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Jeudi 9 juillet 2015 - 71 e année - N o 21920 - 2,20 € - France métropolitaine - www.lemonde.fr Fondateur : Hubert Beuve-Méry - Directeur : Jérôme Fenoglio Algérie 180 DA, Allemagne 2,50 €, Andorre 2,40 €, Autriche 2,80 €, Belgique 2,20 €, Cameroun 1 900 F CFA, Canada 4,50 $, Côte d'Ivoire 1 900 F CFA, Danemark 30 KRD, Espagne 2,50 €, Finlande 4 €, Gabon 1 900 F CFA, Grande-Bretagne 1,90 £, Grèce 2,50 €, Guadeloupe-Martinique 2,40 €, Guyane 2,80 €, Hongrie 950 HUF, Irlande 2,50 €, Italie 2,50 €, Liban 6 500 LBP, Luxembourg 2,20 €, Malte 2,50 €, Maroc 13 DH, Pays-Bas 2,50 €, Portugal cont. 2,50 €, La Réunion 2,40 €, Sénégal 1 900 F CFA, Slovénie 2,50 €, Saint-Martin 2,80 €, Suisse 3,50 CHF, TOM Avion 450 XPF, Tunisie 2,50 DT, Turquie 9 TL, Afrique CFA autres 1 900 F CFA MODE Depuis dimanche et jusqu’au 9 juillet, trente maisons présentent à Paris leurs collections automne-hiver 2015- 2016. L’exercice vaut démonstration d’excellence pour les ateliers qui fabri- quent ces pièces uniques, mais aussi pour les couturiers, qui doivent se révé- ler visionnaires afin que continue à vivre la haute couture. LIRE PAGE 23 LES PRISES DE RISQUE DE LA HAUTE COUTURE JUSTICE AFFAIRE MAGNITSKI : UN EMPOISONNEMENT EN FRANCE ? LIRE PAGE 6 DROIT DU TRAVAIL ET CHANTAGE À L’EMPLOI LIRE PAGE 24 GRANDES ÉCOLES HEC, LA FIN DES ANNÉES RAMANANTSOA LIRE PAGE 12 PIXELS UN FABRICANT DE LOGICIELS ESPIONS PIRATÉ PAR DES HACKEURS LIRE LE CAHIER ÉCO PAGE 8 ENQUÊTE LES COLONIES PERDUES DES « COCOS » LIRE PAGE 14 Richard III, roi d’Avignon Lars Eidinger (Richard III) et Jenny König (Lady Anne), le 6 juillet, à Avignon. BORIS HORVAT/AFP Sous la direction de Thomas Ostermeier, l’Allemand Lars Eidinger offre une interprétation magistrale du roi shakespearien LIRE PAGE 18 Inquiétudes après un vol d’explosifs dans une base militaire Une dizaine de pains de plastic, 180 détonateurs et 40 grenades ont été vo- lés dans un dépôt d’armes à Miramas, dans la nuit de dimanche à lundi Une enquête a été ouverte par le parquet de Marseille pour identi- fier les auteurs du vol et d’éventuelles complicités à l’intérieur de la base Le ministère de la défense a commandé une enquête pour évaluer les niveaux de protection de l’ensemble des installa- tions militaires françaises L’opposition dénonce le manque de moyens disponibles pour protéger les infrastructures militaires LIRE PAGE 10 Grèce : le compte à rebours avant le divorce Les dirigeants de la zone euro ont durci leurs exigences avant le prochain sommet européen, prévu dimanche 12 juillet bruxelles - bureau européen L e compte à rebours avant le « Grexit », la sortie de la Grèce de la zone euro, a commencé. Dimanche 12 juillet au soir, si aucun accord entre le gouvernement de la gauche radicale d’Alexis Tsipras et ses créanciers n’a été trouvé, l’Europe en tirera les conclusions, lors d’un conseil avec les 28 pays mem- bres. « Parce que cela concerne tout le monde », a déclaré, grave, Donald Tusk, le président du Conseil européen, mardi 7 juillet à Bruxelles, à la fin d’un énième sommet de la zone euro. « Je suis ferme- ment contre un “Grexit” mais je ne pourrai pas l’empêcher si le gouvernement grec ne fait pas ce qu’il doit faire », a ajouté le prési- dent de la Commission européenne, Jean- Claude Juncker. « Hope over Justus Lip- sius », avait pourtant tweeté, en début de soirée, Martin Selmayr, le directeur de ca- binet de M. Juncker, avec une photo d’arc- en-ciel au-dessus du siège du Conseil nommé Justus Lipsius en signe d’espoir. cécile ducourtieux et jean-pierre stroobants LIRE LA SUITE PAGE 2 Les Européens ont fixé un ultimatum au gouvernement grec pour faire des propositions LIRE P. 2 À 5 Le « Grexit », une fatalité ? LIRE LA TRIBUNE DE JEAN-MARC DANIEL P. 15 La Grèce, une hystérie française LIRE LA CHRONIQUE D’ARNAUD LEPARMENTIER P. 24 Giorgio Armani Privé. ED ALCOCK/JÉRÉMIE LÉON/MYOP POUR « LE MONDE » A Paris, les maisons tentent de concilier savoir-faire et devoir de modernité DEVENEZ LES BUSINESS DÉVELOPPEURS DE DEMAIN Téléchargez votre dossier de candidature sur www.icd-ecoles.com business development, human adventure INSTITUT INTERNATIONAL DU COMMERCE ET DU DÉVELOPPEMENT - CRÉÉ EN 1980 ETABLISSEMENT D’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR TECHNIQUE PRIVÉ RECONNU PAR L’ÉTAT Sabine CHOLLET 01 80 97 66 11 - 12 rue Alexandre Parodi - 75010 Paris Journées de sélection admissions parallèles en 3 e et 4 e années tous les du mois de juillet mercredis Épreuves d’admission en 1 ère et 2 e année 8 et 15 juillet

Le Monde Du Jeudi 9 Juillet 2015

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le cotidien le monde du 9 juiller 2015

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  • Jeudi 9 juillet 2015 71e anne No 21920 2,20 France mtropolitaine www.lemonde.fr Fondateur : Hubert BeuveMry Directeur : Jrme Fenoglio

    Algrie 180 DA, Allemagne 2,50 , Andorre 2,40 , Autriche 2,80 , Belgique 2,20 , Cameroun 1 900 F CFA, Canada 4,50 $, Cte d'Ivoire 1 900 F CFA, Danemark 30 KRD, Espagne 2,50 , Finlande 4 , Gabon 1 900 F CFA, Grande-Bretagne 1,90 , Grce 2,50 , Guadeloupe-Martinique 2,40 , Guyane 2,80 , Hongrie 950 HUF, Irlande 2,50 , Italie 2,50 , Liban 6 500 LBP, Luxembourg 2,20 , Malte 2,50 , Maroc 13 DH, Pays-Bas 2,50 , Portugal cont. 2,50 , La Runion 2,40 , Sngal 1 900 F CFA, Slovnie 2,50 , Saint-Martin 2,80 , Suisse 3,50 CHF, TOM Avion 450 XPF, Tunisie 2,50 DT, Turquie 9 TL, Afrique CFA autres 1 900 F CFA

    MODE

    Depuis dimancheet jusquau 9 juillet, trente maisonsprsentent Paris leurs collectionsautomnehiver 20152016. Lexercice vaut dmonstrationdexcellence pourles ateliers qui fabriquent ces picesuniques, mais aussi pour les couturiers, qui doivent se rvler visionnaires afin que continue vivre la haute couture.

    L IRE PAGE 23

    LES PRISES DE RISQUE DE LA HAUTE COUTURE

    JUSTICEAFFAIRE MAGNITSKI : UN EMPOISONNEMENTEN FRANCE ? LIRE PAGE 6

    DROIT DU TRAVAIL ET CHANTAGE LEMPLOI L IRE PAGE 24

    GRANDES COLESHEC, LA FIN DES ANNES RAMANANTSOA L IRE PAGE 12

    PIXELSUN FABRICANT DE LOGICIELS ESPIONS PIRAT PAR DES HACKEURS LIRE LE CAHIER CO PAGE 8

    ENQUTELES COLONIES PERDUES DES COCOS LIRE PAGE 14

    Richard III, roi dAvignon

    Lars Eidinger(Richard III) et

    Jenny Knig(Lady Anne),

    le 6 juillet, Avignon.

    BORIS HORVAT/AFP

    Sous la direction de Thomas Ostermeier, lAllemand Lars Eidinger offre une interprtationmagistrale du roi shakespearien

    L IRE PAGE 18

    Inquitudes aprs un vol dexplosifs dans une base militaire

    Une dizaine de painsde plastic, 180 dtonateurs et 40 grenades ont t vols dans un dpt darmes Miramas, dans la nuit de dimanche lundi

    Une enqute a t ouverte par le parquetde Marseille pour identifier les auteurs du vol et dventuelles complicits lintrieur de la base

    Le ministre de la dfense a command une enqute pour valuer les niveaux de protection de lensemble des installations militaires franaises

    Lopposition dnonce le manque de moyens disponibles pour protger les infrastructures militaires LIRE PAGE 10

    Grce : le compte rebours avant le divorce Les dirigeants de la zone euro ont durci leurs exigences avant le prochain sommet europen, prvu dimanche 12 juillet

    bruxelles - bureau europen

    L e compte rebours avant le Grexit , la sortie de la Grce de lazone euro, a commenc. Dimanche12 juillet au soir, si aucun accord entre legouvernement de la gauche radicale

    dAlexis Tsipras et ses cranciers na t trouv, lEurope en tirera les conclusions, lors dun conseil avec les 28 pays membres. Parce que cela concerne tout le monde , a dclar, grave, Donald Tusk, le prsident du Conseil europen, mardi 7 juillet Bruxelles, la fin dun nime

    sommet de la zone euro. Je suis ferme-ment contre un Grexit mais je ne pourrai pas lempcher si le gouvernement grec ne fait pas ce quil doit faire , a ajout le prsident de la Commission europenne, JeanClaude Juncker. Hope over Justus Lip-sius , avait pourtant tweet, en dbut de

    soire, Martin Selmayr, le directeur de cabinet de M. Juncker, avec une photo darcenciel audessus du sige du Conseil nomm Justus Lipsius en signe despoir.

    ccile ducourtieux

    et jean-pierre stroobants

    L IRE L A SUITE PAGE 2

    Les Europens ont fix un ultimatum au gouvernement grec pour faire des propositions LIRE P. 2 5 Le Grexit , une fatalit ? LIRE LA TRIBUNE DE JEAN-MARC DANIEL P. 15

    La Grce, une hystrie franaise LIRE LA CHRONIQUE DARNAUD LEPARMENTIER P. 24

    Giorgio Armani Priv. ED ALCOCK/JRMIE LON/MYOP POUR LE MONDE

    A Paris, les maisons tentent de concilier savoirfaire et devoir de modernit

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    8 et 15juillet

  • 2 | europe JEUDI 9 JUILLET 20150123

    Lultimatum des Europens la GrceAthnes doit prsenter des mesures dconomies et de rformes avant le conseil europen dcisif du 12 juillet

    suite de la premire page

    En fait, part les Franais, et un peu les Italiens, aucun des autres chefs dEtat et de gouvernement ne partageait cet optimisme.

