Le Monde Septembre 2011

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UNE ROUTE sinueuse, des forts de pins verdoyantes et deshommes en uniforme. Soudain apparaissent les images decarte postale de la baie de Hongkong, ses haies dimmeubleset son essaim de navires. Au volant de sa berline dcapotable,Charlotte fait signe de la tte lagent de scurit; et la barriredu Tertre de Stanley, un village priv portant le nom du clbreexplorateur britannique, se lve.Depuis 2005, cette expatrie franco-belge et son marifranais coulent des jours heureux dans leur maison avecterrasse, trente minutes du cur de l conomie la plusouverte du monde (1) . Monsieur occupe un poste stratgiquededirecteurnancierdansunegrandebanquefranaise.Madame ne travaille pas et sadonne aux joies de la baignadedans la baie de Stanley, du tennis et de laction humanitairepour une grande organisation non gouvernementale (ONG)franaise. Pour leurs quatre enfants et leur grande maison,CharlotteetPaulontbesoindune nounou,quivalenteuropanis de la domestique. Lennie, sextasie sa patronne,est tellement dvoue. MmeLeonora Santos Torres garde lesenfants, cuisine et fait le mnage. Elle est lune des quelque290 600domestiquestrangresemployesen2011Hongkong. Chez Charlotte et Paul, elle vit, comme lcrasantemajorit de ses collgues, dans une chambre de moins de cinqmtres carrs et se rend disponible jour et nuit pour veiller auconfort de ses employeurs.Charlotte, qui na pas mis les pieds dans un supermarchdepuis quatre ans et vit cette exonration des tches domes-tiques comme une vritable libration, stonne encore queson employe fasse scher son maillot de bain quand elle rentrede la plage, sans quelle le lui demande. Pour soffrir ce servicevingt-quatre heures sur vingt-quatre, six jours sur sept, le couplepaie MmeTorres 5000 dollars hongkongais (450 euros). Cest100 euros de plus que le salaire minimum pour les domestiques Hongkong, raison dau moins dix heures de travail par jour ,prcise Charlotte. Et, puisquelle et son mari nautorisent paslemploye se servir dans le rfrigrateur, ils y ajoutent 55 eurospar mois. Cest la loi Hongkong , explique-t-elle (2). Afrique CFA: 2 200 F CFA, Algrie : 200 DA, Allemagne : 4,90 , Antilles-Guyane : 4,95 , Autriche : 4,90 , Belgique : 4,90 , Canada : 6,75 $C,Espagne : 4,90,Etats-Unis : 6,75$US,Grande-Bretagne : 3,95,Grce : 4,90,Hongrie : 1500 HUF,Irlande : 4,90,Italie : 4,90 ,Luxem-bourg : 4,90 , Maroc : 28 DH, Pays-Bas : 4,90 , Portugal (cont.) : 4,90 , Runion: 4,95 , Suisse : 7,80 CHF, TOM: 700 CFP, Tunisie : 5,50 DT.l+!l-lll|'ttat is mtsit a 1 assl+!l-lll|'ttat is mtsit a 1 ass|li||rts tt itsstts ttmjltmtstairts ssr www.ttatismtsit.ttm l! jats, l| ts asalsts ajjrt|tsiitsrtiitts jarlts mtilltsrs sjttialistts#4, 90 -Mensuel -28 pages N690 -58eanne.Septembre2011LI BYE, LESCONDI TI ONSDEL UNI TNATI ONALE page 16LOGEDU FLOUPARGRARDMORDI LLATPage 27.# S O MMA I R E C O MP L E T E N PA G E 2 8PAR NOTRE ENVOY SPCI ALJULI ENBRYGO*Addictions chinoisesPARMARTI NEBULARDDES Etats-Unis tancs et privs de la note de meilleur lvede la classe (capitaliste); une Chine sollicite pour renouerles caisses et impulser la croissance mondiale. Mme dans leursrves nationalistes les plus fous, les dirigeants chinois nauraientpu imaginer plus spectaculaire basculement de lhistoire.Ils ne se privent donc plus de donner des leons cetteAmrique qui doit soigner son addiction la dette (Xinhua,7 aot 2011). Et prcisent que Pkin a tous les droits dexigerdes Etats-Unis quils sattaquent leur problme structurel . Quipaye le bal mne la danse. Or la Chine se montre trs gnreuse :elle a accumul en bons du Trsor amricain 1170 milliards dedollars, soit lquivalent ou presque de la richesse annuelleproduite par la Russie. Une arme nancire quelle utilise politi-quement, renvoyant les Occidentaux leurs turpitudes.On aurait tort de croire qu ce jeu elle est isole. Dans largion, les souvenirs des mesures imposes en 1997-1998 parle Fonds montaire international (FMI) restent vifs. Lex-ambas-sadeur singapourien Kishore Mahbubani fait remarquer, nonsans ironie : Tous les conseils que les pays asiatiques ont reusont t ignors par lOccident (1). Malgr des tensions territo-riales en mer de Chine mridionale, les pays de lAssociationdes nations de lAsie du Sud-Est (Anase) ont donc, le 9 aot, mislaccent sur la complmentarit des conomies asiatiques. Leur voisin est encombrant, voire arrogant ; mais, en cas decrise aggrave, il dispose de moyens sonnants et trbuchants.La Chine, qui aime parler addiction, devrait cependantbalayer devant sa porte. Elle aussi est accro la dette : cellede lAmrique, qui lui permet de placer sans trop de risques sesMANILLE, HONGKONG, PARISProfession,domestique(1) Le rapport 2011 sur lindice de libert conomique tabli par la HeritageFoundation et le Wall Street Journal classe cent soixante-dix-neuf pays sur la basede dix critres (commerce, commerce international, fiscalit, taille du secteur public,monnaie, investissement, finance, droits de proprit, corruption et libert du travail).Hongkong ici pris comme entit autonome est numro un en 2011.(2) En ralit, lallocation de nourriture incombant aux employeurs qui nenourrissent pas leur domestique slve 750 dollars hongkongais, soit 67 euros.moyens de sauver le capitalisme , uneissue (heureuse) qui semble si peu acquiseau Washington Post quil sinterroge sousformedditorialplusmacabrequejoyeux : Le capitalisme est-il mort ? (1).Et puis, tout se remet en place.Certes, il y eut un bref intermde durantlequel les lites politiques et nancires,autrefois couvertes de gloire et qui avaientmen lconomie mondiale au bord dugoufre, connurent une traverse du dsert(qui leur permit plus tard de se dire pers-cutes) ; mais elles ont repris du poil delabte.Ilyeutdesdclarations,desgrands-messesrichesdepromesses restes sans suite. Il y eut enn des loisvotes,maisdontlesapplicationsconcrtes quil sagisse de nouvellesarchitectures de supervision, de renfor-cement des rgles prudentielles, denca-drement des bonus ou de protection duconsommateur se sont avres plus quemodestes (2).(Lire la suite page 22.)Mme le ralentissement de la croissance en Chine et en Allemagneninterrompt pas le durcissement des politiques daustrit.Pendant que les socialistes espagnols entendent constitution-naliser la rduction des dcits publics, la droite franaise, quia d se rsigner au relvement cosmtique des impts des plusriches, continue tailler dans les dpenses de lEtat. Aprs lekrach nancier de septembre 2008, on annonait pourtant leretour de Keynes.TROIS ANS APRS LE KRACHIndtrnablesfauteurs de crisePARI BRAHI MWARDE** Professeur associ la Fletcher School of Lawand Diplomacy (Medford, Massachusetts). Auteur dePropagande impriale & guerre financire contre leterrorisme, Agone - Le Monde diplomatique, Marseille-Paris, 2007.(1)RespectivementNewsweek,NewYork, 16 fvrier 2009; Time, New York, 2 fvrier 2009; TheWashingtonPostNationalWeeklyEdition,27 octobre 2008.(2) A year later, Dodd-Frank delays are piling upet Wall Street continues to spend big on lobbying,The New York Times, 22 juillet et 1eraot 2011.CE FUT, il y a trois ans, lun de cesmoments dincertitude o tout tremble,tout tangue et o personne ne doute plusque tout va chavirer. Le 7 septembre 2008,le gouvernement amricain place soustutelle Fannie Mae et Freddie Mac, deuxmastodontesducrdithypothcaire. Le 15, la vnrable banque daffairesLehman Brothers annonce sa faillite. Le16,appellaideparleWallStreetJournal, Washington rachte AmericanInternationalGroup(AIG),premierassureur du pays. La sidration gagne ;lesBoursesplongent.Lapuissancepublique amricaine nationalise une bonnepartie du secteur automobile et injectedes centaines de milliards de dollars danslconomie. Keynes, le New Deal, lEtatstratge sont de nouveau lhonneur.Dans un acte de contrition universelle,la bourgeoisie dafaires jure alors querien ne sera plus jamais comme avant .Le premier ministre franais FranoisFillondcrit unmondeauborddugoufre ; la couverture de Newsweekannonce, presque terrie, Nous sommestous socialistes prsent ; Timeappelle repenser Marx pour trouver les* Journaliste.(Lire la suite page 10 et notre dossier pages 7 12.)Legouvernementfranaisetunepartiedelagauchevoientdanslesserviceslaper-sonneungisementdemploisprovidentiel.Oncomptequelquecentmillionsdetravail-leursdomestiquesdanslemonde. AuxPhilip-pines, l exportation de bonnes est devenueune industrie nationale, avec formation obliga-toireetsminairesdeprparationlexil.Nombre dentre elles travaillent Hongkong.(1) The Economist, Londres, 20 aot 2011.TAKASHI SUZUKI. Bau #0819, 2009SUPER WINDOW PROJECTexcdents nanciers et de continuer exporter crdit. Nest-elle pas dsormais le premier bailleur de fonds tranger desEtats-Unis, devant le Japon ? Ce qui lui apporte au moinsautant de contraintes que de droits. Elle ne peut arrter netlachat de bons du Trsor sans risquer de provoquer une baissedu billet vert : ses normes rserves (en dollars) se dgone-raient alors comme une baudruche.Ne voulant pas utiliser une telle bombe atomique nancire,la Chine cherche se dgager de cette dpendance en inter-nationalisant sa monnaie pour rduire les privilges du dollar.Elle multiplie les possibilits dacheter des bons du Trsorchinois en yuans la Bourse de Hongkong, attirant ainsi descapitaux de moins en moins contrlables. Le jeu est prilleux.Mais, convaincu par ailleurs que ses dbouchs extrieurs vontse rduire, Pkin tente galement de rorienter son conomievers le march intrieur. La mutation est amorce : salaires enhausse, minimum retraite gnralis, etc. Trop lente et surtouttrop ingalitaire, la course contre la montre est loin dtre gagne.Croire cependant, comme lespays occidentaux, quunervaluation du yuan et une hausse des importations chinoisessufraient relancer la machine est une vue de lesprit. Surtoutpour un pays en voie de dsindustrialisation comme la France,dont le dcit extrieur sexplique largement par la productionautomobileraliseltrangerpardesconstructeursnationaux...et rimporte. L aussi, soigner laddiction aux pro -ts devrait tre [email protected] 2011 LE MONDE diplomatique2YougoslavieM. FabriceGarniron (Villejuif)ragitunpassagedureportagedeJean-ArnaultDrens,BaladeenYougonostalgie,publidansLeMonde diplomatique daot 2011 :Jean-ArnaultDrensmetenparallleoustachis[fascistescroates] ettchetniks[rsistantsserbesnoncommunistes], cesderniersayantselonluiversprogressi-vement dans la collaboration avec lAlle-magnenazie.Maisnest-ilpaslui-mmeinuencparlhistoireofciellequeletitisme a faite de la Rsistance ? Si laccu-sationdecollaborationnismeatrcur-rente sous le marchal Tito pour lgitimer lergime comme seule vritable incarnationde lantifascisme, les faits sont l et mon-trent que, avant mme larrive des troupeshitlriennes en Yougoslavie, en avril 1941,un puissant mouvement de rsistance