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Maurice Thévenet C e chapitre fournit les repères nécessaires à l’apprentis- sage de la gestion des ressources humaines. Celle-ci se situe dans un contexte, elle a développé ses propres modes d’approche, elle fonctionne à partir d’une série d’hypothèses souvent implicites sur la personne, l’entre- prise ou le monde économique, qu’il est indispensable de prendre en compte. Ce chapitre aborde donc la fonction « de l’extérieur » en s’interrogeant sur les services rendus par la GRH, avant que nous n’en voyions le contenu et les processus au cours des chapitres ultérieurs. 1 Le sens de la gestion des ressources humaines 1.1 Gérer les ressources humaines ? La gestion des ressources humaines, c’est de la ges- tion 1 , une gestion particulière puisqu’elle concerne les ressources humaines, c’est-à-dire les personnes qui com- posent une organisation. Les ressources humaines ne sont pas une catégorie particulière : il faut donc aborder leur gestion comme une fonction parmi d’autres. Faire de la gestion des ressources humaines, ce n’est pas sortir de la logique de l’organisation, dont la raison d’être est de fournir des biens ou des services à un envi- ronnement prêt à les accepter. Faire de la gestion des ressources humaines, ce n’est pas non plus une acti- vité de soutien social, d’aide, ou d’animation du social 1. Voir l’ouvrage de Bernard Galambaud, directeur de recherche à l’institut Entreprise et personne, et professeur à l’ESCP-EAP : Si la GRH était de la gestion, Éditions Liaisons, 2002, Paris. Chapitre 1 L’entreprise, la gestion et les ressources humaines PARTIE I – RH POUR LENTREPRISE Ce chapitre aborde les questions suivantes : Qu'est-ce que la « gestion » dans l’expres- sion « gestion des ressources humaines » ? Quelle est la place de la gestion des ressources humaines parmi les autres fonctions de l’entreprise ? Quelles sont les problématiques majeures de gestion d’entreprise pour la GRH ? Qu'impliquent pour la GRH les évolutions profondes du travail ? Quels sont les critères de performance de la GRH ? © 2012 Pearson Education France – Fonctions RH, 3e édition – Maurice Thévenet, Cécile Dejoux, Éléonore Marbot, Étienne Normand, Anne-Françoise Bender, François Silva

L’entreprise, la gestion et les ressources humaines de l’entreprise ? • Quelles sont les problématiques majeures de gestion d’entreprise pour la GRH ? • Qu'impliquent pour

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Maurice Thévenet

C e chapitre fournit les repères nécessaires à l’apprentis-sage de la gestion des ressources humaines. Celle-ci

se situe dans un contexte, elle a développé ses propres modes d’approche, elle fonctionne à partir d’une série d’hypothèses souvent implicites sur la personne, l’entre-prise ou le monde économique, qu’il est indispensable de prendre en compte. Ce chapitre aborde donc la fonction « de l’extérieur » en s’interrogeant sur les services rendus par la GRH, avant que nous n’en voyions le contenu et les processus au cours des chapitres ultérieurs.

1 Le sens de la gestion des ressources humaines

1.1 Gérer les ressources humaines ?

La gestion des ressources humaines, c’est de la ges-tion1, une gestion particulière puisqu’elle concerne les ressources humaines, c’est-à-dire les personnes qui com-posent une organisation. Les ressources humaines ne sont pas une catégorie particulière : il faut donc aborder leur gestion comme une fonction parmi d’autres.

Faire de la gestion des ressources humaines, ce n’est pas sortir de la logique de l’organisation, dont la raison d’être est de fournir des biens ou des services à un envi-ronnement prêt à les accepter. Faire de la gestion des ressources humaines, ce n’est pas non plus une acti-vité de soutien social, d’aide, ou d’animation du social

1. Voir l’ouvrage de Bernard Galambaud, directeur de recherche à l’institut Entreprise et personne, et professeur à l’ESCP-EAP : Si la GRH était de la gestion, Éditions Liaisons, 2002, Paris.

Chapitre 1

L’entreprise, la gestion et les ressources humaines

Partie i – rH Pour l’entrePrise

Ce chapitre aborde les questions suivantes :

• Qu'est-ce que la « gestion » dans l’expres-sion « gestion des ressources humaines » ?

• Quelle est la place de la gestion des ressources humaines parmi les autres fonctions de l’entreprise ?

• Quelles sont les problématiques majeures de gestion d’entreprise pour la GRH ?

• Qu'impliquent pour la GRH les évolutions profondes du travail ?

• Quels sont les critères de performance de la GRH ?

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© 2012 Pearson Education France – Fonctions RH, 3e édition – Maurice Thévenet, Cécile Dejoux, Éléonore Marbot, Étienne Normand, Anne-Françoise Bender, François Silva

4 Partie I – RH pour l’entreprise

(voir focus 1.1). Ce peut l’être mais ce n’est pas que cela. Si une organisation a besoin de ressources humaines pour assumer son activité, la GRH a pour but d’opérer au mieux l’adéquation entre les attentes et les caractéristiques forcément différentes des personnes et d’une entreprise.

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s 1.

1 Pourquoi ne pas faire de GRH

De nombreux professeurs en GRH se sont trouvés dans la situation paradoxale de déconseiller à leurs étudiants de rejoindre la fonction. À 24 ans et après des études supé-rieures, en gestion par exemple, il est toujours nécessaire de discerner la motivation à rejoindre le monde de la GRH. Bien entendu, la vocation existe. Parfois, les motivations sont plus curieuses. Il peut s’agir d’échapper à la gestion « courante » de l’entreprise, perçue comme difficile, brutale et inhumaine, ou alors d’intervenir dans le social avec des idées naïves sur les personnes, la vie des organisations, voire le monde. Dans ces cas-là, il vaut mieux ne pas faire de GRH : on ne peut qu’être déçu et avoir ensuite de la difficulté à quitter la fonction.

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Rappeler que la GRH relève de la gestion a deux significations principales.

• La première est de considérer cette fonction comme aussi banale que la fonction finan-cière, commerciale ou logistique. En ce sens, elle doit contribuer à l’activité et à l’efficacité de l’organisation. Elle ne se situe pas en dehors de cet objectif général, même si ce dernier se décline de manière différente d’une fonction à l’autre.

Être une fonction à part entière se traduit concrètement par quelques signes qui n’ont pas toujours été évidents dans l’histoire. Tout d’abord, la GRH figure comme fonction dans l’organigramme. Dans la plupart des cas, elle reporte directement à une direction générale ; son titulaire est fréquemment membre du comité de direction. Plus clairement encore, la fonction a un budget qui concerne les rémunérations et les salaires, mais aussi le développement des compétences et celui des organisations.

• La seconde signification est de voir dans la gestion une démarche à trois phases présentes dans les ressources humaines comme dans d’autres domaines dans et hors de l’entreprise (voir focus 1.2).

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2 Ce que « gérer » veut dire

• Analyser, diagnostiquer. Constater une situation, la décrire, mesurer les carac-téristiques fortes, le potentiel d’évolution, la sensibilité aux changements, à l’environnement, etc.

• Décider. Choisir et traduire en actes.

• Contrôler. Vérifier la pertinence de ses choix, contrôler leur efficacité selon des critères fixés.

La gestion est un processus parce que le contrôle conduit à modifier l’analyse et donc les choix futurs.

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5Chapitre 1 – L’entreprise, la gestion et les ressources humaines

Il y a « gestion » dès que ce processus existe. Un ménage gère son budget en faisant un état de ses entrées et de ses sorties d’argent, de ses besoins et de ses envies. Il prend des déci-sions de dépenses, d’investissement, d’économies. Régulièrement, il se connecte à Internet pour suivre son compte. Certains parlent de gestion du sommeil : repérer la fréquence et la durée de ses cycles, changer ses heures de coucher et de lever, vérifier la pertinence de ses choix. On peut donc parler de « gestion » à propos de beaucoup de choses.

Dans l’entreprise, il est normal que le mot « gestion » se soit généralisé au point que l’on veuille cantonner la notion à ce domaine. En matière commerciale, on voit en quoi consis-tent l’analyse d’un marché, les décisions de prix et le contrôle de l’efficacité commerciale. En matière financière aussi, une analyse conduit à des choix de financement dont on exami-nera les résultats.

Il n’est pas pertinent de réduire la « gestion » aux aspects financiers. Gérer les ressources humaines ne consiste pas seulement à aborder cet aspect important et à ne voir dans la gestion des personnes qu’un profit à court terme ou quelques chiffres. La gestion des ressources humaines, c’est beaucoup plus.

1.2 La démarche de gestion en matière de ressources humaines

Le processus de la gestion s’applique aussi aux ressources humaines. C’est un domaine où il faut analyser, décider et contrôler.

Analyser

C’est repérer, observer, analyser, diagnostiquer, prendre en compte la réalité, ses caractéris-tiques, son potentiel d’évolution. Cette analyse prend différentes formes, au-delà de ce que fournissent les dossiers et les statistiques.

On peut observer les comportements, les façons de travailler et d’interagir. Souvent, au premier regard, le professionnel peut repérer les originalités du fonctionnement d’un atelier, d’un service administratif ou d’un magasin.

