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NOTIONS ÉLÉMENTAIRES D’ÉTAT DES CONNAISSANCES Jay Anderson | Carla Gomez W. | Geoff McCarney | Vic Adamowicz | Nathalie Chalifour Marian Weber | Stewart Elgie | Michael Howlett La monétisation des écoservices, les instruments économiques basés sur le marché et l’aménagement durable des forêts : Notions élémentaires

La monétisation des écoservices, les instruments ...biblio.uqar.ca/archives/030147758.pdf · Publ. aussi en anglais sous le titre: Ecosystem service valuation, market-based instruments,

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NOTIONS ÉLÉMENTAIRES D’ÉTAT DES CONNAISSANCES

Jay Anderson | Carla Gomez W. | Geoff McCarney | Vic Adamowicz | Nathalie ChalifourMarian Weber | Stewart Elgie | Michael Howlett

La monétisation des écoservices, les instruments économiques basés sur le marché et l’aménagement durable des forêts : Notions élémentaires

NOTIONS ÉLÉMENTAIRES D’ÉTAT DES CONNAISSANCES

La monétisation des écoservices, les instruments économiques basés sur le marché et l’aménagement durable des forêts : Notions élémentaires

Jay Anderson, Department of Rural Economy, Université de l’AlbertaCarla Gomez W., Faculté de droit, Université d’OttawaGeoff McCarney, Department of Rural Economy, Université de l’Alberta et School of International and Public Affairs, Columbia UniversityVic Adamowicz, Department of Rural Economy, Université de l’AlbertaNathalie Chalifour, Faculté de droit, Université d’OttawaMarian Weber, Alberta Research Council et Department of Rural Economy, Université de l’AlbertaStewart Elgie, Faculté de droit, Université d’OttawaMichael Howlett, Department of Political Science, Université Simon Fraser

2010 Préparé dans le cadre du Projet « État des connaissances » du Réseau de Gestion durable des forêts sur le capital naturel et l’évaluation écosystémique en tant qu’outils d’aménagement durable des forêts. Chef d’équipe : Vic Adamowicz, Ph.D.

© 2010, Réseau de gestion durable des forêts

Cette publication peut être reproduite en tout ou en partie à des fins non commerciales sans autorisation, sous réserve d’une mention complète de la source. La reproduction de cette publication en tout ou en partie à toute autre fin, y compris la vente ou la distribution commerciale, exige une autorisation écrite préalable du Réseau de gestion durable des forêts.

La valeur ou la pérennité des renseignements ou liens contenus dans la présente publication ne font l’objet d’aucune garantie explicite ou implicite.

Les opinions, conclusions et recommandations exprimées dans la présente publication sont celles de leurs auteurs et ne doivent pas être interprétées comme étant celles du Réseau de gestion durable des forêts.

Référence : Anderson, J., C. Gomez W., G. McCarney, W. Adamowicz, N. Chalifour, M. Weber, S. Elgie et M. Howlett. 2010. La monétisation des écoservices, les instruments économiques basés sur le marché et l’aménagement durable des forêts : notions élémentaires. Notions élémentaires d’état des connaissances. Traduit de l’anglais, titre original : Ecosystem service valuation, market-based instruments and sustainable forest management : a primer. State of Knowledge primer. Réseau de gestion durable des forêts, Edmonton, Alberta. 25 p.

Pour une version électronique du présent rapport, visitez le site Web du Réseau de Gestion durable des forêts à http://sfmnetwork.ca. Les copies imprimées sont disponibles gratuitement jusqu’à épuisement des stocks.

Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives Canada

La monétisation des écoservices, les instruments économiques basés sur le marché et l’aménagement durable des forêts : notions élémentaires / Jay Anderson ... [et al.].

Publ. aussi en anglais sous le titre: Ecosystem service valuation, market-based instruments, and sustainable forest management.

Comprend des réf. bibliogr.

Monographie électronique en format PDF.

Également disponible en version imprimée.

ISBN 978-1-55261-258-3

       1. Foresterie durable--Aspect économique. 2. Forêts--Gestion--Aspect économique.  3. Forêts--Évaluation. 4. Services des écosystèmes. 5. Foresterie durable--Aspect économique--Canada. I. Anderson, Jay Anthony II. Réseau de gestion durable des forêts

SD387.S87E3614 2010a 333.75 C2010-904630-7

Traduction Les entreprises Verret Ltée

Conception graphique www.c3design.ca

Impression Priority Printing Ltd.

Imprimé au Canada

This publication is also available in English

Publié en juin 2010

Photographie Couverture avant (de haut en bas) : • Lynnette Anderson • Dave Locky • Marlow Esau

Arrière-plan : • Archives du RGDF

Couverture arrière : • Ducks Unlimited Canada

Table des matières

5 1.0 Introduction

7 2.0 Écoservices et leur monétisation7 2.1 Concepts clés et définitions

9 2.2 Monétisation des écoservices : une aide à la décision

13 3.0 Instruments économiques basés sur le marché et l’offre des écoservices13 3.1 Le rôle des instruments économiques

15 3.2 Le contexte canadien : défis, perspectives et forces motrices pour la mise en vigueur de mesures incitatives basées sur le marché

17 4.0 Perspectives de développement de marchés en écoservices pour l’aménagement durable des forêts17 4.1 Permis de perturbation négociable

19 4.2 Compensations en fixation de carbone forestier

21 5.0 Conclusions et messages clés

23 6.0 Références

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Liste des encadrés

8 Encadré 1. Bassin hydrologique des Catskill 9 Encadré 2. Biens publics et coûts d’opérations 10 Encadré 3. Exemples de politiques mises en œuvre et des valeurs correspondantes en écoservices14 Encadré 4. Exemples de programmes de mesures incitatives pour l’offre de biens et d’écoservices 18 Encadré 5. Plafonnement et échange, systèmes de crédit, compensations

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Un enjeu crucial auquel les gestionnaires du territoire, y compris les compagnies forestières, sont confrontés est que plusieurs des bénéfices et des coûts environ­nementaux reliés à leurs décisions sur l’utilisation des terres ne se reflètent pas dans les mesures incitatives. Présentement, par exemple, les compagnies forestières ne reçoivent aucune récompense monétaire, ou encore une récompense minime, lorsqu’elles incorporent des valeurs écologiques à leurs plans d’aménagement du territoire; de fait, ces compagnies encourent souvent des dépenses et leurs actionnaires se montrent récal­citrants. Afin d’assurer que les pratiques d’aménagement du territoire continuent de fournir des biens publics, il importe d’avoir des mesures incitatives qui encouragent l’offre et la protection de biens et services des écosystèmes. Le concept du maintien du capital naturel pour fournir des biens et services écosystémiques reçoit un appui étendu des gouvernements et du public; il demeure toutefois de nombreux défis à relever afin de mettre ce concept en pratique de façon générale.

