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L’

I SLANDE

A VA N T L E CHRI S T IA N I S ME

n’

arnÈs LE GRAGAS ET L E S SAGAS

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OUVRAGES DU MEME AUTEUR

E tude sur les pamphlets politiques et religious: de M ilton .

ln —8 . D ezobry et Magdelein e , 1848 .

His toire des E ta ts S candinaves (S uède , N orv ège , D an emark) .ln - 12 . Hachette , 1 851 .

Lettres in édites du roi Charles XI I . Texte suédois, traduction

française . ln -8 . 1 852 .

N otices e t E x traits des man uscri ts con cernan t la France

con serv és en D anemark , S uède ét N orvège . ln —8 . 1855 .

Lettres in édi tes de la prin cesse des Ursine, avec in troduction

et n o tes . ln -8 . D idier, 1859 .

H is toire du roi Charles XII de Voltaire . N ouv elle édition av ec

préface , n otes his toriques et philologiques , etc . ln—12 . D‘

elagrav e,1854 .

S verig og Rusland i det 19 . A àrhundrede , traduit de la

Revue des D eux: Mondes , par C . Rosenberg . 1 vol. in -8 . Copen

hague , 1865 .

Gus tave I II et la Cour de Fran ce , av ec un e étude sur les

le ttres apocryphes de Louis XVI et Marie—A n toin ette . 2 v ol.

in -8 . D idier, 1867 .

M ar ie —A n toinette . Correspondance secrète en tre Marie—Therese

et le comte de Mercy—A rgen teau, publiée en collaboration avec

M . d‘

A rn eth , directeur des A rchives de Vien n e. 3 v ol. in -8 .

D idot, 1874 .

Rome et les Barbares . E tudes sur la German ie de Tacite . 1

v ol. in -8 . D idier, 1874.

Recueil des Ins truction s aux ambassadeurs et m in is tres de

Fran ce depuis les traités de Westphalie jusqu a la Ré vo lutionfran çaise , publié sous les auspices du min istère des affaires

étrangères , a v ec in troduction e t n otes . S uède . 1 v ol. in -8.

A lcan , 1886 . D an emark. 1 vol. in -8 . A lcan , 1 895 .

Madame de Main ten on d‘

après sa correspondance authen tique .

Choix de ses le ttres et en tretien s . 2 v ol. in -12 . Hachette , 1887 .

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DES INSTITUTIONS ET DES MOEURS

DU PAGANISME SCANDINAVE

L’

I S L A N I EAVANT LE CHRISTIAN I SME

D’

A PR E S L E G R AGA S E T

L E S S A O—A S

PA R M ‘G E F F R OY

mamans D E L‘

i usrirur

PA R I S

E RN E S T L E ROUX,E D I T E UR

28 , rue Bonaparte , 28

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AVERTISSEMENT DE L’

ÉDITBUR

Cet ouv rage a paru pour la prem i ere fois

en 1864 dan s le s mémoires de l’

A cadém ie

des in scription s et be lles le ttres , tome VI ,

1” série,119

partie . L’

auteur le con sidéra it

comme le commen cemen t d’

une série de

travaux sur le moyen —âge scandinave qu i l

comptait publier successiv emen t .,Appelé

au cours d’

his toire ancienne à l’

Ecole nor

male,. puis à la Sorbonne il dut , non san s

regrets et san s espo irde retour, abandonner

ces études spéciales auxquelles il avaitcru se

dévoue r , mais don t de nouv elles circon stan

ces l’

é loignèren t toujours davan tage . I l put

cependan t développer de quelques un s des

ren se ign emen ts ou des aperçus nouveaux

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_ n __

qu’

elles lui semblaien t pouvoir fourn ir à la

science historique dan s son ouv rage : Rom e

et les Barbares, étude sur la German ie de

Tacite .

On verra (p. 168 ) qu’

il s’

était propos é

d’

étudier dan s un e su ite de mémoires la

pénalité dan s les lois islandaises, la con

dition de la femme,celle de la fam ille . On a

retrouv é , sinon achevé au moin s fort avancé ,

le mémoiresur la pénalité , on le donn e ici

en appendice avec un curieux fragmen t sur

les formules dan s le droit islandais .

S’

aidan t de notes et de quelques publica

tion s de l’

auteur sur le même suj et‘on a pu

faire de nombreuses addition s au mémoire

déjà imprimé .

1 . Revue des D eux—Mondes Les Sagas is landaises . 1 ° l'

no

vembre 1 875 .

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L’

ISLÀNDEAVANTLECHRISTIANISMED

APRES LE GRAGAS ET LES SAGAS

Occupation du sol e t premi er dév eloppemen tde la con stitution

Ce n ’est pas seulement la nature , c’

est'

aussi

l ’histoire qui a fait de l’

Islande une terre digne

d ’étude . Presque entièrement composée de glaciers

et de volcans , elle est comme un champ-clos,pour

la lutte perpétuelle et terrible des deux élémens,l’

eau et le feu. De nouveaux cratères s ’y forment

sans cesse , rèpandant des flots de lave ou des nuées

de cendres que les vents emportent sur toute l’île

,

en Norvège , en Angleterre , quelquefois jusque sur le

continent . Le feu souterrain yengendre des richesses

minérales qui, assez mal exploitées jadis , offrent à

la science et à. l’

industrie de précieux encourage

mens il y entretient une grande quantité de sources

chaudes qui paraissent ne servir auj ourd‘hui qu

à

l'

élonncment du touriste alors que geyser et strokkur,

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bassins ou pui ts d’eau boui llante, lancent dans

les airs, paréruptions tantôt régulières et spontanées,tantôt provoquées ou intermittentes , des colonnes de

30 , de 40 , de 100 mètres retombant en vapeurs ou

en…—pluie. -En même .

temps de vastes plateaux dans

tout le centre de l’

île se couvrent de glaces , qui etei

gnent ce que lesmatières volcaniques engendreraient

de végétation .

La vie se trouve ainsi restreinte aux côtes, soit le

long des fiords nombreux du nord , soit surtout dans

la partie occidentale de l’ île, que baignent et ré

chaufient les eaux du gulf-stream. Aussi la tempe

rature moyenne est-elle , dans la région de Reykj avik,au sud—ouest , de 2° en hiver et de en

été . Ce climat ressemble à celui des Orcades l’

été yest moins chaud et l

’hiver moins froid qu’

en Norvège

et au nord de la Suède ; pour certaines parties de

l ’ île, assure- t-on , j anvier est plus doux qu’ i l ne l

es t

à Milan , mars y est plus froid de 9 degrés, février

est le mois le plus rigoureux de toute l’année . Le

blé ne croit guère, mais la pomme de terre réussit ,et les pâturages , pour un bétail nombreux et de

petite taille, sont excellens . On a beaucoup discuté

la question de savoir si , dans les temps anciens , 1 1le

n’

avait pas connu des espèces de plantes et d’

arbres

d ’

une dimension supérieure a celles qu’

on yrencon

tre aujourd’

hui ; les habitans montrent comme des

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merveilles, en certains‘

l ieux abrités ,‘

des sorbiers de

grandeur ordinaire, cinq ou'

six peut—être pour tout

le pays . Olafsen et Paulsen , deux voyageurs du

mil ieu du xvm °siècle , y ont signalé un arbre de 20

et même un de 40 pieds les anciens livres natio

naux ofïrent des textes embarrassans qui paraissent

mentionner des forêts, tout au moins des arbres

isolés , assez nombreux cependant pour suffire , sans

que cela soit signalé comme extraordinaire par les

chroniqueurs , à la construction de maisons , ou bien

de bateaux capables de naviguer vers les côtes de

Norvège Les lignites ou l its de charbon feuilleté

qu'

on désigne en Islande sous le nom de surtur

brandr offrent des restes de pins , de bouleaux ,d

érables, d‘

ormeaux, d’

aulnes, de vignes et même

de tul ipiers , avec des traces de feui lles aux dimen

sions considérables ; cette végétation a du être très

v igoureuse , et suscitée par un climat plus chaud que

notre climat des environs de Paris mais la formation

de tels dépôts remonte à l‘

époque tertiaire , et l’

île

ne produit plus en quelque abondance depuis des

s iècles qu’

une espèce de bouleau nain qui ne dépasse

guère une hauteur de 75 centimètres ; c’

est de quoi

faire des forêts pour le pays de Li lliput . Heureuse

ment le bois flotté ne manque pas sur les côtes , et

Voyez en particulier la Svarfdæta S aga .

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la tourbe, ainsi que les fumiers d’

animaux , desse

chés, servent de combustible . Du côté de l’ouest

surtout , où les courans d’

eaux chaudes empêchent

les_fiords de se fermer l’hiver par les glaces , la

morue abonde, pendant qu a l'

intérieur lacs et

I‘ÎVIBI

BS contiennent en quantité considérable le

saumon et la truite . Si l’on aj oute , la baleine,le dauphin et le phoque , qui se montrent au large,pui s au dedans de l

’île les animaux domestiques , tel s

qu’

une petite race de chevaux sobres et sûrs , le

mouton , le bœuf, le chien , le renne, enfin le renard

polaire , l’ours maritime ou glacial , l

’aigle pécheur.le faucon de chasse le courlis et le fameux ayder ,on aura signalé , peu s

en faut , tout ce que la

nature a donné a l’

Islande pour y retenir la vie , tout

ce qu‘

elle a offert de compensations à de tmpréelles

rigueurs pour y conserver ou même y attirer les

hommes .

Cette terre étrange a eu dans les s1ecles passés

une étrange histoire , qui n’

a rien de commun il faut

le dire avec la présente condition du pays . Son

isolement géographique loin de la condamner àl’

inaction et de lui mériter l’oubli est devenu pour

elle l’occasion singul ière d’

un rôle historique que la

1 . D‘

lslande venaien t les gerfauts que le roi de D an emark

offrait chaque ann ée , sous Louis XVI , pour la fauconnerie desrois de France.

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5

Science moderne'

ne saurait négliger . Vers la ñu'

du

1x°

siècle , au moment où le vieux pagan i sme oriental des nations scandinaves allait succomber sous

l’

ascendant d’

une religion supérieure et sous les

liens multipl iés du génie classique, l’

Islande a été,pour la civil isation informe mais féconde dont le

reste du Nord était animé, un asile qui est resté

longtemps a peu prés inviolable. Les institutions ,les croyances , les passions et lesmœurs de la grande

race germanique, qui, déj à , s‘

étaient conservées

plus voisines du berceau commun et plus pures de

mélange dans la presqu 1le scandinave, menacées

par le christianisme, se sont réfugiées et retranchées

en Islande , et s’

y sont conservées très—tard à l ’abri

des influences étrangères . Bien plus , une fois trans

plantées sur cette terre vierge, elles s’y sont assises,

régularisées et comme condensées , si bien qu’

on a

pu dire d’

une île, jusqu'

alors déserte et reléguée vers

le pô le, qu‘

elle étai t devenue pour tout un monde

ce que les É tats-Unis d’

Amérique ont été, dans

les temps modernes , pour l’

Europe des derniers

siècles République florissante pendant quatre cents

ans , elle a reproduit la civili sation de la Norvège

1 . E s sind in der That die nordarmerikan ischen Frelatas

ten für une dasselbe , was eine Z eitlang im M ittelalter für die

akandinañschen Valli er I sland (D P il . Leo , E in iges

über das Leben und die Lebensbedingungm in Island in der

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et de tout le Nord , qui lui servait de mère patrie,‘

et

c ’est chez el le qu’on peut étudier le plus facilement

cette civili sation , dont elle a offert comme un fidèle

résumé

En effet , dans la petite mais intime société

qu’

avait formée l’

émigration, les colons islandais

ont contracté les habitudes et acquis les qual i tés qui

font d’

ordinaire et qui ont fait d'

eux en effet de bons

archivistes , des chroniqueurs et même des traduc

teurs scrupuleux . Après avoir longtemps ignoré

l’

usage de l’écriture et s

être servi à peu près exc lu

sivement de la tradition orale , aussi tôt que les

caractères dont se servait le continent leur ont été

connus, c’

est—à—dire au lendemain du christian isme ,ils se sont hâtés d

en faire un fréquent usage ,comme si surpris et charmés , ils eussent été

pressés de j ouir de ce nouvel et ingénieux instru

ment . A partir de la fin du xl° siècle (au moins

n’

avons- nous pas conservé de témoignages plus

anciens ils ont écrit jusque dans le dernier détai l

l ‘histoire des familles notables de la colonie, ils ont

rédigé leurs coutumes et leurs lois , que chacun

savait par cœur, et il s ont de la sorte laissé à

l ’historien , dans leurs sagas et leurs codes , un bon

Z eit des Heiden thumes , mémoire inséré dan s la sixième an née

du Portefeuille his torique (His torisches Taschenbuch) de Fr. v.

Baumer, Leipzig,

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nombre de monuments authentiques qui nous

donnent un tableau presque complet de la nouvel le

société établ ie dans l’

île et par conséquent aussi de

la société antérieure . Restituons à l’

aide de ces

l ivres la civilisation scandinave tel le qu’

elle était

avant la conversion du Nord au christianisme et

nous retrouverons sans doute quelques origines , ou

du moins quelques traits primitifs, de notre propre

civilisation . Ceux- là en conviendront qui se rappel

lent l’

étroite parenté entre les Scandinaves et les

Germains , et ne req ent pas d’

apercevoir, à côté de

la source romaine la source germanique des prin

cipales soc1etés modernes . L’

intéressante et heu

reuse diversité de caractère et d’ intell igence qui

règne en Europe remonte, entr’

autres causes , à la

dualité d’

influence qui s’

est produite au commence

ment du moyen- âge quand les peuples de notre

continent se sont distingués et formés les uns

sous la direction du génie classique, à la double

école de la civilisation romaine ou grecque presque

non interrompue et du christianisme de bonne

heure accepté les autres sous l’

in 5piration de ce

différent gén ie qu’

on appellera comme on voudra,germanique , anglo- saxon , barbare , mais dont i l ne

faut pas contester l’

existence ni l ’action , puisqu’ il a

enfanté des lois , des institutions , disons plus des

idées et des sen timents assez profonds et vivaces

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pour avoir laissé jusqu’

en notre temps des traces

persistantes . S’

il est incontestable que les mêmeidées intel lectuelles , morales, politiques rel igieuses

même, n’ont jamais cessé d

être différemment corn

prises et d’

être comme aperçues sous un autre ah

gle àLondres et à Rome , en France et en Allemagne ,en Hollande et en E spagne , les origines historiques

expliquent en grande partie ces dissemblances , les

nations du midi s’étant conservées plus fidèles aux

traditions classiques , cel les du nord ayant offert en

commun d ’autres traits , qu’on retrouve chez les

Germains dont elles sont issues , toutes d’ailleurs

ayant subi en d’

inégales proportions , par un si long

mélange cutr’

elles, par l’

action du christianisme par

dix autres causes la double influence que nous

venons de signaler . Ge qu’

a été pour la France pour

l’

Angleterre l’

alluvion romaine , de savants travaux

l ’ont suffisamment montré et à vrai dire sans tr0 p de

peine ; il est plus difficile de dis tinguer le reste, c’

est

adire ce qui provient directement de la source

barbare dans certaines régions de la patrie et de

l ’ intell igence française , ou bien dans la civilisation

britannique , si profondément originale . Les livres du

Nord qui nous ont gardé quelques souvenirs de ce

que furent en Scandinavie les t emps anterieurs aux

influences venues du continent doivent nous éclai

rer à cet égard .

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Les ouvrages de l’ancienne l ittérature islandaise

qui nous ont été conservés sont principalement dedeux sortes : il y a surtout des sagas et des lois . Les

sagas sont pour la plupart de simples récits biogra

phiques , des chroniques de famille, rédigés dans

cette langue narrène qui a été jusqu’

au x1v° siècle

la langue commune de tout le Nord et de laquelle

se sont formés les idiomes de la Scandinavie actuelle .

Des lois nous avons plusieurs recueils entr’

autres

celui qu’on a intitulé dès un temps très ancien le

Gra'

gds Il y va de soi que la comparaison entre les

textes législatifs et les narrations historiques est un

moyen de contrôle et une source de lumière . La saga

de Nial , ainsi appelée du nom de son héros princi

pal, la plus complète et la plus intéressante des

sagas islandaises , nous montre la société islandaise

déjà toute fum ée et au moment même où el le va ,après avoir énergiquement résisté , se soumettre,elle aussi , au christianisme.

Nous emprunterons d'

ailleurs çà et là quelques

autres commentaires du Gragas soit aux annal ia

tes islandais , soit aux principales sagas qui, avec

celle de Nial , complètent l’

œuvre historique des

laborieux chroniqueurs du Nord . Ce sera le seul

moyen d’obtenir l

explication de textes douteux et

On prononce en islandais gr0gè s.

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de lois obscures , et cette comparaison nous fournira

en outre les éléments d’

un tableau presque complet

de la c ivilisation de l’

Islande au x1°s1ecle, qui résu

mera à nos yeux la civili sation de la S cand1navœ

tout ent1ere pendant les derniers temps du paga

nisme .

Il doit être entendu que les l ivres dont nous nous

servons , rédigés après l’

introduction du christian is

me , pourront‘

nous offrir des expressions chrétien

nes , mais ces express ions mêmes revêtiront le plus

souvent des descriptions et des idées toutes païen

nes ; elles ne nous tromperont pas .

Les annalistes nous présentent un récit de la

colon isation de l’

Islande et de la prise de posses

sion du sol par les immigrants norvégiens qui est

l ’ introduction naturel le et nécessaire de l’

étude que

nous abordons . C’

est le sujet spécial du plus

ancien livre islandais qui nous soit resté , l’

Islendinya

Bols, qu’on a désigné , au moyen âge , du nom de

Schedæ ou pages , livre écrit en 1 120 par le prêtre

Are Frode ou le Sage Le Landnama Bols, écrit à la

1 . Am Thorqilsis lila , cognomen to Froda , id es t mull ison vel

polyhis toris , in Islandia quondam presbyteri , prim i in septen

trione his torie i, S ckedæ seu libellas de Islandia , Islendenqa

Bol: dielus e veteri islandica , ve l, si mavis , dan ica an tiqua ,

sepæn trion a libus alim commun i lingua , in la tinam versus ac

præter necessarios indices , quorum anus est ten ici ins tar,

brevibus notis et chronoloqia. præmissa quoque auctoris vita,

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fut jeté par les vents sur la côte orientale . Il gravit

une montagne pour chercher. dit le Landnama

Bok,s’

il n’

apercevrait pas de la fumée ou quelque

autre s igne d’

habitation : ce fut en vain,et il quitta

l’

île en la nommant la terre de neige , Suce—land.

Vers le même temps un Suédois , Garder, allant aux

Hébrides pour y réclamer l’

héritagede sa femme, fut

assailli , au sortir du détroit de Petland, par un vio

lent orage , qui le jeta vers l'

ouest en pleine mer.

Arrivé en vue de l’

Islande, il aborda , par le consei l

de sa mère , habile devineresse, sur un point de la

côte orientale où il y avait un bon port ; il fit par

mer le tour de la contrée et se convainquit que c’

ê

tait une île . Parvenu à un golfe de la côte du nord

est, i l y construisitdes habitations grâce auxquel les il

put l1iverner ; et, au printemps suivant, de retour en

Scandinavie , i l vante beaucoup le nouveau pays

qu’ i l avait visité .

Le bruit s etant promptement répandu en Norvè

ge qu’

il y avait vers l’

ouest une grande île fort

souhaitable et déserte , un Norvégien , Floki, fi ls de

Va1gard, résolut de s’

y rendre . Il emporta avec

lui, comme moyen de direction trois corbeaux

qu’ i l avait consacrés aux dieux . Ses deux filles

l’

accompagnaient avec un nombreux équipage .

Après avoir fait voile vers les Shetland , puis vers les

Féroé, ils se confièrent à la pleine mer. Le premier

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des t rois corbeaux, mis en liberté ; s’

envole en

arrière pour regagner la terre qu’on avait qui ttée le

second , quelque temps après plane un peu au

dessus du navire et puis revint s ’y abattre ; plus tard

enfin le troisième s’

envole droit en avant et ne

reparut pas ; en . suivant la direction de son vol,

Floki rencontra la terre . Il aborde sur la côte sud

est de la grande île qu’

il cherchait , et c‘

est lui qui le

nomme Is—land en ile de glace . Cependant il ne s’y

établit pas , et les premiers véritables colons furent

Ingolf et Lait, dont le voyage se place dans l‘

année

874 . (l’

étaient deux exilés norvégiens i ls étaient de

haute naissance et d’

une même famil le ; à la suite

d’

un meurtre exécuté en commun , mêlant leur sang ,ils étaient devenus frères d

armes . A de tels pros

crits l'

Islande offrait un sûr asile . Après un premier

voyage pour reconnaître le pays , i ls revinrent pour

préparer un établissement définitif. Ingolf se chargea

des dispositions à prendre en Norvège , pendant que

Leif irait en Irlande afin de se procurer —des provi

sions et des esclaves . Lorsqu 1l fut de retour, i ls

partirent ensemble avec deuxnavires. Ingolf avait au

soin de consul ter les dieux , que son compagnon

dédaignait ; lorsqu’ i l fut en vue de la terre , il jeta à

la mer les piliers sacrés de son siège . domestique

1 . Les ôndevegis—sulur, Ondvegi est le haut

-siège qu‘

occupe

le me ttre dan s les maison s des anciens S candinaves , codes

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c'

est—à—dire les deux montan ts‘

antérieurs du haut

s iège qu’

occupait , aumilieu de la grande salle, dans

toute demeure i slandaise , le chef de la famille ; cha

cun d ’

eux était surmonté d'

une tête sculptée de Thor

ou d’

0din ; c’

étaient des images sacrées du foyer ,des symboles de la puissance respectée du maître

de la maison . Ingolf avai t fait vœu ,suivant la

coutume de ces hommes de mer, de s’établir là où

les flots et la volonté des dieux porteraient les ondes

gts—sulur ; mais ceux—ci disparurent , et il prit terre

près d’

un promontoire de la côte sud—est, qui porte

auj ourd ’hui son nom . S es esclaves les ayant retrou

vês trois jours après dans une baie de la côte sud

ouest, il elle s’y fixer, et c

est précisément l’

emplace

ment de la ville actuel le de Reykjavik. Quant au

compagnon d‘

Ingolf, qui avait négligé de s’

en

rapporter aux dieux , les v en ts l’avaient jeté sur la

côte méridionale,et i l s

’y étai t établi , mais ses

esclaves irlandais l ’avaient assassiné ; lngolf apprit

en même temps le lieu de son établissement et de

sa mort . 11 partit pour le venger ; en trouvant son

cadavre, il fut saisi de douleur : Mourir de la

main d’

un esclave, dit—il, est un triste sort et indi

primaria , dit S v einbiô rn Egilsson dan s son Lex icon poeti

cum an tiqua lingua septen triona lis , Hatn iæ, 1844-1 860 . S a la

v eut dire colon n e . (Voy . Leo , apud Historisches Taschenbuch ,

p. 452. Ct. Weinhold, A ltnordisches Leben , Berlin , 1856,

in p. 220,

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gne d’

un homme ; mais je vois bien qu’une pareille

destinée est le partage de quiconque dédaigne les

sacrifices

lngolf pas sa trois années de suite dans l 1le , et

c’

est de la sorte lui seul qui ouvrit réellement l’ère

de la colonisation . Are Frode et les auteurs du

L andnama Bok énumèrent ses descendants , racon

tent chacun de leurs voyages et montrent ainsi par

quelle suite d‘

immigrations l’

Islande devint , dans

l’

espace de soixante ans environ , de 874 a934 , une

colonie scandinave et principalement norvégienne .

Si les premiers colons avaientétè despirates oudes

criminels fuyant les lois de leur pays , les troubles

politiques auxquels la péninsule scandinave était en

proie allaient bientôt faire naître une source d‘immi

gration à la fois plus abondante et plus pure . La fin

du 1x° siècle devait, à la suite d

un grand mouvement

intérieur , ouvrir une période nouvelle pour toute

l ’histoire du Nord . On avait vu dès 840 , à l‘

imitation

d’

Egbert, roi deWessex chez les Anglo—Saxons , le

danois Gorm . l‘

Ancien , d‘

abord simple roi de Leire

ou Léthra en S élande , employant tour à tour la force

ouverte et la ruse et s’

aidant aussi d‘

alliances habi

lement préparées , grouper sous se domination les

nombreux petits royaumes indépendants qui l‘

entou

raient . A le suite de ces heureuses conquêtes , pour

suivies jusqu’

e l’

Eyder, extrême limite de la race

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scandinave en présence des Allemands , il avait

réuni le Jutland septentrional et méridional , et en

outre , les grandes îles de Sélande et Fionie, cel les

de Laeland et Falster, et les trois provinces , enjoa r

d’

hui suédoises , de Scenic, Palland et Bleking.

Lamême révolution s‘

était accomplie en Suède ,et lasaga Ynglinga , écrite par Snorre S turleson ,mort en 1243 , la raconte ainsi Ingiald, fils du petit

roi d’

Upsal, et qui fut peut—être contemporain de nos

premiers chefs carlovingiens avai t été vaincu dans

ses jeux d’

enfant par le fils d’

un roi voisin , et il e n

avait conçu un profond ressentiment . Pour l’

aider à

se venger , son père nourricier avait fait rôtir le cœur

d’

un loup , et cette nourriture avai t rendu le jeune

prince fier et cruel . Quand son père mourut , lui lai s

santun royaumedepeu d’

étendueetmalassuré, iln’

en

voulut pas moins célébrer avec beaucoup d’

apparat

la cérémonie habituel le de la bière funèbre . Il fit

construire une magnifique sal le royale garnie de

hauts-mages ou trônes pour les rois qui se parta

geaient avec lui le pays de Suède, et i l les invite

avec leurs iarls . Sept de ces rois s’

y rendirent et i l

leur offrit un grand repas . L ’

usage voulait 2 que,

1 . Ingialdr I llradi est le dern ier des rois d’

Upsal, le dam ier

de la famille des Ynglings . L es his toriens suédois placen t

l'

époque qui finit avec lui dan s le vm ° siècle.

2 . V. Am esen , His torisk Indledn ing til Islands/ce Rœl

torgang, 1762, p. 210 .

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pendant cette fête , où , après avoir célébré le mort ,on saluai t le nouveau chef, celui-ci se tint d

abord

sur un escabeau au pied du trône , jusqu’

à ce que

les invités, qui étaient ses pairs lui présentassent la

corne a boire . Il devait le saisir, faire solennelle

ment un vœu quelconque , vider la corne , et alors

seulement il montait sur le trône de son prede

cesseur et devenait vraiment roi . lngiald reçut

la corne pleine et prononça le vœu d ’augmenter

de moitié son royaume vers les quatre points

cardinaux ou de mourir à cette tâche . D ès le

soir même i l se mit en mesure d’

accomplir ces

paroles , dont nul des assistants n’avait saisi l ’ im

minente menace . Des hommes armés furent apos

tés par lui a la salle du banquet, et la nuit venue ,quand tous les convives eurent bu cepieusement,

selon la coutume , i l ordonne qu’

on mit le feu à

l‘

édifice , de sorte que, par le fer ou par le feu, il s

périren t jusqu’

au dernier . Quant a ceux de ses

rivaux qui ne s etaient pas laissé prendre au piège ,i ls se virent promp tement attaqués par lngiald ; ils

purent résister quelque temps avec l’

aide des rois de

mer, mais finalement sans succès . lngiald réussi t de

cette manière à s’

emparer a peu près de tout le

pouvoir .

On raconte du roi de Norvège Harald Harle

ger, avec d’

autres c irconstances , le même ex

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ploit Harald avait douze ans lorsque -épris de la

beauté de Bague la F1ere , fille d’

un chef norvégien ,i l lui déclare son amour . E lle lui répondit qu’

elle

n’

appartiendrait qu a celui qui soumettrait a sa

domination tous les petits chefs du pays et qu’

elle

ne voulait pas d’

autre époux . Herald fit le vœu de

ne pas couper sa chevelure avant d’

avoir conquis sa

main , et, dès son avènement , i l se mit à l‘

œuvre .

Pendant dix années , par la force ou par la ruse , il

poursuivi t ardemment son but. Il conquit d’abord le

pays de Trondhiem, puis une partie de la côte

occidentale , pui s le Tellemerk e t l’

Hordaland Mais

le péri l renaissai t touj ours devant lui, les vaincus se

faisant pirates et revenant sans cesse attaquer ses

nouveaux domaines . Voulant même tenter un grand

effort , ils se réunirent et lui l ivrèrent un grand

combat naval dans la baie de Hafursfiord, aujour

d’

hul golfe de Stavanger , à l’

extrémité sud-ouest de

la Norvège . C’

est une j ournée célèbre dans les

1 . Voy . le premier chapitre de la saga d‘

Olaf Tryggvason .

E lle es t traduite en danois dans le volume des Oldnordiske

S agaer , Kj ôbenhavn , 1826 , in

2. Minutula N orvagiæ regna e t ille tamen independen tia,

vix u llo n isi forte in terdum m ilitarie fœ deris v inculo in ter se

j un cta , Pylki v ocata sun t . Vox a Folk siv e Flokr derivata

(gen s siv e grex) ; Fylkiskdnqr pæne per regem gen tilem

reddere anadeo . Vehemen ter errant qui tales pro v inciales

reges v ocarun t . (N ote à l‘

édition arnamagnéenne de la

Laxdeala saga , 1826, in p.

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un genre de pr0pr1eté ineliénable et exempt de toute

redevance . Les possesseurs de ces terres indépen

dantes , holder, odalbomz‘

r mean, se trouvèrent

doublement frappés , parce que , indépendamment

du privilège de ne supporter aucun e charge , ils

avaient encore celui de prendre à ferme avant tous

les autres les terres communales . Harald n’

en

épargne aucun . Les uns résistèrent avec courage ,mais beaucoup cédèrent lâchement . Deux frères , qui

étaient chefs dans le Nanmadal, étaient occupés à

achever la construction d’

un tertre destiné a leur

servir de sépulture quand ils apprirent que Harald

s’

avençait contre eux. L ’ainé , qui se nommait

Herlaug, fit apporter une grande provision de vivres

dans l’

intérieur du tombeau ; i l y entre avec douze

de ses serviteurs , et en fit murer derrière lui l ‘ouver

ture . L ’autre , au contraire , ordonna qu’

on préparât

sur la coll ine royale un haut—s1ege et, un peu eu

dessous , des bancs comme ceux où les iarls prenaient

place d’

ordinaire . Il alla s’

asseoir une dermere fois

sur le haut -s1ege qu’

il avait , en sa qualité de chef,occupé jusqu

’alors , puis , se précipitent a terre , i l se

laissa rouler jusqu’

aux bancs des iarls , parmi lesquels

il se rangeait ainsi désormais . Harald le félicite de sa

bonne conduite , et , lui attachant au cou un bouclier,a la ceinture une épée , lui donne , avec le titre d

ierl

du roi de Norvège , la domination sur tout le district

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de son frère et le sien . La plupart des autres chefs ,sans imiter précisément l ’exemple de l ’aîné des

deux frères , préférèrent du moins a l’

asservîssement

l’

exil .

Ainsi triomphe le mouvement de concentration

monarchique survenu dans la péninsule scandinave

vers la fin du 1x° siècle , peu de temps avant l

'

avène

ment da christianisme , qui allait fortifier encore

l’

un ité politiqueen même temps que l'

un ité rel igieuse .

Cemouvement , quisemanifeste , comme nous l'

avons

vu, dans les trois royaumes du Nord , ferma une

période de ténèbres et de barbarie confuse , et ouvrit

celle où chacun d’

eux eut désormais son existence

particul ière et son histoire écrite . Mais surtout i l

détermine l‘

époque de la plus grande expansion des

races scandinaves , et donne ainsi le signal d’

une des

phases lesplus importantes de la civilisation moderne .

Le génie aventureux des hommes du Nord , impatient

de la vie domestique et n ‘

ayant plus les guerres

civ iles , les lança vers l‘

Occident et l‘

Orient dans les

expéditions ou les découvertes les plus inattendues

et les plus lointaines . Tandis qu'

imitan t l’ancien

exemple des Saxons et des A ngles , Danois et

Northmans envahissaient l‘

A ngleterre et la France ,ravagaient nos côtes , pillaient Rouen et Paris et

1 . Je puis attes ter qu i l'

y a peu d'

ann ées des religieuses hre

tonnes , venues à Versailles pour y in staller une maison de leur

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_ 22 _

se répandaient jusque dans la Méditerranée , d’

autres

navigateurs , à la suite d’

Other et Wulfstan , dont le

roi Alfred nous a conservé les récits , partant des

ports situés à l‘

extrémité septentrionale de la penin

sule , s’

en allaient exploiter la mer Blanche et visiter

les bords’

de la Dvina , remontaient ce fleuve , comme

leurs frères d’

Occident avaient remonté le Rhin , la

Seine, la Loire et la Garonne, eflrayeient ces

nouveaux rivages , dépouillaient sur la route le

temple des Biermes et le riche idole de Jumela,s’

ouvraient un passage jusqu’au cours supérieur du

Volga , arrivaient par ce fleuve aux rives de la mer

Caspienne , et rej oignaient là une des grandes voies

de l ’ancien commerce de l’

A sie avec l’

Europe . En

même temps , par la Baltique , dont ils peuplaient les

î les et les côtes , i ls pénétraient dans le lacde Ladoga ,puis dans le vaste con tinent

'

de l’

Europe orientale ,fondaient Novogorod, s

emparaient de Kief, se

mêlaient aux origines de la Russie moderne , et

s’

enhardissaient, après s etre grossis , là comme

partout ail leurs , de nombreuxet hardis compagnons

de tous pays , jusqu’à attaquer la capitalede l

empire

ordre, dans leur prière du soir disaient cette in voœ tion

L ibera nos a moto et a furore n ormannorum . S ingulier reten

tissemen t de la terreur qu‘

in spirèren t ces pirates du Nord, et

en même temps curieux exemple de la perpétuité des tradi

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d'

Orient , dont la faiblesse tremblait à l‘

aspect de ces

ennemis inconnus.

