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Les sceptiques grecs /par Victor Brochard,...
Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France
Brochard, Victor (1848-1907). Les sceptiques grecs / par Victor Brochard,.... 1887.
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8° R 8247
Paris
1887
Brochard, Victor
LesSceptiques grecs
C.
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SCEPTIQUESGRECS.
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SCEPTIQUES (iRECS,
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VICTOR BROGH&R»,
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CAR 1;CAUI!~Ut: MRS setBtCEt MtHUt.tiS KT t'Ot.tTtCMKS.
(tmjicvicTnRcoiistN..
PARIS.
IMPRJMEaiE iUTUhVALE.
\l llCCI l, H.
Cet ouvrage a été présenté sons l'orme d« mémoire à
l'Académie des sciences morales et politiques, qui lui a
décerné en t88ft le prix Victor Cousin. Depuis cette
époque, il a été, dans la partie historique, considérable-
ment remanié et augmenté. On s'est efforcé ia tenir
compte, dans la plus large mesure, des observations et
des critiques exprimées par M. Ravaisson dans le beau
rapport qu'il a adressé à l'Académie (Séantes et travaux de
}' Académiedex sciences morales et politiques, i885; repro-
duit à la suite du Rapport sur la Philosophie eit France au
xix* sièete, Paris, Hachette, »885).– Les conclusions,
notablement remaniées dans la forme, sont demeurées à
peu pr«\s les mAmos,
Sel*'mbl'l~ t K~7'
LES
SCEPTIQUES GRECS.
INTRODUCTION. a
LES ANTÉCÉDENTS &L'-8CKPTHil8MB.
CHAPITRE-PREMIER.
M WHL080PU1B AXT«SQ(lStA.TlQifK.
S'il falbiil en croire certains sceptiques,on ne saurait re-
monter trop liaul pourretrouver les origines
du scepticisme;
elles se confondraient avec celles mènes de la pensée humaine*
Quelques sceptiques,dit Diogène Laè"rce; considèrent Ho-
mère comme le précurseur de leur secte, parce que, plus que
personne,il exprime sur les marnes sujets des idées différentes,
sans jamais rien définir ni affirmer expressément.)) Hsuffisait
«iissi qu'ontrouvât chez, les sept sages des maximes telles que
celles-ci Rien </<trop; ou l'romem, omxe tle rnine, pour qu'on
tes rangent parmiles ancêtres du scepticisme. Mais
il est ù poine
besoin de remarquer quede telles assertions, inspirées, par te
désir, si fréquent chezles Grecs, de justifier
tout ce qu'onavance
par une citation d'Homère, reposentsur une équivoque. La
mobilité d'espritet l'inconsistance des pensées
sont autre chose
(jue le doute; la prudence et la réserve dans les choses d'ordre
pratique,la crainte des engagements téméraires,
telleque
l'expériencede la vie suffit à l'inspirer, ne sont pas
encore le
doute théorique,toi que la réflexion seule peut le faire naître.
"l IX, 71.
1
2 »STHttlH5GÏWN.-JtI|ï.Ù»|TBH l..waac:~cca~u: a.
Enfin le doute lui-même n'est pas lascepticisme. C'est ttu ·
doute seulement qu'on pourrait dire qu'il est à pu près contem-
porain de lapensée humaine; car, pour un esprit qui réfléchit
fa découverte de la première erreur suffit « inspirer une certaine
défiance do soi: et combien îleu>ui|is n-i-il Mu à dos
espritsun
peu attentifspour s'apercevoir cpj'ilg s'élaient
plus d'une fois
trompés ?g
L'usage de la langue autorise peut-être à employer le mot
scepticisme pour désigner l'état d'un esprit non seulementqui
doute, mais qui doute depropos délibéré, pour «les raisons
générales seieutifiqitc'utent déterminées. Encore n'est-cepas ta
sa signification véritable et définitive: par, à cecompte, quel
philosophe ne serait unsceptique? La
philosophie, en tant
qu'elle se distingue du sens commun et s'élève an-dessus de
lui, contestetoujours quelques-unes de ses manières de voir,
récusequelques-unes do ses raisons de croire; en un sens, it
y a duscepticisme en toute philosophie. Le vrai
scupttquo n'est
pas celui qui doute depropos délibéré et qui réfléchit sur son
doute; ce «'est pas même celui qui ne croit à rien et. ailirme
que rien n'est vrai, autre signification du mot quia donné lieu
a bien deséquivoques: c'est celui
quide
propos délibéré et
pour des raisons générales doute de tout. excepté desphéno-
mènes, et s'en tient au doute.
Mais de ces trois formes descepticisme, on admettra sans
peine que lapremière précède naturellement les deux autres
et y conduit. Cette sorte de scepticisme, fort improprementnommée, qui consiste à douter sciemment de plusieurs choses,est l'antécédent naturel de ce scepticisme qui niejoute_vérjtg.Va le
scepticisme qui nie toute vérité, en vertu de ladisposition
de l'esprit humain à «lier toujours d'un extrême à l'autre,
comme uu pendule qui ne trouvepas «lu premier coup son
pont d'équilibre, précède aussi cescepticisme qui
ne sait pas si
quelque ehosp est vrai et n'affirme rien au delà des apparences.Les deux
premières formes du scepticisme peuvftrifrfonc^tren>n.sidér«'i>sconnue tes germes du véritable sreptieisnie. Dans
m VMhùmmw AHt&mmiTiQmi 3.r_ 1
l'iualoire, ellesappamtsseitt lon^eirtps «™mqù&le
8eeptiei8mesuit définitivement constitué. Qtrelle que fut la naïve- confiance
que la pensée humaine avait en elle-même, il étaitimpossible
que dès ses premiers pas ellen'aperçût pas quelques-uns de&
obstaclesauxquels elle ho heurtait, et
n'apprît pas de bonneheure à se défier d'elle-même. Aussi voyons-nous des traces de
scepticisme dès lespremiers temps de ta
philosophie; il y enachez les
philosophes antésocratiques, surtout chez les sophistes,même clu-z les
socratiques.
I. Peutdtre, si nous possédions sur lespremière philosophes
de la Grèce desrenseignements plus complets, trouverions-nous
chez eux des réflexions sur les limites et les dillicultés de lascience. analogues à celles
que nous rencontrons chez leurssuccesseurs, et
qui s'offrettt si naturellement à t'esprit de tous«ux (lui poursuivent la vérité, Toutefois, tandis
que tes éléafes,Heraclite, Empédocle, Démocrito et
Anaxugore sontexpres-
•sèment désignés par plusieurs sceptiques comme les précurseursde leur doctrine, nous ne voyons rien de pareil à
propos desanciens ioniens H des pythagoriciens. A cette
époque, commelanionlré
Ed. Zofl,.P W, r«sprît humains'applique directement
àJ'étud^dujéel sans
sou^jc^nnerj^cj^^ujbjwtive qui par-ticipe i la formation de
$e$1307 le et etl'objet ne font f
rfu'un; 1.' Il' nedoute un moment
1.qu'un l'inteingence
ne doutepas un moment do sa
puissance<"t de sa véracité.
H en estdéjà tout autrem«nl h
|'épo«fu« des éléates ilsemble mène
qu'on voieapparaîtra an
scepticisme oxprcssénwntformulé chez le fondateur de cette école. Xénophane de Colo-
phon. « II n'y a jamais eu dit-il «, iln'y aura jamais un homme
"> L, fhilomplmda Grta, lra.1.E. Boiiirom, 1.1, ,34.
Miillacl», Frapn.phil.grœt., 1. 1, p. io3, fr. 1/,K«J ri p& oi» otÇh oins Mp yévn' oiié tk (oU,
dièe, ifiÇi «.«Si» te x*i Saa» Uya tsepl <t<t't<w ·
àyèp xai ta fuOiait ti!Zoi iers!.e<tpé»oV emèv,airùt S^,( oix olie Sitôt l' ni vâm ténxiit.
r.
4 mf ROMkmim CIIAMTflK t.
«|Hi eounnisse iww eerfitude tout etquejtrdiMlte dieux et de
l'univers. Quanti miHue if rencontrerait' la vérînï siir cessujets,
il ne serait pas sâr de fa posséder l'opinion règne en touteschoses.» Ailleurs*1* il semble se contenter de la vraisemblance,
\us-i, eho* les uneieu», éhiit-il parfois regardé comme un
sceptique. Suivant Sotion aj, il aurait le premier déclaré quetoiij^tjflsfiiBjw^hensihle; il est vrai
qu'où rapportant re td.
«toignage, Uiofjène ajoute que Sotion serttrempé. Timon de
t'idionie, dans le second livre des Siltes, où ilimagine un dia-
logue entreXénophtme et lui-même, met dans I» touche du
vieuxphilosophe tes invectives
qu'il adresse il tous les dogma-tistes. Ce choix doit avoir une raison. Avoir injurié les poètes,comme t'avait fait
Xénophanc n'étaitpeut-tHre pas un motif
'suffisant pour lui prêter desinjures contre les
philosophes ilest
plus probable qu'il y eut une certaine conformité entre lesiclôes de
Xèmphane «t celles dusceptique Timon (î».
Il sembleimpossible de contester qu'il y ait eu chez Xéno-
phane un commencement descepticisme. Toutefois les témoi-
gnages lesplus dignes de foi, comme ceux d'Aristote, ne lui
attribuentque des
opinions dogmatiques-, et parmi lesscep-
tiques, il en est, comme Timon1'», qui lui reprochent d'avoir
««primé des affirmations positives. D'autres, comme Sextus^
Kmptricus. tout en rfconiiaissaj»tsesafli»itfe avec lescepticisme,
refusent de lecompter parmi les
sceptiques. Xénopliane a été"
Miilliicii, Fragm. phil.gnK., p. 10:{, fP. ,5
Tïvu hSôîm'im (jj« eoimin mît Mtuattt.
Dioii.. IX. ao. Cf. Stuk, KcL, 11, t4; Higp«!vl..%Wi., i, ,4 .Krfj,Diiiictcr et .Solmi-iilewiii. «Jùllinj. Diclricli. tXây). j.
u> DiversI..TO«ign.ig<;< «ttrihiwiit m.Jme à des Silh* analnraos & cent
>im:mnym, plus tard Tira* (VW sur ce point Uaclism.illi, De Timoue VMimk,p. •)().•!mj, l.i|«ijj, i*59.i Mais ^t sans doute une orivur. Dans Ira di«cis
l'as~al[es "s Sillet il~- Timon. Ii,r! COIIIIIIS tlansl'antiquilé, et
frequ/'nlillent cilés,installes <« SilU,,\» Timon,
fort connus ,lai» i#nnfif,Bi!c, et freqiicnmieBt cites,
est XénopliaiK (|.ii est censéparler :<Jos lettems inaltciilifs auront cru nue les
paroles i|u-n lui allrihiic «laiwit (wllwuent «le lui. Voir Cousin, t'ragm. dephiU.I. I. p. 1 1 .V «lit. Paris, Di.lioi-, i805. (varelon. Phil. ff.w. «/ ». aS.ili Uiillarb,
op. fit, p. Kii. y. -ig.
186-11.gréee. rel.. 1). 2.ri.
s II., LvA.
lu nniMomm xwftsmumwiiï. a
i 1 1 1 ir ri"
s·a·as, s rEV i,acas J'
tantepar
le cluute; il n'ml pas R!6b$ dans le doute Suivant
quelques auteurs ®, il aurait récust' explicitement letémoiguuge
designs,et déclaré que la
raison swiln put «ffgn;tj|rp L-i xtkUé.
I Mais il seinbleplus polmhliï i|im ci'llo o|»|)usi(ioir (mire l<?s sens
et la raison « étéaperçue par ses successeurs, i'urm^uide et
/(non (t'ISIée: ils j)nraisst.»ntà I roles premturs (jui l'aientevijri's-
si'.ment iilliriiK'îe.
FarmdiHtlg et Xè»m d'Jjtfa [icuveni êtrecomptés parmi les
plitlosoptas lesplus^èîgmatistes «jut furent jnraais; l'inlm-
duction dupoème de Parméhide
(lue nous a mntsunèe Sextus
l'Impiricus wen fait foi. Poin-tititt ils eseiwrettt sur ics (hwliacVs
duscepticisme une iniliience
plus (jruitcfo peut-être que n'iiupoile
lequeldes
pltilosoplies atitésoeiatitpjcs. Avec euxapparait cette
opposition du sensible et del'intelligible <pti (levait
plus tard
tenir une si grande place dans les argumentations sceptiques.La counajssmi£e_seHsilile est déelarée instillkunte
cl irat»|ii>u.se.La raison démontre (pie l'èli-e est un, immobile, éternel; les
sens nous font voirpartout lit
multiplicité, le changement,la naissance et la mort; ils ne méritent donc aucune créance.
On sait d'ailleurs comment Pm-inéuideopposait k vérité
{ta nrpls àhfftaa») a rapparenra (rà -mpfc Sii-av): les sceptiquesretiendront cette distinction, pour s'en tenir, il est vrai, à l'in-
verse de Farmuuide, ù in souteapparence. Quant « Zenon,
tous ses ell'orts tendaient il montrer ipiu dans les apparencessensibles il n'y a que contradiction et absunt ité.
Mais c'est surtout par l'invention de la dialectique que les ?•éléates fournirent au scepticisme ses armes tes plus redoutables.
Bien que feurphilosophie fut «vaut tout, connue l'a montré
Zeller, nnephilosophie, de ta nature, la méthode qu'ils em-
ployèrent pouvait servir à d« tout autres lins. Les premiers,
prenant la notion de_Tèlre dans un sens absolu, etappliquant
avec une rigueur implacable leprt«ci|ic de contradiction, ils dé-
!l)Cf. Karslo»,op. cit., p. i8i; Xellor.<»/».«l., l. Il, p.
w
Aristqcl. an. Biiwl». l'rirn, ci-. ni', 17. t; i(j, «.
"f..Vtt.t. t.
« INTROIHJCTION» CiHAFITRK 1.
inouWkenJ quu lire exclut la nialûjilicito et le cliaijf{«inofif Ensuivant lu même méthode* if était facile d'établir après eux
qu'il n'exclut .\m moins l'unité al tinimouiiité cesconséqu «nées
furent de bonne heure aperçues, comme un peut to voir par*leParméitide de Platon, qui eu signale et essaye d'en
conjurer lo
danger. lit dialectique dMùiésidènie ne procédera pas autre-
ment. Seules les notionsmivc|tiell<'s s'applique la méthode aérant
changées onraisojjm>rtu}U£Jaw_eaj»se et les signes au lieu de
raisonnwrjqr féjre. Et après /Enésidème, c'est à tontes tes
notionspossibles que s'appliqueront les
procédés éléaliques,«vee la mémo facilité ut lu mente
nouent' apparente.Au
surplus, entre les deux écoles ily a des liens de filiation
historitjtte. Sans parler de Gorgias. qui procède directement dé
l'éltSatisme" l'école jné(rari<jue^et l'école d'Krôrie se rattachent
étroitement a cette d'Ëlée de (adialectique esi née
Téristique,et de t'érislique au scepticisme, il n'y
aijti'nn pas. Pyrrfton
subit l'influence de ces idées; car il futdisciple de Bryson, (lui
avait probablement lui-mèiiie écouté tes leçons d'tëuclide de
Mégare12'. Enfin Timon, qui injurie tous lesphilosophes, n'a de
louanges que pour Xéuopiuine Pitrménide et Zenon m.
Ainsi, par un étrange renversement» lesplitlosoplms les plus
hardis et lesplus résolus dans leurs aflirnmtions ouvrirent la
voie ci ceux(lui devaient déclarer toute aflirmatioit impossible
ou illégitime. Celte inlluence cesse d'ailleurs deparaître extraor-
dinaire, si on songe que l'éléatisme commençait par déclarer quele monde, tel
que nous le voyons, n'est qu'une apparence. Nous
montrerons dans le cours de cette étudeque les sceptiques,
surtout a partir d'.Knésidèrae, s'inspirent directement de la
méthode de PanBénjde_ej_de_Zénon les vrais ancêtres du scepti-cisme. ce sont les éléates.
Rien de plus opposé a ta doctrine des éléates que celte d'Hé-
raclite. Les uns disent «L'être est. le non-être n'est pas»;
Zeller,op.cil., I. Il, p. boa.Voir ri-doKout, p. 5a.
'Vl Voir ci-<l«$<Mis, p. H6.
m iwtMwmw AHtUotmxtimt 71,(1 riiibirav/riiiR ARin9l/UB,VItyt'E> 7
l'autre goulient que Felren'est pas, que le naitrétra est. four-
tant, sur ta valeur du ta connaissance sensible et sur les difli-
eultés do ta science, ils arrivent à la même conclusion «Les
yeux et les oreilles. dit Heraclite, sont de mauvais témoins pourceux <|iii ont des eues barbares liK» L'un des premiers, sinon te
premier» Heraclite a montréque
la sensationsuppose un
double facteur, le mouvement del'objet et celui du sujet <
Parménitie récusait letémoignage des sens, parce qu'ils nom
montrent lamultiplicité et le changement; Heraclite, parée
qu'ils nous représentent les choses commeavant de l'unité et
de la durée.
L'apparition de l'école d'tëlée marque dans l'histoire de la
philosophie grecque et mênie de laphilosophie en général une
date. capitale. Parménide et Zenon eurent la gloire d'introduiredes idées
qui, une foisproposées, devaient s'imposer, et que
fous lesphilosophes ultérieurs, d'un commun accord. accep-
tèrent. C'est désormais un axiomepour la pensée grecque que
IVSjreen lui-même est éternel, immobile» soustrait à ta géné-ration et à la mort, ou, connue on l'a tant répété depuis,
que rien ne n;tPt tto rien, et tttte rien nepefttpenr.
Lesefforts
t
desphilosophes (lui vinrent après eux teiidircnt
uniquement à
expliquer comment cette unité et cettepersistance de l'Ôtre
peutse concilier avec la diversité et le changement qu'il est
impos-sible de contester sérieusement. On sait comment ftnpédocle,
par sa théorie des quatre éléments, Leucippe et Déinocrite, par tcelle des atomes. Anaxagorc par celle des homéomériefs, tous
par faconception mécaniste, qui exp!i<)Me la des êtres
par lajuxtaposition temporaire de
principes immuables, [es-
sayèrent de résoudre leproblème et de concilier Pannénide et
Heraclite.
Uneconséqunncejuicessaire de ces vues sur l'être, toujours
antérieures, chez lesphilosophes de ce
temps, il toute théorie dé
<•> Mnllwh. Fragm., i3, p. :ti7. Cf. Arist.. »fc(., f, 6; ScxIih, .V.. VII.
|-J(i, l3i.
•" Zclkr, «p. cit., p. i-jd, mrfi» ;i.
S ÈNTROlMHmôM. – CBAWTB-E I.
la connaissance, était que tes sens no nous font pas conjja^rola véiJéTt.'es principes iiiimùaMes, qu'on les appelle éléments,
atomes on liouiéome>ies. nu sauraient tomber sous les sons la
raison seule les découvre; les sens sont donctrompeurs-, Aussi tu»»
kw nouveaux ioniens sout-ils d'accord sur cepoint avee l'armé-
nide et Heraclite « Refuse, ditKmpédwlo !tJ, toute créance aux
sons que lapensée seule te fasse connaître la réalité.» –
«Chacun to se flatte de connaître l'univers mais ni les yeux, nî
tes oreilles, ni t'iutetiigtincc d'un homme ne peuvent le com-
prendre. Tu n'en sauras jamais que ce qu'en peut saisir l'intel-
ligence d'un mortel.» Comme Parménîde, Uctnocrtle (Ji opposela vérité à
l'ojiîiiîan et déelare(pie ce. qui apparaît aux sens
n'existe pas réellement. Ce qui existe, ce sontuniquement tes
atomes; le chaud et Je froid h dottx et l'amer, ta couleur n'ont
pas de réalité. «La vérité, dit-il '» encore, estprofondément
cachée», et il insiste tellement surce point, cEtte souvent on
l'a pris ponr tutsceptique.
Anaxagore'A à son tour déclare que nos sens sont trop faibles
pour connaître la vérité. «Si vous prenez deux couleurs, dit-il
j encore V'K.et que vous tes mélangiez, l'œil ne peut distinguer les
changements quise font
peuà
peu pourtant ils existent dans
la réalité. C'est la raison seulequi jti{»o de la vérité'71.» A ces
vues se rai tache te sophisme que les sceptiques devaient si
souventrépéter «La neige est noire, car elle est formée avec
de l'eau et l'eau est noire !s;.s
Sans aucun doute, c'est à cause de ces assertions que plustard tes académiciens se mirent autorisés à
invoquerte nom de
f«5fu!la<4»,p. » 5;.Ibùt., v. tit-ii. (',(. Oie, Ac, l!,v, t ' REmycdecfc* iutervtuin mîhi fiirere
vulelnr abstona i>swomoia nihil nossentir*»,niliilremerv, niliil oimiiuo,i|ualt!sil.posse rejieriie.n
Seïl.W., VII. i35. Cf. Mullaé, I, p..HJ^.1
Diog., IX, 73; tic. Ae.t H, ï, 3a. Cf. Arisl., Mttafh., lit. 5, 1009.>
SctI.I/VII.Uo.« S«i.,iW., <)o.
Itiid., 91.'' St;itl.. P., I. :s:S; t;ic, Ac, II, mu, 7:jmi, n>n.
LA PtHbOSOI'JÙÉ ANTÉSOGRATlQlfB. 9
ces |)li^osopjR»s et ù lys comjiloF parmi leiire devanmrs. Mais
ity
a là une exagération évidente s'ils se défient des sens, ils
ont tous une conUanee absolue dans la raison. Même il na
viennel'esprit d'aucun d'eux de considérer les sensations
comme des dtutspurement subjectifs elles n'expriment pas
fidèlement la réalité, mais il y a toujours dans la réalitéquel-
que chose» un mouvement, une «.onibiiiuison d'élémentsqui les
explique. Tonspourraient répéter la maxime de l'orraénide t
«On ne pense pas ce titi n'est pas,n -
Démocrite surtout a été souvent considéré comme unscep-
tique oit comme unsophiste
tl). Le fait est qu'on trouve chez lui
nombre de formulessceptiques. Notts ne
pa clous pus de la
maxime ûù fiâAAo»»,parce qu'il ressort très clairement d'un texte
de Sextus mqu'il lui donnuit un tout autre sens
que celui de
IVrrito». Mais if contestait la vérité de tout ce que les sens nous
font connaître. Dans l'ouvrage intitulé xp&iwrtfput®, quoiqu'ileût promis de montrer que les sens méritent confiance, il les
condamnait. «Nous ne connaissonspas
la réalité, disait-il, mais
seulement cequi s'offre à nous suivant la manière dont notre
corpsest affecté, suivant la nature de ce qui entre dans nos
organes et en sort. » Et ilavait répété '^maintes fois
que nous ne
comprenons jamais ta vraie nature des choses.
Toutefois ces formules s'accordent fort mal avec tout ce quenous savons du reste de sa philosophie. L'alojnisme n'est rien
s'il n'est uneexplication dogmatique
de l'univers. Ainsi le
comprirent les épicuriens, qut furent en opposition ouverte avec
lessceptiques; ainsi le
comprit Démocrite lut-niérnc.
Nous avons heureusement un document ® qui permet d'ex-
1 C'est l'accusation que RiHor en particulier ( ttkt. <feh pliiht. «ne 1. 1. p. A73et «* fratl. Tissot) dirige contre Oomocnle. Zclter (o/i. cil., \i. 3b<] cl teq.)lut a victorieusement rcpvnclti.
">/». 9.3.
w S«sjt.,M.,VH,i:tti.tir IM.
w Cesl te lo»te de Seslus (M., Vit, i.f8), ilunlJ'anlhculicil<!iwsaurait Ht*.louteuse. Seslusciln l'niiti-jj; ih tk-mocritn(iv mitxtu/ôm).itiipicl il cinpruiitn,1"ulell5e, Sexlers dl. 1'001YI'3I:e,1.. 1>morrÍlp (~r soia 1<111") 31111uel il PlllllrlllllpMt citation (xatà À^Ç«>I jiioSjius Sia tvm iiitiA fit ymsin. U axo-tin.
I ft I NTttOÔtlfiïJON: CH AHTIB f
.~u_. 1..1. t~ £Pplicjuer I» contradiction apparente natte les formules de Démo-eritc et sa doctrine. Quand il est
sceptique, c'estuniquement,
à l'égard des données sensibles! Mais il y a4 suivant lui, un
autre mode de connaissance bienplus certain c'est la raison,
ou plutôt le raisonnement. A vrai dire, il «teparaît pas avoir
cru que la raison à elle seule sulïit à atteindre ta vérité; il s'est
plutôt séparé sur ce point des tSléates». Maisen «'appliquant
aux données sensibles, le raisonnement nous permet de con-
naître les réalités nécessaires pour Lesexpliquer. Telle est la
connaissance légitime (y wfo), qu'il oppose à la connaissance
obscure des sens (axa-rut). C'est à peu près ce que Descartes
diraplus tard. Ainsi, tout en conservant les formules citées
ci-dessus, Démocrile peut dire, au moment môme où il les em-
(tue ce (lui existe réellement{hep),
ee sont les atomes
et le xide.
Finalement, Uémoerife n'est point sceptique dans le sens
plein et entier du mol; il ne l'est que partiellement.. S'il aplu
par la suite aux nutiveaux de voir en lui un pré-curseur, Sextus Eiupirieus, bien mieux avisé après avoir marquéles analogies, a soin"* de signaler les différences qui séparentDéuioerile des
jivrrtiotiiens. «Il ne suffit pas, dit-il p* trèsjus-
tement, pour é*tresceptique, de parler quelquefois comme un
sceptique; on cesse de l'cUre dès qu'on prononce une affirmation
dogmatique.»»
Mais s'il n'y apoint,
àproprement parler, de sceptiques
w If est vrai qiTArislolo(/}« Ce»,et Ctm:, l, a >sltrilraeà Dématrite cette
opinion, santeuiti» plus luril parÊpioir»,ijae le pliviiomèiKsensible est vrai enItii-mwne..MaisZelfor (op. cit., p. Xf;)« hi.Mi monli-é qu'Ari^lole ne donne en ces
passages que io rvstittal in ses propres déductions.
i!;Lorsi|uoDémocnto( Seïi. .V. VIIt 3a7) déchirela démonstrationimpossible,
il s'.ijjit rrai>ciiibiabl<<iiic>iit de lu dèiiowlrniion abstraite, telle que l'entendaient
les .Icalert. Au surplus, niènç dans cette négation, comme le remarque Seilus,
Défiiocritf dillère des sceptiques, qui doutent seulement de la possibilité de. la
•lémnaitraliau.
'Jî Se,t., ,M..VI1..35.
|V! (, ft»3.
ft. 1,1aX
LA PiHLOSOMÏHî ANTtèSOCIUïlQtfB.- H
tnn ~"ar.E,.a ae .rr: c 1.F «vant les sophistes» il faut reconnaître (jtfên fait, toutes les
I écoles s'acheminent vers h scepticisme; historiquement, elles youi toutes abouti. Des éléates
procédera Gorgias; d'Heraclite,
Prolagurus etCratyle"t,.(|ui en arrivera à ne
plus oser prononcerntt jugement. Nous reviendrons bientôt sur les
principaux
sophistes. Déinocrite aussi eut des successeurssceptique» tel
fut Métrodorc de Cliio <*>,soitqu'il
ait été directement son
disciple. soitqu'il ait reçu ses leçons par l'intermédiaire de
Nessus. Non content d'attaquer laperception sensible, Métradore
déclarequi; nous ne savons rien, pas mente si nous savons
quelque chose mi rie» l3K
Apres M«lrodore «le Cliio vient Anaxanp»e d'Ahdèn». Nous
avons malheureusement trop peu de renseignements sur ce
personnage étrange, corapaijnan d'Aieiandre, également promptà flatter son maftro cl à lui dire de désuj^ables vérités, livré à
toutes les voltiplés. et capable, sa mort l'a prouvé, desupporter
les plus cruels tourments avec uttprodigieux courage (l!. Hais
nous savons de lui qu'il fut de l'école de IMmoerite, disciple de
Mdtrodorc ou de sondisciple Diogène, et cju'il fat ouvertement
sceptique & il comparait les choses aux représentations qu'onvoit sur un théâtre, ou aux tinaijes qui hantent le sommeil et
la folie(ci. Or cetAnaxarque fut le compagnon et l'ami de
Pyrrhon, dont il Joue et admireï'adkfliork W,Ici encore, il y a
an lien de filiation historique entre l'école de Déroucrite et l'école
sceptique.
Logiquement^ le passage du dogmatisme mécaniste et maté-
VoirZfllcr, op. «(.,(>. \^j.•»
Ihii., p. 375.l1' AriMot". op. Kuseb., Pricp. ecaug., XIV, ut, 5 OiSeis fyëp oiièv oïhv,
cW«i!to nvtoaôitpop tiDipev i o»'« otltftet. Cf. Cit., .le, H, %xm, fi; Diw;
IX,58}S«l.«.,Vtl, HH.'«
Wor., IX 5tjî Wiit., Virl. mm., .0; ttém., Slrom., IV, AgO; Voici-. Mai.,
IH.3; Hin., Iliil. ma., VIII. «m, 87.
«SmI.. JI..VH, 87.•• au.
1% ix, es.
ti HtTfiODtfCTKHfc Clf AlMTttB l
rialiste au scepticismô &'eiipti«|uo sans peine. Tout occupés de
leursrecherches physiques, tes premiers philosophes ont bientôt
reeonim fmsfilftsîinfe do l'eipéricuee sensible; mais tour con-
fiance uaJvo dans la raison n'a pas été ébranlée. Cependantlu diversité des résultais
auxquels ils sont arrivas devait mettre
leurs successeurs en défiance; et des esprits déliés ne devaient
pas tarder àcomprendre que l'an
peut diriger contre la raison
elle-même des arguments analogues à ceux qui ont miné la
confiance d'abord accordée aux données des sens. Lus premiers
philosophes se sont arrêtés à mi-chemin; tessophistes iront
plus avant.
Il. i\ous n'avons pas à faire ici l'histoire de insophistique, 1
ni à chercher les causes qui en favorisèrent l'apparition à
Athènes; notre tache estuniquement de marquer les
rapports
qui existent entre lessophistes
et lessceptiques
de l'école phyr-
rhonienne, et comment lespremiers frayèrent la voie aux se-
conds.
Les faux savants qu'on désigne sous le nom de sophistesfurent très nombreux: tes seuls dont nous ayons à nous
occuper
y. sont Protagoraset Gorj;ias. Les autres, mi (>ffot. tout en parlant
et en agissant comme s'il n'y avait point de vérité, ne paraissent
guère s'être attardés à déterminer les raisonsthéoriques de
teur doute. Leurscepticisme
est surtout pratique; ils songentà
l'exploiter, bien plutôt qu'à l'expliquer. Tous lessophistes,
mais surtout ceux de la seconde période, furent avant tout des
professeur* de rhétorique, de politique, de n'importe quelleautre science «m plutôt de
n'importe quel art; ils auraient cru
perdre leurtemps
et leurpeine s'ils s'étaient attardés à démontrer
que rien n'est certain. Cette assertion est de bonne heure prise
par eux comme un axiome qu'on ne discuteplus. Ils no s'ar-
rêtent pas auxprincipes;
ils courent aux. applications. Si la
dialectique a une si grande importance Il leurs yeux, c'est
uniquement h cause des services qu'elle peut rendra à fa tribune
ou au tribunal: si les disciples si? pressent autour d'eux, c'est
», v i*iiff.osopiiiKn m&mGMïwm. n
qu'ils espèrent, grftcc à {eues façons, devenir dé* avocats subtite
et retors, capables d'éblouir leurs auditeurs, doperdre leurs
adversaires et de gagner tes plus mauvaises cuuses. Embarrasser
un interlocuteur, tui jeter à la té*£edes raisons, bonnes ou mau-
vaises, qui i'élourdisscRl, et lui ferment lu bouche au moment
oiï il devrait parler» le déconcerter par l'imprévu desripostes ou
par l'étràngeté des questions, abuser contre lui d'un mot mal-
heureux, et lé tourner en ridiculejiar tous les moyens voilà
toute leur ambition. Aussi ladialectique des sophistes n'est-elle
qu'une routine, qu'on n'enseigne pas par principes, mais dont
on fait apprendre par cœur tessophisme* les
plue usuels; c'est
àpeu près, suivant l'ingénieuse comparaison d'Aristote' comme
siquelqu'un promettait d'enseigner le
moyen de n'avoir pasmal aux pieds, puis n'enseignait ni à faire des chaussures, ni
mène à s'en procurer de bonnes, tnais se contentait d'en donner
une grande quantité de toutes formes; c'est un secours utile,
c« n'estpas
un art.
Cette thèse générale qu'il faut douter do tout, quoiqu'elledétruise toute
philosophie, est encore trop philosophique poureux, et fort au-dessus de leur portée. Si peu d'estime
qu'onveuille avoir
pour lespyrrltaniens, ils sont incomparablement
supérieurs à laplupart des
sophistes; lessceptiques
sont des
philosophes; les sophistes sont des charlatans. Ce serait fairetrop d'honneur aetx
arguties d'un Ëuthydènie ou d'un Diony-sodore
que de leur supposer uneparenté quelconque avec les
arguments d'un Cnrnéade ou d'un /Enésidùine..
Ces ciiractères sont, à différents degrés, ceux de tous 1ns
sophistes; en vain Grotê '?> a essayé de les défendre son plai-
doyer n'estqu'ingénieux et sa cause est
perdue (s). Toutefois
il serait très injuste de confondre les fondateurs de la sophis-
tique avec les bateleurs que Platon nousprésente
dans i'Euâtj-ilème. Prolagoras et Gorgias sont, il est vrai, les fondateurs de {
">Sophi$t.Etetick,««ï, |8:«.111 Itul. (h h Grèce, Irait. Smlmis, l. XII, |>. 178 if »n/. Paris, Larron, tK6<>.
m Voir Zeltir, op. cit. t. tl p. a»»,». t.
f* INTRODUCTION CHAPITRE I.1("" 4 ni. UU~"t 1 11-.0. -1..
réristKjiiB elle procède d'eux eu droite ligne iW niais datte celte
voie ils surent s'arrêter àit'ai|w ifs ont encore un sérieux de
pensée, une tenue do conduite, un souci de logique qui les
mettent fort au-dessus de leurs indignes successeurs. Chez
Piiiton, qui n'est pas suspect. Socrate ne parle jaintiis d'eux sans
égards if lui arrive mêmed'envoyer dus disciples à
Protagoras.Seuls panuiles sophistes, ils sont encore des
philosophes.Oit sait que, par
des voies différentes et à t'aide de formulesen apparence opposées, Protngoras et Gorgias arrivent à une
conclusion identique « L'homme »ditPfolagoras, est la mesure
de toutes choses n, car k«s sensations seules lui font connaître co
qui est; or la sensation, résultent, comme l'avait déjà montré
Heraclite, de la rencontre du mouvement de l'objet avec celui
s du sens, est essentiellement relative elle ne nous fait pas con-
naître tes choses tellesqu'elles sont, mais telles qu'elles nous
apparaissent, et fa manière dont elles nous apparaissent dépendelle-même de ht manière dont nous sotnmes affectés ou disposés.
Profagoras, la chose vaut lapeine d'être remarquée, se place
y toujours à un point de vue objectif la raison de ce que nous
pensonsest hors de nous. V.o
qui existe dans la réalité est
dans unperpétuel
mouvement parmi ces mouvements inces-
sants, les uns, rencontrant les sens, provoquentune sensation;
tes autres n'eu provoquent pas; mais au même instant, diverses
personnes peuvent percevoir, àpropos
d'un même objet, diverses
sensations le même objet peut apparaître comme un homme,
ou comme un mur, ou comme une galère '3|. «A l'élut normal,
on perçoit les choses qui doiventapparaître
à l'état normal;
dans le cas contraire, on perçoit d'autres choses De ta, la dif-
férence des sensations suivant l'âge, le sommeil, la veille, la
folio. Dès lors, comment faire une distinction entre les sonsa-
•u Voir Zdfcr, «p. «'(., p. 5j5.ri' l* ifiic Srortns( P. t 41H)appelle«l'unwul inconnusansdouli»à t'rofa-
ror~a, t&)).« .<iist.,Mfc.Hf.
Uni., /»..(, -us.
M PHILOSOPHIEANTÉSOfiBATlQDE. t.r>-u,, [ir
tit»ns, àMwep les u«eg vraie»* h» autres fausses ? Elles sonttoutes %afemftttt vraies, étant toutes naturelles, ayant toutesleurs causes hors dejioug,, flnne tout est vrai,
Gorgiass*ejt|jpinio tout autrement. «Rien n'est vrai», dit-il. H
prouve que l'étro n'estpas; que, s'il était, on na
pourrait le con-
naître que, si oiîlocônnnissait, on n'en pourrait rien dire. Mois,dire que Wcn n'est vrai, c'est évidemment la même chose
quedire lotit est vrai.
Dans ees doux argumentations, on pout dire que se trouventan germe toutes les thèses
que le |iyrrhonisme développera plustank La theVurio de Protogtimg lui m-uit M su(fj{(Sr<5epar Je
système d'Héraelitc; mats, pour la justifier, il avait recours auxerreurs des sons, aux contradictions des opinions humaines
/Kndsideiwo no ferapas autre chose lorsqu'il .dnumérara ses dix
froges,et tous les
sceptiques procèdent de même.
(;'est lit méthode de l't%ole d'KIéequ'applique Gorgias it
retourne ladialectique de Pannénide et de Zenon contre leurs
propres thèses. Ici encore sonexemple sera irait»-. Entre la
critique do l'idéede l'ètiv, idte que i'a entreprise lesophiste,
et lucrttif|ue_dêja_nÔtion de cause, telle que la fera &nfoi-
dftme. lapan-nlé est lîviiïïmtéTîies habitudes et la direction
d'esprit des nouveauxsceptiques sont tellement semblaldes ii
celles deGorgins, (jue quand Se*tusw résume une partie du
traité De la iValure ou du tXou-lhre, il ajoute do lui-même et
presque sans s'en apercevoir des arguments et des éclaircisse-
mentsqui
se fondent très l»ien avec le reste de.l'exposition et
font corps avec elle ce n'estq«e par un ellbrt d'attention et
et)comparant le texte avec celui du De Mémo, faussement at-
tribué à Aristote, qu'on peut les distinguer w.
Si on descendait dans le détail, bien d'autresanalogies se
présenteraient. Déjà Prolagoras attaque l'astronomie1»: il écritsur les
mathématiques, probablement pour en contester la eer-
!llM..¥H-.65-87.
111 Voir Zellor, op. rit.. |». fma wife -Xw
Ami., M»., H, ,k.
m WFRwDfjtrnoN;– .aitAPitite r.
titudescientifique* Ips
scc^(i(|uesse
doniieront |>(us fwd l«
mène tâche, en Peiargissajït et en l'étendant ik toutes tes
sciences(iyxwxAi« ftoA^ww). De même, par une
conséquencedirecte île sa célèbre maxime, Protagoras déclare
que sur tout
sujet, on peut opposer deux assertions contraires <•> c'est ta
première forme de cette hosthéaie des sceptiques, qui, opposantsur chaque question deux thèses contraires
quise font équilibre,
se déclarent dansl'impossibilité
deprononcer. Les nouveaux
académiciens s'exerceront aussi ù plaider partout tepour
et le
contre. S'il y du scepticisme dans l'érislîque dessophistes,
on
verra plus loin qu'il y a bien aussi de l\kislique dans lescepti-
cisme.
Dans les questions de morale, Protajjoras et Gorgias de-
meurent encore attachés aux anciennes traditions. D'autres
sophistes, à l'exempte d'IIippjas. opposent le droit naturel au
droit écrit, l'oadé uniquement sur J&. coutume c'est la thèse
que reprendront plus tardPyrriion et Carnéade. Et ils
préparentencore la voie à €arnéade, lorsque, pour attaquer ta religion
populaire, ils insistent sur ter diversité des religions, et avec
Prodicus, expliquent que les premiers hommes ont divinisé tout
ce qui leur était utile.
Toutefois, a cwtû (les analogies, il y a des différences essen-
tielles lasophistique ressemble au scepticisme.! comme l'ébauche
à l'œuvre achevée, comme fa figure de l'enfant à celle do
f homme Fait. D'abord, comme l'indique Sextus Kmpiricus(5J, quia
pris soin de-noter quelques-unes de ces dilïépences, ia
sophis-
tique est conduite à une conclusiondogmatique que récuse le
pyrrbonismo; celui-ci ne ditpas que tout est vrai ni que rien
n'est vrai il dit qu'il n'enjait_rien. Au fond, iln'y a peut-
êtrepas grande différence au moins la position prise par
lescepticisme est plus facile à défendre et plus habilement
choisie. De plus, c'est sur une base dogmatique que reposent
Dioj; 55. Cf. Zflltcr. op. «'(., p. 5o;.
r>io,r.5i.
'S P., I. ilfi Ht,q.
U l'Hir.OSO|>|{fB SHTfmcii&TlQiHi. 17
t«s H%ft(iens de Protagaras If déclare qw'en dehors d» nous*tout est toujours im muuv«intt»t
ol «ju'j\ la diversité des mouve-
monts correspond lit diversité des sensations deux points sur
lesquelsSextus ne peut s'entendre avec lui. Ln
sophistique n'est
pasencore enfermée tout entière dans lu conseillée ht
règne
du pur suhjoctivismo n'est pas encore arrivé.
Outre ces différences, indiquées par Sextus, on peut cil si-
gnaler d'autres, non moins importantes. D'abord lesarguments
des sophistes sontprésenté sans ordre et sans aucun souci de
méthode. On verra au contraire avec quel artaccompli tes
nouveaux académiciens savent disposwr les diverses partiesd'une argumentation. Carroîade en particulier, quoique nous
ne le connaissions que par des fragment? mutilés, a laissé des
modèles de discussion, ou toita les arguments sont savamment
groupés,s'enchaînent aisément, se fortifient l'un l'autre, et font
pénétrer peu àpeu dans l'esprit une clarté qui l'enchante, alors
mêmequ'elle ne le convainc
pas. De même, etpeut-être sous
l'influence de Carnéadc, /Enésidème classeméthodiquement
sous le nom de Iropa tes arguments sceptiques: et chez Sextus
Empirions, le souci de" l'ordre et «le la méthode est poussé si
loin qu'il devient fatigant et importun.Mais c'est moins encore par fa méthode
fille par la force des
arguments et la finesse des analyses que les sceptiques l'em-
portent sur lessophistes. Avrai dire, Protagoras «;t Gorgios ne
fontqu'effleurer le scepticisme, lis en
aperçoivent les arguments
principaux, mais ne songent pas ù les approfondir. Rien de
comparable chez eux aux délicates analyses par lesquelles (,'ai-
néade. devançant lapsychologie moderne, montre le rôle de y
l'association des idées, et fait voir que l'accord denosjvpré-
senfations est la meilleure garantie de leur prohabilité. Il v a
loin aussi des indicationsde Protagoras aux trupes d'/Kri<>sidème,
plus loin encore de lacritique de l'idée d<»
l'tjtrepar Gorgias à
lacritique de l'idée de cause par /Knfoidçmc. Le choix mène
de ce»»- notion, siimportante dans tes sciences, les exemples
invoqués, lus objections prîmes, attestent une profondeur, uue
•j
t» lNtitOl)tlCT[ON, GHAWPRBl
précision, mémo«a esprit scientifique dontles sophistes n'eurent
pas mi'itie l'idée.
Enfin le but que suproposent les uns et les autres, l'esprit?
dont ils sont animes, sont tout autres; et c'est de là (juo dériventtoutes les différences que nous venons
d'indiquer.Les
sophistessont surtout préoccupés dos conséquences et des applications
qu'on peut tirer du scepticisme; leur esprit est tout entier tourné
vers lapratiqué. Ils sout, avant, tout, des professeurs de rhéto-
{ riqueoude politique; ta théorie n'a d'intérêt pour eux que
si elle
conduit » »it art, et quand ils se sont, pour ainsi dire, mis en
règle avec elle, ils ont lutte d'arriver auxapplications. Ils na font
que traverser le scepticisme. Ils renoncent àpoursuivre la vérité
plutôt qu'ils nedésespèrent de la trouver; ils
y renoncent sans
chagrin,et
pleins de confiance en eux-mâmos, ils se jettentavec ardeur dans la vie
publique; ta ils ne doutent de rien.
y. Le doute n'est potir eux qu'un moyen. Il est une fin pour
Pyrrhon. Lessophistes sont des habiles; Pyrrhon sera un
philosophe. CVst par dégoût de la vie active, par fatigue de la
dispute,dont il aura reconnu la stérilité, par esprit
de renon-
cement qu'il arrivera au doute. Ni lui ni Timon une fois quece dentier sera devenu son disciple, ne tireront aucun
profit de
leur enseignement; ni l'un ni l'autre ne brigueront les fonctions
politiques: ik vivront comme des sages, dans le repos et le
silenee.
Cette opposition semarque clairement dans l'attitude que les
uns et les autres prennent a l'égard des croyances populaires.
Déjà Protagoras, malgré sa réserve habituelles exprime des
doutes sur l'existence (les dieux; Prodkus fait plus que d'en
douter: il l'explique par une illusion. Leurs successeurs ont
encore moins de ménagements; ils ne s'occupent que de renverser
les idées reçues: en religion comme en morale et enpolitique,
ils sont des révolutionnaires. Les pyrrboniens seront des conser-
vateurs. Leur constantepréoccupation
.sera de nepas toucher
aux croyances Populaires et, comme ils diront, de nepas
bouleverser la vie; l'vrrhon sera (fraiid prêtre. Ils affecteront à
U 1*HIM>S0I'IUK WfÉSOGBATIQUE. 1»
t'égnrtt d« kFtttfBLo» et dos traditions im respect si grand qu'onade In peine à lie pu» le trouver ttn peu suspect. Leur eonelusioa
'sera qu'il faut vivre comme tout le monde, puisque lu .science
n'est bonne tt rien et même n'existe pas. C'est bien à tort qu'on
regarde souvent te pyrrhonisme comme un déli jeté au sens
commun. Nous montrerons au contrairequ'il n'est pas autre
chose (lue la philosophie du sens commun. Ausurplus, les
sceptiques ne s'occupent pas volontiers des questions pratiques;ils n'en
parlent qt^'âleur corps défendant, et n'en
disent queré
qu'ilest
impossible de n on pas dire. Ils se sentent mal à
l'aise stn* ce terrain, et aiment à s'en détourner; car c'est là
qu'ontes
attaque toujours, et ils sentent bienque c'est leur
point faibk Aussi serejettent-ils volontiers dans la discussion
théorique: c'est là qu'ils triomphent. Ce qui chez lessophistes
était en somme l'aecessoiro devient pour eux l'essentiel.
C'est donc seulement par les grandes lignes 'lue ces deux
écoles se ressemblent.Presque tout restait à faire après les
sophistes.Le
pyrrhonisnio reprend l'esquisse rontmoméo, partes
sophistes, et l'achève. C'est d'ailleurs ainsi que procèdef~
généralement l'esprit grec. Les artistes fonttoujours
la même
statue, et si>contentent d'y modifier quelques détails, d'y ajouter
quelques traits. Lespoètes dramatiques reprennent
souvent les
mêmes sujets, et imitent leurs dei'ancicrs sans tes copier. Les
philosophes recommencent des tsepi Çûasw et ne se font passcrupule d'encadrer les pensées do leurs prédécesseurs au milieu
des leurs. Tous procèdent par additions successives, améliorant
peuà
peuIWvrc commune,
jusqu'àce
qu'ilsl'aient
portée au
plus hautpoint de perfection. C'est a
peu près ainsiqiivlruvniile
la nature; et c'est taprétention
avouée dugéniu grec de
se con-
former en toutes choses à la nature.
-j». wnwmcnm. «:ïi ai*i'Fhk h.
CHAPITRE Il.
SUCIUÏE BT LES KUCttATiQUES.
f Socrate a été l'adversaire uchurné des sophistes; longtempson a (tu qu'il n'y avait rien «le commun entre eux et lui et
qu'il•'•tait leur
opposé en toutes choses. Certains historiens modernes
ontcltittigô tout cela: Hegel (t! trouve que Socrate ressemble aux
sophistes: Grote'1 estimefille
lesprincipaux sophistes ressem-
blent à Socrate; va, (in decompte. Soc rate ne serait
quele
plusillustre îles
sophistes. Socrate, dit Hegel, n'est pas sorti de
terre tout acoup
comme unchampignon; il est en parfaite
continuité avec soit temps. Comme les sophistes, il renonce à
expliquer le monde; il seplace au point de vue subjectif. – Si,
dit Groto, dans le milieu de la guerre du Péloponèse, on eut
demandé à un Athénienquelconque Quels sont les
principaux
sophistes de votre cité ? il eut certainement nommé Socrate
parmi les premiers.
Sans entrer ici dans une discussion qui nous écarteraittrop
de notre sujet, nous devons signaler cequ'il y
ad'exagéré dans
•esopinions. S'il
y aquelques analogies entre les sophistes et
leur illustrecontemporain, les diifércnr-es sont bien plus nom-
breuses et plus importantes fîi. Assimiter Socrate même à l'rota-
îjonis et à Gorgias. c'est à la fois lui faire une injure imméritée
H commettre une grave erreur historique. Quels que soient les
(ievIMte ,1er Plutôt., l. II, p. ôa (Wtrl,e. t. XIV; Berlin Ouncker, i833).
Itàttiire dela Orke, Iracl.Sailuus, t. MI, p. \-}3 et mj. (Paris, Lacroix,mitij.
'• CVI re (|ii« Zeller il'hiht. lier Ctiechen, t. H, p. j.'iK, :t*AuH. fcipri|>.
|X-5) iiniiitiT ,iï(><- lip.uii-.)ii|i ili> fiiirr- <•! <|i> piiVisitm.
stWftATK lit XRS SÔGlUTIQIiBS. 21
moyens t[«'ît wn|jh)ift ei h>s ifétour» «mse «Hiipintt «a pensée,
Socratc nuqu'un but' trouver une vérité absolue, univer-
selle, qui s'iijqwse a totitosprif: et (font la conscience individuelle
n<>soit pis lit mesure. Sa doctrine a été fort bien nommée I»
j)tii!oso[iliie desconcepts, et it l'a nettement dûfînie en disant
que lu science est la connaissance du générai. QueUes quesoient ses hésitations et ses réserves il est des
points sur lesquelsil n'a jamais varié. Où voit-on qu'il ait douté de la vertu, de i»
différence du juste ot de l'injuste, de l'obligation de faire le
bien* Jamais moraliste n'a montré une convictionplus profonde,
une ardeur plus sincère etplus commumeative a
prêcher la vertu.
Si on peut luireprocher quelque chose, c'est d'avoir eu trop
d« confiance dans la science, d'avoir cru qu'il suffit de connaître
te bienpour Je faire, d'avoir identifié la vertu avec la certitude
absolue qui s'empare del'esprit lorsqu'il est
parvenu à recon-
naître la véritable nature du bien. Et si la pensée de Socrate
avaitquelque chose de commun avec le scepticisme, comment
comprendre que sesplus illustres
disciples Platon et Aristote,
s'inspirant do son esprit et continuant son œuvre, soient arrivésti
à construire les systèmes lesplus dogmatiques qui furent
jamais ??"
Non seulement Socrate a eu foi dans la science, mais il a
découvert une méthode excellente. Cet examen qu'il- recommandeà chacun de faire sur sot-môme
et 'qu'il savait si bienpratiquer
sur autrui, cetteanalyse (les notions, cette épreuve par l'ironie
et ladialectique à
laquelle il soumettait sesdisciples, était vrai-
ment unprocédé scientifique. Ce n'est pas la méthode
expéri-mentale, puisque ¥êksy)(ps ne
s'applique pas à des objetsextérieurs et conserve
toujours un caractèredialectique et
subjectif; mais c'estquelque chose d'analogue et
qui procède du
mômeesprit. Grote, (lui sait malgré tout lui rendre
justice, le
compare, sous cerapport,
a Bacon, s VEknchos,tel que Socrate
"> Voir, sur |« vrai sens de h philosophé; ,k Son-ale, la Mie liiud* ,1e M. Km.
Uoiilroi», Hoaate, fondateur de latcience morale (Sémites cl Itavam de f Atari. <k?
». morales <( |)olilii|ii<^i, t8*3).
•22 tfttUOMm'hON. – aiAMTRR11.
l'appliquait, dit uiJKW*mm raison l'historien anglais^, éliBl a
animé* de l'esprit le plus vrai de Iiiscience positive «t forumil un
précurseur intlispensabîu qui aidait à y parvenir.» – «Soerute,
ujoutu-t-il, était te contraire d'un sceptique personne ne
regarda jamais (a vie d'un œil plus positif et plus pratique;
personne ne lendit jamais à san but avec une perception plusclaire de la route tpi'il parcourait personne ne combina jniimi»comme lui l'enthousiasme tlu nii&nannuire avee la finesse,
l'originalité*, l'esprit de ressources inventif et la compréhension
yt''iu''ralisatnce du philosophe.»
Toutefois, si Soeratte est le contraired'un sceptique, il finit
reconnaître qu'il y a dans son dogmatisme des parties de scep-déisme. Lorsqu'il répudie
tascience, déjà nature et déclare que
de telssujets dijpassentjVnjlendfinent humain (i|, que la divinité
les dérotx! ;i nos yeux, il parle comme lessophistes et comme
lessceptiques
de tous les temps. Il est vrai qu'il donne «ne
définition de la science, et en cela il diffère dessophistes
et des
sceptiques; tnais, il ne faut («rs s'y tromper, la science dont il
parle est uniquement la science morale '3' tesconcepts qui en
sont l'objet sont uniquement desconcepts moraux. Qu'est-ce
que le bien? le juste et PiiijiiNÎe ? lapiété ?
Voilà lesquestions
qu'il examine le plus souvent dans les Mémorables do Xénophutiet certainement Xétiophon nous représente Socrate
plusfidèle-
ienwutt|iie Platon, (domine les
sophistes, la pratique l'intéresse
bien plus que la théorie toute son ambition, comme la leur,
>' Op.âl., |>.3/li. t.
<•> Xctiajilion, Mentor., l, i, 1 1;– tV, vu, 6. – Aristote, Met., I, 0.
'• Xoiis croyons (jue XI. Fouillai', ilan< «oh K»rii «l*aiti<*urs sircniairjuaMo, Lu
MUatapliK i/c Svemlp (fit. n et in; t'aris, 0. Bnilliére, 1 87*1), a <;xa|{<jté le l'amc-
tite u>i;tnpliysti{ia> de la pliilusuphiu ife Socral». 1.0 lestw si «unun du l'héém 96, A,
sur lei|net rfjiose suitout son iulcrprélatiun uian|u« nRtlomenlla tlilfc-rcncu1)11pi;int ifc vue 1I1; Socrale, iINpow < rxpli(|ucr te monde par l'Iioinmc, avec celui
les |jIiî1'i>o|i1im :nilfri«ir< 'lisposé» à cipli(|»or l'homme par le tnondft; maii il
n'implique pas un sysii'incî ila iii('ta|)ltysi(|iic. U\ si-iil« tcieuci' iloit! Socralo s'oc«up«cl dont il reconnaisse la Icgitimilû «I la morale. Cf. Km. lioulruux, < al. il 1x3-
[oniit (railleurs à savoir ai dans ci:passage l'fctton >^primc, non sa propre pensée,
mais celle <lt- soi» inailro, «I cVsi fofl druilniiv.
SOCBATR- ET IBS SOCRATIQUES. >M
est (le loniiertlt's lioinmes «lilos, diîfjoiiir citoyens; il ne (HlK'ru
d'eux (jtio par l'idde qu'il se fait du but à alttiîudre et desmoyensles
plus propres à y parvenir. Nous m* voulonsplis,
avne
A. Lange, {'accuser d'avoir arrêté tes progrès dofespril humain
et de l'avoir égard «pur des milliers d'années dans le dédain
de l'idéalisme platonicien(1)», Mais il est certain qu'il professait
pour ceque nous appelons aujourd'hui la science positive un
dédain excessif. Lorsqu'il recommande d'étudieri'iirilltiiiéliqiie
et la géométrie seulement dans la mesure où elles sont prati-
(Iuement utiles fc", il tient exactement le niante langage quetiendra
plus tard SextusEmpiricus c'est vraiment une sorte de
scepticisme.
Par la méthode qu'il emploie, Socrate se distingue encore
desphilosophes (lui f avaient précédé et se rapproche (les
sophistes. Dès l'instant oîi il se confinait dans t'analyse des
concepts, In dialectique était la seule méthode qui lui convînt.
Or il fallait une grande attention pour s'apercevoir que les
mômes moyens peuvent èlre employés en vue de buts tout diffé-
rents. Ajoutons que, soit par un défaut inhérent à l'esprit [frec,
soit par tes nécessités que luiimposait
une Julie quotidienneavec des
esprits exercés et redoutables, ladialectique de Socrate
est souvent subtile etjwaft captieuse. Encore aujourd'hui, en
lisant certains dialogues de Platon, ne nous arrive-t-i! pasde
nousdemander quel <wt le
sophiste?Il n'est
pas surprenant quedes
contemporains commeAristophane, s'y soient {rompes. Sur
cepoint encore, Socrate devait avoir des imitateurs les philo-
sophes de la nouvelle académie s'autorisent de son nom et le
revendiquent pour un des leurs"
Enfin, même dans les questions où il avait les convictions les
plus arrêtées, dans lesquestions morales, tes n<5cessk«!sdela dis-
cussion et le caractère de sa méthode forçaient Socrate aprendre
HUtoin du matdvialUtm, Irait. Pommerai, t. I, p. 5o. l'aiis. Reiim-aM.
1877.
'•" Xcno|iliou, Mm., IV, m, a.
Oie, 4c. t, iv. iti-in, Vu
M UmiODlFGTIOS i. aUMTRtf ».
«rie attitude sceptique. Dans toutes les discussions, son premiermut était qu'il ne savait -rien son
premier soin était de montrer,
soit à des adversaires présomptueux, sott « des disciples inexpé-rimentés, qu'ils ignoraient tout; et il ajoutait qu'il n'avait rien
àleur apprendre < DeM cette formule si connue
« Go que jesais
le mieux, c'est (lue je «e sais rien (î!.» Ou encore «Seule h Divi-
nité possède lit sagesse; ta science humaine n'a que peu duvu-
leur, et même n'en a aucune511. » La sottiesupériorité qu'il osât
s'attribuer sur les autres était de ne pas croire qu'il savait alors
qu'il ignorait '•>.A force do faire de l'ignorance et du doute un
éloge immodéré, il a fini par être pris au mot on s'est trompéa
sur soit ironie, et, sans le savoir ou sans le vouloir, ce dogma-tisas a favorisé de son nom et de ses exemples les entreprises ul-térieures du scepticisme.
Il. Parmi les successeurs de Socrate, ceux qu'on appelle les
IH'tils mmthptes ne furent qu'à demi fidèles à leur maître du
moins, s'ils se souvinrent de sonenseignement, ils ne le conser-
vèrent pas sans alliage, et l'on voitreparaître dons leurs doctrines i
l'influence desphilosophes antérieurs et des sophistes celle de
l'éléafisme et de Gorgias. chez lesmégariques
et lescyniques (5);
celle d'Héraclile et de Protagoras, chez lescyrénaïrpies.
De là
dans ces doctrines des germes de scepticisme (lui ne tardèrent1
pasà se
développer.
Eticlide est certainement un philosophe dogmatique. Avec ses
maîtres éléafes, il répète que les sous nous trompent, mais il a
une confiance absolue dans la raison il croit à l'unité de
!1= t'Ial., Tftéél., i5o,C; Slena, 8oA; Arisl., %/i. clenck, xxxm, iK3.4; Cic, Ac, II, uni, 7-'i; t, ir, i(i.3"
Cl.it. AjiuI.Sijix., ai, B,H teq.« ftiW.
Antistliùncarailéldteilis(;iplo(leCor;fias(l)iog,. VI, i; Ath-, V, 330); quantà Ku.lide, nous ne suoni camnii!nl il fut initié nm doclrincs <!« IVcolu <l'KI';i;;
mais il n'est |ias il»ul«it.v iju'il les ait connues. Cicûron {/te.. Il, .un, i:>;>) na
fait .iiiciiiio ilt.-liuflioii i-alro lVrote <l'Éléc et celte <fe Mé|<aro, ajijicl<>e plus tord l"«?-
cote it'Kiis. cl ifiiliii i«i|e tPCnfirip Innijui: MènéSkiw se fxt «-failli dans cette
deruivns ville. Cf. Arislocl. aj». Eus., Prmp. «., XIV, t»n, 1.
SdCftATË m IJ-ÎS SOCRATIQUES. 25
l'klpfif'f iinlititti'l'il'i r>l Mpvnnt iiu'îl iiminft» «user fi> Riim m» fni'htre'" immatériel et éternel, qu'il apjiefte aussi ll> fiîctn ou la
Raison; il admet k théorie des idtk's. Mais, comme les êUalva
aussi, tes exi|»etwes de la causé (fu'il défendait te poussèrent vers
lu dialectique. Ce n'était pas chose aisée de dépendre directement
et do faire accepter la théoriesuivant laquelle l'Être véritable est
un, immatériel et immuable il était plus facile de prendreà
partie eouxqui s'en
tiennent auxapparencçsjjf^ibles et de leur
montrer que leur croyance mène, à d'inévitables contradictions.
La mène raison qui avait faitapparaître
la méthode indirecte de
Zenon d'EIée après celle de Parniénide devait cette fois encore
susciterl'Institue après lit dialectique, Eubulide après Euelide.
Eulmlide re|)rcnd ou invente("2) lescélèbres sopbismes du Voilé,
du Menteur, du Tas ou dit Chauve, du Cornu; nous sommes en
pleine sophistique: Eutfiydème et Dionysodorene parlaient pas
autrement.
Ces sophistes ne méritent pas qu'on s'occupe d'eux, mais nous
devons faire uneexception pour JJiodere Cronus, vigoureux dia-
lecticien, au témoignage de Cicéron f5!, et qui a exerce une cer-
taine inlluencc sur l'écolesceptique.
Sextus le cite souvent pourse moquer, il est vrai, de lui et de sa dialectique; il l'appellemême un sophiste (1). Néanmoins il lui arrive de reprendre (tourson propre compte les arguments contre la
possibilitédit
mouvement, que Diodore avait lui-même empruntésà Zenon
d'Élee.
Stilpon réunit les doctrines iiiégariqucs et celles de l'école
cynique5" Il soutient, comme l'avait déjà fait Antisthène^, Km-
f" Voir .Waltt'l, //ijIuiVc <fc l'écoic rfc Migart et 4a écoles d'Élu ei it'Hrilric. Pnrij.
i8A5.
'«l'nmtUCeKlMhtc <ler Ugik, M. I, a, p. 33- Uipzi|{, Hîrtct, .Ki5)ak
triliufià c« siipliismn uni; origine mc(;iirii|ite. Zelle- {op. cit., Il. p. a3-.t, 3, 3'
AuO.)es\ ptntût |>orli;Apenser«|nc<lt*j[àlt>ssophiste,s'en Hakni staris.– • l'raiitl
exposeen détail IonscescurieuxraisuDircmi'uts.M/fcfiifti, vi, il.
"» />[(. a&5;M., X,85,ç,9.
'» P., III, 71.r.
Zellcr,«/). cil. II p. 3H1 et scq.V«y.ci-dessousp. afi.
i& iNTROIMiCTJMt CHAPITREci.
ptissibilité d'uiHi- deux lenat» dans unJw^ineftli de dire
par
exemple Le cheval court >lKparce que are cheval et courir sontdeux choses très différentes. H dirige aussi, comme plusieurs
cyniques, contre b religion populaire desattaques qtti font déjà
prévoir Carnéade (2>.Lephilosophe inégarique Alexinus ® combat
de mène la théorie de Xénon de Citium sur l'âii»! du monde
par un argument que Carnéade s'est plus tard-approprié.
Pyrrhon, né àElis, qu'il ait été le disciple de
Bry-sou fils de
Stilpon ou d'un autreBrjson, fut certainement inilî«| de bonne
heure à cettedialectique ou à cette
étistique; et Stilpon fut le
maitre do Timon. H y a donc un liejihistorique entre l'éeole de
Mégare et te pyrrhonkue. Mais c'est surtout plus tard que se ma-
nifestèrent les analogies entre les deux écoles. Les trois écoles
issues de Socratu devaient, en se transformant, donner naissanceaux trois grandes écoles
post-aristotéliciennes lescyniques sont
tesprécurseurs des stoïciens; les
cyrénaïques, desépicuriens;
lesniéfjariqnes, des
sceptiques.
Avuc Antistîtène et les cyniques, nous voyons une
disposition toute nouvelle à subordonner la .science à la morale.Môme uae 'Mme d'An tislhène. manifestement inspirée par les sou.venirs Je fi'nsei«netnt>ntde fi«»rgias, conduisait directement à ta
destruction de toute science. On ne peut, suivant lui, unir dans
un ju{jen»enl un sujet et un attribut-, car leconcept de l'un dif-
lère ducuncept de l'outre, et de deux choses dont tes
conceptsdiffèrent, on ne saurait dire que l'une est l'autre. C'est toujourscette rigoureuse application du
principe de contradiction dontnous wons déjà signalé l'abus chez Parménide. Par
exemple,dire Cltommeest kn!i\ c'est dire que l'homme est autre chose
.|ue lui-môme. En d'autres termes, toute délinition. estintpos-
!1>Mut., /Mr. ù>ht., ati, i .|J,
»f«og.. Il, mS.
r)>Voicice raisonncnreiit,d'aptfe Sextus (,«., IX,toS): Lepoète vautmieuxque relut ifiii n'est pas poêle, le grammairien, que celui qui n'est
pas |;rammai-tvn, et île même pour tout te reste, il n'ya rien île mnlionr que lemoucfc; (toutle muoii<> tst poète et graiumairiuii.
11 Phlim, Sople. -»i, B; Arist., Mtt., IV, ag.
80CRATB BT LES SOCItATlQUBS. 27nJemawuas-a asr. ams.v.sar~s.t.e.r.r. 8-1'
sil>te. On » dit tout ce qu'on- jwtiîsavon' quand ou
adésigné une.
chose, quandon l'a nonimita ce qui existe réellement, ce sont
les élws individuels les concepts ite sont quedes manières de
penser ot ne correspondent à rien de rdel. Je vois les hommes,
disait Antisthène" je ne vois pas l'Immunité. Ce aominalismc est
exactement le contraire de la doctrine de Socrate et de Platon.
Cette sorte d'atomisme logique amenait Antistlièiie à des
propositions inquiétantes,couime «ello-ci qui rappelle les for-
mules sophistiques il est impossible <juodeux personnes se con-
tredisent «.
Toutefois Atitisthènô n'est pas gcepticjùe.tl a écrit un livre
sur la distinction de t'opinionet de la science i3) il juge encore
ta Kcience nécessaire pour préparer lu morale. La IWtuule<|iie
nous venons da citer n'a pas pour tui une signification seeulique.
Si deux personnesne peuvent
se contredire, c'est ([ue dans sa
théorie notninulisto chaqueêtre devant être désigné par
un nom
individuel, il n'y a pas deux manières de désigner une raûine
chose. Si l'on ncs'entend pas, c'est que, eroyantparlerd*unm<?me
objet,en ratifié* on parte d'un autre. Si on parlait
du même,
on s'entendrait; on ne peutse contredire, parce qu'on
ne dit rien.
Aristofe avait donc raison de conclure aussi (le cette proposition
qu'elledéclare toute erreur impossible.
Ilais. outre quecette
théorie, qu'ellete veuille ou non, est «ne entière renonciation
à la science, on conviendra (luede telles subtilités confinent à
lasophistique;
dans S'Eulhyëme de Platon, lo sophiste Oionyso-
dore tient exactement Je mène langage. Antisthène n'en a pas
conclu directement que la science est impossible;mais ses suc-
cesseurs iront plits loin toutes les sciences (iyxàxha italhfiuna)
seront pour euxw, ainsi que pour les sceptiques,comme si elles
n'étaient pas.
Aiïstippe et les ivrénaïques sont d'accord avec les cyniques
"Siroplic, Ineaftg. Scluil. Aritl., i>h. If.
Arist. Mel., VU. M) (iAef«'« àmiiyav.
1% VI, 17.
l>iof[.,VI,|S 7»; Slol).Wort/ XI. i h.
28 HfTKOlHfCtlÛJt – tlttX PITRE IL
.r~ _il1_ 1 1pour diminuer- le rôle du ta science; mais bars raisons «mtdifférentes. Nous ««uns, disent-ils, des sensations mais nous
no savons rien des choses (lui tes produisent. Le doux et ruiner,le Froid et le diattd, Je blanc et le noir sont des états de notre
conscience (W^): mais nous nopouvons dire ni
que le miel est
doux, et l'herbu («mire, amèrc; nique la glace est froide et le
vin généreux ni rjtie l'air «lela nuit est obscur (u. Comme dans une
ville assiégée, nous sommes isolés des choses extérieures nousne connaissons que nous-mêmes. Nous ne
pouvons m&ne pas dire
que noussoyons tous afteefés do la mène manière, dans tes
mènes circonstances; car, si deux hommes disent qu'ils voient du
blanc oit du noir, qui peut leur assurerqu'ils éprouvent des sen-
sationsidentiques? Chacun d'eux ne connah (lue la sienne. il y a
d'ailleurs de grandes différences entre les hommes et les ani-maux il on est
qui n'aiment pas le miel: d'autres se nourrissent
d'herbe tendre; parfois la glace brûle et le vin refroidit; Jesoleil
aveugle et il est des élresqui voient clair
pendant la
nttit. Si nous voulons i-viter ferreur, il ne fautparler que de
nos états de conscience. Ne disonspas que les choses existent,
maisqu'elles paraissent'-1. Et c'est
parce que noire science se
réduit à connaitre ce qui se passe en nousque le plaisir est le
seul bien.
Ens'exprimant ainsi, tes
cyrénaïques reviennent au pointde vue
purement subjectif de Protagoras; ou plutôt, ils le dé-
passent. En effet, Protagoras, nous l'avons vu, expliquait le
caractère relatif de la sensation par le dogme héraelitéeit duIlux
perpétuel des choses; il objectivait nos sensations en aliir-
mant que tout ce qui est représenté existe réellement, que toutest vrai. Los
cyrénaûnies s'affranchissent de toute affirmation
métaphysique; ils s'en tiennent au pur phénoméiiisme; par làils sont encore
plus près duscepticisme.
Plut., Mt. CMm.,j'i. (X Cie.,Ac, 11,tm, tlis; m. 30; Sert., «.. VII.191; I, 3l5;DM)t' II.99.
MPlut., ibid. Tifanwmi -uUpivo,, sir }'ê<r1i p* vfommo^uvà^aH» ttepl
TWP êxTGt.
SOCIÎATK ET LES SOCRATIQUES. 2U
Ifs en sont siprés, (jtft* Sextus s'est cm obligé de marquer
les différences Ilui séparent tes deux doctrines Les eyre*-
nn'tynes, dil-i], allirment que tes objets extérieurs no peuvent
(Hro perytm: le sceptique n'en sait rien. La différence, on ie
voit, se réduit a peu de chose.
Mais tescyrdnaïqueK
se bornaient àindiquer cette théorie
surisy insister beaucoup. Elle n'est pour eux qu'un moyon de
justifier leur doctrinecapitale, celle qui prétend que le plaisir
est le seul bien ce n'est pas encore le véritable scepticisme.
Ht, II serait ridicule de chercher des traces descepticisme
chez Platon et Aristotn. Quelle affinité peut-il y avoir entre les «
sceptiques et tes grands philosophas qui. dans toutes leurs
«uvres, parlent avec une si Jîère confiance, des choses en soi,•
de l'être en tantqu'être,
du bien, absolu et immuable? Jamais
il ne leur est venu à l'esprit qu'on pïtt vivre dans le doute et
s'en contenter; et oit les aurait bien surpris si l'on eut exprimé
devant eux les formules du pyrrhonisme. La seule forme du
scepticisme qu'ils aient connue est celle, nonqui doute de tout,
maisqui nie tout. c'est-à-dire un dogmatisme retourné. On sait
de quelle manière ils l'ont traitée. Il sullit derappeler ici ta
vigoureuse réfutation de Protagoras dans le Tltéétète, celle de la
théorie du plaisir dans le Pltitèfa; le Gorfiies et leSophiste
achèvent de nous montrer avec la dernière clarté ceque Platon
pensait des sophistes, et quel ras il faisait de leurs arguties.
Quant à Aristote, s'il a pris la peine, dans sa Rêfutalùm fies
wphimtcs, de résoudre quelques-unes des difficultés soulevées par
eux, c'est toutau plus si dans les revues générales des
philo-
sophes antérieurs par lesquelles il aime, à commencer sesgrands
ouvrages, il daigne tnentionner quelquefoisles thèses des
plus
eélèbrfe sophistes, Il se «mtenle de formuler nettement,
d'établir magistralement leprincipe de contradiction; il ne fait
pas à Protagoras H à (îorgias l'honneur de tes discuter comme
un Paritténide on un Pythagore." uf..
30 tNTftODttCTÛUL-- CHAPITRE tt.
ComiiK'at doue ses i'ait-il i|uo toute une branche de l'ècok
sceptique, la nouvelle académie, n'ait cessé de se donner
conune iu gardienne fidèle des traditions platoniciennes ? El elfe
a trouvé créance dansl'antiquité; car Cieéron a l'air de
prendre au sérieux cette prétention, et SextusEmpirions dissorte
doctement sur laquestion du savoir si Platon est dofjmatiste ou
sceptique*11. C'est une erreur, incontestablement: mais des
hommes(lui n'étatent ni
privés d'intelligence ni de mauvaiso
foi n'ont pu se tromper sansqu'il y ait au moins une apparence
qui explique leur méprise. Qu'y a-t-il donc dans laphilosophie
de Platon qui puisse servir doprétexte
à une interprétation scep-
» tique ?
Nous avons déjà indiqué les raisons qui obligèrent Socrate,
entouré d'adversaires si habiles, à n'avancerqu'avec prudence,
à
ne rien alttrmer qu'avec ménagements, et en faisant toutes
sortes de réserves. Platon prend naturellement, surtout quandil fait parler Socrate, les mêmes précautions. De là dans ses
dialogues nombre depassages
où il semble hésiter, où il se sert
de formules dubitatives «affirmer, dit-ilaprès avoir exposé
le mythe du PkéJon, que les choses sont telles que je les ai
décrites ne conviendrait pas à un homme sensé. » – tt Dans ses
ouvrages, dit à son tour Cicéron Platon n'affirme rien il
discute le pour et le contre, hésite sur toutes lesquestions, ne
dit rien de certain.» Mais, visiblement, Cicéron exagère. Dans le
passage que nous venons de citer. Platon fait les réservesque
tout homme raisonnable tloit faire et peut faire sans rien con-
céder au scepticisme. Est-ce douter de la vérité que de dire
Dieu seul peut la connaître tout entière !IJ; ou encorependant
sa vie mortelle l'âme nepeut
en avoir la pure intuition M, et
enfin qu'elle ne peut é"tre entrevuequ'à
de rares moment? et
ft,lt-«l9.• Phad., ii 4, l>.' Je., ut. /il». i;f. II, «m, -h.
f'arm.. t3V C.
/•<««. II.
somiA'FB tët im mgmîiwmï. n
avec beaucoup de peine ®î Si c'est là duscepticisme, tous les
philosophes sont sceptiques. Mais il n'en fallait pas davantage à
des tioiiunos passionnés, qui cherchaient partout des autorités
et voulaient des «neâtres h tout prix,ils abusaient du droit
qu'ilss'attribuaient de se contenter on toutes chose» des appa-
rences.
Toutefois un» si faible raison ot un si misérable prétextel2t
ne suffisent pas a nous faire comprendra que ta nouvelle académie
aitpu
se donner pour l'héritière légitime de Platon; il faut qu'il
y ait entre elle et lui un lien réel de parenté. C'est d'ailleurs
une parenté fort illégitime.•
Dans une intention toutedogmatique, afin d'exercer l'esprit, t
do l'habituer à se mouvoir avec aisance clans la région abstraite
des idées, Ptaton avait recommandé ces discussions <liaiecfi(jtio.s
qui, d'une idée donnée, ou, comme il disait, d'une hypothèse,
déduisent toutes les conséquences, positives ou négatives, qui y
sont contenues, cherchent celles qui s'accordent avec elle ou la
contredisent, l'examinent en un mot sous toutes ses faces; nous
avons unexemple remarquable de cette méthode dans le Parme-
nùh^K De là l'habitude(lui
s'étaitperpétuée dans l'école d'exami-
ner sur chaque sujet toutes les alternatives possibles, ut de peser
tour à tour lepour
et le contre. Avec letemps,
on oublia le
but, pour ne conserver que le moyen; l'esprit passa, et la lettre
resta. Des intelligences moins élevées que celle de Platon purent
croire de bonne foi qu'elles appliquaient sa méthode, alors
qu'elles n'en avaient conserve que la forme extérieure et le
procédé technique,et
qu'à vrai diro. cttes faisaient tout le con-
traire. ("est une décadence progressive, analogue à celle que
Platon lui-môme a si finement décrite, lorsqu'il montre, dans le
8° livre de litliépublujtw comment de la forme la plus parfaite
i» %VI, 5o«. Ej VU, 517. B«Phœl, *M, A.
Ce serait aliustr des mois <\m «In [itvltmdre ln>um>r <*itez Ptalon <|iu'lt|ti.'
chose de la inmiiéru <t«i sceptiques* parce qu'il a <lit( ftji., V, '1711.C,):vit' eli/uoire
y? elvv ovre fp~'dsepnoûsenvbCstpov.'»» i:l.*i. 0. Cf. /w. 101. I): Mon, SI,. B.
te~y IJrfftOftUtmOiV, – RH*P!'PKB M
de gouvernement mussent pou à peu, par (tes dégradations
presque insensibles, les formes inférieures.
IV. Si Aristote a été compris parmi les maîtres dont les
sceptiques de la nouvelle académie revendiquaient tes noms,
quoiqu'ils le nomment moins souvent et insistent moins pour
faire de lui un des leurs, c'est que lui aussi attachait une grande
importanceà la dialectique. Dans lu théorie de l'induction, le
grand philosophe avait remontré leproblème (lui préoccupe
tous les modernes; comment passer dequelques
cas observés
la loi(lui régit tous les cas semblables ? comment, sans faire
une énumération complète, manifestement impossible, affirmer
de tous les êtres d'un m'ente genre cequ'on n'a constaté que
pour quelques-uns* C'est par ta dialectique qu'il avait essayéde
combler l'intervalle. Étant donnés tes cas observés, les croyances
généralement adoptées, les proverbes, surtout tesopinions
des
hommes lesplus instruits, il faut, avant de formuler une loi
générale, soumettre ces faits à ta critique, examiner dialec-
liquenient ce qu'on peutdire
pouret contre, passer en revue
les difficultés et essayer de tes résoudre"1. De là des expressions
analogues •'" à celles que lessceptiques
devaient plus tard em-
ployer; it faut douter avant de savoir: c'est le doute méthodique
de Descartes. Rien deplus
raisonnable et deplus conforme au
véritable esprit dogmatique, quelques réserves qu'on puisse faire
d'ailleurs sur cette manière de comprendre l'induction. Mais, ici
encore, il y avaitune
apparence de scepticisme; cette apparence
suffisait à desesprits peu exigeants.
En résumé, si onprend le mot sceptitisme
dans son sens précis
ethistorique,
il n'y a pas en de scepticisme avant Pyrrhon le
'"/> I. i; Elhk. Sic, 1. H.Vny<>i,sur toute rett« thourie,Zcll'T,ay. cit.,
(. Ht, ]i. «13, :r Anl%..Mél.. Ht. t të« dé toh chnpHatu £«/>o|Jîi'Oi> -afjiyjoyov tù Sur.opûaat
HSÀvs- ilj i(» ititpor tlmpii /iiis ;w œpôispov -ir.opvjftivis:< caVi.. Cf.Elhie.
Mr.. Vif. I
SCtôRATB MT tES SCHiRATfQUKS. SJ
limreteiivftA -nef- ltt*atmnn'( ttriit IttAYtttm niiiifinnin tin ri t'iti* nMu
jvyi'i'hnnismeest vraiment tmi' th&nic urijjinalo, une vu» nou-
velle introduite dans litphilosophie. On voit bien poindre chez
les philosophes antérieurs quelques-uns des arguments (font les
sceptiques se serviront; on y déVouvre les liiiéimonls do lour
itoetiiiie. Mais, outra(lue
cesarguments n'y
sont qu'à J'état
(t't-buuclie, ils ne sonlpas encore groupés suusuiKjidée commune,
etsystématisés
en vuv d'une monte poiiclusion. La sophistique
elle-même est fort éloignée du véritable scepticisme. Mais des
raisons unafojjues à celles (lui avaient donné* naissance à la
sophistique, la diversité d«g systèmes, leurs lacunes ou leurs
contradictions intimes, et aussi. si on tient compte des circoti-
sfanees extérieures, la mort d'Alexandre, et !e trouble quo
la chute de sonempire apporte dans le monde grec, vont fitvo-
riser Pdctoston du pyrrhontsme.
UVRE PREMIER.
1/ANCiKKSCEPTICISME.
CHAPITREPREMIER.
DIVISION- DE L'HISTOIRE 1)1." SCEPTICISME.
Les historiens divisent d'ordinaire l'histoire duscepticisme
en
deux partiesils distinguent l'ancien scepticisme et le nouveau:
entre tes deux se place naturellement la nouvelle Académie.
Parmi tes anciens sceptiques, Pyrrlion et Timon sont les seuls
surlesquels
nous ayons des renseignements précis; le nouveau
scepticisme commence avec /Enésidème; Agrippaet Sextus
RmpiricHs en sont les principaux représentante.
Cette division a un grand défaut; elle est en désaccord avec
cellequ'indiquent
tes sceptiques eux-mènes. Un texte de Sextus
distingue bien les anciens et les nouveaux sceptiques: mais
/Ën&tdème est rangé purini tes anciens. «Les anciens scep-
tiques, dit Sexlus" nous ont tniusmis dix troues quironchiont
la suspension du jugement.» Or, dans un autre passage» les
dixIropes
sont formellement attribués a /fênésidèinu-l Haas!ry.
P*f I, 36 \iipii3i&<tt>i<u qviii6v< tzapi lofe ipxptnxip'ns «xetftxoi; rp*')H(tt.
d~ 4rv $ ésa,~ysrn·:IyeaOar ôvxei. 3:xa Trtl· npnt~e.iv. tGid., r ti!t Oi 3~ t'ï~cp~t
tKtvltKoi vtnpxitSô'xm Tpônov; tris èxo%ïiç vétTe toviSs. (]f. t, i~ W-- ^H-
Vih: KiOirep tStiÇsqttr rois tupi ry Aintmjiififi ipuSdvs fwiartct.
'•" \a i|(H'slioit de savuir si >'i>^dit Iropes itniv'i'tit Hiv n'i'lliMiiciil nltrilnii'^ à
,Knmiili'nu' sera discutù; plus tnïii, \i. "ij.'•yi lir IHnttm. •irrptir'ti'. *uri'i'*xîntiitt ».v iliss. iitiiiijj, Wûri-lmi-jjî SluliW, iS^It.
I'. -H.
UVftK t. (ÎIIAflTRE t.
l
«jat« h
pttsmtr s%nnM cotte ttiUiétifttf, FmiciH-trcftH»' en
outrecjtie |HtrtoitI où Sextus tite ;KiiéskKi«e, il I« met en
compagnie dePyrrhon et de Timon (li. UiogiW» ot Aristoefôs ««
nomment attssi /Énésidème eu mènetemps «jut* tes doux fon-
dateurs duscepticisme. Il faut «Jonc laire commencer le nouveau
set>pliris»»e. non avec /lùiésidèmi', mais avec l'iiufcur des tin»
I runes, «p! nous savons l'ireAgrippa.
CcjM'niliint, eit fuviMir (le la «livtsion ordinainuiicnt ado|>ttkson [X!itt invu(|ucr d'assez lionnes raisons. D'abord, cj'îipùs un
térii(»igH;l{;é form«l, «élu» d'AristocliXsf», /En&idèmcrenouvela
le scepticisme «jui avait, jiendant un temps assezlong, subi une
iVKjis»'. En outre, si on considère te contenu mônie «les d»e-
Irine. il est impossiWo de ne pas reconnaître une grandeditteiTiiee entre .Knésidènie et ses devanciers. Chez Fyrrlion et
Timon on trouve peut-être déjà (c'est titipoint controversé)
les dix tropes; ils ne paraissent pourtant pas les avoir classés ut
éimmérésméthadif{uciucnt. Mais surtout, nous ne rencontrons
citez eux rien de pareil h luçrjtitpjede l'idée de cause et de la
dt'inonst ration t|it'a entrepris* /Kn(5sidènie. Il y a là, si nous ne
nous trompons, un élément tout à fait nouveau, «l'uneimportance
capitale, et(lui a exeraS une {'rando inlluence sur le «lévelop-
|iement ultérieur du scepticisme. Les successeurs (F/Enési«lènie,
y ronjpris Sextus, tepr(«luisei»t tes raisons d'/Kn&idènie; et,alors ineme
(jn'ifs apportent de nouveauxarguments, il est aisé
de voir ijit'ils lui empruntent sa méthode, et appliquent les
mentesprocédés dt^ discussion a d'autres* notions
qu'/fên&ùlènu-
n'avail peut-i-tre pas smt{;é à discuter. Il nous snmblo tn's
injuste àl'égard tl* Knésidèinfi quand il lui refuse toute orïjjîmt-
lité, déclm-f ,p, ,Vsl unphilosophe médiocre et sans génie,
'pi'il n'a pas eu de disciples cl n'a pas faitépoijHe dans l'histoin!
I. 1H(), »|ii, -Jïfl; III, i.'IN; W.. VII. :i 'i5 ,{((), i>|c.[:
I '«. IX. ion.'''
K\>. Ku.#k, Praf.ev,, XIV. wil.id.>'
.\|i. Kik, /»,«« XIV, ïi ni .<(. Mni<tàip£< ti< ivy(m-.vp-:ïe tipt*T. f(1W-
·,Ilfr r~il.. If,
DIVISION Bt: J/mSïOtttK DU SCEPTICISME. M
du .scepticisme. La munière -<K»itt les derniers sceptiques parlantde lui, l<;fait qu'ils te mettent sur la même rang qui* l'yrrkonet Timon attestent qu'ils ne votaient pas en lui un homme
ordinaire- Maïs surtout l'étude de ses arguments si -vigoureux et
si profonds, d'un esprit scientifique si rare duns l'antiquité,
nous montre en lui un philosophe de premier ordre.
Nous trouvons bien plus d'analogies entre /linésidème et les
dernierssceptiques qu'entre le même
philosophe et lespremiers.
s
S'il fallait à tout prix conserver la distinction entre les anciens
et les nouveaux sceptiques, en dépit tlu témoignajje de Sextus
ft «les arguments rappelés ri-dessus, nous n'hésiterions pasàuous
rallier à l'opinion commune (lui voit dans MnéàAvme le premierdes nouveaux st;of»tu|ues.
Mais esl-il nc'cessaim de rousevver «elle division t Elle lût
pas (fronde valeur htslociijuc et n'estindiquée que deux fuis en
passant par Sexlus, tpti ne semble pas y attacher lut-invitic
beaucoup d'importance. S'il compte /Enésidèine parmi les anciens
«•ej>li<jues, comme nous croyons qu'il faut l'accorder à Haas,
c'est sans doute pour une raison chronolojjtijue» ou parce qu'ila été frappé lies dillurences, d'ailleurs très réelles, qui distin-
guent sapropre
doctrine de celte dVËnésidème. Mais a-t-il tenu
un compte sullisant (le la différence(lui sépare .EiiésidÙHje de
l'yrrhonet de Timon ? A lit distance où il se trouvait de. ces
philosophes, il n'était pas bien facile il Sexlus de la mesurer
exactement; peut-être ne s'en préoccupa-t-il guî'iv. Enfin Pyrrlionn'avait rien écrit; est [)robatile que Status ne connaissait les
anciens sceptiques que par lesécrits usines d'.Knésidème: il »«•
devaitdonc pas faire de distinction entre eus.
l'our toutes ces riisons, nous croyons qu'on peut sans incon-
vénient abandonner l'ancienne division enfit» les anciens et les
nouveauxsceptiques, el sen tenir h une distinction nouvelle
fondue sur les caractèresintrinsèques des doctrines. Cette division
<rom|m.'iuliail trois périodes, correspondant à trois aspects bien
trau<lit:s de la doctrine sceptique.La |iiï'mi«V«»est eellt' de Pyrrhoii ft île- Timon. Klle a
pour
«UVRE t. – CHAHTRtë I.
caractère distinétif te dédain es ledialectique on m
préoccupeavant tout
d'échapper au» subtilités dossophistes. Nous verrous
plus lui» ijhc Pyrrhon et Timon, obsédas d« ces discussions sans
fiu ontpris li«parti de ne plus répondre à
personne. Do là les
formula; Je ne sais rmn. Je ne déliais rien. Toute leur ambition
se borne à trouver un moyen de vivre heureux ettranquilles.
La morale ou, si ce mot esttrop précis pour désigner une
philosophie c|«i n'admetpas
de distinction naturelle entre h
bien et le itml, la viepratique, est {'essentiel à leurs yeux.
En cela, its sont bien encore dessocratiiHies-, mais Soerale
fondait la morale sur la seienee; ils ont essuyé de la fonder sur
la né*{ja(ioi>d? la science, ou plutôt en dehors do ta science.
Onpourrait designer cette période sous le nom de scepticisme
moral, ou, si ec nom estt{({uivoque, de
scepticisme i>mtique.hn detmt'niL' période, séparée de la
première, (juoi i|aV*nIlise Haas, par tin assez long intervalle, comprend /Ènésidême
et ses siK'ct'ssi'urs imméilials. Elle présente un caractère tout
opposé ù celai de la précédente le scepticisme devient surtout
diatcfiHutc. Pyrrho» et Timon avaient i\é\h oppose les sens et
la raison; mais ils insistaient surtout sur les contradictions des
opinions et «fttténioi|jna{»e des sens. /Knésidème conserve ces
arguments; il classe les dix tropes, mais il s'atlarhcprincipale-
ttieitl a montrer dialeetûpteinent l'inipuissance de la raison,
Il reprend, en ta renouvelant, la méthode, des éléates et sepro-
postîîle mettre
partoutla raison en contradiction avec olle-mène.
Onpeut désigner cette période nous le
nomde mflkiiuiK dialectique.La troisième période présente encore un caractère tout ttou-
vfa» <-taiii|ucl il ne nous seiuhl« pas que les historiens aient
timj(>nisii(t;n;héinieiHi|mrtanH;sullisaiile. L'école sceptiepie, con-
tinuant tk> mettreà profit
les travaux de ses devanciers, récuse
!<•lémoifjmt|j»> des sens, si> sert de ta
dialectique,et mémo en
alutsc, pour montrer l'impuissanee de la raison. Mats, au fond,
•Ile Hii-juise la(fiali'rtiijue u: c'est par lial>iliuli\ par une sorte de
Voir imbiuiu»iil f<ln:scini.iiii-|ni|H|r<-
<nrles sn|i(tisimf> ut'i S«<Xt«s (ft .11,
iï'i) <>|>|(iw; II niptlimif .|f, ilial.olitii'iiv ;( <A\v <Ks m«<|riiis.
UimiON M tfltlSÏOlM DU SCEPTICISME. è$
dilettantisme, pourse donne? te plaisir de montrer à ses ad-
versaires qu'elle sait manier leurs arme* et les tourner contre
eux, qu'elle hasarde tant de raisonnements subtils; itnais elle
sait ce qu'il faut penserde la
<lialei'|i(|tie elle n'est pas
dupe. Le caractère* propre des scejitiques (le cetteépo(jue,
c'est
qu'ils suiii on tnënto temps dt-s mudecins empiriques; ils connais-
sent ou [>tutèl ils entrevoient la mcHiuid»1d'observation; ils se
sont apcrais (ju'un i.-uustutanl des séries du ptiûnouiènes, on
.peut. en prévoir empiriquementle retour c'est cette méthode
qu'ils veulent substituer à ladialectique.
Ce n'est pus la science
si on veut, c'est un art uti tme routine, mais qui est. à leurs
yeux. fort préférttbio à t<»vaine science dont on s'est contenté
jusque-là c'est une sorte depositivisme. (lomnie les premirirs
sceptiques, les piiilosophes dédaigiient, quoHji/its s'en servent,
{o raisonneineitt j>ur el ta diaketique; mais ce n'est ptus seule-
ment la vertu personnelle, ta force du caractère, l'indifférence
du sajje qu'ifsvoûtent substituer à la c'est IVipéricncc
et l'observation. Cest ta période duscepticisme empirique.
Outre ces trois périodes, il faut faire une place à la nouvelle
Académie. La question ,tféjàsi discutée
par(es anciens, de savoir
si ta doctrine de la nouvelle Académie est fa même que celle
des sceptiques sera examinée quand les doctrines auront été
exposées. Lesanalogies
extérieures sont suttisuutes pour qu'ilsoit impossible de faire l'histoire du scepticisme sans parler de
la nouvelle Académie. Elle se place naturellement, par l'ordre
des dates, cuire fa première et ta seconde période tluscepti-
cisme.
Nous diviserons donc la présente étude enquatre livres, et
nous examinerons successivement le scepticisme pratique
(Pyrrlion et Timon), le pruhalnlisiue (nouvelle Académie),le
scepticisme dialectique (;Knési<lènreet Agrippa) et le scepticisme
empirique (Sextus Kuipirieus).
M MVRfi r. CHAt'ITUU IL
CHAPITRE II.
\.m OHUilNKS DIS L'ANCIBNSCBCTlClSHli.
De toutes tes écolesphilosophiques «te
l'antiquité, {'école
pyrrhonienne est certainement celte dont tes doctrines nous sont
le mieux connues. Plus favorise" que ses rivaux le stoïcisme et
f'epieurisnie, c'est par un livreauthentique» œuvra d'un de se»
principaux représentants, Scxtus Ëmpirieus,qiie tepynhonisine
est arrive jusqu'à nous, et ce livre n'est pas un abrégé ou un
manuel, comme les xupkt S&l&ud'Kpiettrc, Platon iui-m&ne et
Aristotc n'ont pas eu cette heureuse fortune de laisser après eux
un exposé clair, systématique et complet do leur doctrine. Mais,
s'il n'y a aucun doute sur cequ'ont pensa les philosophes qui
doutaient do tout, il n'en est pas de môme de leurs personneset de leurs biographies. N\ sur Pyrrhon, ni sur yKn&idème, ni
sur •ScxtusKinpin'eus. nous n'avons des renseignements sufli-
sanJs. Tous ces philosophes se sont eu quelque sorte clïact's
derrière leur œuvre l'oubliprofond oit ils sont tombés est
continu la rançon «le la renommée qui s'est attachée à leur
doctrine.C'est à peine
si ta physionomie de l'un d'entre eux, de
celuiqui a donné son nom a la secte, peut être à peu près
retrouvée. Mais les origines, l'histoire intime de sa pensée nous
échappent presque wtuèreinenl 011 ne peut les atteindre que
par conjecture. Il f;iut pourtant essayer, dans la mesureoù nousle pouvons, d'indiquer les causes de l'appiiiilion du
scepticismefl les liens
quiIt- nitiachenl aux doctrines antérieur!
l. l*»rmt les causesqui pruvoquèfenl l'apparilioit du scepti-
cisme, il faut ccrtaincHienl si|>naler au premier rang la «liversité
I,KS OKlfffHBS Dlî LMNCIÉN SCEPTICISME, 41I,KS OKlfffHBS Dlî I/ANCIEN SCEPTICISME. 41
et l'opposition «les systèmes auxquels s'étaient arrflés les philo-
sopljesantérieurs. Il est nécessaire ici de su défendre d'une
sorte d'illusion d'optique. Nous nous figurons volontiers que,
parmi tant de systèmes, ceux de Platon et d'Aristottj, si différents
parcertains détails, si semblables au fond, étaient lus seuls
avec lesquelsil fallût compter. A la distance où nous sommes,
nous voyons ces grand» systèmes s'élever au-dessus des autres, à
peu près comme à mesure qu'on s'éloigne d'une chaîne de mon-
tagnes on voit se détacher plus nettement l'imposante majesté
des plus hauts sommets. Il n'en était pasainsi au
tempsou ils
prirent naissance ils paraissaient t»us à peu près au meure
niveau. Quand tes plus anciens historiens, Solion el Hippobotus,
essayent de les .classer, ils nomment ensemble, dans un péle-
iiK'Ie et avec un .sans-façon quinous offensent, le mégarisme,
te eyrénaïsme, le platonisme,l«
péripatétisme,le cynisme.
Diogène Lnvrco, dans son grand ouvrage, consacre bien un livre
entier à Platon, mais it ne faitpas
<ï Aristotc le môme honneur.
CicéroB lui-même i!imtnore une foule de systèmes ceux do
Dêmowile, d'tënijitklocld, de Pluton, d'Aristote, sans avoir t'air
de faire entre eux uno bienprofonde différence.
La diversité et
l'oppositiondes systèmes étaient donc.au temps de Pyrrlton.bicn
|>lus frappantes que nous ne sommes ù présenttentés de le sup-
poser, et on comprend que des esprits d'ailleurs éclairés et
ouverts, tiraillés en tous sens, assourdis, roinme le dira Timon,
par tes cris discordants des écoles <juise
disputentles adeptes,
aient cherché le repos dans t'abstention et le doute.
A côté de ces causes d'ordre intellectuel il faut sans aucun
doute faire une place aux influences extérieures et politiques.
L'époque uii apparut le scepticisme amien est cette tjui suivit !a
mort d'Alexandre. Les hommes qui vivaient alors avaient été
témoins des événements tes plus extraordinaires et les plus
propres à bouleverser toutes leurs idées, deux dVnlre eux sur-
tout qui avaient, comme Pyrrhon. accompagné Alexandre
n'avaient pu passerà travers tant de peuples divers sans
s'étonner de la diversité des mœurs, des religions, îles institu-
te WVftiî fc CiUiHïltK U.
tmsi On l'aremarqué souvent, il n'y a rie» de tel
<joe la
contact (tes j»o«j>tosétrangers pour inspirer nux «mes tes inionx
trempées «k>sdoutes sur teuvs croyances, même tes jiîus invité-
i-ées. C'est ainsi que Hutte Ueseartos, pour avoir roulé à travers
te monde, «su délivra deheatieoup dVrreura qui peuvent offus-
quer uotre lumière naturelle et nous rouira moinscapables
d'entmidre raison w ». Lesvoyuges sont ttno écuio de scep-
lieisniif.
Mais surtout c'étaient les eottf|u&es d'Alexandre (jut donnaienttme majifo matière aux réflexions. desphilosophes. L'empire du(jrand roi, qui »on
dépit de toutes ses faiblesses étamtait encore
les Grecspar sapuîssairco et sa richesse, s'était éeroulé en ({uel-
«jik* mois sous kscoups d'un jutine cotupiéranl. Chose jdus extra-
ordinaire encore pour des esprits grecs, ce jeune eonquérantavaitvendu se l'aire adorer, et il y avait réussi. On sait quelle résistance
les Grecs, lesphilosophes surtout (sauf Aiwvarque ), opposèrent à
Alexandre quand illui prit fantaisie de se déclarer (ils
de Jupiter.H en coûta la vie à (lallistbèiies. Les survivants durent se rési-
gner et jjarJer pour eux leurs réflexions. Mais ils avaient vu
cwnttneitf oh fuit un dieu.
