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LA RECONNAISSANCE DES ACQUIS - Quebec · dernier constat, la reconnaissance des acquis n'est pas vraiment accompagnée de modalités favorables à l'organisation de la formation manquante1

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  • LA RECONNAISSANCE DES ACQUIS,UNE RESPONSABILITÉ

    POLITIQUE ET SOCIALE

    A V I S A U M I N I S T R E D E L ' É D U C A T I O N

    J u i n 2 0 0 0

  • Le Conseil a confié la préparation de cet avis à sa Commission del'éducation des adultes dont la liste des membres apparaît à la fin dudocument.

    Recherche : Isabelle Gobeil avec une collaboration de LouiseClermont et Francine D'Ortun, agentes de recherche.

    Analyse documentaire : Suzanne Bouchard, Isabelle Gobeil etMonique Ouellette.

    Rédaction : Isabelle Gobeil, coordonnatrice de la Commission del'éducation des adultes.

    Soutien : Francine Vallée à la documentation et à la préparation dela liste des sites Internet; Marie-Andrée Ayotte et Jacqueline Girouxau secrétariat; Michelle Caron et Nicole Lavertu à l’édition; Jean-Bernard Jobin à la révision linguistique.

    Avis adopté à la 488e réuniondu Conseil supérieur de l’éducation,le 28 avril 2000.

    ISBN : 2-550-36109-1Dépôt légal : Bibliothèque nationale du Québec, 2000

    Reproduction autorisée à condition de mentionner la source.

  • Table des matières

    INTRODUCTION.............................................................5

    P R E M I È R E P A R T I E

    CHAPITRE 1LES FONDEMENTS DE LARECONNAISSANCE DES ACQUIS ..................9

    1.1 Une brève rétrospective ........................91.2 La diversité des lieux et des façons

    d'apprendre........................................101.3 La construction et l'intégration de

    repères pour la reconnaissance desacquis................................................11

    1.4 Les principes à la base de lareconnaissance des acquis et quidoivent guider les actions ...................16

    1.5 Des précisions sur le vocabulaire ........19Conclusion de la première partie ................21

    D E U X I È M E P A R T I E

    CHAPITRE 2L'ÉTAT DE LA QUESTION ÀL'ENSEIGNEMENT SECONDAIRE...............23

    2.1 La reconnaissance des acquisscolaires ............................................23

    2.2 La reconnaissance des acquisextrascolaires.....................................252.2.1 En formation générale des adultes ... 252.2.2 En formation professionnelle ............ 30

    Conclusion................................................35

    CHAPITRE 3L'ÉTAT DE LA QUESTION ÀL'ENSEIGNEMENT COLLÉGIAL..................37

    3.1 Le contexte légal et réglementaire .......373.2 Des données sur les pratiques

    financées de reconnaissance desacquis dans les collèges......................39

    3.3 Un éclairage sur la concentration del'offre de service dans certainsprogrammes.......................................43

    3.4 Une ressource à mettre à profit : leCentre collégial de formation àdistance ............................................ 45

    3.5 Les mesures de renouveau au collégial :une occasion à saisir aussi aux fins dereconnaissance des acquis .................. 45

    Conclusion ............................................... 47

    CHAPITRE 4L'ÉTAT DE LA QUESTION AUPREMIER CYCLE UNIVERSITAIRE............49

    4.1 Des éléments historiques etcontextuels à considérer..................... 50

    4.2 Certaines pratiques récentes àexaminer au premier cycleuniversitaire ...................................... 52

    4.2.1 L'accueil des techniciennes et destechniciens formés dans lescollèges ..................................................53

    4.2.2 La reconnaissance des étudesréalisées à l'étranger.............................54

    4.2.3 La reconnaissance des acquisscolaires et extrascolaires des per-sonnes au parcours hors normes ........55

    4.3 Les principaux constats sur lespratiques universitaires pour lesétudes de premier cycle ...................... 62

    4.4 Les enjeux......................................... 64Conclusion ............................................... 66

    CHAPITRE 5LA SITUATION PARTICULIÈRE DESPERSONNES IMMIGRANTES ENMATIÈRE DE RECONNAISSANCE DESACQUIS .....................................................................67

    5.1 La reconnaissance des acquisscolaires............................................ 68

    5.2 La reconnaissance des acquisextrascolaires .................................... 71

    Conclusion ............................................... 72Conclusion de la deuxième partie ............... 73

  • 4 La reconnaissance des acquis, une responsabilité politique et sociale

    T R O I S I È M E P A R T I E

    CHAPITRE 6DES VOIES DE DÉVELOPPEMENTPOUR UNE RÉPONSE À DES BESOINSDIVERSIFIÉS..........................................................75

    6.1 L'arrimage de répertoires....................756.1.1 Deux voies parallèles de

    reconnaissance en émergence,éventuellement étanches .................... 75

    6.1.2 Une voie prometteuse dedéveloppement, mais qui oblige àrompre avec la logique du tout ourien ......................................................... 80

    6.1.3 Un dispositif mis en place enpartenariat............................................. 84

    6.1.4 La reconnaissance de lareconnaissance..................................... 86

    6.2 « Se reconnaître pour se fairereconnaître » : le bilan des acquis etdes compétences................................87

    6.3 La recherche comme outil dedéveloppement et de suivi...................88

    Conclusion de la troisième partie ................89

    CONCLUSION ................................................................91

    BIBLIOGRAPHIE....................................................... 101

    LISTE DE SITES INTERNET ................................. 109

    ANNEXE 1 ..................................................................... 111

    ANNEXE 2 ..................................................................... 122

    ANNEXE 3 ..................................................................... 124

  • Introduction

    Le Conseil supérieur de l'éducation a jugé néces-saire de produire un avis sur la reconnaissance desacquis scolaires et extrascolaires, parce qu'il s'agitd'un enjeu social et économique majeur. En effet,le savoir est devenu l'un des principaux facteursde développement; les lieux pour l'acquérir semultiplient, les façons d'apprendre se diversifientet, pour chaque personne, la reconnaissance offi-cielle de ses compétences représente une conditiond'insertion et de promotion sociales et économiques.L'éducation continue exige cette reconnaissance,parce qu'elle permet à la personne de s'insérer dansun processus de formation à différents momentsde sa vie et de faire valoir ses compétences dansson cheminement professionnel. Comme le souli-gne Jacques Delors dans son rapport à l'Unesco,« l'éducation continue tout au long de la vie n'estpas un lointain idéal, mais une réalité qui tend deplus à s'inscrire dans les faits, au sein d'un paysageéducatif complexe marqué par un ensemble demutations qui en accentuent la nécessité. Pourparvenir à l'organiser, il faut cesser de considérerles différentes formes d'enseignement et d'appren-tissage comme indépendantes les unes des autreset en quelque sorte superposables, voire concur-rentes, et s'attacher au contraire à mettre en valeurla complémentarité des champs et des temps del'éducation moderne1 ».

    Les transformations constantes de l'organisationdu travail obligent les entreprises à tenir comptedes besoins de formation continue de leur person-nel. Elles exigent aussi des travailleuses et destravailleurs qu'ils construisent leurs propres quali-fications; afin que ces dernières laissent des traces,il importe qu'elles soient reconnues de manièrecrédible. Par ailleurs, le phénomène de mondiali-sation accentue la circulation des personnes àtravers les pays et les continents, ce qui nécessitela mise en place de systèmes de reconnaissancedes acquis qui ont en commun des principes et desnormes et qui peuvent permettre de la sorte l'homo-

    1. Jacques Delors, L'Éducation, un trésor est cachédedans, p. 108.

    logation des titres délivrés ici et ailleurs. Les pro-pos entendus au cours des consultations menéespour l'élaboration du présent avis confirment cettenécessité. Le Conseil demande donc à l'État qué-bécois, aux institutions scolaires et universitairesde même qu'aux partenaires du marché du travailet aux ordres professionnels de décloisonner pro-gressivement leurs systèmes respectifs de recon-naissance des acquis.

    Ce n'est pas la première fois que le Conseil soulèvela question. Ainsi, dans son avis sur l'éducationdes adultes dix ans après la Commission Jean2, ilsoulignait l'importance que revêt la reconnaissancedes acquis scolaires et extrascolaires pour toutadulte qui retourne aux études.

    De nouveau, dans son avis sur l'accès des adultesà la formation continue3, le Conseil constatait quela reconnaissance des acquis constitue l'un desprincipaux piliers d'un système de formationcontinue , pour plusieurs raisons : cette reconnais-sance assure la continuité du processus éducatif;elle facilite les aller-retour en formation; elle per-met de décloisonner les démarches de formation,les programmes d'études et les lieux de formation.Le Conseil établissait alors des constats qu'il rap-pelle dans son avis sur la formation continue dupersonnel des entreprises : « premier constat, lesmodalités de financement représentent un "handicapsérieux" pour l'organisation des services de recon-naissance des acquis. Deuxième constat, "le réfé-rentiel" pose un problème; ainsi, du côté de lamain-d'œuvre, on s'intéresse à la reconnaissancedes acquis de façon à ce qu'une personne puisseaccéder à une fonction de travail, alors que ducôté de l'éducation, la reconnaissance doit per-mettre à la personne d'accéder à un programmed'études ou à la certification; de la sorte, ce sontles programmes existants qui servent d'étalon pour

    2. Conseil supérieur de l'éducation, Accroître l'acces-sibilité et garantir l'adaptation. L'éducation desadultes dix ans après la Commission Jean.

    3. Conseil supérieur de l'éducation, Pour un accèsréel des adultes à la formation continue.

  • 6 La reconnaissance des acquis, une responsabilité politique et sociale

    la mesure des acquis. Autre constat, le processusde reconnaissance des acquis n'est pas suffisammentà l'avantage des adultes, parce qu'il n'est pasd'abord fondé sur les multiples situations danslesquelles ceux-ci font des apprentissages. Enfin,dernier constat, la reconnaissance des acquis n'estpas vraiment accompagnée de modalités favorablesà l'organisation de la formation manquante 1. »

    Dans cet avis sur la formation continue du personneldes entreprises, le Conseil notait que la reconnais-sance des acquis demeure toujours un enjeu impor-tant et un défi qu'il est urgent de relever. Souvent,des programmes de formation sur mesure répon-dent aux besoins de formation de la main-d’œuvreen poste. Les organismes prestataires de cetteformation sont nombreux : personnel interne del'entreprise, firmes de consultants, formateursprivés, établissements du réseau public et privé.Or, en dépit de l'importance sociale que revêt lareconnaissance des acquis de formation scolaireou extrascolaire, en raison de la mobilité que lamain-d'œuvre est appelée à connaître de plus enplus, l'unanimité est loin d'être faite sur la façonde l'assurer. On observe une grande variété desformes d'attestation d'activités de formation sui-vies, qui vont de la simple attestation de partic i-pation jusqu'au diplôme ou au relevé des compé-tences maîtrisées, en passant par des crédits oudes unités d'éducation continue.