Vers le nord—ouest , nous l‘

avons dé jà vu, de

nouvelles découvertes avaient été réservées à la

hardiesse irréfléchie , mais prédestinée , de ces

barbares Au moment même où ils remplissaient

l’

Europe de terreur , il s avaient , en poursuivant de

ce côté le commerce et la pêche , qu’i ls mêleient

touj ours à leurs pirateries , rencontré l’

Islande, d’

on les verra partir ensui te pour aller découvrir et

peupler l’

Amérique . Nous avons dit qu’

une cause

poli ti que allait s’

ajouter aux causes diverses qui

entraînaient le courant de l’

émigration en Islande ;nous la connaissons a présen t : ce fut dans chacun

des tro is royaumes de la péninsule scandinave , la

volon té de se soustraire à la domination exclusive

d‘

un roi partout vainqueur . La découverte récente

1 . L es N orvégien s avaient colon isé , dès le v in o siècle , l’ llede Man , les Féroé et les Orcades . Les évêques de l

ile de Man

res tèren t placés sous l‘

autorité de l'

archevêque de N idaros j us

qu'

à la fin du xv° siècle. (Voy. la savan te publication du pro

fesseur P. A . Mun ch : Chron ica regum Mann iæ et insularum,

(Zhris tian ia , 1860 , in M . Muncb a vait trouvé , en 1850 , au

Musée britann ique , le manuscrit original de ce tte chron ique

latin e , qu‘

il a commen tée a l‘

aide d‘

autres documen ts re latifs

au même sujet, par lui découv erts en 1860 dans la Bibliothèquedu Va tican . S on commen taire et son in troduction , donnan t

l‘

histo ire des premières colon ies n orvégien oes dan s ces iles ,avec le s in scription s run iques trouvées dan s l

lle de Man ,

sont écrits en anglais (225 pages) .

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offrait un asile aux victimesde la tyrannie d’

lngiald,

de Harald et de Gorm . L'

Islande, qui n’avai t reçu

jusqu’alors que des criminels fuyant les lois , ou ,

tout au plus . des aventuriers cherchant fortune , allait

servir à de plus nobles desseins.Observons la manière

dont se fit le landh am, c’

est—à—dire la prise de

possession du sol , que racontent encore en détai l

Are Frode et les auteurs du Landnama Bok. Ce

seront les premiers traits de la civi l isation que

nous essayons de restituer , et nous pourrons en

faire l’

appl ication plus tard à l’

histoire générale de

tout le Nord .

Exilés volontaires , les chefs qui allaient chercher

en Islande la liberté étaient pour la plupartde nobles

fi ls de iarls et de rois , sinon rois eux-mêmes . Ils ne

mettaient pas à la voile secrètement et comme des

fugitifs , mais au grand j our, après de longues

dispositions , avec femmes et enfants , serviteurs et

esclaves , avec toute leur fortune qu’

ils transportaient

dans leur nouvel le patrie , avec tout un apparei l de

pui ssance qui les rendait redoutables encore . Ce

n’était point le rebus des populations scandinaves ;l’

lslande recevait , aucontraire , en eux lesdépositaires

de tout ce que le Nord connaissait de civil isation .

On en jugera par le récit suivant , qui forme le début

de la Lexdaela saga, rédigée dans sa forme actuelle

a la fin du xi 1‘ siècle . Ketil . au nez plat , riche

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habitent du Raumsdal en Norvège , apprenant les

envahissements d’

Hareld Harfager, et prévoyant

qu’

il ne lui serai t permis ni de venger le meurtre

de ses parents ni d’

échapper lui—même à la servi

tude , réunit ses proches et leur dit : Il s‘

agit

d‘

éviter un grand péri l vous savez la haine

d’

Harald contre nous il ne reste que deuxmoyens

d’

y échapper ou bien partir en exil , ou bien

mourir chacun dans sa demeure . J’

accepterais

volontiers pour moi la même mort qu’ont déj a

subie mes parents , mais je ne veux pas vous

envelopper dans mon malheur , et je sais cependant

que vous ne vous ne voudrez pas m’

abandonner

en un tel péril . Bluru, fi ls de Ketil , répondit :

Mon avis est qu a l’

exemple de plusieurs chefs

illustres nous quittions ce pays ; et je ne pensepas qu

il y ait grand honneur à attendre ic i que

les esclaves d’

Harald viennent nous dépouil ler et

nous donner la mort . Comme presque tous

les assistants applaudiren t à ces paroles , Biorn et

Helgi, son frère , proposèrent qu’

on se transportât

en Is lande ; ils avaient entendu dire de cette île

beaucoup de bien ; la terre y était bonne ; i l n’y

avai t pas besoin d’

acheter le bétail ; la mer y

jetait fréquemment des baleines sur les côtes , et

la pêche y était abondante dans toutes les sai sons

de l‘

année. Ketil dit qu’

il était tr0 p vieux pour

2

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aller a le recherche de ces pêcheries ; il préférai t

les mers occidentales , qu’

i l avait souvent parcou

rues en viking et où il rencontrerait des plages à

lui connues . Ces résolutions prises , Keti l

ordonna un grand festin , maria sa fil le Thorunn a

Helgi le Maigre , et fit ensuite ses préparatifs de

départ Unnr, sa seconde fille , et plusieurs de ses

proches l’

accompagnêrent , tandis que ses fil s

partaient pour l’

Islande .

A peine débarqué sur la plage qui lui a été dési

gnée , comme nous l'

avons vu plus haut , par un

signe des dieux, le nouvel arrivant prend possession

du sol , soit en allumant à l’

embouchure d’

un fleuve

un grand feu dont les rayons , aussi loin qu’ ils se

répanden t , lui en soumettent les rives soit en cir

conscrivant par des bûchers placés à égale distance

en vue les uns des autres tout le territoire qu’on

peut de la sorte entourer en un j our soit en faisant

le tour du nouveau domaine une torche allumée à la

main et dans un sens opposé au cours apparent du

solei l , c’

est—à-dire de l’

ouest à l’

est ; soit en lan

cent à travers le pays une flèche enflammée soit en

marquant son passage par des signes sur les arbres

ou sur les rochers , signes que la lo i reconnaît et

protège soit enfin par quelque autre de ces sym

boles dont les peuples primitifs sont habiles à faire

un langage figuré . Le Landnama Bok en offre un

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fois les limites tracées , on construi t l‘

habitation du

chef, avec la grande sal le oblongue , munie de deux

bancs parallèles aux deux parois principales ; au

millieu d’

un de ces bancs est le haut-siège , auquel

on adapte les piliers sacrés apportés de la mère pa

trie , et qui ont déjà servi à déterminer, en nom des

dieux , où l’

on a dû aborder et fixer le premier éte

blissement . Le plus pressé est ensuite la construe

tion d’

un temple ou hof. Beaucoup de chefs qui, en

Norvège , étaient hofgodar , c’

est-à—dire prêtres ou

présidents d'

un temple , ont apporté des fragments

ou même toute la charpente de leur ancien senc

tnaire, et surtout quelques poignées de terre em

pruntées au sol qui supportait en Norvège l‘

autel où

étaient les statues de leurs dieux ces fragments ou

cette terre suffisent pour que le nouveau temple soit,sous un nouveau ciel , également respectable et sacré .

Le temple i slandais consiste lui-même en un grand

édifice dont l’

enceinte forme un asile , et au milieu

duquel on voit , sur un tertre , un autel supportant

d ’abord la flemme qui ne doit jamais 3 eteindre,puis

un anneau d'

or ou d’

argent sur lequel chacun prête

serment et que le chef porte à la main pendant toute

les réunions , enfin la chandmre destinée à recevoir

le sang des victimes , et l’instrument avec lequel on

asperge de ce sang les murs et l’

assemblée Tout

1 . Voy. la saga d'

Hakon Adalsteins fos tri , dans l‘

Heimskfi n

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autour de l’

autel sont les images des dieux. On voit

dans les environs la pierre aiguë sur laquelle on

brise les reins des victimes humaines , un lac , une

riviè re ou une chute d‘

eau, où l’

on précipite ceux

qui sont voués aux dieux . Tout Islandais doit acqui t

ter nu impôt pour le temple et s’

y rendre suivant les

ordres de celui qui y préside. Celui-ci doit , en retour,entretenir l

édifice et subvenir aux repas qui aecom

pagnent les fêtes religieuses . Troisièmement enfin , on

s ’empresse de consacrer , dans le voisinage du tem

ple , un certain emplacement pour les séances du

tribunal ou thing où se jugeront tous les différends

et tous les méfai ts , et où se décideront , en présence

de tous , les questions intéressant la nouvelle colonie .

Le thing est touj ours établi sur quelque haut lieu,parce que les hauts lieux passent pour être habités

par les génies envoyés des dieux et pour inspirer à

ceux qui y méditent les résolutions les plus sages . Si

l’

on ne rencontre pas une hauteur que son escarpe

ment naturel protège suffisamment, on entoure le

thi ng d’

un fossé ou d’

une haie on de quelque autre

obstacle qui le metten t à l’

abri des agressions . Aussi

voit—ou les things appelés quelque fois rèttr , mot qui

gta de Sn orre S turleson , c. vra de la saga, p. 136 de la traduc

tion danoise de M . Grudtvig, 1 818 , in (Voyez, sur les sacri

fices de chev aux et de men u bétail, l‘

Eyrbyggia saga , c. xv1u.

p.

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désigne primitivemen t , dans le Grügäs et les sagas,les parcs où l

on renferme , à l ’automne , plus près

des habitations , le menu bétail qu’on a laissé

, pen

dant l’

été , dans la montagne . Afrètt signifie , dans le

Greges , un pâturage . Les things sont donc par excel

lence des lieux soigneusemen t fermés , comme ces

pâturages ou ces parcs

Le chef de la colonie préside au tribunal , comme

à l 'administration du temple et du cul te , et i l est de

la sorte à la fois chef politique et civil , prêtre et

magistrat . Le titre norvégien de godi , qu’ i l conserve ,

désigne également ces trois sortes de puissance . Le

nom de god—ord s‘

applique à la circonscrip tion sur

laquel le domine un tel chef et asa dignité . Primiti

vement son autorité est grande . Aux temps les plus

anciens du paganisme , lui seul égorge les victimes ,prend sur l

autel l’

anneau d‘

argent , le trempe dans le

sang et en arrose l’

assemblée ; lui seul d’

abord rend

1 . Voy. A rn esen , Historisk Indledn ing til den gamle og nye

Is lands/ce Ræt terganq . (In troduction his torique à la procédure

an cien n e et modern e de l'

Islande) av ec les n otes de John E rich

sen et une préface de Kofod A n cher, Copenhague , 1 762 , id

p. 331 , n ote . A Rome les en cein tes en bois con struites au

Champ de Mars pour les com ices par cen turies s‘

appelaien t

septa on ov ilia , parcs de bergerie . » (l’

étaien t les n ep i e9oiy p a r u

de l'

A ttique . Les planches furen t remplacées , au temps d’

A u

guste , par de superbes portiques en marbre porten t encore

le même nom S epta marmorea . (Voy . A ug. Pan ly, Real

E ncyclopædie, Vl Band, erste Abtheilung, s . v . S epta) .

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la justice dans son thing à tous ceux de son diStrit:t

et les commande dans les expéditions gnerr1eres.

Protecteur et gardien de la communauté , il en exerce

toute la police intérieure, et tire de l’

exercice de ces

devoirs certains revenus . Un navire étranger aborde

t-i l sur son rivage , i l arrive a cheval avec quelques

agents par lui désignés , autorise le débarquement,perçoit l

impôt , fixe le prix des marchandises à im

porter , achète avant tous les autres , et accorde à

certaines familles le droit d’

acheter et de choisir

immédiatement après lui. Il offre l’

h0 5pitalité aux

étrangers , qui la lui payent d’

ordinaire . A lui le

droi t d’

aubaine et les amendes , et main tes préroga

tives , sônrces de grands profits . D’

ailleurs le godard

est inamovible , sauf après certains délits ; i l est

hérédi taire et peut passer à une femme on à un

enfant , au nom de qui un tuteur l’

administre on

peut aussi l‘

acheter .

L'autorité des godar islandais , qui reproduit celle

des chefs de famille et des petits rois de la Norvège ,est , comme on voit , fort étendue . Toutefois elle se

trouve corrigée et limitée par la liberté des citoyens .

S’

i l est vrai que tout Islandais soit rigoureusement

tenu de s’

inscrire dans le district d’

un des godar

voisins de son habitation , du moins il lui est per

mis de choisir entre ses voisins dans un cercle assez

é tendu, qui deviendra bientôt une circonscription

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légale comprenant trois godard simême i l se trouve

mal de son premier choix , i l a le droit de s'

offrir au

second ou au trois1eme de ces magistrats , à condi

tion de présenter et de faire accepter , pour ce chan

gement de résidence légale , des raisons valables ; i l

peut , enfin , s’

il compte pour rien les difficultés du

climat et de la distance , réclamer justice à tel tribu

nal on thing qu’il préfère . Il arrive de la sorte que

celui des godar qui protège mal ou qui opprime ses

adminis trés voit son godard dépérir entre ses mains .

L’ indépendance personnel le , dont le sentiment est

si fort inné dans le cœur des anciens Scandinaves ,tempère ainsi et contient le système oligarchique ,

qui se montre partout dans leur histoire primitive .

Ce système s’ouvrira , d

'

ai lleurs , promptement pour

laisser une place respectée à l‘

idée de la loi , de la

loi protectrice de tous et de chacun en particul ier,de la loi , dont chaque ci toyen , dans le soc1eté scan

dinave , se croire , si les circonstances le demandent ,l'

organe et l’

instrument , et dont une idée exagérée

de l'

Etat ne viendra pas usurper la puissance ni gêner

l ’action . Nous verrons les godar , bien différents en

cela des seigneurs féodaux , surveiller l’

administra

tion de la justice plutôt que la rendre eux—mêmes ,et s

acquitter ainsi d'

une fonction plutôt qu’

exercer

un privilège. Tandis que la féodal ité confondre le

droit public et le droit privé, i ls seront nettement

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distin gués ici , sans danger qu’

une centralisation

extrême détruise entre eux l‘

équilibre .

A mesure que l’

î le se peuple de nouveaux colons ,la constitution primi tive se trouva insuffisante, et

cette insuffisance engendra quelques désordres . Le

temps et la nécessité amenèrent une certaine centra

lisation , qui dut avoir pour résultat surtout de

remédier à l'

isolement et a la dispersion des chefs .

Un demi-siècle après le commencement de la colo

nisetion , la législation d’

Ulfliot se fonde sur la base

d'

un pouvoir public , unique et général .

Norvégien de naissance , Ulfliot était depuis long

temps établi en Islande , et cette île était devenue sa

patrie d’

adoption . Témoin de la confusion qui

régnait dans la république , il conçut le projet de

réunir les différents chefs par un lieu commun , de

les soumettre à une seule loi , à une seule juridiction

qui les dominerait tous, même les plus puissants .

Avant de mettre à. exécution son projet, il crut

nécessaire de faire un voyage vers son beau—frère le

N orvégien Thorleif le sage , lôgmadr ou légiste fort

renommé il voulait , comme j adis Lycurgue visitan t

la Crète , se retremper à la source première des

institutions qu’

il aspirait à. réformer . Sexagénaire ,il traverse de nouveau l

Océan et resta auprès de

Thorleif pendant trois années ; de retour en 928 i l

engegea les Islandais a adopter la législation qu ils

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avaient tous deux méditée et qui semodelait de plus

près encore sur les lois norvégiennes .

De cette législation d’

Ulfliot les auteurs du Lan

dnama Bok nous ont conservé quelques fragments ,

qui n’

en donnent probablement pas, il est vrai , les

dispositions les plus importantes , mais dont le carac

tère tout religieux , confirme bien l‘

antiquité

Le commencement de ces lois païennes était,disent—ils , au chapitre vu de la IV“ part ie , qu

’on

ne devait employer sur mer aucune embarcation

ayant à la proue une tête d’

animal ; ou bien l’

on

devait , avant d’

être en vue d’

un rivage , enlever

cette tête , de sorte qu’

i l n’

y eût ni visage hideux

ni gueule béante qui pût eflrayer etmettre en fui te

les génies tutélaires de la contrée .

L’anneau sacré , pesant deux onces au moins ,devait être placé sur l

autel du temple principal .

Le godi on prêtre devait le ten ir à la main pendant

les cérémonies , après l’

avoir trempé dans , le sang

du taureau sacrifié .

Quiconque avait à plaider une affaire devant le

thing ou tribunal devait commencer par prêter

serment sur cet anneau par— devant deux ou plu

s ieurs témoins Je vous prends comme témoins ,devait—il dire , que , sur l ’anneau sacré , je prête

serment, serment conforme à la loi . Que Freyr

m'

assiste, et N iôrd et le dieu A se tout—puissant ,

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présidée par un magistrat élu , qui devenait le chef

suprême de la république . Dès qu’

Ulfliot fut de

retour , dit le Landnama Bok, l’

A lthing fut consti

tué et des lois communes régirent ce pays .

Nous étudierons dans le second chapitre l’

organi

sation de l’

A lthing, qui est resté le principal organe

des institutions politiques et judiciaires de l’

Islande

achevons ici l ’histoire de l’

entier développement de

cette ancienne constitution . L’œuvre n’

était pas

complète l ’édifice érigé par Ulfliot avait désormais

un faite , mais il y manquait des degrés . Are Frode

nous apprend qu'il y eut, peu de temps après la

réforme d’

Ulfliot, un grand procès entre deux

puissants Islandais , Thord Gellir et Tungu Oddr.

Par suite de la nouvel le organisation , ce procès

coûte aux parties et à leur clientèle d’

innombra

bles voyages à l’

A llhing, d 1ncroyables dépenses ,un trouble inouï, des rencontres fâcheuses , des

querel les privées , des désastres et des meurtres .

Aussi Thord Gellir, pendant une des sessions de

l ’assemblée générale , dit- i l publiquement combien ,en beaucoup de cas , . i l était fâcheux d

avoir à se

rendre vers des tribunaux éloignés et inconnus , et

que de peine i l avait en , pour sa part , à établir sa

poursuite . S a réclamation paraissant fondée , on

div ise l’

île en quatrefiordungar ou quartiers , chacun

d'

eux se subdivisant en trois things , excepté celui du

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Nord , qui en eut quatre . Ces things locaux devaient

tenir leurs assises régul1eres au printemps , et pre

nalent de la le nom de varthings ou things du prin

temps ; chacnn d’

eux se subdivisait en trois des eu

ciennes circonscriptions nommées godard troi s

chefs de ces godard composaient, comme juges , le

thing du printemps .

Cette répartition , qui eut l ieu en 964 , efface natu

rellement et absorbe les things primitifs , établis

arbitrairement, suivant la puissance ou le gré des

chefs de l’

émigration primitive , et ainsi se trouva

fixée , sauf quelques modifications ultérieures , la

constitution que l‘

Islande devai t conserver pendant

toute la période de son indépendance . Pour étudier

cette constitution en elle-même , ayons recours au

Grâgâ s , qui en montre à la foisl ’esprit et les ressorts .

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Ins titution s poli tiques.

comme assemblée légtsh fl v e e t politique .

On désigne sous le nom de Gra'

q le livre qui

nous a conservé , réunies et commentées , les diffé

rentes lois que l’

lslande s’

est données depui s l‘

époque

de la colonisation jusqu’

à la fin du :un! siècle . Nous

avon s conduit , dans le chapitre précédent , l’histoire

de la constitution islandaise jusqu’

à lafin du 11 ° siècle ,où elle atteignit son entier achèvement . Jusqu

alors

les loi s avaient été conservées par la seule tradition

orale , à peu près exclusivement . Quant vint le chris

tianisme , vers l’

an 1000 , l’

Islande connut l’écri ture,

ou, du moins , des caractères d‘

un usage plus facile

que n’étaient les roues . Peut—être ne s

en servit—elle

pas fréquemment dès le x1° siècle pour la rédaction

de formules qui étaient encore familièrement fixées

dans toutes les mémoires ; mais , en 1 11 7 , les eu

ciennes lo is de la république étant devenues décidé

ment trop nombreuses et trop compl iquées pour être

retenues , comme autrefois , par le seul souvenir,plusieurs d

entre elles ne convenant plus d’

ailleurs

aux récents progrès de la civilisation dans l’

île, le

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magistrat suprême ou président de l’

A ltbing, Berg

thor fils de Rafn,proposa une rédaction définitive et

complète de cel les qui resteraient en vigueur . La

proposition fut adoptée , et l’

œuvre confiée aussitôt à

Bergthor lui-même, à son frère Haflidi Masson , et a

quelques autres citoyens choisis pour ce dessein .

Nous apprenons par le témoignage contemporain

d’

Arc Frode qn’

Haflidi, le plus riche des Islandais ,

prête sa maison et fit les frais rendus nécessaires

par ce grand travail . Les délégués revisèrent toutes

les lois encore en usage, retranchant et ajoutent,suivant qu

il leur semblait utile . Leur travail prépa

ratoire fut soumis a l’

A lthmg pendant l’été suivant ,

et le suffrage de cette assemblée décida, à lamaj orité

des voix lesquelles de ces lois ainsi modifiées feraient

partie du nouveau code . Lu à l‘

assemblée générale

de l’

année 1 1 1 8 , le code ainsi revisé fut unanimement

adopté ; plusieurs c0pies en furent faites , et l’

exem

plaire dressé par les soins d’

Haflidi lui-même dut

être conservé chez le magistrat suprême pour servir

de modèle authentique

Toutefois cette prem1ere rédaction des lois islan

daises ne fut pas définitive . Quatre ans après la

rédaction des lo is civiles et criminelles , c’

est—à-dire

en 1 123 , on y ajoute un code ecclésiastique ou Kris

tinna loge pattr dont l’auteur ou l

un des auteurs fut

peut- être Saemuud Frode, rédacteur présumé de

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l ’ancienne Edda , et disciple de l’

Université de Pari s .

Sept ans après , en 1130 , d’ importantes modifications

furent apportées aux lois civiles . I l y eut encore

d ’autres sources d’

additions et de corrections fré

quentes . Une des principales fut l’ introduction de

nouveaux édits dans le corps général des lois en vi

gueur . Le magistrat suprême de la république , qui

n ’é tai t autre que le présidentde l’

assemblée générale ,élu par el le pour trois ans , avait le droit et le devoir

de promulguer , à son entrée en charge , non pas

précisément , comme le prêteur à Rome , un édit ,mais une sorte de commentaire , qui, sans se substi

tuer eu code , devait le compléter , et qui était valable

tan t que ce magistrat restait en fonctions . Le succes

saur adoptait souvent les commentaires d‘

un de ses

prédécesseurs qui finissait par gagner , en tout ou

partie , force de loi . De plus , l’élection pouvant être

renouvelée en faveur d’

unemême personne certains

magistrats conservaient le pouvoir pendant toute

leur vie , et l‘

on conçoit qu’

à l’

aide de leur longue

et durable autorité quelques unes de leurs maximes

aient pu rester inscrites parmi les lois définitives .

Autres causes de changements et d’

additions : la

chose jugée , surtout dans les cas difficiles , faisai t

règle , non pas seulement pour les parties dans le

présen t , mais aussi pour les générations suivantes ;les précédents , retenus d

abord et invoqués par la

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mémoire des plaideurs et des juristes , entrèrent

facilement dans le corps du droit civil dès qu’on sut

communément employer l’

écriture ; s’

il arrivait qu’

en

présence d’

un cas douteux ou de complications im

prévues la loi interrogée gardât le silence , le magis

trat suprême , sur la demande de l’

une oude l’autre

partie, devait convoquer les magistrats inférieurs ; ce

tribunal improvisé jugeait , à la majorité des voix, le

cas qui lui était soumis, et la décision devenait lo i

pour l’

aven ir . Enfin lemagistrat devait lire publique

ment , chaque année , une partie du code à ses admi

nistrés ; à cette lecture i l était tenu d’ajouter des

éclaircissements sur les passages difficiles ou obs

curs ; il devait répondre aux citoyens qui venaient,en dehors des sessions régulières, le consulter chez

lui ; et l’

on comprend que ces explications et ces

réponses n’

aient pas manqué quelquefois de se glis

ser parmi le reste des lois .

Nous ne possédons plus le code islandais tel qu’

il

a été rédigé une première fois en 1 1 18 . Lemanuscrit

d’

Haflidi et ses 0 0 pies fidèles on t été perdus . Il ne

nous est resté qu’

un singulier recuei l datant du x…“

swele, où se rencontrent , avec les principales dispo

sitions du code de 1 1 18 , rangées dans un ordre

probablement nouveau,lesmodifications et additions

successives et les commentaires dont nous venons

d’

énumérer les occasions diverses . Ce recueil est ce

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prédécesseurs et ses commentaires'

personnels . Ce

n’

est plus'

un code, c’

est un compendinm raisonné

que nous avons sous les yeux , ou même seulement

un cahier de notes entremêlées de textes .

Quant a la dénomination de Grâgés, qui désigne

exclusivement ce recueil auj ourd’hui , et qui s

’étend

à l ’ancien code que seul il représente, elle est toute

moderne . Inconnue dans les documents du moyen

âge , el le ne commence à paraî tre que dans les l ivres

du X…! s1eele . On la trouve pour la première fois ,suivant le témoignage du savant M . W erlaufl , dans

les ouvrages inédits de e n de Skardsa, mort en

1665 . Dans son Lexique run ique , publ1e en 1650,

Olaüs Wormius désigne plusieurs fois du nom de

Gragas le code le plus ancien de l’

Islande . Mais on

chercherait en vain la même dénomination dans le

l ivre d’

Arngrim Jonsson sur l'

histoire de l’

Islande

publié à Hambourg son s le titre de Crymoqœa , en

1609. Bien que l‘

auteur y cite précisément lesmêmes

titres de paragraphes et de chapitres que nous retrou

vons dans nos deux manuscri ts , et d‘

après ces

manuscrits sans aucun doute , cependant il ne connaî t

d ’

en tres expressions pour désigner le vieux code lui

même , dont il donne de nombreuses citations , que

celles de code primitif, d’

ancienne loi, etc. Ce n’

est

pas à dire, d'ailleurs , que ces érudits , Biôrn de

Skardsa et Oleüs Wormius, qui ont employé les

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premiers, en mil ieu du xvu‘sœcle , lemot deGrâgâs ,

aient été les inventeurs de cette dénomination . Il est

beaucoup plus probable que le peuple i slandais

l 'avait appliquée avant eux, afin de distinguer le

recuei l contenant les anciennes loi sdes codes imposés

ultérieuremen t par les rois de Norvège , comme le

Jarnsida et le Jens Bok. les col lectionneurs , les

copistes et les savants n’

auront fait ensui tequ’

adopter

et enregistrer un usage établ i . Le mot de Gragas n’a

lui—même d’

entre sens que celui d’

un âge très—avancé

il signifie oie grise ; c’

était une croyance populaire

en Islande que les oies grises sauvages parvenaient

d 'ordinaire à une extrême vieil lesse , et les paysans

islandais se servent encore auj ourd’

hui de cette

expression en parlant d’

une personne qui a viei lli .

Le mot signifiait donc , chez ce peuple habitué au

style figuré , le plus ancien des codes , la plus ancienne

des l ois , et i l désignait avec le même sens le recueil

manuscrit où cette loi étai t contenue . Nous devons

ajouter cependant qu’on propose quelquefois une

autre étymologie . Le mot gds paraît avoir désigné

le parchemin , et, par sui te , un manuscrit sur

parchemin ou même un volume relié en parchemin

gra'

gds signifierait donc la même chose que gras

kinna,manuscrit de parchemin ou relié en parche

min gris

1. Un e troisième explication a* été proposée ; une espèce d‘oie3.

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Nouspossédons deuxéditions impriméesduGü gäs ,chacune reprodui sant un des deux manuscri ts primi

tifs,avec les additions et les variantes de l

autre ‘. La

plus connue de ces deux éditions est celle qui a été

donnée par les soins de la commission ername

gnéenne , en 1829, avec une traduction latine , et qui

se compose de deux volumes ih -quarto . La traduc

tion , la disposition des diverses parties , les notes ,les tables et les deux index , celui des choses et celui ,fort précieux, desmots , y sont l

œuvre d’

un Islandais ,M . Thord S veinbiornsson . L’ introduction seule est

de J . F . G . Schlegel ‘

Pour ce qui est du contenu etdes principales divi

sions dn Grâgàs , i l est facile de s’

en rendre compte.

si l’

on ne se préoccupe pas des différences entre les

d‘

Islande ayan t la peau très épaisse , on peut en faire une

reliure . Plusieurs livres du Nord ancien son t ain si nommésd

après leur reliure le N orkina Kinn a le Rokin s Kinn a. V.

A rn esen . In troduction au D roit islanda is , note de la préface.

1 . Un e autre édition , avec traduction dan oise , a été en treprise

par la société littéraire du Nord, N ordù ke Litæ a tur -Samfunda C0 pen hagn e , e t con fiée aux soin s de M . V . Fin sen . La

prem ière partie a paru en 1 850 , la quatrième partie en 1856 ;

l’

ouvrage n'

es t pas term in é .

2 . Jean -Frédéric-Guillaume Sch legel, n é le 4 octobre 1766 à.

Copenhague , mort le 19 juillet 1836, fut un des juristes érudits

les plus distingués du D an emark . Comme son père il fut

longtemps professeur à l’

Un iv ersité de Copenhague et élevé à

plusieurs hauts emplois . On trouvera la lis te‘

de ses nombren

ses publication s dan s le dictionnaire d’

E rslew ,A lmindelig For

[atter Lexicon , tome 111, pag. 58 sq .

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deux manuscrits , peu importantes après tout .'

Ou

rencontre d’abord dans ces deux manuscrits le code

ecclésiastique . Kris tinna tage Pattr , de 1 123 , et qui

était la partie la plus importante aux yeux des 0 0 pis

tes du x1n° siècle . M . S veinbiornsson avait cru devoir

l’

omettre dans l’édition arnamagnéenne, et cette

omiss ion était d'

autant plus regrettable , que la seule

édition qu’

on en eût, celle de Cl . Thorkelin , était

fréquemment fautive . M . Finsen a inséré et tradui t

en tête de son travail ce code ecclésiastique , qui

n’

est pas d’

une médiocre importance pour faire com

prendre la loi judiciaire et civile , placée immédiate

ment après . ou même les lois rel igieuses du paga

n isme , auxquelles il fai t de perpétuel les allusions .

Le reste du recuei l , tel qu’

il se présente dans l ’édition

arnamagnéenne, se divise en dix sections , dont

chacune se subdivise en titres . Les tro is premières

sections trai tent de l’

organisation judiciaire, c‘

est—à

dire des droits et des devoirs du premier magistrat ,de la constitution des tribunaux suprêmes , et de la

procédure . Les quatrième, cinquième et sixième

sections traitant du droit civil , c’

est—à-dire des héri

tages , de la condition des pauvres , des proscrits , des

affranchis , et de la condition des femmes . La septiè

me section a pour titre ces mots , Kaupa-Baihr , que

M . S veinbiornsson traduit par De commerciis . Il faut

l’

entendre sans doute de toutes les sortes de négo

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ciations et de contrats qui peuvent survenir entreles particuliers : C ’

est , dit M . Pardessus , comme

quand le droit romain dit , res in tra commercium,

« r es extra commercium, ou bien comme l’

entend

l‘

article 1 128 du code civil françai s : Il n ’y a que

les choses qui sont dans le commerce qui puissent

être l’

objet des conventions . La huitième section

est une sorte de code criminel ; la neuvième contient

les dispositions relatives à la propr1eté fonc1ere, et

la dixième enfin est un petit code maritime .

Ce n’

est pas à dire que l’

ordre général soit

rigoureux , ni que chaque division contienne exacte

ment cc que son titre annonce . Soit par le peu

d’

expérience des rédacteurs , soit par l ’effet des

additions successives que nous avons signalées , soit

enfin parce que cette législation reproduit naturelle

ment la complexité un peu confuse de la société

dont elle est l‘

image , d’

une part les catégories ne

sont pas nettemen t tranchées , et de l‘

autre les

matières , dans chaque division , paraissent souvent

confondues . Toutefois un effort excessif n ’

est pas

nécessaire pour coordonner clairement les loi s

éparses et reconstruire en son en tier tout l’

édifice .

Les codes d’

un peuple qui commence à s’

ouvrir à

la civilisation,surtout si ce peuple est bien doué et

destiné à un grand rôle , contiennent l’

expression

attachante de toute sa vie morale, car il y inscrit

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tons ses instincts et fontes ses passions . C’

est l’hon

neur de l’

human ité de sentir de bonne heure la

nécessité et la majesté de la loi , et si profondément ,

que les sociétés naissan tes identifient , dans cette

seule vue et pour ce seul intérêt , l'ordre politique ,

l‘

ordre civil , l'

ordre moral et l’

ordre rel igieux ; elles

sont d'

autant plus portées à invoquer cette tutel le ,qu

'

el les sont plus na1ves leur chef militaire est en

même temps leur prêtre et leur juge, et , placée dans

ces conditions , la loi , qu’

elle soit transmise unique

ment par la tradition on bien qu’

elle soit écrite ,envahit bien au delà de son domaine naturel .

