Gouttebroze SarahManon Ariane

Master 1 Métier du LivreLe 4 Avril 2011

L' nluminure

I/ Définitions et PratiquesA/ Manuscrit

e mot manuscrit vient du latin : manus la main et scribere : écrire, il s'agit donc d'un texte écrit à la main.

Les manuscrits sont les livres écrits à la main, sur du parchemin, et donc des objets uniques.La confection d'un manuscrit est un travail réalisé en plusieurs étapes. Jusqu'au XIVe siècle, le texte est écrit sur une peau de bête (le plus précieux, le velin étant fait en peau de veau mort-né) appelée parchemin.

e parchemin est découpé en feuilles qui sont regroupées en cahiers. Les couvertures étaient en cuirs et parfois incrustées de métaux plus ou moins précieux. La reliure est parfois décorée, notamment par estampage à froid de petits fers juxtaposés. Les livres précieux du culte peuvent être dotés de reliures comportant des morceaux d'ivoire et de l'orfèvrerie.

ur chaque page, des lignes verticales et horizontales sont

tracées avec un calame pour guider l'écriture. Le texte est écrit à l'encre noire, les rubriques à l'encre rouge et se répartit sur deux colonnes. Dans les espaces réservés par le copiste au début des textes, l'enlumineur peint les miniatures et les initiales ornées ou historiées et, dans les marges, il peut réaliser des décors végétaux, minéraux, ou des petites scènes de la vie courante.

es ouvrages représentaient donc un travail long, compliqué et minutieux, ce qui

explique le petit nombre qui en a été produit et leur coût.

B/ Enluminures

nluminer vient du latin « illuminare », c'est-à-dire éclairer, illuminer. Les enluminures sont de petites

peintures qui décoraient les manuscrits, les premières lignes des chapitres ou des images pieuses prenant une page entière. Néanmoins, ce terme désigne à partir du XIIIème siècle les dorures.

n parle aussi de miniatures, mot qui vient de l'Italien « miniatura », issu du latin « miniare » et qui signifie

donc « enduire de minium » c'est-à-dire l'oxyde de plomb rouge qui servait pour tracer les initiales et les titres, nommés rubrique (mot lui-même dérivé de « ruber » qui signifie « rouge », en latin.

C/ Différents types d'enluminures

es Lettrines

Les moines enluminent différentes parties des manuscrits. Une des partie de la page la plus ornée est l'initale, ou la lettrine. Il en existe de différente sorte. Elles peuvent être peintes ou rubriquées (c'est-à-dire rouge).

Elles peuvent être simples, champies (dorées sur fond peints, avec des motifs stéréotypés), filigranées (avec un motif végétal dessiné avec une plume relativement fine), ornées (avec des entrelacs d'animaux, de plantes et même de personnages), synthétiques (le décors forme la lettre) ou encore historiées (des scènes narratives sont représentées dans les espaces libres de la lettre).

es pleines pages

Entre plusieurs pages de textes, il arrive que l'on trouve une ou deux pleines pages d'images. Celles-ci sont souvent d'une grande importance et sont de petits tableaux d'une grande finesse.

À l'époque Carolingienne où elles deviennent plus fréquentes, elle se trouvent au début de l'ouvrage pour l'illustrer, plus tard, les enluminures gothiques et romanes représentent la plupart du temps des scènes religieuses.

es marges

Les marges sont apparues tardivement. La ligne qui descendait de la lettrine s'élargit et devient un espace à lui seul. Dans ce nouvel espce se juxtapose les motifs sacrés et profanes : scènes de la vie du Christ, passage des saisons, des événements (guerres, fêtes...), motifs floraux et géométriques ornent à présent le tour des pages.

Bientôt les marges sont aussi appropriés par les étudiants des universités qui rajoutent eux aussi leurs propres dessins dans les marges ainsi que leurs annotations personnelles. Les marges deviennent donc définitivement le lieux de la liberté et le meilleur endroit pour retrouver les indices de l'Histoire.

