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centre des femmes de l'Es trie Itée c.p. 141 — Succursale Place de la Cité Sherbrooke (Québec) JlH 5H8 Bulletin INFORMELLES voL 7 numéro 3 Automne 1992

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centre des femmes de l'Es trie Itéec.p. 141 — Succursale Place de la Cité

Sherbrooke (Québec) JlH 5H8

Bulletin

INFORMELLESvoL 7 numéro 3 Automne 1992

Page 2: INFORMELLES - CDÉACF

Sommaire

Editorial par Sylvanne Boulianne

Atelier d'écriture

Grandes orientations du GFE

Femmes et éducation par Louise Bouchard

Chroniques

Un brin d'histoire par Micheline Dumont et Louise Simard

Paroles de femmes

Mythologie et nouvelle spiritualité par Louise De Broin

Femmes d'ailleurs par Flore Castillo

Voix pleines et rondes notes par Danielle Tremblay

Portrait de femme par Lucille Latendresse

Petites et grandes nouvelles

Mot de la fin

Page 3: INFORMELLES - CDÉACF

EDITORIAL

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Reproduction interdite

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Atelier d'écritureNous vous présentons les créations de l'atelier d'écriture qui, le croyions-nous, avaientété égarées. Eh bien non, nous les avons retrouvées pour vous faire plaisir!

Roman III

II était une fois, au beau milieu de ma vie,une histoire d'amour toute en douceur...Amour des uns et des autres, ton amourtout court.

Ce matin, j'ai l'hiver à l'envers. Je coursaprès mon temps: vite, vite, déjà midi!Heureusement qu'il reste encore toutes cesheures devant moi, devant nous. Je le sais,nous nous inventerons mille jeux amoureuxdont nous serons les seuls à en connaître lesrègles. Quel bonheur que ton sourire!

J'ai faim: je croque à la vie. Ma clémentinedégouline et je salive en imaginant une detes caresses. Plus tard, quand j'aurai centans, j'écrirai le roman de nos extases. C'estbien, j'en aurai pour une autre centained'années!

C'est un beau programme. Une~vue~ splendi-de, avec des -gros plans- déconcertants, etcetera. Voyez-vous ça, vous tous, je l'aime.Lui, il est mon tout, mon loup, mon fou!

Les maux passent, les écrits restent.

Claire Martel-Castonguay

Quand la -source- va vers la -rivière-

Tout coule et s'enivre

Tout se prend, se reprend et fait vivre!

Tout est permis dans la beauté du jour

et de la nuit!

en -elles-, le mystère matinal

la naissance du merveilleux

c'est un langage sans mots, sans bruits

une magie dans la nuance

un pas paisiblement posé

sur le chemin sauvage

Carole Landry

Source, rivièreNuit, jourDroit, détourDemain, hier

Tout cela coulecomme une musiqueRoule

Naissance, nuanceAbondanceBombance

Pas de danse

Tout tournedétourneJ'ajourne toute ensauvagée

Gertrude Doyon

A'me dit comme ça: tout tourne, détourne,pis j'ajourne toute ensauvagée.A'm'écris comme ça: tout coule, tout roule,pis j'moule toute endimanchée.

Que se qu'a veut dire quand a'm'parlecomme ça

J'me dis que ça veut peut-être dire qu'am'aime ou bedon qu'à m'hai pas.

J'me dis que ça veut peut être dire qu'apense à moi, pis qu'a m'oublie pas.

L'informelles, vol. 7 rf 3, p.3

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Atelier d'écritureJ'me dis que ça veut peut-être dire qu'arêve à moi, pis qu'a se fait du cinéma.

A'me dit comme ça: tout déboule, chusmaboule, ma coucoune

A'me dit comme ça: tout fouie, tout ourle,ma choucoune.

Que se qu'a veut dire quand a'm'parlecomme ça

Tu sé-tu toi, ma choucoune, ma nounoune,ma coucoune

Tu l'sé-tu toi c'que ça veut dire quand çaroule, ça coule, ça tourne

Que se qu'a veut dire quand a'm'parlecomme ça

Chus touttt troublée quand a'm dit des p'titsmots doux, pis des p'tits mots tendres, desmots qui roulent, des mots qui tournent etqui coulent.

Chus toutt à l'envers quand a'm'dit qu'am'aime, pis qu'a m'hai pas, qu'a rêve à moi,pis qu'a m'oublie pas.

Tu l'sé-tu toi c'que ça veut dire quand onmurmure, touttt collés: naissance, nuance, etbombance

Alors, à toi la suite

Suzanne Pouliot

Faire bombance! H y a longtemps qu'elle nesait même plus ce que c'est. Ou alors! Ellele sait, dans le sous-bois obscur de sonenfance, rétréci, tout amoché comme le pind'hiver sous lequel elle se love, sans atten-dre la nuit. Le vieux manteau drapé fière-ment sur ses belles cuisses mûries par lesplaies de lit, elle n'attend rien, béate devantsa trajectoire solitaire. Est-elle solidaire desoiseaux blessés, du sang d'encre des mères-acrobates toutes jeunes et de toutes les

robineuses intelligentes qui larguent lesamarres du désespoir Si pauvres et si plei-nes des sens qu'elles comprennent, du sensqu'elles retiennent malgré tout et malgrétous.

-Viens, ma choucoune, j'ai besoin de toi!...-

Elle a bientôt quinze ans et c'est sa premièredanse, son premier party dans les pommeset dans les pins.

Elle préfère grimper dans les rideaux: elleen trouve trop qui se plaignent et se tordentdans le froid chagrin. Elle est sortie pouraffronter les premiers baisers, les premiersgouffres, ses éléments naturels. Elle n'a pasbeaucoup changé, non. Le paysage souselle est juste plus sauvage, exilé dans labienfaisance grise, la divertissante masse.Elle n'abandonne pas! Elle retrouvera biensa soeur de lait, de l'autre côté, à l'autrebarrière, à l'autre station du chemin decroix.

Danielle Tremblay

L'autre jour on l'a vue marcher près de lamer. Seule. Comme avant. Comme tou-jours. Le bois et la mer: ses deux amours.Rien ne l'arrête: ni la pluie, ni le vent, ni lefroid, ni le soleil de midi. On l'a vue habil-lée de toutes les façons, on l'a même vuepas habillée du tout. En fait, ce jour-là, ellene portait que des plumes. Et de toutes lescouleurs. Un bel oiseau exotique, unique.Chaud, le vent coulait sur son corps deduvet. Légère, elle aurait pu s'envoler.Elle chantait. Les vagues lui répondaient.Elle pleurait. Seule.