    Comme au début des années 80, la question de lareconnaissance des acquis est toujours d'actualité;la Commission des États généraux sur l'éducationl'a soulevée en faisant de cette reconnaissance l’undes objets ayant des effets sur l'ensemble du sys-tème de formation continue et devant retenir priori-tairement l'attention2.

    Au Québec, bien que la reconnaissance des acquisait été un sujet fréquemment évoqué au cours des

    1. Conseil supérieur de l'éducation, La Formationcontinue du personnel des entreprises. Un défipour le réseau public d'éducation , p. 62.

    2. Commission des États généraux sur l'éducation,Exposé de la situation , p. 92.

    deux dernières décennies, l'adoption de la Loifavorisant le développement de la formation de lamain-d'œuvre, en 1995, a sans doute contribué àrelancer le débat sur les décisions à prendre pouren assurer la mise en œuvre. De plus, la politiquesur la formation continue que le gouvernement aannoncée devrait contenir des orientations à cetégard. C'est pourquoi le Conseil s'est intéressé à laquestion, et a jugé important de participer à laréflexion et aux actions visant la mise en place desystèmes souples et crédibles de reconnaissancedes acquis.

    Devant les exigences de la société du savoir, lacroissance des besoins de formation continue et ledéveloppement du marché de la formation ontrévélé des tensions entre la reconnaissance offi-cielle de ce que l'on apprend à l'école et celle dece que l'on apprend ailleurs. Tout au long de sestravaux, le Conseil a ainsi tenté de répondre à unequestion en apparence simple mais qui est apparuecomplexe, justement du fait de ces tensions : quidoit reconnaître quoi ?

    Le Conseil a vite reconnu qu’il y avait eu au Qué-bec, depuis les années 80, des progrès notoirespour répondre à cette question du qui-reconnaît-quoi. Même si l'on ne part pas de zéro, le Conseila noté un certain plafonnement des pratiques, voireun essoufflement, notamment du côté de l’éducation,comme si la reconnaissance des acquis tenaitmaintenant moins de politiques institutionnellesque de l'engagement du personnel qui œuvre dansdes établissements. Il ne s’agit donc pas de nierl'importance des percées, mais bien d’en saisir leslimites afin de déterminer des voies d’action àprivilégier pour les franchir progressivement.

    Selon le Conseil, il importe d’examiner la questionen allant bien au-delà du discours des organisationsqui la mettent de l’avant. En effet, la résolutiondes problèmes dont il sera fait état dans le présentavis doit considérer les besoins des institutions,mais elle doit d'abord être centrée sur ceux despersonnes qui pourront conserver des tracescrédibles de leurs acquis , quelle qu’en soit laprovenance, et les faire valoir. En somme, la

  • Introduction 7

    reconnaissance des acquis doit passer « du statutde "questions essentiellement techniques" (commentévaluer ?; quelles procédures pour certifier ?), àcelles d'un enjeu politique fondamental dans ledéveloppement économique, social et éducatif despays1 ». C'est la perspective qu'adopte le Conseil etsur laquelle il s'appuie pour analyser la situation,établir des orientations et proposer des pistesd'action.

    L'avis comprend trois parties. Les recommandationsdu Conseil, formulées tout au long des chapitres,sont regroupées dans la conclusion. La premièrepartie, qui contient un chapitre, porte sur les fonde-ments de la reconnaissance des acquis, essentielle-ment du point de vue des besoins des citoyennes etdes citoyens, et sur les principes qui en découlent.Ces éléments servent de cadre conceptuel pourexaminer dans la deuxième partie les pratiquesdes établissements d'enseignement. À la fin duchapitre, le cadre conceptuel est précisé par unlexique qui, sans vouloir être unique, présente ladéfinition que donne le Conseil aux termes qu'ilutilise.

    La deuxième partie, qui comporte quatre chapi-tres, traite de l'examen critique de la contributionactuelle du système de l'éducation à chacun desordres d'enseignement en matière de reconnais-sance des acquis; le Conseil se penche égalementsur la situation particulière des personnes immi-grantes en cette matière.

    À la lumière des observations effectuées et desprincipes retenus, le Conseil propose, dans la der-nière partie, des pistes d'action qui s'articulentautour de la mise en œuvre progressive d'un sys-tème intégré de reconnaissance des acquis. Leséléments proposés, qui visent autant les systèmesde reconnaissance établis du côté de l’éducation etceux mis de l’avant par les partenaires du marchédu travail, permettent de mettre en place des condi-tions facilitant l'arrimage des systèmes de recon-

    1. Danielle Colardyn, La Gestion des compétences :perspectives mondiales, p. 20.

    naissance des acquis. Le Conseil suggère égale-ment des actions pour favoriser des développementsharmonisés des pratiques et en assurer le suivi.

    Le Conseil a confié à sa Commission de l’éducationdes adultes le mandat de préparer le présent avis.Pour nourrir la réflexion de la Commission et duConseil, des recherches documentaires ont étéeffectuées. Des personnes en provenance de ministè-res, d'établissements de formation et d'organisationsintéressées ont également été invitées à présenteraux membres de la Commission des éléments dessystèmes de reconnaissance des acquis en place,des pratiques en cours et de problèmes. Enfin, laCommission a tenu deux journées d'audiences aux-quelles ont participé une trentaine de personnes dequelque vingt organismes. La liste des organismesconsultés apparaît en annexe. Le Conseil tient àremercier chaleureusement l'ensemble des person-nes qui ont contribué à la préparation de cet avis.

  • P R E M I È R E P A R T I ECHAPITRE 1

    Les fondements de la reconnaissance des acquis

    Derrière ce dossier, apparemment trèscirconscrit, de la reconnaissance desacquis, on s'aperçoit que, plus on enanalyse les fondements et les prolonge-ments, on touche à toute une gammed'impératifs de société qui concernenttoujours finalement la participation auxbiens de la culture et, par là, aux finséconomiques. Nous sommes dans undossier d'équité et de construction desociété, il n'y a aucun doute là-dessus1.

    Les fondements de la reconnaissance des acquissont intégrés au discours des vingt dernières annéessur la formation continue et l'apprentissage tout aulong de la vie. Ces fondements sont établis à partirde constats essentiels : d'abord la diversité des lieuxet des façons d'apprendre et le besoin de titressocialement reconnus qui font état des acquis d'unepersonne. De ces deux constats découlent le droitdes personnes à la reconnaissance de leurs acquiset le devoir de la société de rendre accessible cettereconnaissance.

    1.1 Une brève rétrospective

    Au début des années 80, y compris au Québec, lareconnaissance des acquis est déjà associée étroite-ment à tout projet d'éducation permanente, effectuédans divers lieux et de diverses façons. Ainsi, en1982, la Commission d'étude sur la formation desadultes (Commission Jean) situe la reconnaissancedes acquis au point de départ et au point d'arrivéed'un système décloisonné d'éducation des adultes.« Reconnaître les acquis de l'adulte, c'est accepterque l'adulte soit capable d'apprendre à partir deses propres expériences et d'intégrer expériences

    1. Pierre Lucier, « La reconnaissance des acquis deformation : contexte, sens et portée des propositionsministérielles », Actes du Colloque sur la reconnais-sance des acquis de formation au Québec, Univer-sité de Sherbrooke, mai 1984.

    et connaissances acquises (scolaires et autres) dansun processus de formation continue 2. »

    En 1984, dans son énoncé d'orientation et son pland'action en éducation des adultes, le gouvernementdu Québec fait aussi de la reconnaissance des acquisscolaires et « expérientiels » une condition essen-tielle à tout projet d'éducation permanente. L'énoncéfait preuve d'une nette ouverture, en considérant lareconnaissance des acquis comme un service dis-tinct de celui de la formation. « D'abord pratiquéedans le cadre de l'inscription d'une personne à unprogramme de formation offert dans un établisse-ment – c'est l'aspect le plus connu – la reconnais-sance des acquis peut aussi se faire comme opéra-tion particulière, indépendamment de l'inscriptionde l'individu dans la démarche d'un programmedonné de formation. Ainsi libérée du processusd'inscription, la reconnaissance des acquis permetaux individus d'en utiliser ou d'en présenter lesrésultats là et auprès de qui ils veulent pouvoir lefaire, ce qui n'exclut évidemment pas les établis-sements d'enseignement eux-mêmes. C'est là l'as-pect le plus prometteur des pratiques de reconnais-sance des acquis; c'est celui vers lequel on inciterales réseaux d'enseignement à se diriger, au fur et àmesure qu'ils pourront disposer des techniquesrequises3. »

    Douze ans plus tard, dans son rapport final, laCommission des États généraux sur l'éducationsouligne à son tour l'importance de la reconnais-sance des acquis, en raison de la multiplicité deslieux d'apprentissage. « La diversité incontourna-ble des projets et des lieux de formation requiert,tout comme la monnaie, la création de systèmesd'équivalence et de reconnaissance assurant unevisibilité de la correspondance des formations4. »

    2. Commission d'étude sur la formation des adultes,Apprendre : une action volontaire et responsable :énoncé d'une politique globale de l'éducation desadultes dans une perspective d'éducation perma-nente, p. 362.

    3. Ministère de l’Éducation, Un projet d'éducationpermanente : énoncé d'orientation et plan d'actionen éducation des adultes, p. 38.

    4. Commission des États généraux sur l'éducation,Rénover notre système d'éducation : dix chantiersprioritaires, p. 39.

  • 10 La reconnaissance des acquis, une responsabilité politique et sociale

    La Commission des États généraux évoque l'éta-blissement de ponts entre les systèmes de recon-naissance.

