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# 5 LE JOURNAL DE L’OPÉRATION UN COLLÉGIEN, UN ORDINATEUR PORTABLE CONSEIL GÉNÉRAL DES LANDES / AVRIL 2007 SPÉCIAL ”MATIÈRES LITTÉRAIRES ET ARTISTIQUE, ET EPS”

EnConnexion#05 - avril 2007

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La revue EnConnexion#05, journal de l'operation "un collegien, un ordinateur portable", publie en mai 2007 par le Conseil general des Landes. Ce cinquième numéro est consacré à l’enseignement des matières littéraires et artistiques : français et langues anciennes, histoire-géographie, éducation musicale et arts plastiques. Nous ferons également un détour du côté des cours d’éducation physique et sportive (EPS) pour y découvrir un usage inédit des ordinateurs portables. Pour en savoir plus : http://www.flickr.com/photos/cg40/sets/ ; http://www.dailymotion.com/cg40/1 ; http://www.landesinteractives.net/

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Page 1: EnConnexion#05 - avril 2007

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Page 2: EnConnexion#05 - avril 2007

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DOSSIER

MATIÈRES LITTÉRAIRESET ARTISTIQUES,ÉDUCATION PHYSIQUEET SPORTIVE…Ce cinquième numéro d’EnConnexion est engrande partie consacré à l’enseignement desmatières littéraires et artistiques: français etlangues anciennes, histoire et géographie,éducation musicale et arts plastiques. Nousferons également un détour du côté des coursd’éducation physique et sportive (EPS) pour ydécouvrir un usage inédit des ordinateursportables. Ainsi, après l’enseignement deslangues vivantes dans le # 3, et l’utilisation dumultimédia en sciences dans le # 4, nousterminerons notre tour d’horizon de l’utilisa-tion des outils numériques dans les différen-tes disciplines enseignées au collège.

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-----EN CONNEXION #5 _P. 2

BEAUCOUP TROP DE CASSE!Les collégiens d’aujourd’hui seraient-ils moins responsables que leurs aînés? En tout cas,les sept premiers mois de l’année scolaire 2006-2007 ne sont pas bons: au 9mars, on dénom-brait 440 casses d’ordinateurs (non couvertes par la garantie du constructeur), alors quenous n’en avions constaté que 260 à la même date, sur les sept premiers mois l’année sco-laire dernière. Ces casses surviennent à parts égales (45 %) au collège et à la maison ; les10 % restant se produisant dans les transports, entre le collège et la maison. Elles concer-nent essentiellement des bris d’écrans, un objet ayant été oublié sur le clavier, l’ordina-teur ayant chuté, ou quelqu’un s’étant assis dessus… ¶ Les ordinateurs portables sont demerveilleux outils comme en témoigne encore ce numéro d’En Connexion consacré à l’en-seignement des disciplines littéraires et artistiques, et à celui de l’éducation physique etsportive. Mais chacun peut comprendre que ces machines demandent un minimum de soins…

Attention donc : les écrans sont fragiles ! Collégiens,parents, enseignants, personnels des collèges, il nousfaut, tous ensemble, redoubler de vigilance ; la péren-nité de l’opération «un collégien, un ordinateur por-table» en dépend. Le président du Conseil général des Landes

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EDUMEDIA (SUITE)

Il était question d’eduMedia dans

En Connexion #4. Voici maintenant

deux nouveaux services :

– eduMedia-Blog

(www.blog-sciences.com)

Ce service permet aux auteurs d’edu-

Media de présenter de manière

informelle leurs travaux. C’est l’occa-

sion pour les utilisateurs d’échanger

sur leurs pratiques pédagogiques et

de les comparer à celles de leurs col-

lègues ou des auteurs. Les ensei-

gnants sont donc chaleureusement

invités à venir réagir sur ce blog!

– eduMedia-Share

(www.edumedia-share.com)

Il s’agit d’une plateforme collabo-

rative, sur laquelle chacun peut trou-

ver et partager des ressources éduca-

tives libres de droits. N’hésitez pas à

faire connaître ce service!

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Page 3: EnConnexion#05 - avril 2007

HISTOIRE ETGÉOGRAPHIEL’enseignement de l’histoire et de la géogra-phie bénéficie avantageusement du déve-loppement des outils numériques et de leurpotentiel d’accès à des bases documentairestoujours plus complètes, comme Lesite.tv ouJalons pour l’histoire du temps présent, aux-quels le Conseil général a abonné tous les col-lèges des Landes. ¶ Rencontre avec CécilePaillas et Fabienne Saint-Germain, profes-seurs d’histoire et géographie au collègeJean Moulin, à Saint-Paul-lès-Dax.

Cécile Paillas (CP) : Vous voulez savoir si ces outils changentma manière d’enseigner? La réponse est oui. Entre le débutde l’opération, en 2001, et maintenant, l’outil informatiqueest vraiment entré dans ma pratique, et je dois dire qu’au-jourd’hui, j’aurais bien du mal à m’en passer. Mais il nefaut pas essayer de tout faire d’un seul coup, sous peine d’ypasser ses jours et ses nuits! Mes cours évoluent progressive-ment et je les complète chaque année par de nouveauxmodules. Et tout cela se répercute aussi sur les classes quin’ont pas les ordinateurs : j’ai la possibilité, en sixième parexemple, de projeter les documents – images fixes ou vidéos– en grand format sur le tableau et même d’écouter du son…

Fabienne Saint-Germain (FS-G) : Au collège de Saint-Paul-lès-Dax, nous sommes dans la sixième année de pratiqueavec les ordinateurs portables. Et je suis toujours aussienthousiaste : aucune déception ; c’est génial ! Si ce n’estpeut-être que, maintenant que tout cela s’est un peu bana-lisé (au mauvais sens du terme), les élèves prennent, hélas,moins de précaution avec leur ordinateur. Du côté des ensei-gnants, tout le monde n’en est pas encore à l’utiliser, nimême à vouloir l’utiliser. Mais je constate quand même qu’ily a une évolution. Les jeunes générations sont mieux for-mées à ces techniques ; on annonce une épreuve d’infor-matique pour les prochains Capes. Je constate autour de

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LES TICE

– EN HISTOIRE

L’utilisation des Tice peut être l’occa-

sion de questionner les documents et

leur fiabilité. […] Une analyse de la

place et du rôle de l’image peut être

particulièrement adaptée à l’étude

de la période contemporaine.

– EN GÉOGRAPHIE

La multiplicité des ressources invite à

chercher, lister, trier, varier et croiser

les données (naturelles, historiques,

culturelles, démographiques, etc.…)

afin de mieux rendre compte de la

diversité des territoires. […] Le travail

sur les cartes, en croisant photogra-

phies, images satellitales et cartes

topographiques sont à la base du

travail du géographe. Une initiation

aux SIG est l’occasion pour les élèves

de construire eux-mêmes leurs cartes

à partir de données sélectionnées.

– EN ÉDUCATION CIVIQUE

C’est l’occasion de travailler sur des

thèmes d’actualité ou des thèmes

institutionnels liés aux programmes.

[…] Internet devient alors une vérita-

ble porte ouverte sur le monde: les

sites des grandes ONG et ceux de la

presse sont particulièrement perti-

nents pour ce type d’exercices.

tice.ac-dijon.fr/spip.php?article58

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RESSOURCES PÉDAGOGIQUES

La Direction de la technologie du

ministère de l’Éducation nationale a

décidé de réaliser, pour chaque disci-

pline, un recensement indexé des

ressources pédagogiques disponi-

bles en ligne sur les sites disciplinai-

res académiques. En histoire-géo-

graphie, 467 fiches concernant le

collège, sont disponibles à l'adresse:

www2.educnet.education.fr/sec

tions/histgeo/ressources/ressour

ces8424/ressources_indexees

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-----EN CONNEXION #5 _P. 3

Page 4: EnConnexion#05 - avril 2007

JALONS POUR L’HISTOIRE

DU TEMPS PRÉSENT

«En collaboration avec le ministère

de l’Éducation nationale, de l’Ensei-

gnement supérieur et de la Recher-

che, Jalons pour l’histoire du temps

présent a été conçu avec le concours

de d’enseignants et d’historiens. Le

site met à disposition des élèves et

des professeurs des documents

audiovisuels issus de la presse fil-

mée, de la télévision et de la radio,

de 1919 à nos jours, re-situés dans

leur contexte historique et médiati-

que. Une fiche contenant la notice

documentaire, la transcription des

textes est imprimable et téléchar-

geable.» Le document vidéo est uni-

quement téléchargeable dans le

cadre du collège.

www.ina.fr/jalons

> un exemple d’utilisation

Dans un collège de l'Isère, un ensei-

gnant étudie avec sa classe de 3e le

régime de Vichy et la Résistance en

comparant deux discours du Maré-

chal Pétain et du Général De Gaulle.

L'enseignant utilise des support

audiovisuel issus des Jalons pour l'his-

toire du temps présent pour illus-

trer son cours.

www.educnet.education.fr/tv/usages

/Histoire.htm

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GÉOPORTAIL

Géoportail est un site internet qui

permet de visualiser l’ensemble du

territoire français. Par un simple clic,

on passe d’une photo aérienne à

une carte routière, ou encore à une

carte en relief, etc. C’est extrême-

ment simple d’utilisation : il faut

choisir le lieu (à la main ou bien en

passant par le moteur de recherche

des communes) et la carte s’affiche.

Il faut ensuite zoomer pour atteindre

de niveau de précision d’une cen-

taine de mètres ! Pour passer à une

autre visualisation, sur le coté gauche

de l’écran, il convient de choisir la

vue souhaitée et immédiatement on

accède à la carte demandée. Pour

l’instant en 2D et très bientôt en 3D.

Une production de l’IGN/BRGM qui

constitue une alternative à Google

Earth (http://earth.google.fr).

www.geoportail.fr

-----EN CONNEXION #5 _P. 4

moi que plusieurs enseignants sortent du refus catégori-que, et s’y mettent, petit à petit.

Un accès facilité à une plus grande variété de documentsFS-G : Du point de vue des ressources pédagogiques dispo-nibles dans nos matières, la situation a très nettement évo-lué ces dernières années. Je trouve beaucoup de choses surl’internet, j’ai beaucoup moins à scanner! Le problème cru-cial, c’est celui des droits… J’espère que nous parviendronsà obtenir cette fameuse exception éducative, dont on parledepuis des années.L’intérêt des techniques numériques, c’est qu’elles offrentun accès facilité à une plus grande variété de documents :textes, images, vidéos. Comme mes collègues de SVT, j’uti-lise des animations en image de synthèse. En ce moment,par exemple, je prépare un cours sur la révolution indus-trielle. J’ai trouvé sur www.lesite.tv un petit module de troisminutes qui explique le fonctionnement de la machine àvapeur : avant j’avais moi-même du mal à comprendre vrai-ment le système, et donc à l’expliquer à mes élèves. Là, c’estgénial : on voit le charbon, on voit la vapeur qui pousse lepiston, le piston qui revient, la bielle qui fait fonctionnerla roue… Dans le même ordre d’idées, on peut aussi fairedes cartes animées assez simples, et ça nous aide beaucoupque ce soit en histoire ou en géographie.Le site de l’Ina – www.ina.fr/jalons – auquel nous sommeségalement abonnés par le Conseil général, c’est quelquechose de fabuleux : on peut accéder à des documents pro-duits dans le contexte de l’époque. Mes élèves sont parexemple très surpris de voir un salon de l’automobile dansles années cinquante : la forme des voitures, la façon dontelles sont présentées, l’ambiance sur les stands, les vête-ments des visiteurs… Précieux : tous les documents sontaccompagnés de repères pour les situer dans leur contextehistorique, et de la transcription écrite de tout ce qu’on yentend! Malheureusement, ce site ne vaut que pour le pro-gramme de troisième (le 20e siècle) : sous Louis XIV, il n’yavait pas encore le cinéma!