natio-nalecontrelAllemagnenazieexistaitenSerbie indpendamment de Tito.Cest en efet avant larrive des troupesallemandes que les Serbes rent tomber leurgouvernement,alorsquecederniersap-prtait, en mars 1941, signer le pacte tri-partite avec Hitler. Et ce nest pas Tito, maisDraza Mihailovic qui, ds avril 1941, fut lepremierdclarerlaguerreloccupant.CestencoreMihailovicquedeGaulledcoradepuisLondres,en1943,etquilconsidra jusquau bout comme un hroslgendaire. Enn, ce nest pas pour sa pr-tendue collaboration que Tito le t ex-cuter en 1946, mais uniquement parce quecelui-ci, sil tait rest en vie, aurait repr-sent un obstacle son pouvoir absolu.Cest en arguant des accords de cessez-le-feu que certains lieutenants de Mihailo-vic ont parfois passs avec les troupes ita-liennes que lhistoire officielle titiste a faitpasserla guerredanslaguerre entrersistantstchetniks etcommunistespourun combat entre fascisme et antifascisme.Pourtant, aussi peu glorieux soient-ils, cesaccords ne permettent pas de conclure unbasculement gnral de la rsistance natio-naliste dans la collaboration et le fascisme.A cet gard, la rsistance titiste elle-mmenestpasirrprochable,puisquilluiestarriv de passer des compromis avec loc-cupant nazi pour mieux craser ses rivauxnationalistes. Toutes ces trahisons doiventtre remises dans le contexte dun affron-tement qui, des deux cts, fut sans mercientre les deux branches de la Rsistance enYougoslavie.Quelques mots enn sur Dobrica Cosic,queJean-ArnaultDrensprsentecommeun crivain trs nationaliste. Rappelonsque, dans les annes 1980, cet crivain fut linitiative dun comit ayant pour but dor-ganiseruneoppositiondmocratiquelchelle de la Yougoslavie. Et que, ds lesannes 1960, il conut un plan de partage duKosovoentreAlbanaisetSerbes,recon-naissant les droits historiques des uns et desautres sur cette terre. Sans doute est-il faciledetrouveruncrivainplusnationalisteque Dobrica Cosic.La raison du plus fouMODLE RHNANJournaliste au quotidien britannique TheGuardian, Aditya Chakrabortty proposeun quiz ses lecteurs (9 aot).Quel est le pays dvelopp qui a connula plus forte croissance des ingalitset du taux de pauvret au coursdes dernires annes (selon la trs srieuseOCDE [Organisation de cooprationet de dveloppement conomiques]) ?Laissez-moi deviner : vous hsitezentre le Royaume-Uni en dclinet les Etats-Unis daprs George W. Bush.Rat : il sagit dun pays de la zone euro.Et, dernier indice, les travailleursy peroivent certaines des rmunrationsles plus faibles dEurope occidentale.Facile, direz-vous : la Grce, le Portugalou lun de ces pays en proie la crisede leuro? Pas du tout : il sagitde lAllemagne.OPRATION DE CHARMELe quotidien francophone Wal Fadjrise penche sur loprationde sduction (conomiqueet diplomatique) que mne actuellementlInde en Afrique (22 aot).Dans le combat [des puissancesmergentes sur le continent noir],New Delhi nentend pas jouer les gurants.Ainsi, ce ne sont pas moins de 5 milliardsde dollars qui ont t prvus dans leurportefeuille pour le continent africain.Et ce dans des domaines aussi varisque le transport, les mines... Avec cettesomme, le Sngal compte bien tirerson pingle du jeu. Rcemment, au coursdune rencontre entre [le prsidentAbdoulaye] Wade et le premier ministreindien Manmohan Singh, ce dernier avaitannonc la mise la dispositiondu Sngal dun nancementde 75 milliards de francs CFA[prs de 115 millions deuros]pour la deuxime phasedu programme de mcanisationde lagriculture sngalaise. Avec pourcibles la valle du euve Sngalet la Casamance, deux zones de riziculture.FAUSSE BONNE IDELhebdomadaire britanniqueThe Economist suggre que les chefsdentreprise hsiteraient dsormais sous-traiter certaines activits,les inconvnients lemportant souventsur les bnces (30 juillet).Le mcanisme de la sous-traitance peutse dtraquer de mille et une faons.Il arrive que les socits exercentune telle pression sur leurs prestatairesque ces derniers nont dautre choixque de rogner sur la qualit; un problmeparticulirement aigu dans lindustrieautomobile, o une poigne dentreprisesimposent leurs conditions plusde quatre-vingt mille fabricants de picesdtaches. Parfois, les vendeurs promettentplus quils ne sont en mesure de fournir,de faon obtenir un contrat. ()Il arrive galement que des socitsafaiblissent leur stratgiedensemble en dlaissant, de faonpeu judicieuse, la responsabilitde certaines activits. Les socitsde service, par exemple, sous-traitentles plaintes des centres dappel trangers,et sinterrogent aprs cela sur les raisonspour lesquelles leurs clients les dtestent.UNE INDE CORROMPUEAlors que lancien ministre indiendes tlcommunications est accusdavoir organis le dtournement de28,5 milliards deuros, un militantapolitique, M. Anna Hazare,sest lanc dans une grve de la faim pourobtenir une lgislation anticorruption. Sonarrestation la mi-aot a suscit un telmoi populaire que le gouvernement a dle librer. Lditorialiste Shoma Chaudhuryregrette les erreurs du gouvernement(Tehelka, 27 aot).Chaque socit a besoin dun projetexaltant et de dirigeants forts pourmobiliser. Or ce gouvernement semblesans tte. Il semble navoir ni les motsni la politique pour se ressaisir,et il se laisse guider au l des vnements,en tablant sur le fait que les partisdopposition, eux-mmes en difcult,ne sont pas en mesure de menacerlectoralement son pouvoir.Vous souhaitez ragir lun de nos articles :Courrier des lecteurs,1, av. Stephen-Pichon 75013 Parisou [email protected] par la SA Le Monde diplomatique, socitanonymeavec directoire et conseil de surveillance. Actionnaires :Socit ditrice du Monde, Association GunterHolzmann,Les Amis du Monde diplomatique1, avenue Stephen-Pichon, 75013 ParisTl. : 01-53-94-96-01. 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Guido Westerwelle, ministredesafairestrangres,etnonsonex-col-lguedeladfense.Parailleurs,leLandlepluspeupldAllemagnenestpasleBade-Wurtemberg,maislaRhnanie-du-Nord-Westphalie.Dans larticle de Dominique Vidal Ceux quiparlentaunomdesJuifsdeFrance (juil-let 2011), les citations de Marianne et ActualitjuivetaientextraitesdulivredeSamuelGhiles-Meilhac,LeCRIF.DelaRsistancejuivelatentationdulobby,RobertLafont,Paris, 2011. Le Monde diplomatique AubagneDes journalistes et des collaborateurs duMonde diplomatique participeront auxconfrences et rencontres organises Aubagne du 8 au 15 octobre 2011, danslecadreduForummondiallocal Aubagne lheure du monde , dont lejournal est partenaire.La rdaction rencontrera les lecteurs, lesamedi 8 octobre, 16 heures, au thtremunicipal, lors dun dbat sur le thme :De WikiLeaks Al-Jazira, un nouvel ordremondial de linformation, suivi dun verredelamitiorganisaveclesAmis duMonde diplomatique. (Programme dispo-nible sur Aubagne.fr et dans notre suppl-ment paratre en octobre 2011.)ON TROUVAIT dj il y a dix ans desjournauxetdesformationspolitiques pour arguer que lesmesuresdaustritaggravaientlescrises,quelafiscalitdevaitcrterlesplushautsrevenus,quunetaxesurlestransactionsfinanciressimposaitsanstarder,queleurocomportaitunvicedeconstruction.Onentrouvait,certes,maisdesjournauxjugstroparchaquespourquedesrevuesdepressecondes-cendentlesciter,etdespartisconfins au rle de figurants du cinmadmocratique.Or,danslabatailleidologiquecommeauguichetdesbanques,lecrditvaauxpuissants.Pour que ces vues autrefois hrtiquesou biscornues simposent aux commen-tateurs, il adoncsuffiquedautres,plus lgitimes, les noncent. Leuroestauborddugouffre ,annonce M. Jacques Delors, ancienministre des finances, prsident de laCommission europenne de 1985 1994, concepteur avec M. Helmut KohletFranoisMitterrandduneunionconomique et montaire fonde surlalibrecirculationdescapitaux.Quelques mois plus tt, tel Pancho Villaou Ravachol, il vituprait la glouton-neriedespuissants : Entendrelesconseillers des banques nous intimerlordrederduirelesdficitspublicspuis, lorsque cela est en bonne voie,salarmerdelapannedecroissancequi pourrait en rsulter est une doublepeineinsupportable (1) ! Fustigera-t-il demain limprvoyance des archi-tectes de lEurope?Dans sa colre, M. Delors a t rejointpar une autre indigne : MmeChristineLagarde. Devenue directrice gnraledu Fonds montaire international (FMI),lancienne ministre des finances choisiepar M. Nicolas Sarkozy pour diminuer la fois les impts des plus riches etle nombre de fonctionnaires estime prsentque lesrductionsdedpenses ne suffiront pas, les recettesdoiventgalementaugmenter,etlepremierchoixdoitportersurlesmesuresquiaffectentlemoinslademande .Ilyaquelquesmois,MmeLagarde se souciait de devancerles attentes des marchs; elle conclutdornavant que leurs dsirs sont tropcontradictoires pour quon puisse lessatisfaire. Les marchs peuvent trede deux avis : sils dsapprouvent unedettepubliqueleveetpeuventsaluer une forte consolidation budg-taire , ils apprcient encore moins unecroissance faible ou ngative (2). Dsarmerlesmarchs et fairepayer les riches guraient galementsur la liste des propositions que lon neformulait plus depuis la chute du murde Berlin sans encourir le soupon desimplisme et de populisme. Hierjuge irralisable ou gauchiste, lataxe europenne sur les transactionsnancires compte dsormais M. Sar -kozy et la chancelire allemande AngelaMerkelaunombredesesferventspartisans. Larme scale, nous jurait-on, dcourageait linvestissement (donclemploi)etprovoquaitlafuitedescapitaux. Las, un spculateur, deuximefortune du pays le plus riche du monde,rclame un relvement sensible de sontaux dimposition, infrieur selon lui celui de ses employs. Et M. WarrenBuffett dajouter : Jai travaill avecdes investisseurs pendant soixante anset je nai encore vu personne sabs-tenirdunplacementraisonnablecause du taux dimposition sur les plus-values potentielles. Les gens inves-tissent pour gagner de largent et lafiscalitnelesajamaiseffrays. Comme cela vient dAmrique, lidesduit aussitt sur le Vieux ContinentunpatronprisdepublicitcommeM. Maurice Lvy, prsident-directeurgnral (PDG) de Publicis, et dautresquecertainsaigrissuspectaientderapacit : devanant le boulet scal,MmeLiliane Bettencourt ainsi que lesPDG de la Socit gnrale et de Totalappellent une contribution excep-tionnelle pour les plus favoriss (3).DansleconteclbredAntoine de Saint-Exupry, le lecteur apprendque la plante du Petit Prince, last- rode B 612, avait t repre par unastronometurcauquelnulneprtaattention jusquau jour o il prsentasa dcouverte habill leuropenne.En conomie, le costume de la respec-tabilit porte dautres rayures : il fautstre beaucoup tromp (ou beaucoupenrichi) pour esprer se faire entendre.PIERRE RIMBERT.(1) Le Monde, 8 dcembre 2010.(2) Le Figaro, Paris, 16 aot 2011.