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Le Mémorial de Plötzensee

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Le Mémorial dePlötzensee

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Brigitte Oleschinski

Le Mémorial dePlötzensee

Une publication duMémorial de laRésistance allemandeBerlin

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Vue aérienne, avant 1945

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Plötzensee :Lieu du martyre – lieu du crime

« Ici, entre 1933 et 1945, sous la dictature hitlérienne,des centaines de personnes ont été assassinéessur décisions de justice, payant de leur vie leur combatcontre la tyrannie, pour les droits de l'homme et leslibertés politiques. Ces condamnés venaient de toutesles couches de ia société et de presque toutesles nations.Par ce Mémorial, Berlin honore les millions de victimesdu IIIe Reich diffamées, maltraitées, emprisonnéesou assassinées en raison de leurs convictions politiquesou religieuses ou de leur appartenance raciale. »

Le bâtiment des exécutions1965

En haut à droite :Mur du souvenir et urne contenantde la terre des anciens campsde concentration

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« Habituellement, le bourreau venait deux fois par semaine. Ils'appelait Roettger. Il se faufilait plutôt qu'il ne marchait. Il étaittoujours vêtu d'une veste trois quarts. Que pouvait-il se passeren lui ? Il en avait exécuté des milliers. Des innocents. Il touchait80 marks de prime par tête. Et des rations de cigarettes enplus. Il en avait toujours une à la bouche. Ses assistants étaientgrands et forts. Il leur fallait hisser sur l'échafaud les victimesaux mains liées dans le dos!

Deux gardiens conduisaient le condamné de la cellule au bâti-ment des exécutions! Chacun d'eux recevait huit cigarettes. [...]La Maison de la mort était dirigée par un nommé Appelt, queles détenus surnommaient le renard. Il se faisait un plaisir d'ap-paraître brusquement pour contrôler les liens. Il était constam-ment sur le qui-vive.»

Que reste-t-il aujourd'hui ? Pas grand-chose. Un passage longet large mène à une cour, au milieu de laquelle se dresse unmur gris, monument dédié «Aux victimes de la dictature hitlé-rienne 1933-1945». Dissimulé derrière lui s'élève un entrepôten brique rouge, divisé en deux salles. Une poutre en fer garniede cinq crochets relie les murs nus de l'une d'elles.

Voilà tout ce qui reste de l'ancien bâtiment des exécutions ca-pitales de la prison de Berlin-Plötzensee. Seule la connaissancedes événements qui s'y sont déroulés permet de prendre con-science de l'horreur qui a enveloppé ce lieu. C'est dans cetentrepôt d'apparence modeste qu'entre 1933 et 1945, plus dedeux mille huit cents personnes ont été mises à mort par laguillotine ou par pendaison. Beaucoup d'entre elles étaient desadversaires de la dictature nationale-socialiste, condamnés parle Tribunal du Peuple et par d'autres tribunaux pour leur oppo-sition au régime. Certaines faisaient partie de groupes de résis-tance communistes, d'autres des structures oppositionnellesdu réseau Harnack/Schulze-Boysen, du Cercle de Kreisau etde la conjuration du 20 juillet 1944. Mais il y eut également d'au-tres victimes, condamnées par la justice allemande pour desdélits insignifiants, et de nombreux prisonniers originaires despays européens occupés, qui durent mourir en ce lieu.

Le souvenir appellel'interrogation

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Située près du lac qui lui a donné son nom, la prison de Plöt-zensee a été construite entre 1869 et 1879. Les bâtiments enbrique nue s'élevaient sur un terrain de plus de 25 hectares etétaient entourés d'un mur de six mètres de haut. Les logementsde fonction du personnel se trouvaient à l'extérieur de l'encein-te. L'établissement comprenait cinq bâtiments de détention detrois étages, d'une capacité de mille quatre cents détenus en-viron. Il était construit selon le système panoptique qui permetune bonne surveillance grâce à des plafonds dotés d'une ou-verture centrale et à une disposition cruciforme des bâtiments.Avec les centres de travail, la chapelle et les cours intérieuresentourées d'un mur, les bâtiments carcéraux formaient unmonde à part, régi depuis toujours par une surveillance et unediscipline sans faille dans la tradition militaire prussienne. Raresétaient les personnes du «dehors» qui savaient ce qui se pas-sait derrière les hauts murs de Plötzensee.

Entrée principalede la prison de Plötzensee,1950

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Sous le national-socialisme, le système pénitentiaire classiquese mue, à côté du nouveau régime concentrationnaire extra-judiciaire, en instrument politique de répression et de mise àl'écart des «ennemis du peuple». Surpopulation carcérale, exer-cices militaires et sous-alimentation constituent le quotidien despénitenciers et des prisons du IIIe Reich. Mais les souffrancesdes détenus ne trouvent pas d'écho dans une opinion publiquemise au pas. La raison à cela réside non seulement dans unehabile propagande nazie présentant sans distinction les déte-nus comme des «étrangers a la collectivité» ou des «profes-sionnels du crime», mais aussi dans les préjugés tenaces d'unegrande partie de la population, partisan instinctif d'un régimecarcéral répressif. Les juges, indépendants aux termes de laConstitution du Reich, ne peuvent ou ne veulent pas soustraireles opposants politiques à la répression menée par l'État. Despeines draconiennes et l'assimilation délibérée des délits poli-tiques aux délits criminels deviennent la règle. De plus en plussouvent, et de plus en plus facilement, les tribunaux allemandsrequièrent la mort. Le nombre de condamnations à la peinecapitale entre 1933 et 1945 s'élève à au moins 16560, dont11881 sont exécutées jusqu'à la fin 1944. Près d'un quart desexécutions ont lieu à Plötzensee.

Plan de la prison dePlötzensee ;à droite de «Gefängnis III»(bâtiment de détention)«Entrepôt», lieu des exécutions,vers 1935

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Urne contenant de la terredes camps de concentration,en souvenir des victimes,1956

Les victimes sont des personnes de toutes origines sociales etpolitiques, dont les projets, le comportement et les idées nes'accordent pas avec le système national-socialiste. Beaucoupne sont connus que par leur nom inscrit au fichier des exécu-tions. Toujours donnée par pendaison ou par décapitation, lamort constitue la dernière et terrible phase d'une procédureimplacable, réglementée jusque dans les moindres détails, etqui subit une «rationalisation» croissante au fur et à mesurequ'augmente le nombre des exécutions. C'est ainsi qu'à lasuite des bombardements de septembre 1943, cent quatre-vingt-six prisonniers sont pendus en une seule nuit afin deprévenir les évasions de la prison à moitié détruite (documentspages 56 à 63). Et à peine un an après, s'ajoutent aux nom-breuses autres victimes les auteurs de l'attentat manqué du 20juillet 1944 et leurs complices, dont Hitler fait filmer la fin atroce.

Le Mémorial de Plötzensee se trouve dans et autour de l'ancienbâtiment des exécutions, au milieu des établissements dedétention modernisés de la Justice berlinoise. Les bâtimentsendommagés pendant la guerre ont été rasés – parmi lesquelsle bâtiment III où les condamnés passaient leurs dernières heu-res avant l'exécution – ou réparés et complétés plus tard pardes installations neuves.

Les premiers projets de monument et de mémorial remontent àl'été 1946. Un concours est alors organisé par la Commissioncentrale des Victimes du fascisme de la Municipalité de Berlin.En février 1947, les projets sont présentés dans la Salle blanchedu Château de Berlin sans qu'aucun ne soit réalisé. Ce n'estqu'en 1951 que le bâtiment des exécutions et le terrain l'entou-rant est détaché de la prison et transformé en mémorial et enlieu de recueillement. Le portail d'entrée en fer forgé du Hüttig-pfad, flanqué de deux grands piliers en pierre, s'ouvre sur unlong passage qui débouche sur une cour surélevée de troismarches. Dans celle-ci s'élève un mur commémoratif en pierrestaillées, portant l'inscription «Aux victimes de la dictature hitlé-rienne des années 1933-1945» et derrière lequel se trouve lebâtiment des exécutions. Au nord-ouest de la cour se dresseune grande urne de pierre, portant l'inscription «En hommageaux victimes des camps de concentration». Le bâtiment lui-même, une construction en briques sans étage, au toit faible-ment incliné, comprend deux salles. Les exécutions avaient lieudans celle du nord, aujourd'hui salle commémorative. La sallecontiguë contient une documentation sur la pratique de la jus-tice nazie. Le Mémorial a été inauguré le 14 septembre 1952.

Il est essentiel que soit rappelé, à l'emplacement même oùs'élevait le dépôt des condamnés à mort de Plötzensee, le sou-venir de toutes les personnes assassinées par la justice natio-nale-socialiste. Pour autant, il convient naturellement de ne pasmasquer les divergences profondes qui sous-tendaient les in-tentions et les actes des victimes. Ni les buts politiques, trèsdiversifiés et souvent antagonistes, qu'elles poursuivaient, ni lesraisons de la répression par le régime nazi, différant selon

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l'époque et la cible visée, ne permettent de les placer purementet simplement sur le même plan. Aujourd'hui comme hier, ledestin des individus appartenant aux cercles dissidents et auxréseaux clandestins de la Résistance suscite de lourdes inter-rogations sur les limites de l'engagement politique et de la res-ponsabilité individuelle. Dans ces destins se reflètent les mille etune facettes du comportement de la société allemande pen-dant et face à la dictature nationale-socialiste, qui vit souventétroitement cohabiter soumission et résistance, adhésion et re-fus, inconscience et impuissance.

Cinquante ans après la fin de la guerre, un grand nombre demonuments et de mémoriaux allemands honorent la mémoiredes victimes du nazisme. Pourtant, au fur et à mesure ques'agrandit le recul historique, la catastrophe du IIIe Reich appa-raît de moins en moins réelle aux yeux de la majorité des gens.Un nombre croissant d'entre eux met en doute la nécessitéde perpétuer au bout de plusieurs décennies le souvenir descrimes allemands commis par millions dans toute l'Europeet refuse d'être identifié à un passé que les événements del'après-guerre dans les deux États allemands semblent avoirrendu caduc et racheté.

Bâtiment des exécutions,à l'arrière-planles ruines du bâtiment III,vers 1950

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Pourtant l'horreur suscitée par la terreur nazie perdure en Alle-magne et à l'étranger. Les cicatrices de la Seconde guerremondiale continuent de marquer le présent des voisins euro-péens. Aujourd'hui encore, nous pouvons discerner dans notrepropre famille, notre propre ville, notre propre pays l'entrelacsdes culpabilités et des défaillances. Partout en Allemagne, au-jourd'hui comme hier, on trouve encore, à côté du rejet évidentdes crimes nazis, les traces d'une approbation tacite et desurvivances de cette époque. La xénophobie et l'antisémitismemilitants s'inscrivent dans cette continuité.

La majorité des Allemands d'aujourd'hui réprouvent sans aucundoute l'oppression des opposants politiques et des minoritésethniques pratiquée en son temps par le régime national-socia-liste. Bien souvent, cependant, le lien n'est pas établi avec lesorigines d'un système qui n'est pas tombé du ciel, mais quis'est développé progressivement au sein de la société alle-mande de la République de Weimar, favorisé par les erreurspolitiques et les illusions nationalistes, à une époque de grandedétresse sociale. Acteurs et profiteurs, complices et specta-teurs venaient tous des mêmes quartiers et des mêmes villes,d'où sont également originaires les premières victimes. Dès ledébut, les nazis ont utilisé envers les dissidents non seulementla force brutale mais aussi les moyens juridiques et administra-tifs d'un État de droit bureaucratisé, autoritaire, et politiquementpartial. Considéré sous cet aspect, le Mémorial de Plötzenseen'est pas seulement un lieu dédié au souvenir des victimes, iléclaire également à travers leur destin les agissements desresponsables, bureaucrates et magistrats. Ce sont les juges etles procureurs, les fonctionnaires des ministères et des servicesde justice, les bourreaux et leurs assistants qui coupèrent le lienunissant le droit et la légalité à la dignité de l'homme, à la libertéet à la démocratie et les mirent au service de la dictature nazie.De ces aspects-là aussi, il doit être question lorsque nouscommémorons la mémoire des victimes.

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Lorsqu'en janvier 1933, Adolf Hitler est nommé chancelier d'ungouvernement de coalition, le régime démocratique de la Ré-publique de Weimar existe encore. Bien que la pratique desdécrets d'urgence et des ententes secrètes entre partis natio-nalistes-conservateurs ait dans une large mesure rendu cadu-ques les règles parlementaires, le NSDAP ne dispose pas demajorité au Reichstag et n'a pratiquement aucune influencedans les administrations d'État. Seule la fatale interaction entrela terreur tolérée des «bataillons bruns» et la «mise au pas» vo-lontaire de nombreuses institutions établissent définitivementles nazis au pouvoir. Outre les hommes politiques et les militai-res, les juristes et les cadres administratifs jouent un rôle déter-minant. Grâce à eux est instauré, accepté et mis en pratique le«droit national-socialiste» qui transforme l'Allemagne en unenasse mortelle pour tous ceux qui n'ont pas les bonnes idéesou qui appartiennent à une race indésirable.

Dès le début, le «droit national-socialiste» n'a rien de communavec la légalité d'un État de droit classique. Les nouvelles loisne se fondent plus sur la Constitution du Reich et ne possèdentaucune légitimité parlementaire, mais reposent sur des sourcesde droit telles que la «volonté du Führer» ou la «vision natio-nale-socialiste du monde». Utilisant leurs décrets et leurs or-donnances comme arme contre les dissidents, les étrangers etles opposants politiques, les soi-disant gardiens du droit récla-ment une rupture totale avec le régime constitutionnel « ultra-libéral» de Weimar: «Le concept entier des droits fondamen-taux, de l'opposition entre individu et État, l'idée d'une sphèrede liberté individuelle originelle et inviolable [...] est en opposi-tion fondamentale aux conceptions nationales-socialistes.»Par conséquent, la seule finalité du droit nazi est de « préserverl'ordre concret de la collectivité nationale, d'éliminer les per-sonnes nuisibles, de sanctionner les comportements dange-reux pour la collectivité et d'arbitrer les litiges entre les membresde celle-ci».