Il y a de nombreuses valeurs associées aux écosystèmes forestiers. Certaines sont achetées et vendues sur des marchés tandis que la majorité ne l’est pas. C’est ce qui crée le besoin d’établir des façons de mesurer, de monétiser1 et d’établir des compromis entre la valeur des forêts en tant que biens et services marchands, tels la matière ligneuse et l’énergie, et les valeurs non marchandes reliées aux loisirs, à la conservation et à la filtration de l’eau ainsi qu’aux habitats fauniques. Traditionnellement, les services non marchands n’ont pas été monétisés sur le marché et c’est pourquoi nous avons besoin de nouvelles politiques et de mesures

incitatives qui incorporent les valeurs du capital naturel au résultat net ou à la rentabilité des compagnies et aux bénéfices des actionnaires. Des instruments basés sur le marché sont des mécanismes d’intervention qui utilisent des incitatifs financiers pour maintenir le capital naturel et l’améliorer.

Des instruments basés sur le marché sont des mécanismes d’intervention qui utilisent des incitatifs financiers pour maintenir le capital naturel et l’améliorer.

Le présent document offre un survol de l’état des connaissances par rapport à la mesure, à la monétisation et à la mise en vigueur d’approches fondées sur le marché et élaborées pour préserver les biens et services écologiques dans les forêts. Nous commençons par un survol des concepts reliés aux services des écosystèmes et à leur monétisation; une telle monétisation peut aider dans l’élaboration de politiques et appuyer l’aménagement durable des forêts. Nous passons par après à une discussion des approches politiques, y compris divers instruments basés sur le marché. Il est aussi question de certains défis reliés à l’élaboration de politiques. Nous terminons par des illustrations montrant comment des politiques basées sur le marché peuvent contribuer à l’aménagement durable des forêts au Canada.

1.0 Introduction

1 Ndlr : monétiser signifie réduire à la seule valeur monétaire.

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2.0 Écoservices et leur monétisation

2.1 Concepts clés et définitions

Les territoires forestiers et leurs ressources renouvelables et non renouvelables constituent un stock de capital naturel qui fournit bon nombre d’écoservices qui contribuent au bien­être des humains. Le capital naturel comprend des ressources renouvelables et non renouvelables telles les minéraux et l’énergie, les forêts, l’eau, les pêcheries et les écosystèmes qui fournissent des services essentiels (Olewiler 2004).

Le capital naturel comprend des ressources renouvelables et non renouvelables telles les minéraux et l’énergie, les forêts, l’eau, les pêcheries et les écosystèmes qui fournissent les services essentiels (Olewiler, 2004).

Les écoservices sont les bienfaits que les gens retirent des écosystèmes, y compris « les services d’approvisionnement » tels la nourriture et l’eau; « les services de régulation » tels le contrôle du climat et des inondations; « les services de soutien » tels la genèse du sol et le cycle des éléments nutritifs; et « les services culturels » tels les loisirs et les « services religieux », spirituels et autres bienfaits immatériels (p. ex. Millennium Ecosystem Assessment 2005, Daily 1997, Sanchirico et Siikamaki 2007).

Le concept clé qui distingue les écoservices des autres objectifs environnementaux est l’accent mis sur les bienfaits humains, directs et indirects, provenant du capital naturel (Brown et coll. 2006). La contribution des services au bien­être humain est un élément essentiel de la définition des écoservices, et cela représente un virage dans la façon dont on tient compte des écosystèmes dans l’élaboration de politiques et dans la façon dont le public les voit.

On trouve certains exemples d’autres terminologies représentant le même concept dans la littérature, y compris « les biens et services des écosystèmes » et « les biens et services environnementaux ». Dans ce document, nous adoptons la terminologie « écoservices », équivalent de l’expression « ecosystem services » utilisée par le Millennium Ecosystem Assessment.

La valeur que représentent les écoservices auprès de la société crée un besoin, soit celui de soutenir le capital naturel tel le fonctionnement des écosystèmes forestiers qui appuient ces processus (Brown et coll. 2006). Lorsqu’on emploie des substituts artificiels pour le capital naturel, ils peuvent souvent compenser les pertes en écoservices. Par exemple, si le fait d’enlever la forêt qui entoure une rivière a pour conséquence de diminuer la qualité de l’eau potable, il est possible pour les humains de construire une station de traitement d’eau potable en tant que substitut.

Pourtant, les substituts construits par les humains nécessitent souvent beaucoup plus que du capital humain et physique; ils exigent souvent des écoservices supplémentaires. De plus, les substituts

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artificiels ne ciblent souvent qu’une seule sorte d’écoservice, tandis que la dégradation du capital naturel amoindrit plusieurs écoservices. Et finalement, les substituts artificiels créés par la société peuvent finir par coûter plus cher à produire que de protéger les écoservices originaux (Brown et coll. 2006). Par exemple, les terrains humides fournissent d’importants services tels l’atténuation des inondations et une protection contre les grandes marées de tempêtes; la perte des terrains humides côtiers a contribué aux dommages reliés à l’ouragan Katrina de 2005 en Louisiane qui sont de l’ordre de plusieurs centaines de milliards de dollars. Il en coûtera de 17 G$ à 50 G$ pour remplacer la perte de capital naturel et les coûts ne faisaient pas partie d’évaluations immobilières typiques dans le dévelop pement des terrains humides (Ruhl et coll. 2009).

Les substituts artificiels créés par la société peuvent finir par coûter plus cher à produire que de protéger les écoservices originaux (Brown et coll. 2006).

Le Watershed Management Program (le programme d’aménagement des bassins versants) de la ville de New York, décrit dans l’encadré 1, démontre aussi qu’il en coûte moins cher pour maintenir un capital naturel plutôt que d’investir dans un capital artificiel créé par l’être humain.

Bien qu’il existe des marchés pour quelques écoservices tels les loisirs, il n’existe pas de marchés pour de nombreux écoservices, et ce, pour plusieurs raisons, y compris (voir, par exemple, Murtough et coll. 2002) :

• Les caractéristiques d’un bien public (y compris les questions reliées à la propriété) qui rendent certains écoservices difficiles à mettre sur le marché (voir encadré 2);

• Des coûts d’opération appréciables (i.e., coûts encourus pour participer aux marchés des écoservices causés, par exemple, par le petit nombre d’acheteurs et de vendeurs dans le marché, et par les différences dans l’information disponible aux acheteurs et aux vendeurs reliés aux coûts de mise en œuvre des écoservices);

• L’incertitude scientifique au sujet des bienfaits ou des qualités liés à des écoservices en particulier.

Le bassin hydrologique Catskill (Heal 2000)

Dans les années 1990, la qualité de l’eau entrant dans la ville de New York en provenance du bassin hydrologique Catskill avait tellement diminué qu’un nouveau système de filtration s’avérait nécessaire. On estimait, outre les frais opéra tionnels continus, le coût en capital de l’usine de 6 G$ à 8 G$. On estimait qu’il n’en coûterait que de 1 G$ à 1,5 G$ pour remettre en état le bassin hydrologique. La décision s’imposait clairement. On estime aussi que l’entente du bassin hydrologique a augmenté l’économie du nord-ouest de l’État de New York de 100 millions de dollars par année, la plupart de cette stimulation économique provenant de :

• l’augmentation de l’emploi. La ville de New York paie les habitants du nord-ouest de l’État qui travaillent pour le « Department of Environ mental Conservation ». Des entrepreneurs locaux sont payés pour installer des fosses septiques, améliorer les usines de traitement des eaux usées et établir des mesures de drainage pour protéger contre les eaux de pluie.

