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Éditions OUEST-FRANCE Ces FEMMES qui ont fait la BRETAGNE Nathalie de Broc

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Éditions OUEST-FRANCE

Ces FEMMES qui ont fait

la BRETAGNE

Nathalie de Broc

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8 Ces femmes qui ont fait la Bretagne

Avant-propos

Les légendaires

Les ferventes

Les femmes de pouvoir

Les résistantes

Les militantes

Les femmes de lettres

Les artistes

Les visionnaires

Les gourmandes

Les hors-la-loi

Les inclassables

Index par thème

Bibliographie

SOMMAIRE

9

11

27

43

55

71

83

105

127

137

147

157

182

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Les légendaires

QUI FUT LA PREMIÈRE ?À qui revient de droit la place légitime d’aïeule suprême de toutes les autres ? L’histoire se charge du choix crucial et la chronologie l’offre tout naturellement.

Si l’on s’en tient aux dates, Brigitte serait cette première, du moins sa représentation et l’on en a trace.

LES LÉGENDAIRES

Née dans l’île d’Avalon, Morgane se montre particulièrement savante dans l’art de guérir et se distingue par sa beauté. Mais ses prouesses ne sont pas bienveillantes. Par elle, par Mordred, le fi ls qu’elle aura d’Arthur viendra la fi n… de la merveilleuse épopée de la Table ronde.Lancelot prisonnier de Morgane, manuscrit « Lancelot-Graal : Lancelot du Lac », vers 1480, enluminure.

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14 Ces femmes qui ont fait la Bretagne

La matière de Bretagne

Yseult, Morgane, Viviane, la Dame du Lac ou encore Guenièvre sont certainement les « légen-daires » les plus « partagées » de l’imaginaire

celte, de ce que l’on nomme « la matière de Bretagne », cet ensemble des textes écrits au Moyen Âge regroupant les légendes des deux Bretagne, la petite et la Grande, et dans lequel on englobe bien évidemment la légende arthurienne… Les temps de cultes de la déesse-mère ont été pourvoyeurs de ces dames d’une grande beauté et d’une égale sagesse qui occupaient la préséance dans la société. Que plus tard, l’ère romaine, puis chrétienne se sont empressées de reléguer au second plan pour ne plus leur octroyer qu’une place subalterne. Ces ères nouvelles ont indiscutablement modifi é la place de la femme, en tout cas mis en place puis renforcé le patriar-cat. Ainsi donc, dans les temps anciens, les femmes avaient le pouvoir, telle Viviane – également appelée Niviene, Ninienne, Nynianne ou Nimiane. C’est elle, ou son avatar, la Dame du Lac, qui a changé la face du monde en offrant Excalibur, l’épée sacrée au roi Arthur.

On sait aussi que Viviane a recueilli Galahad – dans certaines versions, elle aurait ravi l’enfant à sa mère – après que ses parents prirent la fuite, assaillis par la trahison d’un de leurs sénéchaux. Elle l’a élevé au fond de ce même lac, lui a ensuite demandé – imposé ? – de prendre le nom de Lancelot du Lac. Avant que celui-ci ne rejoigne la cour du roi Arthur et n’en devienne l’un de ses plus preux chevaliers.

Mais son exploit le plus notable est d’amour… Un matin qu’elle était assise près de la fontaine de Barenton, au cœur de la forêt alors impénétrable de Brocéliande où elle vit le jour, la « semblance » d’un joyeux jouvenceau s’avança vers elle et la salua sans toutefois lui adresser un

Viviane, dame du lac. Illustration de Walter Crane.

« Merlin dit à Arthur :– Roi que te semble de cette eau ?– Merlin, fi t le roi, elle me paraît très profonde et telle que tout homme qui y pénètrerait devrait périr.Pendant qu’ils parlaient de la sorte, ils regardèrent vers le milieu du lac et virent une épée apparaître sur l’eau, au bout d’une main et d’un bras visible jusqu’au coude… »Merlin, roman en prose du XIIIe siècle, d’après le manuscrit appartenant à M. Alfred H. Huth, Paris : Firmin Didot, 1886.