Ce lut bien attire chose encore (|ttiind les successeurs
d'Alexandre sedisputèrent le monde. Toutes les idées les
pluschères ;t des esprits grecs reçurent dts événements les plus cruels
démentis Jamaispeuple n'avait été jusque-là |dus profondément
iiltory à la liberté Platon, l'aristocrate, Aristote, l'ami
d'Alexandre, ne parlent de la tyrannie qu'avec dédain ou ironie;tous les Grecs, d'un commun accord, la regardent comme le
p!as nbjt'rt gouvernement. C'est latyrannie pourtant qui triomphe
partout. Après une tentative malheureuse d'Athènes pour recon-
quérir la liberté, la lourde main d'Anli|jaler retombe sur la
ville: lu guerre lai»i»qitu a mis fin aux dernières espérances; ilfaut décidément obéir a un
l'olysperchon.à un Cassandre, un
iJf'inélrius Polioirèt'.1.
1 \téil,L t.
uvs oRtiitNBR m h'xmtm scKtfrrcfffSHL o
Ott iivaif déjà m bien des fois succomber h justice et le fion
droit, mais il était réservé ce temps de voir le plu« insolent
triomphedu (a farce brutale, tkhnosthènes et Hypéride sont
morts: Léoslhèties a succombé; Phocion boit lu ciguë. Mais,
après Démétrius de Phalère» Dérnétrius Poliorcète s'installe
triomphalement dans Athènes,souille lu temple du Minerve de
déhaueticssans ttoro et iiilrottuit ouvertementen Grèce fa dépra-
vation orientale. Toute la Grèce est en proieà une horde de
soldats avide» et sans scrupules; partoutta trahison, la fraude»
l'assassinat» tics cruautés honteuses, inconnues jusque-làdans
l'Occident. Kl ce n'est pas seulement la Grèce, cest l'univers
entier, livre aux lieutenants d'Alexandre, (juidonne ce lamen-
table spectacle.
Si encoru un- avait pu laisser passerla tourmente et attendre
destemps
meilleurs! Mais l'espéraucemôme est interdite. L'avenir
est aussi sombre <|itcle
pr&i'iil.Le peuple
d'Athènes est si pro-
fondément corrompu (fu'it n'y a plus rien à attendre de lui
l'arbre est pourrià sa racine, (l'est ce
temps,en effet, où tes
Athéniens se tléshonorèrenl par d'indignes flatteries à Démétrius
Poliorcète; ils changunt In loL chose inouïe, pour lui permettre
de s'initier avant l'àjjo aux uiysfères d'Eleusis; ils chantent en son
honneur FItyphalluset le mettent au-dessus des dieux :r Ceqac
commande Oéinétritts est saintà l'égard des «lieuse ju&f e à l'égard
«les hommesu>. » On élève des templesà ses maîtresses et à ses
favoris. Les choses en viennent à cepoint que Déiiiéfnus lui–
mène dtfclare«pj'il n'y a plus à Allièues une seule âme iwble et
généreuse f- et ou voit des philosophestêts que Xénocrate-1'
refuser le droit de cite dans Athènes.
Les philosophes même ne sont pas exempts de reproche.Outre
«piela
philosophieest devenue trop souvent une sorte d'amuse-
ment accessible même aux courtisanes on a vu desphilo-
' t'Iiit., DéuiiHr., 4.
AllK'li., VI. In. (ht. |r. «a: t'tiil.Itimèir,. «6.
l'till.. 11m:. ail.
VHimii..\|||. (, :.s:{:VU. p. (,.
m mm i,_cH.unTRiï n.s
sophes devenu1îles tyrans
.») et sa sîguulcr par lettre miiiukW
Théopliraste «si IW de Démenti» tic Phalêre, et Arislott tit ae
fait le flatteur d'Antigone (îonatas.
Quoi d'étonnant si,«;n présence d'un tel spectacle, quelques-uns se sont laissés «lier h désespérer de la vertu et do la vérité,i
d&larerque la justice n'estqu'une convention? Il fallait uno
vertu plus (inhumaine pour résister à (te telles eommolious.
Cette vertu, ce sera l'éternel honneur du stoïcisme d'en avoir
donnéait monde. Mais on ne saurait être surpris si
d'autres, nioius éiertficjwïs et moins fiers, se sont découragés,ont renoncé à la lutte, et dit, comme le fera plus tard Urutus,
qtre la, vertu n'est qu'un nom.
-0tj se représente habituellement les sceptiques coinmu ayantcontribué à
produire, par leurs subtilités et leurs négations, cet
affaiblissement de laet des mœurs
pulilt([ues. Ils
seraient, à encroire hcmieoup d'historiens, les auteurs des mal-
heurs deleurs temps. Ils en sont
plutôt les victimes. Au moment
oùle scepticisme paratl, Athènes n'a plus une vertu à perdre.
U ne s'agit plus alors, comme au temps de lasophistique, de
saper sourdement les anciennes croyances elles sont en ruine.
Lesceptique, nous le montrerons plus loin, n'est pas à cette
époque, un railleur, qui ne songe qu'à détruire, à s'enrichir ou
à étonner sescontemporains c'est un désabusé, qui ne sait
plus où seprendre. Il est plus voisin dit stoïcisme <jue de l'épi-
îurisme aussivoyons-nous (lue Cieéron nomme toujours
Pyrrhon avec les stoïciens. Comme les stoïciens en effet, il
s'isole d'un monde dont il ne peut plus rien attendre il ne
compte que sur lui-même il renonce à toute espérance,comme à toute ambition. Sa
replier sur soi-même, afin de don-
ner ait malheur le moins de prise possible, vivre simplement«t modestement, comme les humbles, sans prétention d'aucune
sorte, laisser aller le miindu. etprendre spu parti de maux
qu'il
'•Altiéll., V, |>. >i.'i; XI, |». "mH.
Atlh'ii., U, |». a.'ii, ifnprnt Timon.
ÏM ORIGINES DE MNOtEtf SCBPTtCiSHE, ®
r .t-" .rlo- ff. ta '1 '1
s'est a» pouvoir de personne tf empôt-her /wifà {'idéal du seep-
!i(|iKi. t*liilosojihïo existe et bornée, sans doute! U y avait
mieux à faire mé"raoen ces temps troublés. Mais il toutprendre
il faut convenir que comparés à leurs contemporains, lespyr-
rtiotiiens doivent encore i?ti« rangés parmi tes meilleurs, Il y a
dans leur attitude une certaine dignité, et une véritable force.
Ils ont manqué de vertu du moins ils n'ontpas
eu do vices. Ils
sont à peu près comme copersonnage moderne à qui l'on deman-
dait ce (ju'il avait fait pendant la Terreur et (lui répoiltlait
«J'ai vécu. »
Cette résignation et ce renoncement qui sont les caractères
distinetifx duscepticisme primitif. Pyrrhon
en avait trouvé les
exemples sur les rives de f indus c'est encore un point par où
l'expédition d'Alexandre a exercé sur tes destinée* du scepti-
cisme une influence que nous croyons capitale. It nous est ex.
pressément attesté(jue Pyrrhon a connu les gyrnnosophistes,
ces ascètes <|tii vivaient étrangers au monde, indifférents à la
souffrance et la mort. Nul doute qu'il n'ait été vivement frappéd'un spectacle si étrange;
el il s'en souvint, lorsquerevenu
dans sapatrie,
il vit ù quels misérables résultats avaient abouti
tant d'efforts tentés par les philosophes, tant de victoires rem-
portées par le plus glorieux des conquérants. La dialectique
lui avait pent-étre appris le néant de la science telle qu'elle
existait (le son temps il apprit des gymnosophistes le néant
de la vie, et crut, ave«- un autre sage de l'Orient, que tout, est
vanité.
II. (les influences extérieures sutiisent-ellcs àexpliquer l'ap-
parition de Pyrrhon, ou faut-il chercher un lien plus étroit
entre sa doctrine et les philosophies antérieures? A première
vue. on peut être tenté de croire qu'il y a une parenté inlimo
«utre lasophistique et le scepticisme que. malgré les efforts de
Sociale «t de Platon, la sophistique n'a jamais entièrement dis-
paru, qu'ellen'a
pascessé «le
vivrt' rtrlégiiét* au di'iivièincplan:
qu'en un imd. Pyrrlum i*! h' véritable continuateur d«< (im-giit*
t» hrviiBi.-ruiAi»rraiiH.
et di1 PfoliijjftRH. %Ukmm («rions déjà indique* Wles dijfettai);
profondes cjui séparent les sophistes «t tespyrrhoniens c'est
par une véritable injustice:de l'histoire qu'on u
trop longtemps
poursuivi des mémos raifleïk's et des mthrtes invectives ces deux
sectesphilosophique», l'vrrhon, on te verra
plus loin, était
l'ennemi déclaré des sophistes, et tout ceque nous savons de
son caractère et de sa vie fonfifiiu» sur cepoint
ce témoi-
gnage formel de celui <|iii t'a te mieux coanu, soudisciple
Timcft.
Lessophistes nimaienl les lionnettrs et l'argent ils menaient
une existence brillante, et on peut dire, au moiii* de^ackpies-
uns d'entre eux. que leur scepticisme mettait leur conscience ;t
l'aise, et les allégeait d'utt certain nombre (le scrupules. l*yr-rlton au contraire est resté
pauvreil n'a point tiré parti
de son doute sa vie estsimple, austère, irréprochable
elle
a tout le sérieux et la gravité (lui ont toujours manqué aux
sophistes.
En outre, lasophistique est avant tout une doctrine d'action.
Si elle déclare la scienceimpossible elle cultive avec une con-
fiance souvent excessive toutes les sciences, ouplutôt tous les
arts elleappartient a la jeunesse du
génie grec. Pyrrhon est
par-dessus tout indifférent ou apathique; il neprend intérêt à
rien; il se laisse vivre. C'est une doctrine de vieillard.
Enfin les sophistes sont une race essentiellementdisputeuse
ils excellent tous dans la dialectique. Pyrrhon renonce à toutes
tes discussions, qu'il trottve également vaines. Si onpeut dire
qu'il y a duscepticisme dans la
sophistique, il n'y a rien de
sophistique danstescepticistne, du moins dans celui (le Pyrrhon:
c'est ce qu'on verraplus clairement dans la suite (le cetln étude.
A défaut de lasophistique est-ce à une autre école
qu'ilfaut rattacher le pyrrhonisme ?'r
Logiquement, ou peut trouver un lien eu Ire lui et toutes les
écoles untérienres c'est en effet tint; chose digne de renmrfpK',
Vint"i'i-ih'S«(H, |i. iti.
lbs ohkmks m vsmm scepticisme m
({mi<proscgue totitot», par des pbeinû» diffiSnatts, aboutissent an
scepticismel'éléatimne* sans
parierde Gorçjras, par Kubuh'dc,
Otodore et l<»st<ratii|iies; i'héraeliléïsuie, par (i'patylwut Prola-
{{oras; lecyrejioïsnuj, des le temps d'Aristippe; le cynisme, du
vivant d'AnlistMnes le ptittoititiine lui-même, |iar lu nouvelle
Académie.
Historiquement, il y a un double lien de filiation direct'.1
«litre Pyrrhon, et, d'tiiio part, l'tkok de Mtyuve, d'iuiire part
{'(Seole de IMmoerile. Né à Klis, Pyrrhon a cerfaineroenf connu
la dialectique de Ueoh d'Élis-Érëlrie. qui continuait celle d«
tiégaro. Ort rompt» parmi se» limitas Brysoti, cjuifat (teat-ôtre
disciple d'Euelidt!. Toutefois, si cette école a pu exercer <|iioii|tie
influence sur les orijjint's du [lyiThotiisiiie, nous no croyons |>»s
fju'il en dérive directeimuit fl>. Sans parler des dtificuUés <{»e
présente In question do savoir quel a été ce Brysun uviUre.
de Pyrrbon, on verra plus tard fftie Pyrrhou u été l'oniii'ini des
sophistes, plutôt t{«e teur imitateur Timon a souvent des mots
durs pour lesmégariques.
Sa doctrine a été une réaction
contre tes abus du raisonnement et s'il s'est servi de lu dialec-
tique,c'est
probablement pourcombattre tes dialecticiens.
Entre le pyrrbonisme et ta philosophie de^éraocrite, les
liens .sont beaucoup plus étroits fal. Il est certain que Pyrrhon
avait tu Démocrite, etipt'it j;;irda toujours pour
eephilosophe
un goftt très vif. Timon ue parlede Démocrite qu'avec éloges.
En outre. Pyrrhon fut l'ami et li-eomjMjjtitm d'Aiiaxanjui-,
<Hi'on raille <pit4<|itefms parmi tes sceptiques fl!, etAitaxarque
!tJ On Irnnw it <sl ïrai, du'! Tiinui», l(v sumssvur «te Pyrrhon, quolt|trcs idées
i|iii gcnibtenl iiruvenir «l'uni' souiv.. m>rart<jn<>. Voir cwlisstms. p. 88.
I'* Voirci-ttvssotifi,|».i:>.M 'Fouira les i-ii-iuis- ((ii'uii peut iltmiier |iour ralUutioi- Cyrrliun à D(:ninrrit>'
uni èU1 |irésonl«cs avvc htaiirmij» de fnrci1 |i»r Ifincl (inters. ut Cicm's fkiowph.
Stliriflm 'f heil III, p. I.iM|i;i; llirzcl, iSs:i). 'l'uiili'l'ois il imiis somlili' ipio Iliivel
lient Imp pi>u «te coiitpt"' il" t\m;;Hi»!ili; •!(• IVii-lum. Pyrrlmu il siibi il mi liaiil
tifjrû l'iulliifiici' iIi>Di'inncrili>. nous IVninttin^, mais nous nniH i->'fusnns n vnir
i'il lut un simple di«ripli>.
i'sctid. «al., Uut.fini.. I. lit. p. ;i'i. ôdil.Ktilm.(XS^Itis. il.. VII.'|K.
m LIVRE L- CHAPITRE tl
élût Iw-méttie le drsHpl« «fo ce Slétïodkire «te Ctifo, disciplu de
0énocrito, et qui disait1" «Mous ne pouvons rien savoir, pasmême si nous savons quelque chose ou vien. n Enfui, Diogène
Luêieu,q»i probablement reproduit l'opinion de l'alexandrin
Sotion l' range l'yrrhon parmi les philosophes de l'école ita-
litlue, et leplace
h h suite d'Anaxorqtie de Protajjorus, de
Démocrite, «ju'il rattache lui-imhno à l'école lYÉlée.
On peut être d'autant pins tenté do faire dériver le pyrrhe-
nisrne de Oôimterite, que Démoerito lui-même a souvent em-
ployé des formules sceptiques. Mnis nous avons vu plus ltaut(3) l
cequ'il faut penser du prétendu scepticisme du Démocrite. II 'a
est possible que l'yrrhon ait été particulièrement frappé des n
arguments pur lesquels Démocrite récusait le témoignage des,j
sens mais comme des idées analogues se retrouvaient ehex j
bien d'antresphilosophes il n'y a point là de raison suffisante J
pour affirmer un lien deparenté plus étroit entre le pyrrhonisme
et l'école de Déinocrite. Tous les philosophes de cette école ont
pu exprimerdes doutes, comme Métrodore, avoir (les boutades
sceptiques on n'estpas pour cela en droit de les ranger ni
parmi les sceptiques, ni parmi les aiief-tres du scepticisme. Au-
trement, il faudrait en faire autantpour Socrate, qui a dit à 1]
peu près les mènes choses.
Quant au témoignage de Sotion, lu classification étrange
,1
1 cet Iristorierr s'est 6' titotcrrrtc ;rutorité sestrarales
adont cet historien s'est contenté oie toute autorité à ses
parolesnous n'avons pas à en tenir
compte.Efiltn les relations de Pyrrhon avec
Anaxarque n'impliquentnullement que le second ait partagé les idées du premier. Entre
l'aaslère Pyrrhon, et celui qui fut un des plus vils flatteurs
«l'Alexandre, il y a des différences de caractère assez notables
S» ArisUw.s|>.Kuseli..Vnty. Et., XIV,us, x. Cf.&•<(., Af.,VII, m-, Dioj;IX 58. Cit. Ac. II «m 7.1.
'' Sur tes source» auxquelles a |iiiisu Diujiène, vnir Wtisclu', Ile Ilinj' ImcH.n
funttinu. Itfaiit. Mm. i8«i8; llalmsi-li, {hmslimmui Je Utog. l.uert. juiitibu* initia,
("jambiiiic, îSGH, diss. iiiauj> tt>i!|i>r, lidhhj'ia, I. lit, \i. :i.i, iH/(8 Victor
K(»({iïr, De fmililim Itiiij'ènù Lmelii, llflntf.uix 'iiiiiiiniiilllini, iHMi,l,
1! Voir p. 9.
t.m umGtNBs M vkNcnm scepticisme, m
pour qu'oit sott autorisé à penser ipi'ft n'y avait pas entre eux
une communion: d'idées fort intime.
ii est un point pourtant par ou Déniocritc etl'yirhon
m
touchent, deplus près c'est la morale. Nous voyous on effet
<|ta> pour Démocrito, le biensuprême est la bonne humeur
(eiî%*i'«), l'aliseoco <ie eruiotola tranijuiitilé,
l'ata-
raxtit (li. Pyrrhon dirapeu près {a même chose. Il est possible
que 1rs livres de Démocrite ({«'il lisait leplus volontiers fussent
des traités comme le FJepi svOuftlns îî: m le ïlepl vSxw w. Tou-
tefois, il ne parait pas <|ueDt'inocrite ait
érigé l'wtiaplmrie et
rapif/iii?1** en système, et on «otrouve chez .Pyrrhou rien d'ana-
logue à la théorie de Démocrit« sur leplaisir et la douleur con-
siilccijs ciiintac critoriuiti de futile, et du nuisible^ Enfin, s'il
y » des ressetnlilaiices entre les deux philosophes, il faut rap-
peler que IY;llti(jut! de Démocrite so relie assez mal au reste de
sonsystème
On [lottrrail aussi trouver d'assez frappantes analogies entre
Pyrrttoit et Socrate. Il est certainque
lespyrrhoniens se don-
naient eux-mêmes pour des socratiques • Et nous verrons r{tie
Pyrrbon, comme Socrate, s'estproposé avant tout de trouver
le secret du bonheur. Comme lui, il renonce à la science théorique
pour tourner toutes sespréoccupations du celé de la vie pra-
tique. Comme lui aussi, il prêche dVvi'inpJe, et l'ait plus «l'im-
pression sur sesdisciples par sa conduite
que par ses discours.
Mais ici encore les différences l'emportent de beaucoup sur les
ressemblances. Socrate croitlonjoitrs
à la science, et s'il lui
assigne puur but la recherche i\u souverain bien, s'il la confond
•' Cic.Km., V,v*n, 875 Dioj; IX,'là; Stok, Ed., Il, -fi.">
l>i»(f., JX, Ut; Sia..T,:<m.t, 3.
''• Mullnrh, t 'ragm. plains. Gnee., t, |i. ïiu
>' Xuiis incuilivroits plus loin que s'tîst Won i'n/Mi/iw et 11011pas, comme le vimiI
llirzcl, t'iitorarn) qu'enseigna l'ynlioii.
« Stoli., Un:. m,:f.'i.
?"' Voir Zi'tter, \m philos, des Cm* 1,1, Irai). Uouli™» p. i'nj.
ri* Cic, De orttt., tll, «7 "Kiiomnt l'ttani alrâ ({flm'ra (îltilnsoplioniiti i[iiiso
(jiniK's tciv Sociatims <lii:ekul. Kiiilriuruiu, tloritlitiruiii Mr|;aricartiui. I'vitIiu-
Mcormn.i
5» tt¥ft& – CttiFITRB H,
avec la nioralo, à» moins il ne. dêespère pas d'atteindre un»»
vérité universelte et absolue. Sacrulu. est plein d'urdmir et de
eontiuïKv; Pytrhan est un désabusé, et c'est ou (in de comptedans mm sorte do routine, fondée sur tu coutume1 et lit tradi-
tion, qu'il trouve te honlieitr. Pyrrhon « et» peut-être «tes vertus
personnelles qui [icrtnettent de te comparer à Socrate; mois
outre ia force d'unie telle c|tie fa conçoit Socrate, et rindillerence
pyrrbonienne, il y a uu iarg» intervalle outre lapiété du
maître de Platon, et celte (litgrand préln* d'h'lis, il y a tout«
ta distance qui séjiareune foi éclairée et vaillante d'un
empi-risme vulgaire.
fên résume, laphilosophie de Pyrrbon n« dérhn véritable-
ment d'aurune pljilosopliie antériotire c'est une doctrine
originale, [/'éducation dePyrrlion, ses voyages, surtout ses
relations, en Asie, avec tesgynmosophistos, t'avaient
préparéà se
désintéresser de toutes choses. Le spectacle des discordes des
philosophes et los événements politiques dont il fut le témoin
achevèrent (le le détacher de toutecroyance. JI a pu se. ren-
contrer alors surquelques points avec ses
prédécesseurs; c'estuno simple coïncidence. Sa doctrine est t»n premier commence-
ment «Ileapporte une idée nouvelle, une notrvolh* manière de
résoudre les problèmes philosophiques.
i>r-iiitm>iv. m
Les si-optiquesanciens reconnaissaient expressément Pyrrhon
pour leur maître et leur doctrine a conservé chez tes modernes
it- nom «I»jHjrrlionisme.
Ilsemble que
les écrivains sceptiques se
soient fait un devoir ou une habitude d'inscrire son nom en
tête de leurs ouvrages. Jinésidènje intitule un de ses ouvrages
lluppvvuot X<5yot,et, quatre siècles aprèsla mort (le Pyrrhon,
Soxtti» Empiricus donne encore à un de ses livres le nom
SlhjfotijftDsesftjn-lmmmum.
Cependant Pyrrhon est un desphilosophes les plus mal connus
del'antiquité.
Nous avons sur lui peu de renseignements et
encore ces renseignements ne s'accordent pas très bien entre
eux. Il y a, à vrai dire, deux Pyrrhon celui de la tradition
sceptique représentée par Aristoclès, Sextus Empiricus et Dio-
j'ène; celui de la tradition académiqueconservée
par(acéroit.
Aprèsavoir résumé les principaux faits de sa
biographie,nous
examinerons ces deux traditions et nous essaierons, en les con-
ciliant, de déterminer le véritable caractère de Pyrrhon et ta
portée de sa doctrine.
I. Pyrrhon. fils dePleistarque fli ou. suivant Pausanias'-1,de
Pistocrate, naquità Elis* vers 36."> av. J.-C. Il était pauvre
et
i" Dioj; IX, 6t. Suièis, n»pp«i..
'» IV,,,4, h.l!! l'onr (iwr h ilati» if l'yrrdou, voici le* (iocumcnls dont nous disposons:
i" un article «le Suidas ( ffvpfwp), où il <>$(dit qu'il vvcul sons Philippe ili' Maré-
iliHi»', dans la m* «lympiaile (;t.'i(i-i;i'-i), ce qui ne lions apprend rien ili»|riwis
(|ieitt-<!frc faut-il liiv ch«"i Snîdas Kari rnv fi àivpx. an tien <|c pra' [ Hc:nliiirdy j.
<!f. Hua», Ih xctplir. phtlw, tncreuioit.. Wurttbaiirg, 187.'», p. T>, ft); – a" 1111
<|c pra'JHcinliardyj. j.
p. îi ft) – i" 1111
h.
chapitre rn.
l'YHItlIUX.
M MVBKf. – «HAPiTftRHt.wif rrE,'yrLf r± – ~tmtt t t <t<t tif.
commen^u pur cultiver sansgrand amc&s, h
pointure;on eon-
servail encans dan» sa villo iialafc, an timtptl<» l'utisumns, des
laui[Ki(lo|)limes assez inAliocn/iiU'iil im'eutéstjui
étaioul son
œuvre. Ses moitres en philoKojjhte furentBrysort "5, disccplo de
Soerule, on, ainsiqu'il semble plus {itobiibie, dïùiclitk' de
Id^gape, puis Anaxanjtie !2), qu'il suivit parloul dans lit cam-
texte de Uiogètic, K <k, oà it est dit qn'ft vécut qnatrtj-»in|;M« ans;– 3*tes
témoignage* de Iliogène, qui nous montrent vu lui un compagnon il'Ali«tMiiln>.
(.'ommi' il avait, avant de partir puni- l'Asie, suivi lus terni» (te tient maitivs et
eill(i»ô lit peintun-, il est pomtK de conjecturer qu'if était à|[ê <l<: |ilns d« fmile
ans an montant *le l'e\|)i:ilili«in il'Ale$autlrf (:i'ih). De iù k-s date do .Ififi-n^f»*ur Iwjui'llcs I» plupart «les liiitnrimis, M. Zotfcr, ttaas, Maccott {'the Gmk
streplia, l.omlon and tamliriilgn, Macmilfun, iSlîy), M. Wiutdiii|;lun (/'jrWion et
le pyirhunàme, séances dis l'A'-ad. «tvs sciences mor. et pulit., iK;(», p. «5, 4oC,
fv.^tt), sont d'awonl,
Ct QiibI est n; Krvson dont Pjithoii suivit Ivs leçons? CVrt un pcttnt .qu'il importu
d'tkliiireir, rar il faul savoir s'it » a un lien entre te |>yn!ioiiinmo et l'école de
Méjjarc. Miuj5'"HP l'appelle fils deSlil|inn; i-'vtl m.iMifcslciiiciif nrio erreur, car
Stilpon cmci|pm lieaucoup pliK tard vt put (jour disciple Timon. ( Voir /Coder, Dk
l'Iùtot.itrr ffrwc/icu.B'1 It, p.!»»S, 3* Am(J., j87».)OnpoiiritiilavecK<i>pi>r(l'W-
M. ki, hdû ) corriger te lotie de Dio/>ùiie et lire Bpfa, »}St/Aa. ait lieu de Bp»'».tov Siiiit. Mais it est bien peu probable que P;rrlion ait enlvntlu Stilpon. liein
hypothèse» sont possililes uu t'yrrlion n'était pas disciple tle llrjsoii, ou Brysonn'était pas Gb de Sfilpoii. Zcller"(ll* IV, p. A8i, y Aull., t88o) penche pour la
première, nous inclinons «ers la seconde, l'jrrfio» a vucertainement pour maittv
un Bryson. l>i«|;ciie l'atteste <•!Suidas in ri'pête atkat rcpriws. Mais il ti:«tdfedu
l«tto di- Suidas (S«Kp4»n<) ijiwl« ftrysnn dont il s'agit ûlail non le filsile Slilpon,
mais utniiscijjlf dt» Hoctate ou, suivant il'autres, il'Kmliilo «le Mv)jin>. ïiwparits.
ÇùoaiÇms ttfyiaxta. ftpiawn iipixhùrnv os tiIm e'pi»7«i)i' Smlvenxil»
eînéjaye («ri Viixleiîuv, tais ik Upwi'i'ï oj Sa'Hpéro'jt 4/X' Ev'xAW&v
ixpoïTiii' yç,i$mtrr roirm Si «ai (Ivpfi'jii1 iKp'iicno. Ailli:iir< (Ilvppui'), Suidas
ivjprdi! Itrysun eonmie (ïisciplo de Oiiuiliiiifjuo. autre philosophe île l'école ,Vléj[a-
rï«{iie. t'est |ietit-<!trc In wài»' Bryson que tuiiuiiie. Scvtns ( it. VH 1 3), Joui Aris-
tote dit ijw'il avait trouvé li» (|i>adr»ture tlu ri'ccfe et qu'il ap|iclle un sophiste
(W/ieV., III, s, i.< De (i/tii/i. kûtur., Vf, 5; IX, 1 1; Ih. m/j/iùm. cfrii. \t, :i6).
t:f. Xi-H«r, H, K30.
l)io([., IX, Ci, d-\ Aiislocles, ap. Eusck, /'rayi. tvaug., XIV, tvin. «».Dulri' lliysnii et Aii.iv.iiijun, mi rompit* c|ucl<|iiffni< ^liUiédéme parmi
Un maitresde
INi-rhim ( Waitilinf'fon, for. cit.). Mais il résiiltv d'un leste •!•• Dingène (II. thi)
<|ti<»Mèiiiili'fini» vivait encore ait temps «le la lot.iille <le l.vsimactiie ( *jS av. l.-C),et it mourut à snU»ut<M|tiii(nrj'.<* ans; it était dmiv plus ji'tm» «jite Pvrrlinn it'envirnn
lieiiR mis. (Cf. StiidaM, Apuras.) tt i'*t vrai qu'uu lit dans Suidas {Xvxpint).IhtiIupi It/EWi' Hii tinv !tiw wtîrtaivï* v)(o)jw i»i> i\)ci-i«i\v as' «v'toS
tXnOe ïiiv Çoiepw* &è*£r»» Èpnpiiitù êxhiQrt Mît»t^»(4w eis iïpèiùetv 5i34£wttt<•
PYlilUIQN. 5»
fi;ij;iit' (lAsie. VratsoiimfuMommil le premier fui enseigna (a
ili;tliï(li'|uc subtilequi
fttt tutti e» Imimeur dans l'école de
Mt'jpco et <|(tf aboli tissait naturellement h une sorte descepti-
cismesophistique. L'autre l'initia à Ju doctrine de Démocrite,
pour laquelle il conserva toujours un goût très vif etqui [watt
avoir exercé sur sapensée une grande influence1".
En compagnie d'Anu.wf|ue,l)yrrhon suivit Alexandre en Asie.
Il composa tttie pièce do vers dédiée auconquérant et qui lui
valut unprésent de 10,000 pièces d'or f->. li connut li'sgymno-
sopltistes, les mages indiens, etprobablement ce Calant!»8' qui
accompagna quelque temps Alexandre et donna aux Grecsétonnés l«
spectacle d'une mort volontaire si fièrement et si cou-
rageusement supportée. Onpetit
croireque ces événements firent
surl'esprit
dePyrrhon- une profonde impression et détermi-
nèrent au moins en partie le cours queses idées devaient
prendre
plus tard.
Après la mort d'Alexandre, Pyrrhon revint dans sapatrie; il
y mena ulte vie simple et régulière, entouré de l'estime et de la
considération de sesconcitoyens, qui le nommèrent grand
prêtre et, après sa mort, lui levèrent une statuequ'on voyait
encore au temps de Pausanias M. Il mourut versa75.
San fia poésie dédiée àAlexandre. Pyrrhon n'a rien écrit; sa
doctrine n'a été connue des anciens(pie par le
témoignage de
ses disciples, et particulièrement de Timon.
ex retîruu Ji roi Siàsaxitov c llippùiir yiyorte. On punirait » la rigueur rapporterh rovrov StSiaxâXm à Plu.'doii mats ce passage uiiii|iic 11e semble pas suffisant
pourcumpterni l'bûlun ni Mûnûtéiw pantii los maitivsde t'yrriion.Pioj[., IX, U7. llinel (IJiterstuL in Cicero't philos. Scliriflen, Bd lit.
p.( et « k'i|«i);, Ilinet, jS83) insiste avec raison sur ectk' influcnro de D«mo-
irite sur Pyrrlio». Il est certain (pie Tiuiun (Diog. IX, 4o) parle <t« Héinocrite
jii'c îles <:|;arclsi[u'il n'a paspourla autres philosuphcs,pas uiteft pourceux <lo
Mt:(»aiv.Toulel'ois,on verrapar ta suited<>ce travail que,suivantitotis,l'influviirede Dt'-niorrilo,si graiule qu'elle soi! n'a pas élti h ptus ilikisive.– II n'y a paslieu d'insister sur iVmploi par Dcmo.nle de ros|u-i>ssioii oti Sextus moiitre
(/ I, a i3) qu'il l'entendait totrt stitromcnt que l'yrrlion.•!î
Wojj., IX, (il. – Sixte, M., f, :tS-.t.r l'hit., De Akr.jortil., I. »o.
-'» l'Itrt., Iï«. Alex., r,i».«
Diotf., IX, 6â. – {'ans., Vf, -i4,
54 UVM f. – «HAPtîKK Hf.*J.'f l.ll ItQ f. Ull-11 tl IHi lit. a.
|)iogè»e«, iiiitjiietnous
empruntons la plus |;rmtde partit'dit
résuméqui
va suivre, ne fini aucune distinction entrePyrrlion
et Tiinoii. Suivant sa coutume, c'est lit doctrine générale des
pyrrhontens qu'il expose sous le tiotu de Pyriliou, sans distin-
guer ce qui appartientau inaltre de ec
queles
disciples ontpu
y ajouter. li en est de mène d'Artstoeiès dans le fragment que
nous u conservé Etisèhefl'\
f {. Aristoelès 'ai résumait en ces termes in doctrine «le Pyrrhon
«Pyrrhon d'Élis n'a laissé aucun écrit, mais sondisciple Timon11y ,'1' ton1:1 IS n'a aucun <!<;rit. itinis sondiseilite Tistion
tlit que celui qui veut être heureux doit considérer ces trois
points d'abord, que sont !es choses en elles-mêmes? puis, danst
quelles; dispositions devons-nous ô*ti*eù leur égard? enfin, qno
résuitera-t-it pour nous de ces dispositions? Les choses sont
toutes sans différences entre elles, également incertaines et •'
indisceniaWi's. Aussi nos sensations ni nos jugements ne nous
apprennent-ils pas le vrai ni !e faux. Par suite nous ne devons
nous fier ni aux sens. ni a la raison, niais demeurer sansopi-
nion. sans incliner ni d'un côté ni de t'autre, impassibles. QueUe (
que soit h chose dont il s'agisse, nous dirons qu'ilno faut
pas
plus l'affirmer que la nier, on bien qu'ilfaut i'aiiirmer et la nier B
à la fois, ou bienqu'il
ne faut ni {'affirmer ni lit nier. Si nous
sommes dans cesdispositions,
dit Timon, nous atteindrons
d'abord l'aphasie, [mis Xataraxie. n Douter de tout et dire indif-
férent à tout, voilà tout le scepticisme, au temps de Pyrrhon
comme plus tard. Efoqm\en suspension du jugement, et adia-
phorie, m indifférence complète, voilà les deux mots que toute
l'école répéteravoilà ce
qui tient lieu de science et de murale.
Examinons d'un peu [dus près ces deux points.
Pyrrhon n'a pas invente le doute, car nous avons vit, bien
avant lui,Anaxarque
etplusieurs mégariques
tenir la science t
pour impossibleou incertaine. Mais Pyrrhon paraît
être lepre-
miel qui ait recommandé de s'en tenir au doute sans aucun
Prtrpar. Kr««n.. \îï, wrir, r
('
IU.
I
MfHiHWK. 55
iiiéfuiijji! d'afliriuatiou.au dmUs syshjmalHHie, s'il est, permis
<runir c<;silimx mois, (i't'st lui<|uij a» |t.:moi(;iia|;i; d'Ascanius»1't
trouva la f'oriiiulo sceptique suspendre son jugement. Aristote
n'emploienulle pari le mot étto^.
La raison qu'il donnait, c'est que toujours des raisons de
force éjjale peuvent »Hreinvoquées pour et contre chaque opi-
nion {énùajhtt lm<r(ltvsta\ m. Le mieux est donc de nepas
prendra de parti d'avouer qu'on ne sait pas {itumtkvtyh) fï'; de
ne pencher d'aucun coté (âppe^t'a); de ne rien dire (<lip«x/a);
de rester unsuspens {htê^etv n)p avyxcndOecrti>). De ta aussi
diverses formules l4î (lui. ont la me'me signification je ne définis
rien (<iij$it>«îp/Çs»}; rien n'est mtelligMe («waXijjr'Me); ni oui ni
hou (uùSb niï.Aov). Aliiis ces formules sont uncoro trop ullir-
matives; il faut entendre qu'en disant qu'il n'affirtae rien» lu
sceptique n'affirme nnîme pas cela. Lesmots!5î «fiasplm
cecique
cela» n'ont dans son lmi{ragc,nt un sens afltrnmtrf ef marquant
IVjjiililc connuequand
on dit le pirate n'estpas plus méchant
que le menteur; ni un sens comparatif, comme qimnd on dit *1
le miel n'est pas plus doux tlue le raisin; mais un sens n<%a(if\
comme quand on dit il n'y a pas plusde Scylla que de chimère.
Quelques-uns rnôme fl" ont. remplacé la formule oi3èv fiâAAof pari'intorrugatioti il y.à'klov. En d'autre» ternies, dans toutes ces
formules, l'alfirnuilioit n'est qu'apparente; cite se détruit elle-
même, conitne te feu s'évanouit avec le hois qu'il a consumé,
comme unpurgatif, après avoir débarrassé l'estomac, disparaît
sans laisser «le trace '"l
Le sceptique revient avec insistance sur cepoint; toutes les
expressions dont il se sert n'ont de do(jmali<jue que l'apparence.
Elles désignent non une chose réelle, mais un simple étal de la
Dioff., IX Cil. Tri tilt ixnah)<l>iif xni cnu-^iit sîSoi tiottyayiv.
1 Diog.,IX,fi,1, io3. -Cf. Scritis, P., I, 190.Seiliis, l'ii'rf., Ma.
•'Dio{! IX. 74. – Seïf., 197.
••*»Dioi' IX.7».
Sex»., /». 1 8.''•
Dio{[.. 76. – Arislor., l»e. or. Scx»., P. «065 M. Vlfl, /180.
50 L1¥BB t-GHAfWRKtH.
personne (jiii parte, une strople iniuiiùra d'&re f"tjnt u'impliquo
i.'u mienne manière tutu nSulîté exU'rioure à cotte personne i't
indépendante d'elle c'est un simple ph(5nomuuo, connut? nous
dirions mijuurd'htti, purement subjectif.
Lesdisciples du Pyrrhon sf dormaient lu nom de zélé-tique»
parce qu'ils cherchent toujours ta vérité; dosceptique*, parce
qu'ils examinent toujours sans jamais trouver; Mpkclifies.
parce qu'ils suspendent toujoufs- leur jtijjeinenl: à'aporétiqnex,
parce qu'ils sont toujours înccrlains, n'ayant pas trouvé la
vërifC1.
tl importe tie remarquer que iettotttosceplitjttenepwte passan- li~r
tes apparences ou pliénomènos{<ptttv6(xep<x) (pu* sont évidents mais P
uniquement sur les choses obscures ou caçlides (df<?«A«j.Aucun
sceptt(jue ne doute de sapropre pensée*, et le sceptique'1* avoue
qu'il fait jour, qjt'H vit, qu'il voit clair. Il ne conteste pas cjnetel objet lui paraisse blanc, que
lu miel lut(uintissc dou.v. Mais
l'objet est-il blanc? le miel est-il doux? Voilà cequ'il ne suit
pas. Il i;;uore tottt ce qui n'apparaît pas aux sens; il no nie pasla vision; mais il ne sait pas comment elle s'accomplit. Il sent
quele feu brftle, niais il ignore s'il est dans sa nature de
brûler.
Un homme est en mouvement ou il meurt; lesceptique Tac-
corde. Comment cela se fail-il? Il ne sait. Si l'on dit qu'unlableau présente des reliefs, on exprime l'apparence;
si on dit
«[d'il n'a pas de relief, on ne se tientplus
àl'apparence, on
espritne autre chose. H ne faut donc pas direque
lesceptique
doute de tout en général; il ne doute pasdes
phénomènes, mais
Sett. 1 1 37 Tovto $ikto» » iyè oira ontoiii'i nu ai puiè» t&v inà
jih> £iimtjn» T«i<& aenSaHàvav nOivu âoyfinixâi iî ivMpeîu-. TaSxo Si <pnai
>éy'jiv tù i*VT'ï <Çw<m'.vov -eepl Tiv npoxei^êvam otî» a'ixcij) «Atixiit fiai «jckoi-
IHe'.wt àvtiÇitvopsvai 4XX' & isif/ti in\y ni^zvui.1J)
Oiujj.,1K,70.– S*it.. t1., l. 7.
''•Driig., IX, 77 'ir.ïiv 0Sfov wiyi^ inep vooiotv, 4 n j-«p puenat Sfiiov,
ait. ùv iiïs iMiiacat ftnia^Kiaiii. – Uiid., loft: Km yip r« ^ni'ofieroi» TiOéfieOt,ai.i-: 'v ni, ..i.,9'Í<lI<l1 pt'Í"x.r'V"IV' Ibill" 1otl: ":Ii ""P 1.1p1l1"¿PCVO¡l 110ip,(Jœ.
ov% es Jesei tmovroviv, – • Ihiil., 10G.
11 Dioj;. io'J.
PYBKHON. 57
t:.sonloitt('f)t des réiiiit's en lant
<jae distinctes dus apparences.
Si on retient bien ci» point, il sera facile de répondre ù tous les
sophisme* dirigés contra la scepticisme"1.
Nul doute, on te voit, (jne Pyrrho.it n'ait fait une distinction
entre le phénomène et la chose, ou, comme nous disons, entre
le subjectif et l'objectif. De lu ce vois do Timon m s (/apparence
est mmpartout oà die m présente. «Pyrrhon, dit .ïinésidème f3>,
n'affirmait rien dogmatiquement* ù causu de l'équivalence des
raisons coiilmiics; il suivait los apparences (toîs QawQfiivw).»
Fatit-it attribuer « l'yrrhon ks dix tropes (Tp4woi}au raisonsde douter (appelées encore terni au tàym) i\tii tenaient dans
lesargumentations sccpli«|i»es une si grande place ? Il est pro-
bable (|ue l'yrihon, on mOuic temps (ju'it opposait los ruisoiis
contraires et d'égale force, a signalé (|m)l<jues-tines (tes contra-
dictions des sens. M. Wuddiitglon(tl a ingénieusement détaché
des résuinds de Dingètie et de Se.vttts un trait <[iii semble bien
luiappartenir, et «|ui est comme un souvenir do ses voyages:
l)éinn|ihoii maître d'hôtel d'Alexandre, avait chaud si l'ombre
et froid au soleil (3(. Mais la question est de savoir si ces dix
tropes, sous la forme et dans l'ordre ait ils nous sont parvenus,
étaient déjà des arguments familiers à Pyrrlion. Nous ne le
croyons pas. Les dixIropes sont formellement attribués h Aiiiû-
sidèini; par Diojjèiic par Aristodès'7' par Seuttts aucun
texte ne permet de tes mettre au comptede l'urlum. Accordons,
si l'on veut, ipi'Kuéstdènien'a fait «pie mettre en ordre des
arguments connus avant tui, et s'est borné à leur (limiter une
formeplus précise-,
mais il sembleimpossible
d'allerplus
loîn(oi.
'•" Sest., I, »uS.
l)io|{., IX, ioa.'•'>
U)i4., 10O.
<"Op. cil.
•*>Sext., f' f,St; l)iu|{.. H».
« 87.''•
Ap. EhscI. /%>.«. VI V. uni. 11.
»» M., VII. 345.
' ta mt'iitiuii dan» lu i-ilatoj'iiv de IMutiir<]iic par Ijinpniii. (Kabric. Dibliuth.
5» MVltK L– (MAPtTRE lit
i.iim.tl: 1?,*t. l? ,i. ' I' I- i-fc È'1 iX i
Uuei ûit iV'itsoiuuuttieiiC moral tfo Pyrrfuni? Stu-m point •'
`
cftrare jtaiis avoi» peu du tfuvunu»ils. « HsMUl«îii»itv<Ûllliogèiie*
que rien ttVst honnêio ni tion'luu'x, juste ni injuste, et de métne
pour tout le reste; quo rien n'existe réellement et en vérité,mais qu'où toutes choses les hommes se gouvernent d'après laloi et lit coutume; car une chose n*est pas plutôt ceci
que cela. »
En dehors de cette formule toute négative, nous savons
seulement que Pyrrium considérait l'aphasie et l'atnraxio, et.
suivant une cxpressioii qui parait lui avoirété plus familière,
l'tutmptuM-ienif apathie'* eoinine le
dernier terme auquel iloivent
tendre tous nos ellorts. N'avoird'opinion ni sur le bien, ni sur
le mal, voilà le moyen d'éviter toutes les rnuscs de trouble.
Laplupart du
temps. Ifs hoinnies se reudeot tnallieureux'
|Ktr leur faut» Aî; il* souffrent parce ([ti'ils sont privés de ce
qu'ifs eifti'tit être un bien, outpie, le |H>ssédant, ils craignent
do le perdre, ouparce qu'ils endurent ce qu'ils croient êlre un
mal.Supprimez toute croyance de ce genre, et tous les maux
disparaissent. Lis doute est le vrai bien.
Pyrrl«m paraît ici avoir professé une doctrine que lesscep-
tiques ultérieurs, et mène sondisciple immédiat, Timon, trou-
vèrent excessive, etqu'ils adoucirent. L'idéal de
Pyrrbon, t'est
l'indiflerence absolue, lacomplète apathie; quoi qu'il arrive, le
fir., I. V, p. 163) «l'un ti«ri? llrpi iài> Itippaivos oéx« tpônwu ne saurait iHreim
argiiinont sirieiix. En supposant même te niliilojjui' ;niKiciiti<]ii.>, riIMfio(|uc
de
l'Iul.ininu. oh ne fait («iit-te do di'tiilctiuti outre Pvrrlwit vl tes nvii-hanimi».<1V61. (T.S.xt.M., Xt. r/to.'!i Kst-ci'IViliinu-ieou l'apathie<|iii fut, suivant l'vrrlion, te but snpn!mede la
vie Jliiïi-I i»f». rit., p. t5)se prononce pour ta première Uvjiotlt&ie. Mai* nous
suons pur Diogàno (10S) <jiik corlaiiis sreplKjiies K'j;iinlaieiil l'npalliio loininc te
lernier mot >U la safjcssi-. Qm- \Ak ait <'!« t'upiiiiun «le Pcrrhon c'est ce que mon-
trent avw ta ilcrni-Tc .j.lciice les l«il«s du l.'in-mii ([«"on lira plu* t«in; t'expti-cationque ituniteIliraoldu l'emploiîle »•<•mot par Oici'roitsemble biciiaibilr.iiro.H n'ett }«is vrai no» plus, cuiniue !«• croit Jlirifl rjiie Ici testes de Timon «inlro-
ilisfut ceU»r iiilerprillatiuii; Titnoit, <» effet lotie vm maître «t avoir (fliBjipi; aux
inaiiv <|ui iiais»vnt ix tuteur Sortit le. (Mdllacli, ia.'»). || semlile donc (|«el'ist
Mïulemrnt [.lust.ir<f f(«« les si-'(iIm|iio> siilisiitiiwenl à ï apathie la tiwlriof athie.
(Cf. KîIIit -t l'reller. Itut. /)/«/ [.. :I'm, ti* Alh.)3:
Dioj; 108, tri/. Cf. Arisloc. ap. Eiucli.. /V«r/). «•. XIV, velu, 18.
muuius. m
sii||e, celui dit moins rpji est arrivé, rhoxè dillicite., àdépouillur
l'homme, il» selaisse pas émouvoir. CW une doctrine analogue
ù celle d'Aristote et des stoïciens. Au contraire nous voyons1"
«jiiftTimon et /Knésitfèmo su contentent -do Taluraxie; et bientôt
une distinction s'introduit. Dans les maux tlui dépendent de
ro|ûnton'(3' (A»t«ïs &Sw7ofr), il faut êtreimperturbable; dans
ceux qu'on ne peut éviter(év mît
xonmmyHa<ïiiév(n$), il faut
par un ««(fort do volonté, et par le doute, diminuer la souffrance,
sans qu'on puisse réussir a la faire disparaître [psrpioitSuet).
Pratiquement, le sage doit vivre comme tout le monde, se
conformant um lois, aux coutumes, « la religion de son pays^.S'en temV'uu sens cuiiiituiit. et faire connue Jcs autres voilà
la règle (|ti'ti|m>s Pyrriion tous lessce|ili(jues
ontadoptée. C'est
par une étrange ironie de la destinée*(|iic leur doctrine a été si
souvent roiub»ttu<> cl vit'ùUe an wmrdu sens commun une de leurs
principales préoccupations était au contraire de ne pas heurter
le sens commun. «Nous ne sortons pas de I» coutume,» disait
déjà Timonî»1. Peut-être n'avuient-its pas tout à fait tort: le
sens commun fait-il autre chose <jue de s'en tenir aux appa-rences?Y
Tel fut l'enseignement de Pyrrhon d'après la tradition scej)-
ti(|tte.H faut maintenant nous tourner d'un autre côté.
III. Si nous lie connaissionsPyrrhon tjue par
lespassages
assez nombreux oit (iicéron parle de lui, nous ne soupçonnerions
jamais qu'il ait été unsceptique.
Pas une fois Cicéron ne fait
allusion au doute pyrrhonieu. Bien plus, c'estexpressément
à
AreésiJas(5>i{u'il attribue la dortritic d'après laquelle le sage ne
!l>Diq| 107.Sexl., M, I, 3o; III, «35. l.o in|i|)roclii>meiitde ces douxIcxlos, oit les
met» itiÙM cl *ripï{« s»nt siilislilites J'im !i l'aulrp 0» iIpuï |>l»rasi<-i iilenlii|ii<s.montre qu'il iû a |»s cuire r.i|i.illii<; p| l'jl.innic nulunt A», ilifeem-tt 1111e te croit
ttMe) (<. ejIlinel {/. c.)
a I)as etitrt4 1«~-kletlitieil.I'al;il-~ixie akt(iklit (l~~ titie le crxiii
11Hio{; 1118.llmt., mi.
/te, II. \\t\: }- -Ni'iiio Mi|n'noitiin non hukIo t't|nv»«ral snl n<- dix.-r.it
» WVltË t. CHAPITBKt«-
iloifc avoir aui'imo »|iiiiion .»t t|U;tiul il prit» dt« P&axV. C*«st«BH-on?
» propos d'Aiv&itiis. Pourtant, l'omision ik>pnk>r
«lu
«eofjlieBine --pyrrtiotttenno lui n
pas mompié.tt
y a dmi» les
/ln«/w«jKis Jeuxpussages'» oh, (tour les besoins de sa nuise,
il «minière avec eomplaismice tous le» (iliilosophes cpii ont
révoqué ou doute la eiTlittulo de nos caïutaissuitcw; on est surprisîle trouver sur cette liste les noms de l'iimidnide, d'Anaxnjjore,tfc Socrate tneïiie ot «le Platon on est encore plus surpris <l«
n'y paslire coitti de Pyrrlion.
l*onr (iirérun, Pyrrfaon' it'«st«[tAm moraliste très <lo|jimi-
lùjuc' très sévère, lu plus sévka diâmo de touteIWi(|iii((>.
fl crôtla ta vertu0', a« souverain bienfjiiî
est i<lioiin$tc(é(tlf: il
ii'atlmet mtUiiepas cesaceoinmodentcnt»
nu.xquckscpriîttttcuties
stoïciuas; les <t>oses indifférentes, telles rjue la santd et lit ri-ifiessc, (jui, sans être des biens, so
rapjn-otrkoat des biens d'aprèsZenon
(«potfy^fa), sont absolument sans valeur auxyeux de
l'yrrliinr1'. (.iciirou lu nomme presque toujours enconipagnio
du sévère stoïcien Arisltm'01, et il dit«ju'il pousse plus loin que
Zéuou [ui-in^itte la rigidité stoïcienne -71.
<|ui([t'iit (mise liuininciit uihil «pima-i nec sofiim jiosso, rhI ifa iiecosse esso sa|iieuti,!>t^l. hiii, 5çi et.lc, I. tit, .'jj «Uuuin cutUnn re («aria lOKtriiriis iir ji.itliliu. mo-
mt'nlii c,-ili«uuiu imt'iiirailiir, facilins abutraquu parle assciisio rclinurvtur. n –
i'X. KihpIi,, lac. cit., XIV, r«, «5.
•" f, ïrr, i'j; II, uni, ii,seif.« U» lintsrivn ancien, NiiiMéiriiis(Dio;j., IX, dH)h ajjanlait aussi comme un
iii)pluiiili({ue.iJI t'iu.y IV.ivi.&.t: ft>yrriii>«i)ieet.i|iii virtutu consMiUt, nitiil untnino quwt
,c|i|if(i?mluui sit ivliuquiit.^"•
(fol-, iH, iï, i:i -KisdHirlioni clAristiuti) isttullionestimi, no» summum
iiiwlo, s'il •'liant, ni fit vis, solmii tiuuuni viil«ri.1'
iU., If, un, i:t<> 'Unie (Ari^loni) Minimum fiotmm est in lii* rébus ueu-Imiii
i» |).irtcin itmwri, ((iw %3a$uph ait ipso diciltir. l'yrrho «lient ea ne senlire
quidiMn Sitjti.'utiiiii <|ua-ixiùtii ntimiiiiitur.
!•»Ac., II, un, i'Io. lui., IV, xm, 'r:f; IV, »im, H!, m, h; V'.vm, 33;
II, vi, 35; II, »m, M. 7«»c.,V. m, «5. 0/ l.ir. Ô.
l'ïn., IV, «i, W Mil» vitliititur mimes (|»iitcm ilti <Tras.se i|tii linem liono-
iimi iwe ilitvriint Itom^lis vivure s*hI ;tlius alio HMj;i-. l'yi-rho sciliiTl maxime.«IWinli'.liislu. Slnici atift'iu «jihmI liin-ui luniciniiii iu tma viriuti* |i<umnl stmi-li-s siiril illoriiiii, i|uur| atilvm (iriiicipiuiii ullicii i|ua'raiit, uivlius quain l'yrrlio.»
I*HIIHH>,V. «f
Ces textes.attx<ju«fc
lest liistûl-lofts, sattl' H, ftaddingtou"'ft Lew.s {->,ne nous semblent |>ns «voir
apporté «ne ntk'tilioti
sudisiiiilt1, sont itîllïeiles à concilier avec I» tradition que nous
rapportionstout à i'tifiiFu. Ils ont sur les reiiseigiraients de
Diojjtmtj un grand avantage c'est qu'ils sont d'uneépoque
Jjciiucuup pli» voisine «le Pyrrlton, et où il était moins facile
il« prêter à cephilosophe les idées de ses successeurs.
On put dire, il est vrai, (|tie Cïcéron ne connaît le»philo-
sophesanciens
que par .'iulenuéd faire des nouveaux aeadémi-
cîens; et ces derniers n'ont-ilspis nu,
soitpar igjiorance,
soit
par espritde rivalité, laisser «Ibcôté toirte ttn« partie de ['rouvre
îlel'yrrlionf .Mais alors. scml)lf-{-tI, ils
a'iiuraient jiiis (làparler
non plus de ses théories morales. Ou ne voit jias bien non pluspourquoi ces philosophes, «jiie le souci (le
(inruHre originaux
ii'cmpdclmit pas de eliercher des putrous et des modèles tkvt
f««s lesphilosopln's anciens, auraient négligé de s<;prévaloir
de l'autorité d'tm homme aussi célèbre et aussi recoimnaiidabl»
»|(ie l'a étéPyrrhon. S'ils n'ont pas plus parlé de lui, c'est très
vraisemblablementqu'ils n'avaient rien de
plus à en dire.
Onpeut essayer pourtant
de concilier les deux traditions.
Elles sont d'aceord sur unpoint; toutes deux attribuent à Pyrrhun
la doctrine morale de l'indifférence(iSiaÇopla) et même de
l'apathie» (<br<ftfef«) ijui nuirque, d'après (Jkéroti, undegré
de plus; le sage, suivant Pyrrhon ne doit pas éprouver menu»
un désir, uidinc unpendianl.
si faible(ju'il
soit; il n'estpas
seulement indifférent, it est insensible. \m désaccordporte
sur
deux points suivant la tradition ta plus rvceule. Pyrrhon esl surtout t
un sceptique; lasuspension dit jugement parait être l'esseutiel
rimlifférence l'accessoire. Cicéron mparle (jue de l'indifférence.
En outre, dans la traditionsceptique. Pyrrbon, loin dVtnpIoyer
ces expressions: la vertu, le souverain bien, déclare
«juc dans la nature; il n'y a ni vert», ni honnêteté, tùaniinnns
allentiveuieni ces deuxpoints,
encommençant par
le second.
» 1m:. ni.
llisliiiii ul l'Iiiktsufihii, I, •&
M UVRIv fc – tff.(VI»rrHK ÏM.
la MiSne eoril nutiVtiou tj ne ikihsmnarquotts «titre ta tra-
dition académique et la (rmlitiousceptique kc retrouve datw
lys («tes lesplus aniiens et les
plus anth«?attqucs ijmt nous
ayons, ceux tk> Timon. D'une part, en «iffel., nous voyons une
d'après Pyrrhon el Timon Je bien et Jo mal sont choses tfo
convention, f«imli*esuniquement sur lu coutume; les lois oui
été instituées ait hasard^ itn'y it pînt dit justice selon la
nature.
\{ais ii'»utfejtart, clicz h mène Timon, Pvrrlmtt nous
Appiiruftsiurs un
aspect tout nouveau. S'adressanl a son mailro,
te disripio s'écrie'3' «Voici, àPyrrhon,e» iju«j« vomirais savoir.Comment, n'étant
rju'uti lioinme, mènes-lu. uuu vie si facile et
si paisible* Gomment peux-tu guider tes hommes, semblable
au Dieu qui promène tout autour de ta terre et découvre à nos
yeux te disque enflammé de sa sphère ?» Puis, dans un autre
passage™, fpti semble bien é*tre laréponse de Pyrrhon a nette
{{uextivn, nous lisons «Je te dirai ce qui me parait être la
<»Seul.. M., XI, i ^10 Otxe iyiQi» ti itfit pian, aihe xaxàv,
otA/i njpàf iv&pânùw Tavrï luiftw K£Hptxatt
*n« ïùv Ti'fiuv»..Vous lisons avec ÏVmé (j». ifi) t'âpp ait lion «k vw ( IHkcr>.(>l Timon (Mutlacti, i«») fixent vopeOmnt.
Diuj[., IX, (ir».
To«i»(tot, «5 Ifvpp'i)! i(»s<ptiai jiiop jxova»
oii, -orot' <i»i)p ^r' éyetç pijo7« (ie6' lîow^ilf
[iivi«j; i1 ivQpùtwm &êov rpônov rtyeftuveien
os aepi tsimv i/in> j*ii> ivm'ï pèserai
Saxvii eùxôpvmi aÇaipti xnfiKairopa kùxXo».
I.ps (rois([«piliersvers «mtrites par S(!i(us(Sf., l Soft); nous citonsle troi-sièmed'aprèstoi; it nesemblepas douteux, maljjri!une tpgore dilKronroilans Jetroisièmeyen, que cepissag«suit ta suite de celuiqu'a cité INo^ne.
ljSntius, il., XI, s».
i j*(i «j«if eps» dis (joi X3ti^<uV;t<u eiiii
ftvOov ihfiems Aptyov t-/w xavùva,
es A toû Srcivj te 0ûa« xaî tàyélov é-/ei,
è£ &> ioomos yiprtv iv3(à fias.Aïw. Valoijj, h'artek. z. Uesch. it. HrlximlMtqiroltknn im Allml. Rerlin, i8K/*
fp. :i(|«t, mu» thimi^a an Ki>» ili» «ti. l.'mlci |)r.:lati<in iirufinsiii- |«n- Hinnl
(|>. aK) pom- !<• vers ùc i» t&6 .y«V,v. scmlili' iiiu> vaiw <utililil(j.
l'YRKHUJÎ. «st k. rv.
vé-ittf, ayant une («mite dis iétM peur rè{*l« infaillible; je {«>
«Unit quelle est lu nature du divin ut du bien, d'où vient pourl'homme» I» vie la plus égale, »
Ainsi, voilà le fondateur duscepticisme comparé par le disciple
(pli l'a le mieux connu, ait soleilqui éclair» les hommes. Il a une
parole de vérité, une règle sûre; il connaît la nature «I» divin
et du bien. Nous ne gommes pas très loin du mtmmumktutm dont
(Iin?ron nous parfait tout à î'Iieure.
La contradiction «si tr«p forte pour n'avoirpas
sauté aux veuxdes
sceptiques anciens. Sextus a une façon bien plaisante d'ex-
pliquerla comparaison tfe Pyrihon avec le soleil. «Si. dit-il, un
grammairien veut expliquer le vers de Timon il diraqu'il il pour
but défaire* honneur àPyrrhort.
Un autre s'avisera qu'il renferme
une- contradiction, car le soleil éclaire, (audit; que lesceptique
obscurcit toul. Mais le vraiphilosophe, ajoute le bon Sextus.
comprendra que si Pyrriion ressemble au soleil, c'estque le soleil
« éblouit «euxqui
le regardent trop attentivement. De même le
sceptique ôte à ceuxqui l'écoutant la vue claire des choses, et
,les met hors de rien comprendre' » Or nousdispensera
d'insister sur cette explication manifestement inventée après
coup. Ailleurs f>ililexplique que le mot est u'est pas pris par
Timon dans un sens positif, mais dans un senssceptique, dési-
gnant seulement ce(lui appamt't. no» la véntabie -réalité. Mais
ici encore on est en droit desuspecter l'interprétation de Sextus.
Il est bien vraique Pyrrhnn annonce qu'il dira ce qui lui pa-
raît <*tr« la vérité (as pat xaTsf«iWr«« eiV«i). Mais s'il ne s'agit
que d'apparences ou de.plii;noiH«iU's. comment comprendre
lesexpressions itiOov âÀjjfei'us et bçMv xtuvivaH Comment com-
prendre surtout que l'yrrlion se (latte de connaître la nature
(lit divin <>t«lubien? que peut iHre le divin ait sens phénumé-
nistc ?1
Kntre cesiisserfidiisconliadicfoiies. il n'y a pas d'autre con-
ciliationpossible que celle-ci la théorie r-t la
pratique, la
11 .M.. I.:iim.
W.. M, ••«.
«ft MVHB L – r.ll&PltBK Ht.
1 t
w» Mvnii i. – latAfitttK Ut.
spéeutafKtt cl lumorok», Pyrrtou ci Tintait font une »lisftneU«uliés nette. Hs rejet tent foules tes théories, ils n« s'embarrassent
d'aucune doctrine. Mais ils ont la certitude, toutepratique et
toute inonde, d'avoir trouvé ia Meilleur» manière do vivre, du
posséder le divin et le bien. Peul-iitro (j'teéton a-t-il un peuforcé te sens de leurs
expressions en rapprochant les théories uVPynhou de celles des stoïciens, les plus dogmatistes des philo-
sophes; maïsPyrrhon a dû dire
quelque chose d'analogue it
sait où est le bien {iK
Toutefois, cette certitude pratique, et l'emploi d'expressionsaussi ingénument dogmatiques que celles
que nous venons de
citer, ne sont possibles qu'à une condition^: c'est ijue lescepti-
cismeii ait pasencore eu chez Pyrrlion et Timon la forme arrête
et systématique qu'il aprise chez leurs successeurs. Qu'il y ait
eontnutrrtto» entre les formules de Timon el ta stricte doctrinede iVnrox»', c'est ce
qui est évident et co dont témoigne l'em-
barras dessceptiques ultérieurs et de Sextus
pour les expliquer..D'autre part, Pyrrhoii et Timon ne
semblent pas voir ia contra-
diction, cl il estimpossible qu'elle ait échappe* à de tels esprits,
si eBe existait. S'ils ne t'ontpas vue, c'est
qu'elle n'existait pas.
Et si i.«Ilen'existai! pas, c'est que les sceptiques n'avaient pasun-core
pris cctlu attitude de dialecticiens insaisissables et rompusà toutes les (inesses
quites distingua dans la suite. Its se soucient
peu de la dialectique, ils rejettent tontes tesUntaietAlof pratiques
parce quelles leurparaissent tusuflisautcs ou ridicules. Us se
contentent de chercherune bonne règle de conduitew.lls croient
Cl". I)i«(; ti.'i nu, <l"aprèï Aiiiii;mn- de Carjslii, un tinsplus anciens liislorions
l'yiTlHiij (IiVIniv iju'if vi'iil devenir un Iiuiumt> ifc Won, ^ptia7«.
lliru>i({t. (iti, teq.) et Naloi[>(:!i|a) ami ;miv«;s à mu- roiirlimmi amtnjjtic.!.« (wiiil i|«i iwns s.'|i»n>, r'wl .[«'ils pn'-ti-u! diijà à |*yrrlinit <•! à Tiitimi unelInoiiV Miratiiu, uni! ilisttnrtiui! piCxtf vains li> fioitil •• »«.. |iltômt»ivt»îst>* et l><i«<;iiiatisini>, Mlc ipi'i-Ut! u|)pr.iiti:i r\w Iihhs siicri'sscm-». Nous cniywis ejii'ils ont
<>M(,»:n' Si'loii niiiH, I»vitIioh «l Timon ne mudlietajuis leur llukric iironilc
«v>'C leursci-|ili.:isnn!,(Kirc.: ([lie ton si-cplicismo itVsl viiroiu «|iiY( l'iilaf il'ôtanclia,
[Kircf ijii'ils n'y alliiclnnl i|ii"iine uudiocivimpoil'uicc. H» sont sii'|ilii|ucs et in-
JilFéicul. mm-iiiuiu-, sre|ilt(|n«..s i(n'iiriltHVrfnls.
.tinsiTinwn(S<"tl.. M.. VII, «o)ivprtKli» A l'Iatoml'avoir fait <li; S».ii.l.'
PÏMHM. 6f>
ravoir trouvé: ils le disent, cl si e» le disant ils sont au Tondoit
contradiction avec eiu-ntc'mes et redeviennent doffmatisles sans
le vouloir, peutour
importe. Aussi bien leur dogmatisme, si
dogmatisme il y a, ne relevant d'aucun principe abstrait. sera
toujours différent du dogmatisme qu'ils ont combattu.
Lu mômeconclusion va s'imposer à nous, plus clairement en-
core, si nous considérons l'autre différence que nous avons si-
gnalée entre la tradition sceptique et la tradition académique. II
nous parait certain que les sceptiques ont exagéré te scepticismede Pyrriion, et, en lui prêtant leurs propres idées, ont modifié
tes siennes. Nonque nous refusions de voir en lui ua
seep*
tique, le fondateur môme du scepticisme. H a suspendu son ju-
gement en toute question; il a dit qu'en toute occasiom onpeut
invoquerdes raisons équivalentes pour et contre chaque thèse;
un texte précis nous l'affirme et nous n'avons aucune raisond'<;n contester t'exactitude. Mais est-il il alléplus loin ? s'est-il
attaché à formuler le scepticisme en termes précis, comme l'ont fait
ses successeurs? lit -il comme eux un logicien et un disputeur,
ou est-il surtout un moraliste? Le scepticisme, tel que nous le
connaissons est une doctrine savamment élaborée toujours prêtela riposte et (lui cherche querelle tout le monde. H a une cer-
taine aflinité, au moins apparente, avec la sophistique. Pyrrhon
lui-même a souvent été présenté comme une sorte de sophiste,
par exemple dans la légende'" qui nous le montre si incertain
de l'existence «les choses sensibles qu'il s'en va se heurter contre
les arbres et les rochers, et que ses amis sont obtins de l'ac-
compagner pour veiller sur lui. Le père (lu pyrrhonisme a-l-il
été un logicien subtil, ou comme Socratc, qui doutait aussi de
beaucoupde choses, et des mêmes, est-il plutôt un moraliste ?i
Tout d'abord, ce serait une question de savoir quoi <*iaitpourlui le vrai sens des formules oCSèv\ta\Xuv et «rsx«. Avaienl-ellcs
une signification morale oulogique? Voulait-il dire je m
préfère
un savant, an lieu de ne voir en lui iju'uri homme qui montre coniiiiiml il faut
ivre.
tl!l)i»| IV.fi*.
dt ,j.
<Î6 LiVftB.f. – CH*PttRE III.«« r «« «4 «. Mil (1*. ». J- II» f|h
pa&eedptutot que celn. ou jn n~'me pas p!(ttot cecique cota'('{
je ift'absfieus de c/tora»' uu «IVjj&ww? II est malaisé, on plutôt
impossible pour nous cte décider ici le point ilo vuelogique et
te point de vue raoral se touchent de siprès qu'ils se confondent.
Accordons néanmoins, puisque aussi bien c'est la trudttîou ta
(ilus accréditée, queces formules doivent être entendues au
senslogique.
Mais voici quedes
renseignements, malheureusement insuffi-
sants et iiR'Oiii|)k'is mais d'une authenticité incontestable, nous
sont fournis par les vers do Timon, et permettent de résoudreta question. Timon nous représente Pyrrhon comme évitant les
discussions, etéchappant aux subtilités des sophistes !l>. Ce
qu'illoue en lui, c'est sa modestie, c'est la vie tranquille qu'il a
menée, et qui h rend égal aux dieux; c'est la sérénité de son
«me, et le soin aveclequel il a évitâtes vains fantômes de la pré-
tendue science. Le même caractère se retrouve d'ailleurs chez
les successeurs immédiats de Pyrrhon. Ce qu'on voit reparaître»le plus souvent dans les fragments mutilés de Timon, c'est l'hor-
reur des discussions vaines et interminables où secomplaisaient
lesphilosophes; il leur
reproche sans cesse leurs criailleries et
leurs disputes, surtout leur morgue et leurs prétentions il me-
sure enquelque sorte la valeur des hommes à leur absence de
morgue etXénopiiaue, qu'il loue cependant, n'en est
qu'à demi
exempl(3!(iwr<]fTOpo?).Ainsi encore Pliilon d'Athènes, disciple de
Pyrrhon vit loin des disputes d'écoles, et ne se soucie pas d'y ac-
quérir de la réputation <*>.Euryloque, autre disciple de Pyrrhon,
l) Mullarli,vois 197 <•!suiv., t. J, p. i)5fi yipov, à fUpp'jiv, adi {, wtOt» éxb*mre$pt(
hnfwitîoivv « HSroÇpeoiimt te ooÇniiï»;
Hiid., mjrs 1/17
ftyjoTt f«50'i{<Jv;£iitt
tlsl i^pùvxhlut xm ixtvitrvf *a»i tavm
(t)i ttpioexf iWiA|u>f* iiviâymt açÇntt.
.Niitts .îilopfons pour «• (l.-rnicr vers h runoclioii i|<; Bcrj'fc. ( Voir VVnchsmntli,De Tiimme l'hliaiio, l.oipzij;, |85;{, p. 11.)
'•Miillich wrs :!9, l'vrrlinit unconlrain1( wt*139}«t appelé itvÇo*.M»/ hts H».
t'¥RHHON. Q7
5,
«%itîtuBsj un ennemiacharné dos sophiste» f«. Si Timon sa montre
très dm-pour Arcàiilas,<fonl fcg idées, autémoignage de Sexttnu
serapprochenthemicoup lies siennes, c'est sans
doute parce qu'iluso et abuse de la
dialectique.Dès lors, la doctrine de Pyrrhon nous
apparaît sous un journouveau. Ce n'est
pas par excès, par raffinement dedialectique,
en renchérissant enquelque sorte sur ses
contemporains, qu'ilest arrivé ait scepticisme; sa doctrine est plutôt une réaction
contre ladialectique. Sam doute, il renonce à la science, et il
estsceptique mais le
scepticisme n'est pas l'essentiel à ses veux,et il ne s'y arrête guère il aurait peuWHre été surpris autant
Ilue fâché d'y voir attacher son nom. Las des discussions éter-nelles où se
plaisent sescontemporains, Pyrrhon prend le parti
do répondre il toutes lesquestions je ne sais rien. C'est une fin
de non-recevoir qu'il oppose à la vaine science de sontemps; c'est
unmoyen qu'il imagine pour ne
pas se laisser enlacer dans lesrets de l'éristique. Son
scepticisme procède de son indifférence,
plutôtque son indilférence deson scepticisme. Sonesprit s éloigne
«te lalogique pour se tourner toutenlierversleschoses morales,
il nesonge qu'à vivre heureux et tranquille. «Faire du doute,
r
dit très bien M. Waddinglo», un instrument dosagesse et de
modération, de fermeté et de bonheur, telle est la conceptionoriginale de Pyrrlio», l'idée mère de son
système <»»
Oncomprend dès lors qu'au temps de Cicéron, la seule chose
qui eût attiré l'attention fût sa manière decomprendre la vie.
Sa vie, bien plutôt que ses théories, ses actes bien plutôt queses paroles, sont
l'enseignement qu'ila laissé à ses
disciplesaussi l'un d'eux»
dira-l-H qu'il faut imiter sa manière dVMre,tout en
gardant sesopinions il soi. Plus tard, on dira ewors'1'
"J Rio)»., ta, 69: iv tluh(u6Tiaos xote <nÇta1a.K ùs xtti Tifiuv Çn»ft».
Op. cit., p. aa/i. M. ileiHNtncr avait déjà Jivs bien dit (Manuel <fep/nfa..on-cimm, t. ll,j>.3io. Paris, fouli, Wt ) -Pyrrlioi. A-ut un Socralo Inmqmlloet résigné. Il détruisait la «aplinti^, A ne tendait pas à la n>mptaccr.->«
Nniisipliancs, ap. »io, IX, 04 {Çaoxt yivcaQat ielv t.k fUuitéiatuiiif
Uuppavelev, tâv Se Àoyw «h. Imnoi.m
fti«if-. 70 >ij«itp ïi» w awpiveiui ùpôipmux.
m IJVRlï {. – CHAPITRE ftl.
cftiê c'est parles mœurs qu'il faut lui ressembler pour
être vrai-
ment pyrrhonien.
Comme Pyrrhon avait laissé de grands exemples, comme it
était vendre presque à l'égal d'un Socratc (l) par tous ceux qui
t'avaient connu, les sceptiques trouvèrent bonplus tard. une
fois leur doctrine complètement élaborée, d'invoquer son nom*
et de se mettre en quelque sorte sous son patronage. C'était une
bonneriposte ù l'objection qu'oit leur jetait toujours
à lit télé do
supprimer la vertu et dis rendre lu vieimpossible,
Ils étaient
dans leur droit, car Pyrriion n'affirmait rien, pas même qu'il ne
savait rien; mais peu à peu ils en vinrent, sans s'en rendre compte
peut-tHro, il lui attribuer des théories un peu différentes de ce
qu'ilavait pensé. On interpréta on un sens
logique ce qui d'à-
bord n'avait peut-tHre qu'une signification morale. Bref, Pyrrhonfut une sorte de saint, sous l'invocation duquel te scepticisme se
plaça. Mais lepère
dupyrrhonisme paraît avoir été fort peu
pyrrhonien. C'est plus tard que la formule du scepticisme fut
que sais-je? Le dernier mot du pyrrhonisme primitif était tout
m'est égal.
IV. Il résulte des considérations précédentes que, si l'on veut
se faire une idée exactede ce qu'a été Pyrrhon, c'est sa biogra-
phie qu'il faut étudier, c'est au portrait que les anciens nous ont
laissé de lui qu'il faut accorder toute son attention. Dans les
renseignements que nous a transmis Diogène'2', il y a peut-être
tl! Lunes, «laiis te [«rirait qu'il lrac<> de Pjirhoii ( llùtarg »J phUmufUy 1, 3Ï7)iiiiisli' sur ct'lli' nj-sumlitiiiici' Je Pjrrlion «««* Socrat«.
In plupartde crtSdétailssolit emprunté; jiai-Rici;ji>n«&Anti|;om'do Cnnslc,
<|iii vivait ait temps <l« Pyirlion (Apistoc. ap. Knsoli. /Vtry». ceang., XIV, hiii,
afi) ft avait <;fiit tim» Vit de Pyrrhtm (Oinj; fi«)«l m»' !« île Timon (ibird., >tt).
llir»él rcinnn[ia' otpc raison (p. ij) i|«'. Km'fiiclémi' a roulnnlit |i>s ri'iisci(;pii!-rai'iils d'Anlifjorio <-t comliattu la
|i''Qi>ud(> (|tii i'c|>n*'si'ii|c Pyrrlmii •oiitin» ni»
iroy.iiit pas Ii In ré.i(it>- dis uftjels l'Xl^i'ù'iii-s. Kn raison du rctti* apposition tfimtl
csl iKspoié à récuser le tmmfftagte cl'Anti|;om.>. Mais il m> parait pas aïoir^nn(p»
i|»i»|K'i»(-<i|rp/lùifeitlûnir'a en tnli-tiHù nouswpresrntpr l'jrrhan un peuaiilre-niitiil i|ii'il iiV'Iail, iitiii ifo pmu'dir iiivn«|ii«r sou iitikiriti-, nu
qu'il it pu (lit tnVlimtni* foi lui pivlcr «es propres idt'm et, roinmp ou >lit, (>> tirer à Itti. Von*
pviiBMos. a»
tl~~ EsiV E K, sr. y rr t.
|)i(is (Cuti irait (toiil il faut se délier, plus <Pun détail trop légè-
rement accueilli. Maistous ces faits, même s'ils ne sont pas ab-
solument authentiques, nous montrent au moins quelle idée les
anciens se faisaient de Pyrrlion, et parmi eux,vu l'ancienneté de
la sourceà laquelle Dio^ènu a puisé, ceux qui avaient
pu recueillir
les traditions les plus immédiates, etpeut-être infime connaître
lephilosophe. Si l'on peut s'en rapporter
à eesducuments, Pyr-rima est un persawwjje fort
remarquable. Dans cette longue
galerie d'hommes étonnants, bizarres ou sublimes, quenous fait
parcourir l'histoire de laphilosophie, il est à
coup sûr un des
plus originaux.
H vécut pieusement (ev<rê&«} avec sa sœur Phiîista, quiétait
sage-femme. A l'oeeasiott, il vendait tui-méme au marché la
volaille et les eoçkons de lait; indifférent à tout, il ne dédai-
gnait pas da nettoyer les ustensiles de ménage et de laver la
truie. Son égalité d'Aine était inaltérable, etil pratiquait
avec
sérénité l'indifférencequ'il enseignait. S'il arrivait qu'on le
quittât pendant qu'il parlait, il n'en continuait pas moins son
discours, salis que son visage exprimât le moindre méconten-
tement. Souvent il se mettait en voyage sans prévenir personne,il allait au hasard et
prenait pour compagnons ceux qui lui
plaisaient, il aimait ù vivre seul, cherchait les endroits déserts,
croyons,pour noirepart, qu'il faut voir précisémentdansles témoignais «t'.Eiié-
sidème le commencement de cette tradition sceptique (lui a modifié la vmio
physionomiede l'yrclioii.tl est vrai que {tirent invoqueun autre argumentqui serait décisifs'il était
foiulii c'est que le nidl d"Autij<oiu$de.Caryjte est en amltadietionavecles textesd« Timon. Maisil tousa titc impossibleitv voircette ronlrailiclioii.On vvrra, jwr!c chapitre suivant, qu'il y a de grandes analogû's entre le carac tèrv dePyrrLou et
celui«leTimon le maitre et le discipleparaissentavoireu le mimegmitpour laviesolitaire et paisible (Cf.Dïoj; 113, et la correctiondeWilnuiovilï).Xotani-uicnl, nous ue voyonspas queTimon, dans lesverscités par Pio|>ùnc-(G^),fasseun reprocheà l'hilou, commele dit Itiriel, de fuir la société(leshommes;il n'y a
dans ces vers aucuneIraeade reproche.H n'y a donc pas de raison sérieuse pour révoquer en (toute FaulwilB d'Antigène.
H reste vr»! que son ténioif>naj;cest >ii>r.Sceluide Timon litplusancti'ii.et nouscroyons, avec Wibiiiovitt-Mollendoil ( t'hilus. inlcrsticL, IV, 3'i; Berlin, Weis-
iiiaiin, 1881), qu'il a unehaute valeurhistorique.
» ÙVWt f. – tiHAMTftk lïl
et on ne hvoyait qtte rarement parmi les mens, Son
tHiiquu
préoccupation était de sWïcer à litpratique
de la vertu. Un
jour* un lesurprit A parler seul, et comme ou lui en demandait
la raison, ilrépondit «Je médite sur les moyens de devenir
homme de bien. Une autre fois'1', il était sur un vaisseau
battupur la
tempête; tous lespassagers étaient en proie à la
plus vive épouvante. Seul, Pyrrbon neprditpas un instant son
san^-froid et, montrant un pourceau àqui on venait de donner
de forge etqui mangeait fort
paisiblement: «Voilà, dit*ih Ift
calme qne doivent donner la raison et la philosophie à ceux quih
ne ventent pa& se laisser troubler par les événements, jj Deux il
fois seulement son indifférence se trouvit en défaut la première » u
c'estquand, poursuivi par un chien, U sa réfugia sur un arbre1*1* si
et comme on te raillait, il répondit qu'il était difficile de «
dépouiller tout à fait l'humanité et qu'on devait faire effort pourse mettre d'accord avec les choses
par la raison, si on ne pou-vait le faire
par ses actions. Urie autre fois, il s'était fâché contresa soeur Pltilista et comme on lui reprochait cette inconsé-
quence «Ce n'est pas d'une femme, répondit-il, (lue dépendta
preuve de mort indifférence.); En revanche, il supporta des x
opérations chirurgicales avec uneimpassibilité et une itidiffé- «
ronce qui ne se démentiront pas un moment, ii poussait même '«
si loin l'indifférente qu'un jour, son ami Anaxnrqne étant tombé
dans un marais, it poursuivit son chemin sans lui venir en aide,et comme on lui en faisait un reproche, Anaxarqtie lui-même
loua sonimpassibilité. On petit ne pas approuver l'idéal (te
per-fection
que les deuxphilosophes s'étaient mis en ttHe il faut
convenir du moinsque Pyrrhon prenait fort au sérieux ses pré-
t:c|ttes de conduite. Lalégende qui court sur son
compte n'est
pas authentique, et l)io{;ène nous ditqu'elle avait
provoqué les
dénégations d'Enésidètne. Si elle l'était et si elle a un fond de
vérité, il faudrait l'expliquer tout autrement qu'on ne fait d'or- 1
tlinaire. Ce n'est pas par scepticisme, c'estpar indifférence que
«
l>iog., fi*. Cf. PliiL, Ih prof, in mrt., 1 1.
DioR-, lot. rit. Aristor. ap. Élise b. toc. cit. rtviii, 16.
1
Il
l*¥RBItU.Y. 71
Pyrrhoit serait ailé nonpas sans doute tfontier contre tes racliurs
et tes murs, mais commettre ticsimprudences qui inquiétaient
ses amis. H no tenait pas à h vio. C'est de lui que Cicéron a
dit qu'il ne faisait aucune différence entre ta plus parfaite santé
et laplus douloureuse maladie. C'est lui encore qui, au témoi-
gnage d'Epietoto Wl, disait qui! n'ya
point de différence entre
vivre et mourir.
Saphilosophie, on le voit, est cette de la résignation, ou
plutôt du renoncement absolu. C'est ainsi, nous dit-on isJencore,
qu'il avait toujours à lu bouche ces vers d'Homère « Les hommes
sont semblables aux feuilles des arbres: » et ceux-ci aillais, toi,
meurs à ton tour. Pourquoi gémir ainsi? Putroele est mort, et
il valait bien mieux que toi. a
Cet homme extraordinaire inspira a tous ceux qui le virent
de près une admiration sans bornes. Ses concitoyens, nous
!'avons dit, lui conférèrent les fonctions de grand prêtre et lui
élevèrent une statue après sa mort. II leur avait donné de la
philosophie une si haute idée qu'en son honneur ils exemptèrenttes
philosophes de tout impôt. Son disciple NausiphanèsM,le
mêmepeut-être qui fut te maître d'Épicure, avait été séduit
par ses discours, et on racontequ'Épicuro* l'interrogeait sou-
vent sur le compte de Pyrrhon, dont il admirait la vie et le
caractère. Comment croirequ'il eût exercé un tet ascendant sur
Nausiphnnès, esprit indépendant, et sur Épicure, si peu soucieux
de lalogique, si sa principale préoccupation avait été de mettre
des arguments en forme f H parlait de morale plutôt quede
science, et sa vertu donnait à ses discours une autorité que
n'ont jamais eue tes raisonnements sceptiques.
Mais ce qui plus que tout le reste témoigne en faveur de
Pyrrhon, c'est l'admirationqu'il inspira à Timon. Timon n'avait
('• Fin. H im .'ici Ut inter optimevalereet gravissimeii'|;rolan>iiiliipromis ilicoronl intéresse. »
Slob., Servi., mi, 3 S ttvppwlÀeyeppSèvinÇipeivÇiivil tcVl'îni.
t)ii>|j.. «7.
I>io¡:" 1i!1. m.
H MVRfil. CHAPITREHt
pas -.1 admirationfacile, H est l'inventeur dos Sillmelpersifla
avec mu! maliceimpitoyable mt grand nombre il»
pHiiosoplu»,entre autres Platon seul l'y* rrhon- trouvagrâce devant lui. QuandTimoa
parie do son nrattre, c'est sur le ton de l'enthousiasme^1*«Noble vieillard s'éerie-t-il Pyrrhon comment et
par quel che-
min as-tn suéchapper à
l'esclavage des doctrines et des futiles
enseignements des sophistes ? Comment as-tu brisé tes liens de
l'erreur et de la croyance serviteï Tu ne t'épuises pas à scruterla nature de l'air
(lui enveloppe la Grèce ni iti nature et la tinîle toutes choses. Et ailleurs (i> «Je l'ai vu
simple et sans
morgue, affranchi du ces.inquiétudes avouées o« secrètes, dont
la vaine multitude des hommes se laisse accabler oit tous lieux
par l'opinion etpar les lois instituées un hasard.
» sPvrriion,
jo désire ardeinineat apprendre do toi conuncMU, étant "encoresttr la lerre, t« mèut-s une vie si lieurciuse ut
traitt|iiilte, com-
ment, seulparmi tes jitorti'ls, tu jouis de lit félicite des Diuux.»n
<>esvers font n»t«relteineut penser à ceux où Lucrèceexprime
sicloijuetnmenl son admiration pour Ëpkure c'est le inùim
sentiinetit, lu inùtrtu effusion dedisciple entliousiaste. Mais encore
faut-ilreuniruuer <{uo Liurèie n'est pas tut railleur de profes-
sion ily a toi» du grave et sévère Kouiain au Grec spirituel et
mordant, àl'esprit «lélié et subtil, prompt
à saisir tuus les ridi-
cules et àdémasquer toutes ks affectations. lî« outre, Lucrèce
n'avait pas connu personnellement Épieure Timon a vécuplu-
sieurs années dans l'intimité de Prrrhon. Quelle solide vertu il
fallait avoirpour résister à une pareille i-preuve, et
«|uet- plusprécieux témoignage pourrait-on inv«H[tier en l'honneur de
Pyrrhim «pie lerespeet .pt'il sut
inspirer à l'ancien saltim-
l>aiif|tie
Il nous est bien dillicile, avec nos habitudes d'esprit modernes,de nuus
représenter cepersonnage oit tout semble contradic-
toire et incohérent. Il nous est donné connuesceptique, et il
l'est eu effet: pourtant cesceptique est
plus que stoïcien. H ne
ilJI)io|(i5.
'"• Eustib.. l'iap. (t.. U-. cil.
-WttHON. 73
( t' Itl..00- 1 s k ~t .f .e
se borne pasà dire «Tout m'est <%ttï», il met au théorie eu
pratique. Oh » v« bien des hommes, dans l'histoire de ta pitilo-
KO|)hi« et dos religions pratiquerte détachement dos biens du
monde et le renoncement absolu; mais les uns étaient soutenus
par I*csj>oird'une
récompense future; ils attendaient le prix de
leur vertu, et les joies qu'ils entrevoyaient réconfortaient leur
courage et les assuraient coutre eus-memes. Los autres, à défaut
d'une tulle espérance, avaient tut moins undogme,
un idéal,
auquel ils faisaient. te sacrifice de leurs désirs et de leurpur-
sonne le sentiment de leur perfection était au moins une coin*
pensution à tant de sacrifices. Tous avaientpour point d'appui
tmo foi solide. Seul, Pyrrhon n'attend rien, n'espère rien» ne
croit il rient pourtant il vit comme ceux qui croient etuspùreitt.
Il n'est soutenu par rien et il se tient debout, H n'est ni .décou-
ragé ni car non seulement it ne su plaint pas, mats
croit n'avoir aucun sujet de plainte. (le n'est ni un pessimiste ni
mi égoïste; it .s'estime heureux et veut partager avec autrui lu
secret du fiaidieur qu'il croit avoir trouvé. H n'y a pas d'autre
terme pour désigner cet état d'âme, unique peut-être dans l'his-
loire, que celui-là même dont it s'est servi «'est un indifférent.
Je ne veux certes pas dire qu'il ait raison niqu'il soit un modèle
iuimiter; comment contester au moins qu'il y ait là un étonnant
/«.vemplede eu que petit ta volonté humaine?
Quelques réserves
qu'on puisse faire, il apeu d'Iiotnnies qui donnent une plus
haute idée de l'humanité. Eu un sens Pvrrlton dépasse Maic-
Auièle et Spinoza. Et iln'y
avaitplus qu'un pas il faire
pour
dire, commequelques-uns
d«i sesdisciples l'ont dit rj, que la
douceur est le dernier mot du scepticisme.il
n'ya
pasà
s'y tromper, il faut reconnaître là l'influence de
l'Orient. L'esprit grec n'était pas faitpour
de telles audaces
elles ne furent plus renouvelées après Pyrrhon. Lescyniques
avaient bien pu faire abnégation de tous les intérêts humains,
mépriser le plaisir, exalter lit douleur, s'isoler du monde mais
Dioj; io8 T«i« xai tili»iwiÛmv, &/<«<Sè»i>i>trpaéinta
«Âos ehtiv
ixai toit owalixoCs.
7t MVKB l. – CKAlHTUfK lit.
~1c «ait en
prenant 1 égard dus autn» tut Iond'arrogance et de
défi, et dans cette vertu d'ostentation, et doparade, l'orgueil la
vanité et r%olsme trouvaient leurcompte. Plus sérieux et plu»
sincères pout-dtro, les stoïciens, ou du moins tesplus illustres
d'entre « renoncent à cette vainc affectation et sepréoccupent
moins d'étonner les autres(lue de se mettre discrètement et
honnêtement, duns leur for intérieur, d'accord avec la raison.
Mais, sans compter qu'ils admettent encorequelques adoucisse-
ments» il y a en euxje ne sais
quoi d'apprêté et de tendu ilsse raidissent avec un merveilleux
courage, mais on sent l'effort. t<Chez Pjrrhon. le renoncement semble devenir aisé, presque «naturel il no fait aucun effort pour se singulariser, et s'il a dulutter contre fui-mèiie
(car on nous assure qu'il était d'abordr'
d'un naturel vif etemportiî), sa victoire semble définitive. Il vit
comme tout le monde, sansdédaigner les
plus humbles tra-
vaux il a renoncé à toutes lesprétentions, même à celle «le la
science, surtout à celle-là. Il ne se donnepas pour un sage
supérieur aux autres hommes et lie croit pas l'être; il n'a pasmène l'orgueil de sa vertu. H fait
plus que derespecter les
croyances populaires, il s'y conforme, fait des sacrifices aux idieux et
accepte les fonctions de grand prêtre; il neparait pas a
les avoir remplies plus mal qu'un autre.
C'estl'exemple des
gvmnosopbistes et desmages de l'Inde
e
qui l'a aineiw à ce point c'est dans l'Indequ'il s'est assuré
quela vie humaine est
peu de chose et qu'il est possible do le
prouver. Les leçons de Bryson etd'Anaxai-que avaient
préparéle terrain l'un, en lui
enseignant ladialectique, lui en avait
montré le néant; l'autre luiavait appris que toutes les opinions
sont relatives, etque l'esprit humain n'est pas fait pour la vérité
absolue. Lesfjymnosopliistes firent le reste, et lui
apprirent,mieux
que par des arguments et desdisputes, ta vanité des
choses humaines.
Ce n'est point là une conjecture. Diogènc'" nous ditque s'il
c
tX. (W.
tl
PÏRKHON. 75!-i lClilIlIfW (f
cluucbatt h solitude, et s'il travaillait à devenir homme de
bicn, c'est qu'il n'avait jamais oublié les paroles du l'Indien(lui
avait reproché hAnaxartjiif; d'ôlra incupaltlo d'enseigner aux
autres la vertu, et dufréquenter trop assidûment te
palaisdes
rois.
Pourtant il faut se garder de diminuer l'originalité doPyr-
rlion, et de te réduire au rang d'un simple imitateur de ia
sagesse «H-tHiitale il estplus et mieux qu'un gyniiHisopbisfe
indien. Nous connaissons mat tespensées de ces sages de l'Orient
et nous ne savonspas par quelles raisons ils justifiaient lotir
renoncement. Mais si, coriune il estpermis de le présumer,
c'est surtout des préceptes du Bouddha qu'ils s'inspiraient, on
voit lu distance «fui l<« sépare du tirée savant et subtil, expert à
tous les jeux de ln dialectique, informé de toutes les sciences
connues de sontemps.
Va n'est pas uniquement sous t'influence
de la tradition, de l'éducation et del'exemple, que le contem-
porain d'Aristote est arrive au même état d'aine. Ce n'est
qu'après- avoir fait en quelque sorte le tour des doctrines philo-
sophiques comme il avait fait lo tour du monde, qu'il s'est reposédans l'indiiïérence et
l'apathie, non parce qu'il ignorait les
sciences humaines, mais parce qu'il les Connaissait trop. il jointla sagesse grecque à l'indifférence orientale. et ta résignationrevêt chez lui un caractère de grandeur et (le gravité qu'elle ne
pouvait avoir chez ceux qui furent ses modèles.
Knrésumé, l'enseignement de Pyrrhon fut tout autre que ne
le disent la plupart des historiens. Oit ils n'ont vitqu'un scep-
tique et unsophiste,
il faut voir un sévère moraliste, dont on
peutà
coup sûr contester les idées, mais qu'on nepeut s'em-
pécher d'admirer. Lescepticisme
n'estpas pour lui une fin c'est
un moyen; il le traverse sans s'y arrêter. Des deux motsqui
résument tout lescepticisme, é/mijuc et adiapliorie, c'est le der-
nier qui est le plus important à ses yeux. Ses successeurs ren-
versèrent l'ordre et firent du doute l'essentiel, de l'indifférence
ouplutôt de l'ataraxie, l'accessoire. En gardant la lettre de sa
doctrine, ils pu altérèrent IVsprit. Pyrrhou eut souri peut-être
W LIVRE k-GH/tHTKK If t.
et montré({Uetque compassion, s'il «ftt vu Sexto»
Empirions sedonner tant clo
pota» pour nissemblor en deux indigestes etinterminables ouvrages loin les arguments scepiiijuus. II arrivait
a ses tins bienjjIiis simplement. Il fut avant tant uu désabusé
il fut un ascète grue.
îîmon de imiumm 77
CHAPITREIV.
TIMON DR FIIMONTR
Pyrrhon eutplusieurs disciples. Timon est le plus célèbre de
tous tes autres étaientEuryloque, Phiion d'Athènes, Hécatée
d'Abdèra, Nausiphaiwsde Téos. Dbgôneî» cite cil outre parmi
ses i'jiinilicrs(oW0e«s ) Numénius. en supposant que Nu-
inénius eut «Hé un pyrrhonien, comme il est nommé avec Mnési-
dème, il estimpossible de- savoir si ce
philosophe était un con-
temporain de Pyrrhon, ou s'il n'a vécu que lonr-teniris aprèslui«>.
« t
S'il est permis de hasarder une conjecture au sujet de ces
obscursphilosophes, il nous semble
qu'ils étaient moins les
(lisciples.au sons précis du mot, que les admirateurs dePyr-
rhon, ses familiers ou ses imitateurs. Si eneffet Pyrrhôn,
ainsi que nous avonsessayé (le l'établir, n'avait que fort peu de
doctrine, comment aurait-il fait école Oncomprend, au con-
traire, que quelques-uns do ses contemporains ^vivement frappésîle sa manière de comprendre la vie, l'aient pris pour modèle, et
aient essayé de continuer, non son enseignement, mais ses
exemples.Cette
interpolation est confirmée expressément, pour deux
(l) IX, 103. Sur ce passa|;<>, voir ci-dessous p. 89.
» Suidas (GiôSapot) cite encoreparmiceuxqui ont enlimdu Pyrrhon,TIiôo-dore t'atliép. Il n'y a lit rien <l'im|»ssili|e, cl on .1 pu iiMÎnie (Tcunoiiianu, Hit-foire de h
phihtopliie, t. I, Irail. Cousin) atlriliucr ù Tbi-uilure tes formules très
voisines du pjrrlionisinu. oinjilcniV* |kh- t.s cvrwimîqiics. Cic., Ae., Il, uvi, i/ia ï
'l'rrter |iermotion<» iiilinms iiiliil pntnnt t-sst- judicii.« (T. Plut., Ade. Colul., «/1,«; Setl., M..V||, .91.) |J scmlilcloulffoispliisprabsblftqui' ces formulesétaientplus anciennes «l remotilaù'iit à Arisli|i|ic lui-im'mc. Voir Zeller, «p. ni., t. Il,
p. 3oh. V Anfl.. cl ri-dcssii-s ji. -ig.
78 U fim L – CM» l*IT RE f V,
ait iHoifis «lesphitosojiht-s qu» nous sont donnés comme ses
disciples. Pitilon d'Athènes, ainsi tjue l'attestentauthentique-
inéiif deux vers do Timon, n'était d'aucuneécole (èti&xxtàos) c
il vivait dans la plus complète indépendance, loin de toutes tes
disputes, et philosophait pour son propre compte. «Fuyant los
bomines, dit Timon, étranger a toute dcole, ne conversant
(ju'aeer Ini-raâme, Philon ne se soucie ni de» la gloir» ni (les
disciples fli.»
De même, Nausiplianes témoignait à l'égard de son maître,en mànii li>raps qu'une grande admiration, une grande indé-
pendance. U disait qu'il fallait imiter la manière de vivre é»
Pyrrhon (y(veo(ku m SiaÛéaews rns ïïvppvvsiw), mais s'en
rapporter à soi-mêmepour
les idées (râv X6ym xëv êoanoS).Cette distinction de
Nausiphanes, entre ta <ftrf0eo-«s(jfcles Myat,est très significative, et
marque bien le véritable caractère de
l'ancien|tyrrhonisnic. Au surplus, Nausiphanes n'a pu écouter
bienlongtemps les leçons de Pyrrhon; car il a été lui-même le
maJlred'Ëpicure; or Kpicure a ouvert son école vers 3 1o av. J.-C.
et il neparaît pasfâ que Pyrrhon ait
puêtre de retour ù Élis
avant 333. Ajoutons «juo Nausiphaites appartenait plutôt à
l'école do Démocrite qu'à celle de Pyrrhon Cicéron r<>ppelleDémocritêen i3'.
Eu n loque ne nous est connu que par une anecdote. H lui
arriva, raconte Diogènc, de s'irriter tellement contre son cuisi-
nier, qu'il saisit une broche chargée de viandes, et le poursuivitainsi
jusque sur la place publique. Le fait que ce seul trait est
arrivéjusqu'à nous, n'est-il pas un indice
que pour tous ces
philosophes, la grande affaire était moins de raisonner que de
vivre impassibles et indifférents, et que la malice d<>leurs con-
temporains, curieux de voir s'ils tiendraient leur gageure, enre-
gistrait soigneusement tous les traitsd'inconséquence qui
pouvaient leur échapper? fiurylorçue lui aussi avait peu de (»oât'
f»i«i[., IX, Gy; Miillacli. firof;. l'hito». Grœcor., l. I. jj. i>i, ter* Hu.;li
Mit, aii.nl., I. IV, | 'm. noli- i.51
ljr.5nt.t'je..l, ttve. 73.
