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Nutr. Clin. Metabol., 1995 ; 9 (Suppl 1) : 139-148 RAPPORTS DES EXPERTS Indications respectives des voies entdrale et parentdrale en pdriodes prd et postopdratoire Pre and postoperative support of nutrition for scheduled surgery in adults • parenteral or enteral support ? J. PETIT*, N. KAEFFER**, P. DFSCHELOTTE **, G. OKSENHENDLER t. *Service de Reanimation Chirurgicale, **Groupe de Biochimie et Physiopathologie Digestive et Nutritionnelle, Hdpital Charles Nicolle, 76031 Rouen, Cedex RI~SUMI~ : La d~nutrition est associ~e h une morbidit~ et une mortalit~ postop~ratoires accrues. De nombreuses ~tudes ayant compar~ la nutrition parent~rale (NP) ou ent~rale (NE) pr~ et/ou postop~ratoire ~ i'absence d'assis- tance nutritionnelle, ont montr~ que cette derni~re am~- liorait l'~tat nutritionnel et le pronostic des patients d~nutris. Le but de cette revue de la litt~rature a ~t~ de comparer NP et NE, tant sur le plan clinique (morbiditY, mortalitY, complications, cofits), qu'en ce qui concerne leurs differences physiologiques et physiopathologiques. La recherche bibliographique a permis de retenir douze ~tudes comparatives. Toutes comportaient, ~ des degr~s divers, des biais m~thodologiques, teis que le manque de puissance dfi & des effectifs insuffisants, une population non homog~ne, ie manque d'~valuation en aveugle et l'ab- sence de crit~res objectifs de jugement. De ce fait, les recommandations de pratique qui peuvent ~tre propos~es ne sont que de grade B : apr~s un traumatisme abdominal chirurgical, ia NE pr~coce, lorsqu'elle est possible, doit ~tre pr~f~r~e ~ la NP, car elle est associ~e ~ une moindre incidence de complications infectieuses; en chirurgie r~gi~e les r~suitats cliniques sont actuellement identiques avec la NE et la NP ; la NE entraine pen de complications eta un moindre cofit que la NP. II existe des differences qualitatives importantes entre NP et NE. Les m~langes de NP manquent d'un nombre important de nutriments essentieis (glutamine, arginine, cyst~ine, peptides, fibres polysaccharidiques, acides gras polyinsatur~s en n-3). De nombreuses ~tudes chez I'animal et quelques ~tudes por- tant sur des patients non chirurgicaux ont montr~ que la NP, ~ l'oppos~ de la NE, ~tait associ~e ~ une atrophie de la muqueuse digestive, ~ des alterations morphologiques et fonctionnelles du foie, & des ph~nom~nes de translocation bact~rienne et ~ une d~pression immunologique. Au-del& des probl~mes m~thodologiques, i'~valuation est en fait rendue difficile par la finalit~ diff~rente des deux modes d'assistance nutritionnelle. La NP, qualitativement impar- faite, propose une substitution ~nerg~tique et azot~e quan- titative aux substrats que le patient ne peut ing~rer. La NE, qui ne parvient pas ~ assurer un m6me niveau d'ap- ports que la NP du fait d'une tolerance digestive initiale- ment limit~e, trouve sa justification dans une r~duction exp~rimentale des consequences digestives et immunolo- giques des ~tats d'agression. En conclusion, la NE pr~coce parait sup~rieure h la NP chez le traumatis~ abdominal chirurgical. En chirurgie r~gl~e, ancune difference n'a encore pu ~tre mise en ~vidence, mais la NE est moins cofiteuse et son rapport cofit-efficacit~ est donc sup~rieur. De nombreuses questions restent actuellement sans r~ponse et n~cessitent un compl~ment d'~tudes randomi- s~es, menses en aveugle et avec des effectifs suffisants. Mots-cl& : Anesth~sie (phases) : preparation, suites op~- ratoires ; Evaluation ; Nutrition • ent~rale, parent~rale. ABSTRACT: Denutrition is often associated with poor postoperative outcome. However, a large body of evi- dence, from studies comparing perioperative parenteral (PN) or enteral (EN) nutrition to the absence of periope- rative nutrition, suggests that perioperative nutritional support provides significant improvements in both nutri- tional status and postoperative clinical outcome in selected patients who are or will become malnourished. The aim of this study was to select and review all relevant articles comparing perioperative parenteral and enteral nutritional support, either in terms of clinical outcome, or risks and costs, or in pathophysiological terms. Twelve clinical reports were reviewed. All contained methodological flaws, mainly type II statistical error due to an insufficient number of patients, inaccurate primary diagnosis, absence of blinding, and lack of objective criteria of jugement. These concerns warrant caution in interpreting the results. Moderately strong (grade B) recommendations can only be drawn from these studies : PN (compared to early EN) is associated with a higher rate of sepsis in patients follo- wing abdominal trauma ; EN is as efficient as PN in patients following surgery ; EN is safe and cheaper than PN. PN formulae lack many important nutrients (gluta- mine, arginine, cysteine, peptides, fibers, n-3 polyunsatu- rated fatty acids, and nucleotides). Many experimental (animal) and some clinical (in non surgical patients) stu- dies showed that PN (compared to EN) induces gut muco- TirOs ~ part : J. Petit. 139

Indications respectives des voies entérale et parentérale en périodes pré et postopératoire

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Page 1: Indications respectives des voies entérale et parentérale en périodes pré et postopératoire

Nutr. Clin. Metabol., 1995 ; 9 (Suppl 1) : 139-148 R A P P O R T S

D E S E X P E R T S

Indications respectives des voies entdrale et parentdrale en pdriodes prd et postopdratoire

Pre and postoperative support of nutrition for scheduled surgery in adults • parenteral or enteral support ?

J. PETIT*, N. KAEFFER**, P. DFSCHELOTTE **, G. OKSENHENDLER t.

*Service de Reanimation Chirurgicale, **Groupe de Biochimie et Physiopathologie Digestive et Nutritionnelle, Hdpital Charles Nicolle, 76031 Rouen, Cedex