On ne sait d'où elle vient, on ne sait où elleva. Elle ne parle à personne et pourtant ondit qu'elle est d'une sagesse! Elle sembleavoir tout le temps devant elle, tout letemps pour elle. Des générations ont passéet on lui reconnaît la même ténacité et beaucoup de maturité collée à la peau et aucoeur. Quand on l'aperçoit c'est son air

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Atelier d'écrituredégagé qui nous saute aux yeux même sison regard ne rencontre celui de personne.Personne, sauf l'enfant au cerf-volant. Il y aaussi l'âne sauvage et coquin qui mérite sonattention. Elle seule peut -l'approcher. Etles coquillages qu'elle scrute à les polirjoyeusement. Même les grains de sableaiment être foulés par ses pieds toujoursnus.

Jour après jour, elle marche sur le chemin dela vie, de sa vie. Seule. C'est ainsi qu'ellepartira et qu'on la retrouvera, rejetée par lavague, des écailles miroitantes au corps,telle une belle sirène. Ses yeux, qu'on dé-couvrira vert émeraude brilleront au soleildu matin-, ses lèvres moullées seront entrou-vertes en un sourire serein; ses cheveuxemmêlés seront entrelacés de longues al-gues; son corps sera d'une transparenceémouvante. Telle est l'histoirepresqu'irréelle d'une de ces femmes dont onsait peu de chose parce qu'elle en a choisiainsi.

Carole Tatlock

Reproduction interdite L'informelles vol.7 no 3, p.5

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Femmes et éducation

Culture féminine, vulnérabilités, libreexpression et «parole libre».ouCulture, vulnérabilités et forces féminines.

Il est certain que nous, les femmes, nousavons rompu le silence pesant etdouloureux qui a marqué l'histoire de nosmères, de nos grands-mères, de nosarrière-grands-mères...

Mais il est encore plus certain qu'unecertaine «parole libre», (et je fais ici unedistinction entre «libre expression» et«parole libre» entendant par là que libreexpression n'est pas synonyme de«parole libre», que la libre expressionn'engendre pas nécessairement uneparole libérée d'une culture qui l'asservit;ainsi on peut s'exprimer librement avecdes propos qui consacrent ce qui est enplace!) ou plutôt libérée dans le sensdécrit ci-avant, personnellement etsocialement engagée, politique,consciente, est encore interdite et à créerpar l'ensemble des femmes dans leursmilieux de vie quotidienne et de travail, jene parle pas ici des écrivaines, desfemmes de parole et d'écriture quimarquent déjà des points dansl'avènement de cette parole. Mais tantqu'elle se restreindra à ces cercles, elle nepourra avoir l'impact nécessaire pourengendrer des changements profonds etqui devraient renouveler la face politiqueet sociale de nos sociétés, de nosinstitutions, bien entendu incluantl'institution universitaire dont les membresdevraient être à l'avant-garde.

Cette parole interdite ne se maintient pasde façon aussi grossière que par le passé;avec comme tapisserie de fond cetteincroyable sentence dans une société qui

se prétend démocratique, je réfère au"Sois belle et tais-toi!", ordre devenumaintenant célèbre et passé dans notrehistoire collective de femmes. Certes,nous avons déjoué quelque peu cetidiome bassement politique, mais nousavons hérité de la culture implicite quil'entoure, de sorte qu'il est encore bienvivant dans nos rapports familiaux,professionnels et institutionnelsquotidiens. Sauf que son influence estdevenue plus subtile! Car cet idiome faitpartie de notre culture, et la culture, c'estun donné inconscient et incontrôlé, c'estprofond et enraciné dans des mécanismesde comportements et d'attitudes qu'on nequestionne pas.

il n'est donc pas facile de démasquer lesattitudes qui maintiennent l'interdiction,retardent ou empêchent l'émergenced'une parole libérée et renouvelée par uneculture féminine autre, explorée au fur età mesure dans un langage qui est à créeret que nous ne connaissons pas encore.

De quoi serait faite, cette cultureféminine dont les femmes dépendentlargement encore?

Cette culture issue de nos silences et denos soumissions et qui se perpétuechaque jour dans nos réactions et noscomportements quotidiens, je diraisqu'elle est faite beaucoup de nosvulnérabilités affectives de femmes. Desvulnérabilités qui confèrent des pouvoirspolitiques extraordinaires à nos confrères,à nos frères, à nos partenaires masculinset même et malheureusement aux autresfemmes!

Informelles, vol.7, if 3, p.7

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Femmes et éducation

Mais quelles seraient ces vulnérabilités?J'en ai identifié trois qui seraient à monavis les plus probantes.

La première est la fragûité d'unesolidarité féminine à peine ébauchée etsurtout pas encore intégrée sinon refuséepar un grand nombre de femmes. Sesbrèches sont des portes royales d'entréepour un pouvoir manipulateur quimaintient les femmes dans cette cultured'opprimées et de paroles interdites. Et jecite à l'appui un extrait de ce texte deGuylaine Lanctôt, paru dans le Devoir du7 mars dernier: "Retrouver le principeféminin en nous". Elle parle des "armessubtiles" d'un pouvoir qui se fait passerpour la majorité et impose ses règles aureste de la société:

...Le "diviser pour régner." Faire sedisputer entre eux les hommes et lesfemmes, les noirs et les blancs, leshétérosexuels et les homosexuels, lesautochtones et les autres, les anglophoneset les francophones, les parents et lesenfants, les patrons et les syndicats, lesriches et les pauvres... même les partisansdes Canadiens et les partisans desNordiques... La meilleure de toutes, c'estd'arriver à diviser les femmes entre ellessur la question de l'avortement. D faut lefaire! Et nous marchons comme desmoutons...

inconsciemment nous participons à cettedivision. Nous n'avons qu'à regarder,chacune, dans nos milieux de travail, dansnos rapports sentimentaux, dans nosrelations de chaque moment, comment ce"diviser pour régner" règne en despotedans notre langage quotidien et imprègneprofondément nos échanges avec nosconfrères et consoeurs, erode subtilementune solidarité féminine encore à l'aube desa naissance.

Notre deuxième vulnérabilité culturelle estliée à notre condition de mère. Oui, notrevulnérabilité de mère pour ne pas direnotre culpabilité maternelle a faitsouvent de nous des protectricesmalsaines vis-à-vis nos enfants, leshommes surtout, nos pères, nos confrères,nos frères, nos collègues, nos partenairesmasculins. Constamment, nous noussentons coupables si nous ne sommes pasles protectrices parfaites et traditionnellesde nos "enfants"! Nous traînons cetteculpabilité malgré les cris sourds de nosaspirations et de nos droits pour ne pasdire nos devoirs les plus élémentairesd'individus appelés humainement àpoursuivre des trajectoires choisies,personnelles et pas nécessairementvouées aux autres!. Nous avons peineencore à vivre pour nous , à "se choisir"dans le plus menu de nos actesquotidiens, à secouer le joug et laservitude d'habitudes consacrées au biende l'autre.