    Si la reconnaissance des acquis demeure encoreau Québec un sujet d'actualité, c'est que les méca-nismes de reconnaissance mis en place au coursdes quinze dernières années ne sont sans doute nisuffisants ni surtout satisfaisants. C'est du moinsle point de vue émis par des organismes de plusieursmilieux, plus récemment dans le cadre des audiencesde la Commission des États généraux sur l'éduca-tion et de celles reliées à un projet de politiquegouvernementale de la formation continue. Cesont aussi les propos que la Commission de l'éduca-tion des adultes du Conseil a entendus au cours deses consultations, entre autres pendant les audiencesqu'elle a tenues en janvier 2000.

    L'importance de la reconnaissance des acquis ad'abord été plus étroitement associée à des catégo-ries de personnes en difficulté d'insertion socio-professionnelle et de rattrapage scolaire. Certes,les besoins d'insertion dans le milieu de travaildemeurent encore tout aussi réels, comme en témoi-gnent de façon récurrente les statistiques sur lechômage. Mais, si les personnes en chômage delongue durée peuvent être les bénéficiaires immé-diats de pratiques de reconnaissance des acquis, lapopulation pouvant y avoir recours s'est de plus enplus élargie, au cours des dernières années. Dansun contexte de transformations constantes et rapi-des de l'organisation du travail, la reconnaissancedes acquis apparaît en effet de plus en plus indis-pensable pour assurer l'insertion dans le marchédu travail, mais aussi le maintien dans un emploi,la mobilité et la progression professionnelles despersonnes scolarisées et de celles qui le sont moins.

    Le Conseil observe un consensus manifeste surl'importance de la reconnaissance des acquis et surl'insuffisance de son implantation. Mais on peut sedemander s'il y a aussi un accord sur la reconnais-sance effective de la diversité des lieux et desfaçons d'apprendre, sans laquelle la reconnais-sance des acquis reste confinée aux déclarationsd'intentions et son système, à des chasses gardées.

    1.2 La diversité des lieux et desfaçons d'apprendre

    S'il y a un besoin croissant et élargi de reconnais-sance des acquis, c'est du fait de la diversité deslieux et des façons d'apprendre. Cette diversitéexiste de tout temps. Mais depuis les dernièresdécennies, avec l'importance accrue accordée à laformation tout au long de la vie, on assiste à unediversification des lieux d'apprentissage et deformation en raison de l'expansion d'un « marchéde la formation continue 1 », que l'Organisation decoopération et de développement économique(OCDE) caractérise ainsi : le secteur institutionnel,dans lequel on retrouve les établissements d'ensei-gnement, universitaire et non universitaire; lesecteur non institutionnel, qu'il s'agisse des entre-prises, des associations professionnelles ou syndi-cales; le secteur commercial, à visée lucrative2.

    Cette expansion du « marché de la formation » estaccompagnée au mieux, pourrait-on dire, d'unemultiplication des formes de délivrance d'attesta-tion de la formation suivie, qu'elle revête un carac-tère officiel, comme les diplômes ou les certificatsde qualification, ou non officiel, comme les attes-tations de participation, pour n’en donner qu’unexemple. Au pire, la formation reçue et les acquisqui en découlent ne laissent de traces que pour lapersonne qui s'y est soumise.

    Déjà, en abordant les acquis issus d'activités deformation, structurée ou non, la question de leurreconnaissance est complexe. Elle le devient encoreplus, quand on y ajoute la dimension des appren-

    1. Danielle Colardyn, La Gestion des compétences :perspectives mondiales, p. 42. L'auteur signale que« ce concept ne peut être utilisé et compris dans unsens strictement économique. Ce "marché" n'opèrepas sur la base des coûts réels, et la plupart du tempsdes financements publics sont proposés. Néanmoins,acceptée dans un sens large, cette notion traduitplusieurs aspects de la réalité dont principalementl'existence de plusieurs acteurs et l'existence ou lestentatives d'instaurer des relations compétitivesentre ces acteurs. »

    2. Danielle Colardyn, La Formation professionnellecontinue des personnels hautement qualifiés, p. 56.

  • Les fondements de la reconnaissance des acquis 11

    tissages faits au cours des expériences de vie, debénévolat et de travail, de lectures, d'autodidaxie,de l'utilisation des technologies de l'information etde la communication, etc.

    La reconnaissance des acquis doit être considéréede la sorte comme la traduction sociale de cettereconnaissance de la diversité des lieux et des modesd'apprentissage. Mais d'abord, pourquoi attacherde l’importance à cette diversité, et pourquoi garderdes traces des acquis qui en sont issus ? La forma-tion proposée par le secteur non institutionnel(entreprises, associations) prend de l'ampleur etest un apport dans le développement des compé-tences de la population. Cependant, comme lenote Colardyn, « encore souvent, ces formationsdemeurent "non enregistrées" et de ce fait, "invi-sibles". Tant que la formation demeure "invisible",l'individu ne peut la faire valoir, l'entreprise nepeut formaliser sa prise en compte, le systèmeéducatif ne la reconnaît pas et le pays ne peut lacomptabiliser. Or, par l'intermédiaire de la recon-naissance des qualifications et des compétences,cette formation invisible prend une forme tangi-ble. Elle peut dès lors être située par rapport àl'enseignement formel, aux conventions collectives,comme aux comptabilités nationales (OCDE,1996)1 ».

    L'importance de cette formation « invisible » n'estpas négligeable. Par exemple, en France, les« investissements individuels réalisés dans unparcours de vie au cours d'une expérience profes-sionnelle comme dans le cadre d'une formationcontinue [sont] très rarement certifiantes (moinsde 5 % l'auraient été en 1995)2 ». Au Québec, pourla seule formation en entreprise, c'est de façonindirecte qu'on peut supposer que la reconnaissance

    1. Danielle Colardyn, La Gestion des compétences :perspectives mondiales, p. 195-196.

    2. Groupe des enseignements technologiques, Élèves,apprentis, adultes : quelles certifications pourquelles qualifications, cité par le Centre d'études etde recherches sur les qualifications (CEREQ),« Reconnaissance et validation des acquis dans lecontexte de la formation », p. 7.

    des compétences acquises en milieu de travail estune pratique peu développée dans les entreprises.Ainsi, de façon nettement majoritaire (85 p. cent),les entreprises québécoises ont recours à leur pro-pre personnel pour assurer la formation de leursemployés, et il y a une nette prédominance de laformation « sur le tas » en vue de l'adaptation à latâche. Ce sont des indices de formation la plupartdu temps non assortie d'une reconnaissance offi-cielle d'acquis pour les personnes3. C'est donc direque nombreuses sont les personnes qui, bien quesans diplôme, n'en possèdent pas moins les quali-fications acquises, sans que ces dernières ne soientcomptabilisées.

    Il importe certes d'accroître la reconnaissance desacquis, en particulier de ceux issus de la formationen provenance du secteur non institutionnel. Cepen-dant, pour accroître la visibilité de cette reconnais-sance, il ne suffit pas de diversifier les formes dereconnaissance. Selon le Conseil, il faut plutôttravailler à l'émergence d'un système réseau,en commençant par la construction de repèresen interrelation pour la reconnaissance desacquis.

    1.3 La construction et l'intégration derepères pour la reconnaissancedes acquis

    Au Québec, le repère principal de reconnaissancedes acquis réside dans les diplômes décernés auterme d'une formation scolaire. Le diplôme, s'iln'est plus le seul cadre de référence, conservenéanmoins encore beaucoup d'importance. Ce quementionnait la Commission d'étude sur la forma-tion des adultes au début des années 80 demeured'actualité : « Bien sûr, il existe une école de pen-sée dont les adeptes sont souvent fortement scola-risés et qui préconise une société sans diplôme !Mais la Commission croit que l'on ne peut faire

    3. Conseil supérieur de l'éducation, La Formationcontinue du personnel des entreprises. Un défipour le réseau public d'éducation , p. 36.

  • 12 La reconnaissance des acquis, une responsabilité politique et sociale

    abstraction de la réalité du diplôme au Québec etplutôt tenter de résoudre les problèmes de la recon-naissance des acquis en poursuivant la réflexion etles expériences en cours actuellement au Québec1. »

    Pendant longtemps, du moins pour les détracteursdu diplôme, ce mode de reconnaissance dominanta accordé plus d'importance aux savoirs discipli-naires qu'aux « savoirs en action », ces dernierspouvant être directement utilisés dans les activitésprofessionnelles. Comme le signale Liétard pourle cas de la France, « la conséquence d'une tellelogique est bien stigmatisée par le Conseil économi-que et social quand il souligne, dans l’un de sesavis de 1988, qu'entre un incompétent diplômé etun compétent non diplômé, il peut y avoir le mêmefossé qu'entre le noble et le roturier2 ».

    Qu'en est-il au Québec ? Si ce n'est de l'époquepréalable à l'importante réforme de la formationprofessionnelle au secondaire amorcée en 1986,on ne peut maintenant conclure à une séparation sinette entre l'école et le monde du travail. Maisdiverses voies de certification ont été mises enplace par le ministre responsable de la main-d'œuvre. Ainsi en est-il de l'exercice de métiersréglementés3 mais aussi de ceux pour lesquels laformation et la qualification professionnelles déter-minées par le ministre sont facultatives. À titred'exemple, depuis 1969, pour certains métiers etprofessions ou certaines parties de métier et deprofession, la Loi sur la formation et la qualifica-tion professionnelles de la main-d'œuvre donneau ministre responsable de son application le pou-voir d'établir des programmes de formation et dequalification professionnelles, et le pouvoir de dé-terminer les qualifications que nécessite leur exer-cice. Le certificat de qualification émis par leministre atteste le niveau de qualification acquise

    1. Commission d'étude sur la formation des adultes,op. cit., p. 341.

    2. Robert Liétard, « Se reconnaître dans le maquisdes acquis », Éducation permanente, n° 133/1997,p. 67.

    3. Huit métiers sont réglementés par Emploi-Québec.

    dans un métier ou une profession dont l'exercice estréglementé en vertu de cette loi, ou qui est visé parun programme établi.

    Au début des années 80, on a aussi observé desinitiatives visant à occuper la place non prise oumal prise par les diplômes. Mais de telles initiativesont eu cours aussi dans les métiers pour lesquelsune formation scolaire était sanctionnée par undiplôme de formation professionnelle au secondaire,avant mais aussi après la réforme de la formationprofessionnelle. On a de la sorte envisagé un sys-tème de reconnaissance des compétences profes-sionnelles et procédé à son expérimentation jus-qu'au début des années 90, avant de décider de nepas y donner de suites. Ce système consistait enl’évaluation de compétences reconnues sur lemarché du travail et en l’émission d’un certificatde compétences aux candidates et candidats reçus.L’évaluation des compétences dans la pratique dumétier se faisait à partir de l’instrumentation élabo-rée et se réalisait en entreprise. Le système expé-rimenté a cependant été jugé coûteux; il supposaitl’élaboration d’instruments d’évaluation, la forma-tion et l’accréditation des évaluateurs, en plus dufinancement du service.