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15Les légendaires

mot. Car le « jouvenceau » savait à l’avance ce qui allait lui advenir, la perte de sa liberté et de son cœur tant la dame était belle et lui avait déjà remué l’esprit. Viviane fi t le premier pas, lui demanda son nom, son origine, où il se rendait. Il lui répondit : « Mon nom est Merlin, et si vous me promettez amour sans demander plus, je vous livrerai quelques secrets. » Bien sûr Viviane promit mais n’eut de cesse de connaître les secrets de l’enchanteur, car c’est bien de lui dont il s’agissait. Merlin revenait de la cour du roi Arthur, son œuvre accomplie. Un à un, en toute connaissance de cause puisqu’il possédait le pou-voir que lui avait conféré sa naissance d’une pucelle et du diable, de connaître le passé et l’avenir, Merlin lui confi a les secrets de son savoir jusqu’au suprême : « Comment enchaîner un homme sans tours, sans murs et sans fers de manière qu’il ne pût jamais s’échapper. » Et Merlin donna à Viviane le pouvoir de le faire prisonnier d’amour à jamais. Avec son consentement, tout comme il lui éri-gea un château de cristal que nul mortel ne peut voir ou peut-être certaines nuits où la lune est complice, et que son refl et s’offre sur le grand étang, au pied du château, bien « réel » celui-là, de Comper. Un autre des person-nages essentiels de cette communauté de légendes : Mor-gane, demi-sœur d’Arthur. Pour les Bretons, son prénom signifi e « née de la mer ». Elle serait l’équivalent de la déesse irlandaise Morrigane, ou de « la Grande Reine » en gaëlique. Morgane possède de nombreux pouvoirs mais elle en use de façon maléfi que. De fée, on passe à magicienne, d’alliée de son demi-frère, elle devient son adversaire ainsi que celle de la reine Guenièvre. Les interprétations divergent selon les écrits ; chez Chrétien de Troyes, le rôle de Morgane est positif alors que dans d’autres contes, elle devient meurtrière, pétrie de haine.

Personnage ambivalent et complexe, Morgane est née dans l’île sacrée d’Avalon, Insula Pomorum, l’île de l’éternelle jeunesse mentionnée dès les XIe et XIIe siècles dans les écrits. À la naissance d’Arthur, fi ls d’Ygerne et d’Uther Pendragon, Morgane, née de la première union d’Ygerne, se sent rejetée par sa mère et en conçoit une vive jalousie. Recluse dans un couvent pour parfaire son éducation, elle apprend la pratique de la magie à travers la lecture de manuscrits anciens. Morgane est le pendant féminin du savoir de Merlin. D’ailleurs, il a été son maître ; elle, son disciple. Comme lui, elle sait lire passé et futur ; elle est également douée pour l’art de la métamorphose. Mais si ses fi ns ne sont pas bienveil-lantes, sa beauté est ensorcelante. Parvenue à Camelot, elle apparaît au roi Arthur sous les traits d’une jeune fi lle revêtue simplement. Ébloui, il en tombe amoureux, sans savoir qui elle est. Avec l’aide de ses sœurs d’Avalon, Morgane a ourdi un plan ; elle n’a pas oublié la façon dont Uther a occis son père, premier époux d’Ygerne. Pas plus que la séparation d’avec celle-ci qui lui préfé-rait Arthur. Arthur est la cause de ses malheurs ! Elle le séduit, pendant le banquet boit à la même coupe que lui, passe la nuit dans sa chambre et s’enfuit au petit matin. Quand elle apprend qu’elle porte un enfant, elle l’en informe, lui révélant leur proche parenté. Arthur se confi e à Merlin. Celui-ci révèle que les forces du mal sont en marche, qu’elles vont se déchaîner sur le royaume, à cause de cette union incestueuse, qu’un fi ls naîtra et que de lui, sa mort adviendra… Morgane donnera effective-ment naissance à Mordred, qu’elle vouera d’ailleurs aux forces obscures. Mordred suivra cette route et, devenu traître à la Table ronde, combattra Arthur en un ultime combat qui verra la mort du roi légendaire...

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continue cependant, provoquant de violentes manifes-tations. Pendant six semaines, les femmes affrontent les forces de l’ordre sans ciller, yeux dans les yeux – nombre de jeunes enrôlés dans ces forces de l’ordre craqueront devant cette opposition, ce harcèlement permanent de la part des femmes qui ont pour seule arme, leurs mots. Plus de 150 000 personnes vont monter au créneau pour

empêcher ce que la population nomme « le fl éau de la société moderne ». Partout fl eurissent les trois mots : « Non au nucléaire ». Ce collectif, on le sait, fi nira par obtenir gain de cause et la venue au pouvoir de François Mitterrand en 1981 offi cialisera la décision de renoncer à la centrale de Plogoff. Le site intouché est désormais classé Grand Site de France.

Les Sardinières de Concarneau, Alfred Guillou, huile sur toile, 1896.Musée des Beaux-Arts de Quimper.