RI~SUMI~ : La d~nutrition est associ~e h une morbidit~ et une mortalit~ postop~ratoires accrues. De nombreuses ~tudes ayant compar~ la nutrition parent~rale (NP) ou ent~rale (NE) pr~ et/ou postop~ratoire ~ i 'absence d'assis- tance nutritionnelle, ont montr~ que cette derni~re am~- liorait l '~tat nutritionnel et le pronostic des patients d~nutris. Le but de cette revue de la litt~rature a ~t~ de comparer NP et NE, tant sur le plan clinique (morbiditY, mortalitY, complications, cofits), qu'en ce qui concerne leurs differences physiologiques et physiopathologiques. La recherche bibliographique a permis de retenir douze ~tudes comparatives. Toutes comportaient, ~ des degr~s divers, des biais m~thodologiques, teis que le manque de puissance dfi & des effectifs insuffisants, une population non homog~ne, ie manque d'~valuation en aveugle et l 'ab- sence de crit~res objectifs de jugement. De ce fait, les recommandations de pratique qui peuvent ~tre propos~es ne sont que de grade B : apr~s un traumatisme abdominal chirurgical, ia NE pr~coce, lorsqu'elle est possible, doit ~tre pr~f~r~e ~ la NP, car elle est associ~e ~ une moindre incidence de complications infectieuses; en chirurgie r~gi~e les r~suitats cliniques sont actuellement identiques avec la NE et la NP ; la NE entraine pen de complications e t a un moindre cofit que la NP. II existe des differences qualitatives importantes entre NP et NE. Les m~langes de NP manquent d 'un nombre important de nutriments essentieis (glutamine, arginine, cyst~ine, peptides, fibres polysaccharidiques, acides gras polyinsatur~s en n-3). De nombreuses ~tudes chez I'animal et quelques ~tudes por- tant sur des patients non chirurgicaux ont montr~ que la NP, ~ l 'oppos~ de la NE, ~tait associ~e ~ une atrophie de la muqueuse digestive, ~ des alterations morphologiques et fonctionnelles du foie, & des ph~nom~nes de translocation bact~rienne et ~ une d~pression immunologique. Au-del& des probl~mes m~thodologiques, i '~valuation est en fait rendue difficile par la finalit~ diff~rente des deux modes d'assistance nutritionnelle. La NP, qualitativement impar- faite, propose une substitution ~nerg~tique et azot~e quan- titative aux substrats que le patient ne peut ing~rer. La NE, qui ne parvient pas ~ assurer un m6me niveau d 'ap- ports que la NP du fait d 'une tolerance digestive initiale- ment limit~e, trouve sa justification dans une r~duction exp~rimentale des consequences digestives et immunolo-

giques des ~tats d'agression. En conclusion, la NE pr~coce parait sup~rieure h la NP chez le traumatis~ abdominal chirurgical. En chirurgie r~gl~e, ancune difference n 'a encore pu ~tre mise en ~vidence, mais la NE est moins cofiteuse et son rapport cofit-efficacit~ est donc sup~rieur. De nombreuses questions restent actuellement sans r~ponse et n~cessitent un compl~ment d'~tudes randomi- s~es, menses en aveugle et avec des effectifs suffisants.

M o t s - c l & : Anesth~sie (phases) : preparation, suites op~- ratoires ; Evaluation ; Nutrition • ent~rale, parent~rale.

A B S T R A C T : Denutrition is often associated with poor postoperative outcome. However, a large body of evi- dence, from studies comparing perioperative parenteral (PN) or enteral (EN) nutrition to the absence of periope- rative nutrition, suggests that perioperative nutritional support provides significant improvements in both nutri- tional status and postoperative clinical outcome in selected patients who are or will become malnourished. The aim of this study was to select and review all relevant articles comparing perioperative parenteral and enteral nutritional support, either in terms of clinical outcome, or risks and costs, or in pathophysiological terms. Twelve clinical reports were reviewed. All contained methodological flaws, mainly type II statistical error due to an insufficient number of patients, inaccurate primary diagnosis, absence of blinding, and lack of objective criteria of jugement. These concerns warrant caution in interpreting the results. Moderately strong (grade B) recommendations can only be drawn from these studies : PN (compared to early EN) is associated with a higher rate of sepsis in patients follo- wing abdominal trauma ; EN is as efficient as PN in patients following surgery ; EN is safe and cheaper than PN. PN formulae lack many important nutrients (gluta- mine, arginine, cysteine, peptides, fibers, n-3 polyunsatu- rated fatty acids, and nucleotides). Many experimental (animal) and some clinical (in non surgical patients) stu- dies showed that PN (compared to EN) induces gut muco-

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sal atrophy, liver dysfunction, gut bacterial translocation and immune dysfunction. The final aim of PN and EN would therefore strikingly differ. The qualitatively imper. fect PN would only supply the fasting patient with quanti- tative amounts of calories and proteins. Due to initially limited digestive tolerance, EN provides less nutrition than PN does, but would finally lead to the same or even bet- ter outcome, due to its ability to counteract stress induced gut and immune dysfunction. Current evidence therefore suggests that early EN is superior to PN in trauma patients, and not different from but cheaper (and there- fore more cost-effective) than PN in surgical patients. Further controlled, randomised, and blinded studies inclu- ding sufficient sizes of groups are required, especially in the surgical setting, to address a large number of still unanswered questions. Key-words : Evaluation ; Nutrition : enteral, parenteral ; Malnutrition ; Surgery ; Trauma.

L'6valuation de l'assistance nutritionnelle p6rio- p6ratoire se heurte en pratique ~ de nombreuses difficult6s mdthodologiques : multiplicit6, non-spdci- ficit6, et fr6quente complexit6 des m6thodes d'6va- luation nutritionnelle ; absence de crit~re valid6 de renutrition ; difficult6 pour stratifier les patients par degr6 de malnutrition, type et stade 6volutif de la maladie responsable, age, pathologie associ6e.., et facteurs fr6quemment intriqu6s ; variabilit6 des cri- t6res de morbidit6 ; hdt6rog6n6it6 des mdthodes de nutrition p6riopdratoire (quantit6, qualit6, modali- t6s, dur6e).

Les 6tudes sur la nutrition pdriop6ratoire correspondent ~ un ou plusieurs des quatre objectifs suivants: 1) mise en 6vidence d 'un b6n6fice direct (r6duction de la mortalit6, r6duction des complications postop6ratoires); 2) interpr6tation d 'un b6ndfice escompt6 ou mieux, observ6; 3) d6monstration de l'am61ioration de critbres ou d'indices pronostiques cliniques ou biologiques sup- pos6s sensibles et sp6cifiques dans le contexte p6rio- pdratoire ; 4) enfin explication de l'amdlioration de ces crit6res par des modifications fonctionnelles ou m6taboliques intimes. Les 6tudes concernant les b6n6fices cliniques potentiels doivent mettre en balance ces b6n6fices avec les risques encourus et les coots engendrds. En pratique actuellement, le clinicien dispose de deux types de donn6es pour formuler son jugement et orienter ses pratiques: un certain nombre d'essais cliniques, dont les conclu- sions ne peuvent 6tre interpr6tdes qu'au terme d'une analyse m6thodologique rigoureuse, et des donn6es historiques et physiopathologiques issues de travaux exp6rimentaux voire, plus rarement, d'6tudes humaines, qui permettent de d6gager des attitudes logiques, mais n 'apportent pas la preuve formelle d 'un b6n6fice clinique.