'rt-NIO9. ttË t'ttf.fÛXTK. 79
~uai ~.[;(t1 .–
"lll"dit
peur litdispute; «tnsi f>iogèntt«* raewnie <juç pour se soustraire
aux questions (j«fon lui «dressait, il jeta suit manteau et traversa
l'AlpIwe à ta nage, il était, dit encore ÏKogène, l'ennemi déclarédes
sophistes.
Sur Hécatée d'Abdère nous avonsquelques renseignements
plus précis. Il vécutauprès do Ptolémée
Lagi etl'accompagna
dans sonexpédition
enSyrie»». Joseph» («l'appelle ^xjnfto
#(i* xalmpï ràs vpdÇsts tmvéturot d'où on
peut conclure
qu'àses
yeux lapratique et l'action avaient bien
plus daprix queta théorie. Hécatée avait composé un livre sur la philosophie des
Égyptiens, puis desouvrages étrangers, à la
philosophie»», entre
autres un livre sur les Juifs et Abraham <w. C'est un trait(lui ltti
est commun avec Timon. Cesphilosophes, après avoir demandé
à laphilosophie tout ce
qu'elle pouvait leur donner. c'est-à-dire
unerègle de conduite, s'adonnaient à d'autres travaux.
I. Le véritable successeur de Pvrrhon, le confident de ses
pensées et l'héritier de sa doctrine fut Timon w.
Ilnaquit
Wà Phlkmte vers 3a& av. J.-C, et mourut à
<»D«)B.,tS,
« Cepliilosopt.0 lit. doit pas élro confond» (it Ta êU) avec UécMéo de Miletttelonon Voir Paul}-, lieat.
Eneptop.«- ifarlfaiiMMNMi.fi, Stuttgart,Melilcr, i83j.
™
m Gmtr. Apiait, i, as.
w l'hrt.. De ItMe et Otirié, <>; |)iog. I, 10.
«» iosèphe, /oc. ei».Cf..liifry. Juâ., l, tu,
<•» Scsi., M., I, 53 Ô «po(f»iftiis t<3i>lliîppiiTOs ^«v T/puv.«''Pour Brar la ilatr.de ïimo», voici les rcnseignomeiils donl nous disposons
•i il fut disciple de
Stilppn, Diog. K, o9 »• il vécutqualre-riogl-dir ans, ,bid.
i«a; .1" il survécut à hnésWu, car il composa unIhttqutl funèbre d'Are^silos
.>4; e"G" il r"ll'anli de tac><les- «««esscw dArcoalas, avec lequelAUieitcc (X, hU) rapporte qui» lui arriva de s'enivrer. (Cf. Élien, IW Hi$K, HS i ) Or. Stiipon ne parait pas avoir »«•«. au delà des premiùres années du .»• siècle(Zeller, op. al., 1. Il, an, i). On peut croire «,»e Tiiuon, qui avait été danseuravant d être
pl.ilosoj.lie. «toit âgé ,|Vm ironvingl-ci.uj mis lorsqu'il arriva à Atyorec« qui pfc. la ,lal« de sa naissance ,ers ;{a5. La date de » mort «rail alors à;ï5
coijm concorda bien avec tes auinsreieoisncnients .toêiilas mnuriil vw ,j, r
!r l' IV> !'• *»«• 3>> et <fatls l'>'»«'i-vallc qui sépare cette dal<- de lau ,35,Imiioii eut i,,ut (“
!«,“,“, Mie,«aiB. lwm. flianuer d'opinion sur lo compi,; ,1'Arc.
m UVRE r. – CHAPITRE IV.
Athènes vers a$k II 'exerça «l'abord te mfam <te immin puis
il y renonça et alla à Mégare, où il entendit Slil|)nn. Huvenu
ensuite dans sapultie,
il a'y maria-, jnii* il alla trouver Pyrrhon
ù Elis; à cette époque Timon était déjà célèbre. Lapauvreté
io
força à partir; il se rendit à Chalcédoine, où il s'enrichit en
enseignant, et accrut encore sa réputation. Enfin, il s'établit à
Athènes, et sauf un court séjourà Thok's, il y demeura jus-
qu'àsa mort {l).
Malgré sa vive admiration pour Pyrrjton, Timon ne l'avait
pas pris pourmodèle en toutes choses. On a vu qu'il ne se
résigna pas comme lui iVlapauvreté;
il n'eut rien nonplus
de
cette gravité et de cette dignité, qui conquirent à Pyrrhon la
vénération et ta confiance de ses concitoyens. 11 fat à certaines
heures fort peu philosophe; divers témoignages nousapprennent
qu'il aimait a boire, et s'il faut en croire Athénée tî!, il n'avait
pas perdu cette mauvaise habitude, infinie ti la fin de sa vie, té
IVnoque ou il connut Lacydes, le successeur d'Arcésilas. Cepen-
dant, on cite de luiquelque* traits do caractère, par où il se
rapproche de soit maître. Il aimait comme lui la solitude et les
jardins, et faisait preuve, du moins « IVjjard de ses propres
ouvrages, d'une assez grande indifférence.
C'est surtout par son esprit vif et mordant par sa méchan-
ceté que Timon est reste célèbre. 11 exerçait sa verve railleuse
sii.is qu'il avait cl'alidn] l'oit uraltrnilu, e\ qu'il tuita i'iisuit« iliins k- HipiSsmuov,
puis |inur tlcveitir failli df Lacyes, i|uc sans itunle il n'avait |ui cnnniiiln: «lu vivant
•rAreé>ila% 0» voit donc <|iie <VsE à tort qui» Ililtcret l'eidlur (llisl.fhit. Grtec. et
ttvm,, .'{57, 6" Aull.) (•! Wiickiiiiilti (Oc Timuiie l'hlium, |>. 5, U'ipzi; i85j|)
ilccl.triMit «(tic Timon u'a pu Hrc <lisei|it« de Stilp«it il n'y n jras île ttillicutli
i:bronnto<iii|iieà nilniPttm te l«-iii«i|;n.i|t tl« t>iii(>i'iut sur i-c p«inl.
Qui>|i|ites liisl«iii>n* uni «u pouvoir ••«nclm-c A'un pns-^ijn- do f>i<}(;t-ifo
(i«;( Sitùav iaipump êSilaÇs) <|m- Timon élail aussi ini-ili><-iti i>l ils wml [Mirtitde là [«un- dire
i|iiotl«t ct'llc p|m<|He te scepticisme avait .iv<îc ta iiKJdccintr d'étroites
alliniti.'s. Mai» il est bien peu vniisi'intil.ililv rpt» Tiniwi dmis<-w, |»«'l'' et pliiln-
so|ili>», ait micorir i!it lir ti-iii|is lïittv médecin. F,<> pas«i<;o tic DinQÎMU) sijjnilÎH sim-
plement (|ii*it lit apprendre In iiièderine à son fils.
'»> V, p. ft:«r i>Ip.; Rlien. Kir. Hi«f.. tili. Il, r,u DioBcnc l'appelle aussi
?w««i»i, no; mais Waclistniilh (op. cil., p. 8) dit avec raison (pie ctt passivedoit «Hre coitij»(; et ijn'il fmt lire Çi^o*omtiif.
TIMON DE PHLIONTK 8i
t.
sur fausles sujets, et aux dépens de tout le monde; if
n'épargnait
pas sa propre personne; comme il était borgne" il s'appelaitlui-m^me lo
Cyelope,et
plaisantait volontiers sur son infirmité.
Mais ce sont surtout lesphilosophes qui furent en butte à ses
sarcasmes; il paraît s'être acharné particulièrement sur Arcésilas
si doux pourtant et si aimable, dont tes opinions présentaientavec les siennes plus d'une ressemblance. Un jour (ju'Arcésiio»'2'traversait ta place des
Cercopes, il lui cria «Que viens-tu
faire au milieu do nous autres, qui sommes des liomrnos libres?» >t
Une autre foi», comme Arcdsilas lui demandaitpourquoi
ii dtatt
revenu de Thèbes «Pour vous voir en face, repondit-ii, et
rire do vousw. » II est vraique plus
tard il se réconcilia avec
lui, et fit môme son éloge dans l'ouvrage intituléBanquet fu-
nèbre d'Avcésilas.
Timon avait composé un grand nombre d'ouvrages; des
pommes épiques, des tragédies, des satires, trente-deux drames
comiques, puis des livres en prose qui n'avaient pas moins de
;to,ooo lignes w. Parmi ces derniers se trouvaient le Tiepî
<tloO)tazù>v(i\ hYlvOav^'Kprobablement ua dialogue entre lui et
Pyrrhon, qu'il avait rencontreau moment ou it partait pour Del-
phes;et
peut-être un livre ïlfArtoif tyimxoèt 'et kpxeeniéo»^
atptSsïrrvop. Ajoutons enfin les tombes^, les Images (it»5«Xpo/}tIOÎet les SiUes; ces deux derniers ouvrages sont les seuls dont it
01Diojj., IX. tta, ni.
«>Ibid., ti k.w Ces ieiilesde Diugèimoù sf iimuifeslcla niouv.iisohumourde Timoncontre
Areifilns sont conGruu» par plusieurs vers des Silles, où le fondateur de la iiuu-
velte Académieest fort fiialineiic.Voirentreautres frag. irm, in, cdtt. Watlt*-inulh.
'«l>io({., IX, m.
«I /*«/ io».
? Iliiit., 6»; Arisloc. ap. Kiisol»., Pru-p. evang., XIV, uni, th.
ra Sent., .1/ III, a. –du sVstparfoisdemandési ecl ouvragen'était |»ssim-
pli'incul imo partie des Sillei (Tcnnemann, Gtuk. l'Itilos., u, p. 177; l'ait!
DeSittis, p. «;>).">
Wiojj., IX, 115.'" Ibid., 110.
Sextus, M., Kl, jo. ftiog. IX, i«5, 65.
82 LIVBBi. – CHAPITREi V.82 LIVRB t. CHAPITRE «V.
nous soit parvenu quelque» fragments, cinq«h six vef* «lufe
ImagetM, et environ cent cinquante des &<?*.
Les Silles sont de beaucoup l'œuvre tu plus importante de
Timou c'est de là que lui est vorni te nom de mllograplie,et il
faut que ces poésies nient été souvent lues dans l'antiquité,car
elles sont fréquemment citées par Diogène, Sextus, Afhénde, à
(lui. nous devons les fragments conservés. C'était un poèmesati-
riqueen vers hexamètres, dont chacun paraît avoir été une pa-
rodie d'un vêts d'Homère'*1. Tout co que nous savons de certain
sur la composition de œ poème, c*est qu'il comprenaittrois
livres le premier était uno expositioncontinue {aùtoSnfynrov
r
%si tùp ippttmh»}®;le second et le troisième avaient la forme i
de dialogue Xénophane de Colophon, répondantaux questions
de Timon, passaiten revue, dans le second livre, les anciens
philosophes,dans le troisième les philosophes
modernes. Tous
trois traitaient le même sujet,et étaient consacrés à injurier
et
à couvrir de ridicule tous les philosophes.
Wacu$i»uuY(t>, d'une manière très ingénieuse, a essayé de
reconstituer l'ensemble de l'œuvre. Le premier livre serait une
descente aux enfers, une vsxvta, imitée de celle d'Homère
Démocrite, Pythagore, Pannénide, Zéno» d'Élée, Mélissus,l
Platon, Zenon de Cititini, Aristote auraient tour à tour été dis- il
JÎHgués par Timon dans la foule des ombres, et chacun aurait
été caractérisé par tluelque réflexion, généralementdésobli-
géante. Pytlmgore n'est qu'un charlatan impudent et ignare;
Heraclite, un déclamateur criard qui injurie tout le monde;
Platon, un hâbleurqui
n'est pas dupe des mensonges qu'il in-
vente; Xénophon un pauvre écrivain; Aristote un vaniteux insup-
i') 1.09fragmentsde Timonsonlremis dans Mullacli, /•ragriit.Philo*.Grœcar.,
I. I, p. 89. Cequi nous est reslo des Silles a été publié avec grand soin par
Wacbmuth,0cîi»i«fi« l'htiatiu. l.ci[izi| «85y.
VVVlianiKth a eu soin itfftiler, en regard des vent <li>»Silht, ccik do i'Iliaile
ou de \'Oilysiée dont ils ont la parodie. i
»Biog., IX 1 1 1. Cf. Aiïstre. /oc. cil. a» «a'»t«« toi* ««Sirote Qtlooo&ioantK
j!f&«~'))t<);Xt.
11 (if. ril. |i. 1 7 ci 'ii/.
r
TOION f»R FHfJONÏ'B.8»
\os.
1:.
~#,
porlahfo; Phétfon «t ÉncBde» desesprits ferles, <mi ont jnfra-
duit à Mégare la rag« do fa dispute; tes académiciens» desbavards sans esprit (1>.
Tous ces philosophes se livraient à unegrande discussion,
une lofpmwhie assourdissante analogue aux combats racontés parHomère et dont la foule des ombres applaudissait ou sifflait les
principaux épisodes. On voyait surtout la lutte de Zenon de
Gitium contre Am'sitas «l'ai vu<*>,dans «ne fastueuse obscurité »une vieille Phénicienne, goulue et avide de tout elio
portaitun tout petit filet»1 «jui laissail
<5cb|>per tout cequ'il contenait,*
et. elle avait un peu moinsd'esprit cjn'une guitare, Puis Arcé-
silas, le combat fini, « ayant ainsi parlé •«, se glissa au milieu dela foule. On se pressa autour de lui, comme des moineaux au-
tour «l'un hibou et on s'extasiait en montrant k sot person-
nage. Tuplais it fa multitude c'est bien peu de choso, malheu-
reux! Pourquoi t'enorgueillir comme un sot?»»
Enfin, paraissait Pyrrlion!5! «auquel nul mortel n'estcapable
de résister». Ilreprochait à tous ces
dispaleurs leur fureur et
l'inanité de leurs discours, et finalement rétablissait fa paix. Ici
se plaçait l'éloge de Pyrrhon que nous avons cité plus haut.
Dans le second livre on voyait arriver Xénophane. Timon
fui demandaitpourquoi il n'avait pas pris part au combat
pré-cédent il répondait en
témoignant son mépris pour tous les
philosophes, et ilexpliquait comment if avait dierchiîla sagesse.
sanspourtant parvenir à l'atteindre, honneur
(lui était réservés
à Pyrrhon.
Enfin le troisième livre disait leur fait auxphilosophfs les
plus récents, contemporains de Timon.Épicure n'y était pas
mieux traitéque Cléantlie et les s(oïci»>ns les
philosophesd'Alexandrie n'étaient
pas plus épargnés que ceux de l'Académie.
>» Mlltlacli, tw. al.
« Mull.,«r.8H.01 Allusion mut
•mltlilifw caitlimigps de» sloïeieiw.w
Slull., y. 7fi.!l> Vers i«C, Oiïk &v Jil flippmi y'ipl<toem- §ptnit i>.iot.
84 UVRE I. CHAPITRE IV,
C? I '11( X% •• -«.
"* w ï «a ï.– «jH.iri i niv i ¥,
Si(datisible (|uvelt<j soii, celle reconstitution uo repose, d<?
l'aveu (le son auteur, que sur une conjecture ce qui est cer-
tain, c'estque Timon parlait des
philosophes sur letoit le plus
méprisant et le plus injurieux. On voitpar
là combien il est
loin de Pyrrhon. Son maftre dédaiunait les philosophes parée
qu'ils se contredisent Timon lesoutrage.
Il y aquelque analogie entre ses
procédés et ceux des cy-
niques. Antisthèim et Diogène estimaient aussique la science
est inutile»'; ils critiquaient les iymSxXta (utfiffiunaM, et cri-
blaient de leursépigrammes les (logmatistes. Eux aussi se
plai-saient aux parodies111. Sans doute, Timon est avant tout un
sceptique: mais cequ'on vient de voir montre
qu'il y a aussi
quelque chose de la manière grossière et insultante des cy-
niques chez l'ancien saltimbanque.Il nous reste aussi
quelques fragments (treize vers) du livre
de Timon intitulé tes Images (î«*<5«).p<»')W.Vraisemblablement le
passage conservé par Dioyène était le commencement du poème:Timon demandait à son maître Pyrrhon le secret de cette sa-
gesse qui l'élevait au-dessus de tous les autres hommes, et per-mettait à ses
disciples enthousiastes «le lecomparer au soleil.
Pyrrhon répondait ensuite à cette question et nous avons aussi
le commencement de sa réponse (5t. H nousparaît évident (au-
lt>Diog.. \>l, K,3.
'»Diog.,VI, to/i.
!>1Waelmmilli,op.cil., p. '46.
Diog., lX,(ir>tToCto pu, & lUpptni, ifielpnii Jrop ikowau
a$( mu' ân)p h' iytts «raVra («jO' iaw/ins
\twvot i'àvOpûnatat béov
Tfvnmt iryeyiweias
St aipl -aZattv è'/Sv ynïw àvxolpétpetaiieiKvis eiidprov aÇvipnt -ovp«*v«>p* xix/ov.
Ui Ann iJemwrs vore sont cités par Soilns. St. l. 3of> ils sont CTitlcnmiiiit
la suite fat premiers.Sett.. iL, XJ. ao.
fl yèp iyùv épia & (loi xm^afeetai elra,
(iv9oi> ti.ïiOeinf ùpOùv iyjtv xwivn,
ût » tov Beiuu repimt xmiiynOoiiki
é~ trK~iaré*axos yin_xxr xvdpi jStOt.
Ï1M0N M PliyôKM. m
feint qu'on jw»l parler d'évidence avec des documents si insuf-
fisant»} que ks ipSalpoi étaient un vrai traité de morale à ten-
dances assezdogmatiques
îft. Ils renfermaient, si nous nous
sommes fait de l'œuvre doPvrrlum une juste idée, la
partieessentielle «lo l'enseignement sceptique primitif. Les Sillet étaient
une œuvre depolémique &t de destruction les Images, une
œuvre de construction; on y enseignait le moyen d'être heu-
reux, c'est-à-dire de trouver le bonheur dans Pataraxie et l'in-
différence.
Suivant IfirzeP, il faudrait entendre pr îvSak\xo( les imagesou plutôt les phénomènes, les représentations sur lesquellesnous devons nous régler dans la vie pratique. Timonlïl parattavoir déjà été
préoccupé de J'objcction qui devait <Ure-taiit de
fois répétée dans la suite le doute rend toute action impos-sible. Il ne faut pas, répondait Timon, demeurer inerte; il
faut agir. Pour agir, il faut un critérium un critériumpratique,
Vu critérium, qui n'est autre choseque l'alarasie, permettra
dedistinguer parmi nos
représentations (hSàXftoi) cellesqu'il
faut suivre et celles qu'il faut écarter. Delà, une suite depré-
ceptes, dont nous avons peut-être un échantillon dans un vers
cité par Athénée !4), et qui auraient été le contenu du livrede Timon, analogue par ce côté aux traités des stoïciens, ou
plutôt au Uspï eùthtiiw de Démocrile.
Mais cette conjecture de Hirzel nous semble fort peu vrai-
semblable les raisons dontil l'appuie sont bien subtiles. Cont-
ment croire que Timon, s'il avait voulu parler seulement desimages vraies ou utiles, eût intitulé son livre ïvSaXiwi sans
aucune qualification? Il estplus probable comme l'a
conjecturéWacbsmutli W, que le mot hSaXptol est
pris ici en mauvaise
Voy.ci-itaaus, p. 6s.«
Op.dt., i>. 5i,(io.
'» Se*l., M., VII, s<j.Vtlt, :07, t\. ttayKÛ'jX Si «ai à T/(i4>i. {$»
sraVtue (iii> v(i'Jma7a xtxâv îmOvpiv èaii».
s» Op. cil., p. 11.
86 L1VHB l.– r.ltM'lTRB IV.
part; il s'agit desimages
ouajjpurencos trompeuses quo la fausse
sagesse des |>lûk>s«j>lu>t;,suivant Timon, oH're à l'esprit humain,
et qui sont le |irinci|mtobstacle à la vie heureuse. C'est en ce
sensque
te mot est employé dans un vers de Timon, emprunté
aux \»Sakttoiil\ L'endroit môme où Sextus place ce vers, au
début de son chapitre contreles moralistes semble indiquer que
ce vers était deveuu dans l'École une maxime courante, qui do-
minait toute ta morale et résumait nettement la pensée scep-
tiquesur les
questions de cet ordre.
11. – Laissons maintenant de côté lesconjectures, et es-
sayons, à l'aide des divers fragments quinous ont été conservés,
de recueillir quelques indications précises sur les sentiments et
les idées de tour auteur. Ses opinions ne diffèrent guère de
celtes de Pyrrhon, puisque c'est par tui qu'on connaît Pyrrhon.
fi y a pourtant quelques points à éclaircir.
Parmi tes anciens philosophes, les seuls qui aient trouvé
grâce devant Timon sont les éléates, Démocrite et Protagoras.
Nous avons vu que Xénophane est le principal personnagedes
Sillet c'est ttti qui passe en revue toutes les doctrines; c'est
sous son nom queTimon distribue l'éloge et surtout le blâme.
Il parle avec admiration de Parménide(2J «Le grand et illustre
Parniétride a montré que les idées sont de vaines apparences.»
H loue l'éloquence de Zénon. et Mélissus n'est pasoublié. Pour-
tant, en mènetemps qu'il leur adresse des éloges. Timon fait
des réserves c'estque
ces philosophes n'étaient pasassez
scep-
tiques a son gré ils ont approché de la perfection; ils ne l'ont
pas atteinte Mélissus était supérieur àbeaucoup
depréjugés,
non pasa tous3'. »
Quant àXénophane. Timon le représente
se
«« Sral., M., XI, i:
M>jrapMs^'ifàùpok nivïàyw aoÇini,
Vvi-f. I» comdion «le Bsrgk. (Ontiin. cri't. Sj«c, I, p. A.)
"> Mnliiich, ao-ii. •!3-aO.
n Mulfach.»
lUc SUstaouv
zruücvv ¢amaa~w trt~v~.r rsavp ~rv ye fttf ii'1(J~t.
TIMON UK PHMONTB. 87
désolant d'ttïoîf été trop longtemps égaré et d'être arrivé à h
vieillesse, sans avoir atteint la vraie sagesse t *Car dequelque
cotéque
se tournùt mon esprit. je voyais que toutes choses se
réduisaient n un seul et même être11*,n Mais c'est là une assertion
trop précise et si Timon lui sait gré d'avoir combattu les fables
d'Homère, il ne le trouve pas encore tout à fait exempt de ta
morgito dogmatique [ùndftitifat).
Démocrile est un des premiers écrivains qu'il ait lus1'11, et il
admire fort sa sagacité w! et son aversion pour les discours équi-
voqueset vides. Il
parleaussi en termes fùvorubles de Prota-
goraxw, et il raconte comment, aprèsavoir écrit son livre sur
les dieux il dut prendre ta fuite pour ne pas subir le sort de
Socrate.
Il serait intéressant de trouver dans les fragments des indi-
cations sur les formules dont se servaient i'yrrhonou Timon, et
sur te degré d'élaboration diateetHjiie que te scepticisme avait
atteint de leur temps. Malheureusement lesquelques
vers dé-
tachés qui nous sont parvenusne jettent pas grande lumière
sur ces points. Partout Timon s'attache uniquementà la
partie
négative du .scepticisme;il railtu les philosophes ou ceux (lui
les écoutent; il nousprésente par exemple un jeune homme
qui su lamente d'avoir perdu son temps et son argent à suivre
les leçons desphilosophes, et
se trouve réduit il la misère, sans
avoir rien gagné du côté de l'esprit w. Les ternies tels que
hox'i, oùSèv f/âAAw, si usités dans la suite, n'y paraissent pas
'«Uulbeh. 3a.37.
<•» Ibid., i5.
<3>A»lieu de
OW 4nftéxpit«i> xt mpiïfpovn, oo/fiera (iv'À'i',
àfiÇhoof Maxwt feri -ap-inunv ivéyvuv
t Milliard, i')-éO), XieUwlu! [inifwse de lire;
oTov iVn(ioxpir«V te aepiÇpova, unSpovs pvOuv
i[i$ùoy<iiv Xea^w te, fieià apûjoiviv wéyvvv.
((îratuhtiaaschrijfli(r»i\c<fir/ ;u llascl, Rascl, 1H70,|>.-ji-j'J).»> Mullacb, AO-ôH.
W Ikid.. 97, toit.
88 LIVRE 1. – CHAPITRE IV.
une seule fais» On pourrait lire ces fraginnnts sans se douter
qu'on a affaire à un sci-pliqui. H est clair toutefoisque
«le liti
an ae peut rien conclure.
Si, ù défaut du texte même de Timon, manifestement trop
incomplet,nous consultons les divers
renseignement»iinfirecls
qui sont arrivésjusqu'à nous, plusieurs indices nous
portentà
«airequ'il
avait déjà donné à son scepticisme la forme savante
etdialectique que lui conservèrent les
sceptiques ultérieurs.
Nous savons» en effet, par Sextus qu'il avait eVrit flpèstous (pwtxovs. On pourrait croire, il est vrai, qu'il a traité
lesphysiciens commeil avait traité
les philosophes, eu raillant
et ça injuriant plutôt qu'en discutant. Mais deux allusions
faitespar le mémo Sextus donnent à
penser que Timon avait
engagé une discussion en règle contre le dogmatisme des
physiciens. 11 disait f", en effet, que, dans les dékls avec les
physiciens, la première question est de savoir si ces derniers
prennent pour point dedépart
unehypothèse, (/hypothèse, en
langage sceptique, c'est ce que nousappelons une proposition
évidente ou un axiome: c'est une proposition qu'on ne démontre
pas. Refuser d'admettre aucune hypothèse, et c'est vraisembla-
blement ceque
faisait Timon, c'était donc rendre toute démons-
tration impossible. Si (elle était vraiment sa façon d'argumenter,ce serait déjà un des
cinq tropes d'Agrippa.Dans un autre
passage Timon, selon Sextus '*>,démontrait,
que letemps n'est pas indivisible, car dans ce
qui est indivisible
il estde distinguer des
parties; par suite, dans tin
temps indivisible on ne pourrait distinguer ni commencement ni
fin. Voilà un raisonnement analogue a ceuxque firent plus tard
k'ssceptiques sur toutes les questions de physique; le fait que
S«tus..W. III, a.
-M..<'), 6C. Cf. X, «)~. t)an<ces <temla <n'u)MchoseaHt soit'' M., VI, 66. Cf. X, iji;. Dans ces «leuipassages, la «cutis chose qui soil
allribiiw à Timon, e'mt que li>temps ne pmrt t-tn» imlirisiiMi?. Qu'il ne puni»? pasnon plus tlri» divisible, cW ce
<ju. soutient Sejtiw vl ce que rvebmc la tilt»;
scqitHjiie. Mai» cette assertion u'mI \m fornwlli'ment attribuée à Timon. Il sep«ul
qire Timon ait allîrrné l'imlmsibilitù du |irés(!iit àpropon «l'une autre question; on
n'a pas te droit de lui prùtvr tonte l'argumentation «le Sittlua.
TIMON M PHUQRTK. 89
rTtmmi « écrit contre fes physiciens permet
de conjeetofer que
surplus
d'un point il avait argumenté <1«lu Bvtto.
En outre, Dingène mous donne aussiquelques renseipc-
iuenls positifs, it nous apprend(li
que Timoncombattait ceux qui
veulent confirmer le témoignage des sens par celui de lu raison
et Le franeoiiii et le corfieu se rencontrèrent,» «lisait Timon
dans un voïsqui était peut-etr»
le commencement d'une fable.
(."es noms«{'oiseaux sont employés ici, ainsi que ra remarqué
Ménage, comme synonymes de fripons. C'est à ces fripons que
le sceptique assimilait les sens et la raison.
Enfin, Diogône"' nous assure que, dans le Ptjâtrn, Timon
interprétait lu formule oùSèv fiiXlov dans le sens où tous les
sceptiques l'ont entendue depuis.
D'un autre côté cependantsi la
critiquedes thèses dogma-
tiques avait eu chez Timon un grand développementet une
véritable importance,si soit scepticisme
avait déjà pris la forme
dialectique, comment croire que Sexttis ne Tout lias cité plus
souvent et avec plus de précision et en lui faisant deplus larges
emprunts ? Quand on le voit insister avec complaisance sur les
arguments d'un Dioelore Cronus, comment supposer qu'il n'eut
pas saisi avecempressementPoecasion de reproduire
les critiques
<•> IX. M S.
la supposition admiw par Wilamovilz (P/u'M. Unlert., IV, 3a), suivant
la(|iiol|c Tiinun aurait joini sur l<i mot Kovfuwifo* et «teij;n« en im'me temps qiio lu
curlieu li' |ilulo.w|tlie Ximn.'iiicn, uutri! <li«ci|>lc do l'yri'liou, t« im'inn qui est fit*-
par IHogèiiB (tX, tua^, «>Bjbl« liien invraisemlilalilp. Il faudrait aènrtlre ijtie ce
NiiiiK'iiiiH, iliscipli' inliilt'lc (!< Cyrrlidu éfilil ilcvi'im un (lojimalisle; c'est poui'fc
motifijue nciii, <ïapti% Diu|{£iiu (08), il aurait dit <(uk l'jrrtiun atait (tojjipaliw.
tt est ptus (iruluM< «)iuui« le montre (tirai («p. rit., p. ft6), que le Ntuwinms
de Piof'i'im ni k ii(-o|i}-ttu|;»riacn ilmil Enwlie nom a cmisorvii des fragments. D<!
plus, si te Numi'iiiiH iioinuié ptni loi» an'i- Timuii Icii-inénip et /Kiiésiilèiiic ('fait
un wi>|iin|iic, on no voit pa» puimjuoi Tiinou l'aurait atta«fii> tl se [«ml aussi
comme I<>roujmtuif! llira.'l, que IVimiiRT.-iliim ;wr. liizarrc de Timon, A\nùù-
ili'iiio, Niuiiwiiii». NaiitiplianiH, np[wU* aviii!lai <l<;l'vnlicni quoiqu lia w soient
pi» tons du iih'ido tvmp.'i, »>it iiiw inliirpolalion. Ktiliii, comme l'imliqiw Naloip
{op. ci(., p. 9(>i). ovmOas ne «srapporte peiit-élw qu'à Timon cl /Knèsidi'ine;
it n'y mirait alore nu«iii<: i!illkuli« à itmsiik;rcr Kiimèiius comme êtraiigir à
fécolc sci>plii|in>, aussi bien ({tu? Naasiphaites.<»
l)io|f.,IS,7G.
90 HVHRf.-CHAPtTREtV.
.t:~a r.w..re__ 1 1 à e
déjà formulées pr un des plus anciens représentants de sa
propre doctrine? 1
En outre, comment concilier tes subtilités inévitable!; dans
cegenre d'argumentation avec l'horreur pour lit dispute dont
Timon fait preuve àchaque instant dans les
fragments les
plus authentiques ? Celui qui parle siironiquement des mé-
garû|uesfi| et de leurgoût pour les discussions sans fin, eelui
qui a» cruellement malmené* Arcésîlas et les académiciens, a-t-il
pu leuremprunter leurs procédés et imiter des façons d'agir
qu'il ne se lassaitpas de blâmer?
Timon a pu relever des contradictions chez ses adversaires,
signaler les difficultés que présentaient quelques-unes des con-
ceptions admises par lesphysiciens: il a
opposé les sens à la
raison'9. Mais tout celan'indique ps qu'il ait été un
sceptiquedialecticien, comme le seront Arcésilas et yËnésidème. Le
scepti-cisme nous parait plutôt avoir été chezlui comme chez Pyrrhon«ne réaction contre les prétentions de l'ancienne philosophie »un renoncement à toute philosophie savante et à
l'appareil dia-
lectique dont cite s'entoure. Comme son maître, c'est lapratique,
tu manière de vivrequ'il avait surtout en vue.
Pyrrhon avait
dédaigné la dialectique, Timon s'en est moqué(}>.
Timon eut-il desdisciples? MénodateM dit lion et soutient
qu'après lui lescepticisme disparut jusqu'au jour ou Ptolémée
(ta Cyrène le fit revivre. Hippobotus et Sotion disent, au con-
traire, que Timon eut pour auditeurs Dioscoride deChypre,
iViVolochtis de Rhodes* Euphranor de Séleucic etPraylus de
Troade. Que cesdisciples aient existé on non, ils n'ont rien
ajouté à l'héritage de leurs maures. Tout ce que nous en savons.
111DioB.,Il, 107.111
Nalorp. toujoursdisposaà ivlronrar chi>zte pltw anciens philosophesk'giloflrines te* pins recciites, un nionquo pa» (t')tlfriliin>r Ii Timon te scepticismesivaniniciiléhimri qu'on trouvedira musiicctswii-* (op. cit., p. a8C), maislesraison*qu'il ifonnnne paromonlpv*«frasives.
"f Sur fc« opinions de Timon en morale, voir ci-dessus, p. (>a.!li
1% IX. n5.
TIMON t>Ë PUUGNTE. 9t
lest que l'myHis de Troade fit preuve dun l'are courage en se
laissant inettrt* en croix pir ses concitoyens, (juoitju'ii filt imio-
cent, sans daigner leur adresser une parole. C'est un reiuar-
ijuuhlo trait d'ituiifférence, si toutefois il estatitlji*nti(jm>.
=:
Les vrais continuateurs de Pyrrlton et de Timon furent tes
nouveaux académiciens.
UVRE II,
LA NOUVELLE ACADÉMIE.
CHAPITRE PREMIER.
LES OBIGINES DE LA NOOVKLfcBACADÉMHÎ,
Les doctrines de tel nouvelle Académieprésentent tant de res-
semblance avec celles que la tradition la plus accréditée attribueà Pyrrlwn, qu'on est naturellement tenté eïe considérer l'école
d'Areésilas commeune simple continuation de celle de Pyrrhon.
Aussi voyons-nous que déjà, chez les anciens, plusieurs auteurs
inclinaient vers cette opinion; il est vrai que d'autres la com-
battaient. «C'est, dit Aufu-Gelie *• unequestion ancienne fort
controversée parmi les écrivains grecs que celte de savoir s'il ya une différence entre la nouvelle Académie et le pyrrhonisme. »
Nous ne nousproposons pas de rechercher a présent si, à
aller au fond «les choses, leprobabilisme de ta nouvelle Aca-
démie ne se confond pas avec lescepticisme. Pour examiner
utilement cette question, il faut d'abord connaître tes doctrines
de la nouvelle Académie; lacomparaison avec le scepticisme
trouvera naturellement sa place et ta fin duprésent ouvrage.
Mais, en dehors de laquestion des rapports logiques des
deux dortrines, ily en a une autre dont il convient tie parler des
maintenant.Historiquement, la nouvelle Académie se rattache-
l-elle. par un lien de filiation qu'on puisse retrouver, au
pyrrhonisme? A-t-elle. au contraire, uneorigine distincte et
/Voci.»«.,XI,5.
m I.IVttK H. «HAPITRE t.
0: r> If-
imiéfiendaiite? L'aeconl, s'il tjsiste, et dans lit mesure oit il
existe, provient-il d'une influence directe exercée par Pyrriion,
on résulte– t-it d'il no simplerencontre ?̀~
Arcésifois a connu et fréquenté Pyrrhon,Nuihénius 'l) te dit en
propres termes, et il neparatt guère possible qu'un philosophe
aussi célèbre n'ait exercé sur lui aucune influence. En fait, nous
savons quesur tien* points au moins l'accord* était complet entre
Pyrrhon et Areésilas t l'un et l'autre soutenaient qu'il faut sus-
pendre son jugement l'un et l'autre justifiaient IViroxrf par cette
raison qu en toute question les arguments pouret contre sont
d'égale valeur (-a. Sextus dit qu'Areésilasest
presque pyrrho-
nien w. Timon, Mnaséas, Phiiomélus l'appelaient aussi un
sceptique{lf. Aussi un historien moderne, Haas (5i, a-t-it
pu
considérer la nouvelle Académie comme ta continuatrice du
pyrrhonisme.Par une sorte de pacte conclu entre les deux
écoles, les nouveaux académiciens auraient été chargés expres-
sément depropager l'enseignement sceptique.
Mais contre cette opinion s'élève un fait indéniable la violente
hostilité de Timon contre Arcésilas. {! n'est pointde philosophe
que t'impitoyable raiHeur ait plus malmené. Il est vrai, et c'est
un point sur lequel Haas ne manque pas d'insister, qu'il parattsVlro réconcilié avec lui sur le tard; il fit après sa mort son éloge
funèbre. Mais on conviendra que ce n'est point là un argument
suffisant pour admettre que les deux écoles se soient fondues
en une seule.
H est vraiqu'Areésitas
est quelquefois appeléun
sceptique;
mais il semble bienque
ce soient ses ennemis qui lui donnent ce
nom, et que leurintention soit de lui contester toute originalité.
H n'est pas probable que Timon, qui l'attaquesi souvent, ait
songé à lerevendiquer pour
un des siens. S'il l'appelle sceptique,
Eiisel».,Prœp.étang., XIV, i». Cf. h, 4. Diogmw«Ht«ouleraonl(1V..13)
TJi> flipfKDVH uni Tivsf iinXûxa.
>»(m. Ae., I. ni, 46-H,««», 77.!» Scsi-, P..I, a3'«.
Eu.wft., foc. cil., ri, a.
»Dr i>liih*. ueptu. tucrwioi>iliu$,f. ai (Wirrpbiiijjï. Siuher. 1875).
ÏM ORIGINES DE LA N0«mi.fi ACADÉMIE,
w~n t". A. t t t t rtt u r r y
c'est pour lui ôtre dàttffwkWe.l'elb est aussi ta signification du
vers d'Ariston f" « Ptuton par devant, Pyiihan par derrière,
Diodore peut le mto. Nous no pouvons guère comprendreautrement
que commeune critique déguisée exprimant la môme
pensée que le vers d'Ariston, deux passages assez obscurs de
Timon (Il « Posant sous sapoitrine lit ptombdo M~éiemo,
il (Arcésilas) courra versPyrrhon aux fortes ehuirs ou vers f>î«-
dore», et: «à» nagerai vors Pyrrhon ou vers te tortueux Dto-
dore. n Nous savons m enfinqu'Épicure lui
reprochait souvent
do ne faire (lue répéter ceque d'autres avaient dit.
Il n'estpas douteux qu'Areésilas liri-méme ait répudié cette
parenté avec le py.rrlronisine. Nous en avons pour preuve déci-
sive ce fait *fue Cicéron, si bien instruit de toutes les traditions
de la nouvelle Académie, no fait nullepart allusion à «ne telle
BHation. C'estexpressément à Aredsifasqu'il attribue l'invention
de l'&roxifM. C'est Ml'écoleplatonktenno que constamment il la
rattache. D'autresténioignajjes viennent corroborer cette asser-
tion t Arcésilasest avant toutdisciple «le Poldmon et de Crantor
et il se flatte toujours (le continuer la traditionatadétnique (s>.
Non seulement on nous donne Arcésilas, et on nous dit qu'ilse donnait lui-même pour un académicien. mais on nous dit
pourquoi il prétendait continuer Soerato et Platon. Ces! ("abord
parce qu'il avait conservé ou plutôt repris l'habitude, fort
répandue dans l'école de Platon et même dans celle d'Aristote(fli,
de discuter alternativement le pour et le «onde dechaque
question W; c'est aussi parce que Platon aimait à se servir
de formules dubitatives (8). Nous n'avons aucune raison de
W Euseb., foc.cit., v, (.-(;Scsi., /»., I, «34;Dioi' IV, 33.(»
Diofj., ibùt.
fJ) Pl«(., /Irftf. &ali.(l) Ae., Il, iw, 71. F)i"|;i'w, qui n'en ml pas »
compter se* ronlradûUans,dit à peu près la 111*1110chose {IV, j8) llp<3tof hiexùv xàt ixo&aut Sa t«
iravttoinivt t<$v XoyiSu.'*>Plllt.,Afc. Col., J«.W «c. Un., V, iï, tn.
Cïc, Kii.,H,i, :t.î"
Cic De ont. ,111, tvw «7 II,- irat. ttmr.. l. v. 1 1
9(5 LIVRE1 1. CHAPITREh
contester ces deux points, et il ne paratt pas '-possiblede niée
quela
philosophie d'Are&ilas, parses origines, se rattache à
celle de Platon bien plutôt qu'àcelle du Pyrrlion1".
Si les considérations quenous avons présentées dans la livre
précédent sur le caractère du pyrrltonisme primitif sont exactes,
pout-Ôtre faudrait-il se ranger à l'avis de Cicéron et dire sinon
qu'Arcesilas a le premier donné à ta doctrine de la suspension
dujugement
sa formuleprécise,
(lit moinsque,
le premier, il l'a
Justifiée (lialei'li(|uenn>nt. Pyrrlmn pratiquait le scepticisme
plutôt qu'il- n'argumentait en sa faveur il avait horreur des
discussions subtiles. Arcésitas, nu contraire, y excellait et s'y
complaisait. C'est peut-être pource motif que Timon l'a si vive-
ment combattu; c'est à propos de son {jout pourles
disputes
«{tut le raille le plus durement, et probablement il était moins
sensible à l'analogie des doctrines qu'il la différence dans la
manière de les défendre.
Sur deuxpoints surtout. Arcésilas diffère de son célèbre
contemporain. Pyrrhon et les premiers sceptiques, comme le prou-
vent les dixtropes
dont ils se servaient, insistaient surtout sur les
contradictions des données sensibles, des mœurs, des croyances;
ils procédaient en empirisles. Areésitas et ceux de la nouvelle
Académie s'élèvent surtout contre 1» prétention^ stoïcienne de
trouver dans les données sensibles ln infai!lible
v_ériteT~ils [iroceïTcnt en dialecticiens. Ce ne sontplus
les
'» Hiwt (op. «(.,[>ifi), qui «mlirmt b mt'-me (Iùsa que nous indiquons ici,
non»parait^lagérorqiturnlil mllnclmAmVtlasà Socrate[itulot qu'A Platon.Le
fait que <|«pI«|uos noiiïeaui wailûmiciens uut dit combattre Ptafon, comnw k lit
(."arnéiiili> <>n parlant rontro la jmlico (Oie, llep., lit, (•)), ne saurait servir do
prmiw, puisque, sur évite([iiestiou
de la justice, Sorralc «tait d'accent avec
l'Ialon. Si, dan» les textes de Cict-mn, l« non) de Socrate est ph» soiivenl joint Ii
celui <VVrrésilas que celui tto Ptalon, cfh lient à eu qtu» Swrrate était l'invcn-
leiir de la nwthoitn d'interrogation pratiquée aussi par Platon, «I à ce que tes for-
miilivi ditliïlativcs de Sncrate éiai«nl plus nertto» qm« celles di- Platon. Qu'Arcésilas
n'ail pa» fait, sous os rapport, de différence eswntiHh1 entw Socrale et Platon,
cV«t ceq«« prmin> h pa»"age de Ciréron ((te oral.. ttt. jvki, 67) Arcosilas.
c% variis Pfaloni» lifiria wrinnuiliusijiiiî S«cralicis Ii«c iM.vimc ai'ripuîl, nihtl esse
rorti. «{i'S.An. I. tir, AS.)Arcésilasse rallnchailà Socrale, mais par Platon.
LES «RRîIffKS Ï>K U SOiJVBM«B A«:.4I)ÉMIIÎ. H?
.I.n .t. .r- t. « à.
1
'6'u U"
croyances |»o(iHt«kns qu'ils «jt|Mjsimt « «Iles-iiieines; c'est uni*
doctrinesystématique qu'ils veulent ruiner. El il»
attaquent lu
foiHyissittiçt?sensible
de telle manière,qu'on.
«|Jii
se deman-
der s'ils n'avaient pas «mepensée de derrière la ((île, si à celte
connaissance imparfaite its no voulaient pas substituer une cer-
liltuleplus haute, el d'une autre nature fl'.
Mil outre, tespyrrfaoniens se bornent (t dire
que la ««Sril»?
nVstp»
encore trouvée ils ne disentpas qu'elle
soit tnawes-
hîI>Io5 ils ne tlésosjtèrent pas de tir voir découvrir un jour:hkHhc il* lu cherchent; ils sont
zététitjues. Arci-sibs croitqm? l«-i
vi?rité non seulementn'est jias liwmw, maïs qu'elle ne
peutf'êlre; cl la raison (ut'it en donne, est
qu'il n'ya
pus durepré-
.•M'iilaiien vraiequi soit telle»
qu'on n\;n[iiitssn Irotivor une
fausse absolument semblable {-\ Les[nrrboniens se bornent à
constater un fait ia nouvelle Académie tranche une questi«nde
principe.
Tout cela n'empéclto jias (|ue Pyrrhon ait jhi exercer une
certaine influence surl'esprit d'Aiwsilas, (jit'il l'ail par exemple
coiiltnué dans sts tendances sceptiques. Mais certamement Ar-irsilas est «rrivilatt
sceplicisme parun autre chemin
que» |»yr.
rbon. Lesgermes
«lescepticisme contenus dans la doctrine de «
Démoerile ont. ense développant,
donne naissance aupyrrho-
nisnie. Lesgermes de scepticisme contenus dans la
philosophie
de Sociale el de Platon ont, mse développant, produit la nou-
velle Académie. Si Pyrrhon n'eût pas evtslé, la nouvelle Aca-démie aurait été à peu près ce qu'elle a été. Ainsi l'école evré-
uaïque est arrivée d'elle-même, et sans qu'on puisse soupçonnerune influence
pyrrhonienne. à des formules très voisines du
scepticisme.
C'est unequestion de savoir si à l'inlhience
socratique el
platonicienne il ne faudraitpas joindre celle des
mégariques.Le vers d'Aristo» cite ci-dessus autorise à répondre allirumli-
Voir i:i-ili>sim.sp, 1 1
'*>Scsi., M., VU, 15/1.
5»» iIVRK H. ËIMPfTfiK I.
vwHtmt'l Mais nous savons tru|) |h'U (le chosesd'Aicûsitas jioui1
démêler les traces cfo celte influence*'i!. D'uitli'urti, l*ée«lwiu<%a-
rit|ue procède du mtïme ospril que le platonisme. L'important
était (le montrer qu'enlrv n.'s deux teiidiinces (|tii fuitlicitvnt ît.
eette <5j««jiio l'esprit grec, otjieut-dtre en tout tcmjis l'esprit
humain, l'une vers l'obsoivaiion l*e.\[jértent'e et les faits, l'autre
vers l'analyse j)syeliol«gi(|iie, J« dtaluctiquu et IVloqucRri! (on,
comme nous (lirions; à présent» Tuiiuscientifique « Tautrelitté-
raires), c'est à la[ireiniètu que se rattache le pyrrhonisme. à lit
sei-omle ta nouvelle Aciuléitiie.
1 ' faut ojuuler «jm-' dam di'm uiilivs passuyi» assez obscurs pour iiuiis, ra|i-
poriés jBir Diujjém1 {\ S3), Tniiowcitt' IMcniurc, à c»lt> tin l'jrrlum et de Mi'tw-
itôiiin. foinmo Ml <li"î |ilii["SQ|itios ilnut Afcêsilas *V4 inspiré;''} itiiwl croil [luuvuir atlrilwpi- & Aici'silus ti's !ir|jiuin'(ils- q|ipo|t>s fyxswXvp-
fkévoi Au)o{ et <j4ip(tn( ^Sestus, J| Vit, /nu, ftiTt) el ivllu coujwluri» p»t assez
ïrai<<Miil)lah|i'. Tiinli'loi*. l'icii it.in<i h; li-vii' <ti>SVvlns n'iuilnpii.* <|ti<) <*•>» ai^jitnnniM
;i|>jiurti<'iiii>'itl • |nu|m' ;i AinWtiis. tt si-iuliti> mï-inc qtte l'arjfimicnt dit stirid* n'a
pu tUit»iciïu(|in'1([ii'iiprèsCliry<;ip|M>.
AftCfoHUS. m
CHAPITRE .1!.
h«;ksii.as.
Lps mnituis liisfiuguaioiil |jart«is j»ii«ju"i ftiiwj af'atJériiiés lt
<-eife île. Platon, celle d'Areésifas. celle de Carnéade et de i'.ïi-
totituque. celle du Piiifon i'l dif C'hiirmide. colle tf'Aiiliooltus,
Une traditionplus autorisée à
laquelle nous mais t'onfonne-
i-ons, n'endistingue que doux .-l'Ancienne et la Nouvelle, «elle
de Platon, et celle d'Arcésilns.
i/aticieime Académie «'«jouta rien d'essentiel à la doctrine
de Platon '• c|le se borna à la déveiopfw H à la commenter.
Spousipjie et XénocniUî; repremint une division de ht philo-sophie en trois
[larties, déjà indiijufc par Platon. s'»tf.i^H<rent
àexposer méthodiquement la pensée du maître, «ms'aidait! à la
fois de ses livres et des souvenirs de son enseignement; \i!»n-
crate peuclm davanlage vers lesmatliéinahcjues
et introduisit
nombre dVIéiiii'nts pythagoriciens dans le platonisme; i*aï«*-
iiion, Cratès, Crunlor. négligeant mipeu
lamétaphysique, s»«
préoccupèrent surtout de la morale. Mais le caractère commun
à Ions ces philosophes fut qu'ils s'efforcèrent de faire du plalo-uisitte ttn
corpsde doctrine, de
l'approprier à l'enseignement'1*.
;l> Sexto», P.. t, asti. i'.(. Vtiinvuius, ap. Kusi-K, Vrap. «rang., XIV, iv. il!.<» «;ir. Ite Orat., lt(, stm, (i7; Av., |, «». !,(n Ik Fi»., V, m, T. Vam.,
op. Auj'iisttn. Ilecir. Ipi, XIX, i, I).
('•Dïojî-. IV, i;€ic.f.. I, ,t,34.
"l Scil., U.l. i«.si Cir. Ae., t. iï, 17 -Snd iilriqu« i^rislolcics et Xenocralcsj. l'talonu
uburtali! rotii|)fefi, certttm qiwiml.uu (lisci|ilin.r fnrmutain composucrunl et «am
<|itiilcmptt'iiain ac rcferlam itlantaitti-raSncralicamtlnhilatiuitcitide omoibiisrelim. H null» atrirnialimi.- .iiibiliila » caunu-tiulinem di-.s<-ivnili rcliqiirriinl. lialacla i'sl, ijtmil ,Socral<-s nimrmi-
|imlwli.il. ai> (fiiatlmii |>ltito<u>|ilttic.ft i>tiiiii
ordo, et ili>5srri[ili« <li«i|iliiia;
10» MVRKft – tillA-ptTKB H".
Ott ne eliercKtttt(tltts, eut Ist vérité dtntf trouvée; «Ht*était tfnmt
taparole du maître; oh ne discutait plus-, on commentait.
La imiivcllt' Académie chungptt (otil cela. Elle déclara qu'ilfallait se remettra a ehorcher la .vérité, car il n'était |ias sûr
qu'elle fût trouvée; elle ajouta mômequ'on ne la trouverait
jamais. Par suites elle remit en honneur ta méthode dialectique,un
peu oubliéedepuis Socrate. Elle proclame, comme Swrate,
qu'ellene sait rien, elle
ajoute que cela nwime. nilo ne le
sait pas. Au eiopiatisme elle substitua une librecritique; cVst
piï cela(ju'elie fut muselle. L'»ulunr tncuntestti île celt« révo-
lution dans l'Acadi'niie fut ArrèàtaK.
l. Aiet'silasnaquit à Pitaiiu.en Éolîde. vers 315 5 av. J.-C. K.
\onu x MUl-nes av«c t'intention d'tUuciivr lailiétoricjuc il prit
{>oût à laphilosophie, et devint le disciple d'abord de TWo-
|)liraslei2). puis de Crantor'»', avec(lui il se lia d'une étroite
amitié, <tl(lui plus tard lui légua sa fortune !w. Dès sa jeunesse.
il donnait et belles espérances, etThéophrastc ne le vit quitter
son écolequ'avec les plus vifs regrets t;>). Après la mort de Croit-
lor, il entendit Polémon w et Craies <ï!. ef lullo fut l'impression
qu'il recul de leur enseignement, qu'il tes appelait des Dieux,
des débris de l'âge d'or'81. Il est probable, qu'il connut aussi
Pyrrhon, Diodore leniégariquc et Méné<tème{!>). Comme tous
les académiciens de sot> temps, i) avaitappris
lesmathématiques,
Dio|;i'np nous «piiroml (IV, Gi) (|tic Lacjdcs lui succèla dans la tpnlriimoaimén ik ta cent Imilc-<|u:i(ri«iiK>ol)iiiprado f-».'io »v, J.-<); rt d'nuln' jmrt(IV, 44), ((ti'il iiiouriil à i'ij>i> <[i- sijivurili.M|iriiiH' ans. lliogùiic se lrom|>(< pi-oltalifc-iucrI lurs(|u'itdit it'a|iivsA|)«R<Kiur<<,ifu'il f!uri$saitiliiiista cout vingtièmeiilyui-|iiadc ( agi» av. J.-C), car Arc&ihu n'aiirart on alors q»M>«tÎMiPiif ans.
Uio| IV, ft9.* lbi<l. Cf. Nu mon. «ji. Ktisch. toc. rit., v, !•>.1
t% !¥. -)â."
J)i«i;IV, So.
'• S«l.P., I. j«; (,ic.. De Orai., lit, uni, «7; At.i.,V, <«(, yfi /te., f
n, -i'i. Aujjusliu. A<1Dion, epi* 1(1; lùisch., /«<•, «i.,ï, u.''
Di», IV. :ii.
ftiiij;. IV, a».
Uiii»..IV.S»; Bits»* fcr. nf.; Sftl.. | :iS&.
AttUÉStUS. t«i t
d'abord avec .iHtolyMis' dans son pays, puis à Athènes, avec
Hippoimuts' II avait la Platon' et professa toujours pourlui ht
plus vivo admiration. La supériorité d'Areésilus était tel-
lement reconnue, même par ses condisciples, qu'après la mort
do Cmtès, Socratidesw s'effaça devant lut, et lui laissa la direc-
tion do IVSeole; it mourut, Agé do 7S ans, vers 360 av. L-tï.
Savie ne fut marquée d'aucun événement important. H resta
systématiquementa l'écurt des affaires
publiques,et taudis
queht plupart de ses
contemporains illustres couraient au-devant
d'Auti({one avec un servile empressement, il s« tint toujours sur
la réserve. Aussi, envoyé plus tard en ambassade auprès d'Àtitt-
jjoiw par sesconcitoyens, i{ échoua.
S'il fallait croire tous tescommérages de Dîogéno, Arcésilas
aurait été unpcrsonnajje fort peu estimable. 11 nVst presipji«
•»
question, dans le chapitre que le compilateur lui a consacré,
que d'orgies et de débauches; on l'appelle un nouvelAristipp;
nous voyons te successeur de Platon vivre publiquement avec
deux courtisanes, et ce sont ses amours les moinscoupables;
il n'est pas Jusqu'à son amitié avec le sage Crantorqui
n'ait
donné lieu h de méchantspropos. Il mourut, nous dit-on, pour
avoir trop bu. et it aurait rendu te dernier soupir en diva-
guant, et dans un hoquet. (Je sont au inoins des exagérations et
probablement des calomnies. Ses succès, comme ses doctrines,
lui avaient lait beaucoup d'ennemis: on l'a vu par ceque Timon
dit de lui, etPiularque
''•" nous assure qu'Kpicure était fort
jaloux de sagloire. Vraisemblablement, l'ennemi acimrné de
Zenon n'avait rien de l'austérité stoîeienne; il sepeut qu'il
ait
pris plaisir à se mettre, de toutes tes manières, «»noppositionavec son rival, et
qu'il ait eu pour le luxe et lYrléjjance plusde
};oûl qu'on n'en attend d'ordinaire d'unphilosophe; sa grande
lf Diojj.. !»<).
IM., 3-.» ltii,l.>:/W.-
Mr. '(.. -ii.
W* LIVHK II, – Ç1UIMTRK H.
fortune le lui |KU'ni«Mttil; tes mûmes«I» mn temps Fy invitaient
et sa morale ne le lui interdisait jras. C'était assexncut-ttro pur
itoiuier prise ù l« m;di{>Mté H à l'envie. MaisMutai-que. qui
parla souvent de lui. no lui adresse aucun reproche de co
|{t'tire; il cite dus roots «ti des actionsqui donnent d« lui «ne
tout autre i<k>«.Ktnous avons, pour nous éclairer sur cepoint-,
unti*moign»|{a précieux, celui dW adversaire, du stoïcien
Ciéjiirlii'.Quelqu'un aeeusait diwant lui Amkilas de ne
pasvivre hoiuitHeiucHl «<T«is-toi, ditCt«5atithe;w; si dans ses dis-
eoms ilsu|)|)riiue le dfvoir, il lu rétablît dans ses actions.»n
<»W :VrciSsil«seiicorscjui. voulant
avpli^uor pourquoi on quitte
i[in>Ii|iief(}is les autres socto [tour celle?- d'Êpicure, mais jamaistulle
ifKpieure pur les autres, disait « C'estque
dos hommesau fait des
wmmjuys, mais avec deseunuques on ne fait pas
des hommes. r>
Nous avons sur le caractère d'Arcdsilas des renseignements
(lui lui dunnenl une physionomie toute particulière. La plupartdes
(iliitosojàes de soit temps «taient pauvres, ou môme dé-
{{ucnillés. ce qui «fe un peu de leur valeur à leurs théories sur
lemépris (les richesses. Arcésilus. tui contraire, était riche; et
pour t'honneiir de la philosophie, «11 est heureux (levoir qu'il
sul. sans ostentation et sans faste, mais au contraire avec une
aitttatd*siiiijilrciU1. fair<! d« sa fortune le plus noble usage. Un
(li-s ikhiiIiii'iivtraits qui nous sont. rii|>p»r(és montre avec
quellebonne |{nW cl
quelle exquise discrétion il répandait ses bien-
faits. Il avait appris qu'Apelle de C'hios était malade et se trou-
vait dans leplus complet déiiuettifiitl; il vint le voir, et lui dit
«Oh lie voit iciqn« les quatre ûlttateiits «l'Empédode.. du feu.
île IVau, delà |.«rre <•(de l'air. Kl loi-ini1tn< lu n'es pas bien
conclu:.Puis arrangeant son coussin il ({lissadessous une bour»;
qui couti'oaitviHjjt iliaclimes Sans dont. il était (-outumier
dit f;tit: car. quand la femmequi servait Apelle fui apprit sa
IM«b-. Vit, 17t.1.
lli..l;IV, 'l!.
!iil.. Ile mkl..1 .m». \\l|. t. Ct. l>i«.». |V..1^.
,tituÉsti.4s. 103
!t!lui.éf dit ên .riaE~€ '<t~tMttt tilt ttmf <t'4r<<<!si(a). )ttrouvaille» cetui-ci dit en ptaat î Voila tut iuut* u nrééstlaii. »
On l'acoitfii aussique
son maître deuiutUéitiatiquos Hipponi-
eus, étant devenu fou, il te prit ches lui et te soigna jusqu'à
complète |;iii'"i'isKii.
Arcésilas avait une grande droiture do caractère. Bienqu'il
fui en guerre ouverte avec les stoïciens, il interdit l'entrée de
son école à un certain Battus qui s'était moqué de Cléanthe
((uns une comédie, et il un se reconcilia avec lui que quuud if
eut donné* satisfaction à Cléanlhe 'l!; Ses sentiments «'aviiient
lieu do mesquin et d'exclusif; bien qu'il fût très friand «le popu-
larité, il engageait sespropres
élèves « suivre tes leçons dos
autresphilosophes
ini-méim»en conduisit unaaprès du péri-
patéticien Hî^ronyinc a': II paraJl avoir exercé une grande in-
fluence sur les jeunes {jens qui -se [«ressaient autour de lui, bien
qu'il ne leur méiiageiU pastes
réprimandes et t.(i\fsouvent poureux des mots durs'
Tous lestémoignages s'accordent à rendre hommage ait mer-
veilleux talent «l'Arcésilas. Familier dès l'enfance avec Homère
et l'indarft. il futpoète
à ses heures^ etciuuposu quelques épi-
gramincs. Cicéron iJ nousparle
de la grâce exquisede ses dis-
cours. et c'est {'orateur autant que le philosophe qu'il admire
en lui. Plusieurs rnuts qu'où cite de lui attestent la finesse et
tapromptitude de son esprit. H fut d'ailleurs servi « souhait
par les circonstances, et les adversaires qu'il eut Il combattre
étaient les plus propresà faire ressortir, par le contraste, les
brillantes qualités dont il était doué. C'est contre les stoïciens
qu'il ne cessa tir lutter, et il semble s'être donné pour fàclie de
harceler sans cesse Zéuutt an (.itium. s«n anciencompagnon
aux leçons de Polénwn. Lotinls et ciiiIkiit»s*s dans leurs for-
mules sèches et arides. inhabiles, malgré leur subtilité, mis fi-
nesses de la dialectique, jçénés par leur gravité et Jour sérietiv par
l'Iul.. /to M. <•(mm* \|, .If».
« IV. 'i!.
Vml.. :(«.
1.!< 11. >l. tfï: lh- finit.. Ht. «Ht. (r;.
wt uvrk n. – nutvnmi it.IV l M V IUV II. – <#IIA t'I I lit1, il.
toutes h«»s tguott&s qui i«i grand juttr-cfes disenssiotts publtipresse tournaient en défauts, les stoïciens étaient décmnwtés
parcette
éloquence agilocl «Hée, tour à tour
ironique,subtile oh
ciiipoi-
tét\ toujours brillante, qui bourdonnait à leurs ort'illus, les al la-
quai! sur tous les (lointsà la luis, tes irritait Jourôtait tout sttnjf-
froid, et suvaittoujours,
vlwseiui|)Or!aiito à Athènes mettre les
railleurs du sou cùlii tt.|,eur iiiusu, dit un anciiM^ ii'uvaitpas
!»•soerotdu beau laii({a|jc. ut iguorait les {jruees. » Leui* embur-
ras était d'autantplus gr»mt, qu'ils n'avaient point de prise sur
un adversaire qui luisait profession donc rien affirmer, se déro-
bait, leur .glissait entre tes nrains, cliaqucfuisqu'its croyaient le
saisir» et savait connue eus fantômes inalfaîsatitsqu'on ajipe-
latt les oni|)uuw.'s, |irettdre itiilte formes diltereutes. Us en étniont
réduits, fnuttt de savoir par où prendre Arcésilas, àinjurier
Walon» qui était mort; et ils paraissent s'êtreaet|uiUvs de
«î
soin avec conscience. Dans lastupeur
de ses adversaires, dans
l'enthousiasme de sespartisans,
la victoire d'Arcésilas fut com-
plète.Les Athéniens étaient sous le charme, car il tous ses «Ions
•iratoircs leurphilosophe joignait tous les avantages physiques:
la beauté de sun visage le feu de ses yeux, le charme de sa
voix enlevaient tous les suffrages. On en était arrivé à cepoint,
nous dit Numéuius, qui a tracé de ces luttes oratoires un
tableau vif et animé,qu'il n'y
avaitpas
uneparole» pas
un sen-
timent, pas une action, si iusi|;i)ilianle qu'ellefùl. qu'on se
permît d'approuver, sitel n'était pas t'avis d'Arcésilas de l'itane.
Jamais, nous disent d'autres écrivains (". aucun orateur ne f«l
plus populaire,et ne laissa, après
sa mort, deplus
unanimes
rejjivls.
II. Arcésilas n'a rien écrit ;i|: (ontce que
nous savons <l«
\cini..i|i. Kiiscli.. Inc. ni. ,XtV. vi, l'i.
Muni.. '«. ril. XtV. ïi ii.
• Unit., vi, X
tli»; IV. 'l'i Xsoii/fUu o(^/s À'/iiiitui' nitU.
Ilin; IV..ic l'Iut.. />c .l/cr. iiidilr. l. iï.
AROÊSILAS. J05
positif sur sa doelrMio se réduit assez peu de chose. Nous eon-
iKiissuns seulementlu point précis dit long et retentissant débat
qu'il «ri avec Zèiou et les stoïciens; il est vraique ce point est
d'une importance capitale et <jue, ni ArcéVtlas a gain de cause,
c'en est Fuit de tout le stoïcisme.
A partir d'Aristole01, une des questions les plus discutées
dans toutes les écoles, aussi bien par les épicuriens que par les
stoïciens. les sceptiques ou les académiciens, est eelle du crité-
rium de -la vérité. Zenon trouvait ce criterium dans ce qu'il ap-
pelait la représentation compréhensive (fywm&t* xtttahmitxtfy.Parmi nos diverses
représentations, il e» estqui font sur nous
uneimpression si
purlicutière, si netfe et si précise, qui se
;«rawnl si vivonienl dans l'âme, iju'il estimpossible de les con-
fondre*- avec les autres et qu'elles portent en elfes-in&iiès le
tétnoijjuii{{e de la vérité de leur objet elles le font connaître en
inéttH;temps «ju'elle* sont elies-iuônws connues «m d'autres
ternies, elles sont vraies. Cesreprésentations forment le premier
degré de la connaissance, (lue Zenoncomparait a la main
ouverte w. En m&iie(etups qu'elles se produisent, elles provo-
quent dans la partie supérieure de l'âme, en raison me*nie de
leur clarté et de leur force, un assentiment{myxoniOsirts) qui
est comme une réponse au clioe venu du dehors. Cet acte,
«'•mané de l'initiative de l'âme, dépend de la volonté, mais ne
manque jamais de se produire quand lïinte éprouve une repré-sentation vraie ;i). C'est le second degré de la connaissance,
comparé par Xénon à la main légèrement fermée. Vient ensuite
lacompréhension (xarâXn^te), comparée au poing, puis
la
science, assimile nu poing fermé et fortement maintenu parl'autre main.
Cesprincipes posés, Zenon établissait'1 que le sage cesserait
Voir Itavai&oii, fc'mii sur litinrlitjikijtiijiw ttAnttnle, 1. Il, Il. («7.
t'icint. Pliil., Ih i/litc. jihilus., IV. »•! V.vismvlttsvtiv éivrû Te xcù là ae-
T.rtfix~t.
(m.. Av.. 11. xlkii, i'i.'i.
"•«'»• .le. H, xii, :!>-.
Die. /Ir.. H, <\tv. 77; w. (Ki; wi.'»7:S«t., .M.. VU. tUS .1 »/.
l(MÏ L1VRK rt CtlAPItRK II.
de mérite»* suit nont s'il lut arrivaitjamais
de (tonner son assen-
timent à desreprésentations qui
no seraientpas coinprélionsivcs
il ne le donne «(«'àlu vérité
il n'a point d'opinions, il n'a quo
des certitudes.
'Joule cette théorie de la seieiice,«t parsuite toute fa morale.
v repose sur lareprésentation eompréhonùva, qui
est réellement,
et j\ die seule, le critérium de lu vérité. Si onta supprime, n'y
aplus
decompréhension, parlant plus
de science. C'est bien là
le nœud vital dusystème, (l'est là
«p/Areéstlas?, en tacticien
avisé, porta sescoups
lesplus
rudes.
Il nia d'abordque t'asscrif itnont 'pttisso iHrc donmî â de
simples
représentations ;t(;<m ne
l'accorde, suivant lui, qu'à desjuge-
tneuls(a&<y!i*Ta (.C'està peu près
ceque
nous disons aujourd'hui
en aUtnnantqu'il n'y
a de. vérité ou d'erreurque
dans lejuge-
nient, filais cen'était pas l'argument principal
de sa rél'u-
lalion.
Iladmettait pleinement la déduction de Zenon le
sage, s'il
mérite son nom. n'apas d'opinions,
mais des certitudes. Seule-
ment iln'y
«pas de certitude on de science, car il
n'ya
pasde
représentation rompréltensive. Par suite, leseul parti qui
reste
au sage, c'est de ne rien nilirmer ou de suspendre son jugement.
Areésilas abonde flans le sens- de Zenon, maispour
ramener
pinssArcuienl. à son
scepticisme. Il veut l'enfermer dans ce
dilemme ou le sage a desopinions,
ou il ne doit rien affirmer.
Lapremière proposition, qui
nous sembleaujourd'hui fort accep-
table et(pte
Oarnéade admettra, nepouvait
à aucunprix
être
accordéepar
Zenon il est contradictoire à sesyeux que
le
sape ou le mvantpuisse ne
passarair en
qu'ilnlltnne. Il faudra
donc prendrele
second parti, Faute de eertitudo absolue, hsage
renoncera àtonte croyance. Cette abdication vaut mieux
qu'une
concession c'est la doclrim; du tout ou rien.
Voici maintenant comment Arcésilasprouvait qu'il n'v
apas
dereprésentation (-ompréhensive. La définiti»n stoïcienne admet
SmcI.M-, VII. i.V'i II nyitiiitts<iif ai -apùt Çwmotxv ylvevii, wit>p«>A'~ yin .¿e'(r1!J'¡'t~!t.~?H' œi ~V~JC~T~f~.
AKCÎÉSH.AS. t»7
e*plicit<miéntfl> qu'une représentation vraie diffèrespëeîflque-
nu'ul dvs autres représentations, commetesserpents à cornes
dilii-ront des autres serpents, hes premières sontproduites par
cequi est, de telle façon qu'elles ne sauraient é*frc produites
sernblablernent par ce qui n'est pas f2!. Or, en fait, disait Ar-
eésilus, Cette différencespécifique n'existe pas, car des objets
qui ne sont pas font sur nous des impressions aussi nettes et
aussi expresses que ceux qui sont. ÎVous n'avonsaucun moyen,
lorsqu'une représentation seproduit,
dfdistinguer si elle est
eompréhensive ou non. si elle a un objet ou n'estqu'un fantôme.
Il n'y a donc!pas de criterium de la vérité.
H ne nous est pas permis d'attribuer à Arcésilns tous les déve-
loppements que les académiciens donnèrent plus tard h cet ar-
gument et tous les exemples qu'ils invoquèrent, car ils ne sont
pas expressément mis à son compte par les textes. H est bien
probable cependant (pie, pour montrer qu'il n'y a pas de diffé-
rence spécifique, entre les représentations vraies et les fausses, il
invoquait déjà les erreurs des sens, les illusions dit rêve, de
t'ivresse. de la folie i31. Et il est aisé de deviner quel parti un
dialecticien habile et spirituel pouvait tirer de tous ces faits
pour tourner en ridicule le dogmatisme stoïcien.
Il concluait que ni les sens ni la raison ne peuvent atteindre
la vérité'*5. H faut se souvenir ici que, par raison les philosophesih ce
temps n'entendent plus la faculté de connaître l'absolu
comme Platon et Arislote. mais seulement le raisonnement, quitire des conséquences des données sensibles et s'élève de ce
qui
Sp\I., W., \Ut 'ii YÀyJ ri r«fwîoi<t5iwpi j\ toisvtii ^wraoiai siaroi tis
<i/^(K Çatnaoiif xtOixsp m *fp*j7ï« -aipà rois iXÀovf SiÇus.
Cic, .le, tt, ri, j*4 tVisimi iin|irrainn elttdiinu|Up irx oo, midi* ossel,
i|na|p pss* non |iossi>l i>vm, tnult* non t-s<p| i<J nos a Zirtom- ilcluiitiiin rerti»itne
ilifiiims. Cf. ibU., tut. HvxL..1/ V|tv a'i8, io-»; P. Il, 4; IW.
ï|l,4(».<1( O<l du im.iiK t-,
ipi'im j1Cn| riiiijiYiiirin" iI'^hv* le pas.saj[e il>! Si'itus
M.. M\, t.i'iî: UCZipii nain j/.hÎik ^vriii tvpi'ïxetai wi aux ii> yltonu~ltJJ1i,. M< 'M t!0~/4't'Xtt~)(~.Mt< 1i1Jp¿'J7-2U'.
'•I • Dei.nit., Ht. um,
108 livre Il. l.
ust visible « ce tj«i a» Peslpas. Contester les- doimées êtes sens.
celait donc du indiuecoup mettre lu raison on interdit.
Bu lia «lecompte, il n'y a
rien que l'iiomme puisse percevoir,rien
qu'il puisse comprendre, rienqu'il puisse savoir. Tout «si
enveloppé de ténèbres. Hien no serait moins digne1 d'un sage que4* devancer
pardes affirmation» téméraires ta certitude
qui lui
manque: il doit s'abtentr et clouter toujours. Far suite"1, Areé-
silas passait ses journées à combattre toutesfa» assertions, dogma-
tiques, et ilapportait djms ces discassions u&e subtilité et une
obstinationque rien ne lassait W.
Outre, cesattaqua contre la théorie de la connaissance des
stoïciens, il estprobable qu'Areésïlas s'est plus d'une Ibis égayé
auxdépens de leur physique et do leur
théologie. C'est ce qu'on
peut conjecturer d'après uu passage de Plu turque M Arcésilas,
|)our se tno(|uer d« la formule stoïcienne suivantfaquelie un
corps qui se mélo à un autrecorps te pénètre dans toutes ses
parties (xpdcrets St' 'âku»), disait que, si ou coupe une jambe et
si on la jette à la mer, où elle sedécomposera Hotte d'Antifjone
ou celle de Xurxès pourront naviguer dansune jambe. De môme,
quand Tertuflien '•' nous dit qu'Arc&iuu distinguait trois sortes
de dieux, it est vraisemblable qu'il s'agit d'une critique de la
théologie stoïcienne; niais nous n'avons sur cepoint que des
renseignements tout à fait insuffisants.
Cependant une grave difficulté se présentait que faire et
comment vivre, si on ne croit à rien, si on nit pas d'idées arrê-
tées sur le bien et sur le mal, sur cetjttt est utile ou nuisible ?1
Il semble, en effet, que lasuspension du jugement doive en-
traîner tasuspension de l'action,
et qu'étant incertain dans ses
opinions, «n ne puisse é"tre qu'irrésolu dans sa conduite l'une
de ces abdications entraîne t'autre. Mais. d'un autre côté, Pinae-
& /te., I, tu, 45.
'« Cic.i&ûf.'•"
Mr. (,'ntit., -ii;.
'• M nnlimi.. Il, >.
109
tYerritr~ifnnhe~cf~e~~eery~~E :a.t:f.f, t_ t_I i«i»et Pimmohifité absolues sontincompatibles avec les tendances
les plus naturelles d« l'homme t-t les exigence» fes pl«s pres-santes île la vie. On
ne fieirt évifei' de se prononcer sur les cli«w»de In vie
pratique, et refuser de se décider, ce serait encore sedérider. Une philosophie (|tii aurait recommandé à ses
adeptesde (iemeurer incertains et irrésolus, de se laisser prier par
les
«Wénements, comme les feuilles mortes sont le jouet du vent, téfntt d avance vouée au ridicule moins que {iersonne, des Grecs,des Aihémens ne pouvaient s'en eonlenter. f)'ail{eurs, au tempstl'Arcdsilas, ce
qu'on demandait avant tout à luphilosophie
c était une règlede conduite hquestion n était pas de savoir
s'il faut agir, mais couraient il faut »j»ir. C'était là le but et laraison d'être des
systèmes talogique et lit
physique n'étaientque le vestibule de la morale.
Onjiouvait.à la rigueur, sepasser
du vestibule, pourvu qu'on eût l'essentiel, mais renoncer à la
morale, c'était renoncera laphilosophie.
C'est ici que les stoïciens attendaient Arcésilas et que vrai-semblablement ils
reprenaient l'avantage. Ils tenaient en réserve,comme ultima ratia, un
argument qui devait décider de fa victoireen leur faveur, alors mène
que leur défense obstinée de la
représentation compréhensive n aurait pas satisfait tout le monde.
L'action, disaient-ils, et à plus forte raison la vertu, sont impos-sibles à qui n'a point de croyances. La sensation et l'instinct ne
suHisent pas à la vie de l'homme.Agir, c'est se décider. Quel
homme se décidera sans savoir si leparti qu'il prend est conve-
nable ou non à sa nature.avantageux ou nuisible, bon ow
mauvais? Cicéron ;"y lorsqu'il faitparler les stoïciens, insiste
sur cet argument, etRtilarque nous
apprendque les stoïciens s'en servaient connue d'un épouvantai! dont ils
menaçaient leurs adversairessceptiques.
Nous ne pouvons, n lit vérité, allirinerqu'au temps d'Aivé-
sikix ils avaient donné à cette argumentation tout !<•développe-
.(<• Il, »ll. ri:'ri m/ jii,
."ty.
WAit». C«tnt.t>.
fîf> LIVBH Ifc – MMFITKK fi.
ment qtreilii; eut |»ks fiu'il. Mais il parait iai possible ([un ((esraisons si
simples ut si légitimes ne se su i nul (ias présentées de
bonne heure a leur esjicit i;. lui tout cas, Areisilos ne pouvuit
inam|(ier d'avoir à sV\|jii([U(T sur in manière dont il convient
d'agir, et voici comment il su tirait (le cette diiticutié.
Il avouaitque
lit vie|>taticjui* exige un eritenum, et «» mte-
l'ium il le trouvait dans le raisonnable(evXoyov).
H formulait
mpensée
à la manière stoïcienne, dans un sorite le but
suprême4e la vie est le bonheur, le bonheur a pour condition
litprudeuee ( Çpômimf)
laprudence
consiste à faire sua devoir
(xaTipOwia) h devoir est une m'tiun qu'un pt'itf expliquerrai-
.soHunblftment ( etfÀoyot')
Qu'est-ce iiiaintenanl que cet eûloyou dont Arcésitas l'ait le
critérium do la conduite pratique'' Tous les historiens l'ont
jusqu'ici runfoii(tii avec le nnQavlv (le Caméade et ont désijjné
l'un et l'autre indilféreniment jrar les mots de vraisemblable et de
probable. Mais Iliraol' dans un des meilleursrliapitrcs.de
la
belle étudequ'il
a consacrée an scepticisme ancien, a montré
qu'il y it une différence, notable entre les significations de ces
deux termes.
D'abord il n«us est cxprvssûmctit attesté fju*Arcésilasreje-tait le probable (ai0av6v}; suivant lui. aucune représentation ne
l'emporlu sur une autre au point,de vue de ta créance qu'elle
mérite r'J. C'est assez arbitrairement que quelques historiens ont
tenu le témoignage de Numénius pour non avenu. D'autre part,
('' Onvoit, par nu passaguîle]l'tiilai(|iie ( /li/t. &,lai,, :ii)\, que,suivait! les
aradi-niioipii*, Ciiislinct (spuA) pi'iit ta jinitci' de tui-uu!me à l'artioii et n'a |«»
liesoiit «te l'açsi'ntHiiciil (avfxvtiOems) donné À la son*ilion. D'aulro pari, nous
savons tPlul., Si. n>;> MA'II, m) ijiib OirysipfiR sunlcnail te contraire. C'est
|mit-i;lre contre bi Iliiorie d'Aiwila» <)i>W ilirijjëB l'olijcoliidi de riiry.i|)|Ki.-•
Seit.M., VU, i5H.
Oji. cil., i5o. A P»p|>ui île rctle tluV*», on pourrai! si(jnalw les criliqum que
(iarni'ade, rf'ajirès Pliiliinfii» ilk rum. tmlil., WVII, t.r>), ;i diriges contrr; la
llirâric ttoieioiiiio ife la tHAywTiat èxïoyn. (Voir li-di-ssom, |). «57.) p
Nmni'li. np. KiiscIj. l'mp. evaiif; XIV, vi, 5 kvtupaûvxit x« aùxàu 10
ibii$ist uni xà foÇ&ot, nni 10 nnfapoV.
M S«*xL, I, s^îï Oiie xntà twV'ii» A imo'iiw vftanpivst ti Hçyw érepov.
AKtiÉSlLAS.m 1
uuwi.voyons qui» k* stoïciens»! faisaient une djffifntt»eftfn
mOwé» et etXeyw. le -aiOavh est défini •. <££,«Matj fyw siscnyxotéletn», «t Je f&qw ^/«^ Tè ^/wb-
«tygppfc j^ïfe rè «Aij&ls ehoet. Si le «<§«»/& conduit à
l'assentiment Arcé-silas était
conséquent avec lui-mène en le repoussant. JJpouvait,au point de vue pratique, «Intel!» le tfo07w eomme
équivalentde ta vérité.
D'ailleurs, le eShyw d'Arcésilas ne se confondpas avec k>
mfavàp de Caméade. l*as une fois le mot dkoyw n'estcibbIov*
pur Sextuslorsqu'il cxpom les théories de Carnéade. De
plus.pour Curnuade «w;
représentation isoléepeut. en raison de sa
forci, et de sa vivacité <», êtreappelée «lOaW; il est clair
.jue |p
sfàoyo» suppose une pluialité dereprésentations l>ien lifes entre
elles. Il est vraique Carnéade, comme on Je verra plus loin no
se contente pas de ce premier caractère, etexige en outre t|ue
la Çcnravia soit émplancoriot et *,ep,oS$vnifvn et ici, i| est
évident que la mison intervient <«. Mais elle intervient d'uneautre manière
«pie chez ,4rcésilas. Chez ce dernier, c'est de laraison seule que dépend la vraisembliuiœ; chez, le
premier, la
probabilité des re|jn>sen(atk>ns ne vient({«.; pmn- une
part d<'lu raison; sa véritable source «st
l'expérience la raison ne fait
guère qu'exercer un contrôle. Il faut donc faire une distindioi,entre les doux termes pour Arcésilas. c'est le
raisftnnabfe fpfiest le critérium
pratique <le la conduite: pour Carnéade. c'est If-
probable. Si on persiste à désigner laphilosophie de la nou-
velle Académie sous le non», d'ailleurs assez mal choisi de probn-bilimne
(car ce mol était employé au xvrr*siècle avec une signi-fication bien
différente), c'est seulement àpartir de Carnéâd,-
<|uo ce mol trouvera son application légitime.Le raisonnable
pour Arcésilas désignait dont- dos actionsqu'on
»io(! Vit. 75. ,li.Sr.it.U., VH. il>(»-17i.
s) (iintrairem.MiI ô IIirrI, il nous semble <(«f c'ml la raisonqui juw s'il nyy» pas amlmliclion cnlnt «fccras npKmmiam ,«i ««oiHiliIBn«rt>c..Hcqui«* ™
question. M«iS «reste vrai, comme il Umowlrê..|ue lit «,“«>. &> ta pro-
liiilnllt« wt •'ssi!iitn>lleineiil ilans la ilonnw' sensible.
1t4 UVIMÎ ». – (UIA14TKB ».
pr~ut,~ustitïet:ptt.t e~cltettttes tai~a~tr4.trliti t" ttt~trttr ttént r~atrdrus. I.t
formant un ensemble bien lié. Cesl une uk*t'. stoïcienne, wiiimw
lit forme de raisonnement adoptée parArcpsilus. Do môme aussi
te mot HtnipOwfna est fréquemment usité «tans la teroiiiwtojfk*
stoïcienne. De tans ces faits it semble résulter qu'a» moins en
inuvale les stoïciens avaient arraché à leur redoutable adversaire
<rtnj[ioi*laiîtt'sconcessions. il no
paraît pis d'ailleurs qu'Aret!-
silas se soit étendu volontiers sur les questions de cet ordre
car Gieéron ne mentionne pas une seule fois ses opinionssut*
cet important sujet. (n va de soi (lue malgré ces concessions au stoïcisme, Arci'1-
rsilas ne peut pas plus être considéré comme un ilogrnatiste jjui* tles
pyrrlioniens eux-mêmes; car ees derniers reconnaissaient I
aussi un criterium pratique. D'iiilionrs, comme il ne s'agît ici <
(jueJe l'accord subjectif des
représentations, Arcésilas continue
à ne rien affirmer hors de lui.
Il y a pourtant ((tioltjues diilercnces entre le fondateur de la
nouvelle Académie et les pyrrltonicns. D'abord Arcésilas n'assi-
gnait pas pour fin dernière de la conduito l'adiaphorie ni l'ala-
ra.xie; il s'en tenait lasuspension du jugement; Sex.tus(1)
fnarque
jissoz nettement cette difterence. En outre, tandisque
les purs
pyrrlioniens demandaient a ta raison une entière abdication, cl
se soumettaient aveuglément à la coutume et aux lois établies,
Arcésitas prend la raison pour juge enchaque cas particulier;
par lu, on peut direqu'il
s'élève fort au-dessus dupyirlionismfi:
il garde quelque chose (te la traditionsocratique
et platoni-
cienne, Il est au total aussi sceptique que Timon; mais son
scepticisme est celui d'un homme instruit et éclairé il reste phi-
losophe dans le scepticisme, au lieu que les purs pyrrlioniens
renonçaient jusqu'aunon» de philosophes.
111. Jusqu'ici, rien dans les doctrines d'Arcésilas suuf te
dernier point que nous venons d'indiquer, m- peut nous faire
t·i I' U*.t-t Kai séi~na fOi.. sivst T))y dao~»v. » avveto£~r;~ez7~t 7lip 4T«P'ZFJQI'
ijueïf iïimopzv.
viiefisfus. m
R
,LI~U'U'
M»mprniHtr« pourquoi il apris> «t pourquoi \m mmww lui «ut
conservé le nom d'académicien. Ko quoi est-il k continuateur
àde Platon? il !'est de deux manières-, d'abord, l'Jaton aimait à
employer des formules dubitatives, et on sait- avecquelle d<?-
tianœ, voisine duscepticisme, Stierute
pariait des théoriesphy-
siques, A tort ou à raison, Arcésilns et les nouveau* acadé-
miciens, art poussant h doute jusqu'à ses dernières limites»
pouvaient se croire fidèles aux idées du maître. Sur ce point, Jmj
témoignages abondent Cieéron regarde toujours la nouvelle
Académie comme la (ille légitime de l'ancienne. Mais c'ust sur-tout
par sa méthode, pat samanière d'enseigner et de
parlerqu'Arcésilas s'est montré véritable académicien. Les anciens
attachaient peut-être plus d'importance ces formes extérieures
qu'au fond des choses, etpour mériter le non» d'académicien,
il suflisait i leursveux de parler comme les académiciens.
Voici continentprocédait Arcésilas. Il attendait qu'un inter-
locuteur vint exprimer devant lui son sentiment surquelque
point; en général, if n'aimaitpas qu'on lui adressât des ques-
tions il faisait parler les autres. Mais, quelle qun fut la thèse
exposée, ilentreprenait aussitôt de ta réfuter. l*ar exemple"
fin lui disait le plaisir est le souverain bien (souvent même onle disait sans le penser, uniquement pour lui donner l'occasionde parler» et le mettre en train), et il discourait sur ce.
sujet.De là sans doute une grande variété de discours. Il faut bien
qu'Arcésilns ait traité de la sorte un grand nombre desujets;
car il neparait pas que les thèses négatives que nous venons
de résumer aient pu suffire à son activitéphilosophique et ora-
toire. C'est ainsique, comme Socrate, il interrogeait et répon-
dait. Comme Socrate aussi, il traitait tous les sujets qui sepré-
sentaient, suivant le hasard des rencontres etl'inspiration dit
moment. Voilàpourquoi Cieéron nous dit qti'Arcésilas avait
repris les «sages de l'Académie, depuis longtemps tombés en
désuétude. Cequ'il ne dit pas, c'est que, selon toute vraisem-
('»Cic, Fin., Il, i, l),th;<t., III. tmi, f,7; l)r Xal. /»«. I. v, n.
IU WVJtKII.- -tîlMI'tTftE ».
tthumv, tt y avait itijtvt* Ai'césîJas el 'Sacrale «te protondés tttffi'1-
ronces. Sceptique et irrésolu seulement en apparence, Socrato,
à Iravors fous tes détours du ses questions, ne perdait jamais de
vue io but moral tjti'i! poursuivaitil avait des
pointsde repère,
des idées arrêtées, qui donnaient à ses discours un sérieux et
une élévationque
n'uni pasmunue ses
disciple* dégénérés, Kn
outre, Socntte seproposait
moins debriller que
d'instruire, «I ii
est permis df penser que sur tant do sujets nouveaux un amk'ii.v.
imjH'évfiisou attendus. Areésilas rherebuil surtout IWasion
(f'r'tnk'r les jjràces de son esprit et de faire valoir les ressmui'es~t
de su iliak!t(i([iic.
En résumé, ni dans tes idées d'Arcésîlas. ni dans la méthodee
qu'il mit à teur servii-e, nous no trottons une grande originalité. s
Ses rivaux, lipieuri* surtout, le fui ontreproché plus
d'une t
lois: ils l'accusaient de ne rien dire de nouveau, et de jeter rie
la poudre aux yeux îles ijfiioiaiits. An-ésilas en convenait de
Iwnne {;n*ice; i! se flallail seulement de suivre l'exemple deSo-
••rate. de Platon et de Pannénide, et it s'abritait derrière l'au-
torité de ws grands noms.
ii
IV. Il n'est pas facile, même après qu'ona réuni tout «e
((
qu(! nous pouvons savoir d'.Areéstlas du se faire «ne itlée nette i
de ce personnage, el de porter un jugement d'enseuilile sur son i;
enseignement. Ksl-ee un penseur sérieux, on seulement un tlts- i
coureur habile à ce jeu de la dialectique qu'il appelait lui- mène
un art d'escamotage %? Est-il sincère mi son scepticisme, ou
sceptiquemême à l'égard de son scepticisme?
Ksl-ce un pliilo-
soj)l»e on nu sophiste?
F^es anciens se trouvaient déjà dans le inètne embarras ait
nuiis sommes, et d« bonne heure les avis ont été partagésà
l'éjjard du fondateur de la nouvelle Académie. On ri» fait par-
fois, un dojjnmtisle honteux on le supposait au fond plus plu- t
tnnii:i«Mi qu'ilne voulait le paraître:
dans son l'or intérieur, il l'
l't-H.Mr. t:t»t.. «f,; Ct. «:ir.. > tl. v. l'i.
Si..ti.. FM., IAWII. 'i.
WtëSfUS. flf,
K.
ituntit liityoHCKle»»» (Hun- les dogmes du maître '(font if conser-
vait ostensiblement l;i tradition, et son scepticisme n'aurait été
qu'une sorte de contenance«|if*ïl
s» donnait, en untemps pu
propice aux spéculations imttapbvgiqui's. Sextus fc'mpirkus après
avoir dit lti en sonpropre non» qu'il l« regarde eouwue à peu
près jivii'lionicii, ajoute que suivant quelques-uns, tes argu-ments
st'uptupes lui servaient seulement depierre de touche
pour éprouver ses disciples s'it leur trouvait tes qualités d'esprit
requises pour comprendre la doctrine du maître, il tes ittitiait
il ses dogmes. Suivant Diodes de Cnide"i!, c'étaitpar crainte
desdisciples do Tfiéudore et de Bion. ennemis acharnés de
tout dogmatisme, capables de ne reculer devant rien. qu'Arcé-silas, afin de conserver son
repos, avait feint df ne croire ;Vrien;
son doute était, comme l'encrequi' jette la sépîa
autour d'elle, et
qui ht protège. Elest vrai que JVumwmis, qui rapporte ce témoi-
gnage, ajoute aussitôt qu'il ne le croitpas
exact.
Un textebeaucoup plus important
est celui où (licéron^1 fait
allusion à un enseignement ésolériquede la nouvelle Académie.
tt y avait, semble-f-il. desmystères dont la eoiuiaissaiice était
réservée aux initiés; t-Vsf afin d'atteindre ta vérité que les aca-
démiciens défendaient et combattaient tour à tour toutes les
opinions.
La traditionqui
attribuait aux nouveaux académiciens des
pensées de derrière la tètepersista longtemps; nous en trouvons
encore «n écho riiez saint Augustin Arcésilas, suivant saint
Augustin, voyant lo stoïcisme gagner de proche en proche, et
la foule disposée à croire que Pitons est mortelle, que tout, y
compris Dieu, est matériel, aurait désespéré de la ramènerala
vérité, faute de mieux, il se sentit contenté, ne pouvant t'itt-
"> I. »3.'i.
Xliro.;i[). Kiwli.. Inc. cit., Il, (i. (X rill,
;vl.-le, il, «vin, (Su -Italiil illuit, «|cum{ tlicuut. veti inveuiriwii causii «mlrit
onmia«liri o|iortiTe, et pntoinuibu».Volof|;ilitr virfotvi|niil invueriiil.N!«uwi-
him», inipiil. ostonlew. Quœsunl lamfortisla mysleriti «nieut rc[;i(îs,quasitiirft^alii|iiiii.senltmliiiin««itraïuïn
!l> (Mit. Armlmiit:. I, un, IW. Cf. Ail l)im,;epitl.. tli.
\U UVRE If. – «H APHr'RK H.t.
s-U'ttirt*, de ht désabuser, et A«stfiminpoi
il se serait attacha à
Latin1 i'n brèche le dogmatismesensuulisle des stoïciens; les
ei-uyaua'sdo l'Académie éttiit'iit comme un trésor, qu'il
avait
enfoui, et qu'endes
b*m|is meilleurs, ta|»ost**ritt'*sunratt re-
trouver.
De nos jours, Getîers u) a soutenu ingénieusement la mente
opinionArcéstlas aurait mérita! pleinement son nom d'acadé-
micien. i't serait luujours, au fond du cœur, demeuré fidèt« à
Platon..
H fiiul convenir (|tnl y a là une dilticulté oinbaiTassaitte; le
texte de CWroi» surtoutpeut
donner fort àpenser.
Nous ne
croyons pastoutefois
qu'ondoive s'arrêter à ce soupçon de dog-
matisme ôsotéricjuo, que nous verrons reparaître k proposde e
chacun des nouveaux académiciens. t
L'assertion de Diodes de (Inide est bien invraisemblable et ]
î\ mm;riius avait bien raison de n'y pas croire, comment ad-
mettre qu'un dialecticien hardi et sur de lui, comme Arcésilas,
ait tremblé devant des adversaires très inférieurs, etn'ait pas
osé
dire toute sapensée?
Y
It faut aussi écarter ie témoignage de saint Augustin; nous1
voyonsen effet
parun
passageformel du Contra atadmitos® f
qu'il s'agit ici d'une conjecturetoute personnelle, d'une explica-
,1
tionque
tepère de l'Kglise s'est proposée à lui-môme, et qu'il
it
ne donne que sous toutes réserves. tt se peut, ii est vrai. qu'il!
ait été amené a cette hypothèse par certaines indications des
auteurs anciens, etpar je ne sais quelle obscure tradition. Mais,
comme lui-même fuit allusion au texte de Cicéron, it estpro-
bable que c'est ce texte qui t'a induit à faire son hypothèse. Le
texte de saint Augustin n'a doncpas
de valeur par lui-mê'me:n
Au moins il n'aque
relie qu'il emprunte au témoignage (lee
Cieéron.
t
''» Dénota Acaitemw Areei. imcl. couttituta fiymn. pro|;r.tïoltin| lilia; |).iS. t
»' Ml. vv», :i- Atidile jam(Krnkialk-i>liu<s,non qniit sriim.scdquitl oiis-
liini'i» [{or milii rt»; .Acmlcriiiris inlei inr |ir"l«iliitikT ut |Kilni jm-inhosî Iwr
• t .Ji;i hiijiisiiuHti Hiilli viiL'illuv "
9
I]
I
~~tt~~t:ytt:~s. it7~t~1'jf..«. fi <
•lULr,.TII,;VB. 1|7
Or, Oeérun, s'il fàit allusion à uua sorte de dogmatisme
mystérieux, ne parle pas en tous cas d'un dogmatisme platoni-tien. Kt si lit nouvelle Académie avait eu «m enseignement secretde
quelque importance, comment croireque Ciedron n« l'etU
pas connu? Et s'il l'n connu,comment supposer qu'il n'v ait fait
qu'une obscure «illusion? Commentcomprendre surtout
qu'ilne nous
parle jamais d'Arcésilasque comme d'un
sceptique?Bien
plus, Platon lui-iuftite ne lui»pji»Rtit jamaisr (jue comme
unsceptique; il ne Voit en lui que {'homme'
qui discutaittoutes les
opinions, salis seprononcer sur aucune
D'aprèslui, c'est
le jugement que formulaient sur Plalon tous lesphi-
Iosutiltes de ta nouvelle Académie; s'ils déchirent qu'il n'y u
qu'une seule Académie, que In nouvelle se confond tvec l'iui-ciemie. c'est
qu'ils prêtent à l'ancienne le douteque professe la
nouvelle**>.
Reste letémoignage de Sextus. Mais Sextus ne le donne
quesous forme dubitative; lui-même
n'y croitpas, et il est bien
plutôt disposé a ranger Arcésilasparmi les
purs pyrrlioniens. Levers tf Ariston souvent rite, Platon
par devant, Pijrrhon par der-
rière, Diodoreuu milieu, indique peuf-&n> que pour Ces anciens
témoins leplatonisme
«'est chez Arcésilasqu'à la surface c'est
uneapparente;
ta réalité, c'est lepyrrbottisme. Et enfin, nous
savons que Timona fait l'éloge d'.lrcésilas après
si mort. L'in-
traitablesiliograplie lui mirait-il pardonné des arrière-pensées
platoniciennes et desréticences dogmatiques t
II reste vraicependant que Cicéron et Sextus
parlent sinon
d'un dogmatisme platonicien au moins d'une sorte de dogma-tisme. D'où vient cela ? Il ne faut pas oublier
que les nouveaux
académiciens sont, lion depurs sceptiques,
mais desprobabi-
lisles;cn d'autres termes, ils se réservent le droit d'avoir des
opinions. Ces opinions* ils s'interdisent de lesprofesser en
public, parce qu'ils ne veulent pas donnerprise sur eux à leurs
adversaires, parce qu'ilsvetd.-rrt
garder toujours l'offensive: cVst
-k., I. \n. if.. Cf. IkOr, lil. uni.«;.
tf.. t. xtr. 'tti.
m MVIUS II.UHAIMTRB II.
a .É r.ac 1 a iff a
une attitude de combat qu'ilsont choisie. \hh en particulier,
arec des disciples d'élite, ils jiottvai«ntdiscourir à leur aîse,
et après avoir montré te pouret I«*eoutra, laiswr voir leurs
préférences, fiiitw paraissent-ils avoirévité d'exercer «ru-, in-
fluence ellicuce sur les mty.auf«n; «le leur» adeptes.Ils su bor-
naient à proposerdes
opiuioits,sansk>s
impsi'i";ils voulaient.
dit Cteérott dans le |»iissa{{«iiH'ine
queho«ih u«««s rappclt* lotit
ù riiettre, ([uela raison seule, et non l'autorité, tes déeidùt iU
rntitme putius quantauctorihtte duemtlnr. On peut comprendre
à
pr«s»nt.comment n
pris naissance la tradition, mi fa léj'endc, [i
(bul saiitl Atigusliu s'est Kiit t'édio: on voit sur c|uelle mii-
l"nsi*m ctlorepose
(ioinme k's nouveaux ucadémîciens, tau-
joiu-s sur la rési'm' ci» public» onttut enseignement partiVu-
lier plus pusittf,la malice des adversaires ott figHorancf de f
tpn4i|t»eskislm-iftis leur prèle
tics itugmcs. Comme ils se disent
disciples de l'Ialon et se ri'diiinottl de son aulmïté, on Iwir "•
attribue, des dojjutes jdatoniciens.On un prond pas garde,
ou ott
ne veut pas voir, <|u*eitlrcleur «nseijjnemenl ésotériepu: et leur
cuit»1 pour Plstltn* iln'v
a aitctiiie t-rmnexifé. (le n'est pasSi
t-omine plittouieiens «jit'ils ont des dogmes, puisque suivant .eux <
Platon Inr-ntèine it'ett a pas.Kt au vn«. its n'ottt même pas
de <
dogmes mais seulement des opinionsvraisemblables.