Les Grotesques

e terme de grotesque s'applique depuis l'Antiquité à des décors qui ornaient le

tour de peintures plus importantes. Pour couvrir les murs intérieurs des maisons romaines autour des fresques principales, on rajoutait des décors végétaux et des figures étranges, parfois mi-animales, mi-humaines. Au Moyen-age ce bestiaire s'élargit avec les créatures fantastiques venues d'Orient, avec les conquêtes Arabes, et les nouveaux monstres asiatiques que l'on découvre avec les routes de la soie.

ans les manuscrits, les grotesques ornent parfois le tour des pages,

au même titre que les motifs floraux ou les petites scènes de la vue quotidienne.

D/ Le travail de l'enlumineur

ans les monastères, les moines avaient des tâches bien définies. Ce

n'étaient pas les mêmes moines qui préparaient les peaux et qui enluminaient. Mais même parmi les moins copistes, celui qui posait les feuilles d'or n'était pas forcément celui qui recopiait.

Le travail de copiste était pénible, les monastères souvent froids et mal éclairés. Les tâches étaient réparties, les uns traçaient les traits, les autres copiaient. L'un traçait le tour de l'initiale et du dessin à la mine de plomb réhaussé à l'encre, le suivant appliquait la couleur et le dernier les feuilles d'or.

Les couleurs étaient faites à partir de pigments, d'eau et de liants, quant à la pose à la feuille d'or, elle était complexe et très minutieuse. Le travail des moines enlumineurs était minutieux, un vrai travail d'orfèvre.La fabrication des couleurs étaient elle aussi complexe (voir les annexe) et leur utilisation précise, chacune signifiait quelque chose de précis comme nous le verrons plus tard.

II/ Historique

ujourd’hui le terme d’enluminures englobe l’ensemble de l’ornementation des manuscrits. L’enluminure est donc le décoré réalisé à la main ornant ou illustrant un texte

presque toujours manuscrit (des livres imprimés sont aussi enluminés). C’est pourquoi l’histoire de l’enluminure est fortement corrélée avec celle du livre puisqu’il en est le support. Ceci fait de lui un art à part. Au XIX siècle on parle de miniatures, mot qui vient de l'Italien « miniatura », issu du latin « miniare » et qui signifie donc « enduire de minium » c'est-à-dire l'oxyde de plomb rouge qui servait pour tracer les initiales et les titres, nommés rubrique (mot lui-même dérivé de « ruber » qui signifie « rouge », en latin. Le terme « miniature » désignait les lettrines peintes en rouge.Au départ très modeste, cet élément décoratif a joué un rôle important dans la mise en page des textes. Les initiales enluminées servaient notamment de repères pour distinguer les différentes articulations d’un texte. Au début du Moyen Age, l’enlumineur ne cherche pas l’originalité. Il copie et décorent les manuscrits liturgiques en copiant des exemples célèbres et prestigieux déjà présent dans son monastère ou prêté par d’autre abbaye. Les premiers siècles du moyen âge donnent la priorité aux textes sacrés. Les textes ne sont pas toujours dotés de peintures. Celles-ci sont uniquement présentes dans les exemplaires de luxe, les grands volumes placés sur les lutrins dans le chœur des églises.Au XIIIème siècle, la peinture sur panneau en Italie apparaît et se répand rapidement dans tout l’occident. Celle-ci donne le ton des ma-nuscrits car elle s’inscrit rapidement comme un art majeur. Enlumineurs et peintres n’étant pas forcément, à l’époque, deux professions distinctes. On assiste a une division du travail au sein des ateliers : le miniator décore les marges et les initiales puis le peintre d’ystoir s’occupe des illustrations en pleine page.

u cours de l'époque médiévale, les initiales enluminées ont connu de nombreuses transformations liées à l'évolution des types