    Il faut noter que durant l’expérimentation, il y a eudes discussions interministérielles sur ce systèmeparallèle de reconnaissance, susceptible de semerla confusion entre deux types de reconnaissance etdeux types de sanction : celle de l’éducation etcelle du marché du travail. On a jugé alors que lerecours à un système de reconnaissance des com-pétences professionnelles, si pareil système devaitse développer, devait être limité aux métiers pourlesquels il n’existe pas de programmes d’étudesconduisant au diplôme d’études professionnelles.

    Tel fut le cas, au moins pendant un temps, dansles travaux subséquents de ce même ministère,pour la mise en place du régime de qualification.Ce faisant, le ministère voulait donner suite à lademande du milieu du travail visant la hausse descompétences de la main-d'œuvre et la reconnais-sance officielle des qualifications professionnelles.Pour éviter la mise en place de deux systèmes

  • Les fondements de la reconnaissance des acquis 13

    parallèles de formation et de reconnaissance, il futalors convenu entre le ministère de l’Éducation etcelui responsable du développement de la main-d’œuvre de mettre en place ce régime pour per-mettre de faire des apprentissages différents ouqui s’ajoutent à ceux qu’on effectue dans le cadredes programmes d’études conduisant au diplômed’études professionnelles. En d'autres termes, on aalors privilégié une voie complémentaire de for-mation professionnelle et de reconnaissance. Lerégime auquel ne peuvent avoir accès que les per-sonnes qui occupent un emploi, a été élaboré pourune douzaine de métiers et professions au cours descinq dernières années. L’objectif est de permettreaux travailleuses et aux travailleurs d’acquérir etde faire reconnaître leurs compétences et de sequalifier en fonction des normes établies pourl’exercice du métier ou de la profession1. L'ap-prenti qui répond aux exigences obtient un certif i-cat de qualification délivré maintenant par Emploi-Québec, auparavant par la Société québécoise dedéveloppement de la main-d'œuvre.

    Ces initiatives en ont engendré d'autres, d'aborddans la logique de proposer des voies de rechangeà la formation professionnelle en établissement ausecondaire mais conduisant au même diplôme deformation. C'est au cours du Sommet sur l'économieet l'emploi d'octobre 1996 que la ministre del'Emploi et de la Solidarité, de même que la minis-tre de l'Éducation annonçaient la mise en place durégime d'apprentissage offert alors aux personnesayant réussi une troisième secondaire. Au momentde son implantation, en 1997-1998, le régime estmis au point pour six métiers.

    1. De 1993 à 1998, environ 2 000 entreprises ont signéune entente pour la mise en œuvre du régime. Au31 mai 1998, dans les douze métiers visés, quelque1 000 travailleuses et travailleurs participaient aurégime, avec une concentration plus importante enusinage (377) et en cuisine d'établissement (287).Au 31 mars 1998, environ 200 personnes avaientobtenu un certificat de qualification professionnelledans les métiers de cuisine d'établissement, d'im-pression sur presse rotative, d'usinage, d'entretiende véhicules récréatifs et de pâtisserie. Source :Emploi-Québec, Régime de qualification.

    Le régime d'apprentissage n'a pas obtenu les résul-tats escomptés. Comme en fait état le rapportcommandé par la Commission des partenaires dumarché du travail, on dénombre, en 1998, 24 per-sonnes en apprentissage dans trois spécialités, cequi est loin des 1000 places dans douze métiersannoncées au cours du Sommet sur l'économie etl'emploi2. Il n'est pas sans intérêt de signaler quel'une des cinq recommandations formulées dans lerapport, « qui vise à assurer la spécificité durégime », a trait à l'évaluation et à la reconnais-sance des acquis : « Que l'on reconnaisse que ledéveloppement du programme d'apprentissagedépend en partie d'une politique de reconnaissancedes acquis et des compétences de ceux et cellesqui exercent déjà actuellement ces métiers et qu'unepriorité concrète soit accordée au règlement decette épineuse question3. »

    Au cours de l'année 1999, un groupe de travailmandaté par la Commission des partenaires dumarché du travail a conduit des travaux visant larévision et l'aménagement du régime d'apprentis-sage. L'aménagement finalement proposé vise àétablir un régime d'apprentissage facultatif pourfavoriser l'accès à des métiers et autres professions,ainsi que le développement et la reconnaissancedes compétences de la main-d'œuvre, en fonctiondes besoins du marché du travail. « [La] propositionse situe également dans la perspective d'un systèmeintégré d'apprentissage, de qualification et de recon-naissance des compétences professionnelles4. » Cenouveau régime s'ajouterait aux actions du minis-tère de l'Éducation et de ses réseaux en matière deformation professionnelle, ce qui permettrait dediversifier les modes de formation pour l'accès auxmétiers et autres professions. Le régime s'adresse

    2. Denis Bertrand, Jean Ducharme et Pierre Filiatrault,Le Régime d'apprentissage : perceptions des princi-paux acteurs, constats diagnostiques retenus etmesures prescriptives recommandées.

    3. Ibid.

    4. Groupe de travail de la Commission sur le régimed'apprentissage, Mémoire à la Commission despartenaires du marché du travail, Réunion tenue le17 février 2000, p. 2.

  • 14 La reconnaissance des acquis, une responsabilité politique et sociale

    aux travailleuses et aux travailleurs qui occupentun emploi et à ceux nouvellement embauchés.

    Il faut noter que la proposition de révision a étéretenue par la Commission des partenaires enfévrier 2000, et a été soumise à la ministre respon-sable d'Emploi-Québec. Dans l'attente des chan-gements réglementaires requis pour la mise enœuvre du nouveau régime, provisoirement nommérégime de développement et de reconnaissancedes compétences, la Commission des partenairesdu marché du travail assure le suivi des projetsexpérimentaux en cours et de ceux à venir afin devalider les ajustements1.

    Il importe de souligner que, contrairement au régimed'apprentissage mis en place en 1997-1998, la basede référence de l'apprentissage dans le régimeaménagé n'est plus celle des programmes de for-mation élaborés par le ministère de l'Éducation.Les programmes du nouveau régime reposent eneffet sur des normes professionnelles établies parles comités sectoriels de main-d'œuvre. Ces nor-mes « sont composées des compétences qui décri-vent l'exercice d'un métier ou d'une profession etconstituent les "référentiels" utilisés pour la for-mation et pour la reconnaissance des compétencesacquises. Établies sur la base d'un consensus sec-toriel et tenant compte des particularités régiona-les, elles établissent les standards du marché dutravail et rendent possible la certification2 ». Cettedernière en est une d'État, émise par Emploi-Québec et par la Commission des partenaires dumarché du travail; elle détermine le ou les comités

    1. Il y a actuellement six projets d'élaboration de normesde compétences, financés par le Fonds national deformation de la main-d'œuvre. Rappelons que cefonds, institué en vertu de la Loi favorisant le déve-loppement de la formation de la main-d'œuvre, estconstitué des sommes remises au ministère duRevenu par les entreprises qui n'ont pas consacré àdes dépenses de formation une partie ou la totalitédu montant minimal fixé par règlement. Les projetssont conduits dans les domaines suivants : pétro-chimie, communication graphique, aménagementforestier, production agricole, produits électriqueset électroniques (pour les métiers de techniciens enélectroménager) et mécanique de machines fixes(projet multisectoriel).

    2. Ibid., p. 3-4.

    sectoriels visés par la mise en œuvre du régime. Lescompétences acquises dans le cadre de ce régime« sont attestées officiellement (à l'unité)3 ». Ilrevient à Emploi-Québec d'administrer les condi-tions de reconnaissance des compétences tellesqu’elles sont définies par les comités sectoriels.

    Dans son mémoire de février 2000 à la Commis-sion des partenaires, adopté par cette dernière, legroupe de travail insiste sur le fait que « le déve-loppement du régime appelle, dans une phasesubséquente, un arrimage nécessaire avec le dis-positif de formation de l'Éducation de manière à"concevoir des itinéraires ouverts et cohérents et[à] établir des passerelles"4 », comme le préconisela Commission des partenaires dans son avis sur leprojet de politique de la formation continue, rendupublic en juin 1998.

    Il convient de signaler que, dans la propositioninitiale de révision et de réaménagement du régimed'apprentissage qu'il a soumise à la consultationau cours de l'automne 1999, le groupe de travailsur le régime d'apprentissage confiait à Emploi-Québec, entre autres responsabilités, celle d'établir,en concertation avec les comités sectoriels, laméthodologie et les critères de définition des normesprofessionnelles. Il lui confiait en outre la respon-sabilité de la formation des compagnons et del'accréditation de cette formation5. Le même docu-ment indiquait aussi qu'il revenait aux comitéssectoriels, entre autres responsabilités, d'établir, devalider et de mettre à jour les normes profession-nelles, les compétences et les niveaux de qualif i-cation des métiers et professions « ou des ensem-bles de compétences ». Il leur revenait égalementla responsabilité de valider les normes de forma-tion, les carnets d'apprentissage et les guides descompagnons. À cet égard, le Secrétariat de la

    3. Ibid., p. 7.

    4. Ibid., p. 2.

    5. Secrétariat de la Commission des partenaires dumarché du travail, Proposition d'aménagement durégime d'apprentissage : intégrer le régime d'ap-prentissage et le régime de qualification , février1999.

  • Les fondements de la reconnaissance des acquis 15

    Commission des partenaires du marché du travail« confiait aux principaux acteurs (représentantsdes employeurs et des travailleurs) la gestion desnormes professionnelles1 ». Cette responsabilitésupplémentaire des partenaires du marché du tra-vail dans cette voie additionnelle de formationprofessionnelle de la main-d'œuvre et de recon-naissance officielle des acquis (ou des compéten-ces) se rapproche de celle qui leur est confiée danscertains pays européens. La question sera abordéedans le chapitre 6 du présent avis.