Le deuxième niveau d’analyse consiste à mieux connaître les activités et les besoins en personnel, quantitatifs et qualitatifs, pour mieux comprendre en quoi les ressources humaines doivent contribuer à l’activité et aux objectifs de l’entreprise : dans une entre-prise de haute technologie ou dans un secteur nécessitant de la main-d’œuvre, les besoins sont différents, tout comme la dépendance de l’organisation vis-à-vis de ses ressources humaines.

On peut ensuite regarder la composition de l’effectif, par catégorie de qualification, d’âge, de sexe (voir chapitre 7, « Gérer les compétences »).

On peut recenser les politiques de personnel : emploi, recrutement et sélection, affectation des personnes, rémunérations ou gestion des carrières. Les politiques d’évaluation permet-tent de mettre en évidence les critères implicites et explicites de mesure de l’efficacité du personnel. Les systèmes de sanction (positive et négative) complètent la prise en compte de l’évaluation.

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6 Partie I – RH pour l’entreprise

On peut aussi chercher les représentations. Relevant d’une approche culturelle, cette préoccupation revient à considérer que, dans toute organisation, ou société humaine, s’est construite une conception de la personne, c’est-à-dire des droits et des devoirs de l’organi-sation envers elle et des droits et des devoirs de la personne envers l’organisation.

Les opinions peuvent aussi être recensées. Mais il est important de relativiser cet aspect par rapport à toutes les autres facettes de l’analyse du terrain.

Décider

Gérer, c’est décider et agir. C’est ce qui en fait la difficulté. Le champ des décisions en la matière est étendu. Il concerne l’ensemble de l’entreprise quand on met en place une orga-nisation ou quand on transforme les conditions de travail. Il concerne les groupes quand on forme des équipes ou les personnes quand on touche à leur rapport au travail ou à leur situation personnelle. Il n’y a décision que s’il y a choix possible. C’est ce qui différencie la « gestion » de l’« administration » du personnel, où il suffit d’appliquer les règles, les procé-dures ou un statut.

Ces décisions relèvent de différentes échelles de temps : elles répondent à des besoins immédiats (pourvoir un poste, sélectionner un candidat, fixer une rémunération). À plus long terme, elles visent à construire un parcours de carrière et de formation, développer une politique de formation, mettre en place une gestion prévisionnelle des compétences, adapter les systèmes d’information.

Qui dit décision dit processus de prise de décision. Celui-ci inclut également un comité de direction, l’encadrement, les représentants du personnel et les personnes elles-mêmes.

Contrôler

Gérer, c’est mesurer et suivre les résultats des choix. Cela concerne le respect des règles, des procédures ou des politiques. C’est aussi mesurer la contribution des décisions prises sur le développement des stratégies de l’entreprise : par exemple, dans quelle mesure une campagne de communication et de recrutement a permis de remplir les objectifs de crois-sance ou de remplacement des générations sortantes. Il faut contrôler les frais de personnel déterminants dans les secteurs à forte utilisation de main-d’œuvre, par exemple. On peut contrôler les effets des décisions sur les personnes, leurs stratégies, leur développement, leur satisfaction. Enfin, un dernier niveau de contrôle concerne l’efficacité de la fonction RH elle-même.

Définir ces trois étapes ne signifie pas forcément que la « gestion » soit effective : y a-t-il vraiment gestion quand le recrutement, la gestion des carrières ou l’organisation du travail sont fixés ou conçus par la règle ou le statut ? Bien entendu, il existe toujours des marges de manœuvre et des lieux interstitiels de décision, mais les possibilités de gestion sont faibles.

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7Chapitre 1 – L’entreprise, la gestion et les ressources humaines

1.3 Définition

La gestion du personnel peut être abordée à trois niveaux : l’activité, les personnes et le temps (voir figure 1.1).

PERSONNES ACTIVITÉ

Temps

Figure 1.1 – La gestion du personnel.

L’activité

Il y a gestion du personnel quand une activité nécessite la contribution des personnes. Sans activité, il n’y a plus de gestion du personnel. Ce n’est pas qu’une lapalissade. En effet, l’his-toire des entreprises montre que des marchés ou des activités disparaissent : les chaises à porteurs, les diligences et le Minitel n’existent plus. Les entreprises naissent et disparaissent pour des raisons internes ou externes, quand leur activité n’est plus adaptée ou ne rencontre plus de demande.

L’activité à réaliser par les personnes est la base de la gestion du personnel. Comme la comp-tabilité pour la finance, l’activité et le travail fondent la gestion du personnel. Partant d’une activité à réaliser, il s’agit de la transformer en tâches, en qualifications, en compétences, et en organisations.

À la gestion du personnel sont donc associées les notions de :

• organisation du travail ;

• structure ;

• tâche ;

• conditions de travail ;

• process ;

• règles et procédures ;

• projets.

Faire de la gestion des ressources humaines revient à agir à ces différents niveaux (voir aussi exemple 1.1) :

• organiser le travail ;

• améliorer les conditions de travail ;

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8 Partie I – RH pour l’entreprise

• faire évoluer les structures ;

• constituer des équipes et des groupes de projet ;

• améliorer les process.

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1.1 La GRH doit-elle s’occuper d’organisation ?

Une question apparaît souvent relative au champ d’action de la gestion du personnel. Devrait-elle comprendre les missions de construction, développement et maintenance des organisations ? L’importance prise par l’organisation et les systèmes d’information a conduit à en faire une fonction particulière. Avec les technologies de l’information, la fonction requérait des compétences si spécifiques qu’il fallait en faire une fonction à part pour intervenir de manière transversale dans l’entreprise. Dans les banques et les assurances par exemple, de très puissantes directions de l’organisation mettaient en œuvre des modes de traitement de l’information.

Pourtant, une organisation n’existe pas sans les personnes. Organiser, c’est définir le cadre des activités de chacun, mais la performance dépend de la manière dont chacun s’appro-prie ces modes de fonctionnement. Beaucoup de responsables des ressources humaines ont donc pris en charge cette mission au fur et à mesure que les technologies étaient mieux maîtrisées. Organisation et personnes devenaient évidemment indissociables.

Exem

ple

1.1

Donner de l’importance à l’activité, c’est reconnaître que la contribution de chacun à un processus est à la base du fonctionnement d’une organisation. Cela met en lumière que :

• Les personnes ne font pas que se soumettre aux organisations : ces dernières sont aussi flexibles et s’adaptent aux personnes.

• Personnes et activités ne peuvent être abordées séparément. Des accords de gestion des compétences insistent sur le lien fort entre l’évolution des organisations et les compé-tences acquises.

Les personnes

C’est l’aspect le plus visible de la gestion des ressources humaines :

• sélectionner et recruter ;

• affecter ;

• contrôler ;

• rémunérer ;

• assurer les conditions de vie au travail ;

• gérer la carrière ;

• former ;

• licencier ;

• assurer les relations sociales ;

• évaluer.

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9Chapitre 1 – L’entreprise, la gestion et les ressources humaines

Cette liste non limitative peut se structurer de différentes manières :

• selon les étapes de la relation entre employeur et salarié du début jusqu’à la fin du contrat ;

• selon que l’on envisage la relation avec l’individu ou le collectif (dans les relations sociales) ;

• selon les fonctions à remplir concernant le personnel pour que l’activité soit assurée (voir focus 1.3).

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3 Approche selon les fonctions principales

Staffing. S’assurer quantitativement et qualitativement que les ressources humaines contribuent à l’activité : c’est la fourniture de compétences, l’anticipation des besoins futurs. Le staffing inclut l’alimentation des postes de travail et les succession planning.

Motivation. Créer les conditions psychologiques d’une activité efficace. Cela consiste à s’assurer des attitudes nécessaires à un travail effectif. Cette fonction de motivation ne recouvre pas seulement l’utilisation de techniques spécifiques mais elle s’intéresse aussi au mode d’organisation, aux relations, à l’ambiance de travail.

Rémunération. Cette fonction est centrale dans la relation contractuelle entre la personne et l’entreprise. Il faut entendre par rémunération les aspects financiers du salaire et de ses compléments ainsi que les rétributions plus psychologiques.

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Les relations au quotidien sont une part moins visible de la GRH. Le service du personnel est un lieu où les personnes viennent évoquer leurs problèmes, plus ou moins liés au travail. C’est une part importante de l’activité de la fonction même si elle ne donne pas lieu à des statistiques particulières.

Ensuite, d’autres acteurs que le service du personnel contribuent à la fonction, comme les managers de proximité, qui traitent au quotidien des problèmes professionnels ou person-nels, de l’avenir ou de la vie au travail (et parfois en dehors) des personnes.

« S’occuper des personnes » est une manière d’évoquer la gestion des ressources humaines. Mais cette expression recouvre une grande variété de sens. C’est :

• Comprendre la complexité du comportement humain, des compétences, stratégies, systèmes de représentations des individus. Comprendre la complexité du collectif dans l’interpersonnel, les groupes, les rapports entre groupes et le fonctionnement même du rassemblement de personnes qu’est une organisation.

• Prendre des décisions concernant ces personnes. Le contrat de travail ne définit qu’une petite partie des modalités de ce rapport au travail. Que ce soit dans le cadre de sa zone d’autorité, grâce aux procédures ou dans le relationnel, la GRH est un tissu de décisions qui concernent les personnes et influent sur l’entreprise.

• Contrôler les personnes. Toute organisation évalue et contrôle l’activité des personnes, formellement (entretien annuel) ou de manière plus informelle. Dans toute société humaine, il existe des modes d’évaluation. Dans une entreprise, il suffit de regarder les mécanismes de récompense et de sanction, qui s’expriment dans les promotions ou les rémunérations.