L e Orages contient par—dessus tout un code

jud iciaire et pénal . Mais les institutions judiciaires

touche de très près aux législatives , ainsi qu’

à toute

l ‘organisation politique, chez un peuple à peine

civ ilisé et dans un état social où la séparation des

pouvoirs n’

est pas encore exactement tranchée . L’

ad

ministration de la justice est ici une des fonctions

de la même assemblée qui fait et corrige les lois , et

qui est dépositaire de toute la pui ssance publique .

En même temps donc que le Grâgés nous éclairera

sur la procédure et la pénal ité islandaises , il nous

apprendre comment s etaient constitués le pouvoir

légis latif et le pouvoir politique dans un E tat qui

était appelé , nous l’avons dit , à reproduire toute la

civilisation du Nord scandinave. Les premiers cha

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pitres , qui traitent de l’

organisation de l’A lthing,nous fourniront à eux seuls les principaux traits de

ce tableau .

Mais , avan t d etudier le texte du Grâgäs, il faut

décrire les l ieux qui ont servi de théâtre aux institu

tions qu’ il dépeint .

Le frère même d’

Ulfliot , Grim a la barbe de

chèvre ‘

, avait reçu une somme , fournie en commun

par tous les notables Islandais , pour visiter l’

île et

rechercher l’

emplacement qui conviendrait le mieux

à la future assemblée générale . Celui qu’ il désigne

correspondit singul ièrement , par son étrange ma

jesté, à la sévérité du gén ie scandinave et ala dignité

du rôle auquel il fut réservé .

Non‘

loin et un peu à l’

est de Reykjavik ‘

, on

remarque , sur la carte d’

Islande , un lac de 60 à 70

kilomètres de tour . Une plaine s s tand au nord du

lac c’

est la plaine de Thingvella , formée tout

ent1are de matières volcaniques . Jadis , sans doute ,dans une des plus formidables convulsions de l

1s

lande , une immense nappe de lave est descendue du

centre de 1 11e cette nappe a rencontré le lac et ses

rives ; du lac elle a comblé la partie septentrionale ;puis , en se refroidissant , el le s

est afiaissée dans

1 . Geitskô‘

r , à la barbe , à la chevelure de chè vre ; on bien ,

en lisan t Gaia/«Sr , au soulier, au pied de chèv re .

2 . A un e distance de 6 ou 7 heures a cheval.

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plateau occidental pour aller suivre dans sa dépres

sion toute la plaine de Thingvella . Les traces de la

séparation sont visibles , dans l’

A lmannegia, comme

si elle avait en lieu hier ; aux angles et aux lignes

d’

une des deux parois corresmndent les angles et

les l ignes de l’autre , aussi exactement que si ces pa

rois venaient d’être détachées par desmoyens méca

niques . Autre singularité , l’

A lmann agia est traversé

obliquement , du nord—ouest au sud—eSt , et dans un

assez court espace , par un torrent , l’Oxarä , qui vient

y tomber du plateau occidental en formant une pre

mière cascade de 30mètres , puis une seconde , pour

s’échapper de la dans la plaine , et se perdre‘

dans

le lac après avoir formé trois petites î les . Quant à

la plaine elle—même , ce n’

est , dit un témoin oculai

re‘

, qu’

une croûte de lave couverte de grosses hour

souflures ridées par le poids de la matière encore vis

1 . M . de S aulcy, qui a bien v oulu me commun iquer ses

dessin s , ses n otes , ses plan s faits sous la ten te , et m‘

éclairer

de ses souven irs . M . de S aulcy av ait déj a lui-même rédigé en

partie ces notes en vue d’

un e commun ication in téressan te

ins érée dan s le Cons titutionn el, 16 e t 1 7 septembre 1 856 .

Plusieurs autres voyageurs qui on t accompagn é dan s son

expédition en Islande le prince N apo léon : M . Ch . Giraut ,

pein tre attaché à l'

expédition , et qui a en voyé à l'exposition de

pein ture de 1861 une reproduction in téressan te du paysage de

Thingv ella. ; M . Rousseau , du mn séum d'

his toire naturelle ; M .

Hubaine , secrétaire des commandemen ts du prin ce , etc .,m

on t

aussi aidé de leur bien veillan tes in formation s. M . Charles

Sallandrouze de Lamornais , officier de t’

A rtémise pendan t la

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qneiise , alors que son refroidissement s'

opérait après

sa sortie des entrailles de la terre ; un réseau d’

in

nombrables crevasses et fissures profondes de 1 5 a

20 mètres la découpe en tous sens ; elle a environ

huit ki lomètres de long sur hui t kilomètres de

large ; vers le nord elle se rej oint par une pente

douce aux autres terrains , et son côté sud est bai

gné par le lac, dont le fond n'

est encore qu’

une con

tinuation de la plaine . Son aspect , malgré les bour

souflures et les crevasses , est très riant , à cause

de quelques bois de bouleaux nains et des patu

reges qui bordent l’

A lmannagia. Cet aspect°

devient

majestueux , s i un soleil éclatant illumine en loin les

somme15‘

neigenx qui encadrent la scène , et si l’

es

pri t dn spectateur , en même temps qu’

il admire

l’

étrangeté du site , se reporte aux époques reculées

pendant lesquelles cette plaine de lave a servi de

station nav ale de 1859—60 sur les côtes d’

Islande , a fait à mon

in ten tion une n ou ve lle v isite à Thingv ella , et a soign eusemen t

con sulté la tradition orale . Les s imples rapports des gu ides du

pays se son t trouv és d'

accord av ec les textes du Grâgés et de

la saga de N ial .

(M . Ch . S allandrouze de Lamornaix alors en seigne de vaisseau

aujourd'

hui v ice -amiral, écrivait à l‘

auteur (octobre 1860) j’

ai

passé qu inze heures à étudier j e n e v oulais con

fier à person n e le soin de vous en don n er des dé tails certain s .

J'

ai relu ass is sur le Légberg la description que vous m‘

av ez

donnée , e lle m‘

a paru parfaitemen t exacte ; j e n'

ai pas cru

dev oir en faire moi-même un e trouvan t le v ôtre très vraie .

Note de l'éditeur) .

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theatre a de tumultueuses assemblées nationales .

Un caprice de la nature a isolé , au milieu des fis

sures de Thingvella, un roc de lave formant un ovale

allongé , d’

environ 300mètres , du sudau nord sur une

largeur qui varie de 6 a20 mètres , et entouré d’

une

crevasse continue assez large et assez profonde pour

faire du bloc une sorte d’

î le inabordable , excepté par

un isthme étroit qui , vers l’

extrémité sud—est, le j oint

à la plaine et donne accès sur son plateau C’

est ce

bloc volcanique que Grim a la barbe de chèvre avait

choisi pour les séances de l’

A lthing islandais . Sur

son côté oriental , à peu près au milieu de la lon

gueur totale , a 1 50 mètres donc environ de l’

isthme

et a l’

endroit de la plus grande largeur, se trouve

une éminence d’

une médiocre élévation . A 120 mè

tres plus lo in il y en a une autre , occupen t toute la

pointe nord du rocher . Suivant la tradition , car les

textes sont obscurs , la seconde de ces hauteurs ,celle du nord

,servait aux séances de l

assemblée

légi slative et politique on lôgretta , tandis que sur la

première , celle de l’

est , siégaient les tribunaux ;c etait la proprement le célèbre lôqberg ou rocher

de la loi . Le président de l’

Althing se plaçait aumilieu

du tertre , tourné vers l’occident ; il voyait aisément

quand la lum 1ere du soleil commençai t à éclairer le

1 . D es éboulemen ts on t rendu aujourd‘

hui cet isthme peu

distinct.

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mur occidental de l’

A lmannagia, et la loi voulailqu‘

il

regut lai—dessus certaines Opérations des tribunaux ;

par exemple , et pour emprunter les expressions.cette fois pittoresques , de la traduction latine duGrâ

gas (section 3 , titre on procédait a la récusation

des juges serissime cum sol , e nom0phycalis ad

rupem jurisdicundi sede , occidentali chasmatis rupi

superinstare videretnr En présence du président

ou lôgsôgumadr étaient les juges , qui entouraient le

monticule Des gardes défendaien t l’

entrée à l’

en

droit où le rocher n’

a pas plus de 6 mètres de largeur

totale . Outre ce poste armé on comprend que le roc

était rendu inexpugnable par les crevasses dont il

était et est encore entouré ; ce sont , en effet , de vê

ritehles abimes dont l’

ouverture béante a de 5 a 1 5

mètres et dont une eau verte et bleue ne laisse pas ,malgré sa transparence , calculer la profondeur .

Le seul aspect en in spire l’

horreur et éveille de

lugubres souvenirs : plus d’

une victime y a péri . En

1 742 , un fonctionnaire danois , infidèle et redoutent

le châtiment de sa faute , s’

est précipité volontaire

ment dans la fi9snre occidentale , â laquelle i l a laissé

son nom c ’est le Nicola-gie de l’

autre côté , au

1 . Voici le texte : S va it si parsta, et sol sa a giahamri

enum vestrs or l6gs6gumannz rumi til et sie alôgbergi.

2. d ou Gid veut dire ouverture béan te. (Cf. gapa isl. Cf.l‘

ancien français gaber. Cf. le mot gave, qui désigne les

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point où la fente orientale se trouve le moins large ,un héros des sages , Flosi , a été jadis plus heureux ;au moment où la sentence des tribunaux qui lemet

tait hors la loi al lait s ’exécuter, il fit pour y échapper

un saut formidable , de près de 5 mètres , et la fissure

en a conservé le nomde Flosi-gia .

Tout ce qui environnait le bloc sur lequel l’assem

blée générale se réunissait concourait d‘

ailleurs au

même but . La plaine de Tingve‘

lla, couverte encore

auj ourd ’hui çà et la , parmi les débris volcaniques ,de mousse , d

‘herbe et de bouquets de bouleaux

nains , recevait la mul titude des assistants . Dans la

seconde cascade de l’

Ôxara, qui n’

est guère a ujour

d’

hui qu’

un rapide formé par les les eaux bouillon

nantes -sur un plan incliné de 30 mètres formé de

rocs épars , on précipitait , dit—on , les femmes ednlæ .

tères enfin , l’

une des petites îles que forment les

eaux du torrent avant de se perdre dans le lac ser

vait de théâtre , dès les temps les plus anciens , et

même avant l ’ institution de l’

A lthing, aux com

bats singul iers .

On désignait sous le nom d’

A lthing ou assemblée

eaux torren tueuses sillonn en t e t creusan t les mon tagnes dan s

les Pyrénées . Cf. Chasma , chaos , e tc . )1 . C

'

es t un e tradition , mais peut—être modern e ; la domin a

tion danoise impo'

sa, en 1 564, ce supplice en Islande ; il semble

que la peine de mort n‘

ait pas é té infligée pour adultère

pendan t toute l'

époque du catholicisme .

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générale du peuple islandais deux réunions diverses

qui avaient lieu concurœmment celle d’

une assem

blée législative et , par là, politique le lieu de ses

séances était , comme nous l’

avons dit , le tertre septentrional ; et cel le des tribunaux supérieurs ren

dant la justice pour les quatre divisions de l’

île

ceux—la sœgeaient sur le monticule voisin de l’

is

thme .

Considéré comme assemblée législative, l’

A ltbi,ng

prenait le nom de ldgretta , c’

est—â-dim qui corrige ,

qui précise et qui fait la loi . Aux termes du Gragas ,le lôgrette se réunissait pendant les deux dimanches

et pendant le dernier j our de l’

A lthing, lequel se

tenait pendant toute la seconde moitié du mois de

j uin de chaque année, c’

est-â—dire pendant le temps

où les longs et clairs crépuscules rej oignent l’

aurore

avec une totale absence d'

obscnrité . Il pouvait ton

tefois se réunir plus souvent , si son président ou

la maj orité des assistants le requérait . Le lôgretta se

composait des godar on magistrats locaux de tout le

pays . Chacun d’

eux se faisait accompagner de deux

assesseurs chois is par lui—même entre les habitants

de sa circonscription . Quatre triples rangées de

bancs , une , pour chaque fiordung on quartier , en

touraient l‘

espace carré du lôgretta‘ douze godar

1. Voy. le Gragas , pages 4 et 5 de l‘

édition arnamagn éenne .

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étaient assis sur le banc du milieu de chaque rangée ,chacun ayant , devant et derrière soi , sur les deux

autres banc'

s ,‘

ses deux assesseurs . Le lôgrettacomptait cent quarante—quatremembres sans le président .

Celui-ci siégeait seul au milieu de l'

espace réservé

entre les bancs , dans lequel il introduisait , aubesoin ,

un orateur . La foule des assistants se tenait debout

derrière l’

enceinte ainsi occupée Extra subsellia

sedeat mn ltitudo

Le président du lôgretta ou lôgsôgumadr était

tenu de réciter, comme son titre l’ indique , puis , une

fois qu’

elles furent écrites , de l ire publiquemen t .

tout l’

ensemble des loi s , ainsi que les formules de

la procédure , dont nous verrons bientôt l'

impor

tance anx yeux des Islandais formalistes . Il devait

achever la lecture entière de tout le code pendant

les trois étés que durait sa charge . Si une lo i était

passée sous si lence pendant toute une période trien

nale sans aucune réclamation , cette loi était réputée

abolie . Le lôgsôgumadr étai t obligé d’

aj outer à cette

lecture les explications qui pouvaient sembler nécœ

saires aussi fallait—il qu’

il fût jurisconsulte habile

et expérimenté . En cas d’

embarras , il lui était per

mis d ’

appeler à lui cinq juri stes ou davantage, et de

les consulter secrètement . Son rôle d’

interprète de

1 . Ut fra pollom a alpipa et sitia.

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majorité des voix par son président il la publiait et

l’

interprétait .

Outre son rôle législatif, il paraît avoir encore

servi d'

organe et d’

interprète au pouvoir administre

tif. C’

est le lôgsôgumadr qui publie les d ivi sions de

la prochaine année , le commencement et la fin de

chaque sai son , l’

époque où devront avoir lieu les

divers travaux de la terre il dit si l’

année doit être

ounon bissextile , quand s’

ouvrira leprochain Althing ,quelles règles présideront , comme chaque année, a

ses réunions , ou quelles causes pourront le faire

dissoudre .

Dans cette même assemblée enfin dont nous avons

vu les attributions législatives et administratives , se

prennent toutes les résolutions qui concernent l’

in

térêt général . Par là , el le devient véritablement une

assemblée politique et nationale . L’

histoire des gran

des mesures résolues par le lôgretta sous ses divers

présidents , dont on peut, avec le secours des sages ,restituer la série , serait donc l

histoire même de la

république islandaise . Vers 970 , Thorkell Mani y

fait adop ter la véritable année solaire ; vers l’

an

1000 , le christianisme y est proclamé légalemen t

religion de l’

E tat . Nous dirons en détail dans ce tra

vail même comment y furent décidées , en 1004

l ’ institution d’

un nouveau tribunal supérieur , et

vers 1 011 , l’

abolition du duel . La loi païenne y fut

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dèvelonpéê , en 1094 , par la prem1ere rédaction du

Vigslôdi ou code criminel , et en 1 1 18 par la révi

sion et la rédaction définitive de la législation tout

ent ière . La loi chré tienne enfin yfut confirmée, en1 0 16 , par la défense d

'

exposer les enfants et de

manger de la chair de cheval, en 1 096 par l’

institn

t ion de la dima, en 1 123 par la rédaction du code ao

clésiastique .

Les principaux membres de l’

assemblée étaient à

la vérité les godar ou magistrats locaux , qui occu

paient les quatre bancs intermédiaires autour de

l‘

enceinte carrée du lôgretta, et cas godar étaient les

héritiers des anciens chefs de l'

émigration , qui

tenaient entre leurs mains la triple autorité mil itaire ,judiciaire et religieuse mais l ’ ins titution de l

A I

thing , en créant un pouvoir public , avai t apporté des

l imites à leur autorité , jusque— là exclusive et sans

partage . I ls n‘

étaient pas maîtres absolus dans le

lôgretta . Il est difficile de distinguer , soit d‘

après les

indications insuffisantes du Gragas , soit d'

après les

sages , quelle part les assesseurs , qu’ils étaient tenus

de choisir parmi leurs administrés , prenaien t dans

les résolutions de l‘

assemblée mais il faut que ces

derniers aient acquis avec le temps,s’

i ls ne l‘

avaient

tout d‘

abord , une autorité importante, puisque nous

voyons plus tard , lors de l’

institution d’

un nouveau

et cinquième tribunal , réclamer contre leur inter

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vention au nom des seuls membres qui avaient le

droit de s iéger sur les bancs intermédiaires , c’

est—à

dire des godar, chefs de l’

oligarchie . D ’ailleurs , l’ i n

tervention des hommes libres , c’

est—â—dira de la

nation même, paraît s etre touj ours placée dans l’

A l

thing à côté du pouvoir des membres mêmes de

l’

assemblée , titulaires ou assesseurs , à défaut des

quels les simples ci toyens pouvaient , ce semble , et

devaient même en certains cas siéger Si les de

mandes de privilèges individuel s sont présentées

au lôgretta , dit la Grâgâs . avant l‘

arrivée ou après

le départ des membres, et que l’

assistance compte

quatre douzaines de personnes au moins , le lôgsô

gumadr peut faire occuper lesbancs par les citoyen s

présents jusqu a ce que le nombre légal desmem

bras du lôgretta soit atteint et quiconque , ains i

désigné , refuse , encourt une amende . Les banc s

intermédiaires étant de là sorte remplis , le lôgsô

gumadrprendrades témoins . Javous prends comme

témoins , dira— t— il, que , de mon autorité , j’

ai cous

titné ces hommes pour siéger au lôgretta, avec le

droi t de travailler aux lois et d ’accorder les dis

penses . Je vous atteste, par la formule légale , dan s

l ‘intérêt de quiconque ven t invoquer le droit . Cala

fait, les dispenses accordées de la sorte seront val i

des au même titre que si les godar eux—mêmes

avaient été présents . Bien plus , si une résolution

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du lôgretta blessait des intérêts oudes droits , il était

lo isible en premier venu, se croyant lésé , d’

y Oppo

ser son veto , qui suspendait et annulai t immédiate

ment toutes les opérations : Au lôgretta, dit le

Gragas , sera regardée comme consentie et adoptée

toute proposition qui n’aura pas été combattne par

les juges légitimes , pourvu , toutefois , qu’

el le ne

soi t pas annulée par une opposition venue du

dehors . E t nous verrons la saga de Nial confir

mer et développer ce témoignage . Singul ier trait de

démocratie , qui rappel le les‘

diètes polonaises , où

un membre , s’ il parvenait , après avoir couru dix fois

le ri sque d ’être tué sur la place , à déposer son veto

arrêtait à lui seul la volonté de tout le reste de l’

as

semblée . Encore fallait- i] , en Pologne , faire partie

de la diète , qui ne s’

ouvrait pas à tous les citoyens ,tandis qu

en Islande le dernier des hommes libres

avai t le droit de se présenter à l’

A lthing avec cette

part excess ive d’

autorité . Dans la pratique, il est vrai ,en lôgretta islandais comme aux diètes polonaises ,cette autorité de l

individu se trouvait l imitée par la

crainte que devait lui inspirer , s’ il étai t seul de son

av i s , le courroux des autres mais le droit subsis

tait ; il attestait une ancienne et fière l iberté, et,

pour ce qui est des assemblées islandaises , i l devait

placer dans l ’opinion publique et dans la volonté de

la nation un contra—poids énergiques aux volontés

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ou aux caprices de l’aristocratie . Qu

elle le tint ou

non de la constitution et des lo is , il parait b ien que

la nation islandaise revendiquait , de vive force au

besoin , le droit de se mêler aux délibérations de

l ’assemblée générale les mille précautions du Grâ

gâs et les récits des sages en offrant abondamment

les preuves , et c’

était précisément contre les inter

ruptions souvent tumultueuses de la foule que les

dispositions du sol volcanique de Tiugvella avaien t

paru favorables .

La république islandaise était donc primitivemen t

oligarchique , mais sans que les effets du sentiment

de l iberté personnelle profondément inné chez les

peuples scandinaves s’y fussent effacés . C ’était , sans

aucun doute , ce sentiment intime et vivace qui

avait , en même temps , empêché l’

aristocratie islan

daise de resserrer ses rangs pour opprimer la répu

blique, et protégé cette même aristocratie contre le

despotisme populaire . Jamais un pouvoir central

fortement organisé , au nom du peuple ou de l’

as

semblée , ne se put établir . La lôgsôgumardr prési

dent et organe du lôgretta , en qui se résumait défini

tivement ce qu’i l y avait de gouvernement central ,

était bien le représentant politique du pays ; mai s ce

n’

en était pas moins un fonctionnaire payé , électif et

révocable à volonté . Il était nommé par les magis

trats ses collègues , à la majorité des voix ; cheque

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été , en rémunération de ses peines et de sa science,i l recevait , sur les revenus du lôgretta, formés prin

cipalement des produits d’

un impôt spécial levé

pour l’

Althing, deux cents annes d’

étoife , plus la

moitié des amendes infl igées pendant la session

aprè s certains manquements . Enfin ses collègues

pouvaient la remplacer subitement .

Une autre sorte d’assemblée était destinée â servir

d ’organe au gouvernement central dans l 'intérieur et

aux extrémités de l’

île . Bien que le plus grand

nombredeshommes libres vinssanten elfetâ l’

A lthing,

cependant ils n’y venaient pas tous . A une époque

où l ’écriture n’étai t pas dans l ’usage commun , i l

fallait aviser auxmoyens de leur faire connaître la

lo i ce fut l‘objet d

une institution particul ière,cel le

Il nous faut, dit le Gregas les réunions du laid.

Que les godar d’

un même district convoquent

ensemble et tiennent cette assemblée dans le lieu

où se tient d’

ordinaire leur thing du printemps , à

moins que le lôgretta ne les ai t autorisés à la tenir

ailleurs .

Le laid ne doit pas être réuni plus tard que le

dimanche ouvrant la huitième semaine avant la

fin de l’

été , n i plus tôt que la quinmeme j ournée

1 . Pinkskapa-Pdttr , titre 5 , page 122 de l

'

édition ername

gnéenne.

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après la fin de l’

A lthing La réunion ne durera

pas moins d’

un j our, du matin jusqu’au soir

,ni

plus de deux nui ts .

On proclamera dans cette assemblée : toutes les

loi s nouvel les ; la répartition dé l’année ; si l

an

née est bissextile s i des j our s intercalaires

doivent être aj outés à l’

été ; enfin si l’

on doit se

rendra au prochain Althing avant la fin de la

dixième semaine d’

été .

On voit que le laid n’

avait d’

autre mission que de

compléter l’

organisation du gouvernement central .

Il se réun issait dans chaque chef- lieu de district

immédiatement après la session de la grande assem

blée . Les mêmes chefs ou godar qui avaient assisté

à celle-ci et qui avaient pris part a ses délibérations

proclamaient dans le laid, à leur retour , chacun en

présence de ceux de ses administrés qui n’avaient

pas fait le voyage de l’

A lthing, tout ce qu‘

on yavait

résolu , de telle sorte que personne ne conservât plus

de raisons légitimes pour prétexter l’

ignorance de

la loi . Les formes extérieures du laid étaient d’

ail

leurs analogues â celles de la grande assemblée ,a laquel le i l servait simplement d

interprète et

d ‘organe . On a quelquefo is rangé le laid au nombre .

des tribunaux islandais . Il est vrai qu’

on y publ iai t

1 . La session de l‘

A lthing avait lieu, comme n ous l'

av ons di t

page 38, pendan t la seconde moitié du mois de juin .

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dont parlent les lois d’

Ulfliot , mais i l ne faut pas

t irer de ce silence une conclusion trop absolue ;plusieurs témoignages permettent de penser que le

plus important tribunal de l’

Islande n’

avait pas

primitivement fait exception à une règle générale et

sacrée . Les cascades de l’Oxarâ avaient , sans aucun

doute , servi primitivement «a l’

accomplissement des

sacrifices . Pour tout archéologue du Nord, habitué

à rencontrer auprès des ruines de temples païens

une source. un fleuve , un lac ou une chute d’

eau

pouvant servir à laver le sang des antels et à noyer

les victimes , cette conjecture ne parait pas téméraire ;bien plus , aux voyageurs modernes qui ont consulté

la tradition en vue des l ieux mêmes il parai t probable

qu’

un ancien temple pa1en a en effet existé sur

l ‘emplacement , et peut—être même sur les fondations

d ’

une petite église qu’

on voit auj ourd’

hui dans la

plaine de Tingvella . Le silence du Grâgâ , sécrit dans

un temps chrétien et longtemps après la séparation

des deux pouvoirs , religieux et législatif, qui avai t

précédé la révolution chrétienne , ne contredit pas de

tel les origines . Du reste tout caractère rel igieux ne

manquait pas,même suivant le Gragas , auxréunion s

de la grande assemblée nationale . Aux approches de

la session annuelle , une paix ou trêve solennel le

était proclamée , qui garantissai t , son s les peines les

plus sévères , la sécurité des personnes et des biens

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dans le lieu de l’

A lthing et dans le pays voisin . Cette

paix interdisai t a toute personne de porter des

armes pendant la session , et la dissolution de

l‘

assemblée permettait seule de les reprendre aussi

le moment où on proclamai t la dissolution s’

appelait

il vapna tak ou la reprise des armes ; c etait tr0 p

s ouvent le signal des guerres privées que venaient

d’

enfanter les débats judiciaires . En Norvège on

entourait le thing d’

un cordon attaché à des branches

de coudriers fichées en terre . Cette clôture sacrée

ou cc-bond donnait en effet aux Opérations du tri

bunal un caractère d’

inviolabilité et de légalité qui

cessait aussitôt le cordon rompu. En Islande la

configuration naturelle du terrain qu’

on avait choisi

expliquait sans doute assez l’

absence de cet usage,

que la proclamation de la paix devait remplacer .

Nous verrons d’ailleurs les formules de droit de

l’

A lthing invoquer constamment l’

autorité divine,et la justice rester étroitement voisine

'

de le re

ligion .

Nous avons dit les attributions,le caractère et la

composition de l’

assemblée nous avons même

décrit le lieu de la scène ; essayons maintenant , en

nous transportant par la pensée aumilieudu dixième

meule , de reconstruire et de nous représenter la

scène tout entière .

Quelques j ours avant l’

ouverture de la session,

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au milieude juin , quand l‘

absence complète de nui t

rend le voyage facile , des quatre provinces de l’

île

arrivent vers la plaine de Tingvella les longues files

de petits chevaux islandais qui suivant a travers les

champs de lave la trace frayée pendant les années

précédentes , et qui portent les membres de l’as

sem

blée , avec leurs bagages et leurs armes . On vient

surtout du sud et de l’

ouest, où se rencontrent le

plus grand nombre d’

habitations islandaises les uns

contournent le lac de Tingvella, les autres descen

dent du plateau occidental dans l’

A lmannagia par

un étroit escal ier , naturellement tai llé dans le roc ,

puis pénètrent dans la plaine . Le magistrat ou godi

qui préside au district reçoit chaque contingent ; sous

le nom de A llsherj ar-godi ou magistrat de tout le

monde , il est chargé de la police de l’assemblée .

C’

est lui qui a d’

avance assigné aux citoyens de cha

que circonscription une place pour leurs tentes et

un pacage dans les prairies on les forêts voisines

pour leurs chevaux ces animaux resteront confiés ,pendant toute la session . à un homme désigné par

lui ; il faut , après les avoir dûment soignés , les

rendre morts ou vifs (c‘

est l’

expression du Grâgâs ,

qui prescrit minutieusement au gardien tous ses

devoirs . ) Dès qu’ i ls ont mis pied a terre , les nou

veaux venus commencent a construire les petites

habitations qui les doivent abriter pendant les deux

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semaines que durera l’

assemblée. Ce sont des

tentes , ou plutôt des cabanes , dont les assises et les

murs sont formés de larges dalles de lave eu

des sus desquel les deux ou trois traverses en bois

sont destinées à recevoir les toiles qu’on apporte

chaque fois a cet effet . Tout godi possède un ou

plusieurs de ces campements ,'

où il doit recevoir

les hommes de son district . Il leur paye, a leur arri

vée , en temps convenable, l‘

indemnité du voyage,sauf à percevoir a son retour une amende de tous

ceux qui ne se sont pas rendusà l'assemblée . L'avan

tage d’

un chef est de réunir le plus de clients autour

de lui ; la, comme ail leurs , c’

est un signe depuissance

qui le fai t respecter c’

est un secours qui l'

aide à

être vainqueur dans les nombreuses querelles de

l‘

Althing. Mais une multitude de tentes plus petites ,aux extrémités et jusque dans les profondeurs de

l’

A lmannagia, donnent asi le a des groupes séparés

et surtout aux artisans , charrons , forgerons , me

nuisiers , armuriers , cordonniers et cuisiniers , dont

1 . Lorsque, dan s la Laxdaela saga , chapitre v , Unna aborde

en I slande , et qu'

elle v a trouver, avec une suite de vingt per

sonn es . son frère Helgi , celui—ci v ien t a sa rencon tre avec une

suite moitié moin s nombreuse ; elle le reçoit donc avec dédain ,

et déclare qu’

elle ign orait que son frère se con ten tât d'

un e si

mince condition . S on autre frère Biorn v ien t v ers elle avec un

cortège con sidérable et l‘

in v ite chez lui avec tous les siens ,connaissan t sa fierté .

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les services sont rendus nécessaires pour cette foule

réunie . On comprend bien , d‘

ail leurs , que la session

de l’

A lthing devien t l'occasion d

'

un concours habi

tuel et populaire . Non seulement tous les hommes

libres et non indigents doivent assister a l 'assem

blée nationale , et c’

est un déshonneur que de ne s'

y

pas rendre mais l'

assistance est grossie d’

un

grand nombre de personnes qui n'

ont pas le droit

de prendre part aux délibérations , femmes , enfants ,esclaves , j ournaliers et indigents . Toute l

Islande

se rend en juin à Tingvella . C’

est un marché

où l ’on s’

approvisionne jusqu’à la saison pro

chaine, une rencontre solennel le où se passent les

contrats , où se règlent les transactions , où se

concluent les mariages . Quiconque a des relation s

à entretenir , quiconque tient a sa considération ,

a sa clientèle , à son crédit , quiconque aspire à

la notoriété ou au renom , ne peut se dispenser de

venir a l’

A lthing. Les scaldes y racontent leurs sagas

ou y récitent leurs poemes les lutteurs y montren t

leur force et leur adresse , et les spectateurs se met

tent souvent de la partie . Le voyageur nouvel lemen t

de retour y retrouve parents et amis , raconte ce qu’

i l

a vu en Norvège , aux î les Féroé ou plus au loin et

vend ses cargaisons . On proclame a l’

A lthing les

objets trouvés et perdus ; ou y pub lie, pour s’

en

faire honneur on pour prendre garantie, leswehrgelds

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con sentis Ou imposés ; les pêcheurs y font reconnaî

tre l'

a marque de leurs javelots , afin d'éviter toutes‘

les querelles sur le partage des prises C ’

est, en

un mot, dans une île d’

une faible population et de

communications rares , un moyen de publicité et de

rapprochement mutuel. On ypent faire appel â l’

opi

n ion publique ; ou y paut'

iM erroger le sent iment

général , et c’

est aussi le plus souvent a Tingvella,comme nous l

avons dit , que les destinées dal’

Islande

sa décident et s'

accomplissent

Tel le est la physionomie extérieure de l’A lthing.

I l serai t bien difficile de restituer, d‘

après les

express ions souvent incomplètes et obscures du

Grégas , l‘

aspect de l'assemblée el le—même , et nous

en avons d‘

ailleurs donné plus haut quelques prin

cipanx traits . Il suffit d ’avoir constaté que, soit par

le concours du peuple entier soit par ses attribu

tions étendues , le lôgretta, c est—â—dira l’

assemblée

l é gislative de l’

A ltbing, concentrait toute la vie poli

tique de la république islandaise et créait une

sorte d’

unité dans le gouvernement . Considérons

maintenant dans l‘

A lthing l’

assemblée jud iciaire , les

1 . La Laxdaela saga fait un tableau analogue d'

une assem

blée triennale présidée par le roi lui-même en N orvège è la

fin du xi ° siècle . Commerce , jeux, ban quets , rencon tra d'

Islan

date, de N orvégien s, de D anois et de Russes , rien n’

y manque .

(Chapitre 111 1 , p. 29 de l‘

édition arnamagnéenne.)

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tribunaux . Cette autre étude nous montrera sous

un j our particulier le génie pratique des anciens

S candinaves .

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Ce dernier avait naturel lement une grande impor

tance dans une civili sation qui se dépouillait de la

barbarie primitive , où l’

idée de la protection supé

rieure de l’

É tat commençait à prévaloir , et chez un

peuple à l’

esprit processif et subtil . Le fond de

rudesse encore subsistente sur lequel se détechaien t

ce besoin d’

un ordre nouveau et ce formal isme inné

est un élément indispensable de notre enquête

les sagas nous en ont con servé la peinture animée .

Les sages sont des récits , le plus souvent biogra

phiques , donnant l’histoire d

un homme ou d’

une

famille , composés , en grande partie , d‘

après le tra

dition orale au lendemain du chri stianisme , dans la

langue i slandaise ou norrène c’

est-â-dira dans le

même idiome qui , parlé pendant toute la période du

paganisme par les peuples scandinaves , servit de

bonne heure , a une époque difficile a fixer, aux

poésies de l’Edda , se modifie fort peu sans doute

depuis ces temps reculés jusqu’

au xn°

5 1ecle , reste

dans l ’usage de tout le Nord jusqu’à la fin du x1v

°

,

devint ensuite une langue savante , propre a la

traduction des poemes et chansons de geste , alors

populaires en Europe, et se séquestra en Islande ,où les paysans mêmes le comprennent encore eu

jourd’

hni .

