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Dimanche 1 er - Lundi 2 septembre 2013 - 69 e année - N˚21343 - 1,80 ¤ - France métropolitaine - www.lemonde.fr --- Fondateur : Hubert Beuve-Méry - Directrice : Natalie Nougayrède I ls ont crié victoire. Le juge- ment rendu vendredi 30 août par le conseil des prud’hommes de Compiè- gne donne raison à 680 ex-sala- riés du fabricant de pneumati- ques Continental. Mais il souli- gne aussi la tragédie de la trop fréquente absence de dialogue social en France. A l’issue d’une démonstration sévère, le juge invalide le motif économique du licenciement et condamne l’entreprise et sa mai- son mère allemande à verser des indemnités allant de six à vingt- quatre mois de salaires, selon les cas. Cette victoire à un goût amer, puisque l’usine de Clairoix, dans l’Oise, qui les a licenciés a fermé il y a trois ans et demi. Les procé- dures ont leur rythme. Et ce n’est pas fini, car le fabricant alle- mand pourrait attaquer ces 680 décisions devant la cour d‘appel. Il considère qu’elles n’ont « aucun sens ». La bataille des « Conti », com- me on a pris l’habitude de les appeler, avait pris une valeur symbolique. Ils ont multiplié les coups d’éclat après l’annonce, en mars 2009, de la fermeture du site. L’opinion a été prise à témoin de cette affaire qui tou- chait une usine de 1 113 salariés dans un bassin d’emploi déjà durement affecté. Rien n’y a fait : le groupe, invoquant des surca- pacités, a maintenu la fermeture du site. Ce conflit était devenu emblé- matique. Au point que certains s’inquiétaient de l’image détesta- ble que la France sociale livrait ainsi aux entreprises étrangères qui auraient songé à s’y implan- ter. Pour d’autres, c’était au contraire la signature d’un capi- talisme sans visage préférant fer- mer une usine aux moindres fri- mas pour aller investir dans des pays à la main-d’œuvre bon mar- ché. La loi « sur la sécurisation de l’emploi » votée ce printemps, sur la base de l’accord signé en janvier entre le patronat, la CFDT, la CFTC et la CGC, y aurait- elle changé quelque chose ? Elle limite la « judiciarisation » des procédures sociales en France. Elle doit bouleverser le déroule- ment des restructurations. Elle est un puissant moteur pour encourager la négociation sociale. Puisque, en cas de signa- ture par des syndicats représen- tant la majorité des salariés, la contestation des plans sociaux devant la justice sera plus diffici- le. En revanche, la contestation du motif économique du licen- ciement, comme à Clairoix, reste- ra possible devant les prud’hom- mes. C’est une sorte de victoire pos- thume que les « Conti » rempor- tent. Les indemnités même les plus confortables ne pourront pas tout réparer. Les syndicats ont recensé depuis la fermeture de Clairoix deux suicides et pas moins de 256 divorces parmi les ex-employés du site. Selon les syndicats, la moitié des « Conti » n’ont pas retrouvé d’emploi. Une centaine arrivent en fin de droits et vont se retrou- ver au RSA. Des chiffres contes- tés par Continental, dont la cellu- le de reclassement est toujours active sur place. L’affaire traduit les dégâts pro- voqués par le niveau déplorable du dialogue social en France. Bien souvent jeu de rôles carica- tural entre l’obstruction des uns et la mauvaise foi des autres, il interdit toute négociation constructive. D’autres solutions étaient envisageables pour Clairoix. L’accord de compétitivité signé ce printemps chez Renault, avant la réforme, montre que tout ne dépend pas de la loi. Mais pour négocier, il faut se res- pecter. p LE GÉNIE HILARANT DE MARCEL GOTLIB CULTURE – LIRE PAGE 10 « House of Cards » en tête, les nouvelles séries déferlent SUPPLÉMENT TÉLÉVISIONS – LIRE PAGES 2-3 DUBET « LA CRISE SCOLAIRE EST POLITIQUE » REGARDS SUR LA FRANCE – LIRE PAGE 13 Figure majeure de la photographie de guerre, Don McCullin a couvert tous les grands conflits de son époque. Installé au cœur de la campagne anglaise du Sussex, le photogra- phe de 78 ans est passé à la pho- to de paysage, mais les souve- nirs des guerres sanglantes continuent de marquer sa vie. Le reporter est l’invité du 25 e fes- tival de photojournalisme de Perpignan, Visa pour l’image, avec une rétrospective qui pré- sente ses clichés de l’offensive du Têt au Vietnam, le massacre de la Quarantaine pendant la guerre du Liban… Autant d’ima- ges violentes et noires, au plus près des combats, qui secouaient les lecteurs du Sunday Times Magazine. LIRE PAGE 9 ÉDITORIAL Les « Conti » et le dialogue social en France Entre inventaire et nostalgie, le sarkozysme divise encore t Les Amis de Nicolas Sarkozy se réunissent en petit comité les 1 er et 2 septembre à Arcachon. Les barons de l’UMP s’émancipent de l’ex-président DON McCULLIN, PHOTOGRAPHE HANTÉ Loi sur la récidive : Christiane Taubira a imposé sa réforme SYRIE : LES PREUVES SELON KERRY a Les inspecteurs de l’ONU ont quitté Damas. L’armée française est prête Christiane Taubira, vendredi 30 août. CORENTIN FOHLEN POUR « LE MONDE » G20 : ÉMERGENTSFÂCHÉS L e secrétaire d’Etat américain, John Kerry, a présenté, vendredi 30 août, les éléments qui donnent aux Etats-Unis la certitude de l’utilisation d’armes chimiques à Damas le 21 août. La tuerie aurait fait 1 429 morts, dont 426 enfants. Barack Obama a confirmé que Wash- ington s’apprête à frapper la Syrie afin d’inciter Damas à ne plus utiliser d’armes chimiques. La France, de son côté, tient prêtes ses forces aériennes et navales. Après la confirmation par François Hollande dans Le Monde de la participa- tion française à l’opération militaire, une ques- tion demeure : l’ampleur et la nature des cibles désignées.Le départ des inspecteurs de l’ONU de Damas semble ouvrir la voie à une intervention rapide. p LIRE PAGES 2-3 ET L’ANALYSE PAGE 16 I ls seront bien moins nom- breux que l’an dernier. La ren- trée des Amis de Nicolas Sarko- zy, qui aura lieu dimanche 1s et lun- di 2 septembre à Arcachon (Giron- de), réunira le noyau dur des fidè- les de l’ancien président (Brice Hor- tefeux, Nadine Morano ou Henri Guaino), ainsi que l’ancien pre- mier ministre, Alain Juppé, Eric Woerth ou Christian Estrosi. La plu- part des ministres de Nicolas Sarkozy, qui s’étaient pressés lors de la première édition, en août 2012, ont déserté. C’est que l’été n’a guère été profi- table à l’ex-chef d’Etat : si la base militante et les sondages lui res- tent favorables, les ténors de l’UMP jouent désormais ouverte- ment contre lui. François Fillon et ses fidèles l’affrontent publique- ment ; Jean-François Copé, qui s’en était tenu jusqu’alors à une pru- dente réserve, a ouvert les hostili- tés. Mi-août, le président de l’UMP a autorisé le « droit d’inventaire » en proposant un débat « sérieux et objectif » qui devra être clos « avant la mi-octobre ». Jusqu’ici bloqué par l’ancienne majorité, l’examen de l’héritage de l’ancien président est donc désormais ouvert. Le Monde a demandé à des intel- lectuels de la droite libérale ou conservatrice, fédéraliste ou sou- verainiste de faire le bilan de son action à l’Elysée. Denis Tillinac, Yves Roucaute, Chantal Delsol et Arno Klarsfeld livrent leur diagnos- tic de ce qu’il reste du sarkozysme. Directrice de recherche à Sciences Po, Florence Haegel estime, pour sa part, que l’inventaire est une « opération périlleuse » pour un parti qui traverse une grave crise idéologique et financière. p LIRE PAGE 8 ET DÉBATS PAGES 14-15 UK price £ 1,80 t Dans un entretien au « Monde », la garde des sceaux se félicite de l’arbitrage présidentiel LIRE PAGES 6-7 L es pays « émergents » vont se saisir du sommet du G20 – qui réunit les grandes économies du Nord et du Sud les 5 et 6 septembre en Rus- sie, à Saint-Pétersbourg – pour dénoncer la politique monétaire de leurs interlocuteurs américains et européens. Ils attribuent notamment une partie de leurs difficultés de l’heure – fuite des capitaux, effondre- ment de certaines monnaies, etc. – à la décision de la Réserve fédérale américaine de resserrer sa politique de crédit. Pour autant, ils restent confiants dans leurs perspectives de croissan- ce. Et ils ont bien raison de l’être, explique au « Monde » Lionel Zinsou, président du fonds PAI Partners. La croissance des émergents est « irréver- sible », dit-il, et ne sera pas durablement affectée par les problèmes conjoncturels qu’ils rencontrent. p LIRE CAHIER ÉCO PAGES 2-3 Algérie 150 DA, Allemagne 2,20 ¤, Andorre 2,00 ¤, Autriche 2,40 ¤, Belgique 1,80 ¤, Cameroun 1 800 F CFA, Canada 4,50 $, Côte d’Ivoire 1 800 F CFA, Croatie 19,50 Kn, Danemark 28 KRD, Espagne 2,20 ¤, Finlande 3,50 ¤, Gabon 1 800 F CFA, Grande-Bretagne 1,80 £, Grèce 2,20 ¤, Guadeloupe-Martinique 2,00 ¤, Guyane 2,40 ¤, Hongrie 850 HUF, Irlande 2,20 ¤, Italie 2,20 ¤, Luxembourg 1,80 ¤, Malte 2,50 ¤, Maroc 12 DH, Norvège 28 KRN, Pays-Bas 2,40 ¤, Portugal cont. 2,20 ¤, La Réunion 2,00 ¤, Sénégal 1 800 F CFA, Slovénie 2,50 ¤, Suède 35 KRS, Suisse 3,20 CHF, TOM Avion 400 XPF, Tunisie 2,20 DT, Turquie 7,00 TL, USA 4,50 $, Afrique CFA autres 1 800 F CFA,

Le Monde Du Dimanche01 Et Lundi 02 Septembre 2013

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Page 1: Le Monde Du Dimanche01 Et Lundi 02 Septembre 2013

Dimanche 1er - Lundi 2 septembre 2013 - 69e année - N˚21343 - 1,80 ¤ - Francemétropolitaine - www.lemonde.fr --- Fondateur : Hubert Beuve-Méry - Directrice: Natalie Nougayrède

Ils ont crié victoire. Le juge-ment rendu vendredi30août par le conseil desprud’hommes de Compiè-

gne donne raison à 680ex-sala-riés du fabricant de pneumati-ques Continental. Mais il souli-gne aussi la tragédie de la tropfréquente absence de dialoguesocial en France.

A l’issued’unedémonstrationsévère, le juge invalide le motiféconomique du licenciement etcondamnel’entrepriseetsamai-sonmèreallemandeà verserdes

indemnités allant de six à vingt-quatremoisde salaires, selon lescas.

Cette victoire à un goût amer,puisque l’usinedeClairoix, dansl’Oise, qui les a licenciés a ferméil y a trois ans et demi. Les procé-duresont leur rythme.Etcen’estpas fini, car le fabricant alle-mand pourrait attaquer ces 680décisionsdevant la courd‘appel.Il considère qu’elles n’ont«aucun sens».

La bataille des «Conti», com-me on a pris l’habitude de lesappeler, avait pris une valeursymbolique. Ils ontmultiplié lescoupsd’éclataprès l’annonce,enmars2009, de la fermeture du

site. L’opinion a été prise àtémoin de cette affaire qui tou-chait une usine de 1 113 salariésdans un bassin d’emploi déjàdurementaffecté.Rienn’ya fait :le groupe, invoquant des surca-pacités,amaintenula fermeturedu site.

Ce conflit était devenuemblé-matique. Au point que certainss’inquiétaientdel’imagedétesta-ble que la France sociale livraitainsi aux entreprises étrangèresqui auraient songé à s’y implan-ter. Pour d’autres, c’était aucontraire la signature d’un capi-talismesansvisagepréférantfer-meruneusineauxmoindres fri-mas pour aller investir dans despaysàlamain-d’œuvrebonmar-ché.

La loi «sur la sécurisation del’emploi» votée ce printemps,sur la base de l’accord signé enjanvier entre le patronat, laCFDT, la CFTC et la CGC, y aurait-elle changé quelque chose? Ellelimite la « judiciarisation» desprocédures sociales en France.Elle doit bouleverser le déroule-mentdes restructurations.

Elle est un puissant moteurpour encourager la négociationsociale. Puisque, en cas de signa-ture par des syndicats représen-tant la majorité des salariés, lacontestation des plans sociauxdevant la justiceseraplusdiffici-

le. En revanche, la contestationdu motif économique du licen-ciement,commeàClairoix,reste-rapossibledevantlesprud’hom-mes.

C’estunesortedevictoirepos-thume que les «Conti» rempor-tent. Les indemnités même lesplus confortables ne pourrontpas tout réparer. Les syndicatsont recensé depuis la fermeturede Clairoix deux suicides et pasmoins de 256 divorces parmi lesex-employésdu site.

Selon les syndicats, la moitiédes «Conti» n’ont pas retrouvéd’emploi. Une centaine arriventen findedroits et vont se retrou-ver au RSA. Des chiffres contes-tésparContinental,dontlacellu-le de reclassement est toujoursactive sur place.

L’affairetraduit lesdégâtspro-voqués par le niveau déplorabledu dialogue social en France.Bien souvent jeu de rôles carica-tural entre l’obstruction des unset la mauvaise foi des autres, ilinterdit toute négociationconstructive.

D’autres solutions étaientenvisageables pour Clairoix.L’accord de compétitivité signéce printemps chez Renault,avant la réforme, montre quetout ne dépend pas de la loi.Maispournégocier, il fautseres-pecter.p

LE GÉNIE HILARANTDE MARCEL GOTLIBCULTURE–LIRE PAGE 10

«HouseofCards»entête,lesnouvellessériesdéferlentSUPPLÉMENT TÉLÉVISIONS–LIRE PAGES 2-3

DUBET « LA CRISESCOLAIRE EST POLITIQUE »REGARDS SUR LA FRANCE–LIRE PAGE 13

Figuremajeure de laphotographie de guerre,DonMcCullin a couvert tous lesgrands conflits de son époque.Installé au cœur de la campagneanglaise du Sussex, le photogra-phe de 78ans est passé à la pho-to de paysage,mais les souve-nirs des guerres sanglantescontinuent demarquer sa vie.Le reporter est l’invité du 25e fes-tival de photojournalismedePerpignan, Visa pour l’image,avec une rétrospective qui pré-sente ses clichés de l’offensivedu Têt auVietnam, lemassacrede la Quarantaine pendant laguerre du Liban…Autant d’ima-ges violentes et noires,au plus près des combats,qui secouaient les lecteursdu Sunday TimesMagazine.LIREPAGE9

ÉDITORIAL

Les «Conti»et ledialoguesocialenFrance

Entre inventaireetnostalgie,le sarkozysmediviseencore

tLesAmisdeNicolasSarkozyse réunissentenpetit comité les 1er et 2 septembreàArcachon.Lesbaronsde l’UMPs’émancipentde l’ex-président

DON McCULLIN,PHOTOGRAPHEHANTÉ

Loisurlarécidive:ChristianeTaubiraaimposésaréforme

SYRIE : LES PREUVES SELON KERRYa Les inspecteursde l’ONUontquittéDamas. L’arméefrançaiseestprête

Christiane Taubira,vendredi 30août.CORENTIN FOHLEN POUR «LE MONDE»

G20 : ÉMERGENTSFÂCHÉS

L e secrétaire d’Etat américain, John Kerry, aprésenté, vendredi 30août, les élémentsqui donnent aux Etats-Unis la certitude de

l’utilisation d’armes chimiques à Damas le21août. La tuerie aurait fait 1429morts, dont426enfants.BarackObamaaconfirméqueWash-ington s’apprête à frapper la Syrie afin d’inciterDamasàneplusutiliserd’armes chimiques.

La France, de son côté, tient prêtes ses forcesaériennes et navales. Après la confirmation parFrançoisHollandedansLeMondede laparticipa-tion française à l’opération militaire, une ques-tion demeure: l’ampleur et la nature des ciblesdésignées.Le départ des inspecteurs de l’ONUdeDamas semble ouvrir la voie à une interventionrapide.p LIRE PAGES 2-3 ET L’ANALYSE PAGE 16

I ls seront bien moins nom-breux que l’an dernier. La ren-tréedesAmisdeNicolasSarko-

zy,quiauralieudimanche1setlun-di 2 septembre à Arcachon (Giron-de), réunira le noyau dur des fidè-lesdel’ancienprésident(BriceHor-tefeux, Nadine Morano ou HenriGuaino), ainsi que l’ancien pre-mier ministre, Alain Juppé, EricWoerthouChristianEstrosi.Laplu-part des ministres de NicolasSarkozy, qui s’étaient pressés lorsde la première édition, en août2012, ontdéserté.

C’estquel’étén’aguèreétéprofi-table à l’ex-chef d’Etat : si la basemilitante et les sondages lui res-tent favorables, les ténors del’UMP jouent désormais ouverte-ment contre lui. François Fillon etses fidèles l’affrontent publique-ment; Jean-FrançoisCopé,quis’enétait tenu jusqu’alors à une pru-dente réserve, a ouvert les hostili-

tés.Mi-août, le présidentde l’UMPa autorisé le «droit d’inventaire»enproposantun débat «sérieux etobjectif » qui devra être clos«avant la mi-octobre». Jusqu’icibloqué par l’ancienne majorité,l’examen de l’héritage de l’ancienprésident est donc désormaisouvert.

LeMondeademandéàdes intel-lectuels de la droite libérale ouconservatrice, fédéraliste ou sou-verainiste de faire le bilan de sonaction à l’Elysée. Denis Tillinac,Yves Roucaute, Chantal Delsol etArnoKlarsfeldlivrentleurdiagnos-tic de cequ’il reste du sarkozysme.Directrice de recherche à SciencesPo, Florence Haegel estime, poursa part, que l’inventaire est une«opération périlleuse» pour unparti qui traverse une grave criseidéologiqueet financière.p

LIRE PAGE 8ETDÉBATS PAGES 14-15

UKprice£1,80

tDansunentretienau«Monde»,la gardedes sceauxse félicitede l’arbitrageprésidentielLIRE PAGES 6-7

L es pays «émergents» vont se saisir du sommetduG20– qui réunitlesgrandeséconomiesduNordetduSudles5et6septembreenRus-sie, à Saint-Pétersbourg – pour dénoncer la politiquemonétaire de

leurs interlocuteursaméricains et européens. Ils attribuentnotammentune partie de leurs difficultés de l’heure – fuite des capitaux, effondre-ment de certaines monnaies, etc. – à la décision de la Réserve fédéraleaméricainede resserrer sa politiquede crédit.

Pour autant, ils restent confiants dans leurs perspectives de croissan-ce. Et ils ont bien raison de l’être, explique au «Monde» Lionel Zinsou,présidentdufondsPAIPartners.Lacroissancedesémergentsest«irréver-sible», dit-il, et ne sera pas durablement affectée par les problèmesconjoncturelsqu’ils rencontrent.p LIRE CAHIER ÉCO PAGES2-3

Algérie 150 DA,Allemagne 2,20 ¤,Andorre 2,00 ¤, Autriche 2,40 ¤, Belgique 1,80 ¤,Cameroun 1 800 F CFA, Canada 4,50 $, Côte d’Ivoire 1 800 F CFA, Croatie 19,50 Kn, Danemark 28 KRD, Espagne 2,20 ¤, Finlande 3,50 ¤, Gabon 1 800 F CFA, Grande-Bretagne 1,80 £, Grèce 2,20 ¤, Guadeloupe-Martinique 2,00 ¤,Guyane 2,40 ¤, Hongrie 850 HUF, Irlande 2,20 ¤, Italie 2,20 ¤, Luxembourg 1,80 ¤,Malte 2,50 ¤,Maroc 12 DH,Norvège 28 KRN, Pays-Bas 2,40 ¤, Portugal cont. 2,20 ¤, La Réunion 2,00 ¤, Sénégal 1 800 F CFA, Slovénie 2,50 ¤, Suède 35 KRS, Suisse 3,20 CHF, TOM Avion 400 XPF, Tunisie 2,20 DT, Turquie 7,00 TL,USA 4,50 $, Afrique CFA autres 1 800 F CFA,

Page 2: Le Monde Du Dimanche01 Et Lundi 02 Septembre 2013

JohnKerry, le 30août àWashington, lors de la présentation des éléments de preuve de l’implication de Damas dans l’attaque chimique du 21août. SAUL LOEB/AFP

international

WashingtonCorrespondante

L edécorn’étaitpasaussisolen-nel que celui du conseil desécurité des Nations unies le

5 février 2003. Mais le ton l’était.JohnKerry,seul,deboutdanslasal-le des traités du départementd’Etat,aprésentévendredi30aoûtlesélémentsaccusant le régimedeBachar Al-Assad d’avoir déversédes armes chimiques le 21 aoûtdanslabanlieuedeDamas,«uncri-me contre l’humanité» ouvrant lavoie à des représailles militairescontre le régimesyrien.

La Syrie n’est pas l’Irak, mais ilétaitdifficiledenepasseremémo-rer Colin Powell, le secrétaired’Etat deGeorgeW. Bush, brandis-sant la petite fiole qui était censéecontenirl’anthraxdeSaddamHus-sein. JohnKerry a lui-même fait leparallèle avec « l’expérience ira-kienne». Cette fois, les services derenseignement américains ont

«revu et re-revu» les éléments àcharge, a-t-il assuré. Les Etats-Unis«ne répéteront pas cemoment».

Delaprésentation2013,ilneres-tera pas d’image-gadget. En faitd’accompagnement mutimédia,la Maison Blanche s’est contentéedepublierundocumentdequatrepages et une carte des douze sitesqui ont été contaminés dans larégion de la Ghouta. Pas d’imageforte, mais l’accent passionné dusecrétaired’Etatquiafaitsurgir lescivils asphyxiés, toussant, vomis-sant, agités de spasmes puisinconscients. Et qui a annoncé unbilan effrayant : au moins1 429morts dont 426 enfants.

En 2003, le débat portait sur cequ’on ne savait pas: SaddamHus-sein avait-il bien détruit tout sonstock d’armes de destructionmas-sive? John Kerry, lui, a construittout sondiscours sur «ce que noussavons».LeNewYorkTimesacomp-té24fois l’expression:«Weknow».Le gouvernement américain«sait» que trois jours avant l’atta-que, les équipes responsables desarmes chimiques«étaient en trainde préparer des munitions chimi-ques » – une précision qui,d’ailleurs, a déjà suscité un débutde polémique: si les Américainsavaientinterceptédescommunica-tions, pourquoi n’ont-ils pas infor-mé l’opposition syrienne ? Unhaut responsable américain arépondu que les renseignementsn’arrivaientpastousentempsréel.

En fait de preuves, le dossier–dans sa version non classée –

l’autreayantétécommuniquéeauCongrès – est surtout constituéd’observations, de déductions etd’unecentainedevideos émanantdes réseaux sociaux. Toutes lesroquettessontvenuesducôtégou-vernemental. Toutes sont tom-bées dans les quartiers rebelles.Les vidéos ont montré des morts,des blessés mais «pas une égrati-gnure», a souligné JohnKerry. Pasla moindre blessure par balle :«Des rangées de morts et pas unetache de sang sur les linceulsblancs.» Soigneusement, le rap-portévitedemettreencausedirec-

tement Bachar Al-Assad dans ladécision d’utiliser les gaz neuro-toxiques.Mais il est tenupour res-ponsable de la gestion de sesstocks, indique laMaisonBlanche.

Le gouvernement américain«sait» aussi que les Américainssont « fatigués» de la guerre. Aceux-là, John Kerry a rappelé l’en-jeu: la «crédibilité» des Etats-Unisdans le monde. L’Iran, la Corée duNord, le Hezbollah «observent» etattendent de voir «si la Syrie s’entire». Dans les conversations avecle Congrès, la Maison Blanche faitaussivaloirqu’ilenvadelacrédibi-

lité du président, qui a posé, il y aun an exactement, l’utilisationd’armes chimiques comme une«ligne rouge». Un argument qui afait dire au sénateur JohnMcCainque le but d’une action militairene peut quand même pas être«d’aider le président à sauver laface».

Lespreuvesétantposées, l’incer-tituden’apasdiminuésurlecalen-drier de l’opération. A chaqueapparition, Barack Obama, ainsique le vice-président Joe Biden,essuie la même interpellation. Ladécision a-t-elle été prise ? Ceuxqui surveillent la fumée blanches’échappant de laMaison Blancheassuraient, samedi 31août, que cen’étaitplusqu’unequestiond’heu-res. Les inspecteurs de l’ONU,après une dernière visite dans unhôpitaldelazonegouvernementa-le, où le régime leur avait présentédes soldats victimes présuméesd’armes chimiques, ces « coura-geux» inspecteurs dont a parléJohnKerry,nesont-ilspasdéjàsor-tis de Syrie ?

L’administration Obama, detoute façon, ne compte pas atten-dre les conclusions des enquê-

teurs. Comme l’a rappelé le secré-taired’Etat, leurmandatconsisteàétablir la présence de gaz toxique.En aucun cas d’attribuer les res-ponsabilités.

BarackObamadébat-il avec lui-même comme il le fait à chaquegrandedécision?Ledestinleplacedevantunretournementde situa-tion unique. Lui, le candidat anti-guerre de 2003, élu sur une plate-formeanti-Bush, à l’opposéde l’u-nilatéralisme et du mépris del’ONU professé par son prédéces-seur, le voilà sur le point d’ordon-nerdes frappessans lasanctiondel’ONU et avec une coalition plusétriquée que celle qu’avait réunieGeorgeW. Bush.

L’ironie n’a échappé à person-ne.Et le43eprésident, justement,aété interrogé sur un parcours degolf de Dallas. S’il s’est interdit decommenter sur le fond (« le prési-dentaunedécisiondifficile àpren-dre» ; « je n’étais pas un fan d’As-sad, qui est un ami de l’Iran»), sesanciens amis s’en sont chargéspour lui. Comme Bill Kristol, lenéoconservateur de choc: BarackObama et John Kerry ont «ouvertlesyeux»surlanécessitédel’unila-

téralisme, s’est-il félicité. «Celafait chaudau cœur.»

Le parallèle irakien est évidem-ment un trompe-l’œil. AutantGeorgeW.Bushétaitpresséderen-verser Saddam Hussein, autantBarack Obama freine des quatrefers. Il suffit de l’écouter, entourédes présidents baltes, quelquesminutes après que son secrétaired’Etat ait déclenché le compte àrebours. «Je n’ai pas décidé, répè-te-t-il. Et de décliner tout ce que saréponse ne sera pas. «Pas de bot-tes sur le terrain», pas de campa-gne «prolongée», pas d’opération« indéfinie », mais une action«étroite et limitée». «Personnen’est plus las quemoi de la guerre,a-t-il avoué.Maisunepartiedenosobligations en tant que leader dumonde est de faire en sorte que,quand un régime veut utiliser desarmes qui sont interdites par lesnormes internationales (…), il soittenud’en répondre.»

Obama le «guerrier malheu-reux» comme l’a surnommé lemagazine Time, n’est pas sansamertume. Il se retrouve poussé àune position de leadership àlaquelle il s’est souvent dérobé.« Un tas de gens pensent qu’il fau-drait fairequelquechose.Maisper-sonne ne veut le faire », a-t-ilregretté. p

Corine Lesnes

La guerre en Syrie

«Ce que l’administration améri-caine a qualifié de preuves irréfu-tables (…) n’est rien de plus qued’anciennes histoires diffuséespar les terroristes depuis plusd’une semaine, avec tout cequ’elles comportent de menson-ges, de fabrications et d’histoi-res montées de toutes pièces»,a déclaré leministère syrien desaffaires étrangères dans uncommuniqué lu à la télévisionofficielle syrienne.

Leministère s’est dit «étonné »par le fait «qu’une superpuissan-ce trompe son opinion publiquede cette manière naïve ens’appuyant sur des preuvesinexistantes».Leministère « s’étonne demême que les Etats-Unis fon-dent leurs positions de guerre etde paix sur ce qui est diffusé surdes réseaux sociaux et des sitesInternet », ajoute le communi-qué.