• l’augmentation des subventions. On rembourse les dépenses des agriculteurs qui construisent des clôtures et des ponts qui empêchent le bétail de se rendre aux voies d’eau. On verse de l’argent aux propriétaires fonciers qui n’exploitent pas leurs forêts.

• l’augmentation de l’écotourisme. L’augmentation du tourisme dans la région reliée à une appréciation de l’environnement naturel restauré rapporte des bienfaits aux commerces locaux (Kenny 2006).

ENCADRÉ 1

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Le problème des biens publics est le plus critique « défaut du marché » (empêchement des marchés de fournir un niveau socialement efficient d’écoservices). Ceci porte à penser que même si nous avions la certitude scientifique que les marchés ayant de bas coûts de transaction existent, il serait encore impossible de fournir des écoservices au niveau exigé par la société, et ce, à cause de resquille boursière – des gens qui bénéficient des écoservices sans en payer la note – et, par conséquent, de l’incapacité de certaines entités (gens, compagnies, ou autres agences) à profiter de tous les bénéfices reliés aux écoservices.

En théorie, les marchés qui fonctionnent fournissent de l’information (par le biais de prix et de profits) à la société au sujet de la valeur relative des biens et services dans l’économie. Les ressources rares peuvent ainsi être réaffectées de sorte d’en retirer le bénéfice maximum. Dans le cas des défauts du marché décrits ci­dessus, on doit se servir d’autres méthodes pour établir la valeur des écoservices et incorporer ces valeurs aux politiques publiques et aux prises de décisions personnelles. L’objet de ce guide d’introduction est de décrire les méthodes actuelles et les défis pour la monétisation des écoservices, pour ensuite avoir une discussion sur la façon dont on peut élaborer des marchés substitutifs pour les écoservices de sorte d’offrir

aux individus des mesures incitatives qui tiennent compte de la valeur des écoservices dans leurs choix de consommation et de production.

2.2 Monétisation des écoservices : une aide à la décision

Le but de la monétisation est de renseigner de façon fiable et objective les décideurs au sujet de tous les bienfaits et les coûts liés à une prise de décision. Souvent, il ne suffit pas de savoir que les écosystèmes ont une certaine valeur. Il est souvent nécessaire de connaître leur valeur par rapport à d’autres issues, de savoir comment cette valeur pourrait être affectée par d’autres mesures de gestion, et de renseigner les décisionnaires sur les compromis techniques (Pagiola et coll. 2004).

De façon très large, la monétisation totale d’écoservices axés sur la forêt comprend les valeurs « d’usage » et de « non­usage » (Heal et coll. 2005).

A. Valeurs d’usage• Valeurs d’usage direct. Comprennent la consom­

mation directe des ressources (ex : la coupe de bois, la cueillette des champignons, la chasse, etc.) et la consommation indirecte (ex : la randonnée pédestre, l’ornithologie amateure);

• Valeurs d’usage indirect. Comprennent les écoservices qui maintiennent et protègent les systèmes naturels et humains (ex : le maintien de l’approvisionnement en eau et de sa qualité, la lutte contre les inondations et la protection contre les intempéries, la rétention des nutriments et la stabilisation du microclimat, ainsi que les activités de production et de consom­mation que ceux­ci soutiennent).

B. Valeurs de non-usage • La valeur des écosystèmes reliés aux forêts et leurs

composantes au­delà de leurs possibilités d’usage actuelles (par exemple, la monétisation de l’existence de la forêt pour sa valeur intrinsèque, ou pour l’usage des générations de l’avenir).

Dans un sens large, la monétisation des écoservices2 est le processus par lequel on accorde des valeurs

Biens publics et coûts de transaction

Un bien est un bien public lorsque sa consom-mation par un individu ne réduit pas la disponibilité de consommation par d’autres (i.e., non-concurrent), et lorsque personne ne peut être empêché de bénéficier de ce bien (i.e., non exclusif). Exemple d’un bien public : les ondes radioélectriques.

Les coûts de transaction sont les coûts encourus lors d’un échange économique. Un exemple est la commission versée en achetant ou en vendant des actions, ou le coût de l’information requise pour l’échange.

ENCADRÉ 2

2 En anglais : « economic valuation of ecosystem services », « ecosystem service valuation (ESV) » ou « environmental service valuation ». Voir www.ecosystemvaluations.org pour des définitions et des exemples supplémentaires.

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monétaires à tous les écoservices, mis en marché ou pas. Dans la pratique, la monétisation est habituel­lement utilisée en se référant aux écoservices qui ne sont pas normalement mis en marché. Voici une définition de la monétisation :

[TRADUCTION] « Accorder une valeur monétaire à des facteurs environnementaux (tels que la qualité de l’air et de l’eau et les dommages occasionnés par la pollution) dont on ne tient pas habituellement compte en monétisation. »

(www.BusinessDictionary.com, consulté le 10 juillet 2009)

La monétisation des écoservices est d’importance pour bien des raisons. Elle peut aider à établir lesquelles des valeurs des écoservices les gens trouvent importantes, et à enquêter sur la façon dont les individus font des compromis entre les écoservices

alternatifs ainsi qu’entre les écoservices et les autres marchandises. Elle peut fournir des moyens de mesurer les bienfaits et coûts de diverses possibilités d’action qui transforment les conditions des écoservices. Dans certains cas, elle peut fournir des données pour assurer l’appui et le financement publics pour la conservation et/ou l’offre des écoservices (pour en savoir plus sur ces points, voir Pagiola et coll. 2004). La monétisation peut donc aider les décideurs à :

• établir des normes et des objectifs reliés aux écoservices,

• élaborer des méthodes pour évaluer les questions de politiques concurrentielles,

• élaborer des mesures incitatives qui encouragent l’offre et la protection des écoservices, et

• évaluer les différentes issues des politiques.

Quelques exemples d’utilisation de monétisation des écoservices se trouvent dans l’encadré 3.

Exemples de politiques mises en œuvre et des valeurs correspondantes en écoservices

1) Le projet de déviation Little Bow/Highwood (Alberta Environmental Protection 1994) :L’Alberta Public Works, Supply and Services et l’Alberta Environmental Protection ont conjointement proposé un projet visant à améliorer les débits d’entrée sur la rivière Highwood tout en permettant d’augmenter l’irrigation dans le bassin de la rivière Little Bow. Cette politique a mené à la création d’un réservoir de stockage et à la restauration d’un lac historique qui était jusqu’à récemment demeuré asséché. La monétisation des écoservices reliés au projet proposé a été utilisée pour montrer les bienfaits et les coûts du projet proposé qui justifiaient sa mise en œuvre. Par exemple, l’avantage net des améliorations aux loisirs aquatiques pour la région était estimé être de l’ordre de 0,38 million de dollars à 0,55 million de dollars par année.

2) Préserver le capital naturel de la forêt dans la vallée du Bas-Fraser (Olewiler 2004) :On estime que les régions forestières actuelles dans la vallée du Bas-Fraser de la Colombie-Britannique fournissent 134 $/ha/année en biens des écosystèmes forestiers et en valeur de services tels la cueillette, les terrains de chasse et de pêche, l’observation de la faune et autres loisirs. De plus, on estime la valeur des services de la séquestration du carbone dans les zones forestières de 150 $ à 6080 $ par ha. Ces valeurs des écoservices ont été utilisées pour justifier la mise en œuvre de politiques qui conserveront des zones du capital naturel forestier de la vallée du Bas-Fraser.