La transformation en dictature du régime démocratique de Wei-mar, déjà sévèrement ébranlé, a lieu en 1933 à la manière d'une« révolution légale » au cours de laquelle se manifeste la funesteinteraction de la légalité et la terreur. Violant de facto l'espritet la lettre de la Constitution, les partis encore représentés auReichstag - à l'exception du SPD - votent le 24 mars 1933 la«Loi portant remède à la détresse du peuple et du Reich». Lesmandats du P.C.A. ont déjà été invalidés et de nombreuxdéputés communistes emprisonnés. Cette «loi de pleins pou-voirs» habilite le gouvernement à légiférer sans contrôle parle-mentaire et jette un «pont entre l'ancien et le nouvel État», saluéouvertement par le philosophe du droit Carl Schmitt en 1934 :«Cette transition dans la légalité a été d'une grande impor-tance. Car [...] la légalité [est] un mode de fonctionnement del'administration et des services de l'État et revêt à ce titre unesignification politique et juridique.»

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La justicesous le nazisme

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La «loi de pleins pouvoirs» abolit le système républicain deslibertés publiques, déjà suspendu par l'«Ordonnance du Prési-dent du Reich pour la sauvegarde du peuple et de l'État» du 28février 1933. La liberté individuelle, la liberté d'expression etd'autres droits fondamentaux n'ont plus cours. Une vague d'ar-restations et de persécutions sans précédent commence, frap-pant les communistes, les socialistes, les juifs, les sociaux-démocrates, les syndicalistes et d'autres personnes jugéesgênantes, notamment des responsables politiques et des dé-putés. En maints endroits, des commandos SA (Sturmabteilung= section d'assaut) sont officiellement élevés au rang de policeauxiliaire et peuvent enlever, maltraiter et assassiner leurs vic-times sans rencontrer d'opposition notable de la part de lapolice ou de la justice. Cette dernière ne réagit que pour dé-fendre ses propres intérêts. Certains présidents de tribunauxmanifestent ainsi leur indignation en 1933 devant les agressionscommises par les SA dans des palais de justice contre desjuges et des avocats juifs. Cependant, aucune protestation nese fait plus entendre lorsque la destitution des fonctionnairesjuifs est entérinée par la « Loi sur le rétablissement de la fonctionpublique» du 7 avril 1933.

Les fonctionnaires de la Justice et de l'Administration partagentl'enthousiasme d'une grande partie de la population allemandeau sujet du «sursaut national». Une attitude, très répandue, desoumission à l'autorité de l'État étouffe tout esprit critique. Bienque l'idée nazie du droit diffère de la conception traditionnellede leur métier, la plupart des fonctionnaires se soumettent sansregret au nouveau système juridique. Peu d'entre eux sont ha-bitués à faire preuve de courage civique. Plus il devient évidentque l'avancement professionnel dépend désormais de la «fidé-lité inconditionnelle» au «Führer», plus nombreux sont ceux quichoisissent la voie de la soumission, voire du «dévouementspontané». Ils sont confortés dans cette attitude par la «loi surl'unité du Parti et de l'État» du 1er décembre 1933, qui placetoute entière au service du NSDAP la fidélité traditionnelle desfonctionnaires, son article premier stipulant « À la suite dusuccès de la révolution nationale-socialiste, le Parti national-socialiste ouvrier allemand est l'incarnation de la conception del'État en Allemagne auquel il est irrévocablement lié».

La justice joue un rôle particulier dans l'établissement et la con-solidation de la dictature nazie, des tendances déjà anciennesdans les domaines du droit pénal et du système pénitentiairese recoupant avec les nouveaux instruments du droit policiernational-socialiste. En témoignent les ordonnances d'interne-ment de sûreté (Schutzhaft) édictées par les ministres del'intérieur des Länder, qui permettent à la Police secrète d'Étatde détenir tout individu pendant une période illimitée en campde concentration ou en prison, sans décision ni contrôle judi-ciaires. Pour ces personnes, l'invocation par la justice des prin-cipes de l'État de droit est vain dès le début. Ni les tribunaux nil'administration judiciaire ne peuvent limiter les pouvoirs de lapolice politique, des SA et des SS. Au lieu de cela, les hauts

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fonctionnaires du ministère se lancent dans la répression desopposants politiques et des dissidents en élaborant un nouveaudroit pénal politisé, afin d'élargir leur influence dans la lutte con-tre les « ennemis du peuple». Souvent, la fixation de la peine sefonde non plus sur le résultat réel de l'acte, c'est-à-dire sur ledommage intervenu, mais sur la «volonté criminelle», qui peutêtre concrètement une tentative ou une simple intention depassage à l'acte. De même, les motifs politiques sont consi-dérés comme circonstances aggravantes.

À partir d'avril 1933, une cour spéciale (Sondergericht) est crééedans chaque ressort de tribunal supérieur du Land (Oberlan-desgericht), en concurrence avec la Gestapo et les camps deconcentration. Un an plus tard est instauré le Tribunal du Peu-ple chargé, comme les cours spéciales, des délits politiques.Il constitue la première étape de la restriction généralisée desdroits de procédure des accusés et de leurs défenseurs, pra-tique étendue ultérieurement aux autres tribunaux. Les coursspéciales ne sont plus tenues à l'instruction préliminaire et à lanotification de l'acte d'accusation. Les juges reçoivent pouvoirde rejeter les offres de preuve à décharge. À partir de 1935, lesmoyens de recours utilisés en faveur de l'accusé peuvent en-traîner une aggravation de peine. À partir de 1939 s'ajoute lapossibilité de casser les jugements trop «indulgents» par lebiais d'un «appel extraordinaire» de l'exécutif et d'ordonner unnouveau procès afin d'alourdir la peine.

Cependant, il ne s'agit pas seulement d'une répression arbi-traire et idéologique d'idées politiques dissidentes. Dès 1933, lechangement affecte également la condition des autres détenusdes pénitenciers et des prisons dépendant de l'administrationde la Justice. La vive discussion sur une réforme du systèmepénal menée sous la République de Weimar, qui faisait unelarge part à la réinsertion et aux progrès des détenus, cède laplace à une pratique démagogique de rigueur basée sur la dis-suasion, le châtiment et la vengeance. La croyance selon la-quelle la dureté des peines aurait abouti à une nette baisse dela criminalité est cependant démentie par les statistiques, quimontrent une réduction limitée à quelques délits. Manifeste-ment, ce sentiment provenait de la censure et de l'orientationpolitique des informations concernant la criminalité. Il en a ré-sulté une impression de sécurité dans la mémoire des contem-porains.

Une rigueur draconienne caractérise la vie dans les prisons duIIIe Reich. L'arrivée au pouvoir d'Hitler marque le début d'uneère de tourments pour les détenus. Bien que les prisons etpénitentiers ne connaissent pas les mauvais traitements etassassinats qui sont la règle dans les camps de concentration,les conditions y deviennent intenables du fait de l'aggravationdu règlement des arrêts, de la qualité déplorable de la nourri-ture, des exercices militaires imposés pendant le temps libre,de la mauvaise hygiène, des brimades de toutes sortes et dela surpopulation. Le régime carcéral conserve une partie des

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Couloir et cellules à la prisonde Plötzensee

règlements en vigueur auparavant ainsi que la plupart du per-sonnel en fonction du temps de la République de Weimar.Beaucoup de gardiens font preuve d'une grande dureté avecles prisonniers politiques. Pour les nazis, seule une minorité dedétenus est «récupérable» et susceptible de réintégrer la«collectivité populaire» au sortir de prison. La majorité, en pre-mier lieu les condamnés politiques et les «criminels multirécidi-vistes», ainsi que les «asociaux», doivent redouter la poursuitedes persécutions à la fin de la détention ; la plupart seront dé-portés en camp de concentration, les multirécidivistes placésen détention spéciale étant assassinés en même temps que lespensionnaires des centres de soins psychiatriques.

Le déclenchement de la Seconde guerre mondiale entraîne unefois de plus une nette détérioration des conditions de vie dansles établissements carcéraux. Douze heures de travail par jour,une intensification des exercices militaires et une dégradationde l'alimentation deviennent rapidement la règle. L'escaladesystématique de la tuerie sur les fronts endurcit également lepersonnel pénitentiaire en Allemagne. La pression de l'écono-mie de guerre se traduit par un renforcement de la sélection desprisonniers, dont seule une fraction a encore une chance desurvie. Beaucoup d'autres sont délibérément abandonnés àl'extermination par la famine, la maladie et l'épuisement. Pa-rallèlement à la création de camps d'extermination dans lespays occupés de l'Est et aux massacres commis en de nom-breux endroits d'Europe, la terreur nazie se développe en Alle-magne même. Dans les administrations d'État, on cesse decomprendre que l'extension permanente des «mesures» con-cernant l'Allemagne et l'étranger signifie la mort de centainesde milliers de personnes. Aux yeux des fonctionnaires, les vic-times n'ont aucune valeur. Elles sont des «juifs», des «mar-xistes», des «étrangers», des «parasites», des «ennemis del'État», des «ennemis du peuple». Une réglementation de plusen plus implacable précipite leur exclusion et leur destructionphysique, auxquelles l'appareil judiciaire tout entier prête sonconcours. Dans les seules années de guerre, 15860 peines ca-pitales au moins sont prononcées par les tribunaux répressifscivils en Allemagne. Ces crimes n'ont pas été commis par lesSS et la Gestapo, mais par des juristes et des fonctionnairesde justice, dont la légalité de l'action a été reconnue par la Ré-publique fédérale. Les plus de trente mille sentences de mortprononcées par les tribunaux de la Wehrmacht ont aussi étépassées quasiment sous silence. À cela s'ajoute le nombre in-calculable d'assassinats perpétrés par les SS et la Gestapodans les camps de concentration et les prisons de la police.

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«Il faut veiller - par la propagande et par une intervention de lahaute administration de la justice - à informer la Nation quel'État est décidé à éliminer par les moyens les plus barbarestoute tentative de trouble. Il ne faut pas perdre de vue que la va-leur de la vie humaine au front est toujours sous-estimée, celledes mauvais éléments surestimée et que cela est dangereux.Le juge est garant de la perpétuation de la nation. [...] Si, d'unautre côté, je n'extermine pas sans hésiter cette vermine, celafinira un de ces jours par une crise. Il y a des comportementscriminels qui excluent un homme de la collectivité. [...] Il faut enfinir une fois pour toutes avec l'idée que le juge est là pour direle droit même si tout doit s'écrouler autour de lui».

Plötzensee est le lieu où se sont concrétisées ces menacesd'Hitler, proférées au cours d'une réunion de travail avec sonministre de la Justice, le 20 août 1942.

La peine de mort devient l'une des armes les plus redoutablesde la justice nationale-socialiste. Bien qu'elle existât déjà avantla prise du pouvoir des nazis en 1933, il en était fait un usagemodéré depuis la moitié du XIXe siècle, généralement unique-ment en cas d'assassinat. Pendant les quatorze années de laRépublique de Weimar, mille cent quarante et une condamna-tions à mort sont prononcées dans toute l'Allemagne, dont centquatre-vingt-quatre sont exécutées. À cette époque, des ex-perts de renom, remettant en question le bien-fondé éthiqueet l'utilité de la peine capitale dans la lutte contre la criminalité,réclament son abolition. Démagogiquement, des nazis telsqu'Alfred Rosenberg et Roland Freisler revendiquent le droitillimité pour l'État d'effectuer une «épuration» politique par la«corde et le gibet» afin de «débarrasser» la société des «typesétrangers et des manifestations étrangères à l'espèce». Cecivaut au NSDAP un large soutien dans l'électoral. Lorsque Hitlerarrive au pouvoir en janvier 1933, la peine de mort devient uninstrument privilégié pour démontrer la rigueur de l'État et réglerleur sort à ses adversaires politiques.

L'«Ordonnance du Président du Reich pour la sauvegarde dupeuple et de l'État» du 28 février 1933, qui donne pour la pre-mière fois au gouvernement nazi la possibilité de placer la viepublique sous sa coupe dictatoriale, ajoute à la liste des crimespunis automatiquement de mort de nouveaux délits, notam-ment l'atteinte à la sûreté de l'État, l'incendie criminel et le sa-botage. Un mois plus tard est promulguée une loi autorisantl'exécution des sentences de mort par décapitation à la hacheet par pendaison. Par son caractère rétroactif, cette loi violaitl'un des principes essentiels de tout État de droit. À la mêmeépoque sont instaurées les cours spéciales, tout d'abord char-gées de réprimer les délits politiques tombant sous le coup dela «loi anti-malveillance» du 20 décembre 1934, qui sanctionnelourdement les attaques contre le NSDAP, de la plaisanteriepolitique au port illégal d'uniforme. Les cours spéciales et leTribunal du Peuple, créé en mai 1934, ont le pouvoir de con-

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La peine de mortà Plötzensee

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Chapelle de la prison etbâtiment des exécutions (à gauche),au premier plan les ruines dubâtiment III, la «maison des morts»,après 1945

damner à mort. La liste des délits passibles automatiquementou non de la peine capitale va s'allonger au fur et à mesure desnouvelles lois et réglementations.