CP : Dans un de mes cours, nous avons pu comparer deuxextraits de films qui présentent le débarquement des trou-pes alliées, l’une produite pour les actualités de la France deVichy, et l’autre en provenance de Londres : deux points devue totalement différents. Nous avons aussi pu comparer lesdiscours de De Gaulle et de Pétain en 1940, prendreconscience du timbre des voix, du ton sur lequel les discourssont prononcés, etc. Sans les ordinateurs portables, nousaurions écouté ou visionné les deux séquences une seulefois, en cours. Maintenant, les élèves les téléchargent surleurs ordinateurs, ils ont le temps de les revoir tranquille-ment chez eux…

Faire découvrir la nature fabriquée des images et des informationsCP : Avec mes élèves de troisième, je pratique l’analysed’affiches de propagande ; c’est un moyen de leur fairedécouvrir la nature fabriquée des images. Au début, ils nepensent pas qu’une image peut être quelque chose deconstruit dans le but de délivrer un message. À tour de rôle,ils doivent préparer un diaporama pour présenter une affi-che à leurs camarades : il s’agit de décortiquer vraiment lastructure de l’image pour mettre à jour son message expli-cite – et implicite. Tous se prennent au jeu… Et pour ceux quine travaillent pas trop, du moment qu’il s’agit de faire undiaporama et de le présenter aux autres, ils ont envie que«ça rende bien»: alors qu’ils auraient expédié un devoir surpapier vite fait, mal fait, ils se sentent obligés de fairequelque chose de bien. Au troisième trimestre, nous abor-derons la campagne électorale. Nous analyserons les pro-grammes et l’affiche officielle de chaque candidat. L’objec-tif, c’est d’essayer de ne pas tout prendre au premier degré,de développer l’esprit critique, la formation du citoyen.

Vidéo-projecteur et tableau numériqueFS-G : Le tableau numérique, je l’utilise tous les jours ! Enhistoire et géographie, nous travaillons beaucoup à partirde documents, écrits ou images. Non seulement le tableaunumérique accepte tous les types documents, mais il per-

met également d’enregistrer ce que nous produisons pen-dant le cours. J’écris beaucoup au tableau – mes élèves aussi,d’ailleurs – et je conserve toutes ces traces pour les leur trans-mettre à la fin. Une autre fonction me permet maintenant d’écrire sur desvidéos – nous en rêvions depuis des années… Il suffit defaire un arrêt sur image et de prendre le stylo: je peux inter-venir en surimpression de l’image, comme sur un calque.Pour expliquer une situation historique, pour faire une ana-lyse de paysage, c’est fabuleux. Rien n’est fermé pendant le cours : je peux décider, mêmesi ce n’était pas prévu dans mon paper-board, de poser deuximages côte à côte pour les comparer. Je peux agir à toutmoment, décider même – pourquoi pas – de prendre maleçon à l’envers! Ce qui me laisse une bien plus grande libertéque la présentation d’un diaporama sur le vidéo-projecteur.Si une question m’est posée alors que j’avais prévu d’y répon-dre deux diapositives après, pas de problème: je remodèleen direct. Avec le tableau numérique on retrouve le gesteclassique du prof devant sa classe – à ce détail près qu’ondoive être un peu «présentatrice météo», et se placer légè-rement de côté, pour éviter les ombres.

Un moyen de s’approprier le cours et de le réviser activementCP : Avec mes élèves de troisième, j’essaye de faire en sortequ’ils utilisent systématiquement l’ordinateur en classe,mais à la fin de chaque chapitre, je leur demande d’impri-mer leur travail sur papier. Je pense qu’on étudie mieux surpapier, et comme ils doivent rendre les ordinateurs avant lafin de l’année, ça leur permet de tout garder pour leurs révi-sions: le texte des cours et les documents que nous avons uti-lisé. Et tout cela dans une mise en pages personnalisée, etavec les couleurs et la police de caractère qu’ils ont choisie :ils adorent faire ça; c’est pour eux une façon de s’approprierle cours.

FS-G: Beaucoup d’élèves ne sont pas très studieux: ils n’étu-dient plus beaucoup. Et parmi ceux qui étudient, certainssont constamment hors sujet : ils vous récitent la leçon, maisça n’a rien à voir avec ce que vous avez demandé. J’ai trouvéune manière de les obliger à réviser et à comprendre le sensde ce qu’ils étudient en utilisant le logiciel Didapage. J’aidemandé à mes élèves de choisir trois documents différentssur un même thème, puis de bâtir leur propre épreuve dubrevet. Ils devaient donc imaginer les questions et fournirles réponses, l’intitulé et le plan de l’argumentaire qu’ilsattendaient… C’est un travail que je n’aurais pas réussi àmener sans l’outil informatique, c’est une évidence ! Lesecret, et le levier de tout ça, c’est bien sûr l’aspect un peu« ludique» de la démarche.

En conclusion?CP : À une époque où les cerveaux sont envahis par lesmédias, il me paraît fondamental que nos élèves acquièrentles clés de leur maîtrise et de leur décodage. Je trouveraistrès grave qu’ils prennent tout ce qu’ils voient ou écoutentpour argent contant. Leur apprendre à avoir un peu de reculpar rapport aux médias et à l’information, c’est notre rôle.Pour ma part, j’essaye de leur faire comprendre que rienn’est vérité absolue.

FS-G: L’avenir, ce sont les «Systèmes d’information géogra-phique» (Sig). C’est formidable : on dispose d’une base dephotos satellite, de photos aériennes, de cartes à différen-tes échelles, que l’on peut croiser avec des données trèsdiverses : la démographie, le prix du terrain, le nombre dechiens par famille… tout ce que l’on veut ! On peut croi-ser des notions de géologie, d’environnement, d’économie…Quelle meilleure façon de décloisonner les matières, et defaire comprendre à nos élèves que nous vivons dans unmonde où tout interfère ! Tout ça reste encore très pointu,et n’est pas diffusé en direction les enseignants, mais c’estpour demain. J’ai appris que l’IGN va développer un modulenommé Edugéo, qui permettra aux enseignants de faireapparaître des couches d’informations différentes, d’insé-rer des croquis, de modéliser leur production en 2D, et plustard en 3D… C’est extraordinaire !

Page 5: EnConnexion#05 - avril 2007

LES TICE EN EPS

«Appliquées à l’éducation physique

et sportive, [les Tice] facilitent une

appropriation personnalisée du savoir,

par un accès progressif aux processus

de formation en autonomie et d’ap-

prentissage individualisé. […] Pen-

dant les enseignements, les Tice per-

mettent aux enseignants d’analyser

les prestations des élèves, d’identi-

fier les problèmes d’apprentissage

en utilisant la vidéo numérique, de

différencier les contenus et d’indivi-

dualiser l’enseignement, d’adapter

les charges de travail selon les niveaux

en analysant les données recueillies.

Ces technologies favorisent aussi l’ac-

cès à des fonds documentaires numé-

risés, comme les banques de don-

nées d’images, de schémas et de

vidéos, essentielles dans l’analyse

des activités physiques, sportives et

artistiques. Elles permettent aussi

l’utilisation des logiciels de soutien à

l’intervention de l’enseignant qui

favorisent l’utilisation de données

prises en direct sur le terrain, ou de

logiciels «experts» dans une gamme

étendue d’activités physiques appli-

cables aux groupes (pour l’ensei-

gnant) ou applicables à une per-

sonne (travail autonome de l’élève).»

ac-tice nº 36 Les Tice en EPS

www3.ac-nancy-metz.fr/ac-tice/arti

cle.php3?id_article = 532

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SITE NATIONAL SUR L’EPS

Ce site ministériel a pour objectifs de

fournir aux enseignants et aux élèves

une multitude d'exemples proposés

par les divers groupes académiques,

et de promouvoir les expériences

novatrices des enseignants les plus

investis dans la recherche d'utilisa-

tion de ces nouveaux outils dans

l'enseignements de l'EPS.

Des logiciels spécialisés dans la disci-

pline ou en relation avec les activités

sportives y sont également décrits.

www2.educnet.education.fr/eps

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-----EN CONNEXION #5 _P. 5

ÉDUCATION PHYSIQUEET SPORTIVE (EPS)À quoi peuvent bien servir les ordinateursportables en EPS, discipline qui ne sembleguère devoir s’enseigner avec une souris et unclavier? Pourtant, que ce soit pour la consul-tation de banques d’images, la constructiond’enchaînements ou l’évaluation à partir deséquences enregistrées en cours, les ordina-teurs portables rendent là aussi des servicestout à fait inédits. ¶ Rencontre avec DanièleSarciat, professeur d’EPS au collège Léon desLandes, à Dax.

Danièle Sarciat (DS): En 2001, quand j’ai entendu dire qu’onallait confier un ordinateur portable à chaque élève de troi-sième, je n’y ai pas cru ! Pour moi, qui m’intéressais à l’in-formatique depuis plusieurs années, ce n’était pas possi-ble, c’était trop beau, j’avais dû mal comprendre. Mais non,c’est bien ce que le Conseil général avait décidé de faire…Je me suis donc demandé en quoi ils allaient pouvoir m’êtreutile : le temps du cours est celui de la pratique sportive,pas celui de la manipulation de l’ordinateur, mis à part pourfaire bouger les doigts ! Mais pour ça, il y a déjà les game-boys… Mes élèves n’ont donc pas de raison d’utiliser leursordinateurs portables pendant les cours d’EPS. Je leurdemande par contre un travail en dehors des heures de cours– ce qui n’est pas forcément une bonne affaire pour eux :notre matière était la seule qui n’exigeait aucun devoir àla maison… jusqu’à l’arrivée des ordinateurs !

AcrosportDS : L’ordinateur nous est, par contre, très utile en acros-port. Cette activité consiste à réaliser un enchaînement acro-batique collectif : on monte une pyramide, on la tient, onla défait, on se déplace, etc. Je demande à mes élèves defaire une recherche sur l’internet pour choisir leurs figu-res et leur musique; à eux de se mettre d’accord. Par la suite,chacun dispose du fichier-son pour réécouter le morceauretenu, quand il le souhaite. En cours, la musique reste audi-

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-----EN CONNEXION #5 _P. 6

LISTE DES SITES ET FORUM EN EPS

www2.educnet.education.fr/sec

tions/eps/animation/sites-interl

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ble même si quatre ordinateurs diffusent des morceaux dif-férents, ainsi quatre groupes peuvent travailler dans lamême salle sans se gêner. Et pour permettre à tout le mondede visualiser le résultat de ce travail collectif, un élève, danschaque groupe, est chargé de photographier la prestationde ses camarades – en plus, cela les oblige à tenir leurs figu-res pendant trois secondes, comme c’est la règle. À la finde la séance, ces photos sont disponibles sur le réseau. Lesélèves se voient et ils peuvent éventuellement se corriger.Par la suite, je leur demande d’organiser ces images dansun dossier, en décrivant leur rôle dans l’enchaînement : «Jesuis debout, je fais une roulade… je monte sur la pyramide…voilà comment j’en descends… etc. » Au fur et à mesureque ces séances de prises de vues se banalisent, les attitu-des changent. Ce n’est plus : «Je me montre», ou aucontraire : «Je me cache», c’est une démarche de travailcomme un autre : l’ordinateur permet de se perfectionner.