3) Les politiques de protection des forêts en Indonésie (Pattanayak et Butry 2005) :En 1993, le gouvernement d’Indonésie a établi le parc Ruteng sur 32 000 ha de terres forestières tropicales. Cela a été fait pour prévenir une plus grande déforestation, pour initier le reboisement et la conservation des terres, et pour améliorer la protection du bassin hydrologique. La valeur économique estimée des services d’atténuation de sécheresse que les régions protégées ont offert aux agriculteurs situés en aval représente une augmentation de bénéfices annuels agricoles de 9 $ à 24 $ pour chaque foyer dans une région où le revenu familial moyen est seulement de 780 $/année.

ENCADRÉ 3

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En dépit de l’absence d’un prix du marché pour plusieurs écoservices, des méthodes existent permettant d’estimer leur valeur économique. De fait, c’est leur valeur économique (et non leur prix) qui importe dans l’analyse coût­avantage et dans l’évaluation économique.

La valeur économique est le montant (habituellement mesuré en unités monétaires) qu’une personne serait prête à payer pour une amélioration des écoservices, ou le montant qu’elle serait prête à accepter pour compenser une baisse en écoservices (voir Heal et coll. 2005 pour les détails). La volonté de payer (ou d’accepter) traduit la valeur des écoservices en termes monétaires, ce qui facilite la comparaison avec d’autres estimations monétaires de coûts, d’investissements requis, etc. Veuillez prendre note qu’il s’agit de mesures de valeur reliées aux décisions individuelles de compromis et qu’on pourrait les obtenir à partir d’autres mesures, mais que l’utilisation de mesures monétaires fournit des mesures dans un ensemble commun d’unités de mesure.

La valeur économique est le montant (habituellement mesuré en unités monétaires) qu’une personne serait prête à payer pour une amélioration des écoservices, ou le montant qu’elle serait prête à accepter pour compenser une baisse en écoservices.

On peut réunir en deux catégories les méthodes servant à évaluer la valeur économique des écoservices : (i) l’approche des préférences révélées basée sur les observations de ce que les individus sont prêts à sacrifier pour jouir des écoservices et à partir desquelles nous pouvons déduire les préférences individuelles ou leur consentement à payer les écoservices; et (ii) l’approche des préférences déclarées qui utilise des sondages structurés pour demander aux individus d’indiquer leur consentement à payer directement les écoservices ou de choisir entre différents niveaux d’écoservices et autres biens et services du marché.3

On fait de plus en plus confiance à plusieurs formes de monétisation environnementale. Toutefois, les défis conceptuels, empiriques et méthodologiques demeurent, tels que discutés dans la littérature. On doit les prendre en considération pour assurer une mise en œuvre efficace des politiques. Ces défis vont au­delà de la portée de ce document élémentaire. Les lecteurs intéressés devraient se référer à Heal et coll. (2005), Pagiola et coll. (2004), Pattanayak et Butry (2005), ou Adamowicz (2007).

En l’absence d’information explicite sur la monétisation, on finit par établir une monétisation implicite des écoservices à la lumière des choix de politiques. Par exemple, une politique qui taxe les émissions de dioxyde de carbone à 15 $ la tonne établit une valeur implicite aux activités de séquestration du carbone à 15 $ la tonne de CO2. Il est cependant difficile de savoir combien de carbone peut être séquestré pour ce coût, et de savoir quelle sera la réduction finale équivalente de gaz d’effet de serre qui résultera de cette politique. De plus, sans évaluer la politique à la lumière de la monétisation des écoservices, il est peu probable que ces valeurs implicites de carbone soient égales aux bienfaits sociaux des réductions de gaz à effet de serre. En d’autres mots, les valeurs implicites ne tiendront pas compte de tous les changements de valeurs d’usage direct, d’usage indirect et de non­usage reliées aux changements climatiques. Dans certains cas (tel l’exemple des gaz à effet de serre), où les coûts­avantages d’une politique sont litigieux ou très incertains, une méthode implicite ou « ad hoc » peut être utilisée au début pour conférer une valeur à un écoservice; on peut ajuster cette valeur par après pour tenir compte de nouvelles ou de meilleures données.

En dépit de son importance, il y a deux défis d’envergure qui nuisent à l’utilisation de la monétisation des écoservices dans l’élaboration des politiques :

1) Définir le résultat final d’un changement de politique :Lorsqu’on prend en considération un écoservice en particulier, ou un groupe d’écoservices, cela présente des défis reliés à la définition d’objets ou des résultats finaux de politiques tangibles. Les résultats écologiques finaux sont des énoncés

3 Pour une discussion détaillée des avantages, des limites et des techniques particulières de ces deux approches, voir Heal et coll. (2005).

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concrets, exprimés intuitivement et communément compris, au sujet de ce qui compte dans la nature (Boyd 2007, p. 27).

2) Comprendre l’impact des changements de politiques sur les résultats finaux : La monétisation des écoservices exige qu’on définisse l’étendue du changement en écoservices relié à une politique en particulier, y compris le fait de devoir choisir des échelles spatiales appropriées et la période de temps de l’analyse.

Des lacunes dans notre compréhension scientifique des processus écologiques, le manque de données, ainsi que les implications du regroupement de différents écoservices présentent encore des barrières à la définition de tels résultats finaux et à la compréhension des impacts des changements de politiques. Pour réagir à ces défis, il faut une meilleure communication entre les sciences naturelles (qui décrivent les résultats dans les systèmes naturels) et les sciences sociales (qui relient les résultats naturels au bien­être humain) (Heal et coll. 2005, Boyd 2007).

En résumé, la monétisation peut nous aider à établir des priorités ou des objectifs des politiques. Cela peut aussi nous aider à identifier qui bénéficiera des écoservices et qui fournira les fonds nécessaires à l’offre des écoservices. Toutefois, comme nous le verrons dans la prochaine section, la monétisation, quoique souvent utile, n’est pas essentielle pour la mise en œuvre de politiques en écoservices axées sur le marché. Nous passons maintenant à la discussion des choix de politiques.

LA MONÉTISATION DES ÉCOSERVICES, LES INSTRUMENTS ÉCONOMIQUES BASÉS SUR LE MARCHÉ ET L’AMÉNAGEMENT DURABLE DES FORÊTS : NOTIONS ÉLÉMENTAIRES

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Instruments économiques basés sur le marché et l’offre des écoservices

3.1 Le rôle des instruments économiques4

De plus en plus, on s’entend pour affirmer qu’on ne peut pas se fier uniquement sur des zones protégées pour préserver et maintenir des écoservices sur les terrains forestiers, surtout dans le cas de budgets limités pour la conservation (Sanchirico et Siikimaki 2007). Nous devons donc examiner diverses approches pour maintenir les écoservices dans les paysages « aménagés » (non protégés ou partiellement protégés). On retrouve des possibilités de politiques reliées à l’offre d’écoservices dans plusieurs catégories générales.