Un long chemin sépare toutefois les premières mesures prisespar le NSDAP pour mettre sous tutelle les services de la Justiceet les tribunaux des exécutions de masse des années 1943 et1944. Les efforts entrepris pour augmenter le nombre d'exécu-tions parallèlement au nombre de condamnations se heurtentd'abord à des difficultés techniques. Le Reich manque de cen-tres d'exécution permanents. Les fonctionnaires de justicedoivent alors consacrer de longs mois à l'étude des procéduresd'exécution des autres pays et à l'examen des anciennes etnouvelles méthodes de mise à mort. Il faut ainsi deux ans etdemi pour arriver à une réglementation unique de la procédured'exécution, à laquelle le ministère de la Justice est trèsattaché. Finalement, en octobre 1935, une circulaire du ministrede la Justice, Franz Gürtner, fixe une procédure unique pour lesexécutions capitales sur tout le territoire du Reich. La prison deBerlin-Plötzensee faisait cependant déjà partie des centresd'exécution du IIIe Reich. En 1933, le bourreau y avait exécutéà la hache dans une cour les sentences de mort prononcées àrencontre de quatre malfaiteurs. Cette même année, soixante-quatre peines capitales au total sont exécutées en Allemagne(dont quatre à Plötzensee), en 1934, le chiffre est de soixante-dix-neuf (douze à Plötzensee) et atteint déjà quatre-vingt-quatorze en 1935 (dont vingt à Plötzensee).

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À Plötzensee comme ailleurs, les exécutions ont généralementlieu au petit matin. L'annonce doit en être faite aux condamnésla veille au soir par un procureur accompagné de plusieursfonctionnaires de la prison. Un procès-verbal est dressé. Lescondamnés sont ensuite placés sous stricte surveillance dansune des ailes du bâtiment III, la «maison des morts». Plus tard,ils sont menottes et ne reçoivent plus que la visite de leuravocat et de l'aumônier. À l'aube, des gardiens conduisentles condamnés un par un, les mains liées dans le dos, dansl'entrepôt servant aux exécutions, situé directement à côté dubâtiment III. On procède à la lecture du jugement devant lesprésents et l'aumônier peut ensuite dire une courte prière. Puisles assistants du bourreau s'emparent de la victime et l'exécu-teur fait son office. La décapitation proprement dite ne dure quequelques secondes. On dresse alors un nouveau procès-verbalavant de remettre le cadavre à l'Institut d'anatomie et de biolo-gie de l'université Friedrich-Wilhelm de Berlin.

Au cours des années qui suivent, la procédure est considéra-blement réduite et simplifiée. Le 15 octobre 1942, une circulairedu ministre de la Justice interdit la présence des aumôniers,auxquels on devait de précieux témoignages. L'augmentationdu nombre des exécutions impose une procédure plus rapideet plus efficace (documents pages 46 et 47).

Le 28 décembre 1936, Gürtner, ministre de la Justice du Reich,décide, sans même en avertir le service compétent du minis-tère, qui ne sera informé qu'après-coup, que les condamna-tions à mort devront désormais être exécutées par la guillotine.À l'origine de cette décision se trouvait manifestement un ordrepersonnel d'Hitler. Parmi les onze prisons désignées dans unpremier temps pour servir aux exécutions, Plötzensee couvraitofficiellement les ressorts des tribunaux supérieurs de Berlin etde Stettin et de plusieurs tribunaux de grande instance de larégion (document page 43). Parallèlement est institué un règle-ment fixant avec minutie les droits et les devoirs des bourreauxprofessionnels allemands, qui sont tout d'abord au nombre detrois. Aux termes de ce texte, ils perçoivent des appointementsannuels de trois mille reichsmarks et, pour chaque exécution,une rémunération exceptionnelle de soixante à soixante-cinqreichsmarks, qui est également octroyée aux assistants.

Le 17 février 1937, la guillotine, qui provient de l'ancien centrede détention et d'exécution de Bruchsal, est livrée à Berlin-Plötzensee et installée dans l'entrepôt. À partir de ce moment,le nombre d'exécutions augmente rapidement, ici et ailleurs.De 1933 à mars 1940, il s'élève à deux cent soixante-dix-septà Plötzensee. Trois ans après, il y a longtemps que l'exécuteurberlinois ne comptabilise plus ses «prestations» à l'année, maisau mois : cent quatorze en mars, cent vingt-quatre en mai 1943.Fin 1942, on fait en sorte de pouvoir pendre huit personnes enmême temps. Les premières victimes de cette méthode appar-tiennent au réseau de résistance Harnack/Schulze-Boysen.

La guillotine aprèsla libération de la prison parles troupessoviétiques,mai 1945

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Le bombardement de la nuit du 3 au 4 septembre 1943 en-dommage la guillotine et touche sévèrement le bâtiment III oùtrois cents personnes attendent leur exécution. Trois d'entreelles tentent une évasion pendant l'attaque mais sont rapide-ment reprises. Ceci semble justifier une récente circulaire datéedu 27 août 1943, émise par le nouveau ministre de la Justice,Otto Thierack, qui ordonnait l'accélération de l'exécution dessentences de mort en raison des risques d'attaques aériennes.Le 7 septembre 1943, réagissant à un souhait personnel d'Hi-tler, le ministère de la Justice décide de réduire la procédure derecours en grâce selon les recommandations de Thierack etde faire exécuter l'un après l'autre tous les condamnés à mortemprisonnés à Plötzensee. Afin de gagner du temps lors dela communication des décisions d'exécution, les noms sonttransmis par téléphone du ministère de la Justice au procureurcompétent de Plötzensee, qui doit les comparer à ceux figurantsur des listes toutes prêtes. Il s'ensuit de tragiques méprisesqui voient quatre des cent quatre-vingt-six victimes de la pre-mière nuit être exécutées alors que leur recours en grâce n'apas encore été examiné. Les fonctionnaires fautifs peuvent ce-pendant compter sur la mansuétude de leurs supérieurs. Ils neseront pas sanctionnés, «étant donné que les peines capitalesprononcées contre les quatre condamnés auraient dû de toutefaçon être exécutées incessamment». (documents pages 60 à63)

L'aile détruite du bâtiment III, la «maison des morts»,vers 1950

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La guillotine ne pouvant être remise en état avant plusieurssemaines, les détenus sont pendus. Des témoignages ont étérecueillis ultérieurement sur les exécutions de la nuit du 7 au8 septembre, dont ceux des deux aumôniers de la prison, lepasteur Harald Poelchau et son homologue catholique, PeterBuchholz. Harald Poelchau a livré un récit impressionnant deces nuits d'horreur au cours desquelles ont été tuées plus dedeux cent cinquante personnes:

«Le massacre a commencé au crépuscule, le 7 septembre. Lanuit était froide. De temps en temps, l'explosion d'une bombedéchirait l'obscurité. Les faisceaux des projecteurs dansaientdans le ciel. Les hommes étaient rassemblés, alignés sur plu-sieurs rangées. Ils étaient là, ne sachant d'abord ce qui allaitleur arriver. Puis ils ont compris. On les appelait et on les em-menait par groupes de huit. Ceux qui restaient ne bougeaientpratiquement pas. Seules de temps en temps quelques parolesà voie basse échangées avec moi et mon homologue catholi-que. [...] Une fois, les bourreaux ont dû interrompre leur travailà cause des bombes qui s'écrasaient à proximité. Il fallut re-conduire dans leurs cellules les quarante hommes déjà ras-semblés, alignés par huit sur cinq rangées. Puis la tuerie reprit.Ils furent tous pendus. [...] Comme il n'y avait plus de courant,les exécutions eurent lieu à la lumière des bougies. Les bour-reaux, épuisés, ne s'arrêtèrent qu'au matin, à huit heures, pourreprendre leur activité le soir, avec des forces neuves.»

Au cours des mois suivants, la plupart des exécutions sonttransférées au pénitentier de Brandebourg-Görden (documentpage 58). Leur nombre connaît une nette hausse à partir d'août1944, lorsque le Tribunal du Peuple commence à condamnerles auteurs de l'attentat manqué du 20 juillet 1944. Elles sepoursuivent jusqu'aux derniers jours de la guerre. Vingt-huitpersonnes sont encore exécutées le 18 avril 1945, vraisembla-blement le dernier jour. Une semaine plus tard, le 25 avril, lestroupes soviétiques occupent la prison et libèrent les détenus.

Peter Buchholz

Harald Poelchau

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Des hommes en rébellioncontre le nazisme

Les couloirs dubâtiment III,avant 1940

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Les plus de deux mille huit cents personnes tuées à Plötzen-see entre 1933 et 1945 étaient originaires de milieux sociauxet d'horizons politiques et philosophiques très variés. Tous n'é-taient pas des opposants à la dictature nazie, en dépit de leurscondamnations comme prétendus ennemis de l'État. Beaucoupplus que par leurs opinions politiques, leur rébellion contre lenazisme était souvent dictée par des relations humaines ou parun destin personnel. Au delà de cela, cependant, beaucoup ontété confortés dans leur détermination par leurs convictionspolitiques ou religieuses. (document page 65)

Parmi les victimes de la première heure du régime nazi figurentles communistes et les sociaux-démocrates. Des dizaines demilliers de communistes sont arrêtés par la SA et la police à lasuite de l'incendie du Reichstag, dans la nuit du 27 au 28 février1933, et internés dans des camps de concentration provisoiresspécialement créés, où ils sont sauvagement maltraités. Sousla République de Weimar déjà, les nazis avaient incité à la hainecontre ceux qui ne partageaient pas leurs opinions. La violencedélibérée contre l'adversaire en position d'infériorité et sans dé-fense était une pratique courante du «mouvement». Depuis le30 janvier 1933, la loi n'offrait plus aucune protection aux com-munistes, socialistes, sociaux-démocrates, juifs et à tous ceuxque le NSDAP avait désignés arbitrairement comme ses enne-mis.

Dès la prise du pouvoir, la Justice contribue à la répression desadversaires politiques des nazis, poursuivant et amplifiant, àtravers des jugements draconiens envers les membres des or-ganisations communistes et sociales-démocrates, une longuetradition de partialité politique. Les premières exécutions poli-tiques à Plötzensee frappent les communistes. Le 14 juin 1934,Richard Huttig, alors âgé de vingt-six ans, est décapité à lahache dans une cour de la prison. Membre de l'organisationparamilitaire communiste Roter Frontkämpferbund (Ligue desanciens combattants rouges), il est traduit devant la Cour spé-ciale de Berlin pour avoir abattu en février 1933 un dirigeant SSau cours d'une «expédition punitive» menée dans son quartierpar des SS et des SA. La Cour concède dans ses attendus qu'ilest impossible de prouver la culpabilité de Hüttig, qui n'étaitpas armé, mais le condamne à mort le 16 février 1934 pour«atteinte grave à l'ordre public» et «tentative d'assassinat».

Après 1933, de nombreux communistes, socialistes et sociaux-démocrates choisissent la clandestinité. En dépit des persé-cutions incessantes, on maintient localement le contact entremembres d'un même parti, entre personnes partageant desorientations communes, on distribue en secret des tracts et onintroduit clandestinement des publications étrangères en Alle-magne. Ceci conduit la Gestapo, secondée par la SA et la po-lice, à procéder à des séries d'arrestations de grande envergureafin de démanteler les organisations illégales des partis. Lors-que les personnes arrêtées ne sont pas internées en campsde concentration, elles sont remises à la justice pour être con-

Communistes, socialisteset sociaux-démocrates

Richard Hüttig

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Lilo Herrmann

damnées à des peines de prison ou de pénitentier souventexcessivement sévères. Par mesure de dissuasion, les hautsdirigeants des partis sont condamnés à mort, même lorsqueles accusations d'«atteinte à la sûreté de l'État» ou de «hautetrahison» sont infondées selon les critères d'un État de droit.

Adolf Rembte et Robert Stamm sont exécutés à Plötzensee le4 novembre 1937. Membres berlinois de la direction régionaledu P.C.A., ils entretiennent de bonnes relations avec les grou-pes communistes en exil à Moscou et ailleurs. L'accusation de«préparatifs en vue d'attenter à la sûreté de l'État» leur vaut lapeine capitale. Au moment de l'exécution, Stamm a trente-septans et Rembte trente-cinq. Issus tous deux de familles ouvriè-res traditionnelles, ils impressionnent leur entourage par leurdroiture personnelle et la fidélité à leurs convictions. Le pasteurHarald Poelchau racontera plus tard que l'exécution de person-nes telles que Stamm et Rembte, qui n'avaient fait que pour-suivre leurs activités politiques, avait rendu dubitatifs même lesgardiens de prison, pourtant endurcis.

Un autre cas qui provoque la consternation en Allemagne età l'étranger est l'exécution de Liselotte Herrmann, âgée devingt-huit ans et mère d'un fils de quatre ans. Adolescente, ellerejoint la Jeunesse communiste et étudie à partir de 1931 la bio-logie à Berlin. En 1933, elle est renvoyée de l'université Frie-drich-Wilhelm à cause de son appartenance au P.C.A. Aprèsla naissance de son fils, elle travaille à Stuttgart dans ie bureaud'études de son père et participe aux activités clandestines descommunistes. En décembre 1935, elle est arrêtée par la Gesta-po, qui trouve chez elle les plans d'une entreprise d'armement,destinés à être transmis à l'étranger. Après un an et demi degarde à vue et de détention, Liselotte Herrmann est condam-née à mort le 12 juin 1937 par le Tribunal du Peuple.

Ses co-accusés, Stefan Lovasz, Josef Steidle et Arthur Göritz,eux aussi membres du P.C.A., sont également condamnés àmort. Après le verdict, les groupes communistes en exil déclen-chent une campagne de solidarité internationale. Des centainesde personnes de nombreux pays écrivent au gouvernementallemand pour demander la grâce de Liselotte Herrmann maisrien n'y fait. Même après sa condamnation, elle est interrogéepar la Gestapo dans une autre affaire. Une fois l'enquête ter-minée, elle est guillotinée le 20 juin 1938, ainsi que Lovasz,Steidle et Göritz.

