151

Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

  • Upload
    vulien

  • View
    252

  • Download
    2

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Gravitation relativiste :

une approche simple

basée sur le critère de Schild

Jean-Pierre Chabert (Lambesc, mars 2008)

L'important n'est pas de convaincre, mais de donner à ré�échir (Bernard Werber)

Table des matières

1 Avertissement 3

2 Introduction 3

3 Approche préliminaire 6

4 Ordres de grandeur 11

5 Le paradoxe de Schild 13

6 Ralentissement des horloges dans un champ gravitationnel 15

7 Contraction des règles dans un champ gravitationnel 16

8 Matrices de changement de potentiel 17

9 Evaluation des vitesses en fonction du potentiel 19

10 Evaluation des masses en fonction du potentiel 20

11 Mise au point 21

12 E�et Einstein 28

13 Newton, Einstein, et encore Einstein... 29

14 Métrique de l'espace-temps 32

15 Quelques conséquences 34

16 Métriques de Schwarzschild et de Ni 36

1

Page 2: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

17 Le formalisme post-newtonien paramétrisé 40

18 Principes d'équivalence 41

19 Le pari d'Einstein 42

20 Equations des géodésiques en métrique de Ni 43

21 Forces et/ou géodésiques ? 48

22 Tenseur de Ricci en métrique de Ni 53

23 Tenseur de Ricci en métrique de Schwarzschild 54

24 Courbure intrinsèque 55

25 Interprétation 56

26 Théorèmes d'unicité 59

27 Pseudo-accélération 60

28 Le potentiel Φ dans le cadre newtonien 61

29 Le potentiel Φ en métrique de Ni 62

30 Le potentiel Φ en métrique de Schwarzschild 65

31 Sur la notion de masse en relativité restreinte 66

32 Le champ d'entraînement (ou potentiel quadrivectoriel) 71

33 L'immobilité gravitationnelle 74

34 Conservation de l'énergie-impulsion 76

35 Le graviton existe-t-il ? 78

36 E�et Nordtvedt 79

37 Les trous noirs en métrique de Schwarzschild 82

38 Les trous gris en métrique de Ni 86

39 Les ondes gravitationnelles en métrique de Ni 91

40 La symétrie T 96

41 La détection des ondes gravitationnelles 99

2

Page 3: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

42 L'événement GW150914 103

43 L'événement GW170817 106

44 Les ondes gravitationnelles dissipent-elles de l'énergie ? 108

45 L'hypothèse du transfert de moment cinétique 110

46 L'hypothèse de l'information gravitationnelle intriquée 118

47 Qu'est-ce que l'e�et Lense-Thirring ? 121

48 La matière noire existe-t-elle ? 123

49 Un exemple de calcul 125

50 La gravitation est-elle la clé de la cosmologie ? 133

51 Pourquoi l'univers est-il globalement plat ? 135

52 L'énergie sombre existe-t-elle ? 137

53 Pour terminer ... 147

54 Liens 148

1 Avertissement

Ce document fait partie d'un ensemble comportant cinq volets :

1) Les vitesses en Relativité restreinte

2) Gravitation relativiste

3) Etude du système solaire en métrique de Ni

4) Etude des systèmes binaires en métrique de Ni

5) Métriques de Schwarzschild et de Ni

2 Introduction

Après la publication de la théorie de la relativité restreinte par Albert Ein-stein, il est apparu de manière évidente que l'électromagnétisme de Maxwellétait parfaitement compatible avec cette nouvelle théorie ; mais la gravitation

3

Page 4: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

de Newton ne l'était pas.

Einstein s'est alors �xé un objectif très ambitieux : modi�er la théorie deNewton pour la rendre compatible avec la relativité restreinte, tout en introdui-sant une vitesse limite des interactions.

La solution qu'il a proposée, en 1916, après une dizaine d'années de travail,est la relativité générale.

Il a atteint ses objectifs : toutes les prédictions de la nouvelle théorie, dansle système solaire, ont été con�rmées, et l'étude des pulsars binaires a permisde pousser la précision encore beaucoup plus loin : la dé�exion de la lumièrepar le Soleil (le double de celle prévue par la théorie de Newton) est bien éta-blie, la précession du périhélie (de Mercure d'abord, puis des autres planètes, etdes pulsars binaires) est maintenant bien comprise, l'e�et Shapiro a été mesuréavec une très grande précision (lors d'une occultation de Mercure par le Soleil,puis par l'étude des pulsars binaires) ; le retard des horloges dans un champgravitationnel (e�et Einstein) est pris en compte dans la technologie du GPS ;l'"anomalie Pioneer", qui a longtemps posé problème, semble aujourd'hui ré-solue. Hors du système solaire, les mirages gravitationnels sont fréquemmentobservés, les trous noirs sont traqués et des "candidats" de plus en plus nom-breux ont été repérés (même si leur nature exacte soulève des questions), etsont activement étudiés ; les ondes gravitationnelles n'avaient pas encore été dé-tectées directement lorsque j'ai commencé à écrire ces lignes (en 2008), mais lapremière observation a été publiée en février 2016.

Cependant, beaucoup de physiciens estiment que la relativité générale n'estpas une théorie dé�nitive. Ils font observer, bien sûr, que la célèbre équationd'Einstein (ou équation des champs) n'a jamais été démontrée ; d'autre part,quatre reproches principaux sont régulièrement formulés :- les idées développées par Einstein sont incompatibles avec celles de la méca-nique quantique : on estime souvent qu'à l'échelle des atomes et des particulesélémentaires, des modi�cations seront nécessaires pour permettre à la relativitégénérale de s'intégrer dans le contexte quantique ;- l'apparition dans les équations de singularités et d'in�nis apparemment irré-ductibles est souvent considérée comme un défaut à corriger d'urgence ;- l'étude de la rotation des galaxies fait apparaître des phénomènes inattendus,qu'on n'arrive pas à expliquer dans le cadre de cette théorie, à moins d'imagi-ner la présence d'une grande quantité de matière noire ; présence qui n'est pasen accord avec certaines observations (en particulier avec la loi empirique deTully-Fischer) ;- en�n, la nécessité de faire appel à des phénomènes tels que l'"in�ation" etl'"énergie sombre" pour modéliser l'expansion de l'univers a marginalisé le rôlede la relativité générale en cosmologie.

Pour ces raisons, entre autres, de nombreuses théories concurrentes ont été

4

Page 5: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

développées. Beaucoup d'entre elles ont été éliminées, parce-que leurs prédic-tions s'écartent des observations ; d'autres sont encore en course.

Le but du présent travail était, à l'origine, d'élaborer une présentation sim-pli�ée et pédagogique de la relativité générale, basée sur des notions physiquessimples et concrètes (issues du "critère de Schild") et accessibles à tous.

Cependant, j'ai constaté très vite que les équations qui sortent spontané-ment de cette approche ne sont pas nécessairement équivalentes à celles de larelativité générale ! Elles sont pourtant en parfait accord avec les observations,dans le domaine des champs faibles : en e�et, les applications au système so-laire conduisent aux mêmes conclusions ; elles expliquent bien, comme nous leverrons, le comportement des pulsars binaires. Mais dès qu'on est en présencede champs forts (au voisinage des trous noirs par exemple), ces équations necon�rment plus du tout celles de la relativité générale. Elles convergent davan-tage vers la seconde théorie de Ni (1972), que vers celle d'Einstein.

J'ai donc été conduit, par la force des choses, à redé�nir mon projet : plutôtque de présenter la relativité générale d'Einstein comme la seule théorie pos-sible, j'ai préféré adopter une position beaucoup plus ouverte. Je me suis mêmeamusé, chaque fois que j'ai été confronté à un choix, à privilégier la solution lamoins orthodoxe. Cette attitude me semble la plus constructive : si, au boutdu compte, je suis amené à conclure que la relativité générale est la seule théo-rie de la gravitation qui soit viable, j'aurai la satisfaction d'avoir apporté deséléments pour la renforcer. Mais les autres options sont tout aussi intéressantes...

L'approche proposée ici ne constitue pas une nouvelle théorie de la gravita-tion, mais un raccourci permettant d'accéder le plus simplement possible, pardes considérations élémentaires et non conventionnelles, à une "gravitation re-lativiste minimale". Ma ligne directrice sera l'économie des moyens. Le but estde mettre à la portée du plus grand nombre des résultats réputés inabordablespour le commun des mortels, en choisissant sur chaque sujet l'approche quime semble la plus naturelle, la plus instructive et la moins abstraite, pour quechacun puisse se faire une opinion par lui-même. En même temps, j'essaieraide montrer aussi clairement que possible quelles sont les principales directionsde recherche pour aborder et approfondir l'étude de la gravitation relativiste :recherches basées sur la notion de potentiel gravitationnel, sur la métrique del'espace-temps, les géodésique, ou les échanges quantiques d'énergie-impulsion ;théories locales ou globales... La grande erreur, trop souvent commise, serait decroire que tous les problèmes sont résolus, et de fermer les portes avant d'avoirpris conscience des concepts auxquels elles pourraient donner accès... Je passeraiparfois sans prévenir d'une interprétation à une autre, tout en faisant apparaîtreles contradictions, s'il y en a. Le but n'est pas de construire une théorie cohé-rente, mais de stimuler la ré�exion.

Comme on va le voir, des équations élémentaires basées sur un raisonnement

5

Page 6: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

simpliste permettent de retrouver sans di�culté la plupart des résultats qu'onattribue souvent à la relativité générale, concernant aussi bien le système solaireque les systèmes doubles, car les pulsars binaires permettent d'aller beaucoupplus loin dans les tests gravitationnels. C'est principalement sur les trous noirs etles ondes gravitationnelles que des interprétations divergentes vont apparaître,deux sujets sur lesquels les astronomes apportent régulièrement des élémentsnouveaux.

En cours de route, chaque fois que nous aurons le choix entre deux directionsdivergentes, nous marquerons le carrefour d'une pierre blanche pour y reveniréventuellement par la suite.

3 Approche préliminaire

Attention : cette approche préliminaire est à la fois essentielle (elle contientles équations qui sont à la base de ce travail) et pleine de pièges : elle devra êtreréinterprétée et corrigée à la lumière du critère de Schild, sans quoi elle nousconduirait à des absurdités. On s'en rendra compte en lisant la section "Miseau point".

A partir d'ici, on pourra imaginer un mobile ponctuel (une "planète") demasse m, tournant autour d'un corps central immobile (le "Soleil"), égalementponctuel, de masse M ; on supposera m négligeable par rapport à M ; le mou-vement se faisant dans un plan, on se limitera à deux dimensions spatiales(auxquelles il faut ajouter, bien sûr, une dimension temporelle) : on travailleradonc dans un espace-temps à trois dimensions. Le fait que le Soleil soit immobilenous permettra de raisonner sur un champ gravitationnel statique, ce qui nousdispensera, au moins dans un premier temps, de faire intervenir sa vitesse depropagation.

Dans la théorie de Newton, trois formules jouent un rôle central : la pre-mière (appelée loi de la gravitation universelle) permet d'exprimer la force quis'exerce entre deux corps massifs, la seconde exprime la conservation de l'énergie,la troisième la conservation du moment cinétique. Ces trois formules ne sont pasindépendantes : historiquement, la seconde et la troisième ont été démontréesà l'aide de la première, qui joue le rôle de pilier de la gravitation newtonienne.Nous examinerons ses conséquences, pour voir si elles sont compatibles avec larelativité restreinte.

Selon la loi de la gravitation universelle, la planète subit une force attractivedirigée vers le Soleil, proportionnelle à m et à M, et inversement proportionnelleau carré de la distance (ou du rayon vecteur) r :

~F = −GmMr2

~u,

6

Page 7: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

où G est la constante de la gravitation, et ~u un vecteur unitaire dirigé du Soleilvers la planète.

Nous noterons ~v la vitesse, et ~w la rapidité du mobile considéré (la planète).

Comme l'accélération ~Γ = d~wdt s'obtient en divisant ~F par m, on peut écrire :

~Γ =d~w

dt= −GM

r2~u.

Il s'agit bien, ici, de ~Γ (~Γ = d~wdt ) et non de ~γ (~γ = d~v

dt ) !

Si vous désirez plus d'informations sur la di�érence entre vitesse et rapidité,

et sur l'origine de la formule ~Γ = d~wdt =

~Fm (c'est su�samment important pour

mériter une étude approfondie), vous pouvez vous reporter à mon site sur larelativité restreinte : Les vitesses en Relativité restreinte, et plus particulière-ment à la �n de la section intitulée "Quelques mots sur la mécanique relativiste".

Remarquons bien que l'introduction de la notion de rapidité n'est pas néces-saire à notre raisonnement : tous les calculs peuvent se faire avec des vitesses.Mais les rapidités permettent de simpli�er ces calculs de manière appréciable,à condition de ne pas être rebuté par les fonctions hyperboliques. Si on préfère

les vitesses, on se rappellera que chwc = 1√1− v2

c2

, que shwc =vc√

1− v2

c2

, et que

vc =

shwc

chwc

= thwc .

Rappelons brièvement quelques formules essentielles (en nous limitant à unedimention spatiale) ; en relativité restreinte, on a (en notant m la masse d'unmobile, m0 sa masse au repos, v sa vitesse dans un référentiel donné, w sa ra-pidité, p son impulsion, E son énergie) :

m = m0√1− v2

c2

= m0 chwc ;

p = m v = m0 cvc√

1− v2

c2

= m0 c shwc ;

E = m c2 = m0 c2√1− v2

c2

= m0 c2 chwc .

La force étant dé�nie, comme en mécanique classique, par : F = dpdt , on a :

F = dpdt = m0 c

ddt

(shwc

)= m0 c ch

wc

dwc dt = m0 ch

wcdwdt = m dw

dt .

Plus généralement :

7

Page 8: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

~F =d~p

dt= m

d~w

dt.

Si le vecteur ~w fait un angle α avec ~u (vecteur unitaire dirigé du Soleil versla planète), on peut écrire (en notant w le module de ~w) :

dw

dt= −GM

r2cos α.

Toutes ces formules sont valables en relativité restreinte ; nous verrons unpeu plus loin comment elles s'adaptent au contexte gravitationnel.

Voici donc notre choix initial sur lequel s'appuie tout le travail qui va suivre :nous resterons le plus près possible de la gravitation newtonienne, et nous conser-vons sa pierre angulaire (la loi de la gravitation universelle), à savoir une forced'attraction proportionnelle à la masse de chacun des deux corps, et inversementproportionnelle au carré de leur distance. Mais toutes les conséquences de cetteloi (à commencer par la conservation de l'énergie) seront reformulées dans uncadre relativiste.

Dans la théorie de Newton, l'énergie potentielle (gravitationnelle) d'un mo-

bile est liée au travail de la force gravitationnelle : dEp = −~F .~dl (où Ep désignel'énergie potentielle, et ~dl un déplacement élémentaire). Le potentiel gravita-tionnel s'obtient en divisant l'énergie gravitationnelle par la masse du mobile,et l'accélération s'obtient en divisant la force par cette même masse ; donc, endivisant les deux membres de l'égalité précédente par m, nous obtenons :

dΦ = −~Γ.~dl.

On pourrait donc dire que le potentiel est lié au "travail" du vecteur ~Γ. Comme~Γ = −GMr2 ~u, on a :

dΦ = −~Γ.~dl =GM

r2~u.~dl =

GM

r2.dr = −GM.d

(1

r

).

En intégrant, nous obtenons les formules classiques :

Φ = −GMr

, et Ep = mΦ = −GMm

r.

Remarquons bien le double rôle du vecteur ~Γ = −GMr2 ~u :

- d'une part, il modi�e la rapidité du mobile : ~Γ = d~wdt ;

8

Page 9: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

- d'autre part il modi�e le potentiel gravitationnel : dΦ = −~Γ.~dl.Pour Newton, ces deux rôles n'en font qu'un : ce sont deux aspects d'un mêmephénomène, lié à la notion de force, qui a une place centrale dans sa théorie.Mais nous serons amenés (disons-le tout de suite) à dissocier ces deux rôles.Nous en reparlerons.

La conservation de l'énergie, toujours dans la théorie de Newton, s'écrit :

E =1

2mv2 − GmM

r=

1

2mv2 −mGM

r=

1

2mv2 +mΦ

où 12mv

2 représente l'énergie cinétique de la planète, −GmMr son énergie poten-

tielle, et Φ = −GMr le potentiel gravitationnel.

Cette formule doit être profondément remaniée pour être cohérente avec larelativité restreinte. Nous allons reprendre sa démonstration au point de départ,c'est-à-dire à partir de la loi de la gravitation universelle.

Nous allons dériver chwc par rapport à t. Nous notons α l'angle formé par le

vecteur vitesse ~v avec le rayon vecteur ~u ; l'égalité ~Γ = d~wdt devient donc (sous

forme scalaire) : dwdt = Γ.cosα = −GMr2 .cosα.

d

dt

(chw

c

)= sh

w

c.dw

cdt=v

c.ch

w

c.Γ

c.cosα =

v

c.ch

w

c.−GMcr2

.cosα ;

d

dt

(chw

c

)= ch

w

c.−GMc2r2

.v.cosα = chw

c.−GMc2r2

.dr

dt.

Posons : k = GMc2 . On a donc : kr = GM

rc2 = − Φc2 . Ce nombre k dépend de G

et c (constantes), ainsi que de M , que nous supposerons (provisoirement) �xé.On a alors :

d

dt

(chw

c

)= ch

w

c.−kr2.dr

dt;

d

dt

(chw

c

)= ch

w

c.d(kr

)dt

;

d(chwc

)chwc

− d(k

r

)= 0 ;

d(Log ch

w

c

)+ d

(Log e−

kr

)= 0 ;

Log(chw

ce−

kr

)= constante ;

chw

ce−

kr = constante, ou, si on préfère :

chw

ce

Φc2 = constante.

9

Page 10: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

En l'absence de champ gravitationnel, l'énergie du mobile est donnée par laformule : E = m0c

2chwc ; dans le champ gravitationnel, la formule devient :

E = m0c2 ch

w

ce−

kr = m0.c

2.chw

c.e

Φc2 .

Cette formule va jouer un rôle fondamental ; pour cette raison, nous conseillonsà nos lecteurs de relire et d'analyser sa démonstration. Elle peut être discutée ;d'ailleurs, nous la discuterons plus loin, lorsque nous aurons tous les élémentspour le faire.

Il est clair que cette formule est équivalente à la précédente quand r tendvers l'in�ni ; mais, à la di�érence de cette dernière, elle inclut l'énergie poten-tielle (négative) de la planète.

Notre but va être de déterminer jusqu'où cette formule peut nous mener.Nous allons voir qu'elle nous permet de retrouver un grand nombre de résultatsbien connus, et con�rmés par les observations, concernant plus particulièrementle système solaire. Mais il n'est pas question de lui attribuer un pouvoir illi-mité : si on désire l'appliquer à des conditions "exotiques" (qu'on ne rencontrepas dans le système solaire), il faudra l'analyser, l'interpréter, et éventuellementla corriger, pour la rendre extrapolable à ces situations extrêmes. Mais en at-tendant, conservons-la telle qu'elle est, et voyons ce qu'elle contient.

Posons : E′ = m0c2 chwc ; c'est ce que j'appellerai l'énergie apparente. C'est

une expression de l'énergie qui prend en compte ses aspects "actuels" : masseet mouvement, mais qui néglige l'énergie potentielle, alors que l'énergie réelleE inclut l'énergie potentielle. Elle est liée à l'énergie réelle E par l'égalité :E′ = E e

kr . On a donc : E′ e−

kr = constante. En l'absence de champ gravi-

tationnel (ou lorsque r tend vers l'in�ni), l'énergie apparente se confond avecl'énergie réelle ; mais quand r tend vers 0, E′ tend vers l'in�ni (donc la rapiditéw aussi), alors que E reste constante.

Une question qu'on peut légitimement se poser est la suivante : la relativitérestreinte fait la distinction entre la masse au repos m0 et la masse maupertui-sienne m = m0 ch

wc = E′

c2 . Dans tout ce qui précède, c'est la masse mauper-tuisienne m que nous avons utilisée : nous avons écrit la loi de Newton sous laforme ~F = −G m M

r2 ~u, et non ~F = −G m0 M0

r2 ~u. Est-ce justi�é ? En fait, il n'estpas urgent de répondre à cette question : nous allons étudier le système solairedans un repère lié au Soleil ; on aura donc M = M0 ; d'autre part, la massedes planètes n'interviendra pas, puisque le Soleil produit un champ d'accéléra-

tion (plutôt qu'un champ de forces) : c'est la quantité ~Γ =~Fm = −GMr2 ~u (et

non ~F ) qui est indépendante de la particule-test, ou de la planète considérée.Cependant, la distinction entre masse au repos et masse maupertuisienne est

10

Page 11: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

fondamentle, et nous en reparlerons longuement.

Pour la lumière, l'équivalent de l'énergie apparente est E′ = hν (où ν désigne

la fréquence du rayonnement) ; donc E′ e−kr = hν e−

kr = constante. Comme la

période est T = 2πν , on a, bien sûr : T e

kr = constante. Quand r tend vers 0, la

fréquence ν tend vers l'in�ni, la période T et la longueur d'onde λ = cT tendentvers 0. On peut écrire aussi : ν = ν∞ e

kr , T = T∞ e−

kr et λ = λ∞ e−

kr (où ν∞,

T∞ et λ∞ sont la fréquence, la période et la longueur d'onde limites quand rtend vers l'in�ni, autrement dit quand le rayonnement s'échappe du champ degravitation).

Le choix de conserver la loi de la gravitation universelle telle qu'elle a étéformulée par Newton (à partir de la notion de force) n'est pas anodin : il im-plique que l'accélération à prendre en compte dans l'attraction gravitationnelleest ~Γ = d~w

dt et non ~γ = d~vdt . Entre autres conséquences, ceci va entraîner que la

vitesse de libération à la surface d'un corps pesant sera toujours inférieure à c ;nous en reparlerons au sujet des trous noirs. Une autre conséquence importanteest qu'il sera plus facile, par la suite, d'établir des ponts entre la gravitation etles autres forces de la nature (même si la gravitation n'est pas une force commeles autres) ; en e�et, si on choisit de "jeter" la notion de force pour lui substituerd'emblée l'accélération et la géométrie de l'espace-temps, on risque de casser ledialogue nécessaire avec la mécanique quantique.

4 Ordres de grandeur

Dans ce travail, nous raisonnerons le plus souvent comme si le champ gravi-tationnel en question était celui du Soleil ; précisons donc la valeur de k pour cechamp particulier, ainsi que celle du rapport k

r , qui interviendra souvent dansles équations.

Comme en gravitation newtonienne, nous appellons potentiel gravitation-nel la quantité (négative) : Φ = −GMr . Nous dirons qu'un champ est fort si lenombre ‖Φ‖ est grand.

La masse du Soleil est M ≈ 1, 9891.1030 kg ; la constante de la gravita-tion est G ≈ 6, 6742.10−11 m3.kg−1.s−2 ; et la vitesse de la lumière : c ≈2, 99792.108 m.s−1 ; donc :

k =GM

c2≈ 6, 6742.10−11.1, 9891.1030

8, 9875.1016≈ 1, 47.103 m.

Si on note r = rt ≈ 1, 5.1011 m le rayon de l'orbite terrestre, par exemple,

le nombre kr qui apparaît dans les équations vaudra : k

r ≈1,47.103

1,5.1011 ≈ 10−8,

11

Page 12: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

donc(kr

)2 ≈ 10−16,(kr

)3 ≈ 10−24, etc. Quand on étudiera l'action du champgravitationnel du Soleil sur la Terre (ou sur une autre planète), on ne pourrapas négliger k

r (ce serait négliger la gravitation !) mais on pourra sans craintenégliger ses puissances.

Si on note r = rs ≈ 6, 96.108 m le rayon du Soleil, on aura : ‖Φ‖c2 = kr ≈

1,47.103

6,96.108 ≈ 2.10−6,(kr

)2 ≈ 4.10−12,(kr

)3 ≈ 8.10−18, etc. Ceci montre qu'à la

surface du Soleil, les puissances de kr seront très vite négligeables.

Considérons maintenant une étoile à neutrons ayant pour masse 1, 4 fois lamasse du Soleil, et pour rayon 14 km. A sa surface, on aura : k ≈ 1, 4 . 1, 47.103 ≈2, 058.103 m, et r = 1, 4.104 m, donc ‖Φ‖c2 = k

r ≈ 0, 147 ;(kr

)2 ≈ 0, 0216 ;(kr

)3 ≈ 0, 0032 ;(kr

)4 ≈ 0, 00047 ;(kr

)5 ≈ 0, 00007 ; ... Il faudra donc être très

prudent avant de négliger des puissances de kr à la surface d'une étoile à neu-

trons ! Nous sommes ici dans le domaine des champs gravitationnels forts ...

Revenons à la surface de la Terre. La masse de notre planète est M ≈6.1024 kg ; son rayon est r ≈ 6, 37.106 m ; donc :

‖Φ‖c2

=k

r=GM

r c2=

6, 67.10−11.6.1024

6, 37.106.9.1016≈ 0, 7.10−9.

On voit donc qu'à la surface de la Terre, le champ créé par la Terre elle-même

(‖Φ‖c2 ≈ 0, 7.10−9) est un peu inférieur au champ créé par le Soleil (‖Φ‖c2 ≈ 10−8).

Etudions maintenant le champ créé par notre Galaxie (la Voie Lactée) à lasurface de la Terre. Imaginons par exemple une masse de 3.1011 soleils (éva-luation raisonnable ?) concentrée au centre de la Galaxie, à une distance de28000 AL, soit 2, 6.1020 m. On a alors :

‖Φ‖c2

=k

r=GM

r c2=

6, 67.10−11.2.1030.3.1011

2, 6.1020.9.1016≈ 1, 7.10−6.

Le potentiel gravitationnel créé par la Galaxie dans le voisinage de la Terredépasse largement celui qui est dû au Soleil. (Bien entendu, il ne faut pasconfondre ce potentiel avec la force d'attraction.)

On pourrait étudier ensuite la contribution des galaxies voisines (groupelocal), qui est non négligeable, puis celle des galaxies lointaines ; pour ces der-nières, le calcul est délicat : il fait intervenir la masse moyenne des galaxies,leur répartition dans l'espace, leur âge, leur vitesse de fuite due à l'expansion del'Univers... Si les galaxies étaient en nombre in�ni, réparties uniformément dansl'espace et dans le temps, dans un Univers statique, leur contribution totale auchamp gravitationnel serait in�nie, ce qui nous poserait de sérieux problèmes :

12

Page 13: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

tous les calculs qui suivent seraient caducs. Mais la faible luminosité du cielnocturne (voir le paradoxe d'Olbers : "pourquoi le ciel est-il noir la nuit ?")suggère que le champ gravitationnel total pourrait bien être faible aussi ; maisle paradoxe d'Olbers concerne la lumière, dont l'intensité est en 1

r2 , alors que lepotentiel gravitationnel est en 1

r . Le calcul reste à faire.

5 Le paradoxe de Schild

Jusqu'ici, le rapprochement de la gravitation newtonienne et de la relativitérestreinte a semblé se passer de manière simple, facile et naturelle ; mais nousallons voir surgir un paradoxe qui va nous conduire à envisager la possibilitéd'un espace-temps courbe : c'est le "critère" (ou paradoxe) de Schild.

De même que le paradoxe de Michelson est la porte d'entrée de la relativitérestreinte, je considère le paradoxe de Schild comme la voie royale pour aborderla relativité générale.

Historiquement, ce n'est pas cette porte qu'Einstein a empruntée lorsqu'ils'est attaqué à la gravitation ; en e�et, le travail de Schild (A. Schild, Evidencefor gravitational theories, Academic Press, 1961) est bien postérieur.

De quoi s'agit-il ?

Le paradoxe de Schild s'appuie sur l'analyse de l'expérience de Pound etRebka. Ces deux physiciens, par un procédé très astucieux, ont réussi à mesurerla perte d'énergie d'un rayon lumineux se déplaçant de bas en haut, du piedd'une tour jusqu'à son sommet. Cette perte d'énergie est due à l'action de lagravité terrestre : la lumière doit lutter contre elle pour atteindre le sommet dela tour.

Pour notre part, nous imaginerons un observateur envoyant un rayon lumi-neux en direction du Soleil. Cet observateur est supposé immobile par rapportau Soleil, et su�samment éloigné de celui-ci pour qu'il soit possible de négligerl'action de la gravité solaire à cette distance. Nous l'appellerons l'observateurdistant. D'autre part, nous imaginerons, sur le parcours de la lumière, entrel'émetteur (l'observateur distant) et le Soleil, plusieurs autres observateurs, tousimmobiles par rapport au Soleil, mais subissant une action non négligeable de lagravité solaire. Nous les appellerons observateurs locaux. La distance par rap-port au Soleil sera noté r ; bien entendu, elle n'est pas identique pour tous lesobservateurs.

Les observateurs locaux sont habilités à faire des observations seulementdans leur voisinage immédiat. Au passage de l'onde lumineuse, ils vont releversa période Tloc, sa longueur d'onde λloc, et sa vitesse cloc. L'observateur distant

13

Page 14: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

se charge de faire la synthèse : il va essayer de reconstituer le déroulement desévénements, en les replaçant dans un cadre euclidien (peut-être arti�ciel, maisqui est destiné à re�éter au mieux sa vision des choses). Les mesures établiespar cet observateur distant seront notées Tdist, λdist et cdist. Toutes ces mesuressont des fonctions de r.

Conformément au résultat de l'expérience de Pound et Rebka, nous nousattendons à un accroissement de l'énergie apparente de cette onde, au fur et àmesure qu'elle se rapproche du Soleil. Comment cet accroissement de l'énergieva-t-il se manifester ?

Les formules E = hν, ν = Eh , T = 1

ν = hE , λ = cT = hc

E permettent deprévoir qu'un accroissement de l'énergie apparente va se traduire par une di-minution de la période et de la longueur d'onde. Dans le cadre de la physiqueclassique, nous nous attendons donc aux résultats suivants :- résultats des observateurs locaux : on peut penser que la vitesse de la lumièrecloc est constante, et que la période Tloc et la longueur d'onde λloc diminuentquand le rayonnement se rapproche du Soleil (c'est-à-dire quand r décroît) ;- synthèse de l'observateur distant : on s'attend aux mêmes résultats, autrementdit : cdist est constante, Tdist et λdist diminuent quand r décroît.D'après ce que nous avons vu dans notre approche préliminaire, on peut mêmepréciser que Tloc, λloc, Tdist et λdist vont décroître proportionnellement à e−

kr .

Mais ces conclusions naïves vont s'écrouler comme un château de cartes.Elles vont se heurter à trois problèmes qui vont en avoir raison. Nous seronsobligés de faire de profonds réajustements, et ceci en trois temps.

Le premier problème, le plus fondamental, constitue le noyau du paradoxede Schild : la période Tdist ne peut pas être décroissante.

Imaginez des voitures roulant à 120 km/h sur une autoroute, régulièrementespacées (de 100 m par exemple) ; si, pour cause de travaux, elles doivent réduireleur vitesse à 60 km/h, la distance entre deux voitures successives passera de100 m à 50 m, tandis que l'intervalle de temps (chronométré par un observateurimmobile au bord de la route) ne changera pas. De la même façon, l'intervallede temps entre deux maxima successifs de l'onde (donc la période T) ne peutpas varier le long de la trajectoire ! Il est essentiel de bien comprendre ce pro-blème, car toute la suite en découle... On peut imaginer une vitesse de la lumièrevariable le long du parcours (comme pour les voitures de notre exemple), maisceci ne change rien au problème. Celui-ci serait résolu si les di�érents chrono-métreurs étaient en mouvement les uns par rapport aux autres, mais dans notreexpérience imaginaire, comme dans celle (bien réelle) de Pound et Rebka, ilssont immobiles...

14

Page 15: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

6 Ralentissement des horloges dans un champgravitationnel

Comment sortir de cette impasse ? C'est en fait assez simple. Rappelons-nousl'idée proposée par Einstein pour résoudre le paradoxe de Michelson : deux ob-servateurs en mouvement uniforme l'un par rapport à l'autre travaillent avec desrègles et des horloges di�érentes. Pour résoudre le paradoxe de Schild, il su�td'admettre que l'observateur distant et l'observateur local travaillent, eux aussi,avec des règles et des horloges di�érentes. Dans l'univers tel qu'il est reconstituépar l'observateur distant, le rayon lumineux ne change pas de période lorsqu'ilse propage vers l'observateur local ; mais celui-ci croit mesurer une période pluscourte parce-que son horloge de référence est plus lente que celle de l'observa-teur distant. Et c'est, bien entendu, le champ gravitationnel qui est responsablede cette distorsion.

En m'engageant dans cette voie, je suis en train d'admettre, d'une certainemanière, la courbure de l'espace-temps (même si je ne sais pas s'il s'agit d'unecourbure réelle, ou seulement d'une illusion due à la modi�cation des règles etdes horloges). Cette innovation majeure de la relativité générale a été fortementcritiquée à l'époque où la théorie a été proposée par Einstein ; mais ensuite,divers physiciens (et plus particulièrement Schild, pour qui la courbure étaitune évidence) ont réuni une argumentation forte à l'appui de cette conceptionde l'espace-temps. Mais, comme on le verra, les arguments de Schild peuventêtre interprétés de plusieurs manières... E�ectivement, les idées toutes simplesque je viens de proposer dans le paragraphe précédent vont m'aiguiller dans unedirection qui n'est ni celle d'Einstein, ni celle de Schild ! J'avais décidé de basermon travail sur les idées de Schild, mais, dès le début, je constate que je suisdéjà en train de leur faire dire autre chose que ce que Schild pensait lui-même !Peu importe : continuons dans cette direction, quitte à corriger le tir plus tard,s'il le faut.

D'après ce que nous avons dit, le coe�cient de ralentissement de l'horloge

locale, par rapport à l'horloge distante, est : e−kr , autrement dit : e

Φc2 .

Nous devons bien intégrer le fait que l'intervalle spatio-temporel (intervalled'univers) entre deux événements très proches ne va pas être évalué de la mêmefaçon par nos deux observateurs (local et distant).

En ce qui concerne l'intervalle temporel, on aura donc :

dtloc = e−kr dtdist = e

Φc2 dtdist.

15

Page 16: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

7 Contraction des règles dans un champ gravita-tionnel

Il est certain que la gravité modi�e la vitesse des horloges, donc l'évaluationlocale des durées. Mais modi�e-t-elle aussi les règles, donc l'évaluation localedes distances ?

Voici la réponse que nous proposons. Elle se base sur l'idée suivante : unobservateur se déplaçant selon une géodésique (nous dirons un "observateurinertiel") est en droit de se considérer immobile. S'il utilise une règle dl dispo-sée longitudinalement dans la direction du déplacement, il jugera sa longueurconstante, c'est-à-dire indépendante de sa vitesse.

Observons la scène, du point de vue de l'observateur distant (immobile parrapport au corps central - disons le Soleil - et assez loin pour que le poten-tiel gravitationnel soit négligeable). Pour décrire la trajectoire du mobile iner-

tiel, nous utilisons la formule : E = E0.chwc .e− k

r = cte, ou plus simplement :

chwc .e− k

r = cte. Pour simpli�er encore, supposons qu'on ait : chwc .e− k

r = 1,

autrement dit chwc = ekr . Ceci signi�e que nous raisonnons sur une orbite pa-

rabolique (ou une "géodésique d'évasion") : la rapidité w tend vers 0 quand rtend vers l'in�ni. Donc sur toute la géodésique on a w = wl et v = vl (vl étant lavitesse de libération, variable en fonction de r). Précisons pourquoi nous choi-sissons une géodésique d'évasion, plutôt qu'une géodésique quelconque : c'estparce-qu'à l'in�ni la vitesse de l'observateur mobile va tendre vers 0, donc sonpoint de vue va s'identi�er à celui de l'observateur distant. Ils seront donc d'ac-cord sur l'évaluation de dl. D'autre part, rappelons que v et w sont la vitesse etla rapidité du mobile mesurées par des observateurs locaux situés sur le passagedu mobile (mais eux sont immobiles par rapport au Soleil, comme l'observateurdistant). Donc les mesures de v et w ne sont pas directement accessibles à l'ob-servateur distant.

Lorsque le mobile inertiel se rapproche du Soleil, sa vitesse augmente. Lalongueur dl de la règle, du point de vue du mobile, ne change pas. Pour l'ob-servateur local immobile, c'est di�érent : en raison de l'e�et de contraction desrègles en mouvement, résultant de la relativité restreinte, il doit, en principe, endonner une évaluation dl′ inférieure à celle que donne l'observateur mobile, soitdl ; le rapport entre ces deux évaluations étant :

dl′ =dl

chwc=

dl

ekr

= e−kr .dl

L'observateur distant pourra interpréter ce résultat de deux façons :- s'il choisit de raisonner en termes d'espace plat (euclidien), il dira : la règlede l'observateur inertiel se contracte vraiment quand il se rapproche du Soleil,mais il ne s'en rend pas compte ;- s'il choisit de raisonner en termes d'espace courbe, il dira : l'observateur inertiel

16

Page 17: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

a parfaitement raison de dire que ses règles sont de longueur constante ; c'estson point de vue qui fait autorité ; par conséquent, l'observateur local doit l'ad-mettre, et il doit harmoniser ses règles personnelles avec celles de l'observateurinertiel ; autrement dit, il doit travailler avec des règles plus courtes.

Nous allons choisir le second point de vue. Il y a deux raisons à cela : d'abord,nous avons été obligés d'admettre que les horloges sont modi�ées par la gravité,et nous n'avons pas de raison de penser qu'il n'en soit pas de même pour lesrègles ; ensuite, nous pensons que le fait de considérer le point de vue des observa-teurs inertiels comme référence permet de serrer au plus près la réalité physique.

Le fait que les règles de l'observateur local soient plus courtes que celles del'observateur distant signi�e que ces deux observateurs ne vont pas donner lamême évaluation de la longueur d'un segment (immobile) donné, puisqu'ils vontl'évaluer avec des unités di�érentes ; l'évaluation fournie par l'observateur localsera, bien sûr, supérieure à celle que donnera l'observateur distant :

dlloc = ekr .dldist ;

dldist = e−kr .dlloc.

Nous dirons que le coe�cient de dilatation de l'espace est ekr . Ceci signi�e

que, lorsqu'on se rapproche du corps central (le Soleil), il y a plus d'espace dis-ponible que prévu par la géométrie euclidienne. Si on préfère, on peut dire queles unités de longueur sont contractées par l'e�et du champ gravitationnel.

On peut remarquer qu'en un point donné il passe une in�nité de géodésiquesd'évasion, de toutes directions ; le raisonnement qui précède est donc valablequelle que soit la direction, ce qui signi�e que le coe�cient de dilatation del'espace est identique dans toutes les directions.

Si nous comparons les formules dldist = e−kr .dlloc et dtdist = e

kr .dtloc, nous

voyons que les coe�cients qui interviennent sont inverses l'un de l'autre.

8 Matrices de changement de potentiel

Pour résumer ce qui vient d'être dit, on peut écrire : dtlocdxlocdyloc

=

e−kr 0 0

0 ekr 0

0 0 ekr

dtdist

dxdistdydist

;

dtdistdxdistdydist

=

ekr 0 0

0 e−kr 0

0 0 e−kr

dtloc

dxlocdyloc

.17

Page 18: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

On pourra écrire aussi : dtlocdxlocdyloc

=

eΦc2 0 0

0 e−Φc2 0

0 0 e−Φc2

dtdist

dxdistdydist

;

dtdistdxdistdydist

=

e−Φc2 0 0

0 eΦc2 0

0 0 eΦc2

dtloc

dxlocdyloc

.Si nous considérons, non plus un observateur distant et un observateur local,

mais deux observateurs locaux di�érents loc1 et loc2 (tous deux immobiles parrapport au Soleil), situés dans des potentiels quelconques, alors il sera possiblede passer successivement de l'observateur loc1 à l'observateur distant, puis del'observateur distant à l'observateur loc2, par une composition de matrices : dt2

dx2

dy2

=

eΦ2c2 0 0

0 e−Φ2c2 0

0 0 e−Φ2c2

.

dtdistdxdistdydist

;

dt2dx2

dy2

=

eΦ2c2 0 0

0 e−Φ2c2 0

0 0 e−Φ2c2

.

e−Φ1c2 0 0

0 eΦ1c2 0

0 0 eΦ1c2

.

dt1dx1

dy1

;

dt2dx2

dy2

=

e−Φ1−Φ2

c2 0 0

0 eΦ1−Φ2

c2 0

0 0 eΦ1−Φ2

c2

.

dt1dx1

dy1

.

Pour passer d'un observateur local à un autre, on pourra donc utiliser lesmêmes matrices de changement de potentiel que pour passer d'un observateur lo-cal à un observateur distant, à condition de considérer que Φ désigne la di�érencede potentiel entre les deux observateurs. On pourra même prendre l'habitude deconsidérer Φ comme une quantité relative : Φ = Φmob − Φobs, où Φmob désignele potentiel gravitationnel dans lequel se trouve le mobile observé (par exemplela planète), et Φobs le potentiel dans lequel se trouve l'observateur. C'est cettedi�érence de potentiel, interposée entre l'observateur et la scène observée, quijoue le rôle de verre déformant.

Notons bien que les matrices que nous utilisons ici (que j'appellerai "matricesde changement de potentiel") sont valables lorsqu'on passe d'un observateur lo-cal à un observateur distant (ou l'inverse), ou bien (par composition) lorsqu'on

18

Page 19: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

passe d'un observateur local à un autre observateur local. Mais ces observateursne sont pas des observateurs quelconques : ce sont des observateurs immobilespar rapport au Soleil. Ceci soulève des questions : que se passe-t-il lorsque lesobservateurs ne sont pas immobiles ? Que devient la notion d'immobilité lors-qu'on étudie le champ gravitationnel créé par plusieurs corps en mouvement ?Nous en reparlerons. Pour le moment notre but premier est l'application d'idéessimples à une situation simple : le mouvement des planètes dans le système so-laire ; le mot "immobile" signi�era, jusqu'à nouvel ordre : "immobile par rapportau Soleil".

La relativité restreinte est basée sur la matrice de Lorentz ; la gravitationrelativiste, selon l'interprétation que nous étudions ici, se base sur la matricede changement de potentiel. Si nous cherchons à combiner ces deux types dematrices pour étudier de manière générale les changements de référentiel (ré-férentiels en mouvement l'un par rapport à l'autre, situés dans des potentielsdi�érents), nous rencontrons très vite des problèmes. La raison est la suivante :notre solution du paradoxe de Schild dissocie les rôles de l'espace et du temps,alors que la relativité restreinte les considère comme deux aspects d'une mêmechose. Ces deux types de transformations semblent radicalement incompatibles,à moins d'admettre deux choses : d'une part, la matrice de Lorentz n'a qu'unevaleur locale ; d'autre part, la matrice de changement de potentiel ne s'appliquequ'à des référentiels particuliers, que nous appellerons "gravitationnellement im-mobiles". La signi�cation de cette formule devra être précisée.

9 Evaluation des vitesses en fonction du potentiel

Voyons maintenant l'évaluation des vitesses.

Voici le troisième problème : si nous disons que Tdist est constant et que λdistest multiplié par e−

kr , sachant que cdist = λdist

Tdist, nous en déduisons que cdist est

multiplié par e−kr . De même, si nous disons que Tloc est multiplié par e−

kr et

que λloc est constant, sachant que cloc = λloc

Tloc, nous en déduisons que cloc est

divisé par e−kr .

Ce raisonnement est inexact, car λdist n'est pas multiplié par e− k

r dans l'ab-solu (un absolu qui n'existe pas !), mais par rapport à λloc. De même, Tloc n'est

pas multiplié par e−kr dans l'absolu, mais par rapport à Tdist.

En réalité, comme nous l'enseigne la relativité restreinte, tout observateur,mesurant la vitesse de la lumière dans son voisinage, obtiendra un résultat ri-goureusement égal à la constante c ; on a donc : cloc = c.

Si un observateur local calcule la vitesse d'un mobile par la formule : vloc =

19

Page 20: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

dllocdtloc

, alors l'observateur distant évaluera la même vitesse de la façon suivante :

vdist = dldistdtdist

= eΦc2 .dlloc

e− Φ

c2 .dtloc

= e2Φc2 .vloc.