I1 convient enfin de rappeler que le nombre de patients ndcessaires dans un essai comparatif ddpend, pour un test statistique donn6 :

- - d u niveau de signification (a), habituellement fix6 ~ 0,05, qui exprime la probabilit6 que la diff6rence observ6e soit expliqu6e par le hasard ;

- - de la puissance (1 - b), plus souvent 0,80 que 0,90, qui exprime le degr6 de certitude avec lequel on d6sire ne pas ignorer la diffdrence recherch6e ;

- - de la variabilit6 ou variance des r6sultats ; - - enfin de la sensibilit6 que l 'on d6sire apporter la comparaison : plus la diff6rence que l 'on sou-

haite mettre en 6vidence est petite, plus il faut de sujets. Plusieurs m6thodes, sensiblement 6quiva- lentes pour le clinicien, permettent de calculer les effectifs ndcessaires dans un essai comparatif [1]. Le tableau I donne quelques exemples pratiques d'effectifs n6cessaires.

Tableau I. - - Effectifs necessaires dans chaque groupe pour comparer deux proportions p l et p2 avec un niveau de signifi- cation (a) de 0,05 et une puissance (1 - 13) de 0,90.

pl (%) Effectif n6cessaire dans chaque groupe p 2 = p l - 5 % p 2 = p l /2

10 584 584 20 1 214 268 30 1 676 163 40 1 971 111 50 2 097 79

Une 6tude iddale se proposant d'6valuer une nutrition p6riop6ratoire devrait ainsi concerner une population tr~s homog6ne : la m~me affection, le m6me type d'intervention chirurgicale, la m~me 6quipe m6dico-chirurgicale, un m~me niveau de d6nutrition pr6op6ratoire (avec des normes pr6cises et reproductibles), des procddures d'6valuation et de traitement standardis6es au maximum, des critbres tr~s sensibles et sp6cifiques et une d6finition pr6cise des complications, non seulement celles survenant en p6riode postop6ratoire, mais aussi celles li6es ~ la renutrition.

1. MI~THODOLOGIE DE L'ANALYSE BIBLIOGRAPHIQUE

Les r6f6rences concernant la nutrition parent6rale (NP) et la nutrition entdrale (NE) p6riop6ratoires depuis 1974 ont 6t6 recherch6es dans les fichiers des banques bibliographiques MZDLINE, PASCAL, et EXCERPTA MEDICA. Quelqnes r6f6rences issues des articles sdlectionn6s ont 6galement 6t6 analys6es, ainsi que des travaux fondamentaux permettant d'orienter la r6flexion sans permettre de formuler une recommandation clinique.

Les travaux concernant les pancr6atites aigu~s, les fistules ent6rocutan6es et les pouss6es aigu~s de colites inflammatoires ne sont pas envisag6s, car le choix NP/NE ne se pose pas dans les m6mes termes

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NUTRITION PARENTI~RALE ET ENTERALE PI~RIOPI~RATOIRE

qu'en chirurgie r6gl6e, une intervention n'6tant par ailleurs pas toujours n6cessaire pour ces affections.

La qualit6 m6thodologique de ces travaux et le niveau de preuve apport6 ont 6t6 6valu6s selon les r6gles habituelles pour les 6tudes sur des patients en situation d'agression [2, 3] (tableau II).

Tableau II. - - Niveaux de preuve et grades de recommandation pour I'~valuation des etudes sur des patients en situation d'agression [2, 3].

Niveaux de preuve Grades de recommandation

Niveau 1 : Essai randomis6 contr616 avec un faible risque d'erreur, c'est-~-dire men6 en double aveugle, Grade A sur des effectifs suffisants, et avec des crit6res objectifs Niveau 2 : Essai randomis6 contr61~ comportant un risque d'erreur (non men6 en aveugle et/ou compor- Grade B tant des effectifs insuffisants et/ou sans crit~res objectifs) Niveau 3 : Essai non randomis6 avec groupe de contr61e contemporain, ou essai randomis6 contr616 Grade C portant sur des populations diff6rentes Niveau 4 : Etudes non randomis6es, groupe de contr61e Pas de recommandations historique ou absent N i v e a u 5 : Etudes animales Pas de recommandations N i v e a u 6 : Etudes in vitro Pas de recommandations

2. ANALYSE DES ¢:TUDES CLINIQUES COMPARANT NP ET NE EN CHIRURGIE RI=GLEE ET CHEZ LE TRAUMATISI~ << CHIRURGICAL.

Un hombre important d'6tudes, orient6es sur l'int6r~t de la NP et non sur la comparaison NP/NE, ont compar6 une NP normocalorique voire hyper- calorique h une alimentation orale conventionnelle. Cette nutrit ion orale pr6op6ratoire est en rbgle g6n6rale hypocalorique par rapport 5 la NP (bien que le niveau des apports soit rarement ana- lys6 de mani~re pr6cise). Quant ?~ la p6riode post- op6ratoire, elle correspond ?t l 'absence de NE ou une NE for tement hypocalorique. Trois exemples seront pr6sent6s. Dans une 6tude r6trospective non randomis6e (niveau de preuve 4) portant sur des patients de chirurgie abdominale ou thoracique lourde, MUI+EN et coll. [4] ont compar6 50 patients pour lesquels le chirurgien a d6cid6 de mettre en oeuvre une NP pr6op6ratoire (35 kca l -kg -1.j-1 et 0,25 gN. kg -1.j-1) ~ 95 patients (dits groupe <~ contr61e ,,) ne recevant qu 'une alimentation orale (apports non pr6cis6s). La fr6quence des complica- tions postop6ratoires et la mortalit6 sont plus faibles dans le groupe NP que dans le groupe contr61e (18,0 v s 38,9 % et 4 v s 29,4 % respectivement). La diff6rence est statistiquement significative seulement

