12
A.Tapie, 2017/2018 1 Fiche n°2 – Aménager le territoire Bibliographie : CARROUE Laurent (dir), La France des 13 régions, Armand Colin, 2016 CGET, 50 ans d’aménagement du territoire, La documentation photographique, 2015 JANIN Eric (dir), Les 18 régions françaises, Ellipses, 2017 RHEGGHEZZA-ZITT Magali, La France dans ses territoires, Armand Colin, 2017 RHEGGHEZZA-ZITT Magali, La France, une géographie en mouvement, La Documentation photographique, 2015. SUBRA Philippe, Géopolitique locale, territoires, acteurs, conflits, Armand Colin, 2016 Sites : Géoconfluences, Le Monde, La Croix L’aménagement peut être défini comme une le résultat d’une politique publique et volontaire pour mettre en valeur les ressources d’un territoire et améliorer le cadre vie des habitants, en atténuant les inégalités de développement économique et social. Acteurs : celui qui agit ou qui est susceptible de la faire Territoire : étendue délimitée, appropriée (politiquement, économiquement, et culturellement), sur laquelle s'exerce une autorité reconnue. Le territoire a une identité, une histoire. Espace : étendue organisée par les sociétés grâce à des flux, des réseaux, des lieux. Le terme d'espace est plus neutre que celle de territoire. Lieux : point du territoire. Ex : la mairie, un bâtiment, un quartier. Réseaux : relations entre les lieux. Les réseaux peuvent être des routes, des voies ferrées, des voies fluviales (la Seine) Représentations : image que l’on a d’un territoire. Ces représentations ont un rôle majeur dans les rivalités géopolitiques locales construites par une culture propre ou construites pour des besoins marketing. Ex : « Montpellier la surdouée », slogan choisi par le maire de la ville, George Frêche (1977-2004) « représentation auto-réalisatrice » (P. Subra). Collectivités territoriales : résultat du découpage administratif du territoire national en région, département, commune. Intercommunalité : plusieurs communes décident de se regrouper pour mettre en commun leur budget sur certains projets.

Fiche n°2 – Aménager le territoiredata.over-blog-kiwi.com/.../ob_bc532e_fiche-n-2-amenager-le-territoire.pdf · Culture (bibliothèques, musées) Sources : Magali Reghezza-Zitt,

  • Upload
    others

  • View
    0

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Fiche n°2 – Aménager le territoiredata.over-blog-kiwi.com/.../ob_bc532e_fiche-n-2-amenager-le-territoire.pdf · Culture (bibliothèques, musées) Sources : Magali Reghezza-Zitt,

A.Tapie,  2017/2018  1  

Fiche n°2 – Aménager le territoire Bibliographie : CARROUE Laurent (dir), La France des 13 régions, Armand Colin, 2016 CGET, 50 ans d’aménagement du territoire, La documentation photographique, 2015 JANIN Eric (dir), Les 18 régions françaises, Ellipses, 2017 RHEGGHEZZA-ZITT Magali, La France dans ses territoires, Armand Colin, 2017 RHEGGHEZZA-ZITT Magali,  La  France,  une  géographie  en  mouvement,  La  Documentation  photographique,  2015.  SUBRA  Philippe,  Géopolitique  locale,  territoires,  acteurs,  conflits,  Armand  Colin,  2016   Sites : Géoconfluences, Le Monde, La Croix

L’aménagement peut être défini comme une le résultat d’une politique publique et volontaire pour mettre en valeur les ressources d’un territoire et améliorer le cadre vie des habitants, en atténuant les inégalités de développement économique et social. Acteurs : celui qui agit ou qui est susceptible de la faire Territoire : étendue délimitée, appropriée (politiquement, économiquement, et culturellement), sur laquelle s'exerce une autorité reconnue. Le territoire a une identité, une histoire. Espace : étendue organisée par les sociétés grâce à des flux, des réseaux, des lieux. Le terme d'espace est plus neutre que celle de territoire. Lieux : point du territoire. Ex : la mairie, un bâtiment, un quartier. Réseaux : relations entre les lieux. Les réseaux peuvent être des routes, des voies ferrées, des voies fluviales (la Seine) Représentations : image que l’on a d’un territoire. Ces représentations ont un rôle majeur dans les rivalités géopolitiques locales à construites par une culture propre ou construites pour des besoins marketing. Ex : « Montpellier la surdouée », slogan choisi par le maire de la ville, George Frêche (1977-2004) à « représentation auto-réalisatrice » (P. Subra). Collectivités territoriales : résultat du découpage administratif du territoire national en région, département, commune. Intercommunalité : plusieurs communes décident de se regrouper pour mettre en commun leur budget sur certains projets.

