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L’Union pour la Méditerranée et la question de l’Eau Un programme de coopération Nord- Sud réussi? Mémoire réalisé par Christelle Comair, Marie Gabet et Pauline Vidal pour le cours de Monsieur Alfredo Benites « Management d'un projet de coopération internationale : démarche et pratiques » (Mars 2015) Crédit photo: Union pour la Méditerranée The copyright of this Master's thesis remains the property of its author. No part of the content may be reproduced, published, distributed, copied or stored for public or private use without written permission of the author. All authorisation requests should be sent to [email protected]

L’Union pour la Méditerranée et la question de l’Eau · 2019-02-06 · 2 INTRODUCTION Une courte revue de presse permet dapprécier l¶opinion, généralement pessimiste, des

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L’Union pour la Méditerranée

et la question de l’Eau

Un programme de coopération Nord-Sud réussi?

Mémoire réalisé par Christelle Comair, Marie Gabet et Pauline Vidal

pour le cours de Monsieur Alfredo Benites « Management d'un projet de

coopération internationale : démarche et pratiques » (Mars 2015)

Crédit photo: Union pour la Méditerranée

The copyright of this Master's thesis remains the property of its author. No part of the content may be reproduced, published, distributed, copied or stored for public or private use without written permission of the

author. All authorisation requests should be sent to [email protected]

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Remerciements :

Nous tenons tout particulièrement à remercier, pour le temps qu’ils nous ont accordé et

pour la documentation qu’ils nous ont fournie, Messieurs Antoine-Tristan MOCILNIKAR,

responsable Energie, Infrastructures et Numérique au DiMed, Shaddat ATTILI, Ministre

des Eaux palestinien, Fadi COMAIR, directeur général des ressources hydrauliques et

électriques du Liban, M.Fuad BATEH, Senior Adviser sur l’Eau et l’Environnement au

Secrétariat de l’Union pour la Méditerranée.

Résumé:

Bien qu’elle ne représente pas la première tentative d’instauration d’une coopération Nord-Sud

fructueuse et équilibrée entre les pays des deux rives de la Méditerranée, l’Union pour la

Méditerranée était à sa création en 2008 porteuse d’un grand espoir en tant qu’organisation paritaire

crée comme une réelle politique de dialogue et de projets. Dès le départ des critiques, notamment

européennes, se sont fait entendre quant aux implications politiques d’une telle Union qui a d’ailleurs

rapidement été affaiblie.

Au sein de l’Union pour la Méditerranée comme dans le cadre de la coopération en général, les

projets liés à l’eau ont une importance cruciale et sont souvent révélateurs de la qualité des

institutions. L’accès à l’eau sur le pourtour de la Méditerranée est en effet très inégalement réparti et

constitue un enjeu souligné dans de nombreux textes et conventions internationales dont le règlement

est facteur de paix et de stabilité. Cependant cet enjeu n’est donc pas envisagé dans le cas d’un réel

consensus dans la mesure où des divergences politiques entre ces membres ont empêché l’UPM de

mettre en place une stratégie commune liée à l’eau ; il est donc traité au cas par cas via des projets.

L’un de ces projets phares liés à l’eau est le projet de mise en place d’une installation de dessalement

des eaux à Gaza, une région subissant une lourde pénurie d’eau qui aura faute d’action des

conséquences humanitaires et environnementales graves. L’intervention de l’UPM, qui sur

proposition largement française mais à l’unanimité a labellisé ce projet à la portée politique pourtant

forte, doit normalement mener à des réalisations sur le terrain de 2015 à 2019. Cependant les lenteurs

institutionnelles se multiplient et actuellement seules des estimations et des promesses de financement

semblent avoir eu lieu ; ce projet est donc révélateur à la fois du fort potentiel de l’UPM et des

difficultés actuelles.

Ces faiblesses résident aussi dans des obstacles politiques qui se dressent surtout au Proche-Orient, où

la question des ressources en eau est une préoccupation continue, d’autant plus qu’elle est intimement

lié à celle, pour l’instant insolvable, des frontières. A cela il faut ajouter l’instabilité politique de

certains pays de cette région, ainsi qu’un autre obstacle de taille : le problème des financements. Reste

alors pour l’UpM à trouver un véritable leadership politique et des moyens de financement diversifiés

et plus certains qui permettront de mener à bien les initiatives en train de se développer dans le

domaine de l’eau, le tout dans le cadre d’une réelle coopération Nord-Sud.

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INTRODUCTION

Une courte revue de presse permet d’apprécier l’opinion, généralement pessimiste, des médias, du

public et des observateurs des deux rives sur les réalisations de l’Union pour la Méditerranée.

« Méditerranée: l'union prend déjà l'eau » titrait Alternatives Economiques en décembre 2010

déplorant que l’Union pour la Méditerranée soit « paralysée par les désaccords entre Etats, le flou des

projets et la faiblesse des financements ». L’année suivante, le constat est le même : le Courrier

International interpelle le lecteur en questionnant « L’Union pour la Méditerranée, vous vous rappelez

? » avec cette introduction critique « Trois ans d'existence, et un bilan nul ». La même année, l'ancien

ministre des Affaires étrangères Hubert Védrine estime, dans un entretien à l'AFP, que la dimension

institutionnelle et politique de l'Union pour la Méditerranée demeure "prématurée, hyper-fragile et

bancale"1 La presse de la rive sud n’est pas plus enthousiaste, avec par exemple la presse algérienne

parlant de l'UPM comme d'une "chimère" et d'un "vide sidéral".2

Gangrénée par les obstacles politiques, dont le manque de cohésion entre les deux rives de la

Méditerranée et notamment, le conflit israélo-palestinien et la froideur de l’Allemagne face à ce

projet, l’Union pour la Méditerranée semble faire face à un « avenir incertain ».

Le 22 décembre 2008, la conférence ministérielle sur l’eau qui s’est tenue en Jordanie, coprésidée par

la Jordanie, l’Egypte et la France, a constitué le lancement effectif de l’Union pour la Méditerranée

(UPM) dans le domaine de l’eau. En conclusion de cette conférence, Jean-Louis Borloo, alors

ministre de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement durable et de l’Aménagement du territoire a

déclaré :

Il s’agit aujourd’hui pour nous de passer à l’acte. Je suis convaincu que si nous réussissions

sur l’eau, l’Union pour la Méditerranée aura fait la preuve de sa légitimité.3

Dans la perspective de mettre à l’épreuve la déclaration de Jean-Louis Borloo et de tester la légitimité,

la pertinence et la pérennité de l’Union pour la Méditerranée, ce mémoire a pour objectif, après un

aperçu général de la raison d’être, de l’histoire et de la structure de l’Union pour la Méditerranée, de

répondre aux questions suivantes :

Les projets liés à l’eau menés dans le cadre de l’Union pour la Méditerranée reflètent-ils les

difficultés auxquelles cette Union fait face ?

Est-il possible de surmonter les difficultés politiques et d’encourager les processus de paix

dans la région méditerranéenne en favorisant des projets concrets pour répondre aux questions

transfrontalières telles que l’accès et l’assainissement de l’eau ?

Quelles sont les perspectives d’avenir d’après le précédent constat?

Afin de répondre, sans doute partiellement, à ces questions, nous analysons le projet de Dessalement

de l’Eau à Gaza, situé dans une zone symboliquement chargée du conflit israélo-palestinien, qui doit

être mis en œuvre en 2015 pour une durée de 4 ans, soit jusqu’en 2019.

1 Article du Nouvel Observateur :http://bit.ly/1GnjCF1

2 Article du Monde: http://bit.ly/1B6ORki

3 Conférence ministérielle sur l’eau de l’Union pour la Méditerranée - Communiqué du Ministère de l’Ecologie

(22 décembre 2008) : http://bit.ly/1aMG2CG

Page 4: L’Union pour la Méditerranée et la question de l’Eau · 2019-02-06 · 2 INTRODUCTION Une courte revue de presse permet dapprécier l¶opinion, généralement pessimiste, des

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TABLE DES MATIERES

I- Conceptualisation et structure : l’Union pour la Méditerranée représente-elle une

véritable innovation dans les rapports Nord-Sud ?

a. Processus de Barcelone et courte histoire de l’Union Pour la Méditerranée

b. Structure, financements: véritable rupture avec le processus de Barcelone ?

II- La question de la coopération dans le domaine de l’eau dans le Bassin

Méditerranéen

a. Le Bassin Méditerranéen a-t-il besoin de programmes de coopération pour l’eau?

b. Peut-on parler d’une stratégie commune de gestion de l'eau en Méditerranée ?

III- Etude de cas : le projet « Installation de dessalement pour la bande de Gaza

a. En quoi le projet « Installation de dessalement pour la bande de Gaza » consiste –t-

il ?

b. En quoi ce projet s’insère-t-il dans un contexte qui le rend nécessaire ?

IV- Evaluations, recommandations et perspectives d’avenir

a. Tour d’horizon des obstacles politiques

b. Quelles sont les perspectives d’avenir pour l’Union pour la Méditerranée et la

coopération dans le domaine de l’eau dans la région ?

CONCLUSION

RÉFÉRENCES

ANNEXES (jointes dans un autre document)

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I- Conceptualisation et structure : l’Union pour la Méditerranée représente-elle une

véritable innovation dans les rapports Nord-Sud ?

a. Processus de Barcelone et courte histoire de l’Union Pour la Méditerranée

L’Union pour la Méditerranée a été mise en place par le Sommet de Chefs d’Etat et de Gouvernement

réuni à l’initiative de la France le 13 juillet 2008 à Paris. En mars 2010, le siège du Secrétariat de

l’UpM a été inauguré à Barcelone. Depuis le 1er mars 2012, le marocain Fathallah Sijilmassi en est le

Secrétaire général.

L’Union pour la Méditerranée entendait ouvrir une nouvelle étape des relations entre l’Union

européenne (UE) et les pays du pourtour oriental et méridional méditerranéen dans le cadre d’une

gouvernance plus équilibrée entre les pays du Nord et du Sud de la Méditerranée et visait à répondre

aux attentes des populations du sud et de l’est de la Méditerranée en mettant en œuvre des projets

concrets d’infrastructures et d’équipements. Elle compte 44 membres : les 28 pays de l’Union

Européenne, l’Albanie, l’Algérie, la Bosnie-Herzégovine, l’Égypte, Israël, la Jordanie, le Liban, le

Maroc, la Mauritanie, Monaco, le Monténégro, l’Autorité palestinienne, la Syrie, la Tunisie, la

Turquie, et la Ligue arabe. 4

Cette Union, n’est pas le premier résultat de la volonté de coopération et d’intégration entre les deux

rives de la Méditerranée. En effet, depuis les années 1970, les essais pour créer des relations plus

intenses se sont multipliés : Dialogue euro-arabe de 1973 à 1990 ; Dialogue 5+5, lancé en 1990 ; le

Processus de Barcelone, initié en 1995 et la Politique européenne de voisinage, en 2004.5

En 1995, la Conférence de Barcelone rassemble les quinze pays membres de l'UE et douze pays

méditerranéens. Elle affirme l'importance du bassin méditerranéen en y instaurant une " zone euro-

méditerranéenne de paix, de stabilité et de sécurité " fondée sur le partenariat. Pourtant, dans la

décennie qui suit, le processus de Barcelone n’atteint pas ses objectifs principaux et il est à noter que,

lors de la cérémonie des dix ans du partenariat organisé à Barcelone, seule la moitié des chefs d'État et

de gouvernement des pays de la rive Sud est présente. Quant à la Politique européenne de voisinage,

(PEV) lancée en 2004, de nombreux observateurs, comme Jean-Robert Henry, n'y perçoivent qu'une

"forme de retour à l'unilatéralisme car les plans d'actions conclus avec les ‘voisins’ sont bilatéraux,

comme les conventions d'association du processus de Barcelone, et il n'y a pas d'instance de

concertation collective à l'exception de celle qui est maintenue à l'échelle euro-méditerranéenne »6.