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10 Partie I – RH pour l’entreprise

Il est bon de rappeler l’importance des personnes alors que la GRH se décline en de nombreux outils et techniques, en des systèmes d’information sophistiqués, en des pratiques externa-lisées.

Le temps

C’est la troisième dimension de la gestion du personnel. Traiter de l’activité et des personnes doit se faire dans cette perspective (voir tableau 1.1) :

• D’une part, on gère à différentes échéances temporelles.

• D’autre part, la GRH relève d’une temporalité qui lui est propre.

D’abord se présentent les exigences de « l’immédiat ». Vérifier l’effectif disponible, s’assurer que tous les postes sont tenus le matin, contrôler les horaires et la présence : c’est la base pour que l’activité du jour soit assurée. Affecter le travail, remplacer une personne absente, résoudre des problèmes de conflit, réagir à un accident du travail sont autant de situations qui illustrent le court terme du quotidien.

Vient ensuite le temps des résultats, rythmé par la nécessité de relever, d’établir, de reporter : préparer un plan de formation, évaluer des performances, établir un contrat de travail, une fiche de paie…

Le troisième temps est celui des personnes, celui de leur existence propre, de l’apprentissage ou du développement personnel. C’est gérer une carrière, faire de la gestion prévisionnelle, élaborer des référentiels de compétences, assurer des apprentissages personnels et organi-sationnels.

Le quatrième temps est celui de l’institution. Il dépasse l’échelle des carrières individuelles et peut concerner la culture par exemple.

Tableau 1.1 : Les quatre temps de la GRH

Immédiat Résultats Les personnes L’entreprise

Caractère L’exigence du quotidien

Le rythme des reports

Le temps de la personne humaine

Le temps de l’institution

Illustrations Assurer les postes de travail

Gestion administrative des dossiers personnels

Plan de formation

Gestion du budget de personnel

Établissement des contrats de travail

Gestion de carrière

Apprentissage des compétences

Renforcer les valeurs positives

Assurer l’équité des pratiques

Honorer les obligations de la responsabilité sociale de l’entreprise

Les temps sont multiples. Les décisions de gestion du personnel ne peuvent être cantonnées à l’immédiat, même si les demandes des dirigeants ou des salariés lui sont le plus souvent liées : recrutement, licenciement, augmentation des salaires, etc.

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11Chapitre 1 – L’entreprise, la gestion et les ressources humaines

La notion de stratégie a été associée à la GRH depuis les années 1980 pour plusieurs raisons :

• Les ressources humaines sont un des moyens de mise en œuvre de la stratégie (adapta-tion des effectifs, des compétences, évolution des organisations, etc.).

• On doit avoir une vision stratégique des pratiques de GRH en s’interrogeant sur le potentiel d’évolution et d’influence des actions prises : la portée d’une politique de stop-and-go pour le recrutement (recrutement par « paquets » en fonction des besoins ou des conjonctures).

• Les ressources humaines sont un domaine stratégique en elles-mêmes. Les entreprises peuvent se fixer des objectifs en matière d’équité et de politique de rémunération, de diversité, de conditions de travail, de relations sociales, et organiser leurs pratiques selon ces lignes directrices. Avoir des lignes directrices en GRH est exigeant mais s’en priver est dangereux.

Outre les différentes échéances temporelles, un second aspect du temps caractérise encore plus la GRH : le différentiel de temporalité de la GRH par rapport aux autres temporalités structurant la vie de l’entreprise. Le temps des personnes n’est pas celui des marchés, le temps des carrières, des apprentissages, de la motivation ou du changement n’est pas celui des reportings trimestriels ou des mouvements de concurrence.

C’est là une difficulté essentielle de la GRH : on exige d’elle des actions que le temps dispo-nible n’autorise pas toujours. Par exemple, un changement brutal de marché oblige à changer d’activité alors que le temps du recrutement ou de la formation de personnels existants ne s’ajuste pas aux besoins de la stratégie. Ou alors on veut fusionner deux organisations mais l’apprentissage de nouvelles structures de coopération entre deux entités sera en décalage avec les besoins du marché ou les attentes des nouveaux dirigeants.

À l’inverse, l’opportunité d’une offre intéressante à l’extérieur pousse le salarié à demander à son entreprise des gages de reconnaissance difficiles à satisfaire rapidement. Les dysfonc-tionnements révélés lors d’un conflit social ou d’un accident ayant provoqué de l’émotion ont besoin de temps pour être résolus, et le conflit se termine alors par des mesures à court terme qui réduisent la pression sans répondre aux problèmes posés.

Une difficulté pour les responsables de la fonction est de faire valoir ces exigences tempo-relles.

Activité-personnes-temps

Gérer les ressources humaines, c’est agir à ces trois niveaux dans la plus grande cohérence. Il ne s’agit pas seulement de faire évoluer les organisations et d’attendre que les personnes s’y moulent efficacement ni de s’occuper seulement des personnes sans référence aux exigences d’activité. Il faut parfois renoncer à l’idéal du court terme pour honorer l’avenir, solliciter l’histoire pour comprendre une situation et ne pas se laisser aveugler par la conjoncture. Il faut également agir sur les personnes en fonction de l’activité à réaliser mais aussi faire évoluer les activités en fonction des personnes.

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12 Partie I – RH pour l’entreprise

2 La GRH et les autres grandes fonctions de l’entreprise

La gestion du personnel peut être comparée aux fonctions qui l’accompagnent dans l’en-treprise. La fonction ressources humaines ne produit rien mais apporte des services. La manière dont ces autres fonctions évoluent influe sur elle.

La notion de fonction dans l’entreprise recouvre les activités de base dont la combinaison constitue l’activité globale de l’entreprise. La notion est moins claire aujourd’hui puisque la transversalité conduit de plus en plus à intégrer ces activités. Cependant, la prise en compte de fonctions de base décrit ce qui se fait dans l’entreprise avec les conséquences sur la GRH.

Traditionnellement, trois grandes fonctions sont abordées :

• la production (de biens ou de services) ;

• la commercialisation ;

• les approvisionnements, achats.

D’autres fonctions servent ces fonctions principales :

• les ressources humaines ;

• la finance ;

• l’organisation ;

• le marketing, etc.

Aujourd’hui, cette configuration est fortement remise en cause. Des fonctions importantes émergent, comme la recherche et le développement ou la logistique. La fonction organisa-tion, développée avec l’informatique, devient une fonction à part entière, parfois rattachée aux RH. Plus encore, certaines fonctions sont totalement ou partiellement externalisées, comme la fabrication ou certaines fonctions administratives.

Nous examinerons quelques liens entre la GRH et de grandes fonctions pour ce qu’elles illustrent en termes de besoins exprimés à la fonction personnel.

2.1 Les ressources humaines et la production

Par production, nous entendons évidemment celle de biens ou de services. La partie manu-facturière des emplois concerne aujourd’hui moins du quart seulement des emplois.

Même si le stéréotype de l’entreprise est encore parfois l’atelier des Temps modernes de Charlie Chaplin, même si Plantu représente encore l’entreprise comme une usine aux toits en dents de scie et aux cheminées fumantes, cela ne représente plus la réalité du monde de la production.

Dans la production de services, on produit même en collaboration avec le client. Aujourd’hui, les centres d’appel, la construction de logiciels, de jeux vidéo ou le service à la personne sont des activités de production.

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13Chapitre 1 – L’entreprise, la gestion et les ressources humaines

Le contexte de la fonction production

Plusieurs éléments de contexte montrent combien la fonction production est influencée par des évolutions externes à l’entreprise. L’évolution des contextes explique que les discours sur l’entreprise paraissent parfois décalés. Prenons quelques exemples.

La technologie

Sans doute les historiens noteront-ils la rapidité avec laquelle les nouvelles technologies de l’information ont irrigué le monde du travail, dans tous les secteurs de l’économie et pour tous les emplois. Il y a une trentaine d’années, certains s’interrogeaient sur l’adaptation à l’ordinateur, les freins au changement et les problèmes d’apprentissage. En quelques années, tout le monde « y est passé », et ces discours paraissent aujourd’hui incompréhensibles.

Mais le contexte technologique c’est aussi les robots, la sophistication des machines qui transforment le travail de l’ouvrier chimiste ou de l’employé de banque. Ces technologies ont permis de faire les choses plus vite et avec plus d’efficacité ; elles ont transformé le processus même du travail. Les systèmes de traitement automatique des données ont rompu la chaîne des opérations administratives traditionnelles et automatisé des traitements effec-tués auparavant de manière séquentielle par des opérateurs.

L’internationalisation de l’activité

Les marchés sont moins domestiques, tout comme la concurrence ou les fournisseurs. L’acte de produire n’est plus lié à la contrainte de proximité avec l’utilisateur. C’est évident pour les activités manufacturières comme le montrent les flux de produits et les étiquettes des produits consommés. Et encore, ces étiquettes sont trompeuses puisque le produit peut être constitué de composants élaborés dans divers pays.

Il en va de même dans les services. Lorsque vous appelez votre transporteur aérien, vous ne savez d’où vous répond l’opérateur, tout comme vous n’imaginez pas que des opérateurs traitent la nuit en Inde les informations vous concernant. Il en va même de la composition des livres dans des contrées où la langue de l’ouvrage n’est même pas parlée… Produire n’exige plus l’unité de lieu. Désormais, gérer la production, c’est faire du lieu une variable alors qu’il était une constante.