    Les chefs dEtat et de gouverne-ment ont donc dfini une nou-velle squence politique pour Athnes, en forme dultimatum,avec une runion de lEurogroupemercredi 8 juillet, puis une autresamedi 11 juillet et, dimanche12 juillet, un sommet de la zone euro, suivi dun sommet de lUnion ( 28) pour trouver un ac-cord sur une aide financire laGrce. Cest la sortie de route d-sormais programme si Alexis Tsipras ne se conforme pas aux exigences, consquentes, de ses partenaires europens.

    Mercredi, Athnes devait en-voyer une demande pour un troi-sime plan daide au Mcanisme europen de stabilit, le fonds de sauvetage des pays en banque-route. Une dmarche purementformelle. Elle ne sera juge receva-ble que si le gouvernement Tsi-pras envoie une liste de rformes, avant vendredi 10 juillet, 8 h 30 du matin , a martel M. Juncker.

    Cette liste devra tre dtaille,au moins autant que celle qui tait sur la table quand la Grce arompu les ngociations et an-nonc son rfrendum, le 27 juin 2015. Avec, au minimum, une refonte de la TVA, cense ra-mener 1 % du PIB par an de recet-tes fiscales de plus, et une rformedes retraites pour conomiser 1 % du PIB ds 2016. Et propos de la dette, ne rien demander qui res-semble une demande dannula-tion ou de restructuration imm-diate, car alors la porte des discus-sions se refermera , indiquaient plusieurs sources, mardi.

    Nous avons cinq jours [jusqudimanche] pour trouver un ultimeaccord , a soulign, grave, Do-nald Tusk. Si nous ny parvenons pas, tout le monde y perdra. Ce serasurtout trs douloureux pour le peuple grec, et cela aura des cons-quences gostratgiques . Ath-nes a introduit, depuis le 29 juin, un contrle des capitaux qui as-phyxie le pays. Le 20 juillet, laGrce fera dfaut vis--vis de laBCE, ce qui prcipitera sa banque-route si aucun prt durgence ne lui est accord.

    La Commission est prte tout.Un scnario dtaill prvoyant unesortie de la zone euro a t pr-par , a indiqu M. Juncker. Je ne suis pas optimiste , a enchanMme Merkel, en lattente dune

    liste de rformes trs dtaille . Moins ngatif, Franois Hollande a rpt, lui, que la France veut que la Grce reste dans la zone euro et elle y travaille. Mais la r-ponse dpend de ce que veulent lesGrecs. Et dajouter : Sil ny avait pas daccord, il y aurait forc-ment la recherche dune autre op-tion.

    Aider Athnes passer lt

    Paris a tout fait pour tenter de re-nouer le dialogue entre Athnes et ses cranciers. Un accord de dernire minute avait t tent, en vain, quelques jours avant le rfrendum. Paris dfend mainte-nant une solution en deux temps,avec un accord court terme, con-sistant en une aide quelquesmilliards deuros, pour permettre

    Athnes de passer lt, de rem-bourser les chances de la BCE (environ 8 milliards), condition-ne quelques rformes adoptesrapidement par le Parlement grec.Un plan cens avoir un impact immdiat sur les finances du payset tmoigner de lengagement de M. Tsipras raliser des rformes.

    Si la France a t la dernire prendre la dfense dAthnes au sommet (le premier ministre ita-lien a surtout protest contre son viction de la discussion Hollan-de-Merkel, Paris, lundi 6 juillet), cest, dit-on Bruxelles, parce que la confiance des autres sest envo-le au fil des cinq derniers mois. Lannonce du rfrendum a t assimile par la Commission europenne un coup de poi-gnard dans le dos, alors quun ac-

    cord semblait possible, assurelinstitution. En Allemagne et ailleurs, on a vu dans ce rfren-dum une sorte de chantage, unedmocratie essayant dimposerses vues 18 autres.

    Tsipras a touch les limites dela patience de beaucoup de lea-ders. Mais ce sont des gens respon-sables, qui connaissent leurs res-ponsabilits. Nous sommes dans la situation dun couple qui a tout essay pour sauver son mariage et qui fait une tout dernire tenta-tive , rsume une source proche des cranciers.

    Il faudra rassurer

    Mercredi matin au Parlement de Strasbourg, Alexis Tsipras a rap-pel : Nous souhaitons un accordmais un accord qui montre quil y a

    de la lumire au bout du tunnel ,en ajoutant quil fallait rompre avec cette trajectoire sans issue .Il a remis la question de la dette aucentre des ngociations, au risquede braquer Berlin.

    La dcision dacter dfinitive-ment la fin des ngociations seraprise dimanche. La question dumaintien de la Grce dans la mon-

    Michel Sapin sort dun rendez-vous avec le nouveau ministre des finances grec, Euclide Tsakalotos, Bruxelles, le 7 juillet. JEAN-CLAUDE COUTAUSSE/FRENCH-POLITICS POUR LE MONDE

    naie unique se posera videm-ment. On discutera daide huma-nitaire, cela concerne le budget delUnion dans son entier , a ajout M. Tusk. Les chefs dEtat et de gou-vernement indiqueront aussi, avec force, quils sont prts ren-forcer lintgration de la zone euro, attaque pour la premirefois dans son intgrit. Il faudra rassurer, montrer quil y a un pilotedans lavion , indique une sourcediplomatique.

    Risque de troubles sociaux

    Mais le Grexit ne sera pas d-crt ds dimanche : rien na t prvu dans les traits pour per-mettre un pays de sortir de la zone. Et politiquement, personnene veut prendre cette responsabi-lit devant lhistoire. La BCE fer-mera les vannes des liquiditsdurgence aux banques grecques, partir du moment o il ny auraplus de perspective daccord politi-que sur un programme ou partirdu moment o le systme ban-caire grec seffondrera , a dclar,mercredi sur Europe 1 le gouver-neur de la Banque de France,Christian Noyer. Cela paralysera dfinitivement lconomie grec-que et Athnes sera contrainte de mettre en circulation une mon-naie parallle pour viter un ef-fondrement, voire des troubles sociaux. Merkel est trs proccu-pe par lhritage quelle laisseraitdans un tel cas, tmoignait, mardisoir, un expert allemand, dsem-par. On va dire quelle a pass cinq ans sauver la zone euro de lacrise, pour finalement lcher la Grce

    Quelles seront les consquencesjuridiques ou financires pour la Grce, si ce scnario catastrophe se matrialise ? Les services juri-diques des institutions europen-nes vont travailler darrache-pied,les marchs vont ragir. Mais tout cela nest rien en comparaison des dgts politiques pour la zoneeuro , glissait une personnalit, dans la nuit de mardi, alors que sevidait le Justus Lipsius. Sans arc-en-ciel. p

    ccile ducourtieux

    et jean-pierre stroobants

    Un scnario

    dtaill prvoyant

    une sortie

    de la zone euro

    a t prpar

    JEAN-CLAUDE JUNCKER

    prsident de la Commission

    L A C R I S E G R E C Q U E

    Et ils marchrent, en somnambules, vers la catastropheQuand laveuglement menant la premire guerre mondiale claire les errements des gouvernements du XXIe sicle

    ANALYSE

    L es Somnambules duXXIe sicle sont des compta-bles. Depuis quelques mois,le livre de lhistorien Christopher Clark sur les origines de la pre-mire guerre mondiale (Flamma-rion, 2013) revient dans les conver-sations europennes. Ds le 19 dcembre 2013, la chancelire allemande Angela Merkel avait cit louvrage lors dun conseil europen houleux : Ils ont touschou et cela a men la premireguerre mondiale. Ainsi la chan-celire rsumait-elle louvrage.

    Elle plaidait alors pour la miseen place de mesures contraignan-tes pour imposer des rformesafin de renforcer la monnaie uni-que. Lors de ce sommet, elle avait voqu lt 2012, quand ellestait finalement oppose au Grexit . Nous avons alors dis-cut de savoir si la Grce aurait d sortir de la zone euro et je crois que

    si cela tait arriv, nous aurions tous d la quitter dans un second temps , expliquait-elle sespairs. Dix-huit mois plus tard, le Grexit nest plus tabou. Le pr-sident de la Commission euro-penne, Jean-Claude Juncker, a re-connu mardi 7 juillet quil tait ltude. Une bonne partie des diri-geants europens veulent en finiravec la Grce qui les empoisonnedepuis cinq ans et surtout, avec cegouvernement Tsipras qui ne res-pecte pas les rgles.

    Les dirigeants grecs et euro-pens semblent avoir mis en place un mcanisme inluctable que personne ne veut clairement assumer et que plus personne nesemble pouvoir et vouloir arrter. Personne ne souhaitait que celaarrive, mais au-del de cet intrt commun, chacun dfendait des in-trts particuliers et contradictoi-res , crit Christopher Clark. Len-grenage infernal a commenc semettre en place lautomne 2014,

    pour des raisons comptables, quand la troka a refus de d-bloquer la dernire tranche daidede 7,2 milliards deuros (sur un to-tal de 240 milliards) au gouverne-ment dirig par le conservateur Antonis Samaras. Celui-ci pani-que, prcipite lorganisation auParlement dune lection prsi-dentielle qui choue, le contrai-gnant des lections lgislatives qui voient le triomphe dAlexis Tsipras, le 25 janvier.

    Opacit

    Comment accorder la gauche ra-dicale ce quon a refus un gou-vernement de coalition runis-sant le parti conservateur Nou-velle Dmocratie (ND) et les socia-listes du Pasok ? Une partie de la droite europenne sy oppose et na quune obsession : faire plierTsipras ou le faire chuter. De sonct, le gouvernement grec aubord du gouffre se comporte comme sil allait refondre lEu-

    rope. Sous la pression des opi-nions, lnervement se mle la lassitude sur la question grecque. Athnes se met dos les petits pays au niveau de vie infrieur celui des Grecs.

    Le 22 juin, le gouvernement grecse rsout mettre en place des me-sures dconomie et de rformes en change dun plan daides. Maisla Commission, la Banque centraleeuropenne (BCE) et le Fonds mo-ntaire international (FMI) en de-mandent plus et affichent leurs dsaccords. Le FMI demande une restructuration de la dette, dont lAllemagne ne veut pas. La BCE donne au compte-gouttes des li-quidits pour les banques grec-ques. Lengrenage se poursuit. Etant donn le tissu de relations unissant tous les acteurs du sys-tme, les consquences de chaque initiative dpendaient de celles pri-ses en raction par les autres ac-teurs, des ractions difficiles pr-voir du fait de lopacit des proces-

    sus de dcision , crit Christopher Clark, en parlant de 1914.

    Coinc entre les exigences de la troka et lintransigeance de la gauche de son parti, Alexis Tsi-pras annonce, comme un coup depoker, un rfrendum sur le plan daides europen, quil remporte 61,3 %. Mardi Bruxelles, il ar-rive sans propositions concrtes et la Commission et le Conseil d-clenchent le compte rebours du Grexit , le scnario du pire o nous avons tous perdre , selon le prsident du Conseil, DonaldTusk. Christopher Clark, encore : Et pendant tout ce temps, les hommes politiques europens continuaient agiter le spectredune catastrophe gnrale pour maintenir une pression et protgerleurs propres avantages. Enjuillet 2015, les nouveaux som-nambules semblent en routepour ce quEdgar Morin appelle la dseurope . p

    alain salles

  • 0123JEUDI 9 JUILLET 2015 europe | 3

    Hollande la recherche dun impossible consensusOppos au Grexit , le prsident ne veut pas sacrifier le couple franco-allemand un sauvetage de la Grce

    bruxelles - envoy spcial

    Il ne dit pas le mot et prfreparler de lautre option .Depuis plusieurs semaines,Franois Hollande refuse de

    prononcer lexpression Grexit ,mais le prsident de la Rpubliquesemble de plus en plus se prparerau pire des scnarios : la sortie programme de la Grce de la zone euro. Sil ny avait pas dac-cord, il y aurait forcment la recher-che dune autre option, la France estoblige denvisager cette option , a-t-il confi mardi 7 juillet dans la soire, lissue du sommet de lazone euro Bruxelles.