L’approche traditionnelle de la gestion de l’environnement a été normative, du type commandement et contrôle (CEC, en anglais : command-and-control); par exemple, une réglementation qui mandate des technologies spécifiques de la production, des impératifs de gestion, et/ou des cibles de réduction de la pollution. Dans le cas de la protection de la santé des écosystèmes forestiers, le gouvernement pourrait établir des restrictions de zonage pour interdire certaines pratiques précises d’utilisation du terrain. À l’heure actuelle, la plupart des politiques des écoservices au Canada sont du type CEC.

Récemment, on s’est éloigné un peu des approches normatives pour privilégier plutôt une gestion plus décentralisée basée sur les résultats, qui offre une

certaine flexibilité aux compagnies, comme la possibilité de décider comment gérer les objectifs environnementaux. Les instruments basés sur le marché (IBM) sont des politiques d’incitation qui ont été de plus en plus utilisées pour offrir cette flexibilité aux compagnies.5 Les IBM passent par les incitatifs financiers offerts aux compagnies pour récompenser (ou pénaliser) les décisions basées sur les résultats environnementaux. L’élément commun est le désir de changer le comportement des utilisateurs du territoire en changeant la structure des mesures incitatives qu’ils pourraient prendre en considération (Pagiola et coll. 2004; UNEP 2004). Parce qu’ils peuvent incorporer des valeurs d’écoservices directement dans les mesures incitatives des décideurs, les IBM s’attaquent au problème du manque de marchés pour les écoservices. Les IBM comprennent une gamme d’outils politiques, allant des impôts sur la pollution et des permis échangeables aux paiements directs dans le cas d’efforts de conservation privés. Les IBM peuvent être régulateurs (p. ex., taxes environmentales ou programmes de permis échangeables) ou volontaires (p. ex., paiements pour des écoservices). Quelques exemples d’IBM existants sont soulignés dans l’encadré 4.

3.0

4 Dans ce guide d’introduction nous ne discutons pas de toute la gamme des approches politiques pour fournir des écoservices, mais nous mettons l’accent sur les instruments basés sur le marché en tant qu’approche pour fournir des incitatifs pour l’offre d’écoservices.

5 Ici, « basé sur le marché » se réfère au fait que ces politiques comprennent des incitatifs basés sur des prix; ceci ne veut pas dire que les écoservices en question sont achetés et vendus à l’intérieur d’un marché conventionnel, bien que quelques­uns puissent l’être. Les instruments basés sur le marché comprennent aussi des cas où le paiement d’écoservices se fait par le biais de taxes ou de subventions.

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Exemples de programmes de mesures incitatives pour l’offre des biens et des écoservices

AU CANADA :

1) La certification de l’aménagement durable des forêts1 La certification forestière est un processus selon lequel les compagnies forestières montrent qu’elles se conforment à des normes précises d’un programme de certification dans l’espoir de jouir d’un avantage soit en termes de prix, soit en conservant leur part du marché contrairement à des concurrents non certifiés (voir www.certificationcanada.org/). Le Canada a la plus grande superficie de forêts certifiées par une tierce partie au monde; le pays a presque 146 millions d’hectares certifiés selon au moins un des programmes de certification qui suivent : l’Association canadienne de normalisation (CSA), le Forest Stewardship Council (FSC), et la Sustainable Forestry Initiative (SFI) (Certification Canada 2008).

2) Le Programme ontarien d’encouragement fiscal pour les forêts aménagées (PEFFA)Un programme volontaire qui encourage l’intendance des forêts privées de l’Ontario en offrant des réductions fiscales aux propriétaires de terrains boisés qui acceptent de préparer et de suivre un plan d’aménagement forestier (Voir www.mnr.gov.on.ca/MNR_E000245.pdf).

3) Le programme de compensation en fixation de carbone de l’Alberta Des crédits de carbone générés par une variété de moyens peuvent être achetés par des compagnies qui ont besoin de compensation en fixation de carbone pour satisfaire aux réductions demandées en volume d’émissions de carbone (Voir www.carbonoffsetsolutions.ca).

4) Le « Canada-Alberta Farm Stewardship Program » : le partage des frais pour des pratiques exemplaires de gestion Le programme fournit une aide financière aux agriculteurs albertains admissibles pour réduire les risques environnementaux au moyen d’une meilleure intendance. Ce programme fait partie du Programme national de gérance agroenvironnementale (Voir http://albertaefp.com).

AUTRES :

5) Le « Bush Tender Program » de l’Australie Les propriétaires fonciers ont le droit de soumettre des demandes de compensation pour les pratiques d’aménagement durable qu’ils sont disposés à entreprendre pour protéger la végétation relique des zones biologiquement sensibles. Les soumissions sont comparées les unes aux autres avant d’être acceptées (Voir www.qmdc.org.au/get-involved/bush-tender-2007.html).

6) Le « U.S. Conservation Reserve Program »On encourage les propriétaires fonciers à transformer leurs terres cultivables hautement sensibles à l’érosion et autres superficies environnementalement sensibles en couvert végétal au moyen de paiements contre une location annuelle et des ententes de partage des frais (Voir www.nrcs.usda.gov/programs/crp).

7) Les programmes « U.S. TMDL (Total Maximum Daily Load) » pour la pollution de l’eauLes TMDL calculent le montant maximal de pollution qu’une étendue d’eau peut recevoir tout en satisfaisant encore aux normes de la qualité de l’eau, puis attribuent ce montant aux sources polluantes. On peut accéder aux allocations TMDL via des moyens basés sur des mesures incitatives, réglementés ou non (Voir www.epa.gov/owow/tmdl).

ENCADRÉ 4

1 Des études antérieures de monétisation pour divers programmes de certification de forêts démontrent des résultats discutables par rapport à l’existence de la bonification, ce qui suggère que la certification est un moyen de concurrence des parts de marché non axée sur le prix. (p. ex., Jensen et coll. 2003, Gronroos et Bowyer 1999, Rametsteiner 1999, Ozanne et Vlosky 1997, Winterhalter et Cassens 1993).

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Choix d’instrument : quelques considérations En théorie et en pratique, les approches basées sur le marché peuvent constituer un moyen efficient pour résoudre des problèmes (p. ex. Tietenberg et Johnstone 2004). Si on les compare à ceux des CEC, les réglements des instruments basés sur les marchés (IBM) diminuent les coûts d’observation en permettant aux fabricants d’autoriser des réductions en pollution et/ou l’extraction de ressources dans des zones où il coûte moins cher de les appliquer.6 Par exemple, au lieu d’utiliser des normes technologiques de « taille unique » pour les émissions, des permis d’émission échangeables offrent des mesures incitatives pour adopter de plus fortes technologies d’assainissement où elles sont plus appropriées et résultant en économies globales pour la société qui atteindrait sa cible environnementale. Les économies de coûts peuvent aboutir à de plus importantes réductions d’émissions qu’il n’aurait été possible de le faire autrement7. De surcroît, les IBM tendent à fixer le prix de toutes les unités de pollution et/ou d’utilisation des ressources. Par contraste, les méthodes CEC permettent souvent à la dégradation environnementale de se poursuivre sans pénalité pourvu qu’elle demeure en deçà des seuils des règlements.