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Du temps de la République de Weimar déjà, les nazis avaientessayé de concurrencer les grandes organisations de jeunessedes partis socialistes, des mouvements de retour à la nature(Bündische Jugend) et de l'Église. Après 1933, la plupart d'en-tre elles sont interdites ou mises au pas avant d'être intégréesaux Jeunesses hitlériennes nouvellement créées. Par contre, lesjeunes communistes et socialistes participent sans hésiter à larésistance au nazisme dès les premiers jours et semaines quisuivent l'accession au pouvoir d'Hitler. La Gestapo et la justiceréagissent avec dureté et condamnent les responsables à delourdes peines. Quelques groupes, dont certains s'étaient sé-parés des directions entrées en clandestinité, parviennent àpoursuivre pendant des années leurs activités illégales. Pen-dant la guerre, les juges appliquant de plus en plus souvent lapeine de mort, de nombreux jeunes gens seront victimes deleurs excès.

Le 3 décembre 1942, Hanno Günther, vingt et un ans, et sesamis Elisabeth Pungs, Wolfgang Pander et Bernhard Sikorskisont exécutés à Plötzensee. (document page 68) Après lavictoire de la Wehrmacht sur la France, Günther, Pungs, unecommuniste, et Pander, membre de la J.C. d'origine juive,avaient rédigé et distribué des tracts intitulés «La libre parole»et signés «Front allemand de la paix». Les tracts contenaientdes informations sur la situation militaire, exigeaient la paix et laliberté d'expression et incitaient les ouvriers de l'armement ausabotage. Par la suite, Günther avait monté un petit réseau derésistance avec Sikorski, Emmerich Schaper et d'anciensélèves de l'école Rütli, un établissement scolaire expérimentalde Neukölln. En juillet et en août 1942, toutes les personnes encontact avec Günther avaient été arrêtées. Parmi elles, les jeu-nes gens étaient désignés collectivement par la Gestapo sousle nom de «groupe Rütli».

Les groupes de jeunes

Le groupe Rütli

Affiche annonçantl'exécution d'Hanno Günther

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Le groupe Baum

Dans son réquisitoire du 26 mai 1942, le procureur général duReich près le Tribunal du Peuple reproche aux accusés d'avoirvoulu attenter à la sûreté de l'État et écouté des radios étrangè-res. Un de leurs pires crimes consiste selon lui dans la lecturede publications marxistes au cours de leurs rencontres régu-lières et dans les contacts noués par l'intermédiaire d'ElisabethPungs avec Herbert Bochow, un responsable communisteentré en résistance. Victime de sévices graves au cours desinterrogatoires, Bochow avait mis la Gestapo sur les traces desjeunes gens. Le 9 octobre 1942, six des sept inculpés sontcondamnés à mort ; Dagmar Petersen, complice à un moindredegré, est condamnée à sept années de pénitentier. Gravementmalade, Emmerich Schaper meurt avant d'être exécuté.

À la même époque, la Gestapo détient dans ses geôles lesmembres d'un groupe de juifs communistes dirigé par le coupleHerbert et Marianne Baum. Depuis le milieu des années trente,Herbert Baum rassemblait autour de lui des personnes d'ori-gine juive partageant ses convictions. Considérés par les ré-seaux communistes clandestins comme particulièrementmenacés, ils étaient tenus à l'écart des liaisons avec le Parti, cequi ne les empêchait pas de rédiger des tracts antinazis. En mai1942, ils commettent un attentat contre l'exposition de propa-gande anticommuniste «Le paradis soviétique», sur la place duLustgarten à Berlin. Peu après, Herbert et Marianne Baum,Werner Steinbrink, Hildegard Jadamowitz et beaucoup d'autresmembres du groupe sont arrêtés. Herbert Baum et deux autresse suicident en détention à la suite des sévices subis. Vingtcomplices sont condamnés à mort au cours de six grandsprocès. D'autres, dont le destin n'a jamais été élucidé, ont sansdoute péri en camps de concentration. Les condamnés dugroupe Baum sont exécutés à Plötzensee les 18 août 1942, 4mars 1943, 11 mai 1943, 18 juin 1943 et 7 septembre 1943.

Cérémonie d'inaugurationde l'exposition« Le paradis soviétique»,place du Lustgarten à Berlin,8 mai 1942

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Entre le 22 décembre 1942 et le 5 août 1943 sont exécutés àPlötzensee la plupart des membres d'un mouvement de résis-tance aux longues ramifications, le réseau Harnack/Schulze-Boysen, connu plus tard sous le nom d'«Orchestre rouge», uneappellation émanant à l'origine de la Gestapo. Ses groupescomprennent une bonne centaine de membres et se sontformés au milieu des années trente autour d'Arvid Harnack,chercheur berlinois et attaché d'administration au ministère del'Économie du Reich, et d'Harro Schulze-Boysen, lieutenant auministère de l'Aviation. Leur intérêt commun pour une voie autreque le national-socialisme réunit une première fois Harnack etSchulze-Boysen en 1940. Les conversations menées dans uncadre amical se transforment rapidement en une multitude decontacts et de projets politiques.

Arvid Harnack et son épouse américaine Mildred Harnack-Fish,qui l'a suivi en Allemagne en 1929, forment avant 1933 le noyaud'un cercle se consacrant, à l'initiative d'Arvid Harnack, à l'étu-de de la planification soviétique. Depuis 1930, le couple vit àBerlin. En 1935, Harnack entre au ministère de l'Économie oùil est chargé des questions d'orientation de la politique écono-mique et des affaires américaines. Mildred Harnack est profes-seur de lettres et traductrice à la Faculté des études étrangèresde l'université Friedrich-Wilhelm. Adversaires résolus du na-zisme, tous deux cherchent à élargir à d'autres opposants leurcercle de réflexion, auquel appartiennent l'ancien ministre del'Éducation de Prusse et socialiste chrétien Adolf Grimme,l'écrivain Adam Kuckhoff, sa femme Greta ainsi que l'ouvrierKarl Behrens.

Depuis leur mariage en 1936, Harro Schulze-Boysen et safemme Libertas réunissent autour d'eux un cercle similaire. Jus-qu'en 1933, Schulze-Boysen est proche des groupusculesnationalistes révolutionnaires et collabore à la revue «gegner»(adversaire), rapidement interdite après la prise du pouvoir parHitler. Schulze-Boysen et son ami et collègue Henry Erlangersont déportés par les SA en camp de concentration et sisévèrement maltraités qu'Erlanger en mourra. Après sa libé-ration, Schulze-Boysen commence une formation à l'écoled'aviation commerciale de Warnemünde et est engagé en avril1934 au ministère de l'Aviation. Libertas Schulze-Boysen tra-vaille d'abord comme attachée de presse d'un groupe cinéma-tographique américain, puis en indépendante et devient en1941 régisseur à la direction du film culturel du ministère dela Propagande du Reich. Comme son mari, elle utilise ses rela-tions professionnelles pour trouver des adversaires au régimeet élargir le cercle commun.

Au début 1942, l'organisation formée autour d'Arvid Harnacket d'Harro Schulze-Boysen commence à fabriquer des tractsdont les auteurs sont, outre Harnack et Schulze-Boysen, pourl'essentiel Wilhelm Guddorf, Adam Kuckhoff et John Sieg.Ils décrivent les atrocités commises derrière le front par lesGroupes d'intervention (Einsatzgruppen) et par certaines unités

Le réseauHarnack/Schulze-Boysen

Harro Schulze-Boysen etsa femme Libertas, née Haas-Heye

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Clara, Mildred et Arvid Harnackà Neubabelsberg en 1931

de la Wehrmacht à rencontre des prisonniers de guerre et descivils des territoires occupés. Les textes appellent à faire preu-ve d'esprit critique et de courage civique et prédisent une findésastreuse de la guerre qui ne pourra être gagnée par le ré-gime. Les tracts, qui paraissent régulièrement, sont envoyésdans de nombreuses régions allemandes et jusque sur le front.

Un des moyens d'action clandestins utilisés par certains mem-bres du réseau était la collaboration avec l'Union soviétique.Harnack se livrait à des échanges de vues secrets avec desemployés des ambassades américaine et soviétique. Schulze-Boysen et lui avertissent le gouvernement soviétique de l'atta-que prévue pour le mois de juin 1941. Afin d'accélérer la fin dela guerre et de préparer la voie à une entente en matière de po-litique extérieure avec l'U.R.S.S., ils tentent également, maissans succès, d'établir grâce à Hans Coppi une liaison radioavec Moscou. En automne 1941, le service de renseignementsmilitaires soviétique envoie le chef de son antenne bruxelloise àBerlin, qui transmet par radio de Bruxelles à Moscou le résultatd'un entretien avec Schulze-Boysen. À la fin de l'automne 1942,le décryptage par les services de contre-espionnage allemandsd'un message radio de Moscou contenant des adresses berli-noises scelle le destin du réseau et de ses cercles d'amis.

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Tous les compagnons des époux Schulze-Boysen et Harnackne sont pas au courant des contacts avec l'Union soviétiqueou impliqués dans la fabrication des tracts qui appuient parexemple l'attentat de mai 1942 contre l'exposition de propa-gande anticommuniste «Le paradis soviétique». Certains d'euxcherchent simplement à discuter de thèmes politiques ou so-ciaux ou sont prêts à aider leurs amis sans poser de questions,par exemple en expédiant du courrier, en cachant chez soi desémetteurs radio ou en accueillant des inconnus. C'est le casnotamment de Frida et Stanislaus Wesolek, Klara Schabbel,Else Imme ou Annie Krauss. D'autres, tels l'écrivain AdamKuckhoff ou les journalistes Walter Husemann, Günther Wei-senborn et John Graudenz prennent une part prépondérantedans la rédaction des tracts, qui sont recopiés et tirés dans lesappartements et les ateliers de Kurt et Elisabeth Schumacher,Oda Schottmüller, Cato Bontjes van Beek et d'autres compa-gnons.

Les actions et les cercles de réflexion mettent parfois en pré-sence des gens d'horizons politiques et religieux très divers.Un rôle important est tenu par le journaliste et cheminot com-muniste John Sieg, qui a longtemps vécu aux États-Unis. Il agiten étroite collaboration avec Harnack et Schulze-Boysen et sesert principalement de ses liens avec des cellules clandestinesdu P.C. Un autre groupe, rassemblant des jeunes gens commeUrsula Goetze, Liane Berkowitz et Fritz Rehmer, s'est formé au-tour du médecin et psychothérapeute John Rittmeister. Il prêteassistance aux Français réquisitionnés pour le S.T.O. et parti-cipe aux distributions de tracts. Des raisons philosophiqueset religieuses inspirent l'action de Maria Terwiel, Helmut Himpelet Eva-Maria Buch. La première, par exemple, envoie à descentaines d'exemplaires le texte des sermons de l'évêque deMünster, le comte Clemens August von Galen, qui, à l'été 1941,a condamné en termes non voilés le meurtre par les nazis desmalades et infirmes (opérations d'«euthanasie»).

Hans et Hilde Coppien camping

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En août 1942, la Gestapo démantèle les groupes gravitantautour d'Harnack et de Schulze-Boysen et arrête en quelquessemaines plus d'une centaine de personnes. Une commissionspéciale du service Lutte contre le sabotage de la Directioncentrale de la sûreté du Reich (Reichssicherheitshauptamt)prend la direction de l'enquête et fait procéder à l'interrogatoirepoussé de certains des accusés qui sont cruellement torturés.Les sévices provoquent les aveux de quelques victimes, d'au-tres se contredisent et révèlent des informations capitales sansen être conscients. En décembre 1942, le magistrat ManfredRoeder fait comparaître au cours d'un premier procès les prin-cipaux membres du réseau, dont les époux Harnack et Schul-ze-Boysen, Coppi et Schumacher, devant le Tribunal militaire duReich, compétent en matière d'espionnage. À l'exception deMildred Harnack et de la comtesse Erika von Brockdorff, toussont condamnés à mort le 19 décembre 1942 et exécutés le 22décembre à Plötzensee.

Hitler n'admet pas le verdict relativement clément envers Mil-dred Harnack et Erika von Brockdorff et ordonne au Tribunalde les rejuger. Condamnées à mort, elles sont guillotinées àPlötzensee, la première le 16 février, la deuxième le 13 mai 1943.À la suite d'autres procès organisés en janvier et février 1943,une quarantaine de personnes, exécutées en plusieurs fois,périssent sous le couperet, la plupart à Plötzensee. Parmi ellesse trouvent, le 13 mai et le 5 août 1943, les nombreuses fem-mes du groupe, transférées pour l'exécution de la prison defemmes de la Barnimstrasse (arrondissement de Friedrichshain)à Plötzensee. (documents pages 52 et 66/67) Les enfants deHilde Coppi et Liane Berkowitz, qui ont accouché en prison,leur sont enlevés peu après la naissance. Les corps des deuxfemmes sont remis à l'Institut d'anatomie et de biologie del'université Friedrich-Wilhelm de Berlin pour y être disséquéspar l'anatomiste Hermann Stieve en vue d'études gynécolo-giques.

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Le mépris des nations et des peuples étrangers constitue l'undes éléments essentiels de l'idéologie nazie. Au cours de laguerre, les experts de l'administration judiciaire mettent enplace une réglementation abondante qui, tel le «Règlementpénal pour la Pologne», n'accorde que des droits très limitésaux habitants des territoires occupés et doit devenir, après la«victoire finale», un «droit pénal durable s'appliquant aux peu-ples étrangers».