Des clients plus exigeants

Dans une économie qui a dépassé le stade de la pénurie, le client, devant tant de choix, est de plus en plus important et exigeant même s’il est producteur lui-même. Cette exigence, ce souci de qualité et de perfection entraînent de nombreuses obligations pour l’activité de production. On a pu noter la généralisation des démarches d’amélioration de la qualité ; elles ont modifié les façons de travailler et imposé une pression qui n’est pas de l’ordre de la cadence ou de la pénibilité physique…

Dans le domaine des services, la perception que le client a de la qualité des services pour lesquels il paie se joue dans la relation avec le « personnel en contact ». Les exigences du client se traduisent en conséquences très concrètes pour le personnel. Pour preuve, les agents de la distribution, des services publics ou des transports qui ont à faire face aux inci-vilités, à l’agressivité parfois, des clients et des usagers.

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14 Partie I – RH pour l’entreprise

De nouvelles attentes de la société

Les besoins de localisation, de sécurité pour l’environnement et ceux qui travaillent sont autant d’exigences de la société avec un impact sur ceux qui produisent. Un accident comme celui d’AZF a montré combien l’activité de production pose à la société des ques-tions auxquelles elle ne sait pas toujours bien répondre.

Des impératifs de production difficiles à concilier

Produire impose de multiples contraintes. Bien entendu, la tradition connaît la contrainte de la matière ou de l’outil. Mais l’économie moderne rencontre des tensions nouvelles.

Nous avons parlé des exigences de qualité : tout fabricant doit satisfaire de nombreuses normes auxquelles il ne peut se soustraire sous peine de ne pas se maintenir sur ses marchés.

Une deuxième tension vient des délais. Selon le proverbe, « le temps c’est de l’argent », et le raccourcissement des délais est une exigence économique. Plus le processus de fabrication est court, moins on immobilise de biens, de matières et donc d’argent. Le principe des flux tendus s’est ainsi généralisé : il permet, à chaque stade de la fabrication, de minimiser le stock de produits, matières consommables ou encours. Ce principe a créé des exigences nouvelles pour les opérateurs et les organisations de travail. Le délai est aussi une exigence de la clientèle, qui tolère de moins en moins de ne pas disposer immédiatement des produits commandés : les entreprises de vente par Internet doivent accomplir des prodiges logis-tiques pour satisfaire ce besoin d’immédiateté.

Un autre impératif concerne la variété et la rotation des gammes. On se souvient des prin-cipes du fordisme concernant la Ford T à une seule couleur. La standardisation des produits améliore la performance de la production. Cependant, la concurrence et la nécessité de soutenir la croissance conduisent à créer de nouveaux besoins ou à segmenter de manière plus fine les produits, voire à coller plus étroitement aux attentes des consommateurs. Cela conduit à varier les gammes et renouveler plus fréquemment les produits. Dans le secteur automobile, par exemple, il n’est pas rare de voir un « restylage » de modèle après seulement trois ans d’existence. Carlos Ghosn soutient que Nissan s’est redressée parce qu’elle a, entre autres, augmenté le nombre de nouveaux modèles sortis chaque année. Ceux-ci ne sont pas forcément nouveaux mais ils requièrent des techniques de fabrication permettant de faire du neuf avec une bonne part d’ancien. Le principe de la différenciation retardée pour personnaliser le produit le plus tard possible au cours de la fabrication est un des moyens d’organiser le travail pour faire face à cette tension.

La flexibilité est également un impératif. Pour que l’entreprise soit réactive aux besoins des clients, comme pour des raisons financières, le rythme de production doit s’adapter à la demande. Cela réclame de la flexibilité, c’est-à-dire une disponibilité du personnel en ligne adaptée aux besoins de la production. Cette exigence est évidente dans les activités saison-nières, comme l’agriculture. Des accords de modulation du temps de travail permettent à des entreprises de prévoir ce rythme d’activité durant l’année et d’adapter la quantité de travail disponible au flux de travail. Cela n’est pas toujours possible, dans la confection par exemple, ou dans des secteurs opérant sur des marchés qui ne sont pas toujours renouvelés automatiquement. La flexibilité s’exerce également à moyen terme quand il s’agit de prévoir

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15Chapitre 1 – L’entreprise, la gestion et les ressources humaines

des évolutions de technologie qui réclament l’acquisition de compétences nouvelles ou des mobilités géographiques.

Enfin, un autre impératif est la réduction des coûts. Les prix bas en supermarché dont personne ne s’étonne sont obtenus par l’amélioration des produits ou des process mais aussi par des contraintes organisationnelles qui mettent sous tension les opérateurs.

Des organisations du travail qui évoluent

Depuis plus d’un siècle, on a fait évoluer les organisations du travail en fonction de quelques concepts fondateurs (taylorisme ou « toyotisme », par exemple) ou de la disponibilité d’ou-tils de travail et de technologies nouvelles (voir chapitre 2 « Le référentiel de la GRH »). On peut décrire des évolutions dans des secteurs d’activité donnés mais il est difficile de géné-raliser pour toutes les activités de fabrication.

Quelques conséquences pour la gestion des ressources humaines

La GRH, pour servir de support à la fonction production, peut donc agir à différents niveaux :

• L’affectation des personnels, en compétence et en effectif, en fonction des exigences de qualité, de volume et de temporalité de la production.

• La gestion des compétences pour adapter les personnels aux organisations : ces compé-tences concernent les savoir-faire ou les savoir-être quand le travail collectif, ou la production du service, exige des qualités relationnelles, une capacité d’écoute, une maîtrise des émotions (dans le contact avec les usagers ou les clients par exemple).

• L’évolution des organisations du travail.

• L’attention aux questions d’ambiance et de climat dans les équipes de travail.

• La gestion de la flexibilité.

• Les problèmes de rémunération posés quand une production peut être associée à la personne.

2.2 Les ressources humaines et la commercialisation

Dans les années 1970 et 1980, le développement du consumérisme a illustré l’importance du client et de la prise en compte de ses besoins. Dans une économie développée, quand les offres à la clientèle sont nombreuses, la prise en compte du client et l’incitation à l’achat sont capitales. De nombreux slogans font du client le personnage central de l’entreprise : au-delà de l’affirmation à visée mobilisatrice, cela souligne l’évidence selon laquelle les ventes sont le seul moyen de faire rentrer de l’argent dans l’entreprise. Cette préoccupation du client a servi d’aiguillon aux démarches d’amélioration de la qualité et également de certification visant à donner une garantie à l’acheteur. Ces dernières années, la nécessité pour les entreprises d’améliorer leurs marges et leur efficacité a pu, dans certains secteurs, faire passer cette préoccupation au second plan. À la fin des années 2000 et avant la crise financière, la préoccupation du client est de nouveau centrale. L’innovation, la création de

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nouveaux produits et marchés redeviennent un moyen privilégié de recréer de la croissance et du profit. À cet égard, le plan très médiatisé que présente Carlos Ghosn le 9 février 2006, comme celui de son collègue Christian Streiff en 2007, était significatif : client et croissance en sont les maîtres mots.

La fonction commerciale est diverse selon les secteurs et les tailles d’entreprise. Ses emplois sont également très divers quant aux activités requises et aux compétences nécessaires (voir exemple 1.2).

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1.2 Quelques emplois de la fonction commerciale

• Le vendeur dans un magasin : en contact direct avec le client, il informe, conseille, procède à la vente.

• Le représentant itinérant : il démarche, gère les commandes.

• Le visiteur médical : il informe les médecins sur les produits et suggère la prescrip-tion.

• L’« administrateur » des ventes : il suit les dossiers de commandes et de clients, l’avancée des commandes et les règlements.

• Le commercial dans les produits de grande consommation : il traite avec la grande distribution. Il est vendeur mais surtout logisticien, merchandiser (conseil en organisation du lieu de vente), financier (gestion du budget avec l’enseigne et des conditions financières, etc.).

• Le technico-commercial dans des secteurs fortement techniques : il vend, adapte techniquement la solution, met en œuvre.

• Etc.

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1.2

Au-delà de la négociation avec un prospect, commercialiser peut couvrir des tâches très différentes :

• Informer.

• Organiser le lieu de vente.

• Assurer le marketing (participation à la conception du produit, à l’établissement de son prix, de sa distribution et de sa promotion).

• Négocier les conditions financières.

Mais aussi :

• Travailler à une meilleure connaissance des clients existants et potentiels (leurs attentes et leurs besoins), par l’écoute et des moyens plus sophistiqués comme la segmentation, qui cherche à mettre en regard des besoins spécifiques par catégorie de clientèle (comme le font les banques par exemple).

• Assurer une veille de son secteur : besoins, produits concurrents, changements socié-taux, etc.

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17Chapitre 1 – L’entreprise, la gestion et les ressources humaines

• Coopérer de manière plus étroite avec les autres fonctions de l’entreprise. On a souvent caricaturé les commerciaux comme ne se souciant que de leurs résultats propres. De plus en plus, les organisations tentent de pallier ce défaut en les intégrant le plus en amont possible dans le processus. Ainsi, dans la conception d’un produit, les commerciaux pourront devoir intégrer tôt, dans le processus, les enjeux et les préoccupations commer-ciales liés au produit envisagé.