pour les patients dont le Prognostic Nutritional Index (PNI) est sup6rieur h 50 % ; les complications de la NP ne sont pas pr6cis6es. De la m~me mani~re, SMITH et coll. [5] randomisaient 34 patients d6nutris (PNI > 30 %) devant b6n6ficier de la cure chirurgi- cale d 'une affection gastro-intestinale (niveau de preuve 2). L 'un des groupes re~oit une NP pr6op6- ratoire de 10 jours (n = 17) et l 'autre ne reqoit aucune pr6paration nutritionnelle particuli~re (ali- mentation orale <~ normale , , n = 17). La NP est associ6e ?a une prise pond6rale, une augmentation du pli cutan6 tricipital et une am61ioration des r6ponses aux tests cutan6s d'hypersensibilit6 retard6e, mais morbidit6 et mortalit6 ne sont pas statistiquement diff6rentes entre les deux groupes. Le travail du VETERANS AFFAIRS TOTAL PARENTERAL NUTRITION COOPERATIVE STUDY GROUP [6] (niveau de p reuve2) entre 6galement dans ce cadre: 395 patients devant subir une laparotomie ou une thora- cotomie (~ l 'exclusion de la chirurgie cardiaque) ont 6t6 randomis6s en deux groupes, recevant l 'un (n = 192) une alimentation orale normale plus une NP (420-4 543 kcal . j-l, moyenne - 2 944) pr6op6- ratoire (7-15 jours) et postop6ratoire (3 jours) et l 'autre (n = 203) une alimentation orale normale (0-3 342 kcal . j-l, moyenne = 1 280). La fr6quence des complications graves est globalement identique dans les deux groupes ; la fr6quence des complica- tions infectieuses (en dehors des infections sur cath6ter) est significativement sup6rieure dans le groupe NP (14,1 v s 6,4 %, P < 0,01). Chez les patients for tement d6nutris (n = 33 ou 50 selon le crit6re utilis6), la fr6quence des complications non infectieuses est significativement r6duite dans le groupe NP (5,3 v s 42,9 %, P < 0,05) ; la mortalit6 n'est pas diff6rente dans les deux groupes.

Quelques 6tudes sp6cifiquement orient6es sur l'int6r~t de la NE comparent une NE normo ou hypercalorique ~ une alimentation orale habituelle- ment insuffisante voire absente. C'est ainsi que BASTOW et coll. [7] ont randomis6 des op6r6es pour fracture du col du f6mur, ag6es et d6nutries, en deux groupes : nutrition orale conventionnelle (n -- 58) et suppl6mentation ent6rale nocturne de 1000 kcal et 4,5 gN par voie nasogastrique (n = 64) pendant 2-4 semaines (niveau de preuve 2) ; le d61ai de r6ha- bilitation et la dur6e d'hospitalisation sont plus bas darts le groupe trait6 (P < 0,05). La mortalit6 est de 16 % dans le groupe contr61e et de 1 1 % dans le groupe trait6 (NS). De m~me, SCH~OEDER et coll. [8] ont montr6 dans une 6tude randomis6e (niveau de preuve 2), portant sur 32 patients ayant b6n6fici6 d 'une r6section intestinale, que compar6e ~ la reprise progressive de l 'alimentation convention- nelle (n = 16; 382 kcal . j-l), une alimentation par sonde naso-j6junale entreprise imm6diatement apr~s l ' intervention et prolong6e 56 heures (n = 16; 1 180 kcal . j-l) diminue la dur6e de l'il6us postop6- ratoire et am61iore un indice exp6rimental de cica-

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J. PETIT ET COLL.

trisation, mais sans globalement rdduire les compli- cations.

Seules peuvent donc reellement 8tre prises en compte les etudes dans lesquelles NP et NE ont pour objectif des apports qualitativement ou quantitative- ment significatifs. La presentation est effectude de maniere historique, et s 'attache aux rdsultats cli- niques observes plus qu'aux eventuelles modifica- tions biologiques associees.

LIM et coll. [9] (niveau de preuve 2) ont rando- miss 24 patients devant beneficier d'une oesophagec- tomie pour cancer (etat nutritionnel initial precis non indiqu6) en deux groupes egaux : NP (62,3 _+ 3,6 kcal. kg -1.j-s) ou NE (63,2 + 7,0 kcal . kg 1.j-l , gastrostomie chirurgicale) pendant les 3-4 semaines preoperatoires. La prise ponderale a ete superieure dans le groupe NP (P < 0,05). Un patient est decdd6 dans le groupe NP et deux dans le groupe HE. L'incidence des complications n'est pas differente. Trois complications de la NP (deux infections sur catheter et une thrombose) et un abces de paroi sur la gastrostomie ont ete notes. Le coot de la NP est superieur & celui de la HE.

McARDLE et coll. [10] dans une etude prospective randomisee (niveau de preuve 3), ont apporte une nutrition ~ 24 patients de reanimation chirurgicale et traumatologique, qui ont une perte ponderale supS- rieure ~ 15 % avec le mSme melange de glucose et d'acides amines soit par voie parenterale, soit par voie enterale. L'equilibre du bilan azote a ete obtenu dans les deux groupes 5 J3. Mortalite et mor- bidit6 n 'ont pas et6 pas rapportdes. Le coot de la NP est le double de celui de la NE.

MULLER et coll. [11] (niveau de preuve 2) ont randomise 125 patients, atteints d'un cancer gastro-intestinal, en deux groupes recevant, pendant les 10 jours preoperatoires, soit (n = 66, denutris

o 1 1 59 '/o) une NP (44 kcal glucidiques, k g - . j - et 0,24 gN. kg -1. j-l), soit (n = 59, denutris 62 %) une

1 NE (alimentation orale, objectif 2400 kcal. j- ). Les complications chirurgicales majeures (abces intra- abdominaux, peritonite, desunion anastomotique, ileus) etaient significativement plus frequentes (P < 0,05) dans le groupe NE (32,2 %) que dans le groupe NP (16,7 %). La mortalite est egalement significativement superieure (P < 0,05) dans le groupe NE (18,6 v s 4,5 %). Quatre complications de la NP (2 infections, 1 ponction arterielle, 1 pneumo- thorax) ont ete observees. Cette etude, dont la methodologie parait a priori bonne, a suscit6 de nombreuses critiques qui en affaiblissent notoire- ment les conclusions. Les patients n'etaient pas rdpartis en fonction de leur perte ponderale initiale. I1 semble que les apports n'atteignaient pas l'objec- tif dans le groupe NE (manque d'appetit, explora- tions paracliniques...). Les patients du groupe NE 6taient en fait des patients plus gravement denutris et moins renutris, comme en temoignent des valeurs plus basses des protdines ~ demi-vie courte et une

atteinte plus profonde des marqueurs de l ' immunite mediation cellulaire ; l 'etude revient donc 5 corn-

parer une NP hypercalorique ~ une nutrition orale hypocalorique... I1 a par ailleurs et6 largement indi- que que les patients de l 'etude n'avaient pas beneficie d'une antibioprophylaxie perioperatoire (expliquant en partie la frequence des complications infectieuses rapportees), qu'un second groupe traits a ete abandonne en cours d'etude, sans que cela soit indique dans la publication, et que les desunions anastomotiques ont disparu des deux groupes en cours d 'etude avec l 'introduction des dispositifs de suture mecanique.

L 'e tude de MUGGIA-SULLAM et coll. [12] a port6 sur 15 patients de chirurgie abdominale sus-mdsoco- lique recevant, pendant 7-10 jours apr6s l'interven- tion, soit une NE (n = 7, jdjunostomie par catheter, Vivonex HN), soit une NP (n -- 8, 35 kcal. kg -1. j-1 et 0,22 gN. kg -I . j-i). Elle ne peut 8tre consideree comme contributive en raison du faible nombre de patients Studies, de l'absence de randomisation et de l'absence de donnees sur les complications.