Comme des brebis ou encore mieuxcomme des "moutonnes". Nousmarchons..., et le pouvoir dont lesfemmes ne veulent plus continue de semaintenir. Oh, nous nous faisons "diviser"d'une façon moins évidente quel'exemple de l'avortement cité ci-haut.Mais chaque jour de façon persistante etinsidieuse cela arrive et consciemment ou

Et notre dernière vulnérabilité culturelle etnon la moindre, notre désir de plaire, defaire plaisir, de se laisser séduire et deséduire pour être reconnue comme êtrehumain valable, ce qui peut nous conduireà des bassesses et des trahisons enversnos consoeurs, des alliances mesquinesavec des collègues ou des supérieurs detravail et qui renforcent nos traditionnelles

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Femmes et education

divisions de femmes. Cette vulnérabilitéparticulièrement fait surgir des rivalitésdestructrices, empêche la naissance denouveaux liens féminins, d'une nouvelleparole régénératrice et qui pourrait enfinparticiper dans nos institutions et dans nosmilieux de travail à l'avènement d'une"réelle libre expression", d'une cultureautre entre hommes et femmes, femmeset femmes, une culture basée sur desrapports réciproques d'intérêt honnête etégalitaire.

Mais paradoxalement ces vulnérabilitéssont aussi nos plus grandes forces.Pourquoi? Parce qu'elles contiennent dansleurs envers les germes culturels d'unesociété qui pourrait être différente,c'est-à-dire plus axée sur des valeurshumanitaires qui ont été écartées pour defaux motifs de rationalité, de survie et

même de "nature" humaine fatalementmauvaise. Car la fragile solidaritéféminine indique un souci universeld'inclusion de tous les êtres sans créationde ghettos ou de "tavernes", la culpabilitéféminine cache une immense générositéresponsable jusqu'au désintéressementtotal et enfin le désir de faire plaisir, c'estle souci du bonheur de l'autre jusqu'àl'oubli de soi. Toutes choses indispensablesà la création d'une société véritablementdémocratique basée sur des échangesrenouvelés à travers la richesse desvulnérabilités et des forces féminines.

Louise Bouchard, professeure à la Facultéd'éducation et artiste-peintre.,

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Informelles, vol.7, if 3, p.9

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Un brin d'histoire

1969 : Front de libération des femmes duQuébec

«Pas de libération du Québecsans libération des femmes!Pas de libération des femmessans libération du Québec!»

Front de libération des femmes

À peu près au moment même où apparurenten Occident des groupes appelés «mouvementde libération des femmes», naissait, à Montréal,le Front de libération des femmes du Québec(FLF). C'était à l'automne 1969. Le terme frontmarquait bien l'ancrage national du groupe :il était féministe et québécois, s'abreuvait auxidées féministes radicales américaines, mais aussiau courant nationaliste tiers-mondiste del'époque. Un de ses slogans, cité en exergue,témoigne bien de cette double dynamique.

Ce n'était pas la première fois au Québec quedes femmes étaient rassemblées en groupe«autonome», mais c'était la première foisqu'étaient ainsi associées libération des femmeset révolution sociale. C'était la première foissurtout que des femmes disaient lutter pourelles-mêmes, et qu'il leur appartenait, etàellesseules, de «décider de leurs conditionsd'existence, de leurs corps et de leurs vies»,clamait-on.

Le groupe tranchait aussi avec les pratiquesféminines traditionnelles en favorisant le gested'éclat. Il s'agissait de porter la question desfemmes sur la place publique, faire éclater augrand jour l'existence même des femmes et lasortir du privé. Le privé était politique, et ilfallait que ça se sache!

Comment? Par des manifestations d'abord.Par exemple, au Parc Lafontaine, le jour de laFête des mères en mai 1970, le groupemanifestait en faveur de l'avortement. Le slogan

de la manif a choqué à l'époque : les mèresétaient «Reines un jour, esclaves 364».

Autre action : pour dénoncer la foirecommerciale qu'était le Salon de la femme, cetteode à la femme-objet, le FLF décida demanifester ostensiblement en mai 1971 sur leslieux mêmes du Salon. Effet du hasard? Ona pu voir apparaître par la suite, aux côtés desmarchands de savon et de cosmétiques, deskiosques plus «neutres», sur la santé desfemmes, par exemple.

Ou encore : pour que les femmes du Québecaient enfin le droit d'être jurées à des procès,sept femmes du FLF prennent d'assaut, le 1 ermars 1971, le banc des jurés en plein procès.Pour la première fois au Québec, des femmesétaient condamnées à la prison (de un à deuxmois) pour la cause des femmes. Toujours lehasard? Moins de trois mois plus tard, la Loides jurés du Québec était modifiée et faisaitplace aux femmes. Etc. etc..

Le FLF ne fit pas que des actions d'éclat. Ilassura aussi un service de référence pour lesavortements-, il lança au printemps 1971 unecampagne d'opinion, organisa une marche etun colloque sur le sujet. Il implanta la premièregarderie contrôlée par des femmes. Il a aussiproduit le premier numéro du journalQuébécoises Deboutte! Et il a, surtout, faitlargement savoir que l'oppression des femmesétait l'oppression première dans tous lessystèmes de la planète!

Le FLF vivra deux ans. Quand il meurt, endécembre 1971, il a à son actif des contributionsmajeures à l'avancement de la cause desfemmes montréalaises et québécoises.Mentionnons : avoir bel et bien mis le féminismesur la "mappe" montréalaise; avoir légitimé etdonné droit de cité aux groupes de femmesmilitant pour elles-mêmes: avoir brisé l'imageséculaire de "la", femme, l'image féminine, enoffrant désormais un choix : être des femmessans hommes, vivant, militant, travaillant,s'amusant, voyageant ensemble; des femmes

Informelles, vol. 7 n° 3, p. 11

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Un brin d'htstoire

s'embrassant, des femmes autonomes, libresde leur vie; avoir jeté les bases d'un rapportde force femmes-pouvoir; avoir posé lespremiers jalons du féminisme radical au Québec,avoir, enfin, occasionné la naissance du Centredes femmes (celui de 1972) qui, à son tour,donna naissance au Théâtre des Cuisines, auComité de lutte pour l'avortement et lacontraception libres et gratuits, au Centre desanté des femmes du quartier Plateau Mont-Royal, au Centre de documentation féministe,aux Editions du Remue-Ménage.