d'écriture, des styles et des techniques picturales. A partir de la seconde moitié du XIIIe siècle, la lettre ornée a été dotée de prolongements qui ont donné naissance aux bordures et aux encadrements végétaux et floraux. Chaque lettre est souvent rattachée a une représentation, par exemple ou utilise souvent le T pour illustrer la crucifixion et on loge les statues de Saints dans les I. Généralement de la première lettre s’échappe une longue baguette qui descend tout le long de la page. Dans le même temps apparaissent des ateliers laïcs (suite à l’ouverture des universités et le développement du mécénat) qui donnent lieu à une généralisation des pratiques. En effet, l’ouverture des ateliers laïcs génèrent une production importante d’œuvres profanes et font de l'enluminure un véritable commerce, notamment pour des nobles en quête de reconnaissance sociale. La longue baguette rattachée à la lettrine prend son indépendance pour donner naissance à un nouvel espace primordiale dans l’histoire de l’enluminure : la marge, lieu d’invention et de liberté. En effet dans les marges se juxtaposent les motifs sacrés et profanes, ces illustrations font sens : elles se composent de motifs végétaux et animaliers, s’inspirent de proverbes, de jeux de mots et d’historiette pour y dépeindre des scènes de la vie quotidienne ou du répertoire comique, fantastique ou moralisateur. La marge devient un espace de discours à part entière. Le travail d’enluminure se détache de la sphère purement monastique. Au XVème siècle la décoration des marges ga-gnée par une certaine standardisation. Les feuilles d’acanthe ou de vignes deviennent par exemple omniprésentes ainsi que les semis de fleurs et les symboles héraldiques. Cette à cette époque également que se répand le genre du livre d’Heures.

La gravure sur bois permet la reproduction ra-pide et à moindre coût. La production tend à se standardiser pour répondre à une très forte de-mande.

L’apparition du livre imprimé vers 1450 va mo-difier considérablement le rôle et l’importance du manuscrit enluminé. Néanmoins, elles étaient désormais l’œuvre des copistes, qui uti-lisaient des calques et des transparents pour re-produire les ornementations. Elles étaient pous-sées à un tel degré de luxe et de perfection, que seuls les plus puissants pouvaient s’en procurer. C’est pourquoi cet art disparu en même temps que les grandes fortunes.

III/ Enjeux de l'enluminureA/ L'enluminure : bibliothèque artitistique du Moyen-Age

’enlumineur récupère le manuscrit après le travail du copiste qui lui a

laissé des blancs aux endroits à enluminer. L’artiste a en réalité très peu de liberté. Il est soumis à de nombreuses contraintes : il doit composer avec la mise en page déjà organisée par le copiste avant lui. Il doit s’en tenir aux exigences du commanditaire (A la fin du Moyen Age, un contrat écrit spécifie ce que l’enlumineur doit réaliser. Le commanditaire et/ou le copiste laisse des notes sur ce qu’il veut être représenté dans les marges.) Il doit respecter les les nombreuses conventions représentatives de l’époque ( par exemple représenter les Saints avec leurs attributs)Sachant que la copie d’un livre de 400 pages devant environ six mois de travail pour un copiste rapide, la confection d’un livre entier peut prendre plus d’un ans.Malgré toutes les contraintes de l’exercice ainsi que les différentes périodes standardisation qu’a connu l’enluminure, on ne peut nier que celle-ci est un art à part entière. Dès le haut Moyen Age, l’enluminure a eu une double fonction illustrative et ornementale.

omme nous l’avons vu précédemment, les métiers d’enlumineurs et de peintres

ne sont pas forcément différenciés. De plus, une des formes de l’enluminure est la peinture de pleine page. Le format rectangulaire laisse à l’artiste l’espace nécessaire à la réalisation d’une véritable composition picturale. Réaliser une enluminure en pleine page se rapproche de la réalisation d’un petit tableau dont le cadre serait la page. La pleine page était surtout présente au tout début de l’histoire de l’enluminure dans les évangéliaires. A l’époque Carolingienne elle représente le plus souvent le portrait de l’évangéliste dont elles illustrent le livre ou encore celui de l’empereur ou du roi destinataire de l’ouvrage. Les enlumineurs gothiques ou romans s’en servent pour illustrer des scènes de la vie du Christ, des Saints etc. L’art d’enluminer donne lieu parfois à la création de véritable chef d’œuvre comme Les heures d’Etienne Chevalet. Jean Fouquet y a construit chaque miniature, pleine page etc. comme de petits tableaux, apportant à chacun foule de détails et un travail d’artiste remarquable. Ce précieux ouvrage fut dépecé au XVIIIème siècle et ses admirables miniatures converties en autant de petits tableaux. A la fin du Moyen Age se met en place un marché d’enluminure sur feuille volante sans aucun lien avec un manuscrit.