Il faut également tenir compte du manque de lisibilité ajoutée par la mise en œuvre de la PEV de

l’Union Européenne dont l’articulation avec Barcelone ne paraît pas claire entrainant une certaine

perplexité pour les bailleurs de fonds et les différents acteurs de projet. En particulier, la PEV a

favorisé le développement de la coopération bilatérale entre l’Union européenne et ses voisins

méditerranéens, par exemple dans les domaines de l’énergie (avec l’Algérie et le Maroc).

L’acquis principal du Processus de Barcelone a été de créer un espace de dialogue entre l’UE et les

pays méditerranéens, qui a eu pour conséquence de sensibiliser davantage plusieurs pays du nord de

l’Europe, comme les Pays-Bas ou l’Allemagne, aux problèmes du Sud. Malgré ces avancées certaines,

le Processus de Barcelone a présenté d’importantes limites : les écarts de développement n’ont pas été

réduits substantiellement, les pays méditerranéens hors UE continuent de souffrir d’une faible

4 Partenariat Français pour l’eau : http://bit.ly/1G1l38t

5 http://bit.ly/18lu1SX

6http://bit.ly/17USWN8

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attractivité pour les investisseurs et aucun progrès sensible n’a été réalisé sur le plan de la paix et de la

stabilité politique. De plus, la méthode a fait l’objet de critiques en raison de l’absence de secrétariat

permanent, du déséquilibre nord-sud et du manque d’implication des populations à travers les

institutions.

Constatant les insuffisances des dispositifs de coopération existants, le président français Nicolas

Sarkozy a proposé dès 2007 la création d’une « Union méditerranéenne ». D’abord annoncé dans le

cadre d’une campagne électorale, ce projet a été progressivement détaillé dans un rapport

d’information de l’Assemblée nationale. Réunissant les Etats riverains de la Méditerranée, l’Union

méditerranéenne a été conçue comme une union politique fondée sur la parité entre les participants

(dans le cadre d’un processus de codécision), sur la réunion régulière des chefs d’Etat, sur la création

d’un secrétariat et sur l’adoption d’une présidence bicéphale partagée par les pays du nord et du sud.

Ce format devait permettre de passer d’un système de coopération à un projet d’intégration et

d’associer les pays méditerranéens dans le cadre de projets concrets et consensuels notamment :

« l’environnement et la gestion de l’eau : dépollution de la mer Méditerranée, développement de

l’accès à l’eau potable, rechargement des nappes phréatiques et amélioration des systèmes

d’irrigation, protection des ressources halieutiques, préservation des littoraux et exploitation de

l’énergie solaire ».7

Cependant, de nombreuses critiques ont été soulevées, relevant plusieurs faiblesses du projet :

l’imprécision du contenu et des moyens de financement ;

les partenaires européens de la France, au premier rang desquels l’Allemagne, se sont

inquiétés de l’articulation de l’Union méditerranéenne avec les politiques européennes

existantes et ont voulu être associés au projet à parité avec les Etats membres riverains de

la Méditerranée ;

plusieurs Etats européens ont soupçonné la France de vouloir promouvoir ses propres

intérêts en Méditerranée tout en utilisant les fonds d’aides communautaires pour financer

le projet ;

la Turquie s’est d’abord opposée à la proposition française, craignant qu’elle ne soit

conçue comme un moyen de lui offrir une alternative à l’adhésion à l’Union européenne.8

Ces réticences ont conduit la France à modifier sa proposition : l’Union méditerranéenne en

préparation est ainsi devenue « l’Union pour la Méditerranée ». Pour répondre aux critiques de ses

partenaires européens, la France a cherché un compromis avec l’Allemagne. Les deux pays ont

ensuite présenté un texte commun au Conseil européen du 13 mars 2008, qui a permis de recueillir

l’adhésion des Etats membres de l’Union et de la Commission européenne.

Du projet français initial subsiste le secrétariat permanent, la présidence bicéphale, l’Assemblée

Parlementaire de l’Union pour la Méditerranée et la volonté de mettre en œuvre des projets concrets,

plutôt dans la continuité du processus de Barcelone.

Du fait des obstacles politiques, le projet d’intégration de l’Union Méditerranéenne a évolué en projet

d’Union pour la Méditerranée basée sur la coopération, les solidarités de fait et les projets concrets.

Ce projet à visée communautaire est devenu un projet de coopération.

7 Fondation Robert Schuman, « Questions d’Europe » n° 105 : http://bit.ly/1BarRQ8

8 id.

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b. Plan d’action, structure, financements: véritable rupture avec le processus de

Barcelone ?

Malgré les « effets d’annonce », les difficultés persistent, notamment au niveau des financements et

l’efficacité des structures.

Lors d’une interview vidéo réalisée en avril 2013, le Secrétaire général Fathallah Sijilmassi, a

expliqué que le plan d’action de l’UpM s’articulait autour de trois piliers :

La coopération régionale – « nous sommes convaincus qu’une des clés pour la croissance,

l’emploi et la création d’emplois passe par l’intégration régionale. C’est pourquoi nous nous

efforçons de promouvoir la coopération régionale. »

Des projets concrets – « nous mettons en œuvre des projets qui ont des retombées positives

pour la population, la croissance et le développement social dans les pays. »

Une géométrie variable – « nous n’avons pas besoin de mettre en œuvre tous nos projets avec

la participation des 43 pays, mais tous doivent bénéficier de l’approbation des 43 pays. C’est

pourquoi nous donnons notre label aux différents projets, mais leur mise en œuvre et les

parties prenantes peuvent se trouver dans un certain nombre de pays seulement. »

- Les différentes structures qui composent l’UPM.

Le mandat du Secrétariat de l’UpM est axé sur l’identification, le traitement, la promotion et la

coordination des projets qui améliorent et renforcent la coopération et ont un impact direct sur les

moyens d’existence des citoyens.

Par ailleurs, les partenaires de l’Union pour la Méditerranée se réunissent régulièrement entre hauts

fonctionnaires des départements des affaires étrangères des 43 pays partenaires, institutions de l'UE et

États de la Ligue arabe. Ainsi, les réunions des hauts fonctionnaires surveillent et coordonnent le

travail de l’Union pour la Méditerranée. Elles définissent le budget ainsi que le programme de travail

du Secrétariat et préparent les réunions des ministres des affaires étrangères. Leur rôle consiste

également à examiner les propositions de projet soumises par le Secrétariat en vue de leur approbation

et soutien. Les hauts fonctionnaires prennent leurs décisions par consensus.

L’Assemblée parlementaire de l'Union pour la Méditerranée s’appuie sur le travail de l’Assemblée

parlementaire euro-méditerranéenne instaurée en 2004 en tant qu’organe parlementaire du partenariat

mis en place en 1995 avec la déclaration de Barcelone. L’AP-UpM compte 280 membres : 130

membres de l’UE (81 membres des parlements nationaux de l’UE-27 et 49 membres du Parlement

européen), 10 membres de pays partenaires du Nord de la Méditerranée n’appartenant pas à l’UE

(Albanie, Bosnie-Herzégovine, Croatie, Monaco et Monténégro), 130 membres des 10 pays riverains

(Algérie, Égypte, Jordanie, Israël, Liban, Maroc, Autorité palestinienne, Syrie, Tunisie et Turquie),

ainsi que 10 membres de la Mauritanie.9

L'AP-UpM se réunit en session plénière au moins une fois par an. Elle adopte des résolutions ou des

recommandations sur tous les aspects de la coopération euro-méditerranéenne qui sont du ressort des

organes exécutifs de l'UpM, du Conseil de l'UE, de la Commission européenne et des gouvernements

nationaux des pays partenaires. Il est à noter que ces résolutions ne sont pas juridiquement

contraignantes : l’impact démocratique est donc à nuancer et les partenaires locaux ne sont pas

nécessairement entendus.

9 EU Neighbourhood Info Center : http://bit.ly/1EiHdG9

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Dans le souci de donner une dimension locale et régionale, l’UPM a mis en place une Assemblée

régionale et locale euro-méditerranéenne (ARLEM). Cette Assemblée a une visée uniquement

consultative. Elle réunit 84 membres, issus de l'UE et de ses 16 partenaires méditerranéens et

représentant les régions et les collectivités locales titulaires d'un mandat d'autorité régionale ou locale.

Dans la perspective de rééquilibrer les rapports Nord-Sud dans la gouvernance de l’Union pour la

Méditerranée, il a été convenu que la Ligue des États arabes participerait à toutes les réunions à tous

les niveaux de l'UpM.

Quant aux ressources, des financements importants avaient été mis en place par le programme MEDA

et la Banque européenne d’investissements (BEI) à travers la Facilité euro-méditerranéenne

d’investissement et de partenariat (FEMIP) durant le processus de Barcelone. Entre 1995 et 2006,

8,8milliards d’euros ont été engagés à travers le programme MEDA et 7,2 Milliards d’Euros à travers

la FEMIP.

Le 10 juillet 2009, " la Commission européenne annonce une contribution supplémentaire de 72

millions d'euros, pour la période 2009-2010, en faveur des domaines d'intervention jugés prioritaires

par les chefs d'État et de gouvernement euro-méditerranéens lors de leur rencontre à Paris. […] Une

partie des fonds servira à soutenir le fonctionnement du secrétariat de l'Union pour la Méditerranée.