    M. Hollande ne la souhaite pas La France veut que la Grce reste dans la zone euro, elle tra-vaille pour y parvenir , a-t-il r-pt mardi , mais Paris est isol, tant la prochaine runion des diri-geants europens, programme pour le dimanche 12 juillet, a tout dun rendez-vous pris pour acter lchec des discussions avec le gouvernement dAlexis Tsipras.

    Pour tenter dempcher cettepremire dans lhistoire de lUnion europenne (UE), le chefde lEtat a une dernire fois plaid,mardi, pour que le gouvernementgrec prsente rapidement son plan. Il a fait valider par les chefs dEtat de la zone euro le calendriertabli la veille lElyse avec lachancelire allemande, Angela Merkel : des propositions prci-ses faites ds mercredi matin par M. Tsipras pour un pro-gramme de rformes sur deuxans, examines samedi par lEuro-groupe en change dun plan dur-gence court terme, avant le Con-seil europen de dimanche. Il nya plus de temps perdre, un accordest encore possible, mais il faut al-ler vite , explique M. Hollande.

    Si le prsident de la Rpubliqueveut acclrer, cest parce quil saitque plusieurs pays europens, dont lAllemagne, sont tents de laisser traner pour dgrader en-core davantage la situation grec-que et provoquer de facto un Grexit . Si on ne rgle pas lesproblmes urgents de la Grce, on prend le risque que ce soient lesfaits qui dcident notre place, cest la raison pour laquelle

    Hollande a parl de rapidit , dcrypte une source franaise proche des ngociations.

    Choisir, cest subir

    Franois Hollande peut-il se r-soudre tre le prsident franaisqui aura particip son corps d-fendant lexpulsion dun pays dela zone euro ? Plusieurs voix, en France, lexhortent se dresser contre ce danger et dire que la France posera son veto en cas de Grexit . Mardi, des dputs so-cialistes, rejoints par des cologis-tes et des communistes, ont lancun appel pour que Paris use de tout son poids pour sopposer avecvigueur toute stratgie visant la sortie de la Grce .

    Mais M. Hollande ne semble pasdispos les satisfaire et prfre

    dcide au nom de toute lEurope, mme Merkel ne peut pas soppo-ser toute seule. Le systme marche par consensus donc il faut que toutle monde soit persuad. Si la Francemet son veto, elle bloque toute la machine, quoi a sert au final, part faire un coup dclat ?

    Pas question donc, pour le prsi-dent, de sopposer frontalement ses partenaires europens. A commencer par lAllemagne. Pa-ris ne veut pas abmer de nouveausa relation avec Berlin aprs les tensions de la semaine dernire, lorsque M. Hollande avait de-mand que les ngociations euro-pennes se poursuivent malgr lannonce du rfrendum greccontre lavis de Mme Merkel, parti-sane du gel des discussions. On ne peut pas se permettre un clash

    avec lAllemagne , reconnat lexcutif. Quitte choisir Berlincontre Athnes ? La France fait tout pour aider la Grce, mais dansles situations difficiles, il faut en re-venir aux fondamentaux euro-pens, savoir le couple franco-al-lemand. Si ce couple nest pas uni, cest non seulement inefficace, mais cest dangereux pour lensem-ble de lEurope , explique lElyse.

    M. Hollande prfre donc conti-nuer sa politique europenne des petits pas, en cohrence avec lAl-lemagne, estimant quelle a mal-gr tout port ses fruits depuis2012. Le moteur franco-alle-mand a fait avancer lEurope de-puis trois ans , affirme-t-il, citant la mise en place de lunion ban-caire, lautorisation donne la Banque centrale europenne din-

    tervenir sur les marchs pour ra-cheter de la dette ou les deuxplans pour la croissance.

    Pas sr que ce bilan convainqueen France la gauche de la gaucheet une partie du Parti socialiste qui attendent toujours que le pr-sident Hollande honore la pro-messe du candidat de 2012 de rorienter lEurope. Pour ceux-l, la crise grecque tait lemoment historique, idal pour que chef de lEtat se rvle. Mais lhomme de la synthse ne fonc-tionne pas par oukase. Hollandeveut toujours tout laisser ouvert le plus longtemps possible, car pour lui, choisir, cest subir , expliqueun de ses interlocuteurs rguliers.Au risque que, dimanche, ne pas choisir soit galement subir. p

    bastien bonnefous

    Apart entre Franois Hollande et Alexis Tsipras, mardi 7 juillet, Bruxelles.JEAN-CLAUDE COUTAUSSE/FRENCH-POLITICS POUR LE MONDE

    LEurope se rsout peu peu au Grexit Le principe du maintien de la Grce dans la zone euro trouve de moins en moins de dfenseurs au sein des Vingt-Huit

    L a Grce est dj un peu sor-tie de lEurope. Elle a quittle cur de la plupart desEuropens. Rares en effet sont les Etats qui manifestent une empa-thie sincre lgard du sort dAthnes. Et ceux qui le font pen-sent davantage leurs finances publiques ou leur paysage politi-que qu lintgrit de lunion mo-ntaire.

    Les Vingt-Huit, membres et nonmembres de la zone euro, se d-chirent : dun ct les furieux, de lautre les anxieux. Les premiers, inflexibles, exigent dAthnes quil paie pour ses fautes, son laxisme budgtaire et son client-lisme politique, au point de sou-haiter sans remords un Grexit ,une sortie de la Grce de leuro.

    Dans le camp de ces nervs, ontrouve lAllemagne, mais aussi laFinlande, les Pays-Bas, la Slovnie,la Slovaquie, la Bulgarie, la Polo-gne et les pays baltes. Les plus pauvres, comme la Slovaquie, en-ragent de payer pour un pays plusriche queux. Ceux qui, hier, taient derrire le rideau de fer et en restent traumatiss, comme les Polonais ou les Baltes, ne dco-lrent pas de voir le premier mi-

    nistre grec de la gauche radicale, Alexis Tsipras, flirter avec Vladi-mir Poutine.

    Certains, limage de la Letto-nie, soumise une cure daust-rit avant son entre dans leuro,nacceptent pas que la Grce re-fuse de faire les efforts quils ont endurs. Une sorte de syndromede lenfant battu , estime Yves Bertoncini, directeur de lInstitut Jacques Delors : Jai souffert, donc vous aussi devez souffrir.

    Calcul politique

    Face eux, le camp des anxieux. Ceux qui refusent le Grexit nonpar romantisme europen, mais de peur de subir les rpliques de cequi pourrait ressembler un trem-blement de terre. Revoil les pays que les financiers anglo-saxons, en 2010, surnommaient mcham-ment les PIIGS pour dsigner les maillons faibles de la zone euro : le Portugal, lIrlande, lItalie, la Grce et lEspagne. Matteo Renzi, le prsident du conseil ita-lien la tte dun pays dont la dettepublique dpasse les 2 000 mil-liards deuros, nignore pas quil na pas encore accompli toutes les rformes ncessaires. Les spcula-

    teurs sont aux aguets, il le sait.Par pur calcul politique, le pre-

    mier ministre conservateur espa-gnol, Mariano Rajoy, pourrait, lui, accepter le Grexit . Nul doute que les indigns de laustrit, un temps sduits par le parti de lagauche radicale espagnole, Pode-mos, seffraieraient de la tournuredes vnements. Mais lconomieespagnole est trop fragile pour prendre un tel risque. M. Rajoy d-fend donc mollement le maintiendAthnes dans leuro, toutcomme le Portugal. A Lisbonne, on tremble lide de voir les ef-forts de rigueur rduits nantpar les mfaits du Grexit .

    Grce, Grce pourquoi nous as-tuabandonns ? , crivait, mardi7 juillet, Paulo Rangel, ditoria-liste du quotidien Publico.

    En Irlande, enfin, on stranglequand certains suggrent de gommer une partie de la dettegrecque. Le ministre des finances,Michael Noonan, na pas oublique la troka a refus sonpays de faire disparatre des comptes publics la dette des ban-ques que lEtat avait assume. Du-blin est donc un dur des ngocia-tions. Mais, en dpit dune crois-sance insolente, le pays nose as-sumer le Grexit . De peur de se rappeler au bon souvenir des sp-culateurs, peut-tre.

    Finalement, la France est sansdoute le pays le plus oppos au Grexit . Sa logique est davan-tage gopolitique que comptable. Et pour elle, ne pas respecter les principes europens est pardonna-ble , souligne M. Bertoncini. Unpardon que lAllemagne et ses al-lis ne veulent pas accorder, souli-gne M. Bertoncini rappelantquen allemand un mme mot, schuld, dsigne la dette et la faute . p

    claire gatinois

    Certains Etats,

    limage

    de la Lettonie,

    nacceptent pas

    que la Grce

    refuse de faire

    les efforts quils

    ont endurs

    continuer parler du maintien de la Grce comme dun objectif plutt que dune condition . Ce nest pas comme cela que a fonctionne, sagace un de ses pro-ches. Il ny a pas un dirigeant qui

    VERBATIM

    Franois Hollande

    La France veut que la Grce reste dans la zone euro (). Lenjeu ce nest pas seulement le problme de la Grce, cest aussi lavenir de lEurope (). Trois principes doivent () nous guider : () la responsabilit (), la solidarit (), la rapidit.Il ny a plus de temps perdre. Il faut aller vite pour quil y ait, pour lensemble du monde,une zone euro capablede prendre une dcision.

    Donald Tusk, prsident

    du Conseil europen

    Toutes les parties prenantes de la ngociation portent la respon-sabilit du statu quo. () Notre incapacit trouver un accord sera douloureux pour la Grce [et] affectera lEurope dun point de vue gopolitique. Ceux qui [imaginent] que ce ne sera pas le cas sont des nafs.

    La gauche

    de la gauche et

    une partie du PS

    attendent toujours

    que le prsident

    honore sa

    promesse de 2012

    de rorienter

    lEurope

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  • 4 | europe JEUDI 9 JUILLET 20150123

    Nous voici coups du monde La fermeture des banques et le contrle des capitaux perturbent considrablement le quotidien des Grecs

    REPORTAGEathnes - correspondance

    La tourmente bancaire a,dans la vie quotidiennedes Grecs, des consquences inattendues. Vasso et

    Kostas se marient samedi 11 juillet dans un petit village perdu dans les montagnes du Plion. Un coin de Grce qui se mfie autant deschques que des terminaux de carte bancaire et o la moindre transaction ne se conoit quavec des espces sonnantes et trbu-chantes. Le financement du ma-riage avec ses deux temps forts une crmonie religieuse et une fte la taverne du village est donc devenu un sujet de tracas.

    Cest moi, en tant que tmoin,quil appartient de verser de lar-gent au prtre, explique Fenia, unejeune femme dAthnes. 200 euros, ce nest pas excessif. Mais quand on ne peut retirer que 60 euros par jour la banque, cela se planifie ! Comme elle aide desurcrot ses deux parents qui ontperdu leur entreprise dans la crise et sont au chmage, elle retire donc 60 euros un jour pour son propre compte, 60 euros le lende-main pour ses parents. Collecterles 200 euros pour le prtre risque de prendre du temps ! Il me sera im-possible de participer aussi aux frais du repas.