Athlétisme et sport collectifDS : Des collègues enseignants d’EPS développent des uti-litaires spécifiques à nos activités, et nous échangeons parle biais de sites communautaires. En course de fond, par exemple, pour travailler l’endurance,pendant qu’un élève court, son camarade inscrit les tempsde passage, que j’énonce à chaque tour. À la fin de la course,on vérifie la régularité. Et je tiens compte de cette régu-larité dans mon évaluation, ce qui permet à celui qui n’estpas très fort – je pense à ceux qui ont une petite ou grandesurcharge pondérale – de gagner des points. Dans leur viefuture, ils ne seront pas tous obligés de battre des records,mais si, à quarante ans, ils continuent de courir régulière-ment, ça ne sera pas si mal !Au basket, une macro développée dans Excel permet decomptabiliser les ballons conquis et les paniers marqués.À la fin du match, on affiche non seulement le nombre depoints marqués, mais aussi l’efficacité dans la récupérationdu ballon. Ce qui permet aux élèves d’analyser le matchqu’ils viennent de jouer : «Nous avons récupéré quinze foisle ballon, et nous n’avons marqué qu’une seule fois ? Ah!Nous ne sommes pas très efficaces… il faudrait travaillerle tir.» L’expérience prouve que ce genre de constat est sou-vent bien plus marquant que le discours du professeur !

S’informer, communiquerDS: Le réseau du collège me sert également à communi-quer avec mes élèves : je dépose sur le serveur le détail detout ce que je leur demande, les barèmes de performan-ces, c’est-à-dire la note théorique qu’ils obtiendront s’ils sau-tent telle hauteur, par exemple, les fichiers sur lesquels ilspeuvent entrer leurs temps et leurs performances. Les élè-ves se servent eux-mêmes du réseau pour communiquerentre eux: échanger les fichiers-sons des musiques qu’ils ontchoisies, par exemple, et les copier sur leurs portables.

Un bémol peut-être…DS: J’ai un certain nombre d’années de pratrique derrièremoi, et je considère maintenant que je fais de moins en moinsd’enseignement proprement dit. Disons que je passe la moi-tié de mon temps à faire de l’éducation : je gère des capri-ces, je gère des groupes qui ne veulent plus écouter… Jene veux pas être pessimiste, parce que ce n’est pas dans manature, mais je pense que nous sommes dans une mutation.Malgré mon enthousiasme à travailler avec ces outils numé-riques – et peut-être parce que j’aime trop ça – je suis quandmême déçue: aujourd’hui, les ordinateurs se sont banalisés,et tous les élèves ne font pas l’effort nécessaire pour les uti-liser. Ils me disent : «Je n’ai pas pu me connecter sur leréseau… ou imprimer…», alors qu’ils ont, dans le collège,toutes les facilités pour le faire. Je trouve aussi que beau-coup n’en prennent pas suffisamment soin… L’autre jour, j’aimême vu vu un refermer son ordinateur avec le pied!Une chose m’inquiète enfin : je crains qu’à long terme, onen vienne à ce que les enseignants ne rencontrent plus leursélèves. C’est ce qui se passe déjà, en partie, pour l’ensei-gnement supérieur : en ce moment, je gère une quinzained’étudiants de l’IUFM, que je n’ai jamais vus! Mais dans madiscipline, comment s’y prendra t-on pour faire pratiquerde l’EPS à distance ?

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Page 7: EnConnexion#05 - avril 2007

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TICE ET ENSEIGNEMENT

DES LETTRES

«Passé le cap des difficultés de mise

en place matérielle, l’ordinateur se

présente comme un outil facilitant

considérablement la tâche de grands

producteurs et usagers de l’écrit que

sont les professeurs de Lettres: clarté

et lisibilité, structuration de la pensée,

meilleures organisation et formalisa-

tion du cours, reproductibilité et per-

fectibilité des documents, possibilités

d’illustrations, d’annotations, de cita-

tions, etc. Les facilités et la souplesse

offertes par l’informatique, la démul-

tiplication des possibilités d’écriture

et de mise en forme apportent plus

qu’un confort à l’enseignant : c’est

un plaisir réel, qui se transmet aux

élèves, se transformant inévitable-

ment, malgré la dépense de temps et

d’énergie investis au départ, en amé-

lioration de l’efficacité sur le plan

didactique, voire chez certains d’en-

tre eux en enthousiasme pédagogi-

que. […] ¶ Libéré des contraintes tra-

ditionnelles de la page (et du livre), le

texte ne se présente plus comme un

objet de lecture linéaire mais comme

le nœud d’un réseau (autres textes,

images, références culturelles, etc.) et

comme un univers lui-même traversé

d’itinéraires intérieurs que l’outil

informatique permet de repérer et

de mettre en évidence (par le biais de

l’indexation ou de toutes les formes

d’analyse que permet l’outil). Il peut

être à tout moment retravaillé,

décortiqué ou au contraire étoffé,

élargi, mis en perspective; l’exploita-

tion qu’on peut en faire sur le plan

pédagogique est infinie. […] ¶ Les

élèves sont, de l’avis unanime des

enseignants, bien plus attentifs, à

l’écoute du professeur. Ils n’hésitent

pas à mêler apprentissages et intérêts

personnels.…»

Annexe au rapport de l’Inspection

générale de l’Éducation nationale

(groupe Lettres), L’École et les réseaux

numériques (juillet 2002).

ftp://trf.education.gouv.fr/pub/edut

el/syst/igen/rapports/annexelettres.pdf

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FRANÇAIS ETLANGUES ANCIENNESLes ordinateurs portables ouvrent ici de nou-velles possibilités pour la recherche docu-mentaire, pour l’écriture, et pourquoi paspour l’écoute de textes littéraires lus à voixhaute.¶ Entretien avec Isabelle Pecheyran, IA-IPR de lettres et Sylvie Justome, IA-IPR de let-tres et de langues anciennes.

À partir de l’expérience landaise, pensez-vous que les outilsinformatiques apportent un plus pour l’enseignement dufrançais au collège?Isabelle Pecheyran (IP): Les outils informatiques rendent le tra-vail des élèves beaucoup plus intéressant et agréable. Enrevanche, l’utilisation du portable en classe me paraît moinsefficace que celle du tableau numérique. L’ordinateur porta-ble, c’est un objet individuel qui peut sembler contradic-toire par nature avec le temps, collectif, de la classe.

Sylvie Justome (SJ) : Avec le tableau numérique, on retrouvele groupe, la possibilité de construire collectivement un texteou un savoir. Il focalise l’attention des élèves, avec l’interac-tivité en plus.

IP: C’est pourquoi en français nous nous sommes plutôt inté-ressés à développer l’éducation à l’information à partir de cesoutils.

SJ : Chaque professeur peut apprécier la richesse documen-taire disponible dans l’internet pour la préparation de sescours. Le privilège des langues anciennes, c’est qu’il s’agit d’uncorpus fini, donc adapté aux outils numériques. Mais je nepense pas qu’il soit possible, à la fois pour des raisons de tempset des raisons éducatives, de laisser les élèves travailler enautonomie sur l’internet.

IP : Cette opération initiée par le Conseil général des Landesvise des objectifs sociaux, culturels, éducatifs au sens large…Elle pose en retour des questions complexes aux pédagogues,à différents niveaux.

Les professeurs de français utilisent-ils des logiciels de “trai-tement de texte” pour étudier les textes français?SJ : Le traitement de texte a un effet mobilisateur. Un textemis en page, c’est net, c’est beau. Effet "cosmétique" et flat-teur garanti. Je suis assez sensible à l’enthousiasme des col-légiens à produire du texte avec ces outils. Certains profes-seurs craignent toutefois que leurs élèves n’en oublient dese préoccuper de l’orthographe et ne s’en remettent aveu-glément aux correcteurs orthographiques.

IP : D’autres profitent l’occasion pour montrer les limites deces correcteurs orthographiques : c’est un bon point dedépart pour des exercices de réflexion sur l’orthographe. Ence sens, l’opération landaise finit, à long terme, par faire bas-culer quelques certitudes. On voit bien qu’un certain nombred’enseignants, qui ont rencontré un même problème depuisplusieurs années, parviennent à retourner la difficulté. Maisavec le traitement de texte, je trouve qu’on n’avance pas trèsvite… Pourtant, tous les enseignants sont d’accord pour direque le traitement de texte clarifie les grandes opérationsd’écriture. Les élèves en très grande difficulté sont soulagéspar la clarté des commandes: ajouter, déplacer, supprimer…Ceux qui ont un problème avec leur écriture manuscritesont soulagés par le clavier. Ça les remobilise.

SJ : Ils peuvent plus facilement et plus volontiers retravaillerleur brouillon, ce qui reste si difficile à obtenir autrement, maisavec l’inconvénient qu’il est très compliqué (cela demande desmanipulations particulières) de garder la mémoire de cesinterventions successives, la trace de ces corrections, de leur«historique».

IP : Quant au «copier-coller», c’est vieux comme le monde:nous avons tous recopié des morceaux de l’Encyclopédie Uni-versalis pour faire des exposés! Mais si, sur le plan pédagogi-que, l’outil informatique a pu optimiser de bonnes prati-

ques, il a aussi optimisé de mauvais réflexes… On en revientà la question centrale de l’éducation à l’information: commentchercher chez les autres pour construire son savoir, ses connais-sances, sa pensée? Et à quelles conditions? C’est pourquoi lesopérations de copier/coller ne sont pas du seul ressort de larecherche documentaire: elles intéressent aussi le professeurde français, en tant que spécialiste de la langue: commenttransformer un texte? comment gérer une citation? commentintégrer le texte d’autrui dans son propre texte? sous quellesconditions? au moyen de quelles opérations linguistiques?

La possibilité d’utiliser du son – podcasting – et d’écouter destextes enregistrés vous paraît-elle un moyen d’accéder à la lit-térature?SJ: Oui, et particulièrement pour l’enseignement des languesanciennes où la lecture à haute voix prend toute son impor-tance: en latin ou en grec, l’accentuation des mots, la modu-lation des phrases peuvent rendre ces langues un peu plusvivantes. Je me souviens avoir observé, à Djibouti, des élèvestrès attachés à la lecture à haute voix d’un texte par leur pro-fesseur, à tel point que nous nous sommes lancés dans la pro-duction de cassettes enregistrées. On pourrait envisager,avec les outils informatiques, que les élèves retrouvent, chezeux, la voix de leur professeur…

IP: Dans le même ordre d’idées, je pense à l’écoute d’un textelu par son auteur. Ce surgissement de la voix de l’auteur sur sonpropre texte est très fort pour la découverte d’une œuvre.