Une menace particulière pèse sur les réquisitionnés du travailétrangers et sur les membres des organisations de résistancedes pays européens occupés, qui, pour certains, sont trans-férés en Allemagne après leur arrestation pour y être condam-nés à mort. Sur décision d'Hitler, une ordonnance secrète de«Nuit et brouillard», prise en décembre 1941 et signée du chefdu haut commandement de la Wehrmacht, prévoit la dépor-tation en Allemagne, par «nuit et brouillard», des personnessuspectées de résistance et dont la condamnation sur placen'est pas assurée. Tandis qu'une réglementation spéciale per-met dans de nombreux cas de passer par les armes ou dependre sur-le-champ les résistants des territoires d'Europe del'Est, les prisonniers de l'Ouest sont internés en Allemagne. Lescondamnations prononcées par les Cours spéciales ou par leTribunal du Peuple, ainsi que les exécutions, sont tenues secrè-tes. Parfois, les prisonniers ne figurent que sur des listes provi-soires et sont assassinés au cours du transport par la Gestapoou les SS.

Parmi les étrangers exécutés à Plötzensee entre le début de laguerre et les «nuits sanglantes» de septembre 1943 se trouventdes résistants polonais et tchèques. Certains des condamnéspolonais appartiennent à l'Armée nationale secrète (Armia Kra-jowa) ou lui apportent leur soutien et ont été poursuivis pourdétention illégale d'armes et d'explosifs, sabotage et atteinteà la sûreté de l'État. D'autres sont des prisonniers de guerreévadés ou des réquisitionnés du travail arrêtés par la Gestapoen Allemagne et qui, au début du moins, sont traduits devantles Cours spéciales. À Plötzensee sont également exécutés desPolonais ayant essayé d'aider des compatriotes persécutés.Parmi les nombreux condamnés tchèques, beaucoup appar-tiennent à un mouvement de résistance militaire portant le nomde «Défense nationale» (Obrana Nâroda), composé d'officiersde l'ex-armée tchécoslovaque. Quelque quatre-vingts périssentà Plötzensee entre avril 1942 et septembre 1943. Dans la mêmepériode, plus de deux cent vingt autres Tchèques sont exé-cutés, dont quatre-vingts environ appartiennent à la résistancecommuniste et à peu près cent quarante à d'autres réseauxcivils. Utilisant divers moyens, ils luttent pour une Tchécoslo-vaquie indépendante, ce que les tribunaux allemands jugentparticulièrement répréhensible depuis l'annexion des Sudèteset l'instauration du Protectorat de Bohème-Moravie en mars1939. Parmi les condamnés tués dans la nuit du 7 au 8 sep-tembre 1943 se trouvait le communiste tchèque Julius Fucik qui

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Les prisonniers étrangers

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a laissé un volumineux témoignage sous le titre «Reportages,écrits sous le gibet».

Un des autres groupes de condamnés étrangers se composed'une douzaine de jeunes Belges et de jeunes Français, punisde mort pour cambriolages. Ils font partie des grands contin-gents de réquisitionnés du travail originaires des nombreuxpays occupés d'Europe de l'Ouest et de l'Est, qui ont étédéportés en Allemagne ou y ont été attirés par des promessesfallacieuses. La plupart ont la vingtaine et se trouvent à Berlindepuis plus ou moins longtemps, avant de se voir accuséspar la Gestapo d'une série de cambriolages et de vols. Deuxd'entre eux, le Français Gaston Deflin et le Belge Richard Ha-vron n'ont même pas dix-huit ans. Deflin travaille déjà depuisl'âge de quinze ans en Allemagne et n'a jamais été condamné,comme la plupart des autres. Souffrant visiblement de sous-alimentation, il assure par l'intermédiaire de son interprète avoirvolé uniquement à cause de la faim. Malgré cela, le procureurde la Cour spéciale près le tribunal de grande instance de Berlindemande en avril 1943 la peine capitale pour Deflin et Havronparce qu'ils doivent, «compte tenu de leur maturité précocecaractéristique du type méditerranéen», être «de toute éviden-ce considérés » comme des personnes de plus de dix-huit ans.Deflin et Havron sont exécutés le 23 juillet 1943 à Plötzensee enmême temps que neuf autres condamnés.

Entre temps, la mère de Deflin a eu connaissance par des voiesinconnues de l'arrestation de son fils et adresse de France unappel pressant au directeur de la prison, lui demandant desinformations et une intervention en faveur de son fils. En août1943, le directeur lui transmet par l'ambassade d'Allemagne àParis une réponse dont la dureté et la sécheresse se passentde commentaires : «Le sacrifice qui vous a été demandé a étéimposé par la dissuasion particulière qui doit être exercée entemps de guerre envers la collectivité pour le maintien de lasécurité publique. »

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Julius Fucik

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Les personnes assassinées pendant le IIIe Reich à Plötzenseeet dans les autres centres d'exécution ne sont pas toutes desadversaires politiques de la dictature nazie. Pendant la guerre,des milliers y meurent pour avoir commis de petits délits,comme de menus larcins, du vol à l'étalage ou de l'«abattagenon déclaré». D'autres sont dénoncés comme «défaitistes» etperdent la vie pour avoir, dans des conversations privées, misen doute la stratégie militaire d'Hitler ou pour avoir colporté desblagues politiques. Régulièrement tombent dans les filets de laGestapo des personnes agissant pour des raisons strictementpersonnelles, cachant des juifs ou des déserteurs, fournissantde la nourriture aux réquisitionnés du travail ou aux prisonniersde guerre étrangers ou sabotant avec détermination la propa-gande jusqu'au-boutiste des nazis. (documents pages 65, 70et 72)

Parmi les condamnés se trouvent des jeunes qui ne peuventêtre classés dans tel ou tel mouvement de résistance. En août1942, le Tribunal du Peuple poursuit Helmuth Hùbener, Karl-Heinz Schnibbe, Rudolf Wobbe et Gerhard Düwer, quatre amisde Hambourg, âgés de dix-sept et dix-huit ans, qui tententdepuis 1941 d'alarmer l'opinion à l'aide de tracts. Leurs textesdécrivent la situation militaire telle que la rapportent les radiosétrangères et commentent les mensonges de la propagandegouvernementale. Helmuth Hübener appartient à la commu-nauté religieuse de l'Église de Jésus-Christ des saints du dernierjour (Mormons), où il a fait la connaissance de Rudolf Wobbe etKarl-Heinz Schnibbe. En février 1942, les quatre adolescentssont arrêtés par la Gestapo et torturés au cours des interroga-toires. Considéré comme le meneur, Helmuth Hübener est con-damné à mort et exécuté le 27 octobre 1942 à Plôtzensee, sesamis se voyant infliger de longues peines d'emprisonnement.

Parmi les plus de trois cents exécutions qui ensanglantèrentles nuits de septembre 1943, il faut noter l'histoire tragique dujeune pianiste Karlrobert Kreiten. Né en 1916 à Bonn d'un pèremusicien néerlandais et d'une mère française, il se fait remar-quer très jeune pour ses talents de pianiste et obtient des prixinternationaux de musique. Comme beaucoup d'autres, il estvictime d'une dénonciation provenant de son entourage privé.Ayant, au cours d'une conversation avec une connaissance enmars 1943, exprimé des doutes sur la stratégie militaire d'Hitler,il est dénoncé à la Gestapo et condamné à mort le 3 septem-bre 1943 par le Tribunal du Peuple. Lorsque sa famille obtientun soutien des hautes autorités de l'État et une promesse degrâce de la Chancellerie du Reich, la sentence a déjà étéexécutée. Kreiten fait partie de ceux qui ont été mis à mort sansmême un ordre d'exécution dans la nuit du 7 au 8 septembre1943 à Plötzensee. Une «méprise» pour laquelle aucun desfonctionnaires impliqués n'eut à rendre de comptes.

Les justices civile et militaire font preuve de la même rigueurinflexible envers les déserteurs et les insoumis, généralementpassibles de mort. Le même sort peut frapper les gens qui leur

La résistance au quotidien

Helmuth Hübener (au centre),Rudolf Wobbe (à gauche)et Karl-Heinz Schnibbe à Hambourg,probablement en 1941

Karlrobert Kreiten

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prêtent assistance. Le matin du 9 juin 1944, Emmy Zehden, 44ans, est transférée de la prison de femmes de la Barnimstrasseà Plötzensee pour y être exécutée à 13 heures. Emmy Zehdenfaisait partie des Témoins de Jéhovah et se conformait à leurdoctrine. Sous le IIIe Reich, cette communauté religieuse étaitinterdite et ses membres persécutés. En 1942, Emmy Zehdencache dans un appartement de Gatow son fils adoptif HorstGünter Schmidt et deux de ses coreligionnaires et amis qui sesont soustraits au service militaire pour des motifs religieux.Son mari, Richard Zehden, d'origine juive, se trouve déjà àcette époque aux travaux forcés. En décembre 1942, EmmyZehden et d'autres témoins de Jéhovah sont dénoncés. Le 19novembre 1943, le Tribunal du Peuple la condamne à mort pour«démoralisation». Richard Zehden périt à Auschwitz. Schmidtsera le seul des trois insoumis, eux aussi condamnés à mort,à voir la fin de la guerre. (document page 69)

Sous le IIIe Reich, nombreux sont les gens dénoncés par desvoisins ou par des connaissances. La Gestapo infiltre par ail-leurs les cercles d'amis privés ou les groupes religieux à la re-cherche de propos subversifs. À l'automne 1943, un informa-teur trahit le cercle dirigé par Hanna Solf, veuve du diplomateWilhelm Solf. Hanna Solf réunissait régulièrement chez elleautour d'un thé des membres du ministère des Affaires étran-gères ainsi que d'autres amis et connaissances avec qui elles'efforçait d'aider les persécutés. Faisaient notamment partiede ce cercle la pédagogue et assistante sociale Elisabeth vonThadden, arrêtée début 1944 avec Hanna Solf, l'ex-envoyédiplomatique Otto Carl Kiep et d'autres membres du cercle.Deux personnes, Elisabeth von Thadden et Otto Carl Kiep, sontcondamnées à mort sur la foi de dépositions d'indicateurs.Ce n'est qu'après la condamnation de Kiep que la Gestapoapprend sa participation au complot du 20 juillet 1944. Ellerecommence à l'interroger, lui infligeant de graves sévices. Kiepest finalement exécuté le 15 août et Elisabeth von Thadden le 8septembre 1944 à Plötzensee.

Elisabeth von Thadden

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À la suite des bombardements de septembre 1943 qui ontsévèrement endommagé la prison de Plötzensee, le pénitentierde Brandebourg-Görden est choisi pour être le nouveau centred'exécution du ressort du Kammergericht de Berlin. À Plötzen-see ne doivent plus être exécutés que les verdicts du Tribunaldu Peuple et des cours spéciales de Berlin. Les exécutions enmasse consécutives à l'attentat du 20 juillet 1944 lui redonnenttoutefois son rôle central dans le système nazi de répressionpar la peine capitale. Entre août 1944 et avril 1945, quatre-vingt-six sentences de mort contre des participants à l'attentat man-qué et des complices y sont exécutées, ainsi que d'autres con-damnations.

La tentative de coup d'État du 20 juillet 1944 a une longuehistoire. Elle ne vise pas seulement à mettre fin à la tyrannieen éliminant physiquement Hitler. Beaucoup des conjurés ontégalement pour objectif la préparation d'un système de sociétépost-hitlérien qui mettra fin à la guerre et à la dictature natio-nale-socialiste. Les personnes et les groupes impliqués repré-sentent un large éventail des traditions politiques et intellec-tuelles de l'Allemagne dont émanent la résistance et l'insou-mission tout au long du IIIe Reich. La préparation du coupd'État réunit des groupes d'opposition civile et militaire appar-tenant aux horizons les plus variés. Les milieux conservateursautour de Carl Friedrich Goerdeler, Ulrich von Hassell et Johan-nes Popitz cohabitent avec le Cercle de Kreisau, ouvert auxquestions sociales et qui entretient des liens importants avecles syndicats et les sociaux-démocrates. Les participants à laconjuration militaire dirigée par Ludwig Beck, Henning vonTresckow et le comte Claus Schenk von Stauffenberg comptentdes officiers originaires de toutes les régions du Reich, agissantpour des raisons très variées, dont une des plus importantes,comme dans les autres groupes, est l'éthique chrétienne.

Coordonner les différents groupes est toujours une entrepriseardue car ce dont on discute au cours des réunions clandes-tines ou à apparence amicale relève, sous le régime nazi, del'atteinte à la sûreté de l'État. Cette difficulté explique en partiepourquoi la tentative de mettre fin à la guerre et à ses mas-sacres par un coup d'État arrive si tard. Néanmoins, une réus-site, même tardive, aurait épargné bien des sacrifices et évitébien des crimes.

Préparé pendant des mois, l'attentat du 20 juillet 1944 est unéchec. Quelques heures seulement après l'explosion de labombe introduite par Stauffenberg dans la «Tanière du loup»,le Q.G. du Führer à Rastenburg en Prusse-Orientale, on a lacertitude qu'Hitler a survécu. Le sort du coup d'État est alorsscellé. Stauffenberg et trois de ses plus proches compagnons,Werner von Haeften, le chevalier Albrecht Mertz von Quirnheimet Friedrich Olbricht sont fusillés dans la nuit du 20 au 21 juilletà Berlin, dans une cour du Bendlerblock, siège du Servicegénéral de l'armée de terre. Gravement blessé à la suite d'une

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Les acteurs ducoup d'Étatmanqué du 20 juillet 1944

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tentative de suicide, Ludwig Beck, responsable militaire de laconjuration, est abattu dans un des bureaux du bâtiment.