    Dbrouillardise et solidarit

    Le restaurateur a t trs clair : pas question de faire crdit pourune noce de 200 personnes. Le mari sest donc rsolu faire, par Internet, un virement de 60 euros chacun des invits, lesquels de-vront en retour retirer 60 euros un distributeur et les lui remettre samedi pour payer la taverne.

    Dbrouillardise et solidarit :voil comment de nombreux Grecs rpondent la fermeture deleurs banques et au contrle descapitaux qui sest abattu sur eux le29 juin. En soit, vivre avec 60 euros par jour ne pose aucun problme : cela reprsente 1 800 euros par mois alors quils sont nombreux ne toucher que 800 euros de salaire. Mais dans unpays o largent liquide rgne en matre, la mobilisation soudaine dune grosse somme pour payer son loyer ou une opration mdi-cale est un casse-tte.

    Certes, le gouvernement a tentdallger la pression en accordant un dlai pour acquitter des factu-

    res deau et dlectricit, ainsi que toute dette lgard de ladminis-tration (impts, cotisations socia-les, timbres fiscaux, frais de jus-tice, amendes). Il a galement proclam que chaque commer-ant devait accepter le paiement par carte. Mais cest trs loin dtrele cas. Nombreux sont les restau-rateurs ou prestataires de servicesqui prviennent demble quils nacceptent que du liquide, tousles Grecs sont la recherche de cash et lattente devant un distri-buteur de billets fait dsormais partie des rituels quotidiens.

    Lidal, pour un salari, est doncdtre pay en espces. La chane de supermarchs Sklavenitis en a pris linitiative pour rmunrer lensemble de son personnel ds le 30 juin. De petits commerants et artisans ont fait de mme. Comme la pharmacienne Maria Sakopoulou, qui, disposant dar-gent liquide vers par ses clients, apu payer sans problme ses neuf employs. Cela leur vite de per-dre des heures aux distributeurs. Les autres prennent leur mal en patience, diffrant tous les achatsconsquents ou non ncessaires (vtements, ameublement, voitu-res) pour se concentrer sur les ur-gences quotidiennes (nourriture, mdicaments, essence).

    Quitte faire des provisions parcrainte dune pnurie qui nexiste pas encore mais que la difficult de certains dtaillants rgler leurs fournisseurs et linterdictionde transactions avec ltranger pourrait rapidement provoquer. Quand on fait le plein dessence, on remplit en plus un jerrican.Quand on va au supermarch, on triple ses achats de nourriture non prissable : riz, ptes, lait pas-teuris On court chez son mde-cin pour avoir une ordonnance et la pharmacie on achte en dou-ble des mdicaments les diabti-ques, notamment, sont inquiets de manquer dinsuline. La se-

    ms. La dcision gouvernementale est le coup de pied qui va les pous-ser du haut de la falaise.

    Or et diamants

    Il y a ltranglement d larrt to-tal des achats dans certains sec-teurs (les magasins de vtements, Athnes, sont quasiment vides). Et celui d lintransigeance defournisseurs et partenaires ltranger qui stoppent toute li-

    vraison faute de paiement imm-diat. Or, la Grce importe 52 % de ses produits dalimentation, une grande partie de mdicaments et la majorit des nourritures ani-males, ce qui peut avoir un effet court terme sur la productiondufs, de fromage, de viande, etc.

    Enfin, les exportateurs grecssont galement pnaliss, incapa-bles de payer transport et stoc-kage de leurs produits ltranger,et leurs banques ne pouvant four-nir les garanties exiges par leurs partenaires. Nous voici coups du monde sur le plan bancaire ,rsume Vasilis Korkidis. Les entre-preneurs ont donc demand ins-tamment au gouvernement de le-ver linterdiction de transactions ltranger, au moins pour desproduits prioritaires, et avec un plafond de 12 500 euros. Il faut un accord avec les cranciers euro-pens au plus vite, insiste M. Kor-kidis. Ce sont les entrepreneurs les plus vertueux, qui ont gard leurs

    capitaux en Grce, qui sont les pluspnaliss. Ce nest pas juste !

    Reste langoisse des particuliers lide dune possible saisie delEtat sur leurs avoirs bancaires (comme Chypre, en 2013) oudune brusque conversion de leurs euros en drachmes. Certainssempressent de payer toutesleurs dettes, pour ntre pas pris la gorge en cas de chute soudaine de ressources. Dautres sempres-sent de vider eux-mmes leurs comptes en consommant du luxe. Les joailliers du centre dAthnes ont tous not le phno-mne. Or, valeur refuge ; dia-mants, valeur ternelle. Ainsi ce couple de Grecs qui, mardi, dans une bijouterie de la rue Panepisti-miou, achetait une bague pr-cieuse. Pas pour madame, mais pour leur fille. Pour le jour, peut-tre trs lointain avouaient-ils, oelle se marierait. p

    annick cojean

    et ada guillot

    A Athnes, mardi 7 juillet.LAURENCE GEAI/SIPA POUR LE MONDE

    maine dernire, ctait la folie, la pharmacie ne dsemplissait pas, raconte Maria Sakopoulou. Il ny a pourtant pas de raison de sinqui-ter des stocks court terme. Sauf pour quelques mdicaments uni-quement fabriqus ltranger.

    Evidemment, ces nouveauxcomportements ont eu un impactimmdiat sur lconomie. La Con-fdration nationale du com-merce hellnique, qui reprsente 650 000 petites entreprises et 2,5 millions de salaris, publie mercredi 8 juillet un rapport poin-tant une baisse de 70 % de la con-sommation entre le 27 juin et le 7 juillet et une perte, pour lcono-mie grecque, de 1,2 milliard deuros. Cest dramatique, d-plore Vasilis Korkidis, le prsident de la Confdration. Avant le con-trle bancaire, beaucoup de petitesentreprises taient dj fragilises par la crise. Cinquante-neuf dentreelles fermaient la porte chaquejour et 613 emplois taient suppri-

    Tous les Grecs

    sont la

    recherche

    despces, et

    lattente devant

    un distributeur

    fait partie des

    rituels quotidiens

    L A C R I S E G R E C Q U E

    La dette hellne, au cur des dbatsLe Grexit coterait plus cher la zone euro quune restructuration de ses crances sur Athnes

    L a question empoisonne lesrelations entre Athnes etses partenaires europensdepuis des mois. Pour le gouver-nement dAlexis Tsipras, allger la dette publique, qui culmine aujourdhui 177 % du produit in-trieur brut (PIB), doit tre au cur des ngociations.

    Aux yeux de la chancelire alle-mande Angela Merkel, qui a pro-mis aux contribuables de son pays que laide la Grce ne leur coterait pas un euro, le sujet est tabou. Et pourtant : la dette publi-que hellne est insoutenable et nchappera pas un nouvel all-gement, jugent la majorit des conomistes. Un point de vue partag par le Fonds montaire international (FMI).

    Qui dtient la dette publique ?Lors de la restructuration de 2012, les cranciers privs dAthnes ont accept une dcote de 50 % 75 % sur les obligations publiques quils dtenaient. Depuis, la dette publique hellne appartient aux

    trois quarts des cranciers pu-blics. En mars, le Fonds europen de stabilit financire (FESF) endtenait 131 milliards deuros, les Etats de la zone euro 52,9 mil-liards (dont 11 milliards par la France), la Banque centrale euro-penne (BCE) 26,9 milliards et leFMI, 21 milliards. Au total, lendet-tement public slve 315 mil-liards deuros.

    Un Grexit coterait-il plus cher quune restructuration ra-pide ? Cest certain. Selon les co-nomistes de RBS, une sortie grec-que de lunion montaire accom-pagne dun dfaut souveraincoterait au minimum 227 mil-liards la zone euro. Un chiffrequi ne prend pas en compte les cots indirects, tels que ceuxdune contagion aux pays pri-phriques, de la baisse des inves-tissements, des troubles gopoli-tiques induits

    De son ct, la France pourraitperdre une quarantaine de mil-liards deuros (2 % du PIB), corres-

    pondant au prt de 11 milliards ac-cord la Grce et aux garanties apportes au FESF.

    Un nouvel allgement de ladette, lui, coterait 140 milliardsdeuros si son ratio tait ramen de 177 % 100 % du PIB ds aujourdhui, estime RBS. Une op-tion radicale, et pourtant moins coteuse quun Grexit .

    Quelle partie de la dette serait laplus facile allger ? Tous les cranciers ne sont pas logs la mme enseigne. Ainsi, le FMI a unstatut privilgi : en cas de dfaut,il est rembours en priorit. De-puis sa cration, en 1944, cette ins-

    titution na jamais effac la dette dun Etat. Elle accepte en revanchedtaler les remboursements dansle temps, sans pnalit. Cest no-tamment grce ce statut privil-gi que le FMI peut prter des pays en grande difficult sans met-tre son capital fourni par sesmembres en danger , prcise Diego Iscaro, conomiste chez IHS Global Insight.

    La BCE, elle, a dj fait savoirquelle naccepterait pas de res-tructurer les obligations hellnesquelle dtient : cela reviendrait financer indirectement lEtatgrec. Ce que ses statuts lui interdi-sent. Les obligations les plus sim-ples restructurer seraient celles dtenues par le FESF et surtout,les Etats. Depuis 2012, la dure deces prts on parle de maturit a dailleurs dj t allonge, et leurs taux dintrt rduits.

    Quelles sont les options possi-bles ? Il en existe des dizaines. Laplus radicale, politiquement dli-cate, serait deffacer une partie de

    la dette dtenue par le FESF ou les Etats. Mais il en existe de plus douces. Le think tank bruxellois Bruegel a calcul quallonger de dix ans encore la maturit de cesprts et en rduire le taux permet-trait dallger la dette de 17 %.

    Autre option, le Mcanismeeuropen de stabilit (MES) pour-rait racheter les obligations dte-nues par la BCE, voire le FMI, afinden taler le remboursement. Cesdernires pourraient aussi treindexes sur le taux de crois-sance : plus celui-ci serait fort, plus les remboursements aug-menteraient, linverse ils dimi-nueraient en cas de rcession. Une faon de rendre la dette plussoutenable sur le long terme.

    En revanche, Athnes ne tou-cherait probablement pas aux obligations dtenues par les cranciers privs, qui ont dj subi une dcote en 2012. Cela pri-verait la Grce dun accs aux marchs financiers pour des an-nes encore p

    marie charrel

    Le contrle

    bancaire est

    le coup de pied

    qui va pousser

    les entreprises du

    haut de la falaise

    VASILIS KORKIDIS

    prsident de la Confdrationdu commerce hellnique

    Lexposition

    totale de la

    France au risque

    grec slve une

    quarantaine de

    milliards deuros

    LES CHIFFRES

    315La dette publique de la Grce, en milliards deuros, soit lquiva-lent de 177 % du produit int-rieur brut (PIB) du pays.

    25 %La baisse du PIB grec depuis 2009. Il sagit de lune des rces-sions les plus violentes enregis-tre depuis les annes 1930 la surface du globe.

    50Le montant, en milliards deuros, des financements supplmentai-res dont Athnes a besoin ces trois prochaines annes, selon le Fonds montaire international, pour se maintenir flot.