(3) The New York Times, 14 aot 2011 ; LeNouvel Observateur, Paris, 25 aot 2011.COURRIERDES LECTEURS3LE MONDE diplomatique SEPTEMBRE 2011CEUX QUI NE VOTENT PLUS ET POURQUOILes urnes et le peupleoui a recueilli des scores de 80 %, contre30 % Aubervilliers.Et cest bien un phnomne dabs-tention quasi collective que sont aujour-dhui confronts les quartiers populaires.Dans le quartier des Cosmonautes, Saint-Denis, le taux de participation moyen estpass de 80 % au milieu des annes 1980 50 % aujourdhui, soit dix vingt pointssous la moyenne nationale (1). Une sgr-gation lectorale redouble dsormais lasgrgation sociale et spatiale.Les gens votent en groupe (2). Ausein de la grande bourgeoisie, par exemple,les liens de sociabilit nous autour demanifestationsmondaines,despacesrsidentiels et de pratiques de loisirs spci-fiques, dcrits par les sociologues MichelPinon et Monique Pinon-Charlot commeun collectivisme pratique (3) , entre-tiennent le sentiment de cohsion qui est lesupport la fois de la forte mobilisationlectorale et du voteconservateur.Pour autant, le sentiment dappartenance un groupe social soud par un ensembledintrts communs est le plus souventredevable du travail dducation et denca-drementdereprsentantspolitiques,syndicaux et associatifs. La rgle vaut aussipour les classes moyennes intellectuelles, quifigurent parmi les groupes les plus diplms,et donc a priori les plus disposs sint-resser la politique et se rendre aux urnes.En 2002, la participation moyenne desdiplms des deuxime et troisime cyclesdu suprieur tait de 80 %, et seuls 5 %dentre eux sabstenaient tous les scrutins,alors que chez les sans-diplme ces tauxtaient respectivement de 62 % et 20 % (4).PARBLAI SEMAGNI N*La perspective de llection prsidentielle de 2012 va multi-plier les sondages mesurant les chances respectives dechaque candidat. Programmes et petites phrases serontdissqus par les commentateurs politiques. Mais ceux-ciseront moins diserts sur labstention, qui perturbe le fonc-tionnement du systme reprsentatifdo les gouvernantstirent leur lgitimit.TOUR TOUR prsents comme aber-rants ou pathologiques , les compor-tements abstentionnistes contredisent lamythologie de la dmocratie reprsen tative.Laquelle voit dans la participation lecto-rale lacte fondateur permettant chaquecitoyen dexprimer ses opinions et sesprfrences politiques.Mais le vote ne rsulte dune valuationdes mrites respectifs des programmes etdesidologiesquepouruneinf imeminorit dlecteurs. Plus encore, lintrtconstant pour la politique est trs inga-lement distribu selon les groupes sociaux,les plus dmunis culturellement et socia-lement tant dpossds des moyens deconnatrelefonctionnementdujeupolitique et den matriser les dimensionspratiques.En France, les taux de participationlectoralesonttoutefoisrestston-namment stables et levs (entre 70 % et80 %)entre1848etledbutdesannes 1980 date partir de laquelle ilsdclinent rgulirement. Cet apparentparadoxe peut tre rsolu si lon considreque les lecteurs ne sont pas des individusisolsdontlesprfrencespolitiquesseraientdcouplesdeleursautresexpriences sociales. Ainsi, les mobilisa-tions lectorales sont collectives, et cestlappartenance un groupe social quidtermine trs largement la participation un scrutin, ainsi que les choix lectoraux.Lors de consultations aux enjeux parti-culirement clivants, comme le rfrendumsur le trait constitutionnel europen (TCE)de 2005, les rsultats pousent parfois lespolarisations sociales de faon exemplaire :dans le 16earrondissement de Paris, ledoute au moins autant sur le discrdit dunprsidentquiprtendaitramenerleslecteurs frontistes vers lUMP, au besoinen sappropriant les thmatiques les plusdroitires portes par le FN, et qui, cefaisant, a contribu les lgitimer.Laccroissement des taux dabstentionau niveau national depuis trente ans nesignifie pas quaugmente constamment lenombre de ceux qui ne prtent aucuneattentionauxenjeuxpolitiquesetdemeurent durablement lcart du jeulectoral. Labstention peut, par exemple,constituer un vritable choix politique pourdes spectateurs informs des questionspolitiques mais dtachs de la comptitionlectorale. En outre, les Franais votentde faon de plus en plus intermittente, etles lecteurs irrguliers semblent dsormaisplus nombreux que les participation-nistes systmatiques (10).Fin des identits collectives(1) Cline Braconnier et Jean-Yves Dormagen,La Dmocratie de labstention, Gallimard, Paris, 2007.(2) Paul Lazarsfeld, The Peoples Choice, Duell,Sloan and Pearce, New York, 1944.(3) Michel Pinon et Monique Pinon-Charlot,Grandes fortunes. Dynasties familiales et formes derichesse en France (1996), Payot, Paris, 2006.(4) Franois Clanch, La participation lectoraleau printemps 2002, Insee Premire, no877, Paris,janvier 2003.(5) Pierre Bourdieu, La reprsentation politique,Actes de la recherche en sciences sociales, no36-37,Paris, fvrier-mars 1981.(6) Cf. le sondage ralis par lIFOP les 20 et21 avril 2011, concluant quen 2012 llectorat ouvriersurledveloppementdeconvictionsidologiquesouduneconscienceproprement politique. La disparition desstructures qui entretenaient autrefois dansles quartiers ouvriers la politisation deslieux de vie, de loisir et de travail, et quiy assuraient des taux de participationsuprieurs la moyenne nationale dansles annes 1960 et 1970, a donc entranune forte hausse de labstention.Dans la cit des Cosmonautes, la celluledu PCF, alors trs active, a priclit audbut des annes 1990, mesure que ladsindustrialisation de Saint-Denis, lapression du chmage, le dveloppementde la sous-traitance et de la concurrenceentre intrimaires et salaris empchaientlaconstitutiondesolidaritsprofes-sionnelles et dtournaient de lactivitsyndicale.Aucune identit collective ntant plusreprsente, ni a fortiori mobilisable dansle quartier, les habitants ont t renvoys la prcarisation de leurs conditionsdexistence et de leur statut sociocono-mique, et finalement leur indiffrencepour un univers politique qui choue rsoudre leurs difficults quotidienneset dans lequel ils ne se sentent pas fonds intervenir. Aux Cosmonautes, 20 % desrsidents sont inscrits dans le bureau devote dun autre quartier, et 28 % desinscrits ne rsident pas dans le quartier.Or cest parmi ces mal inscrits que serecrutent lessentiel des abstentionnisteset des lecteurs les plus intermittents. En outre, 25 % des lecteurs potentielsne figurent pas sur les listes lectorales,auxquels sajoutent les trangers privsdu droit de vote. Si bien que llectorateffectif ne reprsente plus quun tiers de la population en ge de participer un scrutin.Souventprsentcommeuneautrepathologie politique, le vote en faveurdu Front national (FN) renvoie davantagelamaniredontcertainescatgoriessociales conjurent dans les urnes leur dclas-sement collectif. Ce choix lectoral touchesans doute certaines fractions du mondeouvrier mais il nest en aucun cas dominantdans lensemble du groupe, contrairementau fantasme inlassablement rabch depuisvingt-cinq ans du gaucho-lepnisme,selon lequel le vote ouvrier se serait dplacduPCFversleFN (6).Dunepart,laplupart des ouvriers qui votent aujourdhuipour le FN sont danciens lecteurs dedroite radicaliss; dautre part, le premierparti ouvrier est celui de labstention.Loindtrelapanagedelaclasseouvrire, le vote FN attire des groupeshtrognes qui connaissent une dgra-dation ou une dstabilisation de leurs condi-tions de travail et dexistence (7) : retraitscontraints de cohabiter dans des logementssociaux avec des immigrs leur renvoyantune image de prcarit laquelle ils souhai-taient chapper ; patrons de trs petitesentreprises ou artisans rencontrant desdifficults financires du fait de la crise;fractions dclinantes de la bourgeoisie quipeinent maintenir leur hritage et dontle mode de vie et les croyances se trouventmarginaliss; membres des petites classesmoyennessalaries,propritairesdepavillons mitoyens en banlieue parisienne,voyantlesreprsentantsdesclassesmoyennes suprieures quitter leur quartierpour tre peu peu remplacs par unecommunaut dimmigrs perturbant unentre-soi petit-bourgeois qui symbolisaitleur ascension sociale (8).Pourdesraisonsstructurellesouconjoncturelles diffrentes, tous peuventtrouver dans loffre politique du FN unevoie dexpression de leur ressentiment etde leur apprhension de la disqualificationsociale, projeter dans les mots dordreanti-immigrs la dfense de leur imagedeux-mmes et manifester leur dfianceenvers des partis de gouvernement qui ontrenonc parler en leur nom ou chou satisfaire leurs intrts spcifiques. Peureprsent dans les institutions rpubli-caines, se prsentant comme rprouv parles principaux acteurs politiques, le FNagrge des mcontentements htrognes.De fait, son lectorat est trs instable :alors que, depuis vingt ans, plus dun quartdes inscrits auraient dj port leur suffragesur un candidat frontiste, ses lecteursconstants reprsentent seulement 3 % desinscrits (9). On ne peut donc rduire levote en faveur du FN au populisme, ni lautoritarismeoulaxnophobiesupposs de son lectorat pas plus dail-leurs quon ne peut voir dans la gauchi-sation rcente du discours de sa nouvelleprsidente les raisons de sa popularit(sondagire) actuelle. Celle-ci repose sansBRIAN COOPER. Visions ofFirsthand Knowledge (Visions du savoir de premire main), 2008* Chercheur en science politique, universit Paris-Ouest-Nanterre.Aprs avoir largement contribu ladstructuration du groupe ouvrier, et donc la monte de labstention en son sein,la mise en uvre continue de politiquesde repli de lEtat et les discours dfaitistesqui les ont accompagnes ont nourri lamonte de cet abstentionnisme.La suppose impuissance des dirigeantspolitiques face aux exigences des marchsstrilisegalementlesprotestationspopulaires, quelles sexpriment dans larueaucoursdemouvementssociauxdurables et massifs (dfense des retraitesen 2003 et en 2010) ou dans les urnes(rfrendum sur le TCE en 2005). Dansles deux cas, mene au forceps, la rformenolibrale brche la mythologie de ladmocratie : pourquoi voter sil sagitseulement de confrer aux gouvernantslalgitimitdegouvernercommeilslentendent ?plbisciterait MmeMarine Le Pen (Le Figaro, Paris,24 avril 2011).(7) Jacqueline Blondel et Bernard Lacroix, Pourquoivotent-ils Front national ? , dans Nonna Mayer etPascal Perrineau (sous la dir. de), Le Front national dcouvert (1989), Presses de la FNSP, Paris, 1996.(8) Marie Cartier, Isabelle Coutant, Olivier Mascletet Yasmine Siblot, La France des petits-moyens .Enqute sur une banlieue pavillonnaire, La Dcou-verte, Paris, 2008.(9) Patrick Lehingue, Lobjectivation statistiquedes lectorats : que savons-nous des lecteurs du FN?,dans Jacques Lagroye (sous la dir. de), La Politisation,Belin, Paris, 2003.