Le lendemain, la Gestapo commence à arrêter systématique-ment tous les suspects et leurs familles. L'enquête est conduitepar une commission spéciale dirigée par Ernst Kaltenbrunneren personne, le chef de la Direction centrale de la sûreté duReich (Reichssicherheitshauptamt). Martin Bormann, secrétairedu Führer et chef de la Chancellerie du Reich, est tenu au cou-rant des progrès des investigations. Les avis de recherche etles arrestations concernent des centaines de personnes, quisont emprisonnées à Berlin et dans les centres de détentionde la région. Les interrogatoires s'accompagnent de torturesgraves qui poussent plusieurs personnes au suicide.

Le premier procès à grand spectacle, conduit par le Tribunaldu Peuple sous la présidence de Roland Freisler, a lieu à Berlinles 7 et 8 août 1944; il marque le début d'une série de con-damnations à mort qui frappent les conjurés du 20 juillet. Lenombre total d'accusés, d'audiences, de jugements et de pei-nes capitales n'a jamais pu être déterminé avec précision. Laseule certitude est qu'entre le 8 août 1944 et le 9 avril 1945, aumoins quatre-vingt-six personnes trouvent la mort à Plötzenseeà la suite du 20 juillet.

Le Bendlerblock en 1942,aile de la Bendlerstrasse(aujourd'hui Stauffenbergstrasse),en 1944, siège ducommandant du Service généralde l'armée de terre

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Les huit premières exécutions de hauts responsables du coupd'État manqué ont lieu le 8 août 1944, après un procès de deuxjours devant le Tribunal du Peuple, Certaines parties du procèset quelques autres journées d'audience sont conservées sur unfilm qui constitue la meilleure illustration de l'iniquité de cetteprocédure. Les accusés portaient la marque des interrogatoireset des sévices. Freisler les fit comparaître dans une tenuemisérable, chacun étroitement encadré de deux gardes. Aucundes accusés n'eut le temps de finir ses propos, si tant est qu'onlui donnât la parole. Les avocats se refusèrent à prendre particlairement en faveur de leurs clients qui furent condamnés àmort et transférés à Plötzensee immédiatement après le verdictpour y être pendus. Désignées par le nom d'opération spéciale,les exécutions provoquèrent l'émoi et l'horreur dans toute laprison.

Le 8 août, Erwin von Witzleben, Erich Hoepner, Helmuth Stieff,Albrecht von Hagen, Paul von Hase, Robert Bernardis, FriedrichKarl Klausing et le comte Peter Yorck von Wartenburg sont pen-dus à Plötzensee. Victor von Gostomski, un détenu employéà la bibliothèque de la prison, a fait plus tard le récit des évé-nements :

«Le bruit courait d'une opération spéciale. Opération spéciale,cela veut dire des personnes haut placées. Des gardiens par-laient d'une affaire importante. J'ai pensé que c'était des gensqui avaient participé au 20 juillet. Vers six heures du soir, tousles détenus furent enfermés dans leurs cellules. Plus un ne tra-vaillait. Même nous, de la bibliothèque, étions en cellule. Nousavons placé la table sous la fenêtre et observé la cour. Il étaitpeut-être sept heures. Les lourdes portes de fer des cellulesse sont ouvertes, laissant sortir des hommes en tenue rayéede détenus, les mains liées, pieds nus dans des sabots quiclaquaient sur le sol, la tête découverte. Chacun était encadrépar deux gardiens, mais ils marchaient sans qu'on ait besoinde les soutenir. Les condamnés étaient suivis par de nombreu-ses personnes en civil, probablement de la Gestapo. Des SSfilmaient la scène. Un policier nous ayant vus nous cria: «Per-sonne aux fenêtres ! » Nous avons pris un petit miroir pour con-tinuer à regarder. Combien de temps cela avait-il duré ? Dix,quinze minutes? J'étais bien trop excité pour y faire attention.L'opération spéciale, c'était cela. Le claquement des sabotsreprit, à nouveau la même procession triste. Ils venaient del'intérieur de la prison. Je suppose qu'on venait de lire la déci-sion d'exécution. L'un après l'autre, on les a conduits dans lebâtiment des exécutions, les mains liées dans le dos, la vesteenfilée à la va-vite. Au bout de cinq minutes environ, c'était letour du suivant. Les hommes de la Gestapo étaient à l'intérieur,le cameraman aussi. En un peu plus de quarante minutes, toutétait fini.»

Erwin von Witzleben

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Carl Friedrich Goerdeler Ludwig Beck

Pour le tribunal, les huit condamnés représentent l'enca-drement militaire du complot. Aux termes des plans élaboréspar l'opposition militaire, le feld-maréchal Erwin von Witzleben,qui, comme le général de brigade Ludwig Beck, conspirait déjàdepuis 1938 contre Hitler, est appelé à devenir commandanten chef des armées. Les généraux Erich Hoepner et HellmuthStieff font également partie des militaires ayant dirigé les pré-paratifs du coup d'État. Le juriste d'entreprise Albrecht vonHagen, qui n'est pas officier de carrière, a déjà participé à lafourniture d'explosifs lors d'une tentative précédente d'attentat.Les officiers d'état-major Friedrich Karl Klausing et Robert Ber-nardis sont chargés de missions de liaison dans le cadre del'opération Walkyrie, planifiée au Bendlerblock sous l'égide dugénéral Friedrich Olbricht, abattu dès le 20 juillet 1944, et deson chef d'état-major, le colonel Albrecht Mertz von Quirnheim.Le général Paul von Hase, gouverneur militaire de Berlin, acomme subordonné un commandant national-socialiste qui,désobéissant à ses ordres, empêche le bouclage du quartiergouvernemental et l'arrestation des dirigeants nazis.

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Le comte Peter Yorck von Wartenburg, qui, avec le comte Hel-muth James von Moltke, est l'âme du Cercle de Kreisau, estexécuté à un moment où les enquêteurs de la Commissionspéciale n'ont pas encore mesuré l'importance de ce groupe.Mis en cause lors des investigations contre l'ex-envoyé diplo-matique Otto Carl Kiep, von Moltke se trouve déjà depuis plusde six mois en prison. La Gestapo ignore cependant tout deson rôle dans le Cercle de Kreisau, tout comme de ses liensavec le complot, auquel il ne participe pas pour des motifs reli-gieux.

La Gestapo ne connaît pas non plus avec précision le rôlejoué par deux des victimes exécutées à Plötzensee quarante-huit heures après le verdict. Spécialiste en droit internationalet juge dans la Marine, le comte Berthold Schenk von Stauffen-berg n'est pas seulement le frère du conspirateur fusillé le 20juillet 1944, il a eu, bien avant lui, des contacts avec l'oppositioncivile et militaire. Le comte Fritz-Dietlof von der Schulenburg, unjuriste appelé sous les drapeaux avec le grade de lieutenantde réserve, a participé aux travaux constitutionnels du groupedirigé par Cari Friedrich Goerdeler, ancien maire de Leipzig,appelé à devenir chancelier du Reich ; il assure en outre la mé-diation entre les différentes tendances de l'opposition. Von derSchulenburg et le social-démocrate Julius Leber sont pressen-tis comme candidats au poste de ministre de l'Intérieur du nou-veau gouvernement. (document page 74)

D'autres personnes impliquées dans le complot sont exécutéesentre le 15 et le 25 août 1944. Parmi elles se trouvent le préfetde police de Berlin, le comte Woif Heinrich von Helldorf, natio-nal-socialiste convaincu pendant des années, plusieurs officierset le secrétaire d'ambassade Hans-Bernd von Haeften, frèrede Werner von Haeften. Otto Carl Kiep est lui aussi jugé et exé-cuté avec les conspirateurs. Une des principales figures duCercle de Kreisau est Adam von Trott zu Solz, qui travaillait auministère des Affaires étrangères et voulait, une fois le putschréussi, se faire l'ambassadeur de l'opposition et entreprendredes négociations avec l'ennemi. Il est exécuté le 26 août 1944à Plötzensee.

Condamné le 30 août 1944, Carl-Heinrich von Stülpnagel, com-mandant militaire en France, avait réussi à exécuter commeprévu l'opération Walkyrie à Paris, le 20 juillet, et à arrêterles chefs de la Gestapo et des SS, avant que l'on apprennequ'Hitler était encore en vie. Le même jour sont exécutés lescolonels Eberhard Finck et Hans-Ottfried von Linstow, égale-ment stationnés à Paris, ainsi que le lieutenant-colonel KarlHeinz Rahtgens, un parent du feld-maréchal Hans Günthervon Kluge, chef du haut commandement Ouest. Le 20 juillet,celui-ci avait refusé son appui aux conjurés qui pensaient l'avoirgagné à leur cause.

Le comte Helmuth James von Moltke

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Le comte Peter Yorck von Wartenburg

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Ulrich von Hassell

Les sept participants exécutés le 4 septembre 1944 faisaientpartie des experts en transmissions et des officiers de liaisonaffectés aux différentes régions militaires selon les plans del'opération Walkyrie. Quatre jours plus tard meurent deux offi-ciers de l'état-major général, le diplomate Ulrich von Hassell etun autre officier, le comte Ulrich Schwerin von Schwanenfeld.Von Hassell avait tenté en 1940 de prendre contact avec leministre des Affaires étrangères britannique, Lord Halifax, et luiavait transmis un document appelé mémorandum d'Arosa,dans lequel il présentait les conceptions de l'opposition alle-mande pour une paix orientée vers l'Ouest. Le même jour estexécuté l'avocat catholique Josef Wirmer, qui, pendant sonprocès, a tenu tête avec détermination et sang-froid au prési-dent du Tribunal du Peuple, Roland Freisler, comme le montreun extrait de film d'époque.

Une des personnes qui trouvent la mort le 14 septembre 1944est un prêtre catholique, Hermann Wehrle, dont le seul lien avecle complot consiste à en avoir eu connaissance par une con-fession et à ne pas s'y être opposé, faisant de ce problèmeune question de conscience personnelle. Le baron Ludwig vonLeonrod s'étant prévalu à l'audience de ce conseil, Wehrle estcité d'abord comme témoin, puis bientôt mis à la barre desaccusés en raison des informations dont il a eu connaissance,avant d'être condamné à mort. Il est exécuté trois semainesaprès von Leonrod.

Une des victimes du 29 septembre 1944 est le syndicalistesocial-démocrate Wilhelm Leuschner qui, à l'instar de son ca-marade de parti Julius Leber, a tenu un rôle-clé dans les négo-ciations menées par Carl Friedrich Goerdeler pour obtenir laparticipation des syndicats de la République de Weimar à unnouveau gouvernement. Le même sort frappe plusieurs officiersde liaison les 12 et 13 octobre puis, le 20 octobre, le pédago-gue social-démocrate Adolf Reichwein, un des moteurs desactivités du Cercle de Kreisau. Comme Leber, il se trouvait déjàen prison le 20 juillet, sa prise de contact avec la direction clan-destine du P.C.A. ayant été révélée par un informateur infiltrédans les rangs communistes.

Lex-ambassadeur d'Allemagne à Moscou, le comte Friedrich-Werner von der Schulenburg est exécuté le 10 novembre 1944.Avec von Hassell, il était l'un des possibles ministres desAffaires étrangères du nouveau gouvernement. Le 14 novembre1944, c'est le tour des premiers membres d'un réseau forméà Cologne autour des anciens dirigeants syndicalistes catholi-ques Bernhard Letterhaus et Nikolaus Gross, que Carl FriedrichGoerdeler a associés au projet de coup d'État. Les exécutionsdu 30 novembre 1944 constituent un autre cas bouleversant,celui des époux Elisabeth et Erich Gloeden et de la mèred'Elisabeth, Elisabeth Kuznitzky, trois personnes qui payèrentde leur vie le fait d'avoir simplement caché chez elles, à lademande d'un ami, le général Fritz Lindemann en fuite.

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Wilhelm Leuschner

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Julius Leber Adam von Trott zu Solz

L'ancien député social-démocrate au Reichstag Julius Leberest exécuté le 5 janvier 1945. Comme ses compagnons Theo-dor Haubach et Carlo Mierendorff, il avait dû passer plusieursannées en camps de concentration. À sa libération, il avait re-noué des liens avec d'anciens sociaux-démocrates et étaitentré en contact étroit avec le Cercle de Kreisau de Yorck etvon Moltke. Ce dernier, Haubach et huit autres participantsau complot, dont Nikolaus Gross et l'ancien président duWurtemberg, Eugen Bolz, sont exécutés le 25 janvier 1945 àPlötzensee, le même jour que Hermann Kaiser, professeur dansle secondaire, qui mettait à profit ses voyages à travers le payspour nouer des contacts pour Goerdeler.

Parmi les derniers acteurs du 20 juillet qui périssent à Plötzen-see, il faut citer Alfred Delp, Johannes Popitz et Carl FriedrichGoerdeler. Des trois, le père jésuite Alfred Delp était le plus pro-che du Cercle de Kreisau et avait, avec ses compagnons LotharKönig et Augustin Rösch, une influence déterminante sur sesconceptions socio-politiques. Pendant sa longue détention à laprison de la Lehrter Strasse, il écrit, malgré ses entraves auxmains et une interdiction formelle, des centaines de pages surdes problèmes théologiques et philosophiques, qui seront sor-ties de prison grâce à diverses complicités. Emprisonné briè-vement à la prison de Tegel avec von Moltke, Eberhard Bethgeet Eugen Gerstenmaier, de confession protestante, il approfon-dit avec eux les principes de base œcuméniques qui avaientinfluencé les textes du Cercle de Kreisau.

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La salle des exécutions,février 1955

Inauguration,le 14 septembre 1952, du monumentà la « mémoire des victimesde la dictature hitlérienne desannées 1933 à 1945»

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Entré en fonctions en avril 1933, l'ex-ministre des Finances dePrusse, Johannes Popitz, avait continué d'occuper des postesimportants même après la dissolution des Länder et était restéune figure contestée parmi les résistants du 20 juillet 1944.Membre de la Société du mercredi (Mittwochsgesellschaft)de Berlin, un club conservateur, il élabore pour le coup d'Étatune «Loi fondamentale provisoire pour l'État» qui instaureraitun régime autoritaire et se heurte à l'opposition des autresmouvements de résistance. Popitz compte même sur le soutiendes SS de Heinrich Himmler pour renverser Hitler. Après sonarrestation le 20 juillet, ses relations personnelles avec Himmlerne lui sont plus d'aucun secours.