  • 0123JEUDI 9 JUILLET 2015 europe | 5

    Schuble, bourreau des Grecs, idole des AllemandsLe ministre allemand des finances est convaincu que le Grexit est souhaitable pour la zone euro

    berlin - correspondant

    Mardi 7 juillet, ce futau tour de lagrande nation ,comme lappelle

    Wolfgang Schuble, den prendrepour son grade. Le premier minis-tre Manuel Valls a-t-il eu, le matin mme, laudace de suggrerquune discussion sur la dette grecque ntait pas taboue ? Dsson arrive Bruxelles pour parti-ciper un nouveau sommet sur laGrce, le ministre allemand des fi-nances tue lide dans luf. Ce-lui qui connat les traits sait quune annulation dune partie de la dette tombe sous la clause du no-bail out , le fameux arti-cle 125 du trait de Lisbonne qui interdit un Etat europen de prendre sa charge les dettes dunautre Etat.

    Dput depuis 1972 ManuelValls na alors que 10 ans, et AlexisTsipras nest pas encore n , Wol-fgang Schuble ne sembarrasse plus de faux-semblants. Depuis ledbut de lanne, il cache peinequune sortie de la Grce de lazone euro, le Grexit , serait ses yeux la moins mauvaise dessolutions. Une ligne politique qui, jusqu ces derniers jours, ntait pas celle de la chancelire Angela Merkel.

    Ds lannonce, fin dcem-bre 2014, dlections anticipes enGrce, il se dit que le tout-puissantministre est convaincu quun Grexit ne serait pas une catas-trophe pour la zone euro. Ce nest pas une fausse rumeur. Mi-f-

    vrier, alors que la Grce et sescranciers ngocient la prolonga-tion du deuxime programme daides, le ministre confie (en off, bien sr) que les marchs ont djanticip le Grexit . Un mois plus tard, une interview la tlvi-sion autrichienne fait grand bruit.Wolfgang Schuble juge en effetpossible une sortie par acci-dent de la Grce de la zone euro. Comme nous ne savons pas exactement ce que les responsa-bles grecs font, nous ne pouvonspas lexclure.

    Mme ses non-rponses deuxquestions essentielles sonnent comme des condamnations sans appel du gouvernement grec. Wolfgang Schuble refuse en effetde dire sil pense que le gouverne-ment dAlexis Tsipras mettra en uvre les rformes annonces et si lEtat grec vitera la faillite. Rienque a ! Deux mois plus tard, dansun entretien aux Echos et au Wall Street Journal, il enfonce le clou et reconnat quil rflchirait lon-guement avant de rpter quil ny aura pas de faillite de la Grce ,comme il lavait dit en 2012. Des propos suffisamment provoca-teurs pour quAngela Merkel ne linvite pas, le 1er juin, au mini-sommet de crise quelle organise sur la Grce avec le prsident Franois Hollande, Christine La-garde (directrice du Fonds mon-taire international), Mario Draghi (prsident de la Banque centrale europenne) et Jean-Claude Junc-ker (prsident de la Commission europenne).

    Mais Wolfgang Schuble sait

    que sa disgrce nest que passa-gre. Car sil a ses ennemis les Grecs, Jean-Luc Mlenchon, etc. il a, en Allemagne, de nombreuxinconditionnels. Comme le quoti-dien populaire Bild. Le 25 juin, ce journal le qualifie de Superman de la zone euro . Parce que comme aucun autre, il se bat () pour un euro fort . Il ne fait plusdefforts. Il ne dissimule plus ce qui ne peut plus tre cach. Il ne croitplus au cirque du sauvetage de la Grce. Il considre lindulgence de la chancelire comme une er-reur , affirme Bild.

    Ovationn

    Ce journal nest pas le seul pl-bisciter Wolfgang Schuble. Selon le sondage hebdomadaire ralis du 3 au 6 juillet par lInstitut Insa, 43 % des Allemands voteraient di-manche prochain pour la CDU sils devaient se rendre aux urnes.Un bond de 3,5 % par rapport lasemaine prcdente. La raison ?

    Dans la crise grecque, les Alle-mands se rangent avant tout der-rire le ministre des finances Schuble. Ils misent sur sa fer-met , estiment les experts dInsa. Les conservateurs lado-rent, les autres le respectent.

    Deux scnes rcentes en tmoi-gnent. Lundi 29 juin, Angela Mer-kel clbre les 70 ans de la CDU.Son ministre, ancien prsidentde la CDU, est videmment au premier rang des 600 invits. Du-

    rant son discours, la chancelire le remercie, lui qui jour et nuit fait tout pour parvenir un com-promis avec les Grecs. La ralit est plutt que cest elle qui cher-che un compromis tout prix mais peu importe : le ministre re-oit une vritable ovation. Unesalve dapplaudissements plus enthousiaste que celle que rece-vra la chancelire la fin de sonintervention.

    Deux jours, plus tard, le1er juillet, le Bundestag dbat durfrendum en Grce. Fait inha-bituel : trois membres du gou-vernement sexpriment. DabordAngela Merkel, puis Sigmar Ga-briel, vice-chancelier et prsi-dent du Parti social-dmocrate, puis Wolfgang Schuble. Il suffit que celui-ci savance en fauteuilroulant vers la tribune pour quaussitt un silence impres-sionnant envahisse lhmicycle.Mme les journalistes se taisent.Et le ministre de se lancer dans

    une vaste fresque des sommetsconsacrs la Grce, ne sortantses notes quaprs plusieurs mi-nutes dintervention.

    Monsieur Tsipras a men cam-pagne en promettant deux chosesaux Grecs. Rester dans leuro maissans conditionnalit et sans pro-gramme [daide europen]. Je luiavais dit quand il est venu Berlin () : Si vous promettez cela pen-dant la campagne, je ne peux quevous souhaiter de ne pas gagner llection. Car vous ne pourrez ja-mais tenir ces promesses. Cest ob-jectivement impossible. Vous ne pouvez pas tre dans lunion mo-ntaire sans faire des efforts trs importants pour des changementsstructurels. , confie-t-il sous le regard approbateur dAngela Mer-kel. Nen dplaise aux Grecs, il est exclu que celle-ci rserve son ministre des finances le sort quAlexis Tsipras vient de rserver Yanis Varoufakis. p

    frdric lematre

    Schuble ne croit

    plus au cirque

    du sauvetage

    de la Grce, selon

    Bild. Il considre

    lindulgence de

    Merkel comme

    une erreur

    La Grce tente de faire revenir ses vads fiscauxAthnes voudrait crer une cellule de rgularisation des avoirs offshore

    L a Grce rflchit la miseen place dune cellule de r-gularisation des avoirs nondclars ltranger par de riches particuliers, afin de renflouer sescaisses.

    Selon nos informations, le gou-vernement dAlexis Tsipras tra-vaille depuis mars un projet vi-sant rapatrier, dans des condi-tions avantageuses, plusieurs di-zaines de milliards deuros de fonds placs sur des comptes en Suisse, Londres et dans dautres places financires offshore.

    Selon ses propres calculs, fondssur lexemple de la France dont lunit de rgularisation cre en juin 2013 tourne plein rgimedepuis deux ans , Athnes pour-rait en escompter entre 0,1 % et 0,2 % de son PIB, soit, sur la base du PIB 2014, entre 180 millions et 360 millions deuros.

    Amnistie litalienne

    Cest Yanis Varoufakis, ministre des finances dmissionnaire, qui a directement pilot ce projet, amorc un mois aprs larrive deSyriza au pouvoir. M. Varoufakis ytravaillait encore dbut juin. Des contacts ont t pris ce sujet ti-tre consultatif avec la Suisse et avec lOrganisation de coopra-tion et de dveloppement cono-miques (OCDE).

    Un article paru dans lditiondominicale du quotidien suisse Neue Zrcher Zeitung (NZZ) du5 juillet avait fait tat de discus-sions en ce sens entre lex-minis-tre des finances grec et le secrta-riat dEtat suisse aux questions fi-nancires internationales. La por-te du projet grec est bien plus large.

    En effet, lide dAthnes est demettre en place un systme effi-

    cace, capable de rapatrier rapide-ment les milliards placs ltran-ger. Et ce, en dpit dune adminis-tration fiscale mal organise dansle pays et dans un contexte fiscalparticulier, o un grand nombrede fonds ne sont pas soumis limpt, tels ceux des armateurs.Ceux-ci sont autoriss crer dessocits en Grce comme sil sagissait de socits offshore.

    Pour ce faire, diffrentes optionssont sur la table, lune delles con-sistant garantir aux fraudeurs etvads fiscaux repentis labsencede poursuites pnales, les exo-nrer de pnalits mais appli-quer une taxe forfaitaire sur les avoirs rapatris en Grce, un taux avoisinant 20 %. Une formedamnistie fiscale litalienne, en somme

    En 2001, lItalie avait permis auxcontribuables de rapatrier leursfonds illgalement transfrs ltranger en change dune pna-lit forfaitaire de 2,5 %. Ce disposi-tif avait produit des effets specta-culaires, avec prs de 60 milliards deuros rapatris ds 2002.

    Si la Grce lui embotait le pas,une loi pourrait tre ncessaire. Cette dernire devrait alors passerle cap du Parlement grec.

    Reste le problme du calendrieret de la faisabilit de ce projet. Car autant ce guichet de rgularisa-tion tait envisageable il y a deux mois, avant le blocage des discus-sions entre la Grce et ses cran-ciers et lembrasement de la crisegrecque, autant dsormais il est irralisable dans le contexte ac-tuel dinstabilit et de dsordre bancaire, o les capitaux conti-nuent de quitter le pays par crainte dune sortie de leuro et dun retour la drachme. p

    anne michel

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  • 6 | international JEUDI 9 JUILLET 20150123

    hano - envoy spcial

    La faon dont vient dtrereu Washington le se-crtaire gnral du Particommuniste vietnamien

    (PCV), Nguyen Phu Trong, tmoi-gne de limportance croissante duVietnam pour les Etats-Unis lheure de la monte en puissanceconomique et stratgique de la Chine en Asie-Pacifique. Aprs unlong entretien dans le bureauOvale de la Maison Blanche, unhonneur rserv aux chefs dEtat et de gouvernement, Barack Obama sest flicit, mardi 7 juillet, de l mergence dune re-lation constructive base sur le res-pect mutuel en dpit de la diffi-cile histoire lie la guerre.

    A lissue de leur rencontre, lesdeux hommes nont pas cach

    avoir eu des discussions fran-ches sur la question des droits de lhomme au Vietnam, qui con-tinue rprimer durement dissi-dents et blogueurs hostiles au r-gime. Selon Human Rights Watch,il y aurait au Vietnam au moins 160 prisonniers politiques con-damns ces dernires annes en vertu de lois pnales qui criminali-sent toute critique contre le gou-vernement .

    Mais lessentiel de la rencontrene portait pas sur le contentieuxamricano-vietnamien en ma-tire de libert dexpression. Car la visite du chef du PCV incarne une symbolique toute particu-lire, mme si dans un pass r-cent le premier ministre vietna-mien, Nguyen Tan Dung, et le pr-sident de la rpublique, TruongTan Sang, les deux autres mem-bres du triumvirat du Viet-nam, se sont dj rendus Washington.