(10) Franois Hran, Les intermittents du vote ,Insee Premire, no546, septembre 1997.LES entretiens que nous avons mensauprs denseignants adhrents au Partisocialiste (PS) entre 2004 et 2010 attes-tentlerlefondamentaldutravaildemobilisationpolitique.Alorsquelaplupart dentre eux ne se souviennent passtre abstenus, ni avoir vot sauf trsexceptionnellement pour un autre partique le PS, ils ne justifient pas leur fid-lit lectorale en se rfrant une quel-conque morale civique , ni en discou-rant sur les mrites compars de la pensede Jaurs, Lnine et de Gaulle, pas plusque sur ceux des programmes du PS, duParti communiste franais (PCF) et delUnion pour un mouvement populaire(UMP). Ils invoquent plutt un attache-ment la gauche (li leur expriencepratique des ingalits) et un intrt pourla politique n de stimulations incessantesdurant leurs tudes linstitut universi-taire de formation des matres (IUFM) ouau contact de militants appartenant laconstellation dorganisations du mondeenseignant. Ils relatent aussi les momentsdeffervescencequeconstituentlescampagnes lectorales sur leur lieu detravail, dans leur quartier ou dans les asso-ciations quils frquentent. Lesquels leurinterdisent quasiment de se tenir lcart.Pour les classes domines, la politiqueconstitue un jeu sotrique sur lequel estport un regard empreint de distance etde scepticisme narquois. Lidentification un camp politique repose avant toutsur une dlgation globale et totale parlaquelle les plus dmunis accordent enbloc au parti de leur choix une sorte decrdit illimit (5) . Et non pas uniquement> RELATON8 NTERNATONALE8> DEFEN8E, 8ECURTE ET GE8TON DE CR8E> GEOECONOME ET NTELLGENCE 8TRATEGOUE> EUROPEAN AFFAR8> COOPERATON NTERNATONALE> METER8 DE L'HUMANTAREIkIS SU' - LnSLlCnLMLn1 SuL8lLu8 Ln 8LLA1lCnS ln1L8nA1lCnALLSLLabllssemenL prlve d'enselgnemenL superleur Lechnlqueuecouvrez les dlplmes de l'l8lS surwww.|r|s-france.orgkeoselqoemeots . 01.5J.27.60.60DIPLMES ACCESSIBLES BAC +3 ET BAC +45dpourvus de signification. Le mot tantla plus petite unit de sens, un apprentissagede la lecture fond sur la reconnaissancevisuelle des mots offre en effet aux lvesla possibilit dassocier systmatiquementdchiffrage et comprhension de lcrit.Mme si les ouvrages prnant la globalepure (ou mthode idovisuelle) ont connu ungrand retentissement dans les annes 1970,il ne semble pas que celle-ci soit jamaisdevenue majoritaire. Sans doute parcequelle se heurtait une impossibilitpratique : toute dmarche globale doit eneffet combiner la mmorisation du plusgrand nombre possible de mots crits etla lecture devinette, cest--dire liden-tif icationdesmotsnonreconnusensappuyant sur le contexte de la phrase,etlecaschantsurlaconnaissanceacquise dune partie du mot concern (parexempledevinerbeaut quandonreconnatbeau).Alusage,ilsesttoutefois avr que, mme en combinantmmorisation de mots voire de phrasesentires et lecture devinette, les rsultatstaient trs peu concluants, parfois mmecatastrophiques. Au point que la globalea t accuse de lextension des dyslexieset autres dysorthographies (3).Ce constat ne sest pas traduit par unretour la syllabique, mais par une monteen puissance des mthodes mixtes, plusrespectueuses du principe lire, cestcomprendre . Elles combinent en effet,dans des proportions et selon des modalitsvariables dun manuel lautre, ltudedes relations entre phonmes et graphmeset les pratiques de la globale, identifi-cation visuelle du mot crit et lecturedevinette.Ltude du code grapho-phonologiqueamliore sensiblement lefficacit de lapdagogie. Dautant plus si, comme lesenqutes internationales le montrent, ellesopre ds les dbuts de lapprentissageet de faon plus systmatique. A la diff-rence de la syllabique, ltude dans lesmthodes mixtes part en gnral non pasdes graphmes quon apprend dchiffrer,mais des phonmes dont on identifie lestranscriptions possibles. Or prendre appuisur la langue parle permet lapprentilecteur de ne jamais quitter le registre dusens.Ilaapprisparler ;ilaimeleshistoires ; il a pris lhabitude ds la mater-nelle dcouter les rcits quon lui raconte lcole. Lide est donc dutiliser ceshistoires pour en extraire les phrases, puisles mots, et enfin les phonmes contenusdans ces mots dont on identifiera alors latranscription graphique.Le matre se repose ainsi sur ce quellve connat et aime, la langue parleet les rcits, pour lamener en douceur ltude des correspondances entre sons etsignes crits. Ecoute le son a que tuentendsdanslemotchat,etregardecomment il scrit : cest la lettre a.Maintenant, regarde ces lettres, ces mots,ces phrases, et retrouve la lettre a. Cestcemomentquilrecourtauxprocds de la globale, en confrontantlapprenti lecteur des mots dont il neconnat pas tous les graphmes (le motchat, en loccurrence) et quil doit identifierglobalement ou deviner partir des lettresou des syllabes quil a apprises, du sensde lhistoire quon lui a raconte, de lillus-tration du manuel.Lemondeactuelninciteguresacrifier lun de ces modles au profit delautre.Linsertiondansunesocitdmocratique et la matrise de technologiesdifficiles apprhender supposent la trans-mission lensemble des jeunes gnra-tions dune culture commune, gnrale ettechnologique de haut niveau, et donc lra-dication des ingalits daccs aux savoirs.Simultanment,latransformationdesrapports familiaux et du statut de lenfant,la volont lgitime dassurer lmanci-pation et lpanouissement individuelsds le plus jeune ge, justifient la recherchedeformesdducationscolaireen(3) Cf. par exemple Colette Ouzilou, Dyslexie, unevraie-fausse pidmie, Presses de la Renaissance,Paris, 2001.(4) Connaissances en franais et en calcul deslves des annes 1920 et daujourdhui. Comparaison partir des preuves du certificat dtudes primaires,Les Dossiers dducation et formations, ministre delducation nationale, no62, Paris, 1996.LE MONDE diplomatique SEPTEMBRE 20114MTHODES EN QUESTION,ENSEIGNANTS SOUS PRESSIONControverses sur lapprentissage de la lecturelmentaireatenclencheparunerforme de lenseignement du franais.Cette dernire a ouvert grand la porte uneautre mthode, dite globale, alors quelapprentissage de la lecture tait rgi jusque-l par les instructions officielles de 1923,qui recommandaient fermement lemploide la mthode syllabique.Cette rforme a plac la question de lalecture au cur des discussions pdago-giques. Tout le monde se sent peu ou prouconcern, et les professionnels de la lecture,didacticiens et matres de cours prpara-toire (CP) ne sont pas les seuls affirmerleur choix. Bien au-del de leurs rangs,dans le monde de lenseignement et de lapdagogie, tre moderne, intelligent etprogressiste, cest dfendre la globale etles mthodes mixtes qui en drivent lespartisans de la syllabique tant volontiersqualifis de passistes, voire de raction-naires. Ainsi, en janvier 2006, lorsque leministre de lducation nationale GillesdeRobienproposederevaloriserlamthode syllabique, un manifeste, signnotamment par lAssociation franaisepour la lecture (AFL), le Groupe franaisdducation nouvelle (GFEN) et lInstitutcoopratif de lcole moderne (ICEM),dnonce la propagation dune idologiepolitique crasant tout espoir dmanci-pationpossibleparlducation . Ilpoursuit : Des mthodes dapprentissageolenfantestchercheurcellesolenfant est dress, le choix idologique[du ministre] est limpide : lui refuser dsle plus jeune ge de penser, lui ter le dsirdequestionner,decomprendre,deconnatre, lui imposer une obissancepassive en lenfermant dabord dans desexercices rptitifs et mimtiques Au-del de lapprentissage de la lecture, cestbien la volont dagir sur les capacitsrflexivesetcomplexesdelacompr-hension du monde de toute une jeunesse! SEPTEMBRE 2011 LE MONDE diplomatiquePARJEAN- PI ERRETERRAI L*EnvisiteHelsinkile16aotdernier,leministredelducationnationaleLucChatelaattribules succs du systme scolaire finlandais sa moder-nit,lagrandeautonomiedesestabli s -sementsetaumodederecrutementdesesprofes-seurs.Desobservationscensescautionnerleschoixfranais,notammentenmatiredecoupesbudgtaires(lirelarticleci-dessous).Leministrene sest en revanche pas souci des mthodes dap-prentissage de la lecture. Lesquelles occupent pour-tant une place centrale dans la russite des lves etla lutte contre la perptuation des ingalits.OLIVIER CORPET. 3083 P 26 V , de la srie Analfabets , 2003 6Y6LF 'Fh5FIhFMFh IFL0MkIF5FFkIFks Cycledepe|leclicnnemenl |se|vouxd|p|omuIos, IoncI|onnu|ros |nIornuI|onuux,mombros du corps consu|u|ro, oII|c|ors oIcudros supr|ours.s Cycle de ccnl|ences el sminoi|es (mo|dimolin el me|c|edi op|es-midi), vcyogedludes.s lc|molicnsonclicnnepo| un HusIrod'FIudos |p|omuI|quos 8upr|ouros.54, ovenue Ho|ceou s J5008 lARlS s Il : +33 (0)1 4J 20 5J 4J6enIre d'FI0desIIomdIIg0es eI 5IrdIIg0es0|gonisme dcl du slolul ccnsullolil oup|esdu Ccnseil Eccncmique el Scciol des lolicns unieswww.oeds-|r.oom - oeds2@wonodoo.|r www.hei-hep.oom - oon|oo|@hei-hep.oomhd0Ies FI0des InIerndIIondIeshd0Ies FI0des FoIIIIg0eslEl-lEl scnl memb|es de l "Acodemic Ccuncilcn lhe uniled lolicns Syslem" 8k6hFL0k5 en 3 ons opres le 8A0 :s Relolicns lnle|nolicnoles,s Sciences lcliliques. Mk5FkF5 en 1 on opres un 8A0 +3/+4 :s Alloi|es lnle|nolicnoles el 0velcppemenl,s Ccmmunicolicn lclilique el Rseoux,s lcnclicn lublique lnle|nolicnole,s 0eslicn des l|cg|ommes lumoniloi|es,s Eludes Sl|olgiques el lcliliques de 0lense.les diplmes scnl occ|dils po| l"Eu|cpeon Acc|edilolicn8co|d cl lighe| Educolicn Schccls"konIro |o 3 ocIobro 2011 o novombro 2011 I|n ju|n 2012Pourquoi veulent-ilscasser lcole ?EN septembre 2007, peine luprsident de la Rpublique, M. NicolasSarkozy avait exprim dans une Lettreaux ducateursson souhait dune coleavec moins de professeurs. Et, pourune fois, la promesse a t tenue, aveclasuppressiondeseizemillepostesdenseignant en 2011 et en 2012, ce quidevraitconduireladestructiondequatre-vingt mille postes en cinq ans danslenseignement primaire et secondaire.Cette vritable saigne suscite colre etinquitude chez les enseignants, maisaussichezlesparentsdlveset,dsormais, chez les maires, y comprisceuxdelUnionpourunmouvementpopulaire(UMP).Lannoncedelafermeture de mille cinq cents classes duprimaire la rentre 2011 a soulev lindi-gnation : Trop cest trop, on ne peut pluscontinuer supprimer des postes danslenseignement (1) ! , sest ainsi exclamM. Jean-Pierre Masclet, le prsident UMPde lAssociation des maires du Nord.Mme lenseignement priv, pourtantmoinstouchenproportionparcescoupesdansleseffectifs,semetdonner de la voix. M. Eric de Labarre,secrtairegnraldelenseignementcatholique, estime que cette politiqueconduit enseignement public et ensei-gnement priv dans une impasse en 2011et un blocage en 2012 (2) . Inspecteursdacadmie chahuts lors des conseilsdpartementaux de lducation nationale,carte scolaire refuse par des lus detous bords, praux occups de jour etparfois de nuit, kermesses transformesen assembles gnrales, banderolesaccrochessurlesfaadesdenombreuses coles : le printemps 2011aconnuunejacqueriescolairedanstoutes les rgions de France. On ne peut pas concevoir ldu-cation des enfants selon un simple rapportcomptable : quand ce ne sont plus lessyndicats denseignants qui le disent, maisles parents, cest--dire des lecteurs, lachose devient plus risque pour le gouver-nement. Lcole primaire nest pas la seuletouche. Les effectifs en sixime vontmonterenchedansbeaucoupdecollges ds la