La vitesse locale de la lumière sera toujours constante : cloc = c ; mais sa

vitesse évaluée par un observateur distant ne le sera pas : cdist = c.e2Φc2 . Par

exemple, lorsque la lumière passe dans le voisinage d'un corps massif (Φ < 0),sa vitesse évaluée par un observateur distant sera inférieure à c, de sorte quecelui-ci aura l'illusion de voir la lumière ralentir.

La solution du paradoxe de Schild que nous proposons comporte donc troisvolets interdépendants et étroitement imbriqués. Le premier est le ralentisse-ment des horloges dans un champ gravitationnel (volet sans lequel l'e�et Ein-stein - voir plus loin - n'existerait pas) ; c'est l'élément central de notre visiondu paradoxe de Schild. Le second est la contraction des règles dans un champgravitationnel (volet sans lequel la déviation de la lumière, ou les mirages gra-vitationnels, seraient incompréhensibles : voir la section sur la dé�exion de lalumière) ; c'est le complément indispensable du premier, sa facette spatiale pourainsi dire. Le troisième est la constance de la vitesse locale de la lumière (indis-pensable si nous admettons la validité locale de la relativité restreinte) ; nousaurions pu commencer par lui, tant il va de soi. Il implique que la vitesse dela lumière, pour un observateur distant, semble varier en fonction du champgravitationnel. Cette variation apparaîtra de manière spectaculaire dans l'e�etShapiro. Ces trois volets sont (au moins qualitativement) nécessaires ; sont-ilsquantitativement satisfaisants, et jusqu'à quel point ? C'est ce que nous allonsexaminer.

Mais auparavant, soulignons encore une conséquence importante concernantl'évaluation des masses.

10 Evaluation des masses en fonction du poten-tiel

En relativité restreinte, l'énergie et l'impulsion d'un corps de masse au reposm0, de vitesse ~v et de rapidité ~w sont données par les formules :E = m0.c

2.chwc et ~p = m0.c.sh~wc = m0.ch

wc .~v.

Si on pose : m = m0.chwc , ces deux formules deviennent :

E = m.c2 et ~p = m.~v.La quantité : m = m0.ch

wc = E

c2 = ~p~v est appelée : masse maupertuisienne.

Elle permet d'établir des parallèles entre la relativité restreinte et la mécaniqueclassique de Newton : il su�t de remplacer m0 par m dans plusieurs formulesclassiques pour obtenir les formules relativistes correspondantes.

20

Page 21: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Est-il possible de faire de même en gravitation relativiste ? L'energie et l'im-pulsion seront alors données par les formules :

E = m0.c2.chwc .e

Φc2 ,

~p = m0.c.sh~wc .e− Φ

c2 = m.chwc .~v.e− Φ

c2 .

En utilisant l'énergie, on pourrait poser :

mE =E

c2= m0.ch

w

c.e

Φc2 .

En utilisant l'impulsion, on poserait plutôt :

mp =~p

~v= m0.ch

w

c.e−

Φc2 .

Nous dirons que mE est la masse maupertuisienne liée à l'énergie, et quemp est la masse maupertuisienne liée à l'impulsion. Ces deux masses ne sontpas égales : la distorsion vient du fait que le potentiel gravitationnel modi�e lamasse et l'impulsion selon des coe�cients inverses.

En pratique, c'est la masse maupertuisienne liée à l'énergie (mE) qui est laplus intéressante, car on pourra toujours se placer dans un repère convenablepour annuler l'impulsion, mais on ne pourra jamais annuler l'énergie.

En termes de masse maupertuisienne liée à l'énergie, on pourra écrire :

mdist = mloc.e− k

r = mloc.eΦc2 .

Par la suite, lorsque nous parlerons de mdist ou de mloc, il s'agira toujoursde masses maupertuisiennes liées à l'énergie (sauf mention contraire).

De plus, si on considère le potentiel gravitationnel produit par un corpsdonné, en gravitation newtonienne, il va de soi qu'il est proportionnel à sa masseau repos M , ou bien à son énergie E, puisque E

c2 = M ; ces deux points de vuesont équivalents, à condition de se placer dans un repère immobile par rapportau corps considéré (ce qui revient à annuler son impulsion). Est-ce di�érent engravitation relativiste ? Nous en reparlerons.

11 Mise au point

Avant de continuer, revenons à notre "approche préliminaire", qui doit êtreréinterprétée à la lumière du critère de Schild. En particulier, nous venons devoir que la plupart des mesures dépendent de l'observateur (local ou distant) ;nous n'en avions pas parlé dans l'approche préliminaire, et nous n'avions pascherché à savoir par qui étaient évaluées les di�érentes quantités impliquées dansle calcul. Mais il est temps de le faire, sans quoi des contradictions risquent de

21

Page 22: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

surgir par la suite.

Reprenons la même situation : une planète de masse au repos m0, se dépla-çant dans le champ gravitationnel du Soleil, de masse M .

Nous avions utilisé plusieurs formules, dont l'expression de l'accélérationadaptée de la mécanique newtonienne : ~Γ = d~w

dt .

La première chose qu'il faut rappeler, c'est que les rapidités ~w sont dé�niesdans un espace hyperbolique, dans lequel il n'existe pas d'addition vectorielleau sens usuel : il n'existe qu'une composition notée ⊕. Il faut donc préciser ceque signi�e d~w : supposons qu'à un instant donné la rapidité du mobile, esti-mée par un observateur local ("immobile") soit ~w, et qu'elle subisse variationin�nitésimale d~w ; pour l'observateur local, cette variation va se composer avecla rapidité initiale selon la règle : ~w⊕ d~w. On peut donc dire que d~w est évaluépar un observateur local mobile, de rapidité ~w constante (non accélérée) parrapport à l'observateur local immobile.

Nous avions aussi exprimé l'accélération gravitationnelle selon la gravitationde Newton : ~Γ = −GMr2 ~u.

Nous avions écrit aussi : dΦ = −~Γ.~dl = GMr2 ~u.~dl = GM

r2 .dr = d(−GMr

), et

nous en avions conclu que : Φ = −GMr .

C'est à partir de ces bases que nous avions démontré que chwc .eΦc2 = constante

(conservation de l'énergie du mobile).

Dans cette démonstration, il était admis implicitement que toutes les quan-tités étaient évaluées par un observateur local, puisque la notion d'observateurdistant n'avait pas encore été introduite. Ceci est évident en ce qui concernela vitesse v et la rapidité w (provenant du coe�cient chwc = 1√

1− v2

c2

), qui dé-

signaient, et continueront à désigner, une vitesse et une rapidité locales ; maisnous avions admis aussi que dr = dl.cosα, avec dl = v.dt, ce qui suppose que r,dl et dt étaient aussi évalués localement (c'est-à-dire par un observateur situédans un potentiel égal à celui dans lequel évolue la planète).

Dès lors, la signi�cation de toutes les formules doit être reconsidérée.

Quand nous écrivions : Φ = −G.Mr , il fallait comprendre : Φ = −G.Mloc

rloc.

Mais nous savons maintenant que les masses et les longueurs sont évaluées dif-féremment selon le potentiel dans lequel est plongé l'observateur ; de plus, onpasse du point de vue local (potentiel Φ) au point de vue distant (potentiel 0) en

multipliant les masses et les longueurs par le même coe�cient : eΦc2 . Précisons

qu'il s'agit ici de la masse maupertuisienne liée à l'énergie et non à l'impulsion,puisque, dans le cas présent, la vitesse est nulle, donc l'impulsion aussi.

22

Page 23: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

On a donc :

Φ = −G.Mloc

rloc= −G.Mdist

rdist.

Ceci signi�e que les potentiels (ou plutôt les di�érences de potentiel) ont unesigni�cation absolue, indépendante de l'observateur. Par la suite, nous poserons,par dé�nition : M = Mdist et r = rdist (ce qui est purement arbitraire, maiscommode), et nous écrirons : Φ = −G.Mr .

Il en va di�éremment de l'accélération (ou "pseudo-accélération") Γ. Si nouschoisissons ces dé�nitions :

Γloc = −G.Mloc

r2loc

rloc, et : Γdist = −G.Mdist

r2dist

rdist

nous aurons Γdist

Γloc= rloc

rdist= e−

Φc2 , ce qui entraîne :

Γdist = e−Φc2 .Γloc.

Ceci est cohérent avec la formule dΦ = −~Γ.~dl. En e�et :

~Γdist.~dldist = e−Φc2 .~Γloc.e

Φc2 ~dlloc = ~Γloc.~dlloc.

Cette formule est donc valable pour tous les observateurs immobiles :

dΦ = ~Γdist.~dldist = ~Γloc.~dlloc.

Quant à la formule ~Γ = d~wdt , que nous avons employée dans un contexte lo-

cal, avec pour signi�cation : ~Γloc = d~wdtloc

, nous pouvons l'écrire d~w = ~Γloc.dtloc.Rappelons que ~w désigne toujours la rapidité évaluée par l'observateur local.

Puisque ~Γdist.dtdist = e−Φc2 .~Γloc.e

− Φc2 dtloc = e−

2Φc2 .~Γloc.dtloc = e−

2Φc2 .d~w, on

peut écrire :

~Γdist =d~w

dtdist.e−

2Φc2

où Φ est la di�érence de potentiel entre le mobile observé et l'observateur :

Φ = Φscene − Φobservateur.

On a donc :~Γdist =

d~w

dtdist.e−

2Φc2 = −G.Mdist

r2dist

.~u,

ce qui entraîne :

d~w

dtdist= −G.Mdist

r2dist

.e2Φc2 .~u = −G.M

r2.e

2Φc2 .~u.

23

Page 24: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Dans l'étude du système solaire, nous aurons : Φc2 = −kr = −G.Mr.c2 ; nous

noterons alors :d~w

dt= −G.M

r2.e−

2kr .~u

où toutes les quantités, sauf ~w, sont évaluées par l'observateur distant.

Quant à l'égalité :

~Γ =d~w

dt

il est clair qu'elle n'est valable que pour l'observateur local :

~Γloc =d~w

dtloc.

Ceci signi�e que l'observateur local "immobile" a un rôle privilégié, nonseulement pour dé�nir la rapidité ~w, mais aussi la pseudo-accélération ~Γ = d~w

dtloc.

Passons à la formule ~F = m.~Γ. On a :

mdist.~Γdist = eΦc2 .mloc.e

− Φc2 .~Γloc = mloc.~Γloc.

Il s'ensuit que l'évaluation de ~F (comme celle de ∆Φ) est indépendante dupotentiel dans lequel est plongé l'observateur :

~F = mdist.~Γdist = mloc.~Γloc.

Par conséquent :

~F = −G.Mdist.mdist

r2dist

.~u = −G.Mloc.mloc

r2loc

.~u.

L'égalité chwc .eΦc2 = constante est vraie pour tous les observateurs situés

dans un potentiel constant. La quantité Φ désigne toujours la di�érence de po-tentiel entre le mobile observé et l'observateur.

La formule E = m0.c2.chwc .e

Φc2 = m0.c

2.eΦc2√

1− v2

c2

est donc générale.

Dans le contexte de l'étude du système solaire, nous l'écrirons :

E = m0.c2.ch

~w

c.e−

kr .

L'impulsion de la planète s'écrira :

~p = m0.c.sh~w

c.e

kr .

Véri�ons la cohérence de ces formules avec ce qui précède ; pour cela, e�ec-tuons les dérivations par rapport au temps.

24

Page 25: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Commençons par l'énergie :

E = m0.c2.ch

~w

c.e−

kr ;

dE

dt= m0.c

2.e−kr .sh

~w

c.d~w

c.dt+m0.c

2.ch~w

c.k

r2.e−

kr .dr

dt;

dE

dt= m0.c

2.e−kr .ch

~w

c.

(~v

c.d~w

c.dt+

k

r2.dr

dt

).

Nous voulons montrer que l'expression entre parenthèses est nulle. Rappelons-nous que d~w

dt = −G.Mr2 .e−2kr .~u. Nous avons donc :

~v

c.d~w

c.dt= −~v

c.G.M

c.r2.e−

2kr .~u = −G.M

c2.r2.~v.e−

2kr .~u ;

~v

c.d~w

c.dt= − k

r2.~vdist.~u = − k

r2.dr

dt.

Donc on a bien :~v

c.d~w

c.dt+

k

r2.dr

dt= 0,

et par suite :dE

dt= 0.

Examinons maintenant l'impulsion.

Partons de ces deux formules fondamentales : E = m0.c2.ch ~wc .e

− kr ;

c.~p = m0.c2.sh ~wc .e

kr .

En les multipliant membre à membre, nous obtenons :

E.c.~p = m20.c

4.ch~w

c.sh

~w

c=

1

2.m2

0.c4.sh

2. ~w

c.

Dérivons par rapport à t, en admettant que E = cte :

E.c.d~p

dt= m2

0.c4.

(ch2 ~w

c+ sh2 ~w

c

).d~w

c.dt;

E.c2.d~p

dt= m2

0.c4.ch2 ~w

c.

(1 +

v2

c2

).d~w

dt.

Nous avons déjà rappelé que d~wdt = −G.Mr2 .e−

2kr .~u. Nous obtenons :

E.c2.d~p

dt= −m2

0.c4.ch2 ~w

c.e−

2kr .

(1 +

v2

c2

).G.M

r2.~u ;

25

Page 26: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

E.c2.d~p

dt= −E2.

(1 +

v2

c2

).G.M

r2.~u ;

d~p

dt= −E

c2.

(1 +

v2

c2

).G.M

r2.~u.

En posant m = Ec2 = m0.e

− kr .chwc (masse maupertuisienne associée à l'énergie),

il vient :d~p

dt= −G.M.m

r2.

(1 +

v2

c2

).~u ;

d~p

dt=

(1 +

v2

c2

). ~F .

La présence du facteur 1 + v2

c2 dans cette formule peut surprendre. Nous leretrouverons dans l'étude sur les géodésiques en métrique de Ni, version carté-sienne (section "Forces et/ou géodésiques ?").

Pour mieux éclairer l'origine de ce facteur 1 + v2

c2 , nous pouvons donnerl'explication suivante. Considérons l'application de R2 dans R2 dé�nie par :(w,Φ)→ (p,E), ou, pour simpli�er les calculs :(

w

c,

Φ

c2

)→ (p, E).

Puisque p = shwc .e− Φ

c2 et E = chwc .eΦc2 , nous avons :

∂p∂ w

c= chwc .e

− Φc2 ;

∂p∂ Φ

c2

= −shwc .e− Φ

c2 ;

∂E∂ w

c= shwc .e

Φc2 ;

∂E∂ Φ

c2

= chwc .eΦc2 .

Ce qui s'exprime sous forme matricielle : dp

dE

=

chwc .e− Φ

c2 −shwc .e− Φ

c2

shwc .eΦc2 chwc .e

Φc2

.

dwc

d Φc2

.

La matrice jacobienne :

J =

∂p∂ w

c

∂p∂ Φ

c2

∂E∂ w

c

∂E∂ Φ

c2

=

chwc .e− Φ

c2 −shwc .e− Φ

c2

shwc .eΦc2 chwc .e

Φc2

26

Page 27: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

a pour déterminant :

detJ = ch2w

c+ sh2w

c= ch2w

c.

(1 +

v2

c2

)=

1 + v2

c2

1− v2

c2

.

Dans le raisonnement que nous avons fait pour résoudre le paradoxe deSchild, nous avons donné les rôles principaux à la rapidité ~w (par l'intermédiaire

de la pseudo-accélération ~Γ = d~wdtloc

) et au potentiel Φ, lui-même directement re-lié à l'énergie potentielle. En dé�nitive, c'est l'impulsion ~p qui va supporter ladistorsion exprimée par le déterminant de la matrice jacobienne.

En relativité restreinte, les égalités dE = ~F .d~l et d~p = ~F .dt sont toutes lesdeux vraies ; ce n'est pas possible en gravitation relativiste. Les dé�nitions quenous avons choisies nous conduisent à "sacri�er" la seconde formule. On auradonc, en général :

~F 6= d~p

dt.

L'égalité ~F = d~pdt ne sera réalisée que dans le cas d'un potentiel constant.

La matrice J ci-dessus est facile à inverser. On obtient :

J−1 =1

detJ.

chwc .eΦc2 shwc .e

− Φc2

−shwc .eΦc2 chwc .e

− Φc2

=1− v2

c2

1 + v2

c2

.

chwc .eΦc2 shwc .e

− Φc2

−shwc .eΦc2 chwc .e

− Φc2

,

ce qui signi�e que : dwc

d Φc2

=1− v2

c2

1 + v2

c2

.

chwc .eΦc2 shwc .e

− Φc2

−shwc .eΦc2 chwc .e

− Φc2

.

dp

dE

.

Si dE = 0, on voit que :

dw

c=

1− v2

c2

1 + v2

c2

.chw

c.e

Φc2 .dp =

√1− v2

c2

1 + v2

c2

.eΦc2 .dp

ce qui entraîne :

dp =1 + v2

c2√1− v2

c2

.e−Φc2 .d

w

c=

(1 +

v2

c2

).ch

w

c.e−

Φc2 .d

w

c;

dp =

(1 +

v2

c2

).E.e−

2Φc2 .d

w

c.

En multipliant les deux membres par m0.c, on obtient :

c.dp =

(1 +

v2

c2

).E

c2.e−

2Φc2 .dw.

27

Page 28: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Il est inutile de pousser le calcul plus loin ; nous allons retrouver le mêmerésultat que précédemment, à un détail près : ici, il ne s'agit pas des variationsvectorielles d~p et d~w, mais des variations de leurs modules dp et dw, qui s'ob-tiennent en projetant les variations vectorielles sur la direction de ~v.

Nous pouvons donner encore une explication particulièrement simple de ce

coe�cient 1 + v2

c2 .

Sachant que vc = thwc =

shwc

chwc, on passe aux di�érentielles :

d(vc

)=chwc .d

(shwc

)− shwc .d

(chwc

)ch2w

c

=ch2w

c − sh2wc

ch2wc

.dw

c=

(1 +

v2

c2

).dw

c,

ce qu'on peut écrire : (1 +

v2

c2

)=dv

dw.

12 E�et Einstein

D'après ce que nous venons de voir, un rayon lumineux se dirigeant de basen haut dans le champ gravitationnel de la Terre doit perdre de l'énergie ap-parente : sa fréquence doit être décalée vers le rouge (pour un observateur im-mobile). C'est précisément ce qui a été véri�é par Pound et Rebka en 1959 ; sion analyse leur expérience, on voit qu'ils ont cherché à annuler ce décalage versle rouge par un e�et Doppler opposé (décalage vers le bleu produit par le rap-prochement de l'émetteur et du récepteur, à une vitesse soigneusement calculée).

On en déduit qu'une horloge immobile dans un champ gravitationnel doitretarder par rapport à une horloge identique située hors de ce champ. Ceci aété véri�é d'abord dans des avions, puis dans des satellites arti�ciels : dans cecas, l'horloge embarquée avance par rapport à celles qui restent à la surface dela Terre, car le champ est plus faible à haute altitude. Cette distorsion (appelée"e�et Einstein") est systématiquement prise en compte dans les calculs du posi-tionnement GPS. L'expérience de Pound et Rebka était donc la première (maisnon la dernière !) mesure de cet e�et Einstein.

En relativité générale, le coe�cient de dilatation du temps est 1√1+ 2Φ

c2

=

1√1− 2k

r

; ici, nous avons trouvé e−Φc2 = e

kr . On peut remarquer que 1√

1− 2kr

et

ekr ont le même développement limité au premier ordre en k

r ; c'est : 1 + kr ; la

di�érence est donc insensible pour r très grand par rapport à k, comme c'est lecas dans l'environnement terrestre, et dans la plupart des situations que nousétudierons.

28

Page 29: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Mais imaginons que r tende vers 2k (ce qui correspond à l'horizon d'un trou

noir : nous en reparlerons !). Alors 1√1− 2k

r

tend vers +∞, tandis que ekr tend

vers e12 , soit 1, 649 environ : pour un observateur distant, un chronomètre situé

à la surface d'un trou noir semblera s'arrêter, si c'est la première formule qui estla bonne ; mais si c'est la seconde formule qui est correcte, alors ce chronomètresemblera tourner à 60, 6% de sa vitesse normale. Ce n'est pas du tout pareil !

Calculons plus précisément la di�érence des deux coe�cients de dilatationdu temps : 1√

1− 2kr

− e kr ;

- à la surface du Soleil (kr ≈ 0, 000002) :1√

1−0,000004− e0,000002 ≈ 1, 000002000006 − 1, 000002000002 ≈ 4.10−12. C'est

négligeable !

- à la surface d'une étoile à neutrons de 1, 4 masse solaire et 14 km de rayon(kr ≈ 0, 147) :

1√1−2.0,147

− e0,147 ≈ 1, 190−1, 158 ≈ 0, 032. (Di�érence relative : 0,0321,19 ≈ 17%.)

En théorie, cet écart devrait pouvoir être mis en évidence par l'étude desradiations provenant de la surface des étoiles à neutrons : dans notre modèle,le décalage vers le rouge (redshift gravitationnel) est de 17% moins élevé qu'enrelativité générale. Nous en reparlerons dans la section consacrée à la mesure del'e�et Einstein à la surface des étoiles à neutrons.

13 Newton, Einstein, et encore Einstein...

Avant de continuer, arrêtons-nous un instant pour observer les piliers surlesquels s'appuie notre ré�exion.

Le premier est, bien entendu, la gravitation de Newton : nous avons pris aupied de la lettre la loi de la gravitation universelle.

Le second est la relativité restreinte d'Einstein, théorie incontournable, maintesfois con�rmée, devenue un pilier essentiel de la physique, car elle est indispen-sable à la compréhension de l'électromagnétisme, de l'optique, de la physiquequantique, de la théorie des champs, etc.

Mais ces deux théories conduisent à une contradiction apparente, mise en évi-dence par le paradoxe de Schild. Pour résoudre ce paradoxe, nous avons proposéune idée, qui constitue le troisième pilier de notre ré�exion : nous imaginonsque l'évaluation de l'espace, du temps, de l'énergie et de l'impulsion, dépendnon seulement de l'état de mouvement de l'observateur (comme en relativitérestreinte), mais aussi du potentiel gravitationnel. Cette idée est inspirée par

29

Page 30: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

la relativité restreinte, mais ne coïncide pas avec les hypothèses de la relativitégénérale, bien qu'elle puisse être interprétée en termes de courbure de l'espace-temps.

En�n, cette façon de traiter le paradoxe de Schild trouve sa force et sa cohé-rence grâce à une autre idée d'Einstein, qui constitue le quatrième pilier de notreré�exion : par son étude de l'e�et photoélectrique, il nous apprend que l'éner-gie d'un photon, la fréquence de l'onde associée, ainsi que sa longueur d'onde,sont étroitement liées. Cette découverte n'étant pas due uniquement à Einstein,mais aussi à Planck : c'est une analyse croisée de l'e�et photoélectrique et durayonnement du corps noir qui a permis d'en révéler toute la profondeur. Larecherche de la cohérence avec cet aspect ondulatoire de l'énergie est l'une desidées directrices de notre travail ; elle nous a servi de guide pour analyser leparadoxe de Schild. La formule E = hν est ici d'une importance capitale : elleétablit un lien fondamental entre l'énergie, l'espace et le temps. Nous l'avonsappliquée à la lumière (car l'expérience de Pound et Rebka utilise un rayon lu-mineux), mais nous aurions pu l'appliquer à n'importe quel mobile : en e�et, la

30

Page 31: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

mécanique ondulatoire a montré qu'elle se généralise de manière remarquable.Elle est devenue aussi l'une des bases de la mécanique quantique.

Précisons le rôle de cette formule : E = hν, dans la solution de notre pro-blème.

L'énergie et l'impulsion ne sont pas évaluées de la même façon par tous lesobservateurs :

E = Edist = Eloc e

Φc2 = m0 c

2 chwc eΦc2 ;

p = pdist = ploc e− Φ

c2 = m0 c shwc e− Φ

c2 .

Dans le cas de la lumière :

E = Edist = hνdist = hνloc.eΦc2 = Eloc.e

Φc2 ;

p = pdist =hνdistcdist

=hνloc.e

Φc2

c.e2Φc2

=hνloc.e

− Φc2

c= ploc.e

− Φc2 .

Il en résulte que les formules Edist = Eloc.eΦc2 et pdist = hνdist

cdist= ploc.e

− Φc2

s'appliquent aussi bien aux rayonnements qu'aux corps massifs.

31

Page 32: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

14 Métrique de l'espace-temps

Nous nous plaçons toujours dans le cas de �gure le plus simple : nous vou-lons étudier les orbites de particules-test (de masse négligeable) dans la voisinaged'un corps pesant de masse M , supposé immobile (confondu avec l'origine durepère).

Nous allons formaliser ce qui a été dit précédemment, dans une optique ins-pirée de celle d'Einstein, c'est-à-dire basée sur la métrique de l'espace-temps etles géodésiques. Le but est d'étudier comment nos idées s'insèrent dans un telcadre, où elles nous conduisent, et, éventuellement, comment elles devront êtrecorrigées.

Dans l'espace-temps euclidien de la relativité restreinte, on utilise la mé-trique minkowskienne : ds2 = c2dt2−dx2−dy2 (en ignorant la troisième dimen-sion spatiale, selon notre choix exposé au début), ou, en coordonnées polaires :ds2 = c2dt2 − dr2 − r2dθ2. (Bien entendu, le corps massif que nous appelerons"Soleil" occupe le centre du repère.)

L'intervalle d'univers in�nitésimal ds est une notion locale ; il s'évalue à l'aidede dtloc, dxloc et dyloc : ds

2 = c2dt2loc − dx2loc − dy2

loc.

Remplaçons dtloc par e− k

r dtdist, dxloc par ekr dxdist et dyloc par e

kr dydist ; il

vient :

ds2 = c2e−2kr dt2dist − e

2kr dx2

dist − e2kr dy2

dist.

Puisque Φc2 = −G M

r c2 = −kr , on peut écrire :

ds2 = c2 e2Φc2 dt2dist − e

− 2Φc2 dx2

dist − e− 2Φ

c2 dy2dist.

Dans cette équation, (cdtdist, dxdist, dydist) sont évalués par un observateurdistant (immobile par rapport à notre repère de référence, donc par rapport auSoleil, et situé dans un potentiel nul), et Φ est le potentiel dans lequel est plongél'objet observé (ou l'observateur local). Mais on pourrait décider de choisir unautre observateur (également immobile) situé dans un potentiel quelconque ;dans ce cas, Φ désignera la di�érence de potentiel entre l'objet observé et l'ob-servateur.

Comme nous voulons étudier les équations du mouvement, nous ne pour-rons pas nous référer à l'observateur local, qui sera nécessairement mobile ; nousallons donc prendre l'observateur distant (immobile) comme observateur de ré-férence ; nous posons donc : dt = dtdist, dx = dxdist et dy = dydist. Par consé-

32

Page 33: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

quent :

ds2 = c2e−2kr dt2 − e 2k

r dx2 − e 2kr dy2.

En coordonnées polaires, on obtient :

ds2 = c2 e−2kr dt2 − e 2k

r dr2 − e 2kr r2 dθ2.

ds2 = c2 e2Φc2 dt2 − e−

2Φc2 dr2 − e−

2Φc2 r2 dθ2.

Cette équation exprime la métrique de l'espace-temps au voisinage du corpsmassif ; elle peut être interprétée comme étant celle d'un espace-temps non eu-clidien. Nous nous engageons donc, en suivant l'exemple d'Einstein, dans la voiede l'espace-temps courbe, tout en gardant à l'esprit que cette courbure n'estpeut-être qu'une illusion.

On peut l'écrire sous forme matricielle :

ds2 =(dt dr dθ

).

c2 e2Φc2 0 0

0 −e−2Φc2 0

0 0 −e−2Φc2 r2

.

dtdrdθ

;

ou, si on préfère :

ds2 =(dt dr dθ

).

c2 e−2kr 0 0

0 −e 2kr 0

0 0 −e 2kr r2

.

dtdrdθ

.

Supposons qu'on veuille modi�er légèrement la métrique que nous avonstrouvée, en jouant sur les exposants ; écrivons-la sous la forme générale :

ds2 = c2emkr dt2 − enk

r dr2 − epkr r2dθ2

où m, n, p sont trois constantes. Alors, pour que la dé�exion de la lumière soitconforme aux observations, on doit avoir : n−m = 4. (Ceci peut se prouver parun calcul analogue à celui de la section : "Dé�exion de la lumière".) Pour obtenirla bonne précession du périhélie de Mercure, la condition est : n + p −m = 6.(On le montre en généralisant le calcul de la section : "Précession du périhélie".)Comme le critère de Schild impose clairement quem = −2, on a nécessairement :n = p = 2. Il est donc inutile d'essayer de modi�er ces exposants.

33

Page 34: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Bien entendu, il serait tentant de simpli�er cette métrique en écrivant :

ds2 = c2e2kr dt2 − e 2k

r dr2 − e 2kr r2dθ2 ;

ce qui entraînerait :

ds2 = e2kr .(c2.dt2 − dr2 − r2dθ2

), ou, si on préfère :

ds2 = e2kr .(c2.dt2 − dx2 − dy2 − dz2

), et, par conséquent :

ds = ekr .√c2.dt2 − dx2 − dy2 − dz2.

Dans ce cas, le coe�cient ekr jouerait le rôle d'un "facteur d'échelle", a�ectant

de la même façon les coordonnées spatiales et temporelles. On pourrait alorsfacilement dé�nir le lagrangien, qui est considéré comme une clé du calcul destrajectoires, en électromagnétisme relativiste par exemple. Malheureusement,les chercheurs qui voudraient s'engager dans cette voie seraient vite bloqués : ene�et, cette métrique n'est pas compatible avec la déviation de la lumière par lesobjets massifs. En e�et, elle correspond au cas m = n = p = 2, donc n−m = 0,alors que la déviation de la lumière ne marche que pour n −m = 4. Oublionsdonc ce genre de simpli�cation, et retenons que la gravitation, par nature, opèreune distinction essentielle entre l'espace et le temps : cette dichotomie fait qu'ellene peut pas être traitée de la même façon que l'électromagnétisme, par exemple.Elle est sans doute relativiste, mais probablement pas de la même manière !

15 Quelques conséquences

Notons dldist une distance in�nitésimale parcourue par le mobile étudié,évaluée par un observateur distant. On a : dl2dist = dx2

dist + dy2dist (ou dl

2dist =

dx2dist+dy2

dist+dz2dist, si on choisit de rétablir la troisième dimension d'espace).

La métrique s'écrit alors :

ds2 = c2 dt2loc − dl2loc = c2 e2Φc2 dt2dist − e

− 2Φc2 dl2dist ;

ce qui entraîne :

ds2 = c2 dt2loc

(1− dl2loc

c2 dt2loc

)= c2 dt2loc

(1− v2

loc

c2

);

c2 dt2locds2

=1

1− v2loc

c2

= ch2wlocc.

Nous noterons simplement v et w la vitesse et la rapidité évaluées par l'obser-vateur local.On obtient :

c dtlocds

= chw

c;

34

Page 35: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

c dtdistds

=c dtloc.e

− Φc2

ds= ch

w

c.e−

Φc2 ;

chw

c= e

Φc2 .c dtdistds

.

dllocds

=v

c.c dtlocds

=v

c.ch

w

c= sh

w

c;

dldistds

=dlloc.e

Φc2

ds= sh

w

c.e

Φc2 ;

shw

c= e−

Φc2 .dldistds

.

On peut donc compléter les formules obtenues précédemment (en notant :dt = dtdist et dl = dldist) :

E = Edist = m0 c2 chwc e

Φc2 = m0 c

2 e2Φc2 . c dtds ;

p = pdist = m0 c shwc e− Φ

c2 = m0 c e− 2Φ

c2 . dlds .

Une autre conséquence mérite d'être soulignée. Sachant que m0 c2 chwc =

E.e−Φc2 et que m0 c

2 shwc = cp.eΦc2 , en utilisant le fait que ch2w

c − sh2wc = 1,

on tire facilement :

E2.e−2Φc2 − c2p2.e

2Φc2 = m2

0c4.

Pour Φ = 0, on retrouve la formule classique : E2 − c2p2 = m20c

4.

Par souci de simpli�cation, nous utiliserons souvent, par la suite, l'énergieréduite E et l'impulsion réduite p, dé�nies par :

E = Edist

m0c2= chwc e

Φc2 = e

2Φc2 . c dtds ;

p = pdistm0c

= shwc e− Φ

c2 = e−2Φc2 . dlds .

On a, bien sûr :

E2.e−

2Φc2 − c2p2.e

2Φc2 = 1.

35

Page 36: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Le moment cinétique d'un corps M par rapport à un point �xe O sera noté

~µ. Par dé�nition : ~µ = ~OM ∧ ~p = ~r ∧ ~p. On aura donc : ~µ = m0c e− 2Φ

c2 .~r ∧ ~dlds .

Dans notre étude du système solaire, on aura : Φc2 = −kr ; de plus, la composante

de ~dl qui intervient dans le produit vectoriel est la composante perpendiculaireau rayon vecteur ~OM ; elle est égale (en valeur scalaire) à r dθ (où dθ désigne lavariation in�nitésimale de l'angle au centre). On aura donc (en valeur scalaire) :

µ = m0c e2kr r2 dθ

ds.

Nous utiliserons aussi le moment cinétique réduit :

µ =µ

m0c= e

2kr r2 dθ

ds.

Dans une étude telle que celle du système solaire, le moment cinétique desplanètes sera conservé ; ceci provient du fait que la force ~F est dirigée vers lepoint �xe O.

D'autre part, nous admettrons la loi de la conservation de l'énergie : chwc eΦc2 =

constante, ou e2Φc2 . c dtds = constante. Attention : ces formules seront valables à

condition que l'observateur (distant ou non) soit immobile dans un potentielconstant.

16 Métriques de Schwarzschild et de Ni

Au point où nous sommes arrivés, arrêtons-nous un instant pour comparerl'équation que nous venons d'obtenir avec celles qui ont été publiées dans lecadre des di�érentes théories de la gravitation.

Dans le cas de la relativité générale d'Einstein, la métrique de l'espace-temps au voisinage d'un corps massif ponctuel est donnée par la solution deSchwarzschild :

ds2 =

(1− 2k

r

)c2 dt2 − 1

1− 2kr

dr2 − r2 dθ2, ou encore :

ds2 =

(1 +

c2

)c2 dt2 − 1

1 + 2Φc2

dr2 − r2 dθ2.

Quant au physicien chinois Ni, dans sa seconde théorie de 1972 (à ne pasconfondre avec ses autres théories, dont certaines présentent de réels défauts !),il obtient :

ds2 = c2 e2f( Φc2 ) dt2 − e−2f( Φ

c2 ) dr2 − e−2f( Φc2 ) r2 dθ2

36

Page 37: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

où f désigne une fonction arbitraire. Notre équation correspond donc au casparticulier le plus simple de la théorie de Ni : le cas où f(x) = x. On pourraitl'appeler : métrique triviale de Ni.

Remarquons que le coe�cient e−2kr = e

2Φc2 est présent dans plusieurs autres

théories de la gravitation, en particulier dans la première théorie de Nordstöm(1912). Cette théorie a été prise en défaut, et Nordström a publié en 1913 uneseconde théorie, qui est restée célèbre, d'une part parce-qu'elle est considéréecomme la première théorie relativiste de la gravitation vraiment solide, d'autrepart parce-qu'elle a ouvert la voie à la relativité générale : Einstein l'a beaucoupadmirée, et s'en est fortement inspiré.

Les partisans de la théorie d'Einstein estiment que toutes les (nombreuses)autres théories de la gravitation doivent être éliminées, pour des raisons variées.Entre autres choses, ils reprochent à la plupart de ces théories de ne pas respec-ter le principe d'équivalence fort. Or, d'après la conjecture de Schi�, une théoriede la gravitation qui respecte le principe d'équivalence faible doit aussi respecterle principe d'équivalence fort. Mais ceci n'est rien d'autre qu'une conjecture...Je reviendrai plus loin sur ces principes d'équivalence.

Le but n'est pas ici d'opposer ces di�érentes théories : rien ne permet de direque l'une d'elles soit totalement et dé�nitivement juste ! Si j'ai choisi d'étudierla métrique triviale de Ni et ses implications, c'est parce-qu'un raisonnementélémentaire nous conduit directement vers elle. Mon intention n'est pas de dé-fendre la théorie de Ni contre celle d'Einstein : la seule chose qui m'intéressedans la théorie de Ni, c'est sa métrique, qui contient, selon moi, au moins unembryon de vérité ; et nous allons voir jusqu'où elle nous mène, et quelles ques-tions elle soulève.

Etudions maintenant les rapports entre les métriques de Ni et de Schwarz-schild.

Prenons comme base de départ la métrique triviale de Ni au voisinage d'uncorps massif, en coordonnées polaires :

ds2 = c2.e2Φc2 .dt2 − e−

2Φc2 .dr2 − e−

2Φc2 .r2.dθ2.

Serait-il possible de modi�er légèrement cette métrique, en s'inspirant desidées d'Einstein ?

Considérons d'abord un observateur tombant vers le Soleil en ligne droite(sa vitesse étant supposée nulle à l'in�ni). Rappelons-nous l'expérience de pen-sée d'Einstein : un physicien enfermé dans un ascenseur en chute libre se croitimmobile. S'il croise sur son chemin des "observateurs locaux" (immobiles par

37

Page 38: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

rapport au Soleil), il sera en désaccord avec eux sur les mesures de distancesdans la direction radiale (d'après la relativité restreinte), mais il y aura accordsur les distances élémentaires perpendiculaires au vecteur vitesse. La chute librede l'observateur modi�e son évaluation des distances selon la direction radialeseulement ; donc, selon le principe d'équivalence fort, la présence d'une masseponctuelle au centre d'un cercle modi�e le rayon de ce cercle, mais pas son pé-

rimètre. Cette remarque va nous amener à supprimer le coe�cient e−Φc2 devant

r2 dθ2 dans le dernier terme de notre métrique, qui devient donc :

ds2 = c2.e2Φc2 .dt2 − e−

2Φc2 .dr2 − r2.dθ2.

Considérons maintenant la seconde expérience de pensée d'Einstein : le phy-sicien se trouve maintenant sur la plate-forme tournante, à la distance r ducentre O ; il estime que la force centrifuge qu'il subit est une force gravitation-nelle. La vitesse est : v = rω (où ω désigne la vitesse angulaire) ; si on désigne parΦ la di�érence de potentiel entre P et O, c'est-à-dire le travail de la force centri-

fuge entre P et O, on a : Φ = − r2ω2

2 ; le coe�cient de dilatation du temps, calculé

selon la relativité restreinte, est donc :√

1− v2

c2 =√

1− r2ω2

c2 =√

1 + 2Φc2 . Ce

physicien va estimer que cette distorsion du temps est due au champ gravita-

tionnel Φ ; il va donc nous suggèrer de modi�er notre modèle, en remplaçant eΦc2

par√

1 + 2Φc2 dans notre métrique ; le coe�cient e

2Φc2 devient 1 + 2Φ

c2 , et e− 2Φ

c2

devient 11+ 2Φ

c2

.

Après avoir fait ces deux petites manipulations, nous obtenons la métriquesuivante :

ds2 =

(1 +

c2

).c2.dt2 − 1

1 + 2Φc2

.dr2 − r2.dθ2

ou, si on préfère :

ds2 =

(1− 2GM

rc2

).c2.dt2 − 1

1− 2GMrc2

.dr2 − r2.dθ2.

C'est exactement la métrique de Schwarzschild au voisinage d'un corps mas-sif.

Nous pouvons aussi réécrire cette métrique en imaginant un repère en chute

libre radiale, à la vitesse v =√

2GMr (vitesse d'évasion évaluée localement). Ceci

signi�e que 1− v2

c2 = 1− 2GMrc2 .

Si nous notons dlt = r2.dθ2 une longueur in�nitésimale "tangentielle", c'est-à-dire perpendiculaire à la direction de la chute (qui est verticale), la métriques'écrit :

ds2 =

(1− 2GM

rc2

).c2.dt2 − 1

1− 2GMrc2

.dr2 − dl2t .

38

Page 39: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Quant on passe du repère local immobile au repère local en chute libre, lesmesures in�nitésimales dt, dr et dlt se transforment en dt′, dr′ et dl′t. D'aprèsla relativité restreinte :

dt′ =√

1− v2

c2 .dt =√

1− 2GMrc2 .dt ;

dr′ = dr√1− v2

c2

= dr√1− 2GM

rc2

;

dl′t = dlt.

On a donc : dt′2 =(1− 2GM

rc2

)dt2, dr′2 = 1

1− 2GMrc2

dr2 et dl′2t = dl2t ; par

conséquent, la métrique peut s'écrire ainsi :

ds2 = c2.dt′2 − dr′2 − dl′2t .

Attention : le raisonnement que nous venons de faire ici est en contradictionavec celui que nous avions fait pour la métrique de Ni, puisqu'ici nous avons sup-posé que le point de vue local et le point de vue distant di�èrent, conformémentaux formules de la relativité restreinte, par l'introduction d'une vitesse virtuelleégale à la vitesse d'évasion, et non par la di�érence de potentiel gravitationnel ;dans l'introduction de la métrique de Ni, nous avions supposé au contraire quela di�érence des points de vue était due uniquement à la di�érence de poten-tiel. La métrique de Ni suppose une réalité physique qui justi�e les distorsionsobservées, tandis que dans la métrique de Schwarzschild elles sont justi�ées parla géométrie seule. La relativité générale prépare ainsi l'élimination des notionsde force et de potentiel gravitationnel.

La métrique de Schwarzschild se transforme (localement) en métrique deMinkowski (métrique euclidienne relativiste) par simple changement de repère(passage de l'observateur local immobile à l'observateur en chute libre). Cecisigni�e que la courbure locale de l'espace-temps est une illusion qui disparaîtdans un repère convenablement choisi.

Posons-nous maintenant cette question : existe-t-il un changement de va-riables simple permettant de passer de la métrique de Schwarzschild à celle deNi ? Dans ce cas, on pourrait considérer qu'il s'agit de deux expressions d'unemême métrique. Mais non : c'est impossible, pour deux raisons au moins.

Première raison : dans la métrique de Schwarzschild, le coe�cient 11− 2GM

rc2

(qui multiplie dr2, dans le second membre de la métrique) tend vers l'in�niquand r tend vers 2GM

c2 , ce qui fait apparaître une singularité associée à lasphère de Schwarzschild ; cette singularité n'existe pas dans la métrique de Ni,

puisque le coe�cient correspondant, e−2GMrc2 , ne diverge pas.

Seconde raison : appelons r1 la distance radiale qui intervient dans la mé-trique de Schwarzschild, et r2 celle qui intervient dans la métrique de Ni ; en

39

Page 40: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

identi�ant les derniers termes des deux métriques, nous obtenons :

r21 dθ

2 = e2kr2 r2

2 dθ2, donc : r1 = e

kr2 r2.

Si nous faisons tendre r2 vers l'in�ni, r1 tend aussi vers l'in�ni : jusqu'ici, riende plus normal. Mais si, maintenant, nous faisons tendre r2 vers 0, alors r1 netend pas vers 0, mais, une fois encore, vers l'in�ni ! Ceci entraîne qu'il est impos-sible d'établir une correspondance bijective entre r1 et r2. Les deux métriquessont fondamentalement incompatibles, du moins pour les valeurs de r prochesde 2GM

c2 , ou inférieures.

Quelle métrique allons-nous choisir ?

Comme nous avons calculé ce coe�cient eΦc2 en utilisant uniquement la loi

de la gravitation universelle de Newton, il apparaît de manière évidente qu'ily a con�it entre cette loi et le principe d'équivalence fort. La loi de Newtonn'ayant jamais (ou pas encore ?) été mise en échec, nous n'avons pas de raisonde l'abandonner ici. De plus, comme nous venons de le voir, la métrique deSchwarzschild fait apparaître des singularités : c'est l'un des reproches majeursqui sont faits à la relativité générale. Evitons donc de nous précipiter dans cettedirection, tant que nous n'aurons pas de vraies raisons de le faire !

Nous n'oublions pas de placer ici un caillou blanc, car nous venons d'entre-voir une passerelle qui pourrait nous ramener vers la métrique de Schwarzschild.