1 . La désigna tion de la ngue norren e n e s 1n tt oduit qu‘

à partirdu commen cemen t du n n ° siècle .

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Les sagas isl andaises en particulier, écrites

du x i°au x1v° S i è cle , quelquefois assez peu de

temps après les faits qu‘

elle racontent , se pré

sentent a nous avec un caractère de véracité et

d ’authenticité souvent incontestable. L’

Islande ré

sumant dans la vie sociale et dans ses mœurs toute

la civi lisation de sa mère patrie , elles nous offren t

elles-mêmes un résumé général des mœurs , des

idées, des institutions de l’ancien paganisme scan

d ih aye .

Une des plus importantes est sans aucun doute

la saga de Nial , curieuse peinture des mœurs ,précieuse en même temps par l

exactitude d’

une

partie de ses détails et par la richesse de son

récit ‘ . L’

espace qu’

elle comprend s ’étend entre les

années 970 et 1017 l ’ introduction du christianisme

vers l’

an 1000 , vient se placer de la sorte en milieu

de la narration . E l le a été rédigée dans la seconde

1 . E lle est désign ée par les différen ts titres de N idls saga ,

N i i la , Brenn u—N idts saga , c‘

est-â-dire de Nial le Brûlé , Fliô tsh

lidinga saga et H lidve ria saga , ces deux dern iers n oms

rappelan t les parties de l'

Islande où l'

action s'

es t passée .

Il y a deux édition s du texte , l'

un e sous ce titre S agan

af N iâti Pôrgeirssyn i ok S on um han s , etc . Comn hagn e , 1 772 ,

ñu av ec préface d’

0 l. Olav ius l'

autre , imprimée à

V idey (Videyar Klaustri) , 1844 , 427 p. in sans notes n i

préface . On en a un e traduction latine par J . John sonius ,

sous ce titre : N ials—Saga . His toria N ia li et filiorum ,la tine

reddi ta , cum adj ecto chronologia varita tex tus islandici lectio

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moitié du xi° siècle ou dans les prem1ere3 années

du x11° , et probablement par le célèbre édi teur de

l’

E ldda poétique , S aemuud, né en 1056 , mort en

1 133 .

Voici sur quel s arguments s’

appuient ces conjee

tures : On a de la sage de Nial un assez grand

nombre de manuscrits,conservés pour la plupart à

la bibliothèque de l'

université de Copenhague ; sept

sont sur parchemin ; le plus ancien date , au juge

ment des savants du nord , du x…! siècle ; mais son

style , qui est celui d’

une très ancienne jprose islan

daise , fait penser à quelques-uns que la saga aurait

été rédigée avant l’

époque où ce manuscrit a été

exécuté ; ce style parait être du même temps

que celui d’

Arc Frode , l’

un des auteurs du Landua

ma Bok,né en 1068 , mort en 1 148 . Des personnages

qui vivaient , suivant le Landnama Bok, à la fin du

XI°

5 1ecle, sont ci tés dans la saga de Nial comme

contemporains . S aemuud Frode , Are Frode, l’

évê

n ibas , earumque crisi , nec non glossario et indice rerum ac

locaram . A ccessere specimina scripturæ codicum membran eorum

tabulis æn eis in cisa . S umtibus P. Fr . S uhmi et lega ti A rn a

Magnæan i . Hav inæ , 1809 in avec un glossaire de Gndmnnd

Magn ussem Un e traduction dano ise se trouve dan s N . M .

Petersen , Historiske Fortaellinger om Islændern es faerd, t . lll .E nfin M . Dasen t en a publié une excellen te traduction

anglaise . Edingurgh , 1 862.

(M . Rodolphe D areste en a donn é une traduction française ,E . L eroux, 1896 , note de l

'

éditeur) .

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que Keti l , écrivains fort connus de la fin du x1° et

du commencement du m ‘s1ecle , y sont nommés ;

mais , bien que l’

auteur se montra fort soigneux de

développer les généalogies , celle de la famille de

S aemuud par exemple , il ne fait aucune mention de

L0 pt ou Lot, ni de Jon Loptsou, fils et petit—fils de

S aemuud, et devenus , da teur vivant, plus célèbres

en Islande que S aemuud lui-même . Toutes ces cir

constances , j ointes à celle-ci que Saemuud Frode

vivai t précisément dans la partie de l’

Islande où se

sont passés les événements qui sont mentionnés dans

la saga qu’

il descendait de quelques-uns des héros

impl iqués dans le récit , que cette œuvre trahit enfin

un écrivain fort instruit , pourraient rendra vrai

semblable la conjecture émise par Pierre É rasme

Mül ler , dans sa Bibliothèque des sages, que Sae

mund lui-même, a été cet écrivain .

Pour ce qui est de la véracité de la saga de Nial ,

1 . Après son retour de France et d‘

A llemagne. v ers 1083 , il

dev ien t prêtre a Odde , dan s le diocèse de Skalholt . Voyez,

sur les tradition s qui se rattachent au souv en ir de ce person

n age , les Isl(indische Volkssagen der Gegenwart , vorwiegend

n ach mündlicher Ueberlieferunq gesammelt und verdeu tscht vonD r Konrad Maurer, Professor des deutschen Rachis an der

Münchner Hochschule , L eipzig, 1860 . Cf. la recen s ion de

es t in téressan t ouv rage dan s la Revue des deux mondes du

15 av ril 1860 . V . aussi (aux pages 485 et suivan tes) le premier v olume du nouv eau recueil de légendes et tradition s

islandaises publié en is landais à Leipzig, en 1862, par M . Jén

Arnason ,volume auquel M . Maurer a aussi donné ses soins.

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elle se trouve confirmée par les témoignages de plu

sieurs autres livres islandais sur les mêmes evene

ments , bien connus dans l’

histoire du Nord , que

l ’auteur a consignés dans son récit . La saga est écrite.

il est vrai , longtemps après les faits qu’

el le raconte

mais ces faits étaient de nature , par leur importance

particuhere, à vivre facilement et sans s’

altérer dans

les souvenirs . Il s ’agissait en effet, comme nous le

verrons plus au long tout a l'

heure , d’

abord d’

un

grave changement introduit par Nial lui—même dans

la législation islandaise , puis de quelques—uns des

plus fameux procès parmi ceux que les tribunaux de

l’

Islande eussent eu j amais à juger, de guerres pri

vées, enfin , entre les familles les plus puissantes de

l’

île , et dont les descendants se trouvaient être les

hommes les plus savants du pays . Les fragments en

vers dont l‘

ouvrage est entrecoupé ont été composés

par deux des héros de la saga , Gunnar et Skarphe

din , qu’on connaît d ’

autre part pour avoir été en elIet

des scaldes renommés La narration d ’

une expedition en Irlande, dans les chapitres cr.vr, cam et

ou…,concorde b ien avec l

histoire générale de ce

pays . La batai lle de Brian , en 1014 , et la mort de

Nial au milieu d’

un incendie , sont des épisodes

1 . Nial lui—mème était poè te , nous le savon s par le témoign a

ge de la n ouvelle Edda, qui cite quelques—un s de ses v ers . (V.

la préface'

à la traduction latine de la saga de N ial, page

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mentionnés dans les annalistes de l’

Islande et dans

la saga de Gunnlaug (chapitre xr) . Enfin , beaucoup

des personnages de la saga de Nial figurent auss i

soit dans le LandnamaBok, soit dans l’

Eyrbyggia, la

LaXdaela et la Liosvetninga saga .

Rédigée à la fin du xx“ s iecle , et donnant un réci t

qui se rapporte à la fin du x“et au commencement

du xl° , la saga de Nial est donc plus ancienne

qu’

une bonne partie du Gragas . Là où les deux mo

numents sont d’

accord , nous avons évidemment , par

cet accord même, un témoignage assuré des premiers

temps là où ils diti‘

érent, c’

est la version de la saga

qui nous révèle l’

état le plus ancien , tandis que le

Gragas , consigne les modifications et les altérations

ultérieures .

Son principal intérêt est de reproduire , jusque

dans le dernier détail , les épisodes et les formules

judiciaires d’

un temps si reculé . E lle estgénéralement

pour les récits de cette nature , dans un si parfait

accord avec le Gragas , que certaines formules sont ,dans l

un et l’

autre ouvrage , absolument lesmêmes .

Les deux monuments se contrôlent et se complètent

ainsi naturellement , le Gragas nous donnant le texte

abrégé , quelquefois sec et peu clair , des prescriptions

, des formalités et des lois dont la saga nous

présente , en action , et dans leur application prati

que, le vivant commentaire ; la saga nous aidant en

5 .

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particul ier à di s tinguer les parties du Gragas qui re

montent au mo ins au x° siècle , et qui contiennen t

le droit contemporain des lo is d’

Ulfiot, l’

ancien droi t

payen des Islandais scandinaves .

C ’

est donc a la saga de Nial que nous devrons

d ’

abord demander les principaux traits des mœurs

encore barbares que les d iverses lois contenues dans

le Gragas seront appelées à réglementer .

La saga de Nial est un ouvrage étendu el le con

tient dans le texte et dans l’

édition islandaise 160

chapitres et 282 pages d’

un petit format in- quarto .

Nous donnerons ici une analyse des principaux

épisodes se rapportant à notre sujet . On s’

attend

b ien ane rencontrer chez les anciens conteurs islan

dais que peu d’

habileté de composition . Ces chroui

ques de famille s’

asservissentà l’

ordre généalogique ,de sorte que le rédacteur , lorsqu

’ il vient à nommer

un de ses héros , se croit obligé d enumérer ses a1eux,de dire les actions de son père , puis celles du père

de son père , deman iere acompliquer demille sèches

digressions la trame de son récit . Ce n’

est pas que

l ’ imagination fasse défaut elle y a seulement un tour

différent de celui qui nous est habituel : pas de des

criptions de nature , nulle généralité de sentimens et

d ’ idées , une suite indéfin ie de traits individuels bien

saisis , non pas uniquement à la surface , mai s dans

le vif et quelquefois tout prés du cœur, du reste une

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pendant ce temps , j ouait sur le plancher avec d'autres

enfans. E lle était déj à belle , et ses cheveux , doux

comme la soie , étaient si longs qu’ il s tombaient plus

bas que sa taille . Hauskuld l’

appela et dit a Brut z

« Que te semble de cette enfant ? N ’

est-elle pas

belle ? Brut ne répondit pas . Hauskuld répète. sa

question Hrut dit alors Oui certes , elle est bel le,d

'

une beauté qui sera funeste à plus d‘

un . Je ne sais

d’

où ces yeux perfides se sont glissés dans notre

famille . Cette réponse mécontenta Hauskuld, et

pendant quelque temps il y eut du froid entre son

frère et lui.

Halgerda crût en âge ; elle devint une très bel le

jeune fille de haute taille mais elle était apre et dure

de cœur . Son père nourricier s’appelait Thiostolt.

Issu d ’

une famille des îles du sud, il était fort hab ile

à manier les armes ; il avait tué plusieurs hommes

sans payer d ’amende pour aucun ; on croyait qu’

i l

n ’

avai t pas contribué à modérer l’

humeur d’

Hal

gerda .

Il y avait un homme appelé Thorvald , fil s d’

0 svif ;

il possédait les îles des Ours , dans le Bredefiord ;il en tirait du grain et une bonne pèche . Thorvald

étai t brave et généreux , mai s prompt et brusque . Un

j our il parlait de mariage avec son père et rejetait

tous les partis d’

alentour : Songerais—tu, lui dit

Osvif, à la fille d’

Hauskuld, Halgerda ? Oui, je

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veux la demander . Ce mariage ne convient ni

pour elle ni pour to i : el le est volontaire, tu es Opi

n1atre et inflexible . J’

en veux faire l’

épreuve ce

pendant : il ne servirait à rien de vouloirm’

en empê

cher . Qu’

à cela ne tienne ! le risque est pour toi

seul . i ls partirent b ientôt pour aller faire la de

mande . Arrivés àŒauskuldstad, ils furent bien reçus ;mais Hauskuld leur répondit : Je veux agir loyale

ment avec vous . Ma fil le est d’

humeur peu traitable

pour ce qui est de sa beauté, vous pouvez en juger

vous—mêmes . Thorvald répondit Fixez les condi

tions ; son humeur ne me fera pas changer d’

avis .

A lors i ls firent leurs conditions sans qu’on eût consul

té Halgerda, car son père avait hâte de la voir ma

riée . Quand elle apprit ce qui avait été conclu : Tu

ne m’

as j amais aimée , dit—elle à son père ; je ne

trouve pas cette alliance a la hauteur de ce que tu

m‘

avais promis . E t en tout el le témoigna qu’

elle se

tiendrait pour mal mariée . Je ne souffrirai pas , ré

pondit son père, que ton orgueil fasse obstacle à mes

desseins ; et, si nous ne pouvons tomber d’

accord ,ma volonté s

accomplira, non la tienne . E lle alla

trouver son père nourricier , lui raconta ce qui était

résolu et qu’

elle en était désespérée ; Thiostolf lui

répondit : Prends courage , tu seras mariée une

seconde fois , et alors on te demandera ton avis . Il

n’

y eut pas un mot de plus entre eux ; Hauskuld par

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tit pour aller faire ses invitations à la fête des noces .

Ce j our venu, Halgerda s’

assit à la place d’honneur,

et se montra comme une j oyeuse fiancée ; mais

Thiostolf lui parlait sans cesse d’

une façon qui parais

sait étrange aux assistans . La fête s’

acheva. Hauskuld

ne fit pas attendre le paiement de la dot de sa fille ;il di t aBrut , son frère : Ne ferai—je point quelques

présens en plus ? Brut lui répondit : Non , cela

suffit maintenant le j our pourra venir où tu auras

encore à payer au sujet d’

Halgerda .

Thorvald partit après la noce pour retourner chez

lui avec sa jeune femme ; le soir , Halgerda s’

assit

auprés de lui, mais elle fit placer Thiostolfde l’

autre

côté près d’

elle . Thiostolf et Thorvald échangèrent

peu de paroles ensemble cet hiver la.

Halgerda était a la fois prodigue et apre i l lui fal

lait tout ce qu’

elle voyait aux autres dans le voisinage ,et tout ce qu

elle avai t entre ses mains , elle le gas

pillait . Aussi , quant vint le printemps , les provisions

manquèrent . Halgerda vint à Thorvald et lui dit : Il

ne s’

agit pas de rester ainsi tranquil le dans ta mai

son car voici que la farine et le poisson sec font dé

faut . Je n’

ai pas , répondit Thorvald , fait la provi

sion moindre cette année, et elle a touj ours suffi

jusqu’

à ] eté . Qu’

y puis—je faire , reprit-el le , si

vous viviez , ton père et toi, comme deux ladres ?

Thorvald irri té la frappa rudement au v isage, puis

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il appela ses hommes , et ils s’

en allèrent aux îles

chercher du poisson sec et de la farine . Pendant

ce temps Halgerda s‘

assit devant sa porte ; elle

paraissai t fort abattue . Quand v int Thiostolf

i l remarqua les traces que portait son visage :

Qui t’

a fait ce mauvais coup ? dit—il. Mon

mari , et tu n’

étais pas là pour me secourir ; peut

être d’

ai lleurs n’

as-tu nul souci de moi ! Je ne

savais rien de cela , reprit— il, mais je vais te ven

ger. Il courut aussitôt au rivage et prit un bateau

à six rames . Il avait en main sa grande hache à poi

gnée de fer. Arrivé aux îles , il y trouva Thorvald

occupé à charger les provisions que ses gens lui

apportaient ; il sauta dans son bateau, mit la main

avec lui au travail et , aprés un moment : Tu ne

vas ni v ite ni bien à la besogne , dit—il. Crois—tu

faire mieux ? dit Thorvald Il y a du moins une

chose que je ferai mieux . Mal mar1ee est la femme

que tu as prise , et il est temps que je vous

sépare . En entendant ces mots , Thorvald saisit

un couteau de pêche ; mais Thiostolf avait levé

sa hache qui, en retombant , déchira le bras et

fi t tomber l’

arme . D’

un second coup de hache ,il frappa la tête de Thorvald , qui expira . Tout

aussitôt Thiostolf se pencha hors du bateau ,

en défonça deux planches , et sauta sur sa bar

que. Au moment où les hommes de Thorvald arri

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vaient, la sombre mer avait englouti l’esq q et le

cadavre il s comprirent bien ce qui s‘

étai t passé ,mais Thiostolf s

éloignait à force de rames sous leurs

malédictions . Quand il revint en brandissantsa hache ,Halgerda était assise au dehors : Ton arme est san

glante , dit—elle ; qu’as- tu fait ? J ’ai fait de tel le

sorte que tu seras mariée une seconde fois . Veux

tu dire que Thorvald estmort ? oui, etmaintenant

songe à ma sûreté . J ’y songe . Va—t’

en vers le

Biornsfiord, chez mon parent Svan . Il te recevra à

bras ouverts , et il est assez puissant pour que per

sonne'

n’

aille te chercher là.

Tel est le premier mariage d’

Halgerda le second

commence en de tout autres circonstances pour finir

de même ou plus tragiquement encore . E lle est

recherchée de nouveau pour sa beauté et malgré de

fâcheux pressentimens . E l le paraît à la réunion de

famil le , et la saga décrit avec soin son costume

manteau bleu, jupe rouge , ceinture aux boucles

d ’argent et longs cheveux épars ; el le s’

engage cette

fois de son plein gré , elle aime , et les premiers temps

de son mariage sont heureux : la naissance d ’

une

fille en est le gage . Pourtant le père nourricier

Thiostolf, d'

abord éloigné , reparaî t elle obtient

qu’

on l’admctte , sauf a lui ordonner, i l est vrai , de

se tenir d ’abord à l 'écart . Ce n’

en est pas moins à

son sujet que s’

engagent bientôt entre les deux époux

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maintes disputes , dans une desquelles Halgerda

reçoit de son second mari un outrage . Il la frappa

au visage, dit la saga ; Halgerda l’

aimait, el le resta

désespérée et toute en pleurs . Thiostolf se présenta

Ne me venge pas , dit-elle , ne te mêle pas de nos

affaires ! Lui s’

en alla grinçant de dépit . On

prévoit ce qui doit arriver ; un j our que Thiostolf et

le mari d’

Halgerda sont ensemble dans la montagne

à la recherche du bétail égaré , i ls se querellent , et

le père nourricier commet un nouveau meurtre . Cela

fai t , i l retourne vers Halgerda : Je ne sais ce que tu

en penseras , dit—il, je l’ai tué .

— C ’

est toi qui as fai t

le coup C’

est moi E l le sourit amèrement et

dit : Certes tu n‘

es pas le dern ier au jeu ! Mainte

nant , demanda-H I , quel est le plus sûr parti pour

moi ? C ’

est d’

aller chez Hrut, le frère demon père

il saura te recevoir. Je ne sais trop si l’

avis est bon ,mais n

'

importe , je suivrai ton consei l . Il monta

aussitôt à cheval , et arriva cette nuit même chez

Brut , qui le Le frère du mort v int ensui te

demander à Hauskuld de lui payer une somme pour

ce meurtre ; Hauskuld lui fit des présens , et i ls se

séparèrent bons amis .

Assurément voilà de rudes peintures , auxquelles

nemanquent parfois ni la vigueurdu trait , ni l’énergie

de l’

expression . Nous sommes en présence demœurs

v iolentes , qui comptent pour peu la vie humaine. La

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femme que l’

auteur de la .chronique met en scène , la

femme dont la beauté fascine et tue , offre un type

vraiment barbare , une physionomie sin istre , que

tempère toutefois ce qu‘

on devine , dans le second

récit , de sa propre douleur ; on prévoit lesmalheurs

qui vont se mul tipl ier autour d‘

elle , et cela sans que

le narrateur nous l ’ait représentée , selon le modèle

antique , comme victime d’

une fatal i té extérieure .

E st— cepourtant unebarbarie obscureet irrémédiable ,celle où nous voyons le mariage institué fortement ,et la femme en possession d

une influence que ses

taleus ou ses passions peuvent tantôt exagérer et

tantôt faire légitimement valoir Sans doute la

coutume de la composition ou du wehrgeld , dont

cespremiers épisodes nous montrent déj à le fréquen t

usage , est la marque d’

un état social très imparfait ,puisqu

il n’

imprime à la peine aucun caractèremoral .

Il faut noter cependant que par ce trait la société

islandaise se rattache à tout un âge de la civili sation

germanique , pour laquel le le wehrgeld a été une

étape vers un progrès meilleur , et une prem1ere

tentative , quoique informe et grossière , pour obtenir

un ordre quelconque et un commencement de loi .

Il y a ici d’

ai l leurs autre chose que le dédommage

ment du tort causé par ce meurtre ; la lo i intervient

en beaucoup de cas pour exercer une véritable

répression au nom de la justice ofiensée : i l y a des

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leurs nez fort,

œ il bleu et vif, j oues colorées , cheve

lure épaisse et bien tombante . Il étai t instruit , actif,doux et patient , fidèle à ses amis , attentif à les

choisir ; il j ouissait avec cela d’

une fortune consi

dérable .

Non loin de là, à Bergthorshvol, habitait Nial , fi ls

de Thorgeir, fi ls de Thorolt‘

. Il était riche et beau de

visage , mais sans barbe . Comme habile juriste , i l

i l n ’

avait pas son parei l . A visé et perspicace , d’

uti le

consei l et prompt à obliger , quiconque le con sultait

dans l ’embarras trouvait en lui un sauveur. S a

femme , Bergthora, était courageuse et honnête .

Nial et Gunnar s etaien t unis d’

une étroite ami tié .

Un j our on vit s’approcher de la côte un navire

venant du Vilc. On appelait ains i le magnifique golfe

où se trouve auj ourd’

hui Gothenbourg, et c’était de

là que sortaient les principaux pirates ou Vikings .

Halvard le Blanc , qui montait ce navire , passa l’

hi

ver chez Gunnar et le pressa de se j oindre à lui pour

quelque riche expédition . Nial appuya ce consei l

Partout où tu paraî tras , dit-i l à son ami , ou te

reconnaîtra pour un homme d’

honneur . Veux

tu, répondit Gunnar , prendre soin de mes biens

pendant mon absence ? Très volontiers . Eh

bien donc , adieu ! E t Gunnar partit en effet

avec Halvard , dans l’

espoir d ’augmenter sa fortune .

Ils visitèrent en pillant les côtes de la Norvège,

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cel les du Danemark et de toute la Baltique . Puis

Gunnar revint chargé de butin et de gloire .

Chacun l‘

accueillit avec j oie, N ial surtout , qu i l

al la visiter d’abord . Au long récit de son voyage,

Nial lui répondit Tu as acquis beaucoup d‘

expé

ricuce assurément , mais il t’

en faut pour l'avenir

davantage encore , parce que tu auras beaucoup

d’

envieux. Mais , répondit Gunnar , j’

en tretiendrai

bonne amitie avec tout le monde . Cela ne sera

pas touj ours poss ib le, et i l faudra quelquefois se

mettre sur la défensive . J ’aurai du moins la con

so lation d’

avoir une bonne cause . Oui , si tu ne

dois pas payer pour les fautes des autres .

Avant de qui tter Nial , Gunnar lui fit des présents

et le remercia d’

avoir administré ses biens ; puis

comme on l'

engageait à aller à l’

A lthing, où sa

renommée accrue ferait céder l’

orgueil de beaucoup

de gens Ce n’

est pas ce que je cherche , dit—il mais

j ’y rencontrerai'

avec plaisir des hommes que j’

es

time .

Gunnar et les siens parurent à l’

A lthing en un si

bel équipage , qu’on vint de toute part les admirer ;

on les interrogea sur tout ce qu’

i ls avaient vu pen

dant leur voyage . Gunnar , répondait , amicalement à

tous et racontait ce que chacun désirait en tendre .

Un j our que Gunnar sortait avec les siens de l’

as

semblée publique , il vit venir à lui une femme bien

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vêtue , qui le salua . Il s’

arrêta et demanda qui el le

était . Je m’appel le Halgerda, répondit—el le , et je

suis fille d’

Hauskuld. E t elle ajouta qu’

elle enten

drait volontiers le récit de ses récents voyages en

Norvège et en Danemark lui de son côté protesta

qu’

il ne refuserai t pas une conversation avec elle

i ls s’

assirent donc , et i ls s’

entretinren t longtemps

ensemble . Enfin il lui demanda,ignorant de ce qui

s ’était passé'

dans l ’île pendant sa longue absence, si

el le était mariée el le répondit que non , mais que

peu d’

hommes oseraient briguer sa main . N'

y

a—t— il donc personne d’

assez bon pour toi Ce

n'

est pas cela , mais je suis difficile . Que dirais- tu

si j’

osais te demander Tu n’

y songes pas . Si

vraiment En ce cas , va trouver mon pére . Gun

nar se rendit aussitôt vers Hauskuld, qui, avec Brut

son frère. lui fit bon accueil . J'

y consens , répon

dit le pére , si ta parole est sérieuse . Cependan t

Brut dit La partie ne me semble pas égale et je

parlerai sincèrement . Tu es brave et géné reux ,Gunnar , et le caractère d

Halgerda a ses mauvais

côtés , nous ne voulons pas que tu sois trompé en

rien C’

est noblement dit à toi , répondit Gunnar ;

je regarderai toutefois comme une marque de peu

d’

amit1e de votre part que vous ne me fassiez pas

entendre vos conditions . J ’ai parlé avec Halgerda,elle agrée ma demande . Brut dit Si tous deux

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tuer . Halgerda dit en en tendant ces paroles I l

me serv ira peu d’

avoir épousé le plus courageux des

Islandais si tu ne venges ceci , ô Gunnar ! Gunnar

à ces mots quitta la table , et l’

entraînant au dehors

Partons , dit—il ; mieux valait rester à la maison et

ne pas venir chez nos amis . Je dois beaucoup à

Nial , et ne serai pas ton marteau . Halgerda en

sortant dit à Bergthora : Souviens- toi que nous ne

serons pas quittes de la sorte ! A quoi Bergthora

répondit que son ennemie tirerait de la peu

d ’avan tage .

Nial et Gunnar possédaient ensemble une forê t

qu’

à cause de leur bonne entente ils laissaient ind i

vise . Chacun des deux amis y coupait selon ses

besoins sans même en prévenir l’

autre . Halgerda ,

apprenant un j our qu’

un des serv iteurs de Nial,

nommé S vart, y faisait du bois comme de coutume ,appela son intendant Kol , qui était depuis long

temps a son service et qu’on redoutait . E lle lui di t

en lui présentant une hache : Je t’ai préparé du

travai l : va t’

en au bois, tu y trouveras S vart.

Que lui dirai— je ? Tu le demandes un meurtrier

comme toi ! tu le tueras . Je le ferai, mais je lepaierai de ma vie . A s- tu peur Ne t

ai—je pas tou

j ours protégé ? J ’en emploierai un autre , si tu ne

l’

oses pas . Kol prit sa hache , monta sur un des

chevaux de Gunnar, et se rendit au bois . La il m it

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pied à terre , attacha son cheval et attendit que

S vart fût prés de lui. Tout à coup , levant sa hache

Il y en a d‘

autres que toi , s ecria—t—il, pour-bien

abattre ! et i l le tua. Aussitôt que Gunnar eut

appris ce meurtre , i l s’

en alla vers Nial : Nous

aurons souvent besoin , dit celui—ci , de nous rap

peler notre amitié . Gunnar paya pour composition

la somme fixée par Nial , et ils pensèrent que cette

affaire était terminée .

On pense bien que Bergthora ne voulut pas être

en reste ; ainsi plusieurs actes sanglans se succé

dèrent ; des deux femmes , l’

esprit de vengeance se

communiquait a leurs parens et a leurs serviteurs ,et, comme dan s les villes italiennes du moyen âge,mais sur une scène plus sombre et plus étroite, les

violences échangées entre les deux familles répan

daient la terreur . Nial et Gunnar seuls , pendant que

tout s’

agitait autour d’

eux et qu’

eux—mêmes étaient

obligés de prendre une part dans les en treprises et

les passions des leurs , ne laissaient pourtant pas

s’

ébranler leur amitié . Après chaque meurtre , ils

conféraient ensemble et s’

acquittaien t équi tablement

l‘

un envers l’

autre , au nom de leur parenté ou de

leur cl ientèle , des wehrgelds fixés par la loi C etait

1 . S ur l‘

importan ce dan s les mœ urs et la législation islan

daises des werhgelds ou amendes pour les meurtres selon la

qualité des v ictimes,v . l

appendice .

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cette amitié si constante , supérieure aux hai nes pri

vees , qui augmentai t la colère et le dépi t d’

Halgerda

elle avait aimé Gunnar, mais sa j alousie l’

emportait ,

et son amour allai t se changer en haine , s’

il ne

se livrait pas entièrement à el le . Le déclin de cet

amour, pui s l eclat de cette haine , sont clairement

tracés dans le récit de la saga pour ceux qui s’atta

chent à en suivre patiemment les détours .

Pour arriver à ses fins et répandre la discorde ,pour perdre Gunnar lui—même avec Nial s

i l le faut ,Halgerda fai t appeler pour habiter auprès d

elle un

des siens , d‘

assez mauvai s renom . Il n ’

appporte

ra rien de bon chez nous , dit Gunnar , touj ours pa

tient et doux , malgré ses prévisions fâcheuses ; mais

enfin je ne chasserai pas de mon foyer un parent de

ma femme : il est mon parent . Bien tôt fasciné , le

nouvel hôte devient le plus actif instrument de la

guerre entre les deux mai sons non- seulemen t il

ourdit les complots , mai s , scalde habile et renommé

il provoque et insulte par ses strophes moqueuses ,

qui courent le pays , les chefs ennemis et leur Nial ,le héros sans barbe , dont il fumera le menton !

En vain Nial ordonne- t— il a ses fils de mépriser ces

gross1eres injures . Un soir, quand il étai t déj à cou

ché , il les entend détacher leurs armes et seller

leurs chevaux . Où allez— vous ? leur dit- il . Père

répond l’

aîné, nous allons rassembler les trou

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l ’accompagner . Déjà le navire était équipé et on yavait transporté les bagages , quand Gunnar al la

visiter , pour leur faire ses adieux , ses amis de

Bergthorshvol. Il prit ensuite congé de tous les

siens , qui reçurent ses paroles avec douleur . Puis ,appuyant sa longue hache

‘ contre terre , i l monta

en sel le et partit avec Kolskeg. A quelque dis

tance , son cheval fit un faux pas ; Gunnar san ta a

terre , et il lui arriva de rencon trer du regard la

vallée et la ferme de Hlidarenda ; et il dit : Cette

vallée est belle , je ne l’

ai jamais vue si belle ; les

grains sont mûrs , les prairies sont fauchées . Je

retourne à Hlidarenda ; je ne partirai pas ! Le texte

est facile à comprendre, et on admirera sa simpli

cité Fogr er hlidin sva at mer hefir han alldri

iafnfogr syn z . bleikir akrar . en slengin tan . ok

man ek rida heim aptr . ok fara hvergi . Kolskeg lui

répondit : Ne donne pas à tes ennemis cette j oie

de te voir rompre sitôt l‘

accord rappelle-toi les

consei ls de Nial . Je ne partirai pas , répéta

Gunnar , et je souhaiterais que tu fisses de même .

Hvergi man eh fara . Oksva villda ck at pu gerdir .

Non , reprit Kolskeg ; je ne violerai pas ma

parole , pas plus dans cette occasion que dan s

toute autre ; tu feras mes adieuxàmes parents et à

1 . A tgeirr, bipenn is , has læ genus prælongæ, disen t les

lexiques .

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ma mère , car je ne reverrai plus l’

Islande ; puisque

« tu vas mourir je n’y reviendrai pas . Ils se sepa

rérent . Kolskegmit à la voile ; Gunnar retourna vers

Hlidarenda. Sa mère vit ce retour avec douleur ;mais Halgerda, sa femme , avec une perfide j oie .

L a peinture n’

est—elle pas achevée Le drame

n ’

est—il pas complet , avec chacun des personnages

in téressants dans son rôle : Gunnar , retenu par les

l iens aimés , et insouciant du péril son frère,ré signé tristement à un perpétuel exil ; la mère.

avec sa douleur inquiète : et la mauvaise épouse,avec son humeur vindicative

A l’

A lthing suivant , Gissur le Blanc réunit tous

les ennemis de Gunnar , et quarante d'

entre eux se

l iguèrent pour lui donner la mort . Ils apprirent , au

commencement de l’

automne, que Gunnar serait

seul a Hlidarenda, tous ses gens devant al ler dans

les iles pour achever lamoisson . Aussitô t il s se ras

semblèrent ; Gissur le Blanc étai t à leur tête. Arrivés

à Hlidarenda, ils commencèrent par tuer, non sans

peine , le chien de Gunnar . É veil lé par les hurle

ment s . celui—ci reconnu aussitôt le danger : On te

traite durement, mon pauvre Sam , dit-il, et i l y aura

pour la fin , peu de différence entre nous deux !

La maison qu’

habitait Gunnar était construite en

bois avec un toit goudronné . Il dormait sous cet

abri avec sa femme et sa mère Banveig. Comme les

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meurtriers n etaient pas encore assurés qu’ il y fût ,

Thorgrim se glissa vers la maison ; mais Gunnar ,apercevan t un manteau rouge qui s

approchait de

la fenêtre , plongea son épée par l’ouverture et la lui

passa au travers du corps . Les autres voulurent le

venger . Gunnar les tient à distance par ses flèches

mortelles , et trois fois il s durent se retirer Il s

s’

élancèren t alors sur le toit et le mirent en p1eces .