L'un des derniers acteurs principaux du complot à mourir àPlötzensee est Carl Friedrich Goerdeler, le 2 février 1945. Aprèssa démission spectaculaire de la mairie de Leipzig en 1937,il commence à organiser en 1938 un réseau de résistance quiest à l'origine du projet de coup d'État qui aurait suivi un atten-tat réussi contre Hitler. Dans ses mémoires et dans ses projets,il critique la politique économique et militaire nazie et présenteses propositions, ardemment débattues, en vue d'un change-ment après la chute d'Hitler. Étant l'une des principales figuresde la conjuration, il est pressenti pour le poste de chancelierdu Reich. Avant même le 20 juillet, Goerdeler éveille les soup-çons de la Gestapo et se trouve dès lors en fuite. Après l'échecde l'attentat, il parvient tout d'abord à se cacher, avant d'êtredénoncé et arrêté. Condamné à la peine capitale le 8 septem-bre 1944, il est maintenu en prison pendant des mois par laGestapo qui veut lui extorquer des aveux sur l'étendue ducomplot.

De toutes ces personnes, le lieu historique de Plötzensee rap-pelle le souvenir. Il associe à la fois les victimes du systèmejudiciaire inhumain des nazis et la mémoire de ceux qui ontparticipé en toute conscience et avec détermination à la résis-tance au régime national-socialiste. Si leurs projets et leursobjectifs pour une «autre Allemagne» divergeaient, ils avaienten commun la confiance dans les générations futures envers le-squelles nous aussi sommes comptables de l'avenir.

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En 1936, le ministre de la Justice duReich désigne pour la premièrefois quatorze prisons qui serviront decentres d'exécution. D'ici 1945,ce chiffre passe à vingt et un.Circulaire du 28 décembre 1936 :

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De l'exception à la règle :La peine de mortsous le IIIe Reich

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" 1. La peine de mort seradésormais appliquée sur tout leterritoire du Reich au moyende la guillotine, sauf dispositionexceptionnelle contraire duGouvernement stipulant l'exécutiondu jugement par pendaison. [...]

2. Étant donné que le transportde la guillotine et son installationne permettent pas le secret del'opération et que des centresd'exécution adaptés ne sont pasdisponibles partout, les exécutionsauront désormais lieu dans lesétablissements carcéraux indiquésci-dessous, dans la mesure oùle tribunal statuant en premièreinstance siège dans un des ressortsindiqués:

a) à la prison de Plötzensee pourles ressorts du Kammergerichtde Berlin, du tribunal supérieur duLand de Stettin et des tribunauxde grande instance de Meseritz,Schneidemühl, Neustrelitz, Güstrowet Rostock ; »

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Depuis 1933, le nombred'exécutions augmente d'année enannée à Plötzensee.Les statistiques enregistrent uneforte progression dans les premiersmois de 1940.Note des services de justice,8 avril 1940

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À l'automne 1942, il est décidé qu'àPlötzensee, les exécutions auront lieunon plus à l'aube mais le soir.Les corps sont donnés à l'Institutd'anatomie et de biologie del'université Friedrich-Wilhelm deBerlin. Le nombre croissant depeines capitales pose la question dela création d'un second centred'exécution. Lettre du procureurgénéral près le Kammergerichtde Berlin, datée du 23 octobre 1942

« II est souhaitable de repousser lesexécutions capitales à Plötzensee ausoir, plus précisément à 20 heures,notamment en raison des problèmespouvant survenir à la suited'attaques aériennes nocturnes.Le professeur Stieve a donné sonaccord et a indiqué que les cadavrespourront être enlevés le soir même,bien que les besoins de l'Institutpour la recherche et l'enseignementsoient déjà couverts pour le prochain

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semestre. Une heure plus tardivene serait pas acceptable pourl'Institut d'anatomie, le traitementdes cadavres destinés à larecherche se prolongeant alors troptardivement dans la nuit, ce quiempêcherait les médecins concernésde rentrer chez eux par les trans-ports en commun. Le professeurStieve a demandé d'étudier laprise en charge par l'administrationjudiciaire du coût des caisses

contenant les corps (17,50 RM parcercueil), faute de quoi l'institutd'anatomie se verrait contraint delimiter l'enlèvement des cadavres àses besoins réels. J'estime cettedemande fondée et requierspar la présente la permission tacitede procéder à l'achat des caisses(sous « Frais divers d'exécutionA 6 33-5»), afin d'éviter desdifficultés dans l'élimination descadavres. Un arrêt de l'enlèvement

par l'institut d'anatomie obligeraità les remettre en bière à la police, cequi provoquerait des problèmesdu point de vue de leur inhumation. »

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À l'initiative du ministre de laJustice Otto Thierack, le bâtimentdes exécutions de Plötzenseeest équipé en décembre 1942 dehuit crochets de fer permettantd'exécuter par pendaison plusieurspersonnes à la fois.Le 22 décembre 1942, ArvidHarnack, Harro et Libertas Schulze-Boysen et d'autres membresde l'«Orchestre rouge» sont pendus.Note du 12 décembre 1942

« II faut envisager l'exécutionprochaine par pendaisonde plusieurs sentences de mort :

a) Le prisonnier de guerre françaisJumel a été condamné à la peinecapitale le 27 juillet 1942 à Kassel parjugement du tribunal de l'état-majorde la division 409 à affectationspéciale. Le chef du haut comman-dement de la Wehrmacht a ordonnéle 21 août 1942 l'exécution de la

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peine par pendaison. Le tribunala demandé au parquet de Francfort-sur-le-Main de prendre en chargel'exécution, qui ne doit pas avoir lieuavant le 25 décembre 1942.

b) Par jugement du 27 novembre1942, le Tribunal du Peuple acondamné à la peine capitale l'an-cien officier de marine Klotz pouratteinte à la sûreté de l'État et hautetrahison. Le docteur Goebbels,

ministre du Reich, a suggéré d'exé-cuter la peine par pendaison.La question a été soumise au Führer.

c) Le ministère de l'Aviation aannoncé aujourd'hui par téléphoneque plusieurs condamnationsà mort pour haute trahison seraientvraisemblablement prononcéescette semaine par le Tribunal militairedu Reich. Il est probable que leFührer ordonnera la pendaison et les

services judiciaires sont priés deveiller à une exécution immédiate. »

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Le 13 mai 1943, treize membresdu réseau Harnack/Schulze-Boysensont exécutés sur instructionpersonnelle d'Hitler.Registre de la bibliothèquede Plötzensee avec mentions du13 mai 1943

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Depuis son entrée au ministèrede la Justice en août 1942,Otto Thierack s'efforce de réduire ladurée de la procédure de recoursen grâce. L'entourage d'Hitler insisteégalement à plusieurs reprisessur la nécessité d'une exécution plusrapide des condamnations à mort.Lettre du 3 septembre 1943

«Suite à la lettre du 24 août 1943 -Rk. 9541 E II – que vous aadressée le Ministre et Chef de laChancellerie du Reich, vousinformant que le Führer considèrecomme nécessaire une accélérationdes décisions d'exécutionscapitales, je vous prie sur son ordred'étudier la possibilité de réduirenettement les délais dans lescas où vous envisagez une grâce

et soumettez aux termes des textesen vigueur le dossier à sa décision. »

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Pendant la guerre, l'Allemagneconnaît une recrudescencedes condamnations à mort, quisanctionnent en premier lieules délits d'atteinte à la sûreté del'État et de haute trahison.Les actes de résistance dansles territoires occupés sontégalement souvent punis de mort.Service d'information duministère de la Justice, début 1944

« Secret !

Nombre de peines capitalesdepuis le début de la guerre

Conformément à la missionconfiée à la Justice par le Führer, àsavoir employer les moyens lesplus rigoureux dans la lutte contreles traîtres à la nation, les saboteurs,les parasites, les criminels etmultirécidivistes asociaux, le nombre

de condamnations à la peine demort a continuellement augmentédepuis le début de la guerre.Pour cette période, on obtient lestotaux suivants : »

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Exécutions en masseà Plötzensee:Les «nuits sanglantes»de septembre 1943

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Dans la nuit du 3 au 4 septembre1943, la prison de Plötzensee està moitié détruite par un bombar-dement aérien. Trois jours plus tard,des hauts fonctionnaires du ministèrede la Justice et du Parquet deBerlin viennent se rendre comptedes dégâts et recommandentl'exécution immédiate des quelquetrois cents condamnés.Note du 6 septembre 1943

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La guillotine de Plötzensee a étéendommagée au cours des bombar-déments du 3 au 4 septembre1943 et doit être réparée à la prisonde Tegel. Le ministère de la Justicepropose alors le 7 septembre detransférer les exécutions à laprison de Brandebourg-Görden.Parallèlement, le procureur généraldu Reich près le Tribunal duPeuple donne un ordre d'exécutionpour trente-quatre cas dont la

procédure de recours en grâceest terminée. La pendaisondes condamnés est prévue pourle soir même à Plötzensee.Document ministérieldu 7 septembre 1943

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Les exécutions commencent lesoir du 7 septembre 1943.Cent quatre-vingt-six personnes,pour certaines sans qu'il aitété statué sur leur recours en grâce,sont pendues pendant la premièrenuit. En plus des ordres d'exécutiontransmis par écrit par le procureurgénéral, le ministère de la Justice enavait communiqué d'autres partéléphone, après avoir été informéoralement du rejet des recours.

Plusieurs méprises s'étaient alorsproduites. Mis au courant lelendemain matin, le ministre de laJustice Otto Thierack exige, endépit de ces événements révoltants,la poursuite des exécutions.Note du 8 septembre 1943

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Les exécutions de la nuit du7 au 8 septembre 1943, ordonnéestéléphoniquement par le ministèrede la Justice, sont dirigées parun membre du Parquet. Une listemanuscrite des personnes àexécuter, comportant le numérodu rejet de la grâce, est établie.Par la suite, cette liste est conservéesous pli scellé, remplacée parun exemplaire dactylographié avantd'être classée.

Page de la liste manuscrite,7/8 septembre 1943

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Le 8 septembre au matin, leprocureur Stoltz informe le ministèrede la Justice des « méprises »,dues essentiellement à la mauvaiselisibilité des listes manuscritesrédigées et complétées toute la nuitpar les fonctionnaires.Les exécutions se poursuivrontmalgré tout les nuits suivantes. Unrapport d'enquête présenté ulté-rieurement par le procureur généralprès le Kammergericht de Berlin,

Hanssen, excusera les erreurspar le fait que les noms tchèquesen particulier ont souvent uneconsonance similaire.Note (rapport provisoire) du procu-reur général, 8 septembre 1943

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En dépit de l'ouverture d'uneenquête disciplinaire devant faire lalumière sur les embarrassantes«erreurs de procédure» survenuesau cours des quelque deux centcinquante exécutions du 7 au12 septembre, ni les fonctionnairesresponsables ni le personnelchargé des exécutions n'auront desuites à redouter. Le ministèresemble surtout préoccupéde réparer la mauvaise impression

produite par l'enlèvement tardifdes corps.Note du procureur général,15 septembre 1943

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De la condamnation à mortà la facture de l'exécution :la mort bureaucratisée

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À elle seule, la justice civile duIIIe Reich prononce plus de seizemille cinq cents peines capitales,dont plus des trois quarts serontexécutées. Entre le verdict etl'exécution se déroule une procé-dure administrative d'une rigueurbureaucratique impitoyable à l'égarddes victimes. En avril 1944 parexemple, il suffit de souhaiter la finde la guerre pour être, tel le tourneursur fer communiste Walter Erich

Kluge, condamné à mort pour« démoralisation » et atteinte à lasûreté de l'État.Première page de la copie dujugement, avril 1944

« L'accusé a exprimé à plusieursreprises dans une usine d'armementle souhait que nous perdions laguerre pour qu'enfin les bolcheviksarrivent dans le pays car le commu-nisme est un régime idéal.

En conséquence, l'accusé estcondamné à la peine capitalepour démoralisation, collaborationavec l'ennemi et tentative d'atteinteà la sûreté de l'État.

Il est privé à jamais de ses droitsciviques. »

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Un recours en grâce est engagéde plein droit après chaque con-damnation à mort, donnant l'occa-sion au condamné et à sa famillede demander la commutationde la sentence en peine de prison.Seul Hitler possède le droit de grâce.Le ministère de la Justice préparele dossier et recommande dansla plupart des cas le rejet de lademande. Hitler approuve générale-ment ces recommandations mais

intervient parfois personnellementdans certaines affaires. Le rejetdes recours en grâce concernantdix-sept membres du réseauHarnack/Schulze-Boysenen juillet 1943 est signé de sa main.Rejet du recours en grâce,21 juillet 1943

Au chef du haut commandement dela Wehrmacht.

Objet :

Recours en grâce de 17personnes condamnéesà la peine capitale et à la privationpermanente de leurs droitsciviques par le Tribunal militairedu Reich dans le dossierde l'« Orchestre rouge » : [...]