B/ L'enluminure : témoin historique

omme nous l’avons vu précé-demment, les éléments de dé-

coration obéissent à des effets de mode. On sait par exemple que les manuscrits caro-lingiens usaient à profusion d'or, d'argent et de pourpre. Il est donc possible de s’appuyer sur tout cela pour obtenir des datations relativement fines des manuscrits.De plus les illustrations sans rapport avec le texte lui-même donnent un éclairage sur la vie quotidienne de l’époque. Elle est le témoin, d'une époque, de manières de vivre, des modes vestimentaires, des techniques et du savoir–faire des artisans et paysans.

Texte et enluminures ne sont jamais deux es-paces distincts et imperméables l’un à l’autre. Les enluminures constituent un inter-texte très important. En effet leur contenu est fort en symbolique. L’enluminure permet d'élargir la réflexion en dépassant le simple contenu du texte.

e livre revêtait à l’époque une efficacité rituelle et sym-

bolique très forte. Le livre enluminé est un ob-jet de luxe, ce qui en fait par extension, un ob-jet de pouvoir. En plus d’illustrer le récit, les enluminures pouvaient avoir une signification en fonction de leur taille, de leur position mais également du contexte et du statut du personnage.La couleur revêt également une symbolique forte, par exemple l’utilisation du bleu est signe d’un très riche commanditaire. En effet le bleu était une couleur compliquée à réaliser, elle nécessitait l’utilisation d’une pierre précieuse : le lapiz-lapalus. Le bleu fut tout d’abord associé à la Vierge puis au pouvoir et à la royauté. Dans les représentations le bleu est donc une couleur réservé à la noblesse. Le noir est lui réservé à la justice et à l’église. Il est donc ainsi possible de décrypter un tableau, de savoir à quel ordre appartiennent les diffé-rents personnages et les relations de pouvoir qui se jouent entre eux.

On peut donc conclure que l’enluminure nous renseigne à la fois sur les mœurs et coutumes de la période à laquelle elles ont été réalisées, sur le statut du commanditaire mais aussi de l’évolution de cet art. Les enluminures sont des témoins majeurs de la vie courante de l’époque.

IV/ AnnexesA/ Les Très riches Heures du Duc de Berry

es Très Riches Heures du Duc de Berry représente le livre des heures, tel qu'il a existé dans la plus pure tradition médiévale. Il s'agissait en

fait d'une collection de textes pour chaque heure liturgique de la journée (d'où le nom), et qui incluait également des textes et écrits supplémentaires. Des calendriers, des prières, des psaumes et des messes y étaient d'ailleurs fréquemment inclus.Les Très Riches Heures est une pièce absolument unique, l'archétype véritable de l'Art Gothique. C'est une des premières fois dans l'histoire artistique, que le calendrier sert de base à un ornement et à un raffinement aussi poussé dans les détails. Les miniatures sont remarquables dans leur disposition dans l'enluminure, ce qui laisse penser, d'après le style, que l'un des auteurs de ces enluminures avait visité l'Italie, tout en donnant une place importante aux peintures descriptives des paysages du Nord.

es Très Riches Heures du Duc de Berry ont été peintes par trois frères, les frères Limbourg,

Paul (Pol), Hermann et Jean (Jannequin). Ils étaient tous trois originaires de la ville de Nijmegen, qui se trouve aujourd'hui dans les Flandres, mais étaient fort probablement des Allemands. On ne sait que peu de choses à propos de ces artistes exceptionnels. Ils seraient nés entre 1370 et 1380, dans une famille d'artistes. C'est en février 1416 que les trois frères Limbourg meurent, dans leur jeune trentaine, probablement victimes d'épidémies, puisque la peste faisait des ravages dans ces régions du monde. Les Très Riches Heures qui furent commencées aux alentours de 1413 restèrent inachevées à leurs morts. Cette oeuvre fut complétée et achevée par le français Jean Colombe (1440-1493?) à peu près soixante-dix ans plus tard.