Malgré les efforts de Gunnar , un des assaillants

sauta dans sa chambre et lui rompit la corde de son

arc . Gunnar avait déj à blessé huit hommes et il en

avait tué deux il reçut en ce moment deux bles

sures , mais son ardeur n’

en paraissai t que plus

redoutable : Femme , s ecria— t- il en s ’adressan t à

Halgerda pendant qu’

il se défendait avec son épée ,coupe une tresse de tes cheveux ; et toi , ma mère ,fais—en vite une corde pourmon arc

‘ En as- tu

bien besoin demanda . froidement Halgerda.

Ma vie en dépend tant que j’

aurai mon arc ,

ils ne pourront rien contre moi . Je te ferai donc

souvenir du soufflet que tu me donnas naguère,reprit—elle ; va , peu m

importe que tu puisses ou

non te détendre Chacun se rend illustre à sa

man1ero, répondit Gunnar ; je ne te prierai pas

longtemps . Ranveigdit «Vous vous condui sez

mal, ma fille , et l’on parlera longtemps de votre

1 . Page 1 16 du texte islandais de la saga .

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C’

est à dessein que nous n’avons interrompud

au

cun commentaire cette analyse rapide de toute la '

prem1ere moitié de la saga de Nial , afin qu’

el le

apparût au lecteur dans son ensemble , comme un

spécimen de la manière habituel le aux sagas islan

daises et comme un premier tableau des mœurs

scandinaves à la fin du x°s1ecle . N

avions—nous pas

le droit aussi de lui attribuer un certain mérite au

point de vue l i ttéraire et moral ? Ce n ’

est pas assu

rément la bonne ordonnance que nous y vanterons

notre analyse fort abrégée ne doit point a cet égard

faire i llusion : le‘

récit est souvent mêlé, confus ,embarrassé de mil le circonstances indifiérentes ou

obscures ; le chroniqueur va en avan t un peu à la

man iere du conteur arabe , qui ne supprime ni ne

classe aucun souvenir . Cela n’

empêche pas que la

narration,soit par le reflet fidèle d ’

une réal ité

v ivante , soit par une certaine simplicité instinctive

et naïve , n’offre une suite réelle dans la peinture

des caractères ; ceux— là mêmes qui sont sur le

second plan ne manquent pas d’

apparaî tre , pour

qui l it tout l'

ouvrage , dans une lumière qui n’

est

point trop indécise . Bergthora par exemple, la

femme de Nial , bien qu’

el le soit à l ’occasion, elle

aussi , v indicative et hautaine , passe cependant pour

être en général une bonne et pacifique maîtresse de

maison ; elle ne quittera pas son mari , même dans

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l ’extrême danger , au j our de sa mort . Le narrateur

n’

a pas beaucoup à dire a son sujet , mais il sait

faire entendre que ce silence est tout a son éloge .

N ous connaissons Halgerda son prestige funes

te , sa passion capricieuse , tantôt amour et tantôt

haine , forment le foyer qui attire à lui l’

action

entiere tous les désastres accumulés finalement par

el le sont en germe dans cet oblique regard que , dès

le commencement de la saga , son oncle a remarqué

dans sa physionomie d’

enfant . La figure de

Gunnar est très fortement décrite , et de toutes

pièces . On ne doi t j amais oublier que c’

est un

redoutable viking , un de ces rois de mer pour

lesquel s la piraterie apparaît comme une source de

richesse régul ière . Au milieu des guerres privées

qui agitent l’

Islande , nul n’ose accepter le duel

contre lui ses adversaires aiment mieux l’

envelop

per dans quelque perfide procès . Sa force est la

rai son de sa douceur : on l’a vu, ne sachant rien des

aventures passées d’

Halgerda, qui ont eu l ieu pen

dant qu’

il naviguait au lo in , céder à son charme, et

ne vouloir pas après cel a s'

en dédire ; on l’

a vu

opposer une réelle patience et une indulgente bonté

à ses emportemens , maintenir ferm ement ses

liens avec l’

ami qu’ i l consul te et respecte ,

et ne se mêler que malgre lui, après une longue

rés istance, aux combats sanglans d’

alentour. A la

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suite d ’une de ces actions d’

où lui et les siens ,comme à l

ordinaire , sont sortis vainqueurs , il

entend ses compagnons chan ter et se ré j ouir , et se

dit à lui—même : Sui s—je donc moins brave que

ceux-là Commen t se fait- il qu’

après avoir tué jeme

sente le cœur triste et pesant ? Parole touchante

et profonde , non pas seulement à cause du senti

ment tout humain qui l’

inspire , mais aussi pour la

sincérité de l ’aveu , et pour cette nuance délicate de

simplicité en même temps forte et na1ve , qui lui

fait se demander avec étonnemen t s ’il est donc

moins courageux que ceux à qui le meurtre ne

coûte pas . Nous avons dit qu’

en lisant les sagas on

pensait quelquefois a Shakspeare ; n’

est—ce pas ici

un de ces mots qui jail lissent des sources vives et

que le grand poète anglais , avec sa puissance d’

ima

gination et de cœur , a su plus ieurs fois deviner !

A côté du viking Gunnar , Nial d’humeur pais ible

et douce est pour toute la société islandaise le sage

renommé . Il est sage, parce qu’

il est savant en

droit,parce qu

i l connaî t en habile juriste les dispo

sitions , les pièges et les ressources de la loi . Le plus

clair témoignage des troubles violens qui agi ten t

alors l’Islande est que des hommes tels que Gunnar

et lui finissent par être enveloppés malgré eux dans

ces tourbillons de colères et de vengeances .

Mais le plus intéressant est peut—être de suivre à

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sements de ses concitoyens ; c'

est là qu’i l rencon

tre Halgerda, venue à l'

assemblée avec toute sa

famille, et c’

est là qu’

il la demande en mariage . C ’

est

là enfin que se réconcilient , pour un temps et sous

les yeux desmagistrats , les parties qu’

une vengeance

peut—être héréditaire a armées l’

une contre l‘

autre .

Le récit qui précède nous a montré aussi à l'avance

quelques traits du rôle judiciaire de l'

A lthing ; étu

dions—le maintenant sous cet aspect particulier, qui

ne se confond pas avec celui de sa puissance légis

lative. Nous avons dit qu‘

i l exerçait l’

autorité judi

ciaire en réunissant dans son sein les tribunaux les

plus élevés du pays , et nous venons de voir d‘

ail

leurs , dans la premiere partie de la saga de Nial ,l 'exposé des mœurs qui rendaient lmtervention de

la justice constamment nécessaire . Ouvrons à pré

sent le Gragas ; il nous donnera la constitution de

ces divers tribunaux , ainsi que les lois et la procé

dure qui les régissaient ; le tableau des institution s

judic iaires s’

ajoutera ainsi pour“

nous à celui des

institutions pol itiques La saga de Nial , dont nous

ne connaissons encore qu’

une'

partie , nous servira,comme nous l

avons annoncé , de commentaire per

pétuel du Gragas dan s cette nouvel le étude ; cer

taines réformes trés—importantes dans l’

ordre judi

ciaire ne nous seront racontées et expliquées que

par elle ; elle nous introduira , grâce aux récits de

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curieux épisodes juridiques , au sein des tribunaux

islandais du xx“ siècle , dont elle nous fera connaître,

dans l’

intime détail , de concert avec le Gr”

agas , les

règles et la procédure .

Le j our de l’

ouverture de l’

A lthing et en même

temps que le lôgretta inaugure ses travaux législatifs

se forment aussi dans le sein de la même grande

assemblée , suivant le Gragas , quatre grands tribu

naux qui correspondent aux quatre régions de l’ île .

Chacun de ces tribunaux , dits de fiordung ou de

quartier se compose, comme le lôgretta, d‘

abord des

godar établis dans sa circonscription , lesquels ne

jugent pas , mais nomment les juges , survei llent et

dirigent les procès , puis des véritables juges desi

gués par eux entre leur subordonnés . Chaque tribu

nal compte trente- six membres , tro is douzaines , et

la réunion judiciaire en compte ainsi dans son

ensemble cent quarante—quatre , comme la réunion

législative . On trouve nettement définies dans le

Grâgâs les conditions requises pour la nomination

des juges par les godar : ils doivent avoir au moins

douze ans , étre hommes libres , pourvus d’

un domi

ci le légal , valides d’

esprit et de corps , et non engagés

eux-mêmes de quelque façon que ce soit dans un

procès ; i l faut , de plus , qu’

ils aient appris dès

l'

enfance à parler la langue norrène .

Le godi se rendra à l’

ouverture orien tale de7

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l’

Almannagia, dit le Gragas . Il fera asseoir son

juge élu ; puis , prenant deux témoins ou davantage : Je vous prends comme témoins , dira—t— il,

que je désigne cet homme, et il dira son nom ,

pour juger toutes les causes qui seront presen

tées devant ce tribunal aux termes de la lo i .

J’

invite défendeurs et demandeurs à user du droi t

de récusation dans les rangs de ce tribunal ; mai s

celui que j’

ai désigné devra assister au jugement ,à moins qu’ il ne soit légalement récusé, auque l

cas je le remplacerai par un autre . Je nomme à

ce tribunal ; il répétera le nom , et i l aj outera

ce tribunal est, pour ce qui nous concerne, léga

lement constitué .

On reçoit à chacun des tribunaux de fiordung,

dont nous verrons plus tard la procédure , les affaires

que les tribunaux de printemps ou varthings, si leurs

juges n’ont pu être unanimes , n

ont pas vidées ; on

y reçoit aussi celles que tout demandeur a droit d’

y

porter de préférence à la juridiction des varthings .

Si un demandeur et un défendeur appartiennent ades

varthings différents , on comprend que le demandeur

aimera mieux ordinairemen t présenter l'

affaire a

l’

A lthing, où les représentants de tous les districts

se trouvent réunis et où chacune des deux parties

trouvera des vois ins et des amis parmi lesquels

elle pourra choisir ses témoins et ses q‘

dr ; nous

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Hauskuld fut devenu jeune homme , Nial s’

occupa de

lemarier et lui proposala fil le de S tarkad, Hildigunne .

Hauskuld lui répondit : Votre choix sera le mien .

« mon père . Ils se rendirent chez S tarkad : Je

viens pour une grande affaire , dit Nial . Je voudrais

fiancer ta fille Hildigunne . Avec qui ? A vec

mon fils adoptif Hauskuld. Cela demande

réflexion . Qu’

as—tu à dire de ton protégé Rien

que de bon ; il apportera d’

ailleurs assez d’

argent

pour que vous soyez tous sati sfai ts . Faisons

appeler Hildigunne , répond it S tarkad, et voyons

ce qu’

el le en pense . Hildigunne , mandée , se

récrie aussitôt , en disant qu’

on lui avait promis de

ne la marier qu’

à un homme revêtu de la dignité de

godi . Je ne refuse pas Hauskuld, dit-elle , s i on

peut lui procurer un tel titre , mais c’

est ma condi« tion . Nial répondit en demandant un délai de

trois années Hildigunne y consentit .

De retour chez lui, Nial s’

occupa immédiatement

de chercher apourvoir Hauskuld mais nul ne vou

lait se défaire de son godard, et il se trouvait fort

embarrassé .

Bientôt la saison d ete amena l epoqne de l’

A l

thing . La session était chargée d’

affaires . Bon nom

bre de parties consul tèrent Nial , car les Islandais

avaient coutume de recourir, dans leurs procès , a

des jurisco’

nsultes , a des j urispeñti , qui connais

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saient la loi, ses formules et ses ressources , mieux

que ne pouvaient faire les juges appelés par hasard

pour une session ou pour une affaire , et mieux que

les godar eux-mêmes , auxquels n’

incombait , en

réal i té , que la seule mission de diriger impartiale

men t l’administration de la justice . Nial , contre leur

attente , ne donn a cette fois a ceux qui le consul

taient que des avis incomplets , qui n’étaien t de

nature à procurer le succès ni aux défendeurs ni aux

demandeurs . Les causes n’

aboutirent pas , et i l fallut ,au milieu d

un profond désordre , que les plaideurs

se résignassent à s’

en retourner chez eux sans être

accordés .

L‘

année suivante, quand le thing approcha , Nial

engagea les parties à dénoncer leurs causes . Beau

coup lui répondirent que c etait inutile , que per

sonne ne réussirait à être jugé , et qu’ ils étaient donc

préparés à faire valoir leurs droits par la pointe et le

tranchant de leurs épées . Quand Nial les vit excités

de la sorte Il ne faut pas qu’ il en soit ainsi , leur

dit—il. Il se peut qu’ il y ait quelque chose de vrai

dans ce que vous dites ; mai s il n’

est pas bon que

la loi chôme dans un pays . C ’

est a ceux qui con

naissent les lois et qui ont a prendre soin de la

justice d ’accorder les parties et de procurer la

paix . Là—dessus , i l se rendit à l’

A lthing, et , s’

a

dressant eu président et aux autres chefs qui étaient

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présents L ’administration de la justice deviendra

inextricable , dit-il , si nous n’

avons prochainemen t .

d ’

autres tribunaux que ces tribunaux de fiordung,où les causes se compliquent de telle sorte , qu

el lesn ’ont plus d ’ issue possible . Je crois donc qu’ ilserait à propos d

instituer un cinqu1eme tribunal

(fimtardom) devant lequel on poursuivrait toutes

les causes non vidées aux tribunaux defiordung.

Mais le président objecta D ’où prendrez—vous

des juges pour cette cour ? Nial répondit : Don

nons de nouveaux godard a ceux qui nous en

parais sent le plus dignes dans chaque fiordung, et

que ceux a qui cela conviendra viennent s’ inscrire

dans les nouvelles circonscriptions . Soit , dit le

président ; mai s quelles sortes de causes ressorti

ront a ce tribunal Toutes cel les , reprit Nial,

qui traitent des i ll égali tés commises à l’

A lthing,

des faux témoignages et des citations erronées de

témoins toutes celles ayant donné lieu à des

décisions contradictoires tout procès , enfin,

contre quiconque aurai t accepté ou offert de

l ’argent pour séduire le tribunal , ou contre quicoo

que aurait , par ruse , retenu l’

esclave ou le servi

teur d’

un autre . Aux serments prêtés devant ce

nouveau tribunal il faudra réserver le plus de« respect ; chaque serment y sera confirmé par deux

témo ins apportant pour garants leur honneur et

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1 16

Le président , après ce discours , s’

occupa de faire

adopter comme loi cette institution du fimtardom

avec toutes les dispositions proposées par Nial . On

se rendit ensuite au rocher de la loi , et on institua

les nouveaux godard. Nial demanda la parole et dit

Beaucoup de personnes ici présentes savent com

ment mes fils et mes serviteurs ont tué Thraen

S igfussen . Nous avons conclu un accord, et j ’ai

adopté son fils Hauskuld je l’

aurais même déj à

marié , s i j’

avais pu lui procurer un godard, mais

personne ne voulait se défaire du sien . Je viens

vous prier de permettre auj ourd’hui qu’

nn'

des

nouveaux godard soit érigé en son nom , a Hvide

pacs . Tous y consentirent . et l’

on se dispersa .

Le mariage d’

Hauskuld avec Hildigunne fut célébré

peu de temps après .

Tel est , en résumé , le récit de la saga de Nial .

Mettons tout de sui te en regard les termes duGrâg:ts

qui se rapportent au même changement

Nous aurons encore , y est—il dit , un cinquième

tribunal , qui prendra le nom de fimtardom . Il se

composera de neuf juges par fiordung, un pour

chaque ancien godard. Les nouveaux godar nom

meront pour leur part douze juges ; le total sera

ainsi de quarante-huit . Le fimtardom se constituera

aussitôt après les tribunaux de fiordung, et ils

1 . S ection I I I , titre xxxv : Um fim tardom .

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procéderont concurremment à rendre la justice , à

moins que le lôgretta n’

en dispose unanimement

d’

autre façon . Le fimtardom siégera dans l’

enceinte

du lôgretta. Les causes suivantes ressortiront au

fimtardom : faux verdicts de quidr faux témoi

guages et faux serments prononcés devant les

tribunaux de fiordung tentative ou consentement

de corruption ; secours illégaux à des proscrits ou

à des débiteurs devenus les hommes de leurs

créanciers , etc . Quant au mode de nomination des

juges,les godar se rendront tous ensemble au

lôgretta, et chacun d’

eux nommera son juge. Le

godi prendra des témoins Je vous prends comme

témoins , dira—t—il, que je nomme celui—ci (et i l

l'

appellera par son nom ) juge au fimtardom, afin

qu‘

i l juge toutes les affaires qui viendront devant

ce tribunal ; et je veux qu’ il siège , s

i l n’

est pas

récusé je constitue le tribunal conformément à la

loi . Puis il prendra de nouveaux témoins , et il

dira : Je vous prends comme témoins que je prête

serment la main sur le Livre. serment concernant

le fimtardom . Puisse Dieu m’

assister dans cette

vie et dans l ’autre comme je crois avoir désigné

un juge tel, que nul autre homme ou habitant de

ce pays ne remplirait cet office , aux termes de la

loi,mieux que celui—ci , nommé parmi les hommes

de mon district ! Chaque godi , nommant son juge7.

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pourlefimtardom , prononceraun pareil serment .

Suivent des dispositions relatives à la procédure que

nous n’

avons pas à examiner quant a présent .

Voilà les deux textes . On voit que celui du Gragas

n’

ajoute presque rien à celui de la saga de Nial , qui

est le plus ancien . Non— seulement la saga nous

indique aussi bien que le code la composition du

nouveau tribunal , mais elle nous raconte encore à

quelle occasion ce tribunal fut fondé , et le récit

qu’

elle donne est d'

autant plus détaillé , que son

propre héros est le promoteur de cette innovation

jurid ique . Il est bien permis de croire que la saga

augmente à plaisir l’

importance de son héros ; i l faut

toutefois se rappeler, d‘

une part, que Nial exerçait ,comme juriste habile , un notable ascendant aumilieu

de cette aristocratie etdanscette assembléejudiciaire ,dont il fai sait sans doute partie ; d

autre part , qu’ il

n ’y a rien d’

étonnant à voir les Islandais professer

cet esprit pratique dont une partie des peuples

german iques se sont montrés plus tard si vivement

animés,et modifier chaque partie de leur législation

à mesure que l’

expérience de chaque j our leur en

faisait sentir les lacunes ou les vices . Le nouveau

tribunal ouvrit une sorte de nouvel le instance , gène

rale et suprême, au—dessus des justices locales et des

quatre grandes cours de l’

A lthing. Il appela à lui un

certain nombre de causes spéciales, qui se trouvèrent

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crédit sur les populations balancerai t l ’autorité de

l’

assemblée législative et lui ferait échec c ‘était un

germe de décentralisation . Les membres du lôgretta

admirent cette proposition de Nial,dit la saga. En

effet el le laissait intacte leur autorité dans l’A lthing,et , de plus la création de nouveaux godard flattait

une sorte de noblesse inférieure , peut—être les asses

scurs mêmes du lôgretta. Nial proposa aussi de

hom er au banc du milieu , dans l’assemblée legisla

tive, le droit de voter et de faire occuper ce banc par

l’

élection . Cela encore était po li tiquement d ’

une

grande importance . Avant la proposition de Nial les

membres occupan t les trois rangées de bancs avaien t

un droit de vote égal ; i l s’

agissai t de limiter le

nombre des voix , ce qui procurerait . disait Nial , un

meilleur ordre et plus de sûreté dans la délibération

et la résolution mais c‘

était à la condition expresse

de remplacer , sur ce banc du milieu,les anciens

godar, membres inamov ibles , par desmembres élus .

C ’

est ici que Nial voulait porter à. l’

aristocratie des

godar le coup le plus sensible , et c ’est ici qu’

il

échoua . On admi t bien que le droit de voter fût

désormais le privilège exclusif de ceux qui sregeaient

sur les bancs du milieu, et les assesseurs n’

eurent

plus qu'

une voix consultative mais les anciens godar

restèrent en possession de ces mêmes bancs san s

que l’

élection fût admise, et, par conséquent , leur

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pouvoir en doubla . Le résultat fut ainsi tout contraire

aux désirs de Nial . Les destinées ul térieures de la

républ ique islandaise réalisèrent les maux qu’

i l

avait voulu prévenir . Un petit nombre de nobles

réunirent entre leursmains toute la pui ssance . Après

avoir étouffé les l ibertés publiques , ils se divi sèrent ;

quelques—uns d’

entre eux appelèren t au secours de

leur ambition le roi de Norvège , au profit duquel

on vit périr finalement , en 1264 , après de longs

troubles intérieurs qu’

a racontés la S turlunga saga,l’ indépendance i slandaise .

En résumé nous avons vu que l’

A lthing compre

nait,outre une assemblée législative appelée lôgretta,

une assemblée judiciaire , composée de la réunion

des quatre grands tribunaux de l’

Islande , à laquelle

s ’est aj outé en 1004 le fimtardom . Nous avons vu se

complé ter une série de tribunaux fixes et réguliers

créés successivement , avec des juridictions touj ours

plus étendues et , en même temps , plus autorisées

et plus puissantes : d’

abord le tribunal du godi, puis

celui du printemps , administré par tro is godar , puis

ceux des fiordungs , enfin , et au—dessus de tous les

autres , le fimtardom ce dern ier supérieur aux

précédents , non par aucune espèce de hierarchie

établie administrativement et de propos délibéré ,mais à cause de son origine même et des raisons de

son existence , parce qu‘

il étai t destiné à combler

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les lacunes et à réparer quelques-uns des vices de

l ’organisation judiciaire primitive , recevant, par

exemple , les affaires que le principe de l’

unanimité

nécessaire des votes avai t empêchées d‘

aboutir

devant les autres tribunaux , et les achevant gràce à

la règle , établie pour lui seul , de la plurali té des

voix ; ré visant les cas mal jugés , jugeant enfin

spécialement certaines sortes de crimes , comme

pour décharger peut—être les juridictions inférieures .

Les mêmes coutumes et le même ordre régissent à

peu près uniformément tous ces tribunaux ordinaires ,comme nous le verrons plus amplement en exami

nant le détai l de leur procédure . Partout les godar ,

qui représentent l’

E tat, ne font que surveil ler et

diriger l'

administration de la justice ; il s ne jugent

pas eux-mêmes . Partout les juges sont de simple s

citoyens nommés par les godar seulement pour une

session , et nous verrons que ces juges eux—mêmes

n’

ont pas en mains toute la décision dans une cause ;d ’

autres citoyens leur seront encore adjoints , tant

se montrent sans cesse , dans l‘

administration de la

justice suivant l’

ancien droi t islandais , le principe et

l ’habitude du self-governmen t .

Ce génie n eclate pas moins . en dehors de l’

orga

nisation régulière que nous venons d’

étudier , dans

toute une administration de justice locale que

l’

examen des sagas et du Gragas nous révèle égale

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ces tribunaux ; si on ne l’

atteignait pas , l’

affaire était

transportée à un tribunal ordinaire inférieur ou à

l’

A lthing. Nous touchons ici évidemment à l'

organ i

sation primitive de la justice chez les Islandais , àcel le que l ’ institution de tribunaux régul iers a

complétée , mais non supplantée entierement . Un e

des plus anciennes formes que cette justice nationale

ait revêtues se trouve assurément dans le tribunal

du seuil de la maison . qui se tenait aux portes ,durado

m. Le Gragas n’

a conservé ni le nom ni même

le souvenir très-précis de cette insti tution primitive

ou plutôt de cet antique usage ; mais il décrit

longuement la visite domicil iaire à propos du vol ,

qui en était l'

occasion ordinaire . Si le propriétaire

soupçonné ne voulait pas permettre que la perqui si

tion se fit régul ièrement , à l’

abri d‘

une paix jurée

par lui-même , ou si les objets volés étaient trouvés

dans sa maison , les sagas nous attestent qu’

une

sorte de tribunal s improvisait à la porte de cette

maison et jugeait immédiatement . L’

Eyrbyggia saga

raconte que Thorbiôru, à qui on avait volé ses

chevaux, prétendit faire une perquisition chez

Thorarin , qui hab itai t a Mafahlid. Comme celui-ci

refusait de se prê ter à l ’enquête , sous prétexte de

quelque i llégal ité , Thorbrorn institua sur— le-champun duradôm, nomma six juges , et fit condamner

Thorarin comme voleur, ce qu’

il était réellement . Il

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est probable que cette forme de jugement sommaire

s'

appliquait à beaucoup de cas dans la législation

primitive de l'

Islande , mais qu‘

on se hâta de la

restreindre ou même de l'

abolir dès que la loi gagna

quelque crédit , pour mettre fin aux nombreuses

violences qu’

elle devait susciter .

De pare ils tribunaux, improvisés et jugeant d’

a

près la coutume et le bon sens populaire , devaient

décider dans les nombreux différends que fai sait

n aître la vie agricole. Il y avai t le tribunal de la prai

rie , engi—ddm, pour le cas où deux voisins se dispu

teraient la proprneté d‘

un champ ; il y en avait un

autre pour fixer à quel endroit précis devait s elever

la haie destinée à clore un pâturage appartenant à

un particul ier mais contigu a des communaux ; i l y

en avai t pour estimer les biens légués à un mineur,pour déterminer les droits des indigents a l

assis

tance , pour régler enfin les faillites , sans omettre les

droits des créances hypothécaires . tant fut réelle de

très bon ne heure , chez les anciens Islandais , la

complexité des relations civi les et commerciales .

Nous venons d’

esquisser un tableau rapide de la

constitution jud iciaire de l’

ancienne Islande ; nous

avons dit comment cette constitution s’

était centra

lisée touj ours davantage , jusqu a ce qu’

ellerencon tràt

sa p lus haute et sa plus complète expression dans

l'

A lthing ; nous avons montré enfin que cette cen

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tràlisation avait laissé subsister les justices locales .

Recherchons maintenant quels étaient les principaux

caractères de la procédure suivie dans tous ces

tribunaux .

En premier l ieu, il ne faut jamais oublier que , s i

l‘

on parle comme nous parlons ici , de l’époque dont

la saga de Nial retrace l’

histoire , c’

est-à—dire du x°

s1ecle , la procédure n’

est pas écrite . Les caractères

runiques , seuls usi tés dans le Nord avant l‘

introduc

tion du christianisme , ne servaien t guère qu à des

inscriptions ou à de très—courts écrits , loin d'

être

alors d’

un emploi général . De laun recours continue l

et forcé de la procédure islandaise aux témoins .

Leur mémoire et leur loyauté tiennent pour ain s i

dire l ieu de registres et de documents écrits , et le

Gragas prévoit les cas où la mort ou bien des oubl i s

involontaires viendraient mettre obstacle au contrôle

de la vérité . Quelque imparfai t qu’

il fût, ce contrô le

subsista longtemps chez ces peuples , à qui un exer

cice constant de la mémoire avait fait de cette facul té

un instrument plus perfectionné sans doute et plus

sûr que nous ne saurions l‘

imaginer.

Secondement , bien qu‘

el le ne soit pas écrite , la

procédure islandaise estextrêmement compliquée , de

formules dont il ne faut pas citer à faux une seule

expression , de marches et de contre—marches dont

on doit posséder a fond la tactique difficile. Cette

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fut seulement exilé pour treize ans . Cette vengeance

parut médiocre pour un personnage aussi considéré

que l'

était Arnkel, et ceux qui avaient alors en main

le gouvernement de la république décidèren t que

désormais nulle poursui te ne serait plus confiée n i

aune femme , ni à un jeune homme âgé de moins de

seize ans . La législation i slandai se resta, surce po in t ,fixée de la sorte . D

après le même sentiment , s i

l’

accusateur désigné par la loi est disposé à conclure

un accord dans une affaire criminelle , mais que le s

autres parents , oumême un seul d’

entre eux, aimen t

mieux poursuivre , ce dernier avis l’

emporte , car il

est plus honorable aux yeux de la loi d’

obten i r

vengeance pour l‘

injure faite à un parent , cette

vengeance fût-el le obtenue par la voie des tribunaux

et non par la violence , que de se contenter d’

une

simple compensation . Il est, d’

ail leurs , interdit (mais

c ’est une prescription rarement observée ) de conclure

un accord dans une cause importante sans l‘

inter

vention du tribunal .

S’

i l n ’y a pas de demandeur désigné par la lo i , ou

s i le demandeur légal s’

abstient ou se trouve empê

ché , le premier venu , comme i l arrivai t à Sparte

dans les causes criminelles , peut s’

emparer de la

plainte . Il y a , d’

ai lleurs , à défaut de poursuivant

légal , une sorte de ministère publ ic , puisque , dans

le repp ou canton , cinq propriétaires , nommés par

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leurs concitoyens où par le sort , Son t chargés de

poursuivre devant le tribunal local les dél its et

crimes commis dans leur peti te circonscription

les godar eux—mêmes ont, d’

ailleurs , le droit et le

devoir de ne pas laisser sans poursui te les crimes

importants ,‘

alors même qu’ils ont pour auteur

quelqu’

un de leurs collègues . Si l’

accusateur

légal se sent inhabile , la loi lui permet de transmet

tre sa cause a un légiste expérimenté , concession

nécessaire en présence d'

une procédure compliquée ,qu

’ i l faut connaitre et appliquer avec une entrere

rigueur .

Une poursuite criminelle s’

ouvre par la citation

de l ’accusé , que l’

accuSateur somme par—devant

deux témoins d‘

avoir à comparaître, dans un délai

fixé, devant tel tribunal . La ci tation , dit le Gragas ,doit mentionner le nom , le domicile, la profession

de l‘

accusé , le nom de son père ,'

qui tient lieu du

nom de famille , l’

objet de la plainte , le lieu , l’

heure ,les circonstances du crime , enfin la peine requise .

C'

est , d’

ordinaire , au domicile du prévenu que doi t

se faire la citation ; le Gragas contient à ce sujet des

distinctions mul tipliées et préci ses . Un j ournal ier ou

un homme de service recevra la ci tation dans le l ieu

où i l aura rés idé quinze j ours au nroins pendant la

saison dern ière , on bien , à défaut d‘

une aussi longue

résidence, dans celui où i l aura passé tro is nuits au

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moins . Un pêcheur sera cité dans la cabane'

où il

habi te avec ses camarades auprès du rivage ; un

matelot descendu à terre le sera à l’

endroit mêmedes pieux auxquels viennent s

attacher les câbles

de son bâtiment.

En même temps qu’

i l fait par—devant témoins sa

citation , l’

accusateurdésigne neufpersonnes voisines

du lieu où le crime s ’est commis , lesquel les son t

chargées de vérifier les fondements de l ’accusation

pour exprimer plus tard devant le tribunal leur avis

concernant la culpabilité de l’

accusé . Ce sont les

quidr, dont nous examinerons tout à l’heure le rô le

en détai l .

Ces mesures préparatoires une fois prises , vien t

la session de l’

A lthing. La Cause est portée devan t

celui des quatre tribunaux de la grande cour judi

cis ire dans le ressort duquel l’

affaire s’

est passée .

L’

accusateur, avant même que les tribunaux soien t

installés et ouverts , publie sa cause du haut de la

Montagne de la loi ; elle prend rang de la sorte

parmi cel les qui devront être jugées dans la session .

Nous avons dit que les tribunaux de f’

A lthingavaient

des juges nommés par les godar mais les parties

peuvent les récuser les godar sont tenus de

remplacer immédiatement ceux contre lesquel s la

récusation est admise .

Le tribunal est installé ; les demandeurs sont

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— 132

dans l‘

arsenal des formules légales celles auxquel les

son adversaire répondra le plus difficilement , et à

lui tendre même , s’i l est possible, quelque embûche

juridique dont ce dernier ne saura pas éluder le

péril . La cause une fois exposée par le demandeur,i l introduit ses quidr, invi te le défendeur à exercer

son droit de récusation contre eux, leur fait pronou

cer leur verdict et requiert ensuite son adversaire

de présenter sa défense .

Le défendeur s‘

avance alors . Il est rare qu’

il fasse

défaut , car il n’y a pas de honte , suivant les mœurs

et aux yeux mêmes de la loi , à avoir tué un homme ,s i l’on prouve qu

’on a fai t que repousser ou punir

une injure méritant la mort , et les mœurs ainsi que

la loi reconnai ssent beaucoup d’

injures de cette sor

te . Bien plutôt le meurtrier serai t tenté de se vanter

publiquement de cc -qu’

i l a fait . Le défendeur com

rnence par accomplir les mêmes formalités que le

demandeur a accomplies . Au préalable i l a , lui aussi ,désigné ses quidr, et i l les a fait asseoir près du tri

bunal . Il prête serment de loyauté , ce qui n’

empêche

pas que , loin de songer tout simplement a se recon

naître coupable , s’

il l’

est en effet , i l s'

applique

d’

abord à présenter les objections capables d’

anéan tir

la poursui te , à récuser , s’

i l peut tous les quidr de

de son adversaire , et à préven ir ainsi les effets de

l ’avis qu’

ils pourraient exprimer , à trouver enfin

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quelque vice de forme par où l’

accusation offre un

cas de nul l i té . S’

i l ne peut d’

auéune façon anéantir

les opérations de son adversaire , alors seulement il

se détermine à repousser l’

accusation en démontrant

à samanière son innocence , et il produit ensuite ses

quidr, qui viennent exposer leur avis pour ou contre

lui. L e défendeur lui-même n’

est pas interrogé ; nul

ne tente d’

obtenir son aveu, de le convaincre , de lui

arracher la vérité .