rentre 2011; un documentdu ministre dat de mai 2010 appelaitles recteurs identier les leviers def-cience (sic) et les incitait calculer lenombre de classes conomises silsparvenaient augmenter les effectifs deun cinq lves (3).Aprs la suppression des rseauxdaides spcialises aux lves en dif-cult (Rased) et de lanne de formationdes nouveaux enseignants stagiaires,aprs la quasi-liquidation de la scolari-sation des enfants de moins de 3 ans, lapoursuite dune telle politique est de plusen plus insupportable pour les personnelset les usagers de lducation nationale.Leurs mobilisations semblent avoir nipar payer : le 21 juin dernier, M. Sarkozyaannonclegeldesfermeturesdeclasses horsdmographiedansleprimairepour2012.Lapprochedellection prsidentielle nest sans doutepas trangre ce changement dorien-tationqui,dailleurs,nesufrapaseffacer le bilan de cinq ans de sarko-zysme scolaire.Lauraatrouvlepostedesesrves; Julien, lui, a trouv un poste lahauteurdesesambitions .Lacampagnepublicitairepourlemtierdenseignant, par voie de presse et grands frais (1,35 million deuros), duministre de lducation nationale auprintemps 2011 ne dit pas seulement lavision sexiste dun monde social danslequel les femmes ont des rves etleshommesdel ambition.Elleconstitue aussi un parfait dni de ralitde la part dun gouvernement dcid dstabiliser la condition professorale parla gnralisation de la prcarit (4).Le gel du point dindice des fonction-naires pendant trois ans conduira unenouvelle diminution de 5 10 % de leurpouvoir dachat, sans compter les effetsde laugmentation du taux de cotisationlaretraite.Cetappauvrissementdlibrnestcertespasnouveau,puisquil a commenc avec les mesuresde dsindexation des traitements parrapport lvolution des prix adoptesparM. JacquesDelorsaudbutdesannes1980,maisilatendancesacclreretsaccentuercesdernires annes : selon les calculs desconomistes Btissam Bouzidi, TouriaJaaidaneetRobertGary-Bobo, lavaleurdescarriresdesagrgsdusecondaireetdesprofesseursdesuniversits () a baiss denviron 20 %entre 1981 et 2004 (5) .On comprend mieux alors le dclinrapidedelattractivitdumtier,quaucune campagne de propagandepublicitaire nenrayera. Un jeune certicommenceavecunsalairenetde1500 eurosparmois,pournirsacarrire, trente quarante ans plus tard,avec moins de 3000 euros mensuels; unmatre de confrences, aprs avoir suiviunparcoursparticulirementslectifaujourdhui, dbute avec un traitementde 1700 euros par mois et peut espreratteindre autour de 3500 euros la veillede la retraite, soit le salaire dun dbutant la sortie dune cole de commerce debonne rputation.Et le mtier lui-mme est rendu deplus en plus difcile, complexe, usant,anxiogne. La dgradation de limage dela profession enseignante se fait sentirauxconcoursderecrutement,olenombre de candidats seffondre depuisune dizaine dannes dans les disciplinesscientiques, mais galement en anglaisou en lettres classiques. En 2011, lescandidatsenmathmatiquessontpresque aussi nombreux que les postesau concours. La directrice des ressourceshumainesduministre,MmeJosetteThophile, a d piteusement admettreque prs de mille places aux concours ducerticat daptitude au professorat delenseignement du second degr (capes)externe navaient pu tre pourvues cetteanne (6). Et, pour pourvoir les postesvacants, le ministre recrute toujours plusdenseignants vacataires, pays lheure,qui nont souvent reu aucune formationadapte et qui ne bncient pas de lammeprotectionsocialequelesfonctionnaires.Lesrcentesrformesnontfaitquacclrer une tendance longue quivisetransformerprofondmentlefonctionnement de lcole, ses modesdergulationetsesobjectifs.MaisM. Sarkozy a choisi la manire forte, endtriorant dlibrment les conditionsdenseignement et dapprentissage pourmieuximposersesprojets.LactuelsecrtairedEtatchargdulogementBenoist Apparu avait vendu la mche lorsdun chat surlesiteduMonde,le20 mai 2009. Il stait alors dit convaincuque la suppression de postes obliger [ait]linstitution sinterroger sur elle-mmeet se rformer . Seule la baisse desmoyens obligera linstitution bouger ,avait-il ajout.Aprs la mise en route de luniversitentreprise, recommande par lUnioneuropenne,cestautourdelensei-gnement primaire et secondaire de sesoumettre la norme de lemployabilit,de lefcacit, de la performance (7). Dansloptique des rformateurs actuels, tout,jusqu la pdagogie, doit se calquer surle monde conomique, car lcole ne faitriendautrequeproduirele capitalhumain et les comptences de basequi lui sont ncessaires. Cette logiquenormative, suppose faire passer lef-cacit avant tout, est aujourdhui portepar une hirarchie intermdiaire de plusen plus centralise et cense appliquerrigoureusementtouteslesrformes,mesures et consignes reues den haut.Le temps le plus noir de lautoritarismedans lenseignement semble revenu. Alinstar du militaire, le professeur devra-t-il obir en tout au gouvernement, repr-sent par un inspecteur dacadmie, unprincipal ou un proviseur. A cet gard, laligne de lUMP est claire : la restaurationde lautorit, cest dabord celle de lahirarchie sur les personnels. Elle a tafrmemartialementparM. GrardLonguet, alors prsident du groupe UMPau Snat, lors du Rendez-vous pour laFrance du 3 novembre 2010 : Il faut unpatron qui puisse rentrer dans les classeset exltrer les enseignants en rupture avecle projet de ltablissement. Cenouvelespritdisciplinairesetraduit par labandon des objectifs gali-taires, jugs contre-productifs. Lcoledoit se dlester de tout ce qui diminue sonrendement, commencer par les lvesperturbateurs, qui seront exltrs versdes tablissements de rinsertion scolaire(ERS), dont les premires expriencesont pourtant t catastrophiques (8). Pourladroite,quiamaldigrlecollgeunique, lgalit nest plus une nalit.Se dbarrasser au plus vite des lves lesmoins performants en les dirigeant verslapprentissage la n de la cinquimepourrait tre une solution tentante. Lasuppressiondelacartescolairedoitpermettrelaconstitutiondtablisse-ments dexcellence qui draineront lesmeilleurs.Quantauxbourses,plusquestiondelesdistribuerautomati-quement en fonction de la situation desparents : elles doivent tre accordesaux lves certes pauvres mais aussimritants. Un pas de plus est franchiquand les descendants dimmigrs sontaccuss de faire baisser les rsultats.Leministredelintrieur,M. ClaudeGuant,napashsitdclarerle25 mai 2011 sur Europe 1, et ceci encontradictionavectouslestravauxsrieux sur la question, que les deuxtiers des checs scolaires, cest lchecdenfants dimmigrs. Un propos viterelayparlarectricedelacadmiedOrlans, MmeMarie Reynier, qui afrmaitquelques jours plus tard : Si on enlvedesstatistiqueslesenfantsissusdelimmigration, nos rsultats ne sont passi mauvais ni si diffrents de ceux despays europens (9). Pour dnir un projet progressiste, ilimporte de comprendre enn que noussommes entrs dans un ge indit delinstitution : celui de la nouvelle colecapitaliste.CHRISTIANLAVAL.PARCHRI STI ANLAVAL** Sociologue, coauteur de La Nouvelle Ecole capita-liste, La Dcouverte, Paris, 2011. Laura a trouvle poste de ses rves Exfiltrerles professeursrfractairesLgalit nestplus une finalit(1) Denis Peiron, Pour un maire, une classe quiferme, cest toujours un drame, La Croix, Paris,27 mai 2011.(2) Isabelle Ficek, Suppressions de postes : fin denon-recevoir de Chatel au priv, Les Echos, Paris,21 avril 2011.(3) Schma demplois 2011-2013, ministre delducation nationale, 5 mai 2010.(4) Lire Gilles Balbastre, Feu sur les enseignants,Le Monde diplomatique, octobre 2010.(5) Btissam Bouzidi, Touria Jaaidane et Robert Gary-Bobo, Les traitements des enseignants franais, 1960-2004 : la voie de la dmoralisation?, Revue dco-nomie politique, Paris, mai-juin 2007.(6) Des centaines de postes denseignant nonpourvus, faute de candidats admis , 12 juillet 2011,www.lemonde.fr(7) Lire Nico Hirtt, En Europe, les comptencescontre le savoir , Le Monde diplomatique, octobre 2010.(8)Cf.PierreDuquesne, ERSdeNanterre,chronique dun chec annonc, LHumanit, Saint-Denis, 18 juillet 2011.(9)Cetteacadmiemanquedambition ,LaNouvelle Rpublique, Tours, 17 juin 2011.adquation avec ces volutions historiques.Peut-on semployer concilier ces deuxmodles afin dentreprendre lindispen-sable rexamen de la faon dont les enfantssont introduits la culture crite?JEAN-PIERRETERRAIL.GlossaireEcole unique : rsultat de la rforme institutionnelle qui, du dcretBerthoin de 1959 la rforme Haby en 1975, met en place le collgeunique et organise laccs de tous les lves au secondaire. Cetterforme runit ainsi les deux rseaux de scolarisation, primaire et secon-daire, qui restaient trs cloisonns sous la IIIeet la IVeRpublique; elleinternalise une slection sociale qui soprait jusque-l lextrieur delcole et met les lves en concurrence via un dispositif de notation,de classement hirarchique et dorientation.Code grapho-phonologique : systme des relations entre les sonsde la langue et les signes graphiques (lettres et syllabes) qui les repr-sentent.Mthode syllabique : enseigne le dchiffrage des signes crits (lesgraphmes) qui transcrivent les sons lmentaires (phonmes) de lalangue. Cet apprentissage de la prononciation des lettres et de leurscombinaisons en syllabes sopre de faon progressive : llve nestjamais appel dchiffrer un mot dont il ne connat pas les graphmesqui le composent.Mthode globale pure : apprend lire par la reconnaissance visuelleglobale des mots, en contournant lapprentissage du code grapho-phonologique. Cette mthode offre llve la possibilit dassociersystmatiquement dchiffrage et comprhension de lcrit. La globaleentend faire appel son intrt et son investissement autonome.Mthode mixte : la globale pure stant avre inapplicable, la mixtea rintroduit lapprentissage du code grapho-phonologique. Mais ledchiffrage sopre en partant du son et non comme cest le casdans la syllabique du signe crit. Il laisse subsister une bonne partde lecture devinette en confrontant constamment les lves desmots dont ils nont appris dchiffrer que telle lettre ou telle syllabe :ils doivent deviner le reste en sappuyant sur le contexte de la phrase,lillustration du manuel, leur connaissance familire du mot.De linstituteur lorthophoniste* Chercheur, membre du Groupe de recherches surla dmocratisation scolaire (GRDS).(1) Note dinformation no08.38, ministre de ldu-cation nationale, dcembre 2008.