Ce livre d'heure est particulièrement connu et reconnu pour la grande précision de ces enluminures. Non seulement, elles ont été faites avec des matériaux nobles (pierres précieuses) pour donner un éclat plus vifs aux couleurs, mais les peintres ont utilisé des pinceaux extrêmement fins et des loupes grossissantes pour arriver à un résultat aussi précis.

Etant resté inachevé, il fut complété par Jean Colombe, mais sa technique étant moins fine, il est facile de savoir ce qu'il y a ajouté.

Janvier : le Duc de Berry à table.Le Duc d'Aumale a décrit cette miniature dans les termes suivants :« Le Duc de Berry est assis, suivant la tradition, le dos au feu, le ventre à table ; il est coiffé

d'un bonnet de fourrure ; sa robe est longue et bleue, fourrée et brodée d'or. Le dais qui abrite sa tête est d'étoffe rouge, chargé d'écussons semés de France.à la bordure engrelée de gueules et parsemé d'ours et de cygnes blessés (souvenir d'une dame, dit-on). Armes et emblèmes sont répétés dans la bordures des tapisseries qui décorent la salle et qui présentent, elles-mêmes, des tableaux complets, sujets de guerre traités avec le plus grand soin, château-fort, rencontres d'hommes d'armes à cheval ou à pied, boucliers et bannières armoriés, etc... Au premier plan, écuyers tranchants, valets du gobelet, lévriers. Tous les costumes sont pittoresques et l'harmonie des couleurs charmante. Au bout de l'estrade où siège le Duc, un personnage qu'à son manteau rouge et son costume ecclésiastique on prendrait pour un cardinal, s'assoit humblement et semble remercier le prince de l'honneur qui lui est fait. Cette figure très étudiée et pleine d'expression, est certainement un portrait qui fait pendant à celui du Duc. Est-ce à ce prêtre, pèlerin ou cardinal, que s'adresse le chambellan qui, se promenant avec sa chaîne et son bâton d'office, jette ces mots écrits : « Approche, approche » ? Encore une figure qui peut bien être peinte d'après nature. Au second plan, des seigneurs ou écuyers se chauffent au feu qui pétille dans une cheminée de pierre et se protègent contre son ardeur en tournant la tête et en étendant les bras. Un écran circulaire en jonc abrite le dos du duc ».

FévrierScène de vie paysanne. L'enluminure représente à la fois la vie à l'intérieur des maisons, le

soir, et la vie de labeur durant l'hiver.

Mars : Le château de LusignanLes paysans taillent la vigne et labourent les champs. L'un d'eux vanne le blé ou des

graines. Le miniaturiste, malgré les couleurs, a traduit la misère des costumes paysans. Les détails de la construction du château sont exacts. On peut mettre leur nom sur les

tours et les portails. Au sommet de la tour poitevine, un dragon ailé : la fée Mélusine qui « vient à travers les airs retrouver son mari Raymondin ». Là fut le berceau des Plantagenet et de La Rochefoucauld. Le Duc de Berry en fit une de ses résidences favorites.

Avril : Le château de DourdanL'enluminure évoque trois sujets : le château de Dourdan, forteresse assez sûre, où le

Duc de Berry déposait une partie de ses objets précieux. Avec l'étang et les pêcheurs, ainsi que les arbres fruitiers qui commencent à fleurir, on comprend l'évocation du printemps.« Avril, l'honneur des boisEt des moisLa douce espérance... »Enfin, les personnages du premier plan, des jeunes filles qui cueillent les premières fleurs dans la prairie ; et des fiancés qui échangent l'anneau qui engage leur foi, rappelle aussi d'une certaine façon la venue du printemps et le radoucissement du temps.

Mai : La ville de RiomL'enluminure représente ici la capitale du duché d'Auvergne, l'un des fiefs du Duc de

Berry.Le 1er Mai est jour de grande fête à la cour de France. Précédés de musiciens, des

jeunes gens formés en cavalcade parcourent la campagne. Ils sont couronnés de feuillage. Trois des amazones portent la « livrée de May », de drap « vert-gay » dont Charles VI aimait gratifier ses familiers à l'occasion du renouveau. En tête, un élégant cavalier peut être un prince du sang ; il porte les couleurs du roi de France, à cette époque, mi-partie rouge, mi-partie blanc et noir.