Cette contribution porte à 90 millions d'euros le budget communautaire total alloué, depuis juillet

2008, aux priorités recensées par l'Union pour la Méditerranée."10

En 2009, cinq projets ont été lancés pour un total de 1 milliard d’Euros. Les bailleurs de fonds des

projets de l’UPM (BEI, Agence française du développement, KfW, Banque mondiale, Fonds pour

l'environnement mondial, Banque africaine de développement, EFG Hermes, la Caisse française des

dépôts et consignations, Sumitomo Mitsui Banking Corporation, Siparex, Banque de développement

du Conseil de l'Europe ...) se sont engagés sur près de 23 milliards d'euros, ce qui est largement

inférieur aux besoins d'investissement qui sont évalués à 200 milliards d’Euros.11 En effet,

aujourd'hui, l'UpM ne dispose pas de fonds propres et sollicite divers bailleurs de fonds comme la

Banque européenne d’investissement (BEI) ou des agences de développement nationales et les

capacités de financements européens restent limitées et le recours à d'autres bailleurs multilatéraux

pose la question de la gouvernance des projets élus.

Le 26 mai 2010, la diplomatie française a annoncé la création d'un fonds d'investissement de 385

millions d'euros, Inframed, destiné à financer les projets de l'Union pour la Méditerranée. " Doté dans

un premier temps de 385 millions d'euros, il s'agit d'un levier important dans des secteurs relevant des

priorités définies par la Déclaration de Paris telles que les projets d’infrastructure en matière de

transports et d'énergie. Ce fonds a pour objectif de lever des capitaux privés pour financer des projets

dans l'ensemble des 43 Etats membres de l'UPM. Ce projet est lancé conjointement par la Caisse des

dépôts française (qui contribue à hauteur de 150 millions d'euros), la Cassa Depositi e Prestiti

italienne (150 millions d'euros), la Caisse des dépôts et de gestion du Maroc (20 millions d'euros) et

l'Egypte (EFG Hermes 15 millions d'euros), ainsi que la Banque Européenne d'Investissement (qui

apportera 50 millions d'euros) ".On s’interroge toutefois sur les biais que ces investisseurs induiront

dans les développements ultérieurs de l'UPM.

10 http://bit.ly/18lu1SX 11 http://bit.ly/1Basf1b

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II- La question de la coopération dans le domaine de l’eau dans le Bassin

Méditerranéen

a. Le Bassin Méditerranéen a-t-il besoin de programmes de coopération pour

l’eau?

L’objectif principal des projets de coopération autour du Bassin Méditerranéen est de réduire “la

fracture méditerranéenne”12

. Celle-ci se définit par les inégalités économiques, sociales et politiques

entre les pays du Nord et du Sud de la Méditerranée, lesquelles tendent à s’aggraver, nuisant aux

relations diplomatiques et commerciales et aux négociations pour la paix dans la région. En effet, en

dépit des efforts de coopération, les deux rives de la Méditerranée n’ont pas entamé de processus de

convergence. A cette fracture s’ajoute l’existence de conflits ouverts, par exemple entre Israël et la

Palestine, entre la Turquie et Chypre ou encore au Liban.

Lors du lancement de l’Union pour la Méditerranée, les chefs d’Etats et de gouvernements ont défini

« La dépollution de la mer Méditerranée » comme premier de leurs six domaines d’action

prioritaires13

pour deux raisons : l’accès à l’eau peut être soit source de conflit soit constituer un

« facteur positif de coopération entre les pays »14

, ce qui avait déjà été souligné par la déclaration

d'Alger (1990) et la charte méditerranéenne de l'eau (Rome, 1992). L’eau serait donc un domaine

auquel les pays du Nord et du Sud, peuvent trouver un intérêt mutuel et coopérer de façon coordonnée

et pérenne.

Étant donné que l’eau dans la région Sud-Est méditerranéenne est une ressource rare, fragile et

inégalement répartie dans l’espace et le temps, la plupart, sinon tous les pays de cette rive sont

confrontés simultanément à plusieurs défis liés à cette ressource.

Depuis le début du XXIe siècle on constate que les ressources en eau se trouvent au centre de

l’actualité politique, scientifique et humanitaire dans le monde. On y retrouve les problèmes liés au

partage équitable des cours d’eau transfrontaliers, la qualité de la ressource et la disponibilité de la

quantité qui devient de plus en plus rare.

Le manque d’eau douce qui caractérise les pays méditerranéens serait lié à plusieurs causes à savoir :

La croissance démographique.

La sécurité alimentaire.

Le changement climatique et la dégradation de l’environnement.

L’accès difficile à la ressource dans les régions à climat aride.

Le partage inéquitable des cours d’eau transfrontaliers entre pays riverains.

La gestion fragmentée et non intégrée de la ressource.

Ce problème apparait avec une particulière acuité dans les pays du Sud-Est du bassin méditerranéen,

ou les ressources en eau sont naturellement limitées, et notamment au Proche-Orient où le taux de

croissance démographique est supérieur à 2.8 %, et la quantité moyenne d’eau par habitant y est

inférieure à 1000 m3 par an, alors que la moyenne mondiale atteint 7000 m3 par an.

12

Revue “Politique Etrangère” 2008 1 : http://bit.ly/1EpBFbl 13

EU Neighbourhood Info Centre : http://bit.ly/1EiHdG9 14

Déclaration de la Conférence Ministérielle Euro-Méditerranéenne sur l’Eau, 22 décembre 2008 :

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L’eau constitue l’un des grands défis du XXIe siècle pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord,

cette région étant par ailleurs la plus pauvre en eau dans le monde, avec 1 % des ressources

mondiales en eau douce pour 5 % de la population mondiale.15

La gestion des ressources en eau y est

d’autant plus délicate que 60 % des cours d’eau de la région traversent plusieurs pays.16

En 2005, la

population méditerranéenne "pauvre" en eau - c'est-à-dire vivant avec moins de 1 000 m3 par an et par

habitant - s'élevait à 180 millions de personnes, soit presque ¼ de la population des pays membres de

l'UPM. Parmi elles, soixante millions se trouvaient en situation de pénurie (moins de 500 m3/an).17

En outre, la gestion fragmentée et non intégrée de cette ressource compromet la stabilité et le

développement socio-économique de certains pays du Proche-Orient caractérisés par une demande en

eau accrue face à une offre en eau limitée, aléatoire et de qualité amoindrie par des phénomènes de

pollution. Désormais, cette ressource naturelle est au cœur des préoccupations diplomatiques des

différents gouvernements de la région. L’eau devient alors une source d’enjeux transfrontaliers et

donc interétatiques. Mais sur le plan global, le défi environnemental est le plus urgent. En effet, la

dégradation de son environnement fait courir à la Méditerranée un grave danger, celui de perdre ses

principaux atouts qui fondent sa singularité, en particulier pour le tourisme, les ressources naturelles

et le secteur agricole. La poussée démographique et le chômage, associés aux faiblesses des

administrations publiques et aux problèmes sociaux, augmenteront encore ces pressions. En outre,

sans une amélioration de la coopération régionale et des dispositifs de gouvernance, la mondialisation

actuelle pourrait aggraver la situation de la Méditerranée et induire par conséquent des tendances

négatives. L’impact de cette situation sur les pays de la rive Sud-Est du bassin méditerranéen,

caractérisé par une politique alimentaire basée sur une gestion non durable de la demande,

compromettra de plus en plus le développement socio-économique des pays émergents de la région.

Face à la gravite du problème, ses conséquences risquent d’être dramatiques. Pour certains

spécialistes le problème de l’eau ne peut être réglé isolément. Selon Fadi Comair, directeur général

des ressources hydrauliques et électriques du Liban ,ce problème doit être inclus dans un schéma

global de développement impliquant une coopération régionale « «hydro-diplomatique » » pour un

partage équitable de cette ressource en mettant l’accent sur l’urgence de mettre en place une

coopération, un début de partage de cette ressources entre les peuples selon la convention des

Nations Unies de 1997, ce qui serait terrain fertile pour la confiance et le respect. C’est une « culture

de l’eau » qui doit être un moyen pour cultiver la paix au Moyen-Orient.

b. Peut-on parler d’une stratégie commune de gestion de l'eau en Méditerranée ?

Dans ce cadre, l’instauration d’une véritable coopération à la fois régionale et internationale, centrée

sur la préservation des sols et de la ressource en eau semble pertinente. De ce point de vue, l’Union

pour la Méditerranée, centrée sur la réalisation de projets concrets, comme défendu par Jean-Louis

Borloo en 200818

, offre une réelle opportunité pour améliorer la gestion de l’eau dans la région.

15

. Comme rapporté par la Commission Ad Hoc sur l’Energie, l’Environnement et l’Eau de l’Assemblée Parlementaire Euro-Méditerranéenne sur la Gestion de l’Eau dans le pourtour méditerranéen, 16

Rapport de la Commission Ad Hoc sur l’Energie, l’Environnement et l’Eau de l’Assemblée Parlementaire

Euro-Méditerranéenne sur la Gestion de l’Eau : http://bit.ly/1B6QTRy 17

Selon le Monde : http://bit.ly/18luynV 18 "Au lieu de débattre de préfinancements pendant des années, nous voulons partir de projets concrets et aller

chercher les financements" selon le Monde : http://bit.ly/18luynV

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Le 22 décembre 2008, la conférence ministérielle sur l’eau qui s’est tenue en Jordanie, coprésidée par

la Jordanie, l’Egypte et la France, a constitué le lancement effectif de l’Union pour la Méditerranée

(UPM) dans le domaine de l’eau.

Le 22 décembre 2008, à l’issue la conférence ministérielle sur l’eau organisée dans le cadre de

l’Union pour la Méditerranée, les représentants de trente-deux pays d'Europe et du pourtour

méditerranéen ont adopté une déclaration définissant les principes d'une future stratégie commune de

gestion de l'eau en Méditerranée (SEM). La préparation de cette Stratégie a été confiée à un Groupe

Expert Eau (GEE) qui a suivi un processus préparatoire « régional structuré, ouvert et complet

impliquant les gouvernements nationaux, les autorités locales et les parties prenantes régionales ».