Les inspecteurs de l’ONUont quitté la Syrie

Les«preuves»desEtats-UniscontrelaSyrieWashingtonestconvaincudel’usaged’armeschimiquesparDamas,ouvrant lavoieàdesreprésaillesmilitaires

«L’histoirenousjugeraextrêmentsévèrementsinousdétournonsleregard»VerbatimLesecrétaired’Etataméricain JohnKerryavivementdénoncé« lecrimecontre l’humanité»commisparDamas

PourDamas, les «preuves» sont des «mensonges»

Lesenquêteurs de l’ONUsur lesarmeschimiques sont arrivés auLibandans lamatinéedusamedi31août aprèsavoir quittéDamas,a constatéun journaliste del’AgenceFrancePresse. La hautereprésentante de l’ONUpour ledésarmement, Angela Kane, quiaccompagnait les experts del’ONUenSyrie, avait déjà quittéDamas, la veille, en voiture, etrejoint le Liban, un trajet de45 minutes depuis la capitalesyrienne. Elle devait rendrecompte, samedi à NewYork, deson voyage au secrétaire géné-ral de l’ONU, BanKi-moon.

Washingtonaannoncéunbilan

effrayantdel’attaquechimique :aumoins1 429morts,dont

426 enfants

YNoussavons tousque le régimeAssada leprogramme

d’armeschimiques leplus impor-tantduMoyen-Orient.Noussavonsque le régimeautilisé cesarmesàdemultiples reprises cetteannée (…). Nous savons que troisjours avant l’attaque, le personnelsyrien chargédes armes chimi-ques était sur le terrainpour effec-tuerdespréparatifs. Et quedes élé-ments du régimesyrien avaientreçu l’ordre de sepréparer à cetteattaque.Nous savons que ceciétait des instructions spécifiques.Nous savonsd’où les roquettesont été tirées et à quelleheure.Nous savonsoù et quandellessont tombées.Nous savons queces roquettes ne sont venuesque

de zones contrôléespar le régimeet qu’ellesne sont tombées quesurdes quartiers contrôlés parl’oppositionou sur des zonescontestées. (…)Denos propresyeux,nous avons vudesmilliersde rapports venantde onze sitesdifférentsdans la banlieuedeDamas. Tousmontrentdes victi-mesavecdesdifficultés respiratoi-res, des genspris de convulsions,toussant, le cœur qui s’accélère,de l’écumesortant de la bouche,inconscientsoumorts. Et toutaus-si important, nous savonsque lesdocteurs et les infirmiers qui lesont traitéesn’ont fait état d’aucu-ne égratignure, aucuneblessured’obus, aucune coupureoun’ontentenduun coupde feu. (…) Legouvernementdes Etats-Unis sait

désormaisqu’aumoins 1429Syriensdont 426 enfants ont ététués dans cette attaque. (…)C’estl’horreur indiscriminéeet inconce-vabledesarmeschimiques.C’estcequ’Assada fait à sonproprepeu-ple. (…)Noussavonsqu’uneperson-nalitédehaut rangdurégime,informéede l’attaque, a confirméquedesarmeschimiquesavaientétéutilisées, enavérifié l’impactetavaitpeurquecela soitdécouvert.Noussavonscela. (…) La questionest : qu’allons-nous faire? (…)Celacomptepournotre sécurité et cel-le denos alliés. (…) Et cela compteprofondémentpour la crédibilitédenos intérêts futurs et denosalliés. (…)Nousdevonsnousdemander: quel est le risquedene rien faire? Cela compteparce

que si nous choisissonsde vivredansunmondeoùunbandit etunmeurtrier commeBacharAl-Assadpeut gazerdesmilliersde ses concitoyens en toute impu-nité, aprèsque les Etats-Unis etleurs alliés ont dit non, et que lemondene fait rien, notredétermi-nation sera sans cessemise àl’épreuve (…)Ce crime contre laconscienc e, ce crime contre l’hu-manité, ce crime contre les princi-pes fondamentauxde la commu-nauté internationale, contre lesrègles de la communauté interna-tionale, cela comptepournous.(…)Nousne sommespas seuls (…)Notreplus vieil allié, la France, adit que le régimea commis cetacte abject, et que c’est unoutrageaux conventions internationales

qui ont banni l’usagede ces armesdepuis quatre-vingt dix ans. (…)Doncmaintenantquenoussavons ce quenous savons, laquestiondoit être : Qu’allonsnous faire? (…)A causede la certi-tudede l’obstruction russe, touteactionduConseil de sécurité,l’ONUnepeut pas encourager lemondeà agir comme il le devrait?(…)Maintenant, nous savonsqu’aprèsune décenniede conflit,le peupleAm.0éricainest fatiguéde la guerre. Croyez-moi, je le suisaussi.Mais la fatiguenenousabsoutpas denotre responsabili-té. (…) Et l’histoirenous jugeraextrêmement sévèrement si nousdétournons le regard sur l’usageinjustifié d’armesdedestructionsmassivesd’undictateur.»p

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international

F autede coalitionoccidentale,l’opération visant à «punir»l’usage de l’arme chimique

en Syrie sera donc américaine,d’abord. Une fenêtre étroite estouverte pour des frappes, entre ledépart des inspecteurs de l’ONUde Damas, qu’ils ont quittée danslanuitdevendredi30août,etceluide Barack Obama pour l’Europe,mardi 3septembre.

Quelle place prendra la France,seul allié volontaire pour uneaction coercitive, à côté de l’arma-da américaine dans la région? Ledispositif militaire français est enplace depuis jeudi. «Nous neserons pas un petit actionnaire»,assure-t-on dans l’entourage duministre de la défense, Jean-YvesLe Drian. La défensemet en avantl’unité de vue franco-américainesur l’objectif :mettre fin àunecri-sedeproliférationd’armesdedes-tructionmassive, qui «menace lacrédibilité» de paysmembres per-manents du Conseil de sécurité,formant ainsi «un risque pour lasécuriténationale».

D’un côté, l’ordre de batailleaméricain apparaît écrasant. Entémoigneunindicateurfourniparla presse américaine : en 2012, lesavions de guerre américains onttransitéplusde2000foisdansl’es-pace aérien égyptien, et les bâti-ments de la 5e flotte, basée àBarheïn, ont effectué une quaran-taine de passages par le canal deSuez. La crise iranienne a conduitWashington à prépositionnerdepuis des mois des centaines de

missiles de croisière Tomahawkdans la région, ces armes capablesde frapper à plus de 1000km,depuis des avions ou des navires,sanscraindrelespuissantesdéfen-ses antiaériennes syriennes.

Outresesbasesdans leGolfeetàDjibouti, le Pentagone a récem-mentrenforcésesmoyensnavals :en mer Rouge, où la 5e flotte peutcompter, depuis le 20août, lesdeuxporte-avions les plusmoder-nes, l’USS Truman et le Nimitz,munis chacun de 90 chasseurs ;

mais aussi en Méditerranée, oùcinq croiseurs lance-missiles ontété positionnés face à la Syrie, cha-cun contenant 150 Tomahawk. Unnombre inconnu de SSGN, dessous-marins nucléaires d’attaquelanceurs de missiles Tomahawk(100 par navire), croisent aussidans la zone.

LaRussiea,quantàelle,annoncévendredi l’appareillage de deuxbâtiments lance-missiles supplé-mentaires, qui rejoindront les sixprésents sur la base de Tartous, surla côte syrienne. «Chacun se jauge,c’est la politique de la canonnière»,résumeunmarin français.

La France a dépêché depuis letout début de la crise syrienne desmoyens d’écoute et de renseigne-ment, des sous-marins d’attaquenotamment.Parisa faitpartirdansla nuit du 28août sa frégate ultra-moderne Chevalier-Paul. Ce navireseulne déciderapasde l’issue de laguerre. Il sera précieux pour assu-rer laprotectionduciel etdes sous-marins.

Surtout, « ses moyens de sur-veillancedonnerontà laFranceunecapacité d’appréciation autonomede la situation», rappelle un offi-cier. Le porte-avions Charles-de-Gaullesetientpourl’heureenarriè-re, il pourra rejoindre la région entroisjoursencasdebesoin.Legrou-peaéronavalestdenouveauopéra-tionneldepuis le 31juillet, aprèsunarrêtdeplusieursmoispourmain-tenance, calé par l’état-major enfonctionducalendrier syrien.

Danscepaysage,unecampagnede frappes ponctuelles, de quel-ques heures à quelques jours, tellequ’annoncée officieusement,a-t-elle un sens? Pour l’heure, cesont surtout des raids aériens, aumoyen de Rafale, qui sont atten-dus. La France ne dispose pas demissiles de croisière équivalentsauxTomahawk.Leschasseurspeu-ventemporterdesmissilesdehau-teprécisionSCALP-EG,maisdepor-tée moindre (300km), utiliséspour la première fois en 2011 enLibye. Les avions français pour-raientainsiavoirpourterraind’ac-tion les zones côtières de la Syrie,tandis que les Tomahawk frappe-

rontdes ciblesdans la profondeur.Les raids pourraient partir depuisle territoire national, des basesfrançaises de la région, Djibouti etAbou Dhabi, ou d’Incirlik, la basede l’OTANenTurquie.

Le chef de l’Etat français a exclu,vendredidansLeMonde,uneinter-vention qui «viserait à “libérer” laSyrie ou à renverser le dictateur»,ce qui sous-entendrait une opéra-tion longue et lourde. «Je ne parle-rais pas d’une guerre, mais de lasanction d’une violation mons-trueuse des droits de la personnehumaine, a expliqué M.Hollande.Elle aura valeur de dissuasion.»Paris parle d’une action «propor-tionnéeet ferme».

Pourladéfense,iln’estpasques-tionde partir dansun planmassif,et il s’agitdedistinguer l’opérationdefrappesde l’aidemilitaireà l’op-position syrienne, à laquelle Fran-çoisHollanden’apasexcludefour-

nir des armements plus impor-tants.

Reste queWashingtondonnerale «go» et définira le volume del’opération.PourqueParissoitvisi-ble dans l’opération, « il faudraavoirnégociédesciblestrèssymbo-liques», noteun expert. «En Libye,les Américains ont tiré 200 Toma-hawk d’emblée dans une affairequidevait se régler enhuit jours. LePentagone pourra être tenté deplaider pour un “truc sérieux” quidéstructure aussi l’appareil de for-ce syrien », explique CamilleGrand, directeur de la Fondationpour la recherche stratégique.

Pour le colonel Michel Goya,auteurdublog«Lavoiedel’épée»,leseulexempleréussideraidpuni-tif est celui mené par les forcesaméricaines contre MouammarKadhafien1986,motivéparlepro-gramme nucléaire de la Libye etl’implication de Tripoli dans des

attentats terroristes. «C’est l’op-tionaminima,quipeutêtrerecom-mencée.» Mais, «compte tenu del’imbrication des forces de BacharAl-Assad dans la population, lacampagnedefrappesseratrèscom-pliquée, juge cet expert, et il seradifficile de perturber le rapport deforce sans avoir ensuite une impli-cation indirecteau sol».

Les militaires rappellent que laFranceapayé cher son implicationdans la précédente «guerre froidecontre l’axe chiite », dans lesannées 1980. Prochainement, descérémoniesmarqueront les 30ansdel’attentatduDrakkaràBeyrouthqui, le 23octobre 1983, tua 58 sol-dats français.Des«mesuresdepro-tection majeures» ont été prisespourles670soldatsdelaForceinté-rimaire des Nations unies (Finul)au Sud-Liban, indique-t-on auministèrede ladéfense. p

NathalieGuibert

WashingtonCorrespondante

C omment «punir » BacharAl-Assad? Les spécialistesaméricainsdesaffairesmili-

tairessontsceptiquessurl’efficaci-té de la réponse « limitée» envisa-gée par Barack Obama contre lerégime syrien. Et tout autant surles proclamations de la MaisonBlanche, répétées vendredi30août, affirmant qu’il n’est pasquestiondemission«prolongée».Avant même l’attaque chimiquedu 21 août, le général MartinDempsey,lechefd’état-majorinte-rarmées, avait mis le Congrès engarde: «Si nous passons à l’action,nous devons être prêts pour ce quivient après. Il est toujours difficiled’éviter un engagement plus pro-fond.»

Michael Eisenstadt, directeurdes étudesmilitaires duWashing-ton Institute for Near East Policy,un centrede recherches sur le Pro-che-Orient,àWashington,critiquel’approcheàreculonsdel’adminis-tration Obama. «La Maison Blan-che a eu le tort de télégraphier sesréticences, dit-il. Le régime deDamas a l’impression qu’il pourrapasser au travers.» Il s’étonne aus-sidu langageemployépar leprési-dent et ses conseillers. «“Punir”,faire“rendredescomptes” : c’estun

vocabulairemoral plus que straté-gique, difficile à traduire en termesd’actionmilitaire.»

Arabisant, officier de réserve,le chercheur a participé à laguerreduGolfe de 1991, puis dou-ze ans plus tard, sous le mandatde George Bush, à l’autorité qui aadministré l’Irakaprès la chutedeSaddam Hussein. Pour lui, lafaçon la plus efficace de punirBachar Al-Assad serait de s’en

prendre à ses fidèles. «Par sécuri-té, il n’utilise que trois divisionssur les douze qu’il possède : la qua-trième division, la garde républi-caine, les forces spéciales. Ellessont composées de militairesayant des liens de famille, dont laloyauté ne fait aucun doute. En1998, pour l’opération “Renard dudésert”, en Irak, nous avions cibléles gardes républicains. L’impactpsychologiqueavait été fort.»

Maisaveclapublicitéquientou-re les possibles frappes américai-

nes depuis plusieurs jours, « lescombattants ont eu tout le tempsde se disperser dans la nature,regretteM.Eisenstadt. LesmissilesTomahawk risquent de tomber surdes chars vides.»

Détruire les armes chimiquesn’est pas inconcevable. «On l’a faiten 1991 en Irak,dit le chercheur. Lesbombes avaient fait de très petitstrousdans lesbunkers. Il n’yaprati-quementpaseudefuites.Maisnom-bre de bunkers étaient vides. Lessubstancestoxiquesavaientétédis-persées dans les champs, endehors.» En Syrie, il faut s’assurerde la localisationdes armes chimi-ques, ce qui supposedu renseigne-ment. «Même si on sait où elles setrouvent, savons-nous exactementdansquelbâtiment?»

PourM.Eisenstadt,BarackOba-man’apas lechoix:«C’est lacrédi-bilité des Etats-Unis qui est en jeufaceà l’Iranet laCoréeduNord.» Ilne croit pas beaucoup aux repré-sailles syriennes contre les alliésdes Etats-Unis dans la région.«Assadn’aimepas prendredes ris-ques, assure-t-il. Les Israéliens ontattaqué à cinq reprises des ciblesenSyrie, cesdernièresannées. Il n’ajamaisriposté. Ilneveutpasouvrirundeuxième front avec Israël.»

Enrevanche,il jugequ’ilseradif-ficile à l’administrationObama dene faire qu’une incursion « limi-tée» dans le conflit syrien. «Unefois que vous avez utilisé la forcemilitaire, l’adversaire va de nou-veau vous mettre à l’épreuve. C’estl’expérience que nous avons eue enIrak, et celle que les Israéliens ontavec le Hezbollah ou le Hamas.» Siles premières frappes ne sont pasdécisives, le dictateur syrien«essaiera d’utiliser de nouveau sesarmes chimiques, prédit M.Eisens-tadt, afin de montrer que BarackObama n’est pas parvenu à sesobjectifs».p

Corine Lesnes

BarackObamarisqued’êtreentraînémalgréluidanslaguerreMichaelEisenstadt, expertmilitaire,metendoute lapossibilitédemenerdes«incursions limitées»de l’arméeaméricaineenSyrie

«C’est lacrédibilitédesEtats-Unisquiestenjeufaceàl’Iran

etlaCoréeduNord»Michael EisenstadtWashington Institutefor Near East Policy

PourqueParissoitvisibledans

l’opération,«il faudraavoirnégociédes

ciblessymboliques»,noteunexpert

Mer Noire

Mer Méditerranée

MerRouge

MerCaspienne

TURQUIE

FRANCE

NB : Le placement des navires est approximatif INFOGRAPHIE LEMONDE

RUSSIE

Damas

CHYPRE

SYRIE

JORDANIE

IRAKIRAN

BAHREÏN

QATAR

E.A.U

GolfePersique

250 km

Charles-de-Gaulle

Toulon, base navale

Tartous, base navale russeLimassol

Solenzara

Batteries anti-missilesPatriotBasemilitaire

Incirlik(Etats-Unis,OTAN)Izmir

Abou-Dhabi-Al-Dhafra700 hommes6Rafale

Djibouti1 400 hommes7Mirage 2000

Marines26e corp

USSNimitzUSS-Truman+4navireslance-missiles

USS-Mahan

USS-BarryUSS-GravelyUSS-Stout

USS-RamageChevalier Paul(en cours)

Basemilitaire BasemilitaireEtats-Unis OTANFrance

Contre-torpilleur équipédemissiles de croisièreTomahawk

Porte-avionsSous-marinFrégate anti-aérienne

Porte-avionsSous-marin

Le premierministre turc, RecepTayyip Erdogan, s’est dit insatis-fait, vendredi 30août, d’une pos-sible actionmilitaire limitéecontre laSyrie, estimant que tou-te intervention devait avoir pourobjectif un changement de régi-medans le pays.«Une interven-tion doit se faire sur le modèle dece qui s’est produit au Kosovo,a-t-il dit à la presse, cité par lachaîne d’informationNTV. Une

opération d’un jour ou deux nesuffira pas. L’objectif doit êtrede contraindre le régime à aban-donner le pouvoir», a-t-il estimé.Auparavant leministre des affai-res étrangères avait affirmé queselon les renseignements desservices secrets turcs, il n’yavait plus aucun doute sur la res-ponsabilité du régime syriendans l’attaque chimique du21août, près de Damas.– (AFP.)

L’arméefrançaiseprêteàinterveniraveclesAméricainsPour l’heure,des raidsaériens, aumoyendeRafale, sontattendus

PourAnkara, une intervention doit faire tomber le régime

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international& planète

CHEZ VOTRE MARCHAND DE JOURNAUX

Dans une société qui revendique son attachement à la laïcité,l’alimentation casher et halal connaît un nouvel engouement.Le judaïsme et l’islam ne sont d’ailleurs pas les seules religionsà s’intéresser à ce qui se trouve dans l’assiette de leurs fidèles.

Des philosophes de l’Antiquité aux sagesses orientales et auchristianisme, toutes les traditions religieuses et philosophiquesont formulé des règles plus ou moins strictes. Pourquoicontinuent-elles de faire sens pour de nombreux croyants ?

PékinCorrespondant

L asanctionaétéannoncéejeu-di 29aoûtpar leministère dela protection de l’environne-

ment: l’Etatarefusédedonnersonapprobation à tout projet de nou-velle raffinerie des géants pétro-liersdupays,CNPCet Sinopec.Plu-sieursde leurs installationsne res-pectent pas les objectifs de réduc-tiondesémissionspolluantes.Tra-ditionnellement, le ministère del’environnement pèse peu faceaux puissantes sociétés d’Etatchinoises du secteur de l’éner-gie.Mais la Chine a décidé de frap-per fort.

La lutte contre la crise écologi-que est désormais l’un des chan-tiers les plus ambitieux de la nou-velle équipe dirigeante chinoise.Lapollutionde l’eaudes rivières etdes côtes, des sols et de l’air afranchi dans bien des régions uneligne rouge. Le coût économiquemais aussi politique d’une telledégradation généralisée de l’envi-ronnement est devenu tel qu’il nepeut plus être ignoré: les citoyenschinois ont fini par développerune conscience verte «épidermi-que»qui lespoussedeplusenplussouventàdescendredans la ruedefaçonmassive. Ce fut encore le casàKunming, la capitale duYunnan,enmai, contre un projet pétrochi-mique. Dans les campagnes, lesrévoltes des paysans contre lacontamination des sols et des usi-nespolluantes semultiplient.

Les riverains rejettent de plusenplussystématiquementraffine-ries, centralesnucléaires et inciné-rateurs.LesyndromeNimby(«Notin my backyard» ou «pas dansmon jardin») s’est généralisé.

Deuxplansd’actionsurlapollu-tion de l’air et les industries durenouvelable,ainsiqu’unaggiorna-mentode la législationenvironne-mentale, partiellement dévoilésces dernières semaines, sont encoursde finalisation, et surtout, denégociations: il s’agit pour le gou-vernementdupremierministre,LiKeqiang,des’assurerdelacoopéra-tiondesprovinces,notammentcel-les de la ceinture du charbonautourdePékin,maisaussidefiliè-res énergétiques aux mains despuissantsgroupesd’Etat.

Au bureau de Greenpeace àPékin, Zhou Rong, la chargée demission du dossier climat et éner-gie, reconnaît qu’il y a enChineunchangement d’attitude. «Tout aulongdeladécennieprécédente,l’im-pératif de croissance primait dansles espritsdesgestionnaires locaux.LaChine amis enplace desnormes

strictes pour le contrôle de la pollu-tion, mais elles restent peu appli-quées, étant synonymes de coûtssupplémentaires.Onaainsiconsta-té que la protection de l’environne-mentétaitinversementproportion-nelle aux chances de promotiond’un cadre local», analyse-t-elle.

Le changement de paradigmes’expliqueparlescoûtsdedépollu-tion qui ont grimpé de manièreexponentielle.Enincitantlesinves-tissementsdans les industriespro-pres, les autorités espèrent conti-nuer à satisfaire l’impératif decroissance. Les mentalités ontchangé dans la population: «Lesgens en Chine ont longtemps ététrès matérialistes. Aujourd’huiqu’ils sontplus riches, ils veulentunenvironnement propre», note Mlle

Zhou.Les crises de ces derniers mois,

comme«l’airpocalypse»qui,àl’hi-ver 2012 à Pékin, a provoqué unepollutionauxparticulesfinesàdesniveaux jamais atteints aupara-vant, exercent une pression salu-

taire sur les pouvoirs publicschinois. L’hiver 2013 serad’ailleursun test : une aggravationde la pol-lution attiserait la colère des Péki-nois,trèsremontéscontrel’incapa-citéde leur gouvernementà agir.

La pollution de l’air fait l’objetd’unplan endixmesures, dont lesgrandes lignesontétédévoiléesenjuin.Ils’agitnotammentderaison-nerengrandes régions,enparticu-lier les trois zones-clés du delta duYangzi (Shanghaï -Suzhou),dudel-ta de la rivière des Perles (Canton-Shenzhen), et dePékin-Tianjin.

D’ici à 2017, les provinces quientourent Pékin devront réduirede 25% la concentration dans l’at-mosphèredesparticulesPM2,5, lesplus nocives pour la santé. Soittrois fois mieux que les objectifsinitiaux du plan quinquennal, quicourt jusqu’à 2015. «La qualité del’air est devenue une priorité, et lecoupable désigné est le charbon.Pékin est condamné à connaîtreune pollution critique s’il n’y a pasune approche régionale du problè-me», explique Zhou Rong. Avecl’hyper-croissanceetlesbesoinsenélectricité, la consommation decharbon a explosé, et approche les400 mégatonnes par an rien quedans le Hebei, la province autourdePékin.L’objectifestderéduirelaconsommation de 100 mégaton-nes en cinq ans dans cette provin-ce.

Les garde-fous seront-ils suffi-sants ? Greenpeace et d’autresONGcontinuentde dénoncer l’hy-pocrisie de la province du Guan-gdong, qui avait annoncé en 2009un moratoire sur la constructiondecentrale thermiqueaucharbon.

En réalité, onze nouvelles centra-les sont en construction et onzeautres à l’état deprojet.

Pour réussir la rupture avec lemode de croissance passé, l’unedesdixmesuresenvisagéesdansleplanprévoit de s’attaquer aux sur-capacités dans l’industrie sidérur-gique, le ciment, l’aluminium. Enéchange, les industries propres etle renouvelable sont désormaisdésignés comme une industrie«pilier», susceptible d’être favori-

sée par toutes sortes de politiquesincitatives. Le gouvernementchinoisad’oresetdéjàchiffrécetteexpansionprésentéecommegran-de ouverte aux sociétés étrangè-res : la nouvelle industrie devracroître de 15% par an et représen-ter, en 2015, 4,5 trillions de yuans(550milliardsd’euros).

Lesbesoinsenmatièred’inciné-ration des ordures vont par exem-ple conduire à doubler le nombred’incinérateurs dans le pays. Cegrandbondenavantn’estpas sansdanger : la frénésie des barrages,parexemple,ouledéveloppementde certaines industries supposées«propres», bouleversent déjà leséquilibresgéologiquesouhydrolo-giques très fragilesde laChine. p

BricePedroletti

EnMongolie,uneusine«modèle»pollueetassèchelarégion

Lapollutiondel’eaudesrivières

etdescôtes,dessolsetdel’airafranchi

dansbiendesrégionsunelignerouge

Une fuite chimique fait aumoins 15morts à Shanghaï

Acculée,laChinefaitdelaluttecontrelacriseécologiquesonchantierprioritaireLesplansantipollutionet les investissementsdans les industries«propres»semultiplient

PékinCorrespondant

Si ellene fait paspartie àpropre-mentparler du secteurde l’éner-gie renouvelable, la filièredespro-ductionsgazières et pétrolières àpartir du charbonest régulière-mentassociéeenChineaux«éner-giespropres».Les carburants quien sont issus sont réputésmoinspolluantsque ceuxobtenusdanslapétrochimie.Or, la premièrecentralede liquéfactiondu char-bonen carburant construite enMongolie intérieure, pour réduireladépendance auxhydrocarbu-res, est dans le collimateurdeGreenpeace.Situéeà quelquescen-tainesdekilomètres au sud-estd’Ordos, elle appartient au groupeShenhua, le premier producteurde charbonchinois.

L’ONGa envoyéà onze reprisesen 2013 ses équipes sur place et aproduitun rapport d’enquêteaccablant: non seulement la cen-tralemodèle, opérationnelledepuis 2008, pollue l’environne-

ment,mais elle est en train desiphonner l’eau d’une régionquienmanque cruellement.

«Il faut engénéral dix tonnesd’eaupour obtenir une tonnedecarburant, ce qui est irrationneldansun endroit dont les nappesphréatiques sont déjà affectéespar l’exploitation intensive ducharbon», affirmeDengPing, ladirectricede la campagnedeGreenpeace sur le dossier.

Rejets sauvagesMlleDenget ses équipesont

découvertautourde la centraletrois sitesde rejets sauvagesdeseauxpolluées,oùprèsde90pol-luantsont été identifiés, dépassantlesnormesenvigueurenChine.D’autresne sontmêmepas réper-toriésdans la législationchinoise.

Greenpeacedénonce la consom-mationexcessiveeneaudupro-jet: Shenhuapuise sesbesoinseneauà 100kmde la centrale, aumoyend’unpipelineet surunsite,Haolebaoji,où22puitsontétéforés. L’écosystèmedespâturages

auxalentoursestdévasté, affirmel’ONG,qui aétudié l’impactsur leséleveurs locaux,qui représententprèsde2400foyers. Lacentraleaaccéléré ladésertification,avanceGreenpeaceen sebasant sur lestémoignagesdeséleveursquipor-tentenvaindepuisdesannéesleursdoléancesenhaut lieu.

Treizeautresprojetsde«basesde transformationducharbon»,similairesà celuide Shenhua,ontdéjàété approuvéspar legouver-

nementà travers laChine, leplussouventdans les régionsd’extrac-tionducharbon. Etunecentained’autressontenattentede l’être.Ils vontposerundéfimajeurauxzonesdunordde laChineoù lapénuried’eauest aiguë: «Cesrégionsgrossesproductricesdecharbonveulentobtenirdavanta-gedevaleurajoutéeenattirantune industriede transformationsurplace, au lieud’exporter leurproduction»expliqueMlleDeng.Eneffet, le ralentissementécono-mique, etparadoxalement, leseffortspour limiter lenombredecentrales thermiquesau charbon,ont faitbaisser lesprixduchar-bon. Il est devenu impératifde ren-tabiliser les surplusdecharbon…

Publié en juillet, le rapport deGreenpeacen’a été que trèsbriève-ment repris dans lesmédiaschinois, signequedes instruc-tions très strictes de la propagan-deont été données afin denepasternir l’imagede cesnouvellesindustries.p

B.Pe.