Juin : Le palais et la Sainte ChapelleLe Palais et la Sainte Chapelle sont représentés tels que le Duc de Berry les voyait

des fenêtres de son hôtel de Nesles, situé sur la rive gauche de la Seine. On reconnaît les tours de la Conciergerie, la tour de l'Horloge, les deux pignons de la grande salle du palais. Entre les bâtiments et le mur d'enceinte crénelé on aperçoit du dehors des berceaux de feuillage et de fleurs. A gauche, une curieuse poterne donne sur la Seine.Au premier plan, les travaux des paysans à ce mois de l'année : la fenaison.

Juillet : Le Château de PoitiersBâti à la fin du XIIe siècle, le château de Poitiers s'inscrit dans un triangle entre deux cours

d'eau, le Clain et la Boivre ; le Duc de Berry le reconstruisit. Le dessin du pont de secours en bois fournit de curieux renseignements archéologiques sur les dispositifs adoptés par les ingénieurs militaires en ce point de la défense.

Des moissonneurs coupent les blés à la faucille, tandis que des bergers tondent les moutons

Août : Le Château d'EtampesAu premier plan, des nobles partent à la chasse avec leurs faucons.En arrière plan, les paysans moissonnent et se baignent dans le cours d'eau.

Septembre : Le Château de SaumurD'après d'autres illustrations de la même époque, le château représenté est très fidèle

à l'original.Au premier plan, les paysans font la vendange, le vin de Saumur étant très réputé.

Octobre : Le LouvreC'est l'image la plus fidèle du Louvre sous Charles V.

Au premier plan, les paysans font les semailles. On remarque la présence de chiffon au bout de baton et d'un épouvantail en forme d'archer prêt à tirer pour effrayer les oiseaux.

Novembre C'est le seul mois illustré seulement par Colombe, seul le fronton avait été fait par les frères

Limbourg. L'enluminure montre la récolte des glans avec lesquels les porcs se nourissent.

Décembre : VincennesEn arrière plan, le château de Vincennes, longtemps résidence princière.

Au premier plan, l'enluminure montre une chasse au sanglier.

B/ Les Encres et Couleurs

es encres naturelles sont connues depuis l'Antiquité comme l'encre de seiche, ce qui donne une encre sépia.

Les encres au carbone (noires) sont fabriquées avec un produit calciné réduit en poudre (noyeau de pêche, sarment de vigne), ou du noir de fumée mélangé avec un liant pour qu'il reste sur la page, la résine d'arbre, le miel et surtout le blanc d'oeuf étant les plus utilisés.

On appelle les encres métalliques celles qui s'obtiennent en mélangeant des tannins végétaux avec du vitriol (du sulfate de cuivre). Le tannin le plus utilisé est fait à partir de la macération des noix de galle. Ces encres foncent au contact de l'air.

près avoir tracé le dessin à la mine de plomb et l’avoir rehaussé à l’encre, l’enlumineur commence par poser le mordant ou « assiette » destinée à recevoir la feuille d’or. Le mordant est l’apprêt collant mis

sur toutes les parties destinées à être dorées. Cet apprêt peut être composé de gomme d' ammoniaque, de blanc d’œuf, de colle de poisson ou de jus d’ail. Cette technique permet les dorures à plat. Pour obtenir une dorure en relief et étincelante, l’or est posé sur une assiette qui se constitue alors d'un mélange de bol d’Arménie (une argile rouge très fine), de miel et de colle. Elle permet de créer du relief et après son séchage complet, il convient de la polir afin de la rendre parfaitement lisse et brillante. L’or adhère sur cette assiette lorsqu'on exerçe une pression à l’aide d’une agate. L’or peut être ensuite bruni avec une agate, ou une dent de chien.Seul l’or en poudre mêlé à de la gomme arabique peut être appliqué après la peinture.