(2) Instituteur et pdagogue, Clestin Freinet (1896-1966) prnait une cole cooprative favorisant la libreexpression des lves et leur pleine participation lagestion de ltablissement. Ses travaux ont connu unretentissement important et continuent faire rfrencedans les milieux pdagogiques.MALGR une amorce rcente de retourlasyllabique,lesmthodesmixtesdemeurent utilises par environ 90 % desmatres de lcole publique. Commentalorsnepassedemandercequeleurdoivent les difficults de matrise de lalangue crite qui affectent un si grandnombre dlves la sortie du primaire?Comment ne pas stonner que le nombredorthophonistes soit pass en France decent soixante en 1963 plus de seize milleaujourdhui ? On pourrait bien sr associercette augmentation lessor des profes-sions de soin lenfance dans la mmepriode.Ellenenapasmoinstalimente et justifie par des difficultsdapprentissage de la lecture qui nont past surmontes dans le cadre de la classe.Et comment ne pas tre surpris par ceparadoxe : dun ct, la rvolution desmthodes de lecture sest opre au nom dulire, cest comprendre; de lautre, lescollgiens de 1995 ne comprenaient pasmieux un texte crit que leurs ans aumme ge dans les annes 1920 (4). Etactuellement, selon des donnes conver-gentes de lenqute 2009 du programmeinternational pour le suivi des acquis deslves(ProgrammeforInternationalStudent Assessment, PISA) et de la direc-tion des tudes du ministre delducationnationale,centcinquantemillejeunessortent chaque anne de lcole en grandedifficult de comprhension de lcrit .Un apprentissage qui substitue le devinerau lire ne peut manquer davoir des effets long terme. Il se prtend plus faciledaccs, mais risque dinstaller llve dansune lecture imprcise, source invitablede difficults de comprhension, et dansune criture floue. De fait, si les lvesdes zones dducation prioritaires (ZEP)ont du mal comprendre des textes simplesau sortir du primaire, cest quils ne prtentpas une attention suffisante la matrialitdu texte crit (des signes graphiques menuscomme la ponctuation ou les accords deconjugaison ne faisant pas sens pour eux).Les tenants du progressisme pdago-gique sopposent aux mthodes tradition-nellesaunomdefaonsdenseignersusceptibles de rendre lenfant plus intel-ligent en le considrant demble commele sujet autonome de ses apprentissages.Leurs critiques se rclament, eux, dunetransmission plus efficace des savoirs.Ainsisopposent,dansunesortededialogue de sourds, deux modles dcole.Lun, ancr dans le refus de toute formedinculcation autoritaire et mcanique,cherche manciper lenfant par la qualitdes faons denseigner. Lautre fait dcoulerlmancipation de lacquisition du savoir.Dchifrer ou deviner ?QUON LA DISE syllabique, alphabtiqueou encore graphmique, la mthode delecture en vigueur jusquaux annes 1970propose un apprentissage progressif dudchiffrage des graphmes. Constitus delettres et de combinaisons de lettres, lesquelquecentcinquantegraphmesdelcriture du franais permettent de trans-crire les trente-six phonmes, ou sons ins-cables,delalangueorale (certainsphonmes nayant quune transcriptionpossible, tel ou, et dautres jusqu sept,tel le son s de sac : s, ss, sc, c, , x, t).Ltude des graphmes permet de dchif-frer un nombre rapidement croissant desyllabes, et donc de mots et de phrases.De son ct, la mthode globale pureprneuneentredanslalecturequicontourne le dchiffrage des graphmes.Lide dapprendre identifier directementlesmotseux-mmes,saisisdansleurglobalit, merge ds le XVIIIesicle. IlfauttoutefoisattendreledbutduXXesicle pour quOvide Decroly, ayantsuffisamment formalis cette dmarchepour la mettre en pratique, linscrive dansledispositifthiqueetthoriquedes pdagogiesnouvelles .Laglobale,soutenue par Clestin Freinet (2), va vitedevenir emblmatique de ces dernires.Son usage restera toutefois marginal dansle systme ducatif jusquaux instructionsofficielles de 1972 et 1985.Ces directives encouragent le passage la globale au nom du principe selon lequellire, cest comprendre, ce qui dvaloriseimplicitement la syllabique, renvoye audchiffrage de graphmes et de syllabesPARMI les nombreux dbats qui agitentlcole en France, celui des mthodes dap-prentissage de la lecture est lun des pluspineux et des plus rcurrents. La publica-tion,particulirementdepuis2005,dedonnes denqute indiquant la matrisetrs insuffisante de la langue crite par leslvesentrantaucollgearoduneconfiance bien tablie dans lcole primaire.La direction de lvaluation, de la pros-pective et de la performance (DEPP) duministre de lducation nationale observeainsi que les performances des coliersfranais lentre en sixime en matirede matrise de la langue crite ont stagnentre 1987 et 1997 (dcennie de la secondeexplosion scolaire qui massifie le lyce etluniversit), et baiss de 1997 2007 (1).Ce problme, bien antrieur la miseen uvre des politiques nolibrales, nesera pas rsolu par la seule restitution despostes supprims, si indispensable soit-elle (lire larticle ci-dessous). Les inga-litsscolairesperdurentdepuislesannes 1960 et la mise en place de lcoleunique de la Rpublique (lire le glossaire) :daprs les calculs raliss par lInstitutnational dtudes dmographiques (INED)et depuis par la DEPP, le taux daccs un bac gnral, celui qui donne le plus dechances de russir dans lenseignementsuprieur, tait dans les annes 1960 de11 % pour les enfants douvriers et de 56 %pourlesenfantsdecadres (45pointsdcart). Il stablit aujourdhui 22 %pour les enfants douvriers et 72 % pourles enfants de cadres (50 points dcart).Tout rexamen des dispositifs densei-gnement doit dbuter par les apprentissagesdu lire-crire. On peut dailleurs rappelerquen 1972 la rnovation de lenseignement5dpourvus de signification. Le mot tantla plus petite unit de sens, un apprentissagede la lecture fond sur la reconnaissancevisuelle des mots offre en effet aux lvesla possibilit dassocier systmatiquementdchiffrage et comprhension de lcrit.Mme si les ouvrages prnant la globalepure (ou mthode idovisuelle) ont connu ungrand retentissement dans les annes 1970,il ne semble pas que celle-ci soit jamaisdevenue majoritaire. Sans doute parcequelle se heurtait une impossibilitpratique : toute dmarche globale doit eneffet combiner la mmorisation du plusgrand nombre possible de mots crits etla lecture devinette, cest--dire liden-tif icationdesmotsnonreconnusensappuyant sur le contexte de la phrase,etlecaschantsurlaconnaissanceacquise dune partie du mot concern (parexempledevinerbeaut quandonreconnatbeau).Alusage,ilsesttoutefois avr que, mme en combinantmmorisation de mots voire de phrasesentires et lecture devinette, les rsultatstaient trs peu concluants, parfois mmecatastrophiques. Au point que la globalea t accuse de lextension des dyslexieset autres dysorthographies (3).Ce constat ne sest pas traduit par unretour la syllabique, mais par une monteen puissance des mthodes mixtes, plusrespectueuses du principe lire, cestcomprendre . Elles combinent en effet,dans des proportions et selon des modalitsvariables dun manuel lautre, ltudedes relations entre phonmes et graphmeset les pratiques de la globale, identifi-cation visuelle du mot crit et lecturedevinette.Ltude du code grapho-phonologiqueamliore sensiblement lefficacit de lapdagogie. Dautant plus si, comme lesenqutes internationales le montrent, ellesopre ds les dbuts de lapprentissageet de faon plus systmatique. A la diff-rence de la syllabique, ltude dans lesmthodes mixtes part en gnral non pasdes graphmes quon apprend dchiffrer,mais des phonmes dont on identifie lestranscriptions possibles. Or prendre appuisur la langue parle permet lapprentilecteur de ne jamais quitter le registre dusens.Ilaapprisparler ;ilaimeleshistoires ; il a pris lhabitude ds la mater-nelle dcouter les rcits quon lui raconte lcole. Lide est donc dutiliser ceshistoires pour en extraire les phrases, puisles mots, et enfin les phonmes contenusdans ces mots dont on identifiera alors latranscription graphique.Le matre se repose ainsi sur ce quellve connat et aime, la langue parleet les rcits, pour lamener en douceur ltude des correspondances entre sons etsignes crits. Ecoute le son a que tuentendsdanslemotchat,etregardecomment il scrit : cest la lettre a.Maintenant, regarde ces lettres, ces mots,ces phrases, et retrouve la lettre a. Cestcemomentquilrecourtauxprocds de la globale, en confrontantlapprenti lecteur des mots dont il neconnat pas tous les graphmes (le motchat, en loccurrence) et quil doit identifierglobalement ou deviner partir des lettresou des syllabes quil a apprises, du sensde lhistoire quon lui a raconte, de lillus-tration du manuel.Lemondeactuelninciteguresacrifier lun de ces modles au profit delautre.Linsertiondansunesocitdmocratique et la matrise de technologiesdifficiles apprhender supposent la trans-mission lensemble des jeunes gnra-tions dune culture commune, gnrale ettechnologique de haut niveau, et donc lra-dication des ingalits daccs aux savoirs.Simultanment,latransformationdesrapports familiaux et du statut de lenfant,la volont lgitime dassurer lmanci-pation et lpanouissement individuelsds le plus jeune ge, justifient la recherchedeformesdducationscolaireen(3) Cf. par exemple Colette Ouzilou, Dyslexie, unevraie-fausse pidmie, Presses de la Renaissance,Paris, 2001.(4) Connaissances en franais et en calcul deslves des annes 1920 et daujourdhui. Comparaison partir des preuves du certificat dtudes primaires,Les Dossiers dducation et formations, ministre delducation nationale, no62, Paris, 1996.LE MONDE diplomatique SEPTEMBRE 20114MTHODES EN QUESTION,ENSEIGNANTS SOUS PRESSIONControverses sur lapprentissage de la lecturelmentaireatenclencheparunerforme de lenseignement du franais.Cette dernire a ouvert grand la porte uneautre mthode, dite globale, alors quelapprentissage de la lecture tait rgi jusque-l par les instructions officielles de 1923,qui recommandaient fermement lemploide la mthode syllabique.Cette rforme a plac la question de lalecture au cur des discussions pdago-giques. Tout le monde se sent peu ou prouconcern, et les professionnels de la lecture,didacticiens et matres de cours prpara-toire (CP) ne sont pas les seuls affirmerleur choix. Bien au-del de leurs rangs,dans le monde de lenseignement et de lapdagogie, tre moderne, intelligent etprogressiste, cest dfendre la globale etles mthodes mixtes qui en drivent lespartisans de la syllabique tant volontiersqualifis de passistes, voire de raction-naires. Ainsi, en janvier 2006, lorsque leministre de lducation nationale GillesdeRobienproposederevaloriserlamthode syllabique, un manifeste, signnotamment par lAssociation franaisepour la lecture (AFL), le Groupe franaisdducation nouvelle (GFEN) et lInstitutcoopratif de lcole moderne (ICEM),dnonce la propagation dune idologiepolitique crasant tout espoir dmanci-pationpossibleparlducation . Ilpoursuit : Des mthodes dapprentissageolenfantestchercheurcellesolenfant est dress, le choix idologique[du ministre] est limpide : lui refuser dsle plus jeune ge de penser, lui ter le dsirdequestionner,decomprendre,deconnatre, lui imposer une obissancepassive en lenfermant dabord dans desexercices rptitifs et mimtiques Au-del de lapprentissage de la lecture, cestbien la volont dagir sur les capacitsrflexivesetcomplexesdelacompr-hension du monde de toute une jeunesse! SEPTEMBRE 2011 LE MONDE diplomatiquePARJEAN- PI ERRETERRAI L*EnvisiteHelsinkile16aotdernier,leministredelducationnationaleLucChatelaattribules succs du systme scolaire finlandais sa moder-nit,lagrandeautonomiedesestabli s -sementsetaumodederecrutementdesesprofes-seurs.Desobservationscensescautionnerleschoixfranais,notammentenmatiredecoupesbudgtaires(lirelarticleci-dessous).Leministrene sest en revanche pas souci des mthodes dap-prentissage de la lecture. Lesquelles occupent pour-tant une place centrale dans la russite des lves etla lutte contre la perptuation des ingalits.OLIVIER CORPET. 