Dans l 'etude prospective randomisee d'ADAMS et coll. [13] (niveau de preuve 2), 46 traumatises abdominaux ont re,u, dbs le premier jour suivant une laparotomie et pendant un maximum de 14 jours, soit une NP (n = 23, 45 kcal. kg -1. j-1 et 0,25 gN. kg -~.j-1), soit une NE par jejunostomie (n = 23, [(BEB (calcules) x 1,7-2,0) + 20 %]). Le niveau d'apport energetique, le bilan azote, et les complications graves (pneumopathies et infections intra-abdominales : NE = 52,2 % ; NP = 43,5 %) etaient comparables. I1 a 6te observe plus d'hyper- glycemies dans le groupe NP (P < 0,05), et plus de diarrhees (47,8 v s 26,1%, P < 0,05) dans le groupe HE. L'economie realisee avec la NE etait globale- ment de 2 383 $ par patient.

BOWER et coll. [14] (etude de niveau 2) ont randomise 20 patients awes chirurgie abdominale sus-mesocolique. Les deux groupes ont re~u pendant au moins sept jours les mSmes apports (35-50 kcal • kg -1. j-;, 0,22 gN • kg -1 • j-l) soit en NP, soit en NE (catheter de jejunostomie). Le bilan azote est plus eleve dans le groupe NP (P < 0,05). L'incidence des complications n'etait pas differente. Une elevation plus importante des SGOT et SGPT a ete notee dans le groupe NP (P < 0,05). Le coot de la NE est inferieur (2 313 v s 849 $).

FLETCHER et coll. [15] (etude de niveau 2) ont randomise en trois groupes 28 patients awes chirurgie du carrefour aortique: 1) compensation simple des besoins hydriques avec du solute glucose (n -- 9) ; 2) NP (n = 10, 1 000 kcal glucidiques • j-1 et 6,4 gN. j-l, 5 jours) ; ou 3) NE (n = 9, isocalorique et isoazotee par rapport ~ NP). Les groupes NE et NP avaient un meilleur bilan azote. Aucune difference en termes de complications ou de duree d'hospitali- sation n'a ere notee.

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NUTRITION PARENTI~RALE ET ENTI~RALE PI~RIOPI~RATOIRE

HEYLEN et coll. [16] ont men6 une 6tude prospec- tive randomis6e (niveau de preuve 2) apr~s gastrec- tomie totale: les patients ont requ soit une NP (n = 10, 40 kcal. kg q . jq et 0,26 gNkcal • kg q . jq), soit une NE (n = 10, j6junostomie par cath6ter, Vivonex HN, 40 kcal. kg -I. jq) pendant 8 jours. Le poids corporel a diminu6 dans les deux groupes, la circonf6rence brachiale augmentant plus dans le groupe NP (P < 0,05).

CERRA et coll. [17] ont randomis6 dans une 6tude prospective (niveau 2) 66 patients ayant un hyper- m6tabolisme persistant (VO 2 > 140 mL.m 2 et soit N urinaire > 10 g. j-1 soit glyc6mie hors perfusion > 1,5 g- L q) 4 ~ 6 jours aprbs l'installation d'un 6tat infectieux postop6ratoire. Trente-cinq patients sont affect6s ?a un groupe NP et 31 ~t un groupe NE (sonde nasoduod6nale on j6junostomie). Tous

1 1 reqoivent pendant 14 jours 30 kcal .kg-. j- et 0,25 gN.kgq.j q. Aucune diff6rence pronostique n'est mise en 6vidence concernant la survenue d'un syndrome de d6faillance multivisc6rale (NP: 21%, NE : 22 %) ni la mortalit6 (NP : 23 %, NE : 22 %). Diarrh6e et vomissements 6taient plus fr6quents dans le groupe NE (80 v s 26% et 31 v s 6 %

respectivement, P < 0,05). Le coot de la nutrition 6tait sup6rieur dans le groupe NP (330 _ 61 v s 228 _+ 59 dollars/jour). Cette 6tude tend ?a prouver que la NE ne pr6vient pas la survenue d'un syndrome de ddfaillance multivisc6rale en cas d'6tat infectieux. Cependant, comme le soulignent les auteurs, l'introduction de la NE 6tait tardive (4-6 jours), le d61ai pour atteindre le niveau d'apports calorico- azot6s souhait6 6tait long (2,5 _+ 0,5 jours), et le m61ange nutritif ne contenait pas les nutriments pr6- f6rentiels de tube digestif que l'on connaR mainte- nant, en particulier la glutamine.

L'6tude prospective randomis6e (niveau de preuve 2) de MOORE et coll. [18] est en fait une pro- longation de l'6tude publi6e initialement par PETERSON et coll. [19]. Elle portait sur 59 traumati- s6s abdominaux graves op6r6s : 29 ont 6t6 affect6s un groupe NE (cath6ter de j6junostomie, Vivonex) et 30 h u n groupe NP, les deux modes assurant le m~me apport calorique et azot6. La nutrition 6tait entreprise h la 12 e h postop6ratoire avec pour objec- tif une positivation du bilan azot6 ~t J2. Les compli- cations infectieuses graves 6taient moins fr6quentes (P < 0,05) dans le groupe NE (1 patient, 3 %, abc6s intra-abdominal) que dans le groupe NP (6 patients, 20 %, 2 abc6s intraabdominaux et 6 pneumopathies). Des alt6rations biologiques h6pa- tiques et des troubles de la glycor6gulation plus importants 6taient not6s dans le groupe NP. Les auteurs formulent l'hypoth6se qu'une nutrition ent6- rale pr6coce pourrait pr6venir le ph6nom6ne de translocation bact6rienne, ~ moteur du syndrome de d6faillance multivisc6rale ~, en pr6servant l'int6grit6 muqueuse du tube digestif, et r6duire ainsi la morbi- dit6 infectieuse.

KUDSK et coll. [20] ont randomis6 (6tude de niveau 2) 98 traumatis6s abdominaux graves op6r6s ayant tous fait l'objet d'une j6junostomie en deux groupes : NP (n = 45) ou NE (n = 51, apport azot6 sous forme peptidique), des J1. Bien que l'objectif des apports nutritionnels ait 6t6 identique dans les deux groupes (30-35 kcal.kgq.j -1 et 0,24-0,32 gN .kg-l.j q, les apports des patients du groupe NE 6taient plus faibles (15,7 v s

19,1 kcal.kgq.j -1 en moyenne). I1 a 6t6 observ6 significativement moins de complications infectieu- ses graves dans le groupe NE: abc6s intra-abdomi- naux 1,9 v s 13,3 % (P < 0,04) ; pneumopathies 11,8 v s 31%, (P < 0,02) ; infections sur cath6ter 1,9 v s

13,3 % (P < 0,04). La fr6quence des complications infectieuses graves n'6tait plus faible (P < 0,01) dans le groupe NE que chez les patients les plus grave- ment atteints (14,7 v s 52,0 %). Les dur6es de s6jour (en raison des 16sions associ6es) et l'antibioth6rapie (principalement ,, prophylactique ,,) n'6taient pas diff6rentes dans les deux groupes. Un patient a dO etre r6op6r6 pour une occlusion, li6e h une insertion d6fectueuse du cath6ter de j6junostomie. La fr6- quence de la diarrh6e est plus 61ev6e darts le groupe NE (21,6 v s 15,6 %, P < 0,01).