En matière de RH se posent des problèmes de compétences. Elles sont relationnelles mais aussi organisationnelles, financières ou logistiques. C’est le cas pour les vendeurs auprès de la grande distribution.

Le problème de la motivation des commerciaux est également central ; c’est pour cette raison que de nombreux travaux traitent de leur mode de rémunération (voir chapitre 9, « Rémunérer le travail », et chapitre 17, « Gérer des équipes »). Quels sont les enjeux de la rémunération variable ? Quelle doit être sa part ? D’autres problèmes concernent la forma-tion et la fidélisation.

2.3 Les ressources humaines et la recherche-développement

Soulignons cinq traits majeurs de cette fonction : importance stratégique, omniprésence, questions de sous-traitance, questions d’organisation et les conséquences en matière de GRH.

Importance stratégique

La fonction R & D revêt une grande importance dans de nombreux secteurs : pharmacie, automobile, informatique, agroalimentaire, services informatiques, etc. La recherche et le développement d’aujourd’hui sont l’innovation de demain et les profits d’après-demain, alors que l’actualité des entreprises met plutôt l’accent sur les plans sociaux et les délocali-sations. La réduction des coûts apparaît alors comme l’unique canon de la gestion et de la stratégie. Bien entendu, la réduction des coûts est importante, elle permet de remettre les choses en ordre et de ne pas gaspiller. Mais, en aucun cas, elle ne crée du développement et de la croissance qui proviennent de l’innovation. Après les années de crise, beaucoup d’entreprises doivent répondre à de nouveaux marchés et à de nouveaux produits pour retrouver de la croissance.

Dans l’importance stratégique de l’innovation, il faut distinguer deux niveaux. Le premier est conjoncturel : les entreprises passent par des phases de croissance, d’investissement, de redressement de bilan, puis à nouveau d’investissement, dans l’innovation par exemple. Même si des entreprises ont des politiques, voire des cultures, de recherche et dévelop-pement et investissent continûment, on remarque une évolution sinusoïdale quand les besoins de recherche se font cycliquement ressentir, du fait du vieillissement des gammes, de concurrences nouvelles et des disponibilités financières.

Le second niveau est plus structurel : des secteurs d’activité requièrent plus d’innovation que d’autres. Le meilleur exemple en est la pharmacie, où les entreprises travaillent en permanence à la découverte de nouvelles molécules qui seront les bases des médicaments de demain. Ce sont des investissements à long terme, et seul cet investissement en continu

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18 Partie I – RH pour l’entreprise

donne la chance de découvertes que l’on ne peut jamais planifier. D’autres secteurs sont dans la même situation, comme l’armement, l’automobile, les cosmétiques, les télécommu-nications, l’électronique, etc. Les secteurs sont nombreux où cette activité requiert de gros budgets. L’agroalimentaire en est un exemple. Les consommateurs recherchent de la diver-sité mais aussi des produits semi-transformés mieux adaptés aux conditions de vie actuelles et respectueux des attentes en matière de sécurité alimentaire (voir exemple 1.3).

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1.3 Nestlé

Créée dans les années 1860 à Vevey en Suisse par un pharmacien, Henri Nestlé, l’entre-prise s’est toujours caractérisée par un fort investissement en recherche. L’importance symbolique attachée à la profession du fondateur en témoigne. Pharmacien, Henri Nestlé était, comme tous ses confrères de l’époque, un inventeur de produits. Il a inventé la farine lactée pour bébés afin de répondre aux besoins alimentaires de jeunes enfants.

D’ailleurs, si on reprend l’histoire de l’entreprise, des efforts importants ont toujours été menés pour l’innovation et la découverte de nouveaux modes d’alimentation plutôt que de produits alimentaires. Quand Nestlé reprend Maggi et ses « bouillons cubes », ce n’est pas d’un produit alimentaire qu’il s’agit mais d’une façon d’améliorer les plats ordinaires avec un produit économique, léger et ne nécessitant pas de réfrigérateur. Quand elle lance le Nescafé en 1938, ce n’est pas de café qu’il s’agit mais d’une manière de prendre le café qui permet de pallier les difficultés pratiques de fonctionnement des vieilles cafetières. D’ailleurs, le principal concurrent de Nescafé sera la machine à café électrique parce qu’elle rend un service pratique. En voulant adapter le principe des nouilles frites asiatiques, Nestlé crée Bolino et c’est encore de la R & D sur le plan du marketing mais aussi des processus de fabrication qu’il faut assumer pour aller au bout de ces idées.

La recherche permanente de nouveaux modes d’alimentation visant à suivre ou à créer des besoins en matière d’alimentation exige donc, même dans ce secteur qui cherche à satisfaire les besoins « primaires » des personnes, une recherche et un développement permanents.

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1.3

Importance financière

La recherche et le développement coûtent cher. Dans certaines entreprises (pharmacie, production de logiciels, exploration pétrolière), l’investissement en R & D atteint une part importante du chiffre d’affaires :

• Coûts humains importants, le personnel est qualifié et donc cher.

• Coûts en matériel.

• Coûts à supporter sur de longues périodes parce que les compétences collectives pren-nent du temps à se constituer et que les temps de la découverte et du développement n’épousent pas parfaitement celui des marchés.

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19Chapitre 1 – L’entreprise, la gestion et les ressources humaines

• Coûts « à risque » puisque l’on n’est jamais certain du retour sur investissement.

• Coûts (et gains) difficiles à mesurer. Des projets avortés permettent souvent d’en faire avancer d’autres.

Omniprésence de la R & D

La recherche et le développement ne concernent pas seulement les scientifiques en blouse blanche manipulant des éprouvettes dans un laboratoire. Tous les domaines de l’entreprise peuvent être concernés, l’innovation ne représentant que la partie émergée de l’iceberg.

Donnons quelques exemples d’autres domaines :

• Le marketing. L’innovation peut concerner la recherche de concepts de produits. Les recherches sur les consommateurs deviennent de plus en plus sophistiquées avec l’utilisa-tion du CRM qui traque les comportements, segmente les clientèles, anticipe des besoins, fidélise des consommateurs. Dans le champ du marketing, on inclut aussi le packaging (si important dans la cosmétique ou l’agroalimentaire). Le mode de distribution est également concerné.

• Les process. Un bon produit doit pouvoir être fabriqué à un coût convenable. Il s’agit d’imaginer des process de fabrication permettant de satisfaire aux exigences de qualité, de sécurité et de coût : dans la multiplication actuelle des modèles de voitures mises sur le marché, on note chez les principaux constructeurs le souci de disposer de plates-formes et de pièces ou systèmes communs qui réduisent les coûts de fabrication.

La circulation des flux. La rapidité, la fiabilité et la réduction des coûts exigent une maîtrise des flux de façon que chacun dispose en temps voulu des ressources nécessaires à son acti-vité sans perte de temps (et donc d’argent) et sans immobilisation inutile de ressources. En développant les flux tendus et en changeant les systèmes d’information, on améliore l’efficacité : des investissements de recherche et développement très importants ont été consacrés à ces domaines dans la dernière décennie.

Questions de sous-traitance

La recherche et le développement posent également des questions liées à la sous-traitance. L’entreprise a besoin de R & D, mais doit-elle la faire elle-même ? Le principe de collabo-ration en la matière existe depuis longtemps, même s’il est insuffisamment développé en France. Par exemple, on note dans certains pays une forte collaboration entre l’entreprise et l’université.

Aujourd’hui, la question de la R & D se pose différemment. Faut-il investir dans ce domaine avec des risques évidents de retour sur investissement ou faut-il développer l’activité de veille et des relations privilégiées avec des laboratoires, universités ou autres entités, de façon à « saisir » au bon moment les innovations pertinentes, quitte à les payer très cher ? Il n’y a pas de réponse unique. L’entreprise doit conserver la maîtrise de ses avantages compétitifs et son cœur de métier, lesquels sont souvent liés à une capacité de développe-ment à maintenir et à enrichir en permanence. Il existe en revanche d’autres domaines dans lesquels il est trop coûteux ou trop long de devenir excellent, sans espoir de jamais disposer

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20 Partie I – RH pour l’entreprise

de la masse critique des compétences permettant de réussir. Dans ce cas, la sous-traitance est plus envisageable.

Questions d’organisation

Enfin, la R & D pose de gros problèmes d’organisation. L’organisation du travail de la connaissance a des effets sur son efficacité. Mais quelle organisation optimale mettre en place ? On sait que des équipes doivent être régulièrement renouvelées, mais avec quelle fréquence et selon quelles modalités ? Quelle est la taille optimale des entités de recherche ? Une grande taille permet de rassembler de nombreuses et diverses compétences mais elle peut aussi rendre la communication difficile. La R & D ne doit pas être trop éloignée des opérations, mais on a aussi besoin de rassembler les chercheurs pour créer des synergies.

On note actuellement dans les grandes entreprises internationales différents mouvements dans ce domaine. Certaines concentrent leur recherche dans un endroit central et protégé : cela semble être aujourd’hui la stratégie des entreprises japonaises qui rapatrient sur l’ar-chipel toutes leurs activités stratégiques de recherche. D’autres essaient de rapprocher la R & D de leurs grands centres de production, qui sont leurs utilisateurs principaux. C’est le cas de l’automobile et des équipementiers (pour poursuivre l’exemple de Renault, c’est ce que précise Carlos Ghosn sur l’évolution de l’entreprise qui créera des centres de dévelop-pement dans plusieurs régions du monde).