17 Le formalisme post-newtonien paramétrisé

Les théories de la gravitation relativiste peuvent être étudiées et classéesselon les méthodes du "formalisme post-newtonien paramétrisé", qui attribue àchaque théorie des coe�cients α, β, γ, etc.

La métrique que nous avons obtenue peut s'écrire :

ds2 = c2 e2Φc2 dt2−e−

2Φc2 dr2−e−

2Φc2 r2 dθ2 (avec Φ = −GMr = −kc

2

r ), ou encore,en remplaçant c par 1 (selon l'usage des physiciens relativistes) :

ds2 = e2Φ dt2 − e−2Φ dr2 − e−2Φ r2 dθ2.

En développant en série les coe�cients de la métrique, on obtient :

e2Φ = 1 + 2Φ + 2Φ2 + ...

−e−2Φ = −1 + 2Φ− 2Φ2 + ...

Ceci permet de calculer facilement les trois premiers coe�cients post-newtoniensα, β, γ, car, d'après le formalisme post-newtonien paramétrisé, le premier dé-veloppement en série est égal à :

1 + 2αΦ + 2βΦ2 + ...

40

Page 41: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

et le second à :−1 + 2γΦ + ...

La comparaison montre que notre métrique correspond à α = β = γ = 1,ce qui est une condition nécessaire (mais peut-être pas su�sante) pour qu'unethéorie de la gravitation soit viable, compte-tenu de l'ensemble des mesures ef-fectuées à ce jour dans le système solaire. Dans la suite de ce travail, le butpremier sera de montrer que notre métrique permet de retrouver les résultatsessentiels de la gravitation newtonienne et de la relativité générale ; mais noussavons d'avance qu'elle va passer avec succès les principaux tests classiques.

18 Principes d'équivalence

Einstein a cherché à baser la relativité générale sur des principes.

Le premier, qu'on appelle aujourd'hui "principe d'équivalence faible", ditque la masse gravi�que et la masse inerte sont équivalentes. Il a pour consé-quence que, dans un champ gravitationnel donné, tous les corps subissent lamême accélération. Ce principe a toujours été con�rmé, en particulier par lesexpériences extrêmement précises d'Eötvös, de sorte qu'il ne semble pas très rai-sonnable, dans l'état actuel de nos connaissances, de le mettre en doute. Nousavons implicitement admis ce principe, puisque nous avons fait intervenir dans

les deux formules ~Γ = d~wdt =

~Fm (loi fondamentale de la mécanique newtonienne,

relecture relativiste) et ~F = −GmMr2 ~u (loi de la gravitation universelle) la mêmeexpression de la masse m ; c'est ce qui nous a permis d'éliminer la masse, etd'obtenir la formule : ~Γ = d~w

dt = −GMr2 ~u.

De plus, cette masse m correspond à la masse maupertuisienne : m = Ec2 ;

comme E est l'énergie totale du corps en mouvement, on peut dire que nousavons attribué le même rôle gravitationnel à toutes les formes d'énergie. La forceattractive entre deux corps est proportionnelle à l'énergie de chacun d'eux, etnon à leurs masses au repos. D'ailleurs la "masse au repos" d'un corps com-posé (étoile, planète, atome ...) inclut déjà diverses formes d'énergie (cinétique,électromagnétique, etc ...) et ne peut pas être interprétée comme une caractéris-tique absolue de ce corps (comme la charge électrique par exemple) : les massesqui interviennent en mécanique classique sont, en réalité, toujours maupertui-siennes ! C'est la relativité restreinte qui nous enseigne que la masse absolue estun mythe : seules existent les masses maupertuisiennes (relatives), c'est-à-direl'énergie.

Nous avons donc admis implicitement l'équivalence de toutes les formesd'énergie dans l'attraction gravitationnelle : c'est le second principe d'équiva-lence, qu'on appelle parfois le "principe d'équivalence d'Einstein", qui est res-pecté par la relativité générale et par la plupart des théories relativistes de la

41

Page 42: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

gravitation. Mais ce principe ne doit pas être considéré comme un dogme, etdoit pouvoir être remis en question si les faits l'exigent...

Le troisième principe d'équivalence est bien di�érent des deux premiers :c'est le "principe d'équivalence fort". Il dit que l'e�et d'un champ gravitation-nel est équivalent à celui d'une accélération, ou encore, si on préfère, que l'e�etde la gravitation peut être (localement) "e�acé" si on choisit un repère conve-nablement accéléré. Autrement dit, si un laboratoire fermé se trouve dans unascenseur en mouvement ou sur une plate-forme en rotation (pour reprendreles célèbres expériences de pensée d'Einstein), ou encore dans une fusée, aucuneexpérience embarquée ne permettra de prouver que les forces subies ne sont pasgravitationnelles.

Précisons la signi�cation de ce principe d'équivalence fort.

Les physiciens distinguent deux sortes de forces : les unes sont de "vraies"forces au sens physique du terme ; elles mettent en jeu de véritables interac-tions, avec des échanges d'énergie, et ont une réalité objective indépendantede l'observateur. Les autres ne sont que des illusions, qui varient selon l'état demouvement de l'observateur. Dans cette seconde catégorie, citons la force centri-fuge ou la force de Coriolis. Ce sont des forces qu'on peut faire disparaître en seplaçant dans un repère en mouvement convenablement choisi. Selon Einstein, les"forces" gravitationnelles seraient, elles aussi, purement illusoires ; son postulatest qu'il doit être possible de les faire disparaître en jouant sur le choix du repère.

Si ce postulat est exact, alors la gravitation doit être exclue du cercle desforces fondamentales, qui ne comportera plus que trois membres : l'électroma-gnétisme, l'interaction faible et l'interaction forte.

Rappelons que la théorie de l'électromagnétisme est actuellement bien dé-crite grâce à son interprétation quantique : l'électrodynamique quantique. Dansce modèle, c'est l'échange de photons (réels ou virtuels) entre particules chargéesqui est la clé des interactions. Ces échanges ont une réalité physique. Les inter-actions faible et forte peuvent s'interpréter de manière analogue (en remplaçantle photon par d'autres particules : bosons ou gluons). On pourrait imaginer d'in-terpréter également la gravitation par des échanges de particules (les gravitons) ;mais cette direction de recherche est incompatible avec le principe d'équivalencefort.

19 Le pari d'Einstein

Le choix d'Einstein, qui consiste à privilégier le principe d'équivalence fortpar rapport à la loi de Newton, sur la seule base d'expériences de pensée, consti-tue ce que j'appelle "le pari d'Einstein".

42

Page 43: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Les raisons de ce pari sont faciles à comprendre : à l'époque d'Einstein (etprobablement encore aujourd'hui), les données observationnelles étaient insuf-�santes pour conduire de manière directe à une théorie unique et certaine ; unacte de foi était nécessaire pour pallier ce manque. Le choix du principe d'équi-valence fort était précisément l'acte de foi qui devait permettre à Einstein derésoudre de manière totale le problème de la gravité grâce à la virtuosité mathé-matique, en marginalisant le recours à l'observation et à l'expérimentation. Enpariant sur le principe d'équivalence fort, Einstein était parfaitement conscientqu'il tenait l'élément clé qui allait lui permettre de mettre en place sa stratégiede géométrisation de la gravité ; il entrevoyait sans doute déjà les outils mathé-matiques qu'il allait pouvoir utiliser, à commencer par les géodésiques.

Mais notre but est beaucoup plus limité : nous nous contenterons d'unemodeste approche, un simple débroussaillage. Pour atteindre ce but, nous de-vons nous appuyer sur des hypothèses minimales (selon le principe du rasoird'Occam) : nous n'utiliserons pas le principe d'équivalence fort, parce-que nousn'avons pas besoin de cette hypothèse ; nous ne ferons aucun acte de foi, et nouscontinuerons à travailler avec la métrique triviale de Ni, a�n d'étudier jusqu'oùelle peut nous conduire.

Bien entendu, on peut considérer que notre façon de résoudre le paradoxe deSchild est basée, elle aussi, sur un pari. Plus précisément, lorsque nous suppo-sons que le potentiel gravitationnel modi�e les règles de la même manière danstoutes les directions, nous faisons un choix, qui est justi�é par notre parti-prisde simplicité : nous estimons qu'il faut explorer les solutions les plus simplesavant de faire appel à des outils plus sophistiqués. Ce choix est contraire à larelativité générale, comme on vient de le voir. Il est destiné à être testé, puisrévisé si nécessaire.

Faut-il douter du principe d'équivalence fort, qu'Einstein lui-même a quali�éd'"idée la plus heureuse de son existence" ? Plus exactement, il faut attendre,pour l'adopter, d'y être contraint par la nécessité. En attendant, il est clairqu'une étude de la gravitation doit s'appuyer en priorité sur la loi de Newton.Le jour où cette loi sera prise en défaut, le moment sera venu d'en chercherla raison, a�n de la corriger. Jusqu'à preuve du contraire, le seul défaut connude la loi de Newton est de ne pas être compatible avec la relativité restreinte ;mais, comme nous venons de le voir, ce défaut peut être corrigé très simplement.

20 Equations des géodésiques en métrique de Ni

Nous voudrions maintenant tester la cohérence de nos équations avec la no-tion de géodésique, qui est à la base de la relativité générale.

43

Page 44: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Comme nous allons étudier le système solaire, nous exprimons la métriqueen coordonnées polaires ; la distance d'une planète par rapport au Soleil estdésignée par r. Sous forme matricielle, la métrique s'écrit :

(gij) =

c2 e2Φc2 0 0

0 −e−2Φc2 0

0 0 −e−2Φc2 r2

=

c2 e−2kr 0 0

0 −e 2kr 0

0 0 −e 2kr r2

.

On a donc : g11 = c2 e−2kr , g22 = −e 2k

r , g33 = −e 2kr r2 ; d'autre part, pour

i 6= j : gij = 0 (car notre matrice est diagonale).

De plus, on notera : x1 = t, x2 = r, x3 = θ.Attention : les indices placés enhaut ne sont pas des exposants !

Le calcul des géodésiques revient à rechercher les trajectoires qui maximisentle temps propre

∫ds.

Il existe deux méthodes principales pour calculer ces géodésiques : la pre-mière (la plus ancienne) est la méthode des variations ; elle s'inspire directementdu calcul in�nitésimal de Newton et Leibniz, qu'elle utilise d'une manière trèsastucieuse ; elle a été mise au point par Lagrange et Euler. La seconde fait appelà des notions plus abstraites (mais très rigoureuses) du calcul tensoriel, et plusprécisément aux symboles de Christo�el.

Les équations ainsi obtenues peuvent s'écrire (en notation tensorielle) de lamanière suivante :

d

ds

(gik

dxi

ds

)=

1

2

dxi

ds

dxj

ds

∂gij∂xk

.

Dans cette égalité, les indices i, j, k, qu'ils soient en position basse ou haute,peuvent être égaux à 1, 2 ou 3 ; i et j sont des indices muets (ils sous-entendentdes sommations, selon la convention d'Einstein) ; k est le seul véritable indice,ayant la même valeur dans les deux membres ; donc, à elle seule, l'égalité résumeneuf équations, qui expriment les contraintes imposées aux géodésiques. Maisgik s'annule pour i 6= k, et gij s'annule pour i 6= j, donc il reste 3 équations(une pour chaque valeur de k) :

d

ds

(gkk

dxk

ds

)=

1

2

∑i

[(dxi

ds

)2∂gii∂xk

].

44

Page 45: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

1) dds

(g11

dtds

)= 1

2

(dtds

)2 ∂g11

∂t + 12

(drds

)2 ∂g22

∂t + 12

(dθds

)2 ∂g33

∂t ;

2) dds

(g22

drds

)= 1

2

(dtds

)2 ∂g11

∂r + 12

(drds

)2 ∂g22

∂r + 12

(dθds

)2 ∂g33

∂r ;

3) dds

(g33

dθds

)= 1

2

(dtds

)2 ∂g11

∂θ + 12

(drds

)2 ∂g22

∂θ + 12

(dθds

)2 ∂g33

∂θ .

Nous savons que :

g11 = c2 e−2kr , donc : ∂g11

∂t = 0, ∂g11

∂r = 2kc2

r2 e−2kr , ∂g11

∂θ = 0 ;

g22 = −e 2kr , donc : ∂g22

∂t = 0, ∂g22

∂r = 2kr2 e

2kr , ∂g22

∂θ = 0 ;

g33 = −e 2kr r2, donc : ∂g33

∂t = 0, ∂g33

∂r = 2(k − r) e 2kr , ∂g33

∂θ = 0.

Faisons les substitutions dans les équations des géodésiques ; il vient :

1) dds

(c2 e−

2kr

dtds

)= 0 ;

2) dds

(−e 2k

rdrds

)= kc2

r2 e−2kr

(dtds

)2+ k

r2 e2kr

(drds

)2+ (k − r) e 2k

r

(dθds

)2;

3) dds

(−e 2k

r r2 dθds

)= 0.

La première égalité signi�e que la quantité e−2kr

dtds est constante sur la

géodésique. D'un point de vue strictement mathématique, nous pourrions direque c'est un lagrangien. Mais nous l'avons déjà rencontrée précédemment, etnous savons qu'elle exprime une loi physique bien connue : la conservation del'énergie (même si nous ne savons pas exactement de quelle énergie il s'agit :nous aurons l'occasion d'en reparler dans la section sur le modèle relativiste dessystèmes binaires). Elle provient du fait queles dérivées partielles de g11, g22

et g33 par rapport à t sont nulles (champ statique). Attention : cette conditionn'est réalisée que dans un repère immobile par rapport au corps central !

La troisième signi�e que la quantité e2kr r2 dθ

ds est, elle aussi, constante.Nous l'avons déjà rencontrée, elle aussi. Nous pourrions dire que c'est un autrelagrangien. Mais nous voyons bien que cette égalité exprime la conservation dumoment cinétique. Elle provient du fait que les dérivées partielles de g11, g22 etg33 par rapport à θ sont nulles (champ à symétrie sphérique).

La seconde égalité est un peu plus complexe : je choisirai de ne pas l'uti-liser, et de baser tous mes calculs, intégralement, sur les trois équations queje considère comme essentielles : la métrique de l'espace-temps, la conservationde l'énergie et la conservation du moment cinétique. Nous pouvons cependant

45

Page 46: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

l'analyser brièvement ; elle peut s'écrire :

d

ds

(−e 2k

rdr

ds

)=kc2

r2e−

2kr

(dt

ds

)2

+k

r2e

2kr

(dr

ds

)2

+ (k − r)e 2kr

(dθ

ds

)2

;

−e 2krd2r

ds2+

2k

r2e

2kr

(dr

ds

)2

=kc2

r2e−

2kr

(dt

ds

)2

+k

r2e

2kr

(dr

ds

)2

+(k−r)e 2kr

(dθ

ds

)2

;

e2krd2r

ds2= −kc

2

r2e−

2kr

(dt

ds

)2

+k

r2e

2kr

(dr

ds

)2

+ (r − k)e2kr

(dθ

ds

)2

;

d2r

ds2= −kc

2

r2e−

4kr

(dt

ds

)2

+k

r2

(dr

ds

)2

+ (r − k)

(dθ

ds

)2

.

Sur une orbite circulaire (r=constante), on aura : drds = 0 et d2rds2 = 0 ; de plus,

la vitesse sera constante, ce qui signi�e que ds sera proportionnel à dt, le coef-

�cient de proportionnalité étant la constante√

1− v2

c2 . On pourra donc écrire,

pour k << r :

d2r

dt2= −kc

2

r2.e−

4kr + (r − k)

(dθ

dt

)2

= −GMr2

.e−4kr + (r − k)

(dθ

dt

)2

= 0.

Ceci signi�e que le mobile (la planète) subit une accélération centrale (dirigéevers le Soleil) égale à GM

r2 (c'est l'accélération gravitationnelle newtonienne) di-

minuée de la quantité (r − k)(dθdt

)2(qui correspond à peu près à l'accélération

centrifuge de Newton, à un détail près : r est remplacé par r − k).

Voici donc les trois équations que nous avons choisi de privilégier :

1) ds2 = c2 e−2kr dt2 − e 2k

r dr2 − e 2kr r2 dθ2 (équation de la métrique) ;

2) E = Em0c2

= e−2kr

cdtds = constante (conservation de l'énergie) ;

3) µ = µm0c

= e2kr r2 dθ

ds= constante (conservation du moment cinétique).

Nous avions déjà établi ces trois formules avant de parler de géodésiques ;le fait qu'un raisonnement basé uniquement sur les géodésiques nous conduiseprécisément aux mêmes lois de conservation (conservation de l'énergie et conser-vation du moment cinétique) nous conforte dans l'idée que ces lois sont bien lesclés de l'étude du système solaire : la cohérence de ces équations avec la notionde géodésique est parfaite jusqu'ici. Elles serviront de base à la suite de notretravail.

Dans le calcul ci-dessus, il apparaît clairement que l'énergie se conserve uni-quement parce-que le champ est statique : ∂Φ

∂t = 0. Quand le champ ne sera plusstatique, l'énergie du mobile pourra varier. Ceci ne doit pas nous surprendre.

46

Page 47: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Pensons par exemple à l'"e�et catapulte" : lorsqu'on désire envoyer une sondespatiale sur une orbite d'évasion du système solaire, il n'est pas nécessaire delui fournir d'emblée une vitesse égale à la vitesse d'évasion. L'astuce est de luifournir seulement l'énergie convenable pour atteindre une grosse planète commeJupiter. Ensuite, en utilisant le sillage de cette planète, la sonde est propulséesur une orbite d'évasion. Le "sillage" de Jupiter est une région de l'espace où ∂Φ

∂test positif, ce qui permet à la sonde de faire une provision d'énergie. Il n'y a pasde violation du principe de conservation de l'énergie, à condition que l'énergierécupérée par la sonde soit prélevée sur l'énergie de Jupiter.

Rappelons que dans la section "Quelques conséquences" nous avions obtenu :E = Edist

m0c2= chwc e

Φc2 = e

2Φc2 . c dtds ;

p = pdistm0c

= shwc e− Φ

c2 = e−2Φc2 . dlds .

On pourra écrire aussi : E = e−kr .chwc = e−

2.kr . c dtds ;

p = ekr .shwc = e

2.kr . dlds .

La première de ces égalités entraîne que :

c dt

ds= e

kr .ch

w

c.

Notons α l'angle formé par le rayon vecteur (qui joint le Soleil à la planète) ;on a alors :

r.dθ

dt= vdist.sinα

ce qui nous permet d'écrire :

µ = e2kr .r2.

ds= e

2kr .r.

(r.dθ

c.dt

).c.dt

ds= e

2kr .r.

(vdistc.sinα

).e

kr .ch

w

c;

µ = r.(vlocc.sinα

).e

kr .ch

w

c= r.e

kr .sh

w

c.sinα ;

µ = p.r.sinα.

Les équations des géodésiques sont su�santes pour aborder l'étude du sys-tème solaire. Nous avons placé cette étude dans un document séparé :

Etude du système solaire en métrique de Ni.

47

Page 48: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Il est possible aussi, moyennant quelque hypothèses supplémentaires, d'abor-der l'étude des systèmes binaires :

Etude des systèmes binaires en métrique de Ni.

21 Forces et/ou géodésiques ?

Nous allons maintenant reprendre l'étude des géodésiques en métrique de Nidans le cas général (Φ quelconque), en utilisant un repère cartésien, pour faireapparaître plus clairement la place éventuelle de la notion de force.

Sous forme cartésienne, la métrique peut s'écrire (en utilisant les coordon-nées établies par l'observateur distant, et en négligeant la troisième dimensionspatiale) :

ds2 = e2Φc2 c2dt2 − e−

2Φc2 dx2 − e−

2Φc2 dy2.

Attention : cette égalité n'est vraie que dans un repère distant immobile parrapport au corps central ; elle ne se conserve pas lorsqu'on change la vitesse del'observateur, car elle n'est Lorentz-invariante que localement.

Posons : f = e2Φc2 et g = −e−

2Φc2 ; la métrique s'écrit alors alors :

ds2 = f.(cdt)2 + g.dx2 + g.dy2.

De plus :∂f

c∂t=

2

c2e

2Φc2

∂Φ

c∂t,

∂f

∂x=

2

c2e

2Φc2

∂Φ

∂x,

∂f

∂y=

2

c2e

2Φc2

∂Φ

∂y,

∂g

c∂t=

2

c2e−

2Φc2

∂Φ

c∂t,

∂g

∂x=

2

c2e−

2Φc2

∂Φ

∂x,

∂g

∂y=

2

c2e−

2Φc2

∂Φ

∂y.

Nous utilisons ici des dérivées partielles, car Φ, f et g varient en fonction det, x et y.

48

Page 49: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Comme nous avons limité à trois le nombre de variables, nous allons obtenirtrois équations pour les géodésiques :

1) dds

(f. cdtds

)= 1

2

(cdtds

)2 ∂fc∂t + 1

2

(dxds

)2 ∂gc∂t + 1

2

(dyds

)2∂gc∂t ;

2) dds

(g.dxds

)= 1

2

(cdtds

)2 ∂f∂x + 1

2

(dxds

)2 ∂g∂x + 1

2

(dyds

)2∂g∂x ;

3) dds

(g.dyds

)= 1

2

(cdtds

)2 ∂f∂y + 1

2

(dxds

)2 ∂g∂y + 1

2

(dyds

)2∂g∂y .

Dans la première équation, remplaçons f , g et leurs dérivées partielles parleurs expressions en fonction de Φ :

d

ds

(e

2Φc2

cdt

ds

)=

1

c2e

2Φc2

∂Φ

c∂t

(cdt

ds

)2

+1

c2e−

2Φc2

∂Φ

c∂t

(dx

ds

)2

+1

c2e−

2Φc2

∂Φ

c∂t

(dy

ds

)2

.

Par conséquent :

dE

ds=

1

c2∂Φ

c∂t

[e

2Φc2

(cdt

ds

)2

+ e−2Φc2

(dx

ds

)2

+ e−2Φc2

(dy

ds

)2].

Dans le crochet, on a :

e2Φc2

(cdt

ds

)2

+e−2Φc2

(dx

ds

)2

+e−2Φc2

(dy

ds

)2

= e2Φc2

(cdt

ds

)2

+e−2Φc2

(dl

ds

)2

= ...

... = ch2 w

c+ sh2 w

c= ch

2w

c=

1

1− v2loc

c2

+

v2loc

c2

1− v2loc

c2

=1 +

v2loc

c2

1− v2loc

c2

.

L'équation pourra donc s'écrire, par exemple :

dE

ds=∂ Φc2

c∂t

1 +v2loc

c2

1− v2loc

c2

.

Faisons de même dans la seconde équation :

d

ds

(−e−

2Φc2

dx

ds

)=

1

c2e

2Φc2∂Φ

∂x

(cdt

ds

)2

+1

c2e−

2Φc2∂Φ

∂x

(dx

ds

)2

+1

c2e−

2Φc2∂Φ

∂x

(dy

ds

)2

;

−dpxds

=1

c2∂Φ

∂x

[e

2Φc2

(cdt

ds

)2

+ e−2Φc2

(dx

ds

)2

+ e−2Φc2

(dy

ds

)2].

49

Page 50: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Comme précédemment, remplaçons le crochet par1+

v2locc2

1−v2locc2

:

dpxds

= −∂ Φc2

∂x

1 +v2loc

c2

1− v2loc

c2

.

Pour la même raison :dpyds

= −∂ Φc2

∂y

1 +v2loc

c2

1− v2loc

c2

.

Et, si nous rétablissons la troisième dimension spatiale :

dpzds

= −∂ Φc2

∂z

1 +v2loc

c2

1− v2loc

c2

.

A partir d'ici, sauf indication contraire, toutes les quantités sont évaluéespar l'observateur distant, sauf v et w, qui sont évaluées par l'observateur localimmobile.

Multiplions par m0c2 ; nous obtenons (sous forme vectorielle, en notant

vloc = v) :

d

ds

E

c px

c py

c pz

= m0.

1 + v2

c2

1− v2

c2

.

∂Φc∂t

−∂Φ∂x

−∂Φ∂y

−∂Φ∂z

.

On aura reconnu, à gauche, la dérivée du quadrivecteur impulsion-énergiepar rapport au temps propre s.

Dans le membre de droite, on trouve un quadrivecteur qui ressemble au qua-drigradient du potentiel Φ (gradient quadridimensionnel, par rapport aux quatrecoordonnées de Minkowski : ct, x, y, z), mais avec la signature (+,−,−,−) aulieu de (+,+,+,+) : c'est ce que j'appelle le quadrigradient signé. On ne doit pass'étonner de voir apparaître ici un quadrigradient signé : en e�et, nous voyons,dans le membre de gauche de l'égalité, un quadrivecteur impulsion-énergie, quiest contravariant, ce qui signi�e que, dans un changement de repère, il se trans-forme selon la matrice de Lorentz directe ; il est bien connu que le quadrigradientusuel (non signé) est covariant : il se transforme selon la matrice de Lorentzinverse. On peut montrer facilement que quadrigradient signé, contrairementau quadrigradient usuel, est contravariant, comme le quadrivecteur impulsion-énergie. Pour cela, il su�t de composer la matrice de passage du quadrigradient

50

Page 51: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

signé au quadrigradient usuel par la matrice de Lorentz, puis par la matrice depassage du quadrigradient usuel au quadrigradient signé :

1 0 00 −1 00 0 −1

.

chwc shwc 0shwc chwc 0

0 0 1

.

1 0 00 −1 00 0 −1

= ...

...

chwc −shwc 0−shwc chwc 0

0 0 1

.

Comme ds =

√e

2Φc2 c2dt2 − e−

2Φc2 dl2 = e

Φc2 .c.dt.

√1− v2

loc

c2 , on peut écrire :

d

c.dt

E

c px

c py

c pz

= m0.e

Φc2 .

√1− v2

c2.1 + v2

c2

1− v2

c2

∂Φc∂t

−∂Φ∂x

−∂Φ∂y

−∂Φ∂z

;

d

c.dt

E

c px

c py

c pz

= m0.e

Φc2 .ch

w

c.

(1 +

v2

c2

).

∂Φc∂t

−∂Φ∂x

−∂Φ∂y

−∂Φ∂z

;

d

c.dt

E

c px

c py

c pz

=E

c2.

(1 +

v2

c2

).

∂Φc∂t

−∂Φ∂x

−∂Φ∂y

−∂Φ∂z

.

On a donc :dE

c.dt=E

c2.

(1 +

v2

c2

).∂Φ

c∂t, et :

d~p

dt= −E

c2.

(1 +

v2

c2

). ~5 Φ.

Le nabla ~5 désigne ici le gradient tridimensionnel.

51

Page 52: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

En posant m = Ec2 = m0.e

Φc2 .chwc (masse maupertuisienne associée à l'éner-

gie), on obtient :d~p

dt= −m.

(1 +

v2

c2

). ~5 Φ.

Puisque Φ = −G.Mr , les composantes de ~5 Φ sont G.Mr2 . ∂r∂x ,

G.Mr2 . ∂r∂y et

G.Mr2 . ∂r∂z ; on peut donc écrire :

d

dt

px

py

pz

= −G.m.Mr2

.

(1 +

v2

c2

).

∂r∂x

∂r∂y

∂r∂z

.Rappelons-nous l'égalité que nous avions obtenue dans la section "Mise au

point" :d~p

dt=

(1 +

v2

c2

). ~F .

Elle était rigoureusement équivalente à celle que nous venons d'obtenir àl'aide des géodésiques.

La présence du facteur 1+ v2

c2 peut soulever des questions ; on pourrait mêmese demander nous n'avons pas commis tout simplement une erreur de signe. Siles équations des géodésiques s'écrivaient :

d

ds

(gkk

dxk

ds

)= ±1

2

∑i

[(dxi

ds

)2∂gii∂xk

],

le signe étant déterminé par la signature de la métrique, à savoir (+ − −−),alors le crochet que nous avons rencontré dans nos calculs, dans cette section et

la précédente, serait égal à 1, et le facteur 1 + v2

c2 disparaîtrait.

Mais nous ne ferons pas cette manipulation, pour plusieurs raisons.

La première est que l'accélération centrifuge, calculée dans la section précé-dente, changerait de signe et deviendrait centripète, ce qui n'est pas acceptable.

Seconde raison : pour un rayon lumineux (v = c), ce facteur 1+ v2

c2 est égal à2 ; c'est pourquoi la déviation de la lumière sera plus importante qu'en gravita-tion newtonienne, d'un facteur 2, précisément, conformément aux observations.

Troisième raison : sur une orbite elliptique, v augmente quand la planète se

rapproche du Soleil, donc le facteur 1 + v2

c2 également, ce qui fait que l'accéléra-tion centripète va alors augmenter un peu plus qu'en gravitation newtonienne,ce qui va entraîner la précession du périhélie.

52

Page 53: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

En�n, rappelons que nous avons donné dans la section "Mise au point" une

explication sur la signi�cation de ce facteur 1 + v2

c2 .

Nous avions vu que : (1 +

v2

c2

)=dv

dw.

Ce facteur intervient ici parce-que, selon l'interprétation que nous avons choiside présenter, la force agit sur la rapidité et non sur la vitesse. C'est pourquoinous disons qu'il s'agit d'une pseudo-accélération, et non d'une accélération ausens usuel.

Finalement, il n'était pas très judicieux de faire intervenir l'impulsion dansnotre formule ; il serait plus intéressant d'écrire :

~F =

Fx

Fy

Fz

= −G.m.Mr2

.

∂r∂x

∂r∂y

∂r∂z

.Mais on doit se rappeler que, selon la dé�nition que nous avons choisie :

~F = mloc.~Γloc = mloc.d~w

dtloc.

En réalité, cette "force" di�ère des vraies forces, puisque, du point de vuede l'observateur distant immobile par rapport au corps central (le Soleil), elleva modi�er l'impulsion du mobile (la planète) et non son énergie. En e�et, pourcet observateur particulier, l'énergie est constante. On pourrait éventuellementparler de "pseudo-force" : pour l'observateur distant, l'impulsion du mobile (nonl'énergie !) varie exactement comme s'il était soumis à une force. Mais il est aussipermis de dire que c'est une vraie force dont l'e�et est masqué (ou absorbé) parla déformation de l'espace-temps, dont elle est la cause.

22 Tenseur de Ricci en métrique de Ni

En coordonnées sphériques, la métrique triviale de Ni s'écrit :

ds2 = e−2kr .c2.dt2−e 2k

r .dl2 = e−2kr .c2.dt2−e 2k

r .dr2−e 2kr .r2.dθ2−e 2k

r .r2.sin2θ.dφ2.

Nous souhaitons calculer le tenseur de Ricci de cette métrique.

Les calculs étant un peu longs, nous les avons placés dans le document :Métriques de Schwarzschild et de Ni, auquel on purra se reporter.

53

Page 54: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Passons directement à la conclusion.

En coordonnées sphériques, les coordonnées covariantes (respectivement :mixtes, contravariantes) du tenseur de Ricci dans le vide, dans le voisinage d'unpoint matériel, calculées selon la métrique triviale de Ni, s'expriment par lestrois matrices suivantes :

(Rij) =2k2

r4.

0 0 0 00 1 0 00 0 0 00 0 0 0

;

(Rij)

= −2k2

r4.e−

2kr .

0 0 0 00 1 0 00 0 0 00 0 0 0

;

(Rij)

=2k2

r4.e−

4kr .

0 0 0 00 1 0 00 0 0 00 0 0 0

.

Nous remarquons que, sur les 16 composantes de ce tenseur, 15 sont nulles.La seule composante non nulle est celle qui concerne la coordonnée r, et elleseule. Pour cette raison, nous dirons que ce tenseur est radial.

Nous reparlerons de ces résultats dans la section "Interprétation".

23 Tenseur de Ricci en métrique de Schwarzschild

En coordonnées sphériques, la métrique de Schwarzschild s'écrit :

ds2 =

(1− 2k

r

).c2.dt2 − 1

1− 2kr

.dr2 − r2.dθ2 − r2.sin2θ.dφ2.

Nous souhaitons calculer le tenseur de Ricci de cette métrique.

On pourra trouver les calculs dans le document :Métriques de Schwarzschild et de Ni, auquel on purra se reporter.

54

Page 55: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Passons directement à la conclusion.

En coordonnées sphériques, les coordonnées covariantes (respectivement :mixtes, contravariantes) du tenseur de Ricci dans le vide, dans le voisinage d'unpoint matériel, calculées selon la métrique triviale de Schwarzschild, s'exprimentpar la matrice suivante :

(Rij) =(Rij)

=(Rij)

=

0 0 0 00 0 0 00 0 0 00 0 0 0

.

Toutes les composantes sont nulles !

24 Courbure intrinsèque

Nous allons faire ici un petit rappel de géométrie, concernant la notion decourbure. Imaginons d'abord une surface plane (variété de dimension deux, eu-clidienne), représentée par une feuille de papier non courbée. Si nous enroulonscette feuille de manière à former un cylindre, sa courbure intrinsèque ne changepas : elle est toujours nulle. Pour un observateur imaginaire vivant dans cetespace à deux dimensions, la géométrie euclidienne reste valable. Par exemple,si un triangle rectangle a été tracé sur la feuille, les longueurs de ses côtés sontinchangées, et le théorème de Pythagore reste valable ; si c'est un cercle qui a ététracé, son rayon et son périmètre sont inchangés, et le quotient est toujours égalà 2.π. Si nous enroulons maintenant notre feuille de manière à former un cône,tout ce qui vient d'être dit est encore localement vrai ; mais on voit apparaîtreun point singulier, qui est le sommet du cône. Ces surfaces (le cylindre et le cône)ont une courbure intrinsèque nulle en tout point (sauf au sommet du cône, oùelle est in�nie). Dans les deux cas, le tenseur de Ricci est identiquement nul,donc le scalaire de Ricci est R = 0. Si nous considérons maintenant une surfacesphérique (qu'il est d'ailleurs impossible d'obtenir en enroulant une feuille depapier), il est clair que sa géométrie est profondément di�érente. Le théorémede Pythagore n'y est plus valable (il est même possible de construire un tri-angle à trois angles droits !) et le périmètre d'un cercle n'est plus égal à 2.π.r.La courbure intrinsèque de la sphère est identique en tout point, et non nulle.Cette courbure est évaluée grâce au scalaire de Ricci R, qui véri�e : |R| = 2

r2c,

où rc est le rayon de la sphère.

Dans le cas de la métrique de Schwarzschild, on peut noter une analogieavec le cône, mais en quatre dimensions spatio-temporelles. Nous avons démon-tré plus haut que la courbure intrinsèque de l'espace-temps est nulle en tout

55

Page 56: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

point (en excluant bien sûr la singularité centrale). Mais on pouvait s'en douter.E�ectivement, nous avons vu, dans la section sur les métriques de Schwarzschildet de Ni, que la première a une particularité : elle est localement équivalente àla métrique de Minkowski pour un observateur en chute libre dont la vitesse estégale à la vitesse d'évasion. Comme la métrique de Minkowski est euclidienne,il est clair que la courbure intrinsèque est nulle pour cet observateur en chutelibre, donc aussi pour tout autre observateur.

25 Interprétation

La métrique de Schwarzschild a donc une particularité extraordinaire : dansl'espace (supposé totalement vide) qui entoure un corps matériel ponctuel isolé,supposé immobile, le tenseur de Ricci Rij , à 16 composantes, est identiquementnul. Le scalaire de Ricci R est donc nul aussi. Cette propriété n'est pas liée à unrepère particulier : en e�et, quand on change de repère, le tenseur se transformeselon les règles de l'algébre linéaire ; ceci signi�e que, si tous les coe�cients dutenseur sont nuls dans un repère, alors ils sont nuls aussi dans tous les autresrepères.

Pour Einstein, cette propriété est fondamentale ; toute la relativité généraleest bâtie sur elle. Une autre remarque nécessaire (et très subtile) est la profondeparenté entre le tenseur de Ricci et le tenseur d'impulsion-énergie Tij , qui décritla répartition et les mouvements de la matière dans un volume in�nitésimal (etqui est construit sur le modèle du tenseur de l'électromagnétisme, qui résume lestravaux de Maxwell, relativistes avant la lettre). Dans le vide, c'est-à-dire dansun volume in�nitésimal où la densité ρ de matière est nulle, les deux tenseursRij et Tij sont identiquement nuls ; mais pour ρ 6= 0, alors les deux tenseurs sontnon nuls. Dans ce cas, les deux tenseurs ne peuvent pas être égaux, car Tij a unedivergence nulle, ce qui n'est pas le cas deRij . Une idée très astucieuse d'Einsteinest alors de fabriquer un tenseur à divergence nulle, s'annulant, comme Rij ,dans le vide ; c'est le tenseur d'Einstein : Gij = Rij − 1

2 .gij .R. Il est clair quela métrique de Schwarzschild annule ce tenseur, puisque dans ce cas on a àla fois Rij = 0 et R = 0, donc Gij = Rij − 1

2 .gij .R = 0. Mais la métriquede Schwarzschild décrit le champ dans le voisinage d'un corps non accéléréisolé dans l'espace. Aura-t-on toujours Gij = 0, dans le vide, dans le voisinaged'un système binaire, par exemple ? C'est l'un des postulats d'Einstein. Mais cepostulat est peu utile, si on ne lui adjoint pas un second postulat beaucoup plusfort : dans une région de l'espace où la densité de matière est non nulle (Tij 6= 0),Gij est proportionnel à Tij . Le coe�cient de proportionnalité se détermine alorspar cohérence avec la gravitation de Newton (limite des champs faibles). Ce quiconduit à la formule fondamentale de la relativité générale :

Gij = Rij −1

2gijR =

8πG

c4.Tij .

56

Page 57: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

La virtuosité mathématique d'Einstein ne peut que susciter l'admiration,d'autant plus que les outils tensoriels utilisés n'étaient encore connus que d'unpetit nombre de mathématiciens à cette époque. Sa théorie a la particularité re-marquable d'être "totalement covariante". Nous avons déjà parlé de covariance,mais ici ce mot est employé dans un sens bien di�érent : il signi�e que, si laformule ci-dessus est vraie dans un repère, alors elle est vraie aussi dans toutautre repère. Elle est totalement indépendante de l'observateur.

Les théoriciens qui ont comparé, analysé et discuté les di�érentes théoriesde la gravitation remarquent que la relativité générale est la seule qui soit par-faitement covariante ; ils estiment souvent que c'est ce qui fait sa supérioritépar rapport aux autres théories. Mais d'autres théoriciens, qui cherchent à in-terpréter la gravitation en termes quantiques, dans le but de l'intégrer dansle cercle des forces fondamentales, constatent que cette covariance totale faitde la relativité générale une théorie désincarnée, qui refuse d'entrer dans unethéorie uni�ée des forces fondamentales. Certains vont même jusqu'à dire que lagravitation n'est pas une force. Paradoxalement, Einstein lui-même a passé lesdernières années de sa vie à rechercher cette uni�cation, sans succès : c'est safaçon d'aborder la gravitation qui est incompatible avec l'approche quantique.La covariance totale de la relativité générale est-elle son point fort ? Ou bienson point faible ?

Einstein était parfaitement conscient d'une chose : il n'a jamais prouvé quesa formule soit vraie du point de vue de la physique ; il a seulement cherché (ettrouvé) une solution mathématique esthétique à un problème qu'il avait posé àsa façon.

Ce qui peut sembler étonnant dans la formule fondamentale de la relativitégénérale, c'est que le membre de gauche est une entité purement mathématique,issue des travaux de Gauss, Riemann, Christo�el, Ricci... Le membre de droite,au contraire, est issu de la physique, puisqu'il représente l'impulsion-énergie,c'est-à-dire la matière. La relativité restreinte nous a appris que la masse estde l'impulsion-énergie (ce que personne, aujourd'hui, ne conteste) ; la relativitégénérale nous dit que l'impulsion-énergie n'est rien d'autre que de la géométrie.Cette marginalisation de la notion de matière, au pro�t de la géométrie, faitl'originalité de la relativité générale ; en même temps, elle rend très di�cile l'in-tégration de cette théorie dans le cercle des théories physiques modernes, dontle noyau est la mécanique quantique.

Pour comparaison, examinons le scalaire de Ricci R (qui est invariant par

changement de repère), obtenu selon la métrique de Ni ; il est égal à 2k2

r4 .e− 2k

r .Mais peut-on estimer qu'il est "presque" nul ? Pour répondre, utilisons une gros-sière analogie : lorsqu'on étudie la courbure d'une surface sphérique de rayon rc,avec les outils tensoriels de la géométrie de Riemann, on trouve que |R| = 2

r2c;

donc rc =√

2|R| . Appliquons cette idée à la gravitation, et appelons "rayon

57

Page 58: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

de courbure" la quantité rc =√

2|R| (quantité qui serait in�nie dans le vide,

en relativité générale, puisque, selon cette théorie : R = 0 dans le vide). Pour

R = 2k2

r4 .e− 2k

r , on a donc rc = r2

k .ekr ≈ r2

k . Evaluons ce rayon de courbure dansdeux cas :- considérons d'abord le champ gravitationnel du Soleil (k ≈ 1, 5.103m) dansle voisinage de la Terre (r ≈ 1, 5.1011m) ; le rayon de courbure, calculé selon

la formule ci-dessus, est : rc = r2

k ≈1,52.1022

1,5.103 ≈ 1, 5.1019m, soit 150 années-lumière ; comme les distances mises en jeu dans les calculs sur le système solairesont négligeables par rapport à 150 AL, on peut raisonnablement travailler avecR = 0 : la métrique de Ni et celle de Schwarzschild sont alors équivalentes ;- plaçons-nous maintenant à la surface d'une étoile à neutrons avec, typique-

ment, k ≈ 2.103m et r ≈ 1, 4.104m ; on a alors : rc ≈ 1,42.108

2.103 ≈ 105m ≈ 100km.Le rayon de l'étoile équivaut à 14% de rc, ce qui est loin d'être négligeable.On comprend donc pourquoi il est crucial d'étudier les phénomènes qui se dé-roulent très près de la surface des étoiles à neutrons, ou, mieux, des trous noirs :ils devraient permettre de déterminer si R est, ou n'est pas, égal à 0 dans le vide.

Cette métrique de Ni est intéressante, dans la mesure où elle est le prototyped'une famille de théories de la gravitation : les théories dans lesquelles cohabitentun potentiel scalaire ayant une signi�cation physique, et une courbure, déter-minée par ce potentiel, exprimée à l'aide d'un tenseur, ayant une signi�cationgéométrique (ou spatio-temporelle). Nous appellons "théories tenseur-scalaire"toutes les théories de la gravitation ayant ces deux caractéristiques. Ce nomest parfois réservé à des théories qui font intervenir, en plus, des paramètresajustables, ce qui n'est pas le cas ici. Rappelons aussi que ce potentiel n'estpas nécessairement une grandeur physique fondamentale : il peut s'agir d'unemanifestation (parmi d'autres) d'une entité plus complexe, par exemple d'unepseudo-accélération quadrivectorielle, comme nous avons été amené à le suppo-ser.

La di�érence fondamentale entre la relativité générale et les théories tenseur-scalaire peut s'exprimer ainsi : en relativité générale, une quantité in�nitésimalede matière située en un point agit sur la courbure spatio-temporelle en ce point,et seulement en ce point. Partout ailleurs, dans le vide, la courbure s'équilibreselon sa loi propre (tenseur de Ricci nul). Dans les théories tenseur-scalaire (enmétrique de Ni par exemple), cette quantité in�nitésimale de matière va pro-duire une modi�cation physique (un potentiel, ou un champ quadrivectoriel)dans l'espace qui l'entoure, et ce champ va, à son tour, agir sur la courburespatio-temporelle. Le champ peut être conçu comme une propriété physiquetransmise par un messager de nature inconnue, que nous appellerons "graviton",qui va agir sur la courbure à distance de l'émetteur. Le �ux de gravitons émispar une particule quelconque est décrit par une loi en 1

r2 ; ces �ux se composentvectoriellement, et leur "travail" sur un parcours donné peut être interprété entermes de di�érence de potentiel gravitationnel. Ce sont ces gravitons qui com-mandent le potentiel, donc qui calibrent les règles et les horloges locales, dont

58

Page 59: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

les distorsions dé�nissent la courbure spatio-temporelle. Ces gravitons sont leschefs d'orchestre de l'espace et du temps.