VON MEYENFELDT et coll. [21] (6tude de niveau 2) ont 6tudi6 200 patients atteints d'un cancer gastrique ou colorectal. Quarante-neuf d'entre eux, non d6nutris (,~ t6moins normonutris '0, ont 6t6 op6r6s d'embl6e sans pr6paration nutritionnelle. Les autres patients d6nutris, ont 6t6 randomis6s en trois groupes: t6moins d6nutris (n = 50, intervention d'embl6e), NP (n = 51, 1 783 + 350 kcal. j -1 et 11,9 _+ 2,5 gN.j q, pendant 10-23 jours avant l"-'interven- tion, puis jusqu'~ reprise d'une alimentation orale postop6ratoire suffisante), NE (n = 50, 1 458 + 444 kcal.j-1 et 20,5 _+ 5,5 gN. j - , p e r o s ou par sonde nasogastrique, pendant 10-15 jours avant l'interven- tion, puis alimentation orale postop6ratoire scion tol6rance comme dans les groupes t6moins). La fr6quence des abc~s intra-abdominaux et des 6tats infectieux graves est plus importante chez les t6moins d6nutris que chez les t6moins non d6nutris (8 v s 2 et 4 v s 0 respectivement, P < 0,05). Cette fr6- quence 6tait de 4 et 1 dans les 2 groupes de patients soumis ~ une nutrition pr6op6ratoire. NP et NE r6duisaient le nombre total des complications post- op6ratoires et, chez les patients les plus gravement d6nutris (perte pond6rale > 10 %) ou ceux ayant une intervention plus lourde (h6morragie > 500 mL), le nombre des abets intra-abdominaux. L'assistance nutritionnelle pr6op6ratoire n'a pas rallong6 la dur6e totale d'hospitalisation. Les complications de la nutrition 6taient au nombre de 6 dans le groupe NP (1 ponction art6rielle, 1 pneumothorax, 4 infec- tions sur cath6ter) et de 8 dans le groupe NE (3 diar- rh6es, 5 vomissements ou distensions gastriques). Cette 6tude confirme les donn6es de MOLLER et coll. [11] et va au-del~, en ce qui concerne la NP, des

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r6sultats de celle du VETERANS AFFAIRS TOTAL PARENTERAL NUTRITION COOPERATIVE STUDY GROUP [6], avec une diff6rence statistiquement significative vraisemblablement due /a une plus grande homog6n6it6 (un seul centre) et 5 une inci- dence sup6rieure de patients fortement ddnutris. Mais faute d'une puissance suffisante, elle ne peut d6partager NP et NE sur des critbres de r6sultats.

Enfin, MOORE et coll. [22] ont conduit une m6taanalyse fond6e sur huit 6tudes prospectives contr616es, utilisant une m6thodologie voisine, comparant NP et NE (Vivonex) pr6coces chez 230 patients en situation d'agression : 112 ont requ la NP e t 118 la NE (sonde nasodigestive : 37 ; cathdter de j6junostomie : 81). L'analyse en intention de traiter montre que le pourcentage des patients d6veloppant une complication infectieuse 6tait plus faible avec la NE pr6coce (16 v s 35 %, P < 0,05), la diff6rence persistant m~me en excluant les infections sur cath6ter (16 v s 29 %, P < 0,05). La mortalit6 n'6tait pas diff6rente entre les deux groupes. La moindre incidence des complications infectieuses, signifi- cative chez les traumatis6s soumis h une NE pr6coce (t9 v s 39 %), ne l'6tait pas chez les patients op6r6s pour un motif non traumatique (9 v s 21%), mani- festement en raison de la taille des effectifs.

Au terme de cette revue des 6tudes cliniques comparatives, plusieurs conclusions peuvent 6tre envisag6es : 1) la NP et la NE pr6 et postop6ratoires ne doivent pas ~tre envisag6es en routine chez des patients non identifi6s comme h risque nutritionnel (grade B) ; 2) chez des patients s6v6rement ddnutris, NP et NE r6duisent l'incidence des complications postop6ratoires par rapport/a l'absence d'assistance nutritionnelle (grade B) ; 3) h condition d'atre introduite prdcocement, la NE est associ6e ~ une moindre incidence de complications infectieuses chez le traumatis6 abdominal op6r6 (grade B) ; 4) chez l'op6r6 non traumatis6 d6nutri ou h risque de ddnutrition postop6ratoire, la preuve d'un avantage de la NE pr6coce sur la NP en termes de rdduction des complications infectieuses reste /~ 6tudier avec des effectifs suffisants.

3. RISQUES ET COOTS DE LA NP ET DE LA NE

La d6cision de mettre en oeuvre une nutrition p6riop6ratoire en chirurgie r6gl6e de l'adulte proc6de non seulement d'une analyse des b6n6fices attendus, mais aussi de la prise en compte des risques encourus, tant en ce qui concerne leur fr6quence que leur gravit&

Le risque de complications iatrog6nes cons6cu- tives & la NP, d'aprbs une m6taanalyse [23], est de 6,7 %. La plupart de ces complications sont mineures, mais certaines peuvent mettre en jeu le pronostic vital. Selon l'analyse exhaustive de la litt6- rature concernant les complications des cath6ters

utilis6s pour la NP [24], la fr6quence des complica- tions m6caniques lots de l'insertion varie de 3,0 ~t 12,0 %, celle des infections sur cath6ter de 2,8 & 14,0 %, et celle des thromboses veineuses clinique- ment parlantes de 2,5 h 4,8 %. I1 faut ajouter & cette liste quelques observations d'endocardite et de thrombose intracardiaque. Les infections sur cath6- ter posent clairement un probl6me de d6finition : de nombreux travaux concernent la positivit6 de la culture du cath6ter lors de son retrait. En milieu chi- rurgical, peu de donn6es sont disponibles concernant les infections ayant une traduction et des cons& quences cliniques. Par ailleurs, comme le d6montre la tr6s faible incidence des infections en NP chro- nique [25], il est difficile d'imputer l'infection ta la seule NP lorsque, en p6riode postop6ratoire, le cath6ter est indispensable. La NP comporte 6gale- ment des risques m6taboliques plus importants que la NE, par exemple hyperglyc6mie et hyperosmola- rit6 [13, 19], qui impliquent une surveillance biolo- gique plus importante. Enfin, la NP alt6re plus l'activit6 m6tabolique du foie, en particulier l'oxyda- tion des x6nobiotiques, que ne le fait la NE. L'impact de ces modifications est d6montr6 chez le rat [26, 27], mais n'a pas fait l 'objet d'6tudes chez l'homme.