Tous ces groupes, issus en droite ligne du FLF,sont tous nés avant 1976, date à laquelle il estd'usage courant maintenant, chez lesuniversitaires, de faire remonter l'origine duféminisme radical au Québec. C'est toujoursavec un pincement au coeur que des militantesde cette époque-là entendent tomber cejugement historique, elles qui ont dû lutter dansl'hilarité générale, quand ce n'est pas au corpsà corps (sic), pour briser la glace et fonder lesassises d'un féminisme "anti-patriarcal et anti-capitaliste", comme on disait en ce temps-là.

Retourné à ses limbes historiques par le plusrécent livre d'histoire des femmes, qui doncpourra dès lors se souvenir de ce type deféminisme montréalais, pourtant bien de cheznous!

Louise Toupin, militante et membre du Frontde libération des femmes du Québec Cet extraitest tiré d'un ouvrage en préparation sur lesgrandes montréalaises.

-Louise demande un cocher et se fait conduireà l'Hôpital général de Québec où Charlotte luia offert l'hospitalité pour la durée de son séjour.Elle se réjouit à l'idée de revoir sa soeur aînée.

Elle souhaite lui parler d'Angélique qui minesa santé à épauler Marguerite d'Youville et sescompagnes. Un sujet de conversation quidevrait les rapprocher.

Aux portes de la ville, le cocher met son chevalau pas. Le printemps étale ses verts tendresjusqu'au moindre buisson. Les trembles et lespeupliers bruissent doucement, effleurés par labrise. Des mouvances mystérieuses s'emparentdes bocages où se croisent lueurs et ombres.Un lièvre, comme surgi d'un conte, courtquelques secondes devant la voiture avant dedisparaître dans un fourré. La terre crée uneillusion de sérénité. Tout devient possible. Desdésirs de partance hantent la voyageuse. Partirloin... Découvrir tous les mondes... Voir la mer,des animaux étranges, ni marins, ni terrestres,des oiseaux aux couleurs bigarrées, aux becsénormes, des gens à la peau jaune ou noire.Ecouter leurs chants, épouser leurs rythmes.Le printemps s'infiltre en elle, la contamine,l'intoxique de pulsions nouvelles. Sur les restesde léthargie de l'hiver fleurissent des rêvespoignants, ensorceleurs, presque cruels à forcede grandeur inaccessible.

Pour y échapper, Louise questionne le cocher.- Vous demeurez à Québec depuis longtemps?

- Oui, mademoiselle. J'y suis né ainsi que tousmes enfants. Et j'espère bien que les enfantsde mes enfants y naîtront aussi.

- Vous en avez combien?

- Quinze! Et tous bien portants, grâce à Dieu!

La fierté naive du bonhomme la heurte. Ellecherche quelque chose à opposer à saprétention. D a bombé le torse, aussi magnifiquesur son petit siège de bois qu'un prince sur sontrône. Elle voudrait le rabaisser pour ne plussentir sa propre petitesse. Mais quelle valeurpeuvent prendre les plus grandes réalisationscomparées à l'exploit de cet homme? Il assure

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Un brin d'histoire

la sauvegarde de la race humaine. On sesouviendra de lui. Il vivra toujours alors qu'ellen'a rien fait qui vaille la peine d'être retenu parles générations à venir. Une branche arrachéede l'arbre qui n'aura jamais infusé sa sève àpersonne-Inutile... La vie se transmet à côté d'elle, sanspasser par ses veines.

Une grande ondée de désir la secoue. Ellevoudrait Antoine près d'elle, s'accoupler ici, dansles futaies ombrées, avec ce corps jeune,audacieux, libre. Leur enfant et l'enfant de leurenfant porteraient leurs espoirs jusqu'au nouvelâge, jusqu'au dernier des derniers hommes.Et sa vie, en se confondant à celle d'un autre,prendrait un sens. Elle sourit en pensant àl'étonnement d'Antoine s'il entendait sespensées. Lui-même un enfant buté,déraisonnable, impatient, rêveur, naif, commentpourrait-il seulement envisager une telleéventualité? Il se moquerait d'elle.lui rappelleraitgentiment qu'elle n'a plus vingt ans, hélas, etque c'est justement pour cela qu'il l'aime. Lesfilles de vingt ans sont si bêtes! Elle revoit sonair boudeur, la veille de son départ. Il jurait nepas pouvoir survivre à cette séparation. Il s'estaccroché à elle pendant des heures. Elle l'acajolé, a promis de faire le plus rapidementpossible, juré que ce voyage était nécessaire.Il a voulu venir, puis il n'a plus voulu, heureuxde souffrir pour elle. Il a accepté de ne pas setuer puis il a demandé un fusil. Il a voulupleurer, mais il n'y est pas arrivé. Alors ils ontri aux larmes en se faisant leurs adieux toutela nuit. Si bien que l'aube les a surpris enflagrant délit de libertinage et qu'il a falluattendre le départ d'Angélique et de Claudinepour qu'Antoine puisse s'échapper par la portedu jardin.

- Sous la pluie..., marmonne Louise.

- Pardon, mademoiselle?

Prise par ses pensées, Louise a marmonné.

- Ren... Est<e que nous arrivons bientôt?

-J'aperçois le clocheton du monastère.-

- Oui, mademoiselle, J'y suis né ainsi que tousmes enfants

Louise Simard, écrivaine et chargée de coursà l'Université de Sherbrooke. Son dernier romanLa très noble demoiselle dont c'était un extraitlui a permis d'être en nomination pour le prixdu Gouverneur général.

Informelles, vol. 7 if 3, p. 13

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Paroles de femmes~Ne dédaignez pas votre corps. Car l'âme est tout autant en sécuritédans votre corps que dans le Royaume des cieux.-

Mechtilde de Magdeburg (1210-1280)

~Les saintes personnes attirent à elles tout ce qui est terrestre... La terre est égalementmère. Elle est mère de tout ce qui est naturel, mère de tout ce qui est humain.~

Heldegarde de Bingen (1098-1179)

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Reproduction interdite

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Mythologie et nouvelle spiritualité

Les rituels et les cérémonies

Dans notre monde moderne et mécanisé,nous nous sommes sans cesse éloignés dela connaissance des rythmes du cyclevital. Nous ne célébrons plus les change-ments saisonniers de la Terre, nous délais-sons même nos propres rites de passagequi liaient, autrefois entre eux, les diversstades de notre vie. Nos ancêtres étaientbeaucoup plus conscients de l'importancecruciale d'honorer et de reconnaître cespoints de passage et de changement; ilsrecouraient, pour cela, aux rituels, céré-monies et rites initiatiques.

Les rituels apportent une expérience holis-tique dans laquelle le sacré se mêle auprofane, au quotidien; rencontre entrel'esprit et la matière, moment des sync-hronicités et de réunion qui ouvre detoutes nouvelles possibilités et nous aideà nous départir de réalités dépassées.