Cette stratégie aborde un grand nombre de questions clés et établit un calendrier d’atteinte des

objectifs d’ici 2015, 2020, 2025, voire même au-delà. La SEM est structurée autour des cinq thèmes

principaux que sont « la gouvernance efficace, l’adaptation aux changements climatiques, la gestion

de la demande, l’efficience et les ressources non conventionnelles ainsi que l’évaluation et

l’optimisation du financement ».19

Présentée lors de la 4ème

conférence ministérielle euro-méditerranéenne sur l’eau au mois d’avril 2010,

le projet de la SEM n’a cependant pas été adopté car certains points du document ont suscité de vives

oppositions de la part de la Turquie et d’Israël.20

En effet, une référence aux «territoires occupés» par

Israël a suscité le rejet de ce dernier, l'Etat hébreu refusant cette appellation tandis que la partie arabe

s'opposait à la formulation alternative proposée par les Européens de «territoires sous occupation»21

Il est intéressant de noter que, suite à l’échec de l’adoption de la Stratégie pour l’Eau en Méditerranée,

la 4ème

conférence a été la dernière portant sur le sujet seul de l’eau, qui est maintenant intégré à

la conférence ministérielle de l’Union pour la Méditerranée sur l’environnement et le changement

climatique dont la dernière s’est tenue le 13 mai 2014 à Athènes (Grèce).22

La coopération sur l’eau en méditerranée est ancienne et a été lance dans le cadre de coopération

bilatérales entre pays, de coopération régionales ou encore de coopération déconcentrées (Région,

collectivités territoriales). Il y a l’initiative européennes, celle des Nations Unies, des unions

régionales entre pays arabes ou pays africains, et enfin les initiatives portées par les banques de

développement, les banques privées et les ONG. (Voir Annexe II.1)

19

http://bit.ly/1B6RgeU 20

http://bit.ly/17UUdnj 21

http://bit.ly/1GZ3jf0 22

Secrétariat de l’UpM : http://bit.ly/1ir1EEX

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III- Etude de cas : le projet « Installation de dessalement pour la bande de Gaza »

a. Le profil du projet « Installation de dessalement pour la bande de Gaza »

Ce projet vise à faciliter à la population palestinienne l’accès à une eau potable sur le long terme

par le biais de trois réalisations majeures :

- La construction d’une usine de dessalement de l’eau. Elle permettra d’extraire de l’eau douce à

partir d’eau de mer selon un système d’osmose inverse » ou « Sea Water Reverse Osmosis »

(SRWO) consistant en un filtrage très fin de l’eau pour en extraire le sel et autres particules

polluantes. Selon des plans diffusés lors d’une réunion préliminaire des donateurs en 2012, elle

sera située sur n espace de 80 0000 mètres carrés (une amélioration par rapport au chiffre de 30

000 mètres carré annoncé au départ) au Sud-Ouest de la bande de Gaza près de Dar-El Balah, sur

la côte (voir annexe III.1). Sur le long terme cette usine devrait être capable de fournir 110

millions de mètres cubes d’eau potable par an, mais dans un premier temps l’usine ne sera

idéalement capable que de fournir 55 millions de mètre cubes d’eau par an : dans tous les cas la

consommation annuelle d’eau des habitants de Gaza reste supérieure à ces chiffres, mais cette

usine serait un avancement considérable et nécessaire comme nous le verrons plus bas.

- Le développement d’un système de transport d’eau potable du Nord au Sud de Gaza

permettant une meilleure répartition des ressources en eau sur tout le territoire

- La mise en place d’un système visant à réduire l’eau non génératrice de revenus, c’est-à-dire

l’eau potable déjà produite mais qui n’arrive pas à l’usager à cause de fuites ou de vols23, pour

éviter le gaspillage des ressources via la perte d’eau.

Mis sur le devant de la scène en 2011, il reflète bien les rapports de force et les orientations

majeures au sein de l’UpM. En effet d’après Antoine-Tristan Mocilnikar, responsable énergie,

infrastructure et numérique à la DiMed[1], le projet de Dessalement de l’Eau à Gaza faisait alors

depuis quelque temps partie de la base de propositions à étudier de la branche eau et environnement

de l’UpM. Il était notamment inclus dans une plateforme de dialogue on politique entre organisations

de type SWIM ou H2020 et bailleurs de fonds. Il a été sélectionné parmi beaucoup d’autres pour être

le premier projet officiellement labélisé « projet UpM », selon une double logique :

- En 2011 le besoin d’adapter l’Union pour la Méditerranée à la nouvelle donne issue des

« Printemps Arabes » a fait prendre conscience de la nécessité de financer des projets symboliques

ayant une dimension politique.

- Le projet de dessalement à Gaza, correspondant à cette description, a été choisi par un

noyau dur de décisionnaires et accepté grâce à la forte mobilisation de la France, pour qui cela a

constitué une dernière et importante action avant de céder la présidence à l’UE en 2012.

Bien que ce projet ait été endossé par l’UpM et que des études préliminaires aient été conduites dès

2011, il ne doit officiellement commencer qu’en 2015 et doit durer 4 ans, soit jusqu’en 2019.

Le promoteur de ce projet est le Service des Eaux palestinien. De nombreuses organisations

23

Selon la définition de l’International Benchmarking Network for Water and Sanitation Utilities :

http://bit.ly/1DPvppy

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internationales, interétatiques comme privées, se sont engagées comme partenaires de ce projet. On

peut par exemple citer le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUE) ou le Bureau

du Coordinateur spécial des Nations Unies pour le processus de paix au Moyen-Orient (UNSCO).

Nombre de ces partenaires sont aussi des contributeurs financiers au projet :

- La Communauté Européenne (CE) et la Banque Européenne d’Investissement (BEI) ont promis 4

millions d’euros pour la préparation technique de l’usine de dessalement

- La Banque mondiale va consacrer 2,2 millions de dollars à la préparation technique du

transporteur nord-sud et au programme d’eau non génératrice de revenus

- Les États du Golfe, via la Banque Islamique de Développement, ont promis de fournir 50% des

fonds nécessaires au projet

- La France s’est engagée en 2012, par l’intermédiaire de M. Fillon lors de de la conférence de

Marseille, à lui consacrer les 10 millions d’euros d’aide promis en 2009 lors de la Conférence sur

la Reconstruction de Gaza de Charm El-Cheikh

Tous ces dons devraient être gérés par un fonds fiduciaire mis en place sous la supervision technique

de la BEI, qui retient d’ailleurs pour cela une commission de 4% pour frais de gestion.24

Les analyses prévisionnelles du budget nécessaire à la mise en place de ce projet ont évolué depuis

son lancement. Il devait au départ représenter un coût de 455 millions de dollars, soit plus de 365

millions d’euros25. Dès mai 2012 cependant les rapports de l’Union pour la Méditerranée ont ramené

ce coût à 310 millions d’euros, qui seraient dépensés de la façon suivante :

Activités et coûts du projet « Usine de dessalement à Gaza » selon des prévisions de début 2012

Activité Coût estimé

Mise à jour d’une étude de faisabilité réalisée en 2003 500 000 € (de la BEI)

Gestion de la conception et de la construction 6 800 000 €

Construction de la station d’épuration de l’eau de mer 170 000 000 €

Construction du système de distribution de l’eau 102 000 000 €

Formation de managers et de personnel à même d’utiliser les infrastructures et

d’effectuer des opérations de maintenance

950 000 €

Fonds de prévoyance 27 000 000 €

Développement du projet, management des inspections, et coordination avec les

autorités assurée par le promoteur (le Service des eaux palestinien)

2 750 000 €

Source : Union pour la Méditerranée, février 2012 à l’occasion de la réunion préliminaire des donateurs pour le projet de

dessalement à Gaza)

b. En quoi ce projet s’insère pertinemment dans un contexte qui le rend

nécessaire ?

i. A cause de la gravité du problème de l’eau dans la bande de Gaza

Gaza étant une enclave territoriale au statut ambigu, source de contentieux politique et gérée par une

structure étatique avec peu de moyens, il est compréhensible que les fonds affectés à son

24

D’après Ioannis Kaltsas, chef de la division « politiques et fonds fiduciaires » de la BEI, lors de la réunion de

coordination du fonds de donateurs du projet à Barcelone le 13 février 2012 25

Selon un rapport réalisé par la direction Eau et Environnement de l’UpM et disponible ici :

http://bit.ly/1EQ7NW8 http://bit.ly/1EQ7LxB

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développement viennent d’organismes extérieurs plus que des autorités palestiniennes ou israéliennes.

Pourtant le besoin de projets de développement y est grand, en particulier dans le secteur de l’eau.

L’unique source d’eau potable de la bande de Gaza consiste en un aquifère côtier souterrain qui passe

sous elle. Une exploitation durable de cette aquifère exige qu’en théorie on ne prélève que 55 millions

de mètres cubes d’eau de cet aquifère par an. Or la population de Gaza s’élève à environ 1,8 millions

de personnes, la bande de Gaza est donc un territoire qui connaît une grave pénurie d’eau (la pénurie

pouvant être quantifiée et correspondant à moins de 1000 mètres cubes d’eau par an et par habitant).

Les habitants de Gaza ne peuvent faire autrement que de prélever de l’eau en excès de l’aquifère : ils

en tirent en moyenne 170 millions de mètre cube par an, soit environ 3 fois le volume viable. Cette

surexploitation fragilise l’aquifère, dont l’existence est menacée d’ici à 2020 (voire annexes III.3 et

III.4) Elle induit sa salinisation de manière de plus en plus prononcée. Dans l’état actuel des choses

sans traitement de l’eau seules 5 à 10% des eaux de l’aquifère côtier sont, en théorie, propres à la

consommation. Etant donnée la surexploitation de l’aquifère il est clair que les habitants de Gaza

s’exposent en buvant à de graves risques sanitaires. On a en effet observé dans la région la

multiplication de maladies, notamment des maladies rénales liées à la consommation d’eau salée.

La mise en place d’une installation de dessalement est donc nécessaire et aura de multiples impacts

positifs. D’abord un impact sanitaire et humanitaire puisqu’elle permettra à la population de Gaza

d’accéder à l’eau en quantité suffisante et sans risques pour leur santé. Mais aussi un impact

environnemental, puisqu’elle permettra la régénération de l’aquifère côtier, ce qui bénéficiera aussi à

des pays comme Israël ou l’Egypte qui en tirent aussi de l’eau. Sans oublier un impact politique,

puisque ce projet permettra selon les documents de travail de l’UpM « la promotion de la paix, la

stabilité et la prospérité de la région ». Finalement ce projet aura un impact économique positif dans la

mesure où il créera de l’emploi localement, ce dont la population de Gaza manque cruellement.

ii. Parce que c’est un complément aux rapports et projets déjà menés dans la

région, qui apporte une solution de long terme

Plusieurs études ont été réalisées par des organismes internationaux pour rendre compte de la gravité

exacte de la situation : la Banque Mondiale, Amnesty International, et plus récemment les agences

onusiennes en Palestine avec le rapport « Gaza in 2020 : A liveable peace ? » d’août 2012. Pour faire

face à cette situation l’Autorité Palestinienne des eaux elle-même a également initié le programme

GETAP (Gaza Emergency Technical Assistance Programme) et dans ce cadre commandité une étude

exhaustive de la situation de l’eau à Gaza, la CSO-G, financée par la Norvège et dont les conclusions

ont été rendues à l’été 2011.

De telles études sont un précédent nécessaire à la mise en place de projets comme celui de

l’UPM, qui n’est pas le premier dans la région. En effet la Banque Mondiale finance depuis presque

vingt ans des projets liés à l’accès à l’eau et au traitement de l’eau à Gaza, le plus récent étant le

« Projet d‘intervention d’urgence pour l’eau à Gaza », ayant eu lieu de juin 2005 à janvier 2012.