RDC

LesrebellesduM23reculentdansl’EstKINSHASA.Les rebellesduM23ont annoncé,vendredi30août,qu’ils se retiraientde la lignede frontaunorddeGoma,dans l’estde laRépubliquedémocratiqueduCongo (RDC), face à l’offensived’uneampleur inéditedes casquesbleus etde l’arméerégulièrecongolaise.LegouvernementdeKinshasas’est félicitéde soncôtéd’avoiratteint«l’essentiel»desobjectifs fixéspour cettephasedescombats,qui consistait àdéloger les rebellesdespositionsqu’ilsoccupaientsur leshauteursàunequinzainedekilomètresdeGoma,à la frontièreavec leRwanda,paysque la communautéinternationaleaccuse, avec l’Ouganda,de soutenir la rébellion.Ceretrait intervientaprèsunesemained’affrontements,quis’étaientnettement intensifiésmercrediet jeudi avecuneoffensi-ve conjointedesForcesarméede laRDC, soutenuespour lapre-mière foispar labrigaded’interventiondes casquesbleusde laMissiondesNationsuniesauCongo (Monusco).– (AFP.)p

COLOMBIE

Legouvernementdéploiel’arméecontrelemouvementdespaysansBOGOTA.Leprésident colombien, JuanManuelSantos, a ordonné,vendredi30août, ledéploiementdemilitairesàBogotaet sur lesprincipales routesdupays, jugeant«inacceptables» les blocagesde routeset les troubles suscitéspar lemouvementsocialpaysanqui secoue lepaysdepuisdouze jours.Un totalde 50000soldatsserontdéployéspour«assurer lamobilité sur [les] routes»et des«pontsaériens»pourrontêtreorganiséspourassurer l’achemine-mentdesdenrées, a ajouté leprésident colombien,au lendemaind’une journéemarquéeparune cinquantainedemanifestationsdansplusieursvilles dupays, dont certainesontdébouchésurdesheurts, avecdeuxmortsàBogota. Lespaysanscolombiensont lan-cédepuisdouze joursunmouvementdans l’ensembledupayspour réclamer l’établissementdeprixplancherspourcertainspro-duits ainsique labaissedesprixdes intrantsagricoles.– (AFP.)p

AfghanistanDes troupes d’élite australiennessuspectées d’exactionsCANBERRA. L’arméeaustraliennea ouvert une enquête sur desmembresde ses forces spéciales enAfghanistan soupçonnésd’avoirmutilé le corpsd’unouplusieurs rebelles, a rapporté latélévisionpubliqueABC, vendredi 30août. Ces soldats auraientsectionné lesmains d’aumoinsundes quatre insurgés tués le28avril lors d’uneopérationmenée avec l’arméeafghane. Cesmains auraient été acheminéesà TirinKot, principalebase aus-tralienneenAfghanistan, dans la provinced’Uruzgan, à des finsd’identificationet d’examensdemédecine légale. – (Reuters.)

SurinamLe fils du président extradévers les Etats-UnisNEWYORK. Le filsduprésidentduSurinam,DinoBouterse, a étéarrêtéauPanamaet extradéauxEtats-Unis,où il est recherchépour traficdedrogueetd'armes,a-t-onapprisvendredi30aoûtauprèsdesbureauxduprocureurdeManhattan. L'extraditiondeDinoBouterse, 40ans, a fait scandaleàParamaribo, capitaleduSurinam,oùs’ouvrait lemême jour le sommetdes chefsd'Etatdel'Uniondesnationsd'AmériqueduSud,uneorganisationdont leprésidentduSurinam,DesiBouterse– lui-mêmecondamnéauxPays-Basen2009pour traficdedrogue–assureactuellement laprésidencetournante. Le filsduprésidentavaitdéjà été condam-néen2005àhuit ansdeprisondans sonpays.– (AFP.)

Une fuite d’ammoniac liquidedans une usine de réfrigérationappartenant à une société detransformation de fruits demerdeShanghaï, lamétropole com-merciale chinoise, a fait aumoins 15morts, samedi 31août,selon le premier bilan fourni parl’agence de presse officielleChineNouvelle. Aumoins 26autres personnes ont été intoxi-quées par cette fuite, a indiquél’agence.– (AFP.)

Manifestation àKunming (capitale duYunnan), enmai, contre unprojet pétrochimique. AFP

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Page 6: Le Monde Du Dimanche01 Et Lundi 02 Septembre 2013

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Entretien

L aministrede la justice,Chris-tiane Taubira, se félicite del’arbitrage présidentiel sur la

réformepénale,annoncéevendre-di 30août. Elle assure au Monden’avoir pasmis sa démission dansla balance lors des discussions.Etes-vous satisfaite de l’arbitra-ge rendu par le président de laRépublique? Est-ce la ligneValls ou la ligne Taubira qui l’aemporté?

Il n’y a pas de ligne Valls ni deligne Taubira! Il y a une réformepénale de lutte contre la récidive,uneréformeimportantesurlaquel-leleprésidentdelaRépubliqueetlepremier ministre sont fortementmobilisés.Jesuisraviedeleurimpli-cation, cela donneune force politi-que et une légitimité au projet quebeaucoupde textesn’ontpas.Le dialogue avec leministre del’intérieur par presse interposéea pourtant été vif. Vous n’avezfinalement pas pu éviter la gué-rilla, traditionnelle à gauche,entre police et justice…

Le match peut continuer à sejouer dans la presse, il se jouerasans nous. Manuel Valls et moiavons été très attentifs à ne pasrejouer un énième épisode de l’af-frontement police-justice afin dene fragiliser aucune des institu-tions. Quant aux personnes, peuimporte. On rit, on se dispute, ons’embrasse… C’est sans intérêt.L’important est que nous parve-nionsàuneréformefortepour fai-re reculer la récidive et améliorerla sécurité des citoyens.Le président de la Républiqueavait conditionné la suppressiondes peines planchers à un dispo-sitif convaincant de lutte contrela récidive. Y êtes-vous parve-nue?

Oui. Les peines planchers n’ontpas réduit la récidive, elles l’ontaggravée, il fallait donc les suppri-mer.Pourréduirelarécidive, il fautles peines les plus adaptées possi-bles au cas des condamnés. Il étaitdoncurgentderéintroduireleprin-cipe de l’individualisationdes pei-nesetderéduirelespeinesautoma-tiques. Avec notre réforme, le jugeretrouvetoutelalibertéd’apprécia-tionde l’infraction,de lapersonna-lité de l’auteur, de son comporte-mentenvers les victimes.C’est l’objet de la peine de proba-tion, rebaptisée «contraintepénale»?

Toutà fait. C’est le jugedu tribu-nal correctionnel qui prononceralecontenudecettecontraintepéna-le,qui seraunensembled’interdic-tions et d’obligations, individuali-séenfonctionduprofilducondam-né. Cette nouvelle peine constitue

un vrai progrès car elle sera exécu-toire immédiatement, contraire-mentauxpeinesdeprisonavecsur-sis, dont l’exécution est souventretardée de plusieurs mois. Lacontrainte pénale pourra parailleurs évoluer en cours d’exécu-tion, en fonction du comporte-ment du condamné. C’est un suiviindividualisé, serré et renforcé, lagarantie d’une meilleure préven-tiondelarécidive,doncdesécurité.Pour les détenus, l’idée d’un exa-men automatique aux deux tiersde la peine pour une libérationanticipée est-elle retenue?

Oui. Les sorties sèches de pri-son, sans préparation – c’est le casd’environ 80% des détenus –,aggravent la récidive.Nous créonsdonc un dispositif de retour pro-gressif à la liberté. C’est le principede l’examen obligatoire aux deuxtiers de la peine : au lieu de sortirsans encadrement ni contrôle, lesdétenus verront leur cas examinéaux deux tiers de la peine, pourune libération sous contrainte ou

unmaintienendétention.La loi pénitentiaire de 2009pré-voit que le juge peut éviter la pri-son aux condamnés demoins dedeux ans. Vous réduisez cettepossibilité aux condamnésdemoins d’un an, et de sixmois encas de récidive. C’est un durcis-sement?

Cette disposition restreint eneffet les délais de possibilité d’ap-plicationdelaloi,donc, incontesta-blement, le champdespossibilitésd’aménagementdepeine.La création de la contraintepénale est-elle crédible alorsque le suivi des personnescondamnées est déjà difficile?

Oui, car nous nous donnons lesmoyens de la réforme. Nouscréons, dès 2014, 300 postes deconseillersd’insertionetdeproba-tion, qui assurent le suivi descondamnés, et 150 de plus l’annéesuivante. Ils viennent s’ajouteraux63conseillersdéjàrecrutéscet-te année ainsi qu’aux 55 magis-trats chargés de l’application des

peines.Aveccesrecrutements,cha-que conseiller aurait en charge60dossiers de condamnés contreenviron 100aujourd’hui.La réforme n’est-elle pas endeçàde son ambition originelletelle qu’esquissée par la confé-rence de consensus de préven-tion de la récidive?

Le gouvernement a toujoursdit qu’il garderait sa liberté parrapport au travail de la conféren-ce.Etmoi-même,dès ledépart, j’aiexpliquéque jen’étaispas favora-ble à certaines propositions, com-me la libération conditionnelleautomatique ou le numerus

clausus dans les prisons. Il n’y adoncpas de recul, simplementunprocessus de concertation.Avez-vous vraimentmis votredémission dans la balance lorsdes discussions?

Ce n’est pas mon genre, je nefonctionnepascommecela.Moi, jedémissionneoujenedémissionnepas, jenemenacepasde le faire. Cen’estpasuncaprice,j’aiunerespon-sabilité d’Etat. Je prends des déci-sions qui ont des effets sur la viedes gens. Si, un jour, j’ai un désac-cordetqu’il est insoluble, j’iraivoirleprésidentet lepremierministre.Non, jen’ai pasde ligne rouge.Les électionsmunicipales se pro-filent enmars2014. Votre textesera-t-il examiné au Parlementavant?

Dès que le projet de loi aura étéexaminé par le Conseil d'Etat,nous le présenterons en conseildes ministres, fin septembre oudébut octobre. Ensuite, je n’ai pasla maîtrise du calendrier parle-mentaire, mais une telle réforme,

qui a agité et mobilisé à ce point,doit pouvoir être discutée dès quepossible par la représentationnationale.Jenevoispasquelsargu-mentspourraient s’y opposer.Ona vu des réformes sensiblesretardées pour des raisons élec-torales…

Mais l’intérêt électoraln’estpasdementirauxgens.Oualorsonditqu’onne fait pas de réformepéna-le ! Ce serait non seulementde l’ir-respect envers nos concitoyens,mais une faute éthique et uneerreurpolitique.Craignez-vous une large défaitede la gauche auxmunicipales?

Je ne suis pas du genre à crain-dre,maisà livrertouteslesbataillesnécessaires, à aller sur le terrainpourexpliquerauxgenscequ’afaitla gauche.On est sûr deperdrequeles batailles qu’on ne livre pas. Lafragilité de la gauche, ces dernièresannées, a d’abord tenuà l’offensivedeladroite:uneoffensivesémanti-que et culturelle, un pillage éhontéet sans vergogne de figures et devaleursdelagauche.C’étaitduvoca-bulaire, rien que du vocabulaire.Cette espèce d’effronterie partisa-ne a tétanisé la gauche, qui est res-tée bouche bée, en janvier2007,devantlediscoursdeNicolasSarko-zy sur Jaurès et Blum.Aujourd’hui,nous reprenons notre bien. C’estpourquoi il ne faut pas aborder lesmunicipalesavecparesse.Comment lutter contre la pro-gression du Front national?

Il faut se battre partout, dans lespetites et les grandesvilles. Les res-ponsables politiques sont un peusonnés,etc’estcequipermetlapro-gression de ce discours creux,démagogique et peu crédiblemaisqui prospère sur des inquiétudesréelles, le chômage et le déclasse-ment.Cettetendancepeutsubiruncoupd’arrêtsi lagaucheretrouvelafiertédesesvaleursetexpliquequeson action publique est tournéevers le bien des gens, qu’elle réfor-mepourlasociété.Ilfautdire,expli-quer, affronter. La politique, c’estcela. C’est du courage. On ne peutabandonner le citoyen entre lesmains de fumistes, bricoleurs etgestionnairesà lapetitesemaine.p

Proposrecueillis parSimonPiel, Cécile Prieur

etDavidRevaultd’Allonnes

CHRISTIANETAUBIRApeut affi-cher sa satisfaction. Si les arbitra-ges renduspar l’exécutif, vendre-di 30août, ont amendé certainesdispositions contenuesdans leprojet de loi de réformepénalepréparéà la chancellerie, les prin-cipes généraux– l’individualisa-tionde la peine et la lutte contrela récidive – constituent toujoursle cœurdu texte.

Miseenplaced’une«contraintepénale» Le président de la Répu-blique a annoncé la créationd’une «contrainte pénale». Unnouveaudispositif que la chancel-lerie avait d’abord baptisé «peinede probation», déjà en place dansplusieurs pays (Royaume-Uni,Suède, Canada), et dont l’idée estde proposer une réponse pénalealternative à l’incarcération.

La contrainte pénale, qui pour-ra être prononcée pour unedurée d’un à cinq ans, concerneratous les délits pour lesquels la pei-ne encourue est inférieure ou éga-le à cinq ans. Elle viendra s’ajou-

ter aux nombreuxdispositifsexistants, comme le sursis avecmise à l’épreuve. Lesmodalitésde ce programme individualisépourront comporter des travauxd’intérêt général, assortis d’uneobligationde suivimédical, d’unstage de sensibilisation ou de laréparationdu préjudice causé.Sur le papier, la contrainte péna-le vise à favoriser la réinsertionet diminuer ainsi le risque de réci-dive.

Les conseillers d’insertion etde probation seront chargés d’enétablir lesmodalités et d’en assu-rer le suivi. Les juges d’applica-tion des peines pourront déciderdemodifier l’intensité de lacontrainte en fonctionde l’évolu-tion de la situation. Ce dispositifn’est pas pour autant totalementdéconnecté de la prisonpuis-qu’en cas denon-respectde certai-nes obligations, le juge d’applica-tion des peines pourra déciderd’une incarcérationdont la duréene pourra excéder lamoitié de ladurée de la contrainte pénale.

Se pose dès lors la question desmoyens donnés à ce suivi qui seveut très individualisé. Laminis-tre de la justice a annoncéun ren-forcement des effectifs au seindes services pénitentiaires d’in-sertion et de probation (SPIP).Trois cents conseillers supplé-mentaires en 2014 puis 150 en2015 afin que chacun gère envi-ron 60dossiers contre plus de100 aujourd’hui.

Suppression des peines plan-chers Comme François Hollandeen avait pris l’engagement pen-dant la campagne présidentielle,les peines planchers – une peineminimale imposée par la loi encas de récidive – seront suppri-mées.MmeTaubira avait notam-ment soutenu lors des arbitragesque celles-ci avaient occasionné4000années d’emprisonnementsupplémentairespar an quand letauxde récidive de 56% est restéinchangédepuis 2007. C’est doncla fin annoncéed’unemesureemblématiquevotée sous la

majorité précédente. Demême, aété actée la suppression de larévocationautomatiquedu sur-sis simple.

Eviter les «sorties sèches» Legouvernementapar ailleurs insis-té sur lanécessité demettre finaux«sorties sèches», c’est-à-diresans suivi à l’extérieur, qui concer-nent80%des ex-détenus.Ainsi, lasituationdes condamnésàdespei-nes inférieuresou égales à cinqans sera obligatoirementexami-néeune fois lesdeuxtiersde lapei-neeffectuée.Mais si la chancelle-rie avait d’abord souhaitéque cetexamense fasse«afin que soit pro-noncéeunemesurede sortie enca-drée», la dernièreversiondu texteestdifférente. Elle prévoit lapossi-bilitéd’une«libération souscontrainte» (bracelets électroni-ques, placementextérieur…)maisaussi, aumême titreque les autresmesuresetnonplus«à titre excep-tionnel», lemaintienendéten-tion.Uneplus grande libertéd’ap-préciationest donc laissée au juge.

Ungagedonnéauministèredel’intérieurqui avait émisdes«réserves fortes» sur cepoint.

Un aménagement restreint despeinesRevenantsurlaloipéniten-tiaire de 2009, le premierminis-tre a par ailleurs annoncéque lapossibilitéqui était donnéeauxjugesd’aménager les peines demoinsdedeux ans sera ramenéeàunanpour les primo-délin-quants et à sixmoispour les réci-divistes.«Une tache dans le projetde loi», selon le Syndicatde lamagistrature (classé à gauche)pourqui «le gouvernementn’apas réussi à trancher entre politi-que sécuritaire et politiqued’indi-vidualisationde la peine». Pour sapart, l’Union syndicaledesmagis-trats (majoritaire) s’est dite «glo-balement satisfait[e]des arbitra-ges», se félicitantnotammentquele caractère automatique,pour lespeinesplanchers commepour lesaménagementsdepeine, n’ait pasété retenu. p

S. Pi.

Le projet de loi de lutte contre la récidive

«Avecnotreréforme,lejugeretrouvela

libertéd’appréciationdel’infraction

etdelapersonnalitédesonauteur»

PourMmeTaubira,laréformepénalenepeutattendreReporter l’examenduprojetde loiaprès lesmunicipalesseraitune«fauteéthique», selonlaministrede la justice

Individualisationdelapeineetluttecontrelarécidiveaucœurduprojet

CORENTIN FOHLEN POUR «LE MONDE»

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Page 7: Le Monde Du Dimanche01 Et Lundi 02 Septembre 2013

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Récit

L e feuilleton politique de cetété a rajeuni d’une trentained’années Robert Badinter. A

l’évocation de la guérilla à laquellesesontlivrésManuelVallsetChris-tiane Taubira sur la réforme péna-le, l’ancien garde des sceaux revoitcomme s’il y était les «batailleshomériques» qu’il avait menéesentre 1981 et 1984. « Gaston[Defferre, alors ministre del’intérieur]avaitbalancéàundéjeu-ner qu’il allait demander le droitpour les policiers d’utiliser leursarmes comme les gendarmes! Çaaurait été le western ! », s’excla-me-t-il, en racontant que FrançoisMitterrand,exaspéré, lesavait tousdeuxtraitésd’«incapables».

Les têtes d’affiche ont changé,maislescénarioestidentique:poli-ce contre justice, sécurité versusliberté… Le match des deux places–Beauvau contre Vendôme– estune vieille bataille de territoires etdeprincipesoù la gaucheaura lais-sé bien des plumes. «Rien n’a vrai-mentchangédepuisClemenceauetJaurès», tranche le criminologueAlain Bauer, proche de NicolasSarkozyetparraindudeuxièmefilsde l’actuelministrede l’intérieur.

Politiquement, la partie se jouedepuistrenteansàarmes(très) iné-gales.«Lasécuritéestunfilonélecto-ral formidable, un thème imbatta-bleencampagne,où ilest reçucom-me la rosée sur le désert», souligneM.Badinter, qui se rappelle avoirété«leministre le plus impopulairede la gauche», prudemment igno-ré par la quasi-totalité des candi-datssocialistes lorsdelacampagnedes municipales de 1983, en dépit–ou à cause – de substantiels pro-grèsdes libertés.

Ce «filon» sécuritaire, l’ancienministrede la justice en attribue lapaternité à l’un de ses prédéces-seurs, Alain Peyrefitte – auteur dela loi « sécurité et liberté » defévrier 1981 –, qui se serait lui-même inspiré de la campagnemenéeoutre-atlantiqueparlerépu-blicainRonaldReagan.

Le PS en est à l’exact opposé. Sadoctrine, explique le politologueGérard Grunberg, est alors mar-quée par «le libéralisme culturel»et « l’anti-autoritarisme» desannées 1970. S’agissant de la délin-quance, l’analyse des causes socia-les éclipse la responsabilité indivi-duelle; la prévention doit prendre

lepas sur la répression. Traductionlibre, à droite : «La gauche privilé-gie toujours les bourreaux plutôtque lesvictimes.»

Lorsque le Front national com-menceàs’implanterpuisàprospé-rer, en surfant sur les peurs et lesangoissesdes Français, et en impo-sant à la droite les thèmes de l’im-migrationetdel’insécurité,lesmul-tiplesattaquescontrelesprésumés«angélisme» et « laxisme» de lagauche font rapidement florès. Aupoint de créer un décalage entre lagrille de lecture traditionnelle duparti et le «terrain».

Dans ce parti de notables qu’estle PS, ce sont des maires en priseavec les questions de délinquancequi vont tirer la sonnetted’alarme,au début des années 1990. Jeunesélus de l’Essonne et de Seine-Saint-Denis, Julien Dray, puis BrunoLeRouxetManuelValls s’efforcentde faire pencher la balance du côté

de la fermetéetdupragmatisme.L’aggiornamentoaurapourchef

d’orchestre Lionel Jospin. Un pre-mier pas est franchi lors de la cam-pagne présidentielle de 1995, sousl’impulsion de Daniel Vaillant.Souslapressionconjuguéedeséluslocauxet des études d’opinionqueluisoumetGérardLeGall,M.Jospinvaplus loin lorsqu’il accèdeàMati-gnon,deuxansplus tard.

Dans sadéclarationdepolitiquegénérale, lepremierministrequali-fie la sécurité de «droit fondamen-taldelapersonnehumaine»etl’éri-geendeuxièmepriorité(derrièrelechômage). Six mois plus tard, lorsd’un colloqueorganisé àVillepinte(Seine-Saint-Denis), il affirme savolontéde «privilégier la responsa-bilité individuelle sur les excusessociologiques». Le changement depied s’appuie sur une phrase, « lasécurité est la première des liber-tés», que reprendront plus tard…

Jacques Chirac, puis Nicolas Sarko-zy. Le tournant de Villepinteestincarné par Jean-Pierre Chevène-ment, ministre de l’intérieur de1997 à 2000. La raideur républicai-ne et le discours d’ordre du prési-dent du Mouvement des citoyenssontlàpourfairebarrageàladroite.

Ainsi conforté, M.Chevène-ment entend pousser son avanta-ge. Il fait feu de tout bois, prônantlacréationde«centresderetenue»et des mesures d’«éloignement»pourles«sauvageons», réclamantune refonte de l’ordonnance de1945 sur l’enfance délinquante. LePS était prêt à bouger,mais pas aupoint de telles embardées. A lachancellerie, Elisabeth Guigoutrouve làmatière à défendre âpre-ment son territoire ainsi que les

options de la gauche dite «mora-le». Elle finit par obtenir gain decause sur plusieurs arbitrages.

L’imagedefermetéaffichéeàVil-lepinte s’estompe. De ces passesd’armes à répétition, il résulte uneimpression de flou et de malaiseque Jacques Chirac observe etexploite depuis l’Elysée. DressantlebilandesonactionàMatignon,le3mars 2002, M. Jospin reconnaîtavoir«pêchéunpeuparnaïveté».

Cette phrase, puis son élimina-tion dès le premier tour de l’élec-tion présidentielle, le 21avril 2002,relancent les tenantsde la fermeté.De « l’ordre juste» défendu parSégolèneRoyal en 2007 à la phrasede François Hollande dans l’entre-tien qu’il a accordé au Monde du31août – «Mon seul objectif, c’est lasécurité» –, de nouveauxmots ontconforté cette ligne. Sans pourautantmettreun termeaudébat.

Ancienne conseillère de M.Jos-pinàMatignonsurlesquestionsdesécurité, où elle avait assisté à «ladualitéde lagaucheaupouvoir», ladéputée du Calvados Clotilde Val-tersedit«triste»d’avoirassisté, cetété, à «la résurgence d’une période[qu’elle]espérait révolue».p

Jean-BaptistedeMontvalon

«Lasécuritéestunthèmeimbattableencampagne,oùilestreçucommelarosée

surledésert»RobertBadinter

ancien garde des sceaux

LevraigagnantdumatchValls-Taubira?…LeprésidentLEQUEL,de lagardedes sceauxouduministrede l’intérieur,peutrevendiquerde l’avoir emportédans lesarbitragesdontprocède la«loi de lutte contre la récidive»pré-sentéevendredi 30août?Répon-se: leprésident. Jugéà l’aunedesorientationspolitiquesetdessavantséquilibres sémantiquesettechniquesqui structurent lepro-jet, le gagnantest indéniablementFrançoisHollandequi, entre jus-ticeetpolice, entreManuelValls etChristianeTaubira, entredeuxphi-losophiesetdeux lignes, a choisidenepas clairementchoisir.Ouplutôtdecomposer.«Leprésidentaunsavoir-fairequ’il a,une fois deplus,démontré», commenteunhaut responsablede lamajorité.

Surce sujet régalienet tradition-nellementsensiblepour le PS, lechefde l’Etat souhaitaitpar-dessustoutéviterunerésurgencede l’éter-nelleguerredepositionsentre lesPlacesVendômeetBeauvau,quicontribueaudéficitdecrédibilitéde lagaucheen lamatière.Mais lerapportde forces entreChristianeTaubiraetManuelValls avaitdégé-néréenquerellepolitiqueouvertedepuis lapublication,mi-aoûtdansLeMonde, d’une lettreduministrede l’intérieurdétaillant safermeoppositionau textepréparé

par la chancellerie. Il importaitdoncd’en rester là.

Signede l’importancede l’enjeuetde l’absencede vainqueur: c’està l’Elyséeques’est tenue laderniè-re réuniond’arbitrage sur le texte.Et c’estdepuis l’Elyséeque Jean-MarcAyrault aprésenté l’esprit etla substancede la réformepénale.

Biensûr,marquesupplémentai-rede laméthodehollandaise, cha-cunpouvait, à l’issuedes arbitra-ges, assureravoirpeséde façondécisivedans l’équilibreduprojet.MmeTaubira,qui prenait soindesoulignerque le textea étéproduitpar la chancellerie,peutavancerqu’elleobtientunemesureessen-tielle: la créationd’unealternativeauxpeinesplanchers,dont la sup-pressionavaitdéjà été tranchéepar le chefde l’Etat.

«Cohérence du texte»Lenouveaudispositifde«libéra-

tionsous contrainte,pourunretourprogressif et encadréà laliberté», qu’elle avait annoncé lorsde l’universitéd’étéduPSàLaRochelle est confirmé.Au-delà,«la cohérencedu texteestunvraisuccèspourTaubira, jugeunparle-mentairespécialistedudossier.L’épureglobalede la conférencedeconsensusdemeure: on ramène la

prisonàcequi est savocation, lapeineultime.»

Leministrede l’intérieur, lui,peut toutaussibiense féliciterdece«messagede cohérence,de fer-metéetde soutienauxvictimes».De fait, le ton, trèsvallsiste,dumes-sagede l’exécutif autourdecetteréformeavaitdéjà étédonnéparFrançoisHollande:«Monseulobjectif, c’est la sécuritédenosconcitoyens.Et l’efficacitéde laréponsepénale»,avait assuré lechefde l’EtatauMonde, vendredi.

Sonentourage insistaitaussisur laprésencedeM.Valls à l’Ely-sée, quidémentait toutmonopolede laPlaceVendômesur laproduc-tiondu texte, et sur«le faitd’assu-mer la constructionde6500nou-vellesplacesdeprison, ce quin’estpashabituel, audébutd’unquin-quennat,de lapart d’ungouverne-mentdegauche», souligne l’undesesproches.

Voilàquin’apas empêchéunprocès immédiat en«laxisme»,intentésans surprisepar ladroiteet l’extrêmedroite.«FrançoisHol-landeachoisi (…) le laxismeplutôtque la fermetéenvers lesdélin-quants», estime leprésidentdel’UMP, Jean-FrançoisCopé,quidénoncedans le texte«unsignalde faiblessepar les délinquants».

Mêmerhétorique, aumotprès,dans la réactionduFrontnational,qui estimeque«le laxismeresteenFranceune idéologied’Etat»etpointe«un trèsmauvais signalenvoyéauxdélinquants».

Le tonestdonné,quipour la sui-tedesopérationsparlementairesaugured’unvifdébat.Aupointquecertains, augouvernementetdans lamajorité, verraientvolon-tiers l’examendu texterepousséaprès lesmunicipales.Pas laminis-trede la justice, laquelle l’indiqueauMonde :«Unetelle réforme,quiaagitéetmobiliséà cepoint, doitpouvoir êtrediscutéedèsquepossi-blepar la représentationnationale.Jene voispasquelsargumentspourraient s’yopposer.»MmeTaubi-ra, qui estimequeretarder levoteconstituerait«une fauteéthiqueetuneerreurpolitique».