    Nous notons donc au Québec le développementprogressif de voies parallèles de formation de lamain-d'œuvre et de reconnaissance de compéten-ces. Assurer des passerelles entre ces voies pa-rallèles en vue de permettre la reconnaissancemutuelle, dans l'une et l'autre voies, des com-pétences communes aux deux « référentiels »constitue pour le Conseil un enjeu important. Ily a lieu à ce sujet de rappeler qu'au Québec, le« référentiel » de l'éducation2 autant que celui dumarché du travail sont établis sur la même base,celle des compétences. Est-il plausible alors, qu'auseuil d'entrée dans l'exercice d'un métier ou d'uneprofession, les compétences retenues dans lesprogrammes d'études conduisant à un diplôme etcelles déterminées indépendamment par un comitésectoriel de la main-d'œuvre soient si étrangèresles unes aux autres qu'il faille opter, avec les coûtsque le double exercice comporte, pour la mise enplace de systèmes parallèles ?

    S'il y a une nette évolution des formes de certifi-cation des compétences professionnelles du côtédes partenaires du marché du travail et de systèmesde reconnaissance en place ou en gestation, leConseil souligne, à l'instar de Liétard, que lesdiplômes eux aussi évoluent : « On a pu constaterle développement progressif d'une perspective deformation professionnelle de base : celle-ci débou-che sur une qualification plus polyvalente, incluant

    1. Ibid., p. 23.

    2. En formation professionnelle au secondaire et àl'enseignement collégial.

    des compétences sociales et méthodologiques,avec une part croissante de formation généralevisant à accroître l'adaptabilité, les capacités demobilité et, pour reprendre un terme à la mode,"l'employabilité". Au niveau de la révision et de lacréation des diplômes, cette conception entraîne lacréation, à tous les niveaux d'enseignement, dediplômes plus larges, correspondant à des famillesprofessionnelles, se substituant progressivementaux qualifications pointues traditionnelles3. »

    De façon particulière pour la formation des profes-sionnelles et des professionnels, des efforts impor-tants ont été consentis à cette fin au Québec. Ainsi,au secondaire, la réforme de la formation profes-sionnelle a visé les objectifs de valorisation decette voie, empruntée désormais à la suite d'unparcours désigné de formation générale. Avecl'approche par compétences pour l'élaboration desprogrammes d'études, déterminées avec la colla-boration du marché du travail, le ministère del'Éducation a voulu faire en sorte que la formationprofessionnelle réponde aux attentes des entreprises,au seuil d'entrée des personnes dans l'exerciced'une profession, tout en s'assurant de la polyva-lence des travailleuses et des travailleurs formés.

    L'enseignement collégial a pour sa part misé sur laformation de techniciennes et de techniciens deniveau supérieur, qui possèdent non seulement leshabiletés techniques requises, mais aussi desconnaissances fondamentales et des compétencesgénériques. Depuis 1993, l'élaboration et la révisiondes programmes de formation technique se fontégalement selon l'approche par compétences. Lacaractéristique du modèle québécois, si on lecompare à des modèles européens, est sans doutenon seulement la place accordée à la formationgénérale commune mais aussi à « l'approche pro-gramme », pour éviter le morcellement de la for-mation4.

    3. Bernard Liétard, op. cit., p. 68.

    4. Réginald Lavertu, Communication présentée à laConférence internationale sur la formation profes-sionnelle et technique, Montréal, novembre 1999.

  • 16 La reconnaissance des acquis, une responsabilité politique et sociale

    L'enseignement universitaire n'est pas en reste. Dansleur offre de programmes, les établissements uni-versitaires doivent tenir compte des demandes descorporations professionnelles afin d'ajuster leurenseignement aux exigences de la pratique.

    Il n'est pas sans intérêt de souligner l'importancede la formation générale dans le développementde compétences de formation professionnelle.Dans son avis sur la formation continue du per-sonnel des entreprises1 et dans celui sur la compo-sante de formation générale dans les études tech-niques au collégial2, le Conseil insistait d'ailleurssur ce point. À l'instar de Bertrand Schwartz, LeBoterf en fait une composante essentielle de la for-mation professionnelle : « c'est elle [la formationgénérale] qui permet aux compétences d'évoluer etde s'adapter aux changements et mutations dessituations de travail. C'est la raison de la montéed'intérêt pour le développement de compétencesgénériques ou transversales qui peuvent s'appli-quer à des situations variées, à des emplois plutôtqu'à des postes.3 »

    En théorie, le « référentiel » des compétences,adopté par le ministère de l'Éducation en formationprofessionnelle au secondaire et en formationtechnique au collégial, rapproche le monde scolaireet celui du travail. Si les « référentiels » sont lesmêmes, la reconnaissance, par le milieu scolaire,des compétences développées en dehors de leurenceinte connaît des ratés, parce qu'elle se bute àdes normes, à des contenus et à des processussinguliers. Malgré l'existence de réseaux scolaires,il semble qu'il soit difficile de faire de la reconnais-sance des acquis en réseau ! Pour bâtir ce réseaude reconnaissance des acquis, il est essentiel deconvenir de principes qui devraient guider sa miseen œuvre. Selon le Conseil, l'application détermi-

    1. Conseil supérieur de l'éducation, op. cit.

    2. Conseil supérieur de l'éducation, Pour une forma-tion générale bien enracinée dans les études tech-niques collégiales.

    3. Guy Le Boterf, De la compétence : Essai sur unattracteur étrange , p. 21.

    née de ces principes devrait conduire à la cons-truction d'un système diversifié, pour répondre à ladiversité des besoins, mais aussi d'un systèmeunifié, ce qu'il faut viser. L'entente sur de telsprincipes est un préalable au passage du modèledes châteaux à celui de réseau4, permettant de pri-vilégier les ponts entre des systèmes de reconnais-sance érigés jusque-là en monopoles.

    1.4 Les principes à la base de lareconnaissance des acquis et quidoivent guider les actions

    Dans les chapitres qui suivent, le Conseil a jugénécessaire de rappeler l'état des lieux dans le sys-tème scolaire, en examinant la situation au regardde trois principes à la base de la reconnaissancedes acquis.

    • Premier principe : une personne a droit à lareconnaissance sociale de ses acquis; encontrepartie, il lui incombe de fournir lapreuve de ses acquis.

    • Deuxième principe : une personne n'a pas àréapprendre ce qu'elle sait déjà; ce qui importedans la reconnaissance des acquis, c'est cequ'une personne a appris et non les lieux, cir-constances ou méthodes d'apprentissage.

    • Troisième principe : tout système de reconnais-sance des acquis doit viser la transparence.

    Ces principes sont centrés sur la personne; ilstraduisent son droit à la reconnaissance sociale dece qu'elle sait et à celui de pouvoir s'en prévaloirauprès de garants qui rendent transparents lessystèmes de formation, d'évaluation et de recon-naissance qu'ils mettent en œuvre. Dans cetteperspective, le Conseil estime important de joindre

    4. Le Conseil reprend ici la métaphore de FedericoButera, La Métamorphose de l'organisation. Duchâteau au réseau et qu'utilise aussi Réal Jacob,« Document d'orientation et d'aide à la décision »,Colloque Pour réussir le partenariat et l'harmoni-sation entre le secondaire et le collégial.

  • Les fondements de la reconnaissance des acquis 17

    à ces trois principes trois corollaires, qui font appelà la responsabilité sociale des organisations, dontles établissements du réseau de l'éducation. Cescorollaires1 sont les suivants :

    • Une personne n'a pas à refaire en un lieu donnédes apprentissages faits en un autre lieu2.

    • Une personne n'est pas tenue de faire recon-naître une deuxième fois des acquis évaluésavec rigueur et sanctionnés officiellement unepremière fois.

    • Les encadrements réglementaires et les moda-lités d'organisation, dans le réseau de l'éduca-tion, doivent créer les conditions favorables àla prise en compte des principes à la base dela reconnaissance des acquis.

    Il apparaît vite que ces principes et leurs corolla i-res trouvent des limites dans leur mise en applica-tion, dans le système d'éducation notamment. Cequi ne signifie pas pour autant que rien n'a été misen place ou que tout est à refaire.

    Avec le premier principe, à l'instar d'autres orga-nisations, le Conseil fait de la reconnaissance desacquis un droit. Il y aura lieu d'expliciter ce droit,et de proposer les moyens d'en assurer l'exercice.Des recommandations en ce sens seront faitesdans les chapitres qui suivent.

    Signalons que, sans faire de façon explicite de lareconnaissance des acquis un droit, la Déclarationde Hambourg adoptée par les représentantes et les

    1. Les deux premiers corollaires étaient mis de l'avantpar le Groupe de travail interministériel sur la recon-naissance des acquis, Rapport du Groupe de travailinterministériel sur la reconnaissance des acquisau Comité interministériel de l'éducation desadultes, p. 18-19.

    2. Comme le signale à juste titre Colette Dufresne-Tassé : « En bonne pédagogie, il est impossibled'aider quelqu'un à apprendre ce qu'il sait déjà ! Ilest complètement démotivé. » « Réflexion à proposde… reconnaissance des acquis dans les universités,interview de madame Colette Dufresne-Tassé », Àpropos de… reconnaissance des acquis dans lesuniversités, n° 2, mai 1988, p. 23.

    représentants des États membres de l'Unesco etdes organisations participantes en a souligné l'im-portance dans sa proposition visant à ouvrir auxadultes l'éducation primaire, secondaire et supé-rieure, entre autres : « (b) en élaborant des méca-nismes cohérents pour reconnaître les acquis desapprentissages effectués dans différents contexteset faire en sorte que leur validation soit transférableà l'intérieur des établissements, des secteurs et desÉtats entre eux3 ».

    L'examen des systèmes de reconnaissance en placedoit être fait également au regard du deuxièmeprincipe. La description des systèmes actuelssoumise dans les chapitres qui suivent permetd'observer les limites de son application.

    Le troisième principe présente un certain caractèrenovateur, du moins au Québec. Le Conseil s'inspireici des réflexions de certains auteurs français,notamment de Danielle Colardyn4. L'auteur signalequ'au cours des dernières années, des organismesinternationaux comme le Centre de développementde la formation professionnelle (CEDEFOP) ont tentéd'établir la correspondance des qualifications entreles pays membres de la Communauté européenne.On a d'abord procédé à l'examen de la qualification,en comparant les systèmes nationaux d’enseigne-ment et de formation. L'entreprise s'est avéréedifficile, en raison des trop grandes différencesentre les systèmes.