3083 P 26 V , de la srie Analfabets , 2003 6Y6LF 'Fh5FIhFMFh IFL0MkIF5FFkIFks Cycledepe|leclicnnemenl |se|vouxd|p|omuIos, IoncI|onnu|ros |nIornuI|onuux,mombros du corps consu|u|ro, oII|c|ors oIcudros supr|ours.s Cycle de ccnl|ences el sminoi|es (mo|dimolin el me|c|edi op|es-midi), vcyogedludes.s lc|molicnsonclicnnepo| un HusIrod'FIudos |p|omuI|quos 8upr|ouros.54, ovenue Ho|ceou s J5008 lARlS s Il : +33 (0)1 4J 20 5J 4J6enIre d'FI0desIIomdIIg0es eI 5IrdIIg0es0|gonisme dcl du slolul ccnsullolil oup|esdu Ccnseil Eccncmique el Scciol des lolicns unieswww.oeds-|r.oom - oeds2@wonodoo.|r www.hei-hep.oom - oon|oo|@hei-hep.oomhd0Ies FI0des InIerndIIondIeshd0Ies FI0des FoIIIIg0eslEl-lEl scnl memb|es de l "Acodemic Ccuncilcn lhe uniled lolicns Syslem" 8k6hFL0k5 en 3 ons opres le 8A0 :s Relolicns lnle|nolicnoles,s Sciences lcliliques. Mk5FkF5 en 1 on opres un 8A0 +3/+4 :s Alloi|es lnle|nolicnoles el 0velcppemenl,s Ccmmunicolicn lclilique el Rseoux,s lcnclicn lublique lnle|nolicnole,s 0eslicn des l|cg|ommes lumoniloi|es,s Eludes Sl|olgiques el lcliliques de 0lense.les diplmes scnl occ|dils po| l"Eu|cpeon Acc|edilolicn8co|d cl lighe| Educolicn Schccls"konIro |o 3 ocIobro 2011 o novombro 2011 I|n ju|n 2012Pourquoi veulent-ilscasser lcole ?EN septembre 2007, peine luprsident de la Rpublique, M. NicolasSarkozy avait exprim dans une Lettreaux ducateursson souhait dune coleavec moins de professeurs. Et, pourune fois, la promesse a t tenue, aveclasuppressiondeseizemillepostesdenseignant en 2011 et en 2012, ce quidevraitconduireladestructiondequatre-vingt mille postes en cinq ans danslenseignement primaire et secondaire.Cette vritable saigne suscite colre etinquitude chez les enseignants, maisaussichezlesparentsdlveset,dsormais, chez les maires, y comprisceuxdelUnionpourunmouvementpopulaire(UMP).Lannoncedelafermeture de mille cinq cents classes duprimaire la rentre 2011 a soulev lindi-gnation : Trop cest trop, on ne peut pluscontinuer supprimer des postes danslenseignement (1) ! , sest ainsi exclamM. Jean-Pierre Masclet, le prsident UMPde lAssociation des maires du Nord.Mme lenseignement priv, pourtantmoinstouchenproportionparcescoupesdansleseffectifs,semetdonner de la voix. M. Eric de Labarre,secrtairegnraldelenseignementcatholique, estime que cette politiqueconduit enseignement public et ensei-gnement priv dans une impasse en 2011et un blocage en 2012 (2) . Inspecteursdacadmie chahuts lors des conseilsdpartementaux de lducation nationale,carte scolaire refuse par des lus detous bords, praux occups de jour etparfois de nuit, kermesses transformesen assembles gnrales, banderolesaccrochessurlesfaadesdenombreuses coles : le printemps 2011aconnuunejacqueriescolairedanstoutes les rgions de France. On ne peut pas concevoir ldu-cation des enfants selon un simple rapportcomptable : quand ce ne sont plus lessyndicats denseignants qui le disent, maisles parents, cest--dire des lecteurs, lachose devient plus risque pour le gouver-nement. Lcole primaire nest pas la seuletouche. Les effectifs en sixime vontmonterenchedansbeaucoupdecollges ds la rentre 2011; un documentdu ministre dat de mai 2010 appelaitles recteurs identier les leviers def-cience (sic) et les incitait calculer lenombre de classes conomises silsparvenaient augmenter les effectifs deun cinq lves (3).Aprs la suppression des rseauxdaides spcialises aux lves en dif-cult (Rased) et de lanne de formationdes nouveaux enseignants stagiaires,aprs la quasi-liquidation de la scolari-sation des enfants de moins de 3 ans, lapoursuite dune telle politique est de plusen plus insupportable pour les personnelset les usagers de lducation nationale.Leurs mobilisations semblent avoir nipar payer : le 21 juin dernier, M. Sarkozyaannonclegeldesfermeturesdeclasses horsdmographiedansleprimairepour2012.Lapprochedellection prsidentielle nest sans doutepas trangre ce changement dorien-tationqui,dailleurs,nesufrapaseffacer le bilan de cinq ans de sarko-zysme scolaire.Lauraatrouvlepostedesesrves; Julien, lui, a trouv un poste lahauteurdesesambitions .Lacampagnepublicitairepourlemtierdenseignant, par voie de presse et grands frais (1,35 million deuros), duministre de lducation nationale auprintemps 2011 ne dit pas seulement lavision sexiste dun monde social danslequel les femmes ont des rves etleshommesdel ambition.Elleconstitue aussi un parfait dni de ralitde la part dun gouvernement dcid dstabiliser la condition professorale parla gnralisation de la prcarit (4).Le gel du point dindice des fonction-naires pendant trois ans conduira unenouvelle diminution de 5 10 % de leurpouvoir dachat, sans compter les effetsde laugmentation du taux de cotisationlaretraite.Cetappauvrissementdlibrnestcertespasnouveau,puisquil a commenc avec les mesuresde dsindexation des traitements parrapport lvolution des prix adoptesparM. JacquesDelorsaudbutdesannes1980,maisilatendancesacclreretsaccentuercesdernires annes : selon les calculs desconomistes Btissam Bouzidi, TouriaJaaidaneetRobertGary-Bobo, lavaleurdescarriresdesagrgsdusecondaireetdesprofesseursdesuniversits () a baiss denviron 20 %entre 1981 et 2004 (5) .On comprend mieux alors le dclinrapidedelattractivitdumtier,quaucune campagne de propagandepublicitaire nenrayera. Un jeune certicommenceavecunsalairenetde1500 eurosparmois,pournirsacarrire, trente quarante ans plus tard,avec moins de 3000 euros mensuels; unmatre de confrences, aprs avoir suiviunparcoursparticulirementslectifaujourdhui, dbute avec un traitementde 1700 euros par mois et peut espreratteindre autour de 3500 euros la veillede la retraite, soit le salaire dun dbutant la sortie dune cole de commerce debonne rputation.Et le mtier lui-mme est rendu deplus en plus difcile, complexe, usant,anxiogne. La dgradation de limage dela profession enseignante se fait sentirauxconcoursderecrutement,olenombre de candidats seffondre depuisune dizaine dannes dans les disciplinesscientiques, mais galement en anglaisou en lettres classiques. En 2011, lescandidatsenmathmatiquessontpresque aussi nombreux que les postesau concours. La directrice des ressourceshumainesduministre,MmeJosetteThophile, a d piteusement admettreque prs de mille places aux concours ducerticat daptitude au professorat delenseignement du second degr (capes)externe navaient pu tre pourvues cetteanne (6). Et, pour pourvoir les postesvacants, le ministre recrute toujours plusdenseignants vacataires, pays lheure,qui nont souvent reu aucune formationadapte et qui ne bncient pas de lammeprotectionsocialequelesfonctionnaires.Lesrcentesrformesnontfaitquacclrer une tendance longue quivisetransformerprofondmentlefonctionnement de lcole, ses modesdergulationetsesobjectifs.MaisM. Sarkozy a choisi la manire forte, endtriorant dlibrment les conditionsdenseignement et dapprentissage pourmieuximposersesprojets.LactuelsecrtairedEtatchargdulogementBenoist Apparu avait vendu la mche lorsdun chat surlesiteduMonde,le20 mai 2009. Il stait alors dit convaincuque la suppression de postes obliger [ait]linstitution sinterroger sur elle-mmeet se rformer . Seule la baisse desmoyens obligera linstitution bouger ,avait-il ajout.Aprs la mise en route de luniversitentreprise, recommande par lUnioneuropenne,cestautourdelensei-gnement primaire et secondaire de sesoumettre la norme de lemployabilit,de lefcacit, de la performance (7). Dansloptique des rformateurs actuels, tout,jusqu la pdagogie, doit se calquer surle monde conomique, car lcole ne faitriendautrequeproduirele capitalhumain et les comptences de basequi lui sont ncessaires. Cette logiquenormative, suppose faire passer lef-cacit avant tout, est aujourdhui portepar une hirarchie intermdiaire de plusen plus centralise et cense appliquerrigoureusementtouteslesrformes,mesures et consignes reues den haut.Le temps le plus noir de lautoritarismedans lenseignement semble revenu. Alinstar du militaire, le professeur devra-t-il obir en tout au gouvernement, repr-sent par un inspecteur dacadmie, unprincipal ou un proviseur. A cet gard, laligne de lUMP est claire : la restaurationde lautorit, cest dabord celle de lahirarchie sur les personnels. Elle a tafrmemartialementparM. GrardLonguet, alors prsident du groupe UMPau Snat, lors du Rendez-vous pour laFrance du 3 novembre 2010 : Il faut unpatron qui puisse rentrer dans les classeset exltrer les enseignants en rupture avecle projet de ltablissement. Cenouvelespritdisciplinairesetraduit par labandon des objectifs gali-taires, jugs contre-productifs. Lcoledoit se dlester de tout ce qui diminue sonrendement, commencer par les lvesperturbateurs, qui seront exltrs versdes tablissements de rinsertion scolaire(ERS), dont les premires expriencesont pourtant t catastrophiques (8). Pourladroite,quiamaldigrlecollgeunique, lgalit nest plus une nalit.Se dbarrasser au plus vite des lves lesmoins performants en les dirigeant verslapprentissage la n de la cinquimepourrait tre une solution tentante. Lasuppressiondelacartescolairedoitpermettrelaconstitutiondtablisse-ments dexcellence qui draineront lesmeilleurs.Quantauxbourses,plusquestiondelesdistribuerautomati-quement en fonction de la situation desparents : elles doivent tre accordesaux lves certes pauvres mais aussimritants. Un pas de plus est franchiquand les descendants dimmigrs sontaccuss de faire baisser les rsultats.Leministredelintrieur,M. ClaudeGuant,napashsitdclarerle25 mai 2011 sur Europe 1, et ceci encontradictionavectouslestravauxsrieux sur la question, que les deuxtiers des checs scolaires, cest lchecdenfants dimmigrs. Un propos viterelayparlarectricedelacadmiedOrlans, MmeMarie Reynier, qui afrmaitquelques jours plus tard : Si on enlvedesstatistiqueslesenfantsissusdelimmigration, nos rsultats ne sont passi mauvais ni si diffrents de ceux despays europens (9). Pour dnir un projet progressiste, ilimporte de comprendre enn que noussommes entrs dans un ge indit delinstitution : celui de la nouvelle colecapitaliste.CHRISTIANLAVAL.PARCHRI STI ANLAVAL** Sociologue, coauteur de La Nouvelle Ecole capita-liste, La Dcouverte, Paris, 2011. Laura a trouvle poste de ses rves Exfiltrerles professeursrfractairesLgalit nestplus une finalit(1) Denis Peiron, Pour un maire, une classe quiferme, cest toujours un drame, La Croix, Paris,27 mai 2011.(2) Isabelle Ficek, Suppressions de postes : fin denon-recevoir de Chatel au priv, Les Echos, Paris,21 avril 2011.