Les rituels facilitent les étapes de transi-tion dans notre vie et nous aident à tra-verser les événements marquants commeles deuils, les séparations, les anniversai-res. Ils peuvent également servir à renfor-cer les liens à l'intérieur d'un groupe.

Les rituels nous ouvrent à une dimensioninterculturelle car on les retrouve danstoutes les traditions, dans toutes les reli-gions. Ils nous rappellent que le cycle dela vie, la naissance, la mort, la renaissan-ce, est le même pour tous les êtres hu-mains, et que cette unité dans la diversitécontribue à la richesse de la vie.

Les rituels permettent aussi d'accéder àune nouvelle conception du temps, letemps mythique, qui coupe la routine dela vie «ordinaire» en nous mettant en

contact avec l'unité de toutes les formesde vie.

Louise de Broin, professeure à la Facultéd'éducation

Références

AÏVANHOV, OrnraamMlkhaël(1987). Les fruits de l'arbre devie. Fréjus : Éditions Prosvcta.

BARZ, Brittle (1984). Festivals with Children. Edlnburg :Floris Books.

POWERS. Mala (1985). Follow the Year. San Francisco :Harper & Row Publishers.

SPANGLER, David (1975). Festivals in the New Age. Moray,Scotland : Flndhorn Publications.

WHITE EAGLE (1982). The Way of the Sup. Hampshire : TheWhite Eagle Publishing Thrust.

Les rites de passage

Malheureusement, on a laissé croire à plu-sieurs d'entre nous que nos menstruations,on ne sait pourquoi, étaient sales, honteuses,la malédiction des femmes quoi! Ce n'estque lorsque je suis devenue enceinte quej'ai réalisé avec respect et émerveillementl'efficacité et la magnificence du travail denotre corps. Et jamais encore ne sentirai-jeune chose avec autant de respect et de joieque le vaste pouvoir créateur de mon corps.

Il n'y a pas longtemps, j'ai trouvé un rituelcharmant pour l'initiation de la jeune fille.J'ai changé certaines choses pour que toutle monde puisse l'utiliser, peu importe sacroyance religieuse. L'objectif est de célé-brer la force créatrice réveillée lors de lavenue des premières menstruations.

D'abord, préparez un bain spécial pour votrefille. Versez quelques gouttes d'huile demusc ou de romarin dans l'eau et faites-yflotter des fleurs rouges et blanches. Lerouge représente le sang, la force et la sexu-alité, alors queleblancreprésentel'enfance,l'innocence et la pureté. Pendant qu'elle

Informelles, vol.7, n° 3, p. 15

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Mythologie et nouvelle spiritualité

se baigne, préparez sa chambre. Fai-tes brûler de l'encens et déposez,sur une table, des fleurs et trois chan-delles. La première chandelle qu'elleallumera sera blanche et représenterasa condition de fille, l'innocence etla lune croissante; la deuxième serarouge et représentera sa conditionde femme, l'intuition et la pleinelune; la troisième sera verte et sym-bolisera la maturité, la sagesse et lalune décroissante. Après le bain,amenez votre fille dans sa chambreet invitez-laàallumer les chandelles,fixez des fleurs dans ses cheveuxpendant que vous lui expliquez lesymbolisme de la cérémonie quevous êtes en train de vivre.

« Tu vis présentement un moment trèsspécial pour toi qui indique que tues maintenant liée avec toutes lesfemmes; te voilà vraiment unie avecla nature parce que, dorénavant, toncorps reflétera ses cycles comme lalune, les étoiles et les saisons. Tu esdevenue une femme capable d'en-fanter de ton corps comme la terreelle-même enfante. Reconnais l'es-sence DIVINE dans ton être et célèbrece jour comme une deuxième nais-sance glorieuse qui t'apporte les pré-sents de créativité, de fertilité, d'intui-tion et de sagesse.»

Maintenant, offrez à votre fille uncadeau que vous aurez caché danssa chambre. Choisissez un objetrouge, soit un bijou, une pierre ouun vêtement; quelque chose dedélicat qu'elle pourra porter chaquemois durant ses menstruations pourse rappeler le monde merveilleuxdont elle fait maintenant partie.

Ensuite, vous pouvez organiser une

fête. Vous pouvez inviter les membres dela famille à partager un verre de vin rouge.Ils pourraient apporter des fruits, des gâ-teaux et des mets préparés en prévision dece partage. Un geste émouvant serait deporter un «toast» en faisant circuler un seulverre d'une personne à l'autre et d'accompa-gner son voeu d'un baiser à la jeune filleconcernée.

Transmi par Louise de Broin.

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Mythologie et nouvelle spiritualitéLA ROUE DE LA VIE DE GAIA, NOTRE TERRE

Cycle des fêtes solaires et lunaires

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Informelles, vol.7, n° 3, p. 17

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Femmes d'ailleurs

Pas mol !

«Mais enfin Maria, toutes les filles rêvent àleur fête de 15 ans» disait sa mère, qui necomprenait rien à son obstinationd'adolescente.

Il falllait que Maria soit comme toutes lesautres jeunes filles de bonne famille, que latradition soit continuée de mère en fille, parune grande fête où on parlera longtemps dela famille De La Portilla.

La belle robe qu'elles allaientporter, pleine de broderies, toutceci n'était pas mal pour Maria,sauf qu'elle rêvait à d'autreslieux, à d'autres pays, à toutesces choses qu'elle désiraitconnaître.

Pour elle ni la fête, ni le Te-Deumdes 15 ans n'ont une grandeimportance.

Pas plus que de se faire dire parle couple Parrain-Marraine de laprésentation, que le soir de ses15 ans, elle était «commme unefleur qui s'ouvre à la vie». Mariapensait que la vie était un grandcheminement à vivre et c'estpour ça qu'elle voulait voir dupays!

Les jours sont passés et personnene réussissait à la faire changerd'avis . Ce qui inquiétait le plusles parents de Maria, c'étaitcomment alliaient réagir les amis,les gens qu'ils côtoyaient en ville.

L

Pour Maria ne pas vouloir de fête des 15 ansne voulait pas dire rompre avec les traditionsde famille; c'était plutôt dire qu'elle voulaitautre chose dans la vie. Pour les jeunes amies,attendant avec impatience l'année de leurs 15ans, le grand rêve rosé-bonbon était de valseravec leur «chambellan», sorte de cavalierd'honneur pour l'occasion. Les cadeauxfaisaient ausssi partie du rêve.

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Femmes d'ailleurs

Dans la ville où je suis née, les filles parlentde «ce jour» longtemps avant et après. «LosQuinceanos» (fête des 15 ans) est une fêtequi a besoin d'une grande organisation car laréussite est très importante pour la famille.On comprend très bien qu'elle soit prête à ydépenser une bonne partie du budget familial.