Conséquences en matière de GRH

Plusieurs problématiques de gestion des ressources humaines sont à considérer. Première-ment, il faut attirer et fidéliser ces personnels aux compétences souvent spécifiques et peu interchangeables. Ce secteur est donc spécialement concerné par toutes les questions de gestion des talents.

Deuxièmement, on peut observer des problèmes de gestion des carrières de professionnels souvent très spécialisés, dont le temps de la créativité et de la production n’est pas forcément synchrone avec celui d’une carrière administrative. Par exemple se pose, dans ce secteur, le problème de la gestion des experts : comment faire évoluer leurs postes, leur statut hiérar-chique, leur rémunération, leur zone de responsabilité ?

Troisièmement, des problèmes de conditions de travail peuvent émerger : l’activité de R & D n’est pas soumise aux mêmes contraintes de cadences et de temps que les activités opérationnelles de fabrication. On peut alors s’interroger sur les conditions de travail et d’environnement qui s’adaptent à ce genre d’emplois, voire suscitent ou favorisent de la performance.

Quatrièmement, des aléas de constitution et de gestion d’équipes sont susceptibles d’ap-paraître : l’activité de R & D n’est pas isolée, elle doit au contraire s’exercer en étroite collaboration avec les autres fonctions de l’entreprise.

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21Chapitre 1 – L’entreprise, la gestion et les ressources humaines

2.4 Les ressources humaines et la finance

La finance est centrale puisque l’entreprise est un agent économique dont l’activité s’ex-prime en termes financiers, avec l’unité monétaire. Le rôle de la fonction financière est d’assurer à l’entreprise les moyens financiers de son activité : lui permettre de disposer des matériels, matières, ressources nécessaires. La fonction valorise l’activité : elle la traduit en unités monétaires. Un dernier aspect doit être noté : les finances commandent le démarrage et la fin de l’entreprise : une société n’est constituée qu’avec un capital, et c’est l’incapacité de l’entreprise à honorer ses dettes qui scelle sa fin.

Les liens entre les finances et la GRH sont importants et plus subtils qu’il y paraît. Depuis des décennies, on essaie de valoriser l’humain en termes financiers pour traduire le plus fidèlement possible ce que coûtent et rapportent les ressources humaines, afin qu’elles n’ap-paraissent pas seulement comme des charges mais aussi des produits potentiels. Créer cette comptabilité sociale n’est pas chose aisée du fait des problèmes de valorisation. Il est vrai-semblable que jamais des normes comptables ne permettront de traduire avec sincérité et pertinence la GRH en termes financiers. Cependant, l’effort n’est pas inutile ; l’exercice a la vertu de s’interroger en termes de coûts et bénéfices sur les aspects humains. On n’imagine pas y parvenir totalement, mais ainsi on n’écarte pas non plus cette référence fondamen-tale pour un agent économique, pour lequel l’euro investi quelque part n’est pas investi ailleurs…

La valorisation du social se fait par l’évaluation des coûts liés au personnel. Salaires et charges sociales constituent dans certains secteurs une part importante de l’ensemble des charges. On ne peut d’ailleurs pas bien comprendre les politiques sociales si l’on ne prend pas en compte ce facteur. Dans le service, les frais de personnel sont une part déter-minante des coûts ; toute décision se traduit donc immédiatement par des conséquences importantes sur les marges et donc la compétitivité. Il en va de même dans des indus-tries nécessitant beaucoup de main-d’œuvre comme le textile. Dans d’autres secteurs au contraire, comme l’électronique ou la fabrication de microprocesseurs, la part des coûts de personnel est moindre et les mêmes décisions sur le coût ou la durée du travail n’au-ront absolument pas les mêmes conséquences. On sait, dans les décisions de délocalisation, combien ce facteur joue (pour combien de temps ?) un rôle important.

Une deuxième question concerne la valorisation des coûts moins visibles liés au personnel. C’est la notion de coût caché. Par exemple, de mauvaises conditions de travail peuvent entraîner de l’absentéisme et du turnover, qui ont un coût (direct et indirect). Les politiques ou l’absence de politiques de personnel peuvent avoir un ensemble de coûts cachés, invi-sibles dans un compte de résultat.

La troisième question sur les rapports entre finances et ressources humaines a trait à la manière de les prendre en compte financièrement. Dans les comptes, les frais de personnel sont des charges, c’est-à-dire des consommations propres à une annuité comptable. Le système a l’avantage de la facilité, de la clarté et de la simplicité. Cependant, il n’est pas tout à fait juste. Les coûts de personnel représentent aussi un investissement, et les compé-tences, des ressources disponibles pour l’avenir. C’est le raisonnement des capital riskers qui évaluent un projet pour éventuellement lui apporter du financement : les financiers sont alors de véritables responsables de ressources humaines, ils évaluent les compétences des

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22 Partie I – RH pour l’entreprise

porteurs du projet, la qualité et la solidité des équipes. Au-delà de l’idée et du business plan, c’est la qualité des hommes qui fait souvent la différence pour investir ou non. L’action des financiers consiste donc à considérer non pas le coût mais le potentiel représenté par une équipe et des personnes.

Ainsi, les ressources humaines pourraient figurer à l’actif du bilan. Elles pourraient aussi se situer au passif, comme un potentiel de dettes de l’entreprise vis-à-vis de ces personnes. On connaît les obligations auxquelles sont soumises les entreprises américaines : elles doivent présenter la dette potentielle représentée par le paiement de pensions pour leurs salariés. Sans être dans la même situation, les entreprises françaises pourraient, avant que des situations difficiles ne leur fassent constituer des provisions, prendre en compte la dette potentielle en termes de salaires ou d’indemnités à verser.

3 La GRH et les grandes problématiques de la gestion

Une autre manière de décrire le champ et la portée de la gestion des ressources humaines consiste à observer son rôle et son importance dans quelques grandes problématiques de management. Nous en retiendrons deux principales, l’internationalisation et les fusions, acquisitions ou restructurations.

3.1 Internationalisation

Les raisons de l’internationalisation

La mondialisation, l’internationalisation des marchés, la globalisation sont devenues les références obligées de l’économie. L’économie est internationale, que ce soit pour les flux de produits, de matières, d’argent et de personnes. L’ouverture des marchés depuis les années 1980 n’a fait que renforcer l’internationalisation des échanges qui a existé à de nombreuses époques de l’histoire économique. L’internationalisation actuelle ne se traduit pas que par des problèmes de localisation d’entreprises, elle est évidente dès que l’on ausculte les étiquettes ou les modes d’emploi de tous les produits : les listes d’ingrédients sont exprimées en de nombreuses langues, les éléments et pièces de n’importe quel appareil sont fabriqués aux quatre coins du monde. En regardant les résultats des grandes entreprises du CAC 40, on s’aperçoit que la plus grosse part de leur activité et de leur profit se réalise hors de France même si heureusement leur capitalisation boursière reste encore majoritairement située dans l’Hexagone pour certaines. Quand on sait qu’un Français sur quatre travaille pour l’exportation, on prend la mesure de l’importance du phénomène.

Au niveau de l’entreprise, l’internationalisation peut s’imposer pour plusieurs raisons :

• étendre les marchés parce que les marchés domestiques sont saturés ou pas assez impor-tants pour assurer la croissance et financer l’innovation ;

• se procurer les matières premières, compétences, ressources non disponibles sur le marché intérieur ;

• compenser la concurrence subie sur les marchés domestiques ;

• trouver de meilleurs fournisseurs, coûts ou marchés ;

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23Chapitre 1 – L’entreprise, la gestion et les ressources humaines

• localiser les activités de manière optimale par rapport au coût des ressources, à la proxi-mité des marchés, aux exigences légales ou contractuelles (quand un client exige qu’une partie de la production soit effectuée sur place, par exemple) ;

• développer les volumes et donc diminuer les coûts unitaires ;

• etc.

Le degré d’internationalisation

Certains ont voulu voir différents stades d’internationalisation de l’entreprise. Ce mode de développement ne date évidemment pas de la fin du xxe siècle. Un minimum de culture historique montre que le commerce a toujours été très actif. Le Moyen Âge voit se développer dans toute l’Europe des foires qui permettent une intense circulation des marchandises et de l’argent ; la recherche de matières premières, associée à la découverte du monde, maintient un fort niveau de commerce. La découverte de la route de la soie vers l’Asie, les mouvements entre l’Afrique et les pays arabes, la colonisation donnent lieu à une intense activité économique internationalisée.

Avec les entreprises, cette internationalisation se poursuit. Michelin crée sa première usine à l’étranger il y a un siècle, à Turin, pour accompagner le développement timide du secteur automobile transalpin. Philips envoie dans différents pays du monde des ingénieurs hollan-dais avec quelques plans, de l’argent et la mission de développer localement une industrie. Les grandes banques françaises s’implantent dans toutes les colonies pour financer l’activité et les échanges avec ces pays.

La forme la plus simple d’activité internationale consiste à vendre dans un autre pays. C’est l’envoi de représentants, l’établissement d’un bureau. Cette forme simple n’entraîne pas de grandes conséquences en matière de GRH, seulement la gestion de quelques contrats spéci-fiques des personnes expatriées.