Que pensez-vous des pratiques adolescentes des “chats”,des blogs, et de l’écriture SMS?SJ: Les blogs, c’est une façon de faire revivre les journaux inti-mes. Il y a là une production très abondante: certains adoles-cents tiennent plusieurs blogs en parallèle! Je ne ressens pasdu tout cela négativement; c’est une écriture authentique,directement en connexion avec le vécu.

IP: Les adolescents ont toujours eu un rapport assez fort avecl’écriture intime. Dans les blogs, ils ont, en plus, l’impressiond’être relié aux autres. Cela peut être, éventuellement, dan-gereux pour eux: ils sont sur un réseau et s’exposent à certainsrisques… Mais pour la langue, non, il n’y a pas de danger!

SJ: Les outils informatiques facilitent aussi les expériences decorrespondance; ils aiguisent le désir d’écrire.

IP: Quand à la pratique adolescente des SMS, je pense qu’ellefonctionne sur un code complètement différent du codeorthographique, et sans aucun rapport avec lui. Certainsadolescents qui ont une excellente orthographe ont aussi uneexcellente maîtrise du code SMS… et l’inverse est vrai. À lalimite, le fait de comprendre qu’il existe plusieurs codes, desavoir que l’écriture SMS en est un, et l’orthographe norméeun autre, ne peut pas faire de mal!

Il semble qu’en français, les enseignants aient plus de mal quedans d’autres matières à s’approprier l’usage de ces nouveauxoutils. Pour quelles raisons?IP : Il y a des raisons objectives à cela : nous sommes une dis-cipline “à texte”, et il reste bien plus confortable de lire untexte sur papier plutôt que de le faire défiler sur un écran.C’est pour cela qu’en français, les manuels numériques ne sontpas très intéressants… SJ : Pendant très longtemps, la télévision a été massivementrefusée par les professeurs de lettres, comme n’étant pas dutout dans le champ culturel. C’est pourtant le champ cultureldes élèves, et cela relève donc d’une mission d’éducation,d’éveil de l’esprit critique et d’analyse. On retrouveaujourd’hui ce même clivage avec les outils informatiques etl’internet. Il s’agit pourtant d’une réalité avec laquelle ilnous faut vivre… Ce bain d’internet, qui succède au bain télévisuel présentetout un ensemble de risques, et le professeur de lettres estbien placé pour contribuer à les expliquer, dans la mesure oùsa discipline est celle de la culture générale… Tout renvoie àtout: on peut être amené, à partir d’un texte, à se poser tou-tes sortes de questions, dans des domaines de connaissancetrès divers : où se trouve l’Andalousie? combien mesure unelieue? etc. D’où le formidable intérêt que présentent lesressources disponibles dans les ordinateurs – dictionnaires,encyclopédies… – et l’accès à l’internet!

Page 8: EnConnexion#05 - avril 2007

-----Rencontre avec Olivier Marié, professeur defrançais au collège du Pays d’Orthe, à Peyre-horade et avec Marion Delbousquet, profes-seur de lettres classiques au collège JulesFerry, à Gabarret.

Ma réflexion a évolué…Olivier Marié (OM) : Jusqu’à la rentrée 2005 (c'est-à-dire àl'extension de l'opération aux classes de 4e), je m’étais refuséà utiliser les ordinateurs portables en cours… et dois direque j’éprouvais même une certaine appréhension à cetteidée. Il m’a fallu du temps pour y venir, mais petit à petit,ma réflexion a évolué et j’ai fini par considérer ces outilscomme des vecteurs pédagogiques intéressants, et poten-tiellement très confortables pour l’enseignant. Comme j’avaisl’habitude de préparer sur mon ordinateur les documentsà photocopier pour mes élèves, je me suis un jour demandé:pourquoi faire toutes ces photocopies, alors que nous som-mes équipés pour fonctionner autrement, et que les élèvesont systématiquement leurs ordinateurs avec eux? Queltemps gagné… et aussi quelles économies de papier ! Noussommes au 21e siècle ; j’ai de nombreuses années d’ensei-gnement devant moi et j’ai du mal à concevoir que l’onrevienne au tableau vert. Enfin, je viens d’être papa… Voyezles magasins de jouets, ils sont remplis de claviers et d’écrans.Je ne voudrais pas être complètement dépassé!C’est donc la deuxième année que nous travaillons avec lesordinateurs portables dans ma classe. J’utilise maintenantl’outil dans toutes les activités qui constituent le cours defrançais : maîtrise de la langue (orthographe, grammaire,vocabulaire), expression écrite, expression orale (par le biaisdes exposés et des diaporamas), étude de l’image fixe etmobile, et enfin lecture et étude de textes littéraires.

Oui, bien sûr, on y passe du temps!OM: L’une des grandes peurs des enseignants, c’est d’y pas-ser beaucoup de temps. Oui, bien sûr, mais quand on a pré-paré quelque chose, on peut ensuite le réutiliser, et avec lamutualisation, on donne et on emprunte beaucoup. Et puisfinalement, on y prend du plaisir ! En ce qui me concerne,ces outils ont renouvelé mon intérêt à enseigner.Une autre grande peur, c’est l’idée que les ordinateurs n’enviennent un jour à remplacer les hommes, comme on a pule vérifier, hélas, dans d’autres secteurs. À mes collègues,qui parfois me disent en forme de boutade : «Bientôt, tune viendras plus au collège!», je réponds que l’explicationdu professeur reste irremplaçable et que mes élèves neferaient pas leur travail à la maison sans cet échange « tra-ditionnel», dans la classe. À leur âge, on ne travaille paspour l’avenir, mais dans une relation avec son professeur !

Vive l’orthographe et la grammaire !OM: On peut utiliser l’ordinateur et continuer à faire descours de français. Grâce à cet outil, je n’ai pas peur de tra-vailler les notions d’orthographe et de grammaire de façontrès complète, parce que mes élèves perdent moins de tempsà recopier. Vous allez me dire : «Ah! Ils n’écrivent plus !»Ce n’est pas vrai : je reste fondamentalement un professeurde français, et pour moi l’acte d’écrire est capital. Pour cha-que leçon de ce type, je demande à mes élèves une petitesynthèse manuscrite dans leur classeur. Le clavier, oui, mais«avec», et non pas «à la place de» l’écriture manuscrite :les deux sont vraiment complémentaires.Tout le temps gagné en cours sur un travail fastidieux decopie est utilisé pour faire des exercices que je diffuse à l’in-tention de mes élèves sur le réseau. Je n’impose pas de faireces exercices sur l’ordinateur – je n’en ai pas encore rencon-tré qui préfère le papier, mais ils ont toujours cette liberté.

Éloge du traitement de texteOM: Internet donne accès à un grand nombre de textesd’auteurs classiques (gratuits et libres de droits), que je peuxchoisir et demander à mes élèves de télécharger – libre àeux de les imprimer ensuite, s’ils le souhaitent. Avec des

CANAL EDUCNET

FILME QUELQUES EXEMPLES

D'USAGE DES TIC EN CLASSE…

Dix sept vidéogrammes montrent

en situation des exemples d’usages

de TIC dans l’enseignement primaire

et secondaire en liaison avec les pro-

grammes d’enseignement et le B2i.

Les vidéogrammes mettent en évi-

dence les activités des élèves, la ges-

tion de la classe et l’apport des tech-

nologies. Ils sont accompagnés de

commentaires d’enseignants et d’élè-

ves et du scénario pédagogique

décrivant la séance filmée.

www.educnet.education.fr/tv

IMAGINER LA SUITE D'UN TEXTE

Un enseignant d'un collège du

département des Bouches du Nord

étudie avec sa classe de 4e un texte

de Prosper Mérimée afin d'écrire

une lettre pour argumenter. Dans

la vidéo présentée, il utilise les répon-

ses de ses élèves afin d'organiser les

idées émises. Il anime son cours avec

un tableau interactif, le dictionnaire

Petit Robert, Internet, etc.

www.educnet.education.fr/tv/usa

ges/Lettres_Livrera.htm

ÉCRIRE UNE LETTRE

Un enseignant d'un collège du

département du Nord étudie avec sa

classe de 3e un texte de Jules Valles

afin d'écrire une lettre pour argu-

menter. Dans la vidéo présentée, il

organise sur une carte heuristique les

idées émises. Il prépare ensuite ses

élèves à l'écriture à l'aide des fonc-

tionnalités du traitement de texte :

couleurs, copier/coller, correcteur.

www.educnet.education.fr/tv/usa

ges/Lettre_argumentative.htm

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DIFFUSION POUR BALADEUR

La diffusion de contenus sonores,

vidéos, textuels en ligne (émissions

de radio, enregistrements divers,

musiques…) a trouvé un écho impor-

tant dans les pratiques de classe.

Deux publications en témoignent :

> Educnet met en ligne un dossier

documentaire issu du séminaire «La

baladodiffusion de contenus de

cours dans l’enseignement ». Il

s’adresse à ceux qui désirent s’ini-

tier à la diffusion pour baladeur et

aux enseignants du secondaire à la

recherche de pistes pour enrichir

leurs méthodes d’enseignement.

www.educnet.education.fr/dossier/

baladodiffusion

> Sur le site académique de lettres de

Grenoble, Yaël Briswalter tient à jour

une rubrique sur «le podcast en classe

de lettres».

www.ac-grenoble.fr/disciplines/let

tres/podcast

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-----EN CONNEXION #5 _P. 8

logiciels de traitement de texte, nous pouvons intervenirdirectement sur ces textes – souligner, surligner, insérer descrochets, etc. – pour en analyser la structure narrative oul’argumentation, pour faire ressortir le plan, les élémentsde liaison logique… Tout ce travail serait, bien sûr possi-ble sur le papier, mais sans vouloir généraliser, je peux direavoir constaté qu’avec l’ordinateur, les élèves le font avecplus de goût.En expression écrite également, toujours grâce aux logi-ciels de traitement de texte, les élèves ont la possibilitéde travailler la typographie de leur rédaction : indiquer lesdifférents paragraphes par des alinéas, etc. Mais dans cedomaine, je n’impose rien : certains me rendent leur rédac-tion imprimée sur papier, d’autres en document manus-crit. Tout dépend de leur familiarité avec l’outil, et de leurdextérité plus ou moins grande sur le clavier.Certains élèves en grande difficulté, qui ont du mal à écrire,qui sont quelquefois même au bord de l’illettrisme, ont uneforte demande du clavier et de l’écran parce qu’ils assimi-lent un peu tout ce qui se fait sur l’ordinateur à un jeu.Mais quand je vois qu’ils sont capables, «en jouant», derester une demi-heure sur une série d’exercices traitant del’accord des participes passés, d’en faire quinze – alorsqu’avec le livre de grammaire, ils seraient à grand-peineparvenus à en faire deux –, et que la semaine suivante, ilsen redemandent encore… il faut bien reconnaître qu’il s’estpassé quelque chose ! Le clavier les a libérés de leur mala-dresse. Et s’ils font quelques fautes, ce n’est pas bien grave:le logiciel les souligne, et attire ainsi leur attention.