Réalisé sous l’égide de l’OLP agissant en tant que représentant des autorités palestiniennes, ce projet

coûtant au total 22,9 millions d’euros a été financé par des donateurs internationaux et des bailleurs

comme la Banque Mondiale ou la BID. Focalisé sur la région du bassin de Beit Lahyia, au Nord de

Gaza, il a visé à pallier les problèmes les plus immédiats de la population des environs en améliorant

les réseaux de distribution et de traitement de l’eau, ainsi qu’apportant de l’aide « technique et

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opérationnelle » au Services des eaux des municipalités concernées par le projet26. Apprécié comme

« un succès » dans la mesure que ce projet a permis un traitement à 99,8% de l’eau, un

fonctionnement des puits à 90% et une disponibilité de l’eau potable plus longtemps dans la journée.

Il a donc été un palliatif nécessaire, mais le projet de l’UpM est en comparaison d’une plus grande

ampleur et plus axé sur le long terme ; ce qui explique donc qu’il soit beaucoup plus coûteux.

c. Appréciation du projet au stade actuel

i. Ce qui a déjà été fait

La première étape importante de ce projet a été sa labellisation par l’UpM. Cette labellisation a été

proposée lors d’une réunion des experts de l’eau de 22 pays membres de l’UpM à Barcelone, en mai

2011, et acceptée lors d’une réunion des Hauts responsables représentant l’intégralité des 43 membres

de l’UpM, le 22 juin suivant à Bruxelles. Le consensus de départ a donc été total.

Ce projet « une réussite politique dans la mesure où toutes les parties l’ont cautionné » et selon M.

Mocilnikar, à toutes les étapes de sa labellisation.

L’étape suivante a été l’entreprise d’une tournée des donateurs potentiels ; tant en Europe notamment

auprès de participants de la conférence de Charm El-Cheikh où une aide à Gaza avait été promise, que

dans les pays arabes. Cette tournée a été réalisée par le Secrétariat de l’Union pour la Méditerranée et

le promoteur du projet, le ministre palestinien des eaux, M. Shaddad Attili. L’accord des bailleurs

arabes a été donné début 2012, comme l’a attesté, fin janvier, le vice-président de la BEI, Philippe de

Fontaine Vive, à Alain Juppé.

Lors d’une réunion de coordination des participants au fonds de financement au quartier général de

l’UpM en février 2012 (voire annexes III 5 et III 6), le secrétaire général adjoint à l’Eau et à

l’Environnement de l’UpM, Rafiq Husseini, y a noté que le projet serait initié « quand au moins la

moitié des fonds serait promise ».

Ont suivi d’autres séances ainsi que des conférences se focalisant comme celle du sixième forum

mondial de l’eau de 2012 , où François Fillon a promis 10 millions d’euros pour ce projet.

En septembre 2013 l’Autorité palestinienne a cherché des donateurs pour financer divers audits sur la

mise en place des trois composantes du projet et a sécurisé l’appui de la Finlande et de la Commission

Européenne. Cette dernière va donner 4 millions d’euros pour permettre, selon les responsables de

l’UpM, « d’assurer l’ingénierie, l’approvisionnement et la construction (de l’usine de dessalement)

avant la fin du mois de décembre de cette année »27.

L’actualité la plus récente du projet remonte à octobre dernier, lorsque 5,4 milliards de dollars, dont

une partie pourrait aller au projet de dessalement, ont été promis par participants à la conférence du

Caire pour financer la reconstruction de Gaza.

26

D’après le site web de la Banque Mondiale : http://bit.ly/1zONr94

27 Ufmsecretariat.org, (2014). Union pour la Méditerranée » Les bailleurs de fonds internationaux s’engagent à

verser 5,4 milliards de dollars pour aider à reconstruire la bande de Gaza. [online] Disponible ici :

http://bit.ly/1DYMksw

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ii. Ce qui reste à faire et les éventuels problèmes du projet

Malgré les diverses promesses de financement sécurisées pour ce projet, sa mise en place sur le terrain

n’a actuellement pas commencé. Son évolution pratique ne peut tout de suite être évaluée.

Certaines modifications dans la quantification des objectifs, comme la réduction du budget ou la revue

à la baisse de la capacité de traitement de l’usine de dessalement, qui devait à la base être tout de suite

capable de fournir 110 millions de litres cube d’eau potable par an, sont autant d’indicateurs de

possibles problèmes à l’exécution , surtout si on considère que ces modifications à la baisse n’ont pas

été suivies d’une réduction du temps prévu pour mener à bien le projet, au contraire. Le peu de

déboursement effectif des fonds promis par les donateurs fait également craindre des lenteurs. Le

risque majeur est celui de la mise en place d’un cercle vicieux : les fonds promis ne sont pas tous

versés dans la mesure où les contributeurs n’ont pas de précision sur ce qu’ils vont financer…

Le cas français est révélateur : mis à part la demande de déboursement de 750 000 euros pour financer

à hauteur de 50% un audit sur le système de transport de l’eau et les composants de réduction de l’eau

non génératrice de revenus, faite à la France en septembre 2013 par le ministre palestinien de l’eau

Shaddad Attili, aucune demande précise n’a été faite, et conséquemment aucun fonds versé. D’après

M. Mocilnikar, l’engagement de la France dans ce projet n’en est pas moins fort et sera respecté. En

témoignent des débats internes quant à l’utilisation précise de ces fonds et quant aux budgets dans

lesquels on pourra les puiser : AFD, Trésor, gouvernement ont tous une idée sur la question. La

France ne décaissera donc que dans le cadre d’un respect scrupuleux des règles de la conduite d’un

projet de coopération.

L’UpM est fondée sur le consensus ce qui impose un rythme en conséquence : le démarrage qui a

permis de mettre en place une organisation et des méthodologies solides a été long : il s’est par

exemple écoulé trois ans entre le sommet de Paris, qui en 2008 a lancé l’UpM, et l’accord des

membres sur un Template de labellisation de projets UpM, qui n’a été conclu qu’en 2011, Gaza en

étant le premier bénéficiaire.

Evaluations, recommandations et perspectives d’avenir

a. Les obstacles politiques :

Spécifiques au Proche-Orient et façonnés par les rapports de forces des grandes puissances qui ont de

nombreux enjeux géostratégiques. L’instabilité politique (le conflit israélo-palestinien, les vagues du

«printemps arabe » », la guerre civile en Syrie, etc) complexifie la coordination direct entre les acteurs

politiques de ces pays. La coopération dans le domaine de l’eau est particulièrement représentative

des différents politiques et de l’asymétrie qui existe entre les pays du Proche-Orient notamment les

approches adoptées par les pays dans la gestion des cours d’eau internationaux, à savoir, une gestion

par concept sécuritaire :

Ce mode de Gestion implique les pays qui considèrent que leur sécurité stratégique ainsi que le tracé

de leurs frontières nationales dépendent essentiellement de l’accès à la ressource en eau et à la

sécurité de son approvisionnement. Dans ce contexte, les besoins en eau pourraient être considérés

comme des outils permettant l’expansion territoriale. Ces nations ont montré qu’elles étaient capables

d’assoiffer et mettre en danger la sécurité alimentaire d’un pays voisin en le privant de son

approvisionnement en eau. Des exemples concrets de la rive sud-est méditerranéenne ont montré que

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le risque de conflit est d’autant plus fort que le pays le plus vulnérable au niveau hydrique, situé à

l’aval du bassin, est le plus puissant sur le plan militaire. Ces pays vivent dans un climat de panique

continue, voire même dans une situation hydraulique obsessionnelle, avec la hantise permanente que

leur approvisionnement en eau puisse un jour être menacé.

C’est le cas de l’Égypte, qui ne peut vivre sans les eaux du Nil qui proviennent en partie d’Éthiopie et

du Soudan, et celui d’Israël situé à l’aval du Jourdain et qui dépend presque totalement des ressources

en eau des pays arabes à l’amont du bassin.

D’après Fadi Comair, «Plusieurs obstacles, lies au mécanisme de gouvernance, posent problème.

D’abord, le vote à l’unanimité. La Turquie et Israël régissent la politique de la région. En ce qui

concerne l’exemple de l’eau, Israël se situant à l’aval du fleuve du Jourdain ne veut absolument pas

déclarer la Palestine territoire occupée car elle devra partager l’eau de manière juste. Aujourd’hui

Israël consomme 300 litres d’eau par habitant alors que la Palestine n’en consomme que 20.

Le second obstacle est indéniablement l’instabilité régionale. Un exemple qui reflète bien cette

difficulté est le fait que la France avait donné à Moubarak la présidence de l’UPM et peu de temps

après, son régime en place en Egypte était renversé. Et jusqu’aujourd’hui la guerre se perpétue en

Syrie et en Irak. L’idée de départ est lancée par les français, et pour cela, il faut un engagement clair

et fort de sa part. Faute de position de force, c’est l’Union Européenne qui préside l’UPM.Le

troisième obstacle est financier. De plus, l’intégration de la Ligue Arabe en tant que membre dans

l’Union aux côtés des autres pays fait de la concertation et des négociations des exercices beaucoup

plus complexes. Etant donné que les intérêts sous-jacents cette organisation sont différents des

intérêts propres aux états, les négociations s’avère beaucoup plus laborieuses et complexes. Vous

voyez bien que ce système de gouvernance est en quelques sortes asphyxié.

C’est pourquoi, on assiste aujourd’hui aux discussions de type 5+5 qui s’effectuent directement entre

les pays de l’Afrique du Nord et les pays du Nord. Le Proche Orient est ainsi marginalisé alors que,

dans un contexte politique de plus en plus précaire, il faudrait une volonté politique claire qui

soutienne la paix dans la région.

Quant à la stratégie de projets, il s’agit de permettre à chaque pays de proposer des projets, qui seront

ensuite labélisé par l’UPM. Un des premiers projets qui a été labélisé est le CIF : le centre régional

d’information et de formation aux métiers de l’eau. Lancé par le Liban, il a été labélisé en mai dernier.

Une fois de plus, les rouages du système de gouvernance que j’ai présentés sont à l’œuvre :

L’intervention de la Ligue arabe, la méconnaissance de la région par les pays du Nord, les problèmes

de financements, ainsi que l’instabilité politique ont considérablement retardé la mise en place

effective du projet. Finalement, le projet sera mis en place au Liban, qui met à disposition le terrain,

l’AFD et l’UPM finance l’équipement. »

b. Quelles sont les perspectives d’avenir pour l’Union pour la Méditerranée et la

coopération dans le domaine de l’eau dans la région ?

i. Déclarations après le printemps arabe et rôle de l’Union Européenne

En août 2011, dans un communiqué de presse, Youssef Amrani, secrétaire général de l'Union pour la

Méditerranée déclarait que :

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Avec le "printemps arabe", une nouvelle ère s'est ouverte en Méditerranée. Les partenaires

euro-méditerranéens doivent être à la hauteur de ce processus historique de transformation :

il faut soutenir la transition démocratique et favoriser le développement économique et social

pour construire un espace euro-méditerranéen démocratique, apaisé, stable et prospère. 28

Il ajoutait alors que l'Union pour la Méditerranée apparaissait comme une « initiative visionnaire » et

appelait à « s’engager une nouvelle étape » en intégrant « la jeunesse et plus généralement la société

civile dans les processus politiques nationaux ». Selon lui, pour faire face aux nouveaux défis, de

nouveaux outils de financement doivent être créés, avec la Commission européenne et les institutions

financières spécialisées telle la Banque européenne d'investissements, fonds d'assistance technique,

mécanismes de garanties facilitant les initiatives du secteur privé et amortissant le risque politique et

ce processus multidimensionnel soit se construire avec l'adhésion de tous les acteurs clés de la région,

avec l'appui de l'Union européenne.