Au fur et à mesure que l’implantation grandit, les exigences sont plus fortes, jusqu’à néces-siter de construire un véritable système d’expatriation avec des modalités bien établies.

Le stade de l’entreprise multinationale requiert un minimum de règles sur les systèmes que l’on veut développer à l’échelle de l’ensemble de l’entreprise : des sociétés cherchent un minimum d’unité dans les modes de gestion des personnes, le recrutement, les modes d’évaluation des performances ou la gestion des carrières. Aujourd’hui, de fortes pressions s’exercent sur certaines entreprises pour qu’elles garantissent un minimum de principes en ce qui concerne les conditions de travail, la protection du travail des enfants, etc.

Il existerait des entreprises en voie de globalisation, c’est-à-dire des organisations où les flux de produits, de personnes et d’argent, ne vont pas forcément du centre (la base domes-tique de l’entreprise) vers et depuis les pays étrangers. Dans l’entreprise qui se globalise, les mouvements de personnel peuvent être plus importants, on ne peut plus réellement parler d’expatriation ou d’impatriation, mais d’une gestion des carrières qui, pour certaines catégories, concerne toutes les implantations de l’entreprise. Il s’agit aussi d’élaborer un minimum de politique sociale à l’échelle de l’entreprise en décidant de ce qui doit ou non être partagé. Les problèmes de systèmes d’information et l’organisation de la fonction RH deviennent plus cruciaux.

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24 Partie I – RH pour l’entreprise

Les sujets classiques de RH

Sur ces questions voir également le chapitre 10 consacré à la gestion internationale des RH.

L’expatriation

On envoie des expatriés quand le pays concerné peut manquer des compétences néces-saires ou d’une bonne connaissance du secteur et de la culture de l’entreprise. On les envoie également parce qu’ils ont l’expérience de l’entreprise, de ses modes de fonctionnement, de ses règles et procédures. C’est aussi un moyen de faciliter le contrôle des opérations et de s’assurer que l’activité se développe bien dans le cadre des objectifs et de la stratégie de l’entreprise.

La situation des expatriés pose les problèmes de gestion du personnel suivants :

• le recrutement ;

• la définition des modalités d’expatriation (le package) ;

• le contrôle de l’activité ;

• la gestion de carrière ;

• le retour.

L’interculturel

La dimension culturelle est souvent mise en avant dès qu’il s’agit d’internationalisation. Les pays ont des cultures propres, et travailler à l’international conduit à leur confrontation.

Les entreprises ont beaucoup réfléchi à l’interculturel dès qu’elles ont étendu leur activité. Elles ont sensibilisé le plus grand nombre aux différences culturelles, ce qui est parfois utile.

Les différences de droit national

Chaque État codifie le travail et l’on retrouve dans cet appareil législatif et réglementaire les traces de l’histoire politique et sociale du pays.

Les questions moins classiques de RH

Les populations de l’international

On peut distinguer trois grands types de profils (voir focus 1.4).

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s 1.

4 Les profils de l’internationalisation

• L’expatrié/impatrié. C’est celui qui est déplacé du pays de la maison mère vers une autre région ou d’une région vers un autre pays ou celui de la maison mère. Ces mouvements sont coûteux, et les compétences sont de plus en plus disponibles quels que soient les pays du monde. Le mouvement de l’expatriation a donc tendance à décliner. Toutefois, on note chez les entreprises françaises qui font une grande part de leur activité à l’international une tendance à embaucher de plus en plus de nouveaux talents à l’étranger et à les impatrier avant de les renvoyer dans une autre

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25Chapitre 1 – L’entreprise, la gestion et les ressources humaines

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4 région du monde. Cela procède de la nécessité de mixer les cultures, de provoquer dans l’entreprise une sensibilisation à l’international mais également de donner aux partenaires une image pas uniquement française de l’entreprise.

• L’expert. C’est le spécialiste d’un domaine dont le terrain d’intervention est le monde. Il voyage, met en œuvre sa compétence là où elle est nécessaire. Cela permet à l’en-treprise d’utiliser au mieux des compétences rares et de faire partager des pratiques dans l’ensemble des entités.

• L’exposé. Il ne constitue pas la figure emblématique des « internationaux », il ne voyage pas forcément mais son activité s’effectue dans un contexte totalement inter-national. Partie prenante dans des projets internationaux, dépendant dans son activité de ce qui se passe sur les marchés mondiaux, en relation étroite et perma-nente avec des partenaires à travers le monde, il peut travailler à La Défense et ne jamais prendre l’avion tout en ayant besoin d’une approche et d’une culture totale-ment internationales pour exercer son activité.

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4 (s

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)

Si la gestion des expatriés et des experts est assez bien rodée dans la plupart des grandes entreprises, les « exposés » sont ceux qui demandent le plus d’attention : de leur ouverture d’esprit et de leur capacité à travailler avec d’autres dépend souvent la réussite des projets.

L’organisation de la fonction RH

Il s’agit de savoir clairement qui décide quoi et où (voir exemple 1.4).

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ple

1.4 La banque d’affaires

Dans cette banque d’affaires, M. Müller, travaillant à Francfort en Allemagne, souhaite suivre une formation. Il en parle à son manager direct qui doit valider ce projet, ainsi qu’au responsable des ressources humaines du pays qui tient le budget formation. Mais comme son métier est englobé au sein d’une business unit, M. Müller doit en référer au responsable des ressources humaines de ce métier, qui est situé à Paris, ainsi qu’au spécialiste de la formation, qui se trouve à Londres. Ainsi, ce ne sont pas moins de quatre personnes qui doivent intervenir sur le cas de M. Müller pour une formation…

Exem

ple

1.4

Les systèmes d’information

Pour avoir une gestion efficace des ressources humaines au niveau mondial, suivre les politiques de management de la performance et la carrière de talents, vérifier la cohérence des politiques de ressources humaines dans l’ensemble de l’entreprise, il est nécessaire de disposer d’un système d’information adéquat. Cette tâche est difficile du simple fait des différences de législation.

Les politiques corporate

Une question importante consiste à déterminer ce qui est commun et ce qui est spécifique dans les politiques de ressources humaines.

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26 Partie I – RH pour l’entreprise

3.2 Fusions, absorptions, restructurations…

Parmi les événements d’entreprise qui font la une de l’actualité, on note les grandes restruc-turations, les fusions, absorptions, rachats ou autres transformations (voir focus 1.5). On en parle quand ils menacent les emplois. Mais ils permettent aussi aux entreprises de déve-lopper de nouvelles activités et d’avoir de nouvelles possibilités de profits et rentrées fiscales.

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5 Différents cas de « mouvements »

• Fusion. Deux entreprises décident de n’en faire qu’une (exemple : Total avec Fina puis Total-Fina avec Elf, en France).

• Alliance. Deux entreprises mettent en commun une stratégie, créent éventuellement une structure nouvelle qui les chapeaute, échangent des actions mais conservent une certaine autonomie (exemple : Renault avec Nissan).

• Absorption, rachat. Une entreprise décide d’en absorber une autre par rachat de ses actions ou par une opération financière plus compliquée. Au final, il ne reste qu’une entreprise, dans laquelle le pouvoir est détenu par l’absorbeur (projet Mittal-Arcelor).

• Restructurations. Ce sont des transformations profondes des structures de l’entre-prise, soit par changement de statut, soit par réorganisation ou abandon d’activités, soit par substitution d’activités (on peut prendre pour ces dernières années les exemples de France Télécom en France ou d’IBM aux États-Unis).

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5

Les caractéristiques de ces mouvements

Ces mouvements ont trois caractéristiques importantes : ils sont normaux, nécessaires et traumatisants.

Mouvements normaux

Ils font partie de la vie normale de tout organisme vivant. Les grandes entreprises, qui paraissent si banales dans le paysage, sont le résultat de telles transformations. Beaucoup des fleurons actuels du Dow Jones n’existaient pas il y a peu. Que dire de Google, Cisco ou Nokia, qui soit n’existaient pas, soit, pour Nokia, avaient des activités totalement différentes encore récemment ?

Plus encore, l’évolution des marchés, des technologies ou des besoins, conduit à l’émergence et à la disparition d’empires industriels, dont les soubresauts sont toujours douloureux quand ils disparaissent, toujours heureux quand ils se traduisent par de remarquables créa-tions d’emplois. En France, par exemple, la libéralisation de l’activité téléphonique s’est traduite par le développement d’entreprises comme Bouygues Télécom ou Cegetel qui emploient des milliers de personnes.

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27Chapitre 1 – L’entreprise, la gestion et les ressources humaines

Mouvements nécessaires

Ces mouvements correspondent à des choix stratégiques, voire à des nécessités. Certains peuvent se révéler plus ou moins performants. On peut en noter plusieurs :

• faire croître l’activité de façon à diminuer les coûts ;

• faire disparaître un concurrent ;

• acquérir de la masse critique pour amortir les investissements par exemple ;

• acquérir des compétences dont on ne dispose pas ;

• adapter les structures à une plus grande taille ou à des conditions de marché différentes ;

• pénétrer de nouveaux marchés ou de nouvelles zones géographiques.