La particularité de la relativité générale est d'éliminer totalement, à la fois,non seulement le graviton, mais aussi le potentiel gravitationnel ; ceci est pos-sible à condition que le tenseur de Ricci soit identiquement nul dans le vide. Il enrésulte que la relativité générale est à la fois la plus simple (conceptuellement)de toutes les théories de la gravitation, du point de vue des mathématiciens, etla plus di�cile à comprendre, du point de vue des physiciens : c'est une sorte debulle parfaite et purement géométrique, d'où la vraie physique semble avoir étéexclue... Nous retrouvons ici le pari d'Einstein, qu'on peut formuler ainsi : "dansune situation d'équilibre (champ constant), le tenseur de Ricci (donc égalementson proche cousin, le tenseur d'Einstein) doit être identiquement nul dans levide ; dans une situation de déséquilibre (champ variable), le tenseur de Riccine peut pas être identiquement nul, mais le tenseur d'Einstein l'est toujours".Mais le tenseur de Ricci était un lien entre le champ gravitationnel et la phy-sique des physiciens. Si on coupe ce lien, la bulle s'envole...

Actuellement, on est en droit de penser que toutes les théories de la gravita-tion sont des approximations, sauf une : la relativité générale, qui représenteraitLa Perfection. Mais on peut penser aussi que la relativité générale est une idéa-lisation, donc une simpli�cation de la réalité, certainement excellente pour leschamps faibles, mais pas nécessairement pour les champs forts, et qu'il existepeut-être un champ gravitationnel ayant des propriétés physiques bien réelles, etnon illusoires, dont l'étude reste à faire avant de construire une théorie dé�nitive.

26 Théorèmes d'unicité

Dans le document : Métriques de Schwarzschild et de Ni, nous étudions demanière systématique l'ensemble des métriques à symétrie sphérique, censéesêtre engendrées par l'action gravitationnelle d'un point matériel. La plupart desdémonstrations étant un peu longues, nous nous contenterons d'indiquer ici lesdé�nitions et les deux principaux théorèmes établis dans cette étude.

Les métriques étudiées sont toutes de la forme :

ds2 = α.c2.dt2 − β.dr2 − γ.(r2.dθ2 + r2.sin2 θ.dφ2

).

Elles sont dites symétriques si β = 1α , isotropes si γ = β, radiales si γ = 1.

Le premier théorème concerne les métriques symétriques et radiales, c'est-à-dire les métriques de la forme :

ds2 = α.c2.dt2 − 1

α.dr2 −

(r2.dθ2 + r2.sin2 θ.dφ2

).

59

Page 60: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Théorème 1 La seule métrique symétrique et radiale ayant un tenseur de Ricci

identiquement nul est la métrique de Schwarzschild.

Le second théorème concerne les métriques symétriques et isotropes, c'est-à-dire les métriques de la forme :

ds2 = α.c2.dt2 − 1

α.(dr2 + r2.dθ2 + r2.sin2 θ.dφ2

).

Théorème 2 La seule métrique symétrique et isotrope ayant un tenseur de

Ricci radial est la métrique triviale de Ni.

Par "tenseur de Ricci radial", nous désignons un tenseur de Ricci dont 15composantes sont nulles, la seule composante non nulle étant la composante ra-diale, de rang (2, 2), c'est-à-dire celle qui concerne uniquement la variable r.

27 Pseudo-accélération

Quantitativement, la di�érence entre les métriques de Ni et de Schwarzschildn'est sensible que dans le domaine des champs forts ; mais qualitativement, elleest très profonde. La métrique de Ni suppose qu'en chaque point, le tenseur deRicci subit l'in�uence d'une quantité physique, qui doit donc être inscrite dansl'information locale. De plus, sur les seize coe�cients du tenseur, un seul esta�ecté par cette information, ce qui signi�e que celle-ci est orientée : son actionse manifeste uniquement selon l'axe ~r. Cette quantité physique orientée doit êtreun quadrivecteur lorentzien : si ce n'était pas le cas, notre gravitation relativisten'aurait aucune chance d'être relativiste ! Dans notre calcul, ce quadrivecteurse manifeste par une composante unique du tenseur (la composante spatialeradiale), mais ceci vient du fait que nous avons travaillé dans un repère "immo-bile" ; tout changement de repère fait réapparaître les composantes cachées. Cequadrivecteur joue le rôle d'une pseudo-accélération ; cette pseudo-accélérationétant une modi�cation des rapports que les particules établissent entre elles etavec l'espace-temps. C'est cette modi�cation que nous pouvons formaliser entermes de courbure.

Par souci de simplicité, dé�nissons la pseudo-accélération à l'aide de la ma-trice (Rij) covariante. Le seul coe�cient non nul du tenseur de cette matrice

est : |R22| = 2k2

r4 . Nous pouvons alors dé�nir un rayon de courbure gaussien

contravariant : rc =√

2|R22| = r2

k . La courbure covariante pourra être dé�nie

comme l'inverse de ce rayon de courbure au sens de Gauss : 1rc

= kr2 . Cette

courbure (orientée) dé�nit la pseudo-accélération quadrivectorielle.

La pseudo-accélération ressemble beaucoup, mathématiquement, à l'accélé-ration newtonienne. Mais elle n'agit pas de la même manière : elle ne régit pasdirectement l'accélération au sens classique (c'est-à-dire la dérivée du vecteur

60

Page 61: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

vitesse par rapport au temps), mais elle a un rapport avec la courbure au sensde Gauss (courbure qui, accessoirement, modi�e la vitesse des mobiles).

28 Le potentiel Φ dans le cadre newtonien

Dans la théorie de Newton, le potentiel Φ produit par un corps de masse M(supposé immobile au point origine) est donné par :

Φ = −GMr

= − GM√x2 + y2 + z2

.

Pour un autre observateur se déplaçant à la vitesse v par rapport au premier,selon l'axe des x, la formule devient (toujours selon la conception de Newton) :

Φ = − GM√x′2 + y′2 + z′2

.

Faisons intervenir ici la relativité restreinte ; en utilisant la transformationde Lorentz, nous pouvons démontrer que :

∂2Φ

c2∂t2− ∂2Φ

∂x2− ∂2Φ

∂y2− ∂2Φ

∂z2= 0,

2Φ = 0.

Nous avons placé la démonstration dans le document :Métriques de Schwarzschild et de Ni, auquel on purra se reporter.

L'opérateur 2 = ∂2

c2∂t2−∂2

∂x2− ∂2

∂y2− ∂2

∂z2 est le d'alembertien. Il est étroitement

relié au laplacien : ∆ = ∂2

∂x2 + ∂2

∂y2 + ∂2

∂z2 , puisque :

2 =∂2

c2∂t2−∆.

Si le potentiel est constant, on a ∂2Φc2∂t2 = 0 ; l'équation 2Φ = 0 entraîne alors

∆Φ = 0. Cette formule signi�e que la divergence du gradient est nulle. CommeΦ = −GMr , le gradient est un vecteur radial de module GM

r2 . Si on calcule le �uxf de ce vecteur à travers la surface sphérique de rayon r, on obtient :

f = 4.π.r2.GM

r2= 4.π.G.M.

L'opérateur 2 étant linéaire, la conclusion que nous avons tirée pour uncorps unique (mobile ou non par rapport à l'observateur) s'étend à un nombrequelconque de corps en mouvement.

61

Page 62: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

On peut montrer (théorème de Gauss) que ce �ux ne dépend pas de la formede la surface fermée (sphérique ou non) : il ne dépend que de la masseM incluseà l'intérieur de celle-ci. D'où on déduit la loi de Poisson :

∆Φ = 4.π.G.ρ

où ρ est la densité de matière (masse/volume) au point considéré.

Il s'ensuit que les formules ∆Φ = 0 et 2Φ = 0 ne sont valables que dans levide.

Le fait que le d'alembertien de Φ soit nul dans le vide est d'une grande im-portance. D'une part, l'égalité 2Φ = 0 est interprétée comme une équation depropagation du champ à la vitesse de la lumière dans un contexte relativiste.D'autre part, il est très surprenant de voir surgir une équation typiquementrelativiste dans la théorie de Newton. On peut reprocher à la gravitation new-tonienne de ne pas être relativiste ; mais elle est compatible avec la relativitérestreinte, au moins sur ce point !

29 Le potentiel Φ en métrique de Ni

Nous allons reprendre l'étude du potentiel Φ = −GMr = −k.c2

r créé par unemasse M ponctuelle immobile, mais, cette fois-ci, nous ne nous plaçons plusdans l'espace euclidien de Newton, ni même dans l'espace-temps plat de Min-kowski, mais dans un espace courbé selon la métrique triviale de Ni. Pour lemoment, nous ne faisons pas intervenir la variable temps.

Nous allons utiliser les notations tensorielles.

Le gradient du potentiel scalaire Φ est un vecteur radial que nous noteronsBi, où l'indice i, placé en bas, est un indice covariant. E�ectivement, le gradientd'un champ scalaire est toujours un vecteur covariant. Les coordonnées de ce

vecteur en coordonnées sphériques sont : B1 = 0, B2 = GMr2 = k.c2

r2 , B3 = 0,B4 = 0.

Nous voulons calculer la divergence S du gradient, en utilisant la formule :

S =∂B2

∂x2+ Γii2B

2.

Rappelons qu'en coordonnées sphériques la notation x2 désigne la distanceradiale r.

62

Page 63: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Le rôle du symbole de Christo�el Γii2 est de rendre la dérivée covariante.Attention : la sommation sur i est sous-entendue ; on peut écrire, si on préfère :

S =∂B2

∂x2+(Γ1

12 + Γ222 + Γ3

32 + Γ442

).B2.

Dans cette formule, c'est B2, et non B2, qui intervient ; l'indice placé enhaut n'est pas un exposant, mais un indice contravariant. Nous devons donccommencer par rendre le gradient contravariant en utilisant la technique adaptéepour "remonter l'indice" :

B2 = |g22|.B2 =GM

r2.e−2 k

r =k.c2

r2.e−2 k

r .

Dans la section sur le tenseur de Ricci en métrique isotrope, nous avonscalculé les symboles de Christo�el :

Γ112 =

α̇

2.α, Γ2

22 =β̇

2.β, Γ3

32 =β̇

2.β+

1

r, Γ4

42 =β̇

2.β+

1

r.

La métrique de Ni est non seulement isotrope, mais aussi symétrique, ce quisigni�e que α.β = 1 ; par conséquent : α.β̇ + α̇.β = 0, donc :

β̇

β= − α̇

α.

La métrique de Ni est aussi pré-relativiste : α = e−2kr , donc :

α̇ =2k

r2.e−

2kr =

2k

r2.α,

α̇

α=

2k

r2,β̇

β= −2k

r2.

En faisant les substitutions dans les expressions des symboles de Christo�el,nous obtenons :

Γ112 =

k

r2, Γ2

22 = − k

r2, Γ3

32 = − k

r2+

1

r, Γ4

42 = − k

r2+

1

r;

Γ112 + Γ2

22 + Γ332 + Γ4

42 = −2k

r2+

2

r;

(Γ1

12 + Γ222 + Γ3

32 + Γ442

).B2 =

(−2k

r2+

2

r

).

(k.c2

r2

).e−2 k

r =

(−2k2.c2

r4+

2.k.c2

r3

).e−2 k

r .

Calculons encore ∂B2

∂x2 = ∂B2

∂r , sachant que B2 = k.c2

r2 .e−2 k

r :

∂B2

∂r= −2k.c2

r3.e−2 k

r +k.c2

r2.2k

r2.e−2 k

r =

(2k2.c2

r4− 2.k.c2

r3

).e−2 k

r .

Nous voyons donc que :

S =∂B2

∂x2+(Γ1

12 + Γ222 + Γ3

32 + Γ442

).B2 = 0.

63

Page 64: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Nous venons de calculer la divergence du gradient du potentiel, c'est-à-direson laplacien :

∆Φ = 0.

Comme en métrique euclidienne (ou de Minkowski), on doit rappeler que celaplacien s'annule seulement dans le vide ; en présence de matière, c'est la loide Poisson qui s'applique. De plus, si nous réintroduisons la variable temps (enattribuant à l'observateur une rapidité non nulle par rapport au corps de masseM , et en utilisant la transformation de Lorentz : voir calcul dans la sectionprécédente) nous retrouvons la formule du d'alembertien :

2Φ = 0.

Evaluons encore le �ux du vecteur gradient à travers la sphère de rayon r.

Nous utilisons la version contravariante du gradient : B2 = k.c2

r2 .e−2 k

r . Pourévaluer l'aire de la sphère, nous utilisons le coe�cient de dilatation de l'espaceselon les directions tangentes à la sphère, soit :

√γ = e

kr , que nous trouvons

dans la matrice covariante de la métrique. En e�et, on peut représenter chaqueélément de surface par un vecteur normal à cette surface, et le �ux s'obtienten faisant le produit scalaire de ce vecteur avec le gradient ; mais pour que ceproduit scalaire soit invariant par changement de repère, il est indispensable quel'un des vecteurs soit covariant et l'autre contravariant. L'aire que nous utilisonsest : 4.π.r2.e2 k

r , et le �ux est donc :

f = 4.π.r2.e2 kr .k.c2

r2.e−2 k

r = 4.π.k.c2 = 4.π.G.M.

Nous voyons donc que les propriétés du gradient newtonien supportent sansencombre le passage d'un espace-temps plat à un espace-temps courbé selon lamétrique de Ni.

Existe-t-il d'autres métriques qui conservent ces propriétés ? Pour le savoir,reprenons le dernier raisonnement concernant le �ux de Bi. L'aire de la sphèreest 4.π.r2.γ, et la norme du vecteur gradient (version contravariante) est : B2 =|g22|.GMr2 , donc :

f = 4.π.G.M.γ.|g22|.

Comme |g22| = 1|g22| = 1

β , on obtient :

f = 4.π.G.M.γ

β.

On voit donc qu'il su�t que le quotient γβ soit constant (indépendant de r)

pour que le �ux f soit constant aussi, donc pour que la divergence du gradient(autrement dit son laplacien) s'annule. Les métriques isotropes ( γβ = 1) rem-plissent cette condition.

64

Page 65: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

30 Le potentiel Φ en métrique de Schwarzschild

Nous allons reprendre l'étude du potentiel Φ = −GMr = −k.c2

r créé par unemasse M ponctuelle immobile, mais, cette fois-ci, dans un espace courbé selonla métrique de Schwarzschild.

Le gradient du potentiel scalaire Φ est toujours le vecteur covariant Bi, de

coordonnées : B1 = 0, B2 = GMr2 = k.c2

r2 , B3 = 0, B4 = 0.

Nous calculons la version contravariante du gradient :

B2 = |g22|.B2 =

(1− 2k

r

).GM

r2=

(1− 2k

r

).k.c2

r2.

Dans la section sur le tenseur de Ricci en métrique radiale, nous avons calculéles symboles de Christo�el :

Γ112 =

α̇

2.α, Γ2

22 =β̇

2.β, Γ3

32 =1

r, Γ4

42 =1

r.

La métrique de Schwarzschild est non seulement radiale, mais aussi symé-trique, ce qui signi�e que α.β = 1 ; par conséquent : α.β̇ + α̇.β = 0, donc :

β̇

β= − α̇

α.

On a donc :

Γ112 + Γ2

22 + Γ332 + Γ4

42 =α̇

2.α+

β̇

2.β+

1

r+

1

r=

2

r,

ce qui entraîne :(Γ1

12 + Γ222 + Γ3

32 + Γ442

).B2 =

2

r.

(1− 2k

r

).k.c2

r2=

2k.c2

r3− 4k2.c2

r4.

Calculons encore ∂B2

∂x2 = ∂B2

∂r , sachant que B2 =(1− 2k

r

).k.c

2

r2 :

∂B2

∂r=

2k

r2.k.c2

r2−(

1− 2k

r

).2k.c2

r3=

2k2.c2

r4− 2k.c2

r3+

4k2.c2

r4;

∂B2

∂r=

6k2.c2

r4− 2k.c2

r3.

Nous voyons donc que :

S =∂B2

∂x2+(Γ1

12 + Γ222 + Γ3

32 + Γ442

).B2 =

2k.c2

r3− 4k2.c2

r4+

6k2.c2

r4− 2k.c2

r3;

S =2k2.c2

r4.

65

Page 66: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Il en résulte que la divergence du gradient ne s'annule pas : ∆Φ 6= 0 et2Φ 6= 0 en métrique de Schwarzschild.

On pouvait s'attendre à ce résultat, puisque nous avons vu précédemmentque seules les métriques isotropes annulent la divergence du gradient dans levide ; or la métrique de Schwarzschild n'est pas isotrope (car γ 6= β), mais ra-diale (car γ = 1).

Véri�ons-le encore en calculant le �ux f : dans cette métrique, l'aire de lasphère de rayon r est 4.π.r2.γ = 4.π.r2, et le module du gradient du potentiel

(version contravariante) est : B2 =(1− 2k

r

).k.c

2

r2 =(1− 2k

r

).G.Mr2 , donc :

f = 4.π.r2.

(1− 2k

r

).G.M

r2= 4.π.G.M.

(1− 2k

r

).

Ce fux varie avec r. Pour qu'il soit constant, il faudrait diviser l'aire de lasphère par 1− 2k

r , autrement dit il faudrait diviser γ par 1− 2kr ; on aurait alors

γ = β, et la métrique serait isotrope.

31 Sur la notion de masse en relativité restreinte

Jusqu'ici, nous avons attribué un rôle fondamental au potentiel scalaireΦ = −GMr . En même temps, nous avons admis dans notre approche prélimi-naire que la masse M devait être une masse relativiste (maupertuisienne). Il estimportant de comprendre que ces notions risquent d'entrer en con�it, si nousn'y prenons pas garde. Ceci vient du fait que la masse au sens de Newton et lamasse au sens d'Einstein sont de nature profondément di�érente.

Nous allons reprendre ici en partie la section sur la masse au repos et lamasse maupertuisienne �gurant dans le document Les vitesses en Relativitérestreinte.pdf.

Considérons deux corps galiléens de masses au repos m1 et m2 (non nulles),et de rapidités ~w1 et ~w2.

Les énergies des deux corps sont : E1 = m1.c2.chw1

c et E2 = m2.c2.chw2

c ;leurs impulsions sont : p1 = m1.c.sh

w1

c et p2 = m2.c.shw2

c .

Pour prendre en compte la direction du déplacement, nous allons faire inter-venir la rapidité sous forme vectorielle (~w) plutôt que réelle (w). Pour condenserles formules et les calculs, nous allons dé�nir l'exponentielle, le cosinus et le sinushyperboliques d'un vecteur tridimensionnel (spatial) ~u à l'aide de leurs dévelop-pements en série, de la façon suivante :

e~x = 1 + ~x+~x2

2!+~x3

3!+~x4

4!+~x5

5!+~x6

6!+ ...

66

Page 67: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

On peut démontrer très facilement, par récurrence, que les puissances de ~xd'exposant pair sont des réels, et que les puissances d'exposant impair sont desvecteurs parallèles à ~x ; en notant x = ||~x|| le module de ~x, on peut écrire :~x2n = x2n et ~x2n+1 = x2n.~x = x2n+1.~xx .

ch~x = 1 +~x2

2!+~x4

4!+~x6

6!+~x8

8!+ ... = 1 +

x2

2!+x4

4!+x6

6!+x8

8!+ ...

sh~x = ~x+~x3

3!+~x5

5!+~x7

7!+~x9

9!+ ... =

(x+

x3

3!+x5

5!+x7

7!+x9

9!+ ...

).~x

x.

On voit donc que ch~x est un nombre réel positif, et que sh~x est un vecteurtridimensionnel ; e~x = ch~x+ sh~x comporte une partie réelle, égale à ch~x, et unepartie vectorielle, égale à sh~x. On peut dire que e~x est un quadrivecteur.

En relativité restreinte, le carré de la norme d'un quadrivecteur lorentziens'obtient en retranchant le carré de sa partie vectorielle au carré de sa partiescalaire :

||e~x||2 = (ch~x)2 − (sh~x)2 = 1 ;

||e~x|| = 1.

Cette norme est invariante, c'est-à-dire indépendante de la vitesse de l'ob-servateur.

Posons maintenant ~x = ~wc , et réécrivons de manière condensée le quadrivec-

teur énergie-impulsion d'une particule de masse au repos m0 :

E + c.~p = m0.c2.ch

~w

c+m0.c

2.sh~w

c= m0.c

2.e~wc .

Remarquons que ||E + c.~p|| = m0.c2.||e ~w

c || = m0.c2.

Nous allons voir qu'on peut dé�nir aussi un produit scalaire associé à cettenorme.

Imaginons par exemple deux particules de masses au repos m1 et m2, et derapidités (dans un repère donné) ~w1 et ~w2. On aura alors :

E1 + c.~p1 = m1.c2.ch

~w1

c+m1.c

2.sh~w1

c= m1.c

2.e~w1c ;

E2 + c.~p2 = m2.c2.ch

~w2

c+m2.c

2.sh~w2

c= m2.c

2.e~w2c .

On peut écrire aussi :

E1 − c.~p1 = m1.c2.ch

~w1

c−m1.c

2.sh~w1

c= m1.c

2.e−~w1c ;

67

Page 68: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

E2 − c.~p2 = m2.c2.ch

~w2

c−m2.c

2.sh~w2

c= m2.c

2.e−~w2c .

Considérons maintenant le système formé par les deux corps de masses m1

et m2. Appelons m la masse au repos de ce système, et ~w sa rapidité globale,ce qui signi�e que :

E + c.~p = m.c2.ch~w

c+m.c2.sh

~w

c= m.c2.e

~wc ;

E − c.~p = m.c2.ch~w

c−m.c2.sh ~w

c= m.c2.e−

~wc .

Ce système aura pour énergie E = E1 + E2 et pour impulsion ~p = ~p1 + ~p2,donc :

m.c2.e~wc = E + c.~p = (E1 + c.~p1) + (E2 + c.~p2) = m1.c

2.e~w1c +m2.c

2.e~w2c , et :

m.c2.e−~wc = E − c.~p = (E1 − c.~p1) + (E2 − c.~p2) = m1.c

2.e−~w1c +m2.c

2.e−~w2c .

Le produit scalaire est dé�ni ainsi :

(E1+c.~p1).(E2+c.~p2) = E1.E2−c2.~p1.~p2 = m1.m2.c4.

(ch~w1

c.ch

~w2

c− sh ~w1

c.sh

~w2

c

).

On peut démontrer que ce produit scalaire, comme la norme, est invariant,c'est-à-dire indépendant de la vitesse de l'observateur. Ceci vient du fait que

(E1 + c.~p1).(E2 + c.~p2) =1

2.(||E + c.~p||2 − ||E1 + c.~p1||2 − ||E2 + c.~p2||2

).

E�ectivement :

||E + c.~p||2 = E2 − c2.~p2 = (E1 + E2)2 − c2.(~p1 + ~p2)2 ;

||E + c.~p||2 = E21 + 2.E1.E2 + E2

2 − c2.(~p1

2 + 2. ~p1. ~p2 + ~p22)

;

||E + c.~p||2 = (E21 − c2.~p2

1) + (E22 − c2.~p2

2) + 2.(E1.E2 − c2.~p1.~p2) ;

||E + c.~p||2 = ||E1 + c. ~p1||2 + ||E2 + c. ~p2||2 + 2.(E1 + c.~p1).(E2 + c.~p2),

ce qui équivaut bien à l'égalité annoncée.

On a donc :

m2.c4 = m21.c

4 +m22.c

4 + 2.m1.m2.c4.

(ch~w1

c.ch

~w2

c− sh ~w1

c.sh

~w2

c

);

m2 = m21 +m2

2 + 2.m1.m2.

(ch~w1

c.ch

~w2

c− sh ~w1

c.sh

~w2

c

).

68

Page 69: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Sachant que le produit scalaire est indépendant de l'observateur, nous pou-vons l'évaluer en choisissant un repère de notre choix, par exemple un repère liéau premier mobile. Dans ce repère, on a : ~w1 = ~0 et ~w2 = ~w2 ~w1 = ~w (rapiditédu second mobile par rapport au premier), donc :

m1.m2.

(ch~w1

c.ch

~w2

c− sh ~w1

c.sh

~w2

c

)= m1.m2.

(ch~0

c.ch

~w2 ~w1

c− sh

~0

c.sh

~w2 ~w1

c

)

= m1.m2.ch~w2 ~w1

c= m1.m2.ch

~w

c.

Il s'ensuit que :

m2 = m21 +m2

2 + 2.m1.m2.ch~w

c;

m =

√m2

1 + 2.m1.m2.ch~w2 ~w1

c+m2

2.

Nous aurions pu faire une démonstration plus élégante en utilisant les égalitéssuivantes :

m.e~wc = m1.e

~w1c +m2.e

~w2c , et :

m.e−~wc = m1.e

− ~w1c +m2.e

− ~w2c .

... puis en les multipliant membre à membre :

m2 = (m1.e~w1c +m2.e

~w2c ).(m1.e

− ~w1c +m2.e

− ~w2c ) ;

m2 = m21 +m1.m2.e

~w1~w2c +m1.m2.e

~w2~w1c +m2

2 ;

m2 = m21 + 2.m1.m2.ch

~w2 ~w1

c+m2

2.

Cette démonstration, très rapide, comporte cependant des pièges, et il faut bienmaîtriser les propriétés des puissances de vecteurs pour l'utiliser. On pourraconsulter la page Les vitesses en Relativité restreinte.pdf.

Si ~w1 = ~w2, on a ch ~w2~w1

c = 1, donc :

m =√m2

1 + 2.m1.m2 +m22 = m1 +m2 ;

si ~w1 6= ~w2, on a ch ~w2~w1

c > 1, ce qui entraîne :

m > m1 +m2.

On voit donc que les masses au repos ne sont pas additives en relativitérestreinte.

69

Page 70: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Considérons par exemple la masse M du Soleil, qui est constitué d'un trèsgrand nombre de particules en mouvement les unes par rapport aux autres. PourNewton, il allait de soi que cette masseM était nécessairement égale à la sommedes masses de toutes ces particules, et que le potentiel produit par le Soleil enchaque point de l'espace s'obtenait en additionnant les potentiels produits partoutes ces particules. Cette linéarité disparaît en relativité.

Considérons maintenant une particule de masse au repos nulle, par exempleun photon, ayant pour énergie : E1 = h.ν, et pour impulsion : ~p1 = h.ν

c .~u (où~u est un vecteur unitaire indiquant la direction de son déplacement). On peutalors écrire :

E1 + c.~p1 = h.ν.(1 + ~u).

Imaginons un second photon de même fréquence, mais de direction opposée. Onaura :

E2 + c.~p2 = h.ν.(1− ~u).

Le système formé par ces deux photons a pour quadrivecteur énergie-impulsion :

E + c.~p = E1 + c.~p1 + E2 + c.~p2 = 2.h.ν.(1 +~0).

Il a pour masse au repos :

m = 2.h.ν

c26= 0.

Considérons maintenant un ensemble de n particules, de masses au reposnulles ou non. L'énergie totale est : E =

∑ni=1Ei et l'impulsion totale est :

~p =∑ni=1 ~pi, donc la masse totale est donnée par la formule :

m2.c4 = (E + c.~p) . (E + c.~p) =

n∑i=1

(Ei + c.~pi) .

n∑j=1

(Ej + c.~pj) ;

m2.c4 =

n∑i=1

n∑j=1

(Ei + c.~pi) . (Ej + c.~pj) =

n∑i=1

n∑j=1

(Ei.Ej − c2.~pi.~pj

);

m2.c4 =

n∑i=1

n∑j=1

(Ei.Ej − c2.pi.pj .cosφi,j

),

où φi,j est l'angle formé par les vecteurs vitesse des particules de rangs i et j.

Dans le cas d'un ensemble de photons, on a : Ei = c.pi = h.νi, ce qui conduità la formule :

m2.c4 =

n∑i=1

n∑j=1

(h2.νi.νj − h2.νi.νj .cosφi,j

);

m2.c4 = h2.

n∑i=1

n∑j=1

νi.νj . (1− cosφi,j) ;

70

Page 71: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

m =h

c2.

√√√√ n∑j=1

νi.νj . (1− cosφi,j).

En raison des propriétés de la norme et du produit scalaire des quadrivecteursénergie-impulsion, on peut dire que la masse m ainsi calculée est indépendantede l'observateur.

En théorie, un corps de masse au repos non nulle peut être reconstitué parun assemblage de particules de masses au repos nulles. Ceci ne doit pas nousétonner, puisque nous savons qu'une particule et son antiparticule peuvent sedésintégrer sous forme de photons. Les particules de masse nulle (comme les pho-tons) sont les briques à partir desquelles on peut, au moins en théorie, construiredes corps de masse au repos non nulle ; mais l'inverse n'est pas vrai. Une théo-rie de la gravitation relativiste doit nécessairement donner le premier rôle àl'énergie-impulsion quadrivectorielle (qui possède les propriétés fondamentales :conservation et additivité), et non à la masse.

Ceci nous conduit à formuler cette conjecture sur les particules élémentaires :

Les seules vraies particules élémentaires ont une masse au repos nulle, et

leur vitesse est celle de la lumière. Toutes les autres particules sont composites.

La masse au repos d'une particule composite dépend de l'énergie de liaison entre

les éléments qui la composent.

Cette conjecture est en contradiction avec le modèle standard actuel. Elleest aussi en contradiction avec la théorie selon laquelle ce serait le boson deHiggs qui confèrerait une masse à toutes les autres particules. Mais ces mo-dèles ne sont probablement pas dé�nitifs. Comment évolueront-ils ? Nul ne lesait. Que notre conjecture soit vraie ou fausse importe peu dans la présenteétude ; ce qui est important, c'est de garder à l'esprit qu'elle peut être vraie,car c'est un bon moyen de résister aux idées toutes faites sur la notion de masse.

32 Le champ d'entraînement (ou potentiel qua-drivectoriel)

Pour Newton, le champ gravitationnel produit par une particule quelconqueest déterminé en totalité par sa masse au repos. La relativité restreinte nousimpose d'abandonner ce modèle.

Une première solution est d'abandonner purement et simplement la notionde champ scalaire, au pro�t de la notion de courbure. C'est la voie choisie parEinstein.

71

Page 72: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

L'autre solution (celle que nous nous proposons d'explorer) consiste à dépos-séder la masse scalaire du rôle qui lui a été attribué par Newton, et de donnerce rôle au quadrivecteur énergie-impulsion.

La masse apparaît dans deux formules essentielles de la gravitation newto-nienne : d'une part dans le calcul du potentiel Φ = −G.Mr (son coe�cient est

alors −Gr ), et dans le calcul du gradient de ce potentiel, donc de l'accélération

ou de la force (le coe�cient étant alors Gr2 ). Nous pouvons essayer de remplacer

la masse par l'énergie-impulsion dans l'une ou l'autre de ces formules, ce quin'est pas équivalent. Examinons la première piste.

Si nous voulons adapter la formule du potentiel, nous écrirons : C = −G.(E+c.~p)r ;

ce sera alors un quadrivecteur. Nous l'appellerons "quadrivecteur d'entraîne-ment" (ou "potentiel quadrivectoriel") et nous le notons C. Il ne faut pas leconfondre avec la pseudo-accélération : alors que la pseudo-accélération pro-duite par un corps massif mobile pointe vers celui-ci, la partie vectorielle del'entraînement est parallèle à son vecteur vitesse.

On peut penser (en première approximation) qu'en un point donné les qua-drivecteurs d'entraînement vont se combiner comme les quadrivecteurs énergie-impulsion qui en sont à l'origine :

C =∑i

Ci = −G.∑i

Ei + c.~piri

.

On pourra noter ce quadrivecteur d'entraînement sur le modèle du quadri-vecteur énergie-impulsion :

C = E + c. ~P

La partie réelle de ce potentiel quadrivectoriel est :

E =∑i

Ei = −G.∑i

Eiri

et sa partie vectorielle :

c. ~P =∑i

c. ~Pi = −G.∑i

c.~piri.

Du point de vue mathématique, il faut noter une chose très importante : selonla dé�nition proposée, le quadrivecteur d'entraînement s'obtient par sommationde quadrivecteurs énergie-impulsion a�ectés de coe�cients en 1

r . Mais ces qua-drivecteurs énergie-impulsion ne sont pas des quadrivecteurs quelconques : ilssont toujours de type temps (car E2− c2.p2 ≥ 0). Or cette propriété se conservepar addition (la somme de deux quadrivecteurs de type temps est toujours detype temps, alors qu'il n'y a pas de propriété équivalente pour les quadrivecteursde type espace !) et par multiplication par un scalaire (un quadrivecteur de type

72

Page 73: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

temps multiplié par un scalaire donne toujours un quadrivecteur de type temps).De par leur construction, les quadrivecteurs d'entraînement vont donc hériterdes propriétés des quadrivecteurs énergie-impulsion. On pourrait les considérercomme des quadrivecteurs énergie-impulsion virtuels. Ils respecteront toujourscette inégalité fondamlentale :

E − c2. ~P2 ≥ 0.

De même que le potentiel scalaire de Newton, en un point donné, peut êtreconsidéré comme une masse virtuelleM (moyenne pondérée des masses réellesqui font sentir leur in�uence en ce point, les coe�cients étant de la forme −G

ri),

qu'on peut écrire ainsi : M = −∑iG.mi

ri, l'entraînement peut être considéré

comme un quadrivecteur énergie-impulsion virtuel (moyenne pondérée avec lesmêmes coe�cients).

Nous avons vu que la masse au repos d'un corps composite peut être dé�nieà l'aide des énergies-impulsions de ses composantes, selon la formule :

m2.c4 =

n∑i=1

n∑j=1

(Ei.Ej − c2.pi.pj .cosφi,j

);

de la même manière, nous pouvons dé�nir une masse virtuelle associée à l'en-traînement :

M2.c4 =

n∑i=1

n∑j=1

(Ei.Ej − c2.Pi.Pj .cosφi,j

);

M.c2 =

√√√√ n∑i=1

n∑j=1

(Ei.Ej − c2. ~Pi. ~Pj

)=√E2 − c2.P2.

Cette masse virtuelle est la norme du quadrivecteur d'entraînement. C'est unscalaire qui peut être identi�é au potentiel newtonien.

Ce quadrivecteur peut s'écrire sous la forme :

C =M.c2.

(ch~w

c+ sh

~w

c

), avec :

M.c2.ch~w

c=∑i

Ei, et :

M.c2.sh~w

c=∑i

c. ~Pi.

Retenons donc cette relation fondamentale :

Φ = ||C||.

73

Page 74: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Le potentiel gravitationnel newtonien (scalaire) est égal à la norme du qua-drivecteur d'entraînement.

On peut dé�nir aussi la "vitesse du champ" au point considéré :

~v

c= th

~w

c=sh ~wcch ~wc

=

∑i c.

~Pi∑i Ei

=c. ~PE.

Pour calculer ~vc , il su�t de diviser la partie vectorielle du quadrivecteur d'en-traînement par sa partie scalaire.

Cette vitesse ~v est la vitesse associée au champ d'entraînement C produitau point donné (P ) par l'ensemble des corps de masses mi, en mouvement lesuns par rapport aux autres.

33 L'immobilité gravitationnelle

Nous venons de dé�nir la "vitesse du champ". Ceci nous conduit à l'"immobilitégravitationnelle" :

Un observateur situé au point P et se déplaçant précisément à la vitesse~v sera dit "gravitationnellement immobile". Autrement dit, un observateur estgravitationnellement immobile si, dans son repère, la vitesse d'entraînements'annule. Pour un tel observateur, l'entraînement s'écrit (localement) :

||Φ||.(1 +~0) =M.c2.(1 +~0) ;

on peut donc dire que l'entraînement se réduit au potentiel newtonien. C'estce qui se passe, par exemple, pour les "observateurs locaux", immobiles dans lechamp gravitationnel du Soleil.

Attention : nous aurions pu dé�nir la notion d'immobilité gravitationnelleà partir de la quantité G.M

r2 , qui, comme −G.Mr , apparaît dans la théorie deNewton. Le problème est que ces deux immobilités gravitationnelles ne sont paséquivalentes, et nous ne pouvons pas dire laquelle possède une signi�cation phy-sique. Ce choix n'ayant pas de conséquence sur l'étude du système solaire, nouslaissons le problème ouvert.

On aurait pu penser que la relativité restreinte allait nous interdire de dé�-nir une immobilité absolue (objective). C'est le contraire que nous constatons :c'est précisément en nous basant sur la relativité restreinte que nous venons dedé�nir non pas une, mais deux notions d'immobilité. Il reste à sélectionner labonne...

74

Page 75: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Le cas du photon est particulier. Son quadrivecteur énergie-impulsion n'estpas de la forme m.c2.e

~wc , mais h.ν.(1 + ~u), donc l'entraînement qu'il produit

n'est pas de la forme −G.m0

r .e~wc , mais −h.νr .(1 + ~u). Cet entraînement n'est pas

nul, mais il a une norme nulle ; c'est di�érent pour un ensemble de photonsde directions di�érentes : ils produisent un entraînement de norme non nulle.Chaque photon contribue à l'entraînement global.

Selon nos hypothèses, le rapport entre le quadrivecteur d'entraînement etla pseudo-accélération est parfaitement clair : la pseudo-accélération est égale àl'opposé du (quadri)gradient du potentiel newtonien Φ, qui est lui-même égal àla norme du quadrivecteur d'entraînement. En pratique, ceci signi�e qu'il fautconnaître le quadrivecteur d'entraînement pour calculer sa norme, qu'on iden-ti�e à l'opposé du potentiel newtonien ; le gradient de ce potentiel permet decalculer la pseudo-accélération, qui peut s'interpréter en termes de courbure.Attention : il ne s'agit là que d'une hypothèse, qui doit être discutée et testée.Elle a un grand intérêt : elle apporte très naturellement une réponse à la ques-tion de l'"immobilité", qui, depuis le début, s'invite malgré nous dans toutesnos équations...

Dans le cas du système solaire, ces deux conceptions de l'immobilité seconfondent, et nous parlerons simplement d'"immobilité par rapport au Soleil".

Nous pouvons remarquer aussi que, pour un observateur immobile par rap-port au Soleil, le potentiel est constant : ∂Φ

c.∂t = 0, ce qui n'est pas le cas (engénéral) pour un autre observateur en mouvement. On pourrait donc être tentéde donner la dé�nition suivante : "Un corps est gravitationnellement immobilesi, dans son repère, ∂Φ

c.∂t = 0." Est-ce cohérent ?

Il se trouve que non. Ceci vient du fait que le quadrivecteur de coordonnées(∂Φc.∂t ,

∂Φ∂x ,

∂Φ∂y ,

∂Φ∂z

)n'est pas de type temps, mais de type espace ; l'ensemble

des quadrivecteurs de type espace n'est pas stable pour l'addition, ce qui barrela route à toute tentative de généralisation. Nous nous contenterons donc desdeux dé�nitions (contradictoires) que nous avons évoquées, ce qui est déjà unede trop.

Une autre idée serait de dé�nir d'abord les forces sous forme quadrivecto-rielle, et de passer ensuite, par intégration, au potentiel. Mais la force au sensde Newton est un vecteur tridimensionnel, qui, sous sa forme quadrivectorielle,ne peut donner qu'un quadrivecteur de type espace. Or la somme de deux qua-drivecteurs de type espace n'est pas toujours de type espace. Nous ne pouvonspas additionner les forces de manière usuelle, sans passer par le potentiel !

Voici donc les hypothèses de travail que nous sélectionnons provisoirement(avec les réserves exposées précédemment) : dans la théorie de Newton, nousremplaçons la masse au repos par le quadrivecteur énergie-impulsion, ce qui nous

75

Page 76: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

conduit à dé�nir le potentiel sous forme quadrivectorielle. Ce quadrivecteur estde type temps, lorentzien, additif. Il permet de dé�nir des repères particuliers(dits "gravitationnellement immobiles") dans lesquels sa composante vectorielles'annule localement. Dans un tel repère, le potentiel est localement scalaire, cequi permet de s'a�ranchir de sa partie vectorielle ; on peut alors calculer soitla courbure, soit la force et la pseudo-accélération (comme nous l'avons exposédans la section "Forces et/ou géodésiques ?"). Les formules exposées au débutde notre travail, destinées à l'origine à l'étude du système solaire, seront valablesdans ces repères particuliers.

Lorsque nous étudierons l'in�uence gravitationnelle d'un corps unique (commele Soleil), c'est ce corps qui dé�nira l'immobilité gravitationnelle. Mais pour com-biner les in�uences de plusieurs corps, il faudra composer leurs entraînementspour en déduire une "immobilité résultante", qui permettra de dé�nir les re-pères dans lesquels les e�ets gravitationnels s'expriment facilement en termesde pseudo-accélération.

Cette direction de recherche n'est pas la seule possible, mais elle se base surdes hypothèses raisonnables. Ce qui est certain, c'est que la notion d'immobi-lité gravitationnelle n'est pas en contradiction avec la relativité restreinte ; ellerésulte directement du concept de potentiel quadrivectoriel lorentzien, conceptqui, lui-même, s'impose dès lors qu'on remplace la masse au repos par l'énergie-impulsion dans les équations de Newton.

34 Conservation de l'énergie-impulsion

La conservation de l'énergie s'éclaire de manière di�érente selon le projecteurutilisé : la relativité générale ou la métrique de Ni.

En relativité générale, la notion de conservation ne peut pas avoir une si-gni�cation globale ; elle ne peut être que locale. E�ectivement, lorsqu'on ditque l'énergie totale d'un système se conserve de l'instant t1 à l'instant t2, celasuppose qu'il est possible de mesurer les énergies de toutes les parties du sys-tème, simultanément, à l'instant t1, puis, de même, à l'instant t2. Le grandproblème, c'est que la simultanéité n'existe pas en relativité. Par conséquent, lemot "conservation" n'a pas de sens en relativité générale (ou seulement un senslocal).

Second problème : depuis la relativité restreinte, on sait que la notion d'éner-gie doit être remplacée par celle d'impulsion-énergie quadrivectorielle ; c'est cequadrivecteur qui doit se conserver. Mais dans le cas d'un système formé deplusieurs parties éloignées, il faudrait pouvoir additionner les quadrivecteursimpulsion-énergie des di�érentes parties du système pour véri�er que cettesomme se conserve. Or, dans un espace-temps courbe, des quadrivecteurs as-

76

Page 77: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

sociés à des particules di�érentes, éloignées l'une de l'autre, ne peuvent êtreni comparés, ni additionnés. Ceci peut s'expliquer par une analogie simple : sion considère deux vecteurs à deux dimensions, en deux points A et B sur unesurface courbe à deux dimensions (comme la surface terrestre), on peut essayerde les comparer en faisant glisser le premier de A jusqu'en B en "conservant sadirection" (selon le principe du "transport parallèle"), selon un parcours choisi.Mais la conclusion dépendra du parcours... Un cas particulier très instructif estcelui du triangle sphérique (ABC) à trois côtés égaux (équilatéral) et à troisangles droits (par exemple A et B sur l'équateur, C au pôle). Lorsqu'on fait glis-ser un vecteur (par transport parallèle, c'est-à-dire sans modi�er l'angle entre levecteur et la direction du déplacement) de A jusqu'en B, puis jusqu'en C, puisjusqu'en A, en suivant les côtés du triangle, on constate qu'il a tourné de 90°.Ceci rend impossible la dé�nition d'une égalité vectorielle entre des vecteurs liésà des points di�érents. De même, dans un espace-temps courbe, il est impossiblede dé�nir une égalité quadrivectorielle entre impulsions-énergies de particuleséloignées. Ce n'est possible que dans un espace-temps euclidien.

La relativité générale est donc une théorie essentiellement locale. Ceci sou-lève un problème de compatibilité avec la mécanique quantique, qui admet lanon-localité. Deux particules intriquées ont des propriétés fondamentales liées demanière simple, même si elles sont très éloignées l'une de l'autre. Par exemple,imaginons deux particules produites lors d'une désintégration, avec des impul-sions opposées. Peut-on dire que ces impulsions seront encore opposées lorsqueles particules seront loin l'une de l'autre ? Et si chacune de ces paricules sedésintègre de nouveau en deux autres particules, la somme des impulsions desquatre particules sera-t-elle nulle ? Cette question possède-t-elle une réponseindépendante du parcours suivi par ces particules ? D'ailleurs, cette notion deparcours a-t-elle une signi�cation en mécanique quantique ? Si nous faisons pas-ser l'une des particules à la fois par deux trous di�érents percés dans un écran(comme cela a été réalisé dans des expériences célèbres), quel parcours faudra-t-il prendre en compte ? Dans la logique de la mécanique quantique, la réalitéfondamentale est l'événement, ou l'interaction. On ne sait pas par où passeune particule, ni même si elle existe, entre deux interactions. Les particules etl'espace-temps apparaissent comme des constructions à posteriori, destinées àexprimer la cohérence entre les interactions. Cet espace-temps doit en principeêtre euclidien à quatre dimensions, tout simplement parce-que la notion fonda-mentale d'impulsion-énergie, qui est de nature quadrivectorielle, l'impose.