La famille se réunit pour préparer la fête. Onchoisit de préférence le samedi. Les noms de14 jeunes filles et 14 jeunes hommes sonttirés et on choisit aussi le «chambellan»,cavalier idéal pour la «quinceanera».

On choisit cinq couples de parrains etmarraines, dont ceux de la présentation quivont veiller sur la jeune fille comme s'ilsétaient ses parents. Ils doivent être descitoyens importants par leur rang social et leurnotoriété dans la ville (donc riches et connus).

Le choix des autres parrains et marraines n'estpas laissé au hasard; il y a : la marraine duchapelet et du livre des prières, la marrainedu cierge, la marraine du bouquet, les parrainsdu gâteau. Ce sont aussi obligatoirement desgens importants dans la ville car il faut payerle gâteau et le vin d'honneur pour tous lesinvités.

Il faut aussi trouver qui va orchestrer le tout etqui va faire la robe de la jeune fille, ainsi quecelle des autres 14 jeunes filles. Les tantes etles grand-mères ont leur mot à dire. Ellesorganisent les répétitions pour la valse quevont danser les 15 jeunes couples.

Le jour de la fête, la jeune fille, accompagnéede son père et suivie des 14 couples, estaccueillie sur le parvis de l'église par le prêtrequi officiera un Te-Deum en son honneur.Tous se rendront au salon des fêtes pour laprésentation et la valse. La fête sera uneréussite si les invités partent tard (au petitmatin), s'il y a eu suffisamment à boire et sil'on parle de l'originalité du buffet.

Quelqu'un disait que «Les mexicainesattendaient leur fête des 15 ans et leurmariage...», mais des filles comme Maria il yen a toujours eu. Elles ne rêvent pas à leurfête des 15 ans, ni au jour de leur mariage!

Flore Castillo, nouvelle recrue au ÇA du CFEqui s'identifie tout d'abord au Mexique parson origine, à la France poour y avoir vécu dixans et enfin au Québec pour y êtremaintenant.

Informelles, vol.7, n° 3, p.19

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Voix pleines et rondes notes

Variations sur le plaisir

Le plaisir de jouer de tout son corps,de toute sa voix, de ses membresdéliés, de l'instrument qui s'épouse etqui vibre. Plaisir intégré aux activitésde tous les jours, réservées ouréciproques, entre hommes etfemmes, dans les sociétés fortementcommunautaires: pour nous, c'est déjàdu passé. Plaisir longtemps refusé auxfemmes par les pouvoirs publics dansdes sociétés de plus en plushiérarchisées et professionnalisées.Plaisir manifesté sous diverses formesplus ou moins convenables depuis dessiècles. D'abord le chant, puis lesinstruments d'usage «discret» commela flûte ou le piano dans un certainrépertoire. Plus tard les percussions,les instruments à corde et les cuivres,qui nécessitaient des positions plus«audacieuses» ou des pratiques plus«agressives».

Le plaisir de chanter. La voie la plusaccessible de la formation musicale,c'est le chant. 11 peut tenir lieu demessage puissant, épanouissant, oude torture pour l'excellence, selonl'éducation qu'on reçoit en pleinventre, selon la respiration qu'onapprend. J'écoute la gymnastiqued'une soprano, qui renverse lesobstacles du registre et qui joue dessubtilités de la texture et de lamélodie. Cette souplesse, cedynamisme, ce nombrilisme de la voixtiennent-ils lieu de discours, de valeur?Avec leurs voix casse-cou, Céline Dionou Mariah Carey n'ont-elles vraimentrien à foutre de ce qu'elles chantent?N'y voit-on que du feu? Y a-t-il uneparole obscure des voix derrière la

parole évidente des chansons? Mêmelorsque Dion chante la plus larmoyantedes ballades, je suis sûre qu'elle jouitde ses propres feux d'artifice.Tellement de chanteuses vivent (trèsbien) de la drôle d'imposture entreune voix libre de ses effets et uneintelligence rompue à une matièredouteuse et rentable. Sensibilitérendue aux clichés «féminins» quideviennent un masque pour la voixsauvage. Par exemple, les vedettesd'opéras doivent un jour ou l'autrehabiller un personnage signifiantdes couleurs de leur voix:malheureusement, trop de livretscondamnent à mort ou humilient lesfigures féminines intéressantes.

H y a des pratiques plus actives et plusconscientes du plaisir de chanter.Plaisir de s'identifier à des contenus ouà des formes bien choisies,compatibles avec la substancepersonnelle de l'interprète ou del'auteure-compositeure. Pauline Julienla chanteuse et la conteuse a «faitparler les poètes» et a voulu elle-même emboîter le pas de la parolecréatrice et solidaire, dès les années70. Ute Lemper fait résonner leschansons du cabaret allemand avecdes accents pointus et puissants, dansun bain de critique sociale etd'émotion presque philosophique. Ellejoue la douceur et l'ironie dans unmême phrasé, d'un même souffle.Plaisir de provoquer, d'enterrer le tropconnu, le trop plein, le trop jugé.Diane Dufresne a provoqué dans ladouceur d'un jouai devenu lyrique:«j'me sens ben-en-en...» LaPéruvienne Yma Sumac a mis enscène les oiseaux et les animaux deson enfance en s'étalant sur quatre

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Voix pleines et rondes notes

octaves au moins, toujours dans despaysages vibratoires différents, de lapoitrine aux pommettes. Provocationculturelle devenue «glamour» dans lesannées 50 aux États-Unis... DiamandaGalas chante le blues dans des tonsgraves qui modulent, un peuhystériques. Elle prend le rôle d'unesorcière douloureuse qui ne sait pluscomment guérir. Mais une sorcièretout de même agissante: elle réalisedes performances au profit desvictimes du sida, où elle tient desdiscours véhéments entre leschansons. Plaisir de partagerintensément la douleur, la colère, ledésespoir et aussi la sympathie. Parfoisle seul plaisir auquel on tient encore.