Kncore l';iut-ilajouter t|iif.1
tout cela est vrai bien plutôt des
successeurs d'Arcéstlas ipied'/lreésilas hii-mtSme. il [cirait en
effet on l'a vu. avoir été surtout sceptique, et ctt lin de compte
plus prèsde l'vnlion <pie
du (Jtméadi; lui-même. Sextus '•' dit
t'iipropres
fermes ipi'il est (tresipio çoinpliîtementd'aci-ord avec
les pyrrlmniens.Mnttséas. Pliilomélos, Timon, au témoijjuajjc
tle Niiménifis i;. le re|;iu'dni(!nt cointue un sireplupte. llappelons
enlin ipte selon (!io>r«n c'est Anésilas. quia le premier
iiTi»minaiidé laMispi>nsion
d»jugenn'iil.
et If iiième Oieéron:>;
1><Irct|>tiiitliun i lat|wfti-
«"in-rfli- lliizirl (>>;).rit.. III. |>. :ti! «I w/.)
I, ••
' \\i.¥.<l--b.. tir..II.. \tV. vt. "(.
,1. II. wu. 7;.i.l. Ili. IV.••«.Ur.. M. vuir. "ut.
iKCfiSILAS. i|y
iUrhw ((fioiiiif m(joint, ii cul plus de fermeté uue Cameade.
»(jitt
H arriva peut-é*tre do eoïK'éder que le» sage pourra avoir
«lesopinions, «ait seulement au |»uîni do vue
pratique, maïs
utiliiM!un théorie.
Areésilas fiit-it du moins sincère dans son scepticisme 1 Oti
eu doutuil parfois eliex les anciens. Suivantcjuetyucs-uiiu !H«
«lans faguerre acharnée
«pi'illit à Zéiioa, il n'aurait obéi
tju'à
un sentiment dejalousie «ontre son ancien
compagnon,et an
désir de te contrecarrer et de le dénigrer en toutes choses. C'est
<re.que disaient les stoïciens, et ils aimaient à le représenter
foinine un esjirii brouillon et inquiof, sans conviction siiieèi-u,
se plaisant àjeter partout le désonlrc et la c«ufusion, faisant en
un motpour la pfùios<»|iltif ce ijue Tibérius Gracclms fil 1«hpo-
îitùjue1' V.kt'mn prend lapeine de h déft'iidre contru t'es
acciisatious il winhle<juc ce suit bien inutile. Poui- attribuer à
un jfraud esprit des motifs aussi bas et des sentiments aussi
u»cs<|tiius, il faudrait d'autres preuves «|ue les boutades jKissiou-né-s de
<(uuI<|UGsadversaires.
Ajoutons (|itu d'après le rapju-ocfienieiil des dates il u«> paraît
p«s (lossible <|u'treésilas ait suivi tes leçons «le i'olûiimn en
inèmetemps ijue Zéuoii }).
Entre tesinterprélalions diverses, le
plus ssiijc notts paraitêtre de s'en tenir au
jugement de (Jicéron. Arcésilas apu
être
un esprit sincère et élevé, vivementfrappé de la difficulté ttc
reconnaître la vérité ait i»ilieu de tant desystèmes ditl'ihvitts:
l'absteution lui parut en lin de compte te parti le plus sûr, et it
l'a considérée comme pouvant se concilier, ainsi cjue te «lit Cicé-
ron" avec riionnciir «t ta dignité du sage. Il pouvait aprèsfont invoquer d'illustres autorités, l'arinénide, Sociale. IMaton:
«•I il ne s'en lit pas faute.Il se peut aussi qu'il ait obéi à des motifs moins noble. Ku
:liXntittMi.. for. cit., x. i uCic. 4< II. n. ni.
!iCic, /le, II, v, i5. tJ..
1 V<»ii* Z<lli>r. •/»..!».. t. H. j,. 'ii,r. t.
/le., II.UIV.77 -tldfll >t.l ^lil.-ltll.i. !>iiii il.iih'-tit ..1
i|i«tia ~ii|«»-(il.
il. k. I. <M. fi4.
m uvitË n. –'chapitre il
Il 1: 1..1:1" 1; t.. 1' b.
ces temps de utiles «uiUmtefles et |>uli!u|»es, (à pail<i£ct{ilHetltt
doute était- iti- plus facile « défi'iidro. N'être «i»»hîHTass«(t^itucuti
dogme,ne donner
ptisustu* soi à aucun adversaire, prendra
toujours l'offensive, et n'avoir rien il j»arder, était uneatlitudo
commode et avantageuse pourun orateur avide de popularité
et attaché avant tout au succès. Aucune autro doctrine no pou-
vait donner « l'éloquence plus d'occasions de briller; aucune
n'était plus appropriéeà ta souplesse d'esprit
«t à l'habileté
oratoire dont nous savons qu'Areésilas adonné tant deprouves.
Nous ne pouvons rie u affirmer, et il faut nous aussi nous contenter j
ici dis vraisemblances; il rat vraisemblable que des raisons dej
cet ordre ont été de quelque poids dans la balance où Arcisilas,
avant d*1 [Hfndre parti pour l'indtkisioi», apesé
lepour et la
t
amtrp.'1
V. Lu nouvelle Académie ne brille dans l'histoire que d'un
éclat intermittent à la distance où nous sommes, nous ne la
connaissons que pur tes (jrnmls noms (lui Ponl illustrée; les
.sommets seuls éuiergonl«le l'oubli. l*our avoir des rensoigne-
nients précis, il faut aller d'Arcésilas ik Oarnéade, et franchir (
une période de cmcptitntc ans.
Nous savons pourtant quetlans l'inlervidfe la doctrine n'a
cessé ni d'iHre repiésenléeni d'tHre enseignée, et si incoin-
[dèles qu'elles soient. les données quenous possédons nous
prouvent que. l'activité philosophique,si elle a été moins heu-
reuse, ne s'est pas entièrement arrêtée. Les chefs de l'école entre
Arcésilas et (Jarnêade nous sont connus; nous savons imîme les
noms d'un ynind nombre de philosophes, (lui sans avoir eu
la direction de l'école demeurèrent attachés à la doctrine du
maître.
Lacydes, Tcléclès et Kvandre, Hégésinus, tels furent les chefs
de la nouvelle Académie; Caruéade fut Ic quatrième1".
l,ai'nli-s devait avoir quelque célébrité, puisque Diogèuc a
t:i. I. II. n, 16.
ARGÉStLAS. m
écrit sa vie, et que Nttjuénitïsparte imëx longuement de lui il
est vrai que t'un et l'autre content des anecdotes sans inférât,ou hm?hw ridicules m. Il succéda à Arcésitus, dans Ja
quatrième [année de let cent
trente-quatrième olympiade (a/it av. J.-C.)ot
remplit sa fonctionpendant vingt-six ansf2>; même il y a lieu ï
cie penser qu'il enseigna du vivunt d'AreésHas, ou du moins l
occupa près de lui dans l'Académie uneplace importante (3>.Les
renseignements que nous avons sur lui sont contradictoires.
Diogène l'appelle àvty oepvlvaxos', d'autre part, il ditqu'il mou-
rut d'un excès de vin, et divers témoignages nousparlent aussi
de son culte immodérépour Baeehus». On nous dit encoree
f|u'il fut u» travailleur acharné, aimable et d'un commercefacile.
Quoique pauvre, il ne répondit pas aux avancesque lui
fit Alfale, et il sedispensa (le lui foire visite en disant «Les
statues doivent être regardées de loin.» C'est Ittiqui par
ses
écrits lit connaître les doctrines d'Arcésilas; on cite de lui t**
deux ouvrages fiUaoÇet et -crepi Çvvew. Il neparaît pas qu'il
ait modifié en rien la doctrine de son maître.
Lacydcs, suivant Diogène, laissa la direction de l'école aux
Phocéens Télèclès et Évandrc. Cicéron (otne nommequ'Évandre
et après lui liégésintrs (appelé par Clément d'Alexandrie ™ Hé-
gésilaus), (jui fut le maître de (Jarnéade. iVousne savons de ces
philosophes «juo leur nom.
La liste est assezlongue de ceux qui nous sont donnés comme
ayant professa les doctrines de la nouvelle Académie ici encore
il faut nous contenter d'unesimple énuntéralion <8>.Parmi les
mKust'l). l'nif. n-ttiig., XIV, vu.
(!>Oing.. IV, Ci.
«D'après le lôuiotunaj-c .Ip Solion (l)i«g., VII. iS3). Cbrjsippc. à lopwiw
où il mcliiiiiit vers les i<lws .le ta numelic Académie, et où il écrivait un Iroilé surla cuiiliimc, s'iis<ocia us Iravaiu (mieeÇùoooÇiioe) il'Aiwsilas ol Je Urydcs. Oi-,
Chi-jsi(>(>c. à la iuurtir,in-vsilas, avait <it>jù saeatU ;i Clwmtlti', niorl vors arii.
KhVi»,Var.llttt., II, '« t Atlioii. X WS,«; VIII, «06.6.(!l .Slliil.is AtaiSnt,
Al\, II. M, |(i.
iV/njMi,, t. .'(en, c.
'» V. Mkr. t. IV, p. 'hJ7.
ÏM M VUE II. – UKAPITUK II.
disciples iPArodsilas. on citePjÉoèw' t|tti ronstgua nom
dans ttu Imité les opinions -du son maître, Aridicusde Klitide»'
Dorothée'3'* PiinaitHas' P&nophanes' i&dc'mos ou &lélos!0)
«|ui juiiu un rôle |)olitt(|iio, au temps de Philopéuteti, ApeH«»!7!.
Liicydos t-ut piMir disciple Arâtipp du€yrèn«iS|.
k mAine
mns doute(jui écrivit un livre mpi <pu<rtoXiyan>'1Ji,et p«ut-iîlre
isspï ««X»às rpv$nsiV>ii puis fimlus'"1. Voici enlîii les noms
d'autres ucadéuiicieris Paséas, Thrasys. deux KubuI«i»!K', Aga-
ipestor'ou
Agapstor" puis Uamo», Leonteus; Afoseirion,
Kvaudre d'Alhènt'S UM. Boéthus.disciple d*Aristi[»[ie de Cyrène.
eut une coutroversu avec Carnéide il'K
f'î [iià* Ikiailaïu'iisia,ml no («((. UuclraicivUrypIiiMnililk-,Oyinn.projii-i S(>j).
"Hiil.; .Vttii'ii., X.i-i(>. > l>tut., Ctmetl. tu«r., II. i.i-s: l'olid fV, i.h, -i.
1 fndcjr.ibiiL!« Alhwt.. XHI, .m-i. • Cl'. Klicn. I. «.
« ('lui., WhVo; h: .Jraf.
(/.M.
Vtlicn.,X. 'isô, d.
KhscI»., Itiv. ut., MV, nu t'i.
!«<«.. VIII. -m.
Vii'lïsche./(A««..M»»..XXIV.•>"' iitiiiti. 'IMlex.. i'iivm.. it><». i>.i: Itut, Itère. %m{.:i~,1: /ii'.i.
:|11 l'ful.. fjtltnt. nue.. 1. iv.{. S.
*> .Suiila*. lOir'jf.
t- Index roi. -jH.
r.AHNKAMi.– SA VIK KT SA JM1CTKLNK. i%\
CHAPITRE III.
CAHSKADB. SA VIK KT SA »«CTRl,\K.
Bienque
les successeurs immédiats d'Areésilas n'aient rien
trouveà ajouter
à sadoctrine, it restait
beaucoupa faire dans
la directionque
le fondateur de la nouvelle Académie* avait indi-
quée.Xf»H seulement Areésïlas n'avait
pasdonné à ses
arguments
s(rc'[)tti|iieK'toute ttr
prwî.siou etlu
i%tient' (ju'iIb comportaient
Miitis ils'était trop [truibiuucul contentû
du rôlo facile de «les-
ÊriKtwu- et denégateur.
La nécessité de vivre cl lescxigimres
de
I» viejira(ii|uu
onttoujours
été tagrande difficulté qu'ont
ren-
contrée lesspcjitïques
c'est ie tatou d'Achille duscepticisme.
Lu doctrine de h vraisemblance n'a été inventée(jtrtî pour parer
à ci-tte dillieulti'. Mais la doctrine de la vraisemblance n'était chez
Arcésilasqu'à
l'étatd'ébauche. Quand il fallait
s'expliquersur ce
point délicat,il balbutiait
plutôt qu'il no parlaitil
passaitdu
doute à la
vraisemblance brusquement,sans
rira justifier, parce
qu'il ne pouvaitfaire autrement.
Car»éad»-,qui repritson œuvre
de fond en comble, en vit bien !<• défaut, ety porta
remède, il
maintint avec autant de fermetéque
sonprédécesseur la
thèse
querien n'est certain, et
il portaà l'école de
Citrysippedes
coups
aussi
rudes que ceux qitoZenon avait
n-çus d'.Virésitas. 3tais,en
menu;temps,
il sut trouver des
intermédiaires, distinguerdes
nuances,passer doucement, sans embarras et sans scandale
logique,du doute à la
probabilité.ses
mains, la doctrine
de la nouvelle Académie forme un tout bien lié et devient un
stslèiiie quimérite l'examen, et,
quelquesréserves
qu'il pro-
voque,tait honneur ses auteurs.
Oiniéadu n'a rien wiïl;1, etprobablement
cV-sl à cette cir-
'l>i«j[.. IV. li.'t: Nul.. II,. I/r.t. tittntr. |. 't.
ut uvre ». mxpiî m m.
eotwtottc»', joitrte m peu àm favettf qtt'ôitfieimGirë d'ordinaire les
doctrinessceptiques, tp/il a dû do n'&i'e pas euntjité parmi tes.
grands philosophes. Un eatmen impartial de ce que nous con-
naissons do lui atteste du moinsqu'il fut un
puissant esprit
Depuis Aristote jusqu'à Piotiu, la Grèce n'en apas eu de plus
grand; seul, Chiysipjio pourrait luidisputer In palme, et «ion
s'en rapportait al'opinion de I» plupart des anciens, c'est à Car-
néad© qu'elle appartiendrait.
[. Carttéade, fils d'Épicomus ou de Philoeomus, naquit à i
Cvrène"> vers aj t av. JL-C<*}.Ses admirateurs faisaient remur-
ijuer qu'il était né le mène jour que Platon, le jour des jeux«annSetts consacrés à
Apollon (î). Il eut pour maître, outre Hdgé-sinus à (lui il succéda te stoïcien Diogène de
Babylono^, (luilui enseigna la
dialectique, Malgré rmlervalb (letemps consi-
dérable (lui lessépare, on
peut regarder Cbrysippe comme «rides «mitres de Carnéad»; c'est probablement dans une lecture
approfondie des nombreux écrits du grand stoïcien qu'il acquit,sans
parler de bon nombre d'arguments sceptiques qu'il lui
emprunta, cettesouplesse H cette habileté
qui le rendirent si
redoutable dans la discussion. Lui-même reconnaissait ce qu'ildevait à son illustre prédécesseur, car il disait souvent, parodiantun mot connu « «S'il n'y avait
point eu deChrysippe, il
n'yaurait
point de Carnéade'51. Sauf lit célèbre ambassade à Home
dont il fut chargé en i 56 avec Diogène de Babylone et Crilolaûs
lorsque les Athéniens voulurent se faireexempter d'une amende
fl>Oiojt., IV, 6a; SCral»., XVII, m, aa; Gt., Ttue., (V, in, 5f Suidas,
Kapnâhit.i!>
Di«([«nc (IV, 65) dit, d'après Ajiollodore, qu'il mourut «huit la qualricnreaim.» de ta cent aoixaittc-<kti\iéinR otympiado (larj av. i.-C). Si oit ailmol, arec
I)iolfèac (cf. lkicipit, ti(lerob.. a 0). elet'il véclit ;inç, teig fisc-1-4l)io|[t'ne (cf. Lucien, Maerob., ao), qu'il vécut qiialrc-vinj;t-dnt| ans, on fiwi-aavBc la plupart des historiens la date <l« M naissance en at.'i. Mais Cicéron (.le,Il, vr, il!) «-f. Vater^Slatiw., VIII, vu, 5) «lit qu'il vécut qualre-vingt-dh »iu. Il•viuhU: lirên tjiip c'est ;i Ciau-nn qu'on doit s'en rapporter.
Ptiil. Quart, orne., ïllf.t, s.
i; Ck..Ae., Il, «t, ;j8.'1
ttmS.. IV. fis. Cf. i'li,t., Hluic. repun., V, ».
aBNÈAilB. SAVfR ET SA DOCTRINE. 123 l· à-
_®
infligéeJ la stiîte dtt sncd'Orope, sa vie n'est
Marquée d'aucunévénement
important*». Sa vieMlesseparaît nvoh* été assttmbrm
par de cruelles infirmités il devint aveugle»» et fut consumé purmm maladie de langueur. Ses ennemis en prirent occasion pourlui reprocher de n'avoir pas mis fin à ses jours, comme soif rival
Antipaler, et d'avoirmanqué" de courage devant la mort. Mais
c'était en vérité uneétrange prétention des stoïciens de vouloir
imposer leurs idées à tout le monde, et de cond;tmner tous leursadversaires au suicide. Rien dans les
principes de Carnéade, ne
l'obligeait à recourir a cette extrémité. Il se bornait fort sage-ment à dire « l«i nature, qui m'a formé, saura bien me dé-truire.» Il mourut en
ta uv. J.-C.,âgé dequatre-vingt-dix
ans.
Bien différent de son élégant et spirituel devancier Âreésilas,Carnéade ne chercha point a briller ailleurs
que dans les dis-cussions
publiques. Son extérieur. nous ditDiogène w, était fort
négligé .-jamais iln'accepta une invitation à dfner, afin doue
pas se laisser détourner de ses travaux. Il était tellement absorbédans ses pensées qu'à table il oubliait de
manger etqu'il fallait
diriger ses mains1*
Tous les auteurs anciens s'accordent à célébrer son merveil-leux talent*»'. Les rhéteurs, dit
Diogène, fermaient leurs écoles
pour aller l'entendre; on sait quel émoi son premier discours
provoqua a Rome etquel enthousiasme il
inspira à lajeunesse,
quelles craintes u Caton le sénat même ne sut pas échapper ùla séduction
que ce Grec extraordinaire portait partout avec lui.H serait téméraire de vouloir le juger sur les
quelques analysesque les auteurs anciens nous ont conservées de ses argumenta-
">l'Iul., CalaMajor,aas Gell., AWf.au., Vt, w, ,ot Cie., Tusc, IV, m,
5, etc. Voir,sur cepoint, le très intéressantchapitre<loM.Mnrtlia«Tansta»Elude*morale*sur l'auliqmlé (Paru, (lichette «883).j.
« 1% IV,«6.
(>) IV,6a.<«
Vnl..M<rc.,VIH,vit,5.<>»Cic, Kit., III, «., /ïi.etf.; 1% IV, (53; Coll., kK.cit.; l'Ii.t.. Col»Jfo/m-,
toc. cit.; tact. Diu. tu$l.. V, i Eus.. /Wp. «•«, \|V. »m, el teq.
t& i t va b 1 1. – »: k ht it !•; it i..u f.,I.UU vf. ui1 i! 1 Nti III. 8.
fions; titiits, inéW en lisant) ces fragment* mutilés au I» boJîo
restitutionquereller"
!t latte de sa discussion-sur t*c\fe<K*iiee des
diuux ou est frappé de la savant» oiilomiuueo dos arguments»de leur enchaînement ludde du mouvement dont le discours
semble animé «Iqui
nousemporte
avec lui. Saréputation était
de lune étant survenue au mometttdesa mort.
quelt|ucs-utis supposèrent que l'astre s'était voilé «mi si{jne de
ttoijît- î lesoleil nuhne, dît Suidas, s'était obscurci. Longtemps
aprèssa
unirtajuandou voulait
parler d'uninjueslian insoluble.
on (lisait, *n 'manière de jiroverl» Oarm'-aclc lui-iiK'nn», si`
l'Enfef le laissait revenir, ne la résotidraitpas f3:.
Il avait, dit !l
Cicérun 4» mie vivacitéd'esprit inrroyabic, une promptitude et ll
«ne siketé salispareïlk's jamais it n« soutint une tfièst» sans lit ll
faire fiiompht'i', jamais il n'attaquaune doctrine sans la détruire.
Ses advi'rsairi's fuyaient à sonapproche. Aiittpater qui fut après
(lliiysippe le principal représentant du stoïcisme, en était réduit
à écrire dans les coins les réfutations qu'il lui destinait, et on
l'appelait le criard par écrit>*. [In de ses ennemis, \uniéniu>t
décrit sonélutaience en des termes dont la malveillance mé'me
urehausse la signification et la valeur. C'était, dit-il, comme un
l(
large Heuvequi emportait et couvmit tout; mais, (tans ses plirs ri
I(
violents eniportemeuls. biensupérieur
àAreésilas. qui se laissait 'j
citlramer irt seprenait
à sonpropre piège '>r>, il savait rester en t
pleine possession de lui-même: quelquefois il cédait, mais comme
Pliilat. lier (itvctuit. t. tV, p. 5o4. 3* Aiitl., 1H80.
Diog., {V, «1.
Urt.. Itit. lmt.,V. i'i.
' Du <«•«(.. II. ««rai, i(5i.t
Ka/aji6&ï>. Plut. De ilnrntl. «1.(
A|i. Kus-, l'rirft. eiuiij; XIX, vm, ji cl teq.'• (km* «* passaijft A> \11111c11i11s K'fiOev ê«/t»i> apmov èpinatiixàit (iii
nvtfioQv, aemiaOai l' x>n8fi shv i téya k. r. À., Hirzol («/). cil., p. 15, 1) croit
r(ii"il làtif siippriim'i- l>?s mois fnr îjifinoSit %er.st'Ait 3é, paro* qui* l.> si-ns !«• lui
parait pas clair. II nous spmhtn tort sirapli». Aii'îla-i ru» s'aprawvoit pas fpi'it «tait f
pi>tsiii»l«», «in» l'avoir appris par Im.«-nii.ipii!
o> ija'il .lisait «tait vrai. Carnéail».
suivant N imi>niu> n'avait mi'mp pas c<l(ti' rroyarinr; aus«i «oif-mi, par h sirid- du
ti>xti>. ijoil nf ii>nail i»n anmn» façon à rcijn'it jiyait dii.
eUH-NlUlHv.- – SA VIEY BT H MJCt'HijîK. W
f i~ n r ¡. 1"
w InHns féroces cjut «e reculentquo pour ruvenîr rasuîfa plus
menaçantes etplus irrésistibles. Puis, quand it était vainqueur,
il paraissait oublier ce qtj*il avait «lit il avait ce stiju-i-mc «lûdaiu
de fairepeu de cas doses meilleurs arguments et de.se montrer
supérieur même à sa viefoirc. Ajoutes à tant de ijuofttds diverses
qu'il avait de l'esprit, fjno sesréparties étaient fittes et promptes,
tju'il était servi par une voix d'unepiiissunce
extraordinaire.
Aussi, dit NuinéiittiB, ontmfuait-i( les Aines «t les mottnit-il «
ses pieds; les mieuxpréparés et les plus exercés no pouvaient
tenir un instant (levant lui.
11. L'enseiijnenienl de Cni-néude autant <fu<' nous en {«m-vohs juger par les documents qui noirs sont
purvimus, portaitsirr trois points principaux: la théorie de la certitude, l-'existeiiw
des «IÏphx, te souverain bien. Zelter'1' ot, après lui, IJaecoll'
ont cni pouvoir distinguer dans cet enseignement demparties:
l'une destructive ptnégative,
la réfutation dudogmatisme;
l'autre
«•onstruelin» et positive rétablissement du piobahilisinc. Xous
ne saurons pas cet exemple, parée qu'une telle division exagère,selon bous le caractère et
{'importancedit
probabiiistne, tel (jhii
l'a conçu Carwéade, et. d'autrepart, parce qu'en religion
et en
inonde, lephilosophe n'a été. croyons-nous, conduit à aucune
conclusion positive.
i" TiiÉoittE i*k m CRBTiTMB. Il n'y a point de eiïtcriutn de la
vérité, voilà ceque C'arnéade voulait établir, non seulement
«•outre les stoïciens, mais ungénéral
contre tous lesdugimt-
tîstes «Jî.
Le critérium ne se trouve ni dans la raison ni dans 1rs sens.
car la raison et les sens noustrompent
souvent la raine plongéedans l'eau, la diversité des nuances du cou de la colombe vu ail
soleil en sont tes preuves
/.«•. aï.(l)
Tkt greeh *ce;</r«, p.t:ï ( Ijimlnn an>i Oimliriilgo. Utii-nnltan. iX(U) i.
P» Sfrttus. M.. VII, r5(|.
l!i. /te. II, «t. 7<|.
Î2K UVRR tt -.CHAPITRE IlL
~n macEnn a~aumi:wa.ar~ m.a.l:a.a "11. ~t.I. lèt..z.El» outre, rendons-noti* compte de ce (JW«(toit ôtrewn eriR'-
rîum(l>. Hne peut être qu'un état de l'âme
(«tfflbfi) produit parl'évidence (ânb xnt évaçyskt). (l'est par Ta puissance de sentir
que l'étre vivant diffère des choses inanimées, c'est par elle seule
(ju'it pourra coiiiniîtm et lui-même et ce qui est hors de lui. Pour
cela, il faut tinchangement, car s'il demeure immobile et impas-
sible, le sens n'est plus un sens, et il ne perçoit tien. Cet état1
de l'âme doit, en môme temps qu'il se fait connaître lui-même,
faire connaître l'objet qui l'aproduit
cet état n'est autre que la
représentation {favrctvk}; comme ta lumière, elle se révèle
elle-même à nosy eus en môme temps que l'objet qu'elle repré-
sente. Le critérium s'il existe doit donc être une représentation
vraie, c'est-à-direqui révèle l'objet qui la
provoque.i
Y a-t-il maintenant des représentations vraies? Carnëade le (
nie. Pour(lue
lareprésentation produite par un objet réel fut
·
reconnue avec certitude, il faudraitqu'il y eût entre elle et la
représentation fausse une différencespécifique
il faudrait qwl'une ne
pût jamais «ire prise pour t'autre. Or, il n'y a point de
représentation vraie a côté delaquelle
il ne s'en trouve une
autrequi n'en difîèreen aucune manière, tout en étant faussera.
Voilà le point capitalsur
lequel portait le débat entre la nou- l
velle Académie et ses contradicteurs. ?
La thèse des académiciens est résumée par Cicéron dans I
tesquatre propositions t° il y a des
représentations fausses
a" elles ne donnentpas lieu à une connaissance certaine 3° si
des représentations n'offrent entre elles aunine -différence, il est
impossible de dire que les unes soient certaines, les autres non;
h" il n'y apas de représentation vraie à côté de laquelle il ne
s'en trouvii une faussequi n'en diffère en aucune manière. La
deuxième et la troisième propositions sont accordées par tout le
"i Sest.. if., VII, i59.<" Cic, .le {(, tut ,'u >Omn«> »isum <jtio<l ait a vero laie pss* (|ual<> «liant
a fat» posaitm.<m».t>Cf. iliût., mi 09 » Teno.ïlm-modoilltiil non irwssoin liis
quidqunm l.ilo <|ii»lc non f liai» falsimi niliil ab en (lilfrri'ns ck» posait.»tT!IM., II. twi. M.
{aItNÉrlD~ SI\ Vtt~ 1~1' Sl tJOC'rnfNI~, t2U
t & à «
'I
monde; npicure seul se refuse u accorder lapremière; niais les
stoïciens et laplupart dos dogmatisas ne
font pan do difficulté
sur en point. Tout te débat porte sur la quatrième.Pour la justifier, Carnéade
invoquaitles
exemptes du rêve,
les fantômes de l'ivresse, les hallucinations de lit folie. Mais,
répondait-on, les imagos du rôve et de la folie n'ont pas la
mémo foree que celles do la veille ou de l'état do santé; revenus« nous. nous savons les distinguer. Quand vous êtes revenus
à vous, fort bien, répondait Carnéade"1; mais, pendant quo vous
iites sous l'influence du sommeil ou du vin ? Mais laissons cela.
A l'état de veille, en pleine santé, nous voyons des chosesqui
n'existent pas, sans pouvoir lesdistinguer
de celles tlui existent.
Castor et Pollux sont deux jumeaux tout à fait semblables
(;astor est devant vous; vouscroyez voir Pollux. La
représenta-tion supposée produite par Pollux ne diffère on rien de celle quedonne Castor; pourtant elle est fausse. Dira-t-on
que deux
hommes vivants diffèrent toujours par quelques traits Maïs
Lysippe ne peut-il façonner avec le mène bronze «ent statues
d'Alexandre absolument pareilles? Cent empreintes faites sur la
môme cire avec le même cachet sont-elles discernables? Deux
n*ufs,deux grains de blé, deux cheveux ne peuvent-ils dire abso-
lument semblables? Ne peut-il vous arriver de prendre l'un pourl'autre? Et si vous avez été trompés une fois, quelle confiance
avoir dans vos représentations? Vous avez eu d'un sujet, qui n'est
pas, exactement la même représentation quevous auriez eue d'un
objet réel. La vie pratique offre àchaque instant des confusions
de cegenre. Quand Hercule, croyant atteindre les fils d'Eu-
rystbée, frappait sespropres enfants, n'élait-il [>as dupe d'une
illusion ? Qui donc a jamais, enprésence d'un objet réel. une
impression plus vive que celle qu'il ressentait?
<»r.ctli>argiHil'iilalioii,(|ii(> nous <™priintoi» à Sratliis (M., VII. 'i»3 cl $ti/.) 1
n'est pas roniinlli'iru'iilatlrihtiép.i Cuméadi'. Mai»Cicôro» (Ae., Il, win, 87|
mi!ir|iie qu'elle se trouvait iléjn ibiris un liviv île(.ii)si|i|ii., « i|ni Cam.'jdi' avjil
fait île lar|;w l'iiijtiniils (»(» m arniiiliini <««> Cmipad.-inL H ,«( don.- |i<>i-mis <)•
irfnsor ((lie l.ann'.nlf Jtuit ili'ïplnppi- «< :u jjiinii'nls,
«<> LIVBE II. (Ur.iPITRK Hl.
Lareprésentation cai»|ii'(5lini)sivo a'a donc pas» comme le
soutiennent lus stoïciens, «ne proppiiSU- intrinsèque (tâfapa)f»
qui ladistingue des autres. Si
plusieurs serpents sont enlacés
dans une caverne et que l'un d'eux dresse la tête, nous ne pour-rons discerner sûrement lequel a fait le mouvement. H semble
que la vue perçoive la couleur, les grandeurs, tes formes} elle
ne perçoit rien de tout cul» (a. Elle neperçoit pas la couleur
d'un homme cette couleur varie suivant les saisons, les actions,
la nature, l'âge, les circonstances la santé, la maladie, te som-
meil, la veille. Ces variations, nous pouvons bien tes connaître,
mais ta couleur en elle-même, jamais. Et de môme pour les
formes: le même objet apparatt rugueux et lisse dans les pein-tures, rond et carré dans les tours, droit et brisé dans l'eau et
hors de l'eau, en repos ou en mouvement selon qu'on est sur
un navire ou assis sur te rivage.
Ajoutons encore l'argument du sorite i3). De l'aveu de Chry-
sippe, à côté de la dernière représentation compréhensive, il yen a une non eompréuensive qui en diffère
infiniment peu. Dès
lors, comment les distinguer?La représentation n'offre donc pas un criterium sérieux. Dès
lors, la raison ne présente pas ptus de garanties, car, avant
d'être soumise au jugement de la raison, il faut que la chose
dont il s'agit lui soit représentée; or, elle ne peut lui être repré-sentée
que par l'intermédiaire de lareprésentation. Carnéade,
d'accord en cela avec tous sescontemporains, n'admet pas que
la raison ait directement l'intuition des choses en soi.
D'ailleurs, l'œuvre propre de la raison, c'est ladialectique.
Ladialectique, disent les dogmatisles, sert à distinguer le vrai
et le faux. Mais où. et comment? Ce n'est tri en géométrie, ni
dans les leltres, ni enmusique.
Ce n'est môme pas en philo-
sophie, car file n'apprendra p;is les dimensions du soleil, ni la
nature du souverain bien. Ello diraquelles liaisons d'idées sont
'l' Seil.. JL.ÏU, 6n.tt. VfF.siia.I; Sont., .M., VU, 'ua <!>»»(>. o\ si Kmènfim.'3: S.><t.«.. VII. 'iiC.
CtlI-XkUMv. – S* VIK lïï SA DttCTBlNK. U\
<i.
légitimés; eVst bien peu. et on attendait mieux..Mais cet art
perfide se retourne contre ceux qui l'invoquent; dansquelles
dillicutté» ne s'embarrassont-ils pas!On connaît en genre de raisonnement qui s'appelle
l<?mite.On
ajoute à une chose donnée, ou on en retranche unequantité
insignifiante enapparence; mais on répète cette
opération si
murent, que la chose change sansqu'on s'en
aperçoive, et lenaïf
qui s'est laissé conduire est inévitablement amené ùquelque
sottiso. (I estimpossible de fixer nulle part des limites précises;
on no peut savoir cequ'est un tas, ni si un homme est
pauvreou riche, célèbre ou obscur. Mais. dit-on, le sorite est un so-
phisme. liésoivez-le donc: montrez-en tepoint faible: <est te
devait- de ladialectique. Chrystppe croit se tirer d'affaire par nn
plaisant expédient. On lui demande si trois sont peu ou beau-
coup. Il dit c'estpeu. On augmente d'une unité quatre, est-ce
beaucoup? Avant d arriver àbeaucoup, il éprouve le besoin dp
sereposer (tf^^stv). Repose-toi, répond Carnéade; ronfle
mène si tu veux, je n'y metspas d'obstacle. Mais tout ù l'heure,
tu te réveilleras. et on te demandera si enajoutant iwt au
nombreaprès lequel ttt as gardé le silence, on obtient peu ou
beaucoup;il faudra bien
que tu répondes.– Comme un cocher
adroit, réplique Chrpippe. quia
prévu l'olijectton j'arrêteraimes chevaux avant d'arriver au but ail milieu de t'interroga-
tion, je cesserai derépondre.
– Belle avance, riposte Cirnéade.
Ou tu vois la vérité, ou tu ne la vois pas. Si tu ta vois i*t ne
veux pas la dire, tu es bien fier. Si tu ne la voispas, tu fais
bien de te taire. Mais ton art est bien impuissant. Ktsi, aprèsavoir dit que neuf est peu, tu t'arrêtes devant le nombre dix, tu
refuses ton assentiment à des choses certaines et bien claires:
pourquoi donc ne me permets-tu pas d'en faire autant vis-à-vis
(les choses obscures?
Mais ily
a mieux mieore: ladialectique se détruit elle-même.
commePénélope défait sa toile, ou comme le polype dévore ses
propres membres r' CVsl un axiome admis en dialectique par
st~t, t:r~arrpu..t3.
«2 r.ï?»K il ~r.ru pitrr m.
les stoïciensque toute
propdsittett est vraie au fuosso. Ks^etlevraie ou fausse, cette
proposition si tu disque tu mens et que
ce soit vrai, tu mens, tout eti disant la vérité. Les stoïciens dé-clarent
que ce sont lit despropositions inexplicables (ittexplim-
Inlia) et demandentqu'on- fasse
exception pour elles. Mais pour.
quoi leur accorder cette concession? Cetteproposition n'est-elle
pas exactement du même type cpio celle-ci, prise pour exemptapar Chrystppe si tu dis
qu'il fait jour et que ce soit vrai, ii fait
jour? Elle revient à «lire Si tu mens, tu mens; or tu mens;donc tu mens.
Ghrysippen'a
pas pu en sortir1".
Rien ne trouvait grâce devant Carncade; il allaitjusqu'à
contester la certitude depropositions mathématiques comme
celle-ci doux quantités égales h une troisième sont égaies entre,»lles^. En résumé rien n'est certain; le
plus sûr est de sus-
pendre sonjugement ». «Chasser de nos àtnes ce monstre re-
doutable et farouche qu'on ap|iclli; laprécipitation (ttt
jugement,voilA. disait
Clitomoque <«, le travail d'Herculeque Carnéade a
accompli.»
Tout estincompréhensible (ixarcàmiâp)', voilà ce
que Car-
néade a prouvé. Rien de mieux en théorie. Mais la vie pra-
tique est là<pii demande ellc aussi à être prise en considération.
Lu conclusion naturelle de cequi vient d'être établi, c'est
qu'ilfaut ne rien croire, ne rien aflirmer, qu'il faut suspendre son
jugement. Mais d'autrepart, pour agir, il faut croire. Il y a la
une grande question dont la solutions'impose au
sceptique.Nous avons vu la réponse que faisaient les pyrrbomens et Arcé-
silas. A son tour, Carnéade doit résoudre leproblème.
lii se présente une difficulté peut-être insoluble, surlaquelle
Hirwl'5i, avec une grande sagacité, a pour lapremière fois at-
tiré l'attention. Les témoignages que nous a conservés Cicéron
»' Cic, Ac.. II. m. r,«.''•
(tatou., Jk optima iloctriim, |. |, p. ftâ.!l>
(m.. ,tc, II, ««,f,8.w Ci. A. U, m iv. uiX.
'»;i. il.. |i. ifiî, el ttij.
GAKR&IM&– S,» vrK ET SA «OCTItlSK. 133
m.mal pas d'accord enta* .eux; y a mvfopHiîort de Darnéadii
deux mutilions discordantes, celle de Clitornaqw, sondisciple
immédiat, et cette de Métrodoru et de Philan.
l)'»prt>s Clitomaque»», Viwotf peut s'entendre de deux fa-
çons «>. D'abord elle signifie que le sage n'affirme rien. fên un ?
autre sens, onpeut entendre (lue te sage, sans rien affirmer, l
préfère ou approuve (probnre) telle ou telle représentation qui lui
paraît plus vraisemblable, C'est dans le premier sens seulement "«
«jue Cnrnéade recommande ïtwff(\ il ne l'admetpas
au second
scns<». Il faut bien en effet que le sage fasse un choix entre ses
diverses représentations, s'il veut agir et se mouvoir r aussi
bien fl), il n'est ni de fer, ni de bois il a une àme il a uncorps t
il a des sens et unesprit; il faut
tju'il agisse, Il agira donc, et
nura des préférences pour certaines représentations, dont on in-
diquera tout à l'heure les caractères. Mais il faut bien entendre
que le sage, tout en ayant ces préférences n'aura pas d'opinion.S'il dit oui, ou non, c'est uniquement au point de vue de l'ac-
tion. H serait en effet indigne du sage de donner son assenti-ment
(wyxxtatfflgaûou) à des chosesqui
ne sont pas certaines.
(,'est cequ'avait dit Arcésilas.
D'après Mélrodorew elPIûlonau contraire, Cantéade «tirait
renoncé à Pàro^i/dans les deux sens du mot. Cette propositionte sage peut avoir des
opinions, donner son assentiment à des
111Âe., Il, xuu, tfia.!1) lit. io.'i. «D«|>iùi(CT tlici ajsensus snsttncro saj.ieittL-iii uiin muilo cwm liac
inlolliyalurmmiiiio puni mi imlli ansculiri; aliet», ruiu se a ns|ioii(leiu!o susiincat.ut neque negetaliqtiiil netp» «iat. n'3<
Ae., H. t«i, (jij it|)mo plawl esse Carnoadi (jouira vUni'itut in uiio liane.liïisioiicm «liavisaesse«|uœperripipossint. alia quœ non [wssiirf;iu alleroaii-Ici», alia visaeue protKrfcilia.alianon prokliilià. llaquc, .|.ia.>cunlra st'nsuscon-Iraqae perepimilalcmdtnntnr, ca portinercad superioraii <liiisionero.Conlrapos-tcTi«remniltildicioporlcre qirareil» placeratale visum iitilltiniesse ut perreptiofOiisiNjuerelui- ut auleni pioh.ilio, iiiulhi.-
de., Il, \m, ioo.
l!| Ac., Il, «iv, 7K: -LitflKil iiihil perapere, ,.[ iamcu u|)iu;ni: cjtioti ;> Car-iiede dicifnr proliîtltm». K<|tif<l<>iHCliluitincliu pins ,(«;““ J'Iiifot» mit Metrodoro«rcdciis. lim: nrajjis al) e» dispnlaliiiii •|mmt pmUliim pnlo.-Cf. txui. 5j>; tiviii,i '• %\t. ri- v«v. ita.
134 M V M tt. – Cil AI'ttKE Ul.
choses ttut no sont oas absolument certaines – prouosiliot
sva ut t uax er. 44 a a wu ac~.
choses quine sont pas absolument certaines –
proposition qui
semblait à Àreésilas comme aux stoïciens, et à Cicéron lui-même,
un scandale logitlue– n'effraie (tas Carnéade. Sans doute, est
donnant son assentiment à des représentations quina sont que
probables,te sage devra se souvenir qu'elles ne sont pas abso-
lument sûres, qu'ellessont suspectes par quelque endroit; mais
cette incertitude ne l'arrêtera pas. Modestement il se contentera
d'opinions probables. A placer le but trop haut comme l'avaient
fait les stoïciens et Areésilas, on risquede ne jamais t'atteindre,
En un mot, entre les stoïciens et Arcésilas » Carnéadeaurait pris
une position intermédiaire (0. Aux premiers il concède qu'il
faut faire une distinction entre les représentations; il va raàne
jusqu'à leur accorder leur définition de la représentation com-
préhensive.hormis un seul point elle est gravée et imprimée
dans i'àmepar
unobjet
réel, etqui
lui est conforme; Carnéade
refuse seulement d'ajouter uide telle façon qu'un objet qui
n'est pas n'en puisse produire une semblable. A Arcésilas. il ac-
cordeque nous ne saisissons jamais les choses telles qu'elfes
sont en elles-mêmes; mais il n'estime pas quecette impuissance
de la[wnsée
doive nous interdire toute croyance.
Qui. deCtifoiuaque
ou de Métrodore. a le mieux compris la
pensée du maître? (l'est un point que dans l'état de laquestion,
it nous estimpossible de décider absolument; Cicéron» à qui
nous devons I<'S plus i-Iairs et les meilleurs de ces renseigne-
ments, semble incliner du côté de Clitomaque!1>;il reproche
mène à (larnéade d'avoir été moinsconséquent
avec iui-m&ne
>" 0» peut bien (lire"avecllirzel (p. t8o) qu'en s'oijirinnnt ainsi, Caraûarfo»
fait tin |kh vpinle (iof>inatisme.Taulofais, en même teuipit,it renonceà cet idéal
du sage, à ce typedp piTl'oction(jiieles stuiciciBavaient rètv, et que les premiersacadi'iuirieus .iv.iient encore admis. Par là it s'éloif'nc du ilo;;mn!isine tel du moins
qu'on tu comprenait do son temps, plus peut-êtrn «m'il an s'en rapproche par sa
théorie <lt? la vr;ii«*m!)l*HKf* il renonce à la certitude.
Sftït., M., VII, 'ioa. – (X VII, 17a oti it est question «Je représentations
capables de ùt <mfK%ii(itefv e'a<ri:w9w. ('.(. l' I, s»H-a3o. C'est sans ilo«t« par
.«rreiir '|hp dansre flnniier passageSnxliisattribua à Clitom.i<j«i>ta mêmeopinion
qu'à tarnéade. –Voy. Hirzf I p. 1 -,(i.
/w. e.it., ttlv,
CABNËAlïM – SA VtK BT SA B0CTRINB. f3»
q«Ar<588Jtastri» mm, duutrepan, il montiorine à diverses re-
prisesdes
interprétations conformes à celle de Métrodore''" et il
dit ltii-iiièno que Métrodore131passait pour bien connaître ta doc-
trine de Carnéade. D'un autre côté, on vient de voirque Sextus
comprend la pensée de Cnrnéade comme Métrodore. Enfin, il
semble tlilliciiument admissible que Carnéade ait élaboré ta doc-
trine savante que nous allons résumer, si sa conclusion avait
dtl dire que le sage doit s'interdire toute opinion. Nous pouvonsdonc dire, avec réserves
it est vrai, que Curnàtde avait renoncéà l'énoxtf; il.reconnaît ta légitimité do certaines croyances; il est
probabilisle. Cest luit{«i,
tepremier, a introduit dans l'Aca-
démie le GtiÛaviv.
Quelles sont maintenant lesreprésentations qui s'approchent
do la certitude sans jamais l'atteindre?
La représentation peut être considérée à un double point de
vue(i|. Par rapport h l'objet, elle est vraiequand elle s'accorde
avec lui, fausse dans le cas contraire. Par rapport ausujet,
tantôt elle paratt vraie et on l'appelle ^«o-« ou probable («u-
Oavif); tantôt elleparait fausse, et on l'appelle à-ni\t$<itJK. àitet-
9tft, âviOavés. Ecartons celles qui sont manifestement fausses,
ouqui
neparaissent pas vraies. Parmi celles qui paraissent
vraies, il en est qui n'ont cette apparence qu'à un faible degrésoit
parce que l'objet considéré est trop petit, soit parce qu'iln'est
pasà une distance convenable, ou
que nos sens trop
faibles ne le perçoivent que confusément. Ecartons-les encore.
Mais il en estqui
ont cette même apparence à un très haut
degré; plus nous y sommes attentifs,plus
elles nous frappentet nous paraissent probables :'Sl.Mètm alors, elles peuvent être
:i> Iac. rit., irnt, 59.'" /le., Il, x«f, 78; mit. r»g; in, 67 xuv, in; uviii, j/i8.
11 Ac, II, vi, 16 "KcueanlemnasseCiiriutf<kniStntlonicousMelrodorus|m-lalralur.» Il fautrapprucliorde ce texte le pas^ignronservépar Vttutej-il'lk'riu-
laiiuut, oit Mi'lTOturcdôciuro<|ti«tes aul«>5|>tiilos»pltraont mat cumpris(îamé.iile
(KapvexSov mpaHnxoiw admt) {Iml. Ilercul., col. (tri, ti).
» Sert, .l/Vll,i(ï6f<»«/.* Sur la «tilKreno» entre te t&of»p d'Arcéilas et Ip mOnvàp de (."arnrade
voir pi»', haut. p. 1 11.
136 UV'itKH. – «HAtrfttE Ht
fausses? tuai» ces occasions sont rares, et cette châtiée tÊ&ttmr
ne doit pas rrous empêcher d'accorder notre assentiment aux
sensations probables; c'est sur ellesque
laplupart du temps
nuu$ réglons nus jugements et nos actions. Voilà la première
condition que (luit remplir une représentation pour limiter
notre assentiment.
En voici une seconde. Nosreprésentations ne sont pas iso-
lées: elles sont liées entre elles, et forment comme une chaîne.
Si je vois un homme, j'aperçois en même tempssa ligure* sa
taille, sa couleur, ses mouvements, ses vêlements, ses chaus-
sures; je vois aussi les chosesqui t'entourent: l'itif, la fermière,
la terre. le ciel, ses amis. Par exempte, si je crois voir Soeratc,
c'est quetoutes les circonstances accoutumées, sa figure, s»
taille, son manteau, sont réunies. Qu'une ouplusieurs
de ces
circonstances viennent àmanquer, j'entre aussitôt en défiance.
Ménélas, ayant laissé sur son navire le fantôme d'Hélène, «ju'il
avait amené de Troie, le prenant pour Hélène, n'en pouvait
croire ses yeux, lorsque abordant à l'île de Pharos, il vit la véri-
table Hélène. Si, au contraire, toutes les circonstances sont
réunies, ce concours est une garantie. Disons donc queta re-
présentation, outre ijuVIie est probable, doit n'être contredite
par rien (àitsptoTtxolos).
Faisons encore un pas de j*tus. An lieu tic se contenter de
voirque
dans ce concours de circonstances aucune ne nous sol-
licite en sens contraire, on peut examiner enparticulier
et en
détail chacune de ces circonstances ainsi dans les élections, le
peuplefait subir en particulier,
àchaque candidat, un examen
attentif. On examinera le sujet; on s'assurera qu'il a de bons
yeux. Est-il on bon état?.Vesl-il pas
fou? On examinera i'ubjel:
n'est-il pas trop petit? On examinera l'intemiédiairo entre le
sujet et l'objet l'air n'est-il pas obscur ou la distance trop
grande? le lieu est-il l»ien convenable? te temps n'est-ilpas
tropcourt? H faut en un root «pie la représentation soit exa-
minât1 en détail^Si^uStoftéw). Sans doute, dans les circon-
stfinn's depeu d'importiinrc.
dans le rours ordinaire de fa vie,
CARflftAD&– MVIE BT SA DOCTtUNK. U7
il est Hnpssibbde preaitre toutes ces précautions on se cuii-
tente alors des deux premières conditions, Parfais, te temps
in;tni|uo pour n'assura* que lu troisième estremplie. Un homme,
poursuivi par les ennemis, aperçoit une caverne il s'approche,
et croit voit*qu'elle est occupée par l'ennemi; il ne va pas exa-
miner la chose en détail, il se sauvo; la seuleapparence pro-
bable lui sullil. Mais un autre a du temps devant fui. Il entre
dans une maison mal éclairée voit une corde enroulée et se
figure que c'est unserpent; il s'en va. Mais à la réflexion, il re-
vient sur ses pas; leserpent
est immobile; il est probable quece n'est pas un serpent. pourtant, l'hiver, les serpents sont en-
gourdis; il faut s'assurer davantage; ilfrappe
le serpent de son
bâton, et décidément s'aperçoit qu'il n'a qu'une corde sous tes
yeux. On voit àquelles
conditions la représentation sera un
bon crilerittm pratique;elle devra être probable, n'être contre-
dite par rien, avoir été examinée dans tous ses détails.
Dans toute cette théorie, on l'a vupar tes paroles mêmes de
Sextus, Caraéadc distingue très nettement, comme les mo-
dernes, le point de vue objectif et le pointdo vue subjectif.
tl renonce absolument à rien aftirtner touchant lit conformité de
ta représentation à son objet, ta chose en soi par lit it demeure
en dehors du dogmatisme tel qu'on t'entend d'ordinaire; il nie
la certitude en tant que perception d'une réalité située hors (le
l'esprit. Sa philosophie est exclusivement subjective; seulement,
sans sortir du sujet et de ses représentations, il cherche d'abord
dans te caractère tfe la représentation, puissurtout dans te tien
qui unit les représentations* dans leur mode de groupement, un
équivalent pratique de cette vérité qu'il déclare théoriquement
inaccessible, Par là, il diffère dessceptiques proprement dits,
qui ne reconnaissent que desphénomènes
éparpillés et sans lien.
On peut dire qu'il occupe une situation intermédiaire entre tes
deux écoles. H importe cependant de remarquer qu'il no fait ou
ne croit faire au dogmatisme aucune concession importante,
puisque toujours il nie que l'esprit puissesaisir ou
comprendre
hors d<*lui une réalité véritable. Il est, à vrai dire, plus éloigné
I3& yVRE If.-GIUPITRU Ht
a: _fi i'i _c;lIn. 1;
a* (ioxTitE les Dieïx. On connaft la théorie stoïcienne, qui
regarde l'univers comme un être vivant, doué de raison, infini-
ment sage et disposant tout en vue des fins les meilleures. En
même temps qu'elle anime le monde entier et circule dans toutes
ses parties, cette intelligence universelle prend conscience d'elle-
même, elle se concentre dans une personne divine qu'on appelle
Jupiter ou Dieu. Et comme ce Dieu se manifeste sous une mul-
titude d'aspect différents, onpeut lui donner autant de noms
K
qu'il prend do formes diverses ces noms sont ceux des divinités
païennes, et les stoïciens se trouvaient ainsi d'accord avec lat
Q- [h Palo, XIV,tU. CI. XI, «3.
A la théorie de la connaissance telle qu'elle vient d'être ex-
poste, se rattache la théorie de Carnéado sur le libro arbitre.
Mais c'est seulement àpropos de la divination que les arguments
de Cuméade sur ce point nous sont indiques par les témoi-
gnages. Nous les exposerons plus loi», l'ourle moment, conten-
tons-nous deremarquer le lien qui unit sa théorie sur le libre
arbitre à celle de la connaissance. Si tous les événements du
monde, disait-il • étaient étroitement enchaînés entre eux, ta
nécessité régnerait an maîtresse; par suite, rien ne serait eu il
notre pouvoir. L'argumentation de Carnéacierepose donc tout ™
entière sur cepoint que quelque chose doit être en notre pou-
;l
voir; etqu'est-ce qui est en notre pouvoir, sinon l'assentiment B
que nous donnons ou refusons à nos idées? li n'insiste pas; il
semble qu'il parle d'une vérité incontestée; c'est qu'en effet tes
stoïciens ne te contredisaient pas.Pour tous les philosophes de
ce temps sceptiques ou dogmatiques, c'est une vérité incon-
testableque nous pouvons librement accorder ou refuser notre
approbation. Carneade fait seulement observer avec toute raison
que les stoïciens se contredisent lorsque, après avoir reconnu ta i
liberté de l'assentiment, ilsproclament
la nécessité universelle
ut absolue.
(tu dogmatisme (lue du scepticisme; II diffère des sceptiques pût'un» nuance* des dogmatisas par un
principe.
M
'l
r
(MHN&IOK. – Si VfK Kï SA i>ÔtiTRlNK, 13»
religion populaire, Optimisme et linatité, déisme et polj thôismo t
tout se conciliait dans leur synthèse un peu confuse. Sur tous
les points,(larnéailo tes combat il nie la finalité*, if conteste les
preuves de l'existence des dieux, il souvent que l'idéequ'on
se
fait de la divinité est contradictoire, il réduit à l'absurde les par-
tisans de la reitgiou populaire.
Pourquoisoutenir
que tout dan» le inonde est l'œuvre d'une
intelligence sage et prévoyante0'? Est-ceparce que
tout se fait
avec ordre, parce que le cours de* saisons, les astres obéissent
à des lois invariables t A ce compte, il faudrait dire que le Jlux
et le reflux del'Kuripe, les marées de l'Océan, les retours de la
fièvrequarte sont des choses divines. Est-ce
parce que tout est
faitpour
le bien de l'homme? Mais alorspourquoi tant de
fléaux, d'animaux nuisibles, de maladie!»-? Est-ce parée que
tout tend au bien dechaque
être enparticulier?
Mais dira-t-oii
quec'est
pour son plus grand bien que le pourceau est tué et
mangé (îl?
L'argument par lequel les stoïciens veulent prouver que le
monde est intelligent peut servir it prouver tout cequ'on veut<
lis disent cequi a la raison vaut mieux que ce qui en est dé-
pourvu rien n'est meilleur que le monde, donc le monde est
doué de raison. On pourrait dire de même il vaut mieux
connaître litmusique que
de l'ignorer rien n'est meilleur que
le monde, donc le monde est musicien.
Quand vous voyez une belle maison, dit encore Clirysippe *ai,
(l' T«ulc cellearjjumunlaliiinrapportée par Clairon (De util. <leor.tIII, it, ••&
et Meq.)n'est pas expressémentatlrilmw :i Carnéadii.Maisnous garonsparCicéron
i|iii> Canittido avait longuement discuté rcltn qm<slinn; <!' plu?, c|iii'lquM-iinM îles
raisons invoi|ucfs par Cicéron nous sont données ailtciiM ( l'orpliyce, lie aklin. tti
jo;SV'it., M., IX. i Ao etteq ) comme «tant de (liiméaid'. Ouest donc autoriseà croire (|«c Ci^Vuiiavait ettnt yeux nu
au
de avait
lu
le est d>> Clitonmipie
à croire fisse Ci''en)n uvait 80UStm yeux 1111ait lIIoill5 avait lit le tir. r2r· Clitoutailtie
et qu'il s'en servait. CC Tlûaticourl liimi sur les truite* philos, de Cieéron, l'aris,
IfacfniK-,iS8ôTp. a.fg.Cic, Ac, H, xiitiu, t»o.
<MPorphyre,Detiktin., III, ao.
(li Cic. D» liai. rf«ir.il(. 11. ti3.
!>; /W.,x,»6.
« MVKM ft. – GUAWTHK M.
vous savent»»qu'elle est fiwfe [w
des butines, «oupow
des
ruts; de même le momie est la demeure «Vs dieux, le le croi-
rais, répond Cufut'adc si j'étais sûrque te monde a été eoustntit
et non fuspi'nu! par la nature. La nature suffit à toutexpliquer.
Toutes lesparties de l'univers sont unies entre elles par un lieu
(le parenté qu'un appelle cnymSsm ce sont les forces de la
nature qui iiiaintimtnent cet accord, et non les dieux.
S'il y aquelque chose, poursuit Chrysippe^, que l'homme;
ne puisse pas faire, celui (lui le fait estsupérieur à l'homme;
l'homme nitpu faire ce (lue nous
voyons dans le monde-, tet
monde est donc l'œuvre d'un Dieu.Pourquoi d'un Dieu? ri-
t
poste Garnéade. Qu'est-ce Ilui prouve que cet être supérieur à
l'homme soit semblable à lui et, comme lui, doué do raison?
Pourquoi lie serait-ce pas la nature? Il faut. une rare oulrecui- t
dancepour déclarer
qu'à l'exception (tes Dieux, il n'y a dans la
nature rien de meilleur<ju<?l'homme.
Les Dieux dit-on nous ont donné la raison, qui nous rend
si supérieurs aux autres animaux. Quel admirableprésent! Ne
voit-on pas des hommes(lui tous les jours se servent de leur
raison pour mieux préparer etperpétrer d'horribles crimes '-1? s
Vlédée et Atrée auraient fait moins de mal s'ils avaient eu moinsa
tl'esprit. La raison n'est un bien que pour ceux qui en font un
bon usage, mais combien y en a-t-it ? Les stoïciens avouent que
pas une fois on n'a vu un sage accompli. Tout le mal, dit-on.
vient du mauvais usage que nous faisons delà raison; ce n'est pasta faute des Dieux. Déjantre non
plus ne voulait pas faire de mal
a Hercule quand elle luienvoya une tunique teinte du sang du
centaure. Les hommes du moins sont excusables quand ils se
Cic. De mil. ,leor., lit, a5.
'• Ihid. vu, l\:> vt w\. M. Tliiaiu'.oiirf (toc. cit. |i. tilt'i ) croit <|iie ( j'céron
n'a «pas <m ici <Ir ino<i>'le tftvr ou du meins <jti"ïl s'en estinspiré tri:* VibiviMnh.
(Ju'il *'m »>it inspiré librnmmt, c'est rn «jiw pnmïi>nt en oITel Iks nombi-etix
|jassa(»i»» htin-i iju'H cili». Mais ijiianl an foiwf !•• l'ir;;niii<'iilalion. il nous aoinbto
iiiihiliitaiit» rjn'il i?st <-niprunti: atr niwféle gmc. Cia;ron n'a ({«rire apporté <pm des
,upl, ,'1 .I~ âlalion~, fin voit. p~'I"e CORlIIINlt le rnr'prot,hp.lII('nt .'('gl fai'l'viiiplc* cl Jm citation». (In voit prp9«|ii(> loniuiciil ti> rapprodiomont sVst faitdan* son l'Hpril, quand il dit (vm 7») il\k' in sy*>pliel>i9 .learfomicuriuii
mort»rmilra •'riminun<>niopinioni'inii'm diibilal piifpiaii;ralinno.«
:i
c
lIAIWÉADIi – SA-VIK B't" SA iJOGTHJNtë. Ui
(ittiitiionti mais les Mieux! Aliettx valait nepas donner la raison
aux bonnues s'ils devaient ©n>abuser et co point. Un médecin
serait impardonnable do permettre à un malade do boire dit vin
pur s'il savait qu'il en boira trop et mourra.
Que dire enfin des muux dont sont accablés les- plus honnétett
gens et du triomphedes criminels ? Pisistralo régna longtemps
il Athènes; Denys, (lui s'était tant inoqué des Dieux, fut trente-
huit ans tyran de Syracuse. Et que d'exemples semblables!
Quelques criminels, il est vrai, sont punis: t justice tardive et
(lui ne répare rien.Pourquoi
nepas
les frapper avant qu'ils nient
fait tant de mal'"?
Et ces Dieux dont on parle tant, quelle idée pouvons-nouspous en faire? lis sont, disent les stoïciens, des âtres vivant et
corporels. Mais il n'y a point de corps qui ne puisse périr les
Dieux ne sont donc pas immortels. Tout être vivant estexposé
sentir le choc des objets extérieurs, par conséquent à être
divise, mis enpièces, c'est-à-dire à mourir. Tout corps est sujet
au changement la terre peut être divisée, l'eaucomprimée; le
l'en et t'air cèdent au moindre choc; comment n'en seràit-ii pasde mène d'un <?tre forme de ces éléments?
Tout être vivant a des sens c'est le signe distinctif des êtres
vivants. Loin de refuser aux Dieux les sens que nous avons, il
tant leur en attribuer de plus nombreux et de plus délicats.
Mais toute sensation, de l'aveu deChrysippc,
est une altérât ion
un êtrecapable d'altération est exposé
àpérir. De plus, avoir
des sens, c'est êtrecapable de
sentir le chaud et le froid, le doux
et l'amer, par suite, le plaisir et la douleur. C'est donc chercher
ce(lui plalt, éviter ce
ijiiifait souffrir, c'est-à-dire ce qui est
contraire à la nature; mais ce (lui est contraire à la nature peut
amener la mort. Et ne sait-on pas que toute sensation portée à
l'extrême est une cause de destruction ?Vivante®, la divinité doit être heureuse, mais ïv bonheur ne
(.'clin aij<aiiii>tilalr(ni csl foiïiit>lf(>iin>iit alh'ilmm» « Carm'-adi» par (acmm (On
imi.iltoe,, III. m, !if| cl »«/.)i't par Sostus (.11., IX. l'io <<*•'(/.).11 Ott* parti" nVsl pas foriwllcmpnl attribnô» t» Coméadi"; mai*. <"li« Ciccron
142 UVRE tL~ tHWtTHtë t».
m pa* sans la vertu h divinité aura doue lotîtes les vertus. Ltti
attribuerons-nous laprudence? C'est l'art de choisir entre le
Won et te mal; mais it quoi tui servira-t-elle, puisqu'elle ne
petit. éprouver ni bien ni mal ? Et latempérance Elle n'est une
vertu que s'il y a des plaisirs auxquels il est difficile de renoncer
on n'est pas tempérant pour dédaigner une vieille femme mori-
bonde, mais pour renoncer à Laïs ou à Phryné si on les a à sa
disposition. Et le courage? Montrer du courage; ce n'est pasboire du vin doux, mais se laisser brûler ou déchirer sans se
plaindre. Si les Dieux sont exposés à de telles douleurs, sont-ilsencore des Dieux ? La
sagesse suppose des obscurités qu'on, peut i1
dissiper: rien n'est obscur pour les Dieux. Il est également im-
possible que les Dieux aient toutes les vertus etqu'ils ne les aient
pas. Et s'ifs ne les ontpas ils ont, d'après un paradoxe fameux
des stoïciens, les vices contraires, car il n'y apas de milieu
entre le vice et la vertu.
Voilà d'inextricables difficultés; on en rencontre bien d'autres,si on considère, non
plus la divinité en général, mais les dieux
populaires dont Zenon etChrysippe s'attachent à démontrer
l'existence. Si Jupiter est dieu, ses frères Neptune et Plulonsont aussi des dicax 'K Si
Neptune est dieu, il faut en dire au-tant d'Acliéloûs du Nil de tous les fleuves, de ious les ruisseaux.Si le soleil est dieu, le jour aussi est dieu, puis l'année, puis le
mois, puis le matin et le soir. On dira aussi que la foi, la con-
corde, t'honneur, l'espérance sont dieux ou d&sses*, de fait, onteur a élevé des
temples. Mais quel homme sensé prendra toutcela au sérieux?
Pourtant, point de milieu: il fautaller jusque-
là ou nier l'existence de ceux qu'on appelle les grands Dieux.
Carnéade n'avaitpas la
partie moins belle avec les théories
stoïciennes de la divination m. Où s'exerce, disait-il, la divina-
oioim.cltwSexliw, elle semble fairecorpsavee la précédenteet n'n <Hre«iib lasuite.
" Ci. De met. deor., lit, «, 5,. c;f. S«st., M., IX, 18a.
lj Cic, Oe Juin., t, ir, 7; H, m, tj. li ne {tarait pas douteux que, <bm lo.ille «tmiupim livre du fin Mwmimiie, Cirênm ml suivi pas i pan un philosopha•tp la noMwfle Académie, M*
probablement OitiHiiaip-: aussi alfribiions-noiis à
CARMÉÂDR. -SA VfK ET SA IMJCTIUNE. Wi
.a..¥ I:.I~--1. 1:lo.. ,,1. 1tionî V» n'est pas 4
propos des choses «j«e les sensperçoivent
il sttflH de voir, (le toucher, d'entendre* Ce n'est pas dans les
différents arts auprès d'un malade on n'appelle pas un devin,
mais un médecin-, pour apprendre à jouer de la Mte, on n'a
pas recours à unaruspice.
Ce n'est pas dans tes lettres ou dans
les sciences demandez à un devin la solution d'un problème de
géométrie, ou ta grandeur du soleil. on le mouvement de la
lune. Ce n'est pas enphilosophie va-t-on demander à un
aruspice quel est le devoir, comment il faut secomporter à l'éjjard
d'un père, d'un frère, d'un ami? Ce n'estpas non plus dans les
questions dophysique ou de
dialectique la divination n'aa
jamais enseigné s'il y a un ouplusieurs mondes, quels sont les
éléments, comment on peut résoudre le raisonnement du menteur
ou les difficultés du sorite. La divination no nous instruit passur toutes choses: elle n'a pas non plus de domaine propre il
n'y a pas de divination.
On répond que la divination a pour objet la prévision des
choses fortuites (l). Mais si cequ'elle annonce est vraiment for-
tuit, comment peut-elle le prévoir? Si l'art. si la raison, si l'ex-
périence, si Ja conjecture peuvent quelque chose, ce n'est pasde divination qu'il s'agit, mais de science ou d'habileté. Et lu
où toute conjecture raisonnable est impuissante, iln'y
a rien
qu'on puisse prévoir; comment prédire ce (lui n'a aucune cause,
ce que rien n'annonce? Sur des indices incertains, comment
fonder des prévisions certaines ? Un Dieu mêmey perdrait sa
peine. Si un Dieu prévoit t'avenir, l'avenir est certain; s'il est
certain, il n'y a plus de hasard. Mais it y a, dit-on, du hasard:
il n'y a donc point de divination.
Les mêmes stoïciens, il est vrai, qui appellent la divination
la prévision des choses fortuites, disent que tout est soumis à la
Carncadc,bien«jn ilni-soit pat nommé |iarlotil, tViiwtnblede cette .iqjmnoiila-lion. Voir: Sclriclinr, Ik fontihm lilmrum iMertmis </ni mut da dkhialMite, loua,
187' llarlfeldor, Dit Quelle» <*« Cicom't :uw« Bùchern de dimnatiom. Kivib. in
Rrôgaii, 1878; Thiaiieniirl, «p. «(., |i. ifi?.'• ? fft. Il. f. ,'1.li.
Ma LtVlHS U.-CH,U»l?nK HT.
roi iiit'wrnbk' (lu destiti. Muis alors i\qu«i surt ta divination01?
Si «m no petit emp«Mter ce qui doit arriver, t\ quoi bon tepré-
voir? Il vaut bien mieux l'ignorer. Qtictt» vie que celle de
l'num si dès son enfance il eût connu le sortqui l'attendait.!
l)ira-t-on que l'attente d'un mal petit l'alléger? Mais le Jupiter(l'Homère m» s'afflige4-i! pas (le ne pouvoir soustraire son fils
Sarpédou il la tuortprédite par le destin ? En deux mots. s'il
y a du hasard, l'avenir n'est pas certain, et ne peut être prédit.Et si l'avenir est certain, si tout est fatal, il n'ya pas non plusde divination puisque lit divination est définie le pressentimentdes choses fortuites.
Serrons Inquestion de plus près et entrons dans le détail. Il
y a deux sortes de divination. La divination savante, qui reposesur des règles et des préceptes fixes; elle interroge les entrailles
des victimes,interprète
lesprodiges,
lescoups
de tonnerre, etc.
La divination naturelle est une sorte «l'inspiration aeeordée à
quelques privilégiés sans préparation et sans art les songeset les oracles révèlent l'avenir.
Sur quoi repose la divination savante fe" ?Comment a-t-on
appris ce que signifient les entrailles des victimes ? Est-ce parune longue observation ? Qui a fait ces observations Quelle en
a été la durée ? D'où a-t-«n su(lue telle fissure annonce un
péril, telle autre un succès? Le» aruspices d'Egypte, d'Étrurie,
de Cartilage se sont-il mis d'accord sur tout cela ? Au contraire
ils sont clivisés, Et les Dieux mêmes ne s'entendent pas entre
eux35. Si on sacrifie àplusieurs Dieux en même temps, l'un
menace, tandis que t'autre promet; les mêmes entrailles offertes
àApollon sont favorables-, à Diane, défavorables.
S'il y a «lesprésages, comment sont-ils possibles? Les parti-
sans de la divination ont recours à un merveilleux subterfuge111.A:ous ne savons pas, disent-ils, la cause des présages, mais
(' De ilitt, H vin an.
!) HM.. tu, »8.
i<r», :ts.
xi. a;. Cf. u, ilj.
(UHKtADE. -SA VIK Ht SA ÙOCflUNK. Ub
H'
noti» savHBs *f«*Hy en a; c'est. un fait, tous tespeup^s Font
reconnu; mille témoignages le prouvent. El ilsmultiplient «
l'infini lesexc'.iii|iios et tes fables.
Mais est-ce à l'avis d'uni' multitude ignorante qu'il faut h'm
rapporter!»? Bt s'il lu faut, que (liront les stoïciens, quuud la
môme foule déclarera rjue le plaisir est te souverain bien ? Quantaux faits qu'ils invoquent* ils n'ont pas jiris lu peine de les con-
trôler: ce sont des fables qu'ils acceptent de toute» mains. Est-ce
fà une méthode dephilosophes? Et depuis ({uund les
philoso-
phes renoncent-ils à chercher les causes? Les stoïciens s'ima-
f;iin;nf-ils qu'on lesdisjiensera de s*e,\[iIi«jHer sur i:<;point
Il y a deux manières de rendre compte desprésages; ils ré-
sultent ou de la continuité* de lit nature, des liens étroits tpiiunissent toutes les parties de l'univers, ou de rintervenfiott des
Dieuv
La continuité delà nature, ce{|tteles stoïciens
nppellcnt wp-vaOeU, est un fait bien constaté ait solstice d'hiver, le foie des
rats se gonfle; on voit des cordes résonner d'ellçs-miimes, quandon en a touché d'autres dans le voisinage; les huîtres et les co-
quillages grandissent avec la lune. Mais entre une lissure du
foie et leprofit qu'on m'annonce, quel rapport peut-il y avoir?t
Mon petit bénéfice est-il étroitement lié au ciel, « ta terre, il
l'univers entier Et quand on va choisir une victime entre tant
d'animaux. Ohrysippe vient nous dire qu'une secrète inspiration,une force divine
préside à ce choix? On en rougit pour lui. Les
stoïciens vont pins loin encore ils disent .qu'au moment où un
saerilico va commencer, les entrailles sont tout Mcoup changées.
Voici un veau dont le foie sera sans tcHe s'il est choisi par tel
sacrificateur, avec une tête, s'il est choisi par un autre. On en
voit dont le «pur s'envole tout il coup, on nu sait où. Ce sont
des physiciens qui disent cela ? Quelle vieille femme le croirait ?
Dira-t-on!J! que lesprésages sont les moyens par lesquels les
m mit. 8r.
»uv, ."tS.
''«ï, r.'i.
Î46 LIVREIfc – CIf.mîRBIII.IQtt btVRCr lit – lilUrHIVft Ht.
Dieu* nous st|jniftL'nt leurs intentions? Mais patmuntt leurs
avis sont-ils si pu clairs quenous ayons besoin d'interprètes
pour les comprendre? Kt pourquoi nous annoncer des périls
qut» nous lie pouvons éviter? Un simple honnête homme n'agi-
rait pas de la sorte il n'annoncerait pasù ses amis des calamités
inévitables; un médecin n'avertit pus les malades (tout il prévoit
la mort certaine, Il faut, si les Dieux veulent que nons soyons
avertis, qu'ils s'expliquent clairement, ou s'ils veulent nous
laisser dans l'ignorance, qu'ils nous y laissent tout à fait, et ne
nous troublent j>us par d'obscurs avertissements.
Tous ces pétentius prodiges ne sont dus qu'auhasard. Uans
les carrions de Cliio 'I:\ on a trouvé, en fendant un rocher, la
tète d'un Panisque. Uans tout bloc de marbre, ily
a des têtes
dignesde Praxitèle. L'artiste fait-il ses chef-d'œuvre autrement
qu'enenlevant certaines parties tin marbre La hasard en
peut
faire autant. C'est une fiction soit. Ne voyons-nous pas souvent
dans les nuages des têtes de lion ou (les hippocentaures? 't
Disons mieux, il n'y a pasde hasard tout n une cause '*>.
Nous pouvons,en bien des cas, ignorer la cause; elle existe
cependant, Chrysippeest le premier Il en convenir. On » vu des
mules fécondes, je le croîs. Si elles ont existé, c'est ijue cela
était possibleit y avait une raison, il n'est rien, dit-on, fille
les Dieux ne puissent faire' Qu'il leur plaise «le faire des
sages 11 y en a moins «[tte de mules fécondes.
Reste la divination naturelle. S'il y a des Dieux, dit Chry-
sip{>e;> «t qu'ils n'annoncent pas ans hommes l'avenir, ou bien
ils n'aiment pas tes hommes, ou bien ilsignorent
eux-mêmes
l'avenir. on ils croient <|uenous n'avons pas d'intérêt le con-
naître, on ils trouvent indigne d'eux de nous le faire savoir,
ou ils n'ont pas le moyenlie nous avertir; tout cela est impos-
sible: donc il est impossible qu'il y ait des Dieux et qu'ils ne
': Iktliv., I, tin, *3; II, «I. 'iS.
*• mut, tit.
fit. Kti,
WX- tul.
aKNfolM.~iU VIK KT SA DUtiTHINK. 147
«an» avertissent {«««.Or il y à des Dieux* donc ils nous aver-
tissent.
Admirable raisonnement Mais comme il prend pour accordées
une foule «le choses dont on «ligule « S'il y a des Dieux, ils mil
bteueeillant*aux hommes. » Qui vous accorde cela t Est-ceÉpuuro ?t
« Us n'ignorent rien.» Beaucoup de grands hommes Font contesté.
«//mhu»importe tk connaître tavenir.n De bons esprits n'en con-
viennentjias.
« « 'estjtm ô«%«c d'eux île nom le faire connaître, r>
Sans doute ils visitant ta maison de chacun pour savoir cequi
fui est utile! « Or il u aenDieux. » Tout le inonde en convient
donc f
Chrysippe n rempli tout un volumefl) de récits d'oracles et de
sonjjes. Mais dans ces prédictions, «jue d'équivoques Quandloracie avertit Grésus
qu'en passant le fleuveHalys, it renver-
serait un grand empire, il était bien sâr de nepas se tromper:
t empire do Crésus serait renversé, à moins que ce ne fut celui
de son ennemi.Quelques préilielions se sont vérifiées: c'est un
hasard. iTa-t-on pas ouï direqu'elles n'étaient pas toujours
désintéressées? ÏWmoslhènes n'oceusait-ii pas la Pythie d<>
pliilippisert Elpourquoi les oracles sont- ils devenus moins
fréquents ?Pourquoi la Pythie est-elle àpeu près muette Le
temps aurait-il affaibli ces exhalaisons tic la terre qui inspiraientla
Pythie ? C'est donc comme le vin et les salaisons qui se
gâtent avec les années. Mais quelle est cette force divine que le
temps petit affaiblir? Car c'est vraiment une force divine, si
jamais ily en eut, qui donne la
prévision de l'avenir, et permetà ses
interpièl«;s de parler en vers. Etquand s'esl-elle évanouie? t
Kst-ccdepuis que
les hommes sont devenus moins crédules ? Us
"racles s'envont; la fortune n'est
plus fortunée qu'à Prénesle m.
C'est surtout par les rêvestitre les Dieux interviennent dans
les affaires humaines.Mais pourquoi y a-l-il tant de ré*ves
trompeursM ? Est-il di|»ne (les Dieux dï;ptn>r dt> faillies
in, u 5.
">«11,87.
Mil,!••
.ttt UVBB. th Ctr4PtTRK III.
liôftimes ? M stfy
» des rêves vrais, d'autres faux, fequef signetes
distinguer? Pourquoi les rcWes sont-ils si obscurs? Chrv-
sippe^ rdeon'ti*qu'au homme vit eu rêve un œuf suspendu sm
sangles tle son lit; un èmn tut ditqu'un trésor «''lait caché sous
son lit; on creusn. on trouva le trésor, une bonnequantité d'or
ontouré d'argent. Mais d'autres n'ont-ils jamais rêve" d'un œuf?
Combien do pauvres gens, dignes de la protection des Dieux.
<|uo leurs avis uont jamais mis enpossession d'un trésor ? Kl
pourquoi, an lieu tUee syruWe bizarre, ne
nos dire clairement
qu'if y avait litun trésor ? Kt onlin, quelle iddc s« fait-on desDieux iminortcts? Vont-ils visiter les lits. Epsgrabat» de tousles mortels, et tandis
qu'Us ronflent, leurjeter des visions em-
brouillées, <ju« leur ils vont, pleins d'épouvanté, porterà des
interprètes ? N'est-il pas plus simple etplus vrai de croire-
que ruine garde la trace desimpressions qu'elle a subies, et
revoit on rêve les idées(lui
fontpréoccupée pendant la veille ?
La divination, sous toutes ses formes, est donc illusoire. II
ne s'ensuitpas qu'il faille détruire la religion fï). La
religion ne
peut que gagner à i-tre débarrassée de toutes cessuperstitions.
Le sommeil est lerefuge où nous nous reposons de toutes les
fatigues et de lotis les soucis: c'est pourtant «le lui que naissentles
plus (grandes inquiétudes et les plus grandes terreurs. On les
dédaignerait, si lesphilosophes ne les avaient prises sous leur
patronage; il fallait bien leur dire leur fait et réduire à néant
toutes ces subtilités et ces cbi mères,propres seulement à trou-
bler lesesprits.
A la question tle la divination se lie étroitement celle du
libre arbitre Carnéade l'a traitik* avec saprofondeur et sa
pé-nétration habituelles: il una donné une solution hardie i-l ori-
ginale.
Le problème se posait pour sescontemporains d'une manière
bien curieuse. Deuxpropositions, doux axiomes.:
sur lesquels repo-
/Ar..H. r.u. i3'i. i.
I.UII, l'iK.
tiABH&UlR.-SA VIKKT SA IM>GTHtRJt tfttt
S;li(!Ut toute ta iittvstuiti;i-( liittti>f:> AuA,il .“(..••
..a. m 1 f)~1 mt1 r~ittl r rltPrri. tat
stitiml toute fa|Ay»4iHi(!(twufora dialectique, conduisaient {ont
droit au fatafisi».. «talu nécessité universelle l>e«es propositions:
Tout tmemeut <«%* nue came, toafc imeriùm fuite porte w le
/«vWm*o« /W,v ert mv« oufausse, comment ne pas conclure
«fut! tout /enchaîne, que tout événementquel qu'il soit
dépenddes événeuienls
oniMoun, |»ar suite est déterminé d'avance, estcertain, et peut èlm
prédit t El dire«,uo tout s'encltaîno, uuo h
l'atum est Ja loisupràne du monte, n'«sl-co pas dire
que* toutarrive
iiécessttiretMBnt (j«*i| n'y “f»oint de place pour lu liberté t
Si ou accorde les deuxpremières propositions (et comment s'y
rofusurf), iiosl-onpas entraîné de foreo à admeltiela troisième
et I»ijuad-ième? C'est, en des tenues un ^rdiflSrente, l'éternel
problwm' de la(«science divine estdu libre arbitre.
l'enoimucependnnt ne voulait aller
juseju^tt \)m{. p0Mrtrouver des
partisans de la nécessité universelle, il font, suivantLieW», raooBlcr à Heraclite, à Uémocrite, à Kn.pédocle età AnstokL La morale, qui est le souci
princifial de toutes lesécoles
philosophiques postérieures h Arislote, ladiakclitmemetne, aageut que l'on fasse une pince à la liberté, que quelquechose soit en notre pouvoir, que nous puissions accorder ou re-
fuser notre assentiment. Autremont, à quoi bon discuter? A
quoi bon donner despréceptes de morale? ï
Les stoïciens étaient fort embarrassés. Leur théorie de fa lii-vimitiun, les
principes de leurphysique, |(,»tr théorie de l'unité
de letre tout concourait à les contraindre de s«.prunoncur
pour1.
lalulisine; aussi neperditient-ils aucune occasion <l'af-
fimier lenchamement uniirersel des phén.miônos. tt fallait pc»«r-lant sauver la liberté. Pour
y |wrvenir. Obrysippe ii.Kijjin» unedistinction entre la fatalilé et la nécessité. One chose, suivantlui, peut are fatale, c'est-à-dire amenée pur «ne série
impos-sible à
rompre d'événements antérieurs, sans être nérnssairo; ilest
possible lo(;î,,uemonl qu'un évém.m«.,il futur n';inm|mSi
quoiqu'il suit certain qu'il arriu-ra; aussi peut-oti |«.prédire
tl; tr~. ~INYf, CYtI..S,r.
15» LIVRE tt – CHAPITRE: Hl.
amm q«*iieusse tWtFe
«Hrtittjfeftt. Netts tûivotispas
à entrer ici
dans le détail de cette théorie flH if est aisé do voirque Uliry-
si|ip« avait fort à taire pour justifier sa doctrine s Cieéron nous
dit qu'il sua sîuijî et eau'1, et nous n'avonspas de peine a h
croire. Carnéade n'était pas {tomme à ne pas proliter (te ses
avanta|jes-« il ne paraît pasf3) cependant qu'il ait sur ce point at-
tnrjtté son adversaire»trop durement w.
Lesépicuriens, tout aussi intéressés
queles stoïciens, et
pourles mènes raisons, à défendre la liberté, avaient pris uu
parti
plus radical: ifs repoussaient eu bloc lesquatre propositions.
De là leur théorie du dintimn. M y a, disent-ils, des mouve-
ments sans cause fD).fl y a despropositions qui
ne sant ni vraies
ni fausses'•). Mats de telsparadoxe» étaient un seantlata
pourles
physiciens autant que pour les dialecticiens.- Cicéronv bien
qu'à tout prendre il soitplutôt disposé fi se résigner à suivre
cetexemple qu'à accepter le fatalisme stoïcien {7), ne
peut s'empé-eber de s'indigner onde railler1'8'.
d'armîiuttf vint nu secours desépicuriens avec
quiil avait
(ait campagne contre les stoïciens sur laquestion de la divi-
nation: pent-étre est-ce le prétexte' dont il se servitpour ré-
soudre à son tour, sansparaître tomber dans le dogmatisme,
un problème dillitile, bien digne àcoup sûr de sa virtuosité
dialectique.
Ilcommençait par établir, à l'aide d'un soiïte. contre les stoï-
ciens, qu'il estimpossible d'admettre le Fatum sans nier la liberté
''• X'mis Pavons uxponx dan» noire i.(m-i.iil, l)e tmeiaiuue xloki (jidd tauvriut.
Pari», tl. IJ.tilft.-re, tf^g.
lie fnb>, a|>. lit-Il., ,V..J. VI, J T(;iuysi|)|iin ;ifslii.i»s l.ilwrnnsi|in-.ifM fiif», xiï, Ht -Niillnni iiiHiilH-lint calumiikiii.i
l'ctit-iHn.' Cici-ni» >'in^|)in'-l-il (•* Carnéiiile il.m* <a oitii|tir> ,(« ur;;iniioiib•le i;iiiy<i|i[j<: >ui- li>s Clial.lwiis .-t cuire la llrciiii.i <lt><jwwiM.-s il.- [)io,'lHrc, n,
ï, i«i. TmiMuU. (jiiinwnl.- n'ist |«s nmnnii1 ilaiis i-i>ll.><li$-ii&$ioii et il si-mlj|i!
[.lus |iitilnili| .pi,- c>>Mini <'H a l'injjriiiil.- li!s ék'Uit-n[!i à il'iiulri-s philosuplira.ih' Fatt>t •-•.
I. ! tvi. :t-.
X. I
«ïi.:<«.
CARNÉADË. SA VIK ET SA UOGÏIHMK. 151
«Si [mit arrivepar
(tes causes antécédentes W<tous les événe-
iiiciils sont lif'*s outre eux par un étroit Vit eu est
ainsi, la nécessité produit tout. Si cette conséquence eut vraie,rien n'est en notre pouvoir. Or
quelquechose ost en notre
pouvoir. Mais si tout arrivepar
ic destin, tout est produit par
des causes antécédentes ce n'est doncpus par
lo destinque
tout arrive.»w
Esl-ce direque, pour conserver ta liberté, on doive nier
que rien ne se fasse sans cause, ouque toute proposition con-
cernant l'avenir soit vraie ou fausse!->Y Carnéade ne lepense
pas. II n'est pas besoin, selon lui. pour résister ù Chrysippe,de recourir a la vaine hypothèse du eliumneit. II n'y a pas de
mouvement sans cause, pourrrtit direKpieure; mais tout mou-
vement ne résulte pas de causes antérieures; notre volonté ne
dépend pas de causes antérieures. Quand nous disons qu'unhomme veut ou ne veut pas sans cause, c'est un abus de (an-
gage; nous voulons dire qu'il se décide sans cause extérieure et
antérieure, mais nonpas
absolument sans cause, (-'est ainsi
qu'un vase vide, dans le lanyajfe ordinaire, est un vase où il n'ya ni vin, ni (tuile, mais non pas absolument vide. Quelle est
donc la cause du mouvement volontaire? Mie est dans sa na-
ture même, qui est de dépendre de nous, de nous obéir: la
volonté est elle-màne une cause.
Ainsi, pour échapper aux raillerie» desphysiciens,
onpourra
dire que l'atome se meut, non pas sans cause, mais parce qu'ilest dans sa nature (le se mouvoir par son propre poids; sa na-
ture est la cause de son mouvement.
K» d'autres termes, a côté des séries d'événements étroite-
ment liés entre euxpar une nécessité naturelle, il y a des causes
qui ne dépendent d'aucun antécédent, qui apparaissent fortui--
Hï, 3l.
(1) Kl, ;)3. Ntcds «divans ici te Iraiht nullité, otiucur et soitvviit inroliûrrnt rte
Cicûiun, ma» en «.'ssayaiil d'y mettre! nu («m il'untrv. il hW pat ttoiiteut (|iteCiixTcm se soil ins(iiiv i(e Clitiiiun(|iie t[ui n|inidiiil les iiliiws ilij (':irin:iiit>>.
l.f. 'fliinuromt, lue. cit., |>. hSi>.
fé2 unuî tt. (mumM m
tement'»*, roMjMMrt b trame «les événeiBimte. s'y insèrent, et
produisent de nouveaux effets.
Par suite, l'action d'une véritable cause nepeut être prévue;
l'événement seul h découvre S- Tantque Pliiloctèt» n'avait pas
été blessépar un serpent, quelle cause y avait-il dans la nature
pour qu'il fut abandonné dans l'lie de Leninos?
Cependant, si l'action do ces causes fortuites ne peut être
prévue*, en elte-mdtne elle est certaine. Nous touchons ici ait
point essentiel de toute cette argumentation. Les événements
futurs sont certains, mais d'une façon enquelque sorte abstraite.
sans qu'aucune intelligence, fut-ce celle d'un Dieu, avoirconnaissance de cette certitude; car personne ne peut savoir
d'avance quand les causes fortuites interviendront. Apollon lui-
même ne connaît le passé que s'il en reste quelque trace w; à
plus forte raison ignwe-t-il l'avenir. Il n'aurait pu prédire le
crime«l'Œdipe, parce qu'il n'y avait dans la nature aucune
cause antérieure (lui forçât Œdipe â tuer son Pourtant, il
était vrai de toute éternitéqu'OEdipe tuerait Laïus, et
que Plii-
loctète sciait abandonné à Lemnos.
Qu'on ne disepas que cette théorie revient au même que
celle des stoïciens. (le n'est lias la même chose de dire que tout
est vrai de toute éternité, ou (lue tout arrive en vertu d'un en-
chaînement Fatal. Deceque toute
proposition £ii est nécessaire-
ment vraie ou fausse, il ne s'ensuitpas immédiatement qu'il y
ait d«s causes immuables et éternelles qui empêchent les choses
d'arriver autrementqu'elles n'arrivent. » La proposition est vraie
parce ijhrdes causes surviendront à un moment donné qui réa-
liseront l'événement annonce. Par suite, cet événement aura
une cause, et il reste vrai que rien n'arrive sans cause.
Mais tout en accordant que rien n'arrive sans cause, la théorie
(1) />«•Fiito,mt, a« Fortuit.mot causa;i|ua>eUirimilnt voretlicanltir«juœita (licontur veniet in Sciiatum Calo, non inclitsa' in rerimi naluni aiijtit? tuunilo.»
'» m.37: Batio evi'»lusa[KTi(c,iiiaiif.r>
; m, ;i«, ;«.1
xii. iK.
CAHNiUDK. – SA V1B-RT SA DQCTIUX& 153
de Carm'ude diffère (Eo-celfe tins stoïciens en ceque l« cause
«l'un fait n'estpas
\im ellu-iotate à des émises éterneltes. Les
stoïciens sont dupes d'un» illusion ils confondent ta succession
et la causalité. Un événement arrive à la suite d'un autre sans
lequel il n'aurait pu seproduire"} ce dernier est-il la cause?
En aucune façon. A cecompte, il faudrait dire
que si je joue à
la paume, c'est parce que je sais descendu auchamp de Mars,
qu'H&ube a été lit cause de la ruine de Troie pare qu'elle a
donné le jour à Paris. Le voyageur In'en vêtu serait la cause quile fait dépouiller par un voleur. La vraie cause n'est pas seule-
ment cequi précède un fait, eest ce qui a une ellicaeité natu-
relle, une vertu, une action c'est cequi. une fois posé, amène
ttdcessnireirtent son effet. Ainsi la blessure est lu cause de la
mort, le feu de la chateur.
Par là se trouve résolue la difficulté tirée do l'argument pa-resseux. Nui ii te droit de dire
qu'il guérira d'une maladie si
tel est son destin, soitqu'il appelle, soit qu'il n'appelle pas un
médecin. Le médecin serapeut-être celte cause, survenant à
t'improviste, qui doit le sauver.
En résumé, tandisque Chrystppe coupait la chaîne des
quatre propositions indiquées ci-dessus, entre ta troisième et la
quatrième, Ctniéade s'arrête à la sc-conde, un plutôt; ilcoupe
cetteproposition par le milieu, accordant
que l'avenir est vrai
ou fativ niant tpj'il puisse êtreprévu.
Telle est ta théorie de (larnttade.Quelques réserves
qu'elle
appelle,on n'en saurait contester
l'originalité; onne peut
nier
nonplus la profondeur de ses
remarquessur ta nature des
causes et la (lillérenee de la causalité et de la succession. Mais
te qui est surtout remarquable dans ce mémorable débat, c'est
que parmi ces philosophes si différentsd'origine, d'esprit, do
tendances, parmi cesdisputeurs si iu-tiarnés, parmi ces
espritssi subtils et si hardis, aucun lùiil songé à nier la liberté.
•!° CuvriiK u MoiiaK. Les idées de Caméade sur ta morale
w..Vi
154 LIVRK II. – «wUHTuK lit
nous sont surtout caitnitns msif son f»utt>u« <(>•»'»»!•<><
·w- usvssu aa.y.uleilei lfLv
nous sont surtout connues |>ar son fameux discours contre ht
justice, dont Cieéron avait fait uneanalyse
(bris le IH* livre du
lielïepuljlka, malheureusement perdu; mais Laclunce nous on
a conservé quelques fragmente;, ou outre. ou rencontre dans
les ouvrages de Cicéron quelques-unes descritiques qu'il diri-
geait contre la théorie stoïcienne.
Lajustice1", dtsait-il à Home, est d'institution humaine; il
n'y tt point de droit naturel, antérieur etsupérieur aux conven-
tions conclues par les hommes, sans autre règle que leur inté-
rêt. On voit en effet que te droitehamje suivant les
tempset les
pays. Si d'ailleurs il y avait une justice, ce serait une suprêmelotie-, car la toi de la nature pour tous tes êtres vivants est de
chercher ce qui leur est utile. Les peuples les plus puissants, il
commencer par tes Humains, n'ont aucun souci de la justice;autrement, ils rendraient tout ce
qu'ils ontconquis et retour-
neraient fi leurs chaumières.
Comme les Klats, les particuliers consultent plutôt leur inté-
rêtque la justice. Un homme possède un esclave rebelle, ou
une maison insalubre il est seul ù connaître ces défauts, et il
veut vendre son esclave ou sa maison. Ira– t– dire à l'acheteur
que son esclave est rebelle, ou sa maison insalubre? S'it te dit,
il sera juste; mais il sera aussi un fou, car il vendra ù basprix,
ou ne vendra pas du tout. S'il ne le dit pas, il attira sagement,mais malhonnêtement. Carnéade citait plusieurs autres ras de
conscience fe: ce sont tes mènesqu'on voit reparaître au troi-
sième livre tlu De nj/îem il parait avoir été indirectement le
fondateur de lacasuistique.
Jusqu'ici on peut être juste sans courir de grands dangers;on ne meurt pas pour être pauvre. Mais voici des cas plus dilli-
ciles. Que fora l'honnête homme dans un naufrage, s'il voit un
de sescompagnons, plus faible
que lui. en possession d'une
planche qui ne peut porter qu'un seul homme? La lui enlèvera-
l-il. surtout s'il s'est assuré qu'en pleine nier nul nel'aperçoit?
l.ai-t. Ih'viu. InMil., V, i.">.'
fin., II. xvm.û(|.
t~i ti 1%f. Aille. s.1 VŒ ET SA ROCTtttNK. 1 Iii)
l'_ kt. )~ ..<!
If reitftWiu s'il eut sage: s'ilaime mieux périr» on
l'appelleral
un juste, mais un fou. Bans une défaite, nu homme est pour*suivi
par les ennemi» il rencontre un Messe" installa sur un
flievttl; i« l«issem-l-jl aller, aurisque
depérir lui-m<îme, ou h l
jettera-t-il à bas, [iota- échapper? Dans le premier cas, il agirasagement et malhonnêtement honndtenient et follement dans lesecond.
Iln'y a
point de justice, voilà la conclusion du discours de
Carnémle. Aen juger par cet dehanttllon de sa nionrère, on peutdire tenté do croire qu'il faisait
publiquement profession d'im-niontliid. Toutefois, il serait injuste de rester sur cette im|tre8-sion. D'abord, nous savons par des témoignages précis qu'avant
d'iitta(jucr lesprincipes de la nmmle,
Cnrnéade avait expose" enfort beau langage toutes les raisons qu'on peut invoquer en leur
laveur, tous les arguments que Socrate, Platon, Aiïstote, Chry-sijipc avaient tant de fois
développés. Si les documents dont nous
disposons nous renseignent moins complètement sur cepremier
discours, et le laissent un peu dans l'ombre, c'est sans doute
parce que ces arguments étaient plus connus de tout le monde.H ne parait pas que Carnéade ait été moins éloquent te
premier
jour que le second; son ambition on sacoquetterie était
d'expri-mer avec une éjjale foree le pour et le contre. Ses discours de
Home, si on voulait le juger d'après eux, prouveraient simple-ment l'indécision de sa
pensée sur les questions do principes; on
ne saurait en conclure qu'il ait favorisé la thèsenégative.
Mais sans vouloir abuser de distinctions subtiles, il semble
bien qu'il faut ici faire une différence entre lephilosophe et
l'ambassadeur. L'ambassadeur se trouvait dans des conditions
particulièrement délicates; nous reviendronsplus loin sur ces
discours de Romequand nous aurons a apprécier la valeur
propre et le caractère duphilosophe, Pour le moment, c'est de
son enseignement qu'il s'agit; et on conviendraque pour s'en
faireune juste idée, il faut connaître ce qu'il a dit à Athènes,
bien plufôl que tes discours qu'il « {finis à Rome.
Iiïpiicwp. nous savonsqu'il il les stoïciens avec son
tm LfVBK H. Cil.U'ÏTKK lit t
ItitllclIftlH îlf'ffftl'ltiiltltllkf ifctCitxt lliïifii Itn/tato, n/m ilit ii..fc,î.I;;habituel ucliuracinciil, mais nous avons peu de r<!tts«igi(UHU>tttssur le détail de cette
phsfniqiit>. Sur deux points smdetnuut tes
textes nouspermettent Je nous luira une idée de sa eritùroe.
Laquestion du souverain bien, toi que lo finissaient k>*
stoïciens, attira son attention, et il poussa son attaque avec une
telle vigueur tjtt'it força ses adversaires à reculer et à modifier <
leur tht5orte.
La vertu, disaient les stoïciens, est fe seul bien; J« vice. le
seul mal; tout le reste est indiffèrent. Mais, d'autre part, lit
vertu consiste, suivant eux, à chercher ce Ilui est conforme il la
nature. Comment tous ces avantages conformes la nature, quele sage doit chercher, seraient-ils indifférents? Ils
ont jiar eux-
mêmes une certaine vatcur ce sont des biens* La vertu n'est
donc [tas lo seul bien. En deux mots. si le seul bien réside seu-
lement dans tapoursuite d'une chose, dans l'effort pour l'at-
teindre, il n'est pas besoin lie parler de la nature et de ce <juilui est conforme; surtout il ne faut lias appeler les biens naturels
choses indiltérentes. Si on tient compte de la nature et de ce
qti'oHe réclame, il ne faut pas faire consister te bien dans la
seule intention, dans la seule vertu.
Les stoïciens essaientd'échapper
à Pobjeetton en distinguant
parmi les choses indifférentes celles <|ui sans (ître bonnes, se
rapprochent davantage du bien(©po»;y{tsW) et celles qui, sans
être mauvaises, s'en éloignent (âvovpotryftépa). (Test, répond
Cari«!ade!1;, une manière détournée de revenir à cequ'ont en-
suignû Ptaton, ArisEote, toute l'ancienne Académie. De lit, le
reproche tant lie fois adressé aux stoïciens d'innover dans les
mots plutôt que dans les choses, lis mettent en avant de grandsmots et font les fiers; mais ou bien ils se bornent à
répétersans franchise ce
flue d'autres ont dit avant eux, ou bien, si Ott
les suit au pied de la lettre, ils se contredisent.
Cette difficile question (qui divise encore aujourd'hui les
moralistes) paraît avoir été chaudement débattue cuire (Jarnéade
' Cic. K».. III. ut, 'ii. 7W., V, 'm.
CUINÉ.IDE.– SAvlK Wt M DQUÏtWNK. 157
«t Attttpnter m. ho bien, selon tes stoïciens, consiste oBsenlielie-et Antipatcr m. ho bien, selon tes stoïciens, consiste essentielle-
ment a l'aire un choix raisonnableparmi tes avantages naturels.
Mais, objecte Carnéade, utt choix ritisonnitiiie suppose une fin;
«Hielto est cette fin ? (l n'y en npas d'autre, répondent-ils,
«jih> de bien raisonner dans io choix des actes conformes ù la
nature. Mais d'abord l'idée du bien apparaît etdisparaît en
mène temps. Pour bien raisonner» il faut connaître la fin. Mais,
famine la lin est de bien raisonnai*, ifn'y
a ni droite raison sans
ta (in, ni fin sans la droite raison les deux notions nous
échappent à la fois. En outre. chose encore plus grave, pourfaire un choix raisonnable, il faut tenir
compte de ce qui est
bon, ou utile, oupropre a atteindre la fin: car comment
ap-
peler raisonnable un choixqui s'arrêterait à des objets sans
utilité, sans valeur, sans qualité ijaî tes fassepréférer? Diront-
ils qtte le choix raisonnable doitporter sur des objets capables
de contribuer au bonheur'/ Mais, comme le bonheur est poureux la droite raison, il faudra dire que la fin suprême est de
bien raisonner dans le choix des objets capables de nous aider il
bien raisonner. Admirable définition!