Les encres de couleurs sont obtenues en mélangeant le pigment de la couleur désirée avec de l’eau et un liant.

es couleurs minérales sont les couleurs les plus stables. On distingue plusieurs origines: les ocres jaunes et rouges; les terres (vertes, brunes ou noires); les

minéraux réduits en poudre : cinabre (sulfure de mercure), réalgar (disulfide d’arsenic), orpiment (trisulfure d’arsenic), malachite, lapis lazuli et azurite; et l’oxydation des métaux : céruse (oxyde de plomb), en chauffant la céruse on obtient le minium, le vert de gris (oxydation du cuivre).

Le bleu fait à partir des pierres de lapis-lazulis est le plus précieux et est donc réservé aux personnages nobles, comme les rois. Il symbolise aussi la loyauté et la joie.

Le blanc de céruse est très utilisé pour son côté couvrant. Dans la symobolique, il est associé à la Vierge, signifiant l'humilité et la vertu, mais également le deuil jusqu'au XVIème siècle.

es métaux sont oxydés avec de l’urine, du vinaigre ou du marc de raisin. Ces

pigments sont conservés en poudre ou mélangés à la détrempe et conservés dans des coquilles.

es couleurs végétales sont extraites par macération, décoction ou fermentation et ont donc besoin d’être stabilisées. Elles sont conservées sur des morceaux de lin imprégnées d’alun (sel métallique) ou précipitées sous forme de laque.

oir : Le noir de charbon obtenu par

la calcination de bois de chêne est le plus ancien des noirs. Il est déjà cité par Pline l'Ancien.

Noir de lie de vin : la calcination de la lie de vin séchée ou de marc de raisin donne du noir. Il était fabriqué en Europe occidentale et est déjà cité par Pline l'Ancien

Le noir de fumée ou noir de carbone est obtenu à partir de la suie produite lors de la combustion de bois résineux. Son utilisation est la plus courante au monde.

Le noir de Liège est obtenu par calcination en milieu clos de l'écorce du chêne liège afin d'obtenir du charbon.

Le noir de noyaux est la calcination en milieu clos de noyaux des fruits tels que la pêche, l'abricot ou même des coques d'amandes.

Le noir de vigne est la calcination de sarments de vigne en milieu clos. Il crée un noir bleuté, fixe et stable.

Le noir est une teinte réservée à l'Eglise. Cette couleur signifie autant la mort, la pénitence que la résurrection.

aune :Le Carthame donne un colorant jaune

obtenu à partir de la fleur de cette plante qui sert aussi à la teinture. Cette plante est connue depuis l'Egypte ancienne et utilisée également en Extrême-Orient.

Le curcuma est d'abord une épice, mais sa racine produit un colorant jaune. Cette plante a été importé d'Asie.

Le safran donne une teinte jaune fragile, plutôt employée en mélange. Il est connu depuis la plus haute antiquité mais reste de tout temps une péice très coûteuse.

La gaude toute entière est utilisée pour obtenir un colorant jaune. Elle poussait d'elle-même à l'époque et a également été cultivée. Aujourd'hui elle est considérée comme rare. Elle est connue depuis le néolithique.

La Gomme-gutte est de couleur jaune et s'écoule naturellement d'un arbre le Garcinia Hanbury qui pousse en Asie. Il suffit de la broyer et de la diluer.

On utilise du nerprun les baies de ce buisson depuis le II° siècle. Ce buisson pousse dans le bassin méditerranéen, au Moyen-Orient et dans le sud de la France où les fruits portent le nom de "Graines d'Avignon". Cueillies vertes, les baies donnent un jaune vif et froid mais cueillies mûres, on obtient un vert foncé nommé "Vert de vessie", car à l'époque cette couleur était stockée dans des vessies de porc.

iolet :Les lichens donnent diverses teintes

selon leur préparation, allant du jaune au rouge, brun et rouge violacé. Le plus mentionné au Moyen âge est l'orseille qui se ramasse dans le bassin méditerranéen et qui est rouge. C'est une couleur dure à réalisée car il est interdit de mélanger des couleurs.Il symbolise le plus souvent le deuil et la pénitence.

ert :Avec les fleurs d'ancolie ou

d'iris de couleur bleues violettes, on obtient un vert qui fut surtout utilisé en enluminure (Couleur citée par Pierre de Saint Omer ( XIV°).)

leu :L'indigo est obtenu à partir des

feuilles des buissons d'indigofera, dont il existe plusieurs variétés qui poussent en Inde, en Egypte et au Moyen-Orient. Cette couleur est connue depuis le néolithique.