Dans lamajorité,beaucoupesti-menta contrarioqu’unexamendans l’année2014 seraitbiensuffi-sant.«Cequi compte, c’est la cohé-rencedu texte et le temps laisséauParlementpour l’adopter, tempori-se leprésidentde la commissiondes lois, Jean-JacquesUrvoas.Nousavonsbesoinde temps.Onnevapasvoteraucanon.»p

LaurentBorredonetDavidRevaultd’Allonnes

Lasécuritéet lagauche,unehistoiremouvementéeDans lavieillebataille entre lesPlacesVendômeetBeauvau, lePSaura laissébiendesplumes

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France

JUSTICE

PatriciaCahuzacmiseenexamenL’épousede l’ancienministre dubudget, JérômeCahuzac, a étémise en examen, jeudi 29août, pour «fraude fiscale» et «blanchi-ment de fraude fiscale»dans l’enquête sur le compte cachédesonmari. Selon l’ancien inspecteurdes impôts RémyGarnier,MmeCahuzac aurait engagédeuxdétectivesprivés, probable-mentdans le cadre de sa procédurede divorce, qui étaient «aucourant»de l’existenced’un compte caché bien avant les révéla-tionsdeMediapart. L’avocat PhilippePéninque, prochedeMari-ne Le Pen, a reconnuêtre celui qui avait ouvert en 1992 àUBS lecomptedeM.Cahuzac, qu’il avait rencontré audébutdes années1990par l’intermédiairedu cousindeMmeCahuzac. – (AFP.) p

Mariage gay LesVeilleurs interdits demarcheàParis par la PréfectureLaPréfecturedepolicea interdit, pourdes raisonsde«préserva-tionde l’ordrepublic», lamarcheprévue, samedi31août, par lesVeilleurs,opposésaumariagehomosexuel. LesVeilleursontenvoyéune lettreauxparlementairesenaffirmantque leurmar-chene saurait s’apparenteràunemanifestation,puisqu’ils«nerevendiquentrien etneportentpas de signesdistinctifs». –(AFP.)

Plainte de deux femmes contre lamaire deBollèneDeux jeunes femmesontdéposéplainte, vendredi 30août, contrelamairedeBollène (Vaucluse),Marie-ClaudeBompard (LigueduSud), qui refusede lesmarier, dans le cadrede l’enquêteprélimi-naire ouvertepar le parquetdeCarpentraspour «discriminationdans l’applicationde la loi en raisonde l’orientation sexuelle» et«entraveà l’exécutionde la loi parpersonnedépositairede l’auto-rité publique». Le coupledevrait êtremarié le 10septembreparl’adjointe à la culture à lamairie de Bollène. – (AFP.)

Récit

C ette année, beaucoup man-queront à l’appel. Si Jean-François Copé a prévu d’as-

sister à la réunion de rentrée desAmis de Nicolas Sarkozy les 1er et2septembre, à Arcachon (Giron-de), si Alain Juppé a accepté de s’ymontrer aux côtés d’Eric Woerthet deChristianEstrosi, on compte-ra les absents : Xavier Bertrand,Bruno Le Maire, Laurent Wau-quiez, François Baroin, NathalieKosciusko-Morizet, Eric Ciotti, LucChatel ou Valérie Pécresse ontdéclaré forfait.

Ils laisseront le noyau dur desfidèles de l’ancien président, telsBrice Hortefeux, Nadine Morano,Henri Guaino ou Guillaume Pel-tier, communier dans « la fidélité,la reconnaissance et la confiance»à Nicolas Sarkozy et proclamerleur foi ensonretour. L’andernier,àNice,ilsétaienttouslàlorsdupre-mierrassemblementdessarkozys-tes, tous sauf François Fillon.

L’espace d’un été, le ciel s’estassombri pour l’ancien président.Si la basemilitante lui est toujoursmajoritairement acquise, si lessondages lui restent favorables,lesténors jouentdésormaisouver-tement contre lui. Ils s’emploientà empêcher son éventuel retourque les sarkozystes envisagentpourl’automne2014,aprèslesélec-tions européennes.

Le droit d’inventaire revendi-qué par Jean-François Copé aumois d’août a sonné comme unaffranchissement, unemarque dedéfiance supplémentaire après larupture assuméequelques semai-nesplustôtparFrançoisFillon.Lesautres n’ont pas eu un mot pours’en offusquer: de Bruno LeMaireà Xavier Bertrand, en passant parLaurent Wauquiez, les membresde la jeune garde espèrent qu’unrenoncement de M.Sarkozy leurpermettradejouerleurproprecar-

tedanslacourseà l’Elysée.QuantàAlain Juppé, il se tait jusqu’auxmunicipales.

Un événement les a tous bra-qués : la venue de l’ancien prési-dent à l’UMP, le 8 juillet, après lerejet de ses comptes de campagnepar le Conseil constitutionnel.Pour sauver le parti de la faillite,l’«ermite de la rue de Miromes-nil » a alors sorti le grand jeu.Devant les caméras, il s’estposéenvictimeetenrecours. Il enaappeléaux militants. Non sans succès,puisque le «Sarkothon» devraitpermettre de récolter près de11millions d’euros de dons. «Deschèquessontarrivésenmasse,avecdesmots d’amour pour lui et pourCarla», affirmeNadineMorano,sagroupie.

Mais, ce jour-là, l’ex-présidentena trop fait auxyeuxdes préten-

dants.Nonseulement il a esquisséunprojetpour2017, levantlesdou-tes sursavolontéde retour,mais illes a tous humiliés en les prenantde haut. Rabaissé une fois de tropau rang de «collaborateur», Fran-çois Fillon a laissé retomber sarage, avant de lâcher froidement,lors d’une réunion publique à LaGrande-Motte (Hérault), le11 juillet : « Je ne lie pas l’avenir del’UMP à un homme, l’UMP ne peutvivre dans l’attente d’un hommeprovidentiel.»

Que François Fillon et ses parti-sans tapent dur, c’est logique. Ilsont choisi d’affronter NicolasSarkozy et l’assument. « Il n’y aplus de chef historique à l’UMP. Il

n’y aquedes gens égaux», tranchel’ex-ministre Eric Woerth. Maisd’autres prises de position, qui nevenaient pas du camp Fillon, ontsurgidurantl’été, sonnantcommedesalarmesauxoreillesdeNicolasSarkozy.

« Je ne suis pas sûr qu’il y aitd’hommeprovidentiel», s’est inter-rogé, le 31 juillet, le vice-présidentde l’UMP, Luc Chatel, soutien deM.Copé.«Le jeudoitêtreouvert», arenchéri une semaine plus tard lenon-aligné HervéMariton, chargédu projet de l’UMP, en refusantqu’un « leader naturel» soit déjàdésignépour la présidentielle.

En privé, des élus qui n’étaientpas forcément anti-sarkozystesconstatent les dégâts : «En ne par-lant que de lui, en nous prenanttouspourdesnuls,Nicolas Sarkozya réussi le tour de force d’agacerceux qui le soutiennent, ceux quiétaient prêts à bosser pour lui etceux qui ne veulent pas de sonretour», résumeundéputé.

Et soudain, Jean-François Copéa lâché sa petite bombe. Le 17août,dans un entretien àNice-Matin, leprésidentdel’UMP,quifaisaitfigu-re de meilleur allié de NicolasSarkozy, a donné son feu vert à unbilan « sérieux et objectif » de lapériode 2007-2012. Il a autorisé le«droit d’inventaire» et il l’a faitsansprendrelapeined’avertirl’an-cien président. Le discours sur la«liberté»,prononcédans la fouléeà Châteaurenard (Bouches-du-Rhône),asonnécommeunelibéra-tion, une façon d’afficher sa pro-pre visée présidentielle, lui quiavaitcollésansréserveauxthéma-tiques sarkozystes.

L’affranchissement de Jean-François Copé tient autant ducalculquede lablessure.Ledéputéde Meaux (Seine-et-Marne) a étésensible aux arguments des jeu-nes loups du parti qui clament ledroit, pour lanouvellegénération,de tenter sa chance sans avoir à

revivre la querelle des vieux cou-ples de la droite française. XavierBertrand, Bruno LeMaire, LaurentWauquiez ne veulent pas d’unmatch Sarkozy-Fillon, qu’ilsvoient comme un remake de l’af-frontement Giscard-Chirac ou dela guerreChirac-Balladur.

«La droite ne doit pas être ducôtéde larestauration», oseBrunoLeMaire, le 6juillet, lors de la Fêtede la violette organisée par le cou-rant sarkozyste de la Droite forte.Unmoisplustard,XavierBertrandl’affirme publiquement: «NicolasSarkozyneserapasànouveaucan-didat à l’électionprésidentielle.»

A ce jour, le maire de Saint-Quentin est le seul candidatdécla-ré à la primairede 2016, avec Fran-çoisFillon.Iln’estcependantpasledernieràypenser.A son tour, Lau-rent Wauquiez secoue le cocotieren reprochant au couple Sarkozy-Fillond’avoirmenédes«réformet-tes». Cen’estpasune révolte,maisc’est le début d’une fronde.

Jean-François Copé prend lamesure de la contestation aumoment où lui-même se senthumilié, mal-aimé, mal payé deretour. Le président de l’UMP n’apas digéré que Nicolas Sarkozyconvie son ennemi juré, FrançoisBaroin, à un déplacement à Lon-

dres, le 3 juin.«Je l’aimalpriset l’aidit à Nicolas Sarkozy », confieM.Copé, qui juge injuste denepasavoirétérécompensédesa«loyau-té sans faille».

Le président de l’UMP n’a pasnonplusappréciéquel’ancienchefde l’Etat le rabaisse au rangde sim-plevalet,le8juillet,devantl’ensem-bledescadresduparti,enluirepro-chant d’être un «conservateur»,sans idées neuves. Sur lemoment,il n’a riendit,mais, le lendemain, ila déclaré enplein comitépolitiqueduparti :«Jenelaisseraijamaisdire

que ladroite est conservatrice.»En 2007, dans sa conquête du

pouvoir, Nicolas Sarkozy savaitflatter, élargir, fédérer. Cette fois,c’est tout le contraire. Il ne passerien à personne. «Tous des nuls !»,lance-t-il depuis un an, persuadéque la guerre Fillon-Copé del’automne a durablement affaibli

ladroite, etqu’aucunprétendantàsa successionn’est à la hauteur.

Sesproches se sont inquiétésdesa dureté. Ils lui ont conseillé demieuxtraiterleprésidentdel’UMPqui«faitle job»,«abesoinderecon-naissance», sachantaufondd’eux-mêmesquel’ex-chiraquienneserajamaisun sarkozystepur jus. BriceHortefeuxveutcroirequelaruptu-re n’est pas consommée: « Jean-François veut être loyal, pas vassal,cela nous va très bien», dit-il enassurant que les deux hommesvont se revoir bientôt.

Lorsqu’il a découvert en lisantNice-Matinque l’UMPallait ouvrirl’inventaire, Nicolas Sarkozy alâché: «Qu’ils fassent ce qu’ils veu-lent, je ne suis pas dans cemonde-là.» Retranché rue deMiromesnil,à Paris, l’ex-président cultive safigure de «valeur refuge» chez lesélecteurs de droite, alors que sesproches recensent avec gourman-dise « la multiplication des écu-ries» qui bloque l’émergence d’unfédérateur. Le succès du «Sarko-thon»cetétéa rassuré sesamis: labase du parti reste sarkozyste. Lesbarons se sont peut-être affran-chis de Nicolas Sarkozy, ils ne s’ensontpas encore libérés.p

Françoise FressozetAlexandre Lemarié

Jean-FrançoisCopéprendlamesuredelacontestationaumomentoù

lui-mêmesesentmalpayéderetour

Al’étévenu,lesbaronsdel’UMPprirentcongédeM.SarkozyLesAmisdel’ancienprésidentseretrouventdimancheet lundi.Al’heuredudroitd’inventaire, lessouriresrisquentd’êtreunpeucrispés

«Sinostalgieilya,ellenedébordepasducampSarkozy»Questionsà…Yves-MarieCann,politologueetdirecteur chargéde l’opinionà l’institutCSA

Quelle cote de popularitéNico-las Sarkozy enregistre-t-il àl’UMPet dans l’opinion?

YPlusd’un anaprèssa défaite à la prési-dentielle, la person-

nalitédeNicolas Sarkozy restetrès clivante dans l’opinion. 43%des Français gardentune imagepositivede lui, contre 55%qui enontuneperceptionnégative, dansnotre observatoirepolitiquedumois d’août.

S’il conserveun capital de sou-tien très fort à droite, avecunecote de90%chez les sympathi-santsUMP, ils ne sont que 18%àgauche. Si nostalgie il y a, leconcernant, elle ne débordepasendehors de son camp, car 54%des Français affirmentnepas leregretter. En somme,NicolasSarkozygarde son socle de fidèles,maisnebénéficiepasde l’impopu-laritéde l’exécutif enplace.Sapopularité a-t-elle variédepuis sa défaite à la présiden-tielle?

Non, depuis sondépart de l’Ely-sée, sa cotene varie quasimentpas. Elle oscille entre 40%et 45%.On constateune stabilité de sonimage, avecun clivage gauche-droite très important, commesison imageétait «gelée»dans l’opi-nion. Le plus frappant concernantNicolas Sarkozy, c’est le capital desoutienqu’il garde au seinde sonpropre campdepuis cinq ans.

De janvier2008 à la fin de sonquinquennat, l’ancienprésident agouvernéen étant très impopulai-re dans l’opinion tout en conser-vantun socle stable departisans.Onobserve lemêmephénomèneaujourd’hui.Comment expliquez-vous qu’ilreste si populaire à droite?

Les sympathisantsUMPéprou-ventde la nostalgie à son égard.Elle senourrit par le résultat de laprésidentielle.Même s’il a perdu,le score deNicolas Sarkozyausecond tour face à FrançoisHol-landea été interprété commeuneperformanceàdroite.

L’autremoteurde sa populari-té, c’est la bataille pour la prési-dencede l’UMP, fin 2012. Cette cri-se a laissé des traces profondesdans l’électoratUMP,qui perçoitNicolas Sarkozy comme le seulcapablede restaurer l’unité à droi-te. Autrementdit, il apparaît com-meune sorte de sauveurdans soncamp.Ecrase-t-il tous ses rivauxà droite dans les sondages?

Oui, aujourd’hui, le championidentifié à droite, c’estNicolasSarkozy.Une enquête récenterésumebien le rapport de forceentre les principauxprétendantsà l’Elysée, à droite.Dans laperspec-tived’une candidature à la prési-dentielle,Nicolas Sarkozyest plé-biscitépar 81%des sympathi-santsde l’UMP, François Fillon estdistancé, avec 39%, Alain Juppécompte24%et Jean-FrançoisCopé, 11%.

François Fillon est très nette-mentdistancéquandon le placeen concurrence avecNicolas

Sarkozy,mais l’ancienpremierministre, qui a un fort capitald’opinionspositives, apparaîtcomme le jokerpotentiel en l’ab-sencede ce dernier.Comment expliquez-vous queNicolas Sarkozy soit rejeté parunemajorité de Français, quandplusieursmesures de son quin-quennat suscitent une forteadhésion, selon un sondageCSAparu le 25août?

Car ce sontdesmarqueursforts de sonprécédentquinquen-nat. Au-delà, le rejet dont il faitl’objetdans l’opinion tient à sapersonnalité et au styledeprési-dencequ’il a incarné.On constatepar exemple que le bouclier fiscalrestemassivementdésapprouvé,car l’imaged’unNicolas Sarkozy«président des riches» reste trèsancrée. Ses activitésde conféren-cier depuis sondépart de l’Elyséeconfortent sansdoute cetteper-ception.p

Proposrecueillis parAl. Le.

Si labasemilitanteesttoujoursacquiseàNicolasSarkozy,

désormais, lesténorsjouentouvertement

contrelui

Nicolas Sarkozy lors de sa venue au siège de l’UMP, à Paris, le 8 juillet. FRED DUFOUR/AFP

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culture

DonMcCullin,hantéparlesimagesLemythiquephotographedeguerreexposesesvisionstragiquesaufestivalVisapour l’imagedePerpignan

Rencontre

Batcombe (Grande-Bretagne)Envoyée spéciale

L a paix, le photographe deguerre Don McCullin semblel’avoir trouvéedans son villa-

ge brumeux du Somerset. Petitsmurs de pierre, collines verdoyan-tes, verger–«Jen’ai pas le tempsdecueillir toutes les pommes». Il y aquelques années, il a acheté leschamps devant sa maison pourque la pression immobilière neviennepas luigâcher lavue.

Lephotographe,qui a suivi tousles conflits marquants de l’après-guerre,exposesesimagesdansunerétrospective au festival de photo-journalisme de Perpignan (jus-qu’au 30septembre), après lesavoir réuniesdansun livre (éd. Ski-ra,2012.)Mais,cejour-là,ilasurtoutl’air d’un parfait gentleman- far-mer, regard bleu coupant, crinièreblanche et prestance intacte mal-gré son âge – 78 ans. Il ymène unevie tranquille avec sa troisièmefemme et son fils de 11 ans, Max,qu’ondevineàunebalançoiredansle jardin.

LeBritanniqueseracontevolon-tiers, servant le thé, ignorant lessonneries stridentes du téléphone.Ce fort en gueule peste contre lescélébrités dans les journaux,contre l’état du service de santéanglais, «déplorable» – il l’a testélors d’une crise cardiaque il y adeuxans.«Mafemmem’autoriseàrâler une heure par jour, sourit-il.En général, c’est après avoir écoutéles infos lematin.»

Tableau paisible? Même dansson éden bucolique, la guerre esttoujours en embuscade. «A la sai-sonde la chasse, les coupsde feumerenvoient sur la route entre le Viet-nam et le Cambodge, où la mortfrappaittousles jours»,dit-il.Touteodeur de brûlé convoque chez luilesfantômesdesapremièreguerre,à Chypre, en 1964: lesmatelas cra-maientdansunemaisonturqueoùtousleshommesvenaientdesefai-remassacrer.

«Le ticket n’était pas gratuit»,résume Don McCullin avec sonsens de la formule, pour parler deses voyages vers l’enfer et de samémoire trop lourde à porter.«Je vis dansmon passé. Je me senscoupable d’avoir survécu, coupable

de cette vie confortable, coupabled’avoir quitté le taudis où j’ai gran-di. Et pourtant j’ai payépour ça.»

De tous les reportersmythiquesde sa génération, dans lesannées1960et 1970,DonMcCullinest celui qui a publié les images lesplus violentes, les plus glaçantes.Sesphotospubliéesdans leSundayTimesMagazine, dont il fut la figu-re emblématique, ont montrél’hommedans ce qu’il a de pire, duVietnam au Biafra, du Cambodgeau Congo: la violence aveugle, lacruauté sadique, la souffranceinconsolable.

Dans sa photo la plus connue,un enfant biafrais albinos faméli-que est à peine capable de tenir

debout,lamaincrispéesuruneboî-tedeconservevide. Il ya ceGIamé-ricain au regard fou après unbom-bardementauVietnam.Ouces sol-dats congolaisqui tourmententunprisonnier avant de l’exécuter. Lephotographe n’a jamais pris degants avec l’horreur, et tirait sesimagesdansdestonsnoirs.«Jevou-lais que ça pète au visage des gensaupetit-déjeuner.»

SonrefugeduSomersetestaussimarqué par une autre guerre, plusancienne. C’est dans la région queMcCullin avait été envoyé, enfant,avec sa sœurMarie et d’autres éco-liers,pourfuirLondresbombardée.Il en garde des souvenirs radieux…et de l’amertume. «Ma sœur étaitdansune famille riche,moi chez untravailleur agricole. Tous les jours,une domestique en uniforme ser-vait le thé àMarie. Je regardais parla fenêtre… on me faisait dégager.Après la guerre, ma mère a donnémasœurà cesgens.»

DonMcCullin,lui,retourneman-ger de la vache enragée dans lesquartiers malfamés de Londres,entreunemère violente et unpèremalade,quimeurtquandila14ans.Il voledu charbonpour chauffer safamille,ilcomposeaveclaviolence,avec lahonted’êtrepauvre–«Jenepouvais prendre une douchequ’une fois par semaine, je puaisdans lemétro, j’avaishonte.»

Il fraye avec les mauvais gar-çons, et ce sont ses amitiés louchesqui lui valent sa première publica-tion: il vend à L’Observerune pho-to du gangdesGuvnorsprise danssarue.Aforced’obstination,appre-nant la photo dans les livres, ildécroche des reportages. «J’auraisdû finir voyou, dit-il.Mais j’aimaistropmalibertéetmonindépendan-ce. Je ne voulais pas aller en pri-son.» Plus tard, ce loup solitairerefusera d’intégrer l’agence Mag-num – « J’ai quitté les gangs, cen’était paspour y revenir!»

Au Sunday Times Magazine, ilrestera dix-huit ans, enchaînantjusqu’à trois conflits l’an. Elevéà ladure, plein de rage, il n’a peur derien–«J’auraisdûmourirdixfois».Dans ses images, les sujets regar-dent droit dans l’objectif. CommecevieuxVietnamienqui le fixe, lesyeux plein de haine. « Je voulaisqu’ilspartagentmonmalaiseàêtrelà. Et qu’ils voient que je compre-nais l’injustice de leur souffrance.»L’aventureaveclemagazines’arrê-te en 1982, quandRobertMurdochrachète le titre: «Ils voulaient faireunmagazinede style. J’ai été viré.»

Dansl’arrière-cuisinedesamai-son,lephotographeaméticuleuse-ment rangé et étiqueté toutes sesarchives–«Si jeparsetquejedispa-rais, ma famille doit pouvoir s’yretrouver». Il y là 60000 négatifs,20000diapositives,quelquesmil-liers de tirages… et des tickets demétro: le photographegarde tout.

Il sort d’une boîte de somp-tueux tirages platine, une techni-queancienneetprécieuse:vuesdedésert, ruines romaines.«Je ne tirepas mes photos de guerre commeça, précise-t-il, ça serait indécent.»Modelé par la presse, McCullin nes’estquerécemmentrésignéàven-dre des tirages en galerie – «Etjamaisdesmorts».

Aprèslaguerre,c’estdanslapho-todepaysagequ’ila trouvésavoie.Mais ces images aussi sont sou-vent lugubres. L’Angleterre, il ne laphotographie qu’en hiver, avecdes ciels chargés – «J’aime la nudi-téde la nature». Il a signé un livresur les ruines romaines auMaghreb et au Moyen-Orient(Southern Frontiers, éd. JonathanCape,2010).Maisilnepeuts’empê-cher de remarquer que l’Empireromain n’est qu’un vaste champde bataille. « Ces monuments

magnifiques ont été bâtis par desesclaves, des gens qui ont souffert.Alors pourquoi suis-je là, béatdevant tant de beauté?»

Don McCullin répète à l’enviqu’il en a fini avec la guerre – elle afailli le tuer, elle a fait de lui un«junkie»accroaudanger,elleabri-sé sa première famille. Pourtant, ily pense encore : « Je ne devrais pas,c’estplus fort quemoi.»

Fin 2012, il s’y est frotté de nou-veau pour le Times, à Alep, enSyrie. « Les bombes, le froid, lafaim, j’y arrive. Mais la vérité, c’estquemoncorpsnerépondpluscom-me avant, dit-il, mélancolique.Mes jambes sont celles d’une tor-tue.» L’esprit, lui, est encore clair.McCullin veut encore se confron-ter à la tragédie du monde. AuNord de l’Angleterre, l’empereur

Hadrien a laissé un long mur defortifications.p

ClaireGuillot

DonMcCullin, la paix impossible.Commissaire : Robert Pledge. Visapour l’image, jusqu’au 15septembre, àPerpignan. Projections du 2 au 5septem-bre au Campo Santo. Vingt-troisexpositions gratuites, de 10heuresà 20heures. Visapourlimage.com

AlaFêteàNeuneu,jesuistombésurungéant

«Alasaisondelachasse, lescoupsdefeumerenvoient

auVietnam» Dans samaison du Somerset, en 2009. EAMONNMCCABE/THE GUARDIAN

J ’ai euunLilliputienpendantvingt-cinqans, il est enAngleter-re, il n’apaspuvenir, explique

EmileVancraeyenest, aliasChoco-lat.Audépart j’avaisuneménage-rie, un lion, un tigre…EtBardot surledos. C’est alors que je l’ai rencon-tré, lesgens le regardaient, lui, plusque les animaux…»Nostalgie.

Photosde la femmeàtroisseinsetdegéantsmons-trueuxaffichéssur lesparoisd’unemodeste tente; des sœurssiamoisesetTotor le cochonàdeuxtêtes, conservésdansunesériedebocaux…LaFêteàNeu-neu,qui installe sesquartiers cevendredi30août (jusqu’au15octo-bre) sur lapelousede laMuette,dans leboisdeBoulogne, àParis, adécidé,pour ses30ans,de rendrehommageàces «phénomènes»quiont jalonnél’histoiredes fêtesforaines.«Desbocauxcommeça,y enaaumoins 250à lamaison,soupireChocolat.Monpèreavantmoi, etmongrand-père,ona tou-jours fait ça.»Adirevrai, avec sesvingt-quatreenfants («Yaeubeaucoupde jumeaux»), le vieuxVancraeyenestétait en soiunphé-nomène.Uneviede forain, de

baraquesà frites enmanèges,detrains fantômesen«entre-sorts»,ces tentesoù l’on invite le specta-teuràvenir satisfaire sa curiosité.

Avouons-le: difficiledenepaséprouverunegêneà regarderaumilieudes flonflons cesmalheursdontonpensait la divulgationdésormais réservéeau cinéma(Freaks, deTodBrowning,Ele-phantMan, deDavidLynch,LaVénusnoire, d’AbdellatifKechi-che…).«Regardez-leavec les yeuxduXIXesiècle, suggère Jean-PaulFavant, créateurduMuséedesarts forains.Celaavaitune fonc-tiondocumentaire, onymontraitlesmaladiesvénériennes, cela fai-sait officede coursd’anatomieetd’embryologie.C’était l’équivalentde la télévision. Et puis ony trou-vaitunhumourquin’est plus lenôtre. Lepolitiquement correct estpassépar là. Lamorale?Avousd’en trouver la limite…»

Deuxmètres47, pointuredespieds: 58. BrahimTakioullaha lavoixdouce:«Jene suispasunmonstre, je suisun recordman.»Deuxièmeplusgrandhommedumonde,maisdespieds sans égal,le jeuneMarocain,marié, bac+4

(géographie), vit aujourd’huidesadémesure.«Et votre femme,elle estgrande?– Jenepourraispasvousdire», sourit-il.

Vous les vouliezmalheureux,ceux-làont trouvésur le champde foireunsens à leurvie etunevaleurà leurhandicap. SadiAzizracontequ’iln’étaitqu’unnain fai-sant leménagedansuncafé;depuisquatreans, il est «le»nainqui, avecdes forainsallemands,«joue»deville enville.Guillau-meBats souffraitd’ostéogenèseimparfaite, il remplit les salles ensemoquantde sesdifformités.Tousont réponduprésentà l’ap-peldeMarcelCampion,qui vou-laitunévénement:«Onest deve-nus trop commercial. Il faut retrou-verdes idées, des artistes», s’en-thousiasme«le roides forains»,quiorganise la Fête àNeuneu,maisaussi celledesTuileries et laFoireduTrône…

Unequestionme tracasse:«Çanevousgênepas, la façondont lesgensvousdévisagent?»Legéantmeregarded’unair perplexe: dequoi il parle, celui-là, avec sesgrandesoreilles?p

LaurentCarpentier

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Bandedessinée

Saint-Malo (Ille-et-Vilaine)Envoyé spécial

M arcel Gotlib n’a jamaisaimé réaliser les décorsdans ses planches. C’est

pours’exonérerdecettecontraintequ’il a imaginé la fameuse petitecoccinelle qui gesticule et glosesans arrêt dans les coins de sescases.Empruntéaumagazineamé-ricainMad–et à l’undesesauteurscultes,WallyWood–,l’effetesttypi-que de l’humour gotlibien, fait deseconddegréetdecontre-piedsper-manents. Donner le nom d’«effetcoccinelle» – détournement paro-diqueducélèbre«effetpapillon»–àlarétrospectivequirendhomma-ge, à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine), aupère de Gai-Luron et de Superdu-pontestunbeauclind’œil.