Antipaterftitbien embarrassé. II eut recours a des
expédientset à des distinctions subtiles- Finalement il dut, au moins sur
un point* s'avouer vaincu; «"convint'3'(lue
(si bonne, réputation,au lieu d'être, comme l'avait soutenu Chrysi|ip»« chose indiffé-
rente, mérite d'être désirée et recherchée pour elle-même. Dès
lors la vertu n'est plus le seul bien.
La question des consolations était encore une de celles que
Xoiucin|jrtm(un9 c<>lt««r{pin»ml<ition â l'hilai^juc ( Ihmmm. notit. XXVit, Xi.
Ellen'est pas i>\|iro<wim>ntafti'ihiiûoà Carn&idc,maisUrmat <|ni lcniiiii<>lepas-Ktgi' di! l'liilan|ui' i bteivov yàp (Aroixarpop) vnà KvpniSw •oreîapsvoi' els
raint xanSfooQu lit ctipiwAoj/df s»utbto bien iii<lii|itiT <|m> le fnml ait moins
•Iftt.ri([imienl5Mt l'inprunli'à OarnOailc0» peiil mi:nn'cnnj«Curorqiu>I'liilan|[u'«V«l inspiré Av ce
pbilosojitiR en plus d'un |>:i«si;;i> <li' l'iii^timciilalion t|ni j)ré-
ri'ile (XXVII,1»l »«/.).Acelle |iuli'inii|ti<<ennliv.iiiti|ml«r s« ratlaclin prokilili1-uii'nt l'opinion tfiio Cironm »l(riliin> smivenl à Cunirâilo ('hic, V. (tt, X'ij
S\\n\ bonum nisî untuni* piiniïs. frai.
'!î Slol».,M, II, lïti.
de. Fin., Ul, xm. :•
15S UTRB II. UIIAPlUUï Ht,
les sleteienï traitaient luplus volontiers; là encttïu tîm-uéuib kw
poursuivit. Nous voyons, en effet, que (;iitoiua<[iw fli, écrivantaux Carthaginois, ses compatriotes, après la ruine de four ville,
leur résumait lesarguments
de Curneudi». A celtequestion
Le
sajjodoit-il
s'affligerde la ruine tic sa
patrieif
i! abondait néga-
tivement. Nom ignorons les raisonsqu'il donnait u
I appui de
cette belle thèse. Ailleurs encore nousapprenons qu'il s'élevait
contre la manière dont tes stoïciens entendaient les consola-
tions «C'est la fatalité, disait Gbrvsippe à ceux qu'il voulait
consoler d'un malheur, et personne n'y échappe.» – « N'est-ce i
pus un grand malheur, disait Cnrn&ule, qui' tout lo monde soit-
soumis à une si cruelle nécessité 3Î?» n
A côté de cette critique toute négative, il serait intéressant de
savoir si Carnéade avait, en morale comme en logique* quelque
enseignement positif. La question est fort dillicilu à résoudre.
Nous savons d'abord qu'en logicien consommé qu'il était,
Carnéade énumérait fort clairement toutes les solutions quepeut
recevoir leproblème
du souverain bien, et réduisait toutes
les théories morales à un petit nombre de types. Il y a, disait-
il'*», un art de la vie; or, tout art se distingue du but qu'il
poursuit. Ainsi la médecine a pour but la santé, l'art du pilote.la navigation. Quel est le but (le l'art de vivre on de la sagesse?z
Tout le monde à peu près convient que ce but doitâlre appropriéà notre nature et. par suite, nous sollicite, nous attire, fait naître
en nous ce mouvement (le l'âme qu'on appelle inclination (dpftq).Le désaccord commence
seulementlorsqu'il s'agit de définir cette
fin de notre conduite, ce but de lit vie. Trois théories sont en
présence la fin suprême est fe plaisir, ou l'absence <fo douleur,
ou les premiers biens conformes a la nature (t(& vfpvrct x«t«
fâmv, prima .lecnmlum »«<«r«i»), tels que la santé, le bon élut
de toutes les parties du corps. l'intégrité des sens, la force, la
beauté et bien d'autres choses semblables. Ces trois fins ainsi
;i Ck., 'Film. III. xtH, a 4.
î! Ctc, Unit., IU, utv. "»f|.
t;i> Fin.. V, m, ji>.
CARttfctDK – M V!K ET SA DOCTHMlL Wi
.x. .s~ 1- ):,
posées oit peut concevoir t|«o fa souverain bien ou le. devoir
.soit «ii Im-n de lesposséder, ou seulement dû les |ioitrsutvret
<tftt-o« ne pas les atteindre. Seulement les stoïciens sont les
seuls qui aient considéré lapoursuite dos premiers avantages
naturels comme bonne enellc-mômc, qu'elle aboutisse ou non
à tut heureuirésultat; jamais on n'a dit
quece fût un bien de
poursuivre le plaisir ou l'absence itu douleur, même sansy
parvenir. fl reste donc, en fin decompte. quatre systèmes de
moralepossibles; tous ceux
(luiont été soutenus
s'y ramènent,soit directement, soit
indirectement, lorsqu'ils essaient de réunir
plusieurs des principes indiqués.Carnéade a-t-il pris parlï pour une des théories morales
qu'ila si licitement formuliica/ Nous avons sur ce point des ronsei-
j;ncineiits contradicloii-es.
Cicéron nous ditque Carnéade défondait l'opinion de Calli-
|ihonw avec tant d'ardeur
rju'il semblait l'avoir faite sienne.
Or, l'opinion de Calliphon<• était que le bonheur exige deux
conditions le plaisir et l'fionnéte. Mais, dans d'autrespas-
sades plus nombreux, te même Cicéronoppose
Caniéade h
(''aiirphon f3/; il va même jusqu'à lerapprocher d'Bpicure!*>.
Une autre doctrine positive est encore attribuée à Carnéade
par Cicéron. Le seul vrai bien aurait été de reehunrher les avan-
tages naturels sans sepréoccuper de l'honnêteté (a). Un témoi-
gnage de Varron <0).dont il ne faudrait pas exagérer l'importance,concorde avec cette assertion.
Mais, en mêmetemps qu'il attribue cette doetrine à Car-
wAc, H, m-, »;(f> n l't (,'ailipliimloiii «c<|ii,ir, ciijn» (|uitli>in soittcnlisr»
(.'•irneattraila stritliw (lufcnsilaliat,ni «•iiin[iroliarcclinm ïiilwclur. »"> Cii- Fin., V, «h. ai V, xvt, 73; Ttue.. V, x«. Sa.;J
Fin., Il, xi, ;t5.
:lifine., V, mi, H7.
le, II, un. i3i; Fin., Il, w. 35 .1 :)8; Tusc, V, xxx. 85.
/fc%SV«|m-nliI<.s. fr.XXIV, nii, iK.ABi. |«o«', p.31/1. Lriptig. iHlifi:
• Vwaa viai» Zuiiuna iiicessinst', «hier *icliil«, liane t*si> nolùlmn, all.'rnnt Car-
iKKiitftn il.'<irIiiilaM. Imna corporw wnilnm. XXV. vu, 19 <r ,Ut»rain >iam
<k>fiiiitta«sn Caruiwtfin. n II s'.i|;i| uMilnii.-iil ii-i. un !• voil, ((.• l.i |i»l.i»it|nfi ,!<•
(.ariH't'ulc (-«difro fi* M(nfi*î>iuif'.
1-6» LIVRE H-OHAMTIHHH.
ttéude, (acéron nous avertît ({tôt »» h smiltmnitpnspuuf sm»
prajn-u compte mais seulement pour luirepièee aux stoïeiens,
tl'wserendi eaum^u
De cestémoignages opposés il semble résulter que Carnéade
n*aprofessé aucune doctrine morale positive. Il défendait tantôt
uneopinion, tantôt une autre. suivant les hasards delà discus-
sion. Onpouvait s'y attendre, d'après
tout ceque nous connais-
sons d« saphilosophie, t<tc'est ce
qui nous est confirmé par le
passage où Cicéroa'3-1 nous dît que sondisciple préféré, Cfita-
inaquo, ne parvint jamais à savoir quelle étaitt'opinion
do (Jar-
néade. Nous aurions ntattvaisc grâce à être plus exigeants que
C'tilomaque.Si Carnéade a eu une doctrine morale personne ne
le saura jamais avec certitude.
Est-il admissible cependant qu'il ait refusé de faire aucune
réponse à la question (lui, de soirtemps, dominait foule la
phi-
Josojjltio et mente était toute la philosophie comment faut-il
gouverner sa vie? l'eut-on croireque le philosophe qui a fait
une part à laprobabilité, qui sesf éloigné sur ce
pointdu
pur
scepticisme et s'en est éloigné plus qu'Arcésilas lui-môme, ait
laissé absolument indécise In question pratique parexcellence?
On pourrait bien diretlue la seule règle de conduite qu'il
recommandait était lie s'attacher en toutes choses à laprobabilité.
Mais enprécepte semble encore insuffisant. Quelles sont tes
actionsprobables?
Aupoint de vue logique, on l'a vu, la pro-
babilité est déterminée par la vivacité de la sensation et parl'accord des
représentations entre elles. Slais, au point de vue
pratique, quand il s'agit de faire un choix entre diverses actions,
il semble bien que ces caractères soient insullisants. H faut bien
avoirpar devers soi une certaine conception du bonheur ou du
bien, probable elle-même, sinon certaine, et ainsi reparaîtl'idée de la fin on la définition du bien, que Carnéade semble
avoir voulu «parler.
'• Ae.. Il, un, i.'ii; /*Vh.. V, vu. -ta.
'• /le. Il, \i.i. i ït) Qitutiratlinsalliriuatiut nniiijiwiii m- iiit«llî|;«'re |>otniw
ipiirl CarU'Mili piuliiu lui
KAMÛitiK – M MÉ G'f SA DOfifBINK. Iftf
i »
Le seul moyen que nous apercevionsde résoudre côtlé diffi-
culté est d'admettre quti.Kuivimt Ctu-néWe» lafin la plus plau-
sible qtte l'activité humaine puisse se proposerest de rechercher
les bien» naturels, rà -erpêra xarà <pâ#tt>.Nous Ysommes conviés
parune sorte d'instinct d'impulsion naturelle, <5p/wA(lui
semble
bien jouerici le mémo rôle que la sensation probaMo e'est une
donnée naturelle que nous recevons, qui s'imposeà nous et
peut servir de règle ou de critérium pratique.suns qu'on intro-
duise aucun principe dogmatique, aucun élément rationnel, ««,
comme nous disons aujourd'hui,«
priori.
La morale ainsi conçue n'est pasnécessairement une morale
scnsualisle. Parmi les biens naturels, nous en avons pour garant
(acéron.Carnéadem* comptait passeulement Ces avantages mr-
porels., comme la beauté ou la santé, mais les(juafités
de
l'esprit !ll II pouvait ainsi conserver l««nom de vertu, et môme
eelui d'honnêteté p), en l'entendant, il est vrai, autreitieiit i|tie
les stoïciens: il y a une vertu et une honnêteté naturelles, sans
prétentions dogmatiques,telles que les comprend d'ordinaire le
sens commun. Ainsi entendues, les idées de (iarnéade ne s'éloi-
gneraient pas beaucoup, du moins si on considère l'application,
des théories d'Arislote et de l'Académie, ijui faisaient une large
part au bonheur dans la définition fin souverain bien.
Mais, dira-t-on, si telles étaient tes vues (le (,'arnéade. elles
se rapprochaient singulièrement de celles des stoïciens, <|ui,
flux aussi, recommandaient lit recherche des mpôna x«rà <pwm>.
Et alors, pourquoi tes attaquer si vivement f
Mais d'aburd répondrons-nousc'est justement
ce que leur
(Il Fi»., V, v« 18 "la quilms mmieitml mmldniiliilcm quorum simili»
«tintprima in unintis, quasi rirtiiltim i|;ntcilli et si'iniiia.» Hirzel (oji. cit.,
le. i(j5, s) s'creriiK! i pronvci- que ces <li-miùr<>s |«iiti|sne <luiv«nt |«» t'Irc
misps sur le ramplc de Caméaàf, mai» suit) une addition Ac Cicéron. N'ou* ne
voyons,pnurjinliïior cnlte coiiJMinw,aucuneraison plaiisilih-.Caniftirfnpmmiil,
«ai» &m inli«Ii-te à son point de nie, porter de («•mi'nn's i|i> vertu, et inêmi» de
vi>rtfi<. l'yirli.m cl Timon mil bien (ciiii < liiii(;a;;f.
II acconlail méinn IVitiplot<lr- rr mnl daiw l;i doclrine «t'Kpifiire. Ijr., fin..
V. vu, ici <tlîl liimfçliini sil fiicw» oinnis «ttitplalii raiisa. ••
162 J.tVRE il– CHïtnTRK IU.
reprochait tarnéa*?.Après Cous lettre beau* drsi»rs, ik <»»
revenaient ù ce qu'avaient dit plus simplement les anciens aca-
démiciens; ils n'innovaient que dans les mois. En dêTmissmrt te
bien comme ils te faisaientpar leur distinction des vponypépa
et des ivoirpotrypé/a, c'étaient eux qui venaient à Carnéade» etnon Carnéade qui allait à eux.
D'uiUettrs. il subsiste de notables différences entre la doctrine
stoïcienne et l'enseignement deCarnénrfc.Chrrsippeet Anlîpater
se déclarent enpossession de la vérité absolue; Carnéade ne se
Halte que d'indiquer la rèjjle de conduite Inplus acceptable, la
plus probable il ne dogmatise pas. Mais surtout les stoïciensfont consister le bien ou la vertu dans la
poursuite, f&t-elle
infructueuse, desavantages naturels c'est moins dans In
pour-suite que dans la
possession de ces avantages que Carnéadetrouve le bonheur, et môme la vertu. En un mot, le
sage, sui-vant la formule de Carnéade pourra se conduire comme le sagestoïcien. Il le fera d'après d'autres principes, avec moins de pré-tentions et d'orgueil. Ici, comme partout, ce sont moins tesconclusions des stoïciens
que les raisonnementspar oit ils y
arriventfjue Carnéade a combattus. C'est à leur science, non à
leur vertu, qu'il en veut.
En résumé, si nosconjectures sont exactes, la morale de
<;amt%de est une doctrine moyenne, sans profondeur et sans
grandeur, conforme aux données du sens commun, â laportée
de tous lesesprits comme de tous les
courages. Celui qui s'yconformera ne fera rien de grand, il ne méritera ni l'admirationni la
louange; il ne fera pas de mal non plus. Si Carnéade ne sefait pas une haute idée de la vertu, nous ne voyons pas non plusqu'il ait jamais fait
lapolof-ie duplaisir it est aussi loin d'Épi-
cureque de Zenon. C'est une doctrine de juste milieu. Telle
qu'elle est, on feraitbeaucoup pour la mémoire do Carnéade si
on pouvait prouver qu'il la pratiquée,et
qu'il mérité cet élogesi justement décerné à sis rivaux d'avoir conformé sa vie « sesidws.
CAIINKADK KXAMKN CftlTlOUK. !«:{
1
CHAPITRE IV.
CARJiÉADB. BXAMBNCRITigUK.
Caméade n'apas bonne réputation. L'histoire t'a fort mal-
traité. La plupart des historiens modernes le regardent comme
un sophiste sans conviction et sans vergogne, pareil à ceux dont
Platon nous a laissé leportrait peu flotté. Ses idées ont natu-
rellement étéfrappées du môme discrédit. On veut bien lui re-
connattre quelque esprit; on ne leprend pas très au sérieux, et
on ne lui fait guère l'honneur de le discuter quelques lignes
dédaigneuses suffisent pour lui dire son fait et le remettre a sa
place. Cette exécution sommaire n'a pas lieu desurprendre,
si on songe que l'histoire de la philosophie a presque toujoursété écrite par des dogmatistes naturellement
prévenu» contre
ceuxqui n'entendent
pasla certitude comme eux, et, en France
surtout, plus enclins à réfutertju'à expliquer, à critiquer qu'à
comprendre. Aussi n'est-cepas une taiche aisée
d'essayer de
juger impartialement Carnéade et son œuvre; il estpourtant
nécessaire de l'entreprendre.
I. L'origine de toutes tes accusations contre Carnéade est sa
fameuse ambassade à Rome où, en deux jours, il parla tour à
tour pour et contre lajustice. N'était-ce pas donner une publique
leçon d'immoralité, et pourra-t-on juger assez sévèrement l'au-
dacieux qui s'est joué ainsi des sentiments et «les idées lesplus
respectables? Aussi flétrir Carnéade est devenu un lieu commun;
et peu s'en faut qu'on n'ait déclaré que t'apparition de ta philo-
sophie à nome ainarqué le commencement de la
corruptionromaine.
Ou»; la condamnationpmn«im'e contre (!aruéa«le soi) au
t<i4 LIVKtë II. CHAHTHÉ IV.
moins tro{> sévère, (juoson
procès aitété témérairement instruit
«*l mérite d'ôlre revisé, c'est ceque M. Mnrtlm(t>a récemment
établi avec une abondance do preuves, une finesse d'analyse,une modération et une fermeté de jugement himi propres à dé-
courager tous ceux qui voudraient tenter aprèslui une rélia-
biittuttoii de (iarnéade.Cependant, môme après le livre de
M. Marina, nous avons vu reparaître'* les mêmes accusations
f»( la même sévérité. Ce sera notre excuse [jour oser revenir sut'
ttn (jeta t|ui pouvait paraître définitivement clos.
Nous avons dound tout à l'heure le résumé ({es discours de i(fjarnéade. Le premier jour, il exposa en beau langage tout ce (
(jn*on [«'ut «tire en faveur de la justice il rappela les arguments “
«le t%tun, d'iirislote. de 7.4nou, du Cluvsippe. Le second jour.ii indiqua les raisons de roux qui m croient pas à l'existence dfi r
la justice; il insista surtout sur l'oppositiuii (|iiiéclate entre ta
jiislict' et ce tju'on appelle comniunément la s»{jflsse t'Iiontme
<jui, avant de vernir» sou esclave, avoue ses défauts, celui cjuidans un naufrage se résigne à la mort plutôt que d'enlever a un
plus faible (jue lui laplanche <|ui le sauverait, sont justes; la
sagesse populaire ne déclare-t-elle pas (jn'ilssont fous? Les
liommi's font volonti<lvs i'élt)j»8de la justirt»; mais c|uantl ii s'agitde l'observer, leurs actions démentent leurs
paroles;la réalité
contredit l'idéal, et on peut dire *|ue tajustice n'est pas.
11semble vraiment, a entendre les accusateurs de Cnniéud^
'' fjt [àilostipke Camtode it Hume, piililii; dans les Klndtt i/wrafrj «m- l'anli-
ifuité. l'aris. Harliotte, t KSS.
'• Dans sa (rôs inliTOssanle» c-l clianimnlc- i;ltuli> intïliil<>e Un ptvMème morni
éw* Fanti,i«ilé (l»aris, Ilactintti-. iSS'i), M. B. Tliamin rel fort sévèn» |wur- Car-
n»*n*tt* nous rroymis qu'il est injuste. Qiinnilil <tilpar cssomplfi(p. t|t) «jm»«h»;
n>nl.>[u[ior;iiiK <ti> (larni'atlo- ne lui fiivnl pas pnwîsinu'iit l.i n:piil;ilioii «l'un iiôros»,"mtl>mporaills .1.. Car/lO:a"~ n~ lui lil"nl pas (l.is.lDlI'nlla "pulalion d'un Ité,'osl>
et cola siiii|ilciiii'iil [Kirco qu'il n'a pas voulu sV'irijiuisoimur a la suite d'Antipaler,
M 'riiiliniu confond nianife^li'nK'iil tes il«nlci)i|Kii,iii)3 de (.'arniâde nvre ses 011-
immU à nmins que nous ne prisions <>njirincipi' i|iw les pliilusoplu» doivent suiïn»
li>nrst rnnthttlieliMirs dans la IoiiiIk1, aussitôt <|ii*it plaît à res ilerniera d'y eiilrer
leur sort serait encore moins enviable ijik» celai dp la veum il» Mahilnr. tt r«!sl<vait li'ailleins à savoir quelle trsw mptih> l'anfcilod' rappoili'o [wr Oiojjriic (IV,
fi'»): !•• liait .iitulojjii.' cjié par Slaliw (Fhril.. f'XIX, kj) |ianit pins vinisi'iu-
lilaW.
tiAKR&Jil)& – KXAVRJf CKLTIQU& iG5
«j«e as discourrait inhirê les Humains u um pt'rvëmM uW
jusque-làils n'avaient pus ou l'idée, «ju'uvaut lui, aucun Humain
ne se serait avisé" do réaliser des profits illégitimes, d'abuser de
sa force et dodépouiller les faibles. Caton, qui traitait si dou-
cement ses esclaves, a dft frémir d'horreur à l'idéo d'une tette
atrocité,
Citrnéade n'a non appris aux Romains, ou il ne leur a appris
qu'une chose:e'est que de» rnani&res d'agir qui leur étaient
familières et leur semblaient naturellos étaient fort réprélien-siblcs. Aussi voyons-nous qu'il a eltoisi tes
exemples les pluscapables de taire impression sut -se» auditeurs, ceux qu'ils pou-vaient le mieux
comprendre. On a reproché ù ses cas de con-
science d'être (ait peu épais; mais il liiHail bien se mettre à la
portée de son publie, II on avait d'autres pour d'autres ocras-
sions, et M. iVfartlm en cite un tout à raitexquis'1*.
Si tephilosophe n'avait prononcé ses discours, comme le
suppose si ingénieusement et sispirituellement M. Marina, que
pour «mener un argument ad hominem et trouver moyen, sous
le couvert (Cuite thèse générale, de dire teur fuit aux Romains,
et de leur laisser entendre agréablement qu'ils étaient tes plus
fit Voici le cas île i-mncienco oit M. Mail lia, m«c Inuli- raisin», selon nous, mil
une prouve de ta iléliralrsse murale de Cariiwido --Si ht savais qu'il y «iU «»
>[iiel(|ii« endroit un«ei-pcul caché, cl qu'ira homme >|ui u'eii siiiiail ri»»*, cl A la
morl iIihjiwI lu |[aj;m;rais, fiil sur te pniiil «le s'asseoir dessus, tu Iwiiis mal de ne
{«is Peu pmiM'-clier. Cqu'iidaul In aurais(Ht iinpiiuénionl iip pas l'atertir; qui I'bc-
ruswsiif?» (& Ik Fia., Il, wiii, âtj.) Hc|iondani a M. Slnrlha, qui si|.nal«;re passif;»; dans sou rapport M. Thaïuin écrit « Dans lu passa|{a cite par M. Martin,lit donii«t! scut; est. «lit |ihiloM>|>ti<! ttont il sVst constitué le (mtron; fa furme et la
délicatesse morale ((u'ellc exprime sonl d« Ciccmr», <[ui, en inl«r|m'-tanl l'arjjii-mciit dit sceptique le relourne conln; ftii.n Mais «l'ulioni, il n'y a rien dans fc
toxtii de Cicéron i|»i permette de supposer que Caméadc n'a pas inlcrpriUc If cas
de commence comme le fait l.'icéwj; c'est très ;if/)itr.iiremcnl qu'! il. Tbaim'it lui
retire ce niériti*. Mais fùt-il vrai que Cacnéadc n'a pas eu cette délicatesse d'iu-
twrprétaticiii, il ternil Inujwirs le pramier «|iii ait eu l'idâ! d'un cas dis consciencemi nil s'ajjil d'un scrupule Ion! iiik-ricur, ili'-rotn! à la connaissanci! des hominfs-,t'i
par fi ce <as de ronscieiin? ilenieiircrnit fort supcriitur « lous les milrvs; if y an-rait, dans la wiiIb dviiiK'R, une liuessc p»v<-|iolo|>i(|iii!, H intime mit? itélitatcssp
murale dont il ne serait (p.n- juste <lo loin.1 tioimcur à OariiMi.te.
t«6 UVRK IL CHAPITRE IV.
grands pillards d« l'univers» on nopourrait que sourire tfe in
malice duphilosophe, et if n'y aurait plus de déliai.
Si< comme il est probable» Caraéade a voulu servir la cause
des Athéniens, et fairecomprendre aux Humains qu'il ne faut
pas abuser des grands mots de justice et d'honnêteté, et qu'eux-mêmes, les
ayant fort souvent oubliés, devaient se montrer in-
ilufgents ù l'égard d'aulrui, on pourrait penser qu'ifa é¥
troj»
diplomate pour unphilosophe. Mais lu mission dont il. était
chargé l'intérêt de sa patrie d'adoption, seraient pout-eire pourlui des circonstances atténuantes, et il serait bien ditiicile, sur
ce chef, do le condamner sans réserves. il
Mais laissons cesexplications. La méthode
employée parl
Carnéude dans ces fanteux discours était cellequ'il suivait con-
stamiuent c'était cette de l'Académie, de l'ancienne autant que<
de la nouvelle. Prenons ce discours comme un échantillon de
ceux qu'il prononçait dans son école, et négligeant les circon-
stances accessoires, jugeons-le à un point de vite purement phi-
losophique.
Que reproche-t-on à Carnéade? Kst-ec d'avoir, sous couleur
d'exposer impartialement le pour et le contre, secrètement favo-
risé la thèse négative, et sournoisement trahi la cause de la jus-tice? C'est bien ce qu'on a dttlli; mais c'est inexact. Rien dans
les texte» ne justifie cette accusation, et elle est contraire à tout
ceque
nous savons de sa méthode, de ses habitudes, de t'atti-
tude mêmequ'if avait prise. Tout son art au contraire était de
tenir la balance égale entre les thèsesopposées, de faire en sorte
que l'auditeur. sollicité en sens contraire par des raisons tout à
(" -C'est froidement,«til-on,et pour t'amourde l'art, queCaméade({«montreàceux qui l'écontont, et dnnt il ro Gientdt Inuer ta patieirae, leur radicale matlton-
ntURté.*Mailce n'est pasparcequ'il a in<%iu-le publie,c'est ail contraireparce«pi'il a eu trop de siiewsque Cirnâide a dit quitterRome.Il n'a pasété chassé:re nVil pas par scrupule moral. c'est parce que la jeunesse était trop enthousiaste,
i|«r>Catan a fait régler lalfitire qui retenaitl'amlaisadnurathénien. C'est un
point i|«e M. Sfarfha a surabondammentdémontré tes teites «ontformel?.Df
pfns, Oarni>ad<! ni» lémontre pas aux Romains «leur radicak mallionnctetéx-, il se
mnteulp A* montn'r qu'en certain au il y a nue ililforciicp ou une oppositionentre la jn«iirc <;t ci- qu'on nuiront; la sayessc.
CA!~ÉAM.–t~AM!{~<:MTm~. Ui1
i P4: f !f' '1: ·t·. nf rt
fait filles, fôt (hitiH i'ijii[)ossfl}fl]té de seprononcer. On nô
peut
supposer quedans ce discours certainement très (trépan! i'ow-
tetiL-, toujours si rnattre de sa parole, ait commis ta faute de
trahir 11110secrète préférence, s'il l'avait, Ott qu'il ait eu la naï-
veté de la laisser voir. Il n'étaitpas naïf!
A vrai dire, lu seul reproche qu'on puisselui faire, c'est de
n'avoir pas conclu. Mais ici In personne môme de Garuéade est
hors de cause c'est sa doctrine, une doctrinequi
lui est com-
mune avec beaucoup d'autres, (lui est en jeu. Avant des'empor-
ler en invectives contre lui, il faudrait s'entendre sur ce point:le doute, fût-ce en morale, es£-i'f un crime? Est-ce uh déshon-
neur d'êtresceptique? C'est un point dont tout le monde ne
conviendrait pas. Ne voit-on pas de fort honnêtes gens ébranlés
dans Ictus convictions par les difficultés de toute sorte que sou-
lève la critique, plusencore
par les démentis que l'expérience
donne tous les jours à leurs idées lesplus
chères? Et Dieu
sait si (le tels démentis étaient fréquents au temps de Carnéade!
Quand Brutus désespère de la vertu, il estsceptique
à sa ma-
nière suti{jc-t-on à lui en faire un crime? Pascal en a dit bien
d'autres que Carnéade. Il ne s'estpas
borné à douter de fa jus-
tice, if a déclarécatégoriquement qu'elfe n'est qu'un leurre.
Nous n'avons pas la folle idée d'instituer un parallèle entre Car-
néade et Pascal; on nous accordera bien cependant qu'ils ont
ici un point commun. Locke en exposant si longuement l'argu-
ment tiré de la contradiction des croyances en morale, tant
d'autres après lui en revenant sur ce lieu commun, n'ont en-
couru aucun reproche d'immoralitépourquoi
réscrvo-l-oti toute
la sévérité à Carnéade?
On dira peut-être qu'en pareille matière, quand ou nepeut
pas conclure, on doit setaire, qu'au lieu d'étaler les vices des
hommes, il vaudrait mieux ne pas voir ou, si l'on a vu, garder
pour soi son pessimisme. Mais qui ne voit qu'il y a ici un cercle
vicieux? On ne peut demander il un homme de régler sa con-
duite sur unecroyance que, par hypothèse.
il n'a pas, etqui
est
précisément l'objet du débat, lit si. avant «les doutes, Carnéade
t6» UVRB JK – €H.y»tTKK »V.
les awfwfa nettement, il a du mains le mérite de te ftatt-
chisem>
Sans doute, c'est unedisposition très fréquente, et fort hono-
rable, de ne pas vouloir livrer a la discussion leprincipe même
do la morale. Nous sommes blessés quand nous entendons
mettre en question l'idée du devoir; nous voudrions qu'elle fût
en dehors et au-dessus do tout débat. Mais avons-nous le droit
de l'exiger? Et si nousl'exigeons, oîi sent la limite? Il
y a des
gens qu'offense le moindre doute élevé sur l'existence do. Dieu
s'interdira-t-on d'examiner cettequestion* II y a des personnes
ijui s'indignent qu'on puisse discuter l'existence dtr monde exté-
rieur t'admettm-t-on sans examen? Il faut a desphilosophes
plus de philosophie. Il faut se résigner à voir tout remettre en
({uestiun, sans exception; il tant surtout s'abstenir desuspecler
ta bonne foi de ses adversaires, quelle que soit ta thèse qu'ils
soutiennent, intime s'ils n'en soutiennent aucune.
Toute la question est de savoir dans quel esprit. avecquelles
intentions Oainéadt» aexposé tour à tour le
pour et le contre.
Est-ce un stiphisk» qui se plaft à porter le trouble dans les
consciences? tëst-e»' tnj philosophe qui expose sincèrement ses
perplexités? 1
Sophiste est bientôt dit; ntaisquel étrange sophiste, si con-
stamment occupé à réfléchir qu'il en perd presque le boire et
lu manger! Que nous voilà loin de ces charlatans dont l'Ialoti
nous a laissé le portrait!
Un des traits caractéristiques du sophiste, c'est apparemmentde faire des sophbtnes. On
parle souvent de la dialectique cap-lieuse de Carnénde: M. Martha lui-même a répété ce reproche.Noua osons dire
que rien n'est moins fondé. Dans tous les rai-son iieincnt.s de (iarnéatle
qui sont arrivés jusqu'à nous, il n'y a
Oiiv qui reprochent ù Ctcncadu «l'avoir dit ce <|ii'il faut taire, t'acrcilitvnt n
t\ii<iede ti'uti-s il" f;ioiroi( oit «s idws sont <-o«MiIt:o;es comme |«-r(irrtiatric«.<iet
rurruplrins d« la jiiimessw..Ainn'niilnn mii>n\ ipi'il cûl fail uuiime Ociiroii, (|«idisait ci» [itililii: lit (iiutraire <li;ce i(u'il («usait, <|ui wciuvail pas aitv Ment, et
f.ùxnl h* tli'-vut |i.ir |»p|itiijti. (fut raillait l,i ilivinaliun H >-tiiil atij'utf'! !)•' Cicêivii
•m ik> Caniùitlc. 1«|iii>I i-»l l« plus cstiiiKilile? 1
t~AlttVt~Ali~t:XAS!(EI~ tati'l'(t~ tG9
-s .e fî -u- .4~ t t t <
point d'arguties, fl y a peurtre (tes erreurs c'est un point sur
lequel, nous reviendrons tout à l'heure; it «"y a pas de ces sub*
filïtdR <|ui impatientent I» 'lecteur;' il n'y a rien qu'un honnête
homme nepuisse dire. Si le
philosophe aquelquefois tort, il
n'estpas toujours facile do te lui prouver. On ne trouvera rien
dans toute son œuvre qui ressemble aux «infusâtes du tas, du
voilé ou du cornu; c'est lui na contraire qui reproche aux
stoïciens tes subtilités de leurdialectique réellement captieuse
en bien (tes cas. Il y a sous corapport une grande différence
entre Carnéade et tes pyrrhoniens, Ceux-ei, on le Verra par la
suite de ce travail, ne sontpas toujours très scrupuleux sur le
chois de leurs arguments ils disent avec une sorte tie ricane-
ment que tours raisons sont toujours assez bonnes pour des
dojjroatistes. L'impression qu'on garde de la lecture des dis-
cussions de («irnéade, c'est i|u'il parle toujours sérieusement.
On sent en lui, avec un art admirable, le souci d'éclairer et de
convaincre; il a lerespect de lui-meine, de son art et de ses
auditeurs. Ce qui frappe leplus dans le peu que nous avons de
lui, c'est mie foute decomparaisons ingénieuses et
spirituelles,
empruntées à l'histoire ou à la mythologie, et(lui donnent « sa
pensée un relief et une netteté saisissante. Point de formules
abstraites; des exemples et des faits précis. On n'est pas un so-
phiste quand on a un tel souci de -la clarté. Dira-t-onpar hasard
que dans le discours de Borne, l'argument lire du conflit entre
le juste et l'utile, l'idéal et le réel, n'estpas un argument sé-
rieux, bien digne d'attirer et d<; fixer l'attention d'unphilo-
sophe?t
Un autre caractère distinrtif du sophiste, c'est de changer
d'opinion ou de n'enpoint avoir, au gré de son intérêt, de flire
de soit art, de battre monnaie avec ses doctrines c'est
bien là ce«pie disent Platon et Aristotc. Or, nous ne trouvons
rien depareil chez (laniéade. On ne nous dit
pas de lui, comme
d'Areésilas, (pj'i| ail été opulent; il paraît avoir vécu fort sim-
plement, en vraiphilosophe. Il n'était p»s ambitieux l'ambas-
sade à Home était une lourdecharge
autantqu'un
honneur: il
17» LlV*B lt.-C«A»'ÏÎRK tv.
lie paraît pas l'avoir briguée; <te fait, c'est foi «pri it rendu au
j;iantl service aux Athéniens, (licérou dit et) propres tenues qu'ilne se mêla jamais do potitittue. Oit ne cite pas un trait ile sa
vie qui ne soit à soli honneur. 11 ne circuit» pas sur son compte,
comme sur celui d'Arcésifas, des bruits fàctiouv ou seundalcuv.
Un homme tel que lui devait avoir «les ennemis il en a eu; ils
ne lui reprochent t\iw des discours, non (tes actes. Quand Nuiné-
nitis(1) l'appelle « fiiuu joueur de tour» », il parla au lijjurt? et s'il
tucompare
;Vces légumes vides qui Ilolteaf A la surface de l'eau
où on le* fait bouillir, tandis que les bons vont au fond, cela
veut dire seulement qu'il n'est pus de son avis. Il n'a pas été de
ri-s esprits légers el brouillons(lui
seplaisent
« jeter le trouble
chez les autres: c'est Amîsilas, et itou pas Curiioade, ijuo le
stoïcien desAcadémiques compare
à ces tribuns du peuple quine rêvaient (|tùi{ji(ation et desordre. S'il a aimé ta (jbire et to
succès dans les luttes oratoires c'était apparemment son droit.
Il n'y a même pas lieu de dire de lui qu'il ait, comme Cicéron,
choisi le prubabiiisine parce que, n'ayant rien à défendre et
toujours prêt ill'attaque
il donnait plusde facilité a l'éloquence.
Stoïcien. épicurien on pur platonicien. Carnéacte, doué comme
il l'était, aurait toujours été lepremier orateur et te premier
philosophe de son temps.H
y a mieux encore Quinlilien'21 nous
dit enpropres
termesque Carnéade n'a point
été un homme
injuste. Luctance '3| nous assure qu'il n'en voulait pas il la jus-
tice. Saint Augustin parleaussi de lui en termes favorables.
<iicértttt'•• déclarequ'il
ne voulait pasdétruire tes dieux c'est
uniquement au dogmatisme stoïcien qu'il avait affaire, non à la
morale ou à la religion. Les stoïciens, (lui font les fiers et veulent
A|i. Knsi.'h., Priv/K Kv., XIV, nu, i'«.
liMit. nraU, XII, i, 3">. ~\f Cai'iieadra ille.. iiijtudm vir fuil.-)
:S> Die. liistit., V, 17; EpilwiK, I,V, «non <|iii.i vilupeMndan» cs<a jusliliam
«PnHobut
*' Cmilra académie, Ili. un, 3;(.
De ual. t)«ir., IIK xvii, 'i'i: illmc CaruiMili-i aiflial non ut «leoj lnlf«n-f
(>|tiuf itiiii |iliilo9uplio miiHM •oiiviiii'na), *'il ut itokus uifiit (1k iIih <.>i|)licar>!('lui.1 ,.nim l'ltiloljtJpho miuus mnv,'ni.,ns), St'd III ';Ioieus niltit d.. ,Iiii '!llllicaf'J
«nnvincoret.
CAttNKADK. EXAMEN CRITIOUR. 171
tout prouver, ne prouvent rien voilà toute sa thèse. Sorti des
discussion»publiques, dit NitlHénius, it rendait hommage à ta
vérité, dans ses entretiens avec ses utnis, etparlait comme tout
le inonde. S'il doutait do ta justice dans ses discours, il l'obser-
vait dans sa conduite. Nous l'era-t-ou croire aisément qu'il ait
été un malhonnête lionime et un sophiste, tephilosophe qui a
exprimé cette belle pensée rapportée par Plularque'" «fl no
faut pas croireijne, si les encensoirs, même quand ils sont vides,
répandent encore longtemps une bonne odeur, les belles actions
disparaissent sans laisser dans rime du sage despensées»
dont
la douceur toujours nouvelle la rafraîchisse et la ravive, et lut
pcnnctti' (lemépriser ceux (lui se répandent en
plainteset en
injures contre lu vie, comme si le monde était un séjour de
misères, un lieu d'exil où les âmes ont été reléguées.» »
Pourquoi,nous dini-t-om ce sérieux et aimable esprit s'est-il
attaché celle étrange etparadoxale doctrine, le
probabifisme?
C'est toujours à ses idéesqu'il faut revenir, car c'est te seul grief
qu'or»ait contre lui. lia
réponse ici est trèssimple c'est qu'on
e
se fait du probabitisine une très fausse idée. Si, au lieu de le
condamner sans l'entendre et sans le comprendre, on voulait y
rcjjanlcr d'un peu près,on verrait bien vite
quecette doctrine
n'est pas aussi noire qu'on le dit, on s'apercevrait mène qu'il ya
parmi les honnêtes gens beaucoup de probabilistes sans le
savoir. L'objection qu'on lui a toujours opposée, par laquelleon
l'étrangle, est tout simplement pitoyable. À-l-on répété assez tic
fois ([ne laprobabilité ne se comprend pas sans la certitude,
qu'on ne peut s'apercevoir qu'une chose est probable ou vrni-
semblable si on nepossède un modèle. un type de vérité
d'après lequel on juge et mesure la vraisemblance, que, par
suite, c'est un non-sens de dire que quelque chose est vraisem-
blable si rien n'est certain ? .Mais ily
a une certitudeque
les
prolmbilistes, pas plus d'ailleurs que lespyrrhoniens, n'ont
jamais contestée, «-'est celle du phénomène Le probabiliste ne
De traiHjuii imimi, i;|.
m trVBE" IL CHAPITRE IV.
ttif |*a», eoimne oit te lut fait dire rie» n'est eertudit pas, eoimne on te lut fait dire rie» n'est certains. H dît
rien n'est certain, hormis le phénomène. La niuntàu dont ihmik
sommes affectés, la donnée, le Wflw, voilà cequi, dp l'aveu de
tout le monde, est évident, certain d'une certitude indiscutable
et indiscutée. Voilà le type, l'étalon ijui peut servir à juger de la
vraisemblance. Comparée à ce modèle peut-on direque la cer-
titudo despropositions générales, de celles
qui portent sur une
existence réelle hors de nous (en laissant de côté, par consé-
quent, les véritésmathématiques, uni supposent toujours cer-
taines conditions admises au préalable et sont.à ce titre, toujours
hypothét unies, connue disaitPlaton),
soit de mette nature?
Ktle ne t'est certainement pas, puisqu'on endispute.
Au fond de tout m débat, il y a un malentendu et tine étjiii-
voque on conçoit, satiii s'en rendre compte» la certitude dé deux
manières did&enles. S'agit-il de la delitur tlteorkHcemenl ? l^i
définilion est fort belle c'est l'adhésion ferme, inébranlable,
irrésistible, de l'unie à la vérité, et rien qu'à In vérité; cVsl la
prise de possession directe de ta réalité par l'esprit; c'est l'union
intime, la fusion, sur un point, du sujet et de l'objet. Aucun
doute, aucune contestation n'est possible; bref, la certitude est
définie commequand
il s'aj;il du phénomène actuellement donné.
Sajfit-il, au contraire, non plus de la théorie, mais del'appli-
cation et de lapratique, considère-t-on la certitude, non plus
telle qu'elle devrait être, mais telle quelle esl, c'est tout autre
chose ce n'est pins que l'adhésion pleine et entière, très forte
ni très passionnée peut-être, absolument sincère, nul ne le con-
teste. mais pourtant qui peutêtre
donnée, qui est souvent
«tonnée à des choses incertaines, votre à «les choses fausses. On
confond ces deux concepts fort dilïécetifs on parte de la certi-
tude pratique, celle dont nous vivons, comme si elle était
toujours ta certitudethéorique,
et elle ne l'est pas. Que répondreà (Jarnéade quand il vient nous dire Cette certitude que vous
déclarez inébranlable, il lui arrive d'être ébranlée; à cette cer-
titude que vous dites irrésistible, vous résisterez tout à liieure,
<|uun(ivous aurez reconnu votre erreur. Mais alors ce n'est
pas
«ÂftlflU'DR. – EUMES* IÎ.BITIQIJEL m
la vraie certitude. – Sans ({(Mité; main, ijukine vous la prenez`
la vraie certitude. ^– Sans diMito; main, puisque vous laprêtiez
(«qui-lu vraie certitude au moment où vous vous
trompez,vous
n'awas pas un moyen snr «le distinguer lu vraie et fa fausse il n'ya
pas une représentation vraie ôlaquelle nos'appose uni* repré-
sentation fausse qui n'en peut être distinguée. Donc, menu si
vous avez atteint ia vérit»?, ce «jui est possible après tout, vous
imîpouvez en être absolument sur. Avouez -le de bonne grâce, et
neprétendez pas vous élever à une perfection inaccessible Ii la
faiblesse humaine.
Rien (le plus simple an fond cjue cette distinction. Mai» si un
philosopheose ta faire, sif vient dire que la certitude dont on
se contente dans la vie est autre chose (jue cette qu'on définit
superbement dans les livres, s'il avoue que In réalité est fort au-
dessous de l'idéal, tottt le momli' se tourne contre lui. Pour
avoir ditque
la certitude pratique, fini légitime d'ailleurs, est
autre (pie la certitudethéorique, on IWusn d'avoir
dit qu'il n'yya pas de certitude, on l'accable sous le ridicule des
conséquences,on le
repousse avec dédain, on le flétrit du nom de sophiste. Ce
n'est pourtant pas ce qu'il a dit. Mais, ayant distingué deux
chosesqui sont en réalité différentes, il a
proposé» pour plus de
clarté, de tesappeter de deux noms différents à l'une il a
réservé suivant l'usage constant desphilosophes, le nom de
certitude; à l'autre il a d(»nné le nom d*>probabilité. A-t-îl con-
testé que cette probabilité puisse s'approcherindéfiiùmimt tle la
certitude, qu'elle en soit l'équivalent pratique, qu'elle suffiseà la
vie, à la morale, la sciwtce même»1? S'it l'avait fait, il serait
peut-ôlre un sophiste là est précisémunt Je tort et l'erreur des
pyrrhoniens. Avant reconnu que nous n'atteignons pas cette cer-
titude absolue que les philosophes définissent dans leurs écoles,
ils déclarent qu'il n'y a rien à mettre à laplace, qu'il faut
renoncer à toute allinnafiou voilà l'excès, voilà la gageureinsoutenable. Encore y aurait-il
beaucoupà dire sur ce point.
car lespyrrhoniens ne sont pas sans avoir
prévu l'objection. Mais
:i1 f'.ic, Ar.. Il, ï, .'{•• IVoMiili' alît|uid es»» ol <|iro«i von«imili\ i>:n|iif«
irti n'giita i'l in u|win!i vi(a, et in <[nu>Fi>Mit<>ac ilissi'iviitln.
174 MVRK H– KHtPlTftK ».
Carnéade s'est précisément garde" do eut excès, A défaut de ecttt*
certitude parfaite qui n'est qu'un idéal nousavons lu probabilité,
qui en tient lieu et qui suffit. Cette croyance [irulk|\iu, qui peut
être aussi inébranlable qu'on voudra. s'il t'avait appelée, comme
peut-être on pourraitte faire, certitude morale ou pratique,
l'objet même du début disparaîtrait. Mais il a voulu éviter toute
équivoque; et, au risque d'employer un mot mat sonnant aux
oreilles des dogenatistes il s'est contenté du motprokabUilé. Sa
mémoire en a porté ta peine. Mais aussi pourquoi s'est-il attaque
à ta vanité humaine?Pourquoi nous a-t-il refusé le pouvoir
d'embrasser l'absolu, comme des dieux'/ Pourquoi a-t-il blesséç
notre orgueil? 11 reste vrai néanmoins que, si on va au fond
des choses, il s'est rendu compte, avec beaucoup de pénétration,
de mesure et de modestie, des limites de la connaissance hu-
maine; son seul tort est d'avoir vu plus clair que les autres,
son plus grand crime est d'avoir oul'esprit trop précis.
Avec quelle finesse et quel admirable bon sons M. Marthn a
sur cepoint
rendujustice
a Carnéade Hfaut citer cette belle
paye,de
plusde portée qu'elle n'en a l'air en sa forme discrète.
«Nous sommes tous probahilistes. vous et moi, savants et igno-
rants nous te sommes en tout, exceptéen mathématiques et en
matière de foi. Dans les autres sciences et dans la vie, nous nous
conduisons endisciples
inconscients du Carnéade. En physique,
nous accumulons des observations, et, quandelles nous parais-
sent concordantes, nous les érigeons en loi vraisemblable, loi
qui dure, quireste admise jusqu'à ce que d'autres observations
ou des faits autrement expliquésnous obligent à proclamer une
autre loi plus vraisemblable encore. Toutes les vérités fournies
par t'induction ne sont quedes
probabilités, puisqueles progrès
de la science les menacent sans cesse ou les renversent. Dans les
assemblées politiques on se plaident le pour et le contre sur une
question,on pèse les avantages et les inconvénients d'une pro-
position législative, et. si la passion ne vient pas troubler la
délibération, le vote est le résultat définitif des vraisemblance!;
<|tii>l>'s orateurs ont fait valoir. !»<• vote n'est
qu'unemanière
CiBNëADË.– BXAHKKGHÏTIQUB. 175-
ccHivenuwde cltiflVer teprobable. Do mène chacun «le nous,
({nanti it faut prendre un parti examine les raisons «|u*tt a d'agirou de s'abstenir, les met comme sur une balance, et incline sa
décision du côté ou le plateau est loplus chargé de vraisem-
blances» La méthode de Curnéudo, comme du reste toutes les
mtUliodes, ne fait donc qu'ériger on règles pins ou moins judi-cieuses co qui se litit tous les jours dans la pratique de la vie.
«Ainsi interprétée, et c'est ainsi qu'elle doit IVUre, lit doctrine
probabiliste n'estplus ce violent paradoxe qu'on a tant de fois:
dénoncé, c'est une doctrine très sage et très raisonnable, à égaledistance du
pétlnittisnte dogmatique et da l'ironiesceptique, (l'est
par lu qu'elle apu,
à Rome môme, trouver des adeptes parmiles hommes les
plus graves et les plus respectables. On se repré-sente mal un personnage i-oiisulaire tel que Cîcéron se déclarant
publiquement tedisciple
d'un sophiste. »
Osons dire toute notre pensée: la doctrineacadémique, en-
tendue dans son vrai sens, est laplus libérale et Ja plus favo-
rable an progrès des sciences. Le dogmatisme semble être ta
condition même de l'esprit scientifique; en réalité1, if le tue. Hn
effet, si nous possédons d'ores et déjà la vérité. à quoi bon la
chercher Le pur dogmatisme est une doctrine d'immobilité, il
y en a de» preuves dans {'histoire. Reconnaissons au contraire
que jamais nous ne pouvons qu'approcher de la vérité sans être
surs de t'atteindre tout entière, et la recherche aura sa raison
d'être; le progrès serapossible.
La science esttoujours inachevée.
En fait, il n'y a guère eu d'esprits plus ouverte, plus curieux
des progrès de la science humaine que lesphilosophes do ta
nouvelle Académie.
Pour achever decomprendre le rôle do Carnéade, et pour
le juger équitahlemenC,it faut se souvenir qu'il avait aiiuirc
aux dogmatistes les plus insupportables. Les stoïciens sont de
fort honnêtes gens, et nous n'aurions garde de diminuer en
rien leurs mérites. Il faut convenirpourtant que si, à la dis-
lance ou nous lesvoyons,
huas travers s'ellai-t-nlpour
tie
laisser appirm'liv que leurs grandes qualités, vu.* d«« pr»V«.
176 LIVRf 11;.– WMPITRE IV.
dan* le coinraereequotidien de la vie. ils devaient tftrfi de
désagréables compagnon*. Kcoutez-les, écoutes surtout les mé-
diocre* continuateurs (leCbrystppe démontrer d'un ton rogne
et triste., avec une longue suite do sortiesa 1 appui que
seul
le sage peuf&re roi, prêtre, devin, jurisconsulte. b»nq,ttier,
cordonnier» qu'il peut bien s'emplir de vin, mais qu'il ne sera
jamais ivre. Est-il (lidicilo decomprendre qu'un esprit libre et
vif, comme était Carnéade, ait perdu patience, et qu'il se soit
donné pour tache de foire Justice de ces sornettes, de culbuter
(«us ces sorites Aqui tiVsl-il pas arrivé en écoutant certains
dogmatistes, de se sentir furieusement pencher vers lé neepti-r
cisme i Caniéade entendait tous les jours les stoïciens; il n'en
faut pas davantage pour expliquer qu'ilsoit devenu prolinhiliste.
La lâche «|(nl s'est donnée «Hait méritoire, et on compri'ad
Il
<;i«?rou disant oi «Caméade mms a rendu un service d'Herettte
en arrachant de rvosàuies une sorte de monstre, l'assentiment t.
trop prompt, c'est-à-dire la témérité et la crédulité.» Que dans
celle lutte de tous les instants il n'ait jamais dépasséle but, que
l'habitude de ta discussion ne l'ait jamais amené à outrer quel-·
qu'unede ses thèses, qu'il n'ait pas parfois méronnu tes mérites
Il
de ses adversaires, c'est ceque
nous ne voudrions pas nier.n
quoique, nous l'avons dit, il ait toujours montré une grande
a,
mesure, et une rare possession de soi-même. Mais en bonne
justice, si cela est, un ne peut lui en faire un grand crime, pas
plus quede nos jours on n'en vent
beaucoup à un homme poli-
tique si. étant de l'oppositionil n'a pas toujours proclamé
exactement les vertus dugouvernement .qu'il
combat.
En résumé, Carnéadfi est un calomnie* de l'histoire. Il a chè-
rement payé le tort de n'avoir rien écrit, Livrer toutes ses pen-
sées à des paroles que lie vent emporte, que les auditeurs ne
comprennent pas toujours. quela
postérité ne peut pascon-
trôler, c'est faire lapartie trop
belle a ses ennemis, c'est se5
t
mettre à la merci des osprits superficiels. Heureux dans sonH
Av.. IL h\» iftK,
(
i'
s
UAHNÉADK. ~» RXAMRN OfUTIQItK. 177
I
malheur. Carnéiide »(•«•pixianl produit sur ses
cotiieiupor.tiits:un» si vivo impression» il a laissé après lui des
disciples si
lidefas, qu'un écho lointain it«* sesparoles est arrivé
jusqu'ànous, ftl qu'à la condition d'y apporter du l'attentiou et de la
bonne volonté, nouspouvons nous faire une idée à peu près
exacte de eo cju'il a été: un esprit merveilleusement subi et
alerte, aiguisé pur l'étude, une réflexion constante, et l'habitude
de ta discussion; animé, si étrange que puisse paraître celte
expression appliquée a un piobnbitisle, dn pur amour de la
vérité; énneiiii de toutpédantisme et de tout fanatisme. tourné,
cliost! nouvetle iS sonépoque, vers l'observation inlûrieure et
l'analyse subjective de la pensée; dialecticien consommé, mais
scrupuleux sur le chois despreuves, attentif
A n employer «pie«les arguments irréprochables, et' mis en garde contre les subti-
lités captieuses de ladialectique, justement parce (j«e »»euv
que personne il en connaissait et les ressources et lit faiblesse:
soucieux di> convaincreplus encore «pjt« d'étonner; mettant la
passion art seiïice de ta raison, etcomptant moins sur ellu
pourarriver a ses fins
«jiiesur la belle ordonnance des preuves. Peu-
«-Itatnement clair et rigoureux despensées, et cette force du
raisonnement (lui, grandissant d«« période en période, portedans l'âme de l'auditeur, avw la joie de
comprendre et de se
sentir dans la vérité, la clialeur et lalumière (pij ta mviWnt
jusqu'à t'enthousiasme; orateur, pour tout dire, autant«pic plii-
losoplie, mais unissant ces deux qualités sans sacrifier l'un*1 à
l'autre, dans la plus belle harmonie peut-être «piists
soit jamaisrencontrée; tel fut notre (iarnéade. Cette
puissance extraordi-
naire, ce génie quia fait l'admiration descontemporains, (lar-
uéade ne l'a, quoi qu'on ait dit. mis au service d'aucune mau-
vaise cause. Probabilisle convaincu, comme il avait tract? utu>
ligne de démarcation «elle et piufnnde entre laspéculation
pure où il déclarait la certitudeimpossible, <-t la vie
praliqnooù il déclarait la
croyancea ta fois légitime, et nécessaire, il a
pu, sans se contredire, prendre dans les «liscussioitspubliques
l'adihidc d'un.vcepfique qon nul n'a mis pu défaut, et garder
m MVHE n.– -tiittWTKË tv.
dans ta vie privée les idées. Imamats et fo ton d'un honiiêto
lioiunie. Sa vie estexempte
dereproche. Sa murale, dont Cieé-
l'on nous a donné la formule précise, tvluptim cum Iwnestule,
était celle do l'ancienne Académie, do Platon, d'Aristole, des
stoïciens mdtne. si on tient compte destempérament* qu'ils
savaient apporter à leurs hautaines formules. Seulement cette
morale, il la déparait des principes abstraits, il se contentait de
la pratiquer sans en faire la théorie. On peut penser que cette
manière decomprendre la vie n'est ni assez noble, ni astm jus-
tifiée nous sommes loin de le défendre sur ce point. Maïs ce
n'est pas à cause de sa morale que nous revendiquons pourlui le titre de grand philosophe. Ce titre, il l'a mérité par la
force et l'originalité de ses idées.
II. «Carnéade, dit M. Martha, n'est pas, comme on le dit,
un sophiste, mais un véritable philosophe, (jui dans sa constante
dispute contre les stoïciens apresque toujours la raison de son
cuti1. Nous oserons aller un peu plus loin que le savant cri-
tique,et dire que d'après ce (lue nous connaissons de l'œuvre
de (jaméade, i;e n'est lias presque toujours, c'est toujours qu'ila la raison de son côté. Seulement, pour que cette assertion soit
exacte, il faut que l'on consente, comme on le doit en bonne
justice, à tenir compte de l'époque où Carnéade a vécu, et de
la manière dont lesproblèmes philosophiques se posaient de
son temps.Ce serait faire à Carnéade la partie trop belle t\ue d'insister
sur sa polémique contre les théoriesreligieuses des stoïciens,
si ingénieusement accommodées au paganisme. Qui oserait au-
jourd'hui défendre contre lui lathéologie de
Chrysippe, et le
blâmer d'avoir réfuté par l'absurdo repanthéisme naturaliste
(lui divinisait sans exception toutes les forces do la nature ?
Si on laisse de e<H« lespoints particuliers <hi le stoïcisme re-
joint la religion populaire pourlie considérer que
tes preuves gé-nérales qu'il donne de l'existence des Dieux, peut-être y a-t-il
c»ncor<; aujourd'hui des philosophes qui invmpiKnl le consente-
UMttiÊAM*– KUMKN CRITIQUE, m
mk*ft*bith^_toi i"i«'»-.«->i»u».i^itfLfrud»y i i ï tt jL ï •(fc
t >i
niant univui-set «i les i-auses finnfet.. Y en n-ï-itqui n'avouent
pas queces deux .upineuts présentent de sérieuses d'incultes ?
tf consentement mrivei'seJ peut-il passer pour Ui»argument sans
réplique ? El Canidade n'avait-ilpas le droit de
rappeler aux
stoïciens que, selon leur doctrine, tous les homiuos sont îles
insensés? Parution liii-iinîme, pou suspect en cette manière,
avouait que la preuve des l'atrees finales est «t une voie moins par-faite
pour arriver à fesistenca de FJiou. Nier l'existence du
mal. pour n'avoirpas à
l'expliquer, est un procédé* tropfacile.
«Quand les stoicietrs, dit M. Afartlui, dans lotir optimisme sans
mesure et sans nuance, prétendaient que tout est bien dans le
monde, que la sagesse divine a tout formé pour l'utilité* du
genre humain ( .améade n*awiit-j| pas le droit de leur demander
enquoi servent au bonheur de l'huiminité les poisons, les béb»
féroces, les maladies, pourquoi Dieu a donné à l'homme une
intelligence dontil peut abuser, et qu'il peut tourner au crime?»Il
Carnéade était dans le vraiquand il disait, non pas qu'il n'v
apas de Dieu, mais
que l'cxistence de Dieu n'est pas ddmontrdiî
par toutes ces preuves.
C'est uneremarque juste et
profonde d'Éd. Zeller(r'que
les
arguments de Carnéadeportent plus loin
quele but qu'Us visaient
directement. Ilsn'atteignent pas .seulement le grossier anthropo-
morphisme des stoïciens, qui donnait aux Dieux des corps et des
sens; ils mettent en lumière les graves difficultésque
rencontre
toute conception de lapursoiiuattlé divine. Comment le
parfait,l'infini. l'absolu, est-il eu mo*m<;
temps une personne, c'est-à-
dire, à ce qu'il semble, une existence déterminée et limitée, pi
comme telle, soumise auximperfections de la nature humaine,
àl'image de laquelle on se ta représente? Les adversaires du
théisme en touttemps n'ont guère fait que répéter sous d'autres
formes les arguments de Carnéade. Accordons, si l'on veut, queces raisons aient été incomplètes et insuffisantes les dttlieultés
qu'elles signalent sont-elles imaginaires? Sont-elles entièrement
'•t'Iutnx. iltr (iiifclmi. I. IV, |i. Un-j.
t >
180 UVRE IL ntlUMTiUÎ tV.
résolues de- nox Jours? fai eantntire-, nom «van* vu nmaftn»
le même débat, et if ne [tarsttt pas (très de finir. Oh
oublie, dans s eesreteittissoiite!;disputes, (e vium philosophe tjui
a le premier mis le doigt sur fa dtDiculté it n'avait pas tort
pourtant d'être embarrassé là où lesplus émineiits esprits de
notre temps confessent leurs hésitations, et montrentpar
les
solutions meniez «jti'ik proposent I» difficulté dit jirobfème. Tout
récemment encore. M. Pat»! Janet<t;
déclarait«que
Dieu n'est
pas une personne, mais .qu'il est la source et l'essence de toute
personnalitér>.
Ne disons rien de lanolémitfue de («iméade contre la tlivi- a
nation; i<*icVst le triomphe éclatant et incontesté du bon sens
sur lu routine de la raison sur la superstition. Mais nous ne:II
pouvons passer sous >ilence l'admirable discussion sur le libref
arbitre.NVAl-it «pie
ert seul titre. no»»s n'hésiterions pasà dire
«pie Caniéadi1 a mérité l'aiîmiratioaipe
les anciens lut !»'-
monnaient unanimeinent. A aucune époque, on n'a défendu
plus fermement la liberté de l'homme, tout en reconnaissant la
part qu'il faut faire au déterminisme. Malgré l'autorité de l.eih-
nitz.»p»i
les a suivis tur ce point admetJra-l-oi» avec les stoï-
ciensque
ce soif une thèse sérieuse, celle cjui distingue le Fatum
et la nécessité, et déclare que nous sommes libres tout en nej^
pouvant agir autrement «pie nous ne le faisons ? Personne avant
Carnéade n'avait analysé avec autant deprofondeur l'idée de
cause,distingué aussi nettement la causalité et la succession, et
fait aussi résolument une place dans l'enchaînement des phéno-mènes à ces causes actives tju'on appelle
des êtres libres» et
qui s'introduisent, sans la détruire, dans la trame iks événe-
ments. Avons-nous mieux à dire aujourd'hui sur cesujet, im-
portant entre tous Le philosophe contemporain quil'a le
plus
profondément étudié. M. Henouvier, soutient précisément la
même thèse que tiarnéade. Il est juste d'ajouter «ju'il reconnaît'-
hautement la parenté de sa pensée et de celle du philosophe
lleeur </<•« Prtu-.t/.>jii/e». i" juin |K>>>.
• \oir ii'i!amm-iill.i Critique p hilos.. y" aiiiii*. t. \V|t. p. <i.
.1
C.tKMiDK.– EXAMEN CtttTIQtE. m
j'réf, et tjue*ft»
premier parmi les modernes, ii lui a rendu
pleine justice.
Kii morale aussi, Carn&irfea aperçu avec
beaucoup de
finesse les point* faibles tin dogmatisme stoïcien. On ne mit
pas trop cequ'Anfipater pouvait répondre à un dilemme comme
celui-ci ou vous regardez les avantages naturels comme des
biens, et alors vous ne faites que répéter Platon et Aristote,
et ('intention ou la vertu n'est plus le seul bien: ou vous vous
obstinez à dire ijue la vertu ou l'intention est k bien unique.<?talors vous vous contredisez
quand vous donnez un contenu à
l'idée de vertu, <|ùand~vous dites <pi> la vertu consiste h faire ce
<[ui est conforme à la tiatun». Et ta preuw .pi'il atait raison.
c*e>t <nTAntipaler a été oblig»? jiour répundre à >es ubjet-tions de
iiKiditiop la tltéorie stoïcienne. Ou ait «|ue fa«{uestiou do savoir
si en morale l'intention ou ta forme de l'action est la seule
condition du bien, indi'p'ndarnment de l'action elie-inénie.
divise encoreaujourd'hui tes philosophes.
X'avait-il pas raison encore «jitand il se moquait des étranges
[laratloxes des st"ïciens ? Se f rouver.-iît-it aujourd'hui tjueltju'un
pour stutlenir <{uela douleur n'est
pas tin mal. <jti«»tous tes vices
et toutes les vertus sontt'gauy. (pie
lesage possède
foutes les
•{naliiës et qu'il est infaillible ?L;i encore il faut qu'on le
veuille ou tmn svtre duttarti
de €<»rnéade.
Mais, dans toutIWi-ignement
d.> Carnéade, lapartie
maî-
tresse est la théorie de la connaissance. La plupart des historiens
et des philosophes se pronuneeiil en faveur des stoïciens une
sorted'esprit
decorps les porte à couvrir le dogmatisme, quel
iju'ilsoit cintre les
attaquesdu
scepticismeou de ce
iju'rti»
appelle d<>ce nom. Opendant combien y en a-t-iltpii. regar-
dant de près la thèse stoïcienne, oseraient laprendre à leur
compte: On peut bien être pourelle en présence de (.arnéade:
on t'abandonnerait certainement Mtiarnêade n'était pas là. Otte
théorie, en effet. e>t àpeu près
la mêmequi
il été soutenue dans
notre siècle par l'école écossaise. Elleprétend «jue nos sens per-
çoivent directement sans aucun intermédiaire, la réalite telle
Ï82 IIWE. fL–-tiliAI'lTRK IV.
qu'elfe estenette-m≠ ils saisissent lestes choses, et non
(tas seulement les idées des choses. L'analyse psychologique a de
Hosjaurs déliititivemettl écarté, semble-t-il, cetteconcention. Après
les analyses doBerkeley, de Mil! de Taine, d'Helmliolte, eVst de-
venu un lieu commun de direque la sensation n'est
pas sotnhbblo
à la cause qui laprovoque, tju'ellc est un état du sujet, que, si
l'Ile suppose une cause, cette cause ne pouvant la produire sans
la participation du sujet, on ne peut jamais ta considérer quecomme une modification de ce sujet, en un mot qu'elle peut être
le signe des objets extérieurs, qu'elle n'enest pus même l'image c
la copie fidèle.
Carnéade n'a pas connu ces finesanalyses; encore faut-il rap- “
peler que nous ne connaissonsqu'une partie de son œuvre.
Il n'estpas exagéré de dire cjtè'il tes a
pressenties: il est certain
que, par un chemin peut-être différent, il est arrivé à la même
conclusion. Si les sensations sont lescopies fidèles des choses,
il doit de toute nécessitéy
avoir autant de sensationsspécifique-
ment distinctes qu'il y a de choses réelles; par suite, des choses
réelles, semblablesd'ailleurs entre elles, deux œufs, deu.v jumeauxdeux cheveux, devront
évoquer en nous des sensations distinctes
et discernables. Peut-on dire qu'il en soit ainsi Et s'il n'en estr
pas ainsi, s'il nous arrived'épmuvcr la même sensation en pré-
senced'objets différents, il est
impossible de soutenir que nous
percevons l'objet lui-même la théorie stoïcienne est atteinte »
la racine. tin vain les stoïciens oiit-ils essayé de résister sur ce
point: ils n'ont rienopposé et ne
pouvaient rienopposer
de
sérieux à cette formule deCarnéade. La représentation compré-
hensive n'est pas un critérium suffisant, puisqu'un <>l>jt>tquin'est
pas peut éveiller en nous une représentation aussi fortequ'un
objet qui est réellement. De nos jours, n'est-cepas aussi surtout
par l'étude des erreurs des sens, des anomalies, que Berkeley et
les autres ont été mis sur la voie de la vraie théorie de ta con-
naissance ?I
Le stoïcisme ruiné sur ce point, Carnéade n'a point cédé à
la tentation, qui elit été irrésistible pour unsceptique, de sp
CAHNÉABK. KXAIElf ftlUTÏQUK. «83
renfermer «ans te silence et de ne donner aucune prise à ses
adversaires; ii n'a pas craint d'exprimer ses propres idées et de
s'exposerh son tour à ta critique -11.Si ce n'est
pasdans te rap-
portdes sensations aux choses que fions pouvons trouver le cri-
terium de la vérité, puisqu'il est impossible de nous placer
entre ta sensation et t'objet pour vérifier ta ressemblance, si ce
n'est pasnon
plus la force de l'impression qui peutnous servir
de règle, il ne reste plus à considérer que la combinaison, l'ordre
desreprésentations.
C'est ainsi que y l'undes premiers « Carnéade
a insisté avec beaucoup do finesse sur te rôle que joue l'associa-
tion des idées pour déterminer une sensation actuelle, pur
t'attribuer à un objet et la situer dans un point de l'espace. C'est
moins la sensation actuelle (luele cortège des idées
que l'esprit
y ajoute en souvenir de l'expérience passée, qui lait la connais-
sauce. Parla» le grossier sensualisme des stoïciens se trouvait
déjà dépassé. Par lit aussi, l'argument tiré des erreurs des sens
cessait de valoir contre la connaissance sensible, tt est absurde
quedeux
objetsdifférents
produisentune même sensation, s'il
doit y avoir autant de sensations spécifiquement distinctes qu'il
ya d'objets. Mais si l'objet, au lieu d'être directement perçu par
nous, est un groupe de représentations, rien n'empèclie plus
que la même représentation fasse partiede plusieurs groupes
différents Je ne puis prendre Castor pour Poilu*, si la sensation
produite en moipar
Castor est tout ce qui me donne l'idée de
Castor; s'il fautque j'y ajoute beaucoup d'autres éléments qui
ta déterminent, on comprend qu'ajoutant des éléments qui ne
lui conviennent pas, je farine l'idée de Pollux l'erreur n'est pas
dans la sensation, elle vient de l'usage que j'en fuis.
Aristote, it faut te reconnaitre, avait déjà proclamé le carac-
tère relatif de la sensation et soutenu que la sensation priseen
11 est vraisemblable, tontine te conjecture l'hilippson {De PhiMemi libro qui
l'iillEpion^aùir, p. 57, Merlin tS8i), quoCarni'adpaetiiprniitéinichiues-unesdesps
idées aux mmlc'ciiis pinpirii[iies, ol qu'il a, à son lu»r, exercii uni? certain»» iiiflucnot»
sor l'épicurienZenon atib'iir d'une iinjiorlant><et.curieusetln'orï<>itiïl'iiulucliuii.
Zenon avait o'rlaiitoiuml été tin des admiraient-» ontlionsi;ist''s A» Carnéarfc. ({'je.
/(<• I. vi. 'iti. )t
IS& LIVRB lf.-miAHTRK IV.
cHt'Hti*i«t» netrompe jamais, qiw ïmtmr mt
toujours dans lu
synthèse. Caméade s'en i-stput-être souvenu; rien
n'einjjôéaitun
philosophe de la «otiveljo Aeadénno do faire deseiu^ruat»
undisciple de Platon.
tùirnéade ne s'en est pas tenu là. L'association des idées ne
sa Hitpas a rendre compte de la connaissance on n'arrive
parlà qu'à un
empirisme1 fort imparfait. L'animal aussi estcapable
de cetteopération. Chez Fhommc, il y a
quelque chose de plus rla contradiction ou la non-contradiction dos idées. On a vu avec
quel soin Carnéade insistait sur cepoint il faut, pour qu'une
représentation mérite confiance, s'assurer que rien ne la eoifc-
tredit, il faut en examiner eu détail tous les éléments et voirs'ils s'accordent entre eux.
S'exprimer ainsin'était-ce pas intro-
duire m» élément rationnel et proclamer» contrairentenl à lu
thèse stoïcienne, PntsmTisance de la sensation? Dcscarles et
Leilmitx diront-ils autre cbse quand ils définiront laperception
ltti rêve bien lié?
Nous avons tbttc une règle de vérité. Sans doute, il ne faut
pas l'oublier, et Carnéadcv insistait, ee n'est
qu'un critérium
subjectif, nousn'atteignons pas l'absolu; nous ne sortons
pasde
noiis-ntêttiis et nouspouvons encore nous
tromper. La con-
naissance demeure relative. Mais cette règle est suffisante pourla vie
pratique mêmepour la recherche et te raisonnement.
Wst-eepas ce que prorlamenl aujourd'hui, en des tenues
peut-<Hrc différents, mais dans le mène
esprit, bon nombre de phi-losophes et de; savants? Il y aurait témérité à
soutenir que nous
possédons aujourd'hui ta vérité absolue sur cettequestion. Mais
il estcertain q«'en poursuivant ses
investirions sur le difficile
problème de la connaissance, laphilosophie moderne a donné
raison à Carnéadc sur ses rivaux en ce sens, il a été en avancesur son
temps et il s'estapproché très près de ce (lui est encore
pour nous la pltis liant.;approximation de la vérité.
Telle fut l'œuvre de (iaméacie.Quelques réserves
qu'on puissefaire, on voit quelle était la sulidité de ses thèses, la clarté etta
vigueur de ses raisonni'inents, lapénétration de son
esprit.
CAKNÉADB. – ÈUttBN (iHITlQUE. 185
te sérieus et !*orij»ittallt<j tte ses recherches. Pertfeiwe m eoatcit-
tera qu'il ait ét4 un vvrttablo |>litl»s«j*Iie; plusieurs piiseroM
piif-ôtre «|Uiî tes «todeïnes feraient une œuvre <fe justices'ils
lui tvrulak'iit la |iliictu[ue les anciens lui avaient assignée parmi
les grands philosophes.
18fr t.t VHSIf. GHANTItB V.
CHAPITRE' V.
KBS SUCKRSSBtlRS DE CARNKAOB. PIULU\ DE LABISSB.
l. U nouvelle Académie avait atteint sonapogée avec Car-
néade; nous n'avonsque peu de chose « dire de ses successeurs
immédiats,€Utonraqnt>, Charmmla», fiseftme. Métrodore de
Stratohice, que (Jicéron > nomme en mêmetemps, furent
cependant encore des hommes illustres.
t'Iitoraacjueest le plus connu des successeurs de Carnéade.
c'est ti luiip»e revient l'honneur d'avoir par ses écrite sauvé de
f oubli les doctrines de son maître®. 11 était deCartilage '*> et
avait d'abord porté le nom d'Hasdnibal <«. Déjà, dans son pays,il s'était occupé de
philosophie et peut-être avait-ilpublié quel-
ques ouvrages dans a langue maternelle. Il vint il Athènes vers
l'âgede
vingt-quatre ans'5', étudiapendant quatre ans, s'initia
à toutes tesphifosophies alors eu vogue, au péiipatétisme et au
stoïcisme, et enfin s'attacha, pour ne (dus la quitter, il la nou-
Ai «rat., I, h, 45; Je, II, VI, tti.*'• S'il faut n'en rapportvr à ïlmter flereulaneiuit CliloniatfiiL- n'aurait ps
«i<:<il.; iimni!ili«|.>inetit à Caniéade, il aurait ûté précédé par un antre Canu-a4\fifs de PolôinaFcbi», qui mourut au hout de deux ans, et pal- Craies <le Ti.rst! <|uipiiseijfijii quatre ai». (Col. mï, t. Cf. \«. i.)
ref>i«(; IV, r, Ci, Ac., tf, an, 98.
liioj;. /oc. ri*.
' N»«s siiirons ici l'Index Ikrailtmmsii tle |>réfùr»tiœ à Dinj5(''ne, cjtij |e faitvnir à .Uliincs i, iMge <la i|«iii;tiil.j an<. D après ttimme .In Itjranco (Ih «rie
Kipjrnîait.), it aurait en vinj;t-lmit ans, ce qui couevrde à |wii près avnc la ilaln
.!«i#ié.' par rWr. On a vu plus liant (p. (5«) fo |i»ï|c <|p Cicéron d'où il résulte
<|u« «:titoma<{iiiv olait <l(ijà .liscipte d« (jinwmh l«rs . lu tîtstradtoii «h Cartliaga1 'ii> av. J.-C). Voilà
pnun[iioi «n iloit avw Zcller, adniPltm coniun- date <l« sa
nai.van« «u moins {"année 1 73. la date i|p sji mort oui .l.'IcmimiM» nppmviinali-vemont par t-o fait rjnr>, d'apr« Cicéran (ft- unit.. I, 11, S.1). I.. Crawus l'avait
'•nrwc vu à \lli(-iH"i l'amipc «mil fui >{ii<?si»ur «1 1 mi av. J.-C
IMS StlCtlËSSKfMi* Ofc CAHRÉADK. – PIIIiON. 187
vcllo Académie. It «lait né vers 17a av. i.-C. et mit tin ù ses
jours après l'année t »aav. J.-C.
(Jlitoiiiiii|iie avait une gFtintitï réputation Cicéron loue sur-
tout lapénétration
do sonesprit
et son ardeur au travail, [i avait
beaucoup écrit, pittsde
quatre cents ouvrages, d'après Diogène.Outre les Conmlulkm, dont nous avons parié plus haut, on cite
du luiquatre sur lit
Suspension thjugemml®, que Cieéron
a suivis de très près dans son exposition des Académiques, II
avait traité le marna sujot dans deux autres ouvrages, dédiés
l'un au poète G. Lucilius l'autre à L. Gonsorinus (|uifut
cuiisuL
Sou condisciple Charmadas ou Oliarmidas était parfois consi-
déré comme» l» fondateur, avec i'Iiilon, de laquatriènre Aca-
démi»tw. Fîd«k» à la traditionacadémique, il discutuit, non pour
faireprévaloir
uneopinion, mai» pour combattre toutes les
alliriualtons c|u'on uxprimuit devant lui l0'. tl imitait Carncadu
jus(pi« dans sa manière de parler'71. Sonéloquence
et sa prodi-
gieusemémoire® l'avaient rend» célèbre. Il soutint avec Glito-
imupieune vive
polémique contre les rhéteurs et prétendit
«pj'on ne peut arriver à la véritableéloquence sans avoir étudié
les systèmes des philosophes !IW; c'est la thèse tjue soutient à
«etteépoque
toute l'Académie. Un autre académicien, Hagnon"1,
avait aussi écrit fin traité contre les rhéteurs.
Parmi lesdisciples
de Carnéade, Mélrodore de Stratonice
mérite une mention particulière. C'était un transfuge de l'école
»> SUib..R«rit, VII, 55.
(iic-, Ac, If, n, iti; i«t, <(K;Allie»., IX, toa, 0.<J' De xuxHneiitlta a»t?toi»HÎkui t Cic, Ac* t II %\u 4K.
> Oie. .If. II, xxiii, 103.
!i: Sexl., l*l, aao; Ëuseb.,/Vip/j.ev., XIV.n, iti.
ifi tic, Hé oral., l,nni,8i.
iT'Cîr., Orutor, XTI,»i.
">Cic, Deirai.. Il, muni, 'JGo; Tiueul., I, mi», jy l'liu., nat., VU,
<tiv, 85.
ç"SojIiis..W..tl,«o.:i*' fae., Dem-au, I, «ni, H'i.
Qtiinlil.. IJ. «ri», >>.
188 LIVRE II. CHAPITRE V.
t_ i\\ il », •• » ». «t
épicurienne (li. Il neparaît pas qu'il ait rien écrit. Nous avons
déjà vu qu'il était, sur unpoint essentiel, en désaccord avec Cli-
tomaque. Suivant ce dernier (4), Carnéade prescrivait de sus-
pendre son jugement en toute question qui n'était pas d'ordre
pratique. Suivant Métrodore, il autorisait l'assentiment, pourvu
qu'il ne fût pas donné comme une certitude, et il estimait quele sage peut avoir des opinions. Peut-être était-ce Métrodore quiavait le mieux
compris la pensée du maître. C'était du moins ce
qu'il disait lui-môme, au témoignage de Y Indexé herculancmis.
Gicéron (4) nous assurequ'il passait pour bien connaître Car-
néade, et nous voyons, fait plus signiiicatif encore, que Philon y
se séparant de son maître Clitomaque, se rangea à l'interpréta-tion de Métrodore (6).C'est peut-être de Mélrodore
qu'est partiecette tradition recueillie
par saint Augustin (0) et suivant laquelleles académiciens auraient, pour le plaisir de combattre les
stoïciens, dissimulé leur propre dogmatisme, 11 est difficile decroire cependant qu'il n'y ait pas là
quelque malentendu ou
quelque exagération'71.
Des autres disciples de Carnéade, nous ne connaissons queles noms Mélanthius de Rhodes'8', Eschine de
Naples'0', Mentor
que Carnéade surprit chez sapropre maîtresse'10', et que, pour
ce motif, il chassa de son école, enfin Hagnon de Hhodes"11.
L'Index Hereulancnsis^ nomme encore Zenon d'Alexandrie, quiavait, comme Glitomaque, exposé dans ses écrits les idées de
<"Dio0.,X>9.
M Voy. ci-dessus, p. i33.
Col. xxvi, 8 KixpvedSov vnxpaKtjxoèvat vtdvrae.
"I A, Il, vi, i(j. Cf. Deorat., I, xi, 45.
<BlAc, Il, xxiv, 78.< Contra académie, III, xvin, /11 « Mnlrodoriu priinuu dicitur esse con-
l'cssus, non ilncroto plaonisBe jicadi'inicis ni 11 i! pusse coniproliciidi »ed nocessario
conlra slnicos liujimmoili «os ni'iiin Buinj)gi«se.»
Voy. ci-dessus, p. 1 1 7.'»'
Cic., Ac, II, vi, iG.
"I Cic, Dnnrat., I, m, lit). – Plut., An emi ail (fa: limji., un."")
Dio|[., IV, 6."t. – Kiisoli., Inc. cit., vm, i3.
<"> Qiiinlil., II, «vu, i5.– AlliiSn., Xlll, fioarf.
Col. xxn et tcq. Cf. xsxiii, \xxvi.
LES SUCCESSEURS DE CARNÉADE. – PHILON. 189
Carnéade; lusTy riens
Zénodore et Agasidès; Balaces elCory-
dallus d'Amiso; Bitou de Soles; Asclépiade d'Aparté; Olym-
piodore de Gaza; liipparchus de Soles; Sosicralc d'Alexandrie;
Slrutippc; Calliclès do Larissc; Apollonius. Parmi les Romains,
Catulle' (lui fui collègue de Marius, et à qui Cicéron donneun rôle dans les Académiques, fut aussi un des partisans de Car-
néade.
Clitomaque eut a son tour un disciple célèbre, Philon de
Larisse; nous exj)oserons tout à l'heure ses doctrines. Les dis-
ciplesde Charmadus furent Héliodore (2), Phanostrate, Métro-
dore'" de Scepsis, célèbre, comme son maître, par une mémoire
extraordinaire. 11 fut au service de Milhridate'41.
Nous n'avons pas de renseignements sur les doctrines de ces
philosophes.On pourrait être tenté de croire qu'ils inclinaient
déjà vers l'éclectisme, en voyant Clitomaque également versé
dans la connaissance de plusieurs systèmes151, ceux de l'Aca-
démie, d'Aristote et de Zénon. L'histoire de la nouvelle Aca-
démie nous montre d'ailleurs une marche plus ou moins lente,
mais ininterrompue, vers le dogmatisme. Toutefois, il estplus
vraisemblable encore que les successeurs de Carnéade se bor-
nèrent àdévelopper ses idées, sans aller
beaucoup au delà.
Nous verrons en effet que Philon lui-même demeura, en dépitdes apparences contraires, fidèle aux vues sceptiques de Car-
néade. Ce n'est que plus tard, au temps d'Antiochus, que la
nouvelle Académie se rapprocha ouvertement du dogmatisme
stoïcien, et finit par se confondre avec l'école de Zenon.
II. Philon naquit à Larisse (0) vers i/i8-i/io av. J.-C''1. Il
"> Ac, Il, xlviii, t48.
's> Ind. Ilerc, col. xxxvi, 2.
(3> Cic, De ural., III, xx, 761 11, uixvm, 3fio. – Ttuc., 1, xxiv, B9.< Slrob. XIII, 1, 55. –
Plut. LncuL, an.
<»>Diog., IV, C7.
(•>Slob. licl., 11, Ito.C Los dalna ne peuvent élre indiquées <|im li'ime façon «iipcoiiniativc. Voici
les points de repère que nous avons: i° d'après {'InJar Ihrculancnm (col. xtvin),il avait (renle-huil ans lorsqu'il succéiln à Oliloniaque; mms avons admis (v. ««;»«,
Î9& LIVRE'IL fi HAPfTRKV.
vint à Athènes tk l'%odo vingt-quatre aiisW» «t fttt pondant
([tiulol'zo ans disciple «V Ciitomaquc, à ipti ii siicedda sans
dauto vers 1 1 o av. l.-C. lorsque tu guerre éclata entre Milliri-
date et les Romains, il tluitta Athènes avecplusieurs
des ci-
toyens lesplus notables, et se réfugia à Rome(i!; il y enseigna
avec grand succès, et on peut conjecturer qu'il do quitta plus
cette ville: en tout cas, il est certain tfu'i'i ne retourna jamais
dans son pays'5'. If mourut âgé do soixante-trois ans, vers 83-77
av. J.-C.
Avant d'dcoutor Clitomacpie, il avait reçu dans sapatrie
les
leçons de Callteiès» disciple de Carnéade w. U entendit aussi le
stoïcien Apollodore
Philon fut célèbre en son temps. Plutar(|neM nous atteste
qu'il excita l'admiration dos Romains autant parson talent <|ue
par son caractère, Il eutpour disciples pltipeur^ hommes il-
lustre*, entre autres Gicéron, ijtii lui témoigna toujours ie pins
vif attachement, ettjui rappelle
un grand homme17'. StoWe'*1
p. 1 87 ) qui' CtilMiuutjue iMuitrtit vers 1 1u uv. i.-C..Mai», comme on t'a vu, cette
date est incertaine C'lituuiar{uea |)enMtre vécuplus loii);K'Hips>-ll'Iiilun n piin.itlre à une ilafe voisina it(> i'io; «? Cjcvron (Ai:, fl, IV, ri) dit que deux livres
île l'Iiiloii venaientol'i-ln-pubtk-sIor=«jii«Autiuchnsvtait à Alexandrieavec l.u-
fiillds suivant Zimipt (Abhaiul. <let Kinigt. Ilerlin. Atmil., i8fm) c'cbirt en s'i; z
suivant O'mtouiFtut. Ikli, t. IIJ, |». 1*7) «•( Keiniiiiw (Ik l'hit. l.arii*. Ditfcrl,
t"r p. 4. Oôtlinjf.i85i, (tviiiii. pfojjr.). <">H7;.T F/mter noirs apprendqu'ilmourut à Hiivaule-lruis ans (Col. <xuu, iH), si loutcfuis on tloit tire avec Hticliflrr
èîifxoiti. l.orsi|iie C'itvn»! vint à Allioiics, «n -y, il dit (llnit.a, ,ii5. /<<»., V,
I, IJ qu'il suivit six mais les Iwonu d'Antioclius dans te |;jimiase il« l'Iolûun-v; si
Plrtlmravait été ù Atlrèm-s,Ciivi-oun'aurait jkis m;ui(|U<*di>te dire. Pmit-cHre
i;tai(-it i-eslv iî Itomf; it est plus prolialile. cotiimi:le omjwtdi-cZollor (t. IV,
p. •*<fff), qu'il était mort.
!1» /«rf. /fcrp., col. xxtm.
'• tic, llrul., u(ti(, 3uO.
"> Cic. Tiuf., t, uiïii.
D'iprès l'tiukjr il niti'iil suivi ses Iwons ;ieiulaul iliv-lmit ans; Z<'lli'i- curri|;i'
avec raison o? Icilu (|iii fait iiiiniJii.-iifi;i- n l'Iiilim IVlndn <li- la plitliKopliiv drâ IVijji»
vraiment trop I.ti.Ih- de sis ans.
'' /«< M.
w <.ïc, :).
yf< I. i», ij': ,1'liifo. iii9f,'iiiis fir, ni lu esislinias."
') Ed.. II. h».
les soncEss-fiirns se GAitNtoE.-Pnn.oN, fw
toue aussi son tal«nt, et saint Augustin sa prudence w. Sa gtaire
était assez bien établie pour qu'où l'ait parfois considéré comme
le fondateur de la quatrièmeAcadémie fil.
Il enseignait la rhétoriquu tut même temps quela
philoso-
phie w,et avait réservé certaines heures de la journée pour
cet
enseignement; il ne se bornait pus,comme les rhéteurs, à faire
plaider des causes particulièreset étroitement circonscrites; il
aimait aussi les sujets généraux tes questions (te principe que
les rhéteurs laissaient d'ordinaire aux philosophes.
Pliilon avait certainement écrit plusieurs ouvrages; aucun
n'est arrivé jusqu'à nous, Cicéron signale(SJdeux livres de lui
publics à Rome, et dont une copie, apportéeà Alexandrie,
excita l'indignation d'Antioehus'01; c'estpour répondreà ces deux
livres, pleins,suivant lui, de nouveautés dangereuses, et en
contradiction avec renseignement de l'Académie, avec cetui
môme (le Philon, qu'Antiochusécrivit un ouvrage intitulé So$m.
A cette attaque, qui paraît avoir été fort pressante, si nous
en jugeons par le discours que Cicéron met dans ia bouche d'un
disciple d'Antiochus, etqui. presque certainement, suivait «le
très prèsl'œuvre réelle du philosophe, Philon lit-il une ré-
ponse !t!?On peut conjecturer, d'après un passage
de saint Au-
gustin, que le livre d'Antiochus lui fournit une occasion de
reprendrecontre tes stoïciens le combat acharné ou s'étaient
signalés tous les vrais adeptes de la nouvelle Académie. Cicéroo
111 ton*, académie., III, vvm. Ut.s.
f> Sert., l' t, s-.io. Eiisck, Pegf. et., XIV, ic, tlî.
M lme.A\,t\\M. 3.
W Cir. Deerat., III, «xnii, 1 10.
»> Ac> II. n.t t.
''• Liiculhis,ibns les Académique»,reproduit lu liist'ours(|ii'i| il entendu pro-noncer parAiiliuclrns,et Cice'roninskt'*à plusioiirsropriscssurla intirtoin-eïtra-
ordiitairc dont Luciitliis >'lail diiuô. A< II. i. u, 't.
(T> Krischc «fans sa rc'ma«|uablu élmlc ùImt <.ïw«*« Atailemilia (tîôtlïn|jer Stu-
dieu, iH/15)se prononcepour la Bi:(jatiK!(p.ij'i); Hi-rroann{op.cit. p. 7) lui
oppose avec raison te passade de «nint AiT|]ii«liii Cnntr. Aautemic, III, mu, '1 >
-S«J Imic. (Ai)linrlio),arrupti< ilcnmi illisatmis, l'hilo» irslitil ilimoc «««rerclnr.»
((£/»«., H. w. 17.)
m uprjï ii-ciuvmmv.".t"JI¡ 1.
(lit aussi que, latit (|H*it vi'ctit, rAcadoiniene
manqua pas ita
défenseurs. Toutefois nous n'avons sur l'ouvrage ou lesouvrai;!»*
que Ptiiton put iM'rh'ct\ ce moment aucun renseignement précis.
III. Pour Pliilon comme pour se» prédécesseurs dans
l'Académie, coimiie pour tous tes philosophes de son temps te
problème capitalfut celui d<; la certitude.
A en croire laplupart des historiens, Philo» se serait rallié
à une sorte ttc dogmatisme mitigé;il attrait recule? i'n arrière de
Carnéade» et incliné déjà vers ce dogmatisme éclectique qui ndevait triompher avec Aiitioclius.
Nombre de témoignages en ciïet s'accordent à établir qu'il a
moiliiit' l'ensuigncment de la nouvelle Académie. On a vu (ju'il
fut considéré comme le fondateur d'unequatrième Acadéniio; et
(aviron nous dît enpropres
termesqu'il
introduisit des non-
veautés *• Ces nouveautés devaient ôtre de <|ticique ifnportance,
puisque,lisant t Alexandrie deux livres
quePhilon venait de
publiorà Rome, son disciple Anliochus, le plus doux des
lwinmes, entra dans une fjran<!t> colère faisant appel aux sou-
ventrs du ceux (jui avaient avec lui suivi les leçons de Phtloii. il
leur tfeuiaiKla si jamais pareilles choses avaient élé entendues
dans l'Académie. Knfin, ilcomposa lui-même un traité pour ré-
futer son maître.
Nul doute encore que Philon n'ait professé une sorte de dog-
matisrne. On nous dit 's>en effetqu'il
faisait remonter jusqu'à
Platon la doctrine de la nouvelle Académie; il se flattait d'être le
continuateur du maître d'Arktotc, disait qu'il n'y avait jamais
eu qu'une seule Académie, et s'élevait contre «'euxqui
soute-
naient le contraire.
iVmnénins (îi nous apprend aussi que dans sa joie de succéder
àCliloraaqu*1, il était, avec une ardeur toute nouvelle, parti
enguerre
contre les stoïciens. Mais plustard
l'expériencecalma
' Ac. II, vr, iS «l'hiluautel», dum nova i|ti;i'daincomiiiovcl.i
Kic. Ac, t. 1», i3.
yAp. Eiiicb.. Anj». it..XIV, lit, t.
I<KSSIMKS8K0RS015 «URNjUDK. PHH.ON. 193
t'A
son zèJe. Il rui)iurt{ija t'aceord (les .«^sat ions, et leur évidence,
U n'osa pas tourner le dosTses anciens amis. Mais il souhaitait
de trouver des contradicteurs qui le fissent changer d'avis. et
le convainquissent d'erreur.
De môme, suivant saint Augustin Ui, Philon, esprit très cir-
conspect, avait déjà avant la défection d'Antiochus, entrouvert
lesportes
de l'Académie à dos ennemis vaincus, et tenté de les
rutnener sous l'autorité et les lois de Platon.
Enfin, ce quiest
peul-étra encore plus décisif, Sextus'21 dit
en propres ter^es^que, d'après Philon, lavér ijé ne peut sans
doute être connue à l'aide du critérium stoïcien, mais qu'en
elle-même, par natuiy, elle peut être^onnue. C'est uniquementcontre le dogmatisme stoïcien que ses critiques auraient été
dirigées; mais cette doctrinesupprimée
et balayée, it y avait
place pour un autre dogmatisme
Ajoutons enfin <jueCicéron!Ji lui.même fait allusion, en termes,
il est vrai, assez obscurs, à un enseignement mystérieux et éso-
térique sur lequel tes académiciens refusaient des'expliquer.
Quel est donc le dogmatisme que Philon avait substitué au
dogmatisme stoïcien Ici commencent les difficultés. Aucun texte
ne permet derépondre avec une entière certitude ce n'est
que
par voie deconjecture qu'on peut essayer de résoudre ta
question.
D'après(es lextes qu'on vient de lire, la première idée
quis'offre à l'esprit est
que Philon revenait simplement au dogma-
tismeplatonicien. Les choses ne peuvent être
connuesjiarles
sens*. Platon l'avait dit, Pltilon le répète, et c'est pourquoi, au
témoignage de Sextus, il combat le critérium stoïcien. Pour-
tant, les chosespeuvent être connues comment? si ce n'est
comme t'avait dit Platon, par l'intuition de la raisonpure.
Telle est l'opinion qui a été adopter et défendue aussi ingé-
Conlr. aetufemir. Ht, »»m, 4» -Quippiï Anliftchns, l'iiitonis aiidilor, ho-
minis, quantum arbilror, rimtnnpeclissimi, qui join veluli apriw iwlontibus lios-
tjhus |xvrtss nt>|H>ra(, et sut Plstonis atictinifat^in Acndemiitin typsqiie mwatt.~
IS: P.. I. -ïMt.
<v Ac, H. Win. (in. – Cf. ^iioml.. (or. cil., wii. HK; x\. Vi.
,t~(
m M¥RK H. -«.'H4P1THK t.
iitousemeiit qu'elle peut fÉrt*par
Hermonn^, H l'avait iiuli-
quée dans sa premiore dissertation~hitoH Larisse. Il t'a
maintenue et développée, malgré, les critiques d'Ed. Zotler, en
l'appuyant d'arguments nouveaux, dans sa seconde disserta-
tion.
Un point sur lequel Hermanu a lepremier
attiré l'attention,
c'est l'emploi par Cieérot», quand il expose la théorie dos aca-
démiciens, d'expressions telles que imptvmm m animoatcjw
meute w. menti imprmasubtilitert qui rappellentd'autres passages
oh Cicéron admet une sorte deconnaissances innées
ou plutôt
analogu«s à celles que, suivant Platon, i'ûme a acquises dans
une vie antérieur». 6
Cependant les arguments d(> Heniiami ne nous onT'pas
convaincu, et nous croyons (luela doctrine de Pfiilon avait
un tout autre sens. et ilempurait fort éloignée du vrai plato-
nisme.
D'abord, pour commencer par ie dernier argument signalé
par Herinann, ia preuve que Philon n'entend pas l'expressionmeitti subtiliter impreua au sens platonicien, c'est
queCicéron
ajoute aussitôt neque tmienid jtercipi ac eomprefiendi possc. L'intui-
tionplatonicienne comporte-t-eile une telle réserve, une (elle
incertitude?
Lepassage où Cicéron fait allusion à une sorte d'initiation
mystérieuse est trop peu explicite pour justifierla conclusion
qu'on an tire. Il ne s'applique d'ailleurs pas à Pbilon en parti-
culier, mais iî tous les académiciens, Kl s'il avait le sens qu'on
veut lui attribuer, comment te concilier avec cet autrepassage
où Cicéron nousnpprend que Clitomaque n'a jamais su il quoi
'eri tenir sur les opinions de l.nrnéade'3'?
Quant an témoignage de saint Augustin, il ne renferme rienilf
précis sur renseignement de Philon. D'ailleurs, saint An-
1 Diuert. i' Huumi;. »Si»i. fiyinn. [irogr.– Hiiwrl. n" Guiling. i85â.
tlym». |ir.1
«< II. st.. '•
.!• II. u», i:{,
I,HS SU(&RS&Ë(tK>v|tK (UKKÉADR.– l*HfM)\. 195
if. t.
gustin prtHfiles
tiiéiiH» arrière^pettsée*à Arerfsilas et à Car-
néade»', et nous avnun vuqu'il se
trnmp. Il faut se souvenir
d'ailleurs qu'il présente cette idée eowinn* une conjecture per-sonnelle, non comme une donnée certaine.
Enfin, Phiion fut-mèiie, chez Cicéron. se rattache à Platon
et déclarequ'il n'y a eu qu'une seule Académie. Mais
qu'on y
prenne garde! PJitfon est à ses veux unsceptique; comme So-
t crate il se gtird^ de jamais rien aflirmer.§'it n'y a eu, selon
Philon, qu'uni' setffa_AeadjSiaie, c'est une Académiesceptique;
ce n'est pas la nouvellequ'il ramène à l'ancienne. c'est l'ancienne
qu'il absorbe dansTa nouvelle.
Dans les deux livres desAcaMmifue*. qui sont arrivés jusqu'àa
nous, Philon nous esttoujours |»rvson(é comme un probahitiste.
Cicéron, dans sa lettré d'envoi à Vairon l--Kdêflare~îpj'il s'est
fait leporte-parole de Phiion; or, (iicéron se donne toujours
pour probabiJiste. Et si Pliilon avait renouvelé le dogmatismede Platon, comment comprendre qu'Antioclius ait
pu lui repro-cher de dire des choses inouïes
jusqu'ici dans l' Académie?Com-
mentcomprendre qu'il Tait si
âprement combattu, lui qui avait
justement la prétention de restaurer le platonisme?Nous n'avons malheureusement
pas le II* livre de ta deuxième
rédaction desAcadémiques, où. suivant la très plausible conjec-
ture de Krische<3), était exposée en détail la doctrine de Philon.
tandisque le troisième et le quatrième correspondaient à
peu
près au Lucutlmque nous avons. Mais le fait même que Cicéron,
plaidant pour Philon. répond a Varron défenseur cTAntiochus,
montre bienque Phiion ne professait pas une théorie
analogueà celle de Platon. Et
quand, dans le [mcuIIus, Cieéïtm, aprèsavoir exposé les théories
sceptiques de (,'arnéade et de Glito-
maqutt, s'écrie m: -Tout ce que je dis. Antiochus l'aappris
t
l'éiole de Phiion, » <onnm>ntsupposer qu'il ait de grandes
III\'ny, ci,dt'SSIlS,p. (Ii.Vny. ci- dessus, p. i ir.