    Ce voyage tmoigne du fait queles Etats-Unis reconnaissent et res-pectent les choix politiques du Vietnam et le systme quil sestchoisi , estime Hoang Anh Tuan, directeur gnral de lInstitut depolitique trangre et des tudesstratgiques. Selon lui, cette visite historique la Maison Blancheillustre la maturit de la relation amricano-vietnamienne , vingt ans aprs ltablissement des liens diplomatiques entre les deux anciens ennemis, date anni-versaire qui a servi de prtexte ce voyage. En une quinzaine dan-nes, le niveau du commerce bila-tral entre les deux pays est pass de 850 millions de dollars (770 millions deuros) 35 mil-liards de dollars

    La question chinoise est vi-demment au cur de cette rela-tion en plein essor, mme si le pivot dsormais qualifi de rquilibrage de la politique amricaine vers lAsie tarde se

    concrtiser. A une poque de ten-sion croissante en mer de Chine du Sud, encore rcemment aigui-se par la poursuite de construc-tions chinoises dlots artificiels dans les eaux darchipels disputsentre Hano et Pkin, le Vietnam semble avoir fait le choix de la poursuite du rapprochementavec Washington. Si on opre un retour en arrire dans lhistoire, onsaperoit que linfluence chinoise sur le Vietnam na cess de dimi-nuer depuis le milieu du XIXe sicle,cest--dire avec larrive des Fran-ais , explique Hoang Anh Tuan. Qui, aprs avoir rappel que le se-crtaire gnral du Parti commu-niste stait rendu rcemment Pkin, analyse la visite de ce der-nier Washington comme la vo-lont du Vietnam de montrer la Chine que Hano lintention demener une politique trangre v-

    ritablement indpendante .Nguyen Phu Trong, considr

    par les analystes comme apparte-nant au clan des conservateurs au sein dun Politburo compos de seize membres, se rangerait-il aux cts des partisans dune rsis-tance plus affirme lgard de la Chine, lennemi hrditaire du Vietnam ? Le fait que le chef du PCV, garant de lidologie du parti,se rende aux Etats-Unis indique quele Vietnam est en train doprer unrquilibrage stratgique , juge dans le Wall Street Journal Jona-than London, professeur au d-partement des tudes asiatiques de la City University de Hongkong.

    Trait transpacifique

    Ct amricain, lannonce en oc-tobre de la leve partielle de lem-bargo sur les ventes darmes auVietnam a t perue Hano, qui rclame la leve totale de lem-bargo, comme un geste dimpor-tance. La marine vietnamienne va ainsi pouvoir acheter de lqui-pement militaire pour ses naviresmme si lembargo sur les armes ltales reste en place.

    Au menu des discussions entreNguyen Phu Trong et ses interlo-cuteurs amricains a figur unautre sujet crucial : la poursuite des ngociations multilatrales entre les futurs partenaires du trait transpacifique (TPP), un ac-

    cord de libre-change qui devraitrassembler bientt douze pays de la zone Asie-Pacifique, dont les Etats-Unis et le Vietnam. Mais pasla Chine Le prsident Obama souhaite conclure rapidementcette ngociation et le Vietnam est aussi trs dsireux de la voiraboutir. Le TPP est importantpour nous, car il est en quelque sorte ltalon de tout accord commercial. De plus, le TPP na pasquune dimension conomique, il est aussi stratgique , relve en-core Hoang Anh Tuan.

    Tout le monde nest pas forc-ment daccord. Pour Bui KienThanh, qui fut lun des missi do-minici du gouvernement de Ha-no lors des ngociations qui ontmen la reconnaissance diplo-matique commune amricano-vietnamienne de 1995, le TPP

    nest pas la panace : Tout le monde sexcite beaucoup sur cette question ici, mais cet accord nesera pas favorable lconomie vietnamienne qui aura beaucoup perdre. Nous sommes encore trsloin de pouvoir affronter la concur-rence des pays de la rgion.

    Ladhsion au TPP est cepen-dant perue, par les factions rfor-mistes du rgime, comme un moyen de jeter les bases dune volution librale, tant conomi-que que politique. Pour Tuong Lai,ancien directeur de lInstitut de sociologie du Vietnam et spcia-liste reconnu du marxisme dans un pays qui a cess de ltre, le TPP va constituer une tape im-portante pour permettre au Viet-nam de continuer sloigner de lorbite chinoise . p

    bruno philip

    Soupon dassassinat en France dans laffaire MagnitskiLe parquet a ouvert une enqute prliminaire sur le possible empoisonnement Paris du banquier russe Alexandre Perepilitchni

    U n banquier russe, mortau retour de son joggingdans sa proprit britan-nique du Surrey en novem-bre 2012, a-t-il t empoisonn Paris ? Cest la question laquelle va tcher de rpondre la justice franaise aprs que le parquet deParis a dcid, le 26 juin, douvrirune enqute prliminaire pour assassinat en bande organise aprs la mort dAlexandre Perepi-litchni, homme daffaires de44 ans rfugi au Royaume-Uni depuis 2010.

    Cette enqute confie la bri-gade criminelle fait suite aux in-vestigations financires menes paralllement en France par le juge dinstruction Renaud Van Ruymbeke sur un dossier qui a considrablement refroidi les re-lations entre Moscou et les capita-les occidentales depuis plusieursannes : laffaire Magnitski, du nom de ce juriste poursuivi par la justice russe pour des charges fic-

    tives et mort en 2009 des suitesde mauvais traitements subis enprison. Sergue Magnitski dnon-ait une escroquerie impliquant des fonctionnaires russes, qui auraient expropri un fonds din-vestissement, Hermitage CapitalManagement, avant de soutirer150 millions deuros lEtat russeavec la complicit dagents du fisc.Son calvaire avait pouss le Congrs amricain adopter, en 2012, une liste Magnitski in-terdisant de sjour aux Etats-Unisles fonctionnaires russes impli-qus dans laffaire.

    Depuis 2010, Alexandre Perepi-litchni aidait le patron dHermi-tage et employeur de Sergue Ma-gnitski, linvestisseur amricainBill Browder, retrouver la tracede largent de lescroquerie, sortide Russie par le biais dune multi-tude de socits-crans et de comptes bancaires dans plusieurspays. La collaboration de lancien banquier tait particulirement

    prcieuse : selon les lments de linstruction suisse, il aurait lui-mme jou un rle dans laffaireen aidant lune des protagonistes de lescroquerie, Olga Stepanova, placer ses gains en Suisse.

    En sa qualit de directrice du bu-reau du fisc de Moscou, Mme Ste-panova avait auparavant obtenu le versement de 150 millions deuros aux nouveaux propri-taires des socits voles Bill Browder. Ce nest quaprs la mortde Sergue Magnitski que Perepi-litchni aurait dcid de changer decamp et de contacter M. Browder, lui fournissant des documents surces comptes bancaires ouverts, notamment au Credit Suisse.

    Enqute sommaire

    Les magistrats franais semblentdonc prendre trs au srieux les rvlations parues il y a quelques semaines dans la presse britanni-que. Le 19 mai, le Times indiquait que du gelsemium, une plante

    originaire de Chine et dont lab-sorption peut tre mortelle, avait t retrouve dans lestomac dAlexandre Perepilitchni.

    Juste aprs sa mort, et malgr lesavertissements de Bill Browdersur le caractre pour le moins par-ticulier du dfunt, lenqute bri-tannique avait t sommaire,concluant une mort naturelle. Cest finalement linitiative de lacompagnie dassurances de M. Perepilitchni qui cherchait un moyen de ne pas verser la

    prime dassurance dcs sous-crite par le banquier russe quune expertise plus pousse a t mene cette anne. Elle a r-vl la prsence du gelsemium.

    Ingre petites doses, la planteest un antistress utilis en ho-mopathie ; hautes doses, elle devient un poison qui peut pro-voquer la mort dans un dlai al-lant de quelques heures quaran-te-huit heures. Lhypothse la plus probable sans carter tout fait la piste britannique est doncque lempoisonnement de M. Pe-repilitchni remonte au court s-jour parisien quil a effectu juste avant de rentrer chez lui dans le Surrey, prs de Londres.

    Pour les avocats franais deM. Browder, Mes Temime, Akorriet Minkowski, le timing des vnements laisse en tout caspeu de place au doute quant au fait que la mort dAlexandre Pere-pilitchni est bien lie laffaire Magnitski : lancien banquier

    sapprtait tmoigner une nou-velle fois devant les enquteurssuisses ; il avait par ailleurs cessses activits et ne se consacrait plus quau dossier Magnitski.

    Les interrogations se portentdsormais sur les personnes quil a pu rencontrer notamment lHtel Bristol, rue du Faubourg-Saint-Honor Paris, o il tait enregistr pour trois nuits lors de ce sjour parisien. Les magistrats du ple financier, qui enqutentdepuis dbut 2014 sur un systmeprsum de blanchiment en France des fonds dtourns en Russie, se sont dailleurs rendus dans le palace pour effectuer des vrifications. Comme le rvlaitfin juin lAFP, ce volet blanchi-ment de laffaire Magnitski avance. Une intermdiaire fran-co-russe installe Saint-Tropez vient dtre mise en examen etdes comptes bancaires Monaco et au Luxembourg ont t gels. p

    benot vitkine et simon piel

    Nguyen Phu Trong, secrtaire gnral du Parti communiste vietnamien, reu la Maison Blanche par Barack Obama, le 7 juillet. EVAN VUCCI/AP

    En une quinzaine

    dannes,

    le commerce

    entre les deux

    pays est pass

    de 850 millions

    35 milliards

    de dollars

    Les Etats-Unis et le Vietnam se rapprochent face PkinLe chef du Parti communiste vietnamien a t reu pour la premire fois la Maison Blanche

    LES DATES

    29 AVRIL 1975Les Etats-Unis ferment lambas-sade de Sagon et vacuent son personnel.

    1995Reprise des relations diplomati-ques entre les Etats-Unis et le Vietnam.

    NOVEMBRE 2000Visite du prsident Clinton Ha-no, la premire visite dun prsi-dent amricain depuis la guerre.

    JUIN 2005Visite du premier ministre, Phan Van Khai, aux Etats-Unis, le pre-mier voyage dun dirigeant viet-namien.

    Exercice militaire dans le Pacifique

    Les Etats-Unis et lAustralie, associs pour la premire fois au Ja-pon, mnent, depuis dimanche 5 juillet, de vastes exercices mili-taires aux portes du Pacifique, sur fond de tensions avec la Chine.Deux semaines durant, 30 000 militaires participent ces manuvres ariennes, maritimes et terrestres dans les Etats aus-traliens du Territoire du Nord et du Queensland. Une quarantaine de militaires japonais et 500 No-Zlandais ont galement t mobiliss pour lopration Talisman Sabre , organise tous les deux ans. Pour John Lee, professeur luniversit de Sydney, le message est clair : LAmrique et ses principaux allis cooprent trs troitement, en grande partie pour contrer la Chine.

    M. Perepilitchni

    aidait le patron

    du fonds

    Hermitage

    retrouver la trace

    de largent dont

    il a t escroqu

  • 0123JEUDI 9 JUILLET 2015 international | 7

    A Quito, le pape sermonne les dirigeants politiquesLe souverain pontife a condamn toute forme de rpression et la restriction des liberts

    quito - envoye spciale

    Il est arriv la secondegrande messe publique dupape Franois en Equateurcomme une runion lec-

    torale. Bras levs, saluant les uns et les autres, puis incitant ses voi-sins du carr VIP ondoyer au rythme de la musique dont les pa-roles martelaient le nom du pays quil prside, pendant que le pape sillonnait lassistance dans sa pa-pamobile : le prsident quato-rien, Rafael Correa, tait dter-min tre lautre vedette de la clbration qui a rassembl au moins un million de personnes, selon les autorits, Quito, mardi 7 juillet.

    Depuis larrive du pape Fran-ois, le chef de lEtat est omnipr-sent, laccueillant laroport, le recevant au palais prsidentiel,apparaissant son ct au balcon devant une foule dense, saffi-chant sans cesse la tlvision. Lagrande ferveur qui entoure la vi-site de Jorge Bergoglio est lvi-dence, pour lui, plus quun rpit,aprs des semaines de contesta-tion de sa politique par la rue.