Quant au rôle du Parlement Européen dans la relance de l’Union pour la Méditerranée, son Président

Martin Schulz, déplorant le « vide de leadership politique » mais souhaitant donner "un coup

d'accélérateur à la mise en œuvre des projets de Union pour la Méditerranée (UpM) à l'heure de

bouleversements politiques et économiques régionaux majeurs", a convoqué un sommet des

présidents des Parlements des 42 pays actuellement membres de l'organisation, les 6 et le 7 avril 2013. 29

D’après Jean-François Daguzelle, directeur adjoint de la Fondation pour la recherche stratégique, "Il

faudrait un appui politique beaucoup plus affirmé", en raison des "besoins financiers". La démarche

du Président du Parlement européen est "un signal lancé vers la Commission et les Etats membres ».

Pour relancer l'UpM, Martin Schulz entend renforcer leur position. C’est ainsi qu’il a écrit que dans

les relations euro-méditerranéennes le " dialogue politique doit se construire autour de trois axes : les

peuples, les parlements et la participation". (tribune cosignée avec André Azoulay, président de la

Fondation euro-méditerranéenne et Anna Lindh, parue dans le journal La Croix, le 3 avril).

L'initiative du Parlement a également pour objectif de restaurer l'image « très écornée » de l'Union

européenne dans la région. L'UE "a perdu en crédibilité" en acceptant de composer avec les régimes

autoritaires aujourd'hui renversés, souligne Khadija Mohsen-Finan, chercheuse associée à l'Institut des

relations internationales et stratégiques (IRIS).30

Néanmoins, pour Kristina Kausch, spécialiste du Moyen-Orient au think tank européen FRIDE,

malgré une "bonne connaissance" de la région, les eurodéputés n'ont qu'un poids "symbolique" face

aux Etats de l'UE dont dépend la vraie nature des relations entre le nord et le sud de la Méditerranée.

En Avril 2010, un communiqué de presse du Parlement Européen affirmait déjà que « le nouveau

souffle dont l'UpM a besoin doit passer par un "engagement historique" des chefs d'Etat et de

gouvernement de doter les projets de fonds "à la hauteur des enjeux" et de solidifier les institutions du

processus ». A plus long terme, les députés ont indiqué vouloir un "renforcement considérable" des

moyens destinés à l’UpM dans les perspectives financières 2014-2020. La résolution propose

également la création d’une banque euro-méditerranéenne d’investissement et de développement.

Enfin, Antoine Tristan Mocilnikar, responsable Energie, Infrastructure et Numeriques, l’Union

Européenne est utile et a beaucoup de fonctionnalités notamment en ce qui concerne sa forte présence

28

D’après le Monde: http://bit.ly/1wJrtJX 29

D’après le Parlement Européen : http://bit.ly/18Tyc9u 30

http://bit.ly/1GnmmSM

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diplomatique. De plus, il y a certains pays européens qui ont une culture de l’action directe et un

rapport privilégié à l’eau : les Pays Bas par exemple sont très impliqués dans les projets liés à l’eau.

Dans le système européen, le domaine de l’eau est assez proche de celui de l’environnement facilitant

la jonction eau-environnement, déjà visible à Barcelone.

ii. Gestion efficace de l’eau dans la région méditerranéenne

Le développement durable doit être un objectif global qui vise à répondre aux besoins actuels de la

société et préparer le terrain pour satisfaire les besoins des générations futures sans pour autant

épuiser les ressources naturelles de la région.

Les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), adoptés par 189 pays en septembre 2000 à

Kyoto, et le Plan de mise en œuvre de Johannesburg, adopté en 2002 par le Sommet mondial sur le

développement durable, soulignent le besoin urgent d’un engagement accru pour réduire les inégalités

et contribuer au développement des pays pauvres.

Reste à trouver les solutions aux questions que les citoyens méditerranéens se posent continuellement.

Comment limiter les effets du changement climatique sur les pays du pourtour

méditerranéen ?

Comment gérer durablement les maigres ressources hydriques dans la région ?

Comment assurer l’accès à une eau de qualité et en quantité suffisante aux populations ?

Comment habituer les usagers à des comportements économes dans leur utilisation de

l’eau ?

Comment éloigner le spectre de la guerre de l’eau de la rive Sud-Est méditerranéenne en

incitant les gouvernements à adopter une politique participative en matière de gestion ?

Certains pays du Nord comme du Sud ont commencé à assurer une gestion plus efficiente de l’eau

comme y ont invité les sommets de Kyoto, de Johannesburg et du Mexique. L’initiative lance par

l’UPM pour l’eau représente un cadre de coopération qui contribuera à atteindre dans la région les

objectifs du millénaire pour le développement.

Le défi est aussi celui des dirigeants des pays de la Méditerranée, la stratégie du dialogue et la

coopération régionale est inévitable pour réaliser des progrès dans les domaines du développement

humain et économique, de la protection des ressources en eau et des avancées culturelles.

Cette démarche constituera une solution durable pour palier à la pénurie d’eau et offrir aux

générations futures arabes et israéliennes une paix durable pour la région. L’eau serait alors un moteur

pour l’entente et l’application de la «Culture de la paix» au Proche-Orient.

Enfin, Arabes et Israéliens devront faire des choix très douloureux entre : un présent basé sur la

culture de la haine ou bien un futur consolidé par une paix durable. La consolidation de cette culture

de l’eau pour la paix passe bien sûr par l’éducation pour laquelle l’UpM prévoit plusieurs projets.

Pour cela, l’Union européenne et l’UPM auront un rôle important à jouer pour relever ces défis. Ces

politiques d’aide qui sont engagées vont favoriser le co-développement du Nord et du Sud sont plus

que nécessaires, mais les partenaires méditerranéens de l’UPM devront aussi travailler ensemble pour

encourager les processus de démocratisation, renforcer les capacités institutionnelles, améliorer la

gouvernance et favoriser le processus de paix dans la région Sud-Est du bassin. La mise en œuvre de

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stratégies de dialogue et de renforcement institutionnel à travers politique de l’UPM orientée vers le

développement durable, aidera les pays sud-est méditerranéens à atteindre leurs aspirations.

Dans un premier temps, cette démarche pourrait faciliter l’application du dialogue national et régional

sur la GIRE( la gestion intégrée des ressources en Eau) , lancé par l’UE à travers la Directive cadre

sur l’eau (DCE) et l’UPM dans le but de mettre en application ce nouveau concept de gestion par

bassin hydro géographique ou «Nouvelle Masse d’Eau.»

Cette initiative encouragera les principaux acteurs de l’eau au niveau du bassin à développer une

politique de coopération et d’échanges bilatéraux ou multilatéraux en vue d’améliorer l’exploitation

des «masses d’eau» sur le plan régional. C’est pour cela qu’une bonne part de la GIRE réside

essentiellement dans la gestion des conflits et l’hydro-diplomatie et il sera nécessaire d’établir un

processus formel de résolution de conflits sur une base permanente.

iii. Volonté de mettre en place une « Méditerranée des Projets »

Dans un dossier de presse datant du 9 juillet 2013, la Délégation interministérielle à la Méditerranée

(DiMed) explique que « le champ géographique de coopération de l’Union pour la Méditerranée, reste

pertinent. Le Secrétariat général de l’Union pour la Méditerranée, a désormais trouvé sa place parmi

les institutions méditerranéennes. » Néanmoins, il appelle à une nouvelle dynamique de l’UPM,

« fondée au plan national sur le pragmatisme dans l’identification des projets communs et l’énergie

des peuples » et qui a comme nom la « Méditerranée de projets ».

Malgré la mention du projet d’intégration de Nicolas Sarkozy, « cette stratégie s’inspire de la

construction européenne et de la méthode des petits pas » p.1), la Délégation interministérielle

souligne la priorité accordée à la mise en place des projets concrets « pour faire avancer la

coopération sur des projets concrets et co-construits avec nos partenaires ».

En guise de conclusion ce projet met en avant l’importance de l’eau comme enjeu majeur dans le

Bassin Méditerranéen et la nécessité d’assurer la continuité des projets dans le domaine de l’eau de

l’UpM.

Si le projet de « Communauté euro-méditerranéenne de l'eau, l'énergie et l'environnement de l'Union

pour la Méditerranée » n’est plus à l’ordre du jour, les partenaires doivent cependant assurer la

continuité des projets multilatéraux dans la perspective du respect de toutes les parties prenantes.

De plus, bien que les obstacles d’ordre politique aient contribué à l’échec de la stratégie

méditerranéenne de l’eau, celui-ci a impulsé une reprise rapide de la coopération lancée par la

stratégie de projets, qui est une initiative tout à fait ambitieuse. Même si le travail de négociation des

projets reste laborieux, le projet pour Gaza qui a été présenté reflète bien le succès de cette politique

des projets.

De plus ce projet est représentatif d’une adaptation de l’UpM aux obstacles politiques, ce qui l’a

amenée à faire des compromis par rapport à son projet de départ : le projet d’intégration semble avoir

été abandonné au profit d’une politique de projets. L’UpM a donc réussit à construire, par un model

innovant, un projet de coopération dans une région autrement paralysée par les conflits politiques.

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Brief de l’Union pour la Méditerranée, réalisé en février 2012 à l’occasion de la réunion préliminaire des donateurs pour le projet de dessalement à Gaza et résumé de cette réunion.

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ANNEXES

Méthodologie

Nous avions décidé de mener des entretiens avec des acteurs de l’eau dans la région méditerranéenne

afin d’obtenir un meilleur aperçu de la distance entre les déclarations officielles et les pratiques sur le

terrain.

Nous nous sommes basées sur cette liste de questions lors de l’entretien avec acteurs de la coopération

au niveau de l’eau en Méditerranée que nous avons eu l’opportunité de rencontrer dans le cadre du

projet de groupe pour le module « Management d’un Projet de Coopération Internationale »

(Septembre-Décembre 2014). Nous les avons évidemment adaptés à notre interlocuteur.

1- Quel a été votre rôle au sein de l’Union pour la Méditerranée?

2- Quel projet lié à l’eau avez-vous suivi?

3- Considérez-vous que ces projets soient adaptés aux besoins de la population concernée?

4- Considérez-vous que les différents acteurs aient été capables de se coordonner?

5- La coopération promue pour l’Union pour la Méditerranée est-elle sensible aux différentes

cultures de la région?

6- L’alternance politique en France, pays à l’initiative de l’UPM, a-t-elle mis un frein à la

coopération méditerranéenne?