•Adfima., l\,im, i.
Op.cit., p. tXn.II. nu. •"><>.
m UVBKH. – CHAPCTHKF.
différences eniïfe Philun et Carnéade? tt a pu é*tre un adver-
!faire moins tranchant '<, un interlocuteur plus conciliant; il était
sur le fond d'accord avec sesprédécesseurs
immédiats.
Il faut donc écarter ta thèse de Hermarm. Philon n'a pas été
un dogmatiste platonicien. H a pourtant professéune sorte de
dogmatismeSextus le déclare formellement, Nnniénius l'assure,
et Cicéron, on va le voir, ne le nie pas.H a cru l'existence det
la vérité. mais la vépjtën'est connue ni
pariëssèTrëTnt par la
raison.Comment doue l'est-elle? Et que répomlaitT'hifon
a cette
question ?g
Il ne répondait rien, et cela par la raison fort simple que, selon
lui ta vérité n'est jamais connue avec certitude. Elle existe, elle
est peuMtreconnue, tnais nous ne sommes jamais sûrs de la
posséder.Il manque toujours te signe infaillible auquel nous la
reconnaîtrions (2!. En elles-mêmes les choses peuvent
être connues; elles sont, en ce sens. compréhensibles1";mais,
en fait, nous nepouvons distinguer te vrai du faux. Autre
chose*41 est la nature du vrai, autre chose la commissmee. La
connaissance toujours possible n'est jamais certaine'5*.
Une pareille thèse peut nous parattre singulière; nous sommes
habitués à prendre tes mots de vérité et de certitude pour syno-
nymes,et nous ne concevons guère que
l'une puisseexister sans
l'autre. Voici, croyons-nous, comment Philon a été amené à
soutenir ce paradoxe.
Après avoir fidèlement suivi la doctrine de Carnéade et de
Clilomaquc,Philon fut un jour profondément troublé par une
Cic, fa., tf, nr, ra.
Cic Ac. Il, xwi. mi
« Sort. I. «35.»: GicAt.. II. \«m, 58.
r>> < Méroa dit à plusieurs reprises ( tt. \i 33 ux», 1 1 •! )que ta ctélinitioi» stoï-
tienne de la représcntiilioii coniprcïiensivt1 peut êlre awplé*1, pourvu qu'on n'a-
joul» pas quomiÀo imprimi non jmwmI « /alto; cVst ta pensée <!<>Pliilon, tout a fait
pan'illi» à cellr- <|iii> Sr»xlot (.tf., VII. 'ma) altritinc A CnrtK'role. Cf. K«s.»l> Prap.
.i-n»/ XIV, ni. iT» iiaÇopii- i' £«•« iStào* »« ixntiiifitîw, ««< vivi* itiv
'w jx*t«An«7«, ni trim ii iitti. Cirôrnn tFailh'iiM. ilam Lmullus, mfpns.•Ile lln;oiii' rnmnii» <Manl rHfc» ilf (jinirâii,
J.ES SUCCKSSBURS && GARNÉA&E. NHU.GN. m
objection (Mntiachus£l1. Parmi lesquatre propositions qui ré
sumoiit la théorie de Carwkdo otqu'on a lues ci-dessus it en
est Jeux, les plus essentielles* qui se contredisent. – II y a, dit
Curnéade'9, des représentations fausses. Puis, entre lesrepré-
sentations vraies et les fausses iln'y a point de différence
spécifique.–
Mais, objecte Antiocitus, quand vous admettez la
première de ces propositions vous admettez implicitement quek* vrai peut étos distingué du fous, et vous le niez dans la
seconde. Si la seconde est vraie, la première ne l'estplus; et si
la première est vraie, il faut renoncer à la seconde. Au fond,
c'est l'objection si souvent dirigée de nos jours contre lenroba-
bilisme, maisprésentée ici sous une forme plus saisissante et
plus vive la probabitité^upjiosçJa vérité; rien n'est probable,
sjjienLnVsl^vrai.-*–
Que répondre à cette objection ? Rien autre chose, sinon ce
que répond Cicéroo!îl? Et on peut être assuré qu'il répèle les
paroles de Philon «L*objectiou serait irréfutable si nous sup-
primions toute vérité; c'est ce que nous ne faisons pas. Car nous
discernons le vrai et le faux. H y a desapparences
en faveur de
laprobabilité, il n'y a pas de signe certain dTTvnfi. »
H faut, on le voit,pour^sauver
laprobabilité reconnaître
l'existence deia'\vérUéyMais, toufëïlivoiïarif cette existence,
Philon~necroit pas à la certitude. Il y a des choses évidentes
(perspicua), (pu ne sont pas perçues et connues(percepta, cmpre-
hensa)l*K (Jes choses évidentes, vraies, (lue l'on peut croire
Cic, Ac.. Il. xmiv, 111 «r.\c ilfatnijuittcmpnclcrmùisU,Lucutte,repre-liensionemAnlioclii(nec uiirum, in primis cnim est nol/ilis)<|iiasolebatdicereAnliochusl'iiilonommaximoperlurbalum-
(t) Ibid. Cf. /)<“ Il, «v, hh.
131 Ac., tt, ïiiiï, in "Id ita essel si nos «arum omnino lollercnms. Xon
rariruu».Maint.-iiuvera c|iianifalsacerniimis.Sed pralundi 9|«>cii>susl pereipiondisignuinluilliim liatu'imis.-
'•* .-le.. Il, «, ;{•! -Mii aiifoni l'Iqrjntius qui etiam querunlitr quotl eos insi-
iniiloinui omnia iiic.'rlu (iteerc i|iiaiiliiin(|iic inlersil inler mrcriutn cl id c|iiod
percipinon possildncr>rei-onanliir raniic ilUtiiigiicra.xCX.Ac, II, w. H «t'tr-
spirua » porceptis vohinl dislin/jnoro, et conanlur o«lendcrfl <weoliquiil jM'rspinii
v<*nim illurl i|uiilem iiupifSMHii in anima alq«<? mente. noqiw laim>n id pfreipi k
m uvm ri. citapitkk t.s~V t«t «K ttt ~tttfH HHHr T.
(jnvfaiv) r maismut eonuattre (jfMtvi)^}1'11, c'est cequi est pro-
bable on vraisemblable au sons où Canukde, d'après .Môtrodore,
définissait ces termes. Et c'est pourquoi, probablement Philo»,
abandonnantl'interprétation
deClitomaquc, adopta celle de
Métrbdore. Il donna seulement à lit pensée de Curnéade ainsi
comprise plusde netteté ot de décision.
Comment iHulou,. dira-l-on, a-t-îf pu soutenir «ne pareille
thèse? Comment dire ijue la vérité existe, si nous ne In cunnm's-
solis pas ? Comment croire qu'elfe est, si nous ne savons jamaisce qu'elle est* Nous no disons pas que Philon ait raison; encore
serait-ee tint» question <ie savoir si cette thèse nepeut èlm
défendue. Mais ce u'est pas do cela <|inl s'agît ici.Historique-
ment, la preuve quu l'Iiilon a soutenu cette théorie e'est
couipref«miji pose.» 4e., Il, s, 3-i rVotunl >'nim jntilKiliilf alitjuid esse, et
(|t«isr vwisiinitc.v Cf. ,1c, il, ïïvii, t«a.
"i Cf. Sfok, Fhril.. aPi :Oi««è t«« fut^tptt iyuïs pèv («iolhiasis) ditli' aviùf olettti XtiSeh àXttOivif Çwnahi, ot! |*i)c ikpiGeh.
"L'inlvrprvblioii de Hirari {o/i. cit., p. igHjcst, au fond. d'accord «w tu
ftftf. Suivant tlir:et, lu jjnttttk crigin.ttitK de l'iliion étè t'iutraduetiort dit mot
xxrùnvitiir, jusque-là cmplayo par h» seul* stoïciens et (fu'H iitiralt adopté pn lut
donnant, il '•'( vrai, un sviis tout ilillërfiit les choses sonlcomgréheiuibla; oeil-
lement nous ne sonunos jani«iis9Ùi"s» faute d"uii_ ciid'rimii suttisanl de les avoir
comprises. Cette intitutuctioii d'un tenue stoïcien dans le lanjj.ijjo de rAcadânie
mirait été ta nouveauté qui a ni fort «camlâfnle' Autiochun. (/le, H.iï, tt.)
A l'appui de cette thèse, Hitzcl cite tu passage «le Sexlm (A, I, »î5), oit li>
mot XKttiwtlov est. en eftVt, einptové pour le compte île Philon et celui de
Cicéron (.4c., II. n, i8),(jui semlilc liicn avoir lu injino »i(juilîcalioii. Il est fort
possible ([ne Hirzel ail raimii. l'Iiilo» iwoiin.ii?«aut l'existence ili> la «ériié, pentfort bien avoir dit (juo toi choses sont cmnpnhviuiltkt et, par suite admis la pos-sibilité de la science. Ce serait un emploi dit mol détourné, it est vrai, de sa
signification ordinaire, i p"it pu'1» connue, chez nous (|ui'I<|iim philosophes peuventêtre amenée à dire (pie nous suniiiip* parfois certain du choses «|uî ne sont peut-être pas vraies.
.Vous avons cependant ifiiptyiips «cruptili-t ù udincttiv! ipie l'Iiilon ait lait <Iu mot
xïM/uirîoi» IViii|iloi «|ue suppou.» flirzel..V<nii vojons, '"il >'ffi"l, «[ii<! la tlies»- con-
".lauti» altriliiiée aux académiiiins et par Liirullu«, i|«i la cnnilial. et pr Cicéron,
<|in l.r itéfend, eit iji«r rien tift peut être p.-irn ou compris (11, xt, o'.li xm, lis:
m-, 't'A \n ti» <t\ fit; vu fiK «m ^:i «it ^8 elc. i. II est vrai <|«"ou a
réscrsi» i-t mis do ri'rtt* la tlif>«" ifp l'Iiiton (i», 19; uni, y^ Main ii'riitlili'His pas
rpi» f.irérnn, dans sa l«'tlre 1»Varron, se donne p»ur In rcpr>>'»mlaiit df l'ililon
(parte* miiu tiim/i» l'hihtm 1 ••! it nV>l pas pif-innalili' «pic <utw édition A
LES SUCCK8SKUH81>KCARNÊÀtfE. l'IULUN. 199
qu'Antiochus la combat avec une grande vigueur et lui adresse
précisément l'objection qu'on vient da lire il compare Wspiri-tuellement tes
partisansde cette opinion
àquelqu'un qui ûterait
la vue à un homme et dirait qu'il ne lui a rien ôté de cequ'on
peut voir. On nous refuse les moyens de connaître la vérité, mais
on nous laisse lu vérité. –
Si étrange qu'elle puisse paraître à quelques-uns, cette thèse
est celle que soutient Cicéron lui-même dans toute ta seconde
partiedu Lucullus. H répète à satiété
que rien n'est certain, mais,
eu mêmetemps,
ilajoute qu'il
ne conteste pas l'existence de la
vérité^1. La vérité, dit-il encore en se servant d'une expressionde Démocrite11', a été profondément cachée par la nature: ne
pouvant l'atteindre, nouspouvons
du moins nous en rapprocher.
l'autre, it ait rliiing» d'attitude. De plu», eu liivti des paisses, il est fait allusion
expressément à l'Iiilon (sut, »x\i», m), ou sl's (îartiwi» s«nl. *t\oo tout''
vraiBembbtico, désigués sans Hce nommés ( %t\, ^i'i v, .•!(. Comment croire que
Cicéron ait combattu nwrikm l'opinion suivant laquelle tes choses sont compré-
hensibles, si Pliilon l'avait soutenue, menu.' atpc les restrictions qu'on suppose:Comment croire surtout, si l'Iiilon avait admis l'emploi de ce mol, c|ue Cicéron ait
écrit (H, ut, ia8) Nec ptumit diceiv aliuâ alio rrnrgM mmujrc amprehtmti
quoniam omnium ivriim nna nt dtjinitio comprehendendi. Enfin, d'après une 1res
ingénieuse correction que Hinef lui-même a inlroduite dans le texte <l« l'Imlius
{Myricb. cod., at«), l'bilon santenail que tout «gl âx<n4Xn*1er (Hirzel, p. îS'.i). i.
Ce qui paratt probable, c'est que l'Iiilon a déclaré que, si nous m1 |io«vons iHrf
si'in) <fe rien, cela ne tient pas à la nnturo même des choses, mait aux cundil'ums
de la connaissance !.« [Ki&uijja d» (Jicênui (H, «m, SB «Veriet lulsi tmiîTïiodri
cognitio, sed ctiam nutura loiktur») concorde tout à fait avec relui de Sexttis. Eu
d'autres termes, te viîriti* jifsil <lfe connue, maie nous n'avons jamais te droit de
dire que nous la connaissons De là à employer couramment te mot Jtitïiun'îdi', il
y « une certaine distance.
.Nous fruyoïis donc qm> l'fiitou ii ronlinné ;'t "inpIunM- |i> mot mOwèv, nmmf {>•
fait constamnient Cicéron. liais ee qu'il os( çs«Pntiel de remarquer, c'est qiif. dan*
un ras comme dans l'autre, il <•$( loitjuui r»>st«liilèlr an point de vue d<> Carnêade
•>t n'a fait au dojjmalisiim qu'iinc ronce^iaii apparente. En lin di> compte il ne dit
pas autre chose, s'il te dit itnttvtneiti «pie « qu'a dit (!arnéadi\
• iM.,Ar., Il, vi. Si.
r> .le II, «, :«.
'• /If. II, ïviii, y'.i rVeri «KM altipiid iniii ii.'|;iirmis pr>ii-i|ii pw«i> m-j'uiiiiH.
Cf. 11, vxwrir, ni): Viili'* iiw l'aleri alit|iii«i <-s>r>vti. iaiu|>iv|iendi ea Iviucu "t
pert'ipi ue(jo.n1
I' I.mi. i'i.
20» LIVRÉ ii. – t;HAI*rritE V.
et il fout Essayer itl. «Nous ne leuoiiytms pas par fatigue à ta
poursuite de ta vérité toutes nos discussions n'ont d'autre but,en mettant aux prises des opinions contraires, que d'en faire
sortir, d'en faire jaillir une étincelle de vérité ouquoique chose
qui en approche. » Hjure ses grands dieux qu'il estplein d'ar-
deurpour
la recherche do ttt vérité wl. Mêïne dans les sciences
physiques, si incertaines, il suit quelle joie un éprouve à s'élever
au-dessus desapparences vulgaires, à tenter du pénétrer le»
secrets de la nature et à découvrir uneexplication, ne fût-elle
que vraisemblable13'. C'est ainsique, plus tard, les nouveaux
sceptiques diront que peut-être ht vérité1 existe, qu'il n'estpas
impossible qu'on la découvre un jour, qu'il ne faut décourager
personne. En attendant, elle n'est pas trouvée. |,
Au surplus, disait «ncure Cicéro»' la simple probabilité n'est 5
point tant a dédaigner, Il y u bien des cas où le sage lut-môme u
s'en contente, fait-il autre chose quand il monte sur un vaisseau,
quand ii fait desplantations quand it se marie, quand il a
des enfants? A-t-il, m» toutes ces circonstances, la certitude
absolue et inébranlable dont se targue te stoïcien ? On aflirme
sans hésiterque
te soleil est dix-huit fois plus grand que la
terre; est-ce une chosequ'on ait
compriseou
perçue f0)?1
Si cetteinterprétation est exacte peut-on dire que Philon ait
faitquelque concession au dogmatisme et
qu'il soit, àquelque
degré, éclectique? Laréponse a cette question dépend de ce
qu'on entendpar dogmatisme. On est sans doute dogmatiste
quand on admet l'existence de ta vérité. L'est-onencorrxpijriid î
un ajoute quenous ne sommes jamais surs
de la posséder?C'est
cequ'on appelle d'ordinaire te scepticisme, et quandon accorde
ta possibilité de se rapprocher du vrai, ou même de l'atteindre
sans \c savoir, on estprobabilistc. Philon n'est ni plus ni moins
1 Oie. II. m, 7.
te..11, \v, 65.
le, II, tu, 117.
t< Il «Kl 93.l<\ Il, luir. iuç|.te, 11, m.i, i-jX.
LES DE (:AI(NPAD9. P1UloON. 201
({u'uii prôbaJrifiste-,c'est uniquement pour sauver k
probabilité
qu'il a «dmis l'existence de ta vérité; ila paru. changer d'opi-
nion, tuais la concession qu'ila faite au dogmatisme est de pore
apparence.
En quoi donc (Mère- t-il de Carnéade et quelles sont les nou-
veautés qu'au témoignage de Cicéron il a apportées? Malgré
l'autorité de Zeller, nous ne croyons pas qu'on doive lui attribuer
en proprela distinction entre les choses évidentes ou probables
(prspicun, probabilia)et les vérités certaines; cette théorie est
de Carnéade (1). comme on l'a vu plus haut. Tout au ptus pour-
rait-on accorder que Pfailona attaché plus d'importance
à ta
partie positive qu'à la partie négativede la doctrine de Car-
néade; il insiste plusvolontiers sur le caractère probable
ou
vraisemblable de certaines propositions, Nous avons vu comment,
avec Métrodore, il prêtaità Carnéade des assertions plus posi-
tives que ne le voulait Clitomaque. D'après Potion, Carnéade
croyait qqe le _sage peutavoir des opinions (licéron. d'accord
avec Clitomaque, ne voyait.là qu'une thèse soutenue pour con-
trarier les stoïciens !2).
Les nouveautés de Philon se réduisaient à deuxpoints,
Il dé-
clarait. ce que Cornéade n'avait pas dit et ce qu'il n'aurait
peut-être pas accordé, que latérite existe.En outre, et
précisé-
ment peut-être parce qu'il reconnaissait l'existence de la vérité,
il a prétendu rattacher la nouvelle Académie à l'ancienne.
Pjaton, en effet, quicroit aussi à l'existence de la vérité^ a sou-
vent des formules dubitatives 13~. it entourt- ses assertions de
beaucoup de réserves; il n'admet pasnon
plus que tes senssoient juges de la vérité, et il permet au sage!1)
d'avoir des
opinions."PlH"lona donc pu,
à tort, nous le voulons bien, mais
de très bonne foi, se croire le continuateur fidèle du fondateur
>' Cest aussi l'opinion de fiint«l, p. 407.
««4c, II, xxiv, 78.
»> /le. ,1. ut. n ~itl.
i" Ac, II, mv. u.'i "Incognito nimirnin aswnliar, ii ni, opiimbor.Hor
mihi et |ieri)).ilctii-iet velusAcademiactiil>*cdit.i
m MYKË f âUAPITRif- ».
tte f Académie. & même, il est dans son droit quand il rap-
proche sa doctrine de celle tl'Aristote. Si k connaissance était
seulementl'impression
faite sur l'esprit par ta vôiité, tes péri-
patétieiens, comme Plnlon, y souscriraient11*. (Je qui gâte tout.
c'est cette grave addition de telle sorte que le faux n'en saurait
produireune semblable. Qui a
jamais, dunsle Lycée, tenu un
pareil langage? C'est Aniiochus, ce sont les stoïciens qui ont
altéré la pure doctrine de l'Académie.
On comprend parlà comment- Pltibn a pu passer pour un
novateur, quoique,au fond, il n'ait guère fait que répéter,
e»
soulignant peut-être certains traits, ce qui avait été dit par
Carnéade. Les innovations de Philon sont assez importantes
pour qu'ont'ait parfois regardé comme, te fondateur d'une qua-
trième Académie. Elles ne le sontpas
assea pour quecette
qualificationait été" universellement admise, et ail
prévalu.
Si Numénius et suint Augustin lui ont attribué un change-
ment d'opinion,et ont vu en lui un
Journaliste jilaton tcimi
c'est qu'ils se sont mépris sur le sens que Philon donnait à cette
formule ta ^EJI^s^isfe. Il faut convenir queleur erreur est
excusable. Il n'est pas naturel, à première vue, qu'un sceptique
proelame l'existence de la vérité.
La grande colère d'Antioclius contre PJtilonliJ vient, selon
toute vraisemblance, de l'effort tenté par le dernier pour mettre
Platon et Aristote d'accord avec Carnéade, et effacer les limites
entre les deux Académies. Transfuge de la nouvelle Académie,
rallié avec éclat au stoïcisme, c'est chezjes stoïciens qn'Antiochus
prétendaittrouver les vrais continuateurs de Platon et d'Aristote.
l'.k:, Ae..If, i i-i.).fI' Suivant Ilircel (|>. ijift). e'usl smlmlt
remploi1I11 mot mtzXnttio» qui
aurait ««tiMlalBc Anliadms. Slai-s wt-e- bien <ic ••<>ni«l. «l (le VMàt (pi'il «priiiKS
(jii'it pouvait dire ci- suiit diows iiwiiiw «taux \eaàétmr1 l.ui-UNim! il'ailt'-ur'
*»i» «'rrait. <>1 it |ir»'t(?n<l(iil lii.'ri n-sler dons l'.k'aelétiiiir..Nous iroj'ons pfiitiit i|ii«
•<><it l'inkipti-tatimi s«-|itii|iii; tlo t» ilm-triiii- An IMatxn •! il'UrsloU' <|«i ta si fort
irrité. <X Ar., t, ii, l-t. (.VxpfWiSirtii i/ienlidir <>ni|)l»yee «Nu fuis t II, «i. iH-iv.
i I ù l'i'|pril île l'Ililoiis.-iiil.l.ni^i |ilnlol s';i|j|ilii|ii.M :t tni |ioinl <1p fnîl )|u'à une
^H.-vtiMii «le tlut-triti'
LES SHCCESSfiUBS iïfc .CAKNÊAD& – PHILUft 20$
*i t-t. ii t> t «*• il item tfi allait jusqu'à dire qu'entre les stoïcien»
^JaS£ÎS!!2g«âS»^ )
mie, les mats seuls différaient, et que le stoïcisme est une cor-
rection de tWtenneJkadémb !l). Il roulait conserver à l'école
(|u'ilservait avec'un zèlo da nouveau converti, le prestige dos
grands noms de l'ancienne Académie t2!. On lui prenait ses
Dieux; il voulut les déftaidre, et c'nsl pourquoi il écrivit le
Sosm,
Deux points assex délicats restent â expliquer. Quel. est le
modo de connaissance admis par l'hiion, et désigné par cos
mots menti subtiliterimpression ? Quel était cet enseignement
i5sotéri<|ue auquel Cicéron fait une allusion dimèfc
Sur le premier point, Uenmmti et Xeller semblent croire
qu'il s'agit d'une connaissance innée, non pas au se».s .stoïcien,
mais au sens platoniciendu mot. Mais on ne peut invoquer en
faveur de cette conjecture aucune raison probante m. Au con-
traire. PliiloHct Cicéroft sont sur ce point de l'avis de Caruéade
qui manifestement fait dériver toute (connaissance des sens.11
noussemble probable..que les académiciens
ne s'expliquaient
guère sur la manière dont se fait ta connài55antcr-tts'T;ûnsta-
taient, comme une donnée, la présence des idées dans notre
esprit, et les tenaient pour conformes à leurs objets,sans rendre
compte du passage des choses à l'esprit,de l'action des choses
matérielles sur la pensée,sans recourir surtout aux images
et à
la terminologie inalérwlistes_dc>s ^fwcieiw^ljs y ont toujours
répugne.C'est contre eux
qu'est dirigé le mot subtilitei: C'est
surtout par cette opposition constante au matérialisme stoïcien
qu'ilssont vraiment de {'écolo du Platon.
Sur renseignement mystérieuxdes académiciens, nous nu
pouvons naturellement hasarder quedes conjectures.
11y a, di-
saient-ils, des choses probables. Mais quelles sont les choses pro-bables ? Quel choix avaient-ils fait parmi les diverses assertions en
tm- –
l; .1. l. «i.«:{.'•' At., Il, ïv, 7<».
Hiosel {Escuri. Il) romkil iv« beaucoup <t«' bvrv lit tlmfi île t''»\ i|tii
(iretonl à Cfci'iwi la lld'uiic <l<^ i'It'c» iiimws.
0
2M UHM IL – GHAIUÏRB V.
faveur desquelles on peut invoquer des raisons plausibles? On
eomprettd que des diulectieiens subtils qui passaient leur vie à
discuter avec des adversaires retors, (ijciit évité de se prononcer
publiquement sur ce sujet se prononcer, c'était donner prise
sur soi, c'était renoncer à cette positionsi avantageuse de gens
qui. n'ayant rien à défendre, sont toujours prêts pour l'attaque,
choseplus facile, comme chacun sait. De là, leur réponse aux
questions indiscrètes sur leurs. mystères"' Non xolcmus o«tei«fere.
Mais dans l'intimité de Parole avec des disciples w choisis et
privilégiés, ils n'avaient plusles mêmes raisons de se tenir sur
la réserve; ifs n'avaient plus d'altitude à observer. C'est làpro-
bablement qu'ils disaient cequi leur paraissait vraisemblable,
et cequ'en
réalité ils croyaient. Mais mêiti£ alors, onpeut croire
qu'ils ne prenaient pas un tondogmatique, lis proposaient leurs
opinionsà leurs
disciples.ils
n'imposaientrien. lis donnaient
leurs raisons, et laissaient à leurs auditeurs le soin et la liberté
de conclure. Ils (-(nient en cela conséquents avec eux-mêmes.
Nous voyons par un passage de Cieéron que Leur souci était
de faire triompher non l'autorité, mais la raison. Cerespect de
la liberté et de la conscience individuelle paratt bien rare dans
tes autres écoles; c'est un caractère propre aux nouveaux aca-
démiciens. Ces excellents philosophes ont été les esprits les plus
libéraux et lesplus modérés de leur
temps.
En tout eus. il n'y a pas, dans t'obscurpassage
de Cicéron,
de raisons pour leur prêterdes dessous ténébreux, ou des
pensées de derrière ta tète. Saint Augustin s'esttrompé quand
il a cru qu'ils tenaient soigneusement caché le trésor des dogmes
platoniciens. On voit quel est le malentenduqui
a donné nais.
sance à la tradition, ou plutôt la légende dont il s'est fait l'écho.
En résumé, IMiilon est toujours resté le fidèle disciple de Car-
néade. Zeller se trompe, ou du moins il force la note, lorsqu'il
(jr., /le. Il, «uti, (in.
*Cf. S<-«t., I.9Î4. Au|;nsl., Coniï. «iWrra.c Il, xnt. K): III, un, .tK.
!1) Oie.,/le., Il, wiri.lWi:-lit, i|iiin(iili''iil. >alione|ioliu*i|iiiim«iictorilalv<lii-canliir.-
(5
LESSUCCESSEURSDR CARNËADK.PHILOR.205
le range avec Antiochus parmi les éclectiques. Cicéroo Wdit
que pendant ta vie de Philon, l'Académie ne manqua pasde
défenseurs. Saint Augustin!Matteste que jusqu'à sa mort il ne
cessa pas de résister à Antiochus et au dogmatisme; il faut
croire ces témoignages.
IV. Si l'on peut contester l'originalitéde Philon en logique.
il est un pointdu moins par où il se distingua nettement de ses
devanciers, et c'est peut-êtrece qui, plus que
tout le reste, a
contribué à le faire regarder comme inclinant déjàvers le dog-
matisme, et placer plus près d'Antiodius quede Carnéade il
traita explicitementles questions
de morale. et Stobéew nous
a conservé l'analyse malheureusement trop succincte, d'un
de ses traités (*>. Puisqu'il reconnaissait rexistBnç_eMdgJa_.yéj«té.
Philon pouvait, sans se contredire, donner despréceptes je
morale. H neparle
d'ailleurs que de morale pratique, et il faut
se souvenir que des sceptiques déclarés, tels que Pyrrhonet
Timon. se sont toujours réservé le droit de dire leur mot sur la
meilleure manière de vivre et d'être heureux.
Nous n'avons pas le titre de l'ouvrage; mais l'objet en est
clairement indiqué. Il se divisait, comme la philosophieelle-
même, en cinq,ou plutôt, à cause de l'importance
d'une des
subdivisions, en six parties.Le philosophe
ressemble au médecin. La première tâche du
médecin est de persuaderau malade qu'il
doitaccepter
le re-
mède; la seconde èsTde détruire l'effet des parolesdeceux qui
lui donnent des conseils contraires. De même, le premierlivre
de Philon, afin d'amener les hommes à la vertu, montrait les
»» Ac, II, vi, 17."I Contr.«cad., lit, wil», &i-o.
<« Ee% », ko.
<•>C'estpeut-dire ce traité qui u servi de modèleà Cieéronpour son tkrUMitu
(Hennann. op. cit. f. fi. n. 36). D'autres critiquesestiment que Cicéron«'était
plutôt servi des nporpetitHa de Posidonius, ou (tu apotpniixàs d'Aristote.
Cf. Tliiaiittmrt, litsai itir It* IrailA philoi. rfc CiWro». p. h- (Paris. Hnchette.
i88r>>.
m f.lV'RK- M. – CttA'FlTRK V.
grands avantage» qu'elle praeure, et réfutait les calomniateurs
de laphilosophie.
C'était l'exhortation(tIpâTpé7f7wt&»).
Après avoir bien préparé son malade, le médecin doit indi-
quer les causes des maladies, et leurs remèdes. De même, le
philosophedélivre
l'espritdos fausses opinions et lui présente
les vraies. Tel était l'objet du second livre il traitait des Bien»
et (les Maux (Iîspï iyaOëtf x&l naxwv).
Le médecin poursuit mi butqui est la santé. Lu fin que se
propose lephilosophe est te bonheur. Le troisième livre de
Phiton traitait des Fins (îkpî tùmv).
JI tre suffit pas au médecin do donner la santé*, il faut encore
la conserver, et indiquer les précautions à prendre. Lephilo-
sophe donne aussi les préceptes les plus capables d'assurer le
bonheur c'est ceque
faisait Philon dans sonquatrième
livre
sur les Manières de vivre(ïlepl |&W). ft traitait ce
sujet à un
double point de vue d'abord ilindiquait les règles particu-
lières, applicables seulement àquelques-uns. Par exemple, le
sage doit-il s'occuper des affairespubliques, fréquenter les
grands, se marier? Dans une secondepartie du même livre,
qui, en raison de sonimportance, formait un livre à part, /<•
Politique, il traitait lesquestions générales, celles qui intéressent
tout le monde quelle est la meilleure forme de gouvernement?les honnmirs et les dignités doivent-ils être accessibles à tous?
Si tous les hommespouvaient être sages, Philon se serait
arrêté là; mais il faut tenir compte aussi de la moyenne des
hommes, de ceux (lui ne peuvent s'élever à la perfection, et,
faute de loisirs, ne lisent pas les livres desphilosophes. De
bons conseils peuvent leur être utiles; de là le dernier livre tlo
Philon, les Précepte» ÇfnoOerixèç\eyos), qui présentait en abrégé
les indirations les plus propres à assurer la rectitude du juge-
ment et la droiture de la conduite.
Lerapprochement obstiné
que Philon établit entre la philo-
sophieet la médecine pourrait donner si penser que déjà, comme
t«' feront plus tard les nouveaux sceptiques, il songe à n'em-
ployer d'autre méthodi» que l'observation f>| l'expérience, lais-
LESgUtiCESSKOKSM; il/tRNïU&K. PHI'MlN. 207
•iiinf «la i-AliS hic nptttriiinic rnf ïnrinntil ut tns tfSmiîrifiSc ita lia nuî-sant de côté le principfiijttUoiinelt;, et tes témérités de ta mé-
taphysique. Mais nous ne savons riende précis
à cetfgsrd.
Telle qu'elle est, ta sèche analyse de Stobée nous montre
que le livre de Philon était un de ces excellents traités de sagesse
pratique, comme l'antiquité grecquedut en connattre beaucoup,
et dont nouspouvons
nous faire une idée d'après le De OJJiriis
de Cicéron. il serait intéressant, si les donnée» ne nous faisaient
défaut, de comparer cettemorjIeJLceifejles
stoiciens. Elle en
évitait certainement les excès, elle n'en avait pas la raideur et
elle donnait les mêmes conseils pratiques.Sur un point au
moins elle a une incontestable supériorité; les stoïciens n'avaient
pas pourla moyenne des hontmes, pour les humbles et les
simples. ces égardset cotte bienveillance que leur témoigna
Philon en leur consacrant tout un livre. Ils se contentaient de
les appeler des insensés, et tes dédaignaient. C'est la première
fois peut-être qu'avec Phiton laphilosophie
s'avisaqu'il existe
dans le monde autre chose que des philosophes et des sages. Il
n'est que juste d'en savoir gré à la nouvelle Académie.
En résumé, PItilon fut un esprit raisonnablo et modéré. En
logique,il combattit le dogmatisme, non pour le plaisir de dé-
truire, maispour réagir contre les Ilrétentions orgueilleuses des
stoïciens. Loin de se laisser entraîner par t'ardeur de ta dispute.
il s'attacha avec autant de bonne foique
desagacité
à rem-
placer la certitude absolue, qui, suivant lui, nous est inacces-
sible, pur son équivalent pratique, lajyobabilité. Unephiloso-
phie qui nous laisse au moinsl'espoir et_t chaneejl'atteindre
la vérité, n'est pas unemauvaisejîmTosophie. Elle ne décourage
pas ta recherche. et nous interdit une trop grande satisfaction
de nous-mônies. Elle est à la fois modeste et laborieuse. En mo-
rale, Philon prit aussi parti pour les opinions moyennes. Il se
défia des grands mots, et il ne connut pas cette vertu farouche.
les ehovetix hérissés, le front ridé et en sueur, seule sur la pointe
d'un rocher, dont notre Pascal a si éluquemment parlé.La
sienne n'est pas non plus enjouée et, folâtre; elle n'est pas cou-
~t?t~ t V1~N: ll~1- ti[IAPFPRFl V.
(!I1~(i mntliamatit. (l1lfifbl7Y "i", ,1.lt..ioiu"t,{ ¡.iII.li.nB ufilée mollement dans le sent de lorsivetétranquille, etn estime
même pas, quoiqu'on l'en accuse souvent, que l'ignorance et
l'incuriosité soient deux doux oreillerspour
une tête bien faite.
Elle est plus grave. plus raisonnable, plus mesurée, plus bour-
geoise enquelque sortis et son
principal mérite est peut-être
que,sans être vulgaire, elle est à la portée de tout le monde.
C'est avec lui que la nouvelle Académie atteignit son apogée.EUe garda ce qu'il y avait d'excellent chez Carnéade, avec un
plus vif souci des choses morales, avec je ne sais quoi de plus
tempéré et de plus doux. Mieux que personne, Philon nous
permet denous faire une idée de ce
que furent ces philosophes
trop maltraités par l'histoire. Esprits déliés et subtils, éloquentssans affectation et ennemis de tout pédantisme, ouverts a toutes
les idées justes sans être dupes des mots. sûrs dans leurs ami-
tiés, les nouveaux académiciens furent leslaius aimables de tous
les philosophes. Très certainement ils valent mieuxque
leur
réputation. La philosophie de Cicéron, qui est la leur, malgré
ses lacunes et ses faiblesses, n'est pas une philosophie mépri-
sable, et ce n'est pas un de leurs moindres mérites d'avoir su
conquériret garder la
préférence de Cicéron.
Après Philon, la nouvelle Académie ne fit plus que décliner.
Antiochus passa à l'ennemi. Les autres successeurs de Philon
n'eurent point d'éclat. Philon de Larisse fut le dernier des aca-
démiciens.
AXTîUr.HUS B'ASCAIiON. 2t»9
le la naissance <i Antio-
i4li
>
CIKPITKK VI.
A.VTIOCHtiS IJMSCAtOV.
Mous avons achevé l'histoire de la nouvelle Académie. Antia-
ehus d'Ascatan, qui nous est présenté par les historiens, et se
présentait lui-mi'me comme un académicien, ne mérite ce litre
que si on t'entend au sens primitif du mot il appartient petit-ètre» c'est dit moins sa
prétention, fortpeu justifiée, comme an
le verra, à l'ancienne Académie; iln'appartient pas à la nou-
velle il en est .l'ennemi déclaré; il le dit lui-même dans leImcuUus oît visiblement Cicéron reproduit ses
propres paroles !l).
Pourtant, l'histoire de la philosophie d'Anliochus est à un
double titral'épilogue nécessaire de l'histoire de la nouvelle
Académie. D'abord Antiochus apendant assez longtemps fait
partie de l'école de Philo». Plus tard il s'ensépara et dirigea
contre elle de nombreuses et graves objections. L'historien a
tout a gagner à nepas substituer son propre jugement à celui
d'uncontemporain des doctrines
qu'il expose l'œuvre toujourssi délicate de la
critique lui est épargnée; du moins il peut de-
venircritique sans cesser d'être historien. Enfin, on n'aurait
d'une doctrinequ'une connaissance incomplète si on ignorait les
objections auxquelles elle a donné lieu. Voilàpourquoi
nous
étudierons aussi la philosophie d'Antiochus, en nous attachant
principalement auxpoints par où elle tient encore à celle de la
nouvelle Académie.
1. Anticelitis naquità Ascalon!2!, vers !î| i a 4- 1 a7 av. J.-G. Il eut
(I' Âc, Il. if, ra K.an<)in'nt Antinetmmtcontrarcnctnmïrnt(disaernntantj.-Cf. It, vi. (8.-
'» Slral»., XVI, ir, -3çi.– Pliil., Luc, '»<. Ck.. > Bnrt., a. Élicn, P. H.,
111, là. Stéphane1 de ftyuwce, cilé pur Falirictiis, liibtiotk. (ir.. I. III, p. 5S7.(3' \011s n'avons pas «l'iiuliivilioris [uwiscs sur la date tic In miissancc rt'Anlio-
°3tt1 t.f4~l4F~tt: cal\tJ'tTIŒ VI.
\.0- t ut f --0, tht't 1
peur titaftw» fi' stoïcien Mn&ttn|ttt!a>,elsurtout l'Inloti dont tf
sttivit tes leçons pendantfort longtemps'*1'. News ut1 sa vanssi,
après avoir quitté Athènes, il vint à Romhm niais nous h; lutroit-
vuiis plustard à Alexandrie, avec Lucuitus. en Pau 87 suivant lus
uns, 84 suivant l«s mitres01. Vers 79. lorsque Ck-itoiu pendant
tu dictature de Sylhi. jugea prudent de quitter Uoiiio, et alla
passer six mots à Atht'iii's. Aiilim'lms y enseignait uvet" éclat1*'
il é"tail le dief incontesté de l'Académie. Kn(in,iiarcompa^n»
encore Luentlus m\ Syrie et assista à la bataille du Ttgrano-
certe(il (&i> av. J.-C.). (I mourut peu tie tempss*' après, en Ué-
sopotamie,à la suite des tatigues de la campagne D>.
Cicéron, sansparlajjer
toutes lesopinions d'Antioihus, avait
pour lui beaucoup d"ni)'eclion et d'admiration &. l\ vante I amé-
nité de sun carad ère la liuesse de son esprit, l'éclat d» sa
paroie:«t'est sans doute ta douceur de son éloquence qui l'avait
fait surnommer l« cygne (<J). Les amitiés illustresque
le philo-sophe
sut f;agner et conserver, cettes d'Atticus, de Lucullus, de
Brutus, de Vairon, attestenttjue
CtctTon ne l'a pas jugé avec
trop de faveur.
chus;maislorsqu'ilmitconnaissanceà Alexandriedeslivresde l'Iiilon(Cic, Ac., 11,
I»,11} en8'i 01187 (vny.ri-di'Siiis p. i ij ), était di'jùseparùdeson muiln',dont
nocissavoin(Cif., Ac., Il, un. tii|)(|ii'il avait «tivi lot leçons pendantdo Iuiijjiics
annéi"».On n»m trnmppnipasde beaucoup,seinble-l-il on uJiuetUiiitqu'à c>>ttp
époque Antiochus devait dire «|{é d'environ quarante ans ce i|iii pince sa nai»sauci>
vers li'i ou ir^ av. J.-C. Cli.ippuis, ifotit te livre [De Aittioclii Asailomtir çila el
iluclrimi, l'aris, tH.'i'i) a tilé iutpudmiiiit'nl pla|;ii' |Kif it'Attniiaud (De Autioehu
Ateahnita, Marnurgi Caltiiriiui. t^56) initique l'an taH.
"> .\nmen. Ap. Èuseli., l'nett. fi'cXIV, k, ;i. Saint Augiisliii. Contra aauk-
mien, tfl, sviti, '11. tac, /le. II, «il, (»).
<•> «•• Ac, I[,mii.W Cic. Ac.l, it, 11; 11. ft; xn, lii.
Cic, lirul., xci. Si». Ae., 1, K, i3: II, «t», t tX te/ I, tw, 54. /•ïn., V,
i, t. – l'Iiil., tic., 4.
<*> Plut., /.«<>S.
lit Ck., <(«: II, <it, lii II;ii<- tiilioclms, in Syrin quiuii csSfl niccimi,
pauln autf quani «--îtmorluus.-
W Mer Km., \xn\ S.
11/le. ft, il, 'i; \vw. il 3.
S(.;|>li. «te Byzance, I. c.
AVnGtîHlfS D'AStiALON. M
Xt»H.tconnaissons lits titres dûplusieurs ouvrages (l'Atrtiocluis
le Sosititli) d'abord, qu'il écrivit pour répondre à Philo», dans
l'accès (te colèreque iui avaient donné les assortions de son •
maître sur l'identité do lu nouvelle Académie et de l'ancienne <
ilprotestait avec thtergie contre cette confusion, et
revendiquait
|wui' lui-même, pour les dogmatistes, pour les stoïciens, lo titre
d'Académicien. Sexto* W cite aussi un passage d'un livre d*An~
tiochus intitulé Kavovucx sans doute ily traitait les questions
delogique; nous voyons qu'il y mentionnait l'opinion du eélèbre
médecinAsclépiade, d'après laquelle
les choses sont connues
par les sens, ni nullement JMrJajwison. C'estpeut-être
le livre.
que Cicéron avait sous les yeux en écrivant le Lucuflus cepen-
dant, comme il ne nomme que te Sostts, il est naturel de croire
qu'il s'est plutôt servi de ce dernier ouvrage lil.
Dans un autre livre, adressé à Baibus (5).Anfioclius soutenait
qu'entro tespéripatétteiens et tes stoïciens, il n'y a
qu'une diffé-
rence de mots. Enfin Plutarquet6'nous
parle d'un livre Ilepi &éan>%
qu'il avait écrit dans les derniers jours de sa vie, puisque c'est
làqu'il parlait de la bataille de Tigranocerte. Indépendamment
de ces ouvrages qui appartiennent à la seconde partie de sa vie,
Antiochus en avait écrit dans sa jeunesse d'autres, ou il défen-
dait les idées de Philon Mais nous n'avons pas de renseigne-
tnents sur ces premiers essais, et sans doute ils furent de bonne
heure oubliés.
Pourquoi Antiochus s'est-il séparéavec tant d'éclat de ses
anciens amis? Ses adversaires ne manquèrent pas de mettre cette
défection sur le compte de son ambition on disaitqu'il
était
resté fidèle à son maître jusqu'au jour où il eut à son tour des
(1) Sosii!» est le nom d'un pliili»o|)li<>, rnnipalrioh- d'Aiiliorlnis, <>l qui ap|mrlo-nail à t'école stoïcienne(Stéph. de livrante, <•.).
IlCic, ,<< H, », u. t.
w M., VII, ttoi.m Cf.Thiaucoiirt, «p.cil., p. 58.») Cic, //« nal. /fo»- I, vu, 16.
" f.m., n8.
Cif.. /te, II. \\n,*i(>.
i
m uvuk ri.– i:ii4i»;irH"K vj.
disciples if voulait «Itre dfcf <t'ê?o{«. «roir ws disciples qui
tussent appelés Antiachiem -'• Nous n'avons aucune raison de nous
associer à ces accusations t dictées peut-être par le dépit les
llièses de Pltiion n'étaient pas tbllemeut évidentes (ut fitî– m^nto
avait varié) qu'ilftlt interdit à ses disciples «l'en proclamer -l'in-
suffisance et de les abandonner. Cicémn est-ilplutôt dans le
vrai lorsqu'il dit q-u'Anlioehu* nu pouvait résister aux objections
unanime* de tous les|ïl»îtoso|>ftcs? Qttf»i «pn! eu. soit, à
partir<le ce moment il se (lniiiia mw double làcltu réfuter les doc-
trines de la nouvelle Académie, et en reprcnmit ({uelques-mws(les idées de l'ancicnn». tui
opposerun dogmatisme rajeuni
il. Leréquisiloti'c d'Aitliochus t'untre tes académiciens était
certainement lapartie principule
(te son unsuignement:, son
umvre de prédilection -f. Ilapportait
dans la discussion une
ardeur exWme, faisant face à ses adversaires sur tous les
points, ne négligeant aucun détail, lespoursuivant partout
avec
une verve infatigable, une dialectique souple et animée, et il
faut le dire, parfois victorieuse.
Il n'hésitait <•*>pas à rendre justice aux
qualitésde ses anciens
maîtres il reconnaissait(ju'ils procédaient avec méthode, divi-
saient bien les({«estions,
les discutaient à fond. Il ne songeaitmène pas à leur reprocher, comme sans doute on l'avait fait
plus d'une fois, la subtilité de leurs analyses et tlt* leurs défini-
tions rien de plus digne, à son gré, des véritablesphilosophes.
Il n'estimait pas non plus qui* te dédain fut une réponse sufli-
sante â une doctrine(lui
nie la possibilité de la connaissance
hausser tes épaules et passer outre, sous prétexte qu'on défend
une doctrine aussi elaire que le jour, lui paraissait aine réfuta-
tinn insuffisante. Le sujet vaut la peine d'êlro étudié pour lui-
Cic Ai:. II. mu. -» • for-1 lit >'< <|m se S"<|iuTviiliii-, tnlinchii »«ra-
ivndir,
1<"ic, /Ir., If, vi, 18. \u;;infm. ùml. iimulemic. tt, vi, ifi.
\uiisimipmnloii* to»< !••« r>'tisi'i|;n^rai'iils i|iii mitl «imvit .m {.mutins tlt»
• lioroii. /«««nu.
ttV`I`tttf~((f: ()',1:~(::il. 213
,.E~ t~,t~f,>, ,tl.i'a ,.#Fx .A: a ~.–t-t
m^iim; et si Pé/videne*» se défend eite-mèné, iJ am«u pourtant
((d'un se laisse prendre il certains prestiges, qu'on soit embar-
rassé par des qwestians subtiles et captieuses il faut avoir tu
réponse prête, être armé lie Manière àrepousser toutes tes
attaques.Examinons donc les thèses dos académiciens.
Tout d'abord, c'est « tort qu'ils s'abritent derrière les noms
des grands philosophesde Pannéiiide. d'Empédoclo de Dému-
rrtte, de Socratc» et de Platon. A quelques exceptions près, ces
philosophes bien loin de (lire qu'ils ne savaient rien, ont affirmé
bienplus qu'ils
ne savaient. Et si parfois ils ont hésité, depuis
qu'ils ne sont plus, l'esprit humain n'a-l-il donc pu découvrir
aucune vérité? Socrate et Platon, en tous cas, ne doivent pasêtre mis au nombre de ceux
(lui doutent Platon, parce qu'ila
laissé imsystème
achevé d<» toutes pièces; Soerate, parée qu'il
lie faut pas se méprendre sur la modestie aveclaquelle il s'ellac^
dans les discussions c'est pure ironie, et il ne songe qu'à sur-
prendre son adversaire.
Considérons aprésent les conséquences oit conduit ta doc-
trine académique. Aucune représentation, dit-on, n'est infail-
lible..Mais chacun de nous, àchaque instant, donne un démenti
h cette assertion. Ne nous attardons pas à discuter l'argumentde la raine plongée dans IVau ou dit cou de fa colombe les
couleursque
nousvoyons. les sons: que nous entendons, tes
parfums qtre nous respirons nous inspirent une pleine confiance.
Kl si oit conteste lulégitimité
de la sensation, tejugement,
le
raisonnement, la mémoire deviennentini|iossihles
comment se
rappeler desdio-ses fausses, des choses que l'esprit n'a point
saisies, et qu'il ne tient pas? Avec la mémoire, l'art disparait.
Que deviendra le ({éomèlre, s'il ne peut discerner rien de cer-
tain? dominant lo musicienpourra-t-il jouer en mesure, ou
suivre la marche dos vers? Knlin, chose plus gravu. In vertu est
reiidui;impossible. Trouvera-t-on des hommes de bien, décidés
à braver tous les loiirmenis plutôt que (le trahir leur devoir, si
les raisons de cette obligation ne sont point connues, perçues,
comprises, fi u1»*avecuu< inaltérable certitude? L'w'ttou. méiue
~t4 t~VtŒn.-t~tt'tTtU~L
1. 1.- 1 _1.' .4..e f
la plus ««tptu, sttjijK» des idées mT&ées, ê/x. creyiuiees. Uii
n'agit pas sans désir et commont délibérer quand on ignore si
la chose désirée est bonne ou mauvaise, «informe ou non « tu
nature? Plus de raison, plus dephilosophie, plus de ces
prin-
cipes (&7fwnr«) qu'on ne peut trahir sans crime; plus d'umilié.
plus(le
patriotisme.
Laissons de eùlé les conséquences d'urdrepratique, ot envi-
sageons lu (jueslion au point de vuethéorique,
tas académiciens
disent rien n'est certain. Mais cette assertion mène, avouent--r·
ils qu'elle est certaine? Xotv, i-éjioiwluil (^amende àAntipalcr
quilui faisait cette objection. Celui qui dit rien n'est certriin.
lie fait aucuneexception; cette proposition n'est que probable,
il n'y a point dej>IhIosoj>Iùo, réplique Anlioclius, qui
n'ait une
opinion sur ces deux points le souverain bien on la règle des
mœurs, et ladistinction tlu vrai et du a~ Qmutd on SI) donttt'
pour philosophe, quand o» veut enseigner aux autres ce qu'ilsdoivent faire et éviter, croire ou rejeter, il faut avoir un prin-
cipe. Leprincipe des académiciens est
(lue rien n'est certain il
faut donc qu'ils s'en tiennent à ce principe, qu'ils lui soient
fidèles; en d'autres termes, qu'ils soient certains.
Ainsi serrés de près, les académiciens répondent Est-ce
notre faute, si rien n'est certain? Prenez-ïous-en à la nature
qui a, suivant l'expression de Démoerite, caché k vérité au fond
d'un abime. Abandonnons lessceptiques, dont il faut désespé-
rer, et pour lesquels tout est aussi incertain que laquestion
de
savoir si le nombre des étoifes est pair ouimpair. D'autres sont
plus adroits: ils distinguent ce (lui ue peut être connu, et ce
qui est incertain. If y a suivant eux des choses qui, sanspou-
voir être connues ou saisies, sont claires ils accordent qa'il ya de laprobabilité, de la vraisemblance; c'est là, disent-ils,
qu'ils trouvent une règle pour l'action et pour lapensée.
Mais comment distinguer ce(lui est probable on vraisemblable
de cequi
nel'est pas, s'il n'y a aucun signe distinctif de la vé-
rité? Entre les représentations vraies et les fausses, i!n'y a pas.
dites-vous, de dilléreme spécifique. Dès lors. de quel droit due
tNTifJCHÛS D'ASC .tt.OR. 215
•{il* tes iuws serapprwliênt «le
la vérité, quelus uutix's s'en
éloipeul? Hlk'S sont toutes également suspectes, (.'est su tiiu-
qoor d« direi|d'ofi
nous enlevant te iiioycm de connaître la
vérité on- nous laisse fa vérité elle-inéïne. Dites à unaveugle
([ti'cn lui étant la vue ou ne lui a pus été ce (lui peut «*lie vu
On commet lu mène erreur quand. un reconnaît dus choses
évidentes (//«•«/«(««)«nuis
qui ne «miraient elre perçues. (Jotn-
lueitt dire qu'une chose est évidemment biunche, s'il peut arriver r
(|uo le noirparaisse blanc? Comment dire d'uni- chose (|u'etlo
est
évidente ou linciiient gravée dans l'esprit, ijuand on lie sait si,
oui ounwnJ'esjM'it
en «reçu rimpression?
T
Qu'est-ce donc que la probabilité Appellerez-vous probable
la première impression <[ui s'olïreù vous'/ L'aertieillerez-vous du
[tremier coup? Quoi de plus tétnéraire? Ne l'admeltra-vous
qu'avec circoiispeelion ct après un examen attentif? Mais quand
vous l'aurez retournée de toutes façons, vous dites qu'il pourra
encore se faire qu'elle soit fausse quelle confiance aurez- vous
donc en elle? Quoi (le plus absurde que de dire voici ta
marque, la preuve qui nie fait admettre celte assertion; il est
bien possible pourtant qu'elle soit fausse.
(ioiisidéréc dans la formule générale qui l'exprime,la tlièse
des nouveaux académiciens ne peut se soutenir examinons à
présent les arguments de détail qu'on invoqueon sa faveur.
Avec les stoïciens, on distingue plusieurs sortes de représen-
tations. Les divisions sont admirables les définitions fines et
exactes. Mais quoi n'est-ce pas là le langage d'hommes quiont
desopinions
arrêtées? Ces merveilleuses définitions, une fois
formulées, peut-on les appliquer imlifTércnuuent an'importe
quoi?Si oui, comment dire
qu'ellessont justes? Si mm, il
faudra bien convenir qu'il y a desobjets auxquels
seuls elles
conviennent, et qu'on lésait, fêt comment ne pas voir une con-
tradiction éclatante entre ces deuxpropositions, expressément
admises par les académiciens II y a des représentations fausses.
Entre les représentations vraies et tes fausses, il n'ya
pointde
différence spéeilique. Ku mbitcUant la première, vous niez la
~ë Li v h L.' t 1. (. il A p tir ItR v 1.
,l.. 0'1. t tseconde t en
proclamant la seconde, vous cfétrttisez Itt- pre-mière.
Analysonsavec soin le fait luêuie de lareprésentation» Lu
représentation est titi état de l'àme, mais un état qui en mêmetemps qu'il est cunmi nous fait connaître aussi ce qui l'a
pro-duit. Je vois uit objet: en le
voyant, je nie trouve dans un état
différent de celui où j'étais t'instantd'auparavant, et je connais
deux choses cet état mène, et ce(lui
l'aprovoqué.
La lumière
se révèle en faisant voir les objets qu'elle éclaire il n'enpeut
être autrement de tareprésentation
Mai», objeete-t-on. si lareprésentation «luit toujours avoir
un objet, d'où vient qu'il y a des représentations fausses exacte-
ment semblables aux vraies? On va alors chercher les fantômes
du riH'e, les illusions de l'ivresse les hallucinations de la folie.
Laissons de côté le soritequi permet de
passer insensiblement
de l'apparence trompeuseà l'impossibilité do distinguer le vrai
du faux(' C'est unsophisme il pourrait tout aussi bien servir
àprouver que les
loups sont des chiens. Cequ'il faut opposer
obstinément à tous cesexemples, c'est qu'ifs n'offrent pas le vé-
ritable caractère de l'évidence. Dans le sommeil ou dans l'ivresse,
les images n'ontpis la même netteté
que dans la veille: on
hésito. un tâtonne, on doute, et te fou, revenu à lui-même, se
hâte de dire mou eojiir n'est pas d'accord avec mes yeux. Et
ne faut-il pas vouloir tout confondre pour aller chercher de tels
exemples? Nous voulons savoir où est la sagesse, la lucidité, le
sérieux on nous parle de fous, «l'endormis, ou d'ivrognes. La
seule conclusion qu'on puisse légitimement tirer de tous ces
faits, c'estque pour connaître la réalité, les sens doivent î!tr«
en bon étal. Nous nous assuronsque cette condition est rempli»
••n changeant la situation des objets que nous regardons, en
modifiant la lumière qui les éclaire, en augmentant ou dimi-
nuant l'intervalle qui nous en sépare, fe précautions prises,nous pouvons juger cm toute sûreté.
1 S»»t.. M..Vit..ii.
C.ii- ,|(\ II. w »,.
ANTIOtlifUB"1ÏWCAWN. if7
Que dire eutiii tlo m$ rossemlilances dont on imôhiî si grand
bruit, attire deux jumeaux, deux œufs, deux ebeveiu? tics res-
«srahlanees, tout le monde tes recoitttttlt mais pourquoi en
«onelure l'identité dos objets semblables? Vous ne distinguez pas
deux jumeaux î Chezeux, leur mère les distingue fort bien. l'ha-
bitude aidant, vous les distingueriez aussi. On a vu à Déios des
j{ens qui.à la seule
inspection d'un œuf, pouvaient reconnaître
Inpoule Ilui
t'avaitpondu. Et à raisonner ainsi, si toutes choses
dans la réalité sont confondues et indiscernables, ce n'est pas
seulement la connaissance, c'est l'existence oublie de ta vérité qui
devient impossible. La jirdwb.iltlvjjieiiit^disjKU'aft il faut en
revenir avec Arcésilas à la suspension du jugement. Au fond.
Arcésilas était bienplus conséquent avec lui-même (|iie (larnéade.
lit. (l'est le dogmatisme stoïcienqu'Antioclius veut sutisti-
tuur au probabilisme de la nouvelle Académie En mente
temps, il est vrai, il se llatle de rester fidèle aux doctrines de
Pluton et d'Aristote, qu'il ne distingue pas l'une de l'autre.
Si un on juge par l'exposition (lue fait Varron. dans te I" livre
desAcadémie»
<le Cicéron. Antiochus divisait la pltilosopliie.
comme les stoïciens, en troisparties;
mais il attachait fort peu
d'importance à la physique, et il avouait volontiers(lue
tes ques-
tions obscures et difficiles dont elles'occupe donnent trop
de
prise » l'argumentation sceptiquedes académiciens. Les deux
questions principales de la philosophie sont pour lui celle du
critérium de la vérité, et la définition du souverain bien -.Dans l'exposition de Varron» ta nKMfle~oèaîpe~la première
place,la
physiquein seconde; la logique
ne vient qu'entroi-
sième lieu.lie
lit seconde. lit1, lit!
vient ~itt'etitroi-
En morale, Anliochiis admettait ta division de Carnéade'-1;
Cït* /(* t tt, M.ift. t «f*i { Aiifiot'liiis) i|m a|t|if^atKitiir.U'attt:inii:tt>.i-iat
<|ui(lcm. si |)iT|«ima iiiu(.ivis~pl jji'tiiiaijï^siiiuis sloû us.
f< Il, ». !(( -Kt'-nim ih» cssi' hwi" maiiina in |itiilu-o|)tna. JMiliriui» «fi,
"I liiifiit tmiiui iim.^
(>lV«y. ri-tU's'iiis. {i. 1 jfc. (jif.. {'Vu.. V, \i sti.
•1W UVtlti if. lîltitTTftB Vf.
é.i.ttMtj*.iKh'tffcCatiKfifctiti..it& <j.ft^t-,̂ |h_A fc B _t i^_iï. tAprès <iwi' combattu et exclu foutes les autres solutions, il se
prononçait pour celle des stoïciens. Le souverain bien est de
vivre eufttWro&ntmt a fa nature 1» naturepropre
de l'homme
est la laisou l'homme doit donc se conformer à la raison. Lit
vertu est pour tui le sauverai»bien" Jusqu'ici le Portique et
l'Académie sont d'accord. Voici oit ils st*séparent. Dans l'homme »
les stoïciens no. voient<jue
h raison; Antiuchus tientcompte
de
ta sensibilité et tl»forjjs1-
Sans donle, étant de nature infé-
rieure, lecorps doit Otrt» suhordouiiiî à res|>rît{*; rouis le sou-
verain bien iiuplitjue leplein épanoni^ement du coq» et de
l't'sjmt,la possession des
Ijieiisjjorporels autant (jue des biens
spirituels. Le bonheur* par suite, itujdûjue aussi cette double
condition. La vertu sullit uu bonheur ;« les stoïciens l'ont dit.
<it ils ont raison. Aristote, ou du moins'FlitSophrasto et son école
sont à tort portés àexagérer l'importance des biens extérieurs^1.
Mais si la viepeut être heureuse grâce à la seule vertu, elle
ne t'est parfaitement qu'à la condition que les biens extérieurs se
joigneitl>JB.Vjgrtu c'est ce que les stoïciens ont trop inéconluW.Anttochus. on le voit, rapproche et rénmtTpintôHfu'il necon-
i-ilie, les vues divergentes (les deux écoles: certainement elles
ne sont pas aussi parfaitement d'accord entre elles qu'il lui plaîttic t'allirmor, et (iicéron raison de lui dire
qu'entre l'une et
l'autre il faut choisir Antioehuss'éloignait encore du stoïcisme
en refusant d'iidmeltiel'égalité «le tous tes
péchés |5i, etl'impas-
sibilité absolue du sage Ui.r 0'
Laphysique rf'Anltocfius admet deux
principes, la force et
' l'.k., l'iu., V, fx, a6. t'isoii ci|M*e la ttuctcttw it'Autioclms, K»., V, m, K.
Af., I, », hj, Cf. Fi»., V, un, 37; vit, 'm: nu, ,fjj.
Cir.. K»., V, xi», 3i.
t'.ie., 4i"l,n, 31 -luuna tirtiile es*' pnsilain lip.il:im «itam, nt'c lamcii
hi'iili^itiiam, ni» n<ljiiiij;iT(!nltir et nir|wris, ift cetera, (jiw sitjirn ili>la smit, ad
viiliilis Mstmi kIoiiki.- Cf..1, H, ,1.111, i.'J.'i. Vin., V, lut, 71 «un, K|.IS
Ci. Fin., V, »-, ri. ,lc, [, x. 35.
Oii-. /•Vii.,V, uiï, 7>t.
lr. tt, xtvtl, ili».
t.'ir.. Ac, II. ii.ui. i^î-J.•
<4i-•!<• |I. «i.iv. i.5.
antiockus imaioN. m..& a. ne·s mamve·. 4~J
lu matière. t|ui tiu jiiHivent exister l'an sans l'autre. t,a réitniwtt
tio«;es deux {iriueips fatum uu eurps, ou
qualité {usotiitis). D«
ces qualités, les «nus, au nombre de cinq, sontsimples
et irré-
ductibles ce sent les éléments; les autres sont composées, ce
sont toutes lespropriétés
«leseorps. Sous ta diversité do tous tes
corps subsiste l'unité de la matièreprimitive» divisible il l'infini,
éterncHa, indestructible, d'oit tout est sorti, oît tout doit rentrer.
Lu réunion de tous ces corps forme l'univers, gotmjnrô par une
intelligence supr&ne parfaite ni éternelle elle Maintient l'ordre
et rburinonie c'est la Proviileneo. On l'a|i|ielli; aussi Dieu, et
parfois lu Nécessité, parce tjue l'encliaînement t|u'efle établit
entre toutes les parties de l'univers est immuable et filial.
Antiocliusexpose
cetto doi-trine comme étant commune à
Platon et à Aristote e'est manifestement une erreur. (Jette
physique ganthéiste est exclusivement ((oïeietme le désaccord
entre Faneimiiie Académie et le stoïcisme est ici encore ittcott-
testable.
Enlogique,
Antiochusexpose
assez exactement ta tltéorie
plalonicietifle_de la connaissance. Toute connaisMinee » pour
pointde
départ les^sens*, niais c'est àk\raisou jpi'il ap|iartieul
dediscerner la
vérité. Les sens sont faibles, imparfaits; ils ne
perçoivent pas les choses qu'ils paraissent ronnailre. On ne voit
pas bien comment Antiochus concitiait cette théorie avec cellu
de la|rt'présenlation compréhensiv^ qu'il admettait avec les stoï-
ciens . Gicérondit d'ailleurs qu'il ne s'est jamais écarté des
traces deClirvsipjie fl).
Tout au moins, il abandonnait (a théorie
des idées de Platon et Oicéron a raisonquand
i! constate ce
désaccord 'SK H est possible, connue le remarque Zeller3', qu'ilait
concilié £Ar.istofe et tes stoïciens est déclarant que la (véritéréside dans tes concepts formés
parla raison h l'aide des dounifis
sensibles.^H reste mTaniiioTns certain
(ju'Aristote attribuait à lu
raison un rôle tout différent de celui que fui laissent les stoï-
Âc, II, mi, l'i.i.
<•' Itàii.
'*>Hp.ril., n.twli.lV Allll.
mu mm ii.->m\nnm\*i
tiens; ici encore Amodias «*» pu r&tttîf d«K doctrines en
réalité fort différattes. <ju'«i faisant violence à l'une d'elles
flous retrouvons partout le mène éclectisme, sans discernement
et sans profondeur.
IV. Dus deux(«mies de l'œuvre
philosophique d'Antiochus,
c'cst, ainsi qu'il arrive si souvent. tapartie négative ou destruc-
tivequi, de beaucoup, lui fait le plus d'honneur. Son dogma-
tisme ne témoigne d'aucune originalité. 11 se borne àrépéter,
sans les approfondir, les assertions des stoïciens il lui suilit de
(es aHéutterquelquefois, et d'adoucir quelques paradoxes insou-
tenables. S'il invoque la grande autorité de Platon et d'Aristote,
c'est presque toujours à contresens il altère et affaiblit leur
doctrine, pour la mettre d'accord avec cette des stoïciens, et
cet aceortl est lui-même depure apparence.
K» revanche, sacritique de la nouvelle Académie ne
manqueni de finesse ni de force. Du moins ou peut dire
ijueles adver-
saires du poimbilismi1 n'ont jamais trouvé d'autres arguments
»{ue les siens.
Toutefois. la critique d'Antroelius serait bien plus décisive
si, à Carnéade ut ù Pliiloit, il opposait autre chose tpte te doj;-matisnjc seiisualiste des stoïciens; Antiochusa peut-iHre raison;
«rais il ne donnepas
de bouiu's raisons. Très fort dans l'attaque,il devient très faillie
lorsqu'il s'agit de substituer une thèse posi-tive à la thèse sceptique qu'il combat. L'objection des académi-
ciens contrela représentât ion eomprêheMsii-e; si nous ne nous
trompons, subsiste (ont entièru. Que répandre à cet argument de
Carnéade si. comme le soutiennent lessloïciens.fbLfepréwji-
liH^_ço|O{iriljensive coiTespondï(y;at'tenicnt à son objet, deux
«bjots différents doiventprovoquer des représentations spécifi-
quement distinctes. Or, l'expérience prouve qu'il nVnest rien à
chaque instant, desobjetsjli fièrent s provoquent des représ*>ftta-
tions identiques. Celait là lu nœud de la dillictiilé Antiocbus a
»-u auiriôtuTle mérite de le c»iH|ni>ndn.> car il mrtsacraîl des
journées cnlit-res à lu dist;ij.<si«fi cl** <;cpoint. Mais
sesarjjri-
~Ttf)<:tftiSH'ASt:At< 2St
.·:r. .·.E~ .x,: ~t.HH'ttfs, tels du mains
qu'ilsont éié consorv^s
par (îie^rou,fie
rikulvimt|ifK
la (iitlktttté Ony sent
de i'oiahtirras et de l'indt'
«isitm lit tiuttvetle AciuMiuie rc>s(«* victorieux» c'est a vrai dire
du si'iisualisitii' iju'ullc triomphe. C'est moins sans doute In faute
tl'Anltochtis «jue cette d« h doctrine <|iii lui «U«tt eoinniuau avec
les sloïcit'iis. An'invo(|uer que le
tvinoignage (tas sens, à s'en-
fernjerjJgiisJl^tirJRfiiç, Uçiiolcy et Humel'on! bien prouvi'»
plus tard, il estimpossible île fonder
une solide tlu'orio de la
cwiiludf.
V. Quelles furent, après Philon ot Antiorhus. (es (iestini5es
de la nouvelle Académie? Il semble bien <juc dans l'ardent débat
«jtit s'engagea enlro le inattre et le disciple ce dernier eut l'avan-
tage. La manière dont Créerai' n<»«» (lit Htifont vivo, uende-
wmfattwSnmm «oh <fi^id'( n'indicjue-t-elte pas qu'une fois Phiion
dis|)(iru. l'Académie n'eut plus de défenseur? fi'est d'ailleurs ee
tjil'atteste expressément le môme Cicéron quand il dit que l'Aca-
démie est abandonnée**?, qu'en Grèce m#mc elfe ne trouveplus
departisans
f*
Toutefois, il faut faire ii-i une distinction. L'Académie n'eut
plus de représentants à Athènes c'est que Pbilon qui avait quittéla Grèce att
temps de la guerre de Mitliridatc, n'y retournaplus151.
Elle! en eut à Rome Cicéron d'abord, puis (,'otfa M, pout-étreln
P. et G. Selius et Tetrilius Rogus. Mais il ne fallait pas comptersur les Romains pour donner à des idées jjn;c<|ues un dévelop-
pement original.
La nouvelle Académie eut aussi desadeptes
à Alexandrie, qui
«•tait devenue dès celle époque la capitale plttlosophiquede ta
Grèce. Cicéron mais parle en effet d'Heraclite (!•• Tyr. tlisriple
(l> tic, Ac, H, m,
/If., Il, H, l7.
« /ie.,ll. ir, 11.a.
'« DeN. O..I, ï, 11.
<;ic, Tinc, V, n«m.
'<••«:ir.,DeN.tl, I. vu, iti.
1 Cic. /!.• 11. iï, 11.
i'H2 UVIHÏ H. RH tMTKK Vi.t~
é» j'btle» m\mène fOKipsqu!A"t{iaehtt8>l',q«i (int buii
justja'auIwtrt en faveur des doctrines de son maître, et combattit AimV
chus avec une douceur obstinée. C'est(>roh;tblcRi<>nt lui mje
twéron l'ait allusion quand il ditque la doctrine tic Phileu,
prope dimixsa, rn'oetttw.
Peut-être faut-il aussi compter |jormi lesdisciples lidèles de
Philon, Eudora d'Alexandrie. Du moins, il nous est donné®
comme académicien. Nous savons de lui qu'il avait écrit un
livre ou if examinait vçf£ktiyionot<Si toutes les questions pliilo-
sojtltifjui's. ci? qui signifie [irobableraent îsi qu'il exposait toutesles opinions à lu façon académique, sans se prononcer, et en
laissant aux lecteurs le soin de conclure. Cependant, nous
voyons qu'ilavait écrit tut commentât!*» <tt sur les
Catégoriesd'Àristole et peut-dtre sur la
Métaphysique® vraisemMeineirt
il it avaitexpliqué le Tintée tle Platon. Tout cela donne à
penser que nous avons affaire à unéclectique. Enfin un pas-
sage qu'Arias Didynius luiemprunta, et
que Slobée7 nous a
conservé» indique, par son allurestoïcienne, qu'il avait fait
plusd'une concession au
Portique. C'est peut-être à lui que pensait.-Enësidème
quand ilreprochait aux académiciens de
n'élre plus
que des stoïciens aux prises avec des stoïciens.
A côté d'Eudore, il faut placer cet AriusDidymus, auquel
StobéV*1 aemprunté tout le vu0
chapitra des titibyeu. Ce phi-
losophe est le miîme""qui fut l'ami intime d'Auguste et de
''Ae.,11, i»,ii. Cf. lud. /far., mm («6 m«.), 4 oà yeut-«lte il est indiqué
comme avant vi'cu soixaiihMtix ans.
» sioK,Set., tr, .'18.<:r. r%r, «.«% vu. sm.i; Zeftcr(l¥,6n) interprète autrementcrt m«t. tfind (Itf, p. ai/) comlial,
avec raison selun nous, «relieinlerpnHation.
Simptic. Sclml. ira Arts)., (il, «, ifi.
!i Viex.Metaph.,XI.1V, *.t.
Plut., De anim. prticr. in Tin., ').
Ed., H. 'i!i. Voy. Thiaupourt, /Je.SW. Ed. mi-nmijni' /ètrii'iits, r. vr. p. 58.l'an», Hachelt*. t»85.
Thiaucourt, idib. 50.
"'» Ce point a «té ronteslc (Hcino. Mrbuch fur <(«.«. t'hilnl., i«fi;i>. nuis à
lurl. (V. Uiels., Daxo».-Gra-c. p. 8ti.) Kit revûndw, il faut cli-.liiif>ncr Ariiisili-
Xiivpr, Atik«« ilnnt pari» Suidas. (Z"ll«'r. «p. rit., (i. liifi. -j,)
INTtOttHliS D'ISCALOiV 223
Jîdeeiro<», €|«i adressa- uue Consolation it UvieM, et '«mtributi
par son amitié avec Octave à sauver Alesundrio, sa puhi«w,Ze-ller a remarqué avec raison qui? son exposition de la ino- «
raiejidi'tplélicifiino a na« couleur stoïcienne Arhts va môme
jusqu'à employer des expressions utilement stoteieniies par tra-duire les idées momies do Platon et il'Aristote w. Toutefois, cotte
raison ne serait pcut-élm pas décisive pour te ranger parmi les
stoïciens; car tes anciens ne sepiquaient pas toujours d'une
scrupuleuse exactitudehistorique, et Anusa pu, tout en voulant
ne fairequ'une
œuvre d'historien, se servir d'expressions fami-
ftères etplus connues de son temps pour exprimer des idées
plus anciennes. Deplus, s'il est très souvent d accord avec An-
tiochusis|, onpeut aussi citer nombre de points où il est en
contradiction avec lui w.
Ltt question serait difficile à résoudre, si la découverte de
l'Index Lmirenliamis™ n'était venue couper court à tout débat.
Nous voyons en effet que Diogène range expressément Arius
parmi les stoïciens, et leplace entre
Antipater de Tyr êt Cor-
nutus W.
La nouvelle Académie a donc bien fini avec Philon, tout au
plus avec Eudorc. Antiochustriomphe décidément. Il eut d'ail-
leurs un grand nombre de disciples, à Home, Varron et
«>Ktim, r«r. ««{.«», j5.
(i! Unfragmentci»««tu conservéparS«iti|uc, dont,ml Mm-c, li.
"> l'lut., Prmc.ger. teip., «nu, 3. Apoph.,Aii(i., tu, 5. Anton., 8a. Su«..
Octm., 89.(l) Tliiaiicourt,op. cil. p. t)(j.«" Zeilm,p. «>j6( t.W Hireel,op. cit., Il, p. 713, 6gfj; Ut, p. shh. llirzct, quiveut à toute fort*
faire d'Eudore et d'Arius duscaiilinualenrsde Philon, ivniari|ue avec raison
((«'Aiius t«moi|;neenversPliilon d'unegrandeadmiration(Stot)., H, ho) et qu'ilsemble connaître et citer l'talon bien mieux<|ii'Anlioi-lms,qui ne le connaissait
que de seconde main (p. ad»). Mais tous ces arguments tomlienl sembie-l-il, de-
vant le texteformel<iot'/i«fcr Lminmlûmm,dont Ilii-zelne parlepas.Cf. Diols.,liât. Gr., p. 81.
m Val.Ruse,Hmiu'i, 37o.
111 C'est d'ailleurs ce <|iie confirme Sàwque, (tant, «st., VII, mn,a •tradf-
miciel vcleres, et minores, tmtlum iinlûtitein ri'li((iiiTtmt.r:
2U LIVRE If. -CttAHTRK \st.
Lijfttftus, Bi'Hius^'1: jVAtexutttffio. swt frèiv Arishis Wl, Ariston
et Dion' finalement Arius Didymus. bien d'autres encore dont
nous n'avons plus à nous occuper. puisqu'ils n'appartiennent
plus à la nouvelle Académie.
Ainsi, le stoïcisme s'établit définitivement sur t<ls mines de
l'Aradémie. Il est vraiqui»
c'est à la suite d'uncompromis, signé
par Antiochus, qui réconcilie Zénun et Plut»», la- pis a été
coud iu> aux dépens di' Philon. et l'Académie a acheté son unité
en rejetant hors de son sein cettetrs&tioa.J4goib"te
etsceptique
qu'elle avait si longtemps essayé de concilier avec les exigences
de la morale et de lu vie pratique. Cette tradition était pourtant
authentiquement platonicienne; et c'est une questionde savoir
si l'Académie aplus. gagné que perdu en se dépouillant d'un
élément, embarrassant il est vrai, maisqui avait sa valeur et sa
dignité et en tous cas tenait étroitement à ce qu'il y avait de
meilleur dans teplatonisme
et i'aristotétisitie. Au point de vue
moral, sans aucun doute, Platon et Aristote sont plus près de
ifénon <juede Carnéade et de Philon.
( Encoreeussent-ifs sou-
scrit aux paradoxes stoïciens ?) C'est ce qui explique et justifie
en un sens la victoire d'Antiocttus. Mais jamais Platon et
Aristote n'eussent admis le sensualisnie_éiroit des stoïciens c'est
à condition de faire silence sur ce point, cependant capital,
d'oublier (juelques-u nés de leurs croyances tes plus chères, qu'on
apu les réconcilier avec les disciples de Zenon. C'est en sacri-
fiant l'idéalisme au sensualisme et à une sorte de matérialisme,
([tt'Aiitiodius a fait triompherla
m»rale__8toïcienne.Il est vrai
que les éclectiques, quiadoucissaient tout, ont pu adoucir la
rigueur stoicienne, en imime temps qu'ils tempéraient jusqu'à
lesupprimer
l'idéalisme platonicien. C'estpar
des concessions
réciproques que se font les compromis. Mais ce n'est pas pardes
compromis que se fait laphilosophie.
Si donc il faut jujjer l'cntrepriso d'Antioehns, on se trouve
Ijc. llrnt., les», 3.ta. Ac, m. i->. Fin.. V. ut. 8. Tme., V. nu, a».
('je., Ac, II, iv, 1 a; I. m, i'. etc.
(l Me, A(., II. IV, la.
ANTIOGlfDSWkiMMM. 225
dans un vmitnhle emhniTnx ici imefirô, connue disaient volon-
tiers tes académiciens, it y a tlu|Hmr et du contre, il «si vrai
tftie cettelongue série de philosophes, réunis; par Anlioclitis sous
l« titrerefipwliî
de l'Académieetijui
vit de Socrate, Platon et
Aristote, ii Zenon et ù(llirysippe, embrassant toutes lt»s glotïes
du laphilosophie ancienne, fuit assez honni! fi/jure. 0» fie
peut
A'iu|i«!cliet jtotHianl depenser qu'entre des noms si divers, t'en-
t«'!ïte n'estqu'apparente, et comme de
parade; epetous ces
philosophes,réunis à leur
corps-déToudanl, ecsKcraîvnt aussitôt
d*(?tr« ti'accord, s'ils cointn«»t-aicnl ss'exjilitjtier. et
(jim celui
tjtit a stgiw te \tmtf d'afliauve «'ii leur nomn'avait peut-être pas
<|ti«lité pour les repit-senter. Peut-iilro aussi est-il permis d'avoir
«n regard dosympathie pour ces
proscrits, que la défaite de
l'idéalisme a dûlinîtivement exclus du chœur despliilosoplrcs, et
tjui porteront devant l'histoire hpeine d'avoir
trop courageuse-
ment contbattii le sensualisme. Dans tous les cas, ce n'est pasdans cette m*>têV
depTiilosophes qu'on trouve le véritable et pur
esprit"' de l'ancienne Académie it nereparaîtra vraiment que
quand renaîtra Inmétaphysique, dans l'écofe d'Alexandrie.
''• Saint Aii|;iistiit ne s'y i>sl (i«s homjié. S'il a cii tort, ramniu uo«s Pimni*iniinti-é,do |ir'lur aux nouveauxaail<;mieicnsîle scci^lMJojimos[ilalonu-iiiiis,il »(«en vu du moins (|u"ils êl.-itTit à liien des i!(;iu-tls, plus [ir?.-ï (hi n'iitalili:
espril
[•latonicioii ((lie leurs liïaiw sloîcii'ii». Aiiliochus est ù ses yc<n ihic sur!» «le tralln1.
c|iii n livii: In place » IVimomi. Cmitr. ucmlemi, [Il, uni, 'n -f A' lim-litis) in
\f.itlpiniiim vclciciii, (jtiastvaiuam di'fminiriluis>( (|ira>inullii lu«U»smuram,vi'lol ailjiKin' i-l rivis
ii-rcpseral. iiiv-ti» i|itiit iiil'crfiis mali •!(>-luirui him rini>riliii<i
((Uiitl l'Ialnni» iiiilii tiiilaci'l.
i5.
i.Vlii: fil.
t.~ Sf:)-:t'T<~8MH <MALt':(!TtQtJH
CHAPITRE PREMIER.
1,'KCOI.B SCEt'TIQliF..
Itam de plus obscur que l'histoire du scepticisme àpartir du
moment où fa nouvelle Académie avant eusse d'exister, *m vit
rurtuitrn ttnr.: lrluï lrrit 1 1 r1e
1. f,'est irenatltc une <;colcqui prit fe nom de
pyrrhoBieune. C'est à
peine si, pour une période d'environ deux cents uns, nous pou-vons savoir quelles furent les doctrines (les plus illustres
scep-
tiques. Le scepticisme est comme un fleuve(lui s'enfonce sous
la tenupour ne revenir à la lumière
que fort loin de IWIroit
nu il u disparu.
Nous avons bien une liste dephilosophes sceptiques, mais
elle est trop courte pur le long espace dotemps iju'elle doit
remplir. H faut qu'il y ail une lacune d;tns la succession des
philosophes sceptiques. Où est cette lacune 1 C'est un premier
problème qu'il faut essayer (le résoudre.
Kn notre, on admet généralement qu'à partir du montent oh
te pyrrhonisme réparait sous soupropre nom, l'école sceptique
forme un idiiI, ou il n'y Il lien d'introduire aucune subdivision.
Le nouveau scepticisme, pour laplupart
des historiens, comprendsans distinction tous tes philosophes qui
se succédèrent depuisPlolémée jusqu'à Sextus
Kntpirktts. On croit que leur doctrine
s'est développée régulièrement, sans modification notable en
particulier, on tient pour acquis que l'tmton duscepticisme
avof la médecineempirique, incontestable depuis Méiiodote jus-
ma mviuï i rt – cit vpirm-: i.
t. i_u. n 1 1 ~t~ 1
<|«*à Seïtus.- a l'ammniLvf>emiettnp plus {ùf, ei cjKt» ta
plupart«ii's
sceptiques,sinon tous, «ml été en mène
tempsdes méde-
cins.
.\ous essaierons nu contraired'établir <|u'it y
a lieu de dis-
liujjuer deux périodes. «|uïse succèdent sans doute sans in.
leri'uptioudans le
temps,«mis diffèrent
parte earadèn> des
doctrines. U;t»s !a proiiiièn. tusci<|i(ici.siHcest surtout (tiutec-
tiijae.Dans la sewmfe, it devient
«»iij|*tr»|m*yfnit altîami1 avec
ta s«toinédieatu:t|ui.[H>rfe je ini'Ute ..nom, et sans rien atxtn-
donuer des aryumonts précédemment invoqués, en ajouk1 de
nouveaux, et tes nnirne d'un tout autreesprit.
M'est l'e.vamt'H i.«l
la tuiiiji.iiaison tics d<»ctn*nesqui Justifiera cette distinction.
Dans le présent chapitre, en passant en revue la suite des piitio-
so|iltos scc|ilii|ues. nous monli'orons (jn'il n'y a iti.st(>ri(piente(tl
aucune raison sérieuse *Ie considérer tesphilosophes seeptitptes
de notrepremière période
commeavant
été des médecins, oh
comme avant aucune affinité avecl'empirisme.
I. lu texte (le Diogène' fortimportant au point de vue qui
imtis occupe renferme la liste «les philosophes sceptiques,t Timon, à ce
ijue dit Méiiodole, n'eut pas (le successeur. Sa
seeti' finit avec lui,pour
être relevée ensuitepar
Ptolémée «le
(Àwiie. Mais Hippubotus t't Sotion disent tpt'il eut pour disciplesl)ioscoride tle
Chypre, Nicoloclius d(« Khod<;s, Knpiirannr de
Sélemie, et IVaylus de Troade. Eupliranor eut pour disciple
Kiifutlus «l'Alexandrie et Eubttltts fut te maître de IHnlémée
Sarpédonet Héractide écoutèrent Ptolémée. AHéracKde succéda
,'Knésidènie de Gnosse: à /Enésidème, Zcuxippe de Polis; à
Zeuxippe, Zi-uxissurnommé le Bancal; a Zeii.vis. Antiochus de
Laodicéc stirle Lycus: à Antiochus. Ménodolede Niroraédic, mé-
decin empirique d îhéodas de Laodict'-e. A Jlénodote succéda
Hérodote de Tarse, tils d'Aricé: à Hérodote, Sextus Empiririrs.auteur «le iliv livns sur le scepticisme, el d'antres ouvrages
; IX. trli.
I.'KCULK SGKPTKHI& 22»
«wuReirts;à Si'vhis sum'ila îïaiiii'iiiniis Cyflii&ms, empirique
comme ha.» P-
Un calcul 1res sintplt} prouve que«rtto liste est incomplète,
tiuijn'îl s'est trouvé une péfiotfe pendant laquelle l'école scep-
tiquea cessé d'«îlre
représentée.En effet. Timon, un l'a vu.
paraît avoir vécujusqu'en :»3f> av. i.~C. Ott fixe à
peu prèsunanimement lu date du
l'apparition de Status lîmpiricus à fan
180ap.
J.-C. Entée ces deux[toiitls extrêmes, il s'est éiibitlé'
'ita ans; et poitr raiiplir cet intervalle, nous avons douze
noms encore faut-ilrcman^tter '[ue (ilusietiis plalosoplios,
Siirpdott et Héraclide. Uénodoie et Theodas. ont r«i;u les
leçons d'un iiidmo maitn*, ce<[ui exclut ridée tle Jouïo (|('néra-
fions successives. Y eut- il douze chefs de l'écolescepfi<|ite,
il
faudrait assigner u chacun imedtirc'o de [»rès de(lenle-cinij ans,
cetjni est sans exemple,
et inadmissible.
Ou n'a pisde raison de croire <[uo J)io|;èna oit les auteurs
tlont il s'inspire aient omis aucun nom. Au coiilraire, deux lestes
|»r«kis nous disent qu'il ya eu «no lacune dans
l'ensiM{{uemeiit
sceptique celui de Dioyène, cju'on vient de lire, et un autre
non moins formel d'Aristoclès'tj!.
Heste à savoir où est t'ettc lacune.
On admet généralement qu'elle s'est produite soit aprèsTimon, soit après Eiibulus. La première opinion a
pourelle
l'assertion fonwlliï de Mèiodolc, qui, étant un des représen-tants les
plus illustres de l'écolesceptique, devait an bien com-
iiiiîlrc riiisluire. La seconde se fonde sur un calcul encore fort
simple. /Knésidèrne a vécu, suivant laplupart dt-s Itistortens. au
commeneciuenl de notre ère, ou an plus tôt, suivant une opi-nion défendue avec
beaucoup d'ardeur par Haas iJi, vers l'an 60
av. i.-C. En prenant pour point de départ cette date extrême.
AilEiiscIi., /V«?ji.ci\,XIV, svih. -iiy. Mnîsvùi iiualpnÇénot viiû», ws si
ftiMÎé êjivotno maipivctp, tyftit x«
-apvwèv
KMhvSfâf îiï xh' Xtymîav
\hnmh\uii ris iiii>'jJT,-jpch'iî(i£it»tùk Htav loituv.;)
l)t jilulvyijih. *rt)itK. miceuiviiibia t)iv. iii.iii' 11, i.'i. Wiiiiitiuiii j; Sltt
l.i-, 187a.
ûU UVRK HK – r.HAI'lïRR I.
t'-6' 'J s 1 ~i · ea l'
on voit quw PtoMmee h*«s{séparé
d'.Km'sidènieque par Sarpé-
tltltt et Héraelide. tpii furent tous tlt,'t14 ses(lisril)lt,5.
On vit aussi
loin que possible en admettant avec Haas qu'il vécut vers i iio-
t -jo av. J.-C. Mais d'autre pari; Ëububis n'est séparé de Tiinolt
que par deux générations il ni1 peut guère «voir dépassé l'un » 3f»
av. J.-(J. H est ilnncimpossible que Pttitémee ait été, comme le
dit Dtogùuc. disciple iI'KuIkiIus. [k'imuquuns d'ailleurs qae
Dtogène parleen son nor», cl cesse, eu noimnai)t le disciple
tl'fêubulns, d'invoquer les tênoiçnages de Métiodole on de
Sotioiu Hy
a donc eu, avant Plolémée, une éclipse de l'école
sceptique.
Ce calcul, en cequ'il
1 d'essentiel, n'est contestépar per-
sonne.Cependant,
Haas s'est ici séparé dit Popinion commune
des bistoriens, H yà bien une lacune suivant ttti; mais elle
s'estproduite après .Knésidème. Quant à la période qui nous
uevupe, il estime «pie le scepticismen'a
pus disparu, mats qu'il
it eessrs seulement deporter
un nom distinct, etqu'il
s'est con-
fondu avec la nouvelle Académie. Hienque Timon ait en des
mots durs pour Areesitas" il aurait Hni par s'entendre avec lui.
et Arcésilas serait son véritable continuateur. L«ssceptiques
auraient fraternisé avec les nouveaux académiciens et fait cause
commune avec eut contre les stoïciens. Ce n'estque plus tard,
quandCarnéade introduisit dans la doctrine des modifications
(jui en altéraient lapureté, que Plolémée de
Cyrène aurait dé-
noncé l'alliance, et recommencé à faire bande àpart.
Cette interprétation, ingénieuse jusqu'à la subtilité, ne nous
satisfaitpas. Que ce soit
(tourune raison ou
purune autre, il
demeure acquis que l'école sceptiquea cessé pendant un temps
d'avoir une existence.1 distincte. Il faut appeler les choses par
leur nom et celas'appelle une éclipse. Nous aurons d'ailleurs
l'occasion d'examiner tesrapports
dupyrrhonisme
et de la nou-
velle Académie, et de voir si a aucune époque, ils ont été aussi
étroits quele croit Haas. Enfin un des maîtres de la secte nous
ï!llt'lj* W y I I 't. I |5.
i;ÉCOiB SCBPTfQUE. 23t4 _e.. iii!
.Y -1;'1"
dit u» propres termesqu'il y u
eu interruption W. Nous nous eu
tenons à ce témoignage formel.
II. C'est seulementà partir du Piolémée que lus
philosophes
sceptiques se succèdent sansinterruption. Dans ce long espace
de tetnjis. nous croyons qu'il faut distinguer deux [tériados
l'une, eomprenunt tessceptiques depuis l'taltfmde
jusqu'à 3M«o-
ilote; i'auti-e, sondant de Méuodoto à Saturniuus, Etumiuon1i,en réservant /Enéstdème, qui sera l'objet d'une étude particu-lière, ce
que nous savons des|t(tiloso|)hes de la première de
ces périodes, et reelierchons enparticulier s'il y ti de bonnes
raisons de croire, comme on le (lit souvent, qu'ils aient iM des
mwk'iins. Mais auparavant, il conviendra de dire quelques mots
desprétendus successeurs dé Timon, d'après Hippobotus et
Sotiou.
Nous ne savons rien de Diosearide de Chypre, de Nicotoctiiis
de Rhodes, tl'Kuplinmor de Séleucie. De Praylus, Diogène nousdit seulement qu'il inoatra une telle
énergie que, quoique inno-cent, il se laissa mettre eu croix par ses
concitoyens sans dai-
[jner leur attresser une parote, Ëukulus est aussi tout à fait
inconnu.
Il en est «le imiiuc du rénovateur duscepticisme, lHolémée
de(Jyrène la date de sa vie, ne
peut,on l'a vu ci-dessus, être
fixée qu'indirectement, dans sonrapport à Celle dVEiiésideme,
qui soulève elle-même de graves dilHcultés.
Des deuxdisciples de Plolémée. l'un, Sarpédoti, est tout à
fait inconnu. Sur le second, Uéraclide, on croit avoirquelques
renseignements qu'il importe d'examiner de près. On connaît
plusieurs Uéraclide qui furent médecins l'un d'eux n'est-il
pas en milinctemps
lephilosophe sceptique dont /Eitésidème
reçut les leçons? t
'•'•l/inloqjivlalion t[iie duiuiv Haas ([». 1 1) «lu mol d« M.'iKhloto Siéhsev «
\yuy4 Si'iiilili;iiiailini<si(»tc.Niilti-[isrton ne viiil<jui>les sc.|>li(|tifsoussoiit(m,-iiraiiicVe |iarlirttli>V !<• «ivre (rite mliW» d imtilula). Cf. Zdler, Dit MtiU. ,kr
lîriedm, vol. IV, jj. 'is;i, 3.
232 MYHB IIL-CUAPITAB L
.t"
.rs.swr aanm ctlfal'LFI.fG i..
Galtei» itousprie d'abord «l'un H&actttfe qui fin cumnieitta-
Itmrd'Hrjipoerati''11, médeein empirique <K et «uteur d'un oit-
mMji» tntftufè fï^pï ffci(initpm>haips<rsms<3K En outre, il »ite
«plusieurs reprises Héraelide de Tarait?, eoimueukiluur d'Hip-
pocrate'1; disciple deIVrojifjiiéen Maiitias*, mais
<|iâ plustard se rallia à fa secte
empirique. Évidemment ces deux Iléro-
flide n'en fontqu'un.
Ilen a un autre appeté, Par Catien et Sirabon'i!, lit(raclid«
li'Ërylbrée, dont on nous ilii.|«'H fut
«lisciple de Oiryscnne^'»
'•t liéropliiléen il avait commenté, non plus, comme le précé-dent, toutes les œuvres
d'Hippoeralu. mais seulement lesÉpidé-
mies (s
L'un de ces deux Héroclide est-il Héraclido lesceptique?
On est liien tante du iïm que k>sceptique et
l'eiiipiritjtie de
Tarante sont le ine"mepersoimajje «piand o»
soit^e aux liens
étroitsqui ont uni le scepticisme et l'empirisme. C'est le parti
tjti'a pris Haas '•»' sans hésiter. Mais c'estune question de savoir
si ces liens existaient déjà àl'époque dont nous parlons. D'ailleurs
lachronologie oppose un obstacle insurmontable. Les historiens
<l« la médecine assignent il fléraclide de Tarcnte rne date bien
1lu ,/<• mot. i.£k., 1, vol. XVIII, 6, j.. 03i.
li.lil. Kiilm. l.ip«œ. iS33.
h Itiyp. tle hmn. protim., vol. XVI, p. t.
!8; thllur.mih., If, 7. vol. X, |>. i'i:i. h Itipp.aptior., VII, 70.ro!. XVIII, «,
|i. »»;S'iii^ Eitf., p. 6t>. 10.
-1' tklib. piv/iF., i|, vol. XIX. p. SS.
"* /« llijip.ih hum *4, vol. XVi, j>. 136.tM mmp. rnetl. sec. foc., VI. ij. vul..VII p. y8g K«poi* ir iv ,i«i toiij oï-
à«om JIijpii'i xai ClpaxAc% tw Tipamip» Br/sw1?» Çipptx* yiffaffim. Boii
fitt tw'm»ivjnépw
àflptxtsiint «i » SiSAfxalu* «îîtov 5f«n«if. Aààï Mwti'h
(iît>, i'« e{ àpx>'« iT» H|so?ttîio* oi'tu «ai Aé^mev i^isi «in-toi, 6f|psx)cU»<
«i Tiic Tin ijaupM&v iitpûv iyjyynv ieixpivev, in fit iptaîof xi te Om ifK
:i-/vvt ?eyoviss xii -aÀshluv Çtpjiix^v ïpxitpot."'
Gw/rt- V1V, p. li'iii.
•rGalo»., De diff. puli., IV, 10, vol. VIII. p.. ?43. /« i% <j;«t, x.
«il. XVII, .1, p. lioK (nu il r«n( lire sans Junte iipixhiètn au lipu t|». f|p»>sKiv).Ir* Mat., vol. I, j>. 3o5.
''fn Ilip/j. fpûl., i. ïirl. XVII, 11, |>. -Jtf'ii.
'"Op. cit., p. 07. l'Iiitippsuii, De A'AiW. ftiru s. aii/j;iuc (UimIih, 1870) fait
.Ki>sitl lli-inrliile uni-oiidniiprimin An Zenon f'i-pktn icii.
f/ÉGOLESCEPTIQUE. 333d Ji t1 V >l'l É fil
mitdrtKure il aurait n'eu de «&o A ssû, suivant fhnvitilMjrg0*.
et S|»rettf*el''i' |ilaœ vers 378 la dutode Stuutias, qui fat .ewtei-
noDH'ut le mutin; (i'HeYtteltde. Kit udtiiuttaul que cette date soit
trop éloijjitée, |HÛ!H|U<»Ctelius Ain*«lîtt»usiaî a|i{itiH(! tlûruclittt»
(Wmw(wtt^tiwai») pwttrior «(que omnium jwobubUioi', toujours
est-il que d'aptes «a uutr«s teste de C«l»«'li, il a dft précMer
d'un temps a|>préetabie l'époijuc tï*Aselé|iia«tc ijut vécut vers
100-80 av. J.-C. if n'a donc pu iHro le mettre d'/Knésidèiue,
m^iue si on admet que ce |>liiioso|ihea vécu vers 60 av. i.-C
Comme le fait observer Zt'Uer;if, ce «"est qu'en torlurant le leste
«jueMans a
|»iir.ieeomriwder il sa thèse ^'K
Si notre sc«|>ti<|ue n'est pas ll&aeiide de ïarentu» peut-il
titre Héraclided'Ërylhrtfe? Zelter, sans se proiiuiiccr, incline vers
cetteojiiniun
it ne voitpas
du moins d'obstacle daits (es dates.
Il nous semble pourtant «ju'il y eti a un, et tout à fait infran-
chissable.
<" WwfoiVe tk* «cteiiM» «u'ificofes, cli. nu, p. 167 (Paris, i.-ti. Baillwte,
1870,).!*> Vermch riim iingiiuidschea Cmc/iiV/iW ikr Arumkmuh, ettnmolvgmlw t't-
bertichf (Halle, Gcliralicr, r8oo.)
|J' De morb. ucut. 1, 17."' De Sleilic, piwi».. v, 3. Ettit. l)an.'nrl»;r(;. ll.i(isi.i;, Teubm-r. iH5g.)
"KjMs aiilviu, qiuc «ihi niurli»* curni, lom;« chrissimi unilurcs cliam allins ijua!-
tfarn a;;ihiix'caii3ti,rct'Ui»()iioi|iiunaliinc silii co|;nili»iii;iit vimliraviniiuf, laiii|ii.nu
sine m Irunc» et «Icliil» mciKcina t"ssc». l'osl quos, Sen|Mou |irimu<ointtiinu niliit
liane latioiuiloni tlisci(iliu;iiii |)Ci'lincre ail miilkinani [irofossus, in iisu laiilnm et
fX|»Tiuii'iilis c»m |H*«il. Qiiuiii Ijiiillciiiinset «ilaiwÊis et niiijiuiilu j»^l HvraclWcs
'farentinus et ali(|ui non mwliacres virt seeuli, el ifisi profrssiuita se enijiWïos
;i|ipellav«rant. Sic in duas (rartes c'a quoipre, «[lia; victu dirai, medifiiia dhisacst,
alïis rutiuiiak'iu 3rtau,atiis «sun» l-inlum «tbi vîntlîiaiilibiis, iiiilto Ter* qtiicqiiam
;w»( <<«, f m' iu//ra mi«p'/ip»« mini, a|plaut» iiisi i|uwt a«c|«îfal, 1I01WC 1sck'pia«t<?s
Hiulciuli rationom et ninj;n;i (Kirlc iniilavit.-
'>O/t. rit., I. V. (i. 3, 1.