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75Les militantes

C’est LA militante pour la langue bretonne. Toute sa vie, Vefa, diminutif de Geneviève, de Bellaing (née Charbonnier de Sireuil ;

Carhaix 1909 – Guingamp 1998) aura œuvré pour la défense de sa langue. La conjuguant à son amour pour la musique, on lui doit le Dictionnaire des composi-teurs de musique en Bretagne, ouvrage qui recense plus de deux cents compositeurs du Moyen Âge au XXe siècle. Mais son action dépasse largement la musique : elle est poète sous le pseudonyme de Soaz Kervahe, journaliste sous celui de Hervé Huiban. Elle fonde un cercle cel-tique en 1939, une école d’été de la langue bretonne qu’elle dirigera pendant vingt-cinq ans. La langue bre-tonne toujours, également en enseignement à distance, avec Skol Ober. Aux côtés de Marguerite Gourlaouen (Douarnenez 1902 – Douarnenez 1987), elles formeront des centaines d’élèves dont plusieurs écrivains, et Vefa recevra pour son engagement le Collier de l’Hermine.

Autre « combattante », mais cette fois pour le parler gallo, Marie Suchet (épouse Drouart ; Saint-Malo 1887 – Rennes 1966). Elle regroupe les chansons et danses populaires de Haute-Bretagne en plusieurs volumes. En 1939, elle fonde les Com-pagnons de Merlin, branche gallèse de la Fédération régionaliste bretonne avec toujours pour motivation, comme elle l’évoquait dans ses principaux ouvrages, de « réveiller la conscience bretonne ». La Libération y mettra fi n, car l’idée de cet enseignement se heurte aux bretonnants tenants d’une Bretagne celtique. À de nombreuses reprises, puisqu’elles ont défendu cette même culture gallo, Marie Suchet a travaillé avec

Pour la langue bretonneSimone Morand (Betton 1914 – Saint-Malo 2001) qui sillonnait les campagnes pour collecter la matière bre-tonne qu’elle a ensuite mise en lumière dans de nom-breux ouvrages. Elle est à l’origine de la fondation du Groupe Gallo-Breton et rêvait que la gastronomie bretonne soit reconnue à sa juste valeur, pourquoi pas qu’on lui « érige » un conservatoire régional… Projet qui perdure mais n’a jamais été concrétisé à ce jour.

Paru en 1938, l’un des nombreux recueils de Simone Morand qui consacra sa vie à collecter « la matière bretonne ».

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Elles furent sœurs de, fi lle de, voire femmes de. Toutes ont joué un rôle qu’on ne peut qualifi er de mineur dans l’œuvre de leur grand homme,

quand elles n’ont pas publié de même.Surnommée « l’immortelle Cartésie », Catherine

Descartes (Elven 1637 – Rennes 1706) était la nièce du philosophe René Descartes et lui dédia un grand nombre de ses écrits poétiques notamment : L’Ombre de Descartes à mademoiselle de la Vigne, ce qui lui attira les bonnes grâces de Madame de Sévigné et de Madeleine de Scudéry.

Dans l’ombre tutélaire d’Ernest Renan, éternelle suiveuse, sa sœur Henriette (Tréguier 1811 – Amchit, Liban 1861) lui voua son existence. À la mort de leur père, Henriette avait 17 ans. Devant le manque de réac-tion de sa mère, elle décida qu’elle paierait les dettes dues à l’incurie paternelle, prit la maison en charge, ouvrit une école pour demoiselles dans une pièce de la vieille maison où elle était née, mais ne rencontra pas grand succès, puis refusa une demande en mariage ; elle dira plus tard qu’elle s’est sacrifi ée à l’éducation et à instruction d’Ernest qui « pensait comme un homme, sentait comme une femme et agissait comme un enfant ». Henriette avoua avoir vécu contre ses propres convic-tions pour permettre à son frère de se réaliser. Elle accompagna ses travaux, ses recherches d’histoire biblique et mourut lors d’une crise de paludisme qui les avait tous les deux frappés – mais dont lui guérit – lors d’un séjour en Syrie et au Liban.

Lucile de Chateaubriand (Saint-Malo 1764 – Boulogne-sur-Seine 1804) est celle dont René de Chateaubriand est le plus proche, sa complice d’enfance. Il suffi t de lire ses Mémoires d’outre-tombe – mais on pourrait le soupçonner d’y réparer le peu de cas qu’il

Une histoire de famillefi t d’elle à l’âge adulte… Ces deux-là ont en commun l’écriture. À elle, les contes et les poèmes en prose, à lui, les écrits que l’on sait et le besoin de lumière à tout prix. Un univers intérieur tourmenté et pour Lucile, un attachement sans doute excessif à son frère : « Le ciel qui se plaît à se jouer de toutes mes autres félicités veut que je trouve mon bonheur tout en toi, que je me confi e à ton cœur. » Mais lorsqu’elle l’appelle au secours à la fi n de sa vie, il ne répondra pas.