Page 2: Fiche n°2 – Aménager le territoiredata.over-blog-kiwi.com/.../ob_bc532e_fiche-n-2-amenager-le-territoire.pdf · Culture (bibliothèques, musées) Sources : Magali Reghezza-Zitt,

A.Tapie,  2017/2018  2  

Chaîne d’actions de l’aménagement

Schéma réalisé à partir d’un extrait de l’ouvrage de Philippe Subra (2016)

I.   Le découpage territorial de la France : des « maillages territoriaux complexes » (Magali Regghezza-Zitt)

Pour contrôler et agir sur le territoire, l’Etat est obligé de découper le territoire

national. Chaque périmètre est dirigé par un acteur public applique les décisions de l’Etat et administre le territoire, c’est-à-dire qu’il gère ce dernier au nom de l’intérêt général. La France métropolitaine compte près de 36 000 communes, plus de 4000 cantons, 577 circonscriptions législatives (élection des députés), 100 départements, 13 régions. Cette parcellisation du territoire rend le découpage très complexe ! Communes, départements, région = collectivités territoriales (échelon administratif).

1.   Les collectivités territoriales (communes, départements, régions)

Les communes sont héritées des cadres paroissiaux de l’Ancien Régime. Elles reprennent souvent les anciennes limites des finages ruraux, dépendants des systèmes agricoles. Ainsi, les communes qui ont un vaste territoire sont situées dans des régions très contraignantes (ex : en montagne). Les départements ont été créés en 1789, pendant la Révolution française. Le découpage régional est plus récent : un premier découpage a lieu dans les années 1950, quand l’Etat souhaite mettre en place sa politique de grands aménagements. La France métropolitaine est ensuite passée de 22 régions à 13 régions, après de longs débats.

Collectivité territoriales (ou locales) : « structures administratives françaises,

distinctes de l’administration de l’Etat, qui doivent prendre en charge les intérêts de la population d’un territoire précis » (définition de l’INSEE)

Diagnostique des  problèmes  du  territoire

Planification  des  opérations  d'aménagement  (urbanisme  

opérationnel)

Conception  et  négociation  desmontages  juridiques  et  

financiers

Conduite  des  opérations  d'aménagement

Gestion des  équipements  et  des  infrastructures

Page 3: Fiche n°2 – Aménager le territoiredata.over-blog-kiwi.com/.../ob_bc532e_fiche-n-2-amenager-le-territoire.pdf · Culture (bibliothèques, musées) Sources : Magali Reghezza-Zitt,

A.Tapie,  2017/2018  3  

Attention ! les collectivités locales n’ont que des compétences administratives (pas de compétences législatives). Elles sont gérées par des conseils ou des assemblées élus au suffrage universel direct. Leurs compétences sont définies par la loi et leur existence est est reconnue par la Constitution.

2.   Un maillage complexe régulièrement critiqué

Le maillage territorial soulève des critiques sur sa complexité et sa redondance. En 2017, chaque Français (en dehors des COM) habite à la fois dans une des 35 416 communes, un des 2054 cantons, une des 577 circonscriptions législatives, un des 101 départements (Mayotte est devenu le 101e en 2011) et une des 13 régions métropolitaines ou 5 régions d’Outre-Mer. Ce maillage administratif dense entraîne parfois un chevauchement de compétences, au détriment parfois de la cohérence et de l’efficacité. Par exemple, la structure intercommunale Lille-Métropole communauté urbaine (LMCU) a des compétences sur l’aménagement et le développement économique, mais c’est à l’échelon de l’arrondissement de Lille qu’elles sont planifiées.