Gotlibn’apassouventeuleshon-neurs d’une exposition à samesu-re. Hormis l’accrochage après sanomination au palmarès desGrandPrixde laville d’Angoulêmeen 1991, seul le Centre belge de labande dessinée lui réserva sescimaises en 2006. A 79 ans, le créa-teur de Fluide glacial jure qu’il se«contrefichecomplètement»decet-te absence de reconnaissance. Lefaitqu’ilaitdécidédeneplusprêterd’originauxne simplifiepas l’exer-cice.Gotlibenabeaucoupconfiésàune certaine époque, et certainsnelui sont jamais revenus…

Que faire partant de là? Primo,accrocherdes reproductionsde sesmeilleuresplanches,celaaugrédesséries (Les Dingodossiers, La Rubri-que-à-brac), des supports (Pif, Pilo-te, Fluide glacial) et autres person-nages (Nanar et Jujube, Gai-Luron,professeur Burp, Hamster Jovial,Isaac Newton, Pervers Pépère,Superdupont…) qui ont jalonné sacarrière. Le résultat est tout saufdécevant. La grande qualité desduplicatas réalisés jettera le doutechez les esthètes, qui n’ignorentpas que les originaux de Gotlibsont d’une propreté absolue. Legros des visiteurs, lui, se délecterade la sélection. On retrouve desbijoux tirés de la Rubrique-à-brac,la sériedont l’auteurest leplusfier.

Impossible de ne pas riredevant le topo hystérique du pro-fesseur Burp consacré à la hyène.Unedoublepagesur le thèmedelafamine africaine à travers le pris-me des médias (Désamorçage),une autre sur le bonheur de lapaternité(LaBoule) font(re)décou-vrir un Gotlib plus sensible quecelui qu’on connaît.

L’autre parti pris de l’exposi-tion malouine – prélude au festi-val Quai des bulles, fin octobre –est la scénographie. De nombreu-ses statues balisent ainsi le par-cours.Laplus impressionnanteestcelle de… Gotlib en personne, per-ché en haut d’une colonne de5,50m de haut, l’air pénétré, unecouronne de lauriers sur la tête.Sonnom:DeconumRex.

Pervers PépèreLa plus osée est celle de Pervers

Pepère ouvrant grand son imper-méable dans un coin du lieu d’ex-position, qui n’est autre… qu’uneancienne chapelle ! Papy salace àl’imagination galopante, PerversPépère ne fait en réalité que simu-ler une perversité débridée dansses gags, cela dans le seul but detrompersonmonde(et les lecteursauxidéesmalplacées).DupurGot-lib là aussi.

Toute l’exposition, à Saint-Malo, est frappée du sceau de ladéconnade,samarquedefabrique.«J’ai toujours aimé déconner, eneffet, confie-t-il. Mais je suis aussiungranddépressif,mêmesi celanese voit pas.»

Prince de l’absurde et génie dutrait,MarcelGotlibaarrêtéde fairede laBDaumilieudesannées1980parcequel’animationdeFluidegla-cial (créé en 1975) lui prenait dutemps. Mais pas seulement : « Jecraignais d’avoir tendance à piéti-ner,àtournerenrond»,dit-il.Dom-magequ’il n’ait pas continuéquel-ques années supplémentaires ànous dérider si énergiquement leszygomatiques. p

Frédéric Potet

Gotlib : l’effet coccinelle. ChapelleSaint-Sauveur, Saint-Malo(Ille-et-Vilaine). Jusqu’au 27octobre.www.quaidesbulles.com

Retrouvez chaque semaine la rubrique“GASTRONOMIE”, renseig. : m 01.57.28.39.57

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Chaque spécialité gastronomique a son maestro, son orfèvre, celuidont le tour de main, l’expérience et le talent permettent de hisserun met au rang d’œuvre d’art. Si la lutte est serrée dans certainsdomaines, tel celui du macaron, le maître incontesté en matière degigot reste et demeure Sébillon, à Neuilly-sur-Seine. Intraitable surla qualité de ses agneaux, ce bel établissement garde jalousementsecrètes les filières lui permettant de disposer, tout au long del’année, de bêtes à la chair merveilleusement délicate et tendre.Amoureusement préparé, le morceau princier exhale, grâce à unecuisson lente et précise, des saveurs étonnamment différentesselon que l’on préfère le rosé ou le plus cuit. Découpé devant voussur un chariot à capot de cuivre, il est servi à volonté, accompagnédes traditionnels et délicieux lingots. Rançon de la gloire, les qualitésde son gigot font parfois oublier que Sébillon propose égalementdes entrées astucieuses, ainsi que de superbes plateaux de fruitsde mer et crustacés, dont c’est la pleine saison. D’une fraîcheur etd’une qualité peu courantes à Paris, ils offrent une joyeuse alternativeà ceux que septembre fait rêver d’embruns...

Jean de LoÿsSÉBILLON www.sebillon.com20, avenue Charles de Gaulle - 92200 Neuilly - Tel. 01 46 24 71 317/7 jours - Service de 12h00 à 15h00 et de 19h00 à minuit - Voiturier

L’idée gourmande de la semaine

Le meilleur gigot sinon rien •• •

DISPARITION

LepoèteirlandaisSeamusHeaney,PrixNobeldelittérature,estmort,àl’âgede74ansPrixNobel de littérature 1995, le poète irlandais SeamusHeaneyestmort, vendredi 30août, dansunhôpital deDublin«aprèsunecourtemaladie», a annoncé sa famille. Il était âgé de 74 ans.Né le13avril 1939en IrlandeduNord, aînéd’une famille deneufenfants appartenantà laminorité catholique, il exalta toute savie les paysages rurauxde sonenfance. Après avoir étudié la lan-gue et la littératureanglaises à l’universitéQueen’sde Belfast, ily devient enseignant en 1966, année oùparaît sonpremierrecueil de poèmes,Deathof aNaturalist. Il se partagera toute savie entre l’enseignementet l’écriture, qui témoignedes contra-dictions et déchirementsde l’identité irlandaise. En 1995, le prixNobel vient récompenser«uneœuvre caractériséepar sa beautélyriqueet sa profondeur éthique». Nous reviendrons sur cette dis-paritiondansuneprochaine éditionduMonde. p

Enchères La«Catho» se sépared’unegrande partie de son fonds photographiqueUnegrandepartie du fonds photographiquede l’InstitutCatholi-quede Paris (ICP), qui comprenddes grandsnomsde la photoduXIXesiècle, sera dispersée auxenchères à l’Hôtel Drouot, a annon-cé le 29août lamaisonAder, chargéede la vente. La dispersionen800 lots des trois quartsde la collectionphotographique, esti-méeà 800000euros, sera organisée le 17novembre, pendant leSalon internationalParis Photo. – (AFP.)

MusiquePaulMcCartney fait du neuf avecdu vieuxEnannonced’unalbumàparaîtremi-octobre,PaulMcCartneyamis ses fansenappétit avecunechansonmiseen ligne jeudi29août sur Internet.McCartney,quinemanquepasd’humour, achoisi lemorceau intituléNew (nouveau), titreprobablede l’al-bum,dont l’atmosphèreest plusprochede lapériodepsychédéli-quedesBeatles façonAll YouNeed is Lovequedesderniersétatsdesmusiquesélectroniques. L’albumdevraitêtreunretourauMcCartneypop, aprèsdes incursionsdans lamusiqueclassique(Ocean’sKingdomen2011) et le jazz (Kisseson theBottomen2012).

culture

Arts

L’Isle-sur-la-Sorgue et Le Thor(Vaucluse)Envoyé spécial

A Avignon, les femmes nejouent pas les Arlésiennes.Outre la remarquable expo-

sition «Les Papesses», qui met enmajesté, à la FondationLambert etau Palais des papes (Le Monde du16 juillet), cinq sculptrices–Camille Claudel, Louise Bour-geois, Kiki Smith, Jana Sterbak etBerlinde De Bruyckere –,deuxautres manifestations ren-dent hommage à ces artistes queleur sexe a longtemps tenues éloi-gnées, non seulement des écolesd’art, où il n’était pas questionqu’elles risquent d’entrevoir unmodèlenu,mais ausside l’histoiredel’arttoutcourt.L’inventeurdeladiscipline,GiorgioVasari, dans sesViespubliéesen1550,n’enréperto-rie «que quatre sur les deuxcentsartistes marquants de son temps,dontuneseulesculptrice,Properziade Rossi », rappelle utilementValériedeMaulmindans le catalo-gue qui accompagne l’exposition«Sculptrices» qu’organise à L’Isle-sur-la-Sorgue la villaDatris.

Immeubles de laineCette fondation, consacrée à la

sculpture contemporaine, en réu-nit, elle, pas moins de soixante-huit. A quelques kilomètres de là,dans la communedu Thor, la Fon-dation Poppy et Pierre Salinger enmontre treize, dans le parc de labastide où le célèbre journalisteaméricain termina ses jours.

On retrouve Camille Claudel,LouiseBourgeoisetKiki Smithà lavilla Datris, mais aussi quelquesnomsqui ontmarqué la sculpturedu XXe siècle, comme KatarzynaKobro, Germaine Richier – César,quandonrefusad’installersespre-mières compressions au Salon de

mai en 1960, aurait dit : « la seulequi peut en juger, c’est Germai-ne…» –, Louise Nevelson, MeretOppenheim,Alicia Penalba,MartaPanouNiki de Saint Phalle.

Mais si l’exposition d’Avignonest centrée sur la représentationdu corps, et pas toujours féminin,celles-ci sont bien plus diverses.Les femmes ont envahi tous lesdomainesdelasculptureetontétépartie prenante de tous les grandsmouvements artistiques duXXesiècle: le constructivismeavecKobro, le surréalismeavecOppen-heim, l’abstraction géométriqueavecGenevièveClaisse,MartaPan,Beverly Pepper, Parvine Curie ouMarieMorel, le cinétismeet l’opti-cal art avec Marina Apollonio,AnneBlanchet,MarthaBoto,maisaussi des travaux plus concep-tuels avec Claire-Jeanne Jézéquelou Agnès Thurnauer (toutes deux

à la FondationSalinger).Elles y ont aussi adapté et

détourné des techniques que lasociétévoulait leurimposer: le tri-cot (Annette Streyl l’utilise pourconstruire d’étonnants immeu-bles de laine), le crochet (JoanaVasconcelos), la dentelle (AlicePilastre l’utilise à la place du car-ton perforé pour partition de boî-tes à musique), voire les arrange-ments floraux, si on peut définirainsi l’œuvre exposée à la villaDatris de Camille Henrot, récentelauréate de la Biennale de Venise,une pièce de la série «Est-il possi-ble d’être révolutionnaire etd’aimer les fleurs?»…

Cette profusion peut parfoisvirer à la confusion dans le par-cours des expositions, et c’estsans doute le seul défaut qu’onpuisse y trouver. Par contre, ellesoffrent aussi quelques jolies

découvertes, comme le fragile(riendecondescendantlà-dedans,mesdames !) et beau travail dePaulineGuerrier,oulebétonchan-tant de Milène Guermont. Ons’étonne de s’en être étonné :sculpture, statuaire (et peintureaussi,pendantqu’onyest)nesont-ils – on a failli écrire «elles» – pasdesmots féminins?p

HarryBellet

Sculptrices, Villa Datris, 7, avenuedes Quatre-Otages, L’Isle-sur-la-Sorgue(Vaucluse). Tél. : 04-90-95-23-70.Du vendredi au dimanche, de 11heuresà 18heures, jusqu’au 11novembre.Entrée libre. Catalogue 160p., 29 €.The Dream Shall Never Die, FondationPoppy et Pierre Salinger, La BastideRose, 99, chemin des Croupières, LeThor (Vaucluse). Tél. : 04-90-02-14-33.Tous les jours sauf mardi, de 14h30 à18h30, jusqu’au 14octobre. Entrée 6¤.

Gotlib,roideladéconnade,déroulesesgagsàSaint-MaloUneexpositionrendhommageaupèrede«LaRubrique-à-brac»etdes«Dingodossiers»

«Acapulco» (2012), de Joana Vasconcelos. COLLECTION PRIVÉE

L’empreintefémininesurlasculptureDeuxexpositions,dans leVaucluse,mettentenmajestédesartistes femmesduXXesiècle

Cinéma

VeniseEnvoyé spécial

L a littérature américainea cecid’extraordinaire qu’elleconstitue un inépuisable

réservoir de scénarios en toutgenre. La pépite n’est jamais loin.De ce point de vue, il était pour lemoins étonnant que les livres deLarry Brown, un auteur de romansnoirsmort en 2004, n’aient jamaisfait l’objet de la moindre adapta-tion. Présenté vendredi 30août en

compétitionà laMostra deVenise,Joe, le filmdeDavidGordonGreen,répare cet oubli. Non seulementc’estunbonfilm,maisildonneunefurieuse envie de découvrir cetauteur injustementméconnu.

Publié en 2001 dans la collec-tionFolio«Policier»(onsedeman-depourquoi,vuqu’ilnes’agitnulle-ment d’un polar), Joe, comme laplupart des romans de LarryBrown, se passe dans un coin pau-méduMississippi.S’ycroisenttou-tes sortes de laissés-pour-comptede la société, des «petits Blancs»,mais aussi des Noirs. Et commesouvent chez Brown (qui fut pom-pier seize ans), il y est question dubien et dumal, de rectitudemora-le, de sacrificeet de rédemption.

Unpère de substitutionDans cette atmosphère faulk-

nérienne, on découvre la familleJones – façon deparler, vu l’état dedélabrement de ladite famille: il ya le père, un immonde individuenvoie de vagabondage, la mère, àmoitié timbrée, et les deuxenfants, une fille qui ne prononcejamais unmot, et un garçon, Gary,qui passe son temps à ramasserdes canettes vides pour se faire unpeud’argent.

Un jour, Gary rencontre Joe(NicolasCage). Undrôle de type, ceJoe, buveur et fumeur invétéré,dont le boulot consiste chaquematin à ramasser des journaliersnoirs et à les emmener dans sonbreak pour travailler dans la forêt.Sous ses airs de grande gueule,c’est un brave type. Unmec coura-geux et sensible, vaguement anar,qui n’a pas été gâté par la vie. Il vitlà, au fin fond du Grand Sud desEtats-Unis, sous des pluies torren-tielles, en se demandant quel sensdonner à sa vie (ou plutôt à ce qui

en tient lieu). Ce jeune Gary, juste-ment, 15 ans, il va s’y attacher, leprotéger, jusqu’à devenir pour luiunvéritablepèrede substitution.

D’une certaine manière, Joe estun western sudiste : on y entredansunbar commeautrefoisdansles saloons; les personnagesont lagâchette aussi facile que dans unfilm de Raoul Walsh. C’est aussiunebellehistoire d’amitié.NicolasCage compose un personnage à lafois sensible,pudiqueet paumé (lemonde qui l’entoure ne luiconvient pas, mais alors pas dutout).Quant àTye Sheridan (Gary),heureux d’avoir enfin unmodèle,il finirabienpar trouver lasérénitéqui lui permettra d’affronter la viesans trop de dommages. Excellen-te réalisation de David GordonGreen(àquil’ondevaitdéjàGeorgeWashington, l’histoired’ungrouped’enfantsdansunevilledéshéritéedeCarolineduNord), Joeadeschan-ces de figurer au palmarès de laMostra.

Trèsattendumaisprésentéhorscompétition,The Canyons, de PaulSchrader, n’est pas le grand filmque l’on pouvait espérer, comptetenude la personnalité de son scé-nariste(BretEastonEllis)etdupedi-greedesonréalisateur (BlueCollar,AmericanGigolo,CatPeople,Mishi-ma…). Filmàpetitbudget, c’estunesérie B, C ou Z, peu importe, qui sesitue dans lemilieu des films por-nosdeLosAngeles.JamesDeen,lui-même acteur du X, et LindsayLohan (excellente) se jalousent àquimieuxmieux.Riendebienpas-sionnant,sicen’estquelquesplansde cinémas à l’abandon, manièresans doute pour Paul Schrader designifier, si ce n’est la fin de l’âged’orhollywoodien,dumoins la finde ses illusionscinéphiliques.p

FranckNouchi

«Joe»,westernsudistepourNicolasCagepauméPrésentéà laMostra, le filmdeDavidGordonGreenest l’adaptationd’unromandeLarryBrown

10 0123Dimanche1 er - Lundi 2 septembre 2013

Page 11: Le Monde Du Dimanche01 Et Lundi 02 Septembre 2013

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AU CARNET DU «MONDE»

Naissances

Vincent BRÉHIERet Lisa MUSCINESI,

ses parents,Céleste et Ariel,ses sœurs,

sont heureux d’annoncer la naissance de

Andrea,Mehdi, Angel, Marie,

le 20 août 2013, àMarseille.

Pépé Pierre et Elisabethsont très heureux de l’arrivée de

Gabriel,le 13 août 2013 et souhaitent àMarjolaine JARRY et Laurent PINEL,

ses parents,plein de bonheur et de joies à trois.

Nathalie FONVIEILLEet Philippe LECAT

ont la joie d’annoncer la naissancede leur petit-fils

Maxime,le 27 août 2013,

chezAgathe de VOGÜÉ et Thomas LECAT.

3, rue d’Arsonval,75015 Paris.

Anniversaire de naissance

Vingt ans et Le Monde devant toi…

Joyeux anniversaire

Vincent !

Mom et José.

Mariages

Estelle COUFFINet Jeffrey BURKHOLDER

ont la joie d’annoncer leur mariage, célébréle 22 août 2013, à San Francisco.

Lilya etMaximeont la joie de faire part de leur mariage,ce samedi 31 août 2013, à 11 heures,à la mairie de Paris 19e.

Lilya Deramchi et Maxime Piermont,Rue André-Dubois,75019 Paris.

Décès

Vincent et Michèle Courtillot,Jean-Pierre et Dominique Courtillot,Carine et Mathieu Tank-Courtillot,Raphaël Courtillot et Agnès Lair

de la Motte,Irène et Olivier Ventrillard-Courtillot,Stéphane Courtillot,Noé, Solal, Elsa,Salomé, Macéo, Naomi,Hector et Agathe,

ses enfants, ses petits-enfantset ses arrière-petits-enfants,

ont la douleur de faire part du décès de

Emmanuel COURTILLOT,

survenu à Paris, le 29 août 2013,dans sa quatre-vingt-quatorzième année.

Nous nous réunirons pour lui rendrehommage, le mercredi 4 septembre,à 15 h 30, au crématorium du cimetièredu Père-Lachaise, 71, rue des Rondeaux,Paris 20e.

Cet avis tient lieu de faire-part.

4, boulevard de la Bastille,75012 Paris.Prades,48160 Saint-Martin-de-Boubaux.

Christine,son épouse,Geneviève,

sa mère,Sophie, Noémie, Alice, Félicie,

ses filles,Jean, Henry, Bruno, Xavier,

ses frères,

ont la grande tristesse de faire partdu décès accidentel de

Christian DUFOURMANTELLE,

survenu à l’Ile-aux-Moines,le 24 août 2013.

Le Trech,56780 Ile-aux-Moines.

Les membresde la Société française de radiologie

ont la tristesse de faire part du décès du

docteur Jacques GILLET,survenu le 27 août 2013.

La société française de radiologie salueson engagement au service de l’imageriemédicale.

Nicole Kahn,son épouse,Daniel et François Kahn,

ses enfants,Toute sa familleEt tous ses amis,

ont la douleur de faire part du décès de

Jean KAHN,grand officier de la Légion d’honneur,

commandeurde l’ordre national du Mérite,grand-croix avec Étoile

de la République Fédérale d’Allemagne,docteur honoris causade l’Université de Haïfa,président honoraire

de la Communauté israélitede Strasbourg,

président honorairedes trois Consistoires concordataires,

président honorairedu Consistoire central de France,

président-fondateurde l’association sportive Menora,président honoraire du CRIF,

président honorairedu Congrès juif européen,vice-président honorairedu Congrès juif mondial,président honoraire

de la Commission nationale consultativedes droits de l’Homme,

président-fondateur honorairede l’Observatoire européen

des phénomènes racistes et xénophobes,

survenu le 18 août 2013,à l’âge de quatre-vingt-quatre ans.La cérémonie religieuse a eu lieu

le mardi 20 août, au cimetière israélitede Strasbourg.9, quai Jacques-Sturm,67000 Strasbourg.

(Le Monde du 21 août.)

Maman est morte.

Jeannette RIBSTEIN,née GINESTET,

sera enterrée auprès deMichel,

dans le cimetière protestant.La cé rémonie débute ra , lund i

2 septembre 2013, à 10 heures, au templede Maguelonne àMontpellier (Hérault).Jean et Gemma,Anne et Jean-Pierre,Pierre et Catherine,Gilles et Léa,

ses enfants,Selma, Gala, Bruno, Raphaël, Ada,

Coline, Adrien, Ariane, Pia, Sylvain,Jean-David, Nina,ses petits-enfants,Marie-Jeanne et Marilène,

ses belles-sœurs,Manée, Suzette et Jean,

ses cousins.Passage de la Marne,34170 Castelnau-le-Lez.

Anniversaires de décès

Merci d’avoir une pensée pourOlivier ALLAIS

qui nous a quittés le 1er septembre 2011.Il repose dans la paix du Jardin

de Mémoire, au Bono (Morbihan).

Karl FLINKER,31 août 1991.

A part ça, tout va bien.J. et S.

Il y a dix ans,Jacques PELTA

nous quittait.Au fil du temps, la mémoire de ce père

tant aimé est impérissable.Laurence,

sa fille,Rywka, née Chajut,

son épouse,Matthieu et Alexandre,

ses petits-enfants,s’associent à cet hommage.

Anniversaire

Ce 31 août 2013, jour anniversaire deAnne-Marie JOLY,

ex-conservateurdes antiquités et objets d’art,

qui nous a quittés en avril dernier.Ses enfants,Ses petits-enfants,Ses proches,Tous ceux qui l’ont connue, aimée,

estimée,se souviennent.

Souvenirs

Il y a dix ans,Gisèle CHALTIEL

nous quittait.Son fi ls , sa famil le, ses amis,

parlent toujours d’elle, de son humour,de sa tendresse.

En souvenir de

Hena WEISSBERG,née SZLAJN.

Arrêtée par la police française.Enlevée à son fils de cinq ans, il y a

soixante-dix ans.Déportée dans le convoi n°59,

le 2 septembre 1943, de Drancyà Auschwitz, pour y être assassinée,parce que née juive.

Perline et Lucille Noisette,ses nièce et petite-nièce.

Nous n’oublions pas.

Communications diverses

Prix de la découverte poétique 2013.Fondation Simone de Carfort, sous l’égide

de la Fondation de France.Ce prix a pour objet la découverted’un poète d’expression française,

inconnu ou méconnu.Adresser cinq jeux identiques

de 30 poèmes inédits,entre le 18 juillet et le 31 octobre 2013,en pli non recommandé, avec code(deux lettres, deux chiffres),

nom, adresse, parcours poétiqueet professionnel

et dix timbres dans une enveloppecachetée à :

A. Baleynaud Joffre,10, boulevard Diderot, 75012 Paris.Le prix d’un montant de 2.500 € seradécerné au cours du mois de décembre.Aucun retour des manuscrits ne sera fait.

J’ai quatre-vingt-dix ans.Je recherche tous civils ou militairesayant connu la débâcle de 1940

ainsi que des militaires de la classe 43appelés en service au camp d’Auvour(Champagné), à 12 km du Mans.

Association Aquitainerecherche marraine pour reconstitution

de porte romaineavec ses pierres anciennes.

Contact :[email protected]

SOS AMITIEqui est à l’écoute 24 heures sur 24de toute personne en situation

de solitude, d’angoisse et de mal-êtrerecherche

DES ÉCOUTANT(E)S BÉNÉVOLES

pour ses sept lieux d’écouteà Paris et en Ile-de-France.

Disponibilité souhaitéede quelques heures par semaine,

le jour, le soir, la nuit ou le week-end.Formation assurée.

Écrire à SOS Amitié Idf7, rue Heyrault, 92100 Boulogne.Email : [email protected]

Nous avons le regret d’annoncer la mortde

Michel GREIF,le 27 juillet 2013.

La crémation a eu lieu à Aix-en-Provence.

L’inhumation est prévue le samedi21 septembre, à 13 h 45, au cimetièredu Montparnasse, Paris 14e.

Par son enseignement, ses missionsde conseil, les jeux pédagogiques qu’ila développés, ses écrits, notammentle livre L’usine s’affiche (1989), MichelGre i f a con t r ibué à l ’évolu t iondu management industriel.

Anne-Sophie Le Goff Greif,son épouseEt les membres de sa famille

remercient le personnel de « La Maison »de Gardanne, qui l’a aidé à poursuivresa vie jusqu’au bout dans la sérénité.

[email protected]@[email protected]

Page 12: Le Monde Du Dimanche01 Et Lundi 02 Septembre 2013

RetraitesL’attente déçue…Desmois d’attente insoutenable à proposdu contenude «la réformedesretraites»…Pourlesmesuresenvisagées,denouveauxprélèvementset, parmi eux, l’armede dissuasionmassive, une bombeA: l’augmenta-tionde laCSGpourtous…Nousn’allionspasycouper, c’était certain…Autableaunumérique se calculait déjà l’incidenced’une tellemesure sur lepouvoir d’achat et le moral des ménages… Et puis, comme dit un jourChirac: pschitt !… Le grandméchant loup Ayrault déjoua les pronosticsmédiatiques…PasquestiondeCSGdanscetteaffaire!Leschasseurs,quel-que peu vexés, ne désarmèrent pas : «Habile, trop habile!», éditorial duMonde daté 29août, pour les uns, «catalogue de “mesurettes”», « toutsauf une réforme», pour les autres…Mais que savons-nous de ce qui sepassera dans dix, vingt, trente ans? Au fil du temps et des événements,l’humanité, toujours en mouvement, est condamnée à se dessiner unpassé et à s’inventer un avenir, et ce en permanence. Rien n’est gravédans le marbre, mais tout peut être dit et écrit, puis contredit, dans lesmédias…Les«Nostradaéconomistes»qui, plus souventqu’à leur tourseretrouvent le bec dans l’eau trouble de leurs prévisions, devraient nousinciterà laprudence: tournerseptfoisàvide lesrotativesavantdesignerle bon à tirer… Jean-FrançoisHagnéré, Creutzwald (Moselle)

SyrieUne solution par la voie diplomatiqueAlorsqu’une interventionmilitairede la part des forces armées occiden-tales est présentée comme la seule optionqui s’impose, notammentpar LeMonde, des Syriens s’élèvent contre cette perspective.Un appelen faveur de la paix et du refus de touteviolence a été lancé par lemonastèredeDeirMarMusa, en Syrie. Situé à 80kmaunorddeDamas,cemonastère a été fondépar le père jésuite PaoloDall’Oglio. Ce derniera disparu il y aunmois dans les environsdeRacca, aunord de la Syrie,alors qu’il cherchait à entrer en contact avecungroupe islamistepour,semble-t-il, négocier la libérationd’otages. Lepère JacquesMourad, prê-tre syrienqui a pris la relève de la responsabilitédumonastère, estclair: «Nous sommesdansunephase d’extrêmesouffrance.Nous souhai-tons que les pays occidentauxprennentuneposition juste face à cette ter-rible crise syrienne. Laposition juste signifie refuser toute formede vio-lence, faire taire les armes, nepas dresser les gens les uns contre lesautres, défendre et protéger les droits humains.»Ce qui s’est passé enIrak lors de l’occupationaméricaine, et ce qui s’y passedepuis lorsdevrait servir de leçon: l’interventionmilitaire a aggravé la situationsécuritaire et communautaire.MaireadMaguire, PrixNobel de la paixen 1976pour son actionen IrlandeduNord, lance elle aussi un avertisse-ment: «Uneactionmilitaire des forces américainesoude l’OTANnerésoudrapas les problèmesde la Syrie.»Ceque les Syriens demandent àgrands cris inaudibles, c’est la paix, la réconciliation, une actionconvaincuemenée sur les planspolitique et diplomatique, et nonmili-taire. Les actionsmilitairesporteront lamort à desmilliers de Syrienssupplémentaireset signeront sa division territoriale. Ce qui est peut-être le but de la stratégie développéepar l’Arabie saoudite, leQatar et,derrière eux, les Etats-Unis. Ainsi disparaîtrait le dernier allié arabedel’Iran.Mais aussi unpays dont la richesse ethnique, culturelle, les tradi-tionsd’hospitalité et de xénophilie en avaient fait un territoire à part.