En métrique de Ni, l'espace-temps peut être interprété comme courbe, mais,comme on l'a vu, le calcul de la courbure (plus précisément du tenseur de Ricci)montre que celle-ci est régie par un vecteur (ou plus vraisemblablement un qua-drivecteur). Or le simple fait de s'appuyer sur une quantité quadrivectorielleentraîne l'existence de repères privilégiés dits "immobiles", qui permettent dedé�nir la notion de simultanéité, et par conséquent de donner un sens global aumot "conservation" : il est possible de dire si l'impulsion-énergie globale d'unsystème étendu dans l'espace se conserve ou non, d'un instant t1 à un instant

77

Page 78: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

t2 (au moins pour ces observateurs particuliers, dé�nis de manière totalementobjective). Quelle que soit la réponse, cette question possède, au moins, un sens.

35 Le graviton existe-t-il ?

On admet généralement que les forces fondamentales sont véhiculées par desparticules (le photon pour l'électromagnétisme, les bosons W+, W−, Z0, pourl'interaction faible, les gluons pour l'interaction forte), et on a imaginé que lagravitation pourrait être véhiculée, elle aussi, par une particule : le graviton.D'après la théorie, il s'agirait d'un boson de masse nulle, de spin égal à 2, sedéplaçant à la vitesse de la lumière ; mais cette particule n'a jamais été détectéedirectement.

Les nombreux physiciens qui cherchent à rapprocher la gravitation de la mé-canique quantique estiment que le graviton est l'outil privilégié qui permettrad'avancer dans cette direction.

De même que l'électrodynamique quantique permet d'expliquer l'ensembledes phénomènes électromagnétiques à partir d'échanges de photons virtuelsentre particules chargées, on peut espérer apporter un éclairage nouveau surles phénomènes gravitationnels en faisant intervenir des échanges de gravitonsvirtuels entre particules massives ("gravitodynamique quantique"). Dans cetteapproche, c'est la probabilité d'interaction entre particules (via l'échange degravitons virtuels) qui devient l'objet d'étude privilégié, les forces d'attraction,le potentiel gravitationnel et la courbure de l'espace-temps étant relégués aurang d'épiphénomènes.

Cette direction de recherche suppose des échanges de gravitons entre lescorps massifs, ces échanges étant à l'origine de tous les phénomènes gravitation-nels. Mais il faut observer tout de suite que cette option est en contradictionavec la relativité générale, puisque dans le cas des trous noirs de Schwarzschild(qui sont une conséquence de cette théorie) les échanges de gravitons entre lamatière située à l'intérieur du trou noir et la matière située à l'extérieur esttout simplement impossible, même à la vitesse de la lumière. Pourtant le trounoir courbe l'espace-temps extérieur ! Ceci signi�e que la courbure est un étatd'équilibre spatio-temporel local qui n'a pas besoin d'être alimenté pour perdu-rer : la courbure est apparue avec la formation du trou noir, et c'est grâce à seslois propres (locales) qu'elle se maintient, sans apport d'information extérieure.Si les gravitons existent et ont un rôle en relativité générale, on ne peut lesconsidérer que comme des agents agissant localement pour assurer le maintiende cet équilibre. Dans le cadre de cette théorie, il est impossible d'expliquer lesphénomènes gravitationnels par un échange de gravitons à distance entre par-ticules massives éloignées ; mais les gravitons doivent être transmis localement(à très courte distance) entre points ("événements") de l'espace-temps. On peut

78

Page 79: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

alors se demander si l'espace-temps vide (dépourvu de particules usuelles) pos-sède une réalité matérielle permettant de tels échanges. Nous n'avons pas leséléments pour répondre à cette question, qui est pourtant fondamentale si ondésire amorcer un rapprochement de la relativité générale avec la mécaniquequantique.

36 E�et Nordtvedt

Vous ne connaissez pas l'e�et Nordtvedt ? Pas d'a�olement : cet e�et n'existepas ! Il a été imaginé par le physicien Nordtvedt pour mettre en évidence unedi�érence éventuelle entre masse inerte et masse pesante, par l'observation del'orbite de la Lune. C'est en quelque sorte la contrepartie astronomique des ex-périences d'Eötvös, dont nous avons déjà parlé. Mais les expériences d'Eötvösavaient pour but de détecter des di�érences liées à la composition chimique descorps, tandis que l'e�et Nordtvedt est censé détecter des di�érences liées à leurénergie gravitationnelle propre.

Nous avons vu que, pour un observateur distant, la masse d'une particule, in-

tervenant dans tout problème de mécanique, est : mdist = m0 chwc e

Φc2 , puisque

c'est elle qui permet d'évaluer l'énergie d'un mobile : Edist = mdist c2. Nous la

noterons simplement m.On pourra utiliser l'approximation suivante :

m ≈ m0.(

1 + 12v2

c2

).(1 + Φ

c2

)≈ m0 + 1

2v2

c2 .m0 + Φc2 .m0 (avec Φ < 0).

Si v << c : m ≈ m0 + Φc2 .m0, avec

Φc2 .m0 < 0.

L'énergie gravitationnelle (négative) de cette particule est :Eg = (m−m0)c2 ≈ Φ.m0.

Dans le cas d'un corps non ponctuel (que nous supposerons immobile), Egest l'énergie de liaison gravitationnelle (négative) des di�érentes particules quile composent.

Le calcul de Eg n'a pas une importance essentielle ici, mais nous le pro-posons quand même, car il permet de bien comprendre cette notion d'énergiegravitationnelle propre. Imaginons la formation d'une planète par accrétion departicules. Appelons M0 la somme des masses au repos des particules accrétées(masse ne prenant pas en compte la perte d'énergie due aux liaisons gravitation-nelles), etM la masse dé�nitive de la planète, incluant l'énergie gravitationnelle(M < M0, puisque Eg < 0). Nous supposons que toutes les particules perdentleur énergie cinétique au cours de l'accrétion. Nous appelons R le rayon dé�nitifde la planète, et ρ sa densité (supposée uniforme). Reconstituons, pas à pas, laformation de la planète, par accrétion de particules de masse dm0 : la masse maugmente chaque fois d'une quantité dm, inférieure à dm0, en raison de l'éner-gie gravitationnelle libérée : Gmdm0

r (ou Gm0dm0

r , car m0 ≈ m). Le rayon r va

79

Page 80: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

croître de 0 à R, la masse m0 de 0 à M0, la masse totale m de 0 à M .

dm ≈ dm0

(1− Gm

rc2

)≈ dm0

(1− Gm0

rc2

)≈ 4πr2ρdr

(1− G

rc2.4

3πr3ρ

);

dm ≈ 4πr2ρdr − 4πr2ρ.G

rc2.4

3πr3ρdr ≈ 4πρd

(r3

3

)− 16

3π2ρ2G

c2r4dr ;

dm ≈ 4πρd

(r3

3

)− 16

3π2ρ2G

c2d

(r5

5

);

...d'où, en intégrant :

M ≈ 4

3πR3ρ− 16

3π2ρ2G

c2R5

5≈M0−

3

5.G

Rc2.

(16

9π2ρ2R6

)≈M0−

3

5.G

Rc2.M2

0 ;

M ≈M0 −3

5.GM2

0

Rc2.

On a donc : Eg ≈ − 35 .GM2

0

R ≈ − 35 .GM2

R .

M

M0≈ 1− 3

5.GM0

Rc2≈ 1− 3

5.GM

Rc2.

Pour la Terre :M ≈ 5, 97.1024 kg,R ≈ 6 370 000m, donc 35 .GMRc2 ≈ 4, 6.10−10,

donc(MM0

)Terre

≈ 1 − 4, 6.10−10 ;

pour la Lune : M ≈ 7, 35.1022 kg, R ≈ 1 736 000 m, donc 35 .GMRc2 ≈ 2.10−11,

donc(MM0

)Lune

≈ 1 − 2.10−11.

La di�érence entre ces deux quotients(MM0

)Terre

et(MM0

)Lune

est de l'ordre de

4, 4.10−10.

Considérons maintenant un corps céleste (par exemple une planète) de massepesante Mp et de masse inerte Mi. Selon la théorie de Newton, la force exercéepar le Soleil sur ce corps est proportionnelle à Mp, et l'accélération qui en ré-

sulte est donc proportionnelle àMp

Mi. L'idée de Nordtvedt est que, si la Terre et la

Lune ne possèdent pas le même rapportMp

Mi, alors elles ne répondront pas de la

même façon à l'attraction du Soleil, comme si elles subissaient des accélérationslégèrement di�érentes. C'est cette di�érence de comportement qui devrait, selonNordtvedt, entraîner une modi�cation de la forme de l'orbite de la Lune autourde la Terre. Cette déformation de l'orbite a pu être calculée avec précision.

L'intérêt de la Lune, dans le cas présent, est que sa distance par rapport àla Terre (et donc la forme exacte de son orbite) sont mesurables, en utilisantdes radars (situés sur Terre) et des miroirs, placés à la surface de la Lune parles missions Apollo, avec une précision de l'ordre de 2 cm sur une distance de385 000 km (soit une précision relative de l'ordre de 5.10−11).

80

Page 81: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Les mesures e�ectuées n'ont détecté aucune modi�cation de l'orbite de laLune, et n'ont donc pas con�rmé le calcul de Nordtvedt ; on en conclut que lequotient

Mp

Miest le même pour les deux astres, avec une très bonne précision.

Mais quel rapport y a-t-il entre les massesMp etMi (masse pesante et masseinerte) d'une part, M et M0 (masses incluant, et n'incluant pas, l'énergie gravi-tationnelle) d'autre part ? C'est simple : si la masse pesante s'identi�ait àM0 et

la masse inerte à M (ou l'inverse !), alors les quotients(MM0

)Terre

et(MM0

)Lune

ne seraient pas égaux, et la précision des mesures aurait permis de s'en rendrecompte, ce qui n'est pas le cas. On en déduit que les masses pesante et inertesont toutes les deux égales à M , ou toutes les deux égales à M0.

Dans l'approche de la gravitation que nous exposons ici, la masse pesante etla masse inerte sont toutes les deux égales à M . En e�et, lorsqu'une particule

se déplace sur une géodésique, sa masse m = mdist = m0 chwc e

Φc2 ne varie pas,

son énergie totale étant constante ; le produit chwc eΦc2 est constant, donc quand

l'un des facteurs augmente, l'autre diminue ; quand l'énergie cinétique augmente,l'énergie potentielle diminue (et réciproquement). Imaginons maintenant la for-mation d'une planète par accrétion. Chaque fois qu'une nouvelle particule estcapturée et tombe sur la planète, elle commence par gagner de l'énergie ciné-tique tout en perdant de l'énergie potentielle, jusqu'à la chute �nale. C'est à cemoment que l'équilibre est rompu : l'énergie cinétique de la particule est néces-sairement évacuée, d'une manière ou d'une autre, par exemple sous forme dechaleur, puis de rayonnement (du moins pour des corps froids comme le Terreet la Lune), mais l'énergie potentielle perdue n'est pas récupérée. C'est lorsquela chaleur due à l'impact est rayonnée qu'il y a une perte d'énergie (donc demasse). La masse �nale est donc M , et non M0.

Encore une précision : quelle est la masse au repos de la planète ? Rappelonsque M0 est la somme des masses au repos des particules qui la composent. Maisla masse au repos d'un corps n'est pas égale à la somme des masses au repos deses composants ! (Voir les explications partielles dans le document Les vitessesen Relativité restreinte.pdf, p. 52-53). Elle dépend de la rapidité relative deces composants (donc de l'énergie cinétique de l'ensemble), mais aussi de leurénergie potentielle (puisque l'énergie cinétique peut se transformer en énergiepotentielle, et réciproquement). Il en résulte que la quantitéM0, que nous avonsfait intervenir dans notre calcul, n'a aucune signi�cation physique : la masse aurepos de la planète (pour un observateur distant) est égale à M , et non à M0. Iln'existe en fait qu'une sorte de masse (pour cet observateur) : Mp = Mi = M ,qu'on peut appeler, au choix, masse pesante, masse inerte ou masse au repos.

81

Page 82: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

37 Les trous noirs en métrique de Schwarzschild

Rappelons que la notion de trou noir découle tout naturellement de la gra-vitation newtonienne. En e�et, dans cette théorie, la vitesse de libération est :

vl =√

2.G.Mr ; donc, pourM > r.c2

2.G , la vitesse de la lumière est insu�sante pour

permettre aux rayonnements d'échapper à la gravité de l'astre, comme l'avaientdéjà remarqué John Michell (en 1783) et Pierre-Simon de Laplace (en 1796).

On lit couramment que l'existence des trous noirs est une certitude, que denouveaux trous noirs ont été découverts, etc...

Les trous noirs stellaires, prévus par la théorie, n'ont pas encore été mis enévidence de manière directe : la plupart des candidats pourraient être des étoilesà neutrons. Dans certains cas, on a cependant la preuve qu'il ne peut pas s'agird'étoiles à neutrons. Citons par exemple le cas de Cygnus X-1 : dans ce systèmedouble, une étoile est en rotation autour d'une source de rayons X. L'étude dumouvement de l'étoile a permis d'évaluer la masse de cette source : elle est supé-rieure à 6 masses solaires (probablement comprise entre 7 et 13 masses solaires),ce qui est très supérieur à la masse maximale d'une étoile à neutrons, qui seraitde l'ordre de 3, 3 masses solaires (selon les calculs d'Oppenheimer et Volko�).D'après la théorie, une étoile ayant une telle masse est une géante, qui doit s'ef-fondrer en trou noir une fois ses réserves de combustible épuisées, car aucuneforce connue ne peut alors résister à la gravité. Ceci est vrai, du moins, dansune théorie basée sur la métrique de Schwarzschild ; mais c'est assez di�érentavec la métrique de Ni, comme nous le verrons un peu plus loin.

Actuellement, on connaît un bon nombre de binaires X apparentées à Cy-gnus X-1 ; mais c'est surtout l'étude des sursauts gamma qui apporte un indiceintéressant en faveur de l'existence des trous noirs stellaires : on suppose qu'ilstrahissent l'e�ondrement d'étoiles situées dans des galaxies lointaines. Lors detels événements, une étoile massive se transformerait en trou noir. Trou noir ausens de Schwarzschild ou de Ni ?

Quant aux trous noirs supermassifs, on estime qu'ils sont présents au centrede la plupart des galaxies spirales. Dans le cas de la Voie Lactée, on a pu mettreen évidence une concentration impressionnante de matière dans un volume trèsréduit : c'est l'étude des orbites des étoiles autour de ce grumeau central quia permis de déterminer sa masse de manière précise : 3, 6 millions de massessolaires ! Pour qu'une telle masse forme un trou noir, il faudrait qu'elle soitconcentrée dans une sphère de rayon inférieur à 16 rayons solaires, c'est-à-diredans un volume équivalent à celui d'une étoile géante (nettement plus grossequ'une naine comme le Soleil, mais beaucoup plus petite qu'une supergéante).

En ce qui concerne les quasars, ces galaxies primitives très lointaines et ex-ceptionnellement lumineuses, ils sont interprétés comme des trous noirs géants,

82

Page 83: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

de plusieurs millions (ou centaines de millions ?) de masses solaires. Mais ils sontaussi considérés comme les ancêtres des galaxies évoluées comme la nôtre.

La seule chose qu'on puisse a�rmer aujourd'hui, c'est qu'il existe des "astrescompacts" : quasars, c÷urs de galaxies, ou étoiles. Le mot "compact" signi�e

que le quotient Mr se rapproche de la limite de Schwarzschild : c2

2G . Ne confon-

dons pas la "compacité" (dé�nie par ce quotient Mr ) avec la densité, qui est

proportionnelle à Mr3 : si r est très grand, la compacité peut être élevée et la

densité très faible...

Rappelons que le rayon de Schwarzschild d'un corps massif se calcule fa-cilement, connaissant sa masse : rs = 2.k = 2.G.M

c2 . Si sa dimension apparentesemble inférieure à son rayon de Schwarzschild, on en déduit, d'après la relativitégénérale, qu'il s'agit d'un trou noir, limité par un horizon ; mais, bien entendu,on n'a jamais observé directement cet "horizon"...

A quoi correspond exactement cette notion d'horizon au sens de Schwarz-schild ? Imaginons une masse M comprimée dans une sphère de rayon inférieurà 2.k = 2.G.M

c2 = rs (limite de Schwarzschild) ; par exemple, une étoile de mêmemasse que le Soleil, dans une sphère de moins de 3 km de rayon. Pour l'ob-servateur distant, c'est cette sphère de Schwarzschild, de rayon rs = 2.k, quiva constituer un horizon au-delà duquel son regard n'aura pas accès : aucuneinformation provenant de l'intérieur de cette sphère ne peut lui parvenir. Si unvaisseau spatial, par exemple, est happé par le trou noir, l'observateur distantle verra ralentir à l'approche de l'horizon, car le coe�cient de ralentissement dutemps tend alors vers 0 ; et il ne le verra jamais franchir l'horizon. Mais si nousadoptons le point de vue des astronautes embarqués dans le vaisseau, qui viventen temps local, alors ce ralentissement n'existe pas.

Pour expliquer ce curieux phénomène, imaginons un rayon lumineux se di-rigeant radialement vers un trou noir. Pour décrire sa trajectoire, utilisons lamétrique de Schwarzschild, avec dθ = dφ = 0, et aussi ds2 = 0 (puisqu'il s'agitde lumière). Les quantités dt et dr sont toujours évaluées par l'observateur dis-tant. Il vient :

ds2 =

(1− 2.k

r

).c2.dt2 − 1

1− 2.kr

.dr2 = 0 ;

c2.dt2 =1(

1− 2.kr

)2 .dr2 ;

c.dt = − 1

1− 2.kr

.dr.

Le signe négatif se justi�e par le sens de parcours que nous avons choisi : rdécroît quand t croît.

83

Page 84: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

c.dt = − r

r − 2.k.dr = − (r − 2.k) + 2.k

r − 2.k.dr = −

(1 +

2.k

r − 2.k

).dr ;

c.dt = −dr − 2.k.d(r − 2.k)

r − 2.k= −d (r + 2.k.Log(r − 2.k)) .

Quand le rayonnement se déplace de r1 à r2 (r1 > r2 > 2.k), il s'écoule unedurée ∆t telle que :

c.∆t = r1 + 2.k.Log(r1 − 2.k)− r2 − 2.k.Log(r2 − 2.k).

Si nous faisons tendre r2 vers 2.k, ∆t tend vers l'in�ni.

Reprenons ce calcul en temps local ; sachant que dtloc =√

1− 2.kr .c.dtdist,

on tire :

ds2 = c2.dt2loc −1

1− 2.kr

.dr2 = 0 ;

c2.dt2loc =1

1− 2.kr

.dr2 ;

c.dtloc = − dr√1− 2.k

r

= −√r.dr√r − 2.k

= −2.k.

√r

2.k .d(r

2.k

)√r

2.k − 1.

Posons x = Argch√

r2.k , ce qui signi�e que ch

2 x = r2.k et sh2 x = r

2.k − 1.

c.dtloc = −2.k.ch x.d

(ch2 x

)sh x

= −2.k.ch x.2.ch x.sh x.dx

sh x= −4.k.ch2 x.dx ;

c.dtloc = −4.k.ch (2.x)− 1

2.dx = −2.k. (ch (2.x)− 1) .dx.

Cette quantité ne diverge pas quand r → 2.k (autrement dit quand ch x→ 1).Pour un observateur distant, le temps nécessaire pour que le rayon lumineuxfranchisse la sphère de Schwarzschild est in�ni ; mais ce n'est pas le cas pour unobservateur local !

Voyons maintenant les raisons qui justi�ent les réticences de certains physi-ciens vis-à-vis des trous noirs au sens de Schwarzschild.

La première raison, c'est que les physiciens (contrairement aux mathémati-ciens) considèrent généralement que les quantités in�nies qui apparaissent dansleurs calculs sont dues à des erreurs, à des interprétations erronées, ou à desextrapolations hâtives...

La deuxième raison est que cette conception du trou noir semble contredirele principe de conservation de Lavoisier, qu'on a l'habitude de résumer par laformule : "rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme". En e�et, si la

84

Page 85: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

matière et la lumière pouvaient pénétrer dans un trou noir (en franchissant sonhorizon), alors, pour l'observateur distant, cette matière et cette lumière dis-paraîtraient de manière irréversible. Il n'y aurait pas, à proprement parler, deperte d'énergie (puisque la masse du trou noir augmente en fonction de ce qu'ilavale), mais, au minimum, une perte d'information.

On pourra répondre que, pour l'observateur distant, le temps mis par lamatière (ou la lumière) pour pénétrer dans le trou noir est in�ni, comme nousl'avons expliqué précédemment ; autrement dit, rien ne peut pénétrer dans letrou noir. On pourrait dire que, pour l'observateur distant, l'intérieur du trounoir n'a pas de réalité physique : c'est une sorte de bulle vide, ou, mieux, uneillusion ; toute la masse se trouve à l'extérieur de l'horizon. Celui-ci n'est alorsqu'une limite (par nature infranchissable) de l'espace-temps, car il se situe, pourainsi dire, à l'in�ni dans le temps.

Mais alors comment peut-on concevoir la formation d'un trou noir de Schwarz-schild ? La théorie en vigueur prévoit, en e�et, qu'une étoile massive peut s'ef-fondrer, en un temps �ni, sous forme de trou noir. C'est cette possibilité qui estcontestée par certains théoriciens, qui pointent les contradictions avec la méca-nique quantique. Avec la métrique de Ni, ce problème ne se pose pas.

Troisième raison : imaginons qu'il puisse exister de la matière à l'intérieurde l'horizon, et que cette matière soit la cause de la courbure de l'espace-tempsà l'extérieur du trou noir (cette courbure étant donc sa conséquence). Dans cecas, comment cette cause pourrait-elle être responsable de cette conséquence,sachant qu'aucun message ne peut sortir du trou noir ? Cest ce que j'appelle leparadoxe de l'interaction entre objets compacts.

Il faudrait donc admettre que la courbure spatio-temporelle, à proximité dutrou noir, se met en place au moment où le trou noir se forme, et "se fossilise"ensuite ; autrement dit, le champ ainsi créé n'a pas besoin d'un apport continud'information pour se maintenir : c'est un état d'équilibre spatio-temporel. Si,d'un coup de baguette magique, on pouvait annihiler toute la matière contenuedans le trou noir, la courbure de l'espace-temps demeurerait ! A moins que letrou noir ne soit rien d'autre que cette courbure...

Plusieurs théoriciens ont pensé que l'horizon des trous noirs était un arte-fact mathématique dû à un mauvais choix des variables, et ils ont essayé de lefaire disparaître, avec un succès mitigé, grâce à des changement de variablesastucieux, mais arti�ciels. Il n'en demeure pas moins que, pour l'observateurdistant, les paradoxes que nous venons d'évoquer sont irréductibles. A moins deremplacer la métrique de Schwarzschild par celle de Ni... Il est bien possible quel'horizon des trous noirs soit un artefact ; mais il ne provient pas d'un mauvaischoix des variables : il provient, évidemment, du pari d'Einstein.

D'autres chercheurs ont essayé de résoudre le problème de la perte d'informa-

85

Page 86: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

tion en imaginant que toute l'information absorbée par un trou noir demeureprésente, codée d'une manière mystérieuse, sur son horizon. Cette idée est àl'origine de la théorie holographique.

D'autres ont étudié les trous noirs d'un point de vue quantique. Par exemple,Stephen Hawking a montré que, pour être en accord avec la mécanique quan-tique, les trous noirs devraient s'"évaporer", en émettant un rayonnement cal-culable et, en principe, observable.

En résumé, le concept de trou noir limité par un horizon trouve son originedans la gravitation de Newton ; une synthèse élémentaire de la théorie newto-nienne avec la relativité restreinte conduit à l'e�acement de cet horizon. Einsteinaurait très bien pu concevoir la relativité générale comme un simple prolonge-ment de la relativité restreinte ; au lieu de cela, il s'est passionné pour les espacescourbes de Riemann et de Gauss, et son pari l'a entraîné dans une toute autre di-rection. Ce qui a eu une conséquence qu'il n'avait pas prévue : le retour des trousnoirs ! Car, rappelons-le, Einstein lui-même estimait, paradoxalement, que lesdiscontinuités de Schwarzschild ne devaient pas exister dans la réalité physique...

Ceci ne minimise pas l'intérêt des études menées par les astronomes sur les"trous noirs stellaires" et les "trous noirs géants" : ces travaux sont passion-nants, même s'il s'agit d'"objets très compacts" et non de véritables trous noirsau sens de Laplace et de Schwarzschild !

38 Les trous gris en métrique de Ni

Dans notre approche, basée sur la métrique de Ni, le coe�cient de ralen-tissement du temps ne tend pas vers 0 quand on s'approche de la sphère deSchwarzschild ; pour qu'il tende vers 0, il faudrait que la masse M (non nulle)soit concentrée dans un volume nul. Cette sphère constitue cependant une li-mite de stabilité des orbites, puisqu'aucune orbite circulaire (ou elliptique) nepeut exister à l'intérieur de celle-ci. Si on imagine la masse M concentrée dansun volume nul (singularité centrale), alors toutes les orbites pénétrant dans lasphère de Schwarzschild plongeront vers la singularité, et il n'y aura plus deforce centrifuge pour les retenir.

Comme précédemment, imaginons un rayon lumineux se dirigeant radiale-ment vers un trou noir. Pour décrire sa trajectoire, utilisons la métrique de Ni,avec dθ = dφ = 0, et aussi ds2 = 0 (puisqu'il s'agit de lumière). Les quantitésdt et dr sont toujours évaluées par l'observateur distant. Il vient :

ds2 = e−2.kr .c2.dt2 − e 2.k

r .dr2 = 0 ;

c2.dt2 = e4.kr .dr2 ;

86

Page 87: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

c.dt = −e 2.kr .dr.

Ici aussi, le signe négatif se justi�e par le sens de parcours que nous avons choisi.La quantité e

2.kr ne tend pas vers l'in�ni quand r → 2.k, donc son intégrale ne

diverge pas au voisinage de la sphère de Schwarzschild ; le rayon lumineux sem-blera seulement ralentir, mais sans s'arrêter, à l'approche de la surface critique.En e�et, sa vitesse apparente sera :∣∣∣∣drdt

∣∣∣∣ = c.e−2.kr ≈ 0, 368.c pour r=2k.

Remarquons que ce coe�cient : e−1 ≈ 0, 368 sera inchangé si nous rem-plaçons le rayon lumineux par un mobile de vitesse quelconque se déplaçantradialement.

Un autre remarque s'impose : il est clair que le coe�cient e2.kr tend vers

l'in�ni quand r tend vers 0 ; on peut montrer que son intégrale diverge au voi-sinage de 0. Donc s'il existait un corps (disons une particule élémentaire) demasse non nulle et de rayon nul, alors cette particule ne pourrait communiqueravec aucune autre, puisqu'un message quelconque, transmis à la vitesse de lalumière, mettrait un temps in�ni pour atteindre sa cible. Si toutes les particulesélémentaires étaient de rayon nul, elles s'ignoreraient, et il n'y aurait pas dephysique !

Bien sûr, le fait d'imaginer des particules de masse non nulle et de rayon nul(donc de densité in�nie) est une façon d'injecter, par la pensée, de l'in�ni dansla théorie ; mais cette densité in�nie n'est admise ni par la mécanique quantique,ni par la relativité générale. La di�érence entre la métrique deSchwarzschild etcelle de Ni, c'est que, dans la première, des quantités in�nies apparaissent spon-tanément, même si le théoricien prend soin de ne pas en injecter au départ, demanière arti�cielle et arbitraire ; dans la seconde, on ne trouvera de quantitésin�nies que si on les a apportées soi-même.

Est-il possible de sortir de la sphère de Schwarzschild ? Avec la métrique dela relativité générale (c'est-à-dire celle de Schwarzschild), c'est impossible, car,du point de vue d'un observateur distant, le temps nécessaire pour que le mobileentre dans le trou noir (ou en sorte) est in�ni ! En métrique de Ni, l'impossibi-lité rencontrée en relativité générale n'a plus de signi�cation : un mobile pourrafranchir la limite, de l'extérieur vers l'intérieur, en un temps �ni ; il su�ra alorsde "passer le �lm à l'envers" (ou d'inverser le sens du vecteur vitesse) pour levoir ressortir. Un mobile pourra donc ressortir de la sphère de Schwarzschild,mais pour cela il devra changer d'orbite (car une orbite qui entre dans cettesphère n'en ressort pas spontanément) ; ceci nécessitera un échange d'énergie,dont la probabilité sera d'autant plus faible que le puits de potentiel sera plusprofond. Mais il n'est plus question d'une durée in�nie ! Les "trous noirs" nesont peut-être pas aussi noirs qu'on le dit !

87

Page 88: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Voyons maintenant le rôle du phénomène que nous avons appelé "créationd'espace".

Imaginons une masse M répartie de manière équilibrée dans une sphère derayon r ; ce qui signi�e que le potentiel gravitationnel est supposé constant àl'intérieur de celle-ci. Faisons ensuite varier r pour observer les variations de ladensité ρ.

Nous admettrons que les volumes élémentaires mesurés par les observateurs

locaux (à l'intérieur de la sphère) sont multipliés par le coe�cient e−3Φc2 = e

3GMrc2

(en e�et, le potentiel étant constant, toutes les mesures de distance sont multi-

pliées par le même coe�cient de dilatation de l'espace : eGMrc2 ) ; le volume total

inclus dans la sphère (obtenu en sommant les mesures locales des observateurs

locaux) est donc : V = 43π r

3 e3GMrc2 . La masseM est évaluée par un observateur

distant ; nous supposons qu'elle ne varie pas quand r diminue, ce qui signi�eque son énergie cinétique augmente, tandis que son énergie potentielle diminue.Notons bien que dans ce calcul, contrairement au précédent, il n'est pas questionde "prélever l'énergie cinétique" : les variations de r se font à énergie constante,donc à masse constante. La densité moyenne (évaluée par un observateur local)

est donc : ρ = MV = M

43π r3 e

3GMrc2

= 3M4πr3 e

− 3GMrc2 .

La masse M est supposée �xée ; faisons varier le rayon r (évalué, lui aussi,par l'observateur distant). Si on fait tendre r vers l'in�ni, ρ tend vers 0, commeon pouvait s'y attendre. Mais lorsqu'on fait tendre r vers 0, alors ρ tend encorevers 0, ce qui est plus surprenant ! La densité admet un maximum ρmax, facileà calculer en étudiant la dérivée de la fonction ρ = f(r) :

dr=

3M

4π.r3. 3GMr2c2 .e

− 3GMrc2 − 3r2.e−

3GMrc2

r6=

3M

4πr4

(3GM

rc2− 3

)e−

3GMrc2 ;

dr=

9M

4πr4

(GM

rc2− 1

)e−

3GMrc2 .

La dérivée s'annule pour GMrc2 = 1, soit r = GM

c2 . En substituant dans l'ex-pression de ρ, on obtient :

ρmax =3M

4πr3e−

3GMrc2 =

3M

4π(GMc2

)3 e−3 =3c6

4πG3e3M2≈ 3.1079

M2kg/m3.

Cette formule montre que la densité maximale diminue rapidement lorsquela masse augmente !

88

Page 89: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Comment interpréter ce résultat ?Partons d'une sphère de grand rayon (GMrc2 << 1), et supposons qu'elle secontracte, la masse M restant constante et répartie de manière équilibrée. Tantque le rayon r est su�samment grand par rapport à la valeur limite GM

c2 , ladensité moyenne ρ croît sensiblement comme en gravitation newtonienne, car

le coe�cient de dilatation des distances ekr = e

GMrc2 = e−

Φc2 reste très proche

de 1, donc négligeable (de même que le coe�cient de dilatation des volumes :

e3GMrc2 ) ; mais à l'approche de la valeur critique, ce coe�cient se met à augmenter

brusquement : on pourrait dire que "la matière se met à fabriquer de l'espace" !Et lorsque r atteint la valeur critique, cette "création d'espace" contrebalanceexactement l'accroissement de la densité !

Je vais préciser la valeur de cette densité maximale, dans quelques cas par-ticuliers, car je crois que cette notion permet de bien comprendre la di�érencede comportement des objets compacts, en métrique de Schwarzschild et en mé-trique de Ni.

Pour une étoile de même masse que le Soleil, le rayon critique GMc2 est de

l'ordre de 1, 47 km (et le rayon de Schwarzschild est donc 2, 94 km) ; s'il étaitpossible de comprimer le Soleil jusqu'à cette limite, sa densité (mesurée locale-ment) serait :

ρmax =3.1079

M2�

=3.1079

4.1060≈ 7, 5.1018 kg/m3.

C'est une densité prodigieuse, qui dépasse, de beaucoup, tout ce que les as-tronomes ont pu observer jusqu'ici (presque 10 fois la densité d'une étoile àneutrons) ; les théories actuelles peinent à calculer le comportement de la ma-tière à une telle densité ; mais c'est une densité �nie. Bien entendu, cette li-mite est purement théorique : les physiciens ont calculé qu'une étoile commele Soleil peut se transformer en naine blanche ; mais la pression de la matièredégénérée est alors su�sante pour arrêter l'e�ondrement, et le stade d'étoileà neutrons n'est jamais atteint. On considère qu'une étoile peut s'e�ondrer etse transformer en étoile à neutrons si sa masse est comprise entre la limite deChandrasekhar, soit environ 1, 4 M�, et la limite d'Oppenheimer-Volko�, sou-vent évaluée à 3, 3 M� (mais nous préfèrerons l'estimer à 2, 8 M�, pour uneraison que nous allons voir tout de suite). Calculons la densité maximale (quiest inversement proportionnelle au carré de la masse), à la limite de Chandrase-

khar (M = 1, 4 M�) ; on trouve : 7,5.1018

1,42 ≈ 3, 8.1018 kg/m3. Nous avons calculéqu'une étoile à neutrons atteint la limite de Schwarzschild pour M ≈ 2, 4.M�,et la limite critique (demi-rayon de Schwarzschild) pour M ≈ 2, 8.M�. Dans

le premier cas, la densité maximale est : 7,5.1018

2,42 ≈ 1, 35.1018 kg/m3, et, dans

le second cas : 7,5.1018

2,82 ≈ 0, 96.1018 kg/m3. Or, la densité des étoiles à neu-

trons, d'après les calculs des spécialistes, doit être de l'ordre de 1018 kg/m3.Lorsque la masse dépasse 2, 8.M�, la densité maximale descend au-dessous de

89

Page 90: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

1018 kg/m3, ce qui est insu�sant pour permettre la formation d'une étoile àneutrons : les protons et les électrons restent libres, et ne fusionnent pas pourformer des neutrons. En métrique de Ni, une étoile à neutrons dont la massefranchit le seuil de 2, 8.M� ne se transforme ni en étoile à quarks, ni en trou noirau sens habituel : sa densité est trop faible, et ensuite elle ne peut que diminuer !

Considérons maintenant une étoile de masse nettement supérieure ; choisis-sons comme exemple Cygnus X-1, dont la masse serait comprise entre 7 et 13masses solaires. Son rayon critique est compris entre 10 et 20 km, et la den-sité maximale entre 1, 5.1017 et 4, 4.1016 kg/m3, donc bien inférieure à celled'une étoile à neutrons. Ce type d'étoile illustre bien ce qu'on a pris l'habituded'appeller un trou noir stellaire. Le rayonnement X est émis par des nuagesde gaz spiralant à très grande vitesse dans un champ gravitationnel extrême.Si l'étoile entière pouvait se contracter jusqu'à pénétrer complètement dans sasphère critique, la "création d'espace" serait telle que sa densité maximale (me-surée localement) serait très insu�sante pour produire une étoile à neutrons ;par conséquent, lorsqu'on dit : "une étoile à neutrons dont la masse dépasse lalimite d'Oppenheimer-Volko� se transforme en trou noir parce-que sa densitédevient trop forte", c'est inexact ; au contraire, sa densité est trop faible ! Maisalors, comment peut-on se représenter l'étoile Cygnus X-1 ? Comme on vient dele voir, sa densité est nécessairement faible ; les tourbillons de gaz qui l'entourentdoivent atteindre des vitesses relativistes. L'énergie cinétique (vitesse de rota-tion, chaleur) doit l'emporter de beaucoup sur l'énergie de masse. Pour que cetteétoile puisse se contracter, il faudrait que cette énergie cinétique soit rayonnée,et, bien entendu, la masse totale diminuerait d'autant ; il faudrait que la masserestante descende au-dessous de 2, 8.M� pour qu'elle puisse se transformer enétoile à neutrons. Ceci nous conduit à penser qu'une étoile très massive commeCygnus X-1 n'a peut-être rien à voir avec les "trous noirs de Schwarzschild",tels qu'ils ont été décrits, sur la base de la relativité générale... Ce serait plutôtun "trou noir de Ni" !

Changeons d'échelle, et considérons maintenant un "trou noir supermassif"de 3, 6 millions de masses solaires (comparable à celui qui est décrit au centrede notre galaxie). Sa densité maximale sera beaucoup plus faible. On obtient :

ρmax ≈ 5, 8 . 105 kg/m3.

C'est à peu près 4 fois la densité qui règne au centre du Soleil, mais c'est trèsloin de la densité d'une étoile à neutrons. Le comportement de la matière, à ceniveau de densité, peut être déduit de l'étude du plasma qui constitue les étoiles.Mais n'oublions pas qu'il s'agit ici de la densité maximale, atteinte lorsque lerayon r (évalué par l'observateur distant) est égal à GM

c2 , soit, dans ce cas, 5, 3millions de km (un peu moins de 8 fois le rayon du Soleil, ou 1

80 de celui deBételgeuse). En supposant que le rayon r puisse décroître encore au-dessous dece seuil, alors la densité (mesurée localement) se mettrait à décroître elle aussi !Mais rien ne nous permet d'a�rmer qu'une telle compacité soit atteinte, ou

90

Page 91: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

seulement approchée...

Considérons en�n une masse d'un milliard de soleils (comme les trous noirsdont la présence a été imaginée au c÷ur des quasars). On obtient alors :

ρmax ≈ 7, 5 kg/m3.

Ceci correspond à 7, 5 millièmes de la densité de l'eau sur Terre ! On peut doncestimer que le c÷ur actif des quasars (en supposant que ce soit un plasma com-parable à celui qui constitue les étoiles) ne devrait pas dépasser quelques dizainesde millions de masses solaires.

39 Les ondes gravitationnelles en métrique de Ni

Dans la théorie de Newton, la gravité se transmet de manière instantanée.Pourtant, Newton lui-même considérait cette situation comme une anomalie : latransmission d'information à vitesse in�nie ne correspondait pas à sa conceptionde la physique. Laplace s'était aussi penché sur ce problème, et avait montréque, si la vitesse de propagation de la gravité n'était pas in�nie, elle devait êtreen tout cas considérable. Pour Einstein, la transmission d'information à vitessein�nie est tout simplement un non-sens, car elle impliquerait la simultanéitéabsolue entre l'émission et la réception du message ; or la simultanéité absoluen'existe pas en relativité.

Les équations de la relativité générale ont fait apparaître des ondes géomé-triques, appelées ondes gravitationnelles ; Einstein s'en est rendu compte trèsrapidement, en étudiant le problème du quadrupôle. Une question fondamen-tale s'est alors posée : ces ondes sont-elles porteuses d'énergie ? Ce sujet a étélonguement débattu, et Einstein lui-même était hésitant au début. Mais la co-hérence de la relativité générale impose d'attribuer une énergie à ces ondes,car cette théorie identi�e, mathématiquement, courbure géométrique et énergie-impulsion. Nous en reparlerons.

Ces ondes, prédites par Einstein en 1918, ont été traquées longtemps parles physiciens. En 1968, Joseph Weber, utilisant un dispositif de son invention(barres de Weber), n'avait aucune chance de les débusquer... Au début desannées 2000, avec la mise en service des détecteurs Ligo, Virgo, Geo600, on s'at-tendait à une détection directe rapide, ce qui n'a pas été le cas. L'améliorationde la technologie (projets Advanced Ligo et Advanced Virgo) a permis un bonden avant de la sensibilité des détecteurs, à partir de �n 2015 - début 2016. Etc'est en février 2016 qu'est arrivée la nouvelle tant attendue : la première dé-tection directe d'une onde gravitationnelle a été réalisée en septembre 2015 parLigo (événement GW150914).

91

Page 92: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Nous allons voir comment ces ondes peuvent être introduites en métrique deNi.

Sans nous préoccuper des calculs très sophistiqués qui ont été publiés sur cesujet, abordons-le à notre façon. Imaginons un système double formé de deuxétoiles de masses m1 et m2 tournant autour de leur centre de gravité communO, et un observateur immobile par rapport à ce centre de gravité, situé à grandedistance. Pour cet observateur, les impulsions des deux étoiles sembleront oppo-sées, et le champ se réduira, à peu de choses près, au champ newtonien produitpar une masse m1 + m2 située en O. Mais ce n'est qu'une approximation. Lecalcul de la di�érence entre le champ réel et cette approximation newtoniennefait intervenir le "quadrupôle d'Einstein". C'est ce calcul qui fait apparaître unestructure particulière qui est à l'origine de la théorie des ondes gravitationnelles.

Nous souhaitons illustrer cette problématique, de manière visuelle, en sacri-�ant la rigueur pour privilégier la simplicité et la clarté. Il n'est pas questionde traiter toutes les composantes du champ : nous nous contenterons pour lemoment de parler du potentiel newtonien. Nous allons nous placer dans un casparticulièrement simple, et faire intervenir uniquement la relativité restreinte,en négligeant la courbure de l'espace. Nous savons d'avance que cette simpli�-cation ne sera pas sans conséquence, et qu'une correction sera nécessaire.

Nous imaginerons que les deux étoiles A et B sont de même masse, et

92

Page 93: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

tournent à vitesse constante sur une orbite circulaire autour de leur centre degravité O, et nous supposerons que la vitesse de propagation du potentiel gravi-tationnel, évaluée par l'observateur distant, est égale à la vitesse de la lumière.Ce potentiel, en un point de l'espace-temps, sera supposé indépendant de l'ob-servateur ; il sera entièrement déterminé par la distance spatiale par rapport àl'émetteur, distance évaluée dans le repère galiléen qui était celui de l'émetteur,au moment de l'émission.

Dans la �gure ci-dessus, établie par un observateur distant immobile parrapport au centre de gravité O, le point P représente un point quelconque del'espace-temps à l'instant t. On suppose qu'à cet instant arrive en P un messagegravitationnel provenant de l'étoile A, émis à l'instant te (instant de l'émission).Le point A de la �gure indique le lieu où se trouvait l'étoile A à l'instant te. Ona donc : AP = c(t − te). Supposons que le but soit de déterminer le potentielgravitationnel en P à l'instant t ; pour cela, il faudrait calculer la distance ρ dupoint P par rapport à A, évaluée dans un repère mobile lié à A, à l'instant te :ρ = c(t− te)′ (où le "prime" désigne le changement d'observateur, qui s'e�ectuepar la transformation de Lorentz). En fait, notre but est de tracer les ligneséquipotentielles, c'est-à-dire de déterminer les coordonnées de P pour une va-leur �xée de ρ.

Notons (x, y) les coordonnées spatiales de P dans le repère (O, x, y) et (X,Y )ses coordonnées dans le repère (A,X, Y ) (repères liés au centre de gravité O).

(XY

)= AP

(cos φsin φ

)= c(t− te)

(cos φsin φ

);

(xy

)= r

(cos αsin α

)+

(cos α −sin αsin α cos α

).

(XY

);

(xy

)= r

(cos αsin α

)+ c(t− te)

(cos α −sin αsin α cos α

).