Veuillez noter que les IBM réussissent parce qu’ils délèguent ou décentralisent les décisions environ­nementales, donnant aux compagnies la flexibilité de substituer des émissions, des dommages ou autres impacts à un endroit ou à un moment donné pour un autre, tout en satisfaisant à une cible environnementale globale. Toutefois, il existe certains cas où de telles substititions sont indésirables et où les politiques CEC sont plus appropriées – par exemple, dans la gestion des substances dangereuses ou dans la protection des régions culturellement ou écologiquement importantes. Dans ces cas, la délégation des décisions environ­nementales à des compagnies peut mener à des résultats indésirables ou potentiellement désastreux.8

Les IBM représentent des économies potentielles de coûts au­delà des CEC, mais en dépit de cela, il y a encore d’autres considérations qui influent sur le choix

des instruments politiques. Celles­ci comprennent la structure des lois environnementales déjà en place, la capacité technique et les coûts d’administration (des ministères gouvernementaux) des programmes basés sur le marché ainsi que la faisabilité politique des IBM liée à l’acceptabilité de la distribution des bénéfices, des coûts et des risques associés aux instruments (UNEP 2004).

3.2 Le contexte canadien : défis, perspectives et forces motrices pour la mise en vigueur de mesures incitatives basées sur le marché

Comme nous l’avons vu, la monétisation des écoservices peut être une étape importante dans l’établissement d’objectifs environnementaux; la monétisation et les IBM ont tous deux le potentiel d’appuyer et de promouvoir l’aménagement durable des forêts. Bien que les IBM présentent un certain nombre d’avantages sur les CEC traditionnels, il y a encore bon nombre de barrières politiques et juridiques dans l’utilisation des IBM pour l’AFD.

Le Canada a été critiqué pour son manque de développement des IBM en matière de politiques environ nementales (OCDE 2004). La situation du manque de capacité institutionnelle au Canada, surtout la compétence pour mener des analyses environnementales économiques et pour mettre efficacement en œuvre des politiques environ­nementales basées sur le marché, semble très différente de celles des autre pays membres de l’OCDE (voir Renzetti 2005; Howlett 2007). Adamowicz (2007) maintient que les questions juridiques au Canada, ainsi que le chevauchement fréquent des frontières administratives, peuvent compliquer la question encore davantage en morcelant encore plus le peu de capacité institutionnelle qui existe. Ce facteur ainsi que d’autres contribuent à une certaine « inertie politique » par rapport à l’utilisation de mesures incitatives basées sur le marché pour protéger les biens et services écosystémiques au Canada.

6 Pour une liste plus exhaustive des bénéfices habituellement reliés aux approches IBM, veuillez vous référer au PNUE (UNEP 2004).7 Cet argument a été utilisé pour justifier le programme d’échange des émissions de SO2 des É.­U. sous le titre IV du 1990 Clean Air Act (Tietenberg 2003).8 Il y a beaucoup de littérature sur le choix des instruments qui explore le moment où chaque approche – IBM, CEC ou autres – pourrait être la plus

efficace. Pour un aperçu des possibilités de choix d’instruments, veuillez vous reférer à Stavins (2001) et à Collins et Scoccimarro (2008).

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En étudiant les moyens à prendre pour surmonter les problèmes entourant l’inertie politique, Adamowicz (2007) a souligné le rôle des entrepreneurs en politique (ou champions des instruments) en tant que catalyseurs pour la mise en œuvre de nouvelles politiques. L’idée d’un entrepreneur en politique est analogue au rôle des leaders efficaces promu par Brock (2004). Brock démontre qu’un leadership énergique pourrait potentiellement réduire l’aversion de l’ambigüité (essentiellement, le préjugé en faveur du statu­quo) et contrer les effets des groupes de pairs, deux facteurs qui peuvent prévenir l’adoption de politiques efficaces. Le Programme des Nations­Unis pour l’environnement (UNEP 2004) cite également le besoin de fournir des directives pratiques aux décideurs pour les aider à choisir les types d’IBM qui seraient susceptibles de redresser des problèmes environ­nementaux spécifiques. De telles directives pourraient prendre la forme d’outils d’aide à la décision.9

Au Canada, le développement de politiques environ­nementales pourrait maintenant devoir prendre en considération de multiples niveaux gouvernementaux à l’intérieur des juridictions et d’une juridiction à une autre, les détenteurs de tenures forestières et de concessions, les secteurs des ressources, les groupes d’intérêt, les communautés autochtones, les ONG, entre autres – qui sont souvent concurrents dans l’utilisation des ressources publiques. Un aspect unique que l’on trouve pour plusieurs ressources environnementales du Canada est la question des terres publiques et/ou non attribuées. Étant donné que la plupart des terres forestières du Canada appartiennent aux gouvernements provinciaux, mais qu’elles sont essentiellement gérées par des détenteurs de tenure forestière privés (p. ex., compagnies forestières, intérêts pétroliers ou miniers), cela soulève la question de la propriété des écoservices. On doit tirer cette question au clair pour obtenir une mise en œuvre efficace de bien des formes d’IBM. Un autre défi se situe au niveau du potentiel de négociations stratégiques au sujet de la base de référence des politiques alors que différentes parties essaient de se positionner pour réaliser d’importants gains lors de l’introduction de nouvelles politiques ou de politiques inconnues (Howlett 2007).

9 Pour un exemple d’outil d’aide à la décision lié aux IBM, voir Collins et Scoccimarro 2008.

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Perspectives de développement de marchés en écoservices pour l’aménagement durable des forêts4.0

Des instruments basés sur le marché pourraient aider à rectifier des problèmes que les politiques forestières canadiennes n’ont généralement pas abordés. Quelques­uns, dont la certification de l’AFD (encadré 4), sont déjà utilisés au Canada. D’autres n’ont été mis en œuvre qu’à petite échelle ou ont été utilisés ailleurs dans le monde sans pour autant avoir été essayés dans un contexte de gestion forestière canadienne. Deux exemples d’IBM qui pourraient s’avérer applicables aux forêts et à l’aménagement forestier sont décrits ci­dessous.

Des instruments basés sur le marché pourraient aider à rectifier des problèmes que les politiques forestières canadiennes n’ont généralement pas abordés.

4.1 Permis de perturbation négociable

Au Canada, les gouvernements provinciaux sont propriétaires de la quasi­totalité des terrains forestiers. Les systèmes d’allocation de tenure peuvent aboutir à des tenures qui se chevauchent, ayant de multiples utilisateurs (p. ex., compagnies forestières, intérêts pétroliers) qui ont accès aux mêmes terres. Le fait qu’un seul utilisateur n’a pas les droits de propriété exclusifs mène souvent à plus de perturbation du territoire qu’il ne serait autrement acceptable du point

de vue social. Ceci peut entrainer des conséquences négatives sur la biodiversité et d’autres buts de l’aménagement durable des forêts.