Mouvements traumatisants

Ces mouvements sont toujours traumatisants. Ils provoquent de l’incertitude. Dans ces situations, l’information n’est jamais parfaite et ne peut pas l’être. On est toujours en quête de plus d’information, pas toujours disponible. Ce sont souvent des moments propices aux procès d’intention, aux doutes, à la méfiance. Il n’est pas étonnant que certains vivent très mal ces situations où les besoins de base de sécurité ne sont plus satisfaits, où la tension est forte. Certes, les acteurs de ces changements sont sous la pression de l’urgence et des résul-tats ; mais les autres subissent aussi la pression du changement tout en devant honorer leur rôle et leur fonction (voir focus 1.6). Et il faut continuer de servir les clients et demeurer attentif à la qualité du travail accompli.

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6 Fusions et émotions

En cas de fusion, l’incertitude est aggravée par trois formes de pression.

La pression de l’extérieur

L’entreprise a des « parties prenantes ». Les plus traditionnelles sont les salariés, les actionnaires et les clients, mais on peut y ajouter les fournisseurs, les collectivités terri-toriales ou l’État. Ces parties prenantes sont concernées de près ou de loin par la fusion. On peut imaginer que les fournisseurs de l’industrie automobile ne sont pas insensibles à un regroupement dans ce secteur, qui donne encore plus de poids à leur nouveau client.

Les analystes financiers s’intéressent de près à une telle décision pour fournir aux actionnaires et aux investisseurs une information utile. En cas de fusion, l’entreprise présentera la rationalité économique et stratégique de son projet. Évidemment, les analystes financiers voudront savoir le plus tôt possible si le choix effectué est pertinent et si les résultats suivent. On sait que la fusion prend du temps, que les équipes, les organisations et les process mettent du temps à s’harmoniser mais ce n’est pas le temps des marchés, lesquels réclament le plus vite possible des signes de réussite tangibles. Les opérationnels sont donc sous pression pour faire apparaître ces signes avant-coureurs.

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28 Partie I – RH pour l’entreprise

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uite

) La pression des dirigeants

Une décision de fusion est importante pour l’avenir de l’entreprise et pour ceux qui l’engagent dans une voie dont ils ne peuvent être certains de l’issue. La confidentialité est nécessaire : elle oblige les dirigeants à avancer dans l’analyse de la situation dans le secret des discussions avec les conseils, les banquiers et quelques administrateurs. En effet, une information sur le projet de fusion pourrait avoir des conséquences tant sur les marchés financiers que dans les relations avec les principaux cocontractants de l’entreprise. On peut donc imaginer le poids de la décision qui pèse sur les épaules des dirigeants, la situation de forte émotion qui est la leur à un moment important pour l’entreprise et pour leur carrière personnelle. Il n’est pour s’en convaincre que de se souvenir des échanges par médias interposés entre MM. Pébereau et Bouton (présidents de la BNP et de la Société générale) en 1999 au moment des tentatives de rapprochement impliquant la BNP, la Société générale et Paribas : ils exprimaient certes la confronta-tion de projets économiques rationnels mais aussi de fortes émotions personnelles.

Une fois l’opération décidée et étant donné l’engagement et le risque personnels pris par les dirigeants, ceux-ci mettent la pression sur l’ensemble de l’entreprise pour qu’elle se mette rapidement en ordre de bataille et les conforte dans la pertinence de leur déci-sion. Là encore, le temps de la fusion n’est pas synchrone avec leurs attentes personnelles compréhensibles.

La pression « d’en bas »

Ce troisième niveau de pression s’ajoute, pour tout responsable, à son sentiment d’insé-curité personnelle et aux pressions définies précédemment. Tout responsable est sollicité par ceux qui veulent légitimement savoir ce qui va leur arriver. Parfois, le responsable le sait mais ne peut le dire : c’est une première source de tension. Souvent, il ne le sait pas, il le dit mais il n’est pas cru.

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)

Les problèmes de gestion des ressources humaines posés par les fusions

Fusionner ou restructurer n’est pas qu’une opération juridique ou organisationnelle. C’est un changement important dans les manières de travailler. La GRH est forcément concernée par de telles actions.

Définir une nouvelle politique de ressources humaines : le minimum

Dans un périmètre modifié, la GRH doit s’adapter et se redéfinir. Dans toutes les études sur les organisations, on a toujours établi un lien entre les formes de l’organisation et la taille de l’entreprise. Plus l’entreprise est grande, plus il faut coordonner, définir des structures pour animer l’ensemble. Il en va de même au niveau de la GRH. Lorsque l’entreprise grandit, elle revoit ses systèmes d’information pour faire face aux obligations d’information légale sur le nouvel effectif.

On peut également imaginer que le nouvel ensemble nécessite de nouvelles politiques de recrutement, de gestion des carrières ou des hauts potentiels. Quelques principes peuvent être imaginés pour garantir un minimum d’équité dans les politiques menées.

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29Chapitre 1 – L’entreprise, la gestion et les ressources humaines

Dans une position plus maximaliste, on peut définir de nouvelles politiques, harmoniser les politiques de rémunération, de formation ou de conditions de travail. L’élaboration des organigrammes est une mission difficile puisque ne se jouent pas seulement la définition des fonctions et les lignes de différenciation entre celles-ci ; dans une situation de change-ment, la nouvelle structure est le signe tangible des nouveaux équilibres de pouvoir qui font écho à toutes les craintes et incertitudes générées par la restructuration.

Recherche de productivité

Une restructuration concerne également les fonctions « supports » au service du business. Généralement, la taille de ces fonctions ne croît pas linéairement avec l’effectif ou la taille de l’entreprise. La fonction RH elle-même est donc concernée par ces mouvements, qui remettent en cause son dimensionnement. De manière plus générale, de tels mouvements se traduisent par des changements, des licenciements, des réaffectations, des mobilités. C’est l’aspect le plus visible des restructurations.

Le processus de changement

Les RH sont concernées par la gestion du processus de changement lui-même. Toute restructuration s’accompagne de formation, de communication, d’actions permettant de faire l’apprentissage de la nouvelle structure.

Par exemple, on souligne souvent, lors d’une fusion, la nécessité de développer des groupes de travail au sein desquels des personnels des deux entreprises fusionnées travailleront ensemble. Cette démarche permet de prendre en compte la culture et les références de travail des autres, de construire de nouvelles modalités de fonctionnement et de déve-lopper ainsi de la confiance. Ces processus trop brièvement décrits requièrent beaucoup de rigueur, de persévérance et de cohérence, et c’est une mission de la GRH de piloter ce processus d’apprentissage.

Résumé

Dans ce chapitre, nous avons précisé le contexte de la fonction de gestion des ressources humaines.

• Nous avons défini ce que l’on appelle « gérer » des ressources humaines ; il s’agit de leur appliquer un processus pouvant conduire à analyser, décider et contrôler l’efficacité des choix.

• Nous avons décrit comment les RH peuvent être un business partner des autres fonctions de l’entreprise.

• Enfin, nous avons illustré comment la gestion des ressources humaines intervient dans quelques problématiques importantes de management.

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Activités

Questions 1. Nous avons vu au fil de ce chapitre les connexions entre la gestion des ressources

humaines et quelques grandes fonctions de l’entreprise. La fonction « achats » prend aujourd’hui une importance considérable dans l’entreprise. Examinez les conséquences et les enjeux en matière de gestion des ressources humaines de l’émergence de cette fonction.

2. Gérer, c’est analyser, décider, contrôler. Trouvez des domaines d’application de cette notion en dehors des domaines traditionnels des fonctions de l’entreprise.

3. Quels sont les trois enjeux de gestion des ressources humaines liés au changement ?

Étude de cas

Brandon

Brandon vient de trouver un stage dans une petite entreprise industrielle de 275 personnes au cœur de ce Sud-Ouest qu’il apprécie tant. Sensibilisé à la question de la localisation des entreprises qui permettent à ces territoires de se développer, il cherche à se faire une idée de la situation, des enjeux et des opportunités de la société à travers sa situation sociale. Comme celle-ci n’est pas obligée de réaliser un bilan social, il glane quelques informations éparses.

Effectif

• Atelier 1 (At1) : 72

• Atelier 2 (At2) : 64

• Atelier 3 (At3) : 94

• Personnel administratif et commercial : 45

Répartition de l’effectif par classes d’âge

Total At1 At2 At3 Comm & Adm

20-30 34 7 15 2 10

31-40 80 15 16 34 15

41-50 83 23 17 38 5

> 50 78 27 16 20 15

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31Activités

Chiffres de l’absentéisme de courte durée

Total At1 At2 At3 Comm & Adm

2008 6 % 9 % 5 % 6 % 2,6 %

2009 3 % 4 % 3 % 2,5 % 2,45 %

2010 4 % 6 % 3 % 3,8 % 2,8 %

2011 6 % 9 % 4 % 7 % 2 %

Niveau de salaire 100 en 2008

Total At1 At2 At3 Comm et adm

2008 100 100 100 100 100

2009 101,36 102 100,3 102 100,5

2010 102,99 104 101 104 101,5

2011 106,15 107,1 104,3 107,3 104,5

Pourcentages d’entretiens annuels effectués et d’atteinte des objectifs*

At1 At2 At 3 Comm & adm

% entretiens annuels 57 % 78 % 52 % 82 %

% atteinte des objectifs collectifs 82 % 98 % 84 % 100 %

* Données fournies par la direction.

Questions 1. Quels constats intéressants pouvez-vous effectuer à partir de ces données ?

2. De quelles informations aimeriez-vous disposer pour aller plus loin dans votre analyse ?

3. Dans quels domaines vous paraîtrait-il opportun d’agir ?

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