(cos φsin φ

);

(xy

)= r

(cos αsin α

)+ c(t− te)

(cos (α+ φ)sin (α+ φ)

).

D'après la transformation de Lorentz :

ρ = c(t− te)′ =c(t− te)− v Y

c√1− v2

c2

=c(t− te)− v(t− te) sin φ√

1− v2

c2

;

ρ =c(t− te)√

1− v2

c2

(1− v

csin φ

);

93

Page 94: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

c(t− te) =ρ.√

1− v2

c2

1− vc sin φ

;

cte = ct−ρ.√

1− v2

c2

1− vc sin φ

;

αe =vter

=v

cr

ct− ρ.√

1− v2

c2

1− vc sin φ

.

On aura compris que αe représente la valeur de l'angle α à l'instant de l'émis-sion (te).

Pour construire une ligne équipotentielle à un instant donné (t �xé), on �xeune valeur de ρ (puisque toute valeur du potentiel Φ correspond à une valeur deρ), puis on fait varier l'angle φ de 0 à 2 π ; pour chaque valeur de φ, on calculeles valeurs correspondantes, d'abord de αe, ensuite de x et y.

Plus explicitement, en posant t = 0 :

cte = −ρ.√

1− v2

c2

1− vc sin φ

;

αe =vter

= −vc.ρ

r.

√1− v2

c2

1− vc sin φ

;

x = r.cos

−vc.ρ

r.

√1− v2

c2

1− vc sin φ

+ρ.√

1− v2

c2

1− vc sin φ

.cos

−vc.ρ

r.

√1− v2

c2

1− vc sin φ

+ φ

;

y = r.sin

−vc.ρ

r.

√1− v2

c2

1− vc sin φ

+ρ.√

1− v2

c2

1− vc sin φ

.sin

−vc.ρ

r.

√1− v2

c2

1− vc sin φ

+ φ

.

Dans la �gure ci-dessous, nous avons représenté la structure du champ gé-néré par les deux étoiles, pour des valeurs de la vitesse et du rayon choisiesarbitrairement. Plus précisément, nous avons tracé les courbes équipotentiellesdu champ de l'étoile A, et celles du champ de l'étoile B, en utilisant les calculsprécédents.

94

Page 95: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Nous voyons apparaître une structure spiralée du champ, qui évoque irré-sistiblement les ondes gravitationnelles de la relativité générale. Ceci pourraitsembler satisfaisant, mais en observant plus attentivement cette �gure, nousvoyons qu'elle soulève un problème embarrassant.

Rappelons-nous les résultats obtenus dans la section sur les géodésiques,version cartésienne :

dE

c.dt=E

c2.

(1 +

v2

c2

).∂Φ

c∂t, et :

d~p

dt= −E

c2.

(1 +

v2

c2

). ~5 Φ.

Si nous observons les lignes équipotentielles produites par l'une des deuxétoiles (A), dans le voisinage de l'autre étoile (B), nous voyons qu'elles ne sontpas rigoureusement tangentes à l'orbite, ce qui a deux conséquences. Si nousvisualisons le vecteur accélération (perpendiculaire à la ligne équipotentielle)nous voyons qu'il n'est pas perpendiculaire au vecteur vitesse, mais légèrementprograde (dirigé vers l'avant), ce qui entraîne que le module de l'impulsion del'étoile B va croître. D'autre part, si nous �xons l'un des points bleus (parexemple celui où se trouve l'étoile B à l'instant présent) et laissons tourner leslignes équipotentielles de A, nous remarquons qu'en ce point le potentiel vacroître. Rappelons que les lignes équipotentielles les plus éloignées de A ont unpotentiel plus élevé. La conséquence est qu'au point considéré ∂Φ

∂t est positif,ce qui signi�e que l'énergie de l'étoile B doit croître. Et, par symétrie, il en est

95

Page 96: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

de même pour A. Cette conclusion est évidemment absurde. Il s'agit là d'unproblème fondamental, lié à la propagation de l'information gravitationnelle àvitesse �nie. Et un calcul précis permet de constater que le problème est beau-coup plus important qu'il n'y paraît !

Pour résoudre ce paradoxe, on peut explorer di�érentes pistes. Je me conten-terai de développer ici celle qui me semble la plus intéressante : c'est celle quise base sur la symétrie T.

40 La symétrie T

La symétrie T est la symétrie par inversion du sens du temps.

Cette symétrie T est respectée par toutes les forces fondamentales, y comprispar la gravitation de Newton : si nous remplaçons dt par −dt dans l'équationpermettant de calculer l'orbite d'une planète dans la théorie de Newton, lesparamètres de l'orbite ne changent pas ; seul le sens de parcours est inversé.Autrement dit, si on nous montre le �lm passé à l'endroit et le �lm passé àl'envers, nous n'avons aucun moyen de savoir lequel est le bon.

Observons maintenant les équations des géodésiques que nous avons obtenuesdans la section consacrée à ce sujet, sous leur forme la plus générale :

1) dds

(g11

dtds

)= 1

2

(dtds

)2 ∂g11

∂t + 12

(drds

)2 ∂g22

∂t + 12

(dθds

)2 ∂g33

∂t ;

2) dds

(g22

drds

)= 1

2

(dtds

)2 ∂g11

∂r + 12

(drds

)2 ∂g22

∂r + 12

(dθds

)2 ∂g33

∂r ;

3) dds

(g33

dθds

)= 1

2

(dtds

)2 ∂g11

∂θ + 12

(drds

)2 ∂g22

∂θ + 12

(dθds

)2 ∂g33

∂θ .

Dans l'équation 1), tout changement de signe de dt change le signe des deuxmembres, et l'égalité se conserve.

Dans les équations 2) et 3), on voit que dt est au carré, donc son signe estindi�érent.

Nous voyons donc qu'une théorie de la gravitation basée sur les géodésiquesest compatible avec la symétrie T.

En ce qui concerne le potentiel Φ = −kr , nous avons vu qu'en métrique deNi il respecte (dans le vide) l'égalité :

2Φ =∂2Φ

c2∂t2− ∂2Φ

∂x2− ∂2Φ

∂y2− ∂2Φ

∂z2= 0.

96

Page 97: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Or cette équation est également compatible avec la symétrie T, puisque dt,ici encore, est au carré.

Mais l'étude mathématique de l'opérateur 2 (le d'alembertien) montre qu'ilpossède deux sortes de solutions, qu'on appelle "potentiels retardés" et "poten-tiels avancés". Le potentiel retardé produit par une source donnée se propage demanière centrifuge, à la vitesse de la lumière, à partir de cette source (confor-mément à la fonction de Green retardée) ; le potentiel avancé se propage demanière centripète (fonction de Green avancée). Ils se déduisent l'un de l'autrepar inversion du sens du temps. Aucun des deux ne respecte la symétrie T, maisleur demi-somme (fonction de Green symétrique) la respecte.

Revenons à la section précédente, sur les ondes gravitationnelles. Nous sommesarrivés à une situation où notre système binaire gagne de l'énergie ex nihilo, cequi signi�e que les deux étoiles vont se déplacer sur des spirales, et vont s'éloignerprogressivement l'une de l'autre. Cette situation nous choque surtout parce-quela conservation de l'énergie n'est pas respectée, mais aussi parce-que la symétrieT n'est pas respectée non plus. En e�et, si nous changeons le sens du temps (ousi nous passons le �lm à l'envers), nous voyons les étoiles se rapprocher l'une del'autre au lieu de s'éloigner ! On peut immédiatement di�érencier le �lm passéà l'envers du �lm passé à l'endroit !

D'où vient cette anomalie ? Tout simplement du fait que nous n'avons prisen compte que le potentiel retardé, et non le potentiel avancé. Si nous prenonsen compte les deux types de solutions de l'équation 2 = 0 (à l'aide de la fonctionde Green symétrique), nous faisons disparaître la structure spiralée du champet rétablissons la symétrie. Les courbes équipotentielles sont alors des ellipses.Du même coup, la conservation de l'énergie est rétablie...

Cette idée, due à Fokker, a été appliquée par Wheeler et Feynmann à l'élec-trodynamique quantique, avec le succès qu'on connaît. Peut-être sera-elle à labase d'une future "gravitodynamique quantique" ?

Rappelons que la théorie de l'électromagnétisme peut être expliquée intégra-lement par des échanges de photons virtuels entre particules chargées ; il n'estpas exclu que la gravitation puisse être modélisée à partir d'échanges de quantad'énergie-impulsion par l'intermédiaire de gravitons virtuels.

Que sont ces échanges de photons virtuels entre particules chargées ? Voicid'abord ce qu'ils ne sont pas. Imaginons deux particules chargées, chacune émet-tant, dans toutes les directions, un �ux de photons porteurs d'énergie. Lorsque,par hasard, l'un de ces photons atteint l'autre particule, il est capté et son éner-gie est récupérée. Mais la grande majorité des photons manquent la cible et leurénergie se perd dans l'espace.

Il est certain que ce scénario est faux : les deux particules perdraient constam-

97

Page 98: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

ment de l'énergie, dispersée dans l'espace. Ceci est contraire aux observations !En réalité, les photons qui se perdent dans l'espace n'existent pas. Ils sont vir-tuels, et ne sont pas élus pour devenir réels ! Ce privilège est réservé à ceuxqui atteignent leur cible. Ceux-ci ont une trajectoire dé�nie par : leur point dedépart, leur point d'arrivée et le temps de parcours.

Cette situation est étroitement apparentée à l'hypothèse de l'informationgravitationnelle intriquée, dont nous parlerons plus loin.

Mais pour le moment remarquons deux questions soulevées par l'hypothèsede la symétrie T.

Première remarque : nous venons de voir que l'idée de baser les interactionsgravitationnelles sur la "fonction de Green symétrique" fait disparaître la struc-ture spiralée du champ produit par un système binaire, ce qui est di�cile àconcilier avec l'existence des ondes gravitationnelles. En e�et, celles-ci, selon lathéorie en vigueur, doivent dissiper de l'énergie dans l'espace, ce qui est contraireà la symétrie T. D'un autre côté, l'accélération séculaire des pulsars binaires estun argument fort en faveur de l'existence de ces ondes, ce qui fragilise la symé-trie T. On doit donc se demander s'il peut exister d'autres explications de cetteaccélération séculaire, basée sur des échanges d'énergie ou de moment cinétique.Et une explication non conventionnelle de la "détection des ondes gravitation-nelles", récemment annoncée. Nous allons en reparler.

Seconde remarque : la vitesse de l'interaction véhiculée par la fonction deGreen étant égale à c, il est clair qu'une particule située à l'intérieur d'un trounoir ne pourra pas interagir gravitationnellement avec le monde extérieur, ce quisigni�e qu'un trou noir sera gravitationnellement neutre. Ceci est en contradic-tion avec la conception actuelle des trous noirs. Mais nous avons une solutionà ce problème : c'est la métrique de Ni, qui élimine les trous noirs au pro�tdes "trous gris", et qui est donc compatible avec une future "gravitodynamiquequantique".

Faisons encore un petit rappel sur notre façon d'aborder l'étude des systèmesbinaires, dans le document : Etude des systèmes binaires en métrique de Ni.

Le principe de base, pour étudier le comportement d'un couple d'étoiles(A, B), est de supposer A immobile et d'étudier l'orbite de B dans le champgravitationnel de A (ou l'inverse). Nous supposons alors que, dans un repèrelié à l'étoile A, les courbes équipotentielles de son champ gravitationnel sontsphériques, de centre A. C'est pour cette raison que, dans un repère lié à A,l'énergie de B est constante. Ceci nous a conduits à un modèle dans lequel laconservation de l'énergie et la symétrie T sont respectées, ce qui n'est pas le casdans notre étude des ondes gravitationnelles en métrique de Ni, où nous avons"cassé" la symétrie T.

98

Page 99: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

41 La détection des ondes gravitationnelles

Notre applet met en évidence une structure qui évoque des ondes gravitation-nelles ; mais notre raisonnement ne dit rien d'une éventuelle énergie transportéepar ces ondes. De plus, si nous reprenons nos équations hypothétiques censéesdécrire le mouvement d'un système binaire :

1) E = e−G.mr.c2 .chwc = cte

2) µ = eG.mr.c2 .r.shwc .sinα = cte,

elles ne prévoient évidemment aucune décroissance de l'énergie ou du momentcinétique du système.

Mais c'est, pour le moment, une autre question que nous désirons soulever :des détecteurs tels que Ligo ou Virgo seront-ils sensibles à de telles ondes ?

Il faut rappeler le principe de ces détecteurs : ils sont composés de deuxbras perpendiculaires, de même longueur (plusieurs kilomètres), dans lesquelscirculent des faisceaux lumineux. Le passage d'une onde gravitationnelle, entraî-nant une variation du potentiel, est susceptible de modi�er la longueur de l'undes bras, par e�et de "création d'espace". Une variation de la longueur relativedes deux bras peut être détectée par interférométrie, mais si les deux bras su-bissent simultanément des variations identiques, la détection est impossible. Oril semble, à première vue, que le passage d'une onde gravitationnelle "de Ni"devrait a�ecter les deux bras de la même façon, quelle que soit leur orientation.

Mais le calcul qui précède est trompeur, car il passe sous silence un élémentimportant : le phénomène de "dilatation de l'espace" est lié au repère de l'émet-teur du signal gravitationnel, et non au repère du récepteur. Si le potentiel étaitscalaire, comme nous l'avons supposé dans notre applet, Ligo et Virgo seraientincapables de détecter ces ondes ! Mais nous avons expliqué précédemment lanécessité de concevoir le potentiel comme orienté : c'est un quadrivecteur (ouéventuellement un tenseur à 16 composantes, mais nous allons voir que la notionde quadrivecteur est su�sante pour traiter notre problème).

Si un observateur subit l'in�uence gravitationnelle d'un corps de masse msitué à la distance d et immobile par rapport à lui, son appréciation du tempset de l'espace est altérée ; la modi�cation se résume ainsi : dt′

dx′

dy′

=

e−kd 0 0

0 ekd 0

0 0 ekd

.

dtdxdy

.

Nous avons posé, bien sûr : k = G.mc2 .

99

Page 100: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Nous avons supprimé la troisième coordonnée spatiale pour alléger l'écriture.

Supposons maintenant que le corps massif se déplace à la vitesse ~v selonl'axe des x (par rapport à l'observateur). La formule ci-dessus doit alors êtreadaptée : il faut d'abord attribuer (virtuellement) à l'observateur une vitesseégale à ~v avant de pouvoir l'utiliser ; après quoi il faudra revenir dans le repèreinitial. On va donc composer la matrice de Lorentz, la matrice de changementde potentiel, et la matrice de Lorentz inverse ; ce qui donne :

dt′

dx′

dy′

=

chwc shwc 0shwc chwc 0

0 0 1

.

e−kd 0 0

0 ekd 0

0 0 ekd

.

chwc −shwc 0−shwc chwc 0

0 0 1

.

dtdxdy

;

dt′

dx′

dy′

=

e−kd .chwc e

kd .shwc 0

e−kd .shwc e

kd .chwc 0

0 0 ekd

.

chwc −shwc 0−shwc chwc 0

0 0 1

.

dtdxdy

;

dt′

dx′

dy′

=

e−

kd .ch2w

c − ekd .sh2w

c

(e

kd − e− k

d

).chwc .sh

wc 0(

e−kd − e k

d

).chwc .sh

wc e

kd .ch2w

c − e− k

d .sh2wc 0

0 0 ekd

.

dtdxdy

.

A un instant donné (dt′ = 0) on aura :

dt′ =(e−

kd .ch2w

c− e k

d .sh2w

c

).dt+

(e

kd − e− k

d

).ch

w

c.sh

w

c.dx = 0 ;

dt =

(e−

kd − e k

d

).chwc .sh

wc

e−kd .ch2w

c − ekd .sh2w

c

.dx.

Cette condition étant réalisée, calculons dx′ et dy′ en fonction de dx et dy :

dx′ =(e−

kd − e k

d

).ch

w

c.sh

w

c.dt+

(e

kd .ch2w

c− e− k

d .sh2w

c

).dx ;

dx′ =(e−

kd − e k

d

).ch

w

c.sh

w

c.

(e−

kd − e k

d

).chwc .sh

wc

e−kd .ch2w

c − ekd .sh2w

c

.dx+(e

kd .ch2w

c− e− k

d .sh2w

c

).dx ;

dx′ =

(e−

kd − e k

d

)2

.ch2wc .sh

2wc +

(e

kd .ch2w

c − e− k

d .sh2wc

).(e−

kd .ch2w

c − ekd .sh2w

c

)e−

kd .ch2w

c − ekd .sh2w

c

.dx ;

dx′ =

(e−

2.kd − 2 + e

2.kd

).ch2w

c .sh2wc −

(e−

2.kd + e

2.kd

).ch2w

c .sh2wc + ch4w

c + sh4wc

e−kd .ch2w

c − ekd .sh2w

c

.dx ;

100

Page 101: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

dx′ =ch4w

c − 2.ch2wc .sh

2wc + sh4w

c

e−kd .ch2w

c − ekd .sh2w

c

.dx =

(ch2w

c − sh2wc

)2e−

kd .ch2w

c − ekd .sh2w

c

.dx ;

dx′ =dx

e−kd .ch2w

c − ekd .sh2w

c

.

D'autre part :

dy′ = ekd .dy.

Imaginons maintenant que dx et dy soient les longueurs des deux bras d'uninterféromètre, initialement égales : dx = dy. Le corps massif de vitesse ~v (pa-rallèle au premier bras de l'interféromètre, perpendiculaire au second) modi�einégalement les longueurs des deux bras ; en e�et, les longueurs modi�ées dx′ etdy′ véri�eront :

dy′

dx′= e

kd .dy.

e−kd .ch2w

c − ekd .sh2w

c

dx= ch2w

c− e 2.k

d .sh2w

c;

dy′

dx′= 1 + sh2w

c− e 2.k

d .sh2w

c= 1 +

(1− e 2.k

d

).sh2w

c;

dy′ = dx′ +(

1− e 2.kd

).sh2w

c.dx′.

La di�érence relative de la longueur des deux bras est donc :

dy′ − dx′

dx′=(

1− e 2.kd

).sh2w

c.

On remarque que le bras parallèle à ~v est légèrement plus long que celui quiest perpendiculaire.

Pour d >> k, on écrira :

dx′ − dy′

dx′≈ 2.k

d.

v2

c2

1− v2

c2

.

Supposons maintenant que le corps massif tourne sur une orbite circulaire,que la direction de l'observateur terrestre soit perpendiculaire au plan de l'or-bite, et que les deux bras de l'interféromètre soient situés dans un plan pa-rallèle à celui de l'orbite. Dans ce cas, pour cet observateur, le vecteur ~v seratournant, de période T , et a�ectera alternativement les deux bras de l'inter-féromètre, qui sembleront se dilater et se contracter alternativement avec unepériode T ′ = T

2 . Si la direction de la Terre n'est pas perpendiculaire au plan del'orbite, la conclusion est presque identique, à condition que le temps mis parle message gravitationnel pour parcourir le diamètre de l'orbite soit négligeablepar rapport à T , ce qui est vrai pour v << c. Mais l'angle formé par chacun des

101

Page 102: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

bras de l'interféromètre avec le plan de l'orbite détermine sa réaction par rap-port au signal (celle-ci étant proportionnelle au cosinus de l'angle). Il est doncsouhaitable d'utiliser simultanément deux ou plusieurs interféromètres orientésde manière di�érente, pour pouvoir reconstituer l'amplitude réelle du signal.

Si nous considérons maintenant deux corps tournant autour de leur centrede gravité commun, leurs e�ets vont se cumuler, car le sens du vecteur vitessen'intervient pas.

Supposons que ces deux corps soient de même masse m2 , et tournent sur une

orbite circulaire de rayon r2 , à la vitesse v (évaluation de l'observateur distant).

On a toujours dx′−dy′dx′ ≈ 2.k

d .v2

c2

1− v2

c2

, avec k = G.mc2 (m étant la masse totale).

Le mobile �ctif (voir section sur les systèmes doubles) tourne sur une orbite derayon r, à la vitesse vc = 2.v (évaluation de l'observateur distant). La périodese calcule ainsi :

T =2.π.r

vc(dist).

Nous avions montré que :

vcc

=

√k

r − k.e−

2.kr , ce qui entraîne :

T =2.π.r

c.

√r − kk

.e2.kr .

En posant x = rk , on pourra écrire :

vc(loc)

c=

1√x− 1

;

vc(dist)

c=

1√x− 1.e

2x

;

Tdist =2.π.k.x

c.√x− 1.e

2x .

Remarquons que kk�

= mM�

et que k� ≈ 1, 47 km, ce qui donne (en km) :

k ≈ 1, 47.m

M�.

Tdist ≈2.π.1, 47

300000.√x− 1.e

2x .x.

m

M�;

Tdist ≈ 3, 08.10−5.√x− 1.e

2x .x.

m

M�;

m

M�≈ Tdist

3, 08.10−5.√x− 1.e

2x .x

;

102

Page 103: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

m

M�≈ 3, 2.104.Tdist√

x− 1.e2x .x

.

Nous allons maintenant évaluer l'amplitude du signal en fonction de la dis-tance. On suppose que l'information se transmet sous forme quadrivectorielle,et le quadrivecteur en question, comme tout quadrivecteur lorentzien, conserve"en mémoire" une information de type rapidité, en l'occurence la rapidité del'émetteur au moment de l'émission. La vitesse v qui va intervenir dans le calculest la vitesse circulaire de l'étoile émettrice évaluée par l'observateur distant ;ce qu'on peut écrire ainsi :

v =vc(dist)

2.

On a donc :v2

c2=

1

4.(x− 1).e2x

;

v2

c2

1− v2

c2

=1

4.(x− 1).e2x − 1

;

dx′ − dy′

dx′≈ 2.k

d.

1

4.(x− 1).e2x − 1

.

Cette quantité, que nous noterons δ, caractérise l'amplitude de la réponsedu détecteur d'ondes gravitationnelles.

δ =dx′ − dy′

dx′≈ 2, 94

d.

1

4.(x− 1).e2x − 1

.m

M�;

d ≈ 2, 94

δ.

1

4.(x− 1).e2x − 1

.m

M�.

Soulignons que la notion d'immobilité gravitationnelle joue un rôle essentieldans notre raisonnement : c'est le changement de repère que nous avons e�ectuépour nous placer dans un repère immobile par rapport à l'une ou à l'autre desdeux étoiles qui fait apparaître une distorsion, qui dépend de l'orientation duvecteur vitesse par rapport aux deux bras de l'interféromètre. Insistons sur lefait que ces calculs ne font pas intervenir la vitesse de propagation de la gravité,ni la nature ondulatoire du champ. On pourrait dire que les détecteurs d'ondesgravitationnelles ne sont pas conçus pour détecter des ondes, mais de brusqueschangements d'orientation du champ quadrivectoriel. Ils peuvent donc fonction-ner e�cacement même si les ondes, telles qu'elles sont prévues par la relativitégénérale, n'existent pas !

42 L'événement GW150914

Appliquons maintenant ce qui vient d'être dit à l'événement GW150914 (pre-mière détection d'une onde gravitationnelle). Nous supposerons qu'il s'agit de

103

Page 104: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

la coalescence de deux astres de même masse.

Dans les publications qui ont suivi cette observation, examinons la courbede la vibration captée par Ligo, et évaluons l'écart temporel entre les deux der-niers maxima, juste avant la décroissance du signal. Il faut multiplier par 2 pourobtenir la période de rotation du système. On obtient : T ≈ 0, 013 s.

Quant à l'amplitude maximale du signal, elle atteint, selon l'article publié

par l'équipe de Ligo : δ = dx′−dy′dx′ ≈ 1, 0.10−21 à l'instant de la coalescence.

Nous pouvons donc écrire :

m

M�≈ 3, 2.104.Tdist√

x− 1.e2x .x≈ 3, 2.104.0, 013√x− 1.e

2x .x

≈ 416√x− 1.e

2x .x

;

d ≈ 2, 94

δ.

1

4.(x− 1).e2x − 1

.m

M�≈ 2, 94.1021

4.(x− 1).e2x − 1

.m

M�km.

Divisons par 3, 086.1019 pour convertir en mégaparsecs (Mpc) :

d ≈ 95

4.(x− 1).e2x − 1

.m

M�Mpc.

Pour quelques valeurs de x = rk , nous avons calculé, à l'aide des égalités ci-

dessus, les valeurs de m (masse totale du système, exprimée en masses solaires),de d (distance en mégaparsecs), de k (demi-rayon de Schwarzschild du système,en km), de r (distance séparant les centres des deux étoiles à l'instant de lacoalescence, en km), et de v/c (v étant la vitesse relative des deux étoiles aumême instant, évaluée localement, dans le potentiel kr ).

x 2 2,5 3 3,5 4 4,5 5 5,5 6 6,5 7m 77 61 50 44 36 32 28 25 22 20 18d 736 469 328 241 184 144 116 95 78 66 56k 112 90 74 62 54 47 41 36 33 29 27r 225 224 222 218 214 210 205 200 196 192 188v/c 1 0,82 0,71 0,63 0,58 0,53 0,50 0,47 0,45 0,43 0,41

x 8 12 16 20 24 28 32 36 40 44 48m 15 8,8 5,9 4,3 3,3 2,7 2,2 1,8 1,6 1,4 1,2d 42 16,5 8,4 4,9 3,2 2,2 1,6 1,2 0,9 0,7 0,6k 23 13 8,7 6,3 4,9 3,9 3,2 2,7 2,3 2,0 1,8r 180 156 139 126 117 110 103 98 93 89 86v/c 0,38 0,30 0,26 0,23 0,21 0,19 0,18 0,17 0,16 0,15 0,15

104

Page 105: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Il est clair que l'événement GW150914 ne peut pas être associé à une coa-lescence d'étoiles de type solaire : dans ce cas, on aurait m ≈ 2, et, d'après letableau, la distance r serait de l'ordre de 100 km, ce qui est inférieur, de trèsloin, au diamètre d'une étoile de ce type. On peut éliminer aussi, pour la mêmeraison, une coalescence de naines blanches (masse typique : 0, 8M� ; rayon ty-pique : 6000 km).

Il peut s'agir d'une coalescence d'étoiles à neutrons : ces étoiles ayant géné-ralement une masse de l'ordre de 1, 4 M�, on devrait avoir m ≈ 2, 8, ce qui,selon le tableau, correspondrait à une distance r un peu supérieure à 110 kmau moment de la coalescence ; le diamètre des étoiles à neutrons étant de l'ordrede 14 km, il faudrait admettre que ces étoiles sont fortement déformées, puispulvérisées, bien avant que la distance des centres n'atteigne 28 km. La distanced serait de l'ordre de 2, 3 Mpc, soit 7, 5.106 AL environ.

Supposons maintenant qu'il s'agisse d'une coalescence de trous noirs telsqu'ils ont été modélisés sur la base de la relativité générale et de la métriquede Schwarzschild. Les deux sphères de Schwarzschild ont pour rayons r1 =2.k1 = 2.G.m1

c2 et r2 = 2.k2 = 2.G.m2

c2 ; on pourrait penser que la coalescence

va se produire pour r = r1 + r2 = 2.G.(m1+m2)c2 = 2.G.mc2 = 2.k, donc pour

x = rk = 2. En réalité, les modèles numériques basés sur la relativité générale

montrent que ces sphères doivent se déformer sous l'e�et de la gravité, commesi elles s'aspiraient mutuellement ; elles commencent à fusionner alors que x estencore légèrement supérieur à 2. L'étude de l'événement GW150914 publiée parl'équipe de Ligo situe la coalescence à x ≈ 1, 5 rs ≈ 3.k, et donne : m ≈ 65 M�(57 M� < m < 74 M�) et d ≈ 410 Mpc (230 Mpc < d < 570 Mpc).

Si nous admettons que la fusion se produit pour 2, 5 < x < 3, notre tableaudonne les encadrements : 50 M� < m < 61 M� et 328 Mpc < d < 469 Mpc. Onpeut voir que ces fourchettes recoupent celles qui ont été sélectionnées comme lesplus probables par l'équipe Ligo, aussi bien pour la masse que pour la distance !Je dois dire que j'ai été très surpris de constater que le raisonnement simplisteque j'ai proposé ici pouvait rejoindre les calculs extrêmement complexes de larelativité générale. S'agit-il d'une coïncidence fortuite ? Je ne le sais pas.

Imaginons maintenant que nos deux trous noirs soient des trous noirs sanshorizon, obéissant à la métrique de Ni. Rappelons-nous la section sur les orbitescirculaires : nous avions vu que l'énergie d'un mobile tournant sur une telleorbite, évaluée par l'observateur distant, est minimale pour r = (3 +

√5).k ≈

5, 236.k. Nous ne savons pas à quoi ressemble un trou noir de Ni ; mais il està peu près certain qu'une composante essentielle de tous les trous noirs est letourbillon qui les entoure, qui pourrait s'accumuler autour du rayon d'énergieminimale : r ≈ 5, 236.k. Si c'est le cas, la fusion de deux trous noirs devrait seproduire pour 5 < x < 6.

105

Page 106: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Reprenons notre tableau. Pour 5 < x < 6, nous avons : 22 M� < m < 28 M�et 78 Mpc < d < 116 Mpc. Dans cette hypothèse, il s'agirait d'une fusion detrous noirs de 11 à 14 masses solaires. Ceci n'a rien d'invraisemblable, puisquedes "trous noirs stellaires" de 13 masses solaires ont déjà été répertoriés parles astronomes. Au contraire, des trous noirs stellaires de plus de 30 massessolaires ne sont pas prévus par la théorie en vigueur. Il faut ajouter qu'un �ashlumineux a été détecté par le satellite Fermi, 0, 4 s après la réception du signalgravitationnel. S'il est bien lié au même phénomène, c'est une surprise de plus,puisque la théorie ne prévoit aucune émission de lumière lors de la fusion dedeux trous noirs de Schwarzschild.

43 L'événement GW170817

L'événement GW150914 a été suivi, en 2016 et 2017, par plusieurs autresdétections d'"ondes gravitationnelles" assez comparables ; mais la cinquième dé-tection (GW170817) a apporté des éléments nouveaux.

Première di�érence : une période, à l'instant de la coalescence, près de 4 foissupérieure ; seconde di�érence : une amplitude du signal 70 fois plus importante.

Mais, surtout, cet événement a été enregistré par les trois détecteurs d'ondesgravitationnelles alors en activité (Ligo 1, Ligo 2 et Virgo), ce qui a permis dele localiser avec une précision su�sante sur la voûte céleste ; plusieurs observa-toires ont pris le relais en braquant leurs télescopes vers les galaxies situées dansla zone incriminée, et ont identi�é la contrepartie optique du phénomène : une"kilonova" apparemment située dans la galaxie NGC4993. De plus, un sursautgamma court a été enregistré à l'instant de la fusion des deux astres, ce qui estune chance, car, selon la théorie, les faisceaux de rayons gamma sont directifs,et ne balaient qu'un angle de quelques degrés. Ceci a permis de véri�er d'unepart que les sursauts gamma courts sont liés à des fusions de corps célestes,conformément à l'hypothèse dominante, et d'autre part que les ondes gravita-tionnelles voyagent à la vitesse de la lumière, puisque les détecteurs d'ondesgravitationnelles et de rayons gamma ont réagi simultanément.

Le dépouillement des résultats conduit au scénario suivant : il s'agirait dela coalescence d'un système double formé de deux étoiles à neutrons, dans lagalaxie NGC4993, à environ 40 Mpc du Soleil.

Reprenons le calcul avec les données dont nous disposons (à véri�er !), enutilisant toujours nos hypothèses minimalistes.

Tdist ≈ 0, 06 s ;

106

Page 107: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

δ =dx′ − dy′

dx′≈ 7.10−20.

m

M�≈ 3, 2.104.Tdist√

x− 1.e2x .x≈ 3, 2.104.0, 06√x− 1.e

2x .x≈ 1920√x− 1.e

2x .x

;

d ≈ 2, 94

δ.

1

4.(x− 1).e2x − 1

.m

M�≈ 2, 94

7.10−20.

1

4.(x− 1).e2x − 1

.m

M�;

d ≈ 4, 2.1019

4.(x− 1).e2x − 1

.m

M�km.

Divisons par 3, 086.1019 pour convertir en mégaparsecs (Mpc) :

d ≈ 1, 36

4.(x− 1).e2x − 1

.m

M�Mpc.

Réactualisons le tableau précédent en l'adaptant à ces données nouvelles ;nous obtenons :

x 2 4 6 8 10 20 30 40 50 60 70m 353 168 103 71 53 20 11 7,3 5,3 4,0 3,2d 49 12 5,2 2,7 1,7 0,3 0,12 0,06 0,04 0,02 0,015k 519 247 151 104 77 29 16 11 7,7 5,9 4,7r 1038 988 904 831 770 586 490 430 387 355 330v/c 1 0,58 0,45 0,38 0,33 0,23 0,19 0,16 0,14 0,13 0,12

x 71 72 73 74 75 76 77 78 79 80m 3,1 3,1 3,02 2,96 2,90 2,84 2,79 2,73 2,68 2,63d 0,015 0,014 0,014 0,013 0,013 0,013 0,012 0,011 0,011 0,011k 4,6 4,5 4,4 4,3 4,3 4,2 4,1 4,0 3,9 3,9r 328 326 324 322 319 317 315 313 312 310v/c 0,12 0,12 0,12 0,12 0,12 0,12 0,11 0,11 0,11 0,11

Comme pour GW150914, on peut éliminer une coalescence d'étoiles de typesolaire ou de naines blanches, car, pour une valeur de m proche de 2M�, lavaleur correspondante de r est beaucoup trop faible.

Peut-il s'agir de trous noirs ? Examinons plusieurs hypothèses :- si la fusion s'est produite dans la galaxie NGC4993, on doit avoir d ≈ 40 Mpc,et, selon notre tableau : x ≈ 2, 2 et m ≈ 320 M� ; les deux trous noirs auraientchacun une masse de l'ordre de 160 M�, ce qui dépasse de beaucoup la limitesupérieure admise pour les trous nois stellaires, soit 30 M�. Nous serions alorsdans le domaine des trous noirs dits intermédiaires, dont l'existence n'est pas

107

Page 108: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

con�rmée ;- imaginons maintenant, comme pour GW150914, que x soit compris entre 5et 6. La masse totale serait alors comprise entre 100 et 130 M�, soit plus de50 M� pour chacun des deux astres, ce qui est encore beaucoup pour des trousnoirs stellaires... De plus, la distance serait comprise entre 5 et 8 Mpc, doncbien inférieure à celle de la galaxie NGC4993 ;- si nous imaginons deux trous noirs d'une dizaine de masses solaires chacun(valeur plus vraisemblable), alors la distance doit être comprise entre 0, 3 et0, 4 Mpc, et non proche de 40 Mpc.

Examinons maintenant l'hypothèse d'une coalescence de deux étoiles à neu-trons de 1, 4 M� chacune (m ≈ 2, 4). On aurait alors d ≈ 0, 012 Mpc soit3, 9.104 AL, ce qui situerait le système à l'intérieur de la Voie lactée, et nonde NGC4993 ! Rappelons que le centre de notre galaxie se trouve à environ2, 7.104 AL du Soleil. D'autre part, on devrait avoir r ≈ 300 km, ce qui estau moins dix fois supérieur au diamètre d'une étoile à neutrons (28 km envi-ron) ; ceci nous oblige à imaginer une pulvérisation des étoiles bien avant leurcontact physique direct. Mais si nous optons pour cette explication, alors nousne devons pas exclure que l'événement GW150914 corresponde, lui aussi, à unefusion d'étoiles à neutrons (avec r ≈ 110 km).

N'essayons pas de résoudre ces contradictions pour le moment, et attendonsde nouvelles observations.

44 Les ondes gravitationnelles dissipent-elles del'énergie ?

Rappelons que l'étude détaillée de ce pulsar binaire PSR 1913+16, constituéde deux étoiles à neutrons (l'une étant un pulsar radio, l'autre invisible) très rap-prochées, en rotation rapide autour du centre de gravité du système (période :7,75 h), a permis de déceler une accélération faible mais régulière, qui a puêtre interprétée, indirectement, comme la signature des ondes gravitationnelles.En e�et, cette accélération révèle un rapprochement progressif des deux étoiles,qu'on interprète comme une perte d'énergie, correspondant à l'énergie rayonnéesous forme d'ondes gravitationnelles, d'après la théorie d'Einstein. Cette décou-verte a valu le prix Nobel à Hulse et Taylor en 1993.

Le graphique qui suit illustre la décroissance de la période du pulsar binairePSR 1913 + 16 ; il est considéré comme la preuve d'une dissipation d'énergie.

Sur ce graphique se superposent, d'une part, la courbe observée, montrantl'avance (au sens où on parle de l'avance d'une horloge) du système PSR 1913+16 en fonction du temps (telle qu'elle a été établie à partir des mesures e�ec-

108

Page 109: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

tuées), et, d'autre part, la parabole théorique, calculée sur la base de l'émissiond'ondes gravitationnelles : les deux courbes coïncident d'une manière absolu-ment parfaite !

Cette coïncidence parfaite est de nature à frapper les esprits ; mais n'oublionspas, d'une part, que la forme parabolique de la courbe signi�e simplement quela dérivée dT

dt est constante (autrement dit que la représentation graphique dela fonction T = f(t) est une droite), et, d'autre part, que la pente de cettedroite peut résulter de plusieurs causes : non seulement l'émission d'ondes gra-vitationnelles, mais aussi les forces de marées ou l'e�et Shklovski, par exemple.Rappelons ce qu'est l'e�et Shklovski : c'est une variation de la période apparented'un système dont l'accélération radiale (projection du vecteur accélération surla ligne de visée) est non nulle. Or il est possible d'estimer l'accélération radialegalactique d'une étoile ou d'un système, connaissant sa position dans la galaxie,ainsi que celle de l'observateur. Le calcul utilise la courbe donnant la vitessede rotation des étoiles de la galaxie en fonction de la distance au centre, d'oùon déduit le vecteur accélération, qui est en principe dirigé vers le centre. Maisla densité de matière étant irrégulière, certaines étoiles peuvent subir un e�etShklovski anormal dû à l'attraction exercée par une structure particulière (brasgalactique par exemple).

109

Page 110: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Ajoutons que l'observation de la coalescence d'étoiles implique que ces étoilesse sont rapprochées avant de fusionner, ce qui suppose une perte d'énergie dusystème, qui s'explique tout naturellement par l'émission d'ondes gravitation-nelles.

Nous voudrions quand même poser cette question (que certains jugerontdépassée) : n'est-il pas possible d'expliquer l'accélération séculaire des pulsarsbinaires sans faire appel à cette dissipation d'énergie par des ondes gravitation-nelles ? Plusieurs pistes sont en cours d'étude.

45 L'hypothèse du transfert de moment cinétique

Voici donc l'hypothèse que nous avons sélectionnée. Notre calcul va se basersur la notion de force, comme en mécanique newtonienne.

Dans un premier temps, nous allons imaginer, comme dans la section sur lessystèmes doubles dans le cadre newtonien, deux étoiles de centres A et B et demasses m1 et m2, tournant autour de leur centre de gravité O sur des orbitescirculaires de rayons r1 et r2, à la vitesse angulaire ω. On notera r = r1 + r2

la distance qui sépare les deux étoiles ; c'est aussi le rayon de l'orbite du mobile�ctif. Nous notons m la somme des masses : m = m1 + m2, et m

′ la masse dumobile �ctif : m′ = m1.m2

m1+m2. De plus, nous notons R1 et R2 les rayons des deux

étoiles.

Nous supposons qu'à un instant donné s'exerce au point B une force (vec-teur bleu) dirigée vers le point A (donc vers O). Nous justi�ons cette directioncentripète par la conservation de l'énergie.

Dans la �gure qui suit, les deux étoiles sont supposées ponctuelles.

On doit comprendre qu'à l'instant où arrive au point B (centre de la secondeétoile) un message émis par la première étoile (en A), les autres points de laseconde étoile reçoivent eux aussi des messages ; mais ceux-ci n'ont pas été émissimultanément : les points qui sont plus proches de A reçoivent un message quia voyagé un peu moins longtemps, donc qui a été émis un peu plus tard, et ceuxqui sont plus loin de A reçoivent un message qui a voyagé un peu plus long-temps, donc qui a été émis un peu plus tôt. Il en résulte que les points qui sontplus proches de A vont subir une force qui ne va pas pointer exactement versA, mais un peu "à gauche" (les orbites étant parcourues dans le sens direct) ;les points qui sont plus loin de A vont subir une force qui va pointer un peu "àdroite". Ces forces vont exercer sur la seconde étoile un couple qui va tendre à lafaire tourner sur elle-même, de plus en plus vite, dans le sens direct (donc dansle même sens que le mouvement orbital). Par conservation du moment cinétiquetotal, l'accélération du "spin" (rotation de l'étoile sur elle-même) s'accompagne

110

Page 111: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

d'une décélération du mouvement orbital.

Dans la �gure suivante nous allons prendre en compte le rayon R2 non nulde l'étoile de centre B.

111

Page 112: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Formalisons ce qui vient d'être dit. Soit un point M de la seconde étoile,situé à la distance AB − x = r − x de A. Par rapport au point B , il reçoitun message émis un peu plus tard, l'intervalle de temps étant : xc . Pendant cetemps, le centre des cercles équipotentiels de la première étoile s'est déplacé deA en Ax, avec AAx = v1.

xc . La force qui s'exerce en M va donc faire avec [BA]

un angle dont la tangente est de l'ordre de : AAx

MA ≈AAx

BA ≈v1.xc.r = r1.ω.x

c.r .

Pour une masse in�nitésimale dm, le module de cette force est de l'ordre deG.m1.dm

r2 , et sa composante tangentielle (perpendiculaire à [BA]) est donc :

G.m1.dm

r2.r1.ω.x

c.r=G.m1.r1.ω.x

c.r3.dm.

Le moment de cette force tangentielle par rapport à B s'obtient en la mul-tipliant par x, ce qui donne :

G.m1.r1.ω.x2

c.r3.dm.

L'ensemble des points correspondant à une même valeur de x (−R2 < x <R2) est un disque obtenu en coupant l'étoile par un plan perpendiculaire à[BA] ; son rayon est

√R2

2 − x2, et son aire est π.(R22 − x2). Nous allons donc

faire une intégration en découpant l'étoile en tranches d'épaisseur in�nitésimaledx et d'aire π.(R2

2 − x2), donc de volume in�nitésimal : dV = π.(R22 − x2).dx.

Nous allons supposer que notre étoile est homogène (de densité constante, ducentre jusqu'à la surface). Si nous notons dm la masse de la tranche de volumedV , nous pouvons écrire : dmdV = m2

V = m243 .π.R

32

, donc :

dm =m2.dV

V=m2.dV43 .π.R

32

=3.m2.dV

4.π.R32

=3.m2.π.(R

22 − x2)

4.π.R32

.dx ;

dm =3.m2.(R

22 − x2)

4.R32

.dx.

Le moment global des forces qui s'exercent sur cette tranche d'épaisseur dxest donc :

G.m1.r1.ω.x2

c.r3.dm =

G.m1.r1.ω.x2

c.r3.3.m2.(R

22 − x2)

4.R32

.dx.

Le moment total des forces s'exerçant sur toutes les tranches s'obtient par inté-gration sur la variable x, variant de −R2 à R2 :

3.G.m1.m2.r1.ω

4.c.r3.R32

.

∫ R2

−R2

(R22 − x2).x2.dx =

3.G.m1.m2.r1.ω

4.c.r3.R32

.

[R2

2.x3

3− x5

5

]R2

−R2

;

ou encore :

3.G.m1.m2.r1.ω

4.c.r3.R32

.

[2.R5

2

3− 2.

R52

5

]=

3.G.m1.m2.r1.ω

4.c.r3.R32

.4

15.R5

2 =G.m1.m2.r1.R

22.ω

5.c.r3.

112

Page 113: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Appelons µ2 le moment cinétique de l'étoile B (c'est-à-dire de son spin). Sadérivée par rapport au temps est égale au moment des forces que nous venonsde calculer :

dµ2

dt=

3.G.m1.m2.r1.ω

4.c.r3.R32

.4

15.R5

2 =G.m1.m2.r1.R

22.ω

5.c.r3.