Cependant, les critiques concernant le chevauchement de compétences sont à relativiser : chaque périmètre répond à un objectif précis et si certaines compétences sont enchevêtrées, c’est le résultat d’une succession de réformes.

3.   L’exception française

Depuis les années 1970, les autres pays européens ont plutôt fait le choix inverse : les communes ont fusionné en entité plus large. L’attachement des Français aux communes et au département, montre le besoin de proximité et des raisons plus sentimentales sur l’identité du territoire. L’échelon local facilite l’accessibilité pour tous à certains services et permet davantage la démocratie participative des citoyens.

II.   De l’aménagement du territoire à l’aménagement des territoires 1.   L’Etat aménageur

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le territoire est à reconstruire et à

moderniser, face aux mutations sociales, économiques, et culturelles. Les Français veulent une société plus juste, une véritable politique sociale (1946 : naissance de la Sécurité sociale). En 1946, le Commissariat Général du Plan (CGP) est créé par le Général de Gaulle pour reconstruire une France nouvelle. L’Etat constate un déséquilibre entre la région parisienne et les autres régions. Le géographe J.F Gravier participe au CGP et dessine ce déséquilibre dans un ouvrage devenu célèbre, Paris et le désert français, en 1947. Le ton est polémique : la capitale est décrite comme un « monstre urbain ». Certes, le terme de « désert » est excessif et l’ouvrage apparaît aujourd’hui daté, mais Paris concentrait alors 15% de la population, 25% des richesses, de la production industrielle, 42% des étudiants. A l’ouest d’une ligne Le Havre-Marseille, la France est moins riche et plus rurale. Ce déséquilibre inquiète les dirigeants.

C’est pendant cette période, celle des Trente Glorieuses (voir chapitre d’histoire) que naît la politique de grands travaux. Le programme autoroutier est lancé dans les années 1960. Des zones industrialo-portuaires (ZIP) sont aménagées à Marseille et à Dunkerque. En 1965,

Page 4: Fiche n°2 – Aménager le territoiredata.over-blog-kiwi.com/.../ob_bc532e_fiche-n-2-amenager-le-territoire.pdf · Culture (bibliothèques, musées) Sources : Magali Reghezza-Zitt,

A.Tapie,  2017/2018  4  

six villes nouvelles sont créées en Ile-de-France : Cergy-Pontoise, Evry, Marne-La-Vallée, Saint-Quentin-en-Yvelines, Sénart. Elles ont pour but de désengorger Paris par une offre de services (université, grands centres commerciaux).

Huit métropoles d’équilibre sont créées en 1960 pour freiner la croissance de Paris : -   Lyon-Saint-Etienne- Grenoble -   Aix-Marseille -   Lille-Roubaix-Tourcoing -   Toulouse -   Bordeaux -   Nantes-Saint-Nazaire -   Strasbourg -   Nancy-Metz

A partir des années 1970, il faut rajouter les métropoles suivantes : Rennes, Dijon,

Nice, Clermont-Ferrand, Rouen. L’Etat distribue des primes et des incitations fiscales pour les entreprises qui délocalisent dans ces métropoles. Cette politique a permis de transformer la plupart des grandes villes françaises aujourd’hui en métropoles dynamiques. Elles ont aujourd’hui des taux de croissance démographique et économique supérieurs à celui de la région parisienne. Toulouse est devenue l’une des deux capitales mondiales de l’aéronautique et de l’espace. Bordeaux, Nantes, Grenoble ou Rennes se sont dotées d’économies diversifiées.

Pour relancer le tourisme, des plans sont lancés pour aménager le territoire dans cette direction. Le Plan neige en 1963 favorise la création des stations de ski. La Mission Racine, la même année, crée les stations balnéaires du Languedoc-Roussillon (ex : Port Camargue, La grande Motte, Port Leucate, Cap d’Agde, Saint Cyprien…) Enfin, parallèlement, l’Etat protège et « sanctuarise » certains espaces : premier Parc Naturel National dans le massif alpin de la Vanoise en 1963.