…des correcteurs orthographiquesOM: À l’opposé des critiques de ceux, qui comme moi redou-taient l’arrivée des correcteurs orthographiques, pensantque les élèves n’allaient plus rien vouloir apprendre, jem’amuse maintenant à montrer qu’on ne peut pas faireentièrement confiance à la machine ! Parce qu’au fond, cequi m’intéresse, dans ma démarche d’enseignant, c’est debien faire comprendre à mes élèves qu’il faut toujours réflé-chir ! Pour ce qui concerne l’orthographe lexicale, c’est-à-dire sur la question de savoir si ce mot prend un seul «p»ou celui-là deux « s», l’ordinateur sera toujours imbatta-ble, mais en orthographe grammaticale, avec les accordset les exceptions que nous avons en langue française, aucunemachine ne pourra jamais réfléchir à notre place : nousaurons toujours besoin d’apprendre les règles ! Grâce à cesoutils, mes élèves acceptent beaucoup plus facilement derevenir sur un travail et de se corriger trois, quatre fois, alorsque j’aurais bien du mal à obtenir qu’ils recopient une foisun brouillon manuscrit.

…et du tableau interactifOM: Je découvre l’usage du tableau interactif depuis le moisde février : c’est tout récent mais c’est maintenant un outildont je me sers pour tous les niveaux, de la sixième jusqu’àla troisième. Succès immédiat, attrait incontestable de lapart des élèves… Ils ont envie d’écrire au tableau, c’est for-midable ! Et j’espère que l’engouement sera durable. Leconfort, pour moi, c’est que n’ai plus besoin de recopierentièrement ma leçon sur le tableau : je projette, progres-sivement, les éléments de mon cours préparés à l’avance.Ça me libère, je reste disponible pour circuler dans la classeet suivre de plus près le travail de chacun. Confidence d’unélève un peu rapide, agité… malin: «Monsieur, il y a quandmême quelque chose d’un peu embêtant, avec cestableaux, c’est que vous ne nous tournez plus le dos. Onne peut plus trop parler ou faire de bêtises : maintenantvous êtes toujours au milieu de nous!» Ils ont compris aussique l’attention est plus élevée, que c’est plus exigeant : ily a moins de temps morts, ils sont plus concentrés sur laleçon, ou l’exercice.

En langues anciennes...Marion Delbousquet (MD) : En tant que professeur de fran-çais, je ne me sers qu’exceptionnellement des outils infor-matiques en cours. J’ai essayé de jouer le jeu au début, maisje me suis vite rendue compte que je n’arrivais pas à maî-triser une classe de trente élèves. La honte de ma vie, je

Page 9: EnConnexion#05 - avril 2007

Voila un portail internet pour facili-

ter l’accès aux ressources pour ensei-

gner les langues anciennes :

www.ac-versailles.fr/pedagogi/Let

tres/ensla.htm

www.ac-versailles.fr/pedagogi/Let

tres/classics.htm

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MUSAGORA

Une vrai mine d’or pour latinistes,

hellénistes et historiens !

Hébergé sur le site EducNet, Musa-

gora est déjà tout un programme rien

que par son titre. En liaison directe

avec un des sites académiques les plus

riches en matière de langues ancien-

nes, celui de Versailles, ce site internet

tient d’abord l’internaute au courant

de l’actualité des langues anciennes,

lui offre des dossiers de travail et un

rappel des ressources électroniques

disponibles. Une liste de diffusion est

également ouverte.

www.educnet.education.fr/musa

gora/default.htm

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LE GAFFIOT

Le Gaffiot, du nom de son auteur

Félix Gaffiot (1870-1937), est un dic-

tionnaire latin-français devenu usuel

et classique pour le public latiniste

francophone. Il a été publié en 1934

suite aux travaux que son auteur a

réalisés sur la base d’une commande

de l’éditeur Hachette. Dans son édi-

tion originale non abrégée, le Gaf-

fiot est un imposant ouvrage de plus

de 1700 pages. Ses illustrations et

sa typographie l’ont rendu célèbre.

La version 2000 de ce dictionnaire

comprend en outre un atlas en cou-

leurs, une bibliographie, une chrono-

logie, les règles de la scansion latine,

une table des poids, des mesures et

des monnaies.

fr.wikipedia.org

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LE JEANNEAU

Le Jeanneau du nom de son auteur

Gérard Jeanneau est une véritable

somme. C’est une compilation de

sept dictionnaires (dont le Gaffiot)

disponible en ligne, gratuitement.

www2c.ac-lille.fr/verlaine/College/

Projets/Latin/dictionnaire_fr_latin/

Dicolat.html

perso.orange.fr/prima.elementa/Dico

.htm

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-----EN CONNEXION #5 _P. 9

m’en souviens encore, c’est quand la conseillère principaled’éducation est venue m’annoncer que mes élèves jouaienten réseau avec ceux de l’étude! Par contre, mon latin et mon grec ont été complètementtransfigurés par l’arrivée de ces outils! Ces matières option-nelles sont, je dois le reconnaître, plutôt choisies par lesbons élèves. C’est une merveilleuse propédeutique pourceux qui iront au lycée, mais je suis très fière d’accueillirdes élèves qui partiront en enseignement professionnel.Dans l’ensemble, ils se régalent, et je dois dire que l’ordi-nateur portable y est pour beaucoup. Pour ma part, et je n’ai pas honte de le dire, je suis vrai-ment «nulle» en informatique, ce qui ne m’empêche pasde m’en servir beaucoup : ce ne sont pas tant les manipu-lations qui m’intéressent, que les concepts. En étude de la langue, il existe toute une gamme de res-sources pédagogiques disponibles sur l’internet : on abordemaintenant les déclinaisons autrement que comme une cor-vée. Pour faire une version, les élèves disposent dufameux Gaffiot (dictionnaire latin-français) directement surleurs ordinateurs, et ça va même bien plus loin : ils se ser-vent aussi d’un logiciel qui fournit automatiquement toutle vocabulaire du texte à traduire. Tout le travail de ver-sion reste à faire, mais il est très bien préparé : plus rien àvoir avec ce qu’ont vécu des générations d’élèves qui pas-saient leur vie dans des dictionnaires. Indiscutablement, ça nous a rajeuni !

Une ouverture aux mondes et aux cultures anciennesMD: Je n’ai pas l’ambition de former des agrégés de gram-maire ; mon but, c’est surtout d’ouvrir les esprits sur les cul-tures et les civilisations latines et grecques. Internet, pourcela, est une mine de trésors dans le domaine de l’art etdes civilisations antiques. C’est un réservoir d’images : lespaysages, les représentations des scènes mythologiques, lesœuvres d’art… Cette année, une fois encore, j’ai engagémes élèves à participer à un concours national sur le thèmedu statut de l’étranger dans l’antiquité grecque. Ce qui lesa conduits à mener une recherche, à rassembler des infor-mations, les classer, faire une synthèse… et n’a pas man-qué de soulever une réflexion sur la situation de l’étran-ger dans notre monde contemporain. Au bilan, ils ont acquisune culture solide sur le sujet, ils ont découvert qu’ils avaientbeaucoup de choses à dire… tout cela en grande partiegrâce à leurs ordinateurs.

C’est possible !MD: Pendant les dernières vacances, j’ai visité une remar-quable exposition sur Ulysse, à la Bibliothèque nationalede France, à Paris. De retour au collège, je confiais à mesélèves le plaisir que j’aurais, si nous habitions plus près deParis, à les accompagner dans cette exposition. J’ajoutaisque nous en aurions profité pour faire un détour par leLouvre… mais qu’il était malheureusement hors de ques-tion pour nous d’envisager un tel voyage à moins de s’yprendre six mois à l’avance pour obtenir toutes les auto-risations, réserver les billets, etc. Deux de mes élèves – orga-nisées, efficaces, malignes – m’ont pris au mot : «Si nouspartions pendant les vacances, il nous suffirait des autori-sations des parents?» Grâce à leurs ordinateurs, elles onttout trouvé : les tarifs SNCF avec la réduction de groupe,les horaires des expositions, l’entrée gratuite au musée duLouvre… Elles ont même dégotté une auberge de jeunessedans le quartier latin, près de la Sorbonne… Je me suisretrouvée bien obligée de dire : « D’accord, je vousemmène!» Maintenant, c’est décidé, à Pâques, nous par-tons. Belle démonstration d’autonomie, non?

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Page 10: EnConnexion#05 - avril 2007

collectif et espace individuel. Si nous savons accompagnerles professeurs dans une nécessaire réflexion sur cette situa-tion nouvelle, si nous les aidons à repenser les schémas péda-gogiques fondamentaux en prenant en compte ces moyensparticuliers et d’avenir, nul doute que l’éducation musicaledes élèves en sortira renforcée.

De nombreuses salles de classe sont également équipées de vidéo-projecteurs…VM: Certes la musique s’entend. Mais apprendre à l’écou-ter est une autre affaire, complexe, qui doit sans cesse ména-ger la sensibilité de l’auditeur tout en lui apportant les outilsd’une perception objective. La représentation graphiquepeut très souvent y contribuer. De l’écriture traditionnelle(notre solfège) aux représentations spectrales, des musico-grammes aux éditeurs analogiques des séquenceurs, l’in-formatique ouvre des possibilités considérables pour que« l’œil écoute». Et pour cela, en classe, le vidéo-projecteurest indispensable.

En quoi ces outils changent-ils le travail des enseignants?VM: Dans la plupart des cas, l’édition informatique n’estjamais définitive. Ce n’est pas parce que l’on a tenté deconcrétiser une hypothèse que l’on ne peut ensuite reve-nir à son point de départ ou à une étape intermédiaire.Ainsi, dans sa capacité à rester toujours ouvert à l’éditionet à la modification, un document numérique interroge sanscesse son utilisateur. Aucune décision ne vous enferme dansun destin pédagogique que vous ne pourriez plus infléchir.Ceci est bien différent des situations antérieures où, unefois posé son projet pédagogique sur le papier et quelleque soit la qualité de sa mise en œuvre, le temps manquaitau professeur pour tout reprendre en modifiant sa straté-gie. Aujourd’hui, tout est toujours ouvert, au risque par-fois de s’y perdre un peu. Mais là encore, si l’on sait ce quel’on recherche, l’informatique est alors un formidable miroir,toujours exigeant mais combien formateur et efficace.

Ces outils changent-ils le travail des élèves? Pendant les cours? Pour le travail à la maison?VM: La puissance de ces outils permet aujourd’hui d’ados-ser l’éducation d’une pratique musicale à la manipulationd’objets complexes finement maîtrisée. Tous les enseigne-ments artistiques équilibrent la connaissance culturelle etle développement expressif. Les élèves trouvent alors desperspectives nouvelles pour construire des savoir-faire sédui-sants sur le sonore d’aujourd’hui. Entre l’école et la mai-son, le lien se renforce car, pour une part, le contexte detravail est le même : l’écran, ses possibles et ses contrain-tes. Mais tout cela exige une pensée pédagogique qui tiennecompte à chaque étape de l’élaboration d’une séquenced’enseignement de ces nouvelles frontières.

Souhaitez-vous ajouter autre chose ?VM: Depuis vingt-cinq ans que j’observe et pratique ces tech-nologies appliquées au sonore, une chose me frappe : lesnouvelles potentialités qui se sont ajoutées par strates suc-cessives aux machines grand public ont masqué nombre despotentialités que la plupart portaient en germe. L’âge adultevenant, peut-être faudra-t-il prendre le temps d’approfon-dir les vertus de ce qui existe – et il y a énormément à faire– avant d’investir de nouvelles directions.

-----Rencontre avec Anne-Françoise Delorme,professeur d’éducation musicale au collègeJean Moulin, à Saint-Paul-lès-Dax.