Envisager les complications de la NE am6ne ~ en discuter les voies d'administration. Apr6s chirurgie abdomino-pelvienne, la r6cup6ration de la motilit6 de l'intestin grele survient avant la r6cup6ration de l'activit6 gastrique et colique. [28]. La chirurgie du carrefour aortique ne modifie pas la motilit6 du gr~le ni ses capacit6s d'absorption [29]. I1 parait donc logique de donner la pr6f6rence h la nutrition par sonde nasoj6junale ou par j6junostomie (conventionnelle ou par cath6ter) sur la voie nasogastrique. La j6junostomie par cath6ter, malgr6 sa simplicit6, est associ6e /~ diverses complications m6caniques (occlusions ou fistules intestinales, abets intra-abdominaux ou pari6taux) [30], dont certaines imposent une r6intervention. Elles semblent rares et 6vitables avec une technique rigoureuse de mise en place [20, 31] ; la plupart des complications publi6es sont contemporaines de l'introduction de la technique et correspondent donc, au moinsen par- tie, h u n manque d'exp6rience des 6quipes [32-34]. De plus, une intol6rance h la nutrition ent6rale pr6coce par j6junostomie (distension intestinale douloureuse, r6gurgitations) survient dans 13 h 37 % des cas selon les 6tudes [13, 17, 30, 35]. Une diarrh6e survient plus d'une fois sur trois et jusque dans 80 % des cas [17], mais la plupart des 6tudes en pr6cisant la fr6quence utilisent un r6gime 616mentaire (Vivonex), moins bien to16r6 que les r6gimes polym6riques en raison de sa forte osmolarit6. Ces complications conduisent habituellement ?a r6duire les apports ; mais, comme cela a 6t6 pr6cis6, des apports calorico-azot6s ent6raux r6duits n'emp~chent pas la mise en 6vidence d'un b6n6fice

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NUTRITION PARENTI~RALE ET ENTI~RALE P#RIOPI~RATOIRE

clinique par rapport h une strat6gie de repos digestif avec NP. La NE, administr6e par voie j6junale, ne r6duit pas l'incidence d'une colonisation bact6rienne gastrique, le risque d'inhalation, la fr6quence des pneumopathies et la mortalit6 par rapport h la voie nasogastrique [36, 37].

L'6valuation du coot de l'assistance nutritionnelle n'6chappe pas aux difficult6s traditionnelles de toute 6valuation 6conomique des soins, qui doit 8tre men6e avec la mSme rigueur m6thodologique que l'6valuation de l'efficacit6 et des risques. Les coots r6els doivent 8tre pris en compte, incluant les coots directs li6s h la technique (m61anges nutritifs, cath6- ters ou sondes, tubulures, pompes.,.) et les coots induits (temps ou honoraires du personnel m6dical et param6dical, examens paracliniques, h6tel- lerie...). Faute d'une comptabilit6 analytique d6tail- 16e, ces donn6es ne sont pas disponibles en France. Les r6sultats publi6s dans la litt6rature anglo- saxonne ne sont par ailleurs pas forq6ment transpo- sables ta notre syst~me de sant6. Tousles travaux confirment que les coots li6s ~t la technique sont plus faibles avec la NE [9, 10, 13, 14]. NITENBERG et coll. [38] indiquent que le coot d'une journ6e de NP varierait de 2 660 ~ 8 000 FF (1989), la NE ne r6dui- sant ce coot que de 300 ~t 500 FF/j du fait de la pr6- pond6rance des coots induits. Pour la p6riode pr6op6ratoire, la NE est plus facile h mettre en ~euvre en hospitalisation h domicile, ce qui implique une r6duction importante des coots induits.

Une lois d6termin6 pr6cis6ment le coot r6el de la NE et de la NP, l'6valuation m6dico-6conomique se propose de comparer les rapports co0t/efficacit6 de ces deux techniques dans les situations oh toutes deux peuvent 8tre envisag6es. Ceci suppose un degr6 de certitude suffisant concernant l'incidence des complications nutrition-d6pendantes, l'efficacit6 de la nutrition h r6duire la morbidit6 postop6ratoire, l'incidence des complications iatrog6nes, et, 6ven- tuellement, la valeur pr6dictive des crit~res d'6valua- tion nutritionnelle utilis6s [39]. Toutes ces conditions ne sont pas parfaitement r6unies, et aucune analyse co0t/efficacit6 NP vs NE m6thodologiquement cor- recte n'est disponible actuellement. Les analyses ayant compar6 NP vs nutrition orale conventionnelle [6, 40-42] ont conduit ~ des r6sultats discordants. Les r6sultats pr6sent6s sont actuellement en faveur de la NE : coot moindre, efficacit6 sup6rieure ou non dif- f6rente, risques iatrog6nes moins fr6quents et moins graves.

4. NP ET NE : DES DIFF#RENCES PHYSIOLOGIQUES ET QUALITATIVES

FONG et coll. [43] ont 6valu6 (niveau de preuve 3), les effets m6taboliques d'une injection d'endotoxine chez 12 volontaires sains recevant pendant une

semaine soit une NP soit une NE assurant des apports identiques. En r6ponse ~ l'endotoxine, l'hyperthermie, la tachycardie et la chute tension- nelle 6taient plus importantes dans le groupe NP. Elles 6taient associ6es ~ des taux plasmatiques d'adr6naline, de glucagon et de lactates ainsi qu'h des concentrations de TNF dans le sang veineux sus- h6patique plus 616v6s, et ~t une prot6olyse p6riph6- rique plus marqu6e. La voie d'administration des nutriments a donc, p e r se, une infuence sp6cifique sur la r6ponse inflammatoire syst6mique en r6ponse ta une agression.

I1 a pu ainsi 6tre sugg6r6 que l'objectif de la NE n'6tait pas d'assurer imm6diatement les apports calorico-azot6s correspondant aux besoins th6o- riques des patients, mais d'assurer l'int6grit6 et de stimuler la fonction de leur tube digestif, ce qui est possible avec des apports limit6s [44].

Les diff6rences qualitatives entre NP et NE doivent 8tre 6galement consid6r6es. En effet, s'il est possible d'administrer une mSme quantit6 de calories ou d'azote en utilisant la voie parent6rale ou la voie ent6rale, les nutriments habituellement utili- s6s different en r6alit6 beaucoup entre ces deux voies. I1 n'est pas possible, saul h faire la revue de toutes les 6tudes exp6rimentales publi6es concer- nant l'influence des substrats nutritionnels sur les m6tabolismes, d'envisager toutes ces diff6rences. Seuls seront discut6s les points d'actualit6 et ceux dont l'impact clinique parMt r6el.