Saviez-vous que la fi lle de Théophile Gautier, célé-brissime auteur du Capitaine Fracasse, était elle aussi une romancière à succès et qu’elle a été la première femme élue à l’académie Goncourt ? « La gloire de Judith Gautier, c’est que l’on puisse dire sans nulle fl atterie qu’elle est vraiment en toutes choses la digne fi lle de Théophile Gautier » (Remy de Gourmont 1922). Louise Charlotte dite Judith Gautier (épouse de Catulle Mendès ; Paris 1845 – Saint-Enogat-Dinard 1917) fut une personnalité hors normes. Excentrique, fantasque, brillante, une beauté à l’orientale et un réel talent litté-raire, elle publia à 22 ans, Le Livre de Jade, collection de poèmes chinois dont elle avait assuré la traduction. Elle poursuit, malgré une vie conjugale désastreuse – ou peut-être grâce à cela –, avec la publication d’une vingtaine de romans qui prouvèrent aux plus scep-tiques sa parfaite connaissance de la littérature et des mœurs de la Chine. L’une des dernières maîtresses de Victor Hugo – elle avait attendu 1872 que son père fût mort –, elle inspira également Richard Wagner, lui fai-sant découvrir la subtilité des mystiques orientaux. Mais elle partageait avec l’orientalisme une autre passion : celle de la Bretagne. Elle rédigea Souvenirs de ma vie et Le Second Rang du collier, ses souvenirs littéraires, dans sa propriété de Dinard.

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93Les femmes de lettres

Angélique Anne (née Papot ; Vieillevigne 1806 – Quimper 1886) est la femme d’Émile Souvestre, lui-même prolifi que auteur sur la Bretagne avec une trentaine d’ou-vrages dont Les Derniers Bretons, La Chouannerie, etc. Elle va publier sous son nom d’épouse, reprenant même le diminutif que son mari lui donne : Nanine. On lui doit une demi-douzaine de romans et la par-ticipation à nombre de revues et mouvements féministes.

Judith Gautier, John Singer Sargent, huile sur toile, 1883.Hormis sa passion pour l’orientalisme, Judith Gautier entretiendra avec la Bretagne un amour quasi exclusif. Elle y repose dans le cimetière de Saint-Enogat, proche de sa villa Le Pré aux oiseaux, et son épitaphe en chinois rappelle que « la lumière du ciel arrive… ».

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94 Ces femmes qui ont fait la Bretagne

Elles deux… ô combien !

On les accole souvent, leur lien avec la Bretagne est un rapprochement supplémentaire : comment ne pas citer George Sand, pseudonyme d’Aurore Dupin (Paris 1804 – Nohant-Vic 1876) non qu’elle eût quelque lien que ce fût avec la Bretagne ; toute à son Berry, elle n’y mit guère les pieds, mais elle savait en reconnaître les écrits et montra son enthousiasme inconditionnel devant ceux de Théodore Hersart de La Villemarqué, auteur du Barzaz Breiz, avec qui elle entama une cor-respondance où elle se répand en éloges. En prologue aux Légendes rustiques (1858), elle affi rme : « Une seule province de France est à la hauteur dans sa poé-sie, de ce que le génie des plus grands poètes et celui des nations les plus poétiques ont jamais produit : nous oserons dire qu’elle les surpasse. Nous voulons parler de la Bretagne. Nous la savions bien forte et fi ère, mais pas grande à ce point. »

Sa comparse sur le papier, la grande Sidonie-Gabrielle Colette dite Colette (Saint-Sauveur-en-Puisaye 1873 – Paris 1954) venait se reposer à Saint-Coulomb, entre Cancale et Saint-Malo dans la villa Roz-Ven, cette