(3) Schma demplois 2011-2013, ministre delducation nationale, 5 mai 2010.(4) Lire Gilles Balbastre, Feu sur les enseignants,Le Monde diplomatique, octobre 2010.(5) Btissam Bouzidi, Touria Jaaidane et Robert Gary-Bobo, Les traitements des enseignants franais, 1960-2004 : la voie de la dmoralisation?, Revue dco-nomie politique, Paris, mai-juin 2007.(6) Des centaines de postes denseignant nonpourvus, faute de candidats admis , 12 juillet 2011,www.lemonde.fr(7) Lire Nico Hirtt, En Europe, les comptencescontre le savoir , Le Monde diplomatique, octobre 2010.(8)Cf.PierreDuquesne, ERSdeNanterre,chronique dun chec annonc, LHumanit, Saint-Denis, 18 juillet 2011.(9)Cetteacadmiemanquedambition ,LaNouvelle Rpublique, Tours, 17 juin 2011.adquation avec ces volutions historiques.Peut-on semployer concilier ces deuxmodles afin dentreprendre lindispen-sable rexamen de la faon dont les enfantssont introduits la culture crite?JEAN-PIERRETERRAIL.GlossaireEcole unique : rsultat de la rforme institutionnelle qui, du dcretBerthoin de 1959 la rforme Haby en 1975, met en place le collgeunique et organise laccs de tous les lves au secondaire. Cetterforme runit ainsi les deux rseaux de scolarisation, primaire et secon-daire, qui restaient trs cloisonns sous la IIIeet la IVeRpublique; elleinternalise une slection sociale qui soprait jusque-l lextrieur delcole et met les lves en concurrence via un dispositif de notation,de classement hirarchique et dorientation.Code grapho-phonologique : systme des relations entre les sonsde la langue et les signes graphiques (lettres et syllabes) qui les repr-sentent.Mthode syllabique : enseigne le dchiffrage des signes crits (lesgraphmes) qui transcrivent les sons lmentaires (phonmes) de lalangue. Cet apprentissage de la prononciation des lettres et de leurscombinaisons en syllabes sopre de faon progressive : llve nestjamais appel dchiffrer un mot dont il ne connat pas les graphmesqui le composent.Mthode globale pure : apprend lire par la reconnaissance visuelleglobale des mots, en contournant lapprentissage du code grapho-phonologique. Cette mthode offre llve la possibilit dassociersystmatiquement dchiffrage et comprhension de lcrit. La globaleentend faire appel son intrt et son investissement autonome.Mthode mixte : la globale pure stant avre inapplicable, la mixtea rintroduit lapprentissage du code grapho-phonologique. Mais ledchiffrage sopre en partant du son et non comme cest le casdans la syllabique du signe crit. Il laisse subsister une bonne partde lecture devinette en confrontant constamment les lves desmots dont ils nont appris dchiffrer que telle lettre ou telle syllabe :ils doivent deviner le reste en sappuyant sur le contexte de la phrase,lillustration du manuel, leur connaissance familire du mot.De linstituteur lorthophoniste* Chercheur, membre du Groupe de recherches surla dmocratisation scolaire (GRDS).(1) Note dinformation no08.38, ministre de ldu-cation nationale, dcembre 2008.(2) Instituteur et pdagogue, Clestin Freinet (1896-1966) prnait une cole cooprative favorisant la libreexpression des lves et leur pleine participation lagestion de ltablissement. Ses travaux ont connu unretentissement important et continuent faire rfrencedans les milieux pdagogiques.MALGR une amorce rcente de retourlasyllabique,lesmthodesmixtesdemeurent utilises par environ 90 % desmatres de lcole publique. Commentalorsnepassedemandercequeleurdoivent les difficults de matrise de lalangue crite qui affectent un si grandnombre dlves la sortie du primaire?Comment ne pas stonner que le nombredorthophonistes soit pass en France decent soixante en 1963 plus de seize milleaujourdhui ? On pourrait bien sr associercette augmentation lessor des profes-sions de soin lenfance dans la mmepriode.Ellenenapasmoinstalimente et justifie par des difficultsdapprentissage de la lecture qui nont past surmontes dans le cadre de la classe.Et comment ne pas tre surpris par ceparadoxe : dun ct, la rvolution desmthodes de lecture sest opre au nom dulire, cest comprendre; de lautre, lescollgiens de 1995 ne comprenaient pasmieux un texte crit que leurs ans aumme ge dans les annes 1920 (4). Etactuellement, selon des donnes conver-gentes de lenqute 2009 du programmeinternational pour le suivi des acquis deslves(ProgrammeforInternationalStudent Assessment, PISA) et de la direc-tion des tudes du ministre delducationnationale,centcinquantemillejeunessortent chaque anne de lcole en grandedifficult de comprhension de lcrit .Un apprentissage qui substitue le devinerau lire ne peut manquer davoir des effets long terme. Il se prtend plus faciledaccs, mais risque dinstaller llve dansune lecture imprcise, source invitablede difficults de comprhension, et dansune criture floue. De fait, si les lvesdes zones dducation prioritaires (ZEP)ont du mal comprendre des textes simplesau sortir du primaire, cest quils ne prtentpas une attention suffisante la matrialitdu texte crit (des signes graphiques menuscomme la ponctuation ou les accords deconjugaison ne faisant pas sens pour eux).Les tenants du progressisme pdago-gique sopposent aux mthodes tradition-nellesaunomdefaonsdenseignersusceptibles de rendre lenfant plus intel-ligent en le considrant demble commele sujet autonome de ses apprentissages.Leurs critiques se rclament, eux, dunetransmission plus efficace des savoirs.Ainsisopposent,dansunesortededialogue de sourds, deux modles dcole.Lun, ancr dans le refus de toute formedinculcation autoritaire et mcanique,cherche manciper lenfant par la qualitdes faons denseigner. Lautre fait dcoulerlmancipation de lacquisition du savoir.Dchifrer ou deviner ?QUON LA DISE syllabique, alphabtiqueou encore graphmique, la mthode delecture en vigueur jusquaux annes 1970propose un apprentissage progressif dudchiffrage des graphmes. Constitus delettres et de combinaisons de lettres, lesquelquecentcinquantegraphmesdelcriture du franais permettent de trans-crire les trente-six phonmes, ou sons ins-cables,delalangueorale (certainsphonmes nayant quune transcriptionpossible, tel ou, et dautres jusqu sept,tel le son s de sac : s, ss, sc, c, , x, t).Ltude des graphmes permet de dchif-frer un nombre rapidement croissant desyllabes, et donc de mots et de phrases.De son ct, la mthode globale pureprneuneentredanslalecturequicontourne le dchiffrage des graphmes.Lide dapprendre identifier directementlesmotseux-mmes,saisisdansleurglobalit, merge ds le XVIIIesicle. IlfauttoutefoisattendreledbutduXXesicle pour quOvide Decroly, ayantsuffisamment formalis cette dmarchepour la mettre en pratique, linscrive dansledispositifthiqueetthoriquedes pdagogiesnouvelles .Laglobale,soutenue par Clestin Freinet (2), va vitedevenir emblmatique de ces dernires.Son usage restera toutefois marginal dansle systme ducatif jusquaux instructionsofficielles de 1972 et 1985.Ces directives encouragent le passage la globale au nom du principe selon lequellire, cest comprendre, ce qui dvaloriseimplicitement la syllabique, renvoye audchiffrage de graphmes et de syllabesPARMI les nombreux dbats qui agitentlcole en France, celui des mthodes dap-prentissage de la lecture est lun des pluspineux et des plus rcurrents. La publica-tion,particulirementdepuis2005,dedonnes denqute indiquant la matrisetrs insuffisante de la langue crite par leslvesentrantaucollgearoduneconfiance bien tablie dans lcole primaire.La direction de lvaluation, de la pros-pective et de la performance (DEPP) duministre de lducation nationale observeainsi que les performances des coliersfranais lentre en sixime en matirede matrise de la langue crite ont stagnentre 1987 et 1997 (dcennie de la secondeexplosion scolaire qui massifie le lyce etluniversit), et baiss de 1997 2007 (1).Ce problme, bien antrieur la miseen uvre des politiques nolibrales, nesera pas rsolu par la seule restitution despostes supprims, si indispensable soit-elle (lire larticle ci-dessous). Les inga-litsscolairesperdurentdepuislesannes 1960 et la mise en place de lcoleunique de la Rpublique (lire le glossaire) :daprs les calculs raliss par lInstitutnational dtudes dmographiques (INED)et depuis par la DEPP, le taux daccs un bac gnral, celui qui donne le plus dechances de russir dans lenseignementsuprieur, tait dans les annes 1960 de11 % pour les enfants douvriers et de 56 %pourlesenfantsdecadres (45pointsdcart). Il stablit aujourdhui 22 %pour les enfants douvriers et 72 % pourles enfants de cadres (50 points dcart).Tout rexamen des dispositifs densei-gnement doit dbuter par les apprentissagesdu lire-crire. On peut dailleurs rappelerquen 1972 la rnovation de lenseignement6INTRTS INDUSTRIELS ET AMBITIONS POLITIQUESPatrons de presse en campagneLes Echos, premier quotidien conomiquefranais, avait confi des proches quiltait important de dtenir un journal afinde se prmunir des attaques de la presse.Quel journaliste se sent de taille enqutersur un industriel qui reprsente, outre laquatrime fortune mondiale, lun des plusgros budgets publicitaires de la presse(10 % de celui du groupe Figaro [4])... etun employeur potentiel ? Aux Echos, leconflit dintrts peut surgir chaqueinstant, par exemple lorsquil sagit detraiter les enjeux dune grve dans leshypermarchs Carrefour, dont M. Arnaultest, avec le fonds Colony Capital, laction-naire principal le mouvement avait pourorigine la suppression exige de quatremillecinqcentsemploismalgrunbnfice de 380 millions deuros en 2010.Ou comme ce jour de juillet 2008 o lejournal sest autocensur pour ne pas direque le nom de M. Arnault avait t hulors dune assemble gnrale extraordi-naire de Carrefour.Une charte de dontologie ainsi quedes limites lingrence de lactionnaireont bien t tablies lors du rachat desEchos,en2007.Maiscelanapasempch M. Arnault de confier la dfensedesesintrtsM. NicolasBeytout,prsident-directeur gnral du groupe depresse et invit du Fouquets le soir dellection de M. Sarkozy en 2007. Enmars 2008, M. Beytout est intervenu pourmodifier la une afin que la victoire dela gauche aux lections municipales nepasse pas pour une dfaite de M. Sarkozy.Et dans sa bataille rcente pour le contrledHerms,dontilaacquis17 %enoctobre 2010 sans en avertir au pralablelAutorit des marchs financiers, aumpris des rgles boursires, Les Echosaccompagneencoreloffensiveduprdateur : Herms : les dissensionsfamiliales apparaissent au grand jour ,titre le quotidien le 14 mars 2011. Nullemention, en revanche, de la sortie dupatron du sellier, M. Patrick Thomas, lorsde la prsentation de ses florissants comptes 2010 : Si vous voulez sduireune belle femme, vous ne commencez paspar la violer par-derrire (5). Le Figaro,de son ct, voquera lincident commeune dlicate entorse au style subtil,discretetlgantdelamaison (4 mars 2011)Pour dfendre leurs intrts, les indus-triels peuvent compter sur les journauxdont ils assurent les fins de mois. Propri-taire du quo