L’accès à un véritable monde de sons…Anne-Françoise Delorme (AF-D) : Professeur de musique?Non! C’est beaucoup trop restrictif. Je serais bien incapa-ble d’enseigner à nouveau comme on le faisait il y a vingtans. Ces outils m’ont ouvert l’accès à un véritable mondede sons, si importants dans notre vie, mais pourtant si sou-vent gommés. Ce qui se passe maintenant dans mes coursest en prise directe avec l’ambiance de notre époque. De

-----EN CONNEXION #5 _P. 10

ÉDUCATION MUSICALEAvec les ordinateurs portables et des logicielsde création sonore, ou d’organisation d’évè-nements musicaux dans le temps, le profes-seur d’éducation musicale et ses élèves dispo-sent de possibilités très vastes: découverte del’univers musical contemporain, approchedu langage et des formes, création de sons ouaccompagnement de chansons, etc. ¶ Ques-tions à Vincent Maestracci, Inspecteur géné-ral de l’Éducation nationale (cellule Ticce del’inspection générale).

Vous écrivez TICCE avec deux «C». Coquille ou coquetterie?Vincent Maestracci (VM) : Ni l’une, ni l’autre ! Lorsque lestechnologies informatiques ont fait irruption dans notrequotidien, elles étaient, pour une part quasi exclusive, d’édi-tion et de création. À l’École, dès le début des années 80,elles permettaient de travailler sur le texte, de manipulerdes formes et des couleurs avant de s’emparer de l’image,de produire des sons – bien pauvres mais qui se sont amé-liorés rapidement. Internet a ensuite modifié la donne. Sonarrivée et la rapide croissance des débits n’ont pas modi-fié cette réalité, mais l’ont enrichie d’une dimension nou-velle. Éditer, manipuler, modifier certes, mais en outre échan-ger, transférer, consulter ; en deux mots, informer et com-muniquer. Entre l’abolition des distances, l’immédiateté del’information échangée et l’immensité vertigineuse de laconnaissance accessible, la fascination a pleinement joué.Et l’acronyme a perdu un «C» que la réalité contient encore.Technologie de l’information, de la communication, de lacréation pour l’enseignement. Lorsqu’il s’agit d’éducationartistique, notamment d’éducation musicale, cette dimen-sion créative est loin d’être anodine. Accéder aux œuvres– à l’information artistique en général – est une nécessitéquotidienne de l’éducation musicale ou des arts plastiquesau collège. Mais développer une pédagogie permettant àchaque élève de comprendre par le « faire» comment uneœuvre est construite, ce dont elle témoigne, en quoi ellese rattache à celles qui la précèdent et qui la suivent enest une autre. Ne serait-ce qu’à ce titre, les technologies…de la « création» proposent depuis près de vingt ans desoutils de plus en plus puissants pour éduquer la perceptionmusicale ou visuelle et atteindre les objectifs qui nous sontassignés. Notre deuxième «C» est donc une affaire centrale.

Peut-on dire aujourd’hui que l’on enseigne mieux la musique avec les outils informatiques?VM: Indéniablement, la palette des outils d’une pédago-gie performante s’est considérablement enrichie avec lesTICCE. Mais elle atteint aussi ses limites. La puissance commela polyvalence des machines ne garantiront jamais à ellesseules l’excellence d’une pédagogie. La machine ne donnetoute sa mesure que lorsqu’elle est contrainte par des objec-tifs de formation qui s’imposent à elle. Et seule l’expertiseartistique et pédagogique du professeur est en mesure degarantir cette approche. Sauf à laisser les industries logi-cielles spécialisées imposer une pédagogie qui avanceraitmasquée au bénéfice d’une uniformisation progressive desgoûts et des pratiques créatives.

Et dans les Landes où collégiens et enseignants de 4e et 3e

sont dotés d’ordinateurs portables?VM: La situation du département est évidemment excep-tionnelle. Si les élèves disposent en 4e et 3e d’un ordina-teur personnel permettant de diversifier leurs pratiquesmusicales sous la conduite du professeur, ils en disposentégalement hors temps scolaire pour, entre autres choses bienentendu, approfondir les démarches engagées au collège.Les pratiques musicales informatisées, que l’on sait très inves-ties par les adolescents, trouvent ici une place originale àl’interface entre espace scolaire et espace privé, entre espace

Page 11: EnConnexion#05 - avril 2007

-----EN CONNEXION #5 _P. 11

ÉDUCATION MUSICALE ET TICE

«Les technologies informatiques ont

été intégrées par bon nombre de

professeurs d’éducation musicale à

leur enseignement pour l’innova-

tion qu’elles représentent dans une

pédagogie active, visant à dévelop-

per la créativité et l’inventivité des

élèves. […] ¶ Les cédéroms et sites

Internet offrent des supports docu-

mentaires multiples pour les études

musicales, sous forme de banques

de données sur l’histoire de la musi-

que, la musique vivante, les musi-

ques du monde, les compositeurs,

les studios de création, etc. Le télé-

chargement sur le réseau Internet

permet de rassembler de nombreux

documents de qualité pour la classe,

tels que fichiers Midi, images d’opé-

ras, synopsis, analyses musicales, étu-

des organologiques ou ethnologi-

ques... ¶ Les technologies de l’infor-

mation et de la communication pren-

nent donc une place de premier

ordre dans l’éducation musicale,

dans l’optique de projet et de la

création.»

www.educnet.education.fr/musique/

index.htm

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fait, mes élèves me considèrent un peu moins comme undinosaure : ça les motive, ça les fait travailler !J’enseignais déjà dans ce collège au début de l’opération«un collégien, un ordinateur portable» (septembre 2001),et je me suis bien demandé ce que je pourrais faire avecces ordinateurs ! J’ai bâti ma pratique au fur et à mesure…et ce n’est pas fini : je suis en perpétuelle expérimentation,j’invente encore et je serais vraiment très malheureuse sion m’enlevait maintenant ce cerveau électronique : c’estplus qu’une habitude, c’est une nécessité !Logiquement, la première chose à laquelle j’ai pensé, c’estde mettre les play-back sur le réseau : les élèves ont alorspu travailler la flûte, chez eux, avec l’accompagnement, cequi les oblige à une écoute d’eux-même plus exigeante pourse mettre en accord avec le play-back.J’ai un côté pragmatique, et de ce point de vue, ces outilsnumériques me conviennent bien. Ma matière, ce n’est pasd’écrire, ni de faire de la théorie ou de papoter: ma matière,c’est le son. Le son, par définition, ce n’est pas très concret.Mais grâce au multimédia, nous produisons enfin quelquechose d’exportable. Quand on me demande : «Que faites-vous, finalement?», je peux répondre : «Eh bien voilà, j’aitrois cents films à vous montrer si vous voulez !»

Multimédia : on voit ce qu’on entend, et on entend ce qu’on voit…AF-D : Ces outils rendent possible la confrontation directed’un son avec un support visuel. Quand nous écoutons unmorceau de flûte, nous pouvons afficher à l’écran un cur-seur qui défile sur la partition, et mettre en relation le sonavec le dessin de la note : on voit ce qu’on entend, et onentend ce qu’on voit, en temps réel. Il n’est à aucun momentquestion pour mes élèves «d’apprendre» le solfège, maispourtant, petit à petit, ils font le lien entre ce qu’ils enten-dent et ce qui défile à l’écran.En cinquième, je présente un diaporama – muet – à mes élè-ves, avant de leur demander: «Il manque quelque chose, netrouvez-vous pas?». À eux de créer le paysage sonore quicorrespond à ces images: identifier les sons qui conviennent,imaginer comment les produire, et faire l’enregistrement.Si on veut intégrer la pluie, certains choisissent de la fairesur la table, d’autres sur un tambourin: ce n’est pas la mêmechose. Au moment de l’enregistrement, quand vous avez uneclasse entière totalement concentrée pour maintenir le silenceabsolu pendant les deux minutes nécessaires pour obtenirLA bonne version de leur bande-son, il y a une sorte demagie! Sans les ordinateurs, je n’aurais jamais pu obtenircela. Concrètement, ce sont les élèves qui prennent les cho-ses en main. L’un d’entre eux est au pilotage de mon ordi-nateur, et moi, je tiens le micro: je donne le top départ, etc’est tout ; ça me permet d’être vraiment au milieu d’eux.Vous me demandez comment je fais pour obtenir tout ça?Mais c’est facile, avec ces outils : c’est donné! [c’est quandmême le fruit du travail acharné de la part du prof…]

Interactivité : toute la classe participe.AF-D: En sixième, dans un travail sur le timbre des instruments,j’ai préparé un document interactif dans lequel les sons cor-respondent à des icônes. Une souris sans fil circule dans laclasse, et à tour de rôle, l’élève qui a «pris la main» inter-vient sur l’écran, en déplaçant les icônes pour les classer selondes critères déterminés. Il n’est pas le seul à travailler : sonvoisin, fébrile, attend de récupérer la souris à son tour; sescamarades lui donnent des conseils: «Non, regarde, tu te trom-pes!» Toute la classe participe, ils sont concentrés… Nous res-tons pourtant sur un simple travail à l’oral ; mais avec le sou-tien de ce support visuel, ça change tout. En quatrième, nous abordons en ce moment un concertode Mozart. Naturellement, les élèves peuvent l’écouter àla maison s’ils le souhaitent. En cours, ils travaillent sur undocument interactif qui les guide et les conduit à décorti-quer le morceau. Pendant ce temps, je peux passer de l’unà l’autre : je suis là pour les suivre, et pour les conseiller. Ilest question, entre autres, d’organiser une liste de mots,dans laquelle j’ai pris le soin – le malin plaisir ? – de glisserquelques intrus… Ce genre d’exercice permet l’acquisitiond’un vocabulaire spécifique à ma matière, ce qui me paraît

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fondamental. Si je demandais la même chose sur une feuillede papier, ça ne passerait pas, ça tomberait à plat, mais avecles ordinateurs, l’interactivité change tout !

On touche vraiment à la création.AF-D : En troisième, nous travaillons sur la musiqueconcrète : je fournis plusieurs sons, et je demande aux élè-ves de les morceler, de les tordre, les éclater, les retourner,les détruire, leur appliquer des effets… bref, de les mal-traiter… avant, finalement, de les monter à nouveau pourcréer une œuvre courte : 1’30. Là, nous travaillons commeen studio. Il y a trente ans le GRM (Groupe de recherchemusicale) faisait la même chose dans les conservatoires, avecdes ordinateurs lourds, qui tenaient la moitié d’une piècecomme celle-ci. Aujourd’hui, au collège de Saint-Paul-lès-Dax, mes élèves ont le casque sur les oreilles! Le son devientvraiment pour eux un «objet» sonore – virtuel, certes – maisqu’ils peuvent étirer, couper… secouer. Je suis toujours éton-née de voir ce qu’ils sont capables de faire. Certains, quel’on n’entend jamais, toujours dans leur coin, se retrouventalors face à eux-mêmes, et se mettent à créer des mondessonores absolument extraordinaires ! On touche vraimentà la création. Et d’ailleurs, ils voient bien que c’est un tra-vail : j’entends régulièrement la même remarque : «C’estfatiguant, Madame!» Après trois ou quatre séances, nousavons vingt-cinq fichiers à écouter, anonymement. Et là, jepeux vous dire que toute la classe écoute ! Quelquefois, ilssont surpris, ils essayent de savoir qui est l’auteur : «Dis-nous comment tu as réussi à faire ça !»Dans une autre séquence, après avoir analysé un clip publi-citaire – bande-image, bande-son – je propose à mes élè-ves de monter un clip, à partir d’un haïku comme moteurde création. Je fournis un dossier d’images et un dossierde sons, je donne le choix entre quatre ou cinq haïkus, eten avant, vous avez trois séances! À vous de choisir les ima-ges, de les organiser, de mixer les sons, etc. L’intérêt desportables, ici, c’est que chacun peut assumer ses propreschoix, mener son propre travail : honnêtement, la créationen groupe, moi je n’y crois pas trop.