« grande maison de bois qui sentait le navire » offerte par son amante Missy. Lors de nonchalantes vacances qui sentent les tartines de beurre salé, les haveneaux gorgés de goémon, et les pêches triomphantes « de crabes noirs à passepoils rouges ». Toute la Bretagne est là, ramassée, intense, parfois frissonnante sous la risée ou pire sous l’averse qui fait « claquer la mer en drapeaux déchirés ». Plus tard, entourée de nombreux amis, elle y regarde pousser Bel-Gazou, sa fi lle qu’elle a eue d’Henry de Jouvenel, épousé en 1912 : « Quant à ma fi lle… elle vaut le voyage, non seulement à cause d’un corps singulièrement beau et robuste, d’un visage insolent couleur de brugnon brut, mais à cause de l’indépendance abominable dont la Bretagne l’imprègne. » Colette y écrit évidemment et s’est servi du lieu idyllique comme cadre d’un de ses romans les plus célèbres, transposition à peine voilée de sa liaison avec son beau-fi ls Bertrand de Jouvenel : Le Blé en herbe, qui raconte l’initiation amoureuse d’un tout jeune homme par une femme nettement plus âgée que lui.

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95Les femmes de lettres

Elles ont fait les grandes heures de la Bibliothèque rose… Pour la première place, on se dispute. Avec ses quatre-vingt-trois romans pour la jeu-

nesse, Zénaïde Fleuriot (Saint-Brieuc 1829 – Paris 1890), celle que la princesse Sayn-Wittgenstein (voir Les inclassables) appelait « sa Bruyère de Bretagne » et qui a fait lire des générations d’adolescent(e)s du XIXe siècle l’emporte. Un succès qui ne s’est jamais démenti à l’époque et qui est maintenant totalement tombé dans l’oubli. On l’a appelée « la comtesse de Ségur bretonne ». Elle fut primée par l’Académie française et écrivit la plupart de ses romans depuis sa propriété de Locmariaquer, Kermoareb, face au port. Ses romans sont tous attachés aux valeurs fondamentales, tournés vers un idéal de dépassement de soi, avec la foi pour pilier, sans doute également fortement marqués par le nombre de deuils qu’elle connut : onze de ses frères et sœurs sur les seize de la fratrie moururent en bas-âge.

Qui n’a lu sur la page de garde des Malheurs de Sophie ou des Deux Nigauds, la mention « Comtesse de Ségur née Rostopchine (Saint-Pétersbourg 1799 – Paris 1874) ». Elle était la fi lle du gouverneur de Moscou, Fédor Vassilievitch Rostopchine qui, en 1812, préféra incendier la cité russe plutôt que de la livrer aux troupes napoléoniennes. Les vacances en Bretagne, à Kermadio près d’Auray, sont laborieuses pour Sophie de Ségur. Elle y écrit au kilomètre des histoires puisées dans sa propre vie de grand-mère, avec le plus souvent pour décor, la campagne bretonne. Ce talent d’écriture, elle le trans-mit à sa fi lle Henriette Louise Fresneau (Paris 1829 – Aube 1908), qui publia elle-même cinq ouvrages dans la même collection, mais de moindre succès. Les deux ont certainement écrit de concert en Pluneret dans cet environnement d’exil doré qu’avait choisi par convic-tion politique pour sa famille Armand Félix Fresneau,

Les prolifi quesl’époux d’Henriette Louise, à la suite du coup d’État de Louis Napoléon Bonaparte en 1851.

Gyp est « notre » troisième dans ce palmarès des publications ! À la ville, elle est Sibylle Riquetti de Mirabeau (Plumergat 1849 – Neuilly-sur-Seine 1832), petite nièce de Mirabeau et épouse de Roger de Mar-tel de Janville… Le jour, elle est la comtesse de Mar-tel, la nuit, elle écrit. Aujourd’hui tombée dans l’oubli,

Portrait de la comtesse Martel de Janville dite Gyp, Boldini, 1894.Musée Carnavalet.

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Le terme de visionnaire n’est pas souvent employé au féminin. Et pourtant… Saviez-vous que celles qui vont suivre dans leur domaine, ont été…

LES VISIONNAIRES

Marie-Angélique Brûlon, née Duchemin (1772-1859).

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158 Ces femmes qui ont fait la Bretagne

Celle qui va ouvrir le bal pourrait être de plusieurs appellations : « hors du temps, belle d’amour, belle d’histoire ou femme de ».

