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Programme « Voyager pour apprendre les métiers d’art » Ouagadougou, la terre est rouge et me plait beaucoup. Une terre qui est partout : les maisons, les routes et la poussière que le vent soulève. Le vent et les grosses voitures qui filent à toute allure. Ouaga ça grouille de vie. C'est la ville africaine, qui vacille entre énergie folle et douce léthargie. Il fait chaud, le soleil tape fort. Je suis à l'atelier Gandema à Gounghin un quartier vivant de la ville. C'est ici que je viens pour apprendre à travailler le bronze, dans le capharnaüm d'un atelier exigu. On prépare les feux pour la coulée du bronze. Le premier feu sert à décirer et cuire les moules en banco, mélange d'argile et de crottin d'âne, le second à faire fondre le métal. Il fait tellement chaud à proximité des flammes que mon corps frissonne. Le grand Jack dirige la coulée. Lui sait résister à la chaleur. Il pourrait presque toucher les moules incandescents à main nue ; c'est que l'expérience lui a durci la peau. C'est toujours un plaisir de voir le bronze en fusion que l'on verse dans les moules, on dirait de la lave. C'est le moment spectacle du processus de fabrication d'une sculpture en bronze avec la technique de la cire perdue. Il va ensuite falloir limer la pièce pendant de longues heures : il faut dire que je ne suis pas rapide, je n'ai pas la même force dans le bras que Gilbert et Drissa, les deux limeurs qui passent leurs journées à cette rude tâche. Le travail n’est pas toujours facile et le confort sommaire, mais la satisfaction d’une pièce terminée vaut bien l’effort. J’apprends beaucoup ici, et je sais d’or et déjà que bien des choses me seront utiles à l’avenir. L'atelier est rapidement devenu mon petit monde familier dans cette ville qui palpite sur un rythme nouveau pour moi et dont je ne saisis pas encore toutes les vibrations. En effet l’Europe est loin. La vie y est tellement différente. Il y a tant d’images, de sons, de gestes qui m’étaient inconnus jusqu’à là et qui aujourd’hui font partis du quotidien. Aperçu de l’expérience d’Adèle, partie travailler le bronze au Burkina Faso

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Programme « Voyager pour apprendre les métiers

d’art »

Ouagadougou, la terre est rouge et me plait beaucoup. Une terre qui est partout : les maisons, les routes et la poussière que le vent soulève. Le vent et les grosses voitures qui filent à toute allure. Ouaga ça grouille de vie. C'est la ville africaine, qui vacille entre énergie folle et douce léthargie.

Il fait chaud, le soleil tape fort. Je suis à l'atelier Gandema à Gounghin un quartier vivant de la ville. C'est ici que je viens pour apprendre à travailler le bronze, dans le capharnaüm d'un atelier exigu. On prépare les feux pour la coulée du bronze. Le premier feu sert à décirer et cuire les moules en banco, mélange d'argile et de crottin d'âne, le second à faire fondre le métal.Il fait tellement chaud à proximité des flammes que mon corps frissonne. Le grand Jack dirige la coulée. Lui sait résister à la chaleur. Il pourrait presque toucher les moules incandescents à main nue ; c'est que l'expérience lui a durci la peau. C'est toujours un plaisir de voir le bronze en fusion que l'on verse dans les moules, on dirait de la lave. C'est le moment spectacle du processus de fabrication d'une sculpture en bronze avec la technique de la cire perdue. Il va ensuite falloir limer la pièce pendant de longues heures : il faut dire que je ne suis pas rapide, je n'ai pas la même force dans le bras que Gilbert et Drissa, les deux limeurs qui passent leurs journées à cette rude tâche. Le travail n’est pas toujours facile et le confort sommaire, mais la satisfaction d’une pièce terminée vaut bien l’effort. J’apprends beaucoup ici, et je sais d’or et déjà que bien des choses me seront utiles à l’avenir.

L'atelier est rapidement devenu mon petit monde familier dans cette ville qui palpite sur un rythme nouveau pour moi et dont je ne saisis pas encore toutes les vibrations. En effet l’Europe est loin. La vie y est tellement différente. Il y a tant d’images, de sons, de gestes qui m’étaient inconnus jusqu’à là et qui aujourd’hui font partis du quotidien.

Le pays est pauvre et l’art n’y a pas une place digne. Bien souvent il est confondu avec un petit artisanat vu et revu, souvenir d’un jour pour les touristes de passage. Il y a des gens en possession de savoir-faire incroyables, mais qui ne se rendent pas bien compte de l’or qu’ils ont entre les mains. Souvent la créativité manque, faute d’éducation et de moyens. Faute peut-être aussi au mauvais goût regrettable de toute une classe qui a l’argent, mais préfère l’exhiber imbécilement. Heureusement dans la cohue de la ville il y a des artistes souvent discrets mais formidables et talentueux à rencontrer. C’est là que ça me donne plein de joie.

Adèle JaouenPartie au Burkina Faso avec le programme

« Voyager pour apprendre les métiers d’art »

Aperçu de l’expérience d’Adèle, partie travailler le bronze au Burkina Faso