La création d’une Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale (DATAR) en 1963, est une étape très importante dans l’aménagement du territoire. Sous la direction du Premier ministre, la DATAR décide et coordonne la politique d’aménagement.

2.   Le tournant de la décentralisation Contexte économique : choc pétrolier 1973, 1979 (crise économique, « croissance dépressive) Contexte politique : élection d’un président libéral, Valéry Giscard D’Estaing en 1974

D’après la géographe Magali Reghezza-Zitt, la crise économique, la remise en cause de l’Etat-providence ont conforté les transferts de compétence. L’Etat souhaite « territorialiser les politiques publiques », les inscrire dans le local, dans un échelon de proximité, plus proche des citoyens.

En 1982, Gaston Defferre propose une loi de décentralisation. Des compétences, qui étaient autrefois dévolues à l’Etat, deviennent celles des collectivités territoriales.

Page 5: Fiche n°2 – Aménager le territoiredata.over-blog-kiwi.com/.../ob_bc532e_fiche-n-2-amenager-le-territoire.pdf · Culture (bibliothèques, musées) Sources : Magali Reghezza-Zitt,

A.Tapie,  2017/2018  5  

Les compétences des collectivités territoriales

Région Transports ferroviaires régionaux Gestion des lycées Formation professionnelle Développement économique Aides aux entreprises Environnement Culture (inventaire général du patrimoine) Santé Élaboration en association avec l’État du schéma directeur de la région d’Île-de-France.

Département Action et aide sociale (ex : Revenu de solidarité active ou RSA) Transports scolaires, transports routiers de voyageurs Gestion des collèges Voirie Culture

Communes/ intercommunalité

Action et aide sociale (centres communaux d’action sociale) Transports urbains Gestion des écoles primaires et maternelles Urbanisme (permis de construire, Zone d’activité concertée (ZAC), périmètre de protection…) Culture (bibliothèques, musées)

Sources : Magali Reghezza-Zitt, La France et ses territoires, Sedes, 2011 http://www.collectivites-locales.gouv.fr/competences (mise à jour le 28 septembre 2015)

Les compétences évoquées ci-dessus échappent désormais à la tutelle de l’Etat. Cependant, le préfet (représentant de l’Etat) a un contrôle a posteriori, pour contrôler leur légalité. Ces transferts de compétences s’accompagnent d’un transfert de ressources financières, de dotations annuelles pour permettre aux collectivités territoriales d’exercer leurs nouveaux pouvoirs. La dotation générale de décentralisation s’élevait à 1,6 milliard en 2016.

En 2003-2004, l’acte II de la décentralisation s’opère : la décentralisation est

désormais inscrite dans la Constitution de la Ve République. Les CT ont plus de responsabilités et de libertés, mais l’Etat reste présent dans l’aménagement.

3.   La réforme territoriale (2014-2015) : ce qu’il faut retenir

Loi Maptam (2014) :

-   Clarifier les compétences, les responsabilités des CT et de l’Etat -   Création de 19 grandes métropoles, représentant 27 millions d’habitants + 50% PIB

national. Elles peuvent exercer sur leur territoire à la fois les compétences de la commune et du département, conduisant ainsi à l’affaiblissement de ce dernier échelon.

Page 6: Fiche n°2 – Aménager le territoiredata.over-blog-kiwi.com/.../ob_bc532e_fiche-n-2-amenager-le-territoire.pdf · Culture (bibliothèques, musées) Sources : Magali Reghezza-Zitt,

A.Tapie,  2017/2018  6  

Les objectifs de la réforme territoriale (2015) :