Nadia Braendle, Genève (Suisse)[email protected] et http ://médiateur. blog. lemonde. fr

Courriels

0123 est édité par la Société éditrice du «Monde » SADurée de la société : 99 ans à compter du 15décembre 2000. Capital social : 94.610.348,70¤. Actionnaire principal : Le Monde Libre (SCS).Rédaction 80,boulevardAuguste-Blanqui, 75707Paris Cedex13 Tél. : 01-57-28-20-00Abonnements par téléphone: deFrance32-89 (0,34¤TTC/min) ; de l’étranger: (33) 1-76-26-32-89Tarif 1 an :Francemétropolitaine : 399¤Courrierdes lecteurs: blog: http://mediateur.blog.lemonde.fr/;Parcourrierélectronique:[email protected]édiateur:[email protected]: site d’information:www.lemonde.fr ; Finances : http://finance.lemonde.fr; Emploi :www.talents.fr/ Immobilier:http ://immo.lemonde.frDocumentation: http ://archives.lemonde.frCollection: LeMonde surCD-ROM :CEDROM-SNI01-44-82-66-40LeMondesurmicrofilms: 03-88-04-28-60

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Gilles48

Asie Copieuses pluies orageuses sur le Sud du Japon

En Europe12h TU

Nous retrouverons les restes de notrefront atténué entre le Massif-Central etl'Alsace avec un ciel souvent gris etquelques gouttes le matin puis le ciels'éclaircira en journée. Ailleurs, un tempssec et lumineux prédomineramalgré unvoile d'altitude assez dense en allantvers l'extrême Nord du pays. Enfin,quelques orages pourront éclaterl'après-midi vers les Alpes Maritimes.

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Solution du n° 13 - 206HorizontalementI. Traits d’union. II.Hâbleur. Albi.III. Epée. Gain. IV. IV. Rit.Aggravée.V.Meilleur. ORL.VI. Ice. Osées. Se.VII. Ce.MST. Eta.VIII. Vieillards. IX. Erin. OE. Saie.X.Nationalisés.

Verticalement1. Théoricien. 2. Rapiécé. Râ.3. Abêtie. Vit. 4. Ile.Mini. 5. Té.Alose. 6. Suggestion. 7.Drague.Léa. 8. Irréel. 9.Nana. Stasi.10. Il. Vo. Aras. 11.Obiers. Die.12.Niveleuses.

Philippe Dupuis

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1.Donné quand c’est bien.2. Porteur de bois en Alaska.Démonstratif. 3. Pouvoir absolu.Fait scandale en dehors de l’étable.4. Elimine. Décorationsarchitecturales. 5. Patronmanchois. A respecter. Facilite lescalculs. 6. Fait barrage. Manœuvrefrauduleuse. 7. Bordée d’arbresdans le Nord. Sédiment pouramendement. 8. Forme d’avoir.Comme une roue. 9. Reste au fondde la baratte. 10. Belle villa sur leshauteurs de Fréjus. 11. Fin d’office.Nobel britannique. 12.Ne valentpas grand-chose. Point.

I. Eurêka ou de quoi semettre ausec. II. Jeune déclaration. Trèsduremêmementalement.III. Entre radicule et cotylédon. Abeaucoupmoins d’importanceque la bulle. IV.Met la France encartes. Bien travaillée.V. Réunionde cardinaux. Grande coréenne.VI. Sur la portée. La première peutêtre bonne. Fis des choix.VII.Dans les airs de laScandinavie. Nappes.VIII.Ontombe dessus par hasard. Tout àfait correcte. IX.Ne cherchez pasailleurs. Ouverture en surface.Possessif.X. Supplice d’hier,tourment d’aujourd’hui.

Sudokun˚13-207 Solutiondun˚13-206Samedi31aoûtTF1

20.50Qui veut gagner desmillions?Spécial Handicap international. Jeu. Avec Jean-Marie Bigard, Vincent Cerutti, Fauve Hautot...23.00 Les Experts : Manhattan.Série. Rouge tempête. Derrière l’écran. Auxquatre coins de l’enfer. Cadeau empoisonné(S8, 14 à 17/18). Avec Lee Majors (195min)U.

FRANCE2

20.45 Fort Boyard.Invités : Karine Ferri, Leslie Lemarchal, FauveHautot, Mickaël Miro, Arnaud Tsamère...22.25On n’est pas couché.Les Plus Belles Nuits. Talk-show.1.05 Rendez-vous en terre inconnue.Zabou Breitman chez les Nyangatom (110min).

FRANCE3

20.45 Les Vauriens.Téléfilm. Dominique Ladoge. Avec Jean Senejoux,Frédéric Papalia, Laurent Lucas (Fr., 2006).22.10 Equipemédicale d’urgence.Série. Maudits cookies. Travail au black(S3, 11 et 12/12). Avec Christian VadimU.23.50Météo, Soir3 (30min).

CANAL+

20.55 Le GuetteurFilmMichele Placido. Avec Daniel Auteuil (Fr.)V.22.35 Jour de rugby. Top 14 (3e journée).23.15 Jour de foot. L 1 (4e journée).0.05 Fright NightFilm Craig Gillespie. Avec Anton Yelchin, ColinFarrell, David Tennant (EU, 2011, 105min)V.

FRANCE5

20.35 Echappées belles.Côtes d’Armor : pays de la mer. Magazine.22.10 Les Routes de l’impossible.Papouasie : la bourse ou la vie. Documentaire.23.00Nus et culottés.[6/6] Objectif Paris. Documentaire (50min).

ARTE

20.45 L’Aventure humaine.L’Exil des juifs. Entre mythe et histoire.22.15 Les Trésors perdus de Salomon.23.05God Savemy Shoes.Documentaire. Julie Benasra (60min).

M6

20.50 FBI : duo très spécial.Série. De père en fils. L’Enigme et la Clé.Sur un air de jazz (S4, 11 à 13/16) ; L’Amulettedu pharaon perdu. L’Entrée des masques(S3, 9 et 10/16) ; Le Dilemne du prisonnier(S2, 7/16). Avec Matthew Bomer (300min).

météo& jeux

Dimanche 1er septembre

TF1

20.50 La Guerre des boutonspFilm Yann Samuell. Avec Alain Chabat, EricElmosnino, Mathilde Seigner (Fr., 2011, Audio.).22.55 Les Experts. Série. La GrandeIllusion. L’Enquête inachevée. Vengeancesà retardementW (S3, 5, 6 et 8/23, 145min)U.

FRANCE2

20.45 Jeux de pouvoirpFilm Kevin MacDonald. Avec Russell Crowe, BenAffleck, Rachel McAdams (Coprod., 2009)U.22.55 Little Childrenp

Film Todd Field. Avec Kate Winslet, PatrickWilson, Jennifer Connelly (Etats-Unis, 2006)V.1.05Histoires courtes (100min)U.

FRANCE3

20.45Commissaire Montalbano.Série. Jeu de miroirs. Un été ardent (Audio.).0.00Météo, Soir3.0.25 DestinationMurderpFilm Edward L. Cahn. Avec Joyce MacKenzie,Stanley Clements (EU, 1950, N., v.o., 75min).

CANAL+

21.00 Football.L 1 (4e journée) : Marseille - Monaco. En direct.22.55 Canal Football Club. Le Debrief.23.15 L’Equipe du dimanche.0.05 Abraham Lincoln :chasseur de vampirespp

Film Timur Bekmambetov (EU, 2012, 105min)V.

FRANCE5

20.35 L’Occupation sans relâche.Les Artistes pendant la guerre. Documentaire.22.00 Unemaison, un artiste.[10/10] Les Milandes, le troisième amourde Joséphine Baker. Documentaire (2013).22.30 Verdict.[6/10] L’Affaire Collober. Documentaire.23.20Destination Tahiti.[5/5] Destination Tahiti (55min).

ARTE

20.45 Intrigues impériales.Téléfilm. Michael Anderson. Avec VanessaRedgrave, Julia Ormond. [1 et 2/2] (EU, 1991).23.50 Les Romanov (2013, 90min).

M6

20.50 Zone interdite.Magazine. Secrets, réussites, intrigues :la face cachée des riches héritiers.23.00 Enquête exclusive.Touristes chics, drogue et villas de luxe :main basse sur Cannes. Magazine (85min).

Lessoiréestélé

Résultats du tirage du vendredi 30 août.

2, 17, 25, 36, 45, 5e et 9e

Rapports : 5numéros ete e : 12 821 112,00¤ ;5 numéros ete : 122 794,80 ¤ ; 5 numéros : 35 474,00¤ ;4numéros ete e : 3 455 ,20¤ ; 4numéros ete : 189,80¤ ;4numéros : 112,30¤ ;3 numéros ete e : 49,40¤ ; 3 numéros ete : 14,30 ¤ ;3 numéros : 13,70¤ ;2 numéros ete e : 15,20 ¤ ; 2numéros ete : 7,70¤;2 numéros : 4,50¤ ; 1 numéro ete e : 7,90¤.

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Président : Louis DreyfusDirectrice générale :Corinne Mrejen

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Page 13: Le Monde Du Dimanche01 Et Lundi 02 Septembre 2013

RegardssurlaFranceChaquesemaine,unintellectuelfrançaisouétrangerlivreau«Monde»sesréflexionssurl’étatdupaysetsonévolution

«Lacrisescolaireestpolitique»

décryptages

Le système scolaire français estplusquejamaisencrise.L’écolerépublicaine, coincée entre lecorporatisme enseignant et lemanque de volonté politiquepour la réformer, n’a pas réussi

à niveler les inégalités sociales. C’est toutl’enjeudela«refondationdel’école»enga-géepar le gouvernement.Longtemps, les Français ont été persua-dés d’avoir l’un desmeilleurs systèmesscolaires aumonde. Depuis une trentai-ne d’années, pas un rapport qui ne souli-gne, sous un aspect ou un autre, la crisede l’école. Partagez-vous ce diagnosticglobal?

Il fautseméfierdescomparaisonsinter-nationalesquiclassentlessociétéset leursinstitutions comme des entreprises plusoumoinsperformantes.Lessystèmesédu-catifs sont enchâssés dans des cultures etdes histoires nationales et l’on ne peutimaginerde transférer un système scolai-re comme on transfère une technologie.Mais il n’est pas nécessaire d’être fétichis-te des enquêtes internationales pour voirque l’école française seheurte à de sérieu-ses difficultés.Dansquels domaines?

D’abord, en France commepartout, lesinégalitésscolairesreproduisentlesinéga-lités sociales, mais cette reproduction estcheznousparticulièrement intense.Alorsque des sociétés plus inégalitaires que lanôtrelesontmoinsentermesscolaires,enFrancel’amplitudedes inégalitésscolairesmesurée par les performances des élèvesest plus grande que ne l’impliquerait laseule amplitude des inégalités sociales.L’école accentue donc la reproductiondesinégalités sociales. Cela affecte, évidem-ment, leniveaumoyendesélèvespuisquele taux de ceux qui sont faibles est trèsimportant.

Ensuite, il existe un problème de rela-tions entre la formation et l’emploi. Mal-thusienne, l’école républicaine distribuaitpeu de diplômes, ce qui les rendait effica-cestoutennepénalisantguèreceuxquienétaient dépourvus. Aujourd’hui, les diplô-mes sont indispensables à tous, mais ilsont une utilité des plus variables, laissantdecôté lesdizainesdemilliersd’élèvesquien sont privés. L’école n’est donc pas utileà tous alors que les diplômes sont essen-tiels à l’entréedans la vie professionnelle.

Enfin,pourreprendrelemotdusociolo-gue Emile Durkheim (1857-1917), l’écolerépublicaineavaitunedimension«mora-le», ellevoulaitémanciper les individusetconstruire un lien social, faire descitoyens.Or,nousavonsdeplusenplusdemal à définir ce projet éducatif et toutesles enquêtes internationales montrentque les élèves français sont particulière-ment défiants, stressés, pessimistes,dépourvus de confiance en eux et en lesautres. Tout se passe comme si l’écolen’était devenue qu’un vaste système deconcurrenceentre les élèves et entre leursfamilles, commesi elleneparvenaitplusàsavoir quel type d’individu elle veut pro-mouvoirau-delàd’unsuccès scolaire fata-lement inégal.

Cesconstatssontparticulièrementdou-loureux dans un pays qui a toujours pen-sé que l’école républicaine devait rendremeilleurslesindividusetlasociétéenpro-mouvant l’égalité, le développement éco-nomiqueet la citoyenneté.Depuis quatre décennies, l’école a pour-tant connuune démocratisation specta-culaire, du lycée puis de l’université.N’est-ce pas un indéniable progrèssocial?

Comme la plupart des pays compara-bles, la France a choisi, au prix d’un effortimportant, la massification scolaire danslesannées1960,puisdanslesannées1980.L’accès au lycée et aux études supérieuress’estsensiblementouvert,maislesinégali-téssesontdéplacéesàl’intérieurdel’école.

Tout s’est passé comme si nous avionsvoulu transformer l’école sans véritable-ment la réformer, sans comprendreque lamassification induisait un changementde nature de l’école. Par exemple, nousavons créé le collège unique en 1975 sur lemodèle du premier cycle du lycée «bour-geois », ne répondant pas ainsi auxbesoinsdesélèvesvenusdesclassespopu-laires. Nous avonsmaintenu, voire accen-

tué, les hiérarchies scolaires conduisant àune orientation par l’échec, alors qu’ilauraitfalludiversifierlesmodalitésdefor-mation et permettre aux élèves demieuxcirculerdans le système.Nousn’avonspascompris que dans un systèmedemasse lemétier d’enseignant devait changer denatureetnousavonscruqueleniveauaca-démique desmaîtres suffisait à en garan-tir la compétence pédagogique. L’appel àl’autonomie des établissements n’a paschangé le mode d’affectation des ensei-gnantsetl’autonomieestplusuneincanta-tion qu’une pratique. Non seulement lesclivagesentre les grandesécoleset lesuni-versités, entre l’enseignementprofession-nel et les formations générales n’ont pasétémisencause,maisilsontmêmeétéren-forcés.Autrement dit, la démocratisation n’apas corrigé la stratification élitiste?

Le système scolaire français est restéfortement inégalitaire et commandé parl’élitisme de l’école républicaine: l’idéalélitiste détermine toutes les pratiques, ycompris celles des filières et des établisse-ments qui n’accéderont jamais à l’élite, ycompriscelledesclassesenfantinesoù lesnotes se portentbien.

Au bout du compte, l’école françaises’est transformée tout en maintenant lesstructureset lespratiquesdontonpensaitqu’elles en avaient fait sa grandeur pas-sée. Les enseignants ont le sentimentd’être épuisés par des réformes qui nechangent rien de fondamental pendantque leurmétier est de plus en plus diffici-le ; les parents pensent que le système est

deplusenpluscomplexeetincompréhen-sible; l’écoletransfèreunepartiedesesdif-ficultés vers une foule de «dispositifs»mis enœuvre par lesmairies, les départe-mentsetlesrégions,sansqueriennechan-ge «au fond» dans l’école elle-même.Quels sont les symptômesde cettedésillusion?

Les Français ont appris, à l’école, que laRépublique avait été faite par l’école et ilsattendenttoujoursdel’écoleunefonctionde salut. L’école républicaine ne doit pasêtre seulement une bonne école, elle doit«sauver» la société. Les déceptions sontdonc très profondes.

La première crise est celle de la justicescolaire. Chacun découvre que le passagede l’élitisme républicain réservé à quel-ques-uns à l’égalité des chances offerte àtous a été un leurre. Ce sont presque tou-jours les mêmes qui réussissent et pres-quetoujours lesmêmesqui échouent. Les

familles s’efforcent de choisir lesmeilleu-res filières et lesmeilleurs établissementsen jouant sur le «marché scolaire» publicet privé; elles saventbien que l’école don-neplus à ceuxqui ontdéjàplus. Les écartsde performance entre les établissementsse creusent et bien des élèves décrochentparcequ’ilspensentneplusavoird’avenirà l’école… L’école qui devait unifier lanationestperçueparfoiscommel’institu-tion qui divise et sépare les individus enfonctionde leurmériteet, au-delà, de leurnaissance. Et, comme l’économien’absor-be plus tous les jeunes, il est alors faciled’accuser l’école de tous lesmaux.

L’école connaît aussi une crise d’effica-citépédagogique.Si lesperformancessco-laires des élèves semblent avoir augmen-té durant les années de massification, cen’est plus le cas depuis une dizaine d’an-nées, depuis quenousavonsatteint l’étia-ge de la massification. C’est sur ce pointque les comparaisons internationalessont particulièrement pénibles pour laFrance. L’école ne serait efficace que pourles bons élèves et ceux qui sont destinés àl’être. Ilsembleclairquelesagendasscolai-res, lemoded’organisationdu travail sco-laire, la qualité de la formation des maî-tres, ladifficultéd’individualiser le travaildesélèvespeuventêtremis encausepuis-que des pays qui connaissent les mêmesdifficultés sociales que les nôtres ont demeilleursrésultatsscolaires.Danstouslescas,lepassageàunvéritablemodèledefor-mation professionnelle des enseignantsest un impératif.

La troisièmecriseestunecrised’utilité.La France industrielle avait construit unidéal «adéquationniste» des relationsentre le diplômeet l’emploi; la croissanceéconomique des « trente glorieuses»avait validé ce modèle. Or il ne vaut plusque pour les filières sélectives. A l’excep-tion de l’élite scolaire, l’orientation se faitessentiellement de manière négative. Al’arrivée, un étudiant sur deux travailledans un domaine qui n’a pas de lien avecsa formation; les étudiants français sont,et de loin, les plus pessimistes d’Europe;inquiets et déçus, ils se sentent toujoursmenacésd’être déclassés.Endépit d’innombrables «réformes»,les responsables politiques semblentimpuissants à surmonter cette crise.

Comment expliquez-vous cette paraly-sie du politique?

Une grande part du blocage vient de ceque le monde scolaire ne discute qu’aveclui-même dans un système de négocia-tion interneà l’école.Onpeut le compren-dre, puisque aucune réforme ne peut sepasser de l’assentiment des enseignants.Mais celaposeproblème, car le produitdece jeu est nécessairement conservateur:chaque corps, chaque discipline, chaquecorporation, chaque élément du systèmecraintdeperdresapositionsi les règlesdujeu changent. Par exemple, toucher auxfilières,c’esttoucherauxheuresetauxdis-ciplinesauxquelles chaqueprofesseuresttrès fortement identifié.

Dans ce jeu, il va de soi depuis trenteans qu’un certain nombre de questionssont tenuespourdes casusbelli : ladéfini-tion des services, la nature des concoursde recrutement, lemoded’évaluationdesenseignants, leurmoded’affectationdanslesétablissements,lasélectionàl’universi-té, lanaturedubac…Tout l’artduministreconsiste alors à changer les choses sanstoucheràcesverrousidéologiquesetprati-ques, ce qui limite singulièrement sonaction. Aujourd’hui les organisationsenseignantes combinent souvent un cer-tainradicalismeidéologiqueetunconser-vatismeprofessionnelassumé,commel’amontré le conflit sur les rythmes scolai-res, dont le dossier semblait pourtant fai-re consensus. Pourtant, si ce système denégociationinterneauministèreestparti-culièrementconservateur, rienneprouveque tous les enseignants le soient ; beau-coupd’entreeuxvoudraientchangerl’éco-leetunministredevrait trouver lemoyendenepas les décourager.Ce«conservatisme»du systèmeest-ilseul en cause?

Non. Car ces blocages internes sontd’autant plus rigides que les ministres neparviennent pas àmobiliser de fortes res-sourcespolitiquesextérieuresausystème.Ils ne parviennent pas à s’appuyer sur desmouvements d’opinion, sur des forcessociales et sur des citoyens qui rappelle-raient que l’école appartient à tous et passeulement à ses professionnels. Ce silencetientpourunepartaufaitquelesinjusticesscolaires que chacun dénonce ne sont pasdéfavorablesàunepartie importantede lapopulation.Qui prendrait le risque, à droi-teetàgauche,desupprimerlesclassespré-paratoires qui assurent la reproductionrigidedesélites?Quiprendrait le risquede«déshabiller» un peu les lycées pourmieux«habiller» l’écoleélémentaire?

Dans une société où chacun a le senti-mentquesondestinetceluidesesenfantsse jouent à l’école, le poids politique desbénéficiaires du système scolaire est bienplus important que leur seul poids démo-graphique. On peut admettre que l’écolefonctionnemal,mais il serait plus encoredangereux d’en changer les règles tantqu’ellea lepouvoirdedistribuerlesindivi-dusdanslesdiversespositionssociales.Cephénomène pèse d’autant plus que laparole de ceux qui ont échoué à l’écolen’estni légitimenientendue.Quiplaiderajamais pour les élèves qui apprennentmal, pour ceux qui s’intéressent si peu àl’école qu’elle ne sait pas où les mettre?Pourceuxdontonpensequ’ilssontlesres-ponsablesde leurs échecs?Comment en sortir ?

Lacrisescolairefrançaiseestfondamen-talementpolitique.Maislafaiblessepoliti-que dépend moins des conservatismescorporatistes que de la difficulté propre-ment politique de faire de l’éducation unproblème politique et social essentiel. Ilappartient aux partis de rompre avec lanostalgie d’un âge d’or qui n’a pas existé;il leur appartient d’expliquer et d’expli-quer encore que l’avenir d’une société, etpas seulement celuide chacundenous, sejouedans le systèmeéducatif.

Il appartient aux dirigeants politiquesde produire une offre politique, d’animerle débat public et parlementaire sur lesquestionsd’éducation; sanscela, ilyapeudechancesque lesblocagessoient levésetqu’une légitimité démocratique puissedemain s’opposer à la légitimité corpora-tiste.p

Proposrecueillis parGérardCourtois

FrançoisDubetSociologue de l’éducation, il est né en 1946. Après avoir

enseigné à l’université de Bordeaux puis à l’Ecoledes hautes études en sciences sociales, il a étémembre

de l’Institut universitaire de France. Au-delà de laproblématique de l’école, dont il critique le caractèrede «fabrique d’exclusion», son travail porte sur lesinstitutions. Il est l’auteur de nombreux rapports et

ouvrages parmi lesquels «La Galère : jeunes en survie»(Fayard, 1987) ; «Le Déclin de l’institution» (Seuil, 2002).

Son dernier ouvrage, coécrit avec Olivier Cousin,EricMacé et Sandrine Rui, s’intitule : «Pourquoimoi?Expérience des discriminations» (Seuil, 384p., 23¤).

«Dansunesociétéoùchacunalesentimentquesondestinsejoueàl’école,lepoidspolitique

desbénéficiairesdusystèmescolaireestbien

plusimportantqueleurseulpoids

démographique»

M. RIEGLER

NINI LA CAILLE

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Page 14: Le Monde Du Dimanche01 Et Lundi 02 Septembre 2013

pL’UMP,unparti fracturéUnpérilleuxétatdeslieux

pUneprésidenceintelligenteetcréatrice

Fermé pour cause d’inventaire»,la pancarte affichée à la devan-ture de la boutique UMP seraitplutôt : «Rouvert sous menaced’inventaire.» En cette rentrée2013, la question du droit d’in-

ventaire du sarkozysme divise le parti. Lamétaphore boutiquière a-t-elle ici unsens?Oui, dans lamesureoù l’UMPabienreprésenté, de novembre2004àmai2012,une véritable entreprise de promotion deNicolas Sarkozy. Employant selon lesconjonctures de 100 à 140salariés, elleétaitpeupléed’adhérentsattirésparsaper-sonnalitéetsetrouvaitgéréeparlui,ycom-prislorsqu’ilétaitàl’Elysée.C’estd’ailleurspourcette raisonqu’ouvrirundébat inter-ne est uneopérationpérilleuse.D’uncôté,les adhérents et sympathisants ont éténourrisaulaitdelapersonnalisation,dansunpartioùlegermecharismatiqueestpas-sé au filtre d’unmarketingqui a constituéla figuredu leader enmarque commercia-le; de l’autre, lesdirigeantsont étégénéra-lement impliqués à des postes de respon-sabilitédans le quinquennat.

De l’extérieur, l’exercice est plus facile,essayons-nous donc à un petit inventairede l’action de Nicolas Sarkozy au sein duparti.D’unpointdevuefinancier, labouti-que sarkozyste a drainé des fonds impor-tants grâce à une conséquente dotationpublique (celle-ci représentait 33mil-lionsd’eurosparande2007à2012, elleesttombée depuis à 20millions), un fortendettement,unestratégieefficacedecol-lecte de dons personnels, mais aussi uncontournement des règles de finance-ment des partis politiques et des campa-gnes électorales. Entreprise riche, l’UMPpouvait se permettre d’être dispendieuseenmatière de communication (sondages,Internet, événementiel, marketing, etc.).Aujourd’hui, Jean-François Copé annonceunebaissedu traindevie; François Fillon,dans son discours du 11 juillet 2013 àLaGrande-Motte, renvoie le sarkozysmeàsa transgression des règles républicainesde financement de la vie politique; quantà Nicolas Sarkozy, il apparaît toujourscommeun desmeilleurs pourvoyeurs defondspour remplumer le parti…

Du point de vue du fonctionnementinterne, le sarkozysme partisan s’est tra-duitpar ladiffusiond’unmodèleentrepre-neurial; il a accordé une grande place auxdiscours et pratiques empruntés aumon-dede l’entreprise,auxdomainesdumana-gement et du marketing. Parallèlement,l’UMP est restée une organisation faible-ment institutionnalisée, caractérisée parune très forte fluctuation de règles quivarient selon les conjonctures, sont instru-mentaliséespar les leaders et dotées d’uneforce contraignante très limitée en raisonde la faiblesse des instances de contrôle etd’arbitrage. De ce point de vue, la crise denovembre-décembre2012 doit bien êtremise au débit du bilan partisan deNicolas

Sarkozy. Elle a révélé des déficits d’institu-tionnalisationetdedémocratisationquelesarkozysme avait aggravés. Nul besoin derègles et d’instances pour les faire respec-ter quand on a un chef qui dit la loi et quipeutdoncenjouer.Nulbesoinderégulerladémocratie à l’intérieur du parti quand lacompétition n’y est que marginale. Pre-nantactedecettevulnérabilitéinstitution-nelleetdesrisquesdedélitementdelacom-munauté partisane, l’UMP a mené à bien,en juin2012, une opération de remise enordre institutionnel: nouveaux statuts etrèglement intérieur, renouvellementde lacompositiondesinstancesderégulationetde contrôle qui intègrent désormais despersonnalitésqualifiéesextérieures,codifi-cation d’une charte des primaires. Ainsi,après huit ans de sarkozysme partisan, lerétrécissement financier va probablementfragiliser le modèle entrepreneurial, alorsquelacriseinternede2012peutaccélérerleprocessusd’institutionnalisation.Entrepri-se forte mais institution faible, l’UMPva-elledeveniruneentrepriseplusfaibleetune institutionplus forte?

Du point de vue électoral, l’UMP sousSarkozy peut tirer un bilan globalementpositif en termedemobilisationprésiden-tielle,mais franchementnégatif s’agissantdes élections locales. Pour preuve, au pre-mier tour de l’élection de 1995, JacquesChirac avait rassemblé 6millionsd’élec-teurs ; en 2002, il en avait réuni 5,6mil-lions;en2007,NicolasSarkozya,lui,fédéré

près de 11,5millions d’électeurs. Certes, en2012, le candidat socialiste l’a dépassé enrecueillant 10,2millions de voix au pre-mier tour, mais avec 9, 7millions de voix,on ne peut parler d’effondrement. Enrevanche, l’UMP a subi des échecs lors desélections locales.Aupremier tour des élec-tionsrégionalesde2010, l’UMPet sesalliésont réaliséunde leursplusmauvaisscorespour l’ensemblede laVeRépublique. Sortirde la séquence électorale sarkozyste, c’estdoncaussis’engageren2014dansunmou-vementde réimplantationlocale.

Le bilan idéologique du sarkozysme adavantage été débattu. En résumé, l’UMPse trouvait, en 2002,moinsàdroiteque lesautresdroiteseuropéennes,saufs’agissantdu thèmede l’immigration.Et c’est biencepotentielquiaétéutiliséparNicolasSarko-zy, puisque la droitisation s’est principale-ment opérée sur le thème de l’identiténationale. Le bilan de l’efficacité de cettestratégie n’a pas encore été sérieusementétabli; il supposed’évaluernonseulementles fondements (en termes politiques oumoraux),maisaussi les effetsde cette stra-tégie sur la banalisation et la légitimationdu FN et sur les résultats électoraux. Pourtout parti, se poser la question de qui estsonprincipal adversaireest essentiel. p

Certains qui ont soutenu Nicolas Sarkozymodérément durant laprésidentielletout en l’ayant flatté avec obséquiositédurant son quinquennat ont, aussitôtl’électionpassée, et perdue depeu, exigéun «inventaire» et « le droit d’inventai-

re»,avectoutcequecetermepeutcomporterdepéjo-ratif.L’intentionétait limpide: lebutn’étaitpasd’éva-luer avec objectivité ce qui avait été accompli, maisplutôtdetenterd’enterrervivantunancienprésidentqui pourrait le redevenir.