Ne dévoilons pas tout de suite son nom d’épouse. D’abord parce que son illustre époux était du genre à ne jamais être là, qu’elle a passé sa vie à l’attendre, mais surtout qu’elle a su vivre de ses propres ailes. Tiphaine Raguenel (Dinan 1335 – 1373) est instruite plus que la moyenne et pratique l’astrologie. C’est un moine qui lui aurait enseigné les arts divinatoires et la lecture du monde à travers les chiffres. C’est par ce savoir, précisément par une prémonition, qu’elle va entrer en contact avec celui qui deviendra son époux. Celui-ci doit s’opposer lors d’un duel à un Anglais, Thomas de Cantorbéry. Le duel se prépare à Dinan et Tiphaine rassure l’écuyer : son maître en sortira vainqueur. À quoi, le combattant, breton et tête de pioche, répondit, pas très aimablement : « Une femme n’a guère plus de sens qu’une brebis. »

Mais la prédiction s’avère et lorsqu’on lui présente lors du banquet celle qui a « osé » lui prédire la vic-toire, c’est le coup de foudre. Le Breton tête de pioche, c’est Bertrand du Guesclin. Il n’est pas beau, il sait à peine écrire et se trouver face à une dame si lettrée le

Femme de ?désarçonne. C’est l’union de la belle et la bête. Et pour Tiphaine de seize années sa cadette, qu’il va épouser entre deux combats, va commencer une longue vie d’at-tente de ce Bertrand perpétuellement l’épée à la main. Le désormais grand connétable des armées a installé sa belle au mont Saint-Michel, l’une des places fortes les mieux protégées du royaume de France d’où elle se penche sur les astres pour déterminer jours fastes ou funestes pour son époux. Elle administre les domaines, gouverne son monde, arme des chevaliers et va aussi passer un certain temps à réunir les rançons, fondre vaisselle et bagues pour son époux, prisonnier à de nom-breuses reprises. Sa réputation de « dame de Mercy », sa bienveillance, sa charité envers les pauvres ont dépassé les seules limites du mont Saint-Michel. On vient de loin pour écouter ses visions. Quand l’asthme dont elle souffre la terrasse, Bertrand du Guesclin revient à son chevet au mont Saint-Michel mais il repart très vite, toujours à la chasse aux Anglais, cette fois dans le Poitou. C’est là, en 1373, qu’il apprendra la mort de celle que l’on nommait la fée Tiphaine, qu’il avait si peu vue, mais qu’il rejoignit à son tour, huit ans plus tard, puisque les deux cœurs sont réunis, en l’église Saint-Sauveur de Dinan.

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Mariage du connétable de France, Bertrand du Guesclin, avec Tiphaine Raguenel. Lithographie d’après Paul de Sémant.Paris, collection privée.

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162 Ces femmes qui ont fait la Bretagne

Les belles d’histoireQui n’aime les histoires de bergères épousant

des princes ? Les deux femmes qui vont suivre sont issues du monde paysan, l’une fi lle de

maître-maçon, l’autre de meunier, des conditions de naissance à peu près identiques : dures réalités d’une famille de dix enfants des deux côtés. Chez Rosalie Léon, ils sont vivants, pas chez Maï Manac’h… Les simili-tudes n’en demeurent pas moins étonnantes. Rosalie Léon (épouse Sayn-Wittgenstein ; Quimper 1832 – Ems,

Rosalie Léon par le photographe André Adolphe Eugène, 1886.

Allemagne 1886) naît dans un monde où sévit une épi-démie de choléra qui a cependant épargné sa famille. Très tôt, elle devient fi lle d’auberge mais s’en échappe, au bras du premier prétendant venu, un acteur, Jean Denis, venu donner une représentation au théâtre de Brest. Elle le suit dans sa tournée à travers la Bretagne puis la troupe se rapproche de Paris. Rosalie est rapi-dement promue costumière puis danseuse quand les besoins s’en font sentir. Elle monte sur les planches du

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163Les inclassables

théâtre de la Porte-Saint-Martin, est regardée, admi-rée, célébrée. Elle passe de scènes en vaudevilles. Tou-jours avec le même succès. Passe-t-elle également par la « case » demi-monde ? Un jour, elle infl échit son destin en se rendant à Saint-Pétersbourg. Laissant à Paris une nuée d’amoureux éconduits. Car elle a ren-contré le très riche prince Pierre de Sayn-Wittgenstein, attaché militaire, la fi ne fl eur de l’aristocratie russe et européenne. Le prince installe sa bergère dans une de ses nombreuses résidences parisiennes. Désormais rien n’est trop beau pour elle. Mais Rosalie entend faire connaître sa Bretagne et emmène Pierre à Guipavas pour y acheter… l’auberge où elle a passé une partie de sa jeunesse comme servante. Elle n’oublie pas sa famille et pourvoit désormais aux besoins des siens. Retour à Paris, car Pierre y a ses obligations auprès de la cour. Et la visite du tsar Alexandre II en 1867 en est un des moments les plus notables. Rosalie tient son rang, tout en dirigeant de main de maître ses affaires bretonnes et ses nombreuses propriétés. Les deux vont parcourir le monde et la France de réceptions en cures, car la santé de Rosalie commence à montrer quelques faiblesses. Pour atténuer ses souffrances, elle use – abuse ? – de fréquentes inhalations d’éther. Le prince aux petits soins offre la démission de son poste d’attaché militaire au tsar pour mieux veiller sur Rosalie et lui donner toute respectabilité par leur mariage en 1880 au manoir de Kerléon. Elle est désormais princesse. Une ultime cure les entraînera à Ems, en Rhénanie-Palatinat, où Rosalie décède quelques jours plus tard, et le prince qui « très affecté, ne sortait de Kerléon que pour aller prier sur son tombeau » la suit l’année suivante.