La NP n'utilise que des acides amin6s, et encore certains d'entre eux seulement, comrne source azo- t6e.

La plupart des m61anges de NP n'apportent ni glutamate ni aspartate, des acides amin6s << excita- teurs >> toxiques pour les cellules nerveuses [45]. Ils sont tous actuellement d6pourvus de glutamine et d'asparagine, dont la d6gradation en solution lib6re de l'ammoniaque et des acides amin6s <~ exci- tateurs >>. Or une d6pl6tion pr6coce et profonde du pool de r6serve musculaire de la glutamine se pro- duit en phase catabolique [46]. Chez des patients op6r6s ou greff6s de moelle, une suppl6mentation extemporan6e en glutamine de la nutrition parent6- rale a un effet favorable sur la balance azot6e et sur la synth~se prot6ique [47-49]. Le maintien de l'int6- grit6 de la muqueuse intestinale semble un 616ment essentiel pour pr6venir la translocation bact6rienne et la cascade d'activation de processus cataboliques qui peut en d6couler [50]. La glutamine est le sub- strat pr6f6rentiel de l'intestin [51]. Dans diff6rents mod61es d'ent6rocolites exp6rimentales, l'apport de glutamine, le plus souvent par voie parent6rale, per- met de pr6server l'int6grit6 de la muqueuse et de r6duire la mortalit6 [52]. Certains travaux exp6ri- mentaux sugg6rent que l'incorporation des acides amin6s dans la muqueuse intestinale est meilleure, et la prot6olyse plus faible, lorsque les acides amin6s sont apportds par voie ent6rale, par rapport ~ la voie

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parentErale [53, 54]. Chez l'homme, la glutamine, administrEe par voie entErale, est trGs fortement absorbEe dans le jejunum, et une partie de la charge perfusEe est utilisGe dans le territoire splanchnique [55]. L'apport de glutamine en nutrition artificieUe, qui n'est actuellement assurE, en pratique, qu'avec la voie entErale, pourrait aussi ~tre justifiE par le r61e dE de cet acide amine dans la regulation de l'immu- nitE cellulaire systEmique et digestive [56-58].

L'arginine, un autre acide amine qui tend ~ deve- nit essentiel dans les 6tats d'agression, n'est present qu'~ faibles concentrations dans les mGlanges pour NP, h l'oppos6 de la NE. Chez l'animal, l'arginine amEliore la balance azotEe, la cicatrisation, et la rEponse h une stimulation lymphocytaire [59].

Les melanges de NP sont Egalement dGpourvus de cystEine, acide amine limitant pour la synth~se du glutathion, qui est nEcessaire ~ la dEtoxification des radicaux libres et des mEtabolites rEactifs [60]. Les mEcanismes de conversion en cystEine de la mEthio- nine, qui est prGsente dans les melanges parentE- raux, sont altErEs dans de nombreuses situations pathologiques [61].

Enfin, des travaux expErimentaux ont montr6 que les peptides avaient des effets supGrieurs aux acides amines en termes d'intEgrit6 fonctionnelle de l'intes- tin et du foie, de stimulation des rGponses hormo- nales, d'utilisation de l'azote, de croissance et de cicatrisation [62, 63]. Les protEines et les peptides ne peuvent 6tre administrEs qu'en NE.

Les sucres complexes, qui ne sont administrables, sous forme de fibres, qu'en NE, ont eux aussi des effets favorables sur l'intGgritE et la fonction du tube digestif [64].

Les lipides utilisGs en NP sont riches en acide lino- IEique, un acide gras polyinsaturE en n-6 prGcurseur de l'acide arachidonique et donc des prostaglandines et des leucotribnes, qui ont en experimentation ani- male des effets dGpresseurs sur l'immunit6 cellulaire [65]. Les melanges utilisEs pour la NE contiennent moins d'acide linolGique, voire sont enrichis en acides gras polyinsaturEs en n-3 (acide linolEnique).

Enfin les nuclGotides, qui sont absents en NP mais presents dans quelques melanges pour NE, stimulent expErimentalement l'immunitE cellulaire [66].

Ainsi, NP et NE different par les nutriments administrGs. Les mGlanges utilisGs en NP manquent d'un nombre important de nutriments essentiels. Mais l'impact d'une supplGmentation en tel ou tel nutriment spEcifique sur la morbiditE et la mortalit6 postopEratoires n'a pas fait l 'objet d'Etudes prospec- tives randomisGes. La plupart des arguments prEsen- tGs sont de niveau 5 ou 6, et ne peuvent donc pas conduire h l'Etablissement de recommandations. Concernant l'intGgrit6 structurelle et fonctionnelle du tube digestif, il existe des preuves expErimen- tales, mais aussi cliniques (niveau 3) du rGle dG16tbre de la NP chez l'adulte. Ainsi, GUEDON et coll. [67] ont pratique des biopsies duodEnales par voie endo-

scopique chez sept patients atteints d'une colite inflammatoire placGs sous NP depuis 21 jours et cor- ticothGrapie, et ont observ6 une diminution signifi- cative des activitGs disaccharidase et peptidase rGversible h la rGintroduction de l'alimentation orale. BIASCO et coll. [68] ont montr6 qu'une NP de 30 jours, apr~s rGsection intestinale pour thrombose de l'art~re mGsentErique supErieure, 6tait associEe une aplasie des villositEs muqueuses jEjunales, rGgresslve aprGs 14 jours de renutrition orale. Cependant, si le phEnom6ne de translocation bactE- rienne est parfaitement connu chez l'animal, les arguments dEmontrant qu'il survient chez l'homme en situation d'agression sont encore pauvres et il n'existe pas d'Etude contrG1Ee comparant en clinique la NP et la NE. L'Etat immunitaire de patients rece- vant une NP ou une NE n'a pas fait l'objet d'Etudes prospectives randomisEes.

CONCLUSION

Un nombre important d'Gtudes cliniques de niveau de preuve 2 et d'arguments expGrimentaux de niveau 5 ou 6 vont dans le sens d'une supGriorit6 de la NE sur la NP. A efficacit6 identique, la NE est moins cofiteuse. I1 peut donc ~tre suggGr6 que l'indi- cation principale de la NP reste l'impossibilit6 ou l'Gchec de la NE. Mais des 6tudes mGthodologique- ment indiscutables, menGes non seulement de maniGre prospective et randomisGe mais aussi en aveugle, et avec des effectifs donc une puissance suf- fisants, restent h effectuer pour autoriser des recom- mandations de grade A.

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