7- Y’a-t-il une alternative à l’Union Pour la Méditerranée?

8- Une union méditerranéenne transectorielle est-elle nécessaire voire souhaitable?

9- Est-ce que l’Union pour la Méditerranée est un reflet des rapports Nord-Sud entre les deux

rives de la Méditerranée?

10- Les financements et les bailleurs de fond ont-ils un impact sur la qualité des projets liés à

l’eau de l’Union pour la Méditerranée ?

11- Les perspectives d’avenir: pensez-vous que le projet de dessalage de Gaza arrivera-t-il à son

terme?

12- Quels sont, à votre avis, les obstacles majeurs à la mise en place d’une coopération, en

particulier dans la région et au niveau des questions de l’eau?

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ANNEXE I : Cycle de projet type de l’UpM

(source : présentation générale du secrétariat de l’UpM)

ANNEXE II.1

Benchmark des acteurs dans le domaine de l’eau dans la région Méditerranéenne

Processus politique

- Conférence ministérielle euro- méditerranéenne sur la gestion locale de l’eau, Turin, 18-19 octobre

1999

- La politique environnementale de l'Union européenne (6ème Plan d’action «Environnement 2010:

notre avenir, notre choix (2001-2010)

- Une politique maritime intégrée pour l'Union européenne (COM(2007) 575 final)

- Partenariat Euro-Med – Processus de Barcelone (PEM)

- La Politique Européenne de Voisinage (PEV)

- le Sommet Mondial sur le Développement Durable (WSSD) (2002)

- Convention de Barcelone

- UNEP

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- UN-ESCWA

- UNESCO

- UNDP

- le Conseil des Ministres Africains sur l'Eau (CMAE)

- Le Nouveau Partenariat pour le Développement de l'Afrique (NEPAD)

- Le Conseil Arabe de l’Eau

Stratégies - La stratégie maritime européenne

- La stratégie marine européenne

- La stratégie de l’élargissement de l’UE

- La stratégie de l’environnement pour la méditerranée COM (2006) 475

- Plan d’Action Pour la Méditerranée (PAM)

- Stratégie Méditerranéenne pour le Développement Durable (SMDD)

Plans d’action

- Plan d’action du Turin pour la gestion locale de l’eau

- Horizon 2020 – Plan d’action

- PEV Plans d’action nationaux

- IPEV Programme régional indicatif

- IPEV Programme national indicatif

- La composante méditerranéenne de l’initiative européenne de l’eau ( MED-EUWI)

- Objectifs du Millénaire (ODM)

- L’initiative européenne de l’eau (EUWI)

- La composante africaine de l’initiative européenne de l’eau

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Annexe III. 1 : localisation de l’usine dans la bande de Gaza

Source : Brief réalisé à l’occasion e la réunion des donateurs du 13 février 2012, à Barcelone

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Annexe III.2 : Entretien avec Antoine Tristan Mocilnikar, responsable énergie,

infrastructure et numérique à la DiMed, sur l’UPM et l’eau – 06/11/2014

Depuis quand la DiMed (ou Délégation interministérielle à la Méditerannée) existe-t-elle? Quelle

est sa place au sein de l’infrastructure étatique française ?

Ce qui est aujourd'hui le DiMed existe depuis 2007 et rejoint le ministère des Affaires

Etrangères en 2015.

Il était avant rattaché à la présidence de la République mais depuis 2012 le service est

rattaché au Premier Ministre.

Pourriez-vous nous rappeler brièvement l’évolution de la coopération méditerranéenne avant la

création de l’Union pour la Méditerranée ?

Depuis les indépendances nationales ayant mis fin à la colonisation, la coopération

méditerranéenne, au sein de laquelle la France avait une place importante, déclinait (et nous

y reviendrons plus tard mais les Printemps Arabes par exemple ont aussi été un élément

déstabilisant pour la coopération méditerranéenne). C’est François Mitterrand qui a relancé

cette dynamique de coopération, la France a été à l’origine du Dialogue 5 + 5 et du processus

de Barcelone, elle a relié les pays d’Europe et d’Afrique/ Moyen Orient (la France est aussi

un précurseur sur la question de l’eau).

Puis, en 1995, l’Union Européenne et dix autres Etats méditerranéens ont lancé le processus

de Barcelone, qu’il ne faut pas confondre avec la convention de Barcelone.

Cette dernière fait partie de conférences importantes comme le sommet de Stockholm en

1972, réunissant les ministères de l’environnement, qui a conduit à la création de l’UNEP

(agence de l’ONU pour l’environnement), ou encore la convention sur les mers de 1975/1976

et la convention de Johannesburg 2002/2005.

Si vous deviez résumer les grandes caractéristiques de l’Union pour la Méditerranée, quelles

seraient-elles?

L’Union pour la Méditerranée repose sur deux piliers : des projets concrets et un « co-

ownership » Nord/Sud. Angela Merkel a voulu la participation de toute l’Union Européenne,

ce qui est bien car tous se sont vraiment pleinement mobilisés.

Pouvez-vous nous citer quelques acteurs français de la formation de l’Union pour la

Méditerranée?

Pascal Bertaut, directeur général de l’IGN, qui a beaucoup participé à la mise en place de

toute cette structure.

Claude Martinant, malheureusement décédé, gérait tout le dossier “eau” avant 2007.

Il convient aussi de mentionner Henri Guaino : en 2007, après l’élection de Nicolas Sarkozy,

il a été choisi pour s’occuper des questions de la Méditerranée. Il avait déjà beaucoup

d’autres fonctions et a donc décidé de monter une équipe, un pool de spécialistes, pour

s’occuper de cette question. Cela va d’ailleurs dans le sens des souhaits que Nicolas Sarkozy

formulait pour l’Union pour la Méditerranée : il voulait des experts techniques).

Quelle est la place de la question de l’eau au sein de l’Union pour la Méditerranée ?

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En 2008, lorsqu’à lieu le Sommet de Paris, sommet fondateur de l’Union pour la

Méditerranée lancé sur invitation franco-égyptienne), y identifie les projets prioritaires de

l’Union pour la Méditerranée, dont la stratégie de l’eau pour la Méditerranée. Elle y figure

ainsi en annexe (« L’importance de l’eau est un fait reconnu : la conférence

interministérielle euro-méditerranéenne qui se tiendra en Jordanie en octobre 2008 définira

une stratégie de l'eau pour la Méditerranée, qui défendra la préservation des ressources

hydriques, la diversification des ressources d'approvisionnement en eau et l'utilisation

rationnelle et durable de l'eau. »)

La ministérielle de 2011 et ses conséquences sont surtout liés à des raisons politiques, il

existe une stratégie de l’eau mais elle n’a pas été entérinée. Malgré cela des projets européens

pour l’eau ont été lancés, comme le projet SWIM (Sustainable Water Integrated

Management), projet européen. « Sustainable » renvoie à la fusion des départements

environnement/ dépollution et eau. Au niveau de l’Union pour la Méditerranée la dynamique

environnement domine l’eau, ce qui rend l’eau moins visible, mais l’histoire institutionnelle

de l’eau est moins solide (à peine des initiatives comme Remob) et ses institutions

déficientes ; cette configuration est donc utile et facilite les choses, surtout au niveau de

programmes de financement comme Horizon 2020, un type de structure très importante car

liée à des fonds importants permettant la démonstration de la faisabilité d’un projet.

L’arrivée à la présidence de François Hollande a-t-elle selon vous affecté la coopération

méditerranéenne au sein de l’Union pour la Méditerranée et comment?

La Méditerranée est vaste ; les projets concrets restent donc sa priorité. Dans le domaine des

projets, Il se concentre de plus sur la Méditerranée occidentale où une stratégie de l’eau va

être lancée.

Quelles sont les places respectives de la France et de l’Europe au sein de l’Union pour la

Méditerranée ?

La France pensait présider l’Union pour la Méditerranée pendant deux ans, en réalité elle est

restée comme co-président de 2008 à 2012. La nouvelle co-présidence est constituée de

l’Union Européenne et de la Jordanie.

L’Union Européenne est utile et a beaucoup de fonctionnalités, notamment en ce qui

concerne sa présence diplomatique . De plus l’Union Européenne a beaucoup de « soft

money ».

Certains pays européens ont une culture de l’action directe et un rapport privilégié à l’eau :

les Pays-Bas par exemple aiment beaucoup les projets qui y sont liés (exemple : MedReg à

Mascate). Dans le système européen, le domaine de l’eau est assez proche de celui de

l’environnement d’où aussi la convergence eau - environnement, déjà visible à Barcelone.

Pourriez-vous nous parler du projet « Usine de dessalement pour la bande de Gaza » : quelles ont

été les raisons et les étapes qui ont conduit à son adoption par l’Union pour la Méditerranée ? En

quoi est-il particulier ?

Ce projet est une proposition qui avait été faite depuis longtemps par la Palestine. Vers avril

2011 il était encore au bas de la liste de 100 projets de l’Union pour la Méditerranée ; il a été

mis en avant subitement, dans le contexte des printemps arabes.

A cette période se développe en effet une dynamique impulsée via SWIM, H2020, les

bailleurs de fonds, et qui donne lieu à une plateforme de dialogue non politique (dans laquelle

Gaza est incluse). On veut notamment des projets concrets comme on l’avait annoncé au

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sommet de Paris. Après les révolutions arabes on veut des projets symboliques (comme

l’autoroute transmaghrébine). : Gaza est donc un projet adéquat. Ce projet a été choisi par un

noyau dur de décisionnaires, notamment la France qui a fortement fait campagne pour

l’acceptation de ce projet qui a marché. Il a été accepté lors de sommets à Paris et de réunions

officielles de type « senior meeting ». L’accord sur ce projet est donc total.

Ce projet est particulier en ce qu’il est le premier projet labellisé par l’Union pour la

Méditerranée.

De quelle façon la France s’est-elle impliquée dans ce projet ?

La France, par le biais de son Premier Ministre, lors d’une intervention publique au 6e forum

mondial de l’eau Marseille, s’est engagée sur une participation française à hauteur de 10

millions d’euros au projet

Il faut cependant faire attention à plusieurs choses. Tout d’abord la France ne décaissera que

si les règles sont suivies scrupuleusement. De plus même si la promesse de donner 10

millions d’euros a été faite plusieurs fois on parle bien à chaque fois des mêmes 10 millions,

pas d’une nouvelle dizaine s’ajoutant à celle de la promesse précédente.

Quelle est la position d’Israël sur ce projet à Gaza ?

En 2011 un document qui présentait le projet avait circulé et les Israéliens avaient donné leur

feu vert. Le document a été refait selon le « template » Union pour la Méditerranée à deux

reprises et envoyé à toutes les parties. Israël a donc été informée à chaque étape du projet et

n’a jamais mis son véto.