Le tournesol est en fait une plante devenue très rare, nommée également Folium ou Maurelle. Elle donne du bleu, du violet qui n'est pas stable.

Le guède est une plante dont on extrait le fameux pastel bleu. Il est connue depuis le néolithique et a fait l'objet de cultures intensives au Moyen âge en France. Le pastel reste un produit très cher d'abord utilisé en peinture puis comme en teinture.

Le sureau ont des baies qui produisent du bleu ou du violet selon les recettes.

ouge : Le bois Brésil est un bois rouge

qui était importé d'Orient. Il permet de faire des pigments rose, rose violacés ou rouges (Couleur citée par Heraclius (XI°-XII°), Johannes Archerius (XIV°)etc...).

La Garance des teinturiers donne un colorant rouge (la plus solide que l'on sait faire) extrait de la racine. Cette plante a sûrement été utilisée dès le Néolithique.

Le sang de dragon est l'exsudation d'un palmier, le Calamus Draco qui vient de l'Asie du sud. Cette résine est rouge foncée.

Dans la symbolique, le rouge a un rôle ambivalent, il désigne la joie, mais aussi la colère et la violence.

es couleurs animales sont spécifiques selon l'animal. Les

recettes pour fabriquer la pourpre à partir de coquillages se sont perdues dès le haut Moyen Age. La matière colorante d'origine animale est le kermès appelé aussi " graine ". Le pigment rouge provient du corps desséché d'un insecte parasite d'un chêne du bassin méditerranéen. On obtient également un colorant rouge identique au kermès avec la cochenille de Pologne

’enlumineur doit broyer ses pigments avec la détrempe. Cette opération est

primordiale car d’elle dépend la bonne tenue de la peinture. Le broyage s’effectue sur une plaque de pierre très dure (en porphyre ou granite) à l’aide d’une molette ou d'un pilon. Il permet à la fois d’affiner le grain du pigment et d’agglomérer ses grains au liant. Une fois sèche, la préparation s’utilise comme de la gouache.

u’elles que soient leurs origines, les pigments se travaillent à l’aide d’une détrempe. La détrempe est le

mélange de plusieurs corps permettant aux pigments de s’agglomérer et d’adhérer au parchemin. Elle se compose d’un liant : l’œuf et principalement le blanc d’œuf en enluminure. Le blanc d’œuf est rompu à l’éponge pour lui faire perdre sa viscosité, et on y ajoute des clous de girofle pour le conserver. Il sert à agglomérer le pigment en poudre. La gomme arabique est le liant le plus répandu et permet à la peinture d’adhérer sur le support. Enfin le miel apporte de la souplesse à la matière.

utre les outils d’écriture, l’enlumineur dispose de pinceaux très fins en poils de marte et

d’écureuil enchâssés dans un manche de bois. L’enlumineur ne mélange jamais les couleurs entres elles. Certaines sont d’ailleurs incompatibles comme les pigments à base de souffre et ceux à base de plomb. Il peut seulement éclaircir ses couleurs en ajoutant de la céruse. Il peint en superposant de fines couches de couleur jusqu’à l’intensité souhaitée. Il varie les nuances en jouant sur la granulosité du pigment. En effet plus un pigment est broyé fin plus il s’éclaircit. En changeant la nature du liant il obtient des effets picturaux différents. A partir du XVème siècle, en gardant la même palette de couleurs, on obtient de nouvelles teintes en jouant sur les effets de transparence grâce à la superposition de voiles de nature différentes.

Bibliographie/sitograpghie :

http://liberfloridus.cines.fr/http://www.enluminures.culture.fr/documentation/enlumine/fr/ wikipédiahttp://enluminure-medievale.com/ La passion du livre au Moyen Age, Sophie CASSAGNES-BROUQUET, Ouest-France, 2003, Rennes. Le Moyen-Age en lumière, Manuscrits enluminés des bibliothèques de France,Jacques Dalarun, 2002