Femmes et artistes, elles cherchenttous les plaisirs, elles tracent des voiesde re(connaissance) sans toujours lesavoir ou le vouloir. Il paraît que lesmeilleurs plaisirs pour les musiciennesse vivent sur la scène. Comme pourles musiciens, mais avec des enjeuxautrement graves. Le plaisir dessensualités: résonner. Le plaisir dessensibilités: communiquer. Le plaisirdes intelligences: composer. Nosplaisirs peuvent-ils se conjuguer enévitant les pièges qui nousemprisonnent dans le regard desautres? De Madonna à Mitsou. DeMarjo à Jane Siberry. De Ginette Renoà Nanette Workman. De Joni Mitchellà Geneviève Letarte et de Priscilla àWondeur Brass. Où gît notre plaisir?Au milieu des contradictions, oùtrouver le fil conducteur? Tout commevous, j'exerce mon jugement, jenavigue dans ma propre bulle sonoreet je m'ouvre au monde des messages

musicaux avec les outils que je meredonne chaque jour.Alors? Madonna semble pour moi lamusicienne (ou la metteure en scène)d'un contrôle pervers des structures etdes tonalités. Pas de vrai plaisir àsavourer. Sa production me toucherarement mais elle me fascine. J'aitoujours trouvé Mitsou plussympathique, maladroite et malcomprise dans ses chansons-farcesmignonnes comme des pâtisseriesplus épicées qu'elles n'en ont l'air.Mitsou participe-t-elle à l'écriture(cette question n'est pas une blague)?Marjo m'a gavée de son expériencedouce et brute. Ginette Reno m'avaitfait le même effet, j'avais juste quinzeans. Je me suis toujours fait avoir parles voix chargées des belles anecdotessouffrantes et des grosses batailles: lesvoix du blues. Joni Mitchell (uneCanadienne!) a représenté pour moi lapremière femme complète du mondede la chanson: elle luttait et elleaimait, elle parlait et elle planait avecson bel aigu lancinant, elle jouait de laguitare et du piano en même temps:très important pour une petite fille defamille cultivée. Siberry, une de ses«filles spirituelles», mélange avecbeaucoup d'humour la palette savanteet la champêtre: le choix de sesinstruments, de ses harmonies, de sesrythmes de danse et ses histoiresélaborées entre le chanté et le parlé,tout me ravit. Aujourd'hui à trente anspassés, autant de découvertes, autantde plaisirs à refaire pour moi touteseule! Geneviève Letarte ré-inventedes complaintes au nom de bien desfemmes. Je les ressens étrangement: àla fois personnelles et anonymes, juste

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Voix pleines et rondes notes

par l'articulation des syllabes et desrythmes et des Intonations. PriscillaLapointe a touché la première à laguitare électrique des années 60;Wondeur Brass réinventent le «bigband» avec l'irrévérence des femmesfo r t e s p e r d u e s dans lesdéchirantesannées 80. Qui l'eût cru?Voilà en vrac quelques-unes de mesgrandes joies et perplexités sur desmusiques de femmes proches etlointaines. En attendant que vous meconfiiez les vôtres?...

Danielle Tremblay, étudiante audoctorat et membre du ÇA du CFE.

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Reproduction Interdite

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Portrait de femme

Helena Petrovna Blavatsky

II y a une femme qui n'est surtout pasconnue comme une "femme de joie"mais qui trouvera certainement saplace dans un bulletin qui a pourthème "Le plaisir" ou "Le sens de lafête".

En effet, il s'agit d'une personne qui acontribué, par sa vie et son travail depionnière, à ouvrir une voie deconnaissance menant à la liberté et àla joie profondes, pour tous ceux etcelles qui soupçonnent qu'il y a uneautre dimension à ce monde dontl'aspect superficiel, qui est celui quinous apparaît d'abord, ne nous révèleque légèreté, lutte de pouvoir,ambition, violence et folie et danslequel, les femmes, comme groupediscriminé sur la base du genre, loinde connaître le plaisir et la fête, sontencore en butte au mépris, àl'exploitation ou à l'indifférence.

Le plaisir et la fête commencent par lalibération. Helena Petrovna Blavatskynous invite toutes et tous à cettelibération par la voie de la GrandeSagesse Universelle.

Cette grande dame, cofbndatrice de laSociété Théosophique, n'est plusdepuis cent ans! Mais ce qu'elle a faitreste et s'épanouit, apportant laconnaissance qui rend libre tout êtrequi vit, qui aime et qui cherche. Sonmessage révèle une sagesse qui estuniverselle. Depuis sa naissance, dansla nuit du 30 au 31 juillet 1831, enRussie, jusqu'à son décès, le 8 mai1891 en Angleterre, elle a vécu unevie extraordinaire, tellement hors du

commun qu'elle a passé souvent pourune femme insolite, peut-êtredévergondée, car on l'a traitéed'"aventurière"dans le sens péjoratif dumot. La jalousie devant cequ'accomplissait cette femme rendaitplusieurs de ses contemporainsinjustes.

Elle &, en effet, entrepris de nombreuxvoyages dans le monde entier, en Asiecentrale, Inde, Amérique du sud,Éftats-Unis, Canada, Europe, Afrique,Egypte, Grèce, Europe Orientale, Tibet,et encore... dans des conditionspénibles que nous aurions peine àimaginer maintenant. Dans son temps,il n'y avait pas de Club Med!.. Elle aconnu des aventures multiples, desévénements curieux, des personnagesétranges et des réalisationsexceptionnelles. C'était une femmelibérée et libératrice, femmeextraordinaire et insaisissable qui fut laporte-parole et l'artisane d'une grandeet importante mission: la préparationde l'Ere nouvelle.

Après avoir reçu, à l'occasion mêmede ces voyages, une formationésotérique, philosophique, spirituelle,scientifique et humaniste d'inspirationà la fois orientale et occidentale, elle aécrit des livres d'occultismeinternational. Malheureusement, sesécrits, qui consignaient lesenseignements dont elle était lamessagère, furent récupérés par desgens sans scrupules qui n'ont pas citerleur source. La source était unefemme, alors quelle importance!

Lorsqu'elle était à New York, uncolonel américain, Olcott, est devenuson fidèle disciple et l'a beaucoup

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Portrait de femme

aidée par son sens aigu del'organisation. Ensemble ils fondent, en1875, un mouvement philanthropique,la Société Théosophique. À propos decette Société Théosophique, MadameBlavatsky a continuellement mis lesgens en garde de ne pas confondre lecontenu d'enseignement de laThéosophie et la Société Théosophiqueelle-même qui n'en est que le véhiculetrès imparfait. À travers elle, Helena sec o n s a c r e e n t i è r e m e n t àl'accomplissement de sa missionhumanitaire dans le monde. Lamaladie l'ayant terrassée, lors d'unséjour prolongé en Inde pourimplanter la Société, elle revient enEurope où elle poursuit son oeuvrejusqu'à sa mort, survenue à Londres,vers l'âge de soixante ans.

Un axe directeur constant a guidétoute l'existence de cette femmeméprisée et calomniée par la plupartdes philosophes et scientifiques deson temps: servir l'humanité. Cettecontinuité est liée à ses rapportsi n t i m e s avec ses gu idesspirituels.qu'elle présente comme desconsciences humaines qui ont atteintune très grande élévation morale, unegrande connaissance des lois desdomaines spiriuel et psychique et dontles pouvoirs sont le développementde ce qui existe à l'état latent enchacun des êtres humains.