-   Approfondir la décentralisation -   Simplifier l’organisation territoriale -   Réduire l’émiettement communal -   Renforcer

l’intercommunalité -   Réduire le nombre de

régions et renforcer leur rôle/ puissance

-   Redéfinir les missions du Départements

La France métropolitaine passe de 22 à 13 régions. Elles ont en moyenne une superficie de 41863km2 (24 737 auparavant) et sont plus peuplées (5 millions d’habitants contre 3). La région Nouvelle Aquitaine mesure 84 100km2, soit une superficie plus grande que celle de l’Autriche. Cependant, plusieurs questions restent en suspens, notamment en ce qui concerne leur survie budgétaire. En effet, la région perçoit peu d’impôts, comparé aux autres collectivités et dépend donc en grande partie de transferts financiers de l’Etat. De même, dans un contexte européen, les régions françaises font figure de « nains budgétaires ». En Allemagne, la Bavière a un budget de 49,9 milliards d’euros alors que le total du budget des régions françaises est de 25,5 milliards d’euros.

De même la réunion de plusieurs anciennes régions françaises pose problèmes. La région Grand Est est composée des anciennes régions Champagne-Ardenne, Lorraine, Alsace. Le débat s’est posé non seulement sur la ville qui serait capitale de région et concentrerait donc les services et les emplois, mais aussi sur l’identité d’une telle région, sa cohérence et sa cohésion. Le géographe Roger Brunet a dénoncé le nom d’Occitanie pour la région qui réunit Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon, alors que la langue occitane n’est pas parlée sur tous les territoires (certains sont de culture catalane). Dans ces conditions, la région peut-elle être un territoire de vie ?

Ainsi, ces réformes sont vues comme nécessaires par certains, tandis que d’autres critiquent son approche technicienne, sans vision politique claire et l’absence de vrai débat. Enfin, on assiste depuis une décennie à un retour de l’Etat dans les projets d’aménagement (ex : Grand Paris)

Page 7: Fiche n°2 – Aménager le territoiredata.over-blog-kiwi.com/.../ob_bc532e_fiche-n-2-amenager-le-territoire.pdf · Culture (bibliothèques, musées) Sources : Magali Reghezza-Zitt,

A.Tapie,  2017/2018  7  

III.   Les nouveaux enjeux de l’aménagement Aujourd’hui, l’aménagement conduit à deux objectifs :

1.   Attirer de nouveaux investisseurs pour conforter une position dominante ou pour impulser de nouvelles dynamiques

2.   Réorienter le développement par une reconversion ou en limitant les inégalités socio-spatiales

L’Etat ne cherche plus à réduire le poids de Paris. Au contraire, dans un contexte de mondialisation et de concurrence entre les villes, il s’agit de conforter sa domination à l’échelle européenne et mondiale. Disposer d’une ville mondiale devient un atout majeur.

1.   De plus en plus d’acteurs qui complexifient les questions d’aménagement

L’Europe joue désormais un rôle dans l’aménagement du territoire ; en 1975 est créé le FEDER (Fonds européen de développement économique régional) pour favoriser les régions en difficulté. Il intervient dans la coopération transfrontalière (programme INTERREG), dans le développement des quartiers urbains (URBAN) et les espaces ruraux (LEADER).

Dans les années 1990, l’intercommunalité connaît son essor. Il s’agit de réunir plusieurs villes autour de projets d’aménagement. En effet, les seules ressources d’une commune ne lui permettent pas de développer des projets de grande envergure pour satisfaire les besoins de ses habitants. La France compte en moyenne 1300 habitants, contre 4000 en Europe. Ainsi, de façon volontaire, les communes se regroupent au sein d’Etablissement Public de Coopération intercommunale (EPCI, loi de Joxe de 1992) pour développer des prestations communes (ex : réseau de bus) ou pour construire des projets de développement économique.

Plusieurs types d’intercommunalité :

création caractéristiques Nombre d’habitants Communauté urbaine 1966 Pas d’enclave, un seul tenant.