On parle ici d’une diplomatie technique, qui comprend un nombre assez important de

moments de négociation dans un cadre informel, et politique à la fois, la co-présidence

française est arrivée à les mélanger. Ce ne se serait pas fait automatiquement, il a fallu

« mettre les mains dans le cambouis »,

Ne peut-on pas malgré toutes les avancées que vous décrivez observer une certaine lenteur ou des

obstacles en ce qui concerne ce projet à Gaza ?

l’UpM est fondée sur le consensus ce qui impose un rythme en conséquence : le démarrage

qui a permis de mettre en place une organisation et des méthodologies solides a été long : On

peut ainsi observer par exemple que le Sommet de Paris qui a lancé l’Union pour la

Méditerranée s’est fait en 2008, et qu’on ne s’est mis d’accord sur un template UPM en avril

2011, le premier vrai Template réalisé étant la désalinisation de Gaza, encore plus tard.

[1] Délégation interministérielle à la Méditerranée, Instance de réflexion rattachée au Premier

ministre français et spécialisée sur la Méditerranée

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Annexe III.3 Graphique illustrant la nécessité écologique d’une intervention à Gaza pour préserver

l’aquifère

Source : « Fact sheet » de l’UpM disponible à l’adresse URL http://ufmsecretariat.org/wp-

content/uploads/2011/07/Gaza-Desalination-Project-Fact-Sheet-14-May-2012.pdf

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Annexe III 4 : Niveau d’eau et d’intrusion saline dans l’aquifère côtier de Gaza en 2000, 2010, et

selon des prévisions en 2020

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Sources : Brief projet UpM de février 2012 se fondant sur un rapport CSO-G de 2011, commandité

par les autorités palestiniennes, d’après des données de la « Coastal Municipalities Water Utility »

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Annexe III 5 : Emploi du temps de la rencontre des participants au fonds du 13 février 2012

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Annexe III 6 : Liste des intervenants lors de la rencontre des participants au fonds du 13 février 2012

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Annexes III.8 : INTERVIEW WITH Mr.Fuad Bateh, Senior Adviser on Environment and Water in

The Secretariat of the Union for the Mediterranean.

Questions :

1-What have been your mandate and your contribution to UfM?

The mandate of the Secretariat is to identify and submit to the UfM Senior Officials for political

endorsement ("labeling") projects that respond to the objective of promoting regional, sub-regional,

and transnational projects . . . or national projects under regional frameworks or strategies. To date,

the Palestinian managed Division of Environment and Water have the largest number of labeled

projects at 6 more than any other Division. My contribution has been to help build the Division and

label project for which we then support the project's development and implementation.

2-Which of the Water projects have you been following?

I serve as the project manager responsible for supporting the promoters in the development of the

Desalination Facility for the Gaza Strip and the implementation of the Governance & Financing for

the Mediterranean Water Sector project, as well as shepherding a new project proposal on Water

Integrity in the MENA Region promoted by SIWI that will go to the UfM Senior Officials for

consideration on 4 December.

3-Do you consider the projects as suitable for the needs of the population concerned? Does the

specific cultural specificities and capabilities of the population been taken into consideration?

Yes, but there is always room for improvement. The Desalination project is the priority infrastructure

project in the Palestinian water sector, and before the UfM there was no single champion of the

project. The Governance & Finance project comes at a time when there was a complete slow down of

investments in the water and sanitation sector following the political instability of the Arab spring that

had a chilling effect on donors and other sources of financial flows. It is a project meant to help

create a better enabling environment for an increased amount of infrastructure investments in the

water and sanitation sector in the future. On the other hand, as a new institution the Secretariat had to

respond to a political demand to label projects, and therefore the organization selectivity of projects is

definitely improving as the organization matures and builds-up its own human resources.

To answer the second question, I would think it is naturally built in because at the end of the day a

project cannot be labelled unless it has received support letters from the direct beneficiaries, as well as

all 43 member states must approve the project concept. There is always room to improve our own

awareness of cultural sensitivities, but please note that it is the project promoters who design the

projects. Of course, an important criteria for considering any project is the project contribution to

building human capacity in the member states.

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4-What are your views on the Gaza desalination project? What are the difficulties relating to its

advancement?

In 2003, the United States withdrew from implementing the exact same desalination plant project for

political reasons, and in 2005 the United States withdrew from implementing the parallel North-South

Water Carrier again for political reasons. Since that time, it has not been possible for the Government

of Palestine to find any single donor (including UN or World Bank) willing to take on a project of this

scale. The UfM has provided a multilateral platform where 43 states has political endorsed the

project, and the Secretariat has worked hard to build a consortium including the EC, EIB, ISDB,

UNEP, and World Bank to advance the project's technical preparation and financial support. The

difficulties - Beyond the obvious political challenges related to the Gaza Strip, major difficulties are

keep such a broad based consortium moving in the right direction, also the capacity of Palestinian

institutions and personnel to follow this complex project along with the many other development

projects ongoing in Palestine.

5-In your opinion, have the different actors involved been able to coordinate properly? What

have been the major obstacles faced?

It is always a challenge, as individuals and institutions always are subject to their own interest and

agendas.

6-Do you think that the changing political leadership in the European Union and France has

had an impact on the Union?

I would say that France was the 1st country to make a political/financial commitment when it pledged

10 Million Euros to the Desal project on the occasion of the 6th World Water Forum, but

subsequently France has not engaged in the technical preparation of the project. The European

Commission has already mobilized 4 Million Euros so EIB can undertake the technical preparation of

the Desalination plant, as well as the political support letter provided by Lady Ashton . . . but

Governments and institutions are comprised of many individuals that also have a diversity of opinions

and commitment levels.

7- What about the financing of the projects? Does it reflect the North-South relations?

I believe so in regard to the Desal project, indeed the Arab Gulf has pledged 50% and positive

expressions of support have been received from Algeria, Turkey among others. Indeed, the question

comes whether the EU and western countries will match the Gulf funds. However, I am not aware of

the level of financial commitment of the South in other UfM projects. One could always point to in-

kind contributions of the beneficiaries.

8-What are in your opinion on the future of the UfM for the water cooperation? Is an integrated

strategy still an option?

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There is a large opportunity for the UfM because of its political nature. I don't believe there now

exists any opportunity for a Mediterranean Water Strategy given the political impediments and the

long time since it was prepared. . . but we can pleased to see the development of a Western

Mediterranean Water Strategy under the 5+5 political platform that reflects progress on a sub-regional

basis.

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Annexes 4.1: Interview Dr.Fadi Comair

Interview Dr.Fadi Comair(LIBAN)

L’ENJEU DE L’EAU

L’idée d’Union pour la Méditerranée a été lance par la France en 2008. L’appellation qui avait été

prévue par la France était : l’Union de la Méditerranée. Mais l’Union Européenne a fait pression pour

que ce soit plutôt « l’Union pour la Méditerranée » qui fait moins référence à une union régionale.

Un des premiers moments forts de la mise en place de la coopération dans le domaine de l’eau fut

la ministérielle de 2008, qui a pris place en Jordanie et au cours de laquelle les ministres de l’eau de

la région se sont réunis en présence du ministre français Jean Louis Borloo. Lors de cette première

réunion, le mandat a été lancé pour la préparation de la stratégie méditerranéenne de l’Eau.

La deuxième réunion de Barcelone en avril 2010 fut l’occasion d’une première discussion de la

stratégie. Il y a eu à ce moment deux blocages : l’un de la part de la Turquie et l’autre de la part des

Israéliens.

Le premier problème turc a concerné la référence à la convention des nations Unis 1997 et fait

référence au partage équitable et raisonnable des eaux, que la Turquie n’a pas ratifiée, puisqu’elle

tient d’une main de fer le robinet du Tigre et de L’Euphrate.

Le second problème israélien est bien évidemment la référence faite aux territoires sous

occupation. Pour ces raisons, la Turquie et Israël n’ont pas voté la stratégie. Les partenaires arabes

ont donc fait bloc contre la Turquie et Israël et j’ai ensuite proposé de faire allusion à la convention

des Nations Unies uniquement pour les pays qui ont ratifié la convention, et concernant le problème

israélien, j’ai proposé d’utiliser le terme « territoires occupés » plutôt que « sous occupation ». Mais

la Turquie n’a pas accepté la première proposition et Israël la seconde. Le vote se faisant à

l’unanimité, la stratégie n’est pas passée. C’est ainsi que d’une stratégie régionale nous sommes

passé à une politique de projets.

Quels sont, à votre avis, les obstacles réels qui posent problème aujourd’hui ?

Plusieurs obstacles, lies au mécanisme de gouvernance, posent problème. D’abord, le vote à

l’unanimité. La Turquie et Israël régissent la politique de la région. En ce qui concerne l’exemple de

l’eau, Israël se situant à l’aval du fleuve du Jourdain ne veut absolument pas déclarer la Palestine

territoire occupée car elle devra partager l’eau de manière juste. Aujourd’hui Israël consomme 300

litres d’eau par habitant alors que la Palestine n’en consomme que 20.

Le second obstacle est indéniablement l’instabilité régionale. Un exemple qui reflète bien cette

difficulté est le fait que la France avait donné à Moubarak la présidence de l’UPM et peu de temps

après, son régime en place en Egypte était renversé. Et jusqu’aujourd’hui la guerre se perpétue en

Syrie et en Irak. L’idée de départ est lancée par les français, et pour cela, il faut un engagement clair

et fort de sa part. Faute de position de force, c’est l’Union Européenne qui préside l’UPM.

Le troisième obstacle est financier. De même, l’intégration de la Ligue Arabe en tant que membre

dans l’Union aux côtés des autres pays fait de la concertation et des négociations des exercices

beaucoup plus complexes. Etant donné que les intérêts sous-jacents cette organisation sont

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différents des intérêts propres aux états, les négociations s’avère beaucoup plus laborieuses et

complexes. Vous voyez bien que ce système de gouvernance est en quelques sortes asphyxié.

C’est pourquoi, on assiste aujourd’hui aux discussions de type 5+5 qui s’effectuent directement

entre les pays de l’Afrique du Nord et les pays du Nord. Le Proche Orient est ainsi marginalisé alors

que, dans un contexte politique de plus en plus précaire, il faudrait une volonté politique claire qui

soutienne la paix dans la région.

Quant à la stratégie de projets, il s’agit de permettre à chaque pays de propose des projets, qui

seront ensuite labélisé par l’UPM. Un des premiers projets qui a été labélisé est le CIF : le centre

régional d’information et de formation aux métiers de l’eau. Lancé par le Liban, il a été labélisé en

mai dernier. Une fois de plus, les rouages du système de gouvernance que j’ai présentés sont à

l’œuvre : L’intervention de la Ligue arabe, la méconnaissance de la région par les pays du Nord, les

problèmes de financements, ainsi que l’instabilité politique ont considérablement retardé la mise en

place effective du projet. Finalement, le projet sera mis en place au Liban, qui met à disposition le

terrain, l’AFD et l’UPM finance l’équipement.