Du côté des logiciels ?AF-D : Je me sers de Magix (VidéoMaker et MusicMaker),un petit logiciel en version scolaire – il ne coûte que cinqeuros pour chaque poste – qui fait comme les grands : c’estun vrai logiciel de montage, avec des effets… J’aimerais aussifaire du montage vidéo live. Ça serait vraiment bien : les

élèves seraient «VJ», vidéojokeys. Ils travailleraient par deux,l’un pour le son, et l’autre pour les images. Malheureusement, les seuls logiciels qui permettent d’ac-céder à tout ça sont professionnels – pour l’instant !

-----ARTS PLASTIQUESRencontre avec Fabienne Nauze, professeurd’arts plastiques au collège Jean Rostand, àMont-de-Marsan et Nicolas Camiade, pro-fesseur stagiaire d’arts plastiques au collègeJean Rostand, à Tartas.

Plus qu’un simple outil ?Fabienne Nauze (FN) : Je me sers de l’ordinateur tout letemps ! Il fait complètement partie de ma façon de prépa-rer mes cours et d’enseigner. Au fil du temps, j’ai consti-tué une banque de données – images fixes et vidéos – asso-ciées à mes séquences, et que soit le réseau du collège, soitIlias me permettent de convoquer en un clic. L’ordinateur, c’est un outil qui mémorise, et qui me per-met d’utiliser d’autres types de ressources en classe. Pourautant, je n’imagine pas une seconde qu’il remplace à luiseul les matériaux et les supports traditionnels de la pra-tique artistique.

Nicolas Camiade (NC): J’ai fait mes études à Bordeaux, à l’écoledes beaux-arts, et en arts plastiques à l’université. Puis j’ai suiviune formation de concepteur-réalisateur multimédia. Je suisactuellement professeur stagiaire, ce qui signifie que j’ai laresponsabilité de cinq classes au collège de Tartas, et un com-plément de formation à l’IUFM à Bordeaux. Mon mémoireprofessionnel sera orienté sur les Tice en arts plastiques. Mesélèves de quatrième ont quatorze ans, ils sont nés entre 1993et 1994: dans ces années-là, l’informatique faisait déjà par-tie de la vie courante. L’ordinateur, pour eux, c’est plus qu’unoutil, c’est un prolongement de leur corps. Voyez commentils le personnalisent! Pourtant, l’écran reste un objet de fas-cination: dès qu’on est sur ce média, les élèves se sentent pro-ches de ce qui s’y passe, ils «accrochent» mieux…

TICCE ET ENSEIGNEMENTS

ARTISTIQUES

«Les techniques d’information et de

communication (Tice) jouent un rôle

croissant dans le processus éduca-

tif : toutes les disciplines les utilisent.

Les disciplines artistiques y ont

recours selon deux modalités dis-

tinctes. Comme les autres discipli-

nes, elles sollicitent les Tice pour

rechercher, collecter, classer et exploi-

ter l’information; pour la communi-

quer, la visualiser, la mettre en page,

associant le textuel et le visuel, la

parole et l’image, sur les supports

traditionnels (le papier) comme sur

des supports nouveaux. D’une façon

qui leur est propre, les disciplines

artistiques utilisent les technologies

de l’information et de la communica-

tion comme auxiliaires de création.»

(Enseignements artistiques, Préam-

bule commun aux programmes, BO

HS N° 6, 31 août 2000).

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SUR LE SITE ARTS PLASTIQUES

DE L’ACADÉMIE DE BORDEAUX

À consulter sur l’internet : l’actua-

lité des arts plastiques, une galerie

présentant des travaux de collégiens,

et tous les modes d’emploi des logi-

ciels graphiques…

artsplastiques.ac-bordeaux.fr

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-----EN CONNEXION #5 _P. 12

Page 13: EnConnexion#05 - avril 2007

« Ilias», c’est un peu mon dada…Fabienne Nauze : « Ilias», c’’est une application qui offreun grand nombre de fonctions: un mail, des outils de forum,un porte-documents, un éditeur en ligne, etc. Pour l’ins-tant, je suis un des rares enseignants à m’en servir, mais jepense que mes collègues vont y venir très vite. « Ilias», c’estun peu mon dada : c’est mon outil de tous les jours. Tousmes élèves ont leur compte sur « Ilias». Moi, j’y dépose mesidées, mes matériaux bruts, les projets en cours d’élabo-ration, etc. Quand j’ai mis tout cela en forme pour mes élè-ves, j’ouvre ces documents à la lecture pour le groupeconcerné, au fur et à mesure de l’avancement de la leçon.Sur « Ilias», mon cours se présente un peu comme dans unlivre, structuré en chapitres, avec du texte et des images.Les élèves peuvent le consulter, le télécharger, avec les liensvers telle image, ou telle vidéo de l’album-référence, etc.j’utilise le forum sur « Ilias» qui devient un prolongementde cet oral écourté. Par l’écrit, les élèves peuvent affinerleur pensée et approfondir leur réflexion, par le jeu desquestions/réponses qui s’instaure entre eux et moi. Le forumpermet à ceux qui ne parlent pas beaucoup en cours, defaire appel au verbe : j’obtiens, par ce moyen, des chosesque je n’aurais pas pu avoir autrement ! C’est égalementpour eux une machine à gagner des bonnes notes : plusils interviennent, plus ils améliorent leur réponse, et plusla note augmente… et d’une façon bien plus ludique etplus souple que d’écrire sur un papier !Sur « Ilias», il y a également une messagerie qui permet àun élève n’a pas compris quelque chose de me poser direc-tement une question. On parvient ainsi à un suivi indivi-dualisé ; même s’il faut bien dire que ça prend du temps…Ensuite, je mets certaines productions de mes élèves en lignesur le site de l’académie. Ce qui a valu une belle fierté àl’une de mes élèves qui, tapant son prénom – Fiona – surGoogle, a retrouvé son travail sur l’internet !

C’est aux élèves d’expérimenter leurs sensations…FN: En classe, il est important que les élèves s’exprimentoralement – c’est ce que nous appelons la «verbalisation».Je propose une série d’images – ici par exemple, plusieurspeintures de Van Gogh – et je demande à chaque élèved’écrire trois mots pour chacune : au premier degré, dansle registre de la description, ou bien dans celui plus poé-tique, ou plus symbolique, de la connotation.Tous ces mots, inscrits sur le tableau interactif, vont nousservir de point de départ pour identifier les éléments plas-tiques de la peinture. Mon objectif d’enseignant, c’est deparvenir à ce que toutes les notions-clés soient identifiéeset traduites dans le vocabulaire des arts plastiques : les thè-mes, le registre, la facture : c’est aux élèves d’expérimen-ter leurs sensations, leur lecture, leur relation à l’œuvre,afin de parvenir par eux-mêmes à produire une analyse plas-tique de l’image, et pour cela, le tableau numérique esttout à fait extraordinaire. Tout ce travail qui donne de l’im-portance à la dimension verbale, c’est une autre approchede la discipline. Cela permet de sortir des clichés encoretrès vivaces, du genre : «Pour lui, ça marche bien : il a unbon coup de crayon…» En arts plastiques, on n’en est heu-reusement plus du tout là !

NC: Un des objectifs pédagogiques, c’est également d’ap-prendre aux élèves à lire les images qui les entourent. Enpratiquant l’infographie, ils se servent de l’image commed’un matériau plastique. La première étape, c’est la décou-verte des outils. En utilisant les logiciels de retouche d’image,ils apprennent à déconstruire, à manipuler les images. Parle biais de l’expérimentation, ils prennent conscience despossibilités de ces outils, et ils entrent de plain-pied dansl’univers du multimédia : qu’est-ce qu’une image numéri-que? comment est-elle faite? par qui, et pourquoi? À par-tir de là, on peut les amener à réfléchir sur les différentsstatuts de l’image: à quelle image avons-nous à faire? som-mes-nous dans la reproduction? dans le détournement? dansl’information? dans l’exploitation publicitaire? Commentfaire la différence entre l’image qui a fonction de commu-nication, et celle qui a fonction d’œuvre d’art?

-----EN CONNEXION #5 _P. 13

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Apprendre par la pratiqueFN: Je vais prendre l’exemple d’une séquence avec les qua-trième dans laquelle j’aborde les notions d’architecture etde paysage. Je lance quelques pistes de recherche : qu’est-ce qu’une architecture gothique? quelle architecture trou-vait-on au 5e siècle? etc. Nous parvenons à mettre en évi-dence l’idée que l’architecture ne naît pas « comme ça»,qu’elle a une fonction, qu’elle est liée à une culture, unétat de la technique, et qu’elle s’inscrit dans un paysage.Je demande alors à mes élèves de choisir une image parmiplusieurs photographies de paysage que j’ai imprimées etaffichées dans la classe. Pour analyser ces images, les élè-ves sont venus tracer les lignes qui structurent le paysagesur l’image projetée sur le tableau interactif. Et nous avonsenregistré ces croquis.Ensuite j’explique le projet : il s’agit d’imaginer une «archi-tecture caméléon», qui va se fondre complètement dansce paysage. On entre alors dans une phase de travail deproduction plastique plus «traditionnelle»: les élèves mani-pulent des matériaux, ils assemblent, découpent, collent,peignent… La liberté et la variété des propositions formel-les qui jaillissent alors me surprennent toujours! Regardez:certains se sont inspirés du végétal, ils ont produit des for-mes organiques, d’autres au contraire ont imaginé des struc-tures rigoureuses… toujours dans une grande cohérenceavec le propos. Et formellement, « ça marche»! Plusieursélèves se sont demandés comment une maison pourrait êtreautonome: ils ont prévu une éolienne, des panneaux solai-res, des réservoirs pour l’eau…Avant de revenir à l’ordinateur, je demande à chacun defaire plusieurs photographies de son travail, avec des pointsde vue différents. Nous abordons alors une séquence detraitement d’image : l’occasion d’acquérir des bases deconnaissances et un vocabulaire spécifiques, notammentla notion de format des images : quelle est la différenceentre le jpeg, le gif et le xcf qui est format générique deGimp. J’ai créé un petit tutoriel pour ce logiciel, qui indi-que les paramétrages, la fonction des différents outils, lanotion de calques, etc. Les élèves doivent alors parvenir àintégrer la photographie de leur projet dans le paysage.Apparaît alors tout l’intérêt de travailler avec plusieurs cal-ques, pour modifier l’échelle, changer le point de vue, etc.Le travail est alors terminé: l’ordinateur nous a permis d’al-ler jusqu’au bout de l’idée de départ, qui était d’intégrerune architecture dans un paysage… ce qui aurait été vrai-ment difficile à faire avec un support traditionnel.