Les permis de perturbation négociables (PPN) sont des permis de perturbation du territoire (semblables aux droits de surface) qui peuvent être échangés entre les sites et les sources de perturbation au fil du temps de sorte de minimiser les coûts de réduction de l’empreinte du développement. Selon un programme PPN, le gouvernement met un plafond au niveau total de perturbation permise dans le paysage pendant une période de temps déterminée (p. ex., le nombre total d’hectares par année). Les droits de perturbation allant jusqu’au plafond de perturbation sont attribués à des compagnies lors d’encans ou en raison de droits acquis. Les permis/perturbations sont traités en tant qu’équivalents peu importe où la perturbation se produit et abstraction faite de la qualité de l’habitat perturbé. Les PPN permettent aux compagnies de substituer leur empreinte écologique à un endroit et/ou à un moment donné par une plus petite empreinte à un autre endroit/moment donné pourvu que cela satisfasse aux objectifs globaux de perturbation. Les PPN réduisent les coûts pour satisfaire aux objectifs écologiques parce qu’ils accordent une certaine flexibilité aux compagnies, leur permettant de choisir où, quand et combien de forêts elles perturbent dans la limite des contraintes régionales d’utilisation du territoire. Simultanément, les compagnies répondent aux signaux émis par le prix des permis par rapport aux coûts des perturbations à différents moments et dans différents sites lorsqu’elles élaborent leurs plans de développement de ressources. Ceci fait en sorte que

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les droits de perturbation sont attribués aux dévelop­pements ayant la plus haute valeur. Un programme PPN peut être combiné avec un programme de crédits de compensation/d’atténuation de sorte de fournir des mesures incitatives supplémentaires pour la remise en état du terrain subissant l’empreinte (encadré 5).

Les permis de perturbation négociables (PPN) sont des permis de perturbation du territoire (semblables aux droits de surface) qui peuvent être échangés entre les sites et les sources de perturbation au fil du temps de sorte de minimiser les coûts de réduction de l’empreinte du développement.

Bien que des permis négociables aient été utilisés pour gérer plusieurs questions environnementales (la pollution ou la pêche commerciale, par exemple),

nous méconnaissons leur utilisation dans un contexte d’aménagement forestier.

Il y a bon nombre d’obstacles qu’il faudrait surmonter avant qu’un système de PPN puisse entrer en vigueur. En voici quelques­uns :

i) les défis scientifiques reliés à la définition des objectifs régionaux de conservation et de leur rapport au niveau de la perturbation;

ii) les défis de monétisation reliés à l’établissement de plafonds (niveau de perturbation permis chaque année);

iii) les défis de la mise en œuvre reliés au dévelop pement de systèmes administratifs pour appuyer l’échange des permis de perturbation, la surveillance de la conformité et de l’application;

iv) les défis politiques et juridiques reliés aux change­ments, aux tenures existantes et aux répercussions sur les communautés autochtones; et finalement

v) le manque de compréhension chez les parties prenantes et au sein du gouvernement au sujet de l’impact du système des PPN sur les buts et les coûts de la conservation.

PLAFONNEMENT ET ÉCHANGE, SYSTÈMES DE CRÉDIT, COMPENSATION

Les systèmes de plafonnement et d’échange établissent le plafond de l’impact environnemental permis (p. ex. le total des émissions ou le total annuel des perturbations des terres), y compris des marges de tolérance pour les impacts qui sont mis aux enchères ou attribués aux bénéficiaires de droits acquis. Des systèmes de crédit permettent aux compagnies de gagner des crédits pour la réduction d’impacts en-deçà des normes ou de la base de référence; ces crédits peuvent être vendus à d’autres compagnies qui veulent dépasser cette base de référence. Une compensation en conservation est une action positive pour compenser les impacts environnementaux négatifs reliés au développement. Dans certains cas, les crédits de compensations peuvent être mis en réserve ou échangés dans un marché.

Il y a un rapport direct entre les compensations en conservation et les permis de perturbation négociables (PPN). Les PPN et les systèmes de compensation offrent tous deux des moyens flexibles aux compagnies pour satisfaire aux objectifs de conservation. Les PPN représentent des marges de tolérance pour la création de perturbations, tandis que les compensations représentent l’obligation de réduire les perturbations. Lorsque les PPN bénéficient d’une clause de droits acquis, les compensations et les PPN deviennent essentiellement des programmes équivalents. La différence se situe au niveau des indemnités ou des droits et obligations initiaux, des coûts et conséquences de répartition, et au niveau de l’entité/individu qui assume les risques économiques et écologiques reliés au programme (le public comparativement à l’industrie).

ENCADRÉ 5

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En dépit de ces défis, on s’intéresse à l’exploration plus poussée des PPN en tant qu’outils pour l’AFD. L’Alberta et les Territoires du Nord­Ouest ont tous deux participé aux recherches du Réseau de gestion durable des forêts pour enquêter sur la faisabilité de cet instrument en tant qu’outil de gestion des effets cumulatifs sur les terrains forestiers. En Alberta, on fait état des PPN dans le document Alberta’s Land-use Framework (2008) en tant qu’un des outils de conservation et d’intendance qui pourrait être utilisé afin de satisfaire aux objectifs des effets cumulatifs régionaux sur les terres publiques. En bout de ligne, l’évaluation de l’efficacité des PPN comme étant supérieurs à d’autres approches sera fondée sur des comparaisons détaillées avec d’autres politiques en fonction de leur faisabilité administrative et juridique, de leurs répercussions sur les coûts qu’ils représentent pour les compagnies et les détenteurs de tenures forestières, de leurs répercussions sur les communautés, et finalement sur les résultats désirés pour les écosystèmes.

4.2 Compensations en fixation de carbone forestier

Les forêts peuvent agir comme d’importants puits de carbone. Les augmentations en séquestration de carbone au­delà des niveaux de base (c’est­à­dire, le niveau qui serait stocké selon le maintien du statut quo dans le système courant de gestion forestière) peuvent être utilisées pour compenser les augmentations d’émissions de carbone provenant d’autres secteurs de l’économie.

Dans un système de soumissons en carbone forestier, les organismes gouvernementaux de réglementation demandent aux compagnies forestières de soumettre des offres sous pli scellé dans lesquelles les compagnies précisent le prix pour lequel elles feraient du stockage de carbone. Le chargé de la réglementation achète alors ces compensations temporaires en carbone (c’est­à­dire les compensations sur une durée fixe) des fournisseurs au plus bas prix, puis les revend sur le marché du carbone. Un avantage des appels d’offre des contrats en carbone forestier est que les compensations en carbone peuvent être vendues par des organismes gouverne­

mentaux de réglementation – soit dans des marchés provinciaux, fédéraux ou internationaux – générant ainsi des revenus versés aux compagnies forestières pour le stockage du carbone.10

Ce système permet au gouvernement de promouvoir le stockage du carbone tout en minimisant le fardeau financier des contribuables. Dans certains cas, dépendant des coûts de stockage de carbone par rapport aux prix du carbone, le gouvernement peut même tirer profit du stockage du carbone. Bien que la plupart de l’exploitation forestière par les compagnies canadiennes se fasse sur des terres publiques, la longue durée des tenures forestières rend possible un système d’encan du carbone pour obenir des compensations de carbone temporaires.

Bien que l’invitation à soumissionner pour le stockage du carbone forestier soit encore une nouveauté, l’État australien de Victoria teste le système (DSE 2004). Au Canada, des initiatives connexes comprennent :

• L’Alberta a un marché pour les compensations en stockage de carbone. L’Alberta Greenhouse Gas Emissions Trading System exige que les importants émetteurs industriels réduisent leur intensité de 12 %; autrement, ils doivent acheter des compensations de carbone ou payer une taxe de 15 $ la tonne de CO2 (Boyd et coll. 2008). L’Alberta a élaboré un protocole de compensation pour l’afforestation des terres non boisées, mais n’a pas encore de protocole pour les compensations d’aménagement forestier (voir www.carbonoffsetsolutions.ca/offsetprotocols/finalAB.html).