"' It entend «|iœ le» mois pmt eus qui «Mj/m cumprcliemi «mil désignent, non
(«s les mwlortiis 1(11*011 vïont de ttaiiiniiT, niais en {ïén«ral les ctaritsiuu ««eloirt
antérieure à Si-r»|iion. De «elte manii-iv, eiiliv livnididi' et Asflt'|iiadc il pourrait
mu pas y avoir d'iulcnalle »p|>rà:ial>k IJ'ailleiw m» passifde «Jalieu doit lever
tous les dimk'S, Iteeimji. umtie. «v. d«., Vt, 1}. vol. Xl(, |». i)$i\, riti:ckf<ss«s»
p. •»:!•.l.'f\|irf.sioii
m'A xoixmr itanèpaù il(mx>.cihs K«i « iiiwxt'oi a»tuà
Mai>M3« a|irùs mur i-Miiiiiératioii uii esl toiH|iris Astlépiadcsemble tlétisivi-.
m UVRE fil. – CHAPITRE l
ïïest bien- vrai
que Strabon m dit twraoHcumttt i|«'Bûràcfi.lo
tTtërytlirée, l'hérophiMen, fut soncontemporain. Mais d'outré
part k-s historiens de ta médecineassignent ù Héraeltde
d'Ery-thrée une date beaucoup plus ancienne
Sprengellii le fait vivre
vers «o4 uv. J.-C, etDaremberg « voit en lui un
contempo-rain d'Héraclide de Tarente. tëiilro ces deux dates, la fin dum* siècle av. J.-C. et la fin du i", l'écart est considérable. II
faut, on que tes historiens de ta médecine se suient gravement
trompés, ouque, suivant l'hypothèse de Daremberg<*>, il v ait
eu deux HiVacfide, également lu-ronliiiitens, et tous deux d'Erv- u(brée.
3
Quofs arguments les historiens de la œédwîneapportent-ils ?1
«
Daremk'ig invoque le passage où Galien's) tes cite ensemble i
eetle raison n'ust pas décisive, la ressenihlanci; des noms sulli^ «
sant àexpliquer ce
rapprochement. Mais ailleurs tô, Gaficn citeHéradtde
d'Ërythréu |iariiti ceux qui ottt lespnmkm commenté
Hippocrafe. Il suit d'ordinaire très exactement l'ordredes temps
or Héradtded'Erythrée est placé entre Zeuxis de înrente, très
ancieu, comme nous le démontreronsplus loin, et Baccheius et “
Glandas,qui
le sont encore davantage. Enfin, chose décisive. '(Héraclide (l'Kryllirée nous est donné comiue le disciple d«:
Uiryserme!" nous avonspeu
derenseignoinenlK sur ce méde- l<
f-iij, mais «n s'accorde à le placer au af siècle1" av. i.-C. J
II ne reste doncplus iju'à se rallier à
l'hypothèse de Daremhergsi invraisemhlable
((u'elle paraisse d'abord. Ily
a eu deux Héra-
tfwf»- KW. p. lîiâ : tx -rits mtSt ooieas {ÊjuiSpa) xti xiff ij(*« ftp»-xMStif HpoÇasiof àrpit m<rfo>ja'^t knoX'/mmov toi SM«.
WOp. cit., Qirimnlog. t.'el/enieht. Cf. p. ',$
Op. cit., p. i(i-,
IU.
|s:In -piit., vol.
XVII, a (>.lioJ* T« i? flpix/s/w f sr. Ùptxui-
îo») t>,i Ttpitnivov ts jtii ToyÈpiSpthu yeypiiiptint imStibu,
i("; In «;,W., t. v,,t, XVH, «, ,i. 7y.( Tw «pûnw g»}«rificMw ù
fr&lup, h ois xii 'iS&i ialip â Tipinivos mi ô fipuîpjfos tipixwins nxi vpù«iiâf Wmr/imai ri xii Vr.itatiis.
«!; Ih,iïff. ,,“ IV.10, vol. VIII. p.7'a.•:tn av. J.-C. siiivanl Sfiroiii'ct i I. c. ); >“» suivant DitivmWrjj ( I. <.t.
fc'ÈCOLK SCEPTIQUE. S3»
PKiyrtiniif, yreubiUenit l»m deux, «I si l'un d'en* « étéclide d'Br|tfmîe, yrephifêch»
tous deux, «I si l'un d'en* « été
te maîtïe tl'/Knésidème c*ort le contemporain«laStraboit.
Cette qualité d'héraplùléenH*est pas
(tu obstacle, comme le
dit folles- Si laplupart
des sceptiques sont empiriques.Us ne J
le sont pas tous, témoin Sextus Empirieusw, qui fut neut-ôtre«
twStliotlHjue, al Hérodote. Sjn-cugel (J! remarque d'ailleurs que
beaucoup (fhérophîtfoftsavaient adopté tes principes empi-
riques®. ~'t
Si orpouvait
établir avec eertifutle que le «lattre tl'/Kiiési-
tlèine a été Héraclitle d'Erythrée, contoinporain<l«Strabon un
arj»mne!»i ddirîsif serait acquis pourrésoudre lo problenw
si tltf-
fieilc de lu date d';Ë»6sidème. Mais, oh vient è; k voit', ta cer-
titude fait entièrement défaut. Rien ne prouve quete maître
«P/Enusîtlkne ait été un médw-in, et il n'y a pe«t4lreici qu'w»«
homonymie fortuite. Le nom d'ItéVaelide était fort commun chez
les Grecs. Pauly w en cite jusqu'àneuf qui ont obtenu quelque
célébrité. L'uniqueraison
qui provoqueces rapprochements,
c'est que beaucoup de sceptiquesont été en même temps méde-
cins mais ce n'est qu'à partirdo Ménodole qu'on
est en droit
de considérer le mariage, entre- te si-npiicisme et flaaiàiàsmc
comme consommé. l>ons rémunération qu'ilnous a bissée,
Diogène, cïToommantMénodote, ajoute (jtt'il
était empirique
que signifierai! cette mention, si ses prédét-esseursl'avaient été
aussi? Il est plus plausibled'admettre qu'il fut
te premier.C'est
pent-étre une illusion historique de transporteraux premiers
cequi
ne nous est affirmé quedes derniers. /Knésûtème ne
bobs est présenténulle part
comme un médecin pourquoison
"I Voy.ri-dessous, p. a'Jtî, t.
O/<. ci* |>. ^<)5.M 11csl *rai <|uècelle roniar<|m-ne paroi*fftèm pnnvoirs'appliqua
à Ilôra-
tliile il'Érïlfiràv (Galwii, Ai* «icrf., vnl. t. p. 3oâ.) Ajoutons qu'en a|mm.mt
ci!tt.> opiniur», Spiviiccl s'appHW sur t'cniiiiplu *> Z.'t«i«.l» *»» liémpbitûi-ti <-l
•'itipim|iie;>'l cVsl un puiul
oit (•ert.iiiicineril it so Irnwpc. Voy. n-tlwswfc
p. rsSfî-'»
llvalliiuyrl.fMtu: itcr tamsdu-u .Uurlhttms>vmfimhajl. Stuttgart. Mrtïlw.
,M1,5.
m UVHË M.- – (îftAlMTRE I.
tuatfftj IWaiMI éM? Ou petit fave sceptique sun» ère méde-
cin, et médecin, inOiiieempirique, sans ùtie
sceptique.Ni liisto*
riquenieiit, nilogiquement, le scepticisme ne dérive de l'ernpi-
tisiuc et l'e(iij»irisrae ne dérive pas non plus tltr scepticisme'11.Les deux doctriues ont du se développer |MH'nttèteuic»t ce
n'estque su»' le tard qu'eues
se sont aperçues de leurs atliiiités,
et se sont unies. Nous montreronsMtbiHMjEie, [lourdes
raisons
de pure doctrine, le seeptieîsine dVEiiésùièmo doit être disiin-
gué de celui des médecins. Aussi, conclurions-nous volontiers
tju'Hikaclide lesceptique
«l'est ni lie Tnronte, «i if Erythrée..C'est un
persoitnayudont on »ie sail
quele iiot» à la Manière
de Sarpédon et elcZeu.iîp»e et tous nos i-lforls pour le tirer de
sou obscurité sont parfaitement vnins.
/Eitésidème succéda ù Hécaelide. Nous reviendrons phrs loirrstir <•<;philosophe, (e plus grand nom peul-etre de l'école seep-
lique.
Il eut pour successeur Zeitxi|>pe de Polis("J>,dont nous ne
savons rien, et qui fut lui-mêmeremplacé par Zeuxis. Diojjène*
nous apprend que ce philosophe avait ioiiihi /Knésidètne et com-
posé^iin livre: Hepï Strtwp )£yav. Ce titre donne îi peuser que,comme bien d'autres sceptiques, il exposait le
pouret le contre
sur divers sujets, de manière Il conclure il ïisostlimie, c'est-à-dire
h l'égale valeur des thèses contradictoires, et par suiteà Titupos-
stbilité de rien aflirnicr.
Au sujet de Zeuxis, une question sepose, analogue a celle
que ntms avons rencontrée ilpropos dïféraclide. On connaît
i"Haïti*, après;iï«i<'tttclaiv <|ucI» itodriire<ti'Sruiiilccitijio<'tlui<tii[in.isa pius
'l'iiilinitit svi-i: lu so-ptici^me (|ire la in.;iii'.iin' <iiifjirii|in', ujimlu que rufti! .illiiiité
ni':me n'a rien d'atisulu, i( (|n'un potil la fuii-l.iter s.iil.'iifiit par la conipinaiwiiil«s lli«ori»'s: cimjih si-iulilt- liien miiUiir dire ([lù-lli's se suiil (>r tuluilvs i.-<iléiwiil,
i'ii pleine itiilOpflnil.uio', i-l que le i'»p[irutlioiiiviit n<*p>'iit avoir lion i|ii'apr«'s coup.(/ I .((: xai ù$ tspôt gy) xptatv èxsxvyy o*j^ iv).v{ ^iïtïoc sk Toiîraii' x*i tvv
3T~ï]f/jt<?<&tt' y<~ûM sextc,syry3rore.p" (.'olii-t ikrit ZtiSiszoi ù o'/Aira; an lieu <!>« H»/ mu, lais.int ainsi île &'ii-
tippe n» conrftoii'ii if .'Ktlcsiilêliie. On fait nli?iiin;r ipie. |w«i' «pu; ciifli- l«iitii dît
f'-ftilmie, il fmitliiiil i|u'on pût In <• i tio'/mn ntoi.J;
l\. i..fi.
1:1~t:lHÆ SI.:tW'Hf)lat ~7
ii< {«lis tlnm im'ilnr-iuu l'un oiniiii'iiiMf Ur ni rmii-
««1*1*1*1*14 r»**t«§ uv^
ifi'Hs Zeims. toiis tlnitv uiéttceiiiK l'un emjttriqnfl nK et eom-
nM'iiUiliîtir trUij^XM'ialf' (Vest proljubieruenl le ntihiio qui est
a|»j»i'li4 Z«Hixis deTarenle)'* l'antre, Zeuxis de kamiteée, béro-
pfiileVn,et fondateur de la grande école de médecine
hérophi-
leVnne, établie à Litodk'dc àl'exemple
de lY'cole l'rasistratik'nnc
fondée à Snijrne jiarkémis ()1.
Haas'3' allirmc, et Zeller(f* est jjorté h croire(|uo le
sc(.'|)ti(|uon'est autre
(juu Zeuxis !\ui)jiiri(jue.Mais il
y u ici une
(lifticullû (jiii scmMe itisnrni«)>lahle. Galion (" cite Zcuvis paimi
ceux (lui ont les premiers coiumeiilé Hippocrale. D'autre part, lufait
(fueZi'uvis est ntë à
|»I(isieuis reprisesaïee Ildraclûiu de
Tarentc tloniw lieu dn croire (ju'il était à peu près dit mèmn
temps Dnrcmberjjts' croit même cjir'il lui était anldriour. Mais
ity
a mieux dans un texte que ni Haas, ni Zeller n'ont cite.
Zeuxis est ev|>ressément appelé par (Julien le plus ancien des
empiriques('• Ailleurs, il est dit
queles écrits de Zeuxis sont
devenus fort rares (10i, ce qui nes'expliquerait guère s'il avait
vécu a la lin du i" siècle après J.-C.
Galon., [h Ilipp. «/)/.<»•. VU, 70. vol. XVIII, a, 187.
In Iti/tf. epiit., I, vol. XVII, «, p. fJou, 711S. In Ilipp. <fc /un»., vu!. XVI,
p. ». Ibiit, t, ai vol..Wi. p. 196. In Ilipp. de mal. njf., 1. vol. XVIII b, p. li;ti
i') fiai., vol. XVII, «, p. 7«):J.;li Slral»., Gc,q;r., VII, p. 5So.
'»' Op. cil., p. 73.
Op. cil.. V, p. 'l, :l.
i:' In Ili/ip. de kum., I, n'i, vol. XVI, p. n|li Ù |ici> j<ip I'Àîvxi'i; nul tlpi-
x^e/jnc ù Tif3i'tft»(;ff xni Zevjis, «i wp-iTM -otrVri se toi! tniAsioS «Jvjjptfifjiri
^£i»ji?CT«f(»eiK«. ÛoiK^of Si à fiÇémat xii taëlrot èx t«i' »>ts>T^pi.T. Haas -citrec
trxk'; mais »'H sci|i|K)iiul uiOui.- (fuoli's mol*o» -opvt«< screoilt sutilumvitt à ûjijwsci'
(Ivrarlûlp et Zi-mis ans vtêtepot, lluliis il'Kphw <"1 Saliimis, l'onli'iiiporains di>
Trajnn, mi iw voit (tas liicn comini'iit d» pasia|;i' aiitiuiso Haa« à iliii- (lige teuxU a
Vi'CU j»st|Hi'vois l'an 1 00 npit'4 J.-C. ( l'Uni centeriuuuu post ('kri'lum mirniin vilain
«un protulil). j.
O/i. cil., ch. mi.
ly' luIlifip. pnvti., III, 5K, vol. XVI. [i. (i3(i i'ovÇof pèp il fiÇ;«ri« aVilp £v-
«Wein pli» «I rasipvfiEroî tis tta/.rf*s ;(3i^is, s'i'tîvOoi 5» iirmfivj' 'nztii rv
aaitnivi' èpnciQMû, tû ùt iiii'ia t» l^i;axfi4Ti>vs ^iÇà/k j typtÇi-ti iitojjn'fisii».
ZevSis ^é, e»v <?p»iJiï xi< tvvnv pimintviiam.
In Ilipp. epii.. V.viil. XVII. «. p. (iu.'i: XtianttfK» "iv 4 ftéXtv Jtéfav
inù 'Isi^ioe ei> tî> -a(iùrv t(ii|. e,V t« ap'jKitftivuf fi&)iav j-oimtfià-ncv «ai iV
*» i.ir-itE- irf. – t;KAiiiTitB'r. f.
feMin. Étûtiiiti Mpiuee Zttusis avant Zému, qui vécut vers
'«ÏO-ti'lO.
Pom1 toutes cesmisons r, nnus croyons qu'il faut, avee Im
historiens de la médet-inu, aâigttt'r à Zeuxis (%>tii|iii-i«|uoune
date brt antérieure 370-s'io d'après Daremlierf'; par consé-
quent, il h*» rie» de commun avec iîwuxis te scepliijue.If y aurait moins do difficulté* à identifier ce dernier avec
Zetivis du Laodieée, d'autant plus que, suivant la remarque de
ZeUer'-3-1.son successeur dans l'écolesceptique, Anttochus était
aussi de Laodteée. Zeller objecte que ce Zim.vis était unhérophi-
téen mais celait unWrophitteH, Pittlinti». t|tii avait fondé .«
t*ei»|Hrisiue, et nous avons vuihio [)t»ut-«tre les fiérophiléens et f
tesempiriques avaient fini par s'entendre sur Jieaufoup de i
points. Une autre diiJiculté, signalée encorepar Zeller, c'est qu'ài
cecompte Zeu.vis aurait e» deux sueeessours comme philo-
soplie, dans P«Volo sceptique, d'après Diogène, il aurait été
rciu|ilacé par Antiqclius; comme médecin, dans t'école liérophi-léennc, «l'après Slralron, Alexandre Philatètlie aurait [«ris sa
[ilaic. Peut-dtnj 'est-ce pas là encore une raison décisive. Zeller
1.11invoque uneautre, plus grave. Si Zonxis te sceptique et son é
successeur médecin. Alexandre Philalèfhe, ont élé contem|)o-rains <l<;Strabon, c'est-à-dire ont vécu vers io-jo
ap. J.-C, sou (
ii»quii%-mi' successeur, d'nprcs la liste debiogène, Sextus Empî-
e
haï iiuivoy fô<mif/ etvQt tsmsîv £v ioïs toioiItok itnaifi^ti toi* pmXopitms tAi>
Il
ia'tophv tîvtop jsâvm TOpàj j'xefiio to fig>.i«v, M.' isttU M xoû 'lefâ/Sat inu-
(tmipjTi (tn*£it mtotilt&iiïvx asatliei, Stà xavt' nîlwtw épi SiûQet» «vt* tiii»
TpxllVâRëi *,j
MfM~MfOf 4fOt>llyZ!l3Vbr· (I~1'ti,.
'•'•> Gtuuar. in ltii>pwr.. |i. «j. Kdif, FtaM. Ki[>sw-, i7K«. Â[ieii>oi> Ji «(«i
iviytypiÇitm rois vzpi tûv't.vA-v, £'% *« 7.nvwi. Cf. (iitl., vol. XVII, «,
p. lti(|, t'i-jS.
l/ai^uiiien! invnqiii'jnr Haasfo/ «/ p. -^i) |i»tir i-liibtir i[hp Zenxi.i tsl
|insli<rii>ur à l|i':rai:liili> «l'Erytlir>-< miit>m[)Oiiiiii <tc Strob»u sérail décisif, si le
feule <I(î riali«n (|u'i| invm|uu {lu /%j. rfut., VI, i, rot. XVII, «, p. 7<);{ 'Uihs
v Tstçwïirrt; xii iÉp-,Sp3ïo« iiptx'siijfi xii aptt rliêv Ktxyjii'K 1e mï
'1Tt.n»ms) ne se rapportait .i^l/ltiiu-Fit a» pnruiier lléiiitlid*' tl'Éiylltrô-, tli»i|ilR l;•lu t;lni;si'rm«>, <-l tii-aucuttp plus ancien (pie Slialmu. jVo». <i-<k^sus, p. -Ï.Ui.)
''' f^ cil., vul. V, p. '1, 11. ». Haas (p. -t'i, 11. ij (folinjjiifl .n^si Zifmi<|
•:cc(ilic|Mi-(ii- /.••u\isriwirupliiltvu.
7
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i!
~:1~~(~(~t:tGSCf~'Ff~tm :Ht
.4 t.. (é.r Il.. 1 il .t ..<
rk'tis, qui vécnl à k fi« «la s<?mhkJsiMt* «p. J.-C. «sf s«(i«a«
de lui |)iu*un intervalh- «le
pès•(<•«{eux cents ans. II est
jhjjios-
siblc d'admettre que charnu des |tliil(isuplii>s iiitoni»(î(liair(;s ait
<;iis<'i{;tt(' pendant [nés cfe(|uarai»((! ans, .sui'limt si ('un sonjjc
que deux dViiliv eux, Ménoiiiilo «! ThéodaK, wiit connu le même
matin».
Il st.'inbli' doue l'jjak'UK.'at iiiadiumstkte (juc Zt;uxis le scep-
tique s« confonde soit avec Zuuxrs el« Tareiite. soit avec Zeuxis
«le Laodicée, C'est sans tloiitc un- troisième personnage, et cetti?
fois encore, comme à propos d'Héi-uctido, nous rmum-querons«jiic s'il y >ien (les im'ilceins du nom de Zi'tixis, n> n'asl unit
raison ni fiotir qu'ils aient «'-téscf'pliinn's.
nipour <[«<_• Zeuxis
le
sceptique ait été médecin. Il y u eu aussi bien des Zuugis en
Grèce Pauly un compte jusqu'à six. [{énonçons donc à (tes rap-prochements que rien ne justifie suffisamment, et rendons
{jrftees à Dieuqu'il ne se sait pas trouvé dans Je cours des «ges
d'autres médecins portant le môme nom qu'un philosophe scep-
tique. Nous <i u rionsdû faire à leur sujet le même, jié'itibfetra-
vailque
nous uni coûté tléraclidc et Zcuxis.
Aiitiocbtis, de L.iodicéc sur le l.yens succéfb à Zuuxis.
Tout co(|»e
nous savims de fui, c'est que, comme Zeitsisel JEtiû-
sidèine1' il ne en» ail qu'aux [iliéuomènes.Aver tes sttceesst'urs d'Antioclnis w Ménodoff et 'IV'ûclas,
il; Slrali.. Ongr., XII. vhi. i«. p. :Vi.'»
liio. IX, ii>C.
;i' Oitlic les |)hiliKM|i!i(is «iiuprU iliins la liait- (le Didj^uc et i|ui sont scult<-
mi'nl t« chefs <fo r<!col«, if «t encon* lait mention il'inr ci'rlaiii iiuinkr<' «te sn'|i-
fi<|iies. \inii''iiiiis cil iioniUR' par tïioffi'îiu" (IV, mi) ;iuv Timon, .'Kiii;si(|i'ri;f i't
.Vniisiplianes. Slms if y a [ii'iil-ln' ii-i un<; «•«iifthion. (Voir ci-iK-ssus, p. %.)
\llmsviis ol Cliildiiii'lin soitl rilùs |iai- ArisludiK. ( V|>. Kik., Prn1)'. Ev. MV, ïl <r».)
l>i(i|jt:iii> (VII, :3.'t, 'Ml) |i,irl" aussi (l'uiif-'iissius, p\nlniliicii, i|iii mail ;nltv>sc
.1 Xétma <!<•ttumlm'uses «ïlii(ii'<. t"<-t fuiènblt'UKid lu in<?mt> <f»itt |mrlc (i.'ilû'ii
(Ihunbfig.einfinn, p. 'lO.Hoimel, Ilomt, !•-•!). qui |inistri>aillVirt|>l(iitliiraison-
iiHini'ii! ;tji(M-}«- |).is^l;;c ilu si'nilil.cl.li' ;m viutilal'h', H .n.nil >'crit lin fivn> •nlc-'r
.••iif •>; sttjft. \m fait «file tWius avait traité une (•lit) i|ii<Mi»H, «I r<i|>|msilimi <|"«
iîalien •l.ililit vativ lui t'i't'hûuilas, l;ni»<'iit à pi'iisui- qu'il n;ciil ù peu |nvsil.iiis, le
iminpi' (cin|i'c. i-t (ju'il fut 'Miilijiiijjoi-.iiii de .Uviiudiilc.
A|;ri|jji,i .si iiiissi, mi \v vi'it», un <-if|ilii|in' Imrs r.ulii'. Il fil .I i|i' iti<R)i-
M& UVRE Hf. (M tPITIÉB h
WHinwnce mie naitvetti! jjértoifo ènu l'histoire è» sdojrficismetious en [jarluroivs |>tns toi», H wrt
fwnps à pvési^nl tk» rftercher
ce cjue nous [lotivous savoir des doi'lriui's des (thilosoplics aœnous avons (tassés en revtre, et surfont du |ili«s illustre (rentre
eux, i'Knéstdcmo.
d'Apefles, ([ni avait «rit mi Rire intitulé Agripga, i'l dt- 'flrôtown. (Diog., IX,
7«, Cf. SiiiJiis, art. flvpprivswi. Cu itcruivi- piôfcniiait, itaiis s<» Summuim
wptiifiu^, que la (ihilusupbîe .sci'(iti(|iiu m- doit pa-uHre iiuiuihÛ! (i$ittliOttifRR»;carsi !«• mouvfin.'iil de la pensée dans un sens an dans l'imtw ne peut dire compris
[wr nom, iiuikii'->irt]iiiims»ii»p(Kti>îu{iini»i»<tet\frlioii,e([Ku*raus.(|iH>iit,uuus
ne pouvons nuus itwfaper pvrilioiiimis. D'iiillouiiî t'vtrlinn n'avait pas inventé !<
scepticisnu;. l'eut-ùtre vsl-ceTlKodusiu* i«h voulait cmiiptur lluuivtv. tes sept safjffit
t!t Kticipide yaniii lf& ancûlro* du .srcpficMti». (I)iii> fX, 71.} H <li«itt au»i
qu'on 11e duit app,.[(n- pyrrliuiiiens <[iie r«ix qui virent à la manière du l*yiilion.
D'aj)tvs Suidas, Tliiioito>iiis mirait composé phuieu» ouvcajjcs, entre autres im
commentai a> il» ivsiimé de TiHJodas, cl plusieurs, mires, sur à-s sujets de matin1-
iiiali<|«es H d'astn m>. M;m comnii' Siitifaj lui-unSmepaif«> d'un autre 'f Modo-
sius (pii avait ininp»^. nu livre sur h> print"iiipj, llaa» (n. j^)coni(lchir«avw ïriï-
spnitilamv qm> Tli.™dtKins tesci'pliipic est ci'lili de Tripolis, ol qu'if doit <!trv
«tistiiijjuédoTlKiidosiiisdeBitliynKMSIrolion, tieogr., XII, p. 506), le raathômrr-
tîrien.
Il faut en»»? coniplcr pamii fc>.« «rvpiiinn-s UhmjÂus d'éjjini», dont le hVro intj.
tolé àixntxx, a rlé (vsmii.' par l'Iiotitu ( .VjriUft. end., t85). tl y traitait dn-
tpianlL- <piesli.)ni du luûfc-eiue, et eli:i»[Hi» fois, ta inanii-m Ae* sceptique*, it oppo-sait les thèw* nmtrair>'«. l>ai-
fï.'injil.! it montrait d'abord que le désir ait Iwrre et <tc
maii'f.T .liait «ni si.v .faits k>cwp< tout eiili.'r; puis ii .(aliii-s.)il qu'il ne résidait
que dans IWiuii;k.
.GfltôSI-DÈMK. Ml1
it| Hiraef,1H8.I.
1 li
CHAPITRE Il.
KVBSIDKMR.
/KiiiîsuMiHeWi!8l avec Pyrrhon le plus illustre repréieutitrt
duscepticisme
dansl'antiquité. Entre
ces deux hommes, les dift'é-
ronces sont noinhrouscs. l'yivhoii, on l'a vu, est surtout m»
moraliste, cl dédaigne ladialectique. Nous ne savons presque
rien des idées d'/Knésidèoie sur fa morale; en revanche, nous
sommes sûrsqu'il
a été un dialecticien subtil et profond; c'est
luiqui
a donné aupyrrlioiiisme une forme1 philosophique et
scientifique-,te scepticisme lui doit ses arguments tes pttts forts
et les plus redoutables; il a mérité* d'être comparé à Hume et
a Knal.
Nous connaissons mal tes idées de Pyrrhon, mais nous avons
d'assez nombreux détails sur sa vie et son caractère. C'est Fin-
verse pour /fênésidèuie. Ses doctrines sont connues incomplète-
ment, mais d'une manière précise et très sure; nous ne savons
presque rien de sa vie, et rien de sa personne: sespensées
seules ont survécu. (I semble que ta malignité du sort ait [iris
plaisirà
multipliertes contradictions au sujet île ce personnage
qui voyait des contradictions partout,il est impossible de con-
citier tes renseignements qui nous sont parvenus sur la date de
sa vie. On tecompte
d'ordinaireparmi
les nouveauxsceptiques;
mais ity
a de fortes raisons de le ranger parmiles anciens. Des
Notreavon*«Misnltésur .Eiusiili-nie R.ivaisso.v,Ettni tur lu Mctaphijnque4'Aritlale, t. Il, p. a5ij Stisstr, h' tcepticinnii(Paris, DidiiT,a*ëttit., |8(!5);
AtiioiLl., Ttiû (Imk Sti'iJticx,friim /'jrr/iu (a Settm (bimioil, Muctllillnil, iHOcji;
fins, f)e jihihtuplwniM teppiicorum mcee»»iomlius (Uiivclwi'i;. Stubcr, >H^5);
N*Toni', l'oneh. zuf (letchichte des Rrketmlnistprnlilaia un Attcrthitm (Ilorliii,
188A); Dibls, Doxagr. Grteci, p. si», lierliii, Heimor, tXiç; H. Hintei., Vnter-
tttclumfieii ùlier l'inro'iSehriftett, m. Tl> [». M et *ttf,, teifiztfr, Hintef, iHS3.
*« LIVRE III. – CH^PÏTRK ïï.
léraoigiia^'s précis mm le représentent eonïme la seepliffue par
excellence. Mais d'autres, non moins certains, nous font voir
ea lui un (iopiatiste* partisan des théories d'Heraclite. Kssuyens»
sant nouspromettre d'y réussir, déluciderces
questions;it s'unit,
avantd'indiquer
ceque
nouspouvons
savoir de son œuvre, du
chercher ce que nous connaissons de sa vie et de ses écrits.
l. Aiésidème naquit à (înossem en Crète, oupeut-toc
iî
.é{' il enseigna a Alexandrie^, oit ne sait à quelle époque.
Dans une période tl« a to ans (de 80 av. J.-C. à 1 3o ap. J.-C.)
on ne peut lui assigner une place avec certitude. Quelques
Iristariens le font vivre vers t3oap. J.-C;
d'autres au commen-
cemenl de l'ère chrétienne; d'autres enfin voient en lui un con-
temporain deCicéron. Examinons les raisons qu'on peut doniwr
àl'appui
d<; chacune de ces opinions.
Miiecoll choisit la date (le 1 3oaprès J.-C. sans s'appuyer
sur d'autres textes (lue celui d'Aristocics dans Eusùbo'51, ou
.finésidème estreprésenté comme ayant vécu récemment, ix$s
mi mpvtiv. Mais, outre que cette théorie ne tientpas compte
des autres textes qu'on verra plus loin, elle a ta tort d'attacher
une importance excessive à l'expression dWristoclès. Si le mot
êxpès xat tspvnv peut dési/jner une période d'au moins soixand;-
dix ans, car Aristoclès vécut à la Bn du u* siècle de l'ère chré-
tienne, et peut-être au iii% pourquoi ne désignerait-il pas aussi
bien une période de centcinquante ans, ou môme une plus
langue? U faut remarquer d'ailleurs qu'Aristoclès oppose /Knési-
dètne à Pyrrhon, mort depuis longtemps et par rapportà ce
dernier, la tentative dVEniîsidèmo pour renouveler le scepticisme
pouvait lui paraître récente.
<•»DioB., IX, 11C.
t'> Pholius, .MjridWtio», cod. ai-.i.
m Arutoclè»,»|i. Kusiib.,PriBp.Ei'ang,, XIV, mu, «g..
!«> Op. du, p. fij.
•M /Vipp. Ecaitfr., XIV, mu, aj SfnJevàt SiuuflpdÇtvttK aiwv, ùs à ftvSi
tytvovso TO 'GnfI'ÍtrlJI1, éx0le xai ~ctptintv dv Á).~ç~I1Jpe¡' xai ttlpvdivv AffW-
tvpof in ivaicûimpetv ifpÇïio xùv ïQïoe mvxov.
/ENÉSIMMii. Mi
lii_ iti £\ Ail €MIk Cà\ià
il'
Suivant lUtlet"1, Saiffiiet*® at Xeït<î('w* c'est au Cflnjrattirce-
moiit (k I**V«elwfJjfciioft qu'auraitvécu Mnêàdhnm, Pour (ker
culte date, ils s'a|)|)iiiontsur te
passageoa l)iogène<41 donne la
liste des philosophes sceptiques, depuis Pyrrhon jusqu'àSatur-
riiinis. On a vu cMlessus(&t ijuo, danscolle longue période,
nous
pouvons fixftr deuxpciinls
derepère
la date de la mort de
Pyrrhon (37»uv, J.-C),
et celle île ia mort do Sextus Kmpi-
ricus (a 10ajt. ÎAl). Entre ces deux termes extrànes il doit y
avoir une lacune, etd'après Ménodoto, cette lacune doit ôlre
[ilactta après Timon. Dès tors, en remontant de Sextus ù ses pré-
dikessiuirs, et enprenant pour moyenne de renseignement de
chacun une durée de vingt-septans (cî, on e«deule qu'/Ënési-
dème a dû vivre ait début do l'ère chrétienne.
Il faut convenir quece mode de détermination mancluc de
précision et 0» ne peut s'en contenter que s'il est impossible
de trouver mieux. Ne saurait-on fixer la date d'^ndsidème h
l'aide d'autres renseignements que!e passage si embarrassant
de Diogene? Quelques historiens l'ont pensé.
On a vu plus haut m comment Haas a été amené à soutenir
qu'il ya une lacune dans ta liste des sceptiques après
Mnêsi-
(lèmc, et non avant lui. Suivant Haas, /Emîsidème serait le der-
nier des anciens sceptiques, et non le premier (les nouveaux il
aurait vécu vers 80-60 avant 1.4, Cette opinion, quiétait déjà
celle de Fabricius*8' et de M. Havaisson m, a été admise parf)iels"0) et Natorp!ll) elle repose
sur deux raisons principales.<« Histoiretle h pliibituphie ancimne, trml. "l'issol t. IV, p. m3. Ladranoe,
iS36.
")l* tcepticttmo,p. 9».
« Die Phihi. tler Griecfan.IWftcrTirai, tvtéte Aliflieif.!i' A«ll. l<«'«p!
i88t, |i. 8.<» IX. ni!.
Ml'ajjo ;><(.
< C'est te cliitl're iRitrijuv par Zcller.
('<t'ii||ca3o.
'•1 Ad Seit., I, aSi.
Ruai sur lit Wt'lii/z/i. d'Atûl., I. It, p. '>"
'•'•> ftoxographi Graei, |>. «it.
«~:llp. cft., jh aa.
*4 LIVRE Ht – CHAH'ÏKE 11
Mans i imaiyse de Punm1© d\Éui'sMtènu*, qui nous » dié c«i-
servtîepar Pliotius !| il est Jri que de son temps l'.U'iidémie
«.Hait devenue presque stoïcienne. Or, Seslus wparlant d'Anlio-
chus s'exprime à peu près dans les m^mcs termes, si (non qu'on
|ieul se demander si les doux écrivains n'avaient |ias sotts les
yeux ou tic se rappelaient pas le même texte d'un philosophe
[dus ancien, peuMtre tiVKnésiclôrnt» lui-tiwiny.
En outre, Photius nousapprend ilue le livre d'/Knésidème,
intitulé Uufâfotuu I6yot. était dédié u un lionmin illustre,
L. Ttibéron W. Si l'on songe que Cieéron fl)parle a
plusieurs re-
prises tic Tubéron comme d'un ami des lettres et de la philoso-
phie, distingué à la fois par les qualités de sonesprit et par
IVelul des dignités dont il a été revêtu, il est naturel de croire
(lue ce TuWron est précisément celui a(lui /Kmîsidèine a dédié
son livre.
La forée de <resraisons ne nous parait pas sérieusement affai-
blie par les objections de Zeller. La plus {{rave (te ces objections
ist qui; Cieûron non seulement rte parle pas d'/Ënésidème, tnais
encore, h maintesreprises, déclare que le
pyrrlioni.siiie est une
doctrine morte'1'. Comment croireque (aeéron, toujours si
bien informé et si curieux ait ignoré l'existence d'ui» philosophetel qn'/Enésidème? Comment admettre surtout (|u'il ait été indif-
férent à une doctrine si voisine de celle (le l'Académie, et qu'iln'ait rien su de la rupture (lui se faisait sous les auspices do son
ami Tubéron entre un académicien (Enésidème avait commencé
paF en être un) et le reste de l'école? 1
Xffriolt. rotf., ait 0/ Jè «ira rfit Axaltijthf, Çval, p4Xi<rt<t t#f vifv, xal
Xtvîkiïs <np$épotn<u eviene Savais, xii si y^A vihfièt ehciv, Stwixo) ?a/vonai
tCaxü~evar 2.'imixois.
" I. 5-15 À/)à xtù ù Kvxmr/ot ti)i" I'tow pttrtynyw eis ti)i> Axa ivpfav,
'if xuî tipvoOi) lu' (tivi, &it iv i\xi$npi<f ÇiMvuÇli ti ïtoiihi.
p* Plinl. c. YpàÇti Si toit iiyovf AivnaiSrtfioe ttpooÇwvinr aitoùt riï» i%
:~xad>tfetas rmi avvarpeov:rsg .\r,"xj~ TII~¡fII&I"" yévas ~3v i'~flti¥, .rúÇ!¡ .ri ~afmrp~èx ttfayovav x« aohuxài içfit ad fis iv/fiiotf («îriôiit*.
M Quiat. finit. Hp., t, «, 3, to. Cf. Prri Ugar., vu, st n, 9-
ir l'in., Il, <i, .'{5 -l'jrrho, Arkto, Ilcrilliis, jamdiu .ilijcrli.i lliùl.,mt. k'.li
V, vtfi. jH. /)b lirai., III, xïii. (Va. (>/ nj?ir.. I. », ti. TntmL, V, in, 85.
*;niîsim.uh. m&
TtMtefuk» il n'est pas impossible de lever la dilu'cullè". D'a-
bord, «m la vu plus haut, quand Cieéroi» jfarfo de Pyrrtow,
c'est toujours et uniqueinuiit In moraliste qu'il a en vue ta doe-
trinu qui n'a |>!us de représentants est celle derindiJF<îrcncc, et
non te scepticisme, toi quo t'entendait /Ënésidème, Kn outre,
Cieéroi) no connaissait guère, les doctrines philosophiques quepur l'intermédiaire de ses maîtres, les philosophes de la nou-
velle Académie. Oncomprend qu'ils aient mis pou d'emprosse-
ment hpropager une doctrino nouvelle, parliculièremunt diri-
gée contre eux. Il estpossible enfin (lue Cicéron ait entendu
parler do renseignement dMiaésidwne, mais trop peu pour le
bien connaître, ouqu'il n'ait pas daigné le discuter. C'est -du
moins ce que sembleindiquer
unpassage dés Acwlémiijueitil\ ait
Cieéron fait allusion, sans y attacher d'importance» il une doc-
trine qui paraît bien être leswpliwsHje radical d'iKuésidènie.
Zelfer, pour refuser de voir en /Enésidème un contemporainde Cicéron, est obligé de
supposer que te Tubérort àqui
ïnê-
sidème a dédié soit livre u été un neveu ou un descendant de
l'ami de Cicéron. Mois cettehypothèse
est peu vraisemblable. Il
résulte du texte de l'Iiolius que Tubéron n'était pas seulement
connu dans les lettres c'était un homme politique <->, utealte
désignation qui convient très bien à l'ami de Gicéron, ne paraît
.s'appliquer« aucun «titre
personnage dit môme nom.
fleste enfin le tcvle de IHiotius, flui présente avec colui de
Se.vtti.s de (elles' analojfies qu'on ne peut {jnère douter qu'il pro-vienne d'une mène .source. Zeller pense «[ii'Antioclius n'est pasle
seul académicien quiait pu mériter le reproche qu'/linésidème
adresse à rAcadéoiii1 Au son ti:uq>s. Mais un examen attentif du
texte de t'holius montre qu'il au s'agit pas d'Aiitiueliiis, ni d'au-
cunphilosophe
de non école. Nous y voyons en clletquu
les
académiciensdogmatisent
surbeaucoup de points, et ne ivsis-
teut ativ stoïciens quesur l;i
<pi<fstioii de la l'cprésenlutiuii cum-
II, i tllw. i|iii iinhim HÏ in>'i>iTit ilkuiil. itl .(elliii'iim iiiiimiiiis |t.il ;ul
imtlar ~i 1 f)ttît'<t à 1-sliet ie il al4yilus l'c!tltlvtlt:lItIF!·.
'0) Xtt 'Lt4fITfltTf ''P~~ 4i lie Tv~aat p'suo-YTl.
24fi UVRE (tf. GHAMÏlttë11.
pfdynswi)*11. Otr prêëtséraent sur ce point, Aatociuisu c|it«
deéma appelle genitmimiitut* ttotm, était d'accord avoc les
stoïciens (* nous en avons pour garant tout te second livre des
Académiques.Ce n'est certainement pas à Antiochusl5), c'est à
l'biloQ ou à un de ses successeurs «ju'/Ënésideme fait allusion
dans le texte do Photius, Nous savons en effet que Pliilou, après
certaines concessions faites au dogmatisme refusait de céder sur
la question du critérium. Au reste, tout le passage d'/Enésidèiue
montre bien Ilue les académiciens dont il parle se donnaient
pour des sceptiques, 'ce qui n'était pas le cas d'Antiochus. Kit
effet, il leur reproche d'aflirmer et de nier dogmatiquement eer-
taiaes choses, et en même temps de dire «pic tout est incom-
préhensible w. Il leur montre qu'il faut choisir, e'est-a-dînv
s'abstenir d'aUirnier et de nier, ou renoncer à dire que tout est
incompréhensible. Or, ce reproche est précisément le mémo ipjo
chez Giceron (5!, Aatiochus adresse ù Philon, et nous savons
t|tt' Antiochuscombattait ardemment la théorie des nouveaux
académiciens.
Enfin il n'y a pas lieu de supposer qti'.Enésiilùmo ait dirigé
ses critiques non contre J'Iiilon lui-môme, tnais contre ses suc-
cesseurs; car, sauf Eudore d'Alexandrie, et encore la chose est-
elle fort douteuse®>tPhilon ne laissa point de disciples. Il ne
semble donc plus douteux qu\Knésidènte ait été le contempo-
rain de Philon, d'Antiochus et de Cicéron, et qu'il ait enseigné
vers 80-70 avant J.-C. &.
(1> l'Iiol., E. c. -crépi voiXân èoypnifawi imy%u&m<HV ii «epi yotni Mt
R<Sf<S).1J,,1ulif,<;«""<1"
" /le, II, vt, 18.
(l> On peut admettre avoc Naturp (op. cit., p. 67, 3o3) que la première partie
du texte (tu&iala ti'is vvv) s'appii(|iie à Aiiliuclius ta sccomli! depuis jtvTspoc à
t'hilon.
111 Ilirzel (op. cit., p. u.'i.'i) a Ir.'s judicieusement corrigé le teste de l'iioliiis,et montré que dam m |i.iss.i|;ii Ta yip 4un nOcvii ti mt o/peii» àvafipÇoXui, &pix
t; ^-jvii xotvit &nip)(u» Hivthmlà il faut lire iieniïnîi.
« /fc.K, tiï, M.
(s;V<ij. ci-ilessiis, p. saa.
II "=! frai i|it<: la (iitinullé sigiialéu fuir Z.-lli r «ui»btu toujiiuis. c'est Irnp
/KNIÎSlUÈMli. %7
H. Les ouvrages attribué*» 5 /EnMdèïKe |Htr les divers au-
lours (font les témoignage» nous- ont été vomm-vés wnl m
nombre de cinq i' ÏM huit livres «lesfhi^mam MyotilUt
a" K«tà <ra$(«* (11i S" flapi Çim/agw pl; 4° Twaitfww* efe rà
nv|J{^M«Mew; 5* ï&VH%ué<rm|5).
C'est une questionde savoir si les deux derniers litres ddsi-
jjiient des ouvrages particuliers ou des parties dus otivra|;i's jiré-
ctkients. Riller'01 est \wMà emm «j«o l'ïiroTiîîrwris «*e«l fjue
le (mmiier Hvre do* YhippépetM Myota\ HaosW pense tjueeo
litre désigne Ponneinblc desHvppàvmt \tyot, qu'on |teul ronsi-
dt'Tor coiiiine un abrégé de lu docti'iuo ttce|tti([iiu. Suivant Saisscst""
et Zeller(l0ï au contraire, il estplus probable que
c'est un ou-
vrage particulieran- au témoignage d'Ai'istoclès, tes div trojics
élaienl développés dans cet ouvrage or, dans l'analyse que
l'holiiis nous a laissée des Ihppévtuoi Xéyot ii n'en est pas fait
mention. Quant aux £tQixetwrst$ et à un autre titre mentionné
parSextus £ll>,nous n'avons aucune donnée précise.
Des trois ouvrages ijui suulcc'rlaineinentd'/Ëné.sidètnc, il en
est deux dont mms.iie connaissons (jue tes titres; les huit livres
des Ihfâvvsioi Myoi sont les seuls sur lesquels nous ayons des
renseignements certains Wiotius nous eu a conservé t'analyse.
Le but de l'autour était du montrer que rien ne peut ôtre connu
|u-ii Ji'« sc|it iiuiiiHdo ta lislu«le Oiojjèiio|Mur ivtuptir l'iiilcivulli'cuire ('<•-
j»«|!io (i'.lim'-sùti'im? et rtifl» de Soilus. Nuits ue rayons aucun moyen il-' h
ré«m(liT.
W St'»l., ,W.,Vltt.ji.V t% tX,t«»6,ii(». l'holMB,anLt*t<t, appelle c«t
<iiivl'n|;<: \lv(/ji-j.'vlwl> Myoi.<
Di»J(.,IX, l«><».
"> IM.
«»Diuj; IX, 78. Arisluc. ap. Biisek, /'w/i. t'r., XIV, «m, 11.t.
c» Aristac.,ibid., i>>.Cl
Oi>.cil.<:>l'fiolitisdit queilans ce |>n!iiiiurlivre ioufela litiiuriestc'(ilinueciait piv-
si'iilri' M nnf mi xt%<tXvu3ôs.
(if. cit. |i. (Si).•" Of. eil. [i. 37."« «/>.<«.,p. 18. t.
M. X, »i(i wp«Jr» rro»jn)ii.
258 IWRÉ Hi. – CBAP1TKË tl.
avec certitude™, et epil faut s'interdire foule «flmwttion: fou*
vruge était dédié 6. Tubéron, partisan de l'Académie. Il
semblequ'après avoir fait partie de cette école» /Kn&idème ait
précisément dam cet ouvrage rompu avec ellepour se déclarer
en faveur du scepticisme.
Aussi son premier soin fut-il demarquer nettement m
(lui
sépare les académiciens et les pyrrlioutons. Les académiciens
sont dogmutistes tantôt ils affirment sans réserve, tantôt ils
nient sans hésiter. Au contraire» i! n'arrivejamais aux uyrriio-
«iens de direqu'une chose est ou n'est pas vraie ils n'aliirment
rien, pas mène qu'ils n'alfirnieulrien, et s'ils su servent de
cette formule, encoretrop affirmative à leur f;ré, c'est que le
langage les y force» Eu outre, les académicien* sont souvent
d'accord avec les stoïciens ce sont à vrai dire des stoïciens
en lutte avec des stoïciens. Ainsi ils font une distinction entre lu
sagesse et la folie, entre le bien et le mal, entre le vrai elle
faux entre lu probable et ce <jui ne l'est pas ils n'ont d'hési-
tationqu'au sujet de la <pavtwrl& xartthml ixr{. Hion de sem-
blable cIicï les pyrrhoniens. Enfin les pyrrlionîcns ont encoresur les académiciens cette supériorité qu'ils ne sont pas en con-
tradiction avec eux-mêmes; car «est se contredire de soutenir
qu'il ti'y a rien de certain, et eu mènetemps de faire un choix
entre le vrai et le faux le bien elle mal. Ayant ainsi opposé les
deux doctrines, .Emîsidènw achève son premier livre en don-
le résumé de tout le système (î> pyrrhonien.
<Wiot., op. cil. OiSèv piÇmuv E(V jutà^i, oitt Zi uioOiiww, dW oixe
(àtv 'hi voijacait.
Nous suimiios fort onilKiri-assé jmirr traituim le mol ij«i)i) tloul t« pyrrlto-iiiriis <w Mirvaii'iri, el due Sextus oppose » aCpeon (/ I, iO), Les |>yiTliuiiiensixT«««nl ilo «lire qu'ils «ont d'itm' «cfc-. (jn'ils ont un xijstéiue, ,111sens qù lus rfog-malUlM•iii[>luii:nlewsnuit» ils oui «.'(ilcmi'iil(li's iiianii'-rf!)de voir, lundis sur
r«'j|i,;ricnc<> cl la ciiiiIiiiiia (4xoïo-J)<nuet> yip tiw fiya ntxi. rà Çanràptmv (««•
Seixvvvti lîpfti %i Ïiîk «pot ri taaitpra èQn xi\ toit vufiovi k<h ià« àj'jiyis uni jà
mxiïn wi'h). Zi>IIcr iriiJuit lirâ lin>n (>• mut imi iitlciiianil par Huhutiiir {«p. rit.
p. sft, 4). \'mi< ni» Irmivniis ps ilVqiiivitk'iri «il fp«n;.ii* fore"! iniu< l'stdVm-
pUiyw k usai ttjttrmc, on in<ti<|iiiiul l«.nl«:f«i< ni >|i«-i sens (inrlictilier il faut l'r>i»-
(«mlr. (X -suc <•<>ptiint Wwf, \>. h.t.
"ANtSID&ttB. viW
Le second livre développe co qui est indiquédans la |weiiiior
il traite desprincipes (t), des causes, du mouvement de lu géné-
ration et lie lu destruction; Le troisième est consacré à let sen-
sation et à la pensée ul ; lequatrième démontre qu'il n'y a point
(le signes, puis indiqua les dilHcuités relatives à ta nature, ait
monde, àl'existence
des dieux. Le cinquième montre qu'il ne
peut y avoir de attises huit tropes, distincts des dix tropes dont
il. seraquestion plus loin, y sont exposés. Le sixième traite du
bien et du mal; le septième combat la théorie des vertus; le
huitième veut prouver queni le bonheur, ni la plaisir, ni la .va-
gosse no sont le souverain bien et qu'il n'y a aucune lin que
l'homme puissese
proposer.
En dehors de ces indications, nous trouvons (bits Sevtus plu-
sieurs pnssuges où /Knésidèitic est nommé, etqui reproduisent
entêtement, sinon les tonnes marnes dont il sVst servi, au moins
sa pensée. Il y » seulement quelque difficulté à décider àquel
point précis s'arrêtent les arguments empruntasà /tënésidème,
et à quel moment Sexlus recommence à parler pour son propre
compte.
Ces pnssayessont les suivants i° Math., IX, at8 (sur les
causes), jusqu'àla section :i(16 suivant Pabricius'11; jusqu'à
a;>S
suivant S{Hssetl*\ car les mots rotvw odSè x&ià StdSomv ont le
caractère d'une conclusion et d'une transition jusqu'à wjsui-
vant JîeHer'51, car les mots xa) "esdXtvel êc/îi tl nvos othtov indi-
quentle commencement «l'un nouvel argument. Il semble bien
qu'onne puisse
attribuer en toute sûreté il /Knésitlème quele
passage comprisentre 218 et 337.
a" Slalk, VIII, '10 (sur la vérilê) jusqu'à la section 55 sui-
tl iàul pnibaMciiMtit lire (170, B, '>) apx"11 !1" lieu ''e «^tfiHf- Voy. l'ap-
|ici)Iii'im, Die Tm/muiler (jnech. Skepl., |>. a'i; Ilertin, [885.
l>(f'ajtftculicirn(Uni.)mm«veacoev lietifi.'H«iitc-n!te (<-ik, et lit, au li«i de
me pi xivriaeiûi ki) aiaOtiaeust sept vovtacwi mï amHoeai,
wAil Srat. Kuipir., IX, »i8, 'J,
(>) Op. cil., |i. :iti. ,«liir|i(|i. iH:t)cs( ilu nièiM' auv les raisons i|u'il domu!
tic liens juraisM'iit pas ik-cistivs.
Op. cit., p. art, (i.
2S0 LIVRÉ Ht CHAPITRE ».
£* f » #* à- n 9 mi±^viiiit unimtï jusque Mseulement suivant Mler et Haas«*. y
raison donnée par Haas, que la régression à l'infiniinvoquée à
la tiit dul'arguaient uo saurait
appartenir à /En&stdèine, car
cette «laitière d'argumenter ne duto quo «l'Agrippa, n'est pasdécisive. Mais Sovlus'* combat
[opinion «te ceux i|ui regardentcomme vrai ce
qui obtient communément l'adhésion (ri «oX-
Xokvtéifku). Or, cette
opinion- a <fté justomon t sôuteuuo par,Enésidônie ». H
n'ya donc pas lieu d'attribuer à /Enésidôme
une contradiction sî foruieltc, surtout si on prend garde qu*éïi-dvuinieiit un
arjjuiiionl nouveau commence à la section 48.
3° Maà., VHI, 3-i5 (sur les signes), jusqu'à la section a64
suivant Sitïssel, jusqu'à a3& suivant 2eller«. il semble bien en
effet <|u« Sestus, sous prétesito de défendre .'Bne^idème, saisisse
l'occasion de faireétalage do ses connaissances en iogiout* sloï-
eietme.
On peut encorerapporter à /Enésidème le passage où Sextus
expose les dix tropes. On verra plus loin que le fond de cette
théorie est tl'/Enûstdènu}» «mis Sextusl'uvpuse librement'6', sans
prétendre donner une classificationméthodique et définitive*"1.
A quelle partie lies ttufâépuot Myot faut-il rapporter les
diverspassages cités ci-dessus?
Sextus i*1ne donne d'indication Formelleque sur le texte re-
ta0(1Cit., p. 'il.
« Naturp (p. (j.6) «eut ciimiireSaiswl |irolon(ji'f la cilalion (IVKuràiilvtm»
iimiu'ii S."». Il rai [wssilite. A la wrilâ, ijiie raqpimpuiafioii eoiilm te mfhtniv d«s
;i.-nil.TOifi.'iis«lit île ce [jtiitojuplie(cf. l'hutius). Mais iiouiii'avuiiaaucun druilde t'irflîntM'r.
<3>SI., VIII. H.
(>i En «wptout k- passage i-ïi-t&h, cjui scmlile Iii«i d'miu autrw sonnv. \'a-
lorp '$) P., 1, roi rmprrutt a £1It!JJidèmt! jll'1llu'all l'lr.1urap/¡e:th (p. 1 (1).j.« /> 1,30.
V V
w P., I ."18 Xf^efe « T# i«|ei rain ^noût.
m Si o» jwuvait croire ijui" Sexiin t-v|n«« liilùlciuviii i-l ibus li' ilélail les iir|;n-rn^nis et les n<TOpl« <t'/Eii.'siil;ine, lu <jn.slr..ii si dillirilu .1.; la .laie é- n- |ibi'|
sophiî soraiJ .Iot.Iw>. Il rite >•» <€tl (/». H.'i) IVu'iitpIc drr Tilk-re, voyait«lails li-s lilmlire*.
!'> .V., VIII, »i 5.
/8NÉS1DÈM& m
tutif aux signes est extrait du quatrième livre. eu qitr s'accorde
ntfec tas rensoignements de l'hotius.
Pour le texte rotatif aux causes, SoiBsetW, «'appuyantsur
un jiassagedu PhotîusW!, le rapporta
au ci»«|uit'ine Uvre;
Seller i3)croit qu'il faut plutôt le placerdans le tluuxidiiitf livre.
Pliotius dit en effet que dans ce livre il était questiondes causes,
de la génération et de la mort. Or» précisémentdans lo passage
dont il s'agit» Sextus dit qu'A'nésidème s'occupait des difficultés
relatives à la génération. Dans le cinquième livre, il était sur-
tout question,à propos des causes, des huit tropes que
nous
avons déjà mentionnés.
Enfin le texte sur la vérité doit «Hre manifestement rapparié
au premier Uvre, en raison du témoignage de Photû».
Le passage ou sont exposésles dix tropes doit ôtre vraisem-
blablement attribué, comme on l'a vu plus haut, à l'ouvrage
qu'/Enésidènteavait intitulé Titotûw&wtk.
Voilà les seules wdonnées positives quinous permettent
de
<• Op. cit., p. 33.
i» Corf., ai a.
<" Op. cit., p. 90, 6.">
indêpeiHbnuntmt do ces pasMgcs et de ceux, surfont reblifs à Hiiractile,
t|ii'un lioiivura cil& plus foin. if y en « piMiMIre beaucoup tfaiilivs, «taii* ft-s trois
ouvrages tbScxtus, où l'auteur »'iiis|>ire il'/KimiiiKuii. soil dans |'M(Huiiiim des
iloclriiios, soit dan» la aiHi|iw. Mai» it nous est impossilik- tin les ntoiiiiallte avec
stirelé. Iji discussion conlro les acnlémicicus (/ I, Mo-s3.rj) est probablcincul
•iiipnmtvu eu grande partie ,'t .Ivni-sidwiie, |iuisi|iio imus «nous par l'Iioliu» tjiiu eu
philosophe «mmu'iiçait son livre par lit critique de recote, qu'il venait <l« i|uiUer.
,'KmaîMlAine y est «l'aillcurs «xpnaavnient iioiraiié (aaa). Mais I» fait qu'il wl «iW
en iiiêiue temps qno Méiiottute, donne n [wusvv que Sœtlus a réuni Hmwle» iirjj»-
monls invix|m'» |iarl«f Sfeplicjiies aprfs Aùiésidôims qu'il ne sinsiiire d'ifciM»»-
d!-me, <Iu moins en cet endroit, qu'àtravers Ménotlote et nous sommes enclin à
croire que c'est de la même manière, e» lie prenant qui! ce qui «st devenu le
liieu commun dis» 8tellliqlle5, «{lieSextus suit /Kiiésidèïne, partant
où il no te
i-ite |>us.
CqietidantXatoqj, pour des raiwits -iouratK (.lus suliiaes i-t ingéiwiisw q««»>-
lidcs, c:ii)it pouvoir «Itrilmiir siVrement à .-Kncsidi-Hie nombre de passigc»,f«i«
surtout oit sont ejcposws tes uli'ws de Uêmm-iile et d'Kpirurf. ( II I H i >U.,VII
V87 i-l suitHUl f.n-t;l i35-i.'I<i; !Hi3-.H<»; Vllf, r>lî-li(i; 1 H3-1 1 3s!»-3»7 ¡
;!37-«7«; 34H-6.S: \.3uj-3ft5.) Lit rat»»» («iniipal»' invoqué.- j«ir NatMr|>«l
i(tw ht critique diri([«i par Soiltm eoHlve l>t;in<-liius de l^iroiiic (W., VIII, Silîf-
'M Ll\m HL – GHAWRE Il1 .1-
^trouver, dégagée autant <j«e jwssiMe &«s ttttwprâf triions et des
commentait-us la pensée d'JnésidiW C'est à l'aide de ces do-cuments que nous essaierons de reconstituer son argumen-tation.
3tiS) doit dire empruntée « /Knésideme. Pourquoi «iler, au lieu d'épieum, un deses plus obscurs disciples! Co clww iw se comprend guèro que si Démélrhu « été
déjà pris à partie par uncontemporain,
et e'eH ta que confirment tu Ion et lamacUë do. la
{wtwm.jiie. Z«||t.P avait «ê <léjà Trappa de ces taisons mais w »*<*l
pas C«ru«adcf mmm« le cwit Pillustre historien, c'est Jim-sidèrne, «l'aiirts Xa-
lorp, qui a été Fadvi-rsaire d« Deiiiétoiis.
"louic «Ile argumentation est loin dVlrt. sans valeur il faut, crujoiii-iioiis,Ktanhr à .Voturp ( p. -iO3 ) q«o c'i'sl iJiwitfûniei et mmCarnrâdo, i|ui"a été lad-«ewaire de Démctriiis. M»î* vu atinii'llanl (pre SmIiis ait wujininté itircclwiiontcelle criliqw à /Eiiésidëm. vt quVIto ne fut pas devornu* un lieu commun scejj-liqtta, riipiHé et modifia par tous les auteurs A'h^n/lyfoseï, iiuiik ne v«y««s pas«me cela autorise à faite venir «to la miam source tous les i-eiisci|rnoiiiouts fclalifs à
Epicnre et à Oénocrit^. Pat-mi tes raisons directe» invoqué» en fanur de cettedérivation, am-tiue ne imus a paru décisive.
Enfin N'atorp n'Itvsite pas à allriliucr « .Ki>i!sidèin« toute la discussion comprisnentn.' les sections 348 et 368. Ici, il excède lotit ri fait soit droit. La discussioncontre Wmùtritis se fermiiiK ««ideuutwnt à 357 x« fy* xitaltiu&refav chapeir.tl n'est plus question (faits lu suite, de DéimUrius, mais «le*dojpnalistes (3Go). f>i\<lors, il nous est impossible d'attaeW autant
d'importance quelo fait Wilarp an\
pa*ag.-» i|ni viennent après. Toute la théorie «ja'il «lilie sur ces traies nous spimIiIu
péclici- par la base. Ce n'est pas que noua inêcoii!iai«ious ni fc grand savoir ni lafurw <ie p#nwe d»«l Natorp fait preuve dans cette rwonslitiilion, qui remplit son
cliopilrn VI. Mai» en général it nous semble pn:tw à /Kiiésidème des formules Iropinodl'rnes, les raisons ipi'il invoi|iH> sonl trop subtil», tes textes m»disent pas footce qu'if leur fait dir». Au surplus, nous soiiihrs dVrunl avec Xalorjt sur nombrede poinls im|}orl.iiils pour des raisims dilTènnitcs, <-l par un autre chemin nousranimes arrivé à des conclusions analogues aux siennes, iiolainuieiil
lorsqu'il rap-proche
.Eiiésidème de Hume et Kaut.(Voy. ci-dessous, la
p. v. )
«ItfisfOÈMfcSOSSCEPTICISME 253
CHAPITREIlf.
KSÉSIDKJIE. SOS SCKPW.I8MK.
Dans la doctrine d'/Enésidènte, on peut distinguer deux
parties. D'abm'd lu philosophe résume i-l classe, sous te nom de
Impôt,les arguments que
lui avaient té|jiiés tes anciens scep- î
tiques par là. il démontre que les sens ne peuvent nous donner
aucune certitude. Puis il entreprend <k> prouver quelu raison
n** pas plus de succès, et sa démonstration porte sur trois point»
principaux la vérité, les causes, tessignes
oupreuves.
C'est
relto dernière partie <piiest son «-uvre originale et
personnelle
c'est le nouveau srcplicisme.
(. Plusieurs historienspensent <|U»
tes dixtropes,
connus
depuis longtemps, étaient le bien commun de l'école sronliqito'1'.
Mais Zelk'r{il soutient, avec raison selon nous, «jire si le fond
do ces arguments, plusieurs «les exemples qui y sont invoques,
et l'expression môme detropes'3'
n'ont rien de nouveau, c'est
/Knésidème <|tii Ce premier les mit en ordre, les énumérn avec
une certaine ntvuWr, leur donna, en un mot, la formequ'ils
ont gardée. Pour avoir été exposésdans les
ïlu^ûvstot lâyai,
ces arguments ne doivent pas plusêtre attribués ù Pyrrlion
qu'on ne fuit honneur à Socrate «le (miles les théories présentées
parPlaton sous son non». Et si Diogène rite tes dix
tropesdans
la vie de Pyrrhoit, c'est qu'il a l'habitude de dire, a proposdu
pftrc d'une doctrine, tout ce(lue
ses disciples ont pensé lavie
de Zenon renferme les idées de tous les stoïciens. C'est expws-
Saîssct, uf. cil., (i. 7H.
1 Op. en., (». »6. 5.
« Ml., N. A., XI, v, 5. Cf. JMfcr.l. IV. p. 846 (.VAiiIJag.-)-
m uHKiit--cMAmm in.-rac · r~u ·an. ai,sril aaicti est.
sèment &jBaésîtlèmo (pj'ÀHstaefês*l>, Stsstus»*, Ûîoffène51* attri-
buent les dix tropes nulli> paît ils ne sont attribués h aucun
nuire {tf: il n'en est pas question quand les uneii'usprient
do
l'exposition que tit Timon do la doctrine de Pyrrhon. Et m ces
Iropes avaient été connus, comment croireque Geéron n'en cftl
riendit&>? e
Par ce mot/tt^e* {rptoot, ou oitiployuit aussi les mots téiro»
et Mj,-oi){li>,tes sceptiques tlési^uaient les diverses monit-ros on
raisons par lesquelles on arrive à cette conclusion: qu'il faut sus-
|)fit(fiv son jugement, fis ineti(|uaiont comment se forme, en
générai, ln persuasion nous regardons comme çerlarnes les
choses fjui prutluisenl toujours sur nous des impressions ana-
logues, celles qui ne nous (rompent jamais ou ne noustrompent
que rarementcelles qui
sont habituelles ou établies par les lois,
celles (lui nousplaisent on que nous admirons (1>.Mais
précisé-ment
par les niâmes moyens onpeut justifier des crovances
contraires àcelles qui sont les nôtres: à
chaque allirmalion on
peut opposer tmc affirmation contraire, appuyée sur des raisons
équivalente», sans que rien permette de décider (lue Turc est
préférable à l'autre. H suit naturellement de fàqu'il
ne faut
rien affirmer. Ramener à leurs types lesplus généraux ces op-
positions d'opinion, c'est dresser enquelque
sorti; la liste des
catégories du (toute, ou plutôt* car il faut ici mi mot nouveau, 4
qui n'implique aucune allirimition, c'est énumérer les tropes ilil
y en a dix.
!l>Ap. Euseb.>TOp.eï.. XIV,wm,«t.S.
.«., Vil, .Via.
« IX, 78, 87.!li Le mot Tifeoi(Diog.,IX, 79) s'appliqui»plin iiiiturcltMixmtà .Euréitlt'mc
qu'il Pyrrhon. On pourrait aussi adopter la correction prnptHde jur Nielswlie (/fei-
Irâge :«r Quetlaïkwute itt Dwfr. Ijierl., Dasct, 18711. p. 1 j), (|iii lit Toutou* ii
toit ii*t ifôwivt mi Stoiôatos tiftimi» fo -apmot x.r.X.
!i) Zellcr relève (p. a5).tnns IVtpnsilirm il« F)io(;nic et <I« SmIim iiombrc (tVi-
prossiui»qui ne sauratPiit être.nildrieiircaà l'i-|iO((ueit'jf)ut'siil£ini>.
Sea P. 1 36. Cf.l'appenlieim DieTro/miikr Criait. Skept. p. 1:) Bcr-liii. iitS'i.
Di»g.,l\,78.
/ENÉSIDÊME. – «01» SORI'TlOfSMK. 205
Us sont 0X1)081%,uvot; une -extrôme nbnnduiu'iMlY'ximiples et
do commentaires, |mr Sevlus* et plus sobrement, mai» presque
dan» le» mêmes termes, par Uiogftn»*31: un jihbsuj'u'3' do c« «loi--
nier donne à penser qu'il avait sous lesyeux te texte mémo
«ivh'iiôsidôino; nousempruntons à eea deux auteurs tes éléments
du notre résumé <
Lu divenilê des uttimmtw. – 11 v a de nombreuses diffé-
rence» entre les animaux tous ne naissent pasde la même
manière, tous n'ont pas les mêmes organes. Or, on sait qu'unemodification de l'organe, comme la jaunisse chez l'homme, ou
t'action du su frotter les yeux modifie la perception, Quand donc
on voit des animaux (lui ont une tueur dans les yeux ou la pru-nelle allongée il faut admettre que leurs perceptions diffèrent des
nôtres. On doit en dire autant des autres sens te toucher n'est
pas le iikWpour qui
est revêtu d'tille coquille, ou de plumes.ou d'écaillés; le goût pur Ilui a la langue sèche ou humide.
L'observation atteste d'ailleurs cette diversité des perceptions
l'huile, qui est bonne aux hommes, tue tesguêpes et les abeilles,
Peau de mer est un poison pour l'homme s'il en tise trop long-
temps. cite est fort agréable auxpoissons.
Dès lors, d'un objet connu f»|«_rjes sens, nouspourrons
bien
dire comment il nousa^Htraît,
tuais non pas ce qu'il est car
dequel droit supposer que nosjiorceplions sont plus conformes
à la nature des choses que relies des animaux?
D'ailleurs, les animaux ne sont pas aussi inférieurs Al'homme
t~r t' t. 34 et aeq.
w IX,7«iei«î.'<»>IX, 78.
SuivantAristoclès(ap. Kusek, l'hep. tt., XIV,xvm.u). /Knosidt'ineii'niir,iilreconnu que neuf tropra. S'il fallait choisir entre le tiimoijpiajje isolé il'ArtstocIfa et
li»«témoignagesconcordantsde Si'ittw ot de l)io|jùni!,an dernier*devraientévi-
demment olilonir la prûfcronee. Il est pnilmlilft qu'une erri'nr a été rummijo mit
par Aristocfc'.i,soit par uu cupist» c'est aussi l'opinionde Zollm-et detlinet (III1 l'i), PnppMilichn(op. cil.) prend parti pour te tette d'Arisloclés mu rahousne
nousont paspont décisives.Nouspersistonshallritmerà ^néiidtfiuc la dixIropes,comme le fait Sextus, ,1/ VII, 'A'i'i mOinep éietÇtiwv ioi> mapi iji MvwtUw
Jéxa ypénout èmimef.
2M LTVttIUH. CIMPJTRK Ifl,
tja'il ptatl aux doginatistes de h dire; (es sceptiques prennent
plaisir à énumérer les ««Vîtes du chien. Non seulement il a des
senssupérieurs
aux nôtres, «mis il sntt choisir mqui
lui est
utile il a dus vertus qui règlent ses passions, il connaît l'art de
la chasse, il estcapable di>justice, môme il
n'est pas étranger à
fadialectique.
a" h's(lijfêremes
ente ta hommes. – Accordons cependant
tjue [es>lionmi«.'s sont smaHtie«i>saux animaux. H y a entre eux
<le telles différences (fu'ait sera encore dans l'impossibilité dedécider où est la vérité. Les corps diffèrent
par la figure et le
tempérament on a vu une femme d'Athènes boire trente drachines
«te t'Jj'wë sans en «îtr«* incommodée. Démophou, serviteur
d'Àtex&ndrc, avait froid au soleil ou dans un bain chaud h
l'ombre. Lesesprits
ne diffèrent pas moins les uns aiment la
vie active, les autres lerepos; tous les poètes ont signalé ces o|>-
positions. Entre tantd'apparences diverses, comment choisir?
S'enrapporter
implus grand nombre? Mais nous ne connaissons
pas tous les hommes, et ceque la majorité pense ici, elle ne le
pense pluslà-bas. H vaut mieux tm pas choisir et ne rien
ttflirmer.
3* Im (Urtrsiti des sens. Dira-t-onque, pour échapper à
cette difficulté, il faut s'enrapporter à un seul homme pris pur
jit{;e, le sajje idéal du stoïcien par exemple? Il sera tout aussi
embarrassé de se décider, trouvant entre les différents sens une
nouvelle diversité. Une peinture a du ndief pour les yeux et
n'en a pas pourle toucher. En parfum agréable à l'odorat blesse
Ingottt. L'eau de pluie, bonnepour les yeux, enroue et incom-
mode le poumon. Qui sait si lesqualités
des choses ne dépendent
pas uniquement de la diversité de nos organes? Une pomme dit
potil-ârc (jti'iine seule qualité; peut-être en a-l-ellcplus que
nous n'en connaissons nouspouvons les ignorer comme
l'aveugle ignore les couleurs. Donc, ici encore, nous ne voyons
que l'apparence non la réalité.
A" Les cirmmttmrex(ureptorifaets). – Sons ce nom l«*sc«p-
/ENÉsmiÏMK. SON t>(ilïl»TlClSMK. -m
'7
tique désigne les ItaJiitudf.s lesdispositions au en millions par-
ticulières (lui font varier lesperception!; tels son* t veille ou
te sommeil, les divers iîges de ta vie. lorepos te mouve-
ment, l'amour ou la haine. Le miel parait mner ù ceuxqui ont
la jauirisse. A censqui ont un épancheaient de sang, une étoile
parait couleur de sang, lundisque nous la jugeons toute diffé-
renie. Il n'y itpas
ilobjecter que ce sont des cas anormaux et
do maladie» car comment savoir si, eu pleine santé, nous ne
sommes pas dans des conditions capable» de modifier l'apparencedes choses? Ainsi encore l'amour nous fait voir la beauté là où
elle n'est pas. On luipas les mêmes idées étant ivre on
â jeun.Rutre toutes ces
apparences comment se décider? Toutes se
valent.
a" fats stluatiom, fe$ distance* et les lieux. Un vaisseau, vu
(le loin, (tarait petit et immobile; vu de près, il paraît grand et
en mouvement. Une tour carrée, vite de loin, parait ronde. Voilà
pourles distances.
Une rameparaît
brisée dans l'eau droite dehors. La lumière
d'une lampe parait obscure au Soleil, brillante dans les ténèbres.
Voilà pour tes Hem.
fine peinture a du relief si ou la regarde de loin i'IIi*paraît
unie si on la voit deprès. La |;orfje des colombes se nuance «le
millt! couleurs différentes suivant (|u'elles se tournent d'une façonou d'une antre. Voilà pour les positions.
Mais comment («nnaihre les choses, abstraction faite du Heu
qu'elles oecupimt de (a distance où nous sommes de la position
qu'elfes prennent ? Nous lie les connaissons donc pas.
ti L'x mélangea.– Un objet ne nous
apparaît jamais seul.
mais toujours uni ùquelque
autre chose à l'air, à la chaleur,
à la lumière, au froid, au mouvement. Dans ce mélange, com-
ment connaître l'objet en lui-ntdmc? La couleur de notre visage
[tarait autre, quandil fait chaud, et quand il fait froid. Notre
voit ini pas le même son dans un air subtil et dans un air
épais. La pourpre n'a pas la mé*me couleur au soleil et à la
~~t~ I.f\lRE III. t:IfW1'l'IUf HI,
ttt 1,
latnp«. t) -mini part,nous no connaissons les choses
«pu* mutt'iitfemwtli » de nos
organes, nouveauutélan<*e qui
altère in
pttiweptiott. A pourquoitout
parait et blanchâtre à «>n\
qui <mt la jaunisse. Nous iwpouvons pas plus séparer les choses
de ceijui
tes entoureque
nousn« distinguons l'lmtlu dans un
ongutml. Mais liepas
lesséparer,
c'est nepas les connaître en
elles-mtJmes.
7°Ix»
quantité*ou
compositions ' – Les elioseschangent
«l'aspect suivantqu'on
lesprend en plus, ou moins
grandes quan-tités. Considérez
à partIvs raclures de cornes de chèvre elles
j>araiss«nt blanches; regardez les eûmes(jtù
en sont forindes
elles sunt noires. Les |>nûns de sable, séjiaivs. paraissi'nt rabo-
teux; dans le monceau, ils paraissent mous. Lu vin fortifie si on
enprend
avec modération: il affaiblit si on en abuse.
H* La relation – Toute chose est relative à lu fois aux
autres choses ;tvoelesquelles
elle estperçue
et à celuiqui
la
perçoit,liiie chose n'est
pas à droiteou à
jjauctte par elle-nuhnc,
maispar rapport
à une autre. Lejour est rotatif au soleil. De
môme le haut est rotatif ait bas. le grand unpetit, le père
ait
Èils. Rien n'est connu en soi-même.
9" Lafritfuenw Wla rareté.– Une comète nous étonne
parce
qu'elle apparaît rm-ement le soleil nous effraierait si nous ne le
voyions pastous les On ne
s'inquiète plusdes tremble-
ments de terre une foisqu'on y
est habitué. Ce ne sont dom-
pas les caractères des choseselles-mènes qui
dérident de nos
jugements, mais leurfréquence
ou leur rareté nouvellepreuve
•pie nousn'atteignons que
desapparences.
io" hs roulâmes les lois, lesopinions
– II nes'agit plus
i<-i des sensations, mais des croyances mirâtes elles variant à
l'infini. LesKgyptiens embaument leurs morts, tes Bornai as les
Otvnpn «fit»lniili>Miv>ch'i DiojK'm1.
Dixii'Éiiefin-I>icpj;è»M.
il^iniiiiii'iiii1 i:Iii»zOiogi-n'
-KSltëSHrêSIE. SON SfiBPTieJSMK. *59
'"•
'.#I.r"«na:t ;1'1:. J" (J ql~;U~.
Iwûfenl, los PéotiïeiïK tes jettent. dans les marais. Les Perses
permettent aux. filsd'épousei- leurs mères; tes
Égyptiens, au*
frèresd'épouser leurs swiirs; ta loi grecque le défend. Que de
diffwiwes entre les diverses religions, entre lesopinions des
philosophes, entre les récits despoètes! On peut donc dire ce
«pie les hommes ont pensé sur tel ou tel point, ce qui leur a
paru vrai hou cequi est vrai.
Ces dixtropes, on le voit, se succèdent, sauf les
quatre nrerroiere. sans grand' ordre. Il n'y a pas lieu de s'en étonner ce
n'est pas méthodiquement ni « priori, maisempiriquement- et
en accumulant des observations, qu'ils ont été déterminés. On
aurait mauvaise grâce à exiger ici un ordre plus rigoureux quecelui
qu'on trouve, dans les catégories d'Aeislote. jetées. elles
aussi, les unesaprès les autres, sans aucun lien (lui les réu-
nisse'•
Toutefois,il est aisé, tle s'apercevoir que lessceptiques atta-
chaient une certaitteimportance à l'ordre de leurs
tropes. Nous
m avons lit preuve dans cetteexpression de Sexlus xpûpefa
Tjf «*;« ravxti &ermvs; et à diverses reprises il insiste*'1' sur
Tordre auquel il s'astreint. If prend même la peine tle simplifiersa liste et
remarque 'l que les dixtropes peuvent se ramener a
trois le premier porte sur celuiqui juge, le sujet ( it comprend
lesquatre pretniers lie la liste); le second porte sur l'objet (il
comprend leseptième et te
dixième); le troisième porte sur te
sujet et l'objet ^ce sont les cinquième, siviètw. huitième et
neuvième). Onpeut dire aussi, ajoute Sextus.
que torts tes
trolles se ramènent à un seul celui de la relation'5»; il est le
II n'y a pa's lira, (l'ailloitim, de duwlicr ira rapport plus dirait entre Ira lrepc<d'/Kn&iitnne (il les oilégarim <f Aristolu, canimu le- fait ftiuppnlu-iin.
"'P., 1,38.
<>' P.. I.iii.fil
ft.l.II wmlili. tft'en sViprinuint ainsi Soïtiii fasse allusion Ii la rl.wilicalio»
ailn|ilvi' |iar Uiof>i'm>-«fl ijui plao- au <l."riiif>«-raiig li> hiipe è* la relation. NW m-
rroymis pa', avec lliiwl, i|ni a il'aitlciii-s «rit sur ri«U> i|imslion des pi»j;cs ciwl-Icnlfs (op. tit., p. ii.Vi. <|ii.- S<-vlits n'ait jw« l'nimu imc aiiln- liste que fp||(.
2GU UVRE fil- CIIAmUB ffL
genre suprême, les trois précédents sont les genres, les dix mat
desespèces.
On conviendracependant (tue si les dix
tropes se ramènent
aux trois qu'on vient d'indiquer, une méthode rigoureuse exige-rait
qu'ils fussent disposés dans un ortirocorrespondant. Sextus
ne s'estpas conformé à ses
propres indications, probablement
parce qu'il reproduisait le texte môme dMCnésidème* et que le
besoin d'un ordreplus satisfaisant ne s'est fait sentir
que plustant. Mais aous avons la
preuve que lessceptiques ultérieurs
procédèrent autrement.
L'ordre adopté par Diogène, d'après uasceptique plus récent,
Saturntnus o» Théodosiuswi, est, à certainspartis, plus satis-
faisante Le dixième trope (la devientle
cinquième. : il s'agit, en effet, de divergences d'opinion tenantr
à la nature ou aux dispositions dusujet. Le
septième devient Te
lessixième, septième, huitième et neuvième tropes
(situations oudistances, mélangea, quantités ou compositions, fréquence
ou rareté) serapparient à
l'objet considéré en lui-même, abstrac-
tion faite de toutrapport soit entre le sujet et l'objet, soit entre
les divers objets. Le dixième enlii» (/« ivla(iou), le plus important«le tous, désigne les
rapports des objets entre eux.Remarquons
à cepropos que l'idée de la relativité est présentée chez Diogime
un peu autrementque
citez Sesctus. Cedernier entend par relativité
aussi bien lerapport de l'objet au sujet que le
rapport(les
objetsles uns aux autres. La première forme de la relativité (lui se
présente à la pensée est, en effet, la relation des choses à l'es-
prit. Un examen plus attentif ne lardepas à montrer
quela
relation (les choses entre elles n'est pas moins réelle, et celle
relation fournit au scepticisme un argument encore plus décisif:
aussi est-ce uniquement de cette dernière qu'il est question chez
IJiou;~nc
«i'iEnéùlèmiiFonlm màn<« qu'il indique ici prouve qu'il conçoit «no disposition
ptus méthodique.(> serait certainement TlinutoMiu. si un arfupbût la correriiou Je Kietisclic
indiquai; i-i-desii» p. tà'i.
/ENÉSIDÈHE. SON SCEPTICISME, 2tt!na~uarmsn~u. avri ~UUf- II-U.Qj'I-I4" 4Vi
On pourraitétablir une
comparaison analogue entre ces deux
listes et celle de Favoriniis"1. Mais il paraît inutile d'insister
davantage sur unpoint après tout peu important. Bornons-nous
à remarquer que tes dix tropes d'/J'lmisidèine, sauf le dernier
(encore s'agit-il desopinions communément admises, sans aucun
caractère scientifique), ont pour objet de montrer j'insuHisancevitmetêre ont 110111'objet de montre)' 44,~1-ligal"Clde la perception sensible. Il restait à faire un pas de plus et a
montrer que la science (.llc'-roé'me, malgré ses prétentions, n'est
pas plus heureuse. C'est ici que commence l'œuvre propreet
vraiment originale dVËnésidème.
If. C'est probablement sous l'influence de la nouvelle Aca-
démie, àlaquelle nous avons des raisons de eruire
qu'ilavait
d'abord appartenu et pour répondre aux ex%encus nouvelles de
la philosophie de son temps, qu'iKnésidôme fut amené à sou-
mettre à une critique subtile et profonde les idées essentielles de
la science. Après que des philosophes tels (tue Carnéade avaient
proclamé l'impossibilité de la science et mis oit lumière l'in-
suffisance (te la connaissance sensible, le scepticisme,s'il voulait
tenir son ran;; parmi les systèmes, ne pouvait plus se contenter
d'éimmérer desopinions ou des apparences contradictoires, et
secomplaire au jeu farile d'oppositions comme celles
que nous
trouvons dans les dixtropes. Il fallait pénétrer plus avant et
montrer non seulement que la science n'était pas faite, mais
qu'elle ne pouvait se faire. C'est ce qu'entreprît /Eiiésidème. Nous
ne connaissons qu'une partie de ses arguments ils donnent une
haute idée de son rouvre. Il n'estpas impossible, d'ailleurs, que
cequi nous a été conservé fut l'essentiel l'esprit subtil et ctair
de Se.\lus Kinpirieusétait bien capable de faire ce choix judicieux.
En tous cas, !es trois lambeaux de doctrine qui sont arrivés jus-
qu'à nous se rejoignent aisément et forment un tout bien lié.
Lesceptique
établissait d'abord i>n {fénéral qu'il n'y a point et
ne peut yavoir de vérité c'était contester la possibilité 1116110
l'onr FaniriuiH (Oi»j; IX, 87)1 h m'iivivuic H»\><\ de Diojji'iie esl le
Iiiiiliùuii'; lediiiùiuc de Diogi-tm ili'iKiit te iienvit'inu.
262 -tIVBB Ht -CHAWTKK m.!«"»» ia – ondriinb ut.
de la seitsncev Cemqui ëftrieat 41» seienee fa considèrent comme
la découverte des causes ou comme un ensemble de démonstra-
tions s'imposaut nécessairementà l'esprit. Il n'y a
point, il
nepeut y avoir de causes, répond làiésidême. Il
n'y a pasnon plus, il ne peut y avoir de relations nécessaires outre nos
idées,el,^»ar
suite, if n'y apoint de dCnnoiistralion. C'est, on
nu peut s empêcher du leremarquer, précisément buiéme suite
d'idées que Hume défendit pins tard. Mais nous devons d'abord
exposer sans commentaires la doctrine d'.t'nésidème sut- ces trois
points capitauxil
n'y apoint de vérité; il
n'ya
point de causes;
il n'y a point 1 démonstrations, ou. comme oit disait alors, FI
n'ya
point de signes.
t° Dk LA vbihtk. – Sexlus'Ji nous donne, mm le texte même.
ruais le sens de t'arjjunienlation iCEnésidème.
Si le vrai estquelque chose, il est sensible, ou intelligible,
ou l'un et l'autre à la fois, ou ni l'un ni l'autre. Or tout cela «>st
impossible.
Le vrai n'estpas sensible, car les choses sensibles sont géné-
riques, comme tes ressemblances communesà plusieurs indi-
vidus tels l'homme et le cheval, qu'on retrouve daus tous les
hommes et dans tous les chevaux; ouspécifiques, comme les J
qualités propres à tel ou tel, à Dion ou à TWon. Si donc le vraiv
est ehose sensible, il fautqu'il soit
génériqueou
spécifique or il
n'est nigénérique ni spécifique. D'ailleurs, ce
qui est visible
peut êtreperçu par la vue, ce
qui est sonore.par l'ouïe: de
même tout ce qui est sensible est perçu en général à f'aidtï d'un
.1/ Mil, io-i8àuviati Se x*i </ Mnfihaai. izopne rifamv.i:
Pourquoi? Le leslu ne li; dit pas. Suivant Fal.riciiH, le vrai, [wn.u p;tr 1^
«us, n'est pas un j;enri?, para; «ju»» les «ns nfl pm-çoii>»nt pas riinin-rMl il nVst
pas non plus uni» <|tialili: spiù-ilique parce <|w> !<« smt.4 m>pi'Koiïenl j.iniaiî cp quiJ
est propre « un ,.h-i!, mars <eu&>mi<ur lés i|uafik>9 anunium* à f««*. Il non» semble t
plus simple (J'int0rpr<;t<>r ainsi la pi-nsrô it',Kn«itiéRU> le vrai ii'mI jas un genrp.car ce n"psl pas iiih> propri*' qui tarattiri*' un« ilas».< .|'nr« à l'i>trl>i<iaii ,Uhautres loutc» \c< clioais swisiLI.'» pi-mont <>tr<!vraii'-s. El f n>>l pat non jiIik I.i
propricli; i|i> tel ntt d>| oltjel. putir la im!in(> raison.
£Mtell>ÉM&– &0S SCEPTICISME, 263fi.'VivSIBEMK. – sus scepticisme, 263
sens. Mais h mûin n'est pa» perçu en général à l'utde d'un sens,
car la sensation estpar elle-iHttoie dénuée de raison; or on lie
peut connaître le vrai sans raison. Lo vrai n'est ({une passen-
sible.
Il ti'est pas non plus intelligible, car aucune chose sensible
ne serait vraie, ce<|iii
est absurde. Eu outre, ou if sera intelli-
gible pourtous à la fois, ou il le sera pour quelques-uns soule-
moitt. Mais il estimpossible (|ti'il
soit connu du tous à la fois, et
il n'est pas connu «le quelques-uns en particulier, car c'est in-
viiiisemblable, et c'est justement <le quoi on dispute.Knliii le vrai n'est pas il la fois sensible et intolligible. €ar ou
bien on dira quo toute etiosu sensible et toute chose intelligiblesont vraies dit bien certaines choses sensibles seulement ou bien
certaines choses intelligibles. Or on ne petit dire (pie toute chose
sensible et toute chose intelligible soient vraies, car les choses
sensibles sont en contradiction avec les choses sensibles, les
choses 'intelligibles avec les choses intelligibles, et réciproque-
ment, les sensibles avec les intelligibles et les intelligibles avec
les sensibles. Et il faudra, si fout est vrai, qae la nième chose
soit et ne soit pus. soit vraie et fausse en mène temps. (I ne se
peut pas no» (dus i{ite <|ociques-unes des choses sensibles soient
vraies, ou({uelrpii!s-unes «les choses intelligibles, car c'est préci-
sément (lequoi
ondispute. D'iithVttrs, il est
logiquede dire que
toutes les choses sensibles sont ou vraies ou fausses. car. en tant
qu<>sensibles, elles sont toutes semblables l'une ne l'est pas
plus,l'autre inoins. Et il en est de même des choses intelligibles:
toutes sont également intelligibles. Mats il «>st absurde de dire
que toute chose sensible ou toute chose intelligible soit vraie.
Donc le vrai n'est pas.
a" DE la cAi"S-%r.iTiî. – ("est encore Sextusqui
nous
' II nous sctulilc vtirii-iil qu'il finit faire ili'i'/u&éi lit sujet d<' ji'i'piiftii('i.'i);à moins qu'a» lieu ili; ot»ra xni 10 ahUntî»' xtuvxt afaOnan j nupiîmt on ne tiw>
oûsu gai rb ai~n5és.' .V.. IX ftix-;ia;. «X l>i«| IX .7, g8. 91,.c f
26* LIVREML GHAPltBBf ILm c s 1 ii Ii 1 l..
donne le résumé de rargamentirtien d'/Eiiésidèra» contre tes
causes.
fi n'y a pas de causes, car uncorps ne peut être la cause i
d'un corps. En effet, ou bien cecorps n'est
pas engendré, commeç:l'atome d'Epicure, ou bien il est
engendré, comme on le croit
d'ordinaire*», et il tombe sous les sens, comme le for, ou if est
imperceptible, comme t'atome dans les deux cas, tt ne peutS
rien produire, car s'il produit quelque chose, c'est en demeurant
en lui-même ou en s'unissant à au autre. Mais, demeurant en
lui-même, if ne peut produire rien de plus que lui-même rien
qtti ne soit dans sapropre nature.- S'unissant à un autrtvi! m»
peut pas nonplus on
produire un troisièmeqtti. n'exisliU
pasauparavant; car il ne se peut pas quW devienne deux ou quedeux fassent trois. Si un pouvait devenir detiv, chacune desdeux unités ainsi
produites deviendrait deux « son tour, et it yen aurait
quatre-, puis, chacune desquatre unités se dédoublant
à nouveau, ily en aurait huit, et ainsi à l'infini or il est tout à
t'ait absurde de dire que de l'unité sorte une infinité de choses:et il n'est pas moins absurde de dire
que de l'unité naisse une
multiplicité.
Il est encore absurde de dire que de f union d'un certainnombre de choses il puisse en sortir un plus grand nombre. Carsi une unité,
s'ajoutent à «ne unité, enproduit une troisième,
cette dernière. s'ajotitanl aux deux premières, en produira utte
quatrième. celle-ci une cinquième, et ainsi à l'infini. Donc un
coq» uepeut être la cause d'un
corps.Par les mémtw raisons, l'incorporel ne
peut «Ire ta cause de
l'incorporel: car jamais de l'unité ne peut naître It pluralité, ond'une pluralité donnée une pluralité plus grande. En outre,
Au lieu de éOos. li?Kte iwiiifetcment alltré. onpourrai! lit*, avec (lirai
(p. i46), ivQptmos. H est possilil» quVn soutenant qu'il n'y apas .{<:causes, ,-Kné-
sidèm» s* soit lr,,<ivé iFmyon! «w Héractil.. .•onmw l.sii|>pn*. |nra«.| (*«/.). 1.Mais les raisons imo<jii,« à lappiii de o-Ho mnj«ctun> nous ^ml^nl I, «cii.Iwisnes. CVsl [oui aiilm e\l0.é ,te ,|iw, cnmme k (.,it i\c.T:leiill, f,:tl,m; A|llïHtrum., i.'i), ,[“,> [, ,,WIlè|,v “ lie cailW) p| (||V pr0(.|f1lll(, fOn,me |à. iji,
/tni:Hili-ni. rirapu>sil)ilil.f tii;«i<|iio .le iouli- fau?alil.
f
/KNÉSiDÉ&f E – SON SCEPTICISME, 265
110-i. Ii<
l'incorporelétant
inr;i|tnl)l(» de contact, nepeut ni agir ni
pattr'
!)<• mé"me que l'incorporel n'engendre pas l'incorporel un
corps nepeut produire l'incorporel, ni l'incorporel un corps
cw lecorps ne renferme pas en iui-mâme la nature de l'incor-
porel, ni l'incorporel celle (htcorps. Du
platanene nift pas un
cheval, parce que la imturo du cheval n'est pas contenue dans
ccilo du platane-, d'un cheval ne peut naître un homme, parce
(pie la nature de l'homme n'est pas eoiHenw flans celle du cheval
De inOme d'uncorps ne sortira jamais l'incorporel, parce que la
nature del'incorporel n'esl pas dans celle dti corps, et. inversé-
ment, de l'incorporel il ne sortirajamais un corps.
Bien plus, ftm des deux fftt-il dans l'iiutn* i! ne sera pas
engendré par l'autre, car, si chacun existe, il ne naîtpus
de
l'autre, mais possède déjà la réalité existant déjà, il nepeut
«W engendré, car la génération est un acheminement vers l'être.
Ainsi. le corps n'est pas la cause de i'ineorporel ni l'incorporeldu corps. f)"où il suit qu'il n'y a pas de cause.
^TSstte argumentation «l'/KnésKlî'tne sacomplétait par l'éntHiié-
ration, dans le V" livre des ïlufâw'ttot Uyov-K de huiltiopes
particulièrement destinés à réfuter ceux qui croient à l'existence
des causes Sextus nous en n conserve la liste en des termes assez
obscurs.
Cestropes
diffèrent d« ceuxqu'on
a énumérésprécédemment
non seulement par leur objet. mais par ta manière dont ils sont
présentés. H ne s'agit plus ici d'opposer les trucs aux autres des
opinions d'égale valeur et contradictoires, mais seulement d'in-
(Kijtier des manières de mal raisonner sur les causes le mot
trope est employé dans un sens nouveau. La liste d'.Knésidème
est à vrai dire une liste de sophismes.
Saiwil croit voir ici un«O|iliisnif. rttaisonnur ainsi ilitril. ••>>!
supposer
relie maji'iire une cause i«>(«'lit a/;ir r|iu- jiar
mnlm-l. dp, ifiijaemnli- ce(l«' ttta-
jeure ï l'ei«imw, i|ii« je sache, cw|iléIw maiûrialiisb'S.i tlais sans [jartpr tle*
sluiciciis, c«I!(t lli«"se mt a-lte d*Aiistuli« Cm. au».. H. i. 7S1. A Htvcivjip piV
in'ioficvov iàitnx(,y. (;f. Zollcr, t. III, |>f.ri(i.(:
t'Iiol., Mgr. (mI.. -it- Srtliis, ifcv.
Mù UVRK-Itr.-CtUWTftE I».
Voies ces hait tropes11': te Recourir aune catrsw qui n'«st pasévidente et
quin'est
jxisattestée
|>arune autre chose
qu'où
puisse appeler évidente s" Ayantà choisir «itre plusieurs bonnes
raisons également plausibles, s'urrâter arbitrairement a une
seults; 3° Les choses se passant suivunt un ordre régulier, in-
voquer des causesqui ne rendent
pas compte de cet ordre»;
4* Supposer queles choses qu'on lie voit pas se fassent comme
des choses qu'on voit, quoiqu'elles puissentaussi se faire au-
trement; 5* Rendre compte de toutes choses, ainsi que {'ont
fait la plupart desphilosophes
à l'aide des éléments qu'on a
imaginés ait lien de suivre les notions communes avouéespar
tout le monde: 6' .\e tenircompte, comme le font beaucoup de
philosophes, que des causes conformes à ses propres hypothèseset
passer sous silence celles qui y sont contraires, quoiqu ellesaussi probables; f Invoquer des causes
qui sont con-
traires non seulement auxapparences
mais même aux principes
qu'on aadoptés;
8" Pour expliquer des choses douteuses, se
servir (le causes également douteuses.
(I peut arriver entii», remarque J'inésiilème, que les philo-
sophes setrompent en
indiquant des causes de plusieurs autres
manièresqui
se rattachent il celles qu'on vient d'indiquer,
3° Des signes. – S'il est impossible de couitmlre directe-
ment les causes, etpar
ellesd'expliquer les effets, de descendre
Fabrk-iu'i (M Sexlam, P., I, t8u) les explique pat <I<m «xniipte» ingénieuse-ment choisi* r* Kv|ilii|m-r. romnifi ht
|i\tli.ij["riri..Mi9, ta tlûfimi-e île? planète:; parune proportion mmirafe: 3* Expliquer- 1«: itrliorituinent iiniiiieidti Sil parla funli- «tes
ncigi's, aluis ejtt'il p«i! j avilir iCaitiref l'aiHfs.niiiinii* ft'« pluies, (p voul.li" sufeil;
'•'•' Ki|)li([(wr li> moiiveniiitt ik'!i «ntris jiar imo piT--ioii niiitu^Ile i[«i ne r»'nit
.iiifimciiienl rmiipti; t!<; l'onlrt; <|ni y rcj'iies 4* Kxplti|it"r l.i vinion <lc ta même
iiKiiii.1*1 que l'a|iparition des iiiK^s diius une clianilire m)ire; 5* Kvplt'jrrcr le
in»nil>f par les .ilomes, cintime Epinnro, «11 par !>* li«iiM«iiK-ries, comme Aiiina-
fjorc, mi par la matière ci la forme. comni>i Arislole; ty Expliquer Ic^ eoiaHfa
comme Smloto, par r;is«i-mlilaj;e de* vapeurs «kiiiks ilii ta lernr, parce (|»e eettf
lllénri"' concorde utn: *p* idées sur ri'ihi-mhla de l"uniïiM>; f Admettre, comme
Kpieiin1, 1111climnien incampatilile ;i«« la nwm^iti» qui' cepcruliinl il firaclninc:H* Kfpliqii<!r ta inontw de la s«vi? jiar l'itlradinn. parcu mm IVpiifje alliiv t'piiu.
fait i|ui <'<! |iourl.inl contf-slé par i(ni'lqiie»iiii«.
.BNËSHJKUK. SUN SUKI'TICISMK. 267
des cnuses uux dlels, 110peut-un fcmoiMor dus effets aux causes,
saisir tas causes un delà des «ffets, c'eirt-à-dire les atteindre in-
directement? Les ellels, mi d'autres termes tesphénomène)*,
se-
raient afors «tes xifpies ou des prouves dont laprésence attesterait
la réalité des causes le raisonnement serait lemoyeu que nos-
sède notreesprit pour s'élever il l'explication des choses. Telle
était précisément la thèse des stoïciens, des épicuriens: Maê-
sidème essayaaussi de lit ruiner.
(' l J)Ulîï çilvfins tri-& f'Cette thèse, mous savons trèspstiaimmeni «{nVlinétidème
s'est appliqué à lu combatliv. «An quatrième; livre de son ou-
vrage, iiotiS'rfil lJttotiusil!, /Knésidènie déclarequ'il n'y a pas de
signesvisibles révélant les choses invisibles, et
ipieceux
qui
croient à leur existence sontdupes
d'itno vaine illusion, n
Ce fènoi{jna(;e est confirmé par «m passage plus explicite ûe
Sc.vtus1*1.Siles pliûnointiiuis. disait /Knésîdèmc, apparaissent de
la niému manière à tous cenv(jui sont semblableutent disposas,
et si d'autre part les signes sont des phénomènes il fautque
los signes (ipparatssont de la même manière à tous ceux qui sont
aembluhhmeid disposés, Or, les signes n'apparaissent pas de la
inéiui! manière à tous ceuxqui
sont seinblableniciit disposés.Les sifpujs lie sont donc pas «les phénomènes.