Au lieu de se rallier, puisqu’ils ont aussi fait partiedel’exécutif,aubilanpositifd’unprésidentnovateur,courageux et vilipendé avec tant d’injustice, ils ontcherché à ruser et à lui causer du tort avec l’objectifd’en tirer unprofit personnel.

Sectaire, Sarkozy? Lui qui a donné tant de postesconvoitésàdeshommesetdesfemmesdegauche, luiqui ne les a pas jugés sur leur camp mais sur leursidées et leursprojets pour la France.

Fébrile, Sarkozy? Quand de nombreux dirigeantsdelaplanètepaniquaientauxpremiers joursdelacri-se financière, il est un des rares qui, grâce à son sang-froid, a su sauver tout le systèmeen lançant l’initiati-veduG20afind’éviterlarépétitiondeserreursprotec-tionnistes tragiques de la crise de 1929 et en proté-geant les dépôts bancaires des Français.

Président des riches? C’est pourtant bien lui qui ainstauréle revenudesolidaritéactive (RSA).C’estaus-si lui qui s’estbattupour ladéfiscalisationdesheuressupplémentaires.Et, enfin,c’estbien luiquia toutfaitpendant la crise pour empêcher l’augmentation dutaux de pauvreté et qui a permis au pouvoir d’achatd’augmenterpendant sonmandat.

Pasécolo?N’est-cepas luiquia lancé leGrenelledel’environnement?

Pas européen? Qui a relancé la construction euro-péenne?Quiamisaupoint letraitésimplifiéetqui l’afait accepterpar tousnospartenaires, sinonSarkozy?Qui,pendantsixmois, a réussià incarner l’UEet aévi-té de justesse un conflit sanglant enGéorgie? Le peu-

ple français lui sera dans son ensemble reconnais-sant,carc’est l’idéaleuropéenquiassurelapaix.Refu-seruneEuropesans frontièresnesignifiepasquel’onsoit contre l’Europe.

Clivant, Sarkozy, sur le discours de Grenoble?Qu’un journaliste consciencieux reprenne enfin lestermes employés sur les Roms et les compare à ceuxdeManuelValls, et onverraqu’ils sont en touspointssimilaires. Et pourtant, M.Valls, en 2010, accusaitalors Sarkozy de «porter atteinte à la fonction prési-dentielle», d’«opposer les Français entre eux», de«replacer le FNaucœurdudébat»et de«désignerdesennemisde l’intérieur». Sarkozy, lui, n’était pashypo-crite, ilnetressaitpasdes louangesà laRoumanie,quise refuse avec ténacité à les intégrer, mais cherchaitune solutiondurable et à l’échelle européenne.

Pas visionnaire ? Il a renoué des relations deconfianceavec les Etats-Unis, il a consolidéuncouplefranco-allemand indispensable pour l’avenir de l’Eu-rope. Il est intervenuenLibyeet enCôted’Ivoirepourdéfendredesprincipeschersà laFrance,quiontinspi-ré àM.Hollande l’intervention réussie auMali.

Pas courageux sur les retraites? La gauche étaitalors vent debout contre la réforme, promettant del’abroger une fois au pouvoir. Quand la droite étaitunanime pour estimer qu’il était impossible d’allerplus loin dans la réforme sans la compromettre dansunpaysqui y est réfractaire.

Pas respectueux de la justice? Qui a permis à toutjusticiable, par la questionprioritaire de constitution-nalité, de voir étudier la légalité constitutionnelled’une loi qu’il contestepar lesmagistratsde laCourdecassationouduConseild’Etat,avantqu’ellenesoitétu-diée, le cas échéant, par ceux du Conseil constitution-nel?Quiamenéuneréformedelacartejudiciaire,ren-dulespeinesplussévèresetalancélaconstructionetlaréhabilitation de nombreuses prisons, permettantd’augmenterde 10% la capacitéd’accueil encinqans?

Pas soucieux de la vie quotidienne des Français?Quiamisenplace le serviceminimumdans les trans-ports,quichangelaviedemillionsdeFrançaisquiontoublié combien il était difficile «autrefois» de se ren-dre à son travail les jours de grève?

Les périodes d’expansion et de récession, lesvaches grasses et maigres se succèdent sans que lacompétence économique de tel ou tel «pharaon» ensoit lacause.Dansunepériodedecrisesévère,NicolasSarkozyasunonseulementavecintelligenceetcréati-vité sauver tout ce qui pouvait l’être,mais il a su lan-cer des réformes salutaires. Espérons que FrançoisHollandese résolve à fairedemême.

Un débat sur le quinquennat? Pourquoi pas. Pouraller de l’avant et construire? Evidemment. Un droitd’inventairemesquinet ingrat? Ceuxqui s’yhasarde-rontserontsurprisdel’accueildesFrançais…en2017.p

Après avoir été différé, l’inventaireduquinquennatdeNicolas Sarkozya commencéà l’UMP.Sonprésident, Jean-FrançoisCopé, a proposéundébat«sérieux et objectif»qui doit être selon luiclos «avant lami-octobre». Alors que l’Associationdes amisdeNicolas Sarkozy se réunit àArcachonles 1er et 2septembre, LeMonde a demandéàdes intel-lectuels de la droite libérale ou conservatrice, fédéra-liste ou souverainistede faire le bilande son actionà l’Elysée.Directricede rechercheà SciencesPo,FlorenceHaegel dresse, quant à elle, le portraitd’une«opérationpérilleuse» pourunparti quitraverseune grave crise idéologiqueet financière

débats

FlorenceHaegelProfesseure à Sciences Po,

auteure de «Les Droites en fusion.Transformations de l’UMP», Paris,

Presses de Sciences Po, 2012

ArnoKlarsfeldAncien avocat

Ladroitefaceàl’inventairedusarkozysme

Entreprisefortemaisinstitutionfaible,l’UMPva-t-elledevenir

uneentrepriseplusfaible

etuneinstitutionplusforte?

Undroitd’inventairemesquinetingrat?Ceuxquis’yhasarderontserontsurpris

del’accueildesFrançais…en2017

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débats

ChantalDelsolPhilosophe, historienne des idées politiques

et romancière

Aécouter Aristote, on peut sedemander où conduira la«passion désordonnée desoi» qui ravage l’UMP?Hier,elle offrait une ubuesquebataille d’ego pour la direc-

tionduparti.Aujourd’hui,elle les transfor-meenclercsdenotairepour«l’inventaire»d’un quinquennat ouvert pour la succes-siond’unNicolasSarkozypourtantvivant.

Certes,s’interrogersurlesraisonsd’unesérie d’échecs électoraux n’est pas illégiti-me. Tout fut perdu. Sauf l’honneur. GrâceàSarkozyquitintlecapfaceauFrontnatio-nalprotectionnisteet isolationniste.

Attribuer la défaite de 2012 à la crise?Après l’élection de M.Obama avant celledeMmeMerkel, impossiblen’était pas fran-çais.ChercherunSarkozyboucémissaire?Pourceuxquiparadaientdansl’inventairede leurmaroquinau lieudedémissionner,la lâchetén’effacepas la responsabilité.

Ce qui a été fait, et, surtout, ce qui n’apasété faitpourenarriver là, telle estbienla question. Pour répondre, attachons-nous à une vision du monde structuréedont le but est la France, sa puissance, sesvaleursuniverselles d’origine judéo-chré-tiennes et sonmodede vie généreux.

Les républicains américains, démocra-tes-chrétiens allemands ou conservateursbritanniques n’y manquent jamais, quis’appuient sur leurs intellectuels. Pour lespartis de droite français, entre mépris desintellectuels et vision bureaucratique, ledébat risqueden’avoirpas lieu.

La preuve? Le «style Sarkozy», trop àgauche, trop à droite, est en accusation àl’UMP. Que 86% des musulmans aientvotépour la gaucheen2012, pourunscru-tin qui s’est joué à si peu de voix, n’inter-pellerait-il donc pas plus?Quand certainsministres dénonçaient l’islam,mélangé àunzested’immigrationetàdeuxd’insécu-rité, qui croyaient-ils convaincre? Deschrétiens sans foi oubliant l’enseigne-ment christique d’amour universel? Desmusulmansappréciantd’être dénoncés?

A se référer à Saint-Thomas d’Aquin:«Toutméchantest ignorant»et tout igno-rant se punit lui-même… Les 5% devotants musulmans sont allés ailleurs.Pourtant, la droite pouvait l’emporter. Illui suffisait de placer au cœur de sonaction la lutte contre le wahhabisme deFrance.Carl’immensemajoritédesmusul-mans est favorable à la disparition de cefondamentalisme qui gangrène les cités,

propagedans les rues, stadeset transportsdes comportements violents, installe sonordredans lesprisonset condamne la jeu-nesselaplusfragileàl’échec.Elleavaitsou-tenulecontrôle religieuxdes lieuxdepré-dication salafistes et l’interdictiondu voi-le intégral imposée par M.Sarkozy, qui,hélas, ne s’étenditpas auxuniversités.

Eviter la conjuration des egoAveugles faceà la souffrancedenos frè-

res en humanité musulmans, premièresvictimes de l’islamisme, succombant auxcharmes de certains investissements, legouvernementfutincapabledesaisircetteloi : vaincre l’islamisme radical ne se peutsans l’appuidesdémocratesmusulmans.

Signe de sa confusion: la droite lançaun débat intempestif sur l’identité natio-nale, l’islamen ligne demire. Au lieu d’undébat sur la lutte contre le wahhabisme,pour l’assimilation des valeurs et le res-pect desdevoirs dansnotrenation.

Au lieu d’une réflexion, comments’étonner de voir, par l’« inventaire»,s’ouvrirunprocèscontre le«styleSarko».En politique, le style dit le fond. «Capora-lisme», «pouvoir solitaire» ? Il avait ducaractère, cette «vertu des temps diffici-les», disait le général deGaulle. Commentavancer autrement avec cette droite et cecentredesréseauxd’anciensélèves?Com-mentbougerles lignes,balayerlesarchaïs-mesdanscetteFrancedeslobbysconserva-teursde droite et de gauche?

Faute de soutien, comment trouver lejuste milieu, se garder de l’idolâtrie dumarché,de l’Etatetde la raisonscientiste?Hésitations sur l’écologie, reculs sur latranchemaximaled’impositionoulespré-lèvements sociaux, bataille tardive pourune taxe sur les produits financiers.

Mais cette volonté existait ! Serviceminimum dans les transports, peinesplanchers pour les récidivistes, baisse dela TVA dans la restauration, défiscalisa-tion des heures supplémentaires, non-remplacement d’un fonctionnaire surdeux partant à la retraite, autonomie desuniversités, retraite à 62ans. Un styledécrié? Imité par ceux qui veulent avan-cer, telM.Valls.

Par ce style, la France existait aussi.Incroyable énergie reconnue par tous leschefsd’Etat faceàlacrisefinancièrequivitnotre pays renouer avec la puissance enlesentraînantderrière sonpanacheblanc.Energiepourrétablir laconfianceenEuro-peetdéfendrela libertéenLibyeaveccettematurité qui lui a fait se méfier des illu-sionsdémocratiques.

Dénoncer le «style Sarko»? Derrièrecette antienne, j’entrevois une médiocreconjuration de clercs de notaire. «Lesgrands pays le sont pour l’avoir voulu»,disait le général de Gaulle. Hormis l’an-cien capitaine, qui, à droite, le voudra?p

Dresser l’inventaire du quin-quennatdeNicolasSarkozyne présente aucun intérêt,car son activisme n’a rom-pu qu’en surface avec lesprésupposéset lesusdeses

prédécesseurs.Nonobstant l’ébauche demesures salu-

taires, il a moins souvent gouverné quecaboté à la godille sur les basses eauxde lasociété du spectacle, esclave des sondageset captifdes communicants. Intoxiquéparle bruitagemédiatique aumême titre queses ministres et ses adversaires, desserviparunecriseimprévisible,ilafiniparsefai-reétendre,maisdepeu.Ilreviendrasiçaluichante, c’estunehypothèseplausible.

Ensepolarisantsursonbilan,lespréten-dants de la droite entretiennent leurs cha-mailleries et maquillent leur incapacité àdécrypterlasyntaxementaleinstauréepar

lagauchedepuisl’agonieducommunismestalinien. Cosmopolitisme, égalitarisme,laïcisme,égocentrisme,relativisme,liberta-risme: ces «ismes» résument une appro-che du citoyendans la cité, et de l’individuface à son destin, dominante dans lesesprits, et plus encore dans l’inconscientcollectif. Cette pensée a hérité de l’utopiefreudo-marxiste des années 1960 et auprix d’un reniementde ses ferveurs initia-les, elle contamine depuis cinquante anstoute la société. Cette vision imprègne lesécoles de commerce autant quede journa-lisme, elle formate les neurones de l’énar-quesurlemêmecanevasqueceluidupitretélévisuel.Ellen’estnullementméprisable,c’estundes fondsdesaucede lagauche.

De quelque chapelle qu’il se réclame, lesocialiste,legauchiste,l’écololambdaabor-de l’existence avec les mêmes réflexesacquis,invoquantlemême«humanisme»flou pour légitimer son scepticisme, sonhédonisme – bref, le despotismed’unmoimis en lambeaux par les «déconstruc-teurs». Lenihilismen’est jamais loin,maissonegobarbotedans la«culture»ambian-te, lesmiroirsqu’elle luitendlerassurent. Il

n’est pas le salaud sartrien puisqu’il votecomme il faut, vomit le « racisme», la«xénophobie», l’«homophobie», l’« isla-mophobie», le «populisme», le «lepénis-me», «l’intégrisme» et autres accessoiresd’une démonologie à laquelle il feint d’ad-hérer. Additionné d’un compassionnel deroutine et recyclé par le cynisme despubards, le«jouir sansentraves»deMai68luitientlieud’éthique.Sacitoyennetédansl’empire du Bien l’exempte d’un examende conscience. D’ailleurs, la conscience, çasonne «réac», comme l’âme, l’intériorité,lepanache, leremords, l’harmonie, lesraci-nes, la pureté, l’héroïsme. A son aune, lecouple bien contremal a fait son temps, ilest voué au culte de l’indifférencié, del’éphémère,dudernier cri. Il se croit éman-cipé, il n’est qu’un fétubalayépar les ventsde la «modernité», son idole. Idole friableet débilitante.

Bernanos, Ellul, Arendt, Muray etd’autres l’ont démystifiée depuis bellelurette. Une droite quelque peu cérébréedresserait l’inventaire de ses effets à tousles étages dudéveloppementpsychique etmoral d’un rejeton de la télé, d’Internet et

des jeux vidéo. Elle mettrait à nu les res-sorts du cléricalismebobopour leur oppo-serunedéfinitionde l’humainplusaltière,plus vertébrée. Elle oserait le distinguoentreunpeupleetunagrégat,uncoupleetunepaire,uneaspirationetuneconvoitise,un système de valeurs et un précipité defantasmes.

RomantismegaullienL’inventaire du soixante-huitardisme,

M.Sarkozy l’avait promis en 2007. Il se faitattendre. La droite s’en tient à la dénoncia-tion de la surabondance des fonctionnai-res, des rigidités de la législation sur le tra-vail,despérilsliésauxfluxmigratoires,desabusde l’assistanatetdesmatraquages fis-caux. Elle n’a pas tort, mais on n’exalterajamaisquiconqueavecdesrecettesdetech-nosdélayéespardesjuristes.Lelibéralismenepeutavoirdubonqu’enrelaisd’unélan,soutenuparunevision,tiréverslehautparunidéal,pasuncoupdepub.Ladroitefran-çaisenesereferalacerisequ’enouvrantlesperspectives d’une philosophie politiqueaccordéeà lahautemémoiredenotrepaysetaugéniedesonpeuple.Al’âmedelaFran-

ce, pour risquer un gros mot, «réac». Lepeut-elle?Leveut-elle?

Cet hiver, des cœurs vaillants sans affi-liationpartisaneont peut-être inventéunart politique inédit. Par-delà ses motifsexplicites, la révolte spontanée des«manifs pour tous» et des «veilleurs»exprime une exigence de sens, d’altitudeet de fraîcheur. Ses acteurs se sontadoubés chevaliers de la pérennité denotre civilisation. Il y a du romantismegaulliendansleur insurrectioncontrel’airdu temps. Ce qui en résultera, nul ne peutle présumer. D’autres houles se lèveront,impulsées par le même refus. L’appel du18juin 1940n’était pas dans les fiches desofficiels de la IIIeRépublique et Mai 68 alâché sespavés sans l’aval deMollet,Men-dès,Mitterrandet consorts.

Soit la droite s’inscrira dans le sillaged’une récusation de l’insignifiance«moderne», soit elle restera l’ombre por-tée d’une gauche au bout de ses propresrouleaux. Auquel cas des boulevardss’ouvrirontdevant lesultrasdetousbordset les rebelles à venir mettront en jouetous les politiques, sans exception. p

La France est probablement le pays le pluségalitaire et socialiste du continent, avecles Scandinaves. Mais la différence, c’estque les Scandinaves sont enmême tempspragmatiques : ainsi, ils se sont renducompte que l’Etat-providence développé à

l’extrême allait ruiner leurs sociétés ; et ils ont, il y aquelque temps, libéralisé les secteursd’Etat trop coû-teux, afin de permettre au système d’assistance dedurer: laréussiteestévidente.LaFrancen’apasceréa-lisme. Elle continue de vivre dans son rêve où l’Etatdonne sans compter en puisant dans le tonneau desDanaïdes.Cefaisant,elledéploie les inégalitésàpartirdes corporatismes, inhérents à tout système de cegenre. Il n’y a pas plus proche de l’Union soviétiqueque la France d’aujourd’hui.

Quand un peuple est à ce point aveuglé d’idéolo-gie, il faut tomber très bas pour finir par prendreconscience de la situation. Et nous n’en sommes pasencore là. Le pays est riche. Il vit sur ses réserves, quisont immenses. Il vit sur sa réputation, encore consi-dérable parce que héritée de longs siècles. Il dépenseson capital, tout en pleurant parce que les inégalitéssontencoretropgrandes, le travail trop lourd, l’âgedela retraite trop élevé…

Mais cette situation a une autre conséquence.L’Etat-assistance est en France si naturel, si officiel, sicanonique,que tout autre courantpolitiquedoit affi-cher des caractères de grande vertu s’il veut se fairereconnaître.Que le socialismesoitportéparunprési-dent corrompu, des ministresmenteurs, des escrocsentoutgenre:ondiraquec’est lafautedelapolitique.Quelesmêmess’annoncentàdroite:ondiraquec’estla faute du libéralisme, corrompupar nature.

Si l’on veut aller contre les habitudes de penséed’un peuple, il faut absolument commencer par segarder des vices communs. Sinon, les gens auront tôtfait d’identifier ces vices à la nouvelle opinion qu’onveut présenter. En d’autres mots : en France, si vousêtessocialiste,vouspouvezêtrestupide,cupideet fai-néant, vous ne porterez pas tort à vos idées; mais sivous voulez convaincre à droite, cela vous créed’autres exigences.

L’ancien président avait des velléités libérales etdroitières.Etaient-celàsesidéespropresoubienlecré-neaudisponiblepourarriveraupouvoir? Ilestdiffici-le de le savoir (on se souvient commentFrançoisMit-terand,hommededroite, avait choisi lagaucheparceque, ailleurs, la place était occupée). En tout cas, sesconseillers attestaient de ce choix. Seulement voilà :cet hommen’avait jamais appris à dire bonjour; il secomportaitcommeunadolescentmalappris; lesprin-cipesmoraux lui paraissaient aussi superflus que ladécence commune qui commande d’éteindre soniPhonedevantun interlocuteur.

Notre vieux pays, qui a mangé presque toutes sesressourcesparparesseégalitaire,nepossèdeplusquela distinction de ces vieux nobles qui ont tout dilapi-dé sauf les bonnesmanières et vivent d’austérité fas-tueuse. Ce qu’il déteste le plus chez un gouvernant,c’est la vulgarité. Il préfère un gangster élégant à unphilistinmêmehonnêtequivous faitundoigtd’hon-

neuràtoutpropos.C’estpourquoilesquelquesmesu-res du précédent septennat qui tentaient d’allercontre le courant dominant ont été bien vite empor-tées dans le discrédit d’un comportement de voyou.Et l’on peut parier que, pour longtemps, elles luiseront assimilées.

Aucun pays du monde ne saurait vivre très long-temps dans l’état de laisser-aller et de démagogie oùnous sommes. Les pays du socialisme réel ont pumaintenirceleurrependantplusieursdécennies,grâ-ce aumensongeet à la fermeturedes frontières.Maiscette époque est révolue. Nous ne pourrons pas éter-nellementobérerl’avenir.Quandonvoit legouverne-ment promettre au long des semaines une réformedesretraites,puisannoncerquecelle-ci serésumeà laprise en compte de la pénibilité – c’est-à-dire à desdroitssupplémentaires–,onseditque leChâteaului-même vit sur une planète enchantée, où le pouvoirconsisteà faireplaisir auxélecteurs insatiables; pourcombiende tempsencore?

Le seul gouvernement qui pourrait restaurer lepays dans son assiette et dans le concert des nationsserait un gouvernement responsable, c’est-à-direconscient qu’il y a des efforts à faire et plus vraimentd’avantages à arracher – et courageux, c’est-à-dire

capablederisquersapeaupourconvaincreunepopu-lation infantilisée de remettre en question en partiel’assistanat d’Etat. Il est bien difficile de trouver desgouvernantsresponsableset courageux.Mais ladiffi-culté se double d’une autre: un gouvernement de cegenredevraêtre vertueuxet éduqué. Car tout lui seracompté à charge : imaginez que ce gouvernementdise la vérité !Onn’est pas plus fou!

Mais peut-être celui qui dira la vérité suscitera-t-ildesacquiescements inattendus.QuandFrançoisHol-lande tente de nous faire croire quenous sommes entrain de répondre au problème du chômage par desemplois aidés, c’est une manière de nous prendrepour des faibles d’esprit. Beaucoup d’entre nousaccepterontpeut-êtred’assumerunesituationdésas-treuseparceque,enfin,onlesconsidéreracommedesadultes raisonnables, au lieu d’essayer de leur fairegober des mômeries. Les électeurs sont beaucoupmoins crétins que ne le pensent les gouvernants. Etbeaucoup d’entre eux sont passablement fatiguésd’êtrepris pour des crétins.p

f Sur Lemonde.frLisez également les tribunes de Pascal Salin, ancien présidentde la Société du Mont-Pèlerin, «La politique économique deNicolas Sarkozy : une occasion manquée», et de Jean-RobertPitte, membre de l’Académie des sciences morales etpolitiques, «La voie libérale n’a jamais été essayée en France»

pIl fallaitdistinguerl’islamdufondamentalismeUneerreurduquinquennat

L’Etat-assistanceestenFrancesinaturelquetoutautrecourantpolitiquedoitafficherdescaractèresdegrandevertus’ilveutsefaire

reconnaître.Sil’onveutallercontreleshabitudesdepenséed’unpeuple, ilfaut

commencerparsegarderdesvicescommuns

¶Chantal Delsol se définit comme une «libérale-conservatrice».Parmi ses derniers ouvrages: «L’Âge du renoncement» (Cerf, 2001)et un roman, «L’Expédition Janus» (Ed. du Rocher, 2008)

YvesRoucautePhilosophe, écrivain, professeurà l’université Paris-XOuest,

auteur d’«Eloge dumode de vieà la française» (Ed. du Rocher)

DenisTillinacEcrivain et journaliste

pLediscréditd’uncomportementdevoyouConvaincreàdroiterequiertplusd’exigence

pLadroitedoits’affranchirdel’idéologiedelagauchesoixante-huitardeQu’elleassumesavéritableidentitésanscraindred’êtrequalifiéede«réac»

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ANALYSEpar Eric AlbertLondres, correspondance

Depuis troismois,DavidCameronallaitmieux. Les remous au seinde son camp pour sortir del’Unioneuropéennes’étaientcal-més; l’économie semblait enfinsortiede la récession; les conser-

vateurs étaient nettement remontés dans lessondages,n’ayantplusquecinqousixpointsderetard sur les travaillistes, contre une dizainedébut2013.

Sa défaite cinglante, jeudi 29août, à la Cham-bre des communes, risque de freiner cet élan. Aunemajorité de treize voix, les députés ont blo-qué leprojet de frappes aériennes enSyrie. Sansgrande surprise, les travaillistes ont voté contrelamotion du gouvernement.Mais lamajorité abasculéàcausedelarébelliondetrenteconserva-teurs et neuf libéraux-démocrates. «DavidCameron a détruit d’un coup le gain de ces der-niers mois», estime Tim Bale, politologue àQueenMary University. «Il amis un but contreson camp», s’étonne PhilipNorton, politologueetconservateurquisiègeà laChambredes lords.

Les conséquences du vote sont avant toutdiplomatiques. Mais les répercussions politi-

ques sont également lourdes. Jamais depuis leXIXesiècle, un premier ministre n’avait perduun vote sur une question de guerre ou de paix.PourM.Cameron, il s’agit d’une «humiliation»,lemotquiestrevenuleplussouventdanslapres-sebritannique.

Sa défaite s’explique en grande partie par lefantômede la guerre en Irak, qui hante le parle-ment britannique.Mais elle renforce aussi l’im-pression que le premier ministre a perdu lecontrôle de son propre parti. Les «whips», cesministres chargés de faire respecter les consi-gnesdevote,n’ontrienvuvenir.«Celaressembleà de l’incompétence», estime M.Bale. L’erreursouligneàquelpoint le leaderdesconservateursest déconnecté de ses troupes. «Les députés debasenel’aimentpas,noteTonyTravers,delaLon-don School of Economics. Certains pratiquentunestratégievisantdélibérémentàlesconduireàladéfaite [lorsdes élections législativesde2015],pourpouvoir changerde leader.»

Legroupede rebelles est constituéd’une cen-tainededéputés, soit le tiersdesparlementairesconservateurs, avec une trentaine d’irréducti-bles. Ceux-ci sont généralement jeunes et très àdroite,peuinterventionnistesettrèseuroscepti-ques.LabasedeleurdésaccordavecM.Cameronest idéologique.Passur l’économieet l’austérité,mais sur les questions de société. Le premierministre est considéré par les «backbenchers»commeun urbainmondain privilégié, ne com-prenant pas les valeurs de la Grande-Bretagne

profonde. Une large frange de son parti lui enveutencored’avoir faitpasser lemariagehomo-sexuel. Quant à l’Union européenne, c’est unsujetde fâcheries sans fin.

Cedernierdossier,particulièrementexplosif,va bientôt revenir en force: le prochain rendez-vous électoral est celui des européennes demai2014. M.Cameron craint plus que tout unenouvellepercéeduUKIP(UnitedKingdomInde-pendence Party), un parti populiste, qui repré-senteunedroitedure, souverainiste,anti-immi-gration et anti-Europe. De quoi pousser ses pro-presdéputésà euxaussidériver très àdroite.

Signes encourageantsMais l’agacement des élus de base a égale-

ment des racines plus prosaïques. Beaucoup enveulent àM.Cameronde ne pas avoir remportéles électionsde 2010,n’obtenantqu’unemajori-té relative. Le Royaume-Uni a son premier gou-vernement de coalition depuis un siècle. Résul-tat: les postes deministre et de secrétaire d’Etatsontpartagésentredeuxpartis –et se fontrares.Pour les députés, cela signifie que l’espoir d’unepromotion est faible. «Une députée qui avaitvotécontreuneloidugouvernementm’aracontéqu’un ministre, furieux, était allé dans sonbureau pour lui dire qu’elle avait perdu toutechanced’avancement,raconteM.Norton.Elle luia réponduqu’elle savaitdéjà quecettepossibilitéétaitquasimentnulle.»

Résultat, jamais lesparlementairesn’ontaus-

sipeurespectélesconsignesduparti.Enmoyen-ne,touslesdeuxvotesàlaChambredescommu-nes, aumoinsunélu se rebelle. C’estun record.