Dans la section sur les systèmes binaires en gravitation newtonienne, nousavons rappelé que r1

r = m2

m , ce qui entraîne :

m1.r1 =m1.m2.r

m= m′.r.

La formule précédente devient donc :

dµ2

dt≈ 1

5.ω

c.G.m2.m

r2.R2

2.

De même, pour la première étoile :

dµ1

dt≈ 1

5.ω

c.G.m1.m

r2.R2

1.

Appelons µ le moment cinétique orbital du système, autrement dit le momentcinétique orbital du mobile �ctif ; la conservation du moment cinétique totalimpose que :

dt= −

(dµ1

dt+dµ2

dt

)≈ −1

5.ω

c.G.m′

r2.(m1.R

21 +m2.R

22).

Comme nous souhaitons tester notre formule dans des situations où les or-bites sont elliptiques, nous allons compliquer un peu le problème : nous suppo-sons maintenant que r varie, et nous allons reprendre les formules vues dans lasection sur les orbites elliptiques et les lois de Képler.

Sachant que ω = dθdt , on peut écrire :

dµ ≈ −1

5.1

c.G.m′

r2.(m1.R

21 +m2.R

22).dθ.

Rappelons-nous que, pour une orbite elliptique, r = p1+e.cosθ , où p est le para-

mètre de l'ellipse, et e son excentricité ; on écrira donc :

dµ ≈ −1

5.G.m′

c.(m1.R

21 +m2.R

22).

(1 + e.cosθ)2

p2.dθ.

Pour un tour d'orbite, on aura :

∆µ ≈ −1

5.G.m′

c.p2.(m1.R

21 +m2.R

22).

∫ 2π

θ=0

(1 + e.cosθ)2.dθ.

113

Page 114: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Comme (1 + e.cosθ)2 = 1 + 2.e.cosθ+ e2.cos2θ = 1 + 2.e.cosθ+ e2.(

1+cos(2θ)2

),

on a (1 + e.cosθ)2 = 1 + e2

2 + 2.e.cosθ + e2

2 cos(2θ) ; par conséquent :∫ 2π

θ=0

(1+e.cosθ)2.dθ =

[(1 +

e2

2

).θ

]2π

θ=0

+2.e. [sinθ]2πθ=0+

e2

2.

[1

2.sin(2θ)

]2π

θ=0

= 2π.

(1 +

e2

2

),

ce qui entraîne :

∆µ ≈ −1

5.G.m′

c.p2.(m1.R

21 +m2.R

22).2π.

(1 +

e2

2

).

Si on néglige les variations pendant un tour d'orbite, on peut considérer que, àlong terme (sur un nombre su�sant de tours), µ décroît linéairement en fonctiondu temps ; on écrira :

dt=

∆µ

T;

dµ ≈ −1

5.G.m′

c.p2.(m1.R

21 +m2.R

22).2π.

(1 +

e2

2

).dt

T.

D'autre part, en appliquant la loi des aires à l'orbite du mobile �ctif (de massem′), en notant dA l'aire balayée par le rayon vecteur pendant le temps dt, Al'aire totale de l'ellipse, a son demi-grand axe, évaluons le moment cinétique µ :

µ = m′.r2.dθ

dt= 2.m′.

dA

dt= 2.m′.

A

T= 2.m′.

π.a2.√

1− e2

T;

µ≈ −1

5.G.m′

c.p2.(m1.R

21 +m2.R

22).2π.

(1 +

e2

2

).

T

2.m′.π.a2.√

1− e2.dt

T;

µ≈ −1

5.G.(m1.R

21 +m2.R

22)

c.p2.a2.√

1− e2.

(1 +

e2

2

).dt.

Nous savons que p = a.(1− e2) ; on a donc :

µ≈ −1

5.G.(m1.R

21 +m2.R

22)

c.a4.

1 + e2

2

(1− e2)52

.dt.

Nous avons vu, dans la section sur les systèmes doubles en théorie newtonienne,que dT

T = 3.dµµ ; par conséquent :

dT

T≈ −3

5.G.(m1.R

21 +m2.R

22)

c.a4.

1 + e2

2

(1− e2)52

.dt,

ou encore :dT

dt≈ − 3

5.c.(m1.R

21 +m2.R

22).

1 + e2

2

(1− e2)52

.G.T

a4.

114

Page 115: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Dans cette formule, il est possible d'éliminer a, qui est relié à T ,m1 etm2 par

la troisième loi de Képler, appliquée à l'orbite du mobile �ctif : T 2 = 4.π2.a3

G.m =

4.π2.a3

G.(m1+m2) , ou a = G13 .m

13 .T

23

(2.π)23

, ou encore a4 = G43 .m

43 .T

83

(2.π)83

, ce qui entraîne :

G.T

a4=

(2.π)83 .G.T

G43 .m

43 .T

83

= (2.π)83 .G−

13 .m−

43 .T−

53 .

On a donc :

dT

dt≈ − 3

5.c.(m1.R

21 +m2.R

22).

1 + e2

2

(1− e2)52

.(2.π)83 .G−

13 .m−

43 .T−

53 ;

dT

dt≈ −3

5.(2.π)

83 .G−

13

c.

1 + e2

2

(1− e2)52

.m−13 .T−

53 .m1.R

21 +m2.R

22

m1 +m2.

On peut écrire aussi :

m1.R21 +m2.R

22

m1 +m2≈ −5

3.c.G

13

(2.π)83

.(1− e2)

52

1 + e2

2

.(m1 +m2)13 .T

53 .dT

dt.

Sachant que c ≈ 3.108 m/s et que G ≈ 6, 67.10−11 m3.kg−1.s−2, on en tire :

m1.R21 +m2.R

22

m1 +m2≈ −1510.

(1− e2)52

1 + e2

2

.(m1 +m2)13 .T

53 .dT

dt.

Les masses sont exprimées ici en kg ; mais on peut aussi les exprimer enmasses solaires (M� ≈ 2.1030 kg) ; on obtient alors :

m1.R21 +m2.R

22

m1 +m2≈ −1510.

(1− e2)52

1 + e2

2

.213 .1010.(m1 +m2)

13 .T

53 .dT

dt;

m1.R21 +m2.R

22

m1 +m2≈ −19, 02.1012.

(1− e2)52

1 + e2

2

.(m1 +m2)13 .T

53 .dT

dt.

Rappelons que nous avons supposé que la matière était répartie uniformé-ment à l'intérieur des étoiles, ce qui est faux : en réalité, la densité est plusforte vers le centre. On peut donc dire que nous avons raisonné sur un rayon�ctif : c'est le rayon de la sphère dans laquelle il faudrait répartir la matièreuniformément pour obtenir la même accélération séculaire. Ce rayon �ctif estinférieur au rayon réel.

Appelons "rayon caractéristique" le nombreRc dé�ni parR2c =

m1.R21+m2.R

22

m1+m2;

c'est la moyenne quadratique pondérée des deux rayons �ctifs. Ce rayon carac-téristique détermine l'e�cacité du ralentissement séculaire du système.

115

Page 116: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

On a alors :

Rc ≈ 4, 36.(1− e2)

54(

1 + e2

2

) 12

.(m1 +m2)16 .T

56 .

(−1012.

dT

dt

) 12

.

Prenons le problème à l'envers, et utilisons cette formule pour calculer Rcdans le cas de quelques systèmes binaires.

Dans le tableau qui suit, les quatre premiers systèmes sont composés de deuxétoiles à neutrons (visibles ou non comme pulsars), le cinquième et le sixièmecomprennent une étoile à neutrons et une naine blanche, le dernier est composéde deux naines blanches.

système m1 (M�) m2 (M�) e T (s) −1012.dTdt Rc (km)PSR B1913+16 1,44 1,39 0,6 27900 2,4 21,3PSR B1534+12 1,33 1,35 0,27 36300 0,137 12PSR J0737-3039 1,34 1,25 0 8820 1,25 11PSR J1141-6545 1,30 0,99 0,2 17040 0,4 10,6PSR J0348+0432 2,03 0,172 0 8856 0,26 4,9PSR J0751+1807 1,34 0,138 0 21600 0,033 3,4WD J0651+2844 0,26 0,5 0 765 9,8 3,25

On estime généralement que le rayon des étoiles à neutrons est de l'ordre de10 à 20 km ; en supposant que la gravité soit équilibrée par la pression d'un gazparfait de neutrons dégénérés, on propose parfois la formule approximative sui-

vante, pour une étoile de masse m : R ≈ 16. 3

√M�m (en km). Pour m = 1, 4.M�,

on obtient : R ≈ 14, 3 km. Un calcul plus sophistiqué (mais peu �able, carl'équation d'état du gaz de neutrons est encore mal connue) suggère un rayonéquatorial compris entre 12, 5 et 17 km environ, selon la vitesse de rotation del'étoile. Pour comparaison, remarquons que, selon les estimations les plus ré-centes, le pulsar qui se trouve dans le système PSR J0348 + 0432 aurait unemasse de 2.M� et un rayon de 13± 2 km ; en admettant que le rayon soit bieninversement proportionnel à la racine cubique de la masse, on retrouve, pourune masse de 1, 4.M�, l'encadrement 12, 5 km < R < 17 km. Mais, compte-tenu du fait que la densité des étoiles à neutrons est plus forte vers le centrequ'à la surface, nous nous attendons à obtenir un rayon caractéristique un peuinférieur au rayon réel. Les résultats obtenus pour le deuxième, le troisième et lequatrième couples (12 km, 11 km, 10, 6 km) correspondent bien à notre attente,tandis que le premier (21, 3 km) est nettement trop élevé, ce qui nous incite àposer la question : l'accélération du système PSR B1913 + 16 ne serait-elle pasbrouillée par un e�et Shklovski galactique anormal ? Or il se trouve qu'une causepossible de cette anomalie peut être facilement identi�ée : il s'agit d'une impor-tante concentration de matière interstellaire (le bras d'Ophiucus) située juste

116

Page 117: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

derrière le pulsar binaire, selon la ligne de visée. Il est malheureusement trèsdi�cile d'évaluer les forces gravitationnelles éventuelles qui pourraient s'exercersur le pulsar.

Pour les spécialistes, c'est plutôt l'avant-dernier couple (PSR J0751+1807)qui serait a�ecté par l'e�et Shklovski. Laissons donc ce système de côté.

Intéressons-nous plutôt au dernier couple : WD J0651 + 2844, formé dedeux naines blanches très rapprochées et tournant autour de leur centre degravité commun à plus de 600 km.s−1, en s'éclipsant mutuellement à inter-valles réguliers. Les astronomes ont pu évaluer les rayons de ces deux étoiles :R1 ≈ 26 000 km et R2 ≈ 9 700 km. Notre modèle, qui annonce un rayon carac-téristique de l'ordre de 2 à 3 km, est donc pris en défaut ! En e�et, il prévoit,semble-t-il, une accélération du système beaucoup plus importante que celle quia été mesurée. Pourquoi notre calcul donne-t-il un rayon caractéristique rai-sonnable pour les couples formés de deux étoiles à neutrons, et beaucoup tropfaible pour les couples comprenant des naines blanches ? Une explication peutêtre proposée : l'e�et de marée, négligeable dans le cas des étoiles à neutrons,devient prépondérant chez les naines blanches, ce qui fait que le spin ne peutpas accélérer librement. On peut préciser ce phénomène : les astrophysiciens ad-mettent que les naines blanches tournant sur des orbites serrées calent leur spinsur leur période orbitale, de sorte qu'elles présentent toujours la même face l'uneà l'autre, comme la Lune par rapport à la Terre. Elles sont fortement déforméespar deux bourrelets de marée opposés. Si l'axe de ces bourrelets forme un angleε avec l'axe AB joignant les centres des deux étoiles, l'attraction exercée parchaque étoiles sur les bourrelets de l'autre va générer un couple proportionnelà sin ε. Il existe une valeur précise de ε pour laquelle ce couple annule exacte-ment le couple décrit précédemment (le couple d'attraction di�érentielle dû à lavitesse �nie de propagation de la gravité). L'angle ε va donc se caler sur cetteposition d'équilibre. Chez les étoiles à neutrons, au contraire, les bourrelets demarée sont à peu près nuls, de sorte que, quel que soit ε, le couple qui leur estassocié ne pourra jamais équilibrer le couple d'attraction di�érentielle que nousvenons de décrire.

Cette hypothèse, basée sur le couple d'attraction di�érentielle dû à la vitesse�nie de propagation de la gravité, est fragile, car elle se base sur un comporte-ment bien particulier de la force d'attraction. Malgré cette incertitude sur desoptions fondamentales, nous avons choisi de présenter quand même ce calcul,car les rayons caractéristiques obtenus par cette méthode se rapprochent de ma-nière frappante des valeurs attendues.

Pour le moment, il semble di�cile de proposer une explication solide et chif-frée de l'accélération séculaire des pulsars et des naines blanches binaires, pou-vant rivaliser avec l'explication classique. Pour la majorité des astronophysiciens,l'interprétation la plus vraisemblable, et la mieux documentée, de l'accélérationséculaire, reste celle qui se base sur des ondes gravitationnelles consommatrices

117

Page 118: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

d'énergie. Au cas ou les observations futures con�rmeraient cette interpréta-tion, il resterait à déterminer sous quelle forme cette énergie est stockée ; car,pour la physique moderne (centrée sur la physique quantique), toutes les formesd'énergie s'insèrent dans le cadre déterminé par les particules élémentaires etleurs relations par l'intermédiaire des forces fondamentales ; mais la déformationd'une entité abstraite appelée espace-temps n'entre pas, pour le moment, dansce cadre. Les ondes gravitationnelles sont un sujet sensible sur lequel l'accordentre les idées classiques d'Einstein et celles de la mécanique quantique est loind'être réalisé.

Inversement, au cas où les observations futures s'écarteraient des prévisionsbasées sur la relativité générale, il serait intéressant d'explorer de manière plusapprofondie la piste que nous venons de proposer. Rappelons qu'elle se basesur l'hypothèse d'une transmission du message gravitationnel à la vitesse dela lumière, avec une pseudo-accélération centrale (ce qui signi�e que le vecteurpseudo-accélération pointe vers le corps émetteur, quelles que soient sa vitesseet sa position).

46 L'hypothèse de l'information gravitationnelleintriquée

Rappelons par un exemple le phénomène d'intrication, aujourd'hui bienconnu en physique quantique. Imaginons une expérience permettant de pro-duire deux particules A et B de vitesses opposées et de spins opposés. Rien nepermet de prévoir quel va être le spin de A, ni celui de B. Mais si on arriveà mesurer le spin de A, on peut en déduire celui de B, et réciproquement. Onpeut, à priori, proposer deux interprétations de cette expérience.

La première est l'interprétation de la physique classique, déterministe : lesspins des deux particules étaient parfaitement déterminés dès le début, à l'ins-tant de leur séparation, mais l'expérimentateur n'en était pas informé. A partirdu moment où il prend connaissance du spin de la première, il lui su�t de ré-�échir un peu pour en déduire celui de l'autre...

La seconde interprétation est celle de la mécanique quantique, probabiliste :les spins des deux particules sont indéterminés au moment de leur séparation.C'est seulement au moment où l'expérimentateur mesure le spin de la particuleA que celui de la particule B se �xe sur la valeur opposée, comme si l'informa-tion avait été transmise instantanément. Les deux particules sont intriquées :elles forment un tout inséparable jusqu'à ce qu'une cause extérieure (commel'intervention de l'expérimentateur) vienne casser cette unité. C'est ce qu'onappelle le paradoxe EPR, formalisé et critiqué par Einstein, Podolski et Rosen.

118

Page 119: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

D'un point de vue statistique, ces deux interprétations ne sont pas équi-valentes ; en compilant de nombreuses observations et en les traitant avec lesfameuses inégalités de Bell, on arrive à une conclusion indiscutable : c'est laseconde interprétation qui est la bonne. Elle se situe au c÷ur de la grande ré-volution scienti�que du vingtième siècle : la mécanique quantique.

Dans la section précédente, nous avons supposé l'existence d'un message gra-vitationnel transmis à la vitesse de la lumière ; ce message pourrait être trans-porté par une particule, qu'on pourrait assimiler au graviton. Cette particulesert de vecteur à des échanges de quanta d'impulsion entre les corps matériels,qui sont à la fois émetteurs et récepteurs. L'impulsion transportée par un gra-viton n'est pas déterminée à l'instant de son émission ; mais, comme les spinsdes deux particules dans l'expérience décrite ci-dessus, le quantum d'impulsionà l'émission et le quantum à la réception sont liés par intrication : ils serontopposés, comme les spins dans l'exemple précédent. Selon l'égalité ~F = d~p

dt ,les forces qui en résultent seront opposées aussi, ce qui assure la conservationde l'énergie-impulsion totale du système. C'est ce que j'appellerai l'informationgravitationnelle intriquée.

Cette interprétation de la gravité, basée sur des échanges de quanta d'im-pulsion véhiculés par des gravitons se déplaçant à la vitesse de la lumière, ainsique sur l'intrication et sur la non-localité de l'information ainsi transmise, esten contradiction avec toutes les interprétations classiques, qui sont exclusive-ment locales. Ces interprétations classiques sont celles qui se basent soit surle potentiel gravitationnel, comme la théorie de Newton, soit sur une métriqueparticulière de l'espace-temps, comme la relativité générale.

On dit souvent que la relativité générale doit être valable à l'échelle ma-croscopique, mais qu'à l'échelle microscopique elle devra nécessairement êtremodi�ée pour assurer sa compatibilité avec la mécanique quantique. Mais il sepourrait que l'incompatibilité soit plus fondamentale, et se manifeste déjà auniveau macroscopique.

Certains physiciens ont proposé un principe, baptisé principe holographique,selon lequel toute l'information contenue dans un volume quelconque, limité parune surface, serait présente sous forme codée sur cette surface. L'origine de cetteré�exion provient de l'étude des trous noirs de Schwarzschild : nous avons déjàparlé du problème de la perte d'information qui se produit lorsqu'un corps estenglouti par un trou noir. Selon le principe holographique, cette informationne serait pas perdue, puisque toujours présente (donc récupérable) à la surfacedu trou noir (son horizon). Ceci résout aussi le problème de la transmission del'information de l'intérieur du trou noir vers l'extérieur : comment un corps gra-vitant autour d'un trou noir peut-il ressentir l'in�uence de la matière contenuedans celui-ci, si aucune information, quelle que soit sa vitesse, ne peut en sortir ?Le principe holographique répond que l'information n'a pas besoin de sortir dutrou noir, puisqu'elle est entièrement codée sur son horizon, ou sur toute autre

119

Page 120: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

surface contenant le trou noir.

Certaines théories de la gravitation, comme celle d'Eric Verlinde, se basentsur le principe holographique. Comme nous l'avons vu dans la section sur lesondes gravitationnelles en métrique de Ni, s'il n'est pas très di�cile de modi�erla théorie de Newton pour la rendre relativiste, il est au contraire très di�cile d'yintégrer une transmission de l'information à vitesse �nie. Rappelons que, selonla théorie de Newton, toute surface fermée est traversée à chaque instant par un�ux vectoriel proportionnel à la masse totale située dans le volume emprisonnépar cette surface. Le principe holographique fait de même (en remplaçant éven-tuellement la masse par l'énergie-impulsion). L'information gravitationnelle n'apas besoin d'être transmise : elle est non-locale (ou, si on préfère, multi-locale).Elle est disponible partout, à tout moment. Le principe holographique résout àla fois les problèmes soulevés par les trous noirs de Schwarzschild, et ceux quirésulteraient d'une transmission de la gravité à vitesse �nie.

Le principe holographique peut être considéré comme une tentative pourintégrer les idées de la mécanique quantique (comme l'intrication et la non-localité) dans les théories classiques (locales) comme la relativité générale, touten essayant de préserver la notion de trou noir de Schwarzschild, qui concentreles critiques de la physique quantique.

Mais l'événement GW170817, dont nous avons parlé précédemment, a étédétecté à la fois dans le domaine gravitationnel et dans le domaine électroma-gnétique, avec un décalage temporel négligeable, compte-tenu de la distance(plusieurs dizaines de milliers d'années-lumière au moins). Ceci est compatibleavec une transmission de l'information gravitationnelle à la vitesse de la lumière(avec une marge d'erreur très faible), mais sûrement pas avec une transmissioninstantanée. Ceci contredit le principe holographique.

Une autre idée très à la mode, destinée à rapprocher la relativité générale dela mécanique quantique, est connue sous le nom "ER=EPR". Cette formule ré-sume l'hypothèse selon laquelle les trous de vers postulés par Einstein et Rosenne seraient rien d'autre que l'intrication de la mécanique quantique. Bien en-tendu, les trous de vers n'ont jamais été observés, mais Einstein s'est intéressé àla géométrie possible d'un espace-temps courbe (comme le faisait Pointcarré à lamême époque), et il a con�é l'étude des trous de vers (ces tunnels reliant direc-tement des points de l'espace-temps apparemment éloignés les uns des autres)à ses étudiants. Avec le recul, on se rend compte que ces trous de vers, s'ilsexistaient, pourraient injecter un peu de non-localité dans la relativité générale,qui est fondamentalement une théorie purement locale. Mais pour le momentles trous de vers sont du domaine de l'imaginaire, tandis que l'intrication est unphénomène parfaitement réel et de mieux en mieux étudié.

Comme on le voit, les physiciens cherchent actuellement à généraliser lesprincipes de la mécanique quantique à l'ensemble de la physique, aussi bien

120

Page 121: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

macroscopique que microscopique ; en même temps, ils essaient de trouver descompromis pour préserver la relativité générale ; car ils ont bien compris que, s'ildevait y avoir un jour une confrontation entre relativité générale et mécaniquequantique, c'est la première qui devrait céder la place.

47 Qu'est-ce que l'e�et Lense-Thirring ?

L'e�et Lense-Thirring (entraînement des référentiels, "frame-dragging" enAnglais) est un phénomène encore mal connu, qui découle, mathématiquement,de la relativité générale, même s'il semble, à première vue, contredire les prin-cipes qui ont présidé à son élaboration.

Cet e�et me semble plus facile à comprendre grâce à l'éclairage apporté parla métrique de Ni, et surtout par la notion d'"immobilité gravitationnelle", telleque nous l'avons dé�nie précédemment. Pour un observateur gravitationnelle-ment immobile, le champ (en termes de quadrivecteurs d'entraînement) produit

par l'ensemble de l'univers est de la forme a.e~0 (a > 0) ; le quadrivecteur produit

par un corps M donné est b.e~wc , avec b = Gm

r2 . En supposant que ces quadrivec-

teurs soient additifs, la résultante sera a.e~0 + b.e

~wc = A.e

~Wc . On peut facilement

calculer A et ~W , puisque A.ch~Wc = a+ b.ch ~wc et A.sh

~Wc = b.sh ~wc :

A2 =

(A.ch

~W

c

)2

(A.sh

~W

c

)2

=

(a+ b.ch

~w

c

)2

−(b.sh

~w

c

)2

;

A2 = a2 + b2 + 2ab.ch~w

c;

A =

√a2 + b2 + 2ab.ch

~w

c;

~V

c= th

~W

c=sh

~Wc

ch~Wc

=b.sh ~wc

a+ b.ch ~wc.

Ce vecteur ~V correspond à l'entraînement des référentiels par le corps M consi-déré.

Si |b| >> |a|, on a :~Vc ≈

b.sh ~wc

b.ch ~wc

= th ~wc = ~vc . Ceci signi�e que, si le corps

M est isolé dans l'univers (a = 0), alors tous les repères inertiels subissent unentraînement égal à la vitesse ~v du corps M ; autrement dit, ce corps, à luiseul, dé�nit l'immobilité gravitationnelle dans l'ensemble de l'univers. Ceci estconforme au principe de Mach, selon lequel un corps isolé dans l'univers estnécessairement immobile.

121

Page 122: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Si, au contraire, a 6= 0, on aura (pour r assez grand) : |b| = Gmr2 << |a|,

donc~Vc ≈

b.sh ~wc

a =Gm sh ~w

c

r2.|a| . L'entraînement tend très vite vers ~0 quand r croît.

(Bien sûr, quand r tend vers 0, |b| devient supérieur à |a|, donc, comme précé-

demment, ~V tend vers ~v.)

Un cas particulièrement intéressant à étudier est celui où |b| n'est pas né-gligeable par rapport à |a|. Ceci pourra se produire soit près de la surface d'unastre particulièrement compact ("trou noir", étoile à neutrons), soit à l'intérieurd'une galaxie ou d'un amas globulaire, où l'action gravitationnelle des étoiles"proches" peut éventuellement égaler ou dépasser celle de l'ensemble des astreslointains (autres galaxies).

Récemment (en mai 2011), après des mois de travail, destinés à identi�er età éliminer les bruits parasites, ont été publiés les résultats de l'expérience Gra-vity Probe B, qui semblent mettre en évidence (sous réserve de con�rmation,car les discussions ne sont pas closes) l'e�et Lense-Thirring, dans un cas un peuparticulier : il s'agit d'un "e�et Lense-Thirring di�érentiel". Cette expérienceétait basée sur l'idée suivante : lorsqu'un satellite (comme Gravity Probe B)tourne autour de la Terre, à une altitude modérée, la face de la Terre tournéevers le satellite est nettement plus proche que la face opposée, et son attrac-tion est donc beaucoup plus forte. Donc il n'est plus possible de considérer latotalité de la masse terrestre concentrée en un point, comme nous l'avons faitdans le cas du Soleil et de son système planétaire : il faut considérer que chaquepartie élémentaire (dm) de la masse terrestre produit à la fois un potentiel gra-vitationnel et un entraînement du référentiel. On fait appel au calcul intégralpour reconstituer l'e�et global. L'entraînement dû aux parties les plus proches(à l'aplomb, sous le satellite) l'emporte sur l'entraînement dû aux parties lesplus éloignées (aux antipodes). L'entraînement résultant se fait dans le sens dela rotation de la Terre ; mais il décroît très vite avec la distance, et s'annule àl'in�ni. L'entraînement di�érentiel (qui s'exerce plus fortement sur la partie dusatellite qui est la plus proche du sol) produit un couple qui est susceptible defaire tourner un gyroscope (l'e�et étant proportionnel à la dérivée de l'entraîne-ment par rapport à la distance). C'est de cette façon que l'e�et Lense-Thirringa été testé par Gravity Probe B. Mais on pourrait imaginer de le tester plusdirectement, par exemple par une étude �ne de l'e�et Shapiro, qui doit êtrelégèrement dissymétrique dans le cas d'un corps en rotation rapide.

Retenons que la notion d'entraînement des référentiels découle très naturel-lement des idées qui sont à l'origine de notre étude ; notre façon de la présenterlaisse entendre qu'il pourrait exister non seulement un "e�et Lense-Thirringdi�érentiel" (celui qui a été testé par Gravity Probe B), mais aussi un "e�etLense-Thirring intégral", dont nous allons reparler au sujet de la rotation desgalaxies.

L'e�et Lense-Thirring se situe à la limite des possibilités techniques actuelles,

122

Page 123: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

mais on peut penser que, dans l'avenir, il sera une clé essentielle dans l'étudede la gravitation.

48 La matière noire existe-t-elle ?

A l'origine, le problème de la matière noire a été soulevé par l'étude de lacourbe de rotation des galaxies. On peut, en première approximation, modéliserune galaxie spirale comme un disque en rotation, formé d'étoiles tournant toutessur des orbites circulaires, à une vitesse variable selon la distance au centre. Lamesure de la vitesse des étoiles se fait par e�et Doppler. On s'aperçoit que lavitesse angulaire est constante (donc que la vitesse linéaire est proportionnelle àla distance au centre), à partir du centre de la galaxie jusqu'à une distance cri-tique. On peut donc dire qu'une grande partie de la galaxie tourne à la manièred'un solide. Au-delà de la distance critique, la vitesse angulaire décroît, maisla vitesse linéaire, elle, décroît très peu, et se stabilise. D'autre part, l'étude dunombre, de la nature et de la répartition des étoiles visibles permet une premièreévaluation de la masse en fonction de la distance au centre. Cette évaluationest ensuite a�née en prenant en compte le "trou noir" central de la galaxie,les nuages de gaz et de poussières, les étoiles mortes, planètes, corps de toutessortes, pour la plupart invisibles, dont la présence est certaine, mais dont l'abon-dance est di�cile à estimer. Ensuite, on calcule, selon les lois de la gravitation,la courbe de rotation théorique de la galaxie, puis on la compare à la courbemesurée. On constate alors que les deux courbes sont bien di�érentes ; entreautres di�érences, la courbe calculée montre une décroissance très rapide de lavitesse linéaire au-delà de la distance critique. Et lorsqu'on cherche à expliquerce décalage, une remarque s'impose tout naturellement : la courbe calculée serapprocherait beaucoup plus de la courbe mesurée si on supposait que la masseévaluée a été très fortement sous-estimée. Et la même conclusion revient pourtoutes les galaxies étudiées ! Et pas seulement pour les galaxies : l'étude desamas globulaires montre aussi des anomalies de même nature.

Les astronomes ont passé en revue et estimé le plus précisément possible tousles oublis pouvant expliquer cette sous-évaluation de la masse totale, et, tousles calculs ayant été refaits, ils ont été obligés de con�rmer qu'il y a bien unemasse manquante, actuellement évaluée à 80% de la masse totale de l'univers(soit quatre fois plus que la matière "conventionnelle") !

De nombreuses hypothèses ont été formulées pour expliquer cette masse man-quante, par exemple l'existence de particules massives inconnues interagissantpeu avec la matière ordinaire (WIMP : weakly interacting massive particles).La théorie MOND a également été imaginée pour résoudre ce problème : cettethéorie de la gravitation suppose que l'attraction est en 1

r2 pour des distancesmodérées (dans le système solaire par exemple), en 1

r au-delà.

123

Page 124: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

La rotation des galaxies est un phénomène complexe : il est possible que desexplications très diverses contiennent une part de vérité. Mais, dans le cadre dutravail qui nous occupe, il y en a une qu'il me semble intéressant de mettre enavant : c'est le rôle de l'entraînement des référentiels (e�et Lense-Thirring).

Dans la partie centrale de la galaxie, qui tourne comme un solide, les ré-férentiels inertiels ("gravitationnellement immobiles") doivent tourner aussi !Pourquoi ? L'explication est simple. Plaçons-nous en un point P quelconque àl'intérieur d'une galaxie. En ce point s'exerce l'in�uence d'un grand nombred'étoiles ei, dont la résultante est le quadrivecteur d'entraînement global :∑i xi.

(ch ~wi

c + sh ~wi

c

)= x.

(ch ~wc + sh ~wc

). Précisons que x.ch ~wc est la compo-

sante "énergie" (scalaire) de ce quadrivecteur, et x.sh ~wc sa composante "impul-sion" (vecteur à 3 dimensions). On peut penser que c'est la contribution gravita-tionnelle des étoiles proches qui doit être dominante au point P . Si les positionset les vitesses de ces étoiles étaient réparties aléatoirement par rapport à P , lasomme vectorielle ("impulsion") x.sh ~wc devrait s'annuler. Mais les mouvementsdes étoiles dans la galaxie sont ordonnés, et les vitesses des étoiles proches sontorientées sensiblement dans la même direction. Pour cette raison, au point P ,la composante "impulsion" du quadrivecteur d'entraînement ne s'annule pas :les repères dits "gravitationnellement immobiles" tournent dans le même sensque les étoiles proches, mais moins vite, en raison du "contre-entraînement" dûaux étoiles lointaines et, plus particulièrement, à celles du bulbe galactique.

Il en résulte que, par rapport à leurs repères inertiels locaux, les étoilestournent moins vite que ne pourrait le croire un observateur situé loin de cettegalaxie ! Si cette déduction est exacte, alors la force centrifuge générée par leurmouvement orbital autour du centre galactique pourrait avoir été surestimée parles observateurs distants (car le calcul des orbites doit se faire dans un repèreinertiel local, et non dans un repère inertiel lié à l'observateur) ; par conséquent,la force centripète due à la gravité (qui est équivalente à la précédente, maisde sens contraire) a dû être sous-estimée dans les mêmes proportions. On peutremarquer aussi que la période T est sous-estimée par l'observateur distant :quand il croit qu'une étoile a fait un tour complet, les observateurs locaux, quisont a�ectés par l'entraînement des référentiels, estiment qu'elle n'en a parcouru

qu'une fraction. D'après la formule keplerienne T 2 = 4.π2.a3

G.M , on voit clairementque le fait de sous-estimer la période T équivaut à surestimer la masse M . Il sepourrait donc que la masse manquante, invoquée pour expliquer les orbites desétoiles à l'intérieur des galaxies, ne soit plus nécessaire...

Résumons la situation actuelle, concernant le problème de la matière noire :de très nombreuses observations concordantes montrent que les mouvements desastres ne peuvent pas s'expliquer, dans le cadre �xé par la relativité générale,sans faire appel à une "masse manquante" considérable. Mais les recherchesn'ont pas permis d'identi�er cette masse manquante. En particulier, l'hypo-thèse de particules inconnues très massives et peu interactives (WIMP) semble

124

Page 125: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

de moins en moins vraisemblable : des programmes de recherche ciblée, menésdans les grands accélérateurs de particules, sont restés sans résultat. D'autrepart, la con�rmation de la loi empirique de Tully-Fisher, étendue à des classestrès diverses de galaxies, semble contredire l'existence de cette masse manquante.Bien sûr, il est possible d'adapter la relativité générale de manière ad hoc pourrésoudre ce problème, partiellement ou totalement : c'est ce que fait la théorieMOND, qui se base sur une loi d'attracion modi�ée. Mais il se pourrait que laprise en compte du quadrivecteur d'entraînement, que j'ai introduit pour desraisons qui sont loin d'être gratuites, su�se à apporter un éclairage nouveau surla rotation des galaxies, et donc sur la matière noire.

49 Un exemple de calcul

Considérons, dans un plan, une couronne de matière de rayon R, de largeurdR, de densité uniforme, tournant autour de son centre O à la vitesse angulaireω (ou à la vitesse linéaire v = R.ω). Notre but est d'étudier l'entraînementproduit au point P , situé dans le même plan, tel que OP = r, d'abord par lepoint matériel M , puis, en intégrant sur φ, par l'ensemble de la couronne. Nousnotons ρ la densité de matière (par unité d'aire) à l'intérieur de la couronne, cequi se traduit par :

dm = ρ.R.dR.dφ.

Cette masse dm, de vitesse ~v, possède un quadrivecteur énergie-impulsion(dE, d~p) tel que :

dE = dm.c2.chw

c≈ dm.c2 et :

c.d~p = dm.c2.sh~w

c= dm.c2.ch

w

c.~v

c≈ dm.c.~v.

125

Page 126: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

L'entraînement produit en P par cette masse dm sera également un qua-drivecteur, proportionnel au précédent. Sera-t-il inversement proportionnel àla distance MP , ou à son carré MP 2 ? Nous avions laissé ouvertes ces deuxoptions dans la section sur l'hypothèse du champ d'entraînement. Dans notreexemple, nous allons choisir la seconde option. Ceci signi�e (en reprenant lesnotations introduites précédemment) que le champ produit au point P aurapour composante "énergie" :

dE(r) =dE

MP 2≈ dm.c2

MP 2,

et pour composante "impulsion" :

c.d ~P(r) =c2.d~p

MP 2≈ dm.c

MP 2.~v.

La loi des cosinus, appliquée au triangle (OPM), donne :

MP 2 = R2 + r2 − 2.R.r.cosφ.

De plus, nous avons dit que dm = ρ.R.dR.dφ ; il s'ensuit que :dE(r) ≈ ρ.R.dR.dφ.c2

R2+r2−2.R.r.cosφ ;

c.d ~P(r) ≈ ρ.R.dR.dφ.cR2+r2−2.R.r.cosφ .~v.

Pour le moment, R et r sont �xes ; nous faisons seulement varier φ. On adonc :

E(r) ≈ ρ.R.dR.c2.∫ π

−π

R2 + r2 − 2.R.r.cosφ= ρ.R.dR.c2.A(r),

où A(r) est l'intégrale dé�nie par :

A(r) =

∫ π

−π

R2 + r2 − 2.R.r.cosφ.

En ce qui concerne la composante "impulsion", remarquons que le vecteur vi-tesse ~v du pointM a pour composantes, dans le repère (Oxy) : (−v.sinφ, v.cosφ) ;si nous considérons maintenant le pointM ′ symétrique deM par rapport à (Ox),les composantes de son vecteur vitesse seront : (−v.sinφ, v.cosφ). Nous voyonsque, dans notre intégration, les composantes parallèles à (Ox) vont s'annuler, etl'impulsion résultante sera parallèle à (Oy). Nous ne prendrons donc en compteque cette composante dans notre calcul :

c.dP(r) ≈ ρ.R.dR.dφ.c

R2 + r2 − 2.R.r.cosφ.v.cosφ ;

c.P(r) ≈ ρ.R.dR.c.v.∫ π

−π

cosφ.dφ

R2 + r2 − 2.R.r.cosφ= ρ.R.dR.c.v.B(r),

126

Page 127: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

où B(r) est l'intégrale dé�nie par :

B(r) =

∫ π

−π

cosφ.dφ

R2 + r2 − 2.R.r.cosφ.

L'entraînement ~V produit par la couronne au point P est perpendiculaireau rayon [OP ], et son module est donné par :

V

c=c.P(r)

E(r)=ρ.R.dR.c.v.B(r)

ρ.R.dR.c2.A(r)=v

c.B(r)

A(r).

Nous allons donc calculer ces deux intégrales A(r) et B(r).

Nous allons d'abord poser : a = R2 + r2 ;

b = 2.R.r.

Avec cette notation : A(r) =

∫ π−π

dφa−b.cosφ ;

B(r) =∫ π−π

cosφ.dφa−b.cosφ .

Nous allons faire ensuite ce changement de variable très classique : t = tanφ2 ,

qui entraîne : cosφ = 1−t21+t2 et dφ = 2.dt

1+t2 .

Après avoir fait les substitutions, nous obtenons :

A(r) =

∫ π

−π

a− b.cosφ=

∫ ∞−∞

1

a− b. 1−t21+t2

.2.dt

1 + t2;

A(r) =

∫ ∞−∞

2.dt

a.(1 + t2)− b.(1− t2)=

∫ ∞−∞

2.dt

(a− b) + (a+ b).t2;

A(r) =2

a− b.

∫ ∞−∞

dt

1 + a+ba−b .t

2.

Posons maintenant : u =√

a+ba−b .t, qui entraîne : dt =

√a−ba+b .du. Remarquons

qu'on a toujours : a− b > 0 pour r 6= R.

A(r) =2

a− b.

∫ ∞−∞

√a−ba+b .du

1 + u2=

2√a2 − b2

.

∫ ∞−∞

du

1 + u2.

Nous savons que∫

du1+u2 = Arctan u, ce qui nous permet de conclure que :

A(r) =2√

a2 − b2. [Arctan u]

∞−∞ =

2√a2 − b2

.[π

2−(−π

2

)]=

2.π√a2 − b2

.

127

Page 128: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Puisque a = R2+r2 et b = 2.R.r, on a a2−b2 = R4+2.R2.r2+r4−4.R2.r2 =R4 − 2.R2.r2 + r4 = (R2 − r2)2, donc

√a2 − b2 = |R2 − r2|, ce qui entraîne :

A(r) =2.π

|R2 − r2|.

Pour calculer B(r), nous allons faire le même changement de variable.

B(r) =

∫ π

−π

cosφ.dφ

a− b.cosφ=

∫ +∞

−∞

1−t21+t2

a− b. 1−t21+t2

.2.dt

1 + t2;

B(r) =

∫ +∞

−∞

2. 1−t2

1+t2 .dt

a.(1 + t2)− b.(1− t2)=

∫ +∞

−∞

2. 1−t2

1+t2 .dt

(a− b) + (a+ b).t2;

B(r) = 2.

∫ +∞

−∞

1

(1 + t2). [(a− b) + (a+ b).t2].(1− t2).dt.

La fraction 1(1+t2).[(a−b)+(a+b).t2] peut s'écrire sous forme d'une somme :

1

(1 + t2). [(a− b) + (a+ b).t2]=

α

1 + t2+

β

(a− b) + (a+ b).t2,

où les coe�cients α et β sont faciles à calculer :

1

(1 + t2). [(a− b) + (a+ b).t2]=α.[(a− b) + (a+ b).t2

]+ β.(1 + t2)

(1 + t2). [(a− b) + (a+ b).t2];

1 = α.[(a− b) + (a+ b).t2

]+ β.(1 + t2) ;

1 = [α.(a− b) + β] + [α.(a+ b) + β] .t2.

Il faut donc résoudre le système : α.(a− b) + β = 1 ;

α.(a+ b) + β = 0.

On obtient facilement :α = − 1

2.b = − 14.R.r ;

β = a+b2.b = R2+r2+2.R.r

4.R.r = (R+r)2

4.R.r .

Il s'ensuit que :

B(r) = 2.

∫ +∞

−∞

1 + t2+

β

(a− b) + (a+ b).t2

].(1− t2).dt.

128

Page 129: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Nous allons poser :B1(r) =

∫ +∞−∞

1+t2

].(1− t2).dt

B2(r) =∫ +∞−∞

(a−b)+(a+b).t2

].(1− t2).dt

de manière à avoir : B(r) = 2.B1(r) + 2.B2(r).

B1(r) = α.

∫ ∞−∞

1− t2

1 + t2.dt = α.

∫ ∞−∞

2− (1 + t2)

1 + t2.dt = α.

∫ ∞−∞

[2

1 + t2− 1

].dt ;

B2(r) =

∫ +∞

−∞

(a− b) + (a+ b).t2

].(1− t2).dt =

β

a− b.

∫ +∞

−∞

1− t2

1 + a+ba−b .t

2.dt ;

B2(r) =β

a+ b.

∫ +∞

−∞

a+ba−b

(1− t2

)1 + a+b

a−b .t2.dt =

β

a+ b.

∫ +∞

−∞

a+ba−b −

a+ba−b .t

2

1 + a+ba−b .t

2.dt ;

B2(r) =β

a+ b.

∫ +∞

−∞

(1 + a+b

a−b

)−(

1 + a+ba−b .t

2)

1 + a+ba−b .t

2.dt ;

B2(r) =β

a+ b.

∫ +∞

−∞

[1 + a+b

a−b

1 + a+ba−b .t

2− 1

].dt.

Remarquons que βa+b = 1

2.b = −α.

B1(r) + B2(r) = α.

∫ ∞−∞

[2

1 + t2− 1

].dt− α

∫ +∞

−∞

[1 + a+b

a−b

1 + a+ba−b .t

2− 1

].dt ;

B1(r) + B2(r) = α.

∫ ∞−∞

[2

1 + t2−

1 + a+ba−b

1 + a+ba−b .t

2

].dt ;

B1(r) + B2(r) = 2.α.

∫ ∞−∞

dt

1 + t2− α.

∫ ∞−∞

a−ba−b + a+b

a−b

1 + a+ba−b .t

2.dt ;

B1(r) + B2(r) = 2.α.

∫ ∞−∞

dt

1 + t2− α.

∫ ∞−∞

2.aa−b

1 + a+ba−b .t

2.dt ;

B(r) = 2.B1(r) + 2.B2(r) = 4.α.

∫ ∞−∞

dt

1 + t2− 4.a.α

a− b.

∫ ∞−∞

1

1 + a+ba−b .t

2.dt.

Dans la seconde intégrale, posons u =√

a+ba−b .t ; ceci signi�e que dt =

√a−ba+b .du.

B(r) = 4.α.

∫ +∞

−∞

dt

1 + t2− 4.a.α

a− b.

∫ +∞

−∞

1

1 + u2.

√a− ba+ b

.du ;

129

Page 130: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

B(r) = 4.α.

∫ +∞

−∞

dt

1 + t2− 4.a.α√

a2 − b2.

∫ +∞

−∞

du

1 + u2;

B(r) = 4.α.

(1− a√

a2 − b2

).

∫ +∞

−∞

dt

1 + t2;

B(r) = − 1

R.r.

(1− R2 + r2

|R2 − r2|

).[Arctan t]+∞−∞ ;

B(r) = − 1

R.r.

(1− R2 + r2

|R2 − r2|

).[π

2−(−π

2

)];

B(r) = − π

R.r.

(1− R2 + r2

|R2 − r2|

).

Pour R > r, on obtient :

B(r) = − π

R.r.