Elle fut l'agente de la transmission aumonde ordinaire d'une partie desconnaissances universelles quijusqu'alors étaient travaillées au seindes écoles de spiritualité. Elle indiquales principes pratiques du sentier à

suivre pour les assimiler: réception dela connaissance, application desprincipes enseignés et service del'humanité. Pour cela, il fautdévelopper la fraternité universelle,encourager l'étude comparée des arts,des sciences, des plhilosohphies etdes religions, étudier les loisinexpliquées de la nature et les lois etpouvoirs latents en l'humain.

Dans un numéro de la revue NouvelleAcropole,* un article lui a été consacréà l'occasion du centenaire de sa mort.C'est là que nous apprenons sesderniers mots: "Gardez l'union" cetteunion universelle qu'elle avaitenseignée et pratiquée sans aucunedistinction ni discrimination. AvecDenis Bricnet, auteur de cet article,saluons cette grande Dame messagèrede la Voie, annonciatrice d'une èrenouvelle, révélatrice de laconnaissance et des moyens pourincarner cette nouvelle et surtoutmeilleure ère dans notre proprehumanité. Elle nous apprend la libertépar le savoir, sagesse universelle,source de joie et fête de l'âme. Toutesles femmes y sont, pour une fois,conviées!

"Madame Blavatsky nous regardeet nous attend, de l'avenir" (DenisBricnet, Nouvelle Acropole, p.29)

Créons la Fête en nous donnant lamain pour cheminer ensemble verscet Avenir!

Lucille Latendresse est professeure à laFaculté d'éducation

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Hé1éna

Pétrovna

BLAVATSKY

Portrait de femme

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Petites et grandes nouvelles

CENTRE DE SANTÉ DES FEMMES

Novembre chaud pour les communautéslesbienne et gaie.

Le mois de novembre s'annonce chaudpour les communautés lesbienne et gaiede Montréal: pas un ni deux, mais troisévénements relatifs à la vie et à la culturehomosexuelles sont à l'agenda du moisde novembre. En effet, du 12 au 15novembre, se tenait le 1er colloquequébécois d'études lesbiennes et gaies,avec pour thème Lesbiennes et gais àMontréal: histoires, cultures et sociétés. Al'occasion de ce colloque, on pouvaitassister à une exposition de photos sur lavie lesbienne et gaie contemporaine àMontréal. Ce dernier événement, intituléFenêtres et Miroirs, s'inscrivait dans lecadre du 350e anniversaire de Montréal.L'exposition a été présentée du 8 au 15novembre. Et finalement, du 12 au 29novembre se déroule la 5e édition dufestival international de cinéma et devidéo de Montréal Images et nation gaieset lesbiennes

Ces trois activités dénotent un mêmeobjectif principal: présenter la culturelesbienne et gaie tout en abordant lesenjeux sociaux, politiques, spirituels etpsycho-sexuels de la vie homosexuelle enles situant dans le contexte plus large dela société tout entière.

Tout en voulant rejoindre, il va s'en dire,les membres des communautés lesbienneset gaies, les trois événements ont étéouverts au grand public et contribuentainsi à la diffusion de la culture -alternative-.Ils ont vraisemblablement fait du mois denovembre, un mois mémorable dans les

annales de la vie culturelle des lesbienneset des gaies.

Le colloque a été organisé conjointementpar l'Université Concordia et l'Universitédu Québec à Montréal; cette dernièreétait le siège et du colloque et del'exposition. Quant au festival inter-national de cinéma et de vidéo, il sedéroule présentement à la fois à Ciné-mathèque québécoise, à l'Institut Goetheet au cinéma de l'ONF et il est organisépar Diffusions gaies et lesbiennes duQuébec.

Carole Tatlock

GIRFUS

Mercredi, 21 octobre a eu lieul'Assemblée générale du GIRFUS (groupeinterfacultaire de rencontre et derecherche des femmes universitaires deSherbrooke), au salon des professeures etdes professeurs de la Faculté des lettres etsciences humaines. Quinze membres,appartenant à quatre facultés différentes,étaient présentes. À cette occasion, nousavons adopté les Statuts et règlements del'Association, car nous sommesincorporées depuis le printemps dernier,et nous avons élu le Conseild'administration, composé de cinqmembres. Malgré le pessimisme dedépart de Micheline Dumont, qui voulaitréduire le nombre à trois, nous prédisantque même trois membres seraientdifficiles à trouver pour prendre laresponsabilité des activités du groupe,cinq volontaires ont été vite trouvées etenrôlées. Micheline et nous toutes enavons été ravies!

Informelles, vol.7, n° 3, p.25

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Petites et grandes nouvelles

calendrier des rencontres de l'année. 11 ya de la place pour des rencontres dedétente et de fête ainsi que pour de larecherche, des représentations politiqueset des débats sur des sujets de la vieuniversitaire féminine. Notre prochainerencontre aura lieu le troisième mercredide novembre, comme à l'habitude.

Le comité ad hoc pour la présentationd'un mémoire sur le renouvellement desstructures universitaires, composé deLouise Bouchard, Micheline Dumont etLucille Latendresse, s'est réuni et apréparé un document court maisd'importance pour une intégration desvaleurs féminines dans une administrationet une institution encore trèsmajoritairement masculine. Pour préparerson mémoire, le comité s'est inspiré dudocument de base élaboré par la FFQ lorsdu colloque "Pour un Québec fémininpluriel" du printemps dernier. Le mémoiresera présenté à la direction de l'Universitéle vendredi 6 novembre, par MichelineDumont.

Saviez-vous que Marie Malavoy termineson mandat de doyenne à la Faculté deslettres et sciences humaine à la fin dedécembre 1992? Que fera-t-elle àl'avenir? Une histoire à suivre...

Saviez-vous que Christine Guillemette aremis sa démission comme membre duc.a. du CFE. Nous la remercions pour sacontribution et son engagement. Unposte de plus à combler lors de laprochaine assemblée générale!

Saviez-vous que Sylvie Bergeron est lanouvelle présidente de l'Association desauteurs des Cantons de l'Est?

Saviez-vous que Huguette O'Neil a publiéun nouveau roman, Belle-Moue, qui lui avalu le prix Gaston Gouin 1992?

Saviez-vous que Louise Bouchard aproduit quelques-unes des illustrations denotre bulletin Informelles. Elle souhaitequ'elles servent exclusivement à cettefin?.

Saviez-vous que pendant deux mois leCentre des femmes a bénéficié desprécieux services des stagiaires Jo-AnneThemens et Joanne Lévesque,responsables de l'organisation duColloque Femme-Média qui fut un grandsuccès comme vous le verrez dans leRapport Annuel...

Saviez-vous que de nombreux postesseront à combler au c.a. lors de laprochaine assemblée générale...

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L'Informelles, vol.7 rf3, p.27