Tout n’est cependant pas perdu pourM.Cameron,loindelà.«LesBritanniquesnevou-laient pasdes frappes en Syrie. Unedéfaite sur cesujet ne devrait pas trop leur déplaire», souligneM.Travers. Bien plus important est l’économie,dont le redressementest laprincipalepromessedeM.Cameron. Or, de ce côté-là, les signes sontencourageants. La croissance est de retourdepuisledébutdel’année,etellesembles’accélé-rer. Le PIB a augmentéde0,7%audeuxième tri-mestre. Les prix immobiliers sont repartis à lahausseetlaconsommationestderetour.Avingtmoisdesélectionslégislatives,c’estprometteur.

L’autre chance de M.Cameron est son oppo-sant. Le leaderdes travaillistes, EdMiliband,pei-ne à convaincre. Souvent comparé à Gromit, lepersonnage du filmd’animation, à cause de sesdents en avant et de ses airs de débarquer de laLune, ilparaîthésiterentreuneligne«blairiste»etunvirageplus àgauche. S’il peutêtre trèsbonsurcertainscoups,commelorsduscandaleMur-dochen2012, ilmanqueencored’envergure.

Les jeux ne sont pas faits. «David Cameron aencoreunechancedemenersonpartiàunemajo-rité, aumoins relative, lors des élections de 2015,estime M.Bale. Mais tout dépendra de l’écono-mie.»Pasde la Syrie.p

[email protected]

JAMAISDEPUIS LEXIXE SIÈCLE,UN PREMIERMINISTREN’AVAITPERDU UN

VOTE SUR UNEQUESTIONDE GUERREOU DE PAIX

T outestaffairedeméthode.Etd’opportunité. Acteur –modeste – de l’Histoire, celle

qui exige une majuscule, en tantquesecrétairede JeanMoulin,de lafin juillet 1942 à l’arrestation durésistant à Caluire-et-Cuire un anplus tard, DanielCordier n’avaitpas l’intention de revenir sur cesannées. Il s’était investidanssacar-rière de galeriste, collectionneur etmarchand d’art. Jusqu’au mitandes années 1970, quand un livred’Henri Frenay, qui stigmatisait leprétendu «cryptocommunisme»du martyr résistant, et une soiréethématique des «Dossiers del’écran» l’arrachentà ce silence.

Comprenantqu’il doit se faire le«champion»deson«patron»,Cor-dieraccepted’entrerdansla lumiè-re. Si les historiens, depuis trenteans, se sont effacés devant lestémoins, le privilège octroyé sanscontrôleàlaparoledeschefsfausseladonne.EtCordiersait la confron-tation inégale entre «le témoigna-ge d’un “chef historique”, grandhéros de la Résistance, [et] celui dela “piétaille”dont [il] étai [t]».

Aussi décide-t-il de se faireapprentihistorienenexplorant lesfonds d’archives qu’il a conservéset que les «professionnels», HenriMichel en tête, ont négligés. Il ennaît une œuvre sans équivalent.Unebiographiemonstre,JeanMou-lin. L’inconnu du Panthéon (3vol.,JCLattès, 1989-93), une reprise syn-thétique magistrale, Jean Moulin.LaRépubliquedescatacombes(Gal-limard, 1999), et, finalement, unretour plus intime sur l’aventurepersonnelle, l’historien autodidac-te se faisant mémorialiste (AliasCaracalla, Gallimard,2009).

C’est à ce parcours d’écriture, liéàlaprisedeconscienced’unecauseà servir, queDaniel Cordier conviele lecteur deDe l’Histoire à l’histoi-

re,nédeconversationsavecunhis-torienantiquisant,Paulin Ismard.

Lors de la séance à la Sorbonneorganisée à l’initiative de FrançoisBédarida et Jean-Pierre Azéma, en1983, où la conférence de Cordierprovoqueunesclandre, leministreAlain Savary commente: «Peut-êtreapparaîtra-t-ilqu’ilestplusfaci-ledefairel’histoirequedel’écrireoude la commenter.»

Avocat infatigableEnrôlémalgréluiparmileshisto-

riens, dont il sait ignorer lemétier,Cordiernerevendiquequ’unsujet:«L’histoire des relations entre legénéral de Gaulle, Jean Moulin etles chefs des mouvements». Fran-çais libre et non résistant dans laposture: «Je reconnais avoir écritcontre la littérature résistante, quine connaissaitpas la France libre etmonopolisaitlediscourssurlaRésis-tance depuis plus de trente ans. Lerecours à l’histoire constitua pourmoi l’armed’unminoritaire.»

Cordier, avocat infatigable deMoulin et de la France libre, histo-rien, puis témoin, et aujourd’huiexégèted’uneépopéesecrète.p

Philippe-JeanCatinchi

analyses

DavidCameronet lesrebellesde laChambredescommunes

De l’Histoire à l’histoireDaniel Cordier, avec Paulin IsmardGallimard, « Témoins », 160 p., 15 euros.

RECTIFICATIFSa Bertrandde Jouvenel.Dans l’entretienavec l’historienZeevSternhell (LeMondedaté 19août), il était écrit que l’essayisteBertrandde Jouvenel avait été «tenté par la collaboration». C’est de«collabora-tion intellectuelle»qu’il convient deparler, préciseM.Sternhell.

a Gaz de schiste.Dans l’article intitulé «AuQuébec, Petroliamisesur le gaz pour explorer le sous-sol de l’île d’Anticosti» (LeMondedaté28août), des déclarations concernantdes risquesde «fuites fugitivesde gaz» liées à l’extractionde gaz et de pétrole de schiste par lamétho-dede fracturationaupropaneont été attribuéespar erreur auministrequébécois de l’environnement,Yves-François Blanchet. L’auteurde ces propos était en réalité Pierre-Olivier Pineau, professeuràHECMontréal et spécialistedesquestions énergétiques.

LE LIVRE DU JOUR

Historienpar accidentetpar fidélité

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récit

Et toi, tu y arrives ? », « tu faiscomment?», «qui le faisaitchez toi?», «tuenasparlé avectes parents?», « tes enfants leprennentcomment?»,«tupen-ses à bien ajuster le plasti-

que?». Ce n’est pas un sujet demagazine.C’est pourtant une question de société,une douleur secrète dont on parle àmi-mots. Pas une vieille discussion quiremonte au fond des âges obscurs pleinede sang, de peau, de quart de lune,d’amourmaternel et d’hommes impossi-bles. Rien d’archaïque ni de charnel,là-dedans.Quoique.Quoique…

J’ai40ansetjenesuispasfoutuedecou-vrir convenablement les livres de mesenfants.Çagonfle, ça coince, ça colle.Gon-dole, paperolle, ras-le-bol. Enfant, je n’aijamais couvertmes propres livres. J’avaishâte dem’ymettre un jour. De perpétuerle geste. Couvrir les livres, c’est un baptê-me du plastique. Une ordalie : tu couvresbien, t’es un bon parent. «Nel mezzo delcammin di nostra vitami ritrovai per unaselva oscura, che la diritta via era smarri-ta.»Danteavaitvujuste:aumilieuduche-min dema vie, jeme retrouve paumée, lavoie n’est pas droite. Le papier plastiqueondule furieusement du côté de l’Enfer.Chez d’autres, il a l’aplat lumineux duparadis.

Année après année, j’ai raté l’épreuve.Quelque chose clochait là-dedans, j’yretournais immédiatement. J’ai tenté depenser que j’avais la couverture postfigu-rative tendance déconstructiviste. Puis,j’ai décidé qu’être une bonne mère nedevait plus se réduire à des vignettes : lapurée de brocolis au Baby Cook, la nata-tion synchronisée dès 2 mois, le gâteaumarbréapportéà l’école. Jen’essaiemêmeplus. Nous sommes nombreux dans cecas. Beaucoup de souffrances, beaucoupd’enfance. Il suffit d’en discuter pour s’enrendre compte.

Chacun a sa version des faits. Humilié:«Mes livres étaientmal couverts, l’instit semoquait de moi, j’avais honte, je n’osaispas ledireàmamère, c’était si vexantpourelle.» Pratique: «Le plus important, c’estde ne pas resserrer le plastique quand tu

scotches, sinon, le livre ne peut être refer-mé.» Sadique: « Je ne vois pas le problè-me.»Aristocratique: «C’est la nounouquile fait.»Mauvaise copine: «L’essentiel estd’être bien installée.» Stigmatisé : «Uneannée, mamère a pris du plastique trans-parent mais jaune, j’osais pas sortir meslivres. » Désespéré : « J’ai tout essayé,même le kit autocollant, je n’y arrive pas.»Apodictique: «Tout est dans la languet-te.»Mallarméen: «Aboli bibelot d’inanitéplastique.»Néoproustien:«Mamanlefai-sait dans son cabinet de couture. Je sensencore l’odeur du papier. Ça puait.» Réac:«Le problème,maintenant, c’est les verbesirrégulierset les cartesà l’intérieurdescou-vertures. Et les rabats aussi. La pochettepour le CD d’anglais, c’est l’horreur. Et lesmanuels souples… Avant, c’était plus sim-ple.» Alternatif : «Mes parents utilisaientdu papier kraft. Je confondais tous meslivres.»Dis-moicommenttucouvres, je tedirai qui tu es.

Les forums sur Internet sont l’espaced’aveuxdéchirants, de conseils judicieux,d’encouragements anonymes: «Encoresix livresà couvrir, souhaitez-moiboncou-rage les filles !» Il y abien les«tutoriels». Ilen existemaintenant pour tout : changerunpneu, jouerune symphoniedeMahlerà la cornemuse, être heureux. Unmondeidéal. Le rouleau ne roule pas, il ne tombepasdelatable, le livrenerebiquepas,neseferme pas de lui-même, le ruban adhésifcolle sur commande, les ciseaux ne biai-sent pas. De petitesmusiques zen ou pri-mesautières accompagnent le geste. On y

emploiedesadjectifsroboratifs(façoncui-sineMaïté) destinésà atténuer le tragiquede l’affaire, à la transformer en promena-dedesantépleinedebonsensetd’éviden-ce chtonienne : se munir de « bons»ciseaux, d’une « large» feuille, de Scotch«transparent» (le Scotch transparent nementpas)sidumoinsc’est«possible»(onlaisse entendre que l’aléatoire est dans letype d’adhésif, pas dans la manœuvre).Propagande ! Derrière cette limpiditéagressive, on sent les tourments dans lesfamilles, les découragements silencieuxdans les chaumières en septembre!

C’est le jourde la rentrée. Le collègedis-tribue les livres, les enseignants deman-dent aux élèves de les couvrir. Couvrir, cesont les bonnes résolutions et l’inaugura-tionde l’année. C’est unemanièrede faire«peau neuve». Certains enfants sontd’ailleursprofondémentdégoûtésà l’idéederécupérerun livredéjà couvert : leplas-tiquesembleunlingesale,unemuedeser-

pent, de la peau qui pèle, des draps usésqui sentent le fond de cartable, les mainsmoitesdecamaradesplusâgés, leréchauf-fé d’années en boucle. On exhorte, cou-vrez, faites couvrir. On insiste un peu. Pastrop.Moinsqu’auparavant.

Le geste est devenu plus ambigu. Cegros balourd de bouquin est accusé detouslesmaux: ildémolit lescolonnesver-tébrales en croissance, il plombe les sacs.Pourquoiaurait-ondeségardspource cri-minel surpondéré qui massacre le dos denos enfants? Samasse a éclipsé sa gratui-té, sa qualité, sa nécessité. Inciter à cou-vrir, c’estattirer l’attentionsur laquestion

du «poids des cartables». Pas prudentpourunenseignant.

Quelques jours plus tard, en classe :«Sortez vos livres.» Les manuels scolairesdemes élèves sont en ordre sur les tables.Certains sont couverts, d’autresnon. Je nesais pas ce qui s’est tramé dans l’intimitédes familles. Mes incapacités personnel-les me confèrent une indulgence infinie.L’aisance, la lutte, l’aide, l’appel ausecours, l’oubli, le refus ou l’indifférencesont en coulisses.

Sur les livres parfaitement couverts lesétiquettes varient : à l’ancienne, façonleçon de choses et écriture déliée ; tapéessurordinateur.Desidéesdegénie:yinscri-re aussi, entre autres, le nom du profes-seur. Voir son nom sur les cahiers et leslivrescombled’aise. Lavraieautorité:êtreauteur de son cours. Vous êtes compris.Votre nom est inscrit pour l’éternité surl’étiquette en attendant les remercie-ments futurs de l’ancien élève devenuPrixNobel. Bien vu, bien joué. Tout est là :le respectduprof, dumatériel scolaire, dulivre, les respects des pairs, le sens durituel, le geste de bonne volonté. Le sensde l’école,de sesmœurs, de ses codes, toutest plastifié superbe.

A côté de cette rutilante débauche deconnivence scolaire, il y a donc le dénue-ment rêche des livres à nu. Posés là, com-me ça. Oui, il y a les élèves qui n’ont pascouvert leurs livres. Enfin, les élèves dontonn’apas couvert les livres. Là est laques-tion. Ceuxdont les livres ne seront jamaiscouverts.

C’est un signal, pas un verdict. Un cli-gnotement simplement, un entrebâille-mentqui laissedevinerquelquesdétermi-nismessociaux,quelquescodesenmoins,une manière, pour la famille, pour l’en-fant, d’appréhender le système. Même sirien n’est gravé dans le marbre, même sic’estdel’ordredel’incidence,Bourdieutra-verse la salle en paso-doble. Ceux dont lelivre est couvert, ceuxdont le livrene l’estpas. Un schibboleth l’air de rien. Quelquechoseducapitalculturel :envelopperc’estsedistinguer,c’esthériter, c’estperpétuer.Il y a bien, là, dans ces livres dépouillés,bientôt rognés, quelque chose qui appa-raît, qui ne nous échappe pas. Deuxmanuels côte à côte, deuxattitudes.Avoir

ou non les clefs du système. Avoir ou nonles codes. Donner ou non les bons signesauprofesseurdèslespremiersjours.Bour-dieupourlesnulsavecunkitsociologiqueà monter soi-même: ciseaux, Scotch etpapiers. Ludique, technique, familial. Poi-gnantaussi : pourquelques-uns, c’estdéjàla partie visible d’inégalités de moins enmoins invisibles.

Inutile, à ce stade, de s’affoler, de tirerdesconclusionsdéfinitives,dedéclencherle plan Orsec. Ce serait faire fi des capaci-tés, de la liberté, des diverses manières,pour les élèves, d’y arriver. Des diversmotifs pour ne pas couvrir ses livres, aus-si.Lefatidiqueet lemécaniquesontàpros-crire. Pas de théorie brute. Ni de drame:après tout, on s’en fout un peu, non, queles livres soient couverts? Il s’agit simple-ment, pour l’instant, d’être observateur,attentif,derécolterdes indices,d’êtrevigi-lant.Histoiredenepasperdredetemps:sidérisoire qu’il puisse paraître, ce signe,comme d’autres, est malheureusementfréquemment révélateur de difficultés àvenir.

I l pourrait y avoir une solution simple.Modeste et limitée. Le jour de la ren-trée (ce jour si long, si remplide rienet

videde tout),onpourraitcouvrir les livresavec les élèves, en classe. On aurait ainsiune activité commune,marrante, burles-que. Peut-être source de cohésion, sansdoute pleine d’attention pour le respectdumatériel,pourlelivre.Ceseraitunefor-me de pari, de conjuration, d’incantationplastifiée aux dieux éducatifs : «Veillezsur eux comme ils veillent sur leurslivres!»

Çachangeraitquoi?Oh,pasgrand-cho-se. On couvrirait les livres et la diversitédes destins enfantins avec. On recouvri-rait de plastique les inégalités des chan-ces. Non pour les protéger, non pour lesdissimuler ni les planquer mais pour lesatténuerunpeu.Onjoueraitdessignes,dela surface,des symboleset de l’enveloppe.Ceneseraitpasunerévolution(elleresteàfaire), juste une attention, une forme dedisposition.

Le diable est dans les détails. Peut-êtreles bonnes fées le sont-elles aussi. Rentrezcouverts! p

Epreuverituelledudébut

de l’annéescolaire,la couverturedes

livresestaussiunmarqueur social.

Oudis-moicomment tu

couvres, je tediraiqui tues

C’estunsignal,pasunverdict.

Unentrebâillementquilaissedeviner

quelquescodesenmoins,unemanière,pourlafamille,pourl’enfant,

d’appréhenderlesystème

Alivrecouvert

ALINE BUREAU

MaraGoyet

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Page 18: Le Monde Du Dimanche01 Et Lundi 02 Septembre 2013

Société éditrice du«Monde»SAPrésident dudirectoire, directeur de la publication Louis DreyfusDirectricedu «Monde»,membre dudirectoire, directrice des rédactionsNatalieNougayrèdeDirecteur déléguédes rédactionsVincentGiretDirecteurs adjoints des rédactionsMichel Guerrin, RémyOurdanDirecteurs éditoriauxGérardCourtois, Alain Frachon, Sylvie KauffmannRédacteurs en chefArnaudLeparmentier, Cécile Prieur, NabilWakimRédactrice en chef «MLemagazine duMonde»Marie-Pierre LannelongueRédactrice en chef «édition abonnés» duMonde.fr Françoise TovoRédacteurs en chef adjoints François Bougon, Vincent Fagot, Nathaniel Herzberg, Damien LeloupChefsde serviceChristopheChâtelot (International), LucBronner (France), VirginieMalingre(Economie), Auréliano Tonet (Culture)Rédacteurs en chef «développement éditorial» Julien Laroche-Joubert (InnovationsWeb),Didier Pourquery (Diversifications, Evénements, Partenariats)Chefd’éditionChristianMassolDirecteur artistiqueAris PapathéodorouPhotographieNicolas JimenezInfographieEric BéziatMédiateurPascal GalinierSecrétaire générale du groupeCatherine JolySecrétaire générale de la rédactionChristine LagetConseil de surveillancePierre Bergé, président. Gilles van Kote, vice-président

A l’OpéraduCaire, la lumièreblanchedemidi tombesur legrandescalierenvolu-te, le tapis rougeet le costumeduBar-

bierdeSéville, exposédansunevitrine.Moha-medMounirest accoudécontreun fauteuil aupremierétage avecune élégancenonchalante–qu’oncroiserait aussi bienàBerlinouàNewYork – et touteuneviedévouéeà cette ins-titution, le seulOpéradumondearabe jusqu’àceque leQatar s’offre le sienen2011,mais c’estuneautrehistoire.

Dans la chaleurde la finaoût,de raresperson-nescirculentdans les coulisseset, commedansunecathédraledéserte,onse surprendàparleràvoixbasse.C’est à cemoment-làque l’élégantMounirsemetàcrier,une colèresècheetbruta-le.Pourquoi lesvisiteursétrangersnecompren-nent-ils rienà la situationégyptienne, surtoutlesOccidentaux? Ilsdevraient soutenirceuxqui, commelui, ont contribuéà renversercetété le gouvernementdesFrèresmusulmans,cesennemisde la culture.Mais, au lieud’applaudis-sements,Mounirn’entendquedes critiquescontre l’interventionde l’armée, lesmortset lesarrestations.Danscertains journauxinternatio-naux,on les traitemêmede«fascistes», etMou-niréclate:«Cequenousavons fait, c’estune

révolutionpopulaire.»EnEgypte, «révolution»estdevenulemotmagique.Tout lemondesel’arrache, l’OpéraduCairecommelesautres.

La troupe jouaitAïda, lorsque l’affaire a com-mencé le 29mai.Une lettrevientalorsd’arriverduministèrede la culture, encore sous lecontrôledugouvernementMorsi, issudesFrè-resmusulmans.Ladirectricede l’Opéra, InesAbdelDayem,doitquitter sonposte, immédia-tement.Cemêmejour, le Sénatdébatdubud-getde l’Opéra.Ça crieparmi les élus islamistes:commentpeut-ondépenserautantd’argentpour«ça»?Enmesured’économie,unséna-teurproposede supprimer le corpsdeballet,cesgensdemi-nusqui s’agitentsansaucunedécence,enne rapportantpasunsou.KamalRabiaRashed,undesdanseursétoilesduCaire,se souvientdesonhumiliationenentendant ledébat.Danseur?Cela fait si longtempsdéjàqu’il ahontede seprésenter commeça,«sur-toutunhomme», dans la sociétéégyptienne.

Jusqu’àcemoisdemaipourtant, legouverne-mentMorsi avait surtoutciblé la justiceou l’ar-méedans ses interventions.«Tuveuxque je teparlehonnêtement,man?», lanceYehiaKhelil,avecunaccentaméricainplutôtmarrant. Il estpercussionniste, stardu jazz égyptien.«Je

n’avais jamaiseudeproblèmeavec les Frèresmusulmans jusque-là,man.»Depuis2011,Khe-lil a vupasser la révolutionde lagénérationTahrir, la chutedeMoubarak,puis lesvictoiresélectoralesdeMorsi (que les islamistesappel-lentà leur tour«leur révolution») sans inter-rompreundeses concertsni s’enmêlervrai-ment. L’Opéranonplusn’a jamais cessédejouer,malgré les affrontements justede l’autrecôtéduNil, soucieuxsurtoutque lepublicn’aitpaspeurdeveniret suspendantseulement«quand il yavait desmorts». Cette fois, çayest,le tourde la cultureest arrivé.Enquelquesjoursdemai, les Salonsdu livre etde lapeintu-re sont supprimés,unevingtainede responsa-bles licenciés,dont InesAbdelDayem.

PhotogéniquesA l’Opéra,unegrèvearrête les représenta-

tionsd’Aïda. Unecinquantained’artistesoccu-pent leministère, timidesaudébut, réclamantla têteduministre,«mais riendeplus». Deban-deroleenslogan, leuractionvapeuàpeurejoin-dreunecontestationanti-Morsi, quimontedepuisdesmoisdéjà,menée surtoutpar lagénérationTahrir. Si les artistesne sontpas lesplusnombreux, ils sont lesplusphotogéniquessansdoute, avec leur scènedresséeenpleinerueet leurs spectaclesgratuits. Ils s’enhardis-sent. Seprennentàvouloir changer«tout le sys-tème».Bientôt, il n’y aplusde retourenarrièrepossible.«Ona finipar sebattrepournotrevie:lavraie identité égyptienne, c’estnous, paseux», reprend l’élégantMounir. Le 3 juillet, l’ar-méedestitue legouvernementMorsi. Et l’Opé-raduCaire s’écrie:«Ona faitnotre révolution.»

Dans lebureaud’InesAbdelDayem, l’appa-

reil à air conditionnébrassepéniblementl’épaisse fuméedecigarette. Ladirectricedel’Opéraest ennoir, du rimmelauxchaussures,avecdegrandsrires joyeuxqui tranchentaveccetteallurede tragédienne.Docteur Ines–c’estainsiqu’on l’appelle– fut lapremière flûtistede l’orchestresymphonique.Sitôt après la chu-tedeMorsi, lenouveaugouvernement lui avaitoffertunparfumde revancheà lami-juillet: leministèrede la culture. Elle se revoit lematinde laprestationde serment, vérifiantuneder-nière fois son tailleur chic, chezelle,devant laglace. Le téléphonesonne.C’est le premierministre. Il lui annoncequ’elle choquedans lesvillages ruraux,uneartistequi évoluedans lesmilieuxduchantet de ladanse. Sanominationpourraitgêner leprocessusavec lepartial-Nour, salafiste et toujoursaugouvernement.«L’important, c’est l’avenirde l’Egypte, n’est-cepas?», conclut lepremierministre.Unautreestdésignéàsaplace.

Il y aquinze jours, docteur Inesétaitdéjàrevenueà la têtede l’OpéraduCairequand larépressionmilitaire s’est abattue, féroce, sur lesnouvellesmanifestationsconduitescette foispar les Frèresmusulmans, chassésdupouvoir.Lesmortset les arrestations se comptentaujourd’huipar centaines.Docteur Inesbatdescils.«Cette réponseétait nécessaire, c’était euxounous,mêmesinous sommesmal comprisàl’étranger.»Et retentit soudain la chansond’E-dithPiaf,«Non, jene regrette rien…». C’est lasonneriedeson téléphoneportable.

Si le couvre-feu lepermet, la troupe joueraAïdaen septembre, à l’OpéraduCaire. p

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L’AIRDUTEMPS | CHRONIQUEpar Florence Aubenas

Lesrévolutionspassent, l’Opérareste

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FIN MAI,AVANT LACHUTE DEMORSI, LESSÉNATEURSDÉCIDENTDE RÉDUIREDE MANIÈREDRASTIQUELE BUDGETDE LA

CULTURE

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Le«Sarkoboy»BorisBoillonetsavalisedebillets

pTirage duMondedaté samedi 31 août 2013 : 352 250 exemplaires. 2

B orisBoillonallait toutbon-nementmonterdans leTha-lyspourBruxelles, à lagare

duNord, àParis, le 31juillet, lors-que lesdouaniers l’ontcontrôlé.Sans reconnaître l’ancienconseillerdeNicolasSarkozyquidéfraya lachroniqueau tempsoùil était ambassadeurdeFranceàTunis, en2011-2012, lesdouaniersontdemandéauvoyageurs’iltransportaitdesdevises. Et,mal-gré sa réponsenégative,ontdéci-déde fouiller sonsac. C’est làqu’ilsontdécouvert, commel’arévélé, vendredi 30août, le siteMediapart, 350000euroset40000dollars (30000euros)enliquide.

RésidantdésormaisenBelgi-que, l’anciendiplomatea expli-quéquecet argentprovenaitdesanouvelleactivitédeconsultantetdevait servir à créerune filialedesasociétéde consultinginternatio-nal, Spartago. La loi interdisant letransfertdansunautrepaysdel’Unioneuropéennedesommessupérieuresà 10000euros sansdéclarationpréalable, le servicedepolice judiciairede ladouaneaétésaisi et leparquetdeParis a confir-mé,vendredi, qu’uneenquêteestencours.

BorisBoillonsuscitedepuisdéjàquelquesmois la curiosité,sinonles soupçons.Dès sonarri-véeà l’Elysée, FrançoisHollandeavait fait remplacer, à la têtedel’ambassadedeFranceenTunisie,ce«Sarkoboy», qui avait choqué,enpleinerévolution tunisienne,par sesmanières, son langageabruptet lapublicationd’unepho-tounpeuridiculeoù il posaitavantageusementenmaillotdebain.Au«placard»dèsaoût2012,lediplomatede44ansavaitpréfé-ré semettreendisponibilitéde lafonctionpubliquepourse lancerdans les affaires.

Parfaitementarabophone– ses

parents sontdes«pieds rouges»,cesanciensmilitantsdegauchequipartirentenseignerenAlgérieaprès l’indépendance–, BorisBoillondisposede solidesréseauxdansdenombreuxpaysarabes.Selon les télégrammesrévélésparWikiLeaks, lesdiplomatesaméri-cainsavaient raillé, lorsqu’il étaitenposteàBagdad,de2009à2011,«l’ignorance», les«incohérences»et les«erreursd’appréciation»deBorisBoillon. Ils ignoraient cepen-dantsonentregent.

Proche deKadhafiD’abordchargédemissionau

ministèrede l’intérieur, en2006,auprèsdeNicolasSarkozy,puis,après l’électiondecedernierà laprésidentielle,«conseillerAfriqueduNord,ProcheetMoyen-Orient» à l’Elysée, c’est lui quiorganisa lavenueàParis, endécembre2007,deMouammarKadhafi.BorisBoillonétaitunpro-chedudictateur libyenqui, recon-naissait-il alors, l’appelaitvolon-tiers«monfils». Il apar ailleursétéunacteuressentielpourconvaincreKadhafide libérer lesinfirmièresbulgaresà l’été 2007.

Plus récemment, c’est lui enco-re qui serait intervenu, selonMediapart, pourobtenir la natu-ralisationde l’épousedeBachirSaleh, cet anciendirecteurde cabi-net deKadhafi aujourd’hui en fui-te, soupçonnéd’être l’undesacteursd’un éventuel finance-mentpar le régime libyende lacampagnedeNicolas Sarkozyen2007.

Boillonaaussi conservédenombreuxliensavec l’Irak. Il a fon-déuneentreprisedeconseil «endéveloppementd’infrastructuresdans l’agriculture, l’eauou l’éner-gie».Selon lesite IntelligenceOnli-ne, il a aussi signéuncontratavecSuezEnvironnement. p

RaphaëlleBacqué

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