Grandes villes 500 000

Communauté d’agglomération

1999 Pas d’enclave, un seul tenant 50 000 (avec au moins une commune de plus de 15 000 habitants)

Communauté de communes

1992 x x

2.   Les enjeux autour du développement durable

Le développement local cherche désormais à concilier les enjeux du développement durable en permettant un développement économique et social tout en veillant à préservant l’environnement. Les aménageurs insistent sur la dimension écologique, sur le verdissement des dispositifs mis en place à espaces verts, toitures végétalisées, récupération des eaux de pluie, mobilité douce… Succès des différentes opérations d’aménagement sui se revendiquent durables : écotourisme, pôles de compétitivité dévolues aux technologies vertes… Dans le même temps, la géographe Magali Reghezza-Zitt remarque que les pratiques restent peu économes en énergie. Souvent le développement durable sert davantage de communication, d’outil marketing.

Page 8: Fiche n°2 – Aménager le territoiredata.over-blog-kiwi.com/.../ob_bc532e_fiche-n-2-amenager-le-territoire.pdf · Culture (bibliothèques, musées) Sources : Magali Reghezza-Zitt,

A.Tapie,  2017/2018  8  

3.   Des conflits de plus en plus fréquents

Chaque aménagement résulte de choix politiques et dépend de la vision que chaque

acteur a de son territoire et de l’avenir de celui-ci. L’application du développement durable se heurte aux intérêts individuels et égoïstes, résumés par le concept de NIMBY (not in my back yard)

De même, certains aménagements sont souhaités par la population et les acteurs publics alors même qu’il s’agit de territoires à risques. Ainsi, après la tempête de Xynthia, les terrains dévastés par les flots ont été jugés inconstructibles alors même que l’économie locale est avant tout résidentielle, basée en partie sur les résidences secondaires. De même, de nombreuses industries sont installées sur les bords du Rhône (« couloir de la chimie ») alors que cet espace est soumis à un risque de crue.

Le géographe Philippe Subra analyse l’augmentation des conflits autour des aménagements dans son livre paru en 2016, Géopolitique locale. De plus en plus d’acteurs interviennent dans les questions de l’aménagement : militants écologistes, associations, ONG, population locale (ex : aéroport Notre-Dame-des Landes). La démocratie participative est de plus souhaitée pour les aménagements du territoire local. Cela a été le cas pour le Port Seine Métropole Ouest, sur les communes d’Achères, Conflans Sainte-Honorine et Andrésy (Yvelines). La population a été informée et consultée à travers des réunions et un site internet.

IV.   La région et l’Europe

1.   Des régions plus ancrées dans un territoire européen que dans un territoire national ?

Dans un contexte de mondialisation, certaines régions ont plus de liens avec d’autres régions européennes qu’avec les régions françaises. C’est le cas des régions transfrontalières comme les anciennes régions Nord-Pas-de-Calais, Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Alsace.

Les "eurorégions" ne créent pas un nouveau type d'administration au niveau transfrontalier et ne sont pas dotées de pouvoirs politiques. Leurs activités se limitent aux compétences des collectivités locales et régionales qui les composent à politiques spécifiques d'aménagement du territoire dans divers secteurs : économie locale, réseaux sociaux, activités culturelles, institutions scolaires, réseaux de transport, protection et conservation environnementale.

L’UE a facilité leur création en 1980 avec la Déclaration de Madrid. Attention : bcp de projets mais qui n’aboutissent pas toujours !

2.   Le risque d’un éclatement territorial

En Europe, certaines régions souhaitent se désolidariser du reste du pays : c’est le cas du parti indépendantiste catalan. La Ligue du Nord en Italie est un cas particulier : ce parti populiste, décrit comme xénophobe parfois, est né en 1991 et réclame la création d’une nouvelle nation, la Padanie, qui ne réunirait que les régions du Nord, c’est-à-dire les plus riches du pays. Ces mouvements restent minoritaires, même si on constate une recrudescence des mouvements régionalistes. En Corse, les nationalistes sont à la tête de la région et souhaitent une co-officialité de la langue corse et de la langue française, et mettre en place une « corsisation des emplois », c’est-à-dire une préférence régionale pour les postulants à un emploi.