Le recours en grâce est rejeté.Adolf Hitler »

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«LE FÜHRER

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Après le rejet du recours, on fixela date de l'exécution, qui estcommuniquée à toutes les per-sonnes concernées. Les condamnéssont informés quelques heuresauparavant. Ici, en présencede plusieurs fonctionnaires requisd'office, le procureur annoncele 3 décembre 1942 à 13 heures àHanno Günther, vingt-deux ans,condamné à mort pour sonappartenance au groupe Rütli, que

son exécution est fixée à 20 heures.Procès-verbal de l'ouverture dela procédure d'exécution, daté du3 décembre 1942

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Le déroulement de chaque exé-cution doit faire l'objet d'un procès-verbal. Le nom du condamné etdes personnes présentes ainsi quel'heure de la mort sont consignéssur un formulaire. La mentionaffirmant que le condamné a affrontéla mort « avec calme et sérénité »est préimprimée. Comme dans lecas d'Emmy Zehden, Témoin deJéhovah condamné pour avoir cachéchez soi son fils adoptif et deux

autres insoumis, l'exécution parla guillotine ne dure que quelquessecondes.Procès-verbal de l'exécution du9 juin 1944

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Les trois bourreaux officiels et leursassistants ne peuvent procéderà une exécution qu'après avoir reçuun mandat écrit du service compé-tent. William Bauer a été condamnéle 31 mars 1943 par le Tribunal duPeuple pour « avoir cherché à saperla volonté de résistance héroïquedu peuple allemand en ayant notam-ment affirmé à un couple rencontrépar hasard, donc par des propospublics, qu'il n'y avait pas deux solu-

tions, qu'où bien c'était Hitler quinous foutait en l'air, ou bienc'était nous qui le foutions en l'air».Mandat d'exécution capitale du2 septembre 1943

« Mandat d'exécution.

Le bourreau Röttger de Berlinest chargé d'exécuter par laguillotine William Bauer, condamnésur décision définitive à la peinecapitale. »

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Le Règlement des exécutions définitde façon précise quelles personnesdoivent assister au supplice.Est requise la présence de plusieursfonctionnaires de justice et dumédecin de la prison. Des laissez-passer sont délivrés aux avocats etaux autres témoins. En octobre1942, le ministre de la Justiceinterdit aux aumôniers, jusque-làautorisés à assister aux exécutions,d'accompagner les condamnésdans la salle du supplice.

Le dessinateur catholique HermannSchmetz a été condamné à mortle 11 octobre 1940 pour sa collabo-ration présumée avec les servicesde renseignements belges.Deux laissez-passer pour les exécu-tions des 30 mars et 18 décembre1940

« Le porteur du présentlaissez-passer est autorisé à assisterà l'exécution capitale d'Emil Bone,qui aura lieu le samedi 30 mars1940 à 6 heures 05 à la prison deBerlin-Plötzensee.Berlin, le 20 mars 1940.

Le procureur général du Reichprès le Tribunal du Peuple »

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Les frais d'exécution sont à lacharge de la famille du condamné.La facture, d'une précision mathé-matique, comporte la rémunérationdu bourreau, les frais journaliersoccasionnés par la détentionpréventive et le temps passé dansla cellule du condamné du mort,sans oublier les frais de port.À part la facture ci-dessous, on neconnaît rien d'autre de GustavNeubauer, condamné pour démo-ralisation.Facture présentée à la familledu condamné, mai 1944

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Outre la facture de l'exécution,un avis laconique est généralementla seule information que la familleobtient au sujet des dernières heuresdu condamné. Souvent, les lettresd'adieu et les dernières penséesrestent dans les dossiers sans êtreremises aux familles. Commed'autres personnes, la veuve deHasso von Boehmer tentera en vain,une fois la guerre terminée, deconnaître les circonstances de lamort de son mari, condamnépour sa participation à l'attentat du20 juillet 1944.Avis d'exécution de la sentenceadressé à la famille, 8 mars 1945

« L'ancien lieutenant-colonelHasso von Boehmer a été condamnépar le Tribunal du Peuple de laGrande Allemagne à la peine capitalepour atteinte à la sûreté de l'Étatet haute trahison.

Le jugement a été exécuté le5 mars 1945.

La publication d'une annoncenécrologique est interdite. »

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Toutes les exécutions judiciairessont consignées dans un « registredes assassinats», dont certainesparties seulement seront retrouvéesaprès la guerre. Les noms inscritssur les milliers de fiches sontsouvent la seule trace qui subsistedes gens assassinés par la justicenazie.

Dans certains cas, tel celui desacteurs de l'attentat du 20 juillet,l'opinion apprend avant mêmela fin de la guerre qu'il s'agissaitd'opposants actifs au régimenational-socialiste. Parmi ces per-sonnes, on compte Erich Fellgiebel,Fritz-Dietlof von der Schulenburg,Berthold Schenk von Stauffenberget Alfred Kranzfelder.Extrait du registre des assassinats,selon son appellation officielle,10 août 1944

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À force de persévérance, la famillepeut réussir, dans les deux dernièresannées de la guerre, à obtenir laremise des objets personnels laisséspar le condamné. La veuve del'ancien président du WurtembergEugen Bolz, exécuté le 23 janvier1945 pour sa participation au20 juillet, n'est autorisée qu'au boutd'un mois et demi à récupérerà la prison de Plötzensee les objetslaissés par son mari. Aujourd'hui

encore, on ignore où et commentfurent enterrés la plupart descondamnés.Avis de remise des objetspersonnels du condamné, 5 mars1945

« En réponse à la demandede l'épouse Bolz, datée du24 janvier 1945, je vous informe envotre qualité de mandataire queles biens appartenant au condamnéBolz sont à votre disposition.Veuillez prendre contact avec laprison de Berlin-Plötzensee en vuede leur restitution. »

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Plötzensee:Lieu du martyre – lieu du crime

Le souvenir appelle l'interrogationLa justice sous le nazismeLa peine de mort à Plötzensee

Des hommes en rébellion contre le nazisme

Communistes, socialistes et sociaux-démocratesLes groupes de jeunesLe groupe RütliLe groupe BaumLe réseau Harnack/Schulze-BoysenLes prisonniers étrangersLa résistance au quotidienLes acteurs du coup d'État manqué du 20 juillet 1944

Documents

De l'exception à la règle :La peine de mort sous le IIIe ReichExécutions en masse à Plötzensee :

De la condamnation à mort à la facture de l'exécution:la mort bureaucratisée

Bibliographie

Les « nuits sanglantes » de septembre 1943

Page 80: Le Mémorial de Plötzensee€¦ · Le Mémorial de Plötzensee se trouve dans et autour de l'ancien bâtiment des exécutions, au milieu des établissements de détention modernisés

Mémorial de laRésistance allemande

Mémorial de laRésistance allemandeStauffenbergstrasse 13-14Entrée par la Cour d'honneur10785 Berlin-Mitte

Heures d'ouverture :du lundi au mercredi, vendredi

RéservationsTéléphone 030-26995000

030-26995013Télécopie 030-26995010

rendez-vous, diverses manifestationspour groupes :

Visites guidées de partiesde l'exposition avec commentairesd'actes de résistance individuelsou collectifs, de leurs motivations etde leurs objectifs. Les thèmespeuvent être choisis au moment dela réservation ou avant la visite(durée : 90 à 120 minutes).

Projections de films(également après les visites guidéesde l'exposition). Un grand nombrede films de fiction et dedocumentaires sont proposés.(Durée : 30 à 140 minutesselon le film)

Séminaires dont les thèmeset le déroulement sont décidés encommun avec les participants,en fonction de leurs intérêts(thèmes possibles :nous consulter, durée variable,31/2 heures minimum).

Recyclage et formation continuepour les enseignants, le personneléducatif et le personnel de formation(thèmes et durée : nous consulter).Assistance à des projets d'organisa-tion d'expositions sur des thèmesspécifiques de la Résistanceau nazisme (thèmes et durée : nousconsulter).

Les dates des conférences et desautres manifestations publiquesorganisées par le Mémorial de laRésistance allemande sont publiéesdans la presse. Les personnesdésirant être informées à l'avancedes manifestations sont priéesde nous laisser leur adresse.

Le Mémorial est situé dans laStauffenbergstrasse (Bendlerstrassejusqu'en 1955), à l'emplacementhistorique de l'ancien hautcommandement de l'armée de terre.

Dans les locaux de l'actuelle expo-sition se trouvait le bureau du comteClaus Schenk von Stauffenberg,utilisé comme quartier général de latentative de coup d'État du 20 juillet1944. À la suite de son échec etdu suicide forcé du général LudwigBeck, Claus von Stauffenberg, legénéral Friedrich Olbricht, le colonelAlbrecht Mertz von Quirnheim et lelieutenant Werner von Haeften furentfusillés le soir même dans ce quiest aujourd'hui la Cour d'honneur.

À travers 5000 photos et docu-ments illustrant 26 thèmes, l'exposi-tion permanente inaugurée en1989 met en lumière l'ampleur et ladiversité de l'opposition et de lalutte contre le nazisme.Y sont traitées non seulement larésistance politique mais aussiles multiples formes d'insoumissionfondée sur la foi chrétienne, lestentatives de coup d'État militaireentre 1936 et 1944, la conspirationactive d'opposants résolus aucœur du pouvoir, l'opposition de lajeunesse et la résistance pendantla guerre. Elle inclut en outre laprésentation des divers modèles

de pensée et traditions ainsi que lessituations et objectifs qui ont marquéet rendu possible la Résistancede 1933 à 1945.

Le Mémorial de la Résistanceallemande est un lieu de mémoire,d'éducation civique et d'enseigne-ment. Il souhaite montrer commentdes individus et des groupesont résisté à la dictature nazie dansles années 1933 à 1945 et misà profit leur liberté de manœuvre.

Publications du Mémorial de laRésistance allemande

Documentation accompagnantl'exposition La Résistance aunazisme :fiches et fac-similés sur différentsthèmes.

Beiträge zum Widerstand 1933-1945(Contributions à la recherche surla Résistance entre 1933 et 1945) :Conférences ou articles de témoinset de chercheurs sur différentsaspects de la Résistance

Widerstand in Berlin 1933-1945(La Résistance à Berlin de 1933à 1945) Résultats d'un projetde recherche à long termesur la Résistance dans les différentsarrondissements de Berlin.

Schriften der GedenkstätteDeutscher Widerstand(Ouvrages périodiques publiés parle Mémorial de la Résistanceallemande) :Nouveaux résultats de la rechercheet publication de sources.

Les séries sont mises à jour.Une liste des publications estdisponible sur demande.

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de 9h à 18 heuresjeudi de 9h à 20 heures

10 h à 18 heures

le samedis, dimaches etjours féries de

Entrèe libre

Le Mémorial propose, sur

Site internet: http://www.gdw-berlin.de

E-mail: [email protected]

Page 81: Le Mémorial de Plötzensee€¦ · Le Mémorial de Plötzensee se trouve dans et autour de l'ancien bâtiment des exécutions, au milieu des établissements de détention modernisés

Réalisation Sources

Le Mémorial de Plötzenseese trouve Hüttigpfad,13627 Berlin-Charlottenbourg.Téléphone: +4930-3443226 (Plötzensee)ou +4930-26995000

(Mémorial de la Résistance allemande)

Heures d'ouverture :

Entrée libre

©1996by Gedenkstätte Deutscher Widerstand,Stauffenbergstrasse13-14,10785 Berlin-Tiergarten

Rédaction :Ferdinand SchwenknerTraduction : Bernard Mangin, BerlinConception graphique :Atelier du professeur Hans Peter Hoch,BaltmannsweilerImpression :Druckhaus am Treptower Park GmbH,Berlin

Tous droits réservésImprimé en Allemagne en 1996ISBN 3-926082-07-0

Die Deutsche Bibliothek -CIP-Einheitsaufnahme

Le Mémorial de Plötzensee/[Mémorial de laRésistance Allemande Berlin], Brigitte Oleschinski.[Übers. : Bernard Mangin (aus dem Dt. ins Franz.)]. –Berlin: Gedenkstätte Dt. Widerstand, 1996Dt. Ausg. u.d.T. : Gedenkstätte Plötzensee. –Engl. Ausg. u.d.T. : Plötzensee Mémorial CenterISBN 3-926082-07-0NE: Oleschinski, Brigitte; Mangin, Bernard [Übers.];Gedenkstätte Deutscher Widerstand < Berlin >

Photographies et documents

Bundesarchiv: 43/44, 45, 46-49,50/51, 53, 54/55, 56/57, 58, 59, 60,61/62, 63, 65, 66/67, 68, 69, 74.Bildarchiv Preußischer Kulturbesitz,Berlin: 34.Diözesanarchiv, Ratisbonne : 52.Mémorialde la Résistance allemande, Berlin :2/3, 7, 14, 16, 19 (2), 21, 22, 23, 24,25, 26, 30, 31(2), 32, 35, 36(2),37(2), 38(2), 39(2), 70, 71 (2), 72.Landesbildstelle, Berlin : 4, 5, 6, 8, 9,17,18,20,40(2).Klaus Lehnartz: couverture.En possession privée : 27, 73, 75.

Références des citations

Page 4 : texte du documentsigné par le Bourgmestre-régnantErnst Reuter et placé dans lapremière pierre du Mémorial dePlötzensee en septembre 1951.

Page 5: Gostomski/Loch,Der Tod von Plötzensee(La Mort de Plötzensee), 1993,page 106.

Page 15 : Gruchmann,Hitler über die Justiz (La justice vuepar Hitler), in : Vierteljahrshefte fürZeitgeschichte n°12, 1964,page 96.

Page 19: Poelchau,Die letzten Stunden (Les dernièresheures), 1987,pages 48, 49, 50.

Page 35 : Gostomski/Loch,Der Tod von Plötzensee (La Mort dePlötzensee), 1969,page 185.

L'utilisation de la présente brochureà des fins politiques est interdite.

80 © 2002 Gedenkstätte Deutscher Widerstand

Télécopie: + 4930 - 26995010

Mars au octobre de 9h à 17 heuresNovembre au février de 9h à 16 heures(fermé les 24, 25, 26 et 31 decembre et le 1er janvier )