    On a opté par la suite pour la comparaison ducontenu des emplois et l'examen des modes d'accèsdans les États membres. L'opération est vite appa-rue comme un long travail de négociation avec lespartenaires sociaux et on s'est heurté à la difficultéde convenir d'une définition commune de la notionde qualification, très sociétale et spécifique à chaque

    3. Institut de l'Unesco pour l'éducation, Éducation desadultes : la Déclaration de Hambourg, l’Agendapour l'avenir, 5e Conférence internationale surl'éducation des adultes, 14-18 juillet 1997, p. 34.

    4. Danielle Colardyn, La Gestion des compétences :perspectives mondiales.

  • 18 La reconnaissance des acquis, une responsabilité politique et sociale

    pays1. D'où la nécessité d'envisager le concept dequalification en fonction de sa logique d'utilisation.Actuellement, le CEDEFOP conduit des travaux àpartir du concept de compétences afin de développerdes instruments européens de mobilité de la main-d'œuvre2.

    Après des années de travaux du CEDEFOP, onconclut que l'intérêt des pays membres de laCommunauté européenne est de viser la transpa-rence du système éducatif et de formation, ainsique de ses relations avec le marché du travail.Danielle Colardyn3 retient trois critères pour me-surer cette transparence des systèmes de formationet de reconnaissance des qualifications et descompétences :

    • La « transférabilité »4 au sein du systèmeéducatif, qui pose toute la question des passe-relles entre les enseignements général et pro-fessionnel et entre les ordres d'enseignement.

    • La visibilité pour les entreprises. Il s'agit de lavaleur sociétale accordée à la certification et quisoulève l'engagement des partenaires sociauxdans la conception des repères de formation etde reconnaissance des acquis.

    1. « Selon la manière dont les relations industrielleset les formes d'organisation du travail se sont déve-loppées dans chaque pays, nous avons observé queles qualifications font référence aussi bien aux di-plômes scolaires qu'aux caractéristiques des diffé-rentes catégories du marché de l'emploi (telles queles professions), aux classifications dans les sys-tèmes de rémunération, aux postes de travail ausein de l'entreprise ou encore à des combinaisonsde ces divers éléments. » (Grootings P., 1994 ) citépar Colardyn, op. cit., p. 53.

    2. La compétence est propre à la personne « tout enétant intimement liée et étroitement dépendante ducontexte social général dans lequel est émergé cetindividu, et plus spécialement du champ des métiers,des professions comme du secteur professionneldans lequel il vit quotidiennement (Colardyn D. etParlier M., 1989). Elle est centrée sur les résultatset elle est indépendante du lieu et de la durée del'apprentissage. » Colardyn, op. cit., p. 54-55.

    3. Ibid., p. 63.

    4. Le néologisme est utilisé par l'auteur.

    • La « portabilité »5 sur le marché du travail.On aborde ici l'importance accordée par lesentreprises à la formation continue et la valeurd'échange du portefeuille de compétences,quelle que soit sa forme, en touchant alors ladimension économique de la certification pourl'insertion et la promotion sur le marché dutravail.

    Le concept de transparence des systèmes de recon-naissance des acquis et les critères proposés pourl'établir ne sont pas sans intérêt dans l'examen dela situation québécoise. Ils permettent d'interrogerces systèmes sous l'angle de leur caractère infor-matif. Ils peuvent de la sorte servir à juger de lafacilité ou non d'établir les passerelles entre lescahiers de normes de compétences, élaborés pardes comités sectoriels de main-d'œuvre ou lescorporations professionnelles, et les programmesd'études de formation professionnelle et de forma-tion technique. Ils peuvent aussi aider à cerner laproblématique de la continuité de la formation,d'un ordre d'enseignement à l'autre, et d'un établis-sement à l'autre. L'adoption de ces concepts et decelui de la comparabilité des reconnaissances estcentrale dans une démarche concertée visant la miseen œuvre progressive d'un dispositif favorisantl'intégration des systèmes de reconnaissance desacquis.

    L'exercice du droit à la reconnaissance des acquis,sa traduction dans le fait de ne pas avoir à réappren-dre ce qu'on sait déjà et enfin, la transparence dessystèmes de reconnaissance, examinée au regardde leur « transférabilité », de leur visibilité et deleur « portabilité », n'ont de sens que si le garantde la délivrance d'une attestation, quelle que soitsa forme, en authentifie la valeur. L'importantequestion de la rigueur de l'évaluation en amont dugeste final de reconnaissance est de la sorte soulevéeet se pose en ces termes : quelle valeur les garantsrespectifs des délivrances de titres accorderont-ils à ceux émis en dehors de leurs compéte n-ces ? En d'autres termes, la détentrice ou ledétenteur d'un titre, qu'il s'agisse d'unités de

    5. Le néologisme est utilisé par l'auteur.

  • Les fondements de la reconnaissance des acquis 19

    formation scolaire, d'attestation de compéten-ces, d'unités d'éducation continue, etc., pourra-t-il s'en prévaloir auprès de divers garants de« référentiels » similaires, sans avoir à se sou-mettre de nouveau à un processus d'évalua-tion ? La mise en place des conditions pourassurer l'homologation des titres et donc leur« transférabilité » constitue selon le Conseil unenjeu central, sur lequel il reviendra dans lesixième chapitre.

    1.5 Des précisions sur le vocabulaire

    Avant de procéder à l'analyse des pratiques dereconnaissance des acquis, il est utile de préciserla signification que donne le Conseil aux principauxtermes qu'il utilise. La multiplication des initiativesen matière de reconnaissance des acquis dans deslieux institutionnels différents semble avoir donnélieu à un foisonnement des notions et concepts.Aussi le Conseil a-t-il trouvé indispensable declarifier la terminologie utilisée dans le présentavis. L'analyse documentaire effectuée au coursdes travaux a en effet permis de constater un intérêtmanifeste pour le partage d'un lexique minimalcommun, parce qu'on observe une « dérive lin-guistique 1 » sur le sujet.

    Le Conseil n'a pas jugé opportun d'apporter ici ladéfinition de tous les termes auxquels il a généra-lement recours, quand il est question de reconnais-sance des acquis, préférant inviter le lecteur àconsulter l'annexe 1 du présent avis. Néanmoins, iln'est pas sans intérêt de définir au moins quelques-uns de ces termes, d'ailleurs déjà utilisés dans cepremier chapitre. Un point important mérited'être souligné : le Conseil n'a nullement l'in-tention, encore moins la prétention d'imposeraux milieux intéressés un seul lexique, le sien2.

    1. Daniel Jacobi et Karine Lonchamp, « Reconnaîtreet valider les acquis : les dérives linguistiquesd'une injonction paradoxale », Éducation perma-nente, n° 118/1994-1 , p. 51-64.

    2. Comme le soulignent Daniel Jacobi et KarineLonchamp dans leur article précédemment cité :« Notre langue est vivante; elle est utilisée journel-lement par un nombre considérable d'interlocuteurs.

    Son seul souci est de préciser la significationqu'il donne aux termes qu'il utilise, pour êtrebien compris.

    Le Conseil entend par ACQUIS , la définition qu'endonne Francine Landry : « connaissances, attitudes,habiletés, compétences, capacités qui ont été déve-loppées ou apprises par un individu3 ». Il est im-portant de préciser, à l'instar de Landry, qu'avec lanotion d'acquis, on met davantage l'accent sur cequi résulte d'un apprentissage plutôt que sur l'acti-vité d'apprentissage elle-même. En outre, l'acquispeut résulter d'un apprentissage, sans qu'il y ait eunécessairement « activité systématique et intention-nelle d'apprentissage4 ». Enfin, la notion d'acquispeut être limitée à des habiletés, des capacités ouà des compétences, « c'est-à-dire à des élémentsqui se traduisent directement en performances ».Toutefois, dans le milieu scolaire, la notion d'acquisest entendue de façon plus large; elle « inclutnotamment des connaissances et des attitudes quisont jugées importantes en contexte d'apprentis-sage, même si elles ne mènent pas toujours direc-tement à l'exercice d'une activité5 ».

    Le Conseil emprunte encore à Landry la définitiondu terme EXPÉRIENTIEL : « Qui se rapporte à l'ex-périence6. » Comme le souligne l'auteure : « l'adjec-tif "expérientiel" qualifie généralement une acti-vité de formation ou un apprentissage au cours

    Quels que soient les efforts des censeurs et despuris tes, la vie de la langue fait que les mots naissentet meurent, évoluent et se transforment. Et quandils sont rangés alphabétiquement, dans un diction-naire, leur sens a parfois déjà changé, bougé. (…)Les tentations de fixer le sens de certains termesen les normalisant (AFNOR) ou en proposant desdéfinitions publiées au Journal officiel, quand ellesne sont pas entachées d'erreurs au départ, demeurenttoutes vouées à l'échec; au mieux, elles seront tran-quillement oubliées ou laissées de côté. Il est hélasconnu que l'on ne gouverne pas la langue pardécret. »

    3. Francine Landry, Vocabulaire de la reconnais-sance des acquis, p. 13.

    4. Ibid.

    5. Ibid.

    6. Ibid., p. 34.

  • 20 La reconnaissance des acquis, une responsabilité politique et sociale

    duquel la personne est en contact direct avec l'objetd'apprentissage; ce contact direct suppose géné-ralement que la personne est en situation d'action,et non seulement d'observation. » L'apprentissage« expérientiel » est centré sur le vécu et l'expé-rience pratique tandis que l'apprentissage scolairetraditionnel repose sur « l'assimilation d'informa-tions symboliques transmises par un enseignant ouun manuel ». Les deux modes d'apprentissage nesont pas pour autant opposés. « Kolb (1985) adémontré que les deux sont des moments différentsd'un même processus d'apprentissage comprenantquatre étapes : l'expérience pratique, l'observationréflexive, la conceptualisation abstraite et l'expé-rimentation active »1. Enfin, quand on l'utilise dansle domaine de la reconnaissance des acquis, « expé-rientiel » qualifie le plus souvent des apprentissagesqui se sont déroulés au cours d'expériences detravail et de vie, et généralement sans que cesapprentissages n’aient été planifiés ni recherchésen eux-mêmes, les expériences vécues ayant alorsd'autres finalités2 ».