    Conseils de gouvernance

    Sa prsence na pas dissuad lepape argentin, qui lapprcie, deprodiguer, mardi, au deuximejour de sa tourne dune semaine en Equateur, en Bolivie et au Para-guay, des conseils de gouver-nance aux dirigeants politiquesde lAmrique latine, en mme temps quil appelait le sous-conti-nent retrouver un lan la foismissionnaire et unitaire.

    Dans lancien aroport de la ca-pitale devenu parc du Bicente-naire ainsi nomm par rf-rence la formation du premier embryon de gouvernement auto-nome Quito en 1809, dbut du processus des indpendances en Amrique du Sud , la situation politique du pays tait dans les-prit de nombreux participants. Cest important quil vienne. Nous attendons de lui des paroles dunion car, en ce moment, le pays est divis , tmoignaient Nicolas

    et Margarita, deux jeunes Qui-teos de 20 ans que ces divisions tracassent.

    La tche de lunit tait juste-ment au centre de lhomlie de Franois, revtu pour la circons-tance de la chasuble blanche tis-se de motifs noirs, dinspiration indigne, que revtent les prtres quatoriens pour la liturgie. Lhistoire nous relate que [ce cri de libert lanc il y a un peu plus de deux cents ans] a t indiscuta-ble seulement quand il a laiss de ct les individualismes, la volontde leaderships uniques, le manque de comprhension dautres proces-sus de libration , a affirm le

    propositions plus proches des dic-tatures, des idologies ou des sectarismes.

    Un peu plus tard, il a dvelopp,devant des reprsentants de la so-cit civile, les principes qui doi-vent, selon lui, rgir une commu-naut politique. Prenant comme modle les relations familiales, il a affirm que notre socit ga-gne quand chaque personne, cha-que groupe social, se sent vrai-ment la maison .

    Cependant, a-t-il observ, nosrelations sociales, ou bien le jeu po-litique, souvent se fondent sur la confrontation, sur le rejet. Ma posi-tion, mon ide, mon projet se con-

    solident si je suis capable de vain-cre lautre, de mimposer. Au mo-ment o plusieurs projets de r-forme du gouvernement quatorien sont vivement criti-qus, il a appel les normes et leslois rechercher linclusion, ouvrir des espaces de dialogue, de rencontre et ainsi abandonner comme un douloureux souvenir toute forme de rpression, le con-trle dmesur et la restriction des liberts .

    Auparavant, devant des repr-sentants du monde de lduca-tion, lUniversit catholiquepontificale dEquateur, locca-sion dun discours ax sur la d-

    fense de lenvironnement, il a ap-pel les ducateurs dvelopper chez les tudiants, eux aussi agi-ts par une rforme de lenseigne-ment suprieur, un esprit criti-que, un esprit libre pour leur per-mettre de participer un dbat en vue dun monde plus humain .

    Aux jeunes, il a demand de nepas considrer un diplme uni-versitaire comme un statut su-prieur, synonyme de plus dar-gent, de prestige social et une formation universitaire seule-ment comme un droit , maisaussi comme un privilge . p

    ccile chambraud

    A lUniversit catholique de Quito, mardi 7 juillet. ALESSANDRO BIANCHI /REUTERS

    Srieux obstacles la conclusiondun accord sur le nuclaire iranienLes pays du groupe 5 + 1 et lIran continuent de buter sur des points cruciaux, tandis que Thran exige labrogation de lembargo sur les armes, qui le vise

    vienne - envoy spcial

    U ne fois de plus, les tor-tueuses ngociationssur le nuclaire iranienviennent dtre prolonges dequelques jours. Elles pourraientdurer encore toute la semaine, jusquau 10 juillet, a indiqu Ma-rie Harf, la porte-parole du d-partement dEtat amricain,mardi 7 juillet, Vienne. Cest la deuxime fois que lchance fi-nale est repousse depuis le 30 juin, la date butoir initiale-ment envisage.

    De prolongation en prolonga-tion, ces pourparlers ne cessent de sterniser depuis vingt mois lorsque lIran et les pays du P5 +1 (Etats-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni, Allema-gne) sont parvenus un accordintrimaire Genve, en novem-bre 2013, ouvrant la voie des n-gociations qui ne devaient tho-riquement durer quun an.

    Lobjectif de ces discussions,amorces en 2003 par les Euro-pens, est de parvenir un strict encadrement du programme nu-claire iranien, en change duneleve progressive et rversible

    des sanctions internationales,imposes contre la Rpublique islamique depuis 2006 par six r-solutions du Conseil de scuritde lONU.

    Trois points de blocage

    Cette nouvelle extension destractations est clairement le si-gne que les derniers arbitragessont de plus en plus difficilesmalgr la multiplication des ru-nions entre les chefs de la diplo-matie des Six avec les Iraniens,qui ont persist jusquaux pre-mires heures de mardi, avant dereprendre dans la matine.

    Sous un soleil de plomb, Lau-rent Fabius, le ministre franais des affaires trangres, a fait unebrve dclaration, mardi, avantde quitter Vienne, dans laquelle ilna pas dissimul ses rserves. La ngociation sur le nuclaireiranien, comme prvu, nest pas facile, il y a des priodes de ten-sion , a-t-il soulign, avant dnumrer les mmes troispoints de blocage quil avait vo-qus il y a une semaine : la limi-tation du programme nuclaireiranien, la recherche sur desmodles de centrifugeuses, qui

    permettent denrichir luranium,une matire ncessaire la fabri-cation dune bombe atomique,ainsi que les sanctions et leur r-tablissement en cas de viola-tion de laccord par lIran et aussila possible dimension mili-taire , qui concerne les soup-ons sur les activits passes delIran.

    M. Fabius a indiqu quil seraitde retour, mercredi soir, dans lacapitale autrichienne, mais plus le temps passe, plus la lassitudeest perceptible chez les diploma-tes. Cest bien bloqu, constate une source proche des ngocia-tions. Personne ne peut dire si on va y arriver ou pas. Je vois mal cela

    durer encore trs longtemps car ilny a aucune raison de penser queles choses seraient plus faciles lasemaine prochaine ou au-del ,insiste cette source.

    De son ct, Sergue Lavrov, leministre russe des affaires tran-gres, qui sest peu exprim jus-qu prsent, a affirm, mardi,quil restait huit ou neuf ques-tions toujours en suspens, enprcisant que la leve de lem-bargo sur les armes frappantlIran demeurait un problme majeur dans la ngociation.

    Thran rclame labrogationde cet embargo, adopt par le Conseil de scurit des Nationsunies en 2010, arguant que ces mesures restrictives nont rien voir avec le dossier nuclaire.

    Mais les Occidentaux y sont fer-mement opposs. Ils estimentque cela enverrait un signal d-sastreux Isral et aux pays ara-bes sunnites du Proche-Orient,dj vent debout contre les me-nes de lIran chiite dans la r-gion, et trs inquiets dun accordsur le nuclaire dont ils redou-tent quil ne fasse que renforcerlinfluence de Thran. p

    yves-michel riols

    Cest la deuxime

    fois que

    lchance finale

    est repousse

    depuis le 30 juin,

    la date butoir

    initialement

    envisage

    40 000postes supprims dans larme amricaine

    Dici 2017, larme amricaine prvoit de supprimer 40 000 postes de militaires. Le personnel en activit de lUS Army va ainsi passer de 490 000 450 000 personnes, soit son plus bas niveau depuis son enga-gement dans la seconde guerre mondiale aprs lattaque de Pearl Har-bor en dcembre 1941. Ces mesures font partie dun plan dconomie de 1 000 milliards de dollars des dpenses de dfense sur une priode de dix ans. (AFP.)

    CHINEProjet de loi sur le contrle des donnesLe Parlement chinois a mis au point un projet de loi sur la cyberscurit, qui renforce le contrle du pouvoir central sur les donnes. En discus-sion depuis des mois, le texte vise officiellement renforcer la protection de la vie prive des internautes contre le pira-tage informatique et les re-vendeurs de donnes, mais il largit galement les pouvoirsde lEtat pour accder aux donnes prives et bloquer la diffusion dinformations ju-ges illgales. Si le projet de loi est adopt, la collecte de donnes ltranger pour les besoins des entreprises devra tre approuve par le gouver-nement. Selon le Parlement, les agences gouvernementa-les dfiniront un code de con-duite sur la cyberscurit des secteurs sensibles comme les tlcoms, lnergie, le trans-port, la finance, la dfense na-

    tionale et ladministration. Le projet doit tre dbattu jus-quau 5 aot. (Reuters.)

    MALIUn cadre dAQMI tu KidalAli Ag Wadossene, lun des principaux responsables op-rationnels dAl-Qaida au Ma-ghreb islamique (AQMI), a t tu, dimanche 5 juillet, par les forces spciales franaises, prs de Kidal, dans le nord du Mali, a annonc, mardi 7, ltat-major des armes. Ali Ag Wadossene, souponn dtre lun des instigateurs de lenlvement de Serge Lazare-vic, en 2011, avait t relch en dcembre avec plusieurs autres djihadistes par les autorits maliennes en change de la libration de lotage franais. Lopration mene dimanche porte nouveau un coup dur aux groupes arms terroristes au Sahel , estime larme fran-aise. (Reuters.)

    souverain pontife. Il est impen-sable que brille lunit si la monda-nit spirituelle fait que nous som-mes en guerre entre nous, dans une recherche strile de pouvoir, deprestige, de plaisir ou de scuritconomique, et cela aux dpens des plus pauvres, des exclus, des sans dfense, qui ne perdent ja-mais leur dignit bien quils soient maltraits tous les jours , a-t-il lanc, provoquant les applaudis-sements des fidles.

    Mais unit ne veut pas dire uniformit , a-t-il insist : Limmense richesse de ce qui est vari, de ce qui est multiple ()nous loigne de la tentation de

    LE CONTEXTE

    Trois pays sont au programme du voyage du pape Franois en Amrique latine.

    QUATEURLe pape a commenc sa tourne sud-amricaine Quito, diman-che 5 juillet. Le prsident qua-torien Rafael Correa (gauche) est au pouvoir depuis 2007.

    BOLIVIELa deuxime tape du voyage dbute mercredi, La Paz, o il est reu par le prsident Evo Morales (gauche), au pou-voir depuis 2006.

    PARAGUAYLe pape est attendu Asuncion, vendredi, o il sentretiendra avec le prsident Horacio Cartes, du vieux Parti Colorado (conser-vateur), lu en 2013.

  • 8 | plante JEUDI 9 JUILLET 20150123

    Fivre Ebola : les graves manquements de lOMSDes experts proposent la cration dun centre de prparation et de riposte aux situations durgence

    Lpidmie dEbola, quisvit en Afrique delOuest depuis prs deseize mois, la plus lon-

    gue et la plus meurtrire depuis ladcouverte du virus en 1976, a r-vl les failles du systme de santmondiale. Dans un rapport publimardi 7 juillet, un comit dex-perts indpendants dresse un r-quisitoire svre de la riposte lpidmie, ciblant non seule-ment lOrganisation mondiale de la sant (OMS), mais aussi la r-ponse internationale des Etats.

    Ce bilan, assorti de nombreusespropositions de rformes, men sous la prsidence de Barbara Stocking, ex-directrice gnrale dOxfam Grande-Bretagne et pr-sidente du Murray Edwards Col-lege de luniversit de Cambridge, intervient alors que lpidmie de fivre Ebola est loin dtre termi-ne. Pire, la bonne nouvelle que constituait lannonce par lOMS, le 9 mai, de la fin de lpidmie au Liberia, nest plus dactualit.