La deuxième bergère est Maï Manac’h (Belle-Isle-en-Terre 1869 – Belle-Isle-en-Terre 1949). Son vrai prénom est Marie-Louise, que l’on a réduit en Maï et qu’elle gardera. Ses rêves d’une autre vie, où elle gagne-rait plus que 0,60 franc la journée pour un travail de journalière agricole, lui viennent tôt. Et la proximité de la propriété du prince Charles de Faucigny-Lucinge les alimente. Un court voyage à Paris bouscule son destin

lorsqu’elle a 14 ans. Meunière en sabots, elle assiste aux funérailles grandioses de Victor Hugo. Ce sera désormais Paris ou rien. Deux ans plus tard, elle se paie le billet aller simple et croise celui qui sera son premier époux : Simon Guggenheim avec qui elle part pour Londres ; il y pratique nombre de métiers, est tuberculeux, alcoo-lique et l’union s’achève à peine trois ans plus tard, avec son décès, le jour de Noël. Mais si Maï retrouve la Bretagne et Belle-Isle-en-Terre, elle n’a plus les poches vides. Vient de démarrer sa liaison avec Antoine d’Or-léans, petit-fi ls de Louis-Philippe, accessoirement époux d’Eulalie, infante d’Espagne. Cette dernière ne suppor-tant plus les frasques de son mari demande le divorce. Maï est – presque – princesse, mène grande vie, habillée par Poiret, zibelinée, strassée, diamantée. Cependant, quelques ratées dans le conte : Antoine d’Orléans est dépensier, il n’a pas perdu cette habitude et, bientôt, il réclame à Maï quelque argent de poche… Maï a le sens paysan. Elle demande des reconnaissances de dettes et ça barde ! La liaison s’achève de manière quelque peu brutale. De retour à Londres, elle rencontre

Marie-Louise Le Manac’h, dite Maï Manac’h, devenue Lady Mond.

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172 Ces femmes qui ont fait la Bretagne

Clin d’œil…

Elle fut la dernière des bigoudènes : Maria Le Berre dite Lambour (Pont-l’Abbé 1911 – Pont-l’Abbé 2014) qui expliquait, pour

son centième anniversaire, comment elle entamait chacune de ses matinées par le diffi cile exercice de l’installation de sa coiffe de trente-deux centi-mètres qui lui prenait une bonne demi-heure. Ce rituel n’avait pour elle rien à voir avec un quel-conque folklore, mais tout avec sa féminité. Maria est devenue dans la dernière partie de sa vie, elle avait alors 80 ans, une icône du monde publici-taire, quand, sous la direction de Jean Becker, elle a lancé sa fameuse réplique pour la marque Tipiak® : « Ils ont volé notre recette, Pi… rates ! »

Autre icône de la publicité, qui connut son heure de gloire dans les années 1970, sous le nom de mère Denis, Jeanne-Marie Le Calvé (Neulliac 1893 – Pont-l’Évêque 1989). On ne connaît de sa vie qu’un slogan : « Vedette mérite votre confi ance » mais elle fut vingt-sept ans garde-barrière en Nor-mandie sur la ligne Carentan à Carteret pour avoir épousé un cheminot. Après en avoir divorcé, elle s’établit comme… lavandière à Barneville-sur-Mer. N’est-ce pas paradoxal d’avoir servi pen-dant huit années d’emblème publicitaire pour les… machines à laver ? En 1976, elle fut décla-rée « personnalité de l’année » par l’hebdomadaire Paris-Match.

Maria Lambour, âgée de 95 ans, chez elle. Les mains de Marie sont légères autant que précises. Dernier geste face au miroir.