    Quant au terme EXTRASCOLAIRE, la définition rete-nue par le Conseil est celle de la Commission determinologie de l’éducation du Québec : « qui alieu, qui se fait à l'extérieur du cadre scolaire3 ».Selon la Commission de terminologie, « une acti-vité extrascolaire a toujours un rapport avec desobjectifs généraux d'éducation ou de formation4 ».Landry précise pour sa part qu'extrascolaire et« expérientiel » « ne qualifient pas les mêmesphénomènes. Extrascolaire situe le lieu ou le cadrede l'apprentissage, en mettant en évidence qu'unapprentissage s'est développé en dehors du cadrescolaire. Par contre, et il en a été question plushaut, « expérientiel » met l'accent sur un mode

    1. Ibid.

    2. Ibid.

    3. Commission de terminologie de l'éducation duQuébec, dans Renald Legendre, Dictionnaireactuel de l'éducation, p. 602.

    4. Ibid.

    d'apprentissage, dans lequel le contact direct joueun rôle important5 ».

    La définition de RECONNAISSANCE DES ACQUIS queretient le Conseil emprunte des éléments de défi-nitions qu'en donnent divers auteurs6, dont AndréBeaudet7 : fondée sur le principe selon lequel lesapprentissages scolaires et extrascolaires ont unevaleur réelle, la reconnaissance des acquis est unprocessus par lequel un garant, en vertu de lois etde règlements, délivre un titre donné à une personneayant satisfait aux conditions d'obtention de ce titre.Au terme du processus, la reconnaissance est ledocument officiel attestant soit de l'ensemble dessavoirs et des compétences propres à un titre donné,soit d'une partie des composantes de ce titre (uni-tés ou crédits de formation, compétences détermi-nées dans un cahier de normes, unités d'éducationcontinue, etc.).

    Enfin, la VALIDATION des acquis est définie commesuit : « acte officiel délivré par une instance habili-tée à le faire (ministère, délégation interrégionaleou académique8, commission paritaire, jury per-manent…), la validation d'acquis vaut délivrancede tout ou partie d'un titre ou d'un diplôme. Elleporte sur tout ou partie du « référentiel » de ce titreou diplôme. Elle est administrée au vu de preuvesou de résultats comparables à ceux des épreuvesd'évaluation certificative de ce titre ou diplôme.Elle peut être précédée d'une phase ouverte dereconnaissance d'acquis, accompagnée au besoind'évaluation formative. Elle rend opératoire etofficialise une partie d'un bilan ou d'un porte-feuille d'acquis en vue de l'obtention d'un titresocialement reconnu9. »

    5. Ibid.

    6. Francine Landry, op. cit., p. 53; Jean Proulx, 1985,André Beaudet, 1984, Renald Legendre, op. cit.

    7. André Beaudet, La Reconnaissance des acquis.

    8. Réalité française, est-il besoin de le préciser…

    9. Daniel Jacobi et Karine Lonchamp, « Reconnaîtreet valider les acquis : les dérives linguistiques d'uneinjonction paradoxale », Éducation permanente ,n° 118/1994-1, p. 63.

  • Les fondements de la reconnaissance des acquis 21

    Il faut signaler qu'en France, on distingue nette-ment reconnaissance et validation des acquis.Selon Bernard Liétard, la validation « recouvre lesdiplômes et titres délivrés sous l'autorité de l'Étatainsi que les qualifications contractuelles issues dela négociation collective au niveau des branchesprofessionnelles. On notera d'ailleurs que ces deuxsystèmes [celui de la reconnaissance et celui de lavalidation] sont relativement disjoints : la posses-sion d'une qualification personnelle, reconnue parun diplôme, ne donne aucun droit, sauf dans quel-ques professions réglementées, à l'attribution auto-matique d'un coefficient de classification déterminé.Quant à la reconnaissance des acquis, elle regrou-pera toutes les démarches ou certifications, com-portant une dimension à la fois institutionnelle etpersonnelle (traces de stage, bilans de compéten-ces, portfolio par exemple), mais n'accédant pas àune légitimité sociale attestée par des autoritésofficielles compétentes : services valideurs del'État, commissions techniques d'homologation etinstances de négociation collective des branches1. »Pour Liétard « l'attente de validation ou la non-validation ne doivent pas empêcher des expérien-ces de reconnaissance. Inversement, reconnaîtreles acquis suppose, pour ne pas en rester là, d'éta-blir des liens avec les validations, ne serait-ce quepour en améliorer la valeur d'usage2. »

    Au cours des travaux de préparation du présentavis, le Conseil a dû statuer sur le bien-fondéde distinguer ou non, au Québec, reconnaissanceet validation des acquis. Il n'a pas jugé opportund'introduire dans le discours québécois cettedistinction sur laquelle insistent les Européens.Au Québec en effet, la notion de reconnaissanceest conçue dans le sens que lui donne Le PetitRobert, c'est-à-dire comme le fait ou l'action dereconnaître ou l'action de reconnaître forme l-lement. Comme le note Landry, il faut toutefoisconvenir que « la reconnaissance ne s'applique pas

    1. Bernard Liétard, « Se reconnaître dans le maquisdes acquis », Éducation permanente, n° 133/1997-4,p. 66.

    2. Ibid.

    exclusivement à un mécanisme ou acte de recon-naissance officielle, juridique ou réglementaire3 ».D'où l'importance de spécifier si la reconnaissanceest officielle ou non. Il y aura lieu en outre depréciser par quelle instance habilitée à le faire estdélivré tout acte officiel de reconnaissance.

    CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE

    Dans ce premier chapitre, le Conseil a explicitéson orientation de base : la question de la recon-naissance des acquis est une question d'équitésociale pour les personnes tout comme de dévelop-pement d'une société. Deux enjeux majeurs ont étédéterminés. Le premier est de l'ordre de la finalitéde la reconnaissance des acquis, celle de l'homo-logation des titres et de leur « transférabilité ». Ledeuxième est de l'ordre de la faisabilité des passe-relles entre des systèmes parallèles de reconnais-sance. Pour bien cerner la portée de ces enjeux etmesurer les défis qu'ils représentent, il convientd'abord d'observer les lieux où s'effectue la recon-naissance des acquis, en particulier le systèmed'éducation.

    La reconnaissance des acquis constitue une piècemaîtresse des projets individuels de formationcontinue tout comme d'édification des compétencesde la population. Selon le Conseil, elle doit de lasorte représenter une clef de voûte d'une politiquegouvernementale de la formation continue. Lecontexte est propice à considérer l'importance dela reconnaissance des acquis dans ce cadre, aumoment où des travaux sont en cours sur cettepolitique de la formation continue.

    Cette perspective fondamentale guide l'examen dela problématique au regard de principes et de leurscorollaires qui permettent de traduire cette questiond'équité et de construction d'une société. Le Conseila retenu trois principes et des corollaires, qui doi-vent, selon lui, servir de trame de fond dans l'ana-

    3. Landry, op. cit., p. 51.

  • 22 La reconnaissance des acquis, une responsabilité politique et sociale

    lyse des systèmes en place, et dans la déterminationdes axes de développement.

    Le Conseil recommande au ministre de l'Édu-cation et au gouvernement d'adopter ces prin-cipes et leurs corollaires, de les enchâsser dansla politique québécoise de la formation continueet de mettre en œuvre les actions requises pourleur mise en application.

    Comme le Conseil l'a signalé, ces principes etleurs corollaires soulèvent d'emblée la responsa-bilité sociale des organisations visées par la for-mation initiale et continue, de façon à ce que lareconnaissance des acquis et des compétences soitassurée avec équité et diligence.

    C'est la raison pour laquelle le Conseil demandeaux organisations intéressées, notamment lesétablissements des trois ordres d'enseignement,d'adopter ces principes et leurs corollaires et deles enchâsser dans leur politique institutionnelled'évaluation.

  • D E U X I È M E P A R T I ECHAPITRE 2

    L'état de la question à l'enseignement secondaire

    Dans cette deuxième partie, le Conseil présenteson analyse des systèmes de reconnaissance desacquis dans les établissements des trois ordresd'enseignement, en y ajoutant celle de la situationparticulière des personnes immigrantes. Cetteanalyse critique est faite à partir de l'univers dechaque ordre d'enseignement, fondé sur les parti-cularités de chacun des règlements et modalitésdiverses en vigueur dans ces établissements. Laprésentation n'est donc pas uniforme d'un chapitreà l'autre. S'il n'y a aucun intérêt à uniformiser lessystèmes, compte tenu de la singularité de chacundes ordres d'enseignement, il peut y avoir néan-moins des avantages à mettre en œuvre dans unsystème donné certaines des modalités et des pra-tiques propres à l'un ou l'autre des ordres d'ensei-gnement.

    La Loi sur l'instruction publique consacre un pas-sage à la reconnaissance des acquis, au deuxièmealinéa de l'article 250 : « Elle [la commissionscolaire] reconnaît, conformément aux critères ouconditions établies par le ministre, les acquis scolai-res et extrascolaires faits par une personne inscrite àla formation professionnelle ou aux services éduca-tifs pour les adultes. » Outre le fait d'assujettir lareconnaissance des acquis à l'inscription à la forma-tion générale ou professionnelle, la Loi ne précisepas à quel service éducatif la candidate ou le candi-dat à la reconnaissance doit être inscrit. Ces condi-tions sont précisées dans le régime pédagogique.

    La question est de savoir si ce cadre légal et régle-mentaire permet aux commissions scolaires derespecter le droit des personnes à la reconnaissancedes acquis et si les établissements assument leursresponsabilités pour en permettre l'exercice. Dans cedeuxième chapitre, le Conseil examine la situationd'abord sous l'angle de la reconnaissance des acquisscolaires, ensuite sous celui des acquis extrascolairesen formation générale et en formation profession-nelle. Il le fait en analysant les conditions d'accès etde prestation des services de reconnaissance desacquis.

    2.1 La reconnaissance des acquisscolaires

    L'ouverture des pratiques de reconnaissance quelaissait présager le gouvernement du Québec dansson énoncé d'orientation en éducation des adultesde 1984 semble restée lettre morte. En raison desrègles du ministère de l'Éducation, la reconnaissancedes acquis n'est en effet nullement dissociée duprocessus d'inscription d'une personne à un pro-gramme d'études donné. Elle est conçue commeun processus qui, dès le départ, vise à déterminerla formation manquante.