NC: Le propre de notre discipline, c’est qu’il s’agit d’une acti-vité: nous ne faisons pas de cours magistral, l’élève apprendpar la pratique – ceci n’est pas propre aux médias numéri-ques, c’est vrai aussi pour les techniques plus traditionnel-les, comme la peinture, l’aquarelle, le dessin, etc. Notre objec-tif n’est surtout pas de transformer les collégiens en artis-tes ! La fonction de l’enseignement des arts plastiques aucollège, c’est de faire découvrir et partager à nos élèves laculture artistique du monde qui nous entoure. Dans tousles sujets, les notions qui nourrissent la production des artis-tes sont à l’œuvre de manière implicite. De fait les élèvesabordent et travaillent ces notions, même s’ils n’en pren-nent conscience qu’à la fin, au moment de la verbalisation,du retour sur ce qui a été fait.

FN : L’an dernier, j’ai conduit un sujet sur l’autoportrait : ils’agissait pour les élèves de se présenter au moyen d’unevidéo ou d’un diaporama. «Madame, c’est compliqué!»Je leur explique que même avec des moyens très rudimen-taires, on peut faire beaucoup de choses très intéressan-tes. Certains ont utilisé la fonction vidéo de l’appareil photo,d’autres ont préféré mettre en forme un diaporama, avecMovieMaker. Ils ont abordé les notions de rythme, de décou-page, la fonction des transitions, le statut du son, l’inté-rêt du silence… Tous ces paramètres ont surgi parce queles élèves étaient directement confrontés à une production.Comment parvenir à aborder tout cela, sans les outils mul-timédias? En dehors, peut-être de l’analyse d’une séquencede film, mais c’est encore autre chose…

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Les images des architectures camé-

léon sont en ligne ici :

priam.ac-bordeaux.fr/galerie/view_al

bum.php?page=1&set_albumName=

album93

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ration «un collégien, un ordinateur portable», en lien avecl’équipe du Conseil général.

3. Ordinateurs portables des enseignantsCertains enseignants refusant de faire «remastériser» les logi-ciels de leur ordinateur portable tous les ans, aux motifs quecette manipulation leur était souvent peu utile, qu’elle occa-sionnait parfois la perte de données, et qu’elle les obligeaitultérieurement à réinstaller leurs propres logiciels ou ceuxacquis par l’établissement, il a été décidé de n’y procéderque tous les trois ans (au moment du changement de maté-riel). En contrepartie, les différentes ressources disciplinai-res seront mises à disposition sur les serveurs des collèges,libre aux enseignants de les installer selon leurs besoins avecl’aide éventuelle des assistants d’éducation.

4. Bilan des usages des banques de données de l’Ina et de France 5Certains enseignants ignorant encore que le Conseil géné-ral avait abonné leurs collèges aux sites de l’Ina (Jalons pourl’histoire du temps présent) et à celui de France5 (lesite.tv),des représentants du Conseil général et du CDDP iront dansles collèges, pour faire connaître toutes les potentialités deces ressources.

5. Validation du B2iMis en place en 2001, le Brevet informatique et internet(B2i) a été rendu obligatoire pour tous les élèves de 3e àcompter de la rentrée de 2006. «Le B2i de niveau collègesert de référence pour le socle commun et sera pris encompte dès 2008 dans le diplôme national du brevet. Danscette perspective, les principaux de collège ainsi que les pro-viseurs de lycée professionnel veilleront à ce que la tota-lité des élèves de troisième ait été évaluée en vue de l’ob-tention du B2i. » (circul. janv. 2007). Cinq domaines deconnaissances doivent être évaluées :– s’approprier un environnement informatique de travail,– adopter une attitude responsable,– créer, produire, traiter, exploiter des domaines,– s’informer, se documenter,– communiquer, échanger.Comme le principe de la validation des items requis pourl’obtention du B2i se fait dans le cadre du contrôle continu,les enseignants de toutes les disciplines sont mis à contri-bution. Pour faciliter les validations, le rectorat deBordeaux a développé le logiciel GiBii (Gestion informati-sée du B2i) qui est maintenant utilisé presque partout enFrance. Ce logiciel à destination de tous les enseignants per-met également de disposer d’une base de données cen-tralisée indiquant le nombre d’élèves qui ont obtenu le B2i :priam.ac-bordeaux.fr/meligibii.htm

6. Enquête sur la culture numérique des adolescentsPour essayer de mieux appréhender la manière dont les ado-lescents utilisent chez eux les différents outils numériques quiles entourent, le rectorat de Bordeaux a passé commanded’une étude à l’Université de Pau et des Pays de l’Adour (UFRde sociologie, Laboratoire SET) pour analyser ces usages queles Anglo-Saxons ont déjà conceptualisé sous le terme de «cul-ture de la chambre». M. Francis Jauréguiberry, qui a écrit unouvrage sur les l’usage des téléphones portables(www2.cnrs.fr/presse/ thema/393.htm) dirigerait cette étude,d’au moins deux années, qui porterait sur huit groupes d’unedizaine d’adolescents landais au collège et au lycée.

7. Saragosse 2008Pourquoi ne pas relancer une dynamique de concoursauprès des collèges volontaires (comme celui qui avait étéorganisé en 2005 sur la prévention des déchets), sur le thèmede l’eau? Et pourquoi pas pour la classe lauréate un voyageà Saragosse pour l’Expo universelle qui y est organisée dejuin à septembre 2008, justement sur le thème de l’eau?

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ACTUALITÉ

COMITÉ DE PILOTAGESous la présidence de Gabriel Bellocq, vice-président du Conseilgénéral des Landes en charge de l’éducation, et deMme Marie-France Médard, secrétaire générale, représentantMme Linda Salama, inspectrice d’académie, le comité de pilo-tage de l’opération «un collégien, un ordinateur portable»s’est réuni le 22 mars dernier à Mont-de-Marsan. Différentspoints importants à l’ordre du jour.

1. Nouvelles dotations en matériel d’usage collectifPour renforcer l’utilisation des outils collectifs (tableauxinteractifs et vidéo-projecteurs), le Conseil général a adoptéla règle de doter chaque collège d’un vidéo-projecteur pourdeux salles de cours, et de tableaux interactifs en fonctiondes demandes des enseignants. Et comme l’utilisation destableaux interactifs suppose une certaine maîtrise techni-que, 120 professeurs seront formés pendant cette annéescolaire.

2. Embauche d’assistants d’éducationEn 2001 et 2002, pour accompagner le lancement de l’opé-ration, la nécessité était apparue de mettre en place des pos-tes d’assistants d’éducation dans les collèges, pour accom-pagner les utilisateurs, et gérer les matériels et les réseaux.Ces premiers contrats, pris en charge par l’Éducation natio-nale, arrivent à terme (plusieurs d’entre eux ayant déjàexpiré). L’État ne pouvant pas les prolonger à temps plein,il convenait qu’une solution soit trouvée. Le Conseil géné-ral se propose donc de prendre le relais de l’État, et donnemaintenant la possibilité aux chefs d’établissement d’embau-cher des assistants d’éducation, sur des contrats d’une duréede trois ans pour 35 heures hebdomadaires. Ces emploisseront placés sous l’autorité hiérarchique du chef d’établis-sement, et assureront leurs missions dans le cadre de l’opé-

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-----SOMMAIRE DU PROCHAIN NUMÉROLe numéro 6 traitera de la pratique des ordinateurs por-tables à la maison. Nous invitons les parents intéressés pournous apporter leur témoignage à nous contacter : [email protected]

----PHOTOGRAPHIESLes photographies illustrant ce numéro d’En Connexion ontété réalisées par Vincent Monthiers en mars 2007, au col-lège Jean Moulin, à Saint-Paul-lès-Dax, et au collège Léondes Landes, à Dax. Un grand merci aux personnels des col-lèges, aux enseignants et aux collégiens qui ont acceptéde se laisser photographier.

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Attaché à promouvoir l’égalité de tous et

conscient du rôle de l’École dans la réalisa-

tion de cet objectif, le Conseil général des

Landes s’est engagé depuis septembre 2001

dans une opération de grande ampleur de

modernisation de l’équipement informatique

de ses collèges. Avec l’accompagnement de

l’Éducation nationale sur le plan pédagogi-

que, il a décidé de doter chaque collégien et

chaque enseignant du département d’un

ordinateur personnel portable, de câbler les

trente-quatre collèges publics et de les équi-

per des outils permettant d’intégrer l’utilisa-

tion de l’informatique dans la pédagogie.

Le budget total consacré a cette opération,

depuis 2001, est de 33,5 millions d’euros. Le

Conseil général des Landes s’engage donc à

nouveau de façon conséquente et durable

en faveur de l’éducation. Les élèves de qua-

trième et de troisième peuvent ainsi bénéfi-

cier gratuitement d’un ordinateur personnel

portable pour la durée de l’année scolaire.

Les enseignants disposent de nouvelles pos-

sibilités pour enrichir leurs pratiques péda-

gogiques.

Avec l’opération un collégien, un ordina-

teur portable, le Conseil général s’est fixé

quatre objectifs complémentaires :

> relever les défis de l’égalité, en assurant

l’égal accès des élèves à ces nouveaux outils

dont la maîtrise leur sera indispensable dans

leurs études et leur vie professionnelle et

citoyenne ;

> favoriser l’émergence de nouvelles prati-

ques pédagogiques ;

> diffuser la «culture» des nouvelles techni-

ques dans tous les foyers landais ;

> développer l’attractivité des Landes afin

d’attirer les opérateurs de télécommunica-

tions dans un département rural où la seule

logique économique ne les conduirait pas.

Depuis le début de l’opération, près de

20000 collégiens et leurs familles ont ainsi pu

se familiariser concrètement avec les outils

de la “société de l’information” pendant au

moins une, voire deux années : les effets se

diffusent maintenant dans l’ensemble des

foyers landais.

Le taux d’équipement des familles avec

enfant de moins de 11 ans est aujourd’hui de

82 %, soit 5 points de plus que la moyenne

aquitaine. Pour les foyers avec enfants de 15

à 18 ans, ce taux monte même à 84 %.

Quant au taux de connexion à l’internet, il est

supérieur de 20 points à la moyenne aqui-

taine: 82 % pour les familles de collégiens, et

76 % pour celles comportant un enfant de

moins de 11 ans. Chez ces dernières, la pro-

gression est considérable : +73 % en un an.

(chiffres d’octobre 2005 disponibles sur

www.landes.org/fr_cg_position_tele

charge_nouv_techno.asp)

-----

-----UN COLLÉGIEN, UN ORDINATEUR PORTABLE

EN CONNEXION #4

(nouvelle série)

une publication

du Conseil général des Landes

Directeur de publication :

Henri Emmanuelli

Directeur de publication délégué :

Gabriel Bellocq

Rédacteur en chef :

Pierre-Louis Ghavam

Design éditorial :

presse papier

Marie Bruneau, Bertrand Genier

Photographies :

Vincent Monthiers

Impression :

BM/F-33610 ZI Canéjan

Imprimé avec des encres végétales

sur du Cyclus offset 135 g / m2, papier

recyclé à 100 % à partir de fibres

issues de la collecte sélective (inven-

dus, déchets d’impression, etc.), et

blanchi sans utilisation de chlore. Ce

papier est lui-même biodégradable

et recyclable.

-----

Dépôt légal : avril 2007

Contact : [email protected]