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173Les inclassables

Au XIXe siècle, un historien poète, Narcisse Quellien, exhume soudain des archives le Journal d’un bourgeois de Paris, chronique

datant du XVe siècle et qui évoque une certaine Piéronne ou Perrinaïc (Gurunhuel 1390 – Paris 1430), d’ori-gine bretonne, qui aurait accompagné Jeanne d’Arc… Emporté par son talent de conteur, et regrettant peut-être que la vraie pucelle n’ait pas été bretonne, cette trouvaille d’une Perrinaïc console Narcisse, et le voilà parti à broder car selon ses dires, cette autre pucelle entendait également des voix. La suite est de la même veine : « Perrinaïc aurait suivi la Pucelle de toutes les puissances de son âme [sic]. » Le procès d’une jeune fi lle eut bien lieu à Paris. On en retrouve trace dans la fameuse chronique citée où Perrinaïc ne sait répondre qu’en breton et affi rme être venue, à l’exemple de la Pucelle par l’ordre de Dieu. À l’exemple… est une nuance importante. Cela ne signifi e pas que les deux se soient rencontrées. Sauf dans le désir de Narcisse Quellien ! Par un tour de passe-passe, il a transformé la petite Bretonne en compagne d’armes de Jeanne et il s’emballe. Pendant l’été 1892, dans une série de confé-rences où il rend hommage à Perrinaïc, il lance… une souscription pour ériger une statue de vingt mètres de haut au sommet du Menez Bré à sa mémoire ! Les fonds commencent à arriver mais la fronde aussi. Car un autre historien, Arthur de La Borderie, membre de l’Institut, député d’Ille-et-Vilaine, va démolir tout l’argumentaire de Narcisse. Et quand un autre de ses confrères, Ernest Renan, s’en mêle, l’affaire tombe à plat. Exit Perrinaïc.

Mais que vient faire Letizia Ramolino (épouse Bonaparte ; Ajaccio 1750 – Rome 1836) dans cette liste… À peu de chose près la même chose que Perrinaïc. Un sou-hait breton de s’approprier des personnages clés ? Après l’homologue de Jeanne d’Arc, cette fois Napoléon… !

… Et controverses

Une thèse établie par deux historiens sérieux, à quelques années d’intervalle, affi rme que la future mère de l’Em-pereur aurait eu une liaison avec Louis Charles René, comte de Marbeuf (1712-1786), alors gouverneur de Corse, et que le fruit de cette relation adultérine aurait donné naissance au petit Napoléon, non pas à Ajaccio mais lors d’un voyage en 1769 – non avéré, et aucune-ment documenté – à Sainte-Sève dans le Finistère…

Piéronne que l’on crut un temps la Jeanne d’Arc bretonne.

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180 Ces femmes qui ont fait la Bretagne

Les marins la surnommaient « la dame de la mer » car Anita Conti (Ermont 1899 – Douarnenez 1997) partagea longtemps leur quotidien. Petite femme brune, d’origine arménienne – elle est née Caracotchian – et devenue Conti par son mariage en 1927 avec Marcel Conti – qu’elle voit peu au quotidien – elle sillonne à peu près tous les océans de la planète, rencontre les grands de ce monde – Théodore Monod, Blaise Cendrars, Albert Schweitzer, Pierre et Marie Curie –, dénonce dès

1934, les dangers de la surexploitation des ressources maritimes. Son amour de la Bretagne est omniprésent et elle s’y pose sous le moindre prétexte. Membre de l’Offi ce scientifi que et technique des pêches maritimes, elle est chargée en 1935 de missions à bord de chalu-tiers morutiers ou de pirogues d’Afrique de l’Ouest et les immortalise en trésors photographiques – près de cinquante mille documents. Elle publie ses réfl exions sur « ces hommes debout dans la mer » dans ses ouvrages

Anita Conti à Terre-Neuve en 1952. Elle fut la première femme océanographe française. Visionnaire, elle s’inquiéta très tôt des effets de la pêche industrielle.

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181Les inclassables

Racleurs d’océan, Géants des mers chaudes, mêlant savamment l’émotion à sa rigueur scientifi que d’océano-graphe. Avec L’Océan, les bêtes et l’homme, paru en 1971, elle signe une sorte de livre testamentaire qui « témoigne de l’expérience humaine et de sa passion

pour le monde marin », posant également son éternelle question de l’exploitation rationnelle des océans : « Les nations veulent-elles augmenter leur puissance pour savoir mieux vivre ? Ou pour savoir mieux détruire ? » Avant de s’éteindre, « chez elle », à Douarnenez.

Anita Conti en 1989 à Boulogne-sur-Mer où un musée, l’estran Cité de la mer dont elle fut la marraine, retrace l’historique de la mer et de la pêche.

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