Chacune des deux parties a plaidé ou plutôt con

dui t sa cause sur la tête d’

un des juges , dit le Gra

gés c‘

est—à dire que chacun , en prononçant ses for

mules , s’

est adressé spécialement à un des juges du

tribunal , et même , à ce qu’

i l semble , en posant les

mains par derrière sur ses épaules ou en se plaçant

immédiatement devant lui. Les deux juges auquel

on s‘

est adressé doivent , après que le demandeur et

le défendeur et leurs quidr ont été entendus , repren

dre la cause et en faire deux résumés , l’

un énumé

rant les formal ités remplies , les arguments et les

moyens de droit employés par le demandeur , l’

autre

ceux dont le défendeur s’

est servi .

C’

est ensuite à l’

ensemble des juges nommés par

les godar à prononcer le jugement , non sans tenir

compte , pour former leur av i s , de l‘

opinion expri

mée par les quidr. L’

unan imité des voix est, comme

nous l‘

avons dit , nécessaire dans tous les tribunaux,s

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excepté le fimtardom. Si , elles se trouvent partagées

également ou divisées suivant plusieurs avis , les ju

ges quittent leurs places et se divisent en groupes .

Chaque parti cherche alors , en affirmant que sa pro

pre décision est la bonne , à attirer tous ses collègues

à lui. Si , par ces moyens fort élémentaires , aucun

d’

eux ne peut triompher et emporter le vote , un au

tremoyen , tout auss i primitif, est invoqué . Le juge

qui a été rapporteur au nom du demandeur déclare

le défendeur -coupable , et c’

est une nouvelle expé

rience pour voir combien de ses collègues l’

appuie

ront ; mais , aussitôt après , l’

autre rapporteur fai t la

Won tre—épreuve en déclarant le demandeur non rece

vahle , et l’

on voit de nouveau combien de juges vo

tent avec lui . Si le résultat reste lemême, le deman

deur et le défendeur se renden t sur la Montagne de

la loi ; chacun d’

eux réclame la peine de l’

exil con

tre les juges qui l’

ont condamné , et la cause est por

tée devant le fimtardom . D ans le cas où les juges

sont unanimes , leur sentence , qui sera souveraine ,est prononcée par un des rapporteurs, par celui de

la défense si l’

accusation est mise à néant , par celu i

du demandeur si la plainte est admi se : Je pense ,doit- il dire , que nous jugeons bien en jugeant ain

si,

et i l dit la sentence i l aj oute Nous jugeon s

tous de la sorte ; et tous les juges ses collègues ex

priment leur assentiment . Quelquefois un accord est

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ments , de ruses judiciaires , de répliques et de do

pliques tout le développement de la procédure dont

nous venons d’

esquisser les principaux «traits nous y

apparaîtra .

L e développement des guerres privées qui divi

saient les familles de S igfus et de Nial avait amené

un grand désastre . Les fils de S igfus avaientmis le feu

a la demeure de Nial , et i l avai t péri dans les

flammes avec sa femme Bergthora et ses fils . Kaare ,son gendre , y avait cependant échappé . D e concert

avec ceux des parents de Nial qui n’

avaient pas été

atteints , il poursuivit lesmeurtriers devant l’

Althing.

Il se chargea pour sa part de porter plainte contre

Flose , qui avai t tué de sa main Helge , fils de Nial .

Attachons-nous a cette seule action , et voyons à

quelle longue procédure elle donna lieu.

Le demandeur ayant transmis son action aMoerd,

habile légiste et puissant par sa clientèle , celui—ci

dénonça la cause de la façon suivante il convoqua

neuf quidr, voisins du l ieu où le crime avait été

commis ; il les appela par leurs noms et leur dit

Je dénonce Flose Thordsen comme ayan t pratiqué

sur Hel ge , fils de Nial , blessure de téte ou blessu

re du bas-ventre ou blessure attaquant la moelle ,blessure mortelle et qui a été suivie de mort . I l

devait sans doute se contenter de prononcer ainsi

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tout d’

abord la formule générale, sauf à préciser

ensuite , dans le cours des débats . Il aj outa : Je

dénonce la cause en présence de ces quidr, et

il les désigna par leurs noms . Je dénonce denen

ciation légale , je dénonce pour celui qui m’a

transmis la cause . Puis il assigna les quidr à se

rendre au prochain Althing , afin d’y déclarer si

Flose Thordsen avait ou non commis le crime dont

il l’

accusait . Quand on fut à l’

A lthing, Moerd se

présen ta sur la Montagne de la loi (chapi tre cxr.u dutexte is landais , p . prit des témoins et dit : Je

dénoncé l’

agression prévue par la loi que Flose

Thordsen a effectuée contre Helge Nialsen , à qui

i l a fait blessure de bas—ventre ou blessure

attaquan t la nroelle , blessure mortelle et qui a

entraîné la mort ; et je dépose l’avis que , pour ce

crime , i l soitcondamnéàl’

exil, devenantsansrefuge,sans abri , sans secours d

aucune mamere ; ses

biens étant forfaits , moitié pour moi , moitié pour

les juges du fiordung de l’

Est . Je dénonce cette« cause criminelle pour être poursuivie devant le

tribunal auquel , suivant la loi , el le appartient .

Je dénonce dénonciation légale , suivant la formu

le que la loi prescrit . Je dénonce pour la pour

suite avoir lieu pendant cette session et le chati

ment atteindre pleinement Flose Thordsen . Je

dénonce la cause qur m’

a été légalement transs.

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mise . Il se tut, dit la saga ; de bouche en bou

che on répéta sur la Montagne de la loi que Moerd

avait b ien et bravement parlé . Il reprit la paro

le, redit la formule , en s’

adressant directement cette

fois à Flose ; puis i l s’

assit . Flose l’

avait écouté avec

une attention profonde ; l’action étai t désormais

introduite .

Flose , de son côté , avait transmis sa cause à un

légiste habile nommé EyolfBoelverksen . De retour

dans sa tente , Flose lui demanda si , contre l’

accu

sation ainsi posée , il trouvai t quelque échappatoire.

E n voici une, répondit Eyolf. Il faut aliéner ton

godard, le transmettre à. ton frère Thorgils , et te

faire recevoir dans la circonscription d’

A skel, fils

de Thorketil. Si ton adversaire n’

est pas informé

de ce changement de résidence, il poursuivra de

vant le tribunal de l’

E st au l ieu de poursuivre de

vant celui du Nord , et son action cessera d’

être

légale tu pourras alors l’

accuser to i-méme et le

ci ter devant le fimtardom pour s’

être trompé de

« tribunal . Si les autres moyens de défense nous

manquent , nous nous servirons de celui- là . Flo

se suivit ce conseil sans que la partie adverse en

apprit en effet un seul mot , et la poursui te se trou

va de la sorte'

grevée au préalable d’

un motif légal

de null ité .

Le j our venu où les débats devaient s’

ouvrir, on

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ou attaquant lamoelle , blessuremortel lequ’

a suivie

la mort de Belge . J ’ai déclaré qu’ il avait, pour ce

crime , encouru lapeinede l’

exil , devenusansrefuge ,

sans abri , sans secours d‘

aucunemanière, sesbiens

étant forfaits , la moitié pour moi , la moitié pour

les ayant droit du fiordung de l’

Est. J’

ai dénoncé la

cause devant le tribunal auquel , suivant la lo i , elle

appartient . J ’ai dénoncé dénonciation légale , sur

la Montagne de la loi , suivan t la formule consa

crée. J’

ai dénoncé pour la poursuite avoir lieu

dans cette session et le châtiment atteindra pleine

ment FloseThordsen J’

ai dénoncé la cause qu i

m’

avait été transmise . Je me sui s servi , dans la

dénonciation de la cause , des mêmes termes que« je viens d

employer pour son exposition . Cette

cause en traînant l ’exil , je l‘

expose ici telle qu’

el le

est devant le tribunal de l’

E st sur la tête de Jon ici

présent . Moerd introdui sit alors les quidr qu’

i l

avait convoqués . Prenant des témoins , il dit

J‘

invite les neuf quidr que j’

ai désignés pour cette

cause à prendre place a l’

ouest du rivage (sur un

des bords de la riv iere Oxara) , et j’

invite mon ad

versaire à dire s’ il a des objections à faire valoir

contre eux. J”

en fai s l‘

invitation suivant les termes

de la loi , en présence du tribunal , et de telle sorte

que les juges m’

entendent à travers cet espace . Je

prends témoins comme quoi j’

ai produit toutes les

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preuves requises . La partie adverse s’

avança

alors Eyolf prit des témoins et dit Je récuse ces

deux quidr il les nomma par leurs noms et par

ceux de leurs pères je les récuse par cette raison

qu'il s sont parents de Moerd qui poursuit la cause,

motif de récusation prévu par la loi . E t se tour

nant vers eux Aux termes de la loi , dit—il, vous

n‘

êtes pas quidr légaux examen légal a été fait de

vous . Je vous récuse d’

après le droit de l’

A lthinget

la loi du pays . Je vous récuse dans la cause qui

m’

a été transmise par Flose Thordsen .

En entendant ces mots , la foule des assistants

s‘

écria que la poursui te venait de subir un grave

échec , et l’on s

accorda adire que la défense était

p lus habile que l’accusation .

Moerd, embarrassé, envoya demander conseil à

Thorhall, qui avai t la réputation d’être fort expert .

Un messager exposa en détail comment Flose pa

raissait avoir récusé justement deux des quidr.

Thorhall répondit : Votre cause n’

est pas perdue

pour si peu i l faut dire à Flose qu’on ne se

laissera pas imposer par ses tracasseries mala

droites ; avec toute sa prudence , Eyolf s’

est abusé .

Pars au plus vite . Que Moerd se présente au

tribunal et qu’

i l prenne des témoins de l’

illégalité

de leur enquête ; et il lui dit en détail comment

il devait se conduire. Après le retour du messager,

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Moerd se présenta au tribunal , prit des témoins et

dit : Je déclare il légale l’

enquê te faite ici par Eyolf

parce qu’

il n ’a pas eu égard au vrai demandeur ,mais bien à celui à qui la poursuite a été trans

mise . Il se rendit ensuite vers les quidr, fi t

asseoir ceux qui s etaient levés pour s’

en aller , e t

les déclara dûment et légalement nommés .

E t tout le peuple prononça que Thorhall lui avai t

été là d'

un bon secours , et que la poursuite l’

em

portait à cette heure sur la défense .

Flose dit à Eyolf Penses- tu qu’ ils aien t rai son

Oui,répondit—il, et nous nous sommes en effe t

fourvoyés . Mais nous al lons essayer d’

un autre

moyen : Je récuse ces quidr, dit— il à haute voix ,et i l les désigna par leurs noms , parce qu

i ls son t

métayers et non pr0pr1etaires . Je ne leur recon

nais pas le droit de siéger dans le tribunal ; une

enquête légale et régul ière les a frappés . Je les

récuse d’

après le droit de l’

Althing et la loi du

pays .

L ’

assemblée dit alors que la défense al lai t mieux

à présent que la poursuite on donna beaucoup de

louanges a Eyolf, et l’

on pensa que personne ne

pouvait rivaliser avec lui pour la connaissance

parfaite des lois .

Informé de ce nouvel incident , Thorhall demanda

si ces deux jurés étaient donc des mendian ts et en

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on envoya demander au président de l’Althing, à

Skapte lui—même , si c etait réellement justice .

Skapte répondit qu'

en effet c’

était conforme à la loi ,bien que peu d

’hommes en fussent instrui ts .

Eyolf ne se découragea pas : Je récuse quatre

de ces quidr, dit—il, parce qu’ ils ne sont pas les

témoins les plus voisins du lieu du meurtre .

Vous n ’êtes plus en nombre légal pour vous

prononcer , dit— il aux autres , et votre devoir es t

de le déclarer quand on vous appellera devant le

tribunal . Eyolf comptait beaucoup sur ce nouve l

argument , et, de bouche en bouche. on répéta dan s

l ’assistance que la défense paraissait l‘

emporter sur

la poursuite .

Voyons,dit Moerd, ce que Thorhall pensera de

leur nouveau moyen ; i ls ne doivent pas se réj ou ir

prématurément ; Nial a affirmé plus d’

une fo is

qu’ il avait instrui t Thorhall de telle sorte qu’

il se

montrerait bien , au j our'

de l epreuve , comme le

plus habile jurisconsulte . On envoya dire à

Thorhall ce qui était survenu . Sans y longtemps

réfléchir, i l répondit : Nos adversaires seront bien

heureux si cela ne tourne pas à leur trente . Que

Moerd prenne des témoins et qu’

i l affirme , sous

serment, que le plus grand nombre de ses quidr

sont nommés légalement ; il produira ensuite les

témoins devant le tribunal , et, de la sorte , il aura

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réservé la cause ; pour chacun des quidr mal

nommés , il payera trois mares ; on ne peut le

poursuivre a ce sujet dans cette cession de l’

A I

thing . Conformément à cette réponse Moerd pri t

témoins,affirma sous serment que le plus grand

nombre de ses quidr étaient légalement nommés, et

dit qu’

il avait de la sorte réservé la cause .

D ‘

une voix unan ime , l’

assemblée s'

écria que

Moerd avançait habilement, mais de Flose et des

siens on disait qu’ il s ne commettaient plus qu

errenrs

et qu’

illégalités .

Flose demanda de nouveau aEyolf si Moerd étai t

dans son droit . Eyolf répondit qu’

i l ne le savait pas

au juste , et que le prés ident de f’

A lthing en décide

rait . Skapte, consulté de nouveau, parla ainsi : Il

y a plus de juristes habiles que je ne le pensais .

Voilà, s’

i l faut le dire, un dern ier argument qui

est de toutes les façons fort légal , et nul n’y peut

contredire . Pourtant je croyai s être le seul à le

connaître depui s que Nial estmort ; je savais que,de son vivant , lui seul en était instruit .

Moerd ayant de la sorte écarté toutes les objec

tions qu’

on avai t dirigées contre les quidr par lui

désignés , i l les requi t de déposer leur opinou

devant le tribunal . Un d'

eux s’

avança et prononça

ces paroles , que tous confirmèrent ensui te d'

un

commun accord : Nous avons été convoqués ici,

9

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dit-il , par Moerd, pour venir déclarer si Flose

Thordsen a commis contre Belge Nialsen l’

agres

sion prévue par la loi , dans le lieu du meurtre , là

où ce même Flose a blessé Belge d'

une blessure

de bas—ventre ou attaquant la moelle , blessure

mortelle et qui a entraîné la mort d’

Helge . Moerd

nous a requis d ’employer tous les termes légaux

devant le tribunal et tels qu’ i l appartient à la

cause,Il nous a requis en vue de la cause qui lui

a été transmise . Nous déposons donc notre ser

ment et notre témoignage d’

un accord unanime .

Nous témoignons contre Flose ; nous le déclarons

atteint et vaincu. Nous déposons ce témoignage

devant le tribunal de l’

Est sur la tête de Jen , ains i

que Moerd nous a requis de le faire . Tel est notre

témoignage . Cela dit , le chef des quidr reprit e t

déposa encore contre Flose, en se servant de la

même formule que la première fois . Ensuite Moerd

se présenta lui—même , et prit des témoins comme

quoi ses quidr avaient rempli leur office et con

damné Flose . Prenant de nouveau des témoins , il

dit : J’

invite Flose Thordsen , ou tout homme

ayant accepté légalement sa défense , à présenter

cette défense dans la cause que je lui ai intentée ,car toutes les preuves requises par la lo i de la

part de l’

accusation viennent d’

être produites ,ainsi que tous les témoignages nécessaires . Je me

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ressortissaient , nous l’

avons dit , les causes de cor

ruption ; il assigna Eyolf et Flose comme coupable s

de ce crime : Eyolf, pour avoir accepté un riche

bracelet en vue de cette cause ; Flose pour l’

avo ir

offert . Le danger était de nouveau fort grand pour

ceux-ci ; Moerd exposa cette nouvel le cause à peu

près comme i l avait exposé la première ; il produis i t

ses témoins et ses quidr ; le juge rapporteur résum a

tous ses arguments . Flose se croyai t perdu ; il se

retourna vers Eyolf Quelle ressource nous reste

t-il ? Jusqu’ ici Moerd est inattaquable mais atten

dons un peu je pense qu’ i l va se fourvoyer sur le

nombre des juges qu’ il doit récuser . Il va rejeter

« six des quarante—hui t juges nous n’

userons pas

du même droit ; peut—être alors oubliera—t—il d’

en

« rejeter six autres . Or trois douzaines seulemen t

peuvent juger , et non pas trois douzaines et demie .

S ’il commet cette omission , sa poursuite n e

sera pas valable . Moord tomba en effet dans ce

p1ege , dont il s’

aperçut trop tard . S es partisans et

lui—même perdirent alors patience . Thorhall le

légiste qui l’

avait assisté pendant tous le procè s ,s’

élança de son srege , dit la saga , la lance à la main .

Il courut au tribunal . Il aperçut Grim le Rouge ,paren t de Flose , et l

étendit mort . Kaare dit à

A sgrim : Voi là ton fils Thorhall'

qui a déj à tué un

de nos ennemis ; ce serai t une honte si lui seul

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avait le courage de venger nos injures ! Il n ’

en

sera pas ainsi , répondit A sgrim marchons Contre

eux ! Au même instant on en tendi t retentir de

toutes parts le cri du combat . Flose et les siens

étaient déjà prêts , eux aussi , à l‘

attaque ; chaque

parti s’

excitait abien agir, et la mêlée s’

engagea .

Tel est le récit de la saga ; elle nous dévoile à

merveille ce qu’

il y avait de rusé et de retors dans

les mœurs juridiques des anciens Islandais , et elle

ne sort pas non plus de la réal ité en nous montrant ,comme il arrivait bien des fois , un long procès

terminé tout à coup par la force ouverte , a laquelle

les patients efforts de la lo i n’

0pposaient encore

qu’

une barriere impuissante . Nous aurions pu em

prunter à la saga, moins facilement toutefois la

narration d’

un procès civi l les affaires criminelles

y abondent davantage , et leurs débats passionnés

nous oflraient plus naturellement un tableau du

développement à peu près entier de la procédure

islandaise ; les affaires civiles , sous l’

empire de la

coutume et des mœurs , étaient , en général , vidées

assez obscurément dans les juridictions locales ; si

el les arrivaient jusqu a l’

A lthing, el les prenaient une

importance qui manquait rarement d‘

exalter les

passions , d'

entanter quelque guerre privée , et de les

faire dégénérer ainsi en causes criminelles .

On est obligé de reconnai tre que les textes qui

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précèdent, celui du Gragas et celui de la saga, ne

d issipent pas tous les nuages pour qui aspire à

comprendre la procédure suivie devant les tribunaux

i slandais . Par exemple , parmi les moyens de preuve

judiciaire invoqués par cette procédure i l en est un

qu‘

i l est difficile de mettre complètement en

lumière et de dégager de tout élément étranger ,plutô t sans doute , i l est vrai , par suite de la confu

sion où l’

avaient laissé les Islandais eux—mêmes qu a

cause de la difficulté des textes que nous devon s

in terroger. Nous voulons parler de institution des

quidr comparée à celle des domar ou juges , et dont

l’

obscurité cache peut-être le berceau d’

une grande

et noble institution , celle du jury .

Comme on l‘

a vu par ce qui précède , les quidr

islandais ‘ sont désignés à l’

avance par chacune

des deux parties entre les voisins pour venir

au tribunal dire si l’

accusé est ou non coupable .

I ls n’

arrêten t pas leur Opinion d ’

après un débat

contradictoire et sur l ’audition de tout ce qui peut

contribuer a les éclairer ; mais , avant de venir au

tribunal , il s peuvent avoir fait pour eux—mêmes

une sorte d’

enquête , après laquel le ils sont admis à

déclarer leur avis . Ceux qu’

a nommés le demandeur

1 . L e mo t v ien t de l rs landais kve‘

da dire , prononcer e t

se retrouv e dan s le v ieil angla is quoth he , dit-il . La tra

duction latir.e du Graigzis le s appe lle Veridici

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É videmment chacune des deux institutions , celle

des domar et cel le des quidr, contient quelques

éléments du jury moderne . Les quidr sont pris dans

le vois inage , parmi les pairs de l’

accusé , et i ls

doivent se prononcer seulement sur la question de

fait , c’

est-à—dire sur la culpabil ité du prévenu le

Gragas leur interdit expressément de s’

enquérir de

la loi elle—même , de ses dispositions particulreres

dans les cas dont il s’

agit , en unmotdes‘

conséquen

ces légales de l’

avis qu’

ils croiront devoir émettre .

Ils formen t , pour ainsi parler , un jury d’

examen .

Les domar, de leur côté , sont aussi des pairs de

l’

accusé , des citoyens non revêtus d’

un caractère de

magistrature , et leur avis est souverain ; cet avis est

un véritable jugement , un véritable verdict . Ils

forment un jury de jugement .

Tel s sont les éléments divisés qui, en se réunissant,formeront le véritable jury . S ’ il nous fallait décider

laquelle des deux institutions islandai ses nous

semble avoir été le noyau principal auquel se sont

agrégés les autres éléments , nous dirions que c’

est

l ’ institution des domar qui est devenue le jury . Les

juristes , réunis au godz‘

, nous ont représenté , dans

l ’organisation islandaise , un embryon de magistra

ture ; les domar seront devenus les jurés ; les quidr

seront descendus au rôle de simples témoins les

témoins islandais enfin auron t été remplacés , quand

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l ’écriture sera devenue d’

un usage familier, par les

actes publics dont i ls tenaient simplement l ieu . La

transformation complète ne s’

est peut—être accomplie

pour la prem1ere fois que sur le sol de l’Angleterre

moderne .

Nous venons d ’

étudier dans la procédure islandaise

un premier moyen de preuve judiciaire et légale .

Il y en avait un autre, que les mœurs avaient intro

dui t nous voulons parler du combat singul ier ou

du duel . Fondé primitivement. comme le jury nais

sant , sur des sentiments tout modernes , sur la

susceptib ilité de l’honneur , sur le mépris de la vie ,

sur une confiance narva dans une justice divine ,le duel a fait , comme le jury , son chemin dans les

soci é tés germaniques , où il survit encore . Imposé

primitivement par les mœurs à la loi , celle—ci s’

en

est emparée et l’

a transformé d’

abord en une

institution , c’

est—à—dire qu’

elle en a fait une digue

contre de plus grands désordres , jusqu’

à ce qu’

une

mei lleure discipline sociale lui permit de répudier

un remède devenu lui-même un danger .

Le duel nous apparaît ainsi dans les plus anciens

souvenirs du Nord comme un certain adoucissemen t

à la rudesse générale . Alors même que, sous sa

forme primitive , il semble au premier abord , ne

reproduire que l’exercice de la force brutale , il

reconnaît cependant lui—même certaines lois au nom9.

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des sentiments que nous énumérions tout à l’

heure .

Dès la prise de possession du sol islandais , et

d‘

après les témoignages du Landnama Bok, nous

assistons à la période informe de son premier

développement : Halkel somma Grim de lui céder

son domaine ou d’

accepter le combat . Grim se

batti t et fut tué, et Halkel habita désormais dans

ce domaine . Bioern le Noir, dit une saga ,vint trouver Are fils de Thorkel, et lui posa ces

condi tions : ou de ven ir se battre en duel avec lui

dans une petite île de Surnada1, ou de lui céder sa

femme . Trois nuits après ils combattirent . Are fut

E t la femme , comme tout a l’heure le

domaine , devint légalement la proprié té du vain

queur. Il semble bien ici , on doit l’

avouer , que le

droi t du plus fort s’

est érigé en loi au mépris de

toute justice i l faut remarquer cependant que

l’

agresseur s’

est reconnu obligé d’

accepter un

certain péril et de s ’exposer lui -même en s’

inter

disant la ruse . Bientôt , d’

ailleurs le duel revêt ,chez les peuples germaniques , un caractère de

générosité qu’

i l emprunte à un sentiment de l’

hon

neur plus vif et plus délicat que les anciens ne

l’

avaient connu .

C ’était alors la loi , dit la saga de Gunlaug, en

parlant du commencement du x1° siècle , que tout

homme outragé par un autre exigeât de celui—ci le

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l’

année 934 , É gil et Atle se disputent une part

d‘

héritage . Atle s‘

apprêtant à prêter serment

devant le tribunal , É gil l’

interrompt en disant :

Je ne recevrai pas ton serment . J’

invoque d’autres

lo is : nous combattrons ici tous les deux , dans le

thing même, et le vainqueur restera en possession

de l’

héritage. É gil avait raison , ajoute la

saga ; c’

était un vieil usage et une loi que tout

plaideur eût le droit de s’

en référer au com

bat singul ier, qu’

il fut demandeur ou défendeur,

Atle répondit qu’ i l n'

était pas pour récuser cette

offre, qu’

il aurait pu faire le premier . Ils 10 1gnr

rent leurs mains et confirmèrent ainsi leur mutue l

engagement avec la condition qu’

il s avaient sti

pulée .

Nous avons dit que le duel avait en,dés les

premiers temps de la civil isation du Nord , des

règles qui s etaient transformées en de véri tables

lois . Les sagas ne manquent pas de nous en

instruire : le rendez—vous était assigné d’ordinaire

trois nuits à l’

avance le lieu était une petite île ,telle que les golfes , les fleuves ou les lacs de

l’

Islande en oflraien t en grand nombre de là le

terme qui désignait les combats singul iers , holm

ganga , c’

est-à-dire l’

aller dans une île . Les défi s

survenus au milieu de l’

A lthing se vidaient ains i

dans l’

île de la riv1ere Oxara, depuis les premiers

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temps de la colon isation islandaise . Si les deux ad

versaires arrivaient d’

avance , i ls élevaient des tentes

et dormaient l’

un auprès de l‘

autre , sans craindre

aucune surprise . On marquait le champ du combatpar des baguettes de coudrier fichées en terre ou par

une peau de bête ou un tapis étendu sous les pieds

des deux combattants ; celui qui sortait pendant

l ’action de ces étroites limites avouait sa défaite

pour une espèce particulrere de duel appelé

kerganga , un vaste baquet servait de champ clos .

Avant de combattre , on récitait les lo is du duel ;chacun visitai t l

épée de son adversaire , afin de

s ’assurer qu‘

elle ne dépassait pas la longueur légale ,et qu

elle n’

avai t pas quelque vertu magique ; cha

cun prononçait ensui te contre l‘

autre de terribles

menaces , ou le prenait en pitié en insultan t à sa

faiblesse et en lui promettant le châtiment prochain

qu’ il avait mérité ; ils essayaient ainsi de s

intimider

mutuellement . Celui qui avait été provoqué portait

le premier coup . Si l’un des deux voulait renoncer

au duel , i l l ivrait son épée les braves jetaient à

terre pendant le combat leurs boucliers mais

souven t , au contraire , un esclave ou un ami parait

de son boucl ier les coups destinés de part et d’

autre ;souvent aussi chaque adversaire étai t assisté de

de plusieurs combattants . Les témoins ne faisaien t

sans doute j amais défaut dans un temps où ces

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combats rapportaient de l’honneur , aux yeuxmêmes

de la loi, qui en acceptait les résul tats , .et quand les

familles épousaient les querelles de leurs membres .

Les sagas montrent ces témoins presque touj ours

présents , sans dire si leur présence était rigoureu

sement nécessaire . Le premier sang pouvait terminer

le combat le vaincu payait une amende ou aban

donnai t l’

objet en litige , qui appartenait dés lors

légalement au vainqueur . On voit celui-ci tantô t

obligéde pourvoir à la sépulture du vaincu qu’

il a tué ,tantôt lui couper la tête et s

en faire un trophée . S i

le combat se soutient à forces égales pendant tout le

jour, on l’

interrompt à la tombée de la nui t , on bo it

et on dort ensemble , et on recommence le lendemain .

S’

il persiste tout ce jour encore , et que finalemen t

il n ’y ait pas de vaincu, en conclut un accord légal ,

qui n’

a plus rien de moins honorable que le combat

lui-même , et l’

on devient inséparables amis . Si , au

con traire , l’

un des deux est un lâche , et que par

exemple , il ne vienne pas au rendez—vous en bien

qu’

il emploie la ruse , nen- seulement il est trai té

légalement comme vaincu, mais , en outre , son

adversaire élève contre lui le nidstang ou bâton

d’

infamie , tantôt représentant sa figure même

sculptée dans le bois avec des runes exprimant le

mépris,tantôt surmontée d

une tête d’

animal , signe

à la fois d’

insulte et de malédiction ; celui qui a été

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qui, suivant l’

Edda, les duell istes faisaient de s

vœux . Le bœuf abattu au sortir du combat pouvai t

être un sacrifice soit d ’

actions de grâces envers ce

dieu, soit d’

expiatien envers le génie du l ieu ou

envers les mânes du vaincu. C ’

est, d’ai lleurs , l

’oc

casion de rappeler que le bœuf, suivant les supers

titions islandaises , figurait au nombre des êtres dont

les spectres gardaient les tombeaux .

La saga de Gunlaug nous a rapporté , dans un

curieux récit , à quelle occasion l‘

usage du duel fut

aboli en Islande . Un j our, pendant la session de

l’

Al thing, Gunlaud, qui était récemment revenu

de Norvège , s’

avança au milieu de l’

assemblée et

demanda la parole Rafn , fils d’

Aunund. est— il

rer? dit- i l . Rafn lui—même répondit à son appel .

Tu n’

as pas'

oublié , reprit Gunlaug, qu’

en acceptant

ma fiancée pour femme tu m’

as eflensé . En censé

quence , je te provoque ici même , pour le troisreme

jour, dans l’

î le de l’

Oxarâ , en combat singul ier .

Je t’

attend‘

ais , dit Rafn , je suis prêt et j’

accepte .

Les parents des deux adversaires furent fort trou

blés en en tendant ces paroles mais , nous l’avons

dit c etait alors conforme à la loi que celui qui se

croyait oflensé provoquât de la sorte son rival .

Trois j our après, Gun laugse rendit dans l rle ,

accompagné de son père , lllugi le Noir , et d’

une

foule armée Rafn vint aussi avec son père et de

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nombreux parents ; Skapte , alors président de

l’

A lthing, était avec lui. Dès que Gunlaug eut mis

le pied dans l’

île , il récita ces vers Ile voisine de

l’

A lthing, salut ! me voici prêt à descendre dans

ton arène ; que l’

issue soit heureuse au poète et à

l‘

épée flamboyante du poète c'

est ma prrere .

Qu’

ilme soit donné de fendre jusqu’

aux dents et de

séparer du tronc par le tranchant du glaive la tête

du monstre qui se repaît des charmes de la belle

Belga . Rafn répondit par ces autres vers L’

es

prit prophétique ignore auquel des deux poetes la

fortune sourire . La fauxqui tranche est ai gui sée le

glaive est tiré pour la moisson du sang . Belga la

bel le , destinée à pleurer , en fiancée son fiancé, ou

veuve son époux , apprendra avec admiration les

grands coups du combat , dont la renommée se

répandra dans l’

A lthing. Hermund frère de Gun

laug , lui devait tenir son bouclier ; S verting, fil s

d’

Hafr—Bioern , tiendrait celui de Rafn . Le premier

blessé pourrait racheter sa vie pour trois mares .

Rafn , ayant été provoqué , dut commencer. Dès le

premier coup son épée , engagée dans le bouclier

de Gunlaug, blessa légérement son rival , mais

échappa de sa main . Aussitôt la foule des parents

d’

intervenir mais Gunlaug je le déclare

vaincu,s corie- t- il, car i l est désarmé . C ’

est

toi plutôt , s ecrie Rafn pui sque tu es blessé .

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Gunlaug furieux soutenait qu’

il n ’y avait

rien de fai t encore et qu’ il fal lait recommencer ;

mais Illugi. son père , s’

y opposait . On les força de

se séparer et chacun retourna vers sa tente . L e

lendemain le lôgretta publia une loi nouvel le

abolissant le duel en Islande , sur le consentement

unan ime de tous les chefs les plus puissants et de

tous les hommes les plus sages du pays . Ce duel

de Gunlaug et Rafn fut le dernier qu’on vit dans

l ’île . Tel est le récit de la saga de Gunlaud ; i l

serait facile d’

é tablir , par une comparaison avec les

différents témoignages des sagas , que cet te réforme

importante fut accomplie pendant l’

année 101 1 la loi

qui introduisai t les épreuves judiciaires ou ordal ies ,tel les que le moyen âge les pratiqua suivant le droit

ecclésiastique , celle du fer brûlant par exemple , fut

une de celles que les Islandai s reçurent sous les

auspices d’

Olaf le Sain t, roi chrétien de la Norvège

peu d’

années après l’

abolition du duel et peut—être

pour le remplacer.

Ce n etait pas que les anciens Islandai s n’

eussen t

eu ,pendant le paganisme , aucune sorte d

épreuve

judiciaire . Voici un curieux épisode de l‘

histoire du

droit privé,raconté par la Laxdaela saga , au chapi tre

xvm , et qui démontre qu’

ils employaient aussi ce

1 . V . la n ote 101 à la saga de Gun laud, Bafn iæ, 1775 , in—4

,

p. 1 58 sq . Cf. l‘

His toire ecclésiastique de l'

Islande deF. Johannœus .