    C'est le cas a fortiori quand le Ministère soutientfinancièrement le service de reconnaissance desacquis. Ainsi, aux fins de financement, la recon-naissance des acquis est un service offert aux per-sonnes qui ont un projet de formation et qui sontinscrites à un programme d'études. En vertu desrégimes pédagogiques de la formation généraledes adultes (art. 3) et de la formation profession-nelle (art. 3) en vigueur, tout autant d’ailleurs quedes projets de régime proposés par le ministre1,les services liés à l'évaluation, à la reconnaissancedes compétences et des apprentissages sont consi-dérés comme des services de formation, et sontdonc soumis aux règles budgétaires relatives àleur financement.

    Il convient de souligner que le ministère de l'Édu-cation a consenti des efforts importants pour assu-rer aux adultes, par voie d'équivalence, la recon-naissance des acquis scolaires d'études secondai-res ou d'études professionnelles déjà sanctionnéspar une autorité compétente. Le Ministère déter-mine à cette fin les cours admis en équivalence.Cette modalité de reconnaissance des acquis sco-laires s'adresse aux adultes qui veulent faire recon-naître des études faites au Québec sous un régimede sanction des études antérieur à celui en vigueurou des études faites à l'extérieur du Québec. C'estévidemment d’après les programmes d'études et

    1. Projets rendus publics le 8 mars 2000, en prépubli-cation dans la Gazette officielle.

  • 24 La reconnaissance des acquis, une responsabilité politique et sociale

    les exigences de sanction en vigueur que les équi-valences sont accordées.

    Des règles viennent toutefois limiter l'accès desadultes à l'obtention d'un diplôme par le recours àcette modalité de reconnaissance des acquis. Pre-mièrement, aucun diplôme ne peut être obtenuuniquement par voie d'équivalence. Au moins uncours doit faire l'objet d'une évaluation et êtreréussi1. D'après l'information obtenue, le Minis-tère veut de la sorte s'assurer que le diplôme deformation générale accordé pour des acquis scolai-res obtenus au Québec, après évaluation et réussited'au moins un cours offert dans le régime envigueur, atteste des connaissances à jour de l'adulte,compte tenu des exigences actuelles des program-mes. Quant à la reconnaissance d'acquis scolairesau Canada, à l'extérieur du Québec, la règle rela-tive à l'évaluation et la réussite d'au moins uncours offert au Québec assure que l'adulte obte-nant un diplôme a réussi un minimum de coursselon les règles du système québécois. Enfin, ence qui a trait aux acquis de formation profession-nelle, l'attribution d'équivalences ne se fait quepour un ou des cours de formation professionnelledéjà sanctionnés au Québec : « Les apprentissagesdes métiers exercés à l'extérieur du Québec et duCanada ne sont jamais reconnus en équivalence.Leurs compétences font nécessairement l'objetd'une évaluation et d'une sanction selon les règlesdu régime pédagogique québécois2. »

    Une deuxième règle vient restreindre la reconnais-sance des acquis par voie d'équivalence. Commepour toute autre modalité de reconnaissance desacquis au secondaire, seuls les élèves inscrits àl'un des services d'enseignement de la formationgénérale ou à l'un des programmes d'études de

    1. « En formation générale, il s'agit d'un cours de 5esecondaire, du cours [d'anglais] ANG-4036-6 oud'un cours de formation professionnelle harmonisée.En formation professionnelle, il s'agit d'un coursdu programme d'études menant à l'obtention dudiplôme visé. » Ministère de l'Éducation, Guide degestion de la formation générale des adultes et dela formation professionnelle, chap. 6.

    2. Ibid., section 6.4.

    formation professionnelle se voient attribuer, s'il ya lieu, des équivalences.

    Le Conseil remet en question le bien-fondé desrègles ministérielles qui empêchent, à l'enseigne-ment secondaire, l'obtention du diplôme parvoie d'équivalence. Les raisons évoquées pourl'établissement de telles règles, qui compliquentindûment l'accès au diplôme par voie d'équiva-lence, ne se justifient pas. Étant entendu que lademande de reconnaissance par voie d'équiva-lence doit être nécessairement documentée, et lespièces requises par le Ministère en témoignent3, lediplôme pourrait être obtenu uniquement paréquivalence, une fois cette dernière démontrée.L'actualisation d'acquis de formation scolaire etleur conformité relative aux exigences québécoi-ses de sanction et à l'exercice d'un métier encontexte québécois s'en trouvent de toute façondémontrées par la rigueur du processus ministérield'établissement des équivalences.

    Si l'obtention d'un diplôme uniquement par voied'équivalence est impossible, c'est que les règlesbudgétaires annuelles financent les services auxclientèles admissibles, en vertu des régimes péda-gogiques. En formation générale, l'article 32 de

    3. Comme il est précisé dans le guide de gestion citéplus haut (section 6.2.4), « les documents recevablespour l'attribution des équivalences sont uniquementles documents originaux sanctionnant des acquisscolaires. Les copies certifiées conformes par uneautorité compétente sont aussi acceptables.

    Les documents recevables doivent contenir lesrenseignements suivants :- l'année d'obtention du document;- l'ordre d'enseignement, la classe, l'année d'étude

    terminée, la durée de la formation ou la ou lescapacités, pour les équivalences de la formationgénérale;

    - les codes de cours, pour les équivalences de laformation professionnelle;

    - la signature d'une personne autorisée.Les documents détaillés par matières doivent indi-quer les résultats obtenus dans chaque matière. »

    En ce qui a trait à la formation scolaire suivie auCanada, à l'extérieur du Québec, les documents rece-vables sont le diplôme du secondaire et le relevé denotes qui l'accompagne.

  • L'état de la question à l'enseignement secondaire 25

    l'actuel régime pédagogique applicable aux adultesstipule que l'adulte inscrit aux services de forma-tion a droit à la gratuité de tous ces services. Enformation professionnelle, les articles 24 et 25 durégime pédagogique en vigueur déterminent lesconditions d'admission. Les régimes ne distinguentaucunement les services de formation offerts(cours, services d'évaluation et de reconnaissancedes acquis , etc.). Bref, pour être admissible à desservices financés, qu'il s'agisse de reconnaissancedes acquis scolaires ou des acquis extrascolaires,l'adulte doit respecter les critères d'admissionprévus dans les régimes pédagogiques, quelle quesoit la nature de ces services. En d'autres termes,les règles budgétaires ne peuvent considérer queles critères prescrits par les régimes pédagogiques.C'est là, du point de vue du ministère de l'Éducation,la conception de la finalité éducative de la recon-naissance des acquis. Le Conseil s'attardera surcette question au moment d'examiner la situationen ce qui a trait à la reconnaissance des acquisextrascolaires. Il prendra alors position en propo-sant des correctifs à apporter.

    2.2 La reconnaissance des acquisextrascolaires

    2.2.1 En formation générale des adultes

    Les tests d'équivalence de niveau descolarité

    En formation générale des adultes, les tests d'équi-valence de niveau de scolarité (TENS)1 constituent

    1. Il convient de noter l'ambiguïté de la formulationéquivalence de niveau de scolarité, qui fait que l'onperçoit les TENS comme donnant lieu à une équi-valence d'une cinquième secondaire, ce qui n'estpas le cas au regard des conditions d'obtention dudiplôme d'études secondaires (DES). Selon le res-ponsable du dossier au MEQ, l'appellation est à cepoint trompeuse qu'elle crée de la confusion auprèsdes organismes « acheteurs » de services de for-mation ainsi qu'auprès des adultes, dont auprès deceux nouvellement établis au Québec. L'expressionAttestation des acquis extrascolaires de base dusecondaire, par exemple, serait plus appropriée.

    une voie de reconnaissance d'acquis extrascolairesqui permet la mise en application des deux premiersprincipes à la base de la reconnaissance des acquisaffirmés plus haut, bien que dans une faible mesure.Cette voie de reconnaissance couvre en effet unchamp restreint de connaissances et d'habiletésprises en considération; la « transférabilité » de cetype de reconnaissance est elle aussi limitée.

    Il faut souligner que dans les tests d'équivalencede niveau de scolarité , le Ministère a adopté un« référentiel » qui n'est pas celui des programmesd'études2. En effet, les TENS ne sont pas liés auxprogrammes d'études « code de cours par code decours » et ne donnent donc pas lieu à l'obtentiond'unités. Cette forme de reconnaissance attesteplutôt que la candidate ou le candidat possède l'es-sentiel des connaissances générales acquises auterme des études secondaires. L'attestation deréussite facilite l'accès à l'emploi ou le maintiende l'emploi dans les entreprises qui la reconnais-sent. Elle permet en outre l'admission en formationprofessionnelle au secondaire, sans toutefois êtreconsidérée pour l'admission aux études collégiales.

    Au cours de l'année 1996, à la demande du Minis-tère, la Table des responsables de l'éducation desadultes des commissions scolaires (TREAQ) a effec-tué, auprès des commissions scolaires gestionnairesdes services d'éducation des adultes, une étudevisant à recueillir des données sur la clientèle quise soumet à la passation des TENS et sur l'organi-sation de ces services. Le Conseil retient quelquesconstats émis dans le rapport d'étude3.

    2. L'existence des TENS pourrait être remise en questionsi, dans la réforme actuelle des programmes d’étudesdes jeunes et donc de sa « traduction » chez les adul-tes , le Ministère ne retient qu'un « référentiel » :celui des programmes d'études.

    3. Table des responsables de l'éducation des adultesdes commissions scolaires du Québec, « SpécialTENS », TREAQ-COM, 15 novembre 1996, 23 p. Lerapport analyse les données obtenues de 52 des 83commissions scolaires alors gestionnaires des ser-vices d'éducation des adultes.

  • 26 La reconnaissance des acquis, une responsabilité politique et sociale

    Un nombre relativement important d'adultes ontrecours aux TENS : en 1995-1996, 4 476 personnesont demandé à passer ces tests dans les 52 commis-sions scolaires ayant répondu au questionnaire. De1992-1993 à 1995-1996, le nombre de candidats auxTENS est à peu près stationnaire. Les personnes âgéesde 31 à 40 ans constituent la majorité (34,5 p. 100)des adultes qui ont recours à cette modalité dereconnaissance des acquis, tandis que 27,5 p. 100ont 41 ans et plus.

    L'étude révèle par ailleurs que, lorsque la reprise àl'examen est prise en considération, 56 p. 100 descandidates et des candidats réussissent les tests àla première tentative, 21 p. 100 subissent un échecet 18 p. 100 effectuent une reprise. En combinantles abandons et les échecs, le taux d'échec est de26 p. 100. Enfin, bien que les résultats ne soientqu'indica