    Le pays est de nouveauconfront au virus. Dans le comt de Margibi, lest de la capitale Monrovia, deux nouvelles per-sonnes ont t testes positives, le1er juillet, parmi les relations dun adolescent de 17 ans tomb ma-lade le 21 juin et dcd le 28 juin. Depuis le retour dEbola, les auto-rits ont ractiv le systme de sur-

    veillance dans les quinze comts dupays, et 133 contacts identifis sont suivis quotidiennement , expli-que le docteur Alex Gasasira, res-ponsable de lOMS pour le Liberia.

    Pour le moment, aucune expli-cation sur lorigine de la contami-nation na t fournie. Mais le re-tour dEbola dans ce pays qui apay le plus lourd tribut la mala-die, 4 806 morts pour 10 666 cas, nest pas tonnant. Avec les pays voisins o le virus est toujours ac-tif, on pouvait difficilement exclurequil y ait nouveau des cas , t-moigne Nicoletta Bellio, charge de mission pour Mdecins sans frontires (MSF) au Liberia.

    A louest de ce petit pays, le viruscontinue en effet de se propager. Selon lOMS, plus de vingt casnouveaux apparaissent chaque semaine, depuis la fin du mois de mai, en Sierra Leone et en Guine.Depuis le dbut de lpidmie, enmars 2014, la maladie a tu 11 235 personnes, sur plus de 27 500 cas.

    Autant dire que la mobilisationinternationale ne sest pas tra-duite par la fin dEbola. Cest cequessaye danalyser le rapportdes experts, sollicit par le direc-teur gnral de lOMS, le docteur Margaret Chan, pour valuertous les aspects de laction mene depuis le dbut de la flambe de maladie virus Ebola .

    Failles et lacunes

    Failles organisationnelles dans le fonctionnement de lOMS , la-cunes dans le Rglement sanitaireinternational [datant de 2005, ilorganise la scurit sanitairemondiale] , comportement nui-sible de certains Etats le bilan tir par les six experts indpen-dants est svre.

    Premire cible, lOMS, incapabledapporter une rponse dur-gence. Les rapporteurs rappellent le retard avec lequel lagence des Nations unies a dclar lpid-mie comme une urgence de sant publique de porte interna-tionale . La dclaration avait tfaite dbut aot 2014, alors que MSF, en premire ligne depuis le dbut de lpidmie, alertait lacommunaut internationale de-puis plusieurs semaines.

    Selon les experts, ce retard important et injustifiable a rsult, notamment, de la crainte de heurter les gouverne-ments . LOMS a une culture normative, peu accoutume grer des actions durgence dune telle ampleur et dune telle dure, dans plusieurs pays et simulta-nment ; elle nest pas non plus adapte lorsquil sagit dinterpel-ler ses Etats membres.

    Retard, mauvaise qualit despartenariats avec les autres par-ties prenantes , formation insuf-fisante de personnels peu habi-tus aux situations durgence, mauvaise communication, le ta-bleau est sombre. Cest en ma-tire de coordination de crise et de leadership que les comptences pchent le plus, et il faut comblerces lacunes , expliquent les rap-porteurs, qui prnent un change-ment de culture et de procdures de lorganisation.

    Les experts proposent la cra-tion dun centre OMS pour la prparation et la riposte aux si-tuations durgence , qui fusion-nerait deux domaines de travail,

    aujourdhui distincts : la lutte contre les flambes pidmiques et laction humanitaire. Ce centre,dot dun conseil indpendant, serait sous la responsabilit di-recte du directeur gnral de lOMS, et le chef du centre dispo-serait dune pleine autoritoprationnelle .

    Les experts proposent aussiquen cas de crise majeure un re-prsentant spcial soit nomm par le secrtaire gnral des Na-tions unies. Au-del, ils estiment que cest lOMS quil incombe toujours de diriger la politique sa-nitaire internationale. LOMS doit rtablir sa prminence en tantque protecteur de la sant mon-diale, proclame le rapport, mais cetobjectif exige des changements significatifs. Il ncessite aussi desmoyens plus importants.

    Violation du rglement

    Deuxime cible : les Etats. Les experts mettent laccent sur les nombreuses erreurs commises par la communaut internatio-nale, notamment les baisses de subventions lagence, qui a vuson pouvoir dachat reculer dun tiers depuis 2000 . Les Etats

    membres doivent, loccasion de lAssemble mondiale de la santde 2016, envisager de passer de lapolitique de croissance zro une hausse de 5 % des contributions fixes . Les experts demandent aussi aux pays de contribuer fi-nancer le fonds de rserve pour la riposte aux pidmies, annonc 100 millions de dollars (90 mil-lions deuros).

    Beaucoup de gouvernementsnont pas respect le Rglementsanitaire international. En viola-tion du Rglement, prs dun quartdes Etats membres ont institu desinterdictions de voyage et dautres mesures non prconises par lOMS , soulignent les rappor-teurs, qui proposent denvisager des procdures de sanction de-vant le Conseil de scurit desNations unies.

    LOMS a accueilli favorablementles propositions des experts. De nombreuses recommandationsfont cho ce que nous avions djexpertis et mis en chantier, et nous allons les tudier prcis-ment , assure Richard Brennan,charg de la rponse Ebola lOr-ganisation mondiale de la sant. p

    rmi barroux

    Pesticides : enqute prliminaire pour homicide involontaireUn viticulteur du Bordelais, mort dun cancer, avait utilis pendant des annes dans ses vignes des produits base darsnite de sodium

    P our la premire fois enFrance, une enqute prli-minaire a t ouverte par leple sant publique du TGI de Pa-ris pour homicide involontaire aprs la plainte contre X dpose par la famille dun vigneron bor-delais dcd dun cancer, provo-qu par lutilisation de pesticides.

    Linformation a t rendue pu-blique mardi 7 juillet, dans un communiqu commun par Phyto-Victimes et Gnrations futures, deux associations qui soutiennent la dmarche de la fa-mille. Jusqualors, en effet, les pro-cdures navaient port que sur la reconnaissance dun lien entreusages de produits chimiques et maladies chez les agriculteurs.

    Cette plainte au pnal a t d-pose, rappellent les ONG, pourfaire la lumire sur ce qui sestpass et dgager les responsabili-

    ts des firmes qui ont commercia-lis des produits sans avoir indiqules risques encourus . Il sagit aussi de comprendre la complai-sance de lEtat, qui a continu homologuer ces produits alors quon les savait dangereux.

    Danger reconnu depuis 1955

    Cest prcisment ce que nousattendions et esprions. Un classe-ment sans suite aurait t intol-rable pour nous , insiste Valrie Murat, fille du vigneron James-Bernard Murat, qui a dpos plainte le 27 avril avec lespoir de briser lomerta rgnant, selon elle, sur limpact sanitaire despesticides utiliss dans la viticulture.

    Atteint dun cancer du poumonen 2010, James-Bernard Murat a succomb des suites de cette ma-ladie le 8 dcembre 2012, lge de

    70 ans. En fvrier 2011, le caractreprofessionnel de sa maladie lie lutilisation de larsnite de so-dium avait t reconnu par lAssu-rance accidents des exploitantsagricoles (AAEXA). Selon sa fille, leviticulteur de Pujols (Gironde) autilis pendant quarante-deux ans, de 1958 2000, de larsnitede sodium pour traiter ses vignes contre lesca, une maladie due des champignons parasites qui at-taque le bois des ceps, sans jamaisavoir t alert sur la toxicit de ceproduit pour sa sant.

    Pourtant le danger du produitest reconnu depuis au moins1955, date de cration du tableau des maladies professionnelles lies larsenic et ses composs minraux. Mais lEtat a tard prendre les mesures ncessaires. Il na interdit quen 1973 larsnite desodium dans lagriculture, sauf

    dans la viticulture. Ce nest quen novembre 2001 quil a enfin dfini-tivement interdit et retir ce pro-duit base darsenic , souligneFranois Lafforgue, avocat de lafamille Murat. Quarante ans aprs les rvlations sur la toxi-cit du pesticide. Le Royaume-Unilavait, lui, banni ds 1961.

    Franois Veillerette, porte-pa-role de Gnrations futures, es-pre que lenqute ouverte par le parquet sera suivie dune instruc-tion qui marquera le dbut de la fin de limpunit dans cette trag-die des pesticides .

    Echeveau des causalits

    Il est difficile de faire aboutir ce genre daction car en matire p-nale on exige des preuves certai-nes, analyse Laurent Neyret, pro-fesseur de droit, spcialiste du droit de lenvironnement. Maislouverture de cette enqute prli-minaire peut permettre de dmlerlcheveau des causalits et des responsabilits ventuelles entreles entreprises qui commerciali-sent ce produit et lEtat.

    Dbut mai, le parquet de Paris aclass sans suite une plaintecontre X de mise en danger

    dautrui visant dnoncer la pol-lution de lair et ses consquencessur la sant. Le procureur justifiaitalors le classement sans suite par la multiplicit des sources de pol-lution : Cest lactivit (circula-tion routire, chauffage au bois,certaines activits industrielles ou agricoles) et non la carence all-gue des pouvoirs publics qui se trouve directement lorigine de lapollution atmosphrique et de sesconsquences ngatives en termes de sant , arguait-il alors.

    Sagissant de la plainte contre Xpour homicide involontaire dpose par la famille Murat, le produit comme la victime sontbien identifis. Il y a manifes-tement des dysfonctionnementsdans cette affaire qui appellent desexplications , insiste Me Laffor-gue. p

    laetitia van eeckhout

    LEtat na interdit

    quen 1973

    larsnite

    de sodium dans

    lagriculture,

    sauf dans

    la viticulture

    FRANOIS LAFFORGUE

    avocat de la famille Murat

    Dsinfection dans un centre de traitement dEbola, Monrovia, le 30 juin. ABBAS DULLEH/AP

    Cest en matire

    de coordination

    de crise et de

    leadership que

    les comptences

    pchent le plus ,

    expliquent

    les rapporteurs

    LES CHIFFRES

    11 235Le virus a tu 11 235 personnes sur 27 550 cas. Le bilan slve, au 1er juillet, 4 806 morts(sur 10 666 cas) au Liberia, 3 931 morts (sur 13 119 cas)en Sierra Leone et 2 482 morts (sur 3 729 cas) en Guine.

    16Cest le nombre de personnes tues par le virus hors de ces trois pays dAfrique de lOuest, princi-palement au Nigeria et au Mali.

    1 548Cest le nombre de personnes tues par les diffrentespidmies Ebola, entre 1976, lapparition du virus, et 2013.

    91Cest, depuis un mois, le nombre de nouveaux cas enregistrs,en Guine et en Sierra Leone.

    LES DATES

    201422 mars

    Lpidmie dEbola est dclare en Guine (le premier dcs, le cas zro , remonterait au 6 dcembre 2013).31 mars

    Le Liberia est touch par Ebola.26 mai

    La prsence dEbola est confirme en Sierra Leone.8 aot

    Lpidmie dEbola qui svit en Afrique de lOuest est une ur-gence de sant publique de por-te mondiale , dclare lOMS.

    201519 janvier

    Fin officielle de lpidmie au Mali.9 mai

    LOMS dclare la fin de lpid-mie au Liberia.28 juin

    Dcs dun jeune homme conta-min par Ebola au Liberia.

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