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découpée sur le sel ; cette motte de terre eblongue

était érigée en arcade , ses deux extrémités res tan t

fixées à terre ; il fallait passer sous cette arcade ,d

une hauteur convenue , sans la renverser ; les

parens attachaient acette épreuve autant d‘

impor

tance que les chrétiens d’

auj ourd’hui , dit la saga , à

leurs ordal ies . La Vatnsdaela saga nous apprend

que , pour rendre l’

épreuve plus sévère , on érigeait

quelquefois une série de trois arcades , l’

une s‘

élevant

jusqu a la hauteur des épaules , la seconde jusqu’

à

la hanche , la troisième n’

allant que jusqu’au mil ieu

des cuisses ; i l fal lait , en passant par—dessous , n’

en

faire tomber aucune . Suivant la saga de Gisle Surs

soen,une lance en un javelot d

une certaine longueur

soutenait le sommet de la pyramide . Très—probable

ment cc genre d epreuve , fort ancien , n’

était plus

fréquemment usité au temps du Gragas , pui squ’ i l

n’

en parle pe int , et il semble même , d’

après la fin

du récit de la Laxdaela saga , qu’ il n ’

ebtenait plus , de

la part des Islandais , une très naïve créance . Ter

« kil savait bien , dans sa conscience , que le récit de

Gndmnnd n’était pas conforme à la vérité . Auss i

recourut- il a la ruse . Par son ordre deux hommes

feignent de se quereller au moment où l’épreuve

commence , en gesticulant , i ls renversent la bande

de gazon . Aussitôt Torkil et ses amis de souten ir

que l’

épreuve eût sans cela, réussi , et de réclamer

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l'

assentimen t des juges . Finalement Torkil resta

en possess ion de ten te la fortune, excepté les im

meubles , qui n’

en constituaient pas la mei lleure

partie . C‘

étai t ce qu’

on appelait l epreuve du

iardarmen ou de la bande de gazon , fondée , sans

aucun doute , sur lesmêmes sentiments qui servirent

plus tard de base aux épreuves du moyen - âge

chrétien .

Si le Orages ne parle pas du iardarmen , c’

est pro

bablement parce que cet usage judiciaire oommen

cai t à disparaître de son temps , devant les formes

chrétiennes , comme avait d isparu le duel judiciaire

lui—méme la ruse sceptique de Torkil, dans le récit

de la Laxdaela saga que nous venons de résumer ,pourrait bien être regardée comme marquant la

transition entre les deux époques .

Entre toutes les preuves judiciaires enfin , le ser

ment ne devait pas être le moins honoré chez les

peuples qui, comme nous l’

avons vu , avaient le

sentiment de l’

honneur et le respec t de la dignité

humaine . En dehors même des tribunaux , l'

inter

vention du sermen t était fréquente chez les anciens

Islandai s pour consacrer soit des engagements

d’

amitre réciproque , soit des vœux hérorques . Mais

c ’était en justice surtout qu‘

une grande place lui

était réservée ; il tenait l ieu, en bien des cas , de

dernier argumen t légal. Nous avons vu la loi d’

Ulfliot

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le prescrire devant les tribunaux avec une formule

et des apprêts tout rel igieux . La saga de Viga-Glum

nous montre un prévenu obligé , pour se justifier,d

aller déposer dans les trois temples du district le

serment qui doit garantir légalement son innocen ce .

Tous ces témoignages et beaucoup d’

autres que la

lecture attentive des sagas pourrai t fournir, se rap

portent aun temps où la justice et la rel igion étaient

encore étroitement un ies . Dans le Gragas le serment

nous apparaît comme un instrument indispensable de

toute procédure , de sorte qu’

une plaidoirie n’

est pas

valable , s’

il ne l’

a pas à l‘

avance autorisée . Bien

plus , c’

est une formali té que doivent accomplir et les

juges et les quidr et les témoins . Nous l’

avons vu

appliqué de la sorte dans les citations que nous

avons faites de la saga de Nial et du Gragas pour

rendre compte de la procédure islandaise . Ici encore

il revêt des formes religieuses ; mais ces formes

sont empruntées désormais au culte chrétien et non

plus au paganisme .

Nous avons dit que la procédure islandaise ne

comportai t aucun interrogatoire du prévenu , aucune

tentative pour obten ir de lui un aveu. C’

est dire que

les moyens de preuves comme la torture et la ques

tion n’

y étaient point en usage . Le Gragas mentionne

une seule fois la question c’

est contre la femme

qui, devenue mère en dehors du mariage , ne veut

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races . Il sera facile , en étudiant la pénal i té islan

dai se , puis la condition de la femme et de la famille

en Islande , de montrer sous un nouveau j our ce

respect de la dignité humaine et ce sentiment de

l ’honneur dont on a pu distinguer dans les premières

institutions de ces peuples l’

incontestable présence .

En résumé , nous avons essayé , dans cette pre

mière série d’

observations sur l'

ancien paganisme

islandais , qui reprodui t fidèlement l’

ancien paga

n isme scandinave , de rendre compte des idées et

des mœurs sous l’

empire desquelles s‘

est fait l’éta

blissement de ces peuples, puis de retracer le plus

ancien développement de leurs institutions po liti

ques et judiciaires que l’

histoire puis se distinguer .

Sans essayer encore de comparer les institutions

ultérieures de l’

Europe occidentale , nous nous som

mes proposé cependant d’offrir un tableau qui pût

compléter çà et là ou interpréter certaines antiqui tés

communes des peuples germaniques ou angle- saxens

et scandinaves . C ’

est ain si que nous avons sai si déjà ,peut—êtredans leurs formes élémentaires, et lareyan té

et le mâl et quelques traits de la procédure des Ger

mains . Sansdoute c’

est la primitive enveloppedu duel

avantque lesmœurs et l’

esprit modernes l’

aient entiè

remen t consti tué , et c’

est l’

embryon du futur jury que

le Gragas et les sagas nous ont laissé entrevoir . Tout

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aumoins y avait—il un intérêt particulier à décrire,sous le double pe int de vue politique et judiciaire

les mœurs et les institutions de peuples qui sont

venus , pendant le lx°et le x

° siècle , se mêler aux

premiers développements de la secreté européenne,comme aussi à rappeler cette peti te et énergique

société islandaise dont nos livres d’

histoire générale

ignorent , ou peu s’

en faut , l’

existence . Combien peut

être de ces foyers épars où l’

intell igence humaine

s’

est vivement exercée , non sans l’

appui d’

une sell

darité constante avec quelqu'

une des grandes races

historiques ont cependant disparu du souvenir des

hommes , bien que leur date ne soit pas très reculés .

La science doit compter au nombre de ses plus

utiles services de restituer quand elle le peut leurs

titres .

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D e la pénalité dan s les lots islan daises.D u V ehrgeld . D e la pre scription . D e l'exil .

A la base de la société des peuples germaniques ,comme dans la plupart des sociétés primitives , nous

trouvons la vengeance comme un droit reconnu. E lle

se convertit en devoir quand il s’

agit de venger un

parent , un alhe , un ami , un serviteur , un de ceux

qui dépendent de la famille . Le premier effort de la

civil isation sera de chercher un moyen de rétablir la

paix . La coutume bientôt réglée par la loi offrit

celui de la composition le prix offert pour la vie

time, qui est â la fois une amende et un dédomma

gement . Tous les codes d’

origine germanique ont

connu ce genre de pacification . C‘

est le vehrgeld.

Voyons ce qu’

il fût en Islande .

L ’origine même du mot qui, dans les langues

germaniques ,‘

désigne l’or et l’

argent monnayé , geld,paraît être l

idée de compensation et d’

expiati0 n

contenue dans le mot gelten , vergelten . De même les

ancien s Latins employèrent les animaux , pecudes ,comme victimes d

eæpiation avant de désigner la

monnaie par lemot pecam‘

o , et demême aussi lemot10 .

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qui signifie amende dans plusieurs langues anciennes

oumodernes et dans la nôtre même a désigné primi

tivement amélioration et réparation .

Les sagas et le Gragas paraissent ne pas con

naître sous sa désignation ordinaire cette insti

tutien germanique , ils la montrent cependan t

sous sa forme primitive , sous celle d'

une pure et

simple amende , dont le taux n’

est pas encore fixé

par la loi , et dont la coutume fai t par conséquen t

un châtiment plus ou moins sévère , présentan t un

caractère de moralité dont est dépourvu le vehrgeld

fixé et matérial isé tel que nous le rencontron s dans

ce qu’

on appelle les lois barbares . C‘

est là un trai t

curieux de l’

histoire du droit pénal islandais que

quelques citations des sagas ou du Gragas suffiront

à faire ressortir . Ces monuments sont les seuls ,croyons-nous , qui nous fassent connaître l

arbitrage

germanique dans sa forme primitive

On voit clairemen t d’

abord dans les sagas , surtout

dans les plus anciennes , que la composition ne

paraissait pas acceptable pour la mort d'

un trè s

proche parent ; elle eût passé en ce cas pour une

hon te ; un fils venge son père , un père venge ses

fils . il ne vend pas leur honneur et le sien Je

ne veux pas porter mon fils dans ma poche ,répond Thorstein le blanc a celui qui a tué son fil s

dan s une querelle cinq ans auparavan t et qui lui

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176

session de l’

A lthing, il apprend , sans surprise , le

meurtre de Ke l, et Nial lui offre en compensation la

sommemême , enfermée dans la même bourse , qu’ i l

avait reçue de lui ; la saga fait remarquer qu’ i l

l ’avait apportée par prévoyance . Le meurtrier de

Kel paiera a son tour de sa vie le crime auquel il a

été poussé mais i l a son orgueil particulier à

satisfaire et, avant de s'

engager dans ce jeu sanglant ,il a exigé la promesse que s

il y périt on paiera pour

lui le prix d’

un homme libre . Lorsque Gunnar,soucieux avant tout de maintenir son amitié avec

Nial , vient lui annoncer ce nouveau meurtre et lui

offrir compensation , Nial l’

avertit qu’ il est forcé de

lui demander la rançon d’un homme libre . Gunnar

dit que c'

est bien , lui serre la main en signe de paix

et lui compte cent onces d'

argent . La série des

meurtres n ’

est pas finie : c'

est un parent d’

Ha lgerda,

la femme de Gunnar, qui tombe cette fois ; Gunnar

déclare que ce n’

est pas une grande perte car il avait

des raisons de s’

en défier ; cependant i l accepte les

cent onces d’

argent que lui offre Nial , car c’

était un

homme l ibre .

L’

importance des meurtres ira encore croissant ,avec la haine des deux femmes , haine que partagent

bientôt leurs fils et leur parenté ; Gunnar et Nial

essayant touj ours , au moyen du vehrgeld, de rame

ner la paix et de conserver leur amitié au milieu de

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ce tourbi llon de violences . C’

est maintenant le pére

nourricier des fils de Nial qui est tué dans un lâche

guet—â-pens . Quand Gunnar l’apprend il déclare que

rien ne pouvait lui sembler pire . Aussitôt i l va

trouver Nial J’

ai une dure nouvel le à t’

apprendre ,

lui dit— il, la mort de Thord et je viens t’offrir la

composition d’

un homme l ibre . Nial resta silen

cieux nu moment , pui s dit : C’

es t honorablement

offert et je l‘

accepte Je ne veux pas qu’

une

brèche soit faite a notre amitre par ma faute , mais

mes fils me blâmeront . Veux- tu qu’

un d’

eux soit

présent à notre accord dit Gunnar . Non , car il

refuserait d’

y consen tir ; et i ls respecteront la foi

jurée . Deux cents mares d’

argent , voi là ma serr

tence, trouves—tu que c’

est trop ? Non pas , dit

Gunnar et il lui remit la somme .

L’auteur de ce dernier meurtre , Sigmund , est

parent de Gunnar lui—même , mais c’

est Halgerda

qui l’

a attiré dans la maison de Gunnar et en a fai t

son favori . S e fiant a la sorte d’

impun ité que ‘lui

vaut ce dernier accord , et touj ours excité par Bal

gerda, i l insul te publiquement Nial et ses fils , par

des chansons satiriques qui circulent dans le pays .

A ce nouvel outrage les fils de Nial ne se possèdent

plus et tuent Sigmund (voir page Cette fois

Gunnar ne réclame pas , tenant que la vengeance est

méritée . Trois années se passent , les deux amis ont

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cessé de se voir pour éviter les occasions de rappro

chements entre leurs familles . Cependant ayant des

difficultés dans une affaire judiciaire Gunnar se

décide à aller trouver Nial , son conseil habitue l

Nial éclaircit la difficulté,puis prenant Gunnar par

la main Combien y a—t- il de temps que ton parent

Sigmund est tombé san s qu‘

aucune amende n’

ait

été payée pour lui Il y a longtemps et je n’

y

pense plus cependant je ne refuserai pas l’honneur

que tu m’

offres E t la composi tion fut fixée‘

à deux

cents mares d’

argent qui furent remis aussitôt .

Dans la suite.de la saga, après lamort de Gunnar ,nous trouvons un exemple duvehrgeld, réglé cette fois

non plus de gré à gré , mais judiciairement . Les fi ls

de Nial ayant tué Hauskuld,'

celui qui avait été é levé

à la dign ité de gode , Nial parut à l’

A lthing et, comme

l ’assemblée allai t finir,i l prit la parole et proposa un

accord . Les fils de S igfus parents de la victime acceptèrent . Flose , l

un deux , et N ial nommèren t chacun

sixarbitres ; Nial et Flose se donnèren t lamain et N ial

accepta a l’

avance au nom de ses fils tout ce que ces

arbitres décideraient . L’

assemblée tout entrere , dit la

saga se réjouit de cette issue pacifique , et il fut décidé

que les arbi tres siégeraient dans le lôgretta . Lafoule

se retira pour les laisser seuls . Quand ils furen t

entre eux, Snorre le Gode , un des arbitres nom

mes par Nial , parla ainsi Nous voici douze juges

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tribuerait lui—même autant que celui qui donnerait

le plus , et tous les autres appuyèrent la proposi tion

de leur assentiment . Ils se séparèrent alors en

convenant que Hall de Sida proclamerait leur

décision sur la Montagne de la loi. On sonne et la

foule s’

y rendit . Hall de Sida se leva et dit : nous

sommes tombés facilement d‘

accord dans l’

examen

de la cause qui nous avait été confiée . Nous avons

conclu à six cents d’

argent . Nous , arbitres , nous en

paierons la moitié ; car tout sera payé d’

une fois au

thing . Mais c'

est mon désir et ma prière , je les

adresse à toute l‘

assemblée , que chacun des

assistants y contribue pour quelque chose . Tous

répondirent affirmativement . Hall prit des témoin s de

la sen tence rendue , afin que désormais personne ne

pût s’

élever contre elle , et Nial remercia les arbitres .

L es assistan ts s ’étant alors retirés dans leurs tentes ,les arbitres réunirent dans le cimetrere de Thingvalla les sommes qu

’ils avaient promises . Les fils de

Nial apportèren t de leur côté ce qu'

il s avaient sous

la main , un cent d‘

argent . Nial donna ce qu’

i l avai t

et ce fut le second cent . Tout cet argent fut ensui te

porté au lôgretta, où d’

autres personnes de l’

assis

tance complétèrent la somme .

Cet exemple de composition est fort curieux . On

y voit les amis des deux parties s’

accorder d ’

une

part ir infliger une amende très forte en signe de

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châtiment , mais s’

offrir ensui te d’

eux—mêmes et

inviter l’

assistance à y con tribuer en vue de la paix

publique et en considération de Nial, universelle

ment respecté . Double preuve du caractère de

moralité inhérent à une expiation qu’

un arbitrage

loyal graduait suivant les circonstances du meurtre

et l’

importance de la victime, et dont une intéres

sante solidarité partageait le fardeau.

Le taux de la composition avait été triple pour

venger Hauskuld qui était gode ; i l en fut de même

après le meurtre de Nial et l’incendie de sa maison .

Pour compenser le double crime commis envers un

tel personnage , en nomma d’

un commun accord

douze arbitres ; les meurtres commis furent com

pensés également , chacun en efiaçant un autre

pour ceux qui se trouvaient en surplus en pays des

amendes . Quant aux meurtriers incendiaires , i ls

duren t payer triple composition pour Nial et double

pour Bergthora sa femme en stipula double amende

pour Grim et pour Helge , fils de Nial, et simple

amende pour chacune des autres victimes de l’incen

die . Flose fut condamné au petit exil , pour trois ans ,mais ses complices furent proscrits . On demanda à

Flose s’

il voulait qu’

on tint compte des blessures

qu’

i l avait reçues mais i l répondit qu’

il ne voulait

pas recevoir d’

argent en échange d’

un dommage

personnel . Ejolf Bolverksen fut laissé sans cempeh1 1

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sation parce qu’

il avait agi avec déloyauté etperfidie .

La main dans la main , en sanctionna cet accord ; en

fit des présents à celui qui avait été choisi comme le

chef ou le président des arbitres en échangea enfin

des offres d’

hospitalité mutuelle , des anneaux d’

or,

des boucles d’

or et des cein tures d’

argent .

Comme les sagas , le Gragas nous montre l’

usage

fréquent des arbitrages , mais il nous les montre

adoptés et réglementés par la loi

Si des arbitres invoqués a la suite d ’

une contes

tation,dit— il, ont promis leur assistance et que ,

malgré cela , ils ne donnent pas leur déc ision ou que

d’

une man iere quelconque i ls procurent un arran

gement incomplet , qu’

ils subissent le petit exil . Une

fois les arbitres arrivés dans le lieu où la conciliation

doit se faire , celui qui a demandé leur secours

prendra des témoins et dira : Je vous prends comme

témoins que je te demande , à toi N . fi ls de N .

, de

procurer un accord entre nous N . fil s de N . et N .

fils de N ., accord que tu as promis d

effectuer je le

demande avec la formule légale . L’

arbitre qui re

fusera de comparaître pour arranger le procès après

en avoir accepté la charge , sera passible du petit

exil , tout comme s’

il avai t refusé de procurer cet

accord après en avoir été pme légalement . S’

il prouve

cependant que quelque obstacle insurmontable l’

a

empêché de venir, son excuse sera admissible . Celui

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intervenir dans le débat ; en conséquence i ls infl i

ges ich t dans les cas graves , outre la prescription

ou l ’exil , deux peines pécuniaires . Dans une cause

de meurtre, par exemple , la fortune du coupable

était confisquée, moitié au profit du demandeur ,moitié au profit des indigents du district , et de

plus en imposait ce qu’on appelait l

amende de

famille , payée par la famille du coupable à celle de

l’

oflensé . M . Finsen dans son savant mémoire sur

La famille selon le Gra'

gds , dit avec raison quel ’amende personnel le était d’

un caractère tout

pacifique. tandis que l’

amende de famil le rappelai t

tous les instincts bel liqueux de la société islandaise

la premiere pouvait bien passer pour une expiation

volontairement consentie par l’

ofienseur, ou connue

une juste réparation imposée en vue de la paix au

seul coupable ; mai s la seconde, qui pesait sur des

i nnocents , n’avait évidemment pour but et pour effet

que de répondre et de remédier à l’

habituelle

solidarité de la vengeance dont les tribunaux

reconnaissaient ainsi et proclamaient le caractère

légal . La signification de l’

amende de famille étai t s i

bien celle—là qu’

elle n etait infligée et ne profitai t

qu’

aux membres de chacune des deux familles en

état de porter les armes ; les femmes et les enfants

en étaient exclus . Le Gragas, qui donne en détai l les

règles de cette pénalité ; désigne quatre degrés de

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parenté de part et d‘autre ,

formant quatre classes

de donnants et de recevants ; et le langage imagé des

Islandais appelle buayr , c’

est—à—diro anneau, la

somme que paie on reçoit chacune de ces classes ,dénomination qui s

explique par l’

usage ancien de

représenter certaines sommes par des anneaux en

bracelets de certains poids ou de certaine valeur . La

première classe comprend le père , le fils et le frère ,

et l’

amende est fixée pour elle atrois mares , c’

est—à

dire que le père de l’

offenseur paie un marc au père

de l’

offensé, le fils de l’

oflenseur un marc au fils de

l‘

offensé, le frère de l‘

oflenseur un marc au frère de

l’

oflensé . D’

un côté ou de l’

autre , les fi ls ou les

frères , s’

i l y en a plusieurs , ne comptent cependant

que comme une seule personne et ne payent ou ne

reçoivent qu’

un marc ; s’

il n ’y a pas de père, deux

mares au l ieu d’

un , incombent au degré suivant

s ’i l n ’y a pas de fils , i ls incombent au père , etc .

La seconde classe , pour laquelle l‘

amende est de

deux mares et demi en vingt ôre , comprend le

grand—père paternel , le fils du fils , le grand—père

maternel et le fi ls de la fille ; la troisième dont

le taux est de deux mares , comprend le frère du

père et le fils du frère , le frère de la mère, et le

fils de la sœur ; la quatrième d’

un marc et demi en

douze ère , comprend les fils des onc les et tantes . Six

autres classes viennent ensui te pour les degrés de

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parenté plus éloignés et avec des amendes qui

varient d’

un marc aun ôre . Par une singulari té qu’ i l

faut connaître pour bien comprendre certains réci ts

des sagas , l’

amende fixée pour chacune des quatre

classes comporte nécessairement une addition , un

surplus nommé baugpac, et dont le montant est

fixé pour chacune pour la première 6 ôres et

48 dveiti, petites pièces dont il semble qu’

il y

avai t soixante dans l’

ère pour la seconde un

demi marc et 32 pveiti, etc . Sans doute i l étart

permis de payer ce surplus en nature ou par un

objet équivalent, puisqu’

on voit dans la saga de

Nial,lorsqu

il s’

agit de compenser la mort d’

Baus

kuld, Nial lui—même aj outer a la somme d’

argent

fixée par les arbi tres et entièrement complète un

manteau de soie il est vrai qu’

il s’

agit ici d’

un arbi

trage , d‘

une composition privée , d’

une amende per

sonnelle et non pas de famille nul doute cependan t

que nous ne retrouvions là lemême détail demœurs ,la même coutume que le Gragas à converti en lo i .

Ce mode d’

expiation par amendes que la loi avait

emprunté aux mœurs , elle en fit tout un système de

pénal ité , qu’

elle sut graduer en graduant les fautes ,

par un nouveau progrès vers une justice équitable .

Il y avai t plusieurs taux d’

amende , formant autant

de catégories sous lesquelles venaient se ranger les

différents crimes ou délits . Toutefois on ne doi t pas

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guerre privée s‘

ouvre entre deux gen tes et il n’y a

plus alors pour intervenir qu’

une sorte de droit des

gens ayant un caractère public grâce al’

assentimen t

un iversel . plutôt qu’

un droit pénal proprement di t ,pesant comme une menace et comme un j oug impé

rieux . La même remarque s’

applique à tout le dro i t

primitif des peuples scandinaves .

La loi islandaise ne connaissait pas une grande

diversité de peines . Par un heureux contrepoids a la

coutume , sous l’

empire de laquelle l’

homicide éta it

si fréquent , el le n’

ordonnait pas directement la

mort , et ne connaissait pas les supplices . Si l ’on

trouve quelques cas de torture dans les sagas , c’

est

contre des Finnois,réputés magiciens et maudits

ou contre des esclaves , et c’

est de plus une innova

tion dùe probablement à l’

invasion de la procédure

étrangère aprés la conversion au christianisme . L e

Gragas offre un exemple , un seul , de la question ,qu

on appliquait à la femme qui, devenue mère , re

fusait de faire connaître la paternité ; encore le texte

du Gragas dit— il en cette unique circonstance qu’on

devra user de modération .

La loi ne connaissait pas même l’

emprisonnement ,l ’ idée d

accepter une contrainte légale enchaînant la

l iberté des mouvements et des membres même eût

été trop contraire à l ’ instinct d’

indépendance inné

chez l’homme du Nord il comprenai t plus facilement

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que la prescription ou l’

exi l vint, au risque de la vie,restreindre en effet sa liberté en même que dans

certains cas, comme nous le verrons plus tard , la

condition d ’homme l ibre fût entièrement perdue

pour lui . Ne dit—on pas qu’auj ourd ’hui encore l

An

glais aime mieux être frappé qu’

emprisonné ?

La peine la plus extrême étai t la prescription qui

si elle n‘

entrainait pas la mort , chassait pour vingt

ans au moins le condamné loin du pays . Ensuite

venait le simple exil , qui éloignait le coupable de

son district pour trois années , la confiscation et

l 'amende restaient donc les peines ordinaires . La

prescription pouvait entraîner la mort, mais l’

E tat

ne se chargeait point de l’

exécution de la peine. Lors

que la prescription est officiellement déclarée au

Thing par le président du tribunal , i l faut que le

condamné se sauve au plus vite , car, au moment où

la séance est levée et où la foule des assistants a le

droit de reprendre ses armes , i l est permis a cha

cun de le poursuivre et de le. tuer . Suivant la tradi

tion , Flosi n’

a échappé aux ennemis qui allaient

s’

emparer de lui qu’

en franchissant , par un bond

prodigieux, la redoutable erevasse béante entre la

montagne de la loi et la plaine de Thingvalla où se

trouvaient ses amis , pour l’

en tourer et protéger sa

fuite . Si le condamné était un chef, ou appartenait

1 . Voir p. 56.

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à une famille puissante, s rl pouvaitgagner la côte,trouver un navire , s

embarquer, de nouvel les aven

tures commençaient pour lui . Sinon , i l n‘

avai t d’

au

tre refuge que le maquis et le désert , touj ours voisin

en Islande des l ieux habités , et d’

où la faim et le

désespoir le feront de temps en temps sortir pour

demander au brigandage le misérable soutient de sa

vie et de celle quelquefois de ten te une famille qui l’

a

rejo int secrètement dans sa fuite . Le condamné ,

friedlos , est désormais hors la paix , hors la loi , il est

appelé dans toutes les anciehnes loi du Nord le loupen la tête de loup ; il est au mil ieu des hommes

comme la bête dangereuse qu’ il faut détruire , nul ne

doit lui fourn ir d’

aliment , ni d’

abri,ni moyén de

transport , sa femme même n’

a le droit de le recevoir

chez elle que la première nuit qui suit sa condam

nation . Bien plus,la loi récompense celui qui tue le

prescrit. Il arriva même que les prescrits étant deve

nus très nombreux et causant un danger public une

loi les arme les uns contre les autres le prescrit

qui en tuait de sa main trois autres obtenait sa

grâce Tout Islandais pouvai t faire rentrer dans la

paix publique un condamné au profit duquel il tuai t

1 . Il est rapporté dan s un supplém en t du Landnama—Bok que

cette loi , sur laquelle le Gragas con tien t des prescription s dé

ta illées , fut faite sur la proposition de E ylulf Valgerdarson ,

lorsque , dan s un h iv er sév ère au delà de la mesure ordinaire ,

un e quan tité d’

hommes s‘

é taien t cachés dan s les bois e t les

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cède la rédaction du Gragas , car c’

est dans les plus

anciennes sagas que nous le trouvons d'

abord men

tionné e t décrit ainsi qu’ il sui t le sacrifice d

un che

val ou d’

une cavale était suivi de la formule d’

im

précatien attestant les dieux , puis la tête de cheval

coupée était dressée , la mâchoire ouverte , vers la

demeure de l’

ennemi . Surune branche de cendrieren

gravai t en runes l‘

imprécation avec le nom de celui

qu’on vouait à l’

infamie ; c’

est le Nidstrang le bâton

d’

infâmie qu’

on fiche en terre ou dans une fente de

rocher ou dans la mâchoire même de la tête de che

val ; de man iere que tout passant le voit . Cette pu

nitien suprême est réservée à celui qui v iole une paix

ou une trêve sainte , une amitié jurée , qui attaque cc

lui qui est désarmé , sans défense ; qui trahit les siens ,

qui, appelé en combat singul ier , refuse de s’

y ren

dre ,qui viole les règles du duel , etc. Celui qui est dé

claré n iding, infâme , est rejeté des réunions publ i

ques, même de celles de la fami lle ; son témoignage

n’

est plus recevable en justice .Ce châtiment moral du

n ids trang était souven t en relation avec le duel judi

ciaire ,mais il persista aprés l’abolition de celui-ci en

D’autre part et pour préven ir un facile abus

il y a des peines qui von t jusqu a l’

exil pour punir

l’

injurepublique en signes en en paroles , ou l’

érection

sans juste cause du nidstrang, le bâton d'

infamie.

1 . Voir page 1 48 .

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D es formules dans le droit islandais

On sait l’ importance des formules dans la consti

tutien du droi t primitif, quand la parole doit j ouer

le rôle de l’

écriture . Par une sorte de supersti tion

ou de convention facilement d’accord avec l

’humeur

processive et l’

esprit d‘

éristique, que nous avons

déj à reconnus dans la race islandaise, ces formules

doivent être répétées suivant les circonstances , sans

que la mémoire en défaut y modifie un seul terme .

La formule exactement et à propos introduite par

devant témoins perte sur— le-champ son effet légal ,tandis que le moindre manquement devientun motif

de null ité . C’

est encore dans un épisode de la saga de

N ial que nous trouverons a ce sujet un exemple

caractéristique .

Gunnar avait une parente , Unna , fille deMœrd, qui

avait épousé Brut mais Brut , pendant ses voyages ,avait aimé une femme étrangère qui lui avait jeté un

charme .Unna,délaissée, quitta secrètement la maison

de son mari et retourna chez son père, par qui elle

fit réclamer ses biens . Comme il n’y avait pas en

divorce, Brut se contenta d’offrir le duel , que le

vieux père ne put accepter .Unna vint donc prier son

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parent Gunnar de se charger de cette poursuite

mais il fallait que la formule de cita tion fut prononcée

dans toute son intégrité et de son propre aveu en pré

sence de la partie adverse , et qu’ i l fut constaté par

témoins qu’

elle l’

avait entendue . Gunnar alla consul

ter son ami Nial .

L ’

entreprise est diffici le , dit ce dernier ; je vais

t’

indiquer cependant la voie que je crois la mei lleure

tu peux réussir, mais à la condition d’observer ponc

tuellement mes avis . Si tu négliges un seul poin t, tavie même est en danger. Tu prendras deux

compagnons . Par— dessus tes vêtements tu mettras

un surtout brun d’

ételfe commune , sur lequel tu

jetteras un manteau de voyage . Porte à la main une

petite hache . Chacun de vous trois aura deux

chevaux , l’

un gras et l’

autre maigre ; munis— to i en

particul ier d’

un attirail de forgeron . Vous partirez

demain matin de bonne heure . Quand vous arriverez

à la Rivière-Blanche , souviens— toi d'

enfoncer ton

chapeau sur tes yeux . L es gens se demanderont qui

est cet homme a la haute tai lle ; tes compagnons

répondront que c’

est le marchand de ferraille Bedin ,du canton d

OEfiord, qui fait sa tournée S a réputa

tion est faite au loin ; c’

est un vaniteux qui croit seul

tout savoir ; pour des riens i l rompt ses marchés et

querelle les gens . Tu iras jusqu’

au Bergefiord en

offrant partout ta marchandise et en te montrant

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même temps chante—lui quelques strophes pour

l’

amuser, car je sais que tu es scalde . Il te

demandera pourquoi tu es d’

avis qu’

après la mort

de celui— là en ne saurait trouver son pareil . Réponds :

Parce que c’é tait un homme si avisé qu

il ne s’

est

j amais trompé dans la poursuite d’

un procès .

Sais- tu cependant , dira—t— il, ce qui s’

est passé entre

lui et moi ? Oui, i l t’a repris ta femme, et tu n

as

en rien à dire . Mais il a été battu ! répliquera

Brut, il a fait procès , et je n’

ai pas rendu la dot .

Réponds : Tu as offert le duel , et comme i l était

vieux , ses amis lui ont conseil lé d’abandonner la

cause . C’

est cela , dira-t-il les ignorants ont cru

que telle était la loi mais il aurait pu reprendre

l‘

affaire aun autre thing , s’

i l en avait en le courage .

Je le sais bien , répondras-tu. En t’

entendant

parler de la sorte , i l te demandera si tu as donc

quelque connaissance de la loi . Tu lui diras Là

bas , dans ce canton du nord, je passe pour en savoir

quelque chose . Cependant j’

entendrais volontiers de

toi comment on pourrait reprendre le procès . Quel

procès Un procès comme par exemple celui-ci

qui du reste ne m’

intéresse guère : comment devrait

s’

y prendre celui qui je suppose , réclamerait la dot

de la femme ? Il faudrait que la formule de

citation fut prononcée en ma présence , de telle sorte

que je l’

entendisse , et dans mon domicile légal .

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Récite- la un peu, diras—tu, je la redirai après toi .

Il ne manquera pas de la réciter ; toi fais bien

attention à chacun des termes . Il te dira de la

répéter ; répète - la mais tout de travers , sur

deux mots un seul de bon . Il se mettra à rire ,sans nul soupçon contre toi , et i l te montrera

qu’

il y avait seulement tels et tels mots justes .

Rejette la faute sur tes compagnons , dont la

présence te trouble ; prie-le de reprendre chaque

mot en te laissant le reprendre après lui. Ainsi fera

t-il ; cette fois tu répéteras exactement ; tu lui

demanderas si c’

est bien ; i l ne pourra que répondre

qu’

une telle citation serait parfaitement valable .

Alors tu diras à haute voix, comme en te j ouant , de

manière que tes compagnons t’

entendent : Ainsi

je dénonce contre toi Brut le procès que Unna m’

a

confié . Et puis dés le soir venu, quand tout le

monde sera endormi , vous sel lerez , au l ieu des che

vaux maigres , les bons chevaux quevous aurez laissés

au pâturage , et vous regagnerez la montagne, où

vous resterez trois j ours . Moi cependant je me ren

drai au thing , et je t’

y assi sterai pour ce qui reste à

faire .

Gunnar remercia Nial et s’

en retourna chez lui .

Deux j ours après , i l fit ponctuel lement ce que Nial

lui avait consei l lé . Tout réussi t de point en point (lasaga nous le redit en détail dans une seconde narra

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tion) comme il avait été prévu : le faux Hedin provo

qua, entendit , répéta d‘

abord tout de travers , puis fort

exactement et par devant ses deux témoins , la for

mule de citation . Brut s‘aperçut tr0 p tard qu’

une

ruse , où il reconnut l’habileté de Nial , l

’avait abusé .