(1− R2 + r2

R2 − r2

)= − π

R.r.−2.r2

R2 − r2=

2.π

R2 − r2.r

R.

De plus, A(r) = 2.πR2−r2 , donc B(r) = A(r). rR .

Pour r > R, on obtient :

B(r) = − π

R.r.

(1− R2 + r2

r2 −R2

)= − π

R.r.−2.R2

r2 −R2=

2.π

r2 −R2.R

r.

De plus, A(r) = 2.πr2−R2 , donc B(r) = A(r).Rr .

L'entraînement produit au point P par la couronne en mouvement est donccaractérisé par la vitesse virtuelle ~V perpendiculaire à (OP ), telle que :

V = v. rR pour r < R ;

V = v.Rr pour r > R.

Ce qu'on peut illustrer par le graphique suivant :

130

Page 131: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Si on désire combiner plusieurs entraînements, il faut tenir compte du faitqu'ils s'additionnent à la manière des quadrivecteurs. En pratique, ceci signi�eque le vecteur ~V calculé ci-dessus est a�ecté d'un "poids" égal à E(r) ; l'entraî-nement résultant sera la moyenne pondérée des entraînements partiels.

Dans le cas présent, on remarque que E(r) tend vers l'in�ni quand r tendvers R, ce qui signi�e que pour r = R la vitesse d'entraînement sera égale à ~v,et ne pourra être contrebalancée ou même modi�ée si peu que ce soit par aucunautre entraînement de poids �ni. Nous dirons que, pour r = R, l'entraînementest "total".

Ce problème du "poids" in�ni est en réalité purement théorique. Il provientd'une part du fait que nous avons appelé ρ la densité de matière par unité desurface ; si ρ est non nul, alors la densité par unité de volume est in�nie dans lacouronne, qui est plane. D'autre part (et c'est le point important) nous avonsfait l'hypothèse d'une répartition continue de la matière dans la couronne, maisc'est le discontinu qui règne dans l'univers. Si cette couronne contient un gaz,alors il faut prendre en compte la distance entre atomes voisins ; si elle contientdes étoiles, il faut prendre en compte la distance entre étoiles voisines. Un en-traînement ne peut pas être total dans le monde physique.

Cette remarque peut être le point de départ d'une ré�exion plus approfondiesur l'origine des galaxies.

Imaginons un nuage parfaitement continu de matière en rotation : l'entraî-nement serait alors "total", ce qui signi�e que chaque particule de matière seraitgravitationnellement immobile ; la force centrifuge serait alors nulle, et ce nuage

131

Page 132: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

se contracterait sous l'e�et de la gravité, sans qu'aucune force ne vienne lacontrebalancer. Rappelons que, dans la section sur la vitesse circulaire, nousavons vu que le calcul de cette vitesse circulaire revient à chercher, comme lefaisait Newton, l'équilibre entre la force centrifuge et la force d'attraction centri-pète. D'autre part, la force centrifuge dépend de la vitesse locale évaluée dans unrepère gravitationnellement immobile. Dans le cas d'un entraînement "total",toute vitesse, ainsi dé�nie, est nécessairemen nulle ! La recherche d'une vitessecirculaire assurant l'équilibre orbital n'a tout simplement aucun sens.

Ce qui précède est purement théorique ! Rapprochons-nous de la réalité. Sile nuage (tournant toujours de manière régulière et homogène) est composé degaz, les atomes étant très proches les uns des autres, l'entraînement, sans êtretotal, sera néanmoins très fort ; ceci signi�e que la vitesse orbitale de chaqueatome sera à peine supérieure à la vitesse d'entraînement, d'où une force cen-trifuge faible ; le nuage aura tendance à se contracter beaucoup plus vite que nele prévoit la théorie de Newton.

Supposons maintenant que le gaz se condense en étoiles dans ce nuage. Ladistance entre deux étoiles voisines étant beaucoup plus grande que la distanceentre atomes voisins, l'entraînement va chuter de manière spectaculaire, ce quiva permettre de trouver un équilibre entre la force centrifuge et la force d'at-traction. Mais la vitesse circulaire observée sera encore nettement supérieure àce que prévoit la théorie de Newton, qui se base sur un entraînement nul ; cecidonnera aux observateurs distants l'illusion d'une masse attractive plus impor-tante, et ils vont s'interroger sur la "masse manquante"...

Dans une galaxie, on peut se représenter, schématiquement, l'entraînementsubi par une étoile donnée (le Soleil par exemple) comme résultant de deux com-posantes principales : la première est due au bulbe de la galaxie, où il y a uneconcentration de matière importante, mais très éloignée, animée de vitesses qui,globalement, tendent à s'annuler ; la seconde est due à l'environnement proche,où les vitesses sont ordonnées et sensiblement égales à celle de l'étoile considérée,d'où une in�uence "additive", potentiellement beaucoup plus importante, maisdépendant de manière cruciale de la distance moyenne entre étoiles voisines.Si les étoiles étaient très serrées, l'entraînement serait régi principalement parl'environnement proche, donc la seconde composante l'emporterait, et la vitessed'entraînement serait assez proche de la vitesse individuelle des étoiles. Si, aucontraire, les étoiles sont très éloignées les unes des autres, cet entraînementlocal est a�aibli, et l'autre composante, associée au bulbe, prend une place plusimportante.

Au cas où cas où ces idées, basées sur le rôle de l'entraînement et de l'immo-bilité gravitationnelle, seraient con�rmées, on pourrait en tirer les conclusionssuivantes : une galaxie formée d'étoiles très éloignées les unes des autres va secomporter comme si elle contenait une faible proportion de matière noire ; sielle est formée d'étoiles plus serrées, il faudra faire intervenir une plus grande

132

Page 133: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

proportion de matière noire ; et cette proportion va être encore bien plus impor-tante si cette galaxie contient beaucoup de gaz, ou, à la limite, s'il s'agit d'unegalaxie trop jeune pour avoir donné naissance à des étoiles.

Rappeler que l'un des grands problèmes de l'astronomie moderne est l'ex-plication de la vitesse de condensation des nuages de gaz qui sont à l'originedes galaxies : leur formation semble avoir été beaucoup plus rapide que ne leprévoient les calculs basés sur la gravitation de Newton ou sur la relativité gé-nérale, de sorte que t ous les modèles actuels nécessitent l'introduction dans lescalculs d'une importante proportion de "matière noire", dont l'existence restepurement hypothétique, puisqu'aucune des explications proposées jusqu'ici n'apu être con�rmée. Les remarques qui précèdent ouvrent une piste de ré�exionpermettant peut-être d'éliminer la matière noire des modèles théoriques. Dessimulations sur ordinateur seraient utiles pour évaluer la pertinence de cetteapproche.

50 La gravitation est-elle la clé de la cosmologie ?

Après avoir publié les équations de la relativité générale, Einstein a tenté deles utiliser pour décrire la structure globale de l'univers, supposé homogène etisotrope. Comme il croyait que l'univers était statique, il avait cru bon d'intro-duire sa fameuse constante cosmologique pour garantir cette stabilité.

D'autre part, De Sitter, travaillant sur un modèle d'univers vide, remarquequ'il est nécessairement instable.

La découverte de la fuite des galaxies, par Hubble, intervient à cette époque.Einstein comprend alors que l'invention de la constante cosmologique n'étaitpas utile : "c'est la plus grande erreur de ma vie", dira-t-il. Avant même d'êtredécouverte, l'expansion de l'univers était déjà potentiellement présente dans leséquations de la relativité générale !

En�n, Friedmann, Robertson et Walker, s'inspirant de la théorie de l'atomeprimitif de Georges Lemaître, mettent au point le modèle standard homogène,qui a longtemps fait référence en tant que modèle cosmologique basé sur la rela-tivité générale. Son postulat fondamental est l'homogénéité : l'univers doit êtreglobalement identique, quel que soit l'observateur choisi.

Selon ce modèle, les galaxies sont immobiles (on pourrait dire : gravitation-nellement immobiles - tiens, la relativité générale, elle aussi, admet cette no-tion...), et l'expansion de l'univers résulte d'une dilatation continue de l'espace(on pourrait dire, en utilisant notre vocabulaire, qu'il y a une création continued'espace). Donc la vitesse de récession des galaxies n'est pas une vraie vitesse :la vitesse locale de chaque galaxie est supposée nulle ; il en résulte que cette

133

Page 134: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

vitesse de récession peut très bien dépasser la vitesse de la lumière, sans qu'il yait violation de la relativité restreinte. Cette expansion n'est pas expliquée (entant que phénomène physique), mais son évolution est calculée, en fonction dela densité de matière (supposée identique en tout point) ; car la gravité freinel'expansion. Quelle que soit la valeur attribuée à cette densité, l'expansion dé-bute par une phase ponctuelle (le big bang) ; à cet instant, le taux d'expansionest in�ni. Ensuite, il diminue. Si la densité de matière est su�sante, l'expan-sion �nit par s'arrêter, et l'univers commence alors à se contracter, jusqu'au bigcrunch. Si elle est insu�sante, l'expansion est in�nie.

Cette théorie a remporté des succès retentissants, dont les plus connus sontla découverte du fond di�us à 2, 7 K, ou rayonnement cosmologique fossile(datant, selon la théorie, de l'époque où les particules se sont combinées enatomes), et l'explication de la nucléosynthèse primordiale. Mais je voudrais rap-peler quelques problèmes majeurs.

Ce modèle du big bang peut s'étudier de deux façons : la première consiste àobserver l'univers qui nous entoure, tel qu'il est, et à essayer de reconstituer sonhistoire, en remontant dans le passé, de proche en proche, en se basant sur leslois connues de la physique ; la seconde consiste à partir de l'instant zéro, et àimaginer le scénario qui a pu conduire à l'univers que nous voyons aujourd'hui.Le problème essentiel, c'est que ces deux approches ne se rencontrent pas. Plusexactement, si on veut les obliger à se rencontrer, il faut imaginer une astucead hoc ; cette astuce s'appelle : l'in�ation. L'in�ation est une phase très courtede l'expansion de l'univers, peu après le big bang, pendant laquelle son rayonaurait été multiplié brutalement par un facteur considérable : 1026 selon certainsthéoriciens, 101 000 000 pour d'autres... Cette in�ation se serait même propagéeà une vitesse supérieure à celle de la lumière ! La nécessité de faire appel àcette notion a considérablement a�aibli la pertinence du modèle de Friedmann-Robertson-Walker, qui avait été considéré un peu vite comme l'explication detout...

Voyons d'un peu plus près où se situe l'origine du problème. Le modèle stan-dard homogène prévoit l'existence d'un horizon des événements : les galaxies si-tuées au-delà ne sont pas visibles, car leur lumière, en principe, n'a pas encore eule temps de nous parvenir. Autrement dit, les premiers âges de l'univers doiventêtre masqués. Cet horizon recule, c'est-à-dire que la partie visible de l'univers(en pourcentage) augmente au cours du temps, de 0% au moment du big bang,jusqu'à 100% à la "maturité" ; d'autre part, le taux d'expansion de l'univers,in�ni au début, s'annule à la maturité. Mais les astronomes ont pu observerdes galaxies vieilles de près de 13 milliards d'années, alors que l'âge de l'universprévu par la théorie est 13, 7 milliards d'années. De plus, nous recevons actuelle-ment le rayonnement dit cosmologique (fond di�us à 2, 7 K), émis, en principe,en l'an 380 000, ce qui signi�e que le pourcentage de l'univers qui est aujourd'huiaccessible à l'observation serait supérieur à 99, 997%. Nous serions donc très prèsde l'âge de maturité, et pourtant l'expansion continue ! Ceci conduit à douter de

134

Page 135: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

l'existence de cet horizon prévu par la théorie ! (Au sujet de l'horizon, on pourralire la page de Christian Magnan : http://www.lacosmo.com/horizon.fr.html.)

De plus, dans ce modèle, le taux d'expansion étant in�ni à l'instant du bigbang, deux points quelconques A et B, même très proches, ne peuvent pas com-muniquer : un message (rayon lumineux par exemple) envoyé par A en directionde B ne pourra atteindre son but que très longtemps après ; ceci vient du fait quele taux d'expansion, dans les premiers temps, était si élevé que même la lumièrene pouvait pas lutter "contre le courant" ! Par conséquent, ces deux points sontcausalement déconnectés à l'origine : ils s'ignorent ; ils se reconnectent lorsquela lumière émise par A �nit par atteindre B, et réciproquement ; autrement dit,lorsque l'horizon de A rattrape B, et réciproquement ; ce qui suppose un ralen-tissement su�sant du taux d'expansion. Ceci a pour conséquence que l'univers,dans sa jeunesse, n'a pas pu s'homogénéiser, car les échanges étaient impossibles.Or, l'observation de l'univers lointain (galaxies primitives) et du rayonnementcosmologique à 2, 7 K montrent, au contraire, que l'univers observable était trèshomogène, il y a plus 13 milliards d'années... Pour cette raison, les astronomesont récusé l'idée d'un taux d'expansion in�ni à l'origine : ce taux aurait éténul ou très faible au moment du big bang, permettant l'homogénéisation del'ensemble ; mais alors il a fallu ensuite une phase d'expansion très rapide pourrattraper le retard et recoller au scénario mis au point par les astronomes...C'est cette phase qu'on nomme l'in�ation.

On dit souvent que l'observation des galaxies lointaines, et du rayonnementcosmologique, con�rme l'in�ation : il serait plus exact de dire qu'elle in�rmele modèle homogène standard de Friedmann, Robertson et Walker ! En e�et,lorsqu'on étudie les premiers instants de l'histoire de l'univers, peu après le bigbang, ce modèle n'est plus du tout pertinent, comme si ces premiers instantsobéissaient à la mécanique quantique, et non à la gravitation.

La relativité générale est impuissante à décrire les premiers instants de l'uni-vers, mais explique-t-elle correctement la suite des événements ? Il se trouve que,là encore, elle est en di�culté, pour plusieurs raisons ; je vais en développer deux.

51 Pourquoi l'univers est-il globalement plat ?

Selon le modèle de Friedman, basé sur les équations de la relativité générale,la courbure de l'univers (supposé homogène et isotrope) est directement déter-minée par la densité de la matière (ou de l'énergie) qu'il contient. Pendant unegrande partie du vingtième siècle, on a fait une con�ance totale à ce modèle,considéré comme la seule cosmologie relativiste possible. Il est instructif de relirece qu'écrivaient les astronomes et cosmologistes dans les années 1960-1970 : ilsétaient certains que la mesure de cette densité allait permettre assez rapidementde déterminer les caractéristiques essentielles de l'univers.

135

Page 136: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Plus récemment, l'étude globale de l'univers visible, à très grande échelle, afait des progrès considérables. Les évaluations de la courbure de l'univers s'en-têtent à converger de plus en plus vers une courbure nulle. Ceci ne contreditpas la relativité générale, mais contribue à la marginaliser. En e�et, pour lemodèle de Friedmann, Robertson et Walker, un univers plat est possible, maishautement improbable : la densité de matière doit être rigoureusement égaleà une valeur critique, au-delà de laquelle l'univers est sphérique, et en-deçà delaquelle il est hyperbolique. Malheureusement, la densité de matière convention-nelle ("matière baryonique"), mesurée, elle aussi, avec une précision croissante,est très inférieure à cette valeur critique, ce qui ne conduit pas, à priori, à ununivers plat ! Si on prend en compte l'hypothétique "matière noire" (voir la sec-tion sur ce sujet), alors, au contraire, on dépasse de beaucoup cette valeur ! Etplus encore si on fait intervenir l'"énergie sombre", ou l'"énergie du vide"... Al'heure actuelle, le fait que l'univers soit plat à grande échelle reste incompré-hensible dans le cadre strict de la relativité générale. A moins d'introduire desnotions hautement spéculatives inventées dans ce but, comme l'in�ation...

Le problème disparaît si on admet que la courbure est régie par le vecteurpseudo-accélération, comme le suggère l'étude du tenseur de Ricci en métriquede Ni. Il est clair qu'une répartition uniforme de la matière annule la pseudo-accélération, et donc aussi la courbure. On pourrait dire aussi que le potentielest identique en tout point ; comme ce sont les di�érences de potentiel qui créentdes distorsions, un potentiel constant annule toute distorsion à grande échelle.

La particularité de la relativité générale, c'est que dans cette théorie lacourbure intrinsèque est régie directement par la densité de matière, et nonpar l'intermédiaire d'un vecteur, qu'il s'agisse d'une accélération, d'une pseudo-accélération ou d'une force. Si l'univers est homogène, la densité est identiqueen tout point, et donc la courbure aussi, ce qui conduit naturellement à un uni-vers sphérique ou hyperbolique. La courbure est en quelque sorte cumulative enrelativité générale ; elle ne s'annule jamais. Au contraire, dans les modèles quiattribuent le premier rôle à un vecteur force ou accélération (comme la théoriede Newton), les vecteurs opposés s'annulent, donc leurs e�ets aussi. Dans cesthéories, l'e�et d'un vecteur force peut éventuellement être interprété en termesde courbure ; mais les vecteurs peuvent s'annuler, donc la courbure aussi.

Par rapport à la gravitation de Newton, celle d'Einstein représente une ten-tative d'éliminer la notion de force au pro�t de la seule courbure. Actuellement,certains physiciens parmi les plus brillants estiment qu'il faut réintroduire laforce. Mais il n'y a pas d'unanimité sur ce sujet.

136

Page 137: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

52 L'énergie sombre existe-t-elle ?

Rappelons l'origine de l'idée d'une "énergie sombre" : les supernovæ de typeIa sont considérées comme des chandelles standards, car leur luminosité abso-lue, d'après la théorie en vigueur, est constante ; la mesure de leur luminositéapparente permet donc d'évaluer leur distance, et par suite, celle des galaxiesdans lesquelles elles apparaissent. Par ailleurs, la distance de ces galaxies peutêtre évaluée par leur décalage vers le rouge, en s'appuyant sur la loi de Hubble,qui dit que la vitesse de récession des galaxies est proportionnelle à leur dis-tance. Mais lorsqu'on compare les distances galactiques évaluées par ces deuxméthodes, on constate une di�érence, petite mais systématique.

Pour résoudre ce problème, il a fallu corriger la loi de Hubble : la vitesse derécession des galaxies n'est pas proportionnelle à leur distance, donc la vitessed'expansion de l'univers n'est pas rigoureusement constante.

La théorie du big bang , sous la forme du modèle standard homogène, pré-voyait un ralentissement de cette expansion : en e�et, les forces gravitationnelles,tout naturellement, doivent la freiner. Mais l'observation a prouvé le contraire :l'expansion semble accélérer. Il a fallu alors imaginer un "moteur" responsablede cette accélération : c'est l'énergie sombre, qui représenterait 74% de l'éner-gie présente dans l'univers ... Ce qui signi�e que les trois-quarts de l'énergie del'univers seraient de nature complètement inconnue ! C'est un véritable séismepour les tenants du modèle standard homogène ! Mais nous allons voir un peuplus loin qu'il est possible d'interpréter ces observations de di�érentes manières...

Le modèle idéal de Friedmann-Lemaître-Robertson-Walker, basé intégrale-ment sur la relativité générale, est évidemment faux : ceci est prouvé d'abordpar la nécessité de faire appel au phénomène d'in�ation (qui contredit la régu-larité de l'expansion, qui est la base du modèle), ensuite par le fait que l'expan-sion semble accélérer (alors que le modèle prévoyait un ralentissement). Qu'unmodèle mathématique idéal décrive mal la réalité, quoi de plus normal ? Destentatives ont été faites pour le corriger. D'une part, les physiciens relativistesse déclarent incompétents pour décrire l'instant du big bang et la phase d'in-�ation, et se tournent vers les physiciens des quanta pour les charger de cettequestion ; ceux-ci s'adressent aux théoriciens des cordes pour leur demander defaire un e�ort... D'autre part, en réintroduisant une constante cosmologique adhoc, ils tentent de justi�er l'accélération de l'expansion, sans l'expliquer vrai-ment : ce retour de la constante cosmologique d'Einstein semble signi�er quele comportement de l'univers à grande échelle n'est pas dicté uniquement parla gravitation... On avait cru d'abord que l'expansion de l'univers pouvait êtreexpliquée intégralement par la relativité générale ; on comprend aujourd'hui quecette théorie n'explique pas les phénomènes essentiels.

Reprenons ces questions avec l'éclairage que nous fournissent les sectionsprécédentes ; amusons-nous (comme ils l'ont fait avant nous) à inventer un mo-

137

Page 138: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

dèle mathématique simple et "homogène" basé sur cette idée (dans le cadre dela métrique de Ni, bien sûr). Tous les observateurs considérés seront supposésgravitationnellement immobiles, et situés dans un même potentiel ; leurs règleset leurs horloges ne subiront aucune distorsion gravitationnelle.

Dans un premier temps, nous allons partir de la loi de Hubble usuelle, quenous écrirons sous la forme :

~v = H.~l.

On pourra imaginer que l'observateur se trouve dans une galaxie A, et observeune galaxie B telle que : ~l = ~AB ; bien sûr, ~v est la vitesse de récession de B,mesurée par A.

Comme la galaxie B est gravitationnellement immobile, il va de soi que lavitesse ~v ne peut pas être considérée comme une constante liée à cette galaxie ;elle ne peut être liée qu'à la distance ; et puisque la distance de la galaxie varie,sa vitesse de récession varie aussi. En module, on aura donc :

v =dl

dt= H.l ;

dl

l= H.dt ;

d (Log l) = H.dt ;

Log l − Log l0 = H.(t− t0) (où l0 est la distance à un instant t0 donné) ;

l

l0= eH(t−t0) ;

l = l0.eH(t−t0).

Nous obtenons, évidemment, une croissance exponentielle de la distance de lagalaxie en fonction du temps ; ce qui est bien normal, puisque nous avons sup-posé que "l'espace crée de l'espace", et ceci à un taux constant, comme le montrebien l'égalité : dldt = H.l ; pendant une durée donnée dt, l'accroissement dl d'unelongueur quelconque l est proportionnel à l.

Par conséquent, la galaxie B va s'éloigner de plus en plus vite ; ceci necontredit pas ce qui a été dit auparavant, puisque :

v =dl

dt=d(eH(t−t0)

)dt

= H.eH(t−t0) = H.l.

Si nous remontons dans le passé, il faudra faire tendre t vers −∞ pour quela distance tende vers 0. Ceci signi�e qu'il n'y a pas d'instant origine : le bigbang est rejeté, pour ainsi dire, à l'in�ni dans le passé ; il n'y a plus de singula-rité. Les explications usuelles de la nucléosynthèse primordiale et du fond di�uscosmologique restent valables. De plus, l'univers, ayant passé un temps "in�ni"

138

Page 139: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

(peut-être seulement : long ?) dans un état très condensé, a eu tout le tempsnécessaire pour s'homogénéiser.

Dans un tel modèle d'univers, un observateur pourra voir toutes les galaxiesjusqu'à ce qu'elles franchissent un horizon sphérique et immobile ; au-delà, ellesfuient trop vite pour que leur lumière puisse lui parvenir.

Sous cette forme, ce modèle est nécessairement faux, puisque, par hypothèse,il prévoit une vitesse de récession rigoureusement proportionnelle à la distance :dvdl = H, quelle que soit la distance. Nous savons que ceci n'est pas con�rmé parles supernovæ de type Ia : elles montrent que la loi de Hubble n'est pas suiviede manière aussi stricte dans la réalité.

Mais il y a une autre di�culté, qui se manifeste lorsqu'on veut changer derepère. En e�et, nous venons d'utiliser la loi de Hubble sous sa forme usuelle :~v = H.~l ; pour l'observateur A, cette formule décrit un champ de vitesses, destructure particulièrement simple. Mais, si nous changeons de repère (en chan-geant de galaxie de référence), cette structure ne se conserve pas, car les vitessesne sont pas additives en relativité restreinte, et se transforment selon la règle(complexe) de la composition des vitesses, qui n'est pas une addition vectorielle.Si toutes les galaxies respectaient strictement la loi de Hubble usuelle, du pointde vue d'un observateur situé dans une galaxie A, alors elles ne la respecteraientpas, pour un observateur situé dans une autre galaxie B ! Nous ne sommes doncpas satisfait par un tel modèle : il n'est pas homogène.

Dans un second temps, nous allons donc, pour pallier cet inconvénient, ho-mogénéiser la loi de Hubble : pour cela, il su�t de remplacer la vitesse ~v par larapidité ~w. La loi de Hubble homogénéisée est donc :

~w = H.~l.

La structure du champ de rapidités sera conservée par changement de galaxiede référence, car les rapidités, contrairement aux vitesses, ont la propriété d'êtreadditives (on pourra trouver des explications dans mon étude : Les vitesses enRelativité restreinte.pdf). Un changement de galaxie de référence équivaut à unsimple changement d'origine dans l'espace des rapidités. Nous écrirons donc :

v

c= th

w

c= th

H.l

c.

Sous cette forme, la loi de Hubble revue et corrigée respecte la condition d'"homogénéité"que recherchaient les auteurs du modèle standard.On a :

dl

c dt=v

c= th

w

c= th

H.l

c=shH.lcchH.lc

;

H.dl

c=shH.lcchH.lc

.H.dt ;

139

Page 140: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

chH.lc .H.dlc

shH.lc= H.dt ;

d(shH.lc

)shH.lc

= H.dt ;

d

(Log

(shH.l

c

))= H.dt ;

Log

(shH.l

c

)−Log

(shH.l0c

)= H.(t−t0) (où l0 est la distance à un instant t0 donné) ;

shH.lcshH.l0c

= eH.(t−t0) ;

H.l

c= Argsh

(shH.l0c.eH.(t−t0)

).

Cette formule a des points communs avec celle que nous avions obtenue pré-cédemment ; par exemple, quand t tend vers −∞, l tend toujours vers 0, etquand t tend vers +∞, l tend toujours vers +∞.

Mais il y a une di�érence importante : quand l tend vers l'in�ni, v ne tendpas vers l'in�ni, mais vers c. Il en résulte qu'il n'y a plus d'horizon : tout l'universest, en principe, accessible à l'observation. Tous les problèmes liés à l'horizondisparaissent !

D'autre part, puisque vc = thH.lc , on déduit que dv

c = d(thH.lc

)=

H.dlc

ch2 H.lc

,

donc : dvdl = Hch2 H.l

c

; ce qui signi�e que le taux d'expansion apparent n'est pas

constant : il est égal à Hch2 H.l

c

, et semble donc diminuer quand la distance aug-

mente, autrement dit quand on recule dans le passé ; ou, si on préfère, il sembleplus élevé aujourd'hui qu'autrefois. Ceci est conforme aux observations.

Le redshift (décalage vers le rouge) des galaxies est donné par la formule :

z =∆λ

λ=

√c+ v

c− v− 1 =

√1 + v

c

1− vc

− 1.

Si on travaille avec la loi de Hubble usuelle : v = H.l, alors on utilisera leredshift usuel :

z1 =

√1 + v

c

1− vc

− 1 =

√1 + H.l

c

1− H.lc

− 1.

140

Page 141: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Si on adopte la loi de Hubble homogénéisée : w = H.l, alors on utilisera leredshift homogénéisé :

z2 =

√1 + v

c

1− vc

− 1 =

√1 + thwc1− thwc

− 1 =

√1 + thH.lc1− thH.lc

− 1 ;

ce qui donne, en appelant λe la longueur d'onde à l'émission, et λr la longueurd'onde à la réception :

λrλe

=λe + ∆λ

λe= 1 + z2 =

√1 + thwc1− thwc

=

√chwc + shwcchwc − sh

wc

;

λrλe

=

√√√√ ewc +e−

wc

2 + ewc −e−

wc

2

ewc +e−

wc

2 − ewc −e−

wc

2

=

√e

wc

e−wc

=√e

2wc = e

wc = e

H.lc ;

l =c

H.Log

(λrλe

).

Supposons qu'un rayonnement passe successivement par trois points alignésA, B, C, de rapidités wA, wB , wC ; sa longueur d'onde est λA quand il passe enA, λB quand il passe en B, λC quand il passe en C. On doit avoir : λC

λB.λB

λA= λC

λA,

ce qui est bien le cas, car :

ewC−wB

c .ewB−wA

c = ewC−wA

c .

Le graphique qui suit est à l'origine des questions sur l'énergie sombre. Ilconcerne les supernovæ Ia ; le logarithme de la distance, établie d'après la lu-minosité des supernovæ mesurée par les astronomes, �gure en abscisse, et leredshift (également mesuré) en ordonnée. Bien sûr, z = z1 (redshift classique).

141

Page 142: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

La courbe en trait plein, qui se base sur les observations, ne coïncide pasavec la courbe en pointillé, qui a été calculée à l'aide du modèle standard (sansénergie sombre). On peut penser que ce modèle standard contient une erreursystématique.

Cette erreur systématique provient-elle d'une confusion entre le redshift clas-sique z1 et le redshift homogénéisé z2 ?

Le redshift du modèle standard est, bien sûr, le redshift usuel z1 ; c'est celuiqui est utilisé dans tous les calculs basés sur ce modèle. Mais il se pourrait bienque le véritable redshift (celui qui est mesuré par les astronomes) soit le redshifthomogénéisé z2. L'erreur serait tout simplement une confusion entre z1 et z2 !Pour corriger les calculs, il su�rait alors de rétablir le véritable redshift z2, sanschanger la distance (car la distance de luminosité, calculée d'après l'éclat dessupernovæ, est bien leur vraie distance).

142

Page 143: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Pour une distance d (ou une longueur l) �xée, on a : 1 + z1 =

√1+ H.l

c

1−H.lc

, ce

qui entraîne :

(1 + z1)2 =1 + H.l

c

1− H.lc

;(1− H.l

c

).(1 + z1)2 = 1 +

H.l

c;

H.l

c.((1 + z1)2 + 1

)= (1 + z1)2 − 1 ;

H.l

c=

(1 + z1)2 − 1

(1 + z1)2 + 1.

Comme 1 + z2 = eH.lc , on déduit que :

z2 = e(1+z1)2−1

(1+z1)2+1 − 1.

Pour tester notre hypothèse, choisissons trois points A1, B1 et C1 de lacourbe théorique pointillée, et corrigeons leurs redshifts.

Pour le point A1, le redshift calculé par le modèle standard est z1 = 1 ; sonredshift corrigé est : z2 = e

35 − 1 ≈ 0, 82, donc le point corrigé est en A2.

Pour le point B1, le redshift calculé par le modèle standard est z1 = 0, 5 ;son redshift corrigé est : z2 = e

513 − 1 ≈ 0, 47, donc le point corrigé est en B2.

Pour le point C1, le redshift calculé par le modèle standard est z1 = 0, 3 ;son redshift corrigé est : z2 = e

69269 − 1 ≈ 0, 29, donc le point corrigé est en C2.

Curieusement, les points corrigés tombent sur la courbe réellement observée !

Nous voyons donc qu'un modèle mathématique d'une simplicité extrêmepermet de modéliser l'expansion de l'univers (ou sa phase actuelle ?), sans faireapparaître ces "artefacts" que sont (ou semblent être ?) la singularité initiale,et l'horizon des événements ; des artefacts qui pourraient bien résulter du parid'Einstein...

143

Page 144: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Dans le modèle standard, le redshift (z1) tend vers +∞ quand la distance l

tend vers cH , comme le montre bien la formule 1 + z1 =

√1+ H.l

c

1−H.lc

. Si on prend

H ≈ 71, 4 km.s−1.Mpc−1, sachant que 1Mpc ≈ 3, 26.106 AL, on trouve :cH ≈ 4200 Mpc ≈ 13, 7.109 AL (distance de l'"horizon"). Dans la �gure ci-dessus, la courbe en pointillé (calculée selon ce modèle) admet une asymptoteverticale pour l ≈ 13, 7.109 AL. Mais en est-il de même de la courbe réelle(en trait plein) ? Il est permis d'en douter. Si nous prenons comme hypothèsede travail la formule w = H.l (formule de Hubble homogénéisée), alors, pourl = c

H ≈ 13, 7.109 AL, nous trouvons : z2 = e1 − 1 ≈ 1, 718... seulement !

La plus lointaine galaxie actuellement connue (janvier 2013) est MACS1149-JD, dont le redshift est 9, 6 ; sa distance serait alors : l = c

H .Log 9, 6 ≈ 2, 26 cH ≈

31.109 AL, alors que le calcul basé sur le modèle standard donne une distancede 13, 2.109 AL.

Quant au fonds di�us cosmologique, son redshift est estimé à 1100 envi-

144

Page 145: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

ron ; d'après notre formule (basée sur le redshift corrigé) : l = cH .Log 1100 ≈

7 cH ≈ 95, 9.109 AL. Selon l'interprétation classique, ce rayonnement de corps

noir aurait été émis à l'époque de la recombinaison, lorsque le gaz qui rempis-sait l'univers est devenu transparent pour la lumière. Si nous admettons cetteinterprétation, notre calcul signi�e que les astronomes devraient rencontrer le"mur de l'opacité" (opacité pour la lumière, pas pour les neutrinos !) à une dis-tance de 96.109 AL environ. La galaxie MACS1149-JD serait donc située à peuprès au tiers de cette distance. Le calcul classique, basé sur le modèle standard,donne, pour cette galaxie, une distance supérieure à 96% de la distance du murde l'opacité ; ce qui soulève la question délicate de la vitesse de formation desgalaxies, immédiatement après l'époque de la recombinaison : les gaxies loin-taines, comme MACS1149-JD, auraient dû se former en moins de 500 millionsd'années, ce que les théoriciens ont du mal à expliquer... Dans le modèle duredshift corrigé, au contraire, elles seraient le résultat d'une très longue évolu-tion, de 65 milliards d'années (à partir de la recombinaison) ! Ce qui laisse uneappréciable marge de man÷uvre aux théoriciens...

Amusons-nous à examiner l'éclairage apporté par la formule w = H.l (for-mule de Hubble homogénéisée) au paradoxe d'Olbers : pourquoi le ciel est-ilnoir la nuit ? Imaginons un univers euclidien (in�ni), peuplé de galaxies répar-ties uniformément, de manière homogène. Notons nl le nombre de photons nousparvenant, pendant une unité de temps, d'une distance inférieure à l, et dnlle nombre de photons nous parvenant, pendant le même temps, d'une distancecomprise entre l et l+ dl. Si l'univers était statique, le nombre de galaxies dontla distance est comprise entre l et l + dl serait proportionnel à l2, et la proba-bilité pour qu'un photon émis par l'une de ces galaxies nous parvienne seraitinversement proportionnelle à l2 ; on aurait donc : dnl = K.dl, où K est uneconstante (qui dépend du nombre de galaxies par unité de volume, et de leur lu-minosité moyenne), et, par suite, nl = K.l. Ces hypothèses impliquent donc quele nombre de photons reçus pendant une unité de temps tend vers l'in�ni quandl tend vers l'in�ni : c'est le fameux paradoxe d'Olbers. Supposons maintenantque les galaxies s'éloignent selon la loi ci-dessus (loi de Hubble homogénéisée).Entre l'émission et la réception, la longueur d'onde d'un rayonnement est modi-�ée selon la loi : λr = e

H.lc .λe, ce qui donne, pour la période : Tr = e

H.lc .Te, et,

pour la fréquence : νr = e−H.lc .νe. Ceci signi�e non seulement que les photons

provenant d'une distance l auront une fréquence d'oscillation réduite, mais aussiqu'ils seront plus espacés, comme si le temps s'écoulait plus lentement pour lesgalaxies les plus lointaines. On aura donc :

dnl = K.e−H.lc .dl ;

nl = K.[− c

H.e−

H.lc

]ll=0

= −K. cH.(e−

H.lc − 1

)= K.

c

H.(

1− e−H.lc

).

Cette formule montre clairement que nl est borné : sa limite, quand l tend versl'in�ni, est K. cH .On voit donc que la formule de Hubble homogénéisée permet de résoudre le

145

Page 146: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

paradoxe d'Olbers d'une manière particulièrement simple. On pourrait amélio-rer le calcul en faisant intervenir non seulement le nombre de photons reçus,mais aussi leur énergie (qui décroît selon la même courbe). Un autre élément àprendre en compte est l'existence (supposée) du "mur de l'opacité".

Nous allons maintenant ouvrir une courte parenthèse, car nous remarquonsque la formule de Hubble homogénéisée (w = H.l) entraîne une conséquence in-attendue, qui nous éloigne peut-être de notre sujet, mais qui est assez amusantepour être signalée : dans un tel univers en expansion, le nombre d'oscillationsd'une onde lumineuse se déplaçant en ligne droite est nécessairement �ni.

Considérons un rayon lumineux quelconque, appelons λ0 sa longueur d'ondeinitiale, T0 sa période, ν0 sa fréquence, E0 son énergie (toutes initiales, évaluéespar un observateur immobile) ; ces quantités varient sur son parcours : après undéplacement sur une distance l (correspondant à une récession w), la longueurd'onde (évaluée par un observateur local) sera λ. On note N le nombre d'os-cillations de l'onde sur ce parcours. On a : dN = dl

λ , dl = dwH et λ = λ0.e

wc , donc :

dN =dl

λ=

dw

H.λ0.ewc

=1

H.λ0.e−

wc .dw = − c

H.λ0.d(e−

wc

).

Intégrons sur un parcours allant de l'origine (l = 0, w = 0) jusqu'à un pointquelconque (distance : l, vitesse de récession : w) ; il vient :

N = − c

H.λ0.[e−

wc − 1

]=

c

H.λ0.[1− e−w

c

].

Si nous faisons tendre l vers l'in�ni (donc w aussi), nous obtenons :

N =c

H.λ0=

1

H.T0=

ν0

2πH=

E0

2π.h.H.

Ceci signi�e qu'un rayon lumineux d'énergie E possède un "capital d'oscil-lations" : N = E

2π.h.H ; ce capital étant limité ! Lorsque l'onde "dépense" ∆Noscillations, son énergie diminue : ∆E = −2π.h.H.∆N .

Si on prend cH ≈ 4200 Mpc ≈ 13, 7.109 AL ≈ 1, 3.1026 m, pour λ0 = 1 m, on

obtient : N ≈ 1, 3.1026 oscillations ; pour λ0 = 1 cm, on obtient : N ≈ 1, 3.1028

oscillations, et ainsi de suite.

Pendant une durée in�nitésimale dt, le nombre d'oscillations est

dN =dt

T=

ν

2π.dt =

E

2π.h.dt

et la variation d'énergie est donc :

dE = −2π.h.H.dN = −2π.h.HE

2π.h.dt = −H.E.dt ,

146

Page 147: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

ce qui entraîne :dE

E= −H.dt

ou encore, pour un corps de masse m = Ec2 :

dm

m= −H.dt.

Chacun pourra ré�échir à cette étrange conclusion...

Aucune théorie ne donne, pour le moment, d'explication claire de l'expan-sion de l'univers basée sur des lois physiques connues : le modèle relativiste deFriedmann-Robertson-Walker, chacun le sait aujourd'hui, ne correspond pas àla réalité. On pourrait même aller jusqu'à douter d'un big bang issu d'une phaseponctuelle : l'étude �ne du fond di�us cosmologique (grâce aux satellites WMAPet, surtout, Planck) permet de mieux comprendre la nature de la "soupe" quiemplissait l'univers à l'époque où les particules se sont combinées en atomes ;mais, lors de cette phase, l'univers était-il �ni ou in�ni ? Rien ne permet de ledire, puisque les mesures de la courbure globale de l'univers observable donnent,avec une très bonne précision, un résultat nul... On ne sait pas non plus si son âgeétait �ni ou in�ni ! En dé�nitive, la relativité générale ne peut plus être considé-rée comme le cadre indispensable à l'élaboration d'une cosmologie scienti�que :l'expansion de l'univers semble bien régie des deux phénomènes totalement in-compris, l'"in�ation" et l'"énergie sombre" (deux formules destinées à cachernotre ignorance), qui échappent complètement au cadre imaginé par Einstein ;de plus, la relativité générale repose entièrement sur la notion de courbure, et,jusqu'à présent, l'observation nous montre que l'univers, globalement, n'est pascourbé ! Ce qui remet en cause, bien évidemment, l'intuition fondatrice d'Ein-stein...

Mais le but de la gravitation relativiste n'est pas d'expliquer la loi de Hubble :nous ne savons pas si elle est régie par la gravitation ! Nous sommes peut-êtrehors sujet, lorsque nous incluons une discussion de l'expansion de l'univers dansun travail sur la gravitation... Fermons donc cette parenthèse au plus vite, etlaissons ces questions en suspens.

53 Pour terminer ...

J'espère que cette étude aura o�ert à quelques amateurs de physique oud'astronomie, étudiants ou autodidactes, un marche-pied vers la gravitation re-lativiste. J'ai essayé de leur présenter cette discipline de la manière la moinsdogmatique possible : moins di�cile qu'on ne le dit, plus ouverte, et inachevée.S'ils en retirent une vision claire des points forts et, éventuellement, des limitesde la relativité générale, et surtout l'envie d'approfondir un sujet que je crois

147

Page 148: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

très riche, j'aurai atteint mon but.

54 Liens

Voici les adresses de quelques sites où on pourra trouver des informationssur la relativité générale, et sur tous les sujets que nous avons évoqués :

Le site Sciences.ch est un monde à lui seul :

Sciences.ch - Relativité Générale

On trouvera toute une série d'études dans ce site de la commission cosmo-logie de la SAF :

Cosmologie - Société Astronomique de France

Je me suis inspiré des pages de Christian Magnan sur la précession du pé-rihélie de Mercure et sur la dé�exion de la lumière, mais son site contient biend'autres choses à découvrir :

La cosmologie

Déviation de la lumière

Précession de Mercure

Horizon

Plusieurs articles de de Loïc Villain (dans Futura-Sciences) :

Relativité restreinte et naissance de l'espace-temps

Relativité générale - Comment l'espace-temps devint dynamique

Des cours en ligne (Nicolas Cubaynes) :

Physique et Astrophysique

Gravitation relativiste, ondes gravitationnelles, trous noirs, par Eric Gour-goulhon (LUTH) :

La gravitation relativiste

148

Page 149: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Sur les astres compacts (même auteur) :

Etoiles à neutrons et trous noirs

Un article de Blanchet (CNRS) sur les pulsars binaires (surtout PSR 1913+16) :

Spirale infernale

Un autre de T. Damour :

Le pulsar binaire

Sur le pulsar binaire PSR 1913+16 :

PSR 1913+16

Encore sur le pulsar binaire PSR 1913+16 :

PSR 1913+16

Sur le pulsar binaire PSR B1534+12 :

PSR B1534+12

Sur le pulsar binaire PSR J0437-4715 :

PSR J0437-4715

Sur le système PSR J0348-0432 (pulsar+naine blanche) :

PSR J0348-0432

Sur les naines blanches binaires :

Naines blanches binaires

Sur le pulsar binaire PSR J0348+0432 comme test des théories f(R) :

Test des théories f(R)

Sur les étoiles à neutrons (dossier Astro�les) :

Etoiles à neutrons

Un dossier de l'Internaute sur les trous noirs :

149

Page 150: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Trous noirs

Une présentation critique des di�érentes théories de la gravitation :

Théories de la gravitation

Une autre étude critique des théories de la gravitation :

Théories de la gravitation

Dans la version anglophone de Wikipedia, une étude détaillée sur les théoriesconcurrentes de la relativité générale :

Alternatives to general relativity

... et sur les tests de la relativité générale :

Tests of general relativity

Egalement sur les tests de la relativité générale :

Spacetime

Sur l'anomalie Pioneer :

Pioneer

Sur le principe de Mach et l'e�et Lense-Thirring :

Mach

Un document sur les supernovæ et l'énergie noire, Regnault & coll. :

Les supernovæ et l'énergie noire

Les travaux de Mac Gaugh sur la loi de Tully-Fischer :

Loi de Tully-Fisher

Exposé des idées d'Erik Verlinde :

On the Origin of Gravity and the Laws of Newton

Emergent Gravity and the Dark Universe

150

Page 151: Gravitation relativiste : une approche simple basée sur le ...jeanpierre.chabert.free.fr/Etudes/Gravitation relativiste.pdf · Gravitation relativiste : une approche simple basée

Sur le projet Advanced Virgo :

Advanced Virgo

Première détection directe d'une onde gravitationnelle :

GW150914

Première détection d'une coalescence d'étoiles à neutrons :

GW170817

Ensemble des observations sur cet événement :

GW170817

151