Page 9: Fiche n°2 – Aménager le territoiredata.over-blog-kiwi.com/.../ob_bc532e_fiche-n-2-amenager-le-territoire.pdf · Culture (bibliothèques, musées) Sources : Magali Reghezza-Zitt,

A.Tapie,  2017/2018  9  

Exemples à mobiliser dans une copie

Montparnasse, symbole du retour des tours à Paris Outre la rénovation du plus haut gratte-ciel parisien, une douzaine de chantiers ont

débuté ou sont en projet. LE MONDE ECONOMIE | 21.09.2017 à 12h25 • Mis à jour le 22.09.2017 Une tour Montparnasse ouverte sur l’espace public, lumineuse, végétalisée, mêlant

bureaux, hôtel et services, le tout pour une consommation d’énergie divisée par dix… Le projet de transformation du plus haut gratte-ciel parisien, dont les lauréats, la jeune équipe française d’architectes Nouvelle AOM, ont été désignés mardi 19 septembre, n’ambitionne rien de moins que de faire de la tour de 210 mètres « un des monuments préférés des Parisiens », selon les mots de Jean-Louis Missika, adjoint à l’urbanisme de la maire de Paris.

Ironiquement, la tour sombre et hermétique de 1973, dont les défauts ont largement alimenté le rejet des immeubles de grande hauteur dans la capitale, devient un symbole du retour des tours dans Paris et d’un modèle « parisien » de gratte-ciel.

Car la maire (PS) de Paris, Anne Hidalgo, désireuse de « créer la ville du XXIe siècle », a fait de son mandat celui du retour de la grande hauteur, pour des ensembles de logements comme pour des tours de bureaux. Après des décennies de sanctuarisation du ciel parisien, pas moins d’une douzaine de gratte-ciel sont en chantier ou programmés dans la capitale, pour la plupart situés aux entrées sud-est de la ville, dans les quartiers de Bercy et de Masséna.

Sur le sujet, la municipalité marche sur des œufs. « Les tours font à Paris un retour durable, assume M. Missika. Mais ça ne veut pas dire que la ville va devenir un paysage urbain de tours : Paris n’est pas Dubaï ni Londres. On le fait avec délicatesse et discernement, là où les tours sont le signal de nouvelles centralités. »

Sujet tabou Hérésies écologiques, folies économiques (le coût du mètre carré s’envole de manière

exponentielle à mesure que les étages s’ajoutent) : les tours ont longtemps été un sujet tabou dans la capitale, défenseurs du patrimoine et militants de l’écologie s’alliant pour rejeter toute exception au gabarit haussmannien des 37 mètres. http://www.lemonde.fr/economie/article/2017/09/21/montparnasse-symbole-du-retour-des-tours-a-paris_5189085_3234.html?xtmc=amenagement&xtcr=19

EuropaCity, un avis défavorable au projet

Un avis défavorable à l’urbanisation du triangle de Gonesse, dans le Val-d’Oise, a été

rendu fin août dans le cadre de l’enquête publique. Consultatif, il concerne, en premier lieu, le projet de méga-complexe touristique

« EuropaCity », prévu pour 2024. L’avis n’est que consultatif. Mais il réjouit les opposants au projet EuropaCity,

immense complexe de loisirs que le groupe Auchan ambitionne de construire à l’horizon 2024 sur le triangle de Gonesse (Val-d’Oise), à une vingtaine de kilomètres au nord de Paris.

3,1 milliards d’euros À l’issue de l’enquête publique sur la révision du PLU (plan local d’urbanisme) de

Gonesse, le commissaire-enquêteur, Ronan Hébert, donne en cette fin août un « avis défavorable », émettant plusieurs réserves quant aux aménagements envisagés. Il faut dire que le projet de 3,1 milliards d’euros, présenté comme une « nouvelle destination de loisirs » entre

Page 10: Fiche n°2 – Aménager le territoiredata.over-blog-kiwi.com/.../ob_bc532e_fiche-n-2-amenager-le-territoire.pdf · Culture (bibliothèques, musées) Sources : Magali Reghezza-Zitt,

A.Tapie,  2017/2018  10  

les aéroports de Roissy et du Bourget, est pharaonique  : sur 80 hectares, Auchan et son partenaire chinois Wanda prévoient d’ériger des centaines de boutiques, des hôtels, des salles de spectacle, un parc aquatique et une piste de ski.