• L’Ontario étudie la possibilité de compensations négociables pour le carbone que l’on peut gagner par la plantation d’arbres, l’aménagement forestier et la conservation des forêts (voir http://publicdocs.mnr.gov.on.ca/View.asp? Document_ID=15974&Attachment_ID=33671).

• Le Québec, l’Ontario, le Manitoba et la Colombie-Britannique (en collaboration avec quelques États américains) sont partenaires au sein de la Western Climate Initiative, qui est encore à élaborer ses mécanismes de compensations en carbone forestier (voir www.westernclimateinitiative.org).

10 Les entreprises forestières qui détiennent des droits de carbone peuvent aussi conclure des ententes pour fournir des compensations de carbone directement aux agences/enterprises intéressées à acheter de ces compensations.

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• Est-ce que la monétisation des écoservices peut servir de guide au développement d’instruments basés sur le marché (MBIs/IBM) et améliorer l’aménagement forestier durable? La réponse est « oui ». La monétisation des écoservices aide à guider les investissements publics et à fournir des cibles pour des changements de politiques.

• Il y a nombre de défis reliés à la monétisation – le décalage scientifique, la capacité, les contraintes de coûts et de temps étant particulièrement importants. En l’absence d’information sur la monétisation permettant d’établir immédiatement des politiques, les gouvernements peuvent choisir une cible pour les écoservices en se basant sur d’autres critères, pour ensuite évaluer les effets des politiques en termes d’avantages et de coûts. Lorsque l’évaluation est complétée, elle peut servir à corriger les IBM de sorte de refléter les préférences du public pour les écoservices.

• Les IBM tentent de rendre l’adoption de pratiques en vue d’un environnement durable plus financièrement attrayante. Ceci peut mener à des résultats favorables pour l’environnement sans se servir d’une réglementation d’injonction et de contrôle de l’exécution. Les IBM peuvent parfois être utilisés conjointement avec des politiques d’injonction et de contrôle de l’exécution, qui sont encore nécessaires dans certains cas.

• La valeur des écoservices est de plus en plus reconnue et exige souvent des politiques publiques pour être protégée. Comparés aux politiques traditionnelles d’injonction et de contrôle de l’exécution, les IBM sont souvent un moyen moins coûteux de satisfaire aux normes de la performance environnementale et parfois de les dépasser. Le défi est de mettre en corrélation des IBM et des problèmes bien déterminés.

• Le Canada a fait un certain progrès dans l’utilisation des IBM, surtout par rapport au stockage du carbone (p. ex., le marché de compensation du carbone en Alberta). En foresterie, bien que la certification de l’AFD soit un incitatif généralement utilisé partout au Canada présentement, les IBM ne sont pas encore généralement utilisés. D’autres programmes régulatoires d’IBM, tels les permis négociables et les compensations, peuvent potentiellement encourager et récompenser l’AFD, mais ils n’ont pas encore été adoptés de manière générale.

• En dépit des perspectives potentielles, il reste un manque de capacité à mettre en œuvre les IBM en foresterie. Les défis de capacité comprennent le manque d’information au sujet des avantages et coûts de l’amélioration des écoservices, ainsi que le manque de données et de modèles scientifiques pour comprendre les conséquences écologiques et économiques des changements de politiques. Il y a aussi un manque de compréhension des réactions du consommateur et du producteur aux diverses mesures incitatives et programmes d’IBM; on comprend mal aussi la meilleure façon de structurer les marchés de ressources ou les marchés environnementaux et les paiements des écoservices.

• L’expérience dans d’autres juridictions suggère qu’un investissement important dans la capacité à identifier les valeurs des écoservices protégées par diverses approches politiques et dans la capacité à évaluer et à comparer des politiques particulières est requis afin d’obtenir l’appui des parties prenantes et des institutions de sorte d’assurer une mise en œuvre réussie de nouvelles approches d’AFD.

Conclusions et messages clés5.0

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CONSEILS SUBVENTIONNAIRES

• Réseaux de centres d’excellence du gouvernement du Canada

• Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie (CRSNG)

• Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH)

PARTENAIRES

Gouvernements• Gouvernement du Canada

(Environnement Canada)

(Ressources naturelles Canada, Service canadien des forêts)

(Parcs Canada, Direction de l’intégrité écologique)

• Gouvernement de l’Alberta

(Advanced Education and Technology – Alberta Forestry Research Institute)

 (Sustainable Resource Development)

• Gouvernement de la Colombie-Britannique (Ministry of Forests and Range)

• Gouvernement du Manitoba (Manitoba Conservation)

• Gouvernement de l’Ontario (Ministère des Richesses naturelles)

• Gouvernement du Québec (Ministère des Ressources naturelles et de la Faune)

• Gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador (Department of Natural Resources)

• Gouvernement du Yukon (Ministère de l’Énergie, des Mines et des Ressources)

Industries• Abitibi Bowater Inc.

• Ainsworth Lumber Co.Ltd.

• Alberta-Pacific Forest Industries Inc.

• Canadian Forest Products Ltd.

• Daishowa-Marubeni International Ltd.

• J.D. Irving, Limited

• Louisiana-PacificCanada Ltd.

• Manning Diversified Forest Products Ltd.

• Tembec Inc.

• Tolko Industries Ltd.

• Weyerhaeuser Company

ONG• Canards Illimités Canada

Premières nations• Heart Lake First Nation

• Kamloops Indian Band

• Kaska Tribal Council

• Little Red River Cree Nation

• Moose Cree First Nation

• Ralliement national des Métis

• Treaty 8 First Nations of Alberta

Universités• University of Alberta (établissement hôte)

• British Columbia Institute of Technology

• Dalhousie University

• Lakehead University

• Memorial University of Newfoundland

• Mount Royal College

• Royal Roads University

• Ryerson University

• Simon Fraser University

• Thompson Rivers University

• Trent University

• Université Concordia

• Université Laval

• Université du Manitoba

• Université McGill

• Université de Moncton

• Université de Montréal

• Université du Nouveau-Brunswick

• Université d’Ottawa

• Université du Québec à Chicoutimi

• Université du Québec à Montréal

• Université du Québec à Rimouski

• Université du Québec à Trois-Rivières

• Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue

• Université de Sherbrooke

• Université de Winnipeg

• University of British Columbia

• University of Calgary

• University of Guelph

• University of Lethbridge

• University of Northern British Columbia

• University of Regina

• University of Saskatchewan

• University of Toronto

• University of Victoria

• University of Waterloo

• University of Western Ontario

• Wilfrid Laurier University

Membres associés• Association nationale

de foresterie autochtone

• Forest Ecosystem Science Cooperative Inc.

• Forêt modèle du lac Abitibi

• Forêt modèle du Manitoba

• Fundy Model Forest

• Institut canadien de recherches en génie forestier

• Institut forestier du Canada

Partenaires du Réseau GDFaoût 2007

Réseaux de centres d’excellence

Réseau de Gestion durable des forêts www.reseaugdf.ca