Il n ’

est pas difficile , ce semble, d’ imaginer com

ment cette singulière page a pu être écrite . L’

auteur

de la saga, qui vivai t beaucoup d’années après le

temps qu’

il expose , a recueil l i la tradition du

subterfuge , resté célèbre , par où l’

habile Nial ,comptant sur la vanité de Brut grossièrement

flattée , avait obtenu l’

un de ses triomphes . E n

racontant à son tour cet exploit légendaire de son

héros,il a selon la coutume des chroniqueurs ,

étendu par un commentaire son propre récit ; il

a sans doute inventé du moins quant au détai l , la

prem iere des deux scènes , c’

est— â-dire les consei ls

donnés par Nial a Gunnar . Il y a d’

autant moins

lieu de s’étonner des exactes prédictions de Nial et

de la docil ité de Brut , suivant la saga i slandaise , à

lui donner raison , que Nial passait aux yeux de

ses contemporains et à plus forte raison aux yeux de

leur postérité , pour avoir été un de ses hommes ex

traordinaires , à l’

esprit perçant et subtil , qu’

on

croyait , peu s’

en faut , doués de seconde vue i l n’

y

avai t nul effort , pour ses imaginations scandinaves

du x° et du x1° siècle, ase représenter un tel homme,

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TABLE ons MATIÈRES

Avertissemen t de l‘

édi teur

1

D escription et occupation du sol. Prem ier dévelop

pemen t de la con stitution

l l

I nstitution s politiques . Le Gragas . L’

A lthingislandais . D escription du site . L

A lthing con sidéré

comme assemblée législativ e et politique

111

In stitution s judiciaires . L'

A lthing con sidéré comme

cour de justice . Tableau des mœurs dan s leurs rap

ports avee les in s titution s judiciaires , d‘

après la saga de

N ial. D e la procédure . Juges , qv idrs et témoins .

D es preuves judiciaires . D u duel

APPENDlCE

1

De la pénalité dan s les lois islandaises . D u vehrgeld.

De la pre scription . D e l’

ei

I l

D es formules dan s le droit islandais

Baugé (M a ine—et-L oire) . Imprimerie D ufour .

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ANN A LE S

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VOLUME S PARUS

TOMEM É LANGE S . Un v olume in -4

, av ec 8 planches

hors texte . 1 5 fr.

B. Guimet . Rapport au M in istre de l'

In struction publique e t de s

Beaux— Arts sur sa m iss ion scien tifl n e en E xtrême—Orien t . L e

Mand ara de Koô—boô—Daï-shi dan s e temple de Teddj i à K ie t o

(Japon ) . H. Biyn ard. Le My the de Vén us . P Chabas . D e

l'

usage des baton s de ma in chez les an cien s Ê(gyp

tren s et ch e zles Hébreux. Bd. Nav ille . Ostracon égyptien u Musée Gu im e t .

B . Lefébn re . L es Races co n n ue s des Egyptien s . Garc inde Tas sy. Tab leau du Kàli—Youg ou Age de fer. P. Reyn au d .

La M é trique de t irata , xv u° chapitre du Nàtya Çastra .

P. Reynaud. Le Pessim isme Brâhman ique . Rev . C. A lw y s s .

Vis ite des Bouddhas dans l’

î le de Lan kâ tradu i t del'

anglais par L . de Milloué . J . Dupuis . oyarze au Yun - n a n

e t ouverture du fleuve Rouge au commerce . Rav . E -J . Bi t e ] .

L e Feng-shout ou Principes de scien ce naturelle en Chin e , tra

duit de l'

anglais par L . de M illoué .— P —L .

-F. Philastre . E xég è s echinoise . Shidda . E xplica t io n de s anciens caracteres san s cri ts ,

traduit du japon ais par Ymaî zcum i et Yamata . Con fére n c een tre la secte S in-are a et la m iss ion scien tifique fran ça i s e ,

traduite du japonais par Ymaîzeumi , Tomii et Yamata .

Répon ses sommaire des prêtres de la secte S in -sion , tradui tes dujaponais par M . A . Tomii . N otes sur les cours de lan gue so n en tales à Lyon .

TOM E I l

M É LANGE S . Un volume ia-4 15 fr.

F. Max Müller. Ancien s textes souscrits découv erte au Ja o n

traduit de l‘

an glais ar L . de M illon é . Y. Yma‘

izeumi . -m i

to-King , ou S ouk avati- v yflha—S oû tra, texte v ieux san scrit

traduit d'

après la v ers ion chin oise de Koumâraj tva. P. Reyn aud.

L a M étrique du Bhârata , t exte san scrit de deux chapi tre s duN àt a-Çastra , publié pour la prem ière fois et suiv i d

'

un e in terré ation fran çaise . Léon Peer. A nalyse du Kandj o»r et duandj our, recueil des liv res sacrés du Tibet, ar AlexandreCsoma de Korea, traduite de l

'

anglais et augmen t e de di versesaddi tion s , remarques et index.

TOM E I ll

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TOM E IV

ME LANGE S . Un v olume in -4 , avec 1 1 plancheshors texte . 15 fr.

B . L efébure . L e Puits de Derr—e1—Bahari , n otice sur les de rn ièresdécouv ertes faites en E pte . P. Chabas . Tables à libation s duMusée Guimet . !) I! A Colson . N otice sur un Hercule Phallophore , dieu de la g

énération . P. Reynaud L e Paucha-Tan tra ,ou le grand recuei des fables de l

'

Inde ancrenn e . con sidéré au

poin t de v ue de son origin e , de sa rédaction , de son expan sione t de la littérature a laque lle il a don n é n aissan ce . Rev .

J . Edkins . La Reli ion en Chin e . E xposé des trois religions desChin ois , suiv i d

o serv ation s sur l'

é ta t actuel et l'

av en ir de la

pro an

fie

ghrétienn e parmi ce peuple , tradurt de l

'

anglais parL . e i en

TOME V

Léon Peer. Fragmen ts extraits du Kandj our, traduits du tibétain .

Un volume ill - «i

TOM E V I

Ph .-Bd. Ponceux. Le Lalita Vistera , en dév eloppemen t des j eux,

con tenan t l'

histoire du Bouddha Çakya- i lounr depuis sa naissance jusqu

à sa prédication , tradui t du san serit en français .

Première partie . Traductron françai se. Un v olume ia —4, av ec

t pæn che s hers texte . 1 5 fr.

TOM E V | |

MÉ LANGE S . Un v olume ia-4 avec 2 plancheshors texte. 20 fr

A . Bourquin . Brahruakarma , on Rites sacrés de s Brahman e s , traduit

pour la prem ière fe rs du san seri t en fran ça is . D harmasindbu,ou Océan des rites rehgreux, par le prêtre Kàshinàtha , premièrearlie , traduit du son .

—crit e t commen té . Version fran çaise parde Milleué . E .

-S .-W. S énathr-Râ

äa . Quelques remarques

sur la secte Çivaïte chez les luden s e l’

I nde méridionale .

Arn ould Locard. Les Coquilles sacrées dan s les région s indoues.

S ir Mutn Coomara—Swamy . D â tbâvan ça , ou histoire de laD en t—Reli ne du Buddha Gautama , 0 ème épique de DhammaKitti. trav uit en fran ça is d

après a v ersi on un laise , parL . de Milleué . J . Gerson da Cunha . Mémoire sur h istoire dela D en t-Belt ne de Ceylan . précédé d

'

un essai sur la v ie et lareligion de en tama Buddha . traduit de l

anglais et annoté arL . de M illoné . P. Raynaud. E tudes phon étiques et morpfielogi nes dan s le domaine des langues inde - européennes et

part en tièremen t en ce qui regarde le sanscrit.

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TOM E V I I I

P.-L .

-F, Philastro. Le Yi—King e n liv re des changemen ts d e la

dynastie des Tschcou. traduit pour la première fois du chin o i s e n

fran çais , av ec les commen taires tradi tion n els comple t s d e

T’

shéng—Tsé et Tshou-hi e t des extraits des prin cipaux com m ea

tateurs. Un volume in —6 . 1 5 fr .

TOM E IX

L es Hypogées royaux de Thèbes . par’

M . B. Lefebure . Prem iè rediv isron : L e Tombeau de S éti I °l

'

, nhlié ih - exten so av ec la co llaboration de MM . U . Benriant et Loret , ancien s membre s de

la M ission archéologi ue du Caire , et av ec le concour s de

M . Bd. N av ille . Un v o urn e in — i , av ec 130 plan ches hors t

7

e

5

xt

f

e .

r.

TOME X

MÉ LANGE S . Un'

v olum e in —1 , illustré de dessin s et

de 21 plan ches hors texte . 30 fr .

armu re aux numerous sr aux noanusnrs ana na s n e

L‘

An eazeua. La S tèle de Pa lenqn é , par Ch . Ran .— Ide le s de

l’

Amazon e , par J . Verissime . S culpture de S an ta—Lucia C e s u

malwhuapa (Guatémafa) , par S . Babel , traduit de l'

anglai s par

J . Poin tet . Notice sur les pierres sculptées du Guatem a la .

ac n iece ar le M usée de Berlin , par A . Bastian , tradui t del'

a l eman par J . Pointet .

Ménorass orv ans . L e Shin torsme , sa mythologie , sa mora le , par

M A . Tomii . L es Idées philoswhrques et reli ieuse s des

James , par S .-J Warren ,

tradui t du hollandais par J . eintot .

E tudes sur le mythe de Vriéabha , par L . de M illeué . L e

D ialo ne de Çuka et de Bhamba , par J . Grandjean . La n es

tion es aspirées en san scrit et en

grec, par P. Re au

D eux in scription s phén icienn es ine ites , ar G. lem en t

Gann eau . Le Galet d’

A n tibes , ofl‘

rande pha lique à Aphrodite ,

par B . Bazin .

Mémoraas n’

écv rrô coom . La Tombe d'

un ancien Egy tien , par

V . Loret . L es Quatre races dan s le ciel in férieur des gyptien s ,

Ëar J . Liebleim Un des procédés du dérn iurge égy tien , par

Lefebure Mea , déesse de la vérité , et son r e dan s lePan théon égyptien . par A . Wiedemann .

TOMES Xl ET X I I

La Religion po ulaire des Ch in ois. par J .-J .

-M . de Groet . LesFêtes annuel émeut célébrées à Emeui (Amoy) , mémoire traduitdu hollandais , av ec le concours de l

auteur. par —G. Ghavann€:

Il}ust ati

qn s

par Félix Régamey et hélitrgravnrëb . 2 v olumes . 4,

a ét 8 I fr

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D E V U L GA R I S A T ION

cor.r.ncrmu on v or.na es 1111- 1 8 1 115 0 3 A 3 ra. 50

Les Moines égyptien s . 1 . Histo ire de S chnoudi , paf E . Amélinean .

In— 1 8 , av ec un portrait. B fr . 5 0

Précis de l’

Histoire des Religion s de l'

Inde . Par L . de Milleué .

Illustré de 20 des sin s hors texte . 111— 18 3 fr. 5 0

L es Hitt ites . Histoire d’

un empire oublié . par A . H . Seyne, publiéer

lr fran çais par M . J . M en an t , m embre de l

'

In stitut . ln - 1 8 .

1 1 us tre

(Plusieurs v olumes en préparation . )

REVUE

L’

HISTOIRE DES RELIGIONSennu i s sons L A mar—zon es en M . JEAN afivrcr.e

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TOM E

M aurice Vern es . I n troduction . A . Beuch é-L e .clercq D e ladivin ation ita lique . J . Welhausen . D e l

un ité du san ctuairechez les Hébreux. J . Spoon er . Exploration des monumen ts

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PUBL lUA

re ligieux du Cambodge . V. Duray : D e-la formation d

un e

re ligion Officie lle dan s l'

Empire rom ain . C. P. T10 18 . E squisse

du dé v eloppemen t religieux en Grèce. J . Darmostetsr. Le

D ieu se rême dan s la myth ogie inde— euro éen n e . A . Barth .

L a myt£o logie a ryen ne . Maspero . La elrg1on de l‘

Égypte.

M aurice Vernes . La religion juiv e (Juda1sme an ci en ) . A .

Barth . Les religion s de l‘

Inde . S . Guyard. Les religr_on sassyro

-babylon ien ncs . H : Cordier. L es re ligron s de la Ohm s .

J . Vin sen . D ocumen ts in édits sur la sorcellerie ; É lémen ts

mythologiques des pas torales basques . _G. Clermont -Gann eau.

La _mytho logie icon ographi ne . G. d’

Brchthal. S ur le n om et

le caractère du dieu d’

lsraë Jah veh . Van Hamel . L’

en seigne

m en t de l’

histoire des religion s en Hollande . Correctio n s

pro osées au N ouv eau Testamèn t . L e Christian isme jugé parun aponais . N otice sur le Musée religieux. fondé à Lyon par

M . Em ile Guimet . Coin tes rendus . D épouillem en t des

périodiques et des travaux es Sociétés sav an tes . Chron ique .

Bibliographie .

TOM E I l

Ravaison . Les mon um en ts fun éraires des Grecs . J . Welhan sen .

L es sacrifices et les fêtes chez les Hébreux. C. P. Tiele . Commen t dis tinguer les élémen ts exo tiques de la mytholo ie grecque .

J . Welhan sen . Les prêtres et les lév ites chez es ancien sHébreux.

— J Goldziher . L e culte des sain ts chez le s Musulman s .

P. D echarme . L a my thologie grecque . A Gaiden La mythelogie gauloise . Maurice Vern os . La relig ion chrétienn e (Origin e s ) . H . Oert . Le Judaïsme pos t

—biblique . A . BouchéL eclercq. La m ytholo ie la tin e . L éon Peer. L e bouddhisme

extra-in dien (Tibet et n de -Chin e) . Deceurderrian che . Salomonet les oiseaux (légen de N o tice sur le M uséereligieux, fondé à Lyon par M . É mile Guimet . V an Hamel.Aperçu gén éral des principaux phénomèn es religieux.

J . Beoykaas . E tude gén érale des différen tes religion s . Compte srendus . D épouillemen t des périodiques et des travaux desS ocié tés savan tes . Chron ique . Bibliographie .

TOM E

Maurice Vern es . Quel n es observation s sur la place qu’

il con v ien tde faire à l

his toire s e re ligions , aux différen ts degrés de l‘

en sei

gn emen t public . P. Len orman t . Les Bétyles . M ichel N icolas .

gpbard et l

'

Eglise franque au n euv ième siècle . G. Perrot . L are 1gron_égypt1enn e dan s ses rapports av ec l

'

art de l’

Égypte .

C. P.. h ole . La re ligion des Phén icien s d'

après les plus récen tstrav aux. B. Beauvois . La mag ie chez les Finn ois . P. Lenerment . Sol E lagaba lus . A . Bom bé-Leclerc La div inationchez les E trusques . A . Barth . L es religion s e l

'

Inde .—

H . Cord1er. L es religion s de la Chin e (Piété filiale ) . Maurice Vernes .

Ljhrs toire générale des religion s . B . Oert . Le rô le de la relien dan s la formation des E tats , à propos de la Cité an tique

.

e M . Pustel de Coulanges . D eceurdeman che . Fragmen ts deli ttérature supersti1ieuse ottoman e . Paul Pierrot . L

'

œ uv re

de Manette-Bey au poin t de v ue des études d

'

his toire re ligieuse .

J . Vinson . E lém en ts my thologiques dan s les pas torales basques .

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lemen t des périodiques et des trav aux des S ociétés savan tes.

Chron ique . Bibliographie .

A li) . Rév illo. L '

n ouv el isj.e (Herbert S encer } .J .Halévy. s ras e a code sacerdotah L . Leger . s uis se

sommaire de lamythologie s lav e . H . Korn . H istoire du ud

dhism e dan s l'

Inde . J . Rappel . La religion de l’

ancien empirechinois é tudiée au poin t de v ue de l

'

his toire comparée des re li

gion s . Gaston Boissisr . E squisse d’

un e his toire de la reli io n

romaine . E . Beauvois . L a mytho logie scandinave . B crt .

L e judaïsme post-biblique . Maurice Vernos . La religion chré

ti en n e (Vie de Jésus ) . P. Decharme . La religion grecque .

Maurice Vernes . La religion j uiv e an cien ne . Le Pen ta teuq u e

de Lyon et les an cienn es traduction s de la Bible . L es Ca ta

combe s . La politique religie use de Con stan tin .— L e sOrigin e s

de la société musulman e . La Question de l‘

instruction ra ti

g ieuse dan s l‘

en seign emen t secondaire en Hollande . La fo i en

la Rédemptiou et au ltédempteur dan s les principales religion s .

D époui llemen t des périodiques et des travaux des S ociét és

savan tes . Chron ique . Bibliographie.

TOM E V

E . Beauvois . La Magi e cnez les Finn ois (suite) . Mauri ce Verne s .

L es plus ancien s sanctuaires des I sraélites . B . Korn . His to ire

du bouddhisme dan s l‘

in de (suite) . L éon Peer . D e l‘

histoire e t

de l'

éta t présen t des études zoroastrienues ou mazdéen nes , particulièremen t en Fran ce . Michel N icolas . E tudes sur Phi loud

'

A lexandrie . G. Mas sro . Bulletin critique de la religion de

l’

Eg pte an cienn e . A . arth . Bulletin critique des religions de

l’

in e . S . Guyard . Bulle tin critique de la religion as syro—baby lo

n ie iine (Question sumero accadien n e) . Maurice Vernes . Bulle tin

critique de la religion chrétien n e (Sain t Paul) . L a foi en la

Rédemption et au Rédempteur dan s les principales religious (fi n ) .Decourdeman che . La légende d

Adam chez les Musulman s .

D épouillemeut des périodiques e t de s trav aux des S ocié tés sav an

tes . Chron ique . Bibliograplüe .

TOM E V I

A . Kusasn . L’

Islam ofl‘

re—t—il les caractères de l’

un iversalieme reli

gi eux? J . A . Bild. La légen de d

E née av an t Virgile .—A l . Rév file .

Con sidération s énérales sur les religion s des peuples n on ci vi

lisés . W. D . %hitney . L e prétendu hén othéœme du Véda .

M aurice Vernon. Les origin es politiques et religieuses de la natio nisraé lite . B Beauvois . La magie chez les Fin nois (fin) .

— Mau_rxceVernes . Bulletin critique de la religion juiv e (Judaïsme ancien ) .

Dewurdsmanche . La légende d‘

Alexandre chez les Musul

man s . L'

histoire des religions en Beicrique . Maur1 ce_Vernes .

M . Paul Bart et l'

en seign emen t de l‘histoire des re ligion s .

A lb . Réville . La religion des E squimaux. Maurice Vernes .

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Sm rue en 1875 . Da Pu maigre . La fi lle aux main s coupée s ,

etu e de folk— lors : N ico as . Les origin es de l'

A cadémie protestan te de Mon tauban . Re v ue des liv res . Nécro log ie

!S tanislas Guyard ; Richard L epsius ) . Chron ique . D époui l

émeut des périodiques et des trav aux des S ociétés sav an te s .

Bibliographie .

TOM E X I

Gaidoz . L es religion s de la Gran de-Bretagn e . Barth . Bulleti n

des religion s de l‘

inde . Bonet-Maury . Akbar, un in itiateur del‘

étude comparée des religion s et un précurseur de la to léranc e

dan s l’

I nde. Pagnan . Bulletin de l’

I s lam . M on tet . Le s M ission s musulman es eu xxv ° siècle . Reyn aud. Quelques observ ation s sur la méthode en mythologie comparée . Men an t . L e

mythe de Dagon . Lefebure . Les fouilles de M . N a v ille à Pithom. L

exodc . L e cana l de la mer Roug e . Leb lais . L a.

dern ière publication de M . D uemichen . L efébure . L e docteu r

L e siue au tombeau de S e ti l er . Laiaye . L’

in troduction du

ou te de S érapis à Rome . Baz in . L e ga le t in scrit d‘

An tibes .

Ofi”

rande phalli us a Aphrodite . M assebiean . Un e n ouv e lle interprétation de a D idaché par M . M én égoz . Lewis de Sylv aPandit . L e bonheur de N irvànà, extrait du M ilindapprashv ay aau Miroir des doctrin es sacrées . Revue des L ivres . Chron ique . D épouillemen t des périodiques et des trav aux de sS ociétés savan tes . Bibliographie .

TOM E X I IGoblet d

Alv iella . Les ori in es de l’

idolàtrie . Halevy . E sdra s

a- t—ii promulgué un e oi n ouv elle ? P. Reynaud. S ur le s

phases de la religion v édique , d

'

aprés M . Vérou . M aspero .

a religion égyptienn e d‘

après le s pyram ides de la V 0 et de la

Vi° dyn a stie . J . Rév ille . L e M ithriacism e au i i i° siècle de

l‘

ère chrétien n e P. Reynaud. La mé thode en my thologie com

arée ; La Mayà e t le pouv o ir créateur des div in ités v édiq ue s .

inle . L e Mythe de Kron os . S ébillot . L égen de s chré tien n es

de la Hauæ-Breta n e‘

Abd-A llâh ibn‘

Abd—A llâh ,le Brog

man . Le présen t e l homm e let tre pour réfuter les partisan s

de la Croix. Goblet d'

Alv iella . M . M aurice Vern es et la

m éthode comparativ e dan s l’

histoire des Religion s . Le Musée

Guimet à Pari s . Poucaux Un Mémoire espagnol sur le N ir

vana bouddhique . Reynaud. Les Védas et la Pa léographie .

Rev ue des liv res . Chron iques. D épouillemen t des pério

diques. Bibliographie .

TOME XI I I

Ch . Plaix. Mythologie et Folklorisme ; L es mythes de Kron os et

de Psyché . Bug . de Faye . D e l‘

in fluen ce du démon de S ocrate

sur sa pen sée re ligieuse . P. Reynaud. L’

origi ne du mot:

S aturnus . L . Peer. D e l’

importan ce des actes de la pen sée

dan s le bouddhisme . Imbault—Huart . Ronan - ti, le dieu de la

guerre chez les Chino is . J . Rév ille D e la complexi té des

mythes et des légendes , a propos de récen tes con trov erses sur

la méthode en mythologie comparée . A . Laney . Folklore et

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og1 e . a . n em ereur .tu prem i er arucH . Derenbourg . La science des re te ian s e t lîl s la in isms . L Sichler. La Fille aux bras coupés . Carriére L

Hexateuque d’

aprèsM . Kuen ca .

— Revue des L iv res . Chron ique .— Dépouillemen t

des périodiques . Bibliograph ie .

TOM E XIV

A . Rév ille . L’

empereur Julian (fin ) . Letébure. L'

étude de la

re ligion égyptienn e . S on état actuel et ses condition s . Goldziher . L e sacrifice d e la chev e lure chez les Arabes . G. Bot tin .

La croyan ce à l’

immortali té de l‘

âme chez les ancien s irlandais . P. Reynaud. Le sen s primitif des mots latins A uguret Gen ius De Presseuse. La religion chaldea-ass rien ne .

Goblet d'

Alv iella . L es in stitution s ecclésiasti

q£n es dHerbert

Spen cer et l‘

é vo lution du sen timen t religieux. ild. L e pessim ism e moral et religieux chez Homère et li ésiode ram ier article) .Haldvy ._L a code sacerdotal pendan t l

exil . gi . Souriau . Un

merv e i lleux dan s Lucain . Bd. M on tet . La religion et le théâ tre

en Perse .4 L . Peer . Vritra et N amautchi dan s les Mahabhâ

rats . Am61ineau . L e Chris tian isme chez les an cien s Cap tes

(prem ier article ) J . R év illo. L’

Histoire des Religion s ; sa

méthode e t son rôle . D e M illoué. L e se tieme Con rès in tern ational des Orien talistes . S ess ion de ien ne . . S ichler .

Un e dern ière v ersion russe de la Fille aux bras coupés . Rev uedes L iv res . Chron ique . D épouillemen t des pé riodique s .

Bibliographie .

TOM E XV

Sabatier . Une con tribution à l‘

étude du Paulin isme . D e la ues

t ion de l'

origin e du péché , d e rès les lettres de l'

a dire aul.

Bild. L e pessim isme m ars et religieux chez owere e t

Hesiods (2° article) . P. Re gnaud . Un e épithète des dieux dan sle Rig

-Ve‘

da . Am61in eau . Le christian isme chez les ancien s

Coptes (2° article ) . J . M én an t . Les Hétéen s . Un nouveau prob lème de l

'

histoire d’

Orien t . P. Reynaud. L e Bainwv , histoire d

'

un mot e t d'

un e idée . M as era . L e rituel du sacrificefun éraire ; Bulle tin critique de a religion égyptienn e .

G. Lafaye . L es décou v ertes en Grèce au poin t de v ue de l’

his toiredes re ligion s . Maspero. L e L ivre des Morts . Bu lletin critiquede la re ligion égyptien n e . Massebiean . L

'

Apolo é tique deTertullien e t l

Octav ius de M inucius Fé lix. Rev ue es L iv res.Chron ique . D épouillem en t des périodiques . Bibliographie .

TOM E XV I

Bacharme . La déesse Basiléia . H . Derenhaurg. L’

in scription deTabn it , père d

E schmoun’

azar . Lefebure . L‘

œ ul’

dan s la reli

Ëion égyptienn e . Begnaud. L e mot v édique gta . Borat .

inde sur le_D eutéran ome . Compos ition du D eutéran ome.

Lafaye . L es découv ertes en Grèce . Bulletin de 1886 (2° article ) .M aurier . L

é tat religieux de la M ingrélie . Bd. Sayaus . LeTaurobo le . Goldziher . Le monothéisme dan s la v ie re ligieuse

des Musulman s . P. Reynaud. L e caractère et l'

origine des

jeux de mots v édiques . Massebieau . L e traité de la v ie cou

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rusmcrn ous ou MUS É E own er

templative de Philou et la question des thérapeutes . BonaMaury. La

,

légende d‘

Abgar et de Thaddée et les m issions obrétienn es à Edes se. G. Lafaye . Les découv ertes en italie. Bulletinde 1886 . Bacon rdemanche . La morale reli ieuse chez les Musulman s . Correspondan ce L ettres de M . terman t—Gm neau etde M . Carrière . Rev ue des Liv res . Chron ique . D épouillement des périodiques . Bibliographie .

TOM E XV ! I

Borat . E tudes sur le D eutéranome (2° Compos i tion .

H . L es sources et la date . Mansour. La legen e d’

Achille , d’

aprèsE .

—H . M eyer. P. Reynaud. M . Max Müller et les origin es dela mythologie . Bild. Le pes sim isme moral et religieux chez

Hom ère et Hésiode . J . Ha levy L a re ligion des ancien s Babylon ien s et son plus récen t his torien M . S ayce . Maspero L e sh ypogées royaux de Thèbes . Bulletin critique de la religionégyptien n e (t

° ? article) . J . Loeb . Les coutrov erses religieusesen tre les Chré tien s et les Juifs au moyen âge , en France et en

E spagn e (t°r article ) . Balévy . L e s tra vaux de M . Jérém ias et

de M . Han t sur la religion et la langue des an cien s A ss rien s .

Dacour emauche . La morale re ligieuse chez les Muse man s .

G. Lafaye . Un nouv eau dieu syrien Rome . M a ssebieau .

E n core un mot sur la v ie con templativ e de Philou . Corres

panden es L ettre de M . Lafaye . Revue des L iv res Chron ique . D épouillem en t des périodiques . Bibliographie .

TOM E XV I I I

Maspero . Les hypogée s royaux de Thèbes (2° et dern ière partie) .G. Lafaye . Bulletin archéologique de la re ligion romaine . 1881 .

I . Loeb . Le s con trov erses religieuses en tre les Chrétien s et

le s Juifs au moyen a e en Fran ce et en E spagn e (2° et dern ière

artie ) . P. Paris . .es découv ertes en Grève . Bulletin archéo

lbgique de la re li io n grecque , 18874 888 . Goldz iher. in fluences

chrétienn es dan s a littérature re ligieuse de l‘

I s lam . Masparo .

La mythologie égyptien n e . L es trav aux de MM . Brugsch et

Lanzan e il ! partie ) . Cl . Buart . La re ligion de Bab . E ssai de

réforme de l i slamisme en Perse au mx° siècle . L . Peer. Le

séjour des morts chez les indi en s et selon le s Grecs . Borat .

É tudes sur le D eutéranome (3° article) . L e s sources et la date du

D eutéranome . Dumaut ier. L ég endes et traditions du Tonkin

et de l'

Annam . Barth . Abel Bergaign e . Rev ue des L ivres‘

.

Chron ique . D épouillemen t des périodiques . Biblio

graphie.

TOM E X IX

Maspero. La m balogie égy t ienn e . Les travaux de MM . Brugsch

et L anzan e partie) . Vern es . Quand la Bible a—t—elle été

composée ? a—t—ii , dan s l‘

An cien Te stamen t. des livres ou des

morceaux an térieurs à l’

é oque du second tem le ? Barth .

Bulletin des religion s de 1’

nde . Piepenbring. a religion pri

mitive des Hébreux. Moïse et le Jahv isms . Bd. Montet . D e

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PUBL ICATIONS DU MUSEE GUIMET

R eligion s ancien nes de l‘

É gypte . G. Maspero . S tèles fun éraires .

L'

ombre chez les Egyptien s . Félix Robien . Mémoire sur

l‘

économie polit ique . l‘

adm in is tration e t la législa tion de l'

Egypteson s les Lagides . L

immortalité de l'

âme chez les Egyptien s .

B. Lafébura . Le L iv re des Morts. Papyrus de Soutimès .

L e L o tus chez les Egyptien s . J . L eiblein . E tude sur le nom et

le culte prim itif du D ieu hébreu Jahveh . B. N av ille . L es quatres tèles ori en tées du Musée de M arse ille .

Religions anciennes de la Perse et de l‘

A ssyrie. Ardouin du Mazet .L es dangers du

roaélytiame musulman dan s l‘

Afrique cen trale .

B . Cordier. L’

s lamisme en Chin e .— Caravan es et èlerinages

de la M ecque au poin t de v ue commercial . Le abisme .

J . Dam astater . Ormuzd e t A rhiman . B. Cartaiihac. L‘

age

de la pierre en A sie .

SOMMAIRE DU TOME I l

Religions ancienn es de l‘

I nde. S ir Coomara- Swamy

. Extraits du

D a thav an ça . Carson da Cunha . In troduction à'

histoire de la

D en t Relique du Bouddha . L it térature des religion s des'

peu

pics de l‘

archi s i des indes Orien tales N éerlandaises . Panditi léké . Ca te agua des Bouddhas qui on t précédé Çdkya—Moum .

A lwys . Visites des Bouddhas à Ceylan . D ! Cnet . L es langues

modern e s de l‘

inde . Da Sylv a . Du N irvana . De Gharancay.

L e mythe de Vatan .

Religions de la Chin e . B . Cordier . Aperçu sur les reli an s de la

C hin e . B. Bi te] . L e Feng- shui . Y. Ymaizoumi . tuda cri

t ique sur Lab— iss u . P. Parny . Pro v erbes dhiuois . P. Lai

iita . Con s idéra tio ns gén érale s s ur l'

en semble de la civ ilisation

chino ise . Y. Ymaiz 0umi . D es croya nces e t des supers tition s

des Ch inois a v an t Con fucius .— J . Du

çis . E xpédition au Tonkin

B, Ayman iar . Texte s khmers . Ymaizoumi . D u culte des

A n cêtres en Chin e san s la dynas tie de'

i‘

chéou . E tude sur le

livre de la Vertu et de la Voie .

Reliqion3 du Japon . L . Matohn ikoii.E tude sur la religion natio

n ale des Japon ais , le culte de s Be an s o n S h in toi sme . Barada.

His torique des dittéren ts caracteres d’

écn tu_ra employés au

Japon . S émitan i . Le mon t S humi . E xplication du mot Rid

Bou . Prière à. Amida Bouddha . Y. Ymaizoumi . D e la re li

gio n Shin toista. Bruant Chautra ._Reia tion s en tre les s istres

bouddhiques e t certain s obj e t—1 _de l'

age de bronze européen ._

D e l‘

usage de s s is tres . S ém1 tan i . N o tice sur la déesse Bén

Z aï— tén . L . M atchn ikoii . D es caractères an cien s au Japon .

E criture I l i/oumi ou du Livre du S o leil ; écriture A na-l ier ; écri

ture I lolsma .

C lô ture du Congrès . Vœ ux émispar le Congrès . Résumé des

Travaux du Congrès . Inauguration du Musée Orien tal de M .

Guimet .

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ERNE ST LEROUX, ED ITEUR“28

,s es nomm era

,98

R . D A RE STE , M embre de l'Ins titut

LA S AGA DE N IA L , traduite en fran cais pour la prem iere fo i s .

ln—18

R .—B A N D E R SON

MYTIM I.O(HE S CAN D IN AVE . Légende s des Eddas . Tradu c tio n

de M . .I . Lacuanco. I i i — 18 3 fr. . .u

E . B E A U VOI S

I MAGIE CHE Z LE S FIN NOIS . 2 broch . ñu-8 fr.

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LA V IE D E S A INT — GA LL et le Pagan isme german ique .

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A . B E R TR A N D , M embre de l'I n stitut

GAULE AVANT LE S GAULOIS ,d

après les monumen ts et le s

les textes . N ouv elle édition . I ii — 8, n ombreuses illustra

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LE épopée fin n o ise . Traduite sur l‘

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LE S TEMPS Pli É ll lS TORIQL‘

E S en S uède et dan s les autres

pays scandinav es . Traduit par S aconox Rsmscn . ln -8, illustré

de 20 plan ches , 427 figures et un e carte 10 fr.

Baugé (Maine-e t-Loire ) . Imprimerie D atum .