Pour le commissaire-enquêteur, le projet d’aménagement du triangle de Gonesse est

« peu compatible avec la notion de développement durable ». Ses orientations, souligne Ronan Hébert, « sont incompatibles avec le pilier environnemental par ses impacts sur le changement climatique, la destruction des ressources et l’atteinte à la biodiversité ».

Un constat qui n’intervient pas à n’importe quel moment  : début juillet, interrogé à l’occasion de la présentation de son plan climat, Nicolas Hulot, ministre de la transition écologique avait considéré la propension à artificialiser les sols « incompatible » avec les objectifs de son plan.

« Tout cela fragilise EuropaCity », veut croire Bernard Loup, président du Collectif

pour le triangle de Gonesse, qui se bat depuis 2011 contre le complexe touristique et juge dans un communiqué ce projet « d’un autre temps (…) Avec l’accélération du dérèglement climatique, l’aggravation des nuisances et des inégalités pour les habitants de l’Île-de-France, il n’est plus possible de bétonner à tout va ».

« Certes l’avis du commissaire-enquêteur est seulement consultatif et ne suffira pas à décourager Auchan et la mairie de Gonesse, ajoute Bernard Loup. Mais toutes ces réserves en disent long sur les conséquences du projet. »

Dans l’avis, les réserves concernent aussi la question sociale, clé du débat. Dans ce coin d’Île-de-France touché par le chômage, la promesse des promoteurs d’EuropaCity de créer 11 800 emplois directs pèse lourd.

Le commissaire-enquêteur note, lui, que « les objectifs en matière d’emploi » sont « peu en phase avec le niveau de formation local ». Il ajoute que la construction de ce complexe, dans une zone déjà bien dotée en centres commerciaux, risque de se traduire par des destructions d’emplois et d’affecter plus globalement les « équilibres sociaux économiques existants ».

Fort de cet avis, Bernard Loup demande que l’aménagement du triangle de Gonesse

soit appréhendé au niveau régional et avec cohérence. « Tout le monde n’a que le mot ’’transition écologique’’ à la bouche, mais il faut mettre des actes derrière les formules », insiste le militant, en rappelant que ces terres agricoles pourraient connaître un tout autre destin, à l’instar de ce que propose Carma, le groupement de coopération pour une ambition rurale et métropolitaine agricole.

« Pourquoi ne pas en faire un bras de levier pour une véritable politique agricole en Île-de-France, respectueuse de l’environnement et de proximité  ? », interroge Bernard Loup.

De son côté, la municipalité de Gonesse note que « les conclusions du rapport ne sont pas de nature à remettre en cause le principe de l’aménagement du triangle de Gonesse ni à même d’entacher [sa] détermination à offrir une meilleure qualité de vie aux habitants », ce qui passe, à ses yeux, par la réalisation d’EuropaCity. https://www.la-croix.com/Sciences-et-ethique/Environnement/EuropaCity-avis-defavorable-projet-2017-08-27-1200872321

Page 11: Fiche n°2 – Aménager le territoiredata.over-blog-kiwi.com/.../ob_bc532e_fiche-n-2-amenager-le-territoire.pdf · Culture (bibliothèques, musées) Sources : Magali Reghezza-Zitt,

A.Tapie,  2017/2018  11  

Les  acteurs  de  l’aménagement  :  conflits  et  négociations  

   

 SUBRA  Philippe,  Géopolitique  locale,  Armand  Colin,  2016  

Page 12: Fiche n°2 – Aménager le territoiredata.over-blog-kiwi.com/.../ob_bc532e_fiche-n-2-amenager-le-territoire.pdf · Culture (bibliothèques, musées) Sources : Magali Reghezza-Zitt,

A.Tapie,  2017/2018  12  

 Exemple  d’un  conflit  d’acteurs  

 

     

 SUBRA  Philippe,  Géopolitique  locale,  Armand  Colin,  2016