Sevtus se donne beaucoup depeine pour prouver que c'est là
un raisonnement correct, formé d'après les règles de ceque
les
stoïciens appelaient te second «iode d'argumentation indémon-
trable «ni au troisième. Sans entrer dans ces subtilités, accor-
donsque l'enchaînement de ces trois
propositions est rigoureux,et. voyons comment chacune est justifiée.
La première est fondée sur l'observation tous ceux qui ont
les ycu.v en bon é(at voient la couleur hiiiitrhe de la même ma-
nière il en est de même pour les autres sens. La seconde est
évidente. Pour la troisième, la médecine fournit des exemples
décisifs la rougeur chn/ cein qui ont I» fièvre, la moiteur de
la peau, l'extrême chaleur, la fréquence dupouls,
observéespar
.U~tf~ t~n. Il,
"' M..VIII. ai.").
26* UVRE Ht CHAPITRE lit
des médecins seiublobtement dispose* m malpas interprétées
par eu* de la même manièreHt'-rophite y voit une marque do
la bonnequalité
dusang; pur Krwristrato, c'est le
signedu
passage du sang des veines dans lesartères; puur Asclépiade,
c'est la preuve d'une tension [dus {grande descorpuscules intel-
ligibles tiaas les intervalles intelligibles u).
En empruntant cet argument à .Enésidèm©(et probablement
m ledéveloppant à sa manière, par des
exemples qu'il choisit
dans la médecine), Sextus le fait servir àprouver que lus signes
ne sontpas choses sensibles, connue le voulaient les
épicuriens.fi reste après cela à
prouver qu'ils ne sont pas non plus choses
intelligibles, commele croyaient les stoïciens Soxtusentreprend
en elFet cette tféruanstrutia.tr. Mais il ne paraît pas qtùtëuésidèinB
y ait songé il a dû se borner àétablir que
tes signes ne sontpas
choses visibles, revêtant des chose» invisibles-,Çotpepà
t2v d<fa-
vâv. comme dit Pbotitts. Sevtas nous avertit' Itii-ititîntequ'il
tnoditie unpeu l'argumentation do son maître, en prenant le
mot <p*tvi(t°im connuef équivalent
de ahOirtd.
Il serait inléinssant de savoir si .Enwidème avait déjà fait la
tlistinc(if>ii que lessceptiques adoptèrent plus tard enice les
signes comindinoratifs(ùxoium</lixi)s et les
signes imlicalifs
(ivSetiet uca). les uns révélant des choses visiblespar elles-mêmes
|la fumée, lefeu), les autres découvrant des choses
toujoursinvisibles (les mouvements, l'àine). Faire cette distinction, c'est
avoir le sens très net de la méthode d'observation dans son op-
position à la méthode ludique oudialectique. On
peut être tenté
de croirequ'un esprit tel qu'.Knésidème avait
déjà bien compriscette diiféreitce, d'autant plus que les huit
Iropes contre les
causes donnent àpenser,
nous l'avons vu,qu\ Knésidèine
avatl
un tourd'esprit scientifique, une tendance à
interpréter sans
idéespréconçues les données de
l'expérience. Cependant ces
tropcscux-mé'mes. à tout prendre, sont encore d'un dialecticien
plntôt que d'un observateur, et, cequi est plus grave, aucun texte
S«t.V.,VHI, :(:.>.
Iliul.. :ili 'l'uvoftin fiii> ùaixc Hiltïv i Afaneihiftoi i& liaOmî.
<KNÉSJDKME. SON StitëPïïClSMË. Wi
[Jtvcisno nous autotise à atti'ihuoi1 à /Eni'fsidènre ht (Iwtinctioit
(jUt! fait Suvlus !n. La seule distinction qu'ait fuite /lîro-sidèiiie ml
celle «les st|»nes_sgnsjb|çs et clos intelligibles or e'est par une
•'ireur manifeste que r'abririus l-J confond cette distinction avec
«•die de Sevtus; car les épicuriens, (lui n'admettent que des
iViilorp, «tans un curieux et hardi ttiupitie tl'> ses Fanvlmn^m <ler Gmliùltlt-
ifc* lù-hnntnisijirobhim. p. 197 et mif. (Berlin, JlorU, tHSft), soutient l'opinion
contraire ses arfjumi'iits no nous ont pas comaiiicu. Nous croyons avec N*<ilurp
que Soxlus emprunte a /K nésitli'iim ta plupart <l« ses argument» contre Il's aignot
maïs de ci! liiil iiuiis timns imo condusion euntruirv. H est vrai qw Scïtus confond
le signe <>niji'ni'Kil des «lutciimset le sijjuo imlii'alif. l.à-ik'sstis, Philipiisun (Ik l'A. tih.
p. 57) l'arctise <Ic s"i}lr.- omlmlit..Niilurp k défciicl, mais le dt'&nct iimf. Suivant
lui, SimIiis ( 11, 07-1 ;).!«( .1/ VIII, i'in-ii|K) ne pui'ti; que itu signe on jjém'
raf, cl te(BK«n;e/fK 101,011 ce sîjjik* esta|i|««liV hitnamw, csl iulcrpulé. M»te
sijp|iusey un.1 iiiUfijioIitliufi,>'<'sl se tirai* coniuiod<:uicn( d'ulKiire. f.a (lit*; de V.i-
torpest il'iiitfours oiivorteiiK'iit coiitrediti1 parle pacage /ll, to3: cVst bicif du
«;ju<' indicatif <|iic veut parler .Si'xftii. La solution est bien jitus siuipfc. C'est ijhb
|au(uu! 0/1 li.'s- slmàfi}* discitl i;;»»' («lis q«.i)i(kvi(/on/, Sp.ilus eulciitt signa indi-
catif, liiiiluisan! en son laii|;a;;<\ ijtii ôtait atis^i celui ilos slonii'iis île son l'jmj>s, ta
|ien«!e des ;i(KicMi>. tt ivst vrai que te !*i|{in> tint sloicii'iis ne rentre pas evactement
dans la délimitai! qu'il a «limitée «in sij;iie indicatif. Mais ce n'estqu'une
diiïérence
de tonne. Au fond, lesïltrn· etyï~lts
et .lr:rn.= iydirafiÇ sont id(,~litiqtl4~s t'un
et l'aulre supposenteulru le sijjue et ta chose sïjjniliA' un lien néo'^Miii). C'«t
poun|iiot le signe est ëiemhtt1iit''V mv Mlyovmt, es Çioevs ûaiyopwimùv tov
<miieii>rav(M., VIII, tiui). G- xijjueest le seul ([iiM'jiésirfi'-me ait connu, (fiioiipu*
vraiscmliliiiileimml il ne t'ait pas a|i|ielé truliculit'. Et c'est puurquui l>iu;;enc (IX,
<j<i) <fi( sinqilonii'iil Snatîov ovx f/ra.
Il n'y a |>;is;i contester >l"ailleui.< que la ilislincliiiii enlre ta science i-l l'opinion
fonili'i' sur la seule l'ïpurii'iiivsuit aulvrienru à Kiiêsiilèine cVsl iv «|iw [itou\i> un
k'Vl<- de Platon (/(' Vil, ."11fi, ij qui nous avilit iiuiis-mùiiie vivi'uu'iit frappé
.naut ijue I.aas et surtout Natoru «mi cuisent tiré. d'iinpoilanti'* ciihsi'h(iii')ii:ms. <j>r-
bîneiiieiit l'Ialon, et prolintifemeut les sophistes, nul loann une ircyjos rpi&i
(/idî(/i'. ;ïtïf*t ÏC) furè vytsiitc île t'ïW'MovWst rîii» ant^ifKwt* (Sevt*, it "J3jj. J.
Miits csl-ci' unir raison pour ulErihui'F, t-n l'uliseuce il'un f<-iuui];iiajr,j> jn itîh, à ,V.w-
siili'nii' iiiti' llii'iiiii! savante >!• l'expérionce Nous ue truuvuns aucune trace de I»
distinction platonicienne rhet les acailéuriciet». tin pins, autre chose est itistit)|;iKr
la science et ta routine, anln- choy-u faire la théorie de celle routine, la -ulistiliUT
de propoi délilH:re à la science, en formule!' les règles. Il ne parait |jas que h-s
stqiliisli'- aient <léjia<>$c le premier <le <<>sdeuv [loiuls de vue.
\«us rruyiin» aii'C [Valoip i|n'if j y dans f« sci'p(i<'i.wne uw parl(>' ixuiliio nain
nous ne la voyons que cliez Sovln' onlti:inoi>l chez, .f'jiésidèint-, Kt si i-lli>a (>té dira
.'Knfeiifeine ( ce qui n'est miHciur-nl impossible), nous n'avons dans les ilofitinenls
dont nous disposons, aucune raison certaine «te i'altiriuer.
Ad Sexl.. f' H, 100,
•m unx\i Ht cH.wrBK in.
signes sensibles, croient attv signes indicatifs, l'.lwse Meisivo i
Smtus. liait* fa critique qu'il l'ait (le ta lliéwie (tes signes indi-
catifs kl\ «t i»« il suitpiesque
certainement Krtésidème, stnubtt"
oublier parfois sa propre distinction it cite t'animeexemple
de
signes indicatifs t celte femmea du tait, elle « conçu. Or, c'est là
évidemment un signe coniinérnof'atif. Dès lors, il est certain*
qu'au temps de l'écrivain dont s'inspire SesUis (et c'est iKnési-
clèine ) tes signes île cet ordre «tttwnt l'onsidért5» comiiie imite»-
tifs, ouplutôt simplement comme des signes. Lit définition du
<»ignon'i'tait pas tirée, couiim1 <;lle le fut plus tard. du caractère n
de l'objet signifié- (perceptibleou non), tnais du
lien quiunit. le iî
signe à la chose sigitiliéi' entro le lait dans les mantolles et le ?
t'ait d'avuir couçu il y a un ruppoti iH'cessairi! (àxo/.whtx. ouvép-
rncrti). En d'autres termes. la distinction des signes indicatifs l
et commémoratife n'est|»as (iww faite; elle
appartientà un<>
éfoli1 postérieure
lll. En morale. l'enseignement d'/Enésideme ne parait pas
avoir différé de celui de Pyrriiuit et de Timon. A deuxreprises m,
.KtK'.sidùme est uoninié avec Timon comme ayant dit que l'ata-
raxie est le seul bien que nous puissions atteindre, et qu'elle
résulte de l'hto^n. Nous voyons par le résumé de Photius qu'.fë-
nésidùme blàinail les acadéiniciens d'avoir donné une définition
du bien et du mal. Dans tes trois derniers livres de son ouvrage
il combattait la théorie morale des stoïciens sur les biens et les
maux, et leur distinction entre les ispottyptivoi et lesàwovpo-
tiytifim; il réfutait leur théorie de In vertu, soutenait missique
le bien suprême n'est ni le bonheur, ni le plaisir, ni la sagesse,
et finalementque
le bien tant célébrépar
tous lesphilosophes
n'existe en aucune manière1.
Vny. CMkssoiis. I. IV, ih. II.
Siée Philippsonfp. 6fi) nousPallribucrionsà IV«rolei<mpirir|iic,<*tplus particulièrement à Nft-iioilotc. ( Voy. t. IV, eh. I.)
J'Diojf., iX. 107. Vristw*. ap. Kiisek, op..•!> XIV. mil, tir.
ir C'itl.t jia: O p' ziti Tsiai xii w' Ktn* t«v tz^au? sy/atsT^i, prfrs uti* eïëat-
fioriai', [iitre tiii> tUopiii», (tnt« mt 2f.«iii<jiv, puît* iiiu ti sitôt énr/wpvv tirai.
.-K.NÉSIDÈMK. – SON SUKPÏICISMK. 271
Si ï'tm tram- Uix' sort»! «le cûHtt'udieliou entre eelii} ufyn.
lion abstiltii* et Piiifiriuntitt» suivant {«quelle Fatumie est te
bkii que peut seul assurer lescepticisme, celle difficulté est la
iiiétiM'-que nous- avons cl«5j rencontrée àpropos
del'yrrhon nf
de Timon. Klie doit être résolue de la même manière. Ce n'est
[•us dogmatiquement, utt pour des raisons llicoriquos qu'/Kni'1-sittètue reeeiniuatidc l'utaraxie, c'est à itit point de vue purement
pratiqua,et en s'intordisaut toute allirmufiun sur tes
pnnti[jiNou {'essence des eftoses.
Il y a pourtant encore une (iiificttllé. Un passage d'Aristoclès fli,
distii)j;uaiit /Knésidèiuc et Timon, déclare ijt»c faconséquence
du doute, dopii'-s ;Knésidènie. est non seulement {'nturaxto,
mais f« plaisir. S'il n'y « pas ici unn simple erreur, il faut en-
tendre lo mot tiSovif dans mt sens très large, celui par 'veniple
que lui donnait l'Jpirure, qtii Itit aussi comptait l'alnraxiepour
un plaisir iJl. (l'est aussi dans le môme sens <jtte Pyrrliou partait
du bonheur (fii' (iê}^.wt<t evSatttovtfaetv) comme but de la vïo(3i.
Eh tout cas. cepassage isolé ne saurait prévaloir contre fo ré-
sunté si iwAque nous a conservé l'Iioiitis..iînésidèrne ii'allimiait
rien en morale. S'il lui est arrivé de dogmatiser, et s'il y a
quelque contradiction dans son œuvre, ce n'est pas làqu'il
fatilla cuerrj)er.
«itej» ai» Tit T4Îi>x«rà ÇûnitoÇfctf aiftiatuv So^icaev, iXX' iiù.vs o»'x rfim tWo«
xà lErsffd' vtiv&jftçvov.
O/i. ol.: Toi, ficv-soi Smxttpivott oîtw atpiéotaQw Tiptuf <fa«i vipôtov jiii»
iÇaoiav, Hun 3i àtapijiïi/, Mmml&npoi ii vSt>v\\v.
«Diojf., X, i3fi ft pè» yip infant x« ir.ovii x«j«î»paT(xi/ riW
tidovaf.
•' tt est pottililu i|ii'il y »it lu, continu le suppose itjj;ninusfm.>n( Hiracl
(p. ioç(), ta (race d'une Iiiilirlivo pour «inrilipr lecyrenaisinv et te pyrrhonisme.
Mais nuuïtavons trop pou «le raisonsdocroira à fi<*sEptidanct1»(*(tectif}iie-ichoz
/Kiu^idèinc jiotir (|u'on puisse allriliifi- une j;i-;tnil<- valt'iit' e rotlo roiiji'ctnri'. Na-
lopp (p. :too) ivcuse sitnptenn'nl le lenk' d'Aristoclè^.
•in *2 UVRE Ut. -CHAPITRE IV.
CHAPITRE IV."
.VAÉSIDKME. SES 1UW0UTS AVEC LHÉMCMTÉISM1Ï.
Il tant maintenant tourner la médaille. Nous venons de voir
un .finésidènie ennemi déclaré de tout dogmatisme, '«;l scep- j
tique à soulraitvoiei -un Enésidème ouvertement
dogmatique. s
el lesrenseignements qui
nous le montrent sous ce nouvel
aspectsont
prisaux mêmes sources, oui une
«gale antwiUî.
tënésidème se rallie à l'école d'Heraclite il a mie opinion
sur {'essence «les chose*, et surbeaucoup
de (juestïons fort dô-
battut's. Comment expliquer cette inéfamarpliose? C'est le pro-
blème l« plus eiifbarrassiint «me [irésente l'Iiisloire dVEniSsidème.
Les hiskirieiis. t'urt en peine, ontiin«{»in« plusieurs
solution»;
aurune n'est pleinement satisfaisante. L'histoire de fapensf''e
d' Knésidème est comme son système, ijui oppose tes contraires,
et leur inconiputibilitéest (elle, que peut-être te mieux serait s
(ra|i[)li<|iier lu maxime sceptique, et de retenir son jugement.
I. Klalilissons d'abord les preuves de son adhésion à l'béia-
clitiiisrae.
A plusieurs reprises Sevlus, indiquantdes opinions com-
munes ù'Hénielitc* età :Knésidèinc. emploie l'expression A/wj-
niSrtfioi X(nà ilpéhùstiw'1'.
Avec plus de précision encore if dit qu' Knésidème rJ consi-
dérait lescepticisme comme un acheminement vers la doctrine
"• .W.,V1I, .l'iy; IX. :i:ir, X, -ni;, ..y.t.
t. •! 0 Êt?I Si ftr t3Spt t'tv MwJt&npfiv êÀsyw ôêini ùvat tùi» oxtnUtxiiv
iywym Mi ii>v ftpïx/tittioi» Çiio<ro?«ii,lieu
opwjiÎTiiroi rivini* -atpi t«
3'Jre ivàp%£tv To TivxifTis -issfii tv vhà §ixvztfitii xii oi ftèv exenttxoi Çiinsctiit
/.syov'rt 7% Hrtvtvt tizpt Te avrw oi hï HpsxÀfi'refoi affô toîîtov x*i ira t» vitâp%etv
aùri it$upyj>vTit.
/KNÉSIDÉMK. HtèKACMTlïlSME. -m
tfttdraciite, et qu*«i> habituantPesprttà
mivque
les contraires
apparaissent ensemble dans les phénomènes, if hpriipam
à
comprendre qu'ilssont tiitt* dans la rculïté.
Non seulement on nous dit qu1, Enésiderne se rattachait à
Heraclite, mais on iiuusindique nettement sur quels points cet
accord s'était établi,
tënésidème croyait'" c|«e YMvo est fuir.
tl soutenait «[tio cejuviiiiet* |irîm*i|ie. l'air, ne dilli'iv ps du
(einjis, ou (fii nombre. Voici h passage fort obscur do Sextus
ou ct'llesiuguliùrc nsscitto» se trouve formulée • ~Knésidnrne
a dît. d'après Héraciih1, que letemps est utt i-tii'fis; car il né
tliffève (mis (h l'ètiv» Mt du corjw j/idrtwr. }J«ns sa («•eHiière
introduction rniHcnant à stv tesanpt'tintiiius siniptes des
«;liosf;s sl;, (|tii sont Je» parties (fa discours, il place les motsItuips
et unité tliius la catégorie de l'essence, <|«i estcorporelle. Los
jjraiuleurs de temps et les principaux nombres se fortui'fit par
rnultiplicalioii car ce qu'on appelle nmititeimut et<pii inarque le
temps, et (fe même l'unité, ne sont autre chose que l'essence.
Le jour, le mois, l'année sont (les multiples dit maintenant,
c'est-à-dire dutemps. Deux, div, cent, sont des multiples «le
l'unité. Cesphilosophes font tlone du
temps un corps.
Kntkiâèmc affirmait encore que ceprincipe, en recevant les
contraires, donnait naissance if foutes choses. En d'autres
termes, malgréla diversité des
apparences,c'est la mente
essence qu'on retrouve au fond de foute cliosc. et grâce à cette
communauté d'essence, on pont dire que te toutestttlenticme à
chaque partie, et chaque partie identique su tout'5'. La partie
•' il/ X. afti Tri re Av xni tir (ipix'/tnw îiip înlt», et Ziiitv n Sivuai-
~ttt<M.
X. ait).1
IIpi'ïH «Vsji'jn. Sur Miniii»»u voir d-dwiits, |>. i't-t.
(ioinini' te luit n'muri|!i''r llilter {' |>.a.sît), il y a là un $<<» <l<' loiuli'i la ilor-Irine tl'l l'itïiclito [ttts systi>itiali(jiii"iiii'iil par la
?<inifnn>i*on ib>.<furnii'S ilf IVlrc
avii: t. fniiiii-s <fu l,ni|i| Xtiiirellu |iri.im' <|it l'nr.-iJùmo prônait tnrt »u MTieu\
-ou adliésï»!) ù la ilortriiiR il'ili'rnctilc.
SVil.. J/fV.:«7.
274 LIVRE III. CHAPITRE IV.
est autre choseque
te tout, et elle est la même eltose. C«i' l'es-
sence est à la fois le tout et lit partie elle est le tout si on eon*
sidère te monde, ta partie, si on s'attache à la nature lie tel ou
tel animal. La particule (ftipiw) à son tour s'entend en deux
sens tantôt elle diftere de cequ'on appelle proprement
la
partie (p/pc;), comme quand on dit qu'elle est une partiede
ta partie ainsi le doigt est une partie de fi main. i'onutl» est
une partie de la tôle; tantôt elle »Vn diffère pas, mais eite
est une partie du tout ainsi on dit souventque
le tout est formé
de particules.
H a aussi une théorie sur le mouvement. Tandis qu'Aiistole
distinguait six espèces de mouvements, /Enésidème les ramène
toutes à deux; *Les partisans d'Enésidème, dit Se.vtus'1*, ne
laissent subsister que deux sortes do mouvement, te mouve-
ment de transformation (fierot&tiToerf), et le mouvement local
(pna&mW) ''• kepremier
est celui par lequel un corps, en
gardant la mé"me essence, revêt diverses qualités, perdantl'une
et gagnant l'autre c'est ceque
l'on voit dans le changement du
vin en vinaigre, de l'amertume dit raisin en douceur, du camé- i
léon. qui prend tour à tour diverses couleurs, et du polype. i
Ainsi ta génération et ia corruption, l'augmentation et ta ilinii- >
nution doivent êtreappelées des transformations particulières,
i
que l'on comprend sous le nom de mouvements de transfor-
matiou à moins qu'on ne dise que l'augmentation est un cas
du mouvement local provenant de l'extension du corpsen lon-
gueur et en largeur. F4emouvement local est__çgipi par lequel
i!> .«., X.3K.Faut-it croire, .wec Faiiiicius, qu'-Kiiffliilèmc n'a réduit à deux les six ps|iéces
fie mouvement que pour montrer ensuite plus fitfilenvmt <|ue ni l'une ni l'antre
n'«ist«? Comme sceptique, il devait en effet niiM>U-ràlUi; ilu momouient. Oh
bien, roman'Saisset([>.ai i. noie)paraitdisposé» le lain\ faut-ilr.i|i|»irlor celle
tliéorio au dojjmalisniejujiïiclilii'în ? C'est un point <|»'oti doit laisser imlocis, faute
île documents. Remarquons seulement ([n'en tout ois, celle Iliéorie semble persun-
nette » ^nésidème; car .Sextus, au lieu île dire ici comme pnrloul ailleurs Aivnai-
Snpot xni ïtpxxlmav, dit seulement Oi iaepi im Atwio/Aiaoi». Il peutsi» faire,
comme l'indique Zclter (p. 3"). ), (jii".Ku>:Fidèmc ait emprnnlêcelte i-orrection
aux stoïciens.
iKNÉSlUÈHB.– HÉttACM'tKlSMB. -iV.>l',1.. 1..I_~ 1
iS.
un mobile change «V fié», soit en entier, soft eu partie en en-
tier, roititiHt les êtres qui tournent ou qui se promènent; en
partie,connut' la imiin qui s'étend ou se ferme, continu les par»
ties d'une sphère qui tourna autour de son contre; car. tandis
que la sphère demeure au mène endroit. («s parties changent
de place, If
Enfin /Rnôsidème a une opinion arrêtée sur ta nature de
l'Ame, fi saitque la raison
(Stdvota) n'est pas enfermée dans ie
corps elle est on dehors(lî. D'ailleurs, ellene<se_djïtingue pas
d'esjenselle aperçoit les choses au moyen des sells. comme à
travers des ouvertures. Sans (toute, il faut rapprocher cette doc-
trine de celle quiest ailleurs (îl attribuée à Heraclite par Sextus
et suivant laquelle nous aspirons enquelque sort» l;i raison
quiest répandu*; â travers le monde. (]ètté{raiswij^onimÙîj^estlè
critérium de htgèrilé. Ainsi encore. d'après /Enésidème (3f,c'est
par l'aspiration de l'air chaud que l'enfantaprès
sa naissance
acquiert la force vitale.
C'estprobablement à celte ib«'orie qu'il faut rattacher l'opi-
nion d'/Èné'sidème sur les notions communes. «Lespartisans
dVfviUisitlèttie. dit Sextus. d'Heraclite etd'Épicure, ayant la
Sexl., .1/ VII, 3iy 01 Se eh>at piv [t^v Wmw) &ef«ti>, oSx é%>1$ av'ii'
Se rôit'jf -BeptéxeaQst àÀ)' ol ptv èxrùç to$ oéftijos, es Aivitai&tfutf xsts Hfï~
x/eiTot> I{5o ol Se «îtiin sîi'ii ris aiafhjoeis, x«9«ep Sei »m> <faw vïh>
ait)&nmpïwj tjpoitijt'j ovoxpy hs c'îàçeiûf )Ï£>£e )L%çitw ti u Çvmitàf xtt A/vitai-
Snpos.W M., VII, t *) t Tovtov Se rèv &cïoi> ï.6y<iv x«0* llpvKÀctwtr S? xvitcpoiîs
cvéaasrm voepol ytvàpéh. Canin? fiîrzct, et aw Di«>ls «t Nalorp f nij-'i), nous peu-
sonsi|im >*<>-[ki>!ia(;(>sur tiéraclifeest empruntépar Snlus» l-jn'siiti'tnc»liii-injnii>.
f.«s raisons pour li>s«{«e|{«?-«Minai croit devoir ntCribiiur fout le tlcvc(upp«ment de
Si'itus (Vit. 8(|-i'n) à un historien (t>)|;uiiilr<|iiot semblent bien conjecturales >'t
sublifcs .Nslorp les a bien i^fuliws.
Terlul,, De amm,,»/ i-lsli (lui [incstimimt non in nloro concipî animant.
sed r-ITuso partit noncliim vivo infanti ntlrinsecti.'i impriini, (rariicm) éditant
et (te nteri toroac~ fumantem et <!ah)f<*~httam. ot (em)m i);ttit'tnt, et itM<t<*<nM-et de ulcrï fomao* fumantem «t ralore «ihitam, ut ferrant ijjiiilMru, et ibidem fri-
gidœirnmersum, ila aeris rigoropercutsn»ni vim aniiualcnirapor<>«l vocalem
sonnfa eàere. H»r sto'ici cmn £aesideim.n On i«ni.iK|U<!ni l'accuni dVEiitsidome
avec tes sloicioris. Zellci- aigiiale en outre plusiours points on le iiu'-mc occonl se
produit: l'air confondu avec le. feu, lelemps tunsiili-n''
cuinmi' r«s»irw des chnws.
IVmplut du mot oiafa, vif. (p.i.'f ).
m LIVHK III. CH.ll'if M IV.
tnénie opinion sur tus choses sensibles diffèrentcependant
comme tesespèces d'un {jeure. l*es partisans
dMvnésidème font
une différence entre lesphénomènes; les mis
apparaissentcoiu-
Munément à tous tes hommes, lus attiresen particulier
àquel-
ques-uns,lieux
qui apparaissentà tous de ht mente fuguii sont
vrais; ceuxqui m* présentent pas ce
caractère sont I'.iuïd'après
sonétyraolujjie, le
mol m»' sij'titlte t'fqui »Vîe|ja|i|je juts à i'oj)t-
niori cuiuiiiune. »
Entre ces divers fragineuts, pouvons-nous diVouvriiMiit Jietf- t
H semble bienque plusieurs au
moins des|»re>|)osi lions dog-
mati(|uesif Enésittùim1 soi>C te
dévt'J«jj|»('mi'nl tl«celle formidu
qui lut est runiimme avec Heraclite dans la n'alité, dans l'ab-
solu, les contrains coexistent.
Direque
Mire est l'air, etqu'il est
letemps, que
letemps
est
uncorps, identique
iui-inè-ine à l'unité. c.Vsltapproclicr
et con-
fondre (tes chosesque
le sens commun et lesphilosophes
distin-
guent etopposent l'une à t'antre Ainsi encore la
partieest
identifiée au tout, et le dm ta lapartie, la parcelle
à lapartie
et lapartie
à laparcelle, l'ettl-être Knésidètne n'n-t-il ramené
toutes lesespèces
de muuveuieiils à deuxque pour
montrer en-
suiteque
ces deux mouvements différents ott contraires sont
identiques,et ne difl'èretil
pasdu
tempsou de l'être. Enfin la
raison de l'homme est identifiée à la rarsun nui va-selle, l'esprit
à la inâTieTêl~le contenu au contenant. sens et la raison,
qu'onest habitué à
distinguer, soiiïuneseule et même chose'
Nous wvoyons pas,
il est vrai. comment onpeut rattacher
à1
cette théoriemétaphysique
l'autreopinion dogmatique
allinnée
par.'Riiésidème: les phénomènes qui paraissent a tous dota même
utaniiTi* son(_jrr_ais.On est
surprisde voir le sens i.-oiuuiun de-
venir unerègle de connaissance et un critérium de véritédàns
(/Vtll.s.
Nous ïuyiiiis nularmiienl ( S«l.. M,X «37 ) «|»e sloiciens et «|>it:»ricns s'ac-
1oittai''iil ii rt!j;.iriji;r lo Iciiif (oiuin"incorporel.II "-si à n>fiian|ui>ri|ii*ici n>nVst pas <rt[t>racliti<, mais ilft Slr.iiou |i> physi-
cien <jhpSetlt»rri|i|,nicli.' Kmwiik'me ce r|tii semble tômoigner Je l'indiipcnilanc»
't~ ~1 Ileus,
KXKSlf)t>\|K.– HKH.tCMTÉISME. 27Ï
cotte étange métftphysn|ui,<, Peut-é'b'e ho faut-il voir là qu'une
règle toute pratique,destinée seulement h rendre
possiblela vit;
de faits les jours: IWès inft«« de ces spéculations aventureuses
rendait nécessaire, pour le train ordinaire de la vie, une règle
de ce yenre. L« critérium d'ifênésiilème serait alors analogue au
précepte de PyrWiaii l'aire comme tout Je inonde, 0:1 ù ceque
Timonappelait amnfieh. II est vrai qu'alors l'emploi du mot
fànQti a lieu denous Kur|)run<lre.
Quoi qu'ilen soit, les idécsjJogttiatiqMesjllîKjJiSsictwiie sont
nssez bien liées entre i-llcs pour qu'il soitimpossible
de douter
•[«».'nous sommes ici en
présenced'un
système,fort
ir»| arfaite-
nietit couru de nous sans doute, mais soigneusement élaboré.
et délibérément accepté par son arttmir. Km. Saisset se lire d'em-
Imrras trop l'acilomcul(jtiaiid ri (léefare l| rju«
les déln'b de
riténicliléism*' d'Knésùtèttiif n'ont qu'une importance secon-
daire. Sipi'ii iiit|>ur(;iii(s qu'ils soient d'ailleurs ils sont
en par-laite contradiction avec tout lu reste de ce que nous savons
dVfênésidènu'. L'historien nepeut se soustraire au devoir ele
Hieivtter comment un même homme a pu étr« à la fois le plus
illustrereprésentant
duscepticisme
et ttn dojjinatiste si hardi.
C'est leplus dilliiile df toits tes problèmes que situlèv» l'histoire
duscepticisme
ancien.
il. Diverses explications ont été proposées. Saisset suppose
qu'après avoir passé en réalité d'Heraclite à l'vrrhon, .Knési-
dème « voulut éviter le reproche de se contredire par nu ingé-
nieux sufiterf"»[je, eu établissant entre le scepticisme ol l'Iiéra-
cliléisine cetteespèce
de lien logique dont parleSe.vtus. Au
fond, rien ne paraît certain, et li; parti le plus sage est de
s'abstenir de tout système. Mais s'il fallait eu elicmir un, celui
d'Heraclite devrait avoir la préférencei»
1,'iiiiiijue raisoninvoquée par Saisset pour justifier cette inter-
prétation est laprétendue
loi de l'histoire <le fa philosophie,
d'après laquelle le sci'|iticisme sViirhamernit toujours au sensua-
Op. fil.. |>. -I.HJ.
m LIVRE Hl. – CHAPITRE IV.
linna coiuijw à uu principe sa conséquence inévitable. Nous ne
pouvons admettre cette méthode, (lui consiste à construire l'his-
toire fiftmi. D'ailleurs, te texte eité plus haut (lit précisément
le contraire' de ce que Saisset lui. fait dire. /Euésidèine, dit
Sextus regardait le scepticisme connue le ebeuiitt qui mène
ù l'héraeiitéisme de quel droit soutenir que c'est t'héraciitéisnie
quil'a conduit au scepticisme1'1'?Y
Ze-ller et Diels:3>proposent
uneexplication
très ingénieuse.
D'après eux, c'est par suite d'une méprise qu'on attribue à iEné-
sidème les opinions d'Heraclite. Ce pliiiusoplte aurait, peuUé'tredans un ouvrage particulier w, résumé à titre* d'historien, oit.
pour en tirer des arguments, {a philosophie d'Heraclite; puis,comme il est arrivé quelquefois, on lui aurait attribué les opi-
nions qu'il exprintait pour le compte d'autmï. Deux raisons
ont déterminé Zeller à prendre ce parti. D'abord, c'est le
seul moyen de disculper .KnéYtdènie dureproche de contra-
diction. \)cplus, dans fous les passages de Sextus cités ci-des-
sus, il est expressément indiqué qu'yKnésidème parle d'aprèsHeraclite Os Çncw è Aù>ij<7$»feosxtetà ftpâxÀemw. Si j£nési-
dètne estparfois nommé seul, on peut prouver une fois au
moins que Sextus lui attribue uneopinion qu'il avait pu expri-
mer aussi pour le compte d'Heraclite. Le passage J/VIH, 8.
attribue à .Enésidème seul if. dit évidemment la même chose
quele
passage 11. i3i, où Heraclite est nommé. Tertullien
ou plutôt Soraïuis, dont s'inspire Terluilien. aurait fait la même
confusion t peut-être parée (jui*tous deux tte connaissaient les
écrits d';Bni-si(lème qu'à travers les livres d'unsceptique plus
ancien, celui-là même peut-être qui avait fait la confusion.
l.i! 10.
U n»:mn erreur a ék" commise par Diels, v/i. cil., p. aïo.J'
Drixojr. firaft'l p. :t t<».
'• Hittol rfiscutfi aviip bvutnmp <liv force («j/. cit., p. ja) les diverses supposi-
tiArts qu'on peut fmrc îi c^ sujet.
1 C'est par eci<>ur (]u«»ce passive e>( «msiifisn> par Zeltm- comme ne nommant
i|»' Kni'*i<l'-in<> (p..ti! t fféracliti' et nvmnui deux tîgiics ptus haut.
Ut nmmn 1.
ttl~It,\(a.l'1'KI~~Œ, 279
t.~ ..tt.t.. N"o.E.t .i.. ·s..ll_
Malgré toute l'autorité de Zeiler, uotis ne |mttvoiis accepter
cette hypothèse.Continent comprendre que Sexttts, d'ordinaire
très exact, ait trccueilli » ta légère et sans songer à la contrôler*
une opinion qui attribuait à l'un des chefs de l'école sceptique
une véritable défection? Mat» surtout comment concilier cette
hypothèse avec le passa/je ou Sextus dit en propres termes
({u'/fênésidènuî regardait le scepticisme comme u» achemine-
ment vers l'Iiéraotiléisme? Il n'estpas possible que
ce soit là une
explication que Sexto se serait donnée à lui-même e nul le
tangage mé'iiie dVKnésidème. Il faut donc renoncer à récuser sim-
plement les textes où /Enésidème nous estprésenté
comme un
(luj/iiiatisle.
L'espoir de concilier des textes, à première vue si incon-
ciliables, devait tenter quelque esprit ingénieux et subtil. Dans-
une très intéressante et forte étude sur lescepticisme dans l'anti-
quité, iNaforp'1'' a entrepris cette l«k-be difficile. Pour l'honneur
d'^nésidème et deSextus, Natorp
nepeut admettre ni que l'un
se soit si ouvertement contredit, aique
l'autre ait été le scribe
inintelligent et étourdi que supposent Ed. Seller et Diels. Il sou-
tient que tout en proclamatit avec Héraclite la coexistence des
contraires dans lesmèmes objets, Mnésidème nu pas cessé d'être
sceptique. En effet, ce n'est pas dans les choses mêmes, ait sens
dogmatique du mot»-'1,que les contraires coexistent, c'est seule-
ment dansles ^apparences,
dans tes phénomènes. Déjà IYo(a-
/«((i'iin-/iim(ji'jiù(/i'r(/ic.SViY)iiii"iii.'1/lci'f/i!(»i(UliiMiusr|ic';Miisoiim, I. XXXVM,
t i$H3). Cette étuiic a éti n>prai{iti(«> dam I"uiivi-j/;c< déj» cité Fimekungm z«r
Getdn'elite des ErkemUttapraMea* un Altertlwm, Berfa'n, 'Hvrli, i$&î. Vite Ofi-
nï'in aiKilogiK! a M misst iti'li'iulin1 jiri'«|irn en inOwe ti-inp* j»r Ilirad, op. cil.
'r' Pour jiislilior celle dtlPwiu'i», Ifiwi»! iiisi«ti> »nr !•• |)assa|;o itn Scxliis, M.,
V'Ifl. S, oh /KnésidiTO rfil simlcmi'iit i|iie les phénoiiténM ^ont */u6i>, Undis
([ii'lipicun', (|iii <>sl dugmaliile, appdlo k»s t}tt!w «oustlitcii iXnOii xii âvn. Mats
cette «lifliiiiMio" il'c<|irijsïiuii n'a pas la porta* (jui1 lui prùlc Iltrzel les mots cn>-
\i\»vh par lîpiaire «ml iiiiiqiuuiicDl tlcstiius ,'i espliqucr la iti'linitioii <lr>la vérilo
i|iii va suivie. El si, (fans la pi'iisré <(< Seslus, la llirârifl (r.Em:siiti'in>' «vait un
foin [miciin'iit ptn>ii«nii>iiist«, oohikk'nI cfttiijjreiKlm <|n'il t'ciil |iiatv«' entre ((«'M
lliwe* bnit ù fait ilo.jiiKilûjiii's, n-lli- do l'Iatn» et rclte (CKpirurc? l,'ar);inncnt
f»nd(: sur fctymofujjiu du mol ilyÛét (iù (ni >iiOov) nous |i.iiail aussi bien .-ulili!
vl pou probant.
*W MVBKIH. – CKAPfTRKIV.
garas, discipled'Htraelite, remarquantle caractèrerefaltf des
sensations,constatant<|tie tes chosesn'existentpot»' nous quequaudelles sautperçuespar nous, et queleur nature dépenddecelle perception,avait déclaré que toutesles aupareneesjioiilégalementvraies.(Testdans le mcuiesens. purement phéno-»néniste.«|u'Ettésidèmeadmettraitla coexistencedes contraires.
H yauraitainsidans l'œuvred'Ënésidèmeune partie positive,et cela, non seulementau point de vuepratique, maism«*ineait
point devite théorique.Cettepartie positive contiendrait «ne
triple aittrinution d'abordcelle de l'existencedes phénomènes,
qu'aucunsceptiquen'ajamais contestée;puis celle de lu possi-bilité deliUfcieiit'e,unde la recherche{ôh/uns) que les scep-litjnes regardentconuneie^ittiue, puisque la vérité n'est pasencoretrouvée, ait lieu que les doj;iuatistesdoiventla déclarer
inutile, ptris-qn'ibse croient d'oreset déjà en possessionde la
vérilé eiiliticelledi;la successionrt'yuiière despliénoinètiesoudes apparencesdonnéespar l'expérience;cette successionpeutéfr«»prévue,sansqu'oi»ailirmerien des chosesen elles-mêmes.Telserait le sensde la ilisliuelitmfaitepar les sceptiquesentre
les .sijjniscotiiniémoralit's,qui rappellentdesphénomènesobser-vables, maisitclticlleinenLinajieiçus,cl les sijjijesjndicntifs(o\svSstKTtidv}qui d aprèslo*di^yuatisles.tout découvrirdeschoses
tatijutirscachées{àSnm\ Les chosessensiblesou infellifjibles
[fonrx. othfhni) nousseraient à jamaisjimccessibles:les sen-sationsiahûn'crsisi etnu'tneles raisunnemenls(votjasts)seraientfortItjjjttimes.Parla premier*;decesthèses,.Knésiclèmeresterait
>cepliqne:par la seconde, il se rapprocheraitd'Heraclite, et
pourrait soutenirque, dans li-sphénomènes,les contraires co-e\i.<ti'nl.Maislniileuprorlaoiantcette coexistence(les cuiilraii'ès,.Kiii'-Milènii'ajouteque i-crtsiiinisjippîiri'iiccs.coinniuiiéinonlre-ciuiiiuespar Ions,-.ontvraies les autres, n'obtenant quedes
\tnis.iiutKuii>nln*plusli-lilli|ii»iv-lli!ili-hiicl:iMim;doitpj'i<rlri'alti-iliiii-ct .Kt|sl<Jfllp;l[i.l<ii>i.
fftr/îiiisM'*.'iiismsur- jidintt.p.tj't •( illaitirmtr)|ii*"r1»m«uwfojjte.-i(Ul-•II-f.-r»iii]>*•I"Kn-î«i«-i»t«•.iïi'i!.iri';jl<!iwni'rlf'iiii-iilwo-plti»parless-pjili<|««'S.
-BXifolDÉMË. – lléHACLITÉISMK. 28!
;nllii!siot)H |t.(i-(ii»li(<ft'.f soitl fausses. (I y a ainsi un critéfuim
devérihCtniis
<i« vérité purmnewt relative et iMumtiénahu
:\ntar|i dépense,des trésors de subtilité pour défendre cette
théorie: inaiheurwiseniruit il est bien dillieife de {'admettre. Ce
n'est pas quenous lui* reprochions cette subtilité avec Jinési-
tlènn* elle est bienpermise.
(Je n'estpas
nonplus t|ini
nous
méconnaissions la jnirt de vérité que renferme sou explication.
fl est tout à fait certain, et nous ie nioatreroitis plus tard, qu'il
yti dans le
septieismede la ilemière
[ukioile unepartie positive,
œlle^iù mène<j«')i signalée iVatorp.
Mais si celte conceptionest
incontestable chez les derniers sceptiques,aucun texte n'autorise
ii l'attribuer à /Knésidèmo; on n'u pas le droit (ft*j>r«?ter
ù un
philosophe <{<>spensées que d'autres ont eues un siècle ott deux
après lui: rien ne proinv <|u'nu* esprit, fit-il aussi puissiinl que
ciflni (i'/Knésidème uit su apercevoir(tu
premier couptoutes
les conséquences llui devaient sortir des thèses du scepticisme.
iValorp sent bien qu'il y u là une difficulté; if argue de f'insuflr-
saucn de nos renseignements sur /Knésidème pour réclamer le
droit de reconnaître sa pensée dans lessceptiques ultérieurs.
FJien m- peut faire cepetidanl que ce ne soit là mie méthode qui
outrepasse le droit «ie l'historien.
fi y aplus cette théorie que nous n'avonspas le droit d'attri-
buer ;ï Knésïdème, est précisément celle quesoutient Sextus; «m
on verraplus
loin d'irrccusalili-spreuves,
(l'est Sextus quifait
une distiuclifi)} très nette entre les choses ou réajjida_eji_ssji, iu-
accessifoles à la connaissance, et tesphénomènes dont
l'ordre de
successtotTpeirt ètrt.1observé et prévu c'est dans sa philosophie
ipi'il f-itil *uitr<i la i'f)ii(tiiti4', ffiirt.» t-nutmi* fottl t«* MUHiftt*̂ Sc\f., K tFi(i, i:}^K
Sexlus dit mi-mi! (|H.> li' sOf|di<iiiiin,<;oiiiiii(' Imile* ii'S aiilivs |)liiloso|iliics, pari i-o
xotrùi xàv irifv-vr af»).niivf ( t tin). Mai» la «lislaiiei" <|ui s»"paiv ici
.•KuwvMwih- <!•* vrais <r.'jjliijciv> n'i->! iliiujuiit'" iju'Ii ajjpnri'iuv, car les «epliiju"1"
tf «.intiiii'iit l'i'Mi d>> dire <|i|i- >i- qui > riiiilurii»1 <i l'opinion comnmiioj«it vrai
il< •ikiii'iil sciili'inciil i|n*il faut s'y ronfoiiiuM-, i'l c'nt là mi pivri>pl<> [iiirem^ill
pi^fi'pt* ttt **iiihitiv\ fClit'-»K't*it' fft'rltirt* vmic>ki|uî i(|»|itfriiff tfc fu iitèiii»' ttlifttit-ri*
à loin \f> liuuu»u>. il il b'iiîI j»»s («««iW»1 '!•• -:ii|j|i<>.>"r iftf'il n'.>il |w* i»i»pnsb
pitiiûo tic («• mt»l ^ï)\hi$ *:t i|tril ait «*rtt ip«-t^r <(-cptùjtu.' çii lo |ininotiranE,
•m uvre m,– chapitre iv.
qu'on doit distinguerune
partie positiveet une partie négative.
Si doue la même tuéurie su lût déjà trouvée» comme le croit
ffatorp, chez .Enésidènie, Sextus était admirablement préparé
à lacomprendre, et
la louer. Mais bien loin du lu recuimaJtre
chez iluésiiièiiie il traite son devancier comme un ilogmatisto;
il le réfute, il lui reproche sa témérité (tafpow^reia).
Dira-t-on que Soxtus n'a pas compris les distinctions intro-
duites par /Enésidème? Quelle invraisemblance! Et comment
Xatorp, (luilotte si Imbu la fidélité, l'exactitude et l'intelligence
de Sextits lorsqu'il s'agit de le défendre contre Zeiler et Diels.
pourrait-il lui supposerici tant de légèreté et un esprit si obtus?
On m' peut ta^fiiu pas imaginer que Sextus ait ététrompé par
l'emploi de certains mois, tels ijue dhf&eta, ùtrdpxstv, ovcrfa;
car ilreunirque Ini-méme que le langage, naturellement dog-
laafiijue, se prête tuai ;liCmpression des idées
sceptiques;il est
donc en garde contre les erreurs de ce genre, et dans les cir-
constances délicates, il neniaiK[iie pas
d'avertir que les termes
dogmatiques dont il est obligé do se servir trahissent un peusa
penséiuen fait il évite les formules
équivoques.Ces précautions
que prend Se.vtiis, .Edésidèraen'avait-il pu les prendre avant lui?
fêt njihiji' s'il ne le* a pas prises, comment croire que l'esprit
délié et exercé de Sextus n'ait pas su reconnaitre, à travers une
terminologie défectueuse, des idéesqui
lui étaient à lui-même
si familières?
(I no reste pltn qu'à supposer que Sextus, comprenant la
vraie pensée d'.Knésidèrae. n'ait pas voulu la reconnaître appa-
remment pour se réserver le mérite de l'originalité. Ce serait
une supposition tonte ;*raliHte, car ntillo part Sextus ne témoigne
d'aucune prétentionde re j'enre. Il ne donne pas comme lui
étantpropre
la doctrinerpi'il expose
elle est le bien commun
dessceptiques.
En fait. il semble bien qu'elle a été professée
avant lui. telle qu'il l'enseigne, par quelques-unsd<; ses prédé-
cesseurs, tels que .Ylénodotc. Loin de vouloir innover. Sextus
invoque volontiers les autorités les plus anciennes s'il ne cite
guère les modernes, il écrit souvent les noms de l'yrrhon, de
mtSWtUK. ilÉKACLITéiSU'K. 283
Timon et dVÊnêidèmt». Son ambition paraît être de faire du
scepticismeun
système aussi ancienque
tesphilosophie»
tesplus
illustres nul doute ([ne. s'il avait pu placer sous leputrunagf'
d'.Ené.sidèiue ta théoriequi admit!. la prévision des phénomènes
«l une rè(»le cbconnaissance empirique, il eût ngi à r%ard (!<•
vette théorie mmme h l'égard de la tfiëodc des cause» et des
signes.
Enfin, il suHit de lire sans parti pris le texte de Sextuspour
dissiper toute illusion. Dans cesparafes mponyûtw iwiiwnfa
vtep) t5 avtb inépxfitv rè i<xva.vtia «tepl tJ «M famalhu, xatl
01 (ièv o-xmitxQÏ ÇalnaQau Myw&i %à évavtia «spi ?è aôti, ai
Se \\p<uù,ehstot âttb tqutow xcù ênï ib ù-Kixpxztv aùti pnéfflwvucuuunent croira «hwràap^eii' ire|ï! t6 aiîrè. si viaii'enient opposé à
<^«W&M,nci désigne pas une estistpnee sitljsfanhclle, réelle, en
dehors de la ncttsée et des |ilt<Jnotnèii«s? Coiutncnt les motsenrô
mérou xai éitl ta vitolpxgtv etvtà fterépxpvrm ne di'.signeraient-ifs
pas avec la dernière évidence le passage du point de vuephéno-
raéniste au point de vuedogmatique? Personne ne soutiendra
que les héraclitéens soient pl«5no»iéjustes Knésidèrae, s'il est
d'.tecord avec eux, no l'est pas non plus.
Natorp a bien compris (jue c'est ici lepoint faible de sa thèse.
Il tente d'expliquer comment /Kiiésidème a jm dire que les con-
traires existent(fajp%tw) ensemble, (|uui(|u'tl déilare explicite-
ment ailleurs"1 cjue cela est impossible. Suivant Natorp, si
toutefois nous lecomprenons bien, .Knésidème argumentant
contre les do^tnatistes prouve que la même chose en même
temps est et ji'est pas, ce qui est absurde. Cet arpinenl atteint
les (loi;inalisles p:ii% danstous leurs raisonnements sur les choses
ils se fondent sur le principe <{&xçotrtt<iietiott. Mais il n'atteint
pas celui (lui nes'appuie pas sur ce principe, et accorde (jue les
contraires coexistent.linésidènn! s'est placé un instant au point
de vue des dogmutistes, il s'est prêté Il leur manière de voir; les
ayant réfutés au nom de leurs principes, il reprend sa liberté;
llJ M., VIII. 5-' AèvviTOi' to stïrô Htti elvttxù (in eivst.
28* 1-tVftR H L– CHAPITRE FV.
ilportante
tm principe ttrtitopposé
«H. ayant prouvé1 l'impûssi-
bifité d'atteindre, aucune wisteiu'o réelle il n'aOinue uueune
existence Je ce genre, eu introituisant dans ta formate (le ma
principe le mut tkapx«v.C'est bien subtil, nmis il s'agit d' fêné-
sidème.
Toute cette subtilité est en pure perle. Pour en avoir raison,
une simple reuiorcfiie suffit nous voyons dans Sextus que» pour
'l' l s('<'j)t!Mtne ext Mn l l'hé.Eni'sidème, lescepticisme
est un adteminement vers l'iiéra–
elitéisme. Par suite, le scepticisme et Fltérarlitéisiue ne sont pas
•nie même cliose on n'est plus sceptique en étant héraelitéen
on n'est pas h h fois sur la route et au but. Et i-oniment croire
i{u« ce soit un sceptique ([«i ait adopté (es (Mories très dugma-
{iijues d'tléraelittt .sur te leitips,sur t'essent'e. sur l'identité du
tuul d d<; tapaitte?
Iférartitc eertos ne les interprétait- pas en
il ii sens|)[i(;noiii<[ii.s(c
en se ralUtclutni sievptictleinent
à Hdra-
rlile. KtiésidèiiH' ru>les intei-prète pas autrement
(pi'Hécactite.
(lest donc avec tonte raison que Swtiis fait une distinction 1res
nette entre rkénietitéiMno i-t te pyrrlmnisme. La conciliation
ivvi'epar \ittorji
estimpossible.
lit. Si on ne rejette pas les tevtes de Se\tus, comme Zeller,
si on ne les conciliepas avec
les autrespassades
du inâme auteur,
«oimne l'a lente Nal«wp il w reste j>i«s ifn'mi partià
prendre
c'est d'admettre qu'.Kni'sidèniu a changé d'iiléo. t|(t'it ya plu*
.sieursphases
dans sa vit*. Il m-serait pas le seul <jtii, à différentes
priodes,eût
professédes dnef Fines ditférentes. On admet sans
dilKcntté (pie, dans sa ji'iiiïesse. il a passé du scepticisme mitigé
«le rAi-iidêmie a» sceplirisim1 radi<*al. Pourquoi par une seconde
évolution, ne serait-il pas allé du sceplii'isnu' «m dogmatisme?
Ih pi-u
ticscepticisme
l'avait écarté du dogmatisme: beaucoup
de scepticisme l'aurait ramené à nue sorte de dogmatisme. On
dit ainsi ([ni- Platon, ver* la lin des!» vie. devint pythagoricien.
On devrait liésilnr à accepter cette explication,si ri»tte troisième
doctrine, cède Iroisiènc manier* était s;tnsrapport lofjiipie
avec
fa pivcédeiili'. Ou'un esjiril tel iiii*Kricsidèini' dont on apu
,k\i:;sh*k\u*i – uiiHA<;uïÉrs\iK. ma
tiit'stu'i.-r la subtilité 14 lu puissmici' eu lisant les m-jjimimlatitms
exposéesei-dossu», «il sauté
hrusquetueiil etsans raison d'une
opinion à »ii<* autre, c'est et; qu'il est impossible d'admettre.
Mais quesa
pensée, poursuivantses
investigations dansle. même
sens, se soit lentcim'iit modifiée, c'est eu (|ti'il est 1res facile de
comprendre.
Si, en un sens. Enésidèmerompt
avec le pyrrhonisme,
puisqu'il prétend savoir quelque chose tlo ta réiitit«MibK(»I(t«\ en
un aulrosoiis.il lui reste lidèle t«i le cwifiitiH*. Si «*!»{ èlr**sei.'(>-
ti([ue de dire Les (ontrain's apparaissent tutiJKtiFs en^'iitbk*,
c'est, ei»(juelcpij
wnniiW, tïSliif bienc[iiv;tiil«{{e <|iie
tic din» <
Les contraires, dans l'absolu existent ensemble.
Aramionsreppurtafil potir le tnomenl f[ii'tt ne mérite plus
du tout. |ttiis(|tt*il afitriiiR «{rfi'lijtte chose, (<ïnom *lesci-ptitjue
aussi bien if semble en convenir int-incW [iuisf|ti'ii »|ipe{i« le
scepticisme mi acheminement à J'hérarlitéisnie. H cslilofjjnalisle:mais un comprend <[tùii> dialecticien délié or exercé (et <pte lui,
et à vrai titre unmétaphysicien profond et MibliLait passé
d'un
de l'es points de vue à l'autre. fwee de méditerstirrop|nisttian
et l'étpji valence des contraires dans ra pensée liuinaiiie. n'a-l-it
pas pu se demander d'uii vient cette opposition et cette é<piiv;t-lence ?
L'esprit litinmin. et surtout l'esprit d'un tel homme, ne
se contente pas longtemps in fait il en vent Pexpfiiuf ion. Après |avoir tant douté, il vent savoir pourquoi il doute. Le système
d'Heraclite lui offre une réponse ilt'adopte. Les contraires se
fontéquilibre daus l'esprit, parce ipi'ils
se font <;<jitilibre dans
la réalité. Sans doute, pour ert arriver là, il faut abandonner Li
grande, aiuviinc du pyrrhnuisnte il l'aiil afiîriner..Mais tf moyen
truand on a le tempérament d'unmétaphysicien,
de résistera ti
la tentation? /Knésidcine reconnaît dune sun erreur: mais en
même temps il l'explique, ce qui est une manière de lie pus
l'abandonner tout à fait; onplutôt
.ses vues sceptiques n'étaient
pasfausses, elles n'étaient
i|u'inconiplèles.On se
pardonneaisé-
ment de étranger d'opinion, quand on peut se dire qu'on est en
progrès sur s((i-m«*ine.
ûm I.IVKK ttt. – CHAPITRE If.
It y a plus: oh pont etwwwM' qu'en adhérant au dogmatisme
héraclîtéen..Knésidèute ait prétendu conserver, en eequ'elles
avaient (.ressentie!, sus idéessceptiques1'.
Tous k«sargument» |
«posés ci-dessus ont pour but d'établir que la cliosa un soi, la jj
réalité dégagée de toutrapport
avec{'esprit ou avoir d'autres
choses, est inconnaissable. Que dit-il àprésent
avec Heraclite?
Que la chose en soi, la réalité (t'est pas ceciplutôt que cela,
mais <|ii*elie est tout à fa fois, qu'en elle les contraires s'identi-
fient. Par suite. il reste vrai qu'on n'en peat rien dire. Dans
l'héraclitéisme» comme dans ta pyrrbonisme, ee quêTle sage a
de mieux à fain*, dans chaque cas parficuli(»i'. c'est de ne rienaiïinni'r. En se radiant au dogmatisme liéractîte'en, /En&itlèm<*
(l'abandonna aucune des thèsesqu'il avait précédeinment sou-
tenues il reste vraique
nous ne connaissonspas
ia vérité en
soi. les causes réelles, et qu'il n'y apoint
de démonstration pos-
siWe. Mais ces thèses, d'abord isolées dans i;i période pyrrho-
nienne,sont réunies et forment un tout dans la nouvelle doctrine
qu'adopte le sceptique converti. ii n'y apoint de science voilài
cequ'il avait dit d'abord. II sait plus tard pourquoi il n'y a
pasde science.
C'est àpeu près ce qu'un autre sceptique, disciple lui aussi
d'Heraclite, avait souteuu. On a vu ci-dessus' comment, suivant
| Prolagoras, l'intelligence humaine, suivant lopoint de vue ait
elle estplacée, découpe, pour ainsi dire. dans la réalité des
parties différentes, qu'elle voit a l'exclusion des autres, égale-
ment existantes pourtant, et réelles ait mène titre. Qu'y aurait-il
d'étonnant si, après avoir été sceptique comme Pyrrhon,.Enési-
dèine était devenu sceptique comme Frofagoras ?̀~
Qu'on ne dis»' pas qu'il y aurait là une sorte de retour en
arrière et une substitution d'une doctrine plus faible à une
doctrine plus forte. Si, en un sens, la réserve pyrrhonienne, (lui
interdit de rien allirmer, est logiquement plus satisfaisante, et
1 ('.(. Brandis, GaAithte <ter Knlmckflnu/im lier fçrieclmchm Pkikmjifm,
t. il. p. 107 (Ri'rtïri, Roiiwr, i86'ij. ¡.
•" I'. il. V..SKTI.. ft.l. txH.
KNfelDÈMK. – itlîlueUTËiSM. m
surtout plus facile à iléfentlfc dans les discussionsque tt«scopti-
cïsuie nidieal do Protagorns, à un autre point do vue, on peutsoutenir «(ire ce dernier a une
plus haute valeurphilosophique.
Peut-être n'esf-il quejusltj da voir dans II*pyrrhonisme un arti-
fice de discussion plutôt qu'une doctrine sérieuse. Là où le
pyrrhunion dit (lit bout des lèvresqu'il nejait rien et «'est sûr
de rien-, on peut croire qu'au fond it est surqu'il «'y
a rien de
vrai il déguise sa vraiepensée, pour ne
pas fairescandale pour
ne pas choquer le sens commun. Eutout cnsr le scepticisme ainsi
présenté aje ne sais quoi d'emprunté et de cauteleux qui pou-
vait ne pas convenir toujours à leuesprit ferme et décidé. On «lit
quela
vérité- n'est pas encore découverte, maisqu'elle le sera
peut-être un jour; qu'ilne faut décourager personne; qu'on ne
sait pas ce qui peut arriver c'est une sorte de pis-aller. i\*est-ilit
pas bien plus hardi et bien plus franc de dire, avec Protagoras,non seulement
qu'onne sait
pasla vérité, mais
qu'il n'ya
pas
de véritéet qu'on
ne la saurajamais?
En s'exprimant ainsi, il
pouvait se croire en progrès sur lut-méine. Sans doute, il fallait
pour cela abandonner ta maxime pyrrhonienne et se décider à
affirmer. Mais n'est-ce pas un sacrifice assez léger, après tout,
quede se décider à affirmer une seule chose, pourvu que ce soit
fa négation de la science? /Enésidème, bien différent deSoerate.
ne sait qu'une ctlose c'est qu'on ne peut rien savoir. Suivant
un mot célèbre, la science consiste souvent a dériver l'ignorancede sa source la
plus élevée, et on ne fait pas un crime à la
science d'être sortie d'une ignorance. Le sceptique, lui aussi,
n'a-t-il pas pu dériver son doute de la source l« plus élevée? Et
si, à l'inverse du cas précédent, cette source est une connais-
sance, il lui pardonne d'être une certitude en considération des
nombreuses incertitudes qu'elle autorise.
Dira-t-on qu'à ce compte /Bnésidème ne devraitpas être
appelé disciple d'Heraclite? On donnepourtant ce nom ù Prota-
goras, qui fut ouvertementsceptique. S'il suffit, pour le mériter.
d'avoir adopté la maxime ftéraelitéenne, quetes contraires
coexistent dans la réalité <>ndoit sanshésiter le donner à /Kné-
388 MVBB t If. -CHU'fTUK IV.
sitième. Rien, flans les lestesque
tiotts «vous, tt'unttirbe it
supposer i}«*tteutadopté
toutes les vuesdogmatiques (.t'iitiruetite.
Saut'lu tliéoiie do l'àme et de fa rakon i<>miiiini<\ toutes tes
opinions attribuées à Kuésidènie surapportent
a la doctrine di>
l'existence tics contraires, et cette théorie de IVimc peut elle-
uièmt1 èhv considérée cnmm« une uiuwxo tt« Titutiv c'est uue
inanière itese représenter t'orijjitu:
tic lu cui»»»ist>uueo({»i trouve
tiitiui't'llenieiit sa placcilans iine itorfrme où on admet ht miliU'
oljjeclivt* <lc>scontraires.
Kn ri'suuië, iiousrroyuils qu'apè:» avoir (féienJu. avec(|tiei{e
vifjueuf et (jtifitle t'otcc, on i'ii vu «-dessus, le pur.scu|>tirismo.
Knêsitfôiue. ili>propos tiélibéiv et «tdiatit Tort lue» ee
(ju'il
taisait, a pris |tar(i pour relie autre forme descepticisme, qui
»*est. à vrai dire, tju'tm (lojjmatisme ttéfjafif. Eu procédant ainsi
it a frit rester lidèle ;i ses principes et tussuivre jusqu'en leurs
tlernùVes fonsiitjniMtft's. §| » rrn être en progrès sur iut-méme
a certains éjjards il a eti raison. Il y a peut-être plus de fran-
chise et de hardiesse «finis cette forme «lescepticisme que dans
l'autre. En tout cas.iJ y a plus de métupbysicjue, et /EtMsiilèuie
«•st avant tout unifiétapiiysiiïe»*
Si eette explication est vraie, il n'y a pas lieu de s'étonner
que tes sceptiques uluVieurs, mal;;ré une sorte de défection,
aient persisté à le tenir pourun des leurs: au fond, ils s'enten-
daient. Dans tous les cas. ils avaient !•>droit de prendre leur
bien ait ils le trouvaient et d'adopter tes thèses de la première
partie de ta vie d'iivnésidème eu écartant les autres, (l'est ci»
qu'ont fait, (fc nosjours, certains positivistes à l'égard d'Auguste
Comte.
Kst-ee à dire qu'avec Hitter1', il ne failli' voir en fïnésidwnc
qu'un dnjjmatiste? Cette manière de s'exprimer a le tort de ne
pas distinguer entre tes deux périodes de la vie duphilosophe.
Or» doitl'appeler sceptique, puisqu'il l'a été très sincèrement:
ses changements ultérieurs ne modifient pas le caractère de sa
"•' <>p. rit.. |>. iiS.
KNÉMDÈME.-llfiftAlîUTlilSMR.. m
'•>ze>1
pM»im<V« «loelrine. Ihi'yu
pas<f«
raisons, ti'aHIcurs*, pur nous
montrer plus exigonnte «jihj tessceptiques anciens. Ëiitin. c'est
[mr soft sroplicîmne que nous te connaissons surtout, et c'est
uniquement par là qu'it nous inldrosse. Voità pourquoi nous
persistons à Je ranger parmi les cliefs de tMcolesroptifjuc.
iVHi~t UVHK lit. – tlll Vl'ITHtC V.
CtîU~'HŒ V.
E\ \11' ,:m'l'IQI¡i,
f,i's afffiiiinHkts, t[" Knéskiètnt* produisent sot' l'esprittint» stn-
ijulit'iï- impression.Si (lie consulte k* Iwu si on voit où l'on
.0
va. un résisteénergriqticmetit
si on considère les raisons invit-*
qttées,elles sont claires, simples. irréprochablement enchaînée*
on ht'sitt?, on estinquiet;
on sr (feitiantl*1 si cen'est pas
le boir
sens (jtrt a tort et lesn>|>ti<pic «fui
a r»is*on. Tour à toui", .suivant
le biais paroù oh la prend, i'tit^iimentalton paraît irrésistible
ou ricliciilt* elk* est comme le caméléon, «Jtie les sueji{i(|Ui's
prennent volontiers [joiirevernple. et qui change souvent de eoit-
îenr si lin le regarde longtemps, fi faut pourtant lâcher d'yvoir
elair c'estclime trop l'actte d'écarter un raisonneinent sons pré-
textefpt'il
est faux, sans nian|tter on tjitot il l'est. Cette poursuite'
dusophisme, «pie Platon, clans un «-as analojjue. comparait à
une chasse ditlit'ile. ott lin animal fort adroit met plus d'une fois
sur les dents le téméraire «ptî le poursuit aquelque
chose à l«
fois d'irritant et de captivant: elle est surtout dangereuse pour
celui qui IVnt reprend i-'esl une véritable aventure. Le moindre
desrisques que l'on court esl d'être accusé de subtilité.
I. Voici le raisonnement d'.Knésidème sur la vérité réduit à sa
plus simple expression. Toute chose est sensible ou intelligible
dune le vrai, s il existe, sera sensible ou intelligible. Or. il n'es!
ni l'un, ni l'autre, ni tous deux a la lois donc il n'estpas.
Ce
raisonnement sembleirréprochable. C'est
un sophisme. Où est
la faute? Il y ;i, si nous ne nous trompons, un double artifice,
uni' double équivoque.
Enpremier lien, le
sceptique transforme illégitimement des
KMBStDÈMK. KXAMKN CR1TIQIIK*. Bi
t sensible, mais
<<t.
relations en cntitM, desrapports
en chose» on soi. fl raisonne
eommt si le vrai. lesensiW, J'inlelltgiWe étaient des êtres, des
réalités tout au moins il tes regarde connue des propriétés
positives ou intrinsèques que; posséderaient les objet» qu'on
appelle vrais mu sensibles, il faut bien avouer que le Janyajfc
vulgaire, et même celui des |ihilui>o|>Iie$, est do connivence avec
fui. No parlons-nous pas a chaque instant dé l'existence du vrai' 1
Les stoïciens allaient jusqu'à faire de la vérité u» eorps.
11 suffit pourtant d'unne»
de réflexion pour comprendre <|»e
lewraj^cst uneirejatioiytmechose lie recèle pas en elle-même
la jiropriéU; (fV-Ire vtaiet elle ne la possède ^ue si elle est mise
enprésciH'jejljK esprit.
La vérhésuppose
dmx termes une
cfinsc <|iti est, et une pensée oti elle est ntprés-enfée. Quoi d'efon-
uant si aprèsavoir ronsidéré caninte olioso eu soi ce
<juino
peut è-tre positiveiuenl conçu ijueconniuî un rapport on arrive ;'i
prouver que celle cfiose n'existe pas? Il est bien certain quei<*
vrain'est pas.
sipar
là on entend unerwdjt«Mnd^jjemiarile_(l<'
toute [leiisée. El ou en peut dire autant cfûscnsiltlo et de j'intet-
fifjîbte.ljui ne saut aussi iju« des_rejiit4p»s-
Peu importe, pourrait répondre le sceptique. Que le vrai soit
unrapport
ou titte chose cm soi, accordez-vousque
là où se
trouve le rapport exprimé par le mot sensible, li aussi se trouve
lerapport exprimé parle
mot vrai'f Vous*l'accordez certainement
si vous ditesque
le vrai est sensible: et il l'attl bien que vous le
disiez, à tnoins de soutenir qu'il est intelligible, et alors la in&ne
question se posera sous une forme un peu différente.
C'est ici que se découvre la seconde équivoque du sceptique
il entend dans un sens absolu des identités* quine sont accordées
que comme partielleset relatives. Xous accordons, naïvement
et sans défiance, que le vrai est sensible ou intelligible. Que
voulons-nous dire ? Simplement qu'il v a d<"s choses vraie. qwi
sont en même temps sensibles on inlolli|;il)lt's. Ces deux qualités,
vrai et sensible, vrai et intelligible, peuventcoexister dans un
mène objet. Vraie sons unpoint
ile vu«, une chose est sensible
sfMi:; titi autre, et tous tes deux à ht fois. Elle est sensible, niais
in fJVHE fil. CHAPITRÉ V.
elle m»Test pas utiif[tinmi'ii( et ossenliehVunwtt; êlto lVst mm
perdre sa nature propre elle est « fa fuis rumine dirait Platon,la mcteie «|«e le sensible et autre «Jim le sensible. Le
sceptiquene l'entend
pasainsi
if prend tes termes ;iu pied de la lettre.
Vous accordez. dira-t-il, que le vrai est sensible cela veut dire
quevrai et sensible sont «ne seule et niante chose, ou. en
votre tangage, quelà -aii se trouve le
rapport exprimé par le
mot «vii, là se trouve nécessairement lerapport exprimé par
le
mol seuMe. Là oit nous avons enten«lu que deux choses,
d'ailleurs distinctes, sont rapprochées, confondues en un même
objet. et. en ce sens, identiques, il entend «pù'f va une identitéabsolue et définitive il
comprend que l'une «les chosesabdique
sa nature et devient l'autre. l,o vrai est te sensible. Une chose
n'est plus vraie eu mêmekm^is qu'elle est sensible. mais pmw
'/«elle est sensible. lin langage moderne, on diraitque, pour le
sceptique,le lien qui uttit les deux termes est
analytique, tandis
que, pour nous, il estsynthétique.
H est «isé de voir, d'ailleurs, «pie cette seconde «î«|uîvo«p»edérive (le la première. Si vous considérez le vrai et le sensible
comme choses en soi, en disant«jue l'une est l'autre, vous lie
pouvez que les identifiercomplètement c'est une identité dVs-
senceque
vousproclamez. Une chose
peut avoir «liverses relations
ave»; d'autres choses; elle ne peut. en ellc-m&ue, être plusieurs«•hoses.
On voitpar là continent se résout la dilHcuité. Le vrai est-il
sensible ou intelligible? n est tantôt l'un, tantôt l'autre, ni l'un
ni l'autre absolument. – Mats, objecte le sceptique, c'est ce dont,
ondispute; en d'autres termes, on ne peut distinguer les cas
où il est sensible de ceux où il est intelligible. Ceci est une
nuire question, celle du critérium «le la vérité,qu'il faudra
résoudre à part. – Mais ^il est %w/«e, ajoute-t-il que toutes
les choses sensibles soient vraies ou fausses: car, entant que
sensibles, elles sont toutes semblables l'une ne l'est pas jdus,
S..VI.I/ VII. '17.
KtfKSl&ftME. KUHEN CRITKJBK.. in
l'antre moins. »- On voit Mon ici le sopltkine f|ini nous venons
de signaler ii suppose quetoutes les choses sont vraies, r>a
tant (fttc sensibles c'est justement ce(juc
nous iivoijs contesté.
Elles sont sensibles ot, on outre, sons certaines conditions,
vraies.
Voilà le sophisme démasqué, mais àquel prix?
Nous avons
reconnuttue le vrai itW pas mm chose en soi nous nous
sommes enfermés dans Ja sphère du relatif. Nous avons «*>
cordé, en outre, qu'en jugeant Je vrai sensible ou intelligible,
le rapport établi entre le sujet et l'attribut n'est ps une identité
absolue c'est tfau identité parliefle et contingent* En d'autres
termes, celte identité n'existe<jue
dansl'esprit
ici eiti'orë nous
ne sortons pus du relatif. D'ailleurs, on nepeut formuler le
principe d'identité, si oit veut échapper aux subtilités des scep-
tiques, ipi'en introduisant urértsémeitt l'idée d'uni' relation.
«Une cIkkm ne pcul, en itième(etnps et ma le mène ntjtfiort,
ôtre et nopas être. » Bref, nous n'avons résolu la difficulté cju'en
considérant les choses dans notreesprit. telles cpi'elles appa-
raissent, et non tulles qu'elles sont en soi.
Peul-itre /lùiésidèmeti*a-t-i( pas vwthi dire antre chose. Km
te réfutant, peut-èlrc fui donnons-nous gain de cause. Pourtant
nouscroyons n'avoir rien accordé ipi'un dogmatisme sérieux ne
puisse et ne doive accorder, et nous sommespersuadé que,
tiiemc en enfermant Ja pensée é(tm fa sphère du relatif, en lu
soumettant en toutes ses opérations à ta catégorie de ta relation,il est possible de définir la vérité sans lui fcitru perdre le carac-
tère de nécessité et d'universalité sans tetpiel elle n'est plus.Mais il faut convenir
<juc frup souvent le dogmatisme connue te
sens commun, a des prétu» lions plus hautes. Il se flatte d'at-
teindre les réalités en soi, telles qu'elles sont, en dehors de
toute relation entre elles ou avec lapensée
c'est contre ce
dogmatisme que sont dirigés tes arguments dVKnésidème. et ils
sont sans réplique.
II. Les arguments ninln- les causes donnent lieu à des oh-
•m livre m. ciiapithis v.2»» MVHK III. (;.ll.t!'ITKË V.
sei'vatioiis analogues. Si on analyse l'kh'c itc eattse, ou voit sans
peine qu'elle implique une relation, et cela » tut doublepoint
de vue. D'abord une chose ne*peut Aire conçue eoitmio cause que
par rapport ù son effel c'est un point qu'/Knêsidème ne [iaraî(pas avoir touché, et qu'ont envisagé seulement les sceptiquesultérieurs. Mais, en outre, l'acte <le pensée par lequel
une chose
est, connue en elle-même est autreque celai par lequel elle est
connue ewiiruc cause. La chose est d'abord conçue en elte-méme.
en sou essence-,puis
elfe estenvisagée
comme cause ta causalité
est une relation (lui se surajoute à l'idée que nous avons de la itchose, sans la détruire et sans se confondre avec elle. Mais le
sceptique ne t'entend pas ainsi, ici encore, autorise, il faut bienle «lire par le langage et par l'usage, il considère la causalité
i|'.oiiiuii; une propriété réolle et objective qui appartiendrait aux
choses il en fait une chose en soi. Deplus, cette propriété est
identifiée avec la chose même en(lui
elle est supposée exister
ne dit-onpas qu'une
chose est la cause d'une autre Par suite^
si une chose est cause elle l'est absolument par son essence, en
sa nature intime. Iles lors, il tant comprendre comment cette
essence déterminée peut produireautre chose qu*elle-me*me.
Mais laquestion, ainsi posée, est absarde. Une chose donnée. n
délinie en son essence, ne peut qui» ce qu'elle» est. i
Direqu'elle est cause. en serait dire qu'elle est autre chose «
qu'elle-mthm»ce serait se contredire. En langage moderne,
nous dirions que de l'idée d'une chose on ne tirera jamais ana-
lytiqucment l'idée d'une autre chose; et cela demeure vrai si.
au lien d'une seule essence, uu en considère plusieurs réunies
onjuxtaposées. En d'autres termes. comme Hume et Kant l'ont
montré, le rapportde causalité est un rapport synthétique. Les
deux termes posés comme cause et elle ne sontpas
donnés il
la pensée humaine comme identiques, mais seulement comme »
liés d'une certaine manière sous une catégorie tui gmn-is qu'ont
appelle la causalité. C'est cequ'/Euésidème a compris,
et c'est A
pourquoi il est juste de voir en lui. comme l'a fait Saissel, un
précurseur (lesphilosophes que nous venons de nommer.
i
I!
Il
:(
.KXËSiftfitiK. BXAUfcS CRITI()«H 5^5
c t~, fPar suite au viiit va
qu'il ya de vrai et du faux dans !o rai-
sonnement d'$nésidènm. Irréprochablesi ou considère les i-uuscs
comme des choses en soi, ifperd
toute valeur si on considère fit
cmirtlilé fournie un ru|^iorlétnMi par ia p<m«é<*entre ilivom
objets.C« rapport lie lus olijois Naiis iiioililier leur uaturu
[ifu|HO.Us sont d'ahortl
co tjtt'itsmnl on ma-mèims; et, un
outre, ils s««tciivtsiifjiM
comme lié» it d'autres sous eertuttH»
bis. Dès lors, il uV a(tks
de canlcaûktiuu ta eurporof peut
iUre lié <l« cotte mauiâiv au t't«|jorel,ou Tiiicorporel a i'ineor-
j»oivl iiiciuc («'csl unjioiiit Ero|t tlisi-uté tl<-nos jours pour tju'il
suit utile- d'y insister ici) ua (»«•«(cuucevoir f'im'tirporct eointiie
tiitrso tfu em-fioi'i-l. wu îii\-(.'rst!tnt'nt.
Oh le voit, ici «'Henri!, nous n'avons j>u réfuter /Enï-sidèiuc
tjt»'* laeoiitf ît-iott dt; nous enferttier ffaiiir lo relatif, et de renoncer
«il do{îiH«i(i.smeabsolu «outre lequel il <tirigeail ses coups.
III. La fliiWiedwisijjtR's, telle que les léHoigMJiges autbenti-
(|ites nous pt'i'ittelteiit «lu l'attribuera /KnésidèiMe, seriiduilàfort
peu de chose elle est. on Ta va, manifestement incomplète, et
««tains historiens, comme Ritfcr1', ont pune fa considérer »[ue
mhiimm' Hiio forum prticulière du dixième trope. (-'epemlanl
irous soiiiincs fuelin h croire qu'elle avait, »liins la jiensré d'.tëiiB-
sidônw, une bienplus jjraii(îe [>ortée ^nésidètnv devrait &rf
rt'jjartléeoimne le |irécm"seur de Stuarl .ÏÏi[f,si oit pouvait sAn?-
Hicitt mettre à son compte les arguments dont les sceptiquessi>
sont servis nu temps <fe Sexlus. I^u scej»ti«jue, tjuel tjttilsoit.
qui le premierles a développés, a droit « ce titre.
Il est. en effet, digne de remarque qu'àl'occasion de la
théorie des signes romiuémonitifs, Se.vtits <l«:ciit l'indurtion en
tennes que ne désavouerait pas un disciplede l'école anglaise.
«. Lesigne romtiiéiHiii'ittif, observé clairement eu mèiiift
temps
quela chose signifiée s'il se présente ttc nouveau après <|u<'
celte dernière est devenue obscure, nous fait souvenir de la
Op. t., [i. •••X.
,W..VIII.t.
296 tfVBK HL–tMArTFHB V.
f tt. f t à*
a»» tifvim tu. – btt:trirttR ï.
chose (fui a été observée ott nu'iue temps que (ni ©I n'es! plusactuellement évidente ainsi ta fumée nous filit
penser au feu.
En effet, ayantsouvent vu ces
phénomènesunis entre eux,
aussitôt que nous apercevons l'un, la mémoire nuus suggèrel'idée de {'autre, du l'eu, qui n'est pas actuellement visible, lï en
est de même pour lit cicatricequi se montre après lu bles-
sure, et pour la lésion du cœurqui précède la mort. Voyant
la cicatrice, ht mémoire nous représente la blessure<|ui l'a
précédée; et voyant la lésion du cœur, nousprévoyons ta mort
future.»»Ce que les
sceptiques combattent c'est la théorie des signesindicatifs, c'est-à-dire la doctrine suivant
laquelle if y aurait
entre lesphénomènes un lien nécessaire et constant, tel, en un
mot. que l'entendent aujourd'hui encore les dugmatisles.
Il faut bien convenir qu'au point de vue où ils seplaçaient,
leurs arguments sont inattaquables il s'en tenir aux seules
données de l'expérience, auxseuls
phénomènes,il est
impossible
de voir dans l'induction autre chose qu'une association d'idées
fondée sur l'Habitude, et variable connue elle. Ainsi Stuait Mill,
en essayant d'établir une théoriescientifique de l'induction
avotie que Pindueiiwi ne saurait avoir «me valeur absolue elle
ne vaut que pour le immole où nous sommes, et il y a peut-elrcdes mondes où les phénomènes tte sont soumis à aucune loi.
Encore une fois, nous neprétendons pas quVKnésidèmc soit
alléjusque-là les textes ne nous
y autorisent pas. Mais, s'il
n'apas
montré enquel
sens et dansquelle
mesure ilpont y
avoir une science expérimentale, il a compris et prouvé quela
science, au sens absolu que (tonnaient à ce mot les anciens, est
impossible. 11 n'y a rie science, en effet, et de tUmomtmhon quelà où les idées sont enchaînées par un lien nécessaire mais il
n'y il de nécessité véritable que là où les rapports peuvent <!lre
déterminés rationnellement, ou. comme nous disons aujourd'huin
primi. Or. qu'on essaie, étant donné un fait, un signe, pour
parler comme les stoïciens, de déterminer a priori la nature d«?
lit chose signifiée. Ici. comme quand il s'agit de la cause, et plus
.«NÊSlbÈlil-l – BXAHËN CHITlQUfL 297
évidemment encore, Un meréussira pas; et si on
nu réussitpas,
il n'y mira pus de démvnstnitwn. C'est ce tju'/Kitésiilèuiea voulu
dire. et il n'y «» rien à lui répondre.
Les considérations qui procèdentnous permettent démarquer
In véritable place d'/Enésidème dans l'école sceptique.Les histo-
riens s'accordent généralement à ïoir en lui le premier repré-
sentant de ce qu'on appelle le nouveau scepticisme,Pourtant ifs
ne sont pas unanimes .'Haas"1, par exemple, regarde M nésidème
comme l'un des derniers représentantsde l'ancien scepticisme.
Et il. faut reconnaître avec lui que Status !q> semble l'opposeraux
nouveaux sceptiques» dont. Agrippa parait avoir«Hé l'un des
premiers.Nous n'hésitons pas, pour notre part,
à nous ranger à l'opi-
nion conwnumn la puissante originalité d'/Knésidème nu nous
parait pas pouvoirêtre sérieusement mise en doute il a vrai-
ment renouvelé le scepticisme.
Rien n'emptk'tic pourtant qu'après fui, cette doctrine ait en-
cure subi de nouvelles modifications: dans le nouveau scepli-
risme, on peut introduire des subdivisions, comme ott distingue
des espècesdans un yenre. Il est possible qu'après /Enésidènio.
d'atttrcs philosophesaient imprimé
h la pensée sceptiqueune
direction nouvelle ainsi s'expliqueraienttout naturellement les
parolesde Sextus.
S'il fallait marquerle trait précis (lui distingue les <le«* pé-
riodes du nouveau scepticisme, nous dirions qu'iEnésidèmes'est
surtout montré' métaphysicienet dialecticien: après
lui. les
sceptiques sontsurtout des médecins à la spéculation pure, qu'ifs
déclarent vaine, ils opposentl'art ou lit science pratique, qu'ifs
tiennent pour légitimeet nécessaire;. Pour /Knésidème, le seep-
»»/». «t. XIII, XIV, p. if) el «/.
<'> 3<i lUptSttov™ Toiiw owvflat aapè rois àpx*mTëpoK Xxe*1iM'.is
iposoi h' iv >i èito%ii awi-ytoQu Juxeï, Sèm rir ifiiftôv, oif x« >»yow x»
roitovf avpumfOK xr/uitiv. Ikûl.. ifi\:«ûii veârepoi Sxes/fxw' ra«fi<5i*aoi
rprssavs nit '7w;éi, tauu.
m tÂSlW tU. – CIUI'ITRË V.
1. t. .t: t: t.u .·a ci#ticisiiM1était u Itti-iHihiif sa |H"<)[H'e(rit. <*ittioins (|it'il ire tùt nu
«eftt'mmemt'itt « tttt nuttvi'au(it>;riuatisuit>; jimir
ses succt'sst'Uïs
il «st te rusd'buii* tt«! ta tntMei'iiio. Si .-Kit&tdèiH*? simslratt
tjt(el([«c |)ro[)»silit>ii au duuti' universel. cVsl. on Ta vu. hih<
tfit'si; iu<'tti|>ht'sit|uc cl triinsci'uditttfc' t'ulentitit é* t'onti'atrcs
tl.nts Fubiiitltt. Si lesscc{)li(jties (illmintrs iiuienl à e|iielt|tte
«•biisu, c'estKiiiijueinent
aux sui-eessiiiiis eit»[)iii(|tK's <l«* ptiéito-
iiient's tellusque
rubservalioii <vn dehors de foute (fiéyrie jK'itt
i*.s tivcuuvrtr. f'etiMîre pourrait-on ajouter ijue, si .Kiâésidème
lirait do •••tu .sct'jjtif.-ijUH' une ci«isétjue»c« |u'»tt<|ttc. tV'h»it mit–
queinefitun
jifiwpU»de morale t tes
sci'jjfjijuesultérieurs
jiuraissi'tttavtiir
[»r«HV'r«rtes biens ttu
ci>i'|>.>à ceux de l'âme ii.<
ne songentà ruiner, ht sûeuet> S|*écul;itiv(.î <ftnr pour fuire [»liicc
;( fit jctent-u[iitsttive
ou. fournit! ils- dist>ut. » l'ai't. /Kn«'sidèti*»?
est l'ttcore u» i»éf<i[j|iy.sii'ien: ses sticeeweiirs. sur lest|uel.i. tous
lis historiens le iwonitai.SMfiil» il n'oveiva ([ni1 |teu d'iuliui'iiei»,
ne sunl |>liis que des jwsilivisles, ils iuv(j(|uciitson autoiilé ù
jn.'Mjhvs eontute ,\«<f. (.louilt*iuviii|iiti cette d« kaiiE, Hais c'est
i;'i mi jwiiit iiiijiurtaiit .surlequel il tuudia revenir dans ta sititu
de d- Intvail.
LES SÈJCC.KSSBUUSDMJNÉSIBKttii– MîKIH'l iîltf
Ctf IPfTRIv VI.
I.K» SUCCESSEURS D\-EXKSII>BMK. AtittlPPA.
.Nous n'avons. sur tënésidème quo (tes clartés ittsullisuntes
aprèslui.» la nuit est
complète.Nous connaissons les noms do ses
successeurs immédiats, Zeuxijipe. Zeuxis et Antiochus- de Lao-
dicée. Oh a vu ci-dessus ff peu que bimis savoirs sur ces plii-
JosopJjes. Il est (trobabttt qu'ilseautiiiuèietilIWvpcd'Kiwsidt'mi;
dans le même esprit,et en suivant iaitiânte direction. Outre lés
lroi« grandes questiaus qu'il a traitas d'imo manière si f>rt|;buik\ 1
nous savonsoiir
le résumé do Wiotius(ju'.fJuésidème
avaitajijili-
<|uésa subtile dialectique à d'autres sujets, au mouvement, à la
(fénéralionet à la destruction. On j»eut conjecturer que ses argu-
ments furent repris, développés, affinésdo toute façon par
-«es
continuafeurs. (."est ainsi parh; travail curieux et patient du plu-
sieurs générations dopenseurs que
la critique sceptique /^rdant
de toutes ces reeberclies ••«qu'elle trouvait de meilleur, rejetant
le reste, prit cotte ampleur et acquitcette richesse, cette provi-
sion accablante d'argument* variés sur tous les sujets, quenous
luii-oyorts
autemps
de .SexfiisKnipiiiciis. Mais
nous ne savons
rien des ouvriers anonymesde ce lonjf travail il y a chezSovtus
ronirne un parti pris de silence à l'égard de ces obscurs philo-
sophes quiconcourent sans {'foire à l'œuvre commune: ri faut
renoncer à essayerde leur rendre justice. V.'vsl seulewienl quand
nous arriverons Il Sextus qu'ilsera pos*ible de jeter un coup
d'mil d'ensemble sur cette œuvre de longue patienceelle
émerge alors des ténèbres de l'histoire, à peu prisconnue on
voit les bancs de coraux, après de loirffs sièeles. «fltcurer à la
surface de l'océan.
1'. :t;i(i i-l suiv.
3W LIVRE Ut. – CHAPITREVIt'r k • > ».On seul
nuitj.pafjuit-espWys^ilïos^aécIwfjipBàroaWi. et.
ehosesingulière, ce n'est
pascelui d'un »lt«s elle de l'école
d'un de ceux (lui parlaient officiellement en son nom, et avaient
reçu directement l'héritage des niaflres.Agrippa n'est pas cité
dans la liste de Diogène: Sextus n'écrit pas son nom une fois.
Nous savons pourtant, à n'en pas douter, qu'il introduisit dans
la doctrine sceptique des vues nouvelle; qu'il fut l'auteur d'une
série detropes, et on verra que cette liste marque un véritable
progrès. C'est à cephilosophe hors cidre qu'il était réservé de
donner fa formule la plus nette et faplus décisive des arguments
sceptiques. Aussi mérite-t-il de nous arrêter.
I. Nous ne connaissons rien de fa vie (l'Agrippa, nous nu
pouvons même fixer avec certitudel'époque où il a vécu. Haas <lf
croitpouvoir affirmer qu'il enseigna à la fin du i" siècle après
J.-C. et ait commencement du second. Mais son calcul reposetout entier sur ce fait que Dio|jè»e, le seul auteur qui mentionne
te nomd'Ayrippa, avait emprunté à Favorhus tout ce
qu'if dit
des sceptiques. Il semble bien cependant que le compilateur ne
s'est pas borné a suivre Favorinus, nuit plus que Sextus, puisquesa liste des dix tropes diffère de celles de ces deux
philosophes.Ce qui est certain, c'est
qu'Agrippa fut assez célèbre, et eut
assez d'influence, pour qu'un sceptique, rtuntmi:Apelles, donnai
son nom à un de ses ouvrages-.
Haas, s'étonnantqu'un
telphilosophe n'ait pas été reconnu
comme chef del'école, imagine que la liste de Diogène, oti il
n'est pas mentionné, ne comprend que lessceptiques qui furent
en mène temps médecins. Mais une hypothèse que rien ne
justifie. Parmi lessceptiques qui furent médecins, Haas compte
Zeuxis; or, on a vu plus haut les raisonsqui contredisent cette
assertion. lin outre, où commencerait, dans cette liste, la série
dessceptiques médecins? .Enésidème, qui y ne parait t
pas avoir jamais cultivé la médecine. Il faut donc laisser Agrippa
Op.ai., j,, K5.•'
lliojî.. IX,.<><
LES SUCCESSEURS DVBNÉSIPÉMB.-– AfiRIPfc*. 301
maigre* soit méYtffi* en débets de ta liste dus étefs d« l'éeolc.
La chose »*cst d'ailleurs pas sans exemple dans laphilosophie
grecque f".
{[. Les cinq tropes, ta seule chose que nous connaissions de
ta doctrine (t'Agrippa,, ont éiê exposés par Diogënew et par
S<tus-\ ([ui tes attribue en générai aux nouveaux sceptiques,
sans nommer Agrippa. Mais comme fiiogène emploie l'expres-
sion. ot asso) AypiTcnav, et présente tes eintj raisons de douter
dans Je même ordre et presquedans les mêmes termes que
Sextus. on peut considérer comme certain qu'Agrippa en est
réuttcinent l'auteur.
Les cinq trolles sont le désaccord, te progrès à l'infini, tu r<
latron, FJivpolbèsp,le itiallèle. Bitterfw trouve que cette iîn«-
mdfatîoit manqued'urdre et de méthode. On peut se convaincre
répondant en lisant Sextus que les cinq tropes arrivent l'un
après l'autre,se renforcent et se complètent l'un l'autre, de ma-
nière à n« laisser aux dogmatisas qu'on pourchasse aucune
issue; ity
it entre eux une sorte d'enchaînementlogique,
et ils
correspondent à peu près aux diverses positions queles dogma-
tistes pouvaient occuper,<*ldont ils étaient successivement dv~
fogés.
t° Toute chose qui est en questionest sensible ou infelti-
;;il>lr; mais quelle qu'ctli! soit, il y a désaccord, soit entre les
philosophes, soit dans la vir> ordinaire, Les am estiment quo
{l> V'oirZctliT. o/J. ctl.,1. V, p. 7, 1. l,Vx|ilirnbiuii {iroposi-c par Hiticl (p. tïi ).
Miiïiwl la(|uclfp Agrippa attrait clé omis sur la liste «te t>io|[ène |»rcc ijH'il repn«-
sentait une .luth'dii'cclioii ilu so'jiliri^mc, est peu chin1, et au total moins satisfai-
santeque cellequelionsindiquonsici.
'» IX, 88.
"1 I, «6ft ttwif.
'* Itiilmrc de la jiliilotoplM ancienne, t. IV, p. «3o, not« (Irait. Tissol). If finit
ajouter linitofois que l'ordre ilaiis lequel Sextus les vminivre «J'alwnl (ot qui rat le
tr^mc chez Diojjiîne) ii'i-st pas> conforim» à celui qu'ilsttit lorsqu'il s'agit
«te les
oKpiiqucr.Ci-«leniierparait le plu*Itijjîqui!.Biojjùiifiexpliquelescinq Iroposil«i«s
l'nrrfn» suivant lequi'l it li«! a «'•iiiiimw* iii'uvcllc [irMin' qu'il ne pui»1 pas t«nl «
fait ;i«i wburs soi(rc«.
Mi LtVttK tti. – cii.u»rraK vi.
«ai! le st'Hsibh? «st vrai les autresfju«v ce privilège lùijtpartieBt
«ju'à i'iuk'tlijjtbte d'autres t'iiint t|ut* certaines choses sensibles
t't certaines chosesinlcHijfihk's «mt vraies, tlomaient décider
l'utri' (titttiN ces dissidences? 1
i* Si on m- décide rn-n, il estt-lair tju'il faudra suspendre
sonjugement.
Si ou décide cumulents'y pritmlnt-t-oit?
Pour r
prouvi'r unt1 elin.se seiisibif', on aura. r»'«»urs h mw ;wtre chost'
M-nsîWf. ou ou se servira d'une rhoso intcHijjibli' pour prouverfini' elio?!' iuk'lli'filjle. Maisces ii<T«ièi"i»sont etfes-mt.!nios lusoiii
de vuiiltnnation, vt H eu sera ainsi ut l'iiilini.
3" Wra-t-o». |>oiif ik'tfapjx-r au progivs à l'infini, (jue le
-i'iisîl>ff «•prouv." {»;» rtftti"Hi»iW.' ? Mais Ftut<tti(>it>t«>,cuitiment
sf|»rmivi.f-ii? Si eVsl |>ar i'iiilelliijikte. voilà encniv ic progrèsà t'iiiliiii si r.V.slpar h< si-nsilili.1, tjuï i;sl lui-nii'iitc firouiv par
riiili.'lli«;iW<.i.on est i>iiferitu; ilans un ceivle eVsl le dialfèlt1.
'(' Pour sortir clic rt'relo. ['adversaire dira-l-il(jtt'il prend
[wtiFa<i-<trdt.'>, et sans démonstration, certains
principes tjui
sen "iront à lit démuiislratiitn fiitiire? Mais[«•«céder ainsi,
c'est
(aire uni* li\ [jothèsi*. D'aliurd. si<ri>lui t|ui suppose e«-s principes••t les
prend pouraccordés,
est dignede foi, nous, disent les
i'»ptii|iii?s, i|ut supposeronset
prendrons pour accordés des
pt-ineipfs contraires, nous serons éf»al«>ment dignes de loi. f)'ait-
leurs. si <'r>(ju'on supposa est vrai, on le rend
suspect par cela
même iju'on lesuppose. Si
c'est l'auv. on construit sur un fon-
t|i»UGiif- ruirieia. Enfin, si unestippitsitimi
.suffit àprouver
(Hiei(|u«.' chose, il n'est pas besoin de 'supposer un principe pour
prouver laronsétpteiire: autant vaut admettre tout de suite la
l'onséipienri'i-omnu' vraie. Kt s'il est ridicule de
supposervrai
cef { ut
est enijiiestton.
il ne |Vsipas moins
fiesupposer vraie
une aulre proposition, plus générale, qui le contient.
•V Enfin tout est relatif Lu sensible est rotatif à Tètro<pii
Hiojfi.'iio c ( inf. i|iivl- ce Ipifi-: .iiilK-iïienl- t!s'agit |ioiic lui non tte la
rvblivik- •!•-« rlm-isp.ir nippot'l à
l'uprit. mai-: <!»• d'iir i-.?(atiïil«; tes unisil l'i!ur<l
'(•'< .|ilfi"s. l.;i >-<it)<*lll>it>u <r.:lfi*Mir>' t'-t [a lii'-im*.
LKS JÏHXKSSEHIS Jï* KNHSilJKME.– MMUPiM. AÙi\
mhiï, et rintfliliifiiittut fintei%f>iiwi car s'ils étaient cunttus tels-
iju'ils suiit en iMix-tuèWs, abstraction faite de l'être en inii ils
sontrt'présentés,
ils ne «foniierait'iti lieu à minute controverse.
Noncontant» «h1 cette rédttctittn tfes misons (tu douter à eimj
les .wt'jiliijiM's, nu k'Jiwignajfe de StMtlus" avaient essayé tle
simplifier emore. ot *!•• condenser leur argumentation eu uih>
formule plus concise, lleuv trops ntiraii'Ht su(B. Tout» chose,
tiistiient-iis, est cotuprise par.elt<iuôtue ou jiar auti'f; chose.
1)111? l'îi'iï »•• soil -ruuiprK parsoi-jm'inc. tùwl Ctt
ijhij pnmvtiiit
l»'s discussions<ju<
soutiennent lis do^mulistus;aussi bien sur
k'n rhosrw .<;«>it>if|>fi*.st|irt' sur les elmst's t«t«*H»giWes: ef on m»
petit mettre tin tei'iue à ta »|uwlle, car ni h' scnsilitc, ni Tin-
lelJij'iW»*, jMiistjiTifssiml l'un et Taulnr rré«i|«& (» tlyulis »»
(M'tni'til servir a fixer le jii[[i!itifnt. Rien non plus 11c peut titre
l'Bmpris par <tu(re chow* rar ei'tU' <tutn* eliosc i'l!«?-»»èiiM'»»
exigerait une autre. <( c'est leprogrès
à i'iniini.
CV(|<«,si»(j*!i(itatif)H lù-st iiu'apprimb^;un ue
peuf: <*vplîfjii«r
les deux tropes,et les justifier, <ju"à lu condition d'introduire
les précédent; sauf celui «le la relalkité. Mais t'est là un aryn-
inent capital ;mt|itei [esvrais sceutîtpjes tte devaient pas riitoii-
cer volontiers, cl «ite li;;t<1quil'omet est iiiconiplèJe.
Les tîiKj (ropes (l'A{jrî|i|ia, nous dit Sextns ne sont [>at-
destinés à evefure les dix fropes d'.Knésidème; ils servent settfi.
menl à introduire «le la variété dans les nr^uinents ipû mettent
:'i nu la vaiiid: du dogmatisme. Toutefuis, «m y" regardant *!<
I. 17S. Sa&el (up. rit., |j- •Jt'i'j siijijkis<' i|tiir l'aiilcnr (f>: «?ll« iso»»»«-if»'
ih'iIiii lient est A;;ri|>pu; mais ti li'ii|i])oi| irtiniHc piwiw [«tsifin.' û r.i|j|)ui (i>! ri'll-
asM'rtioit. I.ngiijiremtnt. il ri ;i |i;ti non |iln* il" raisins |><mr adiiii'ttie qui- l'aiik'iir
4".s ciin| tro(»sle» a K'cliiil-i à «t-'iH. Il ust plus naturel dt> ppiisitr qui- cette n-iiuc-
lioii 05I t'iiimi' il'im M-»|ilii|iii> till>'i'i*iir. |icnl-«1tr(' cimtmel« sii|i|io«i'iil Rillci' i"iliun l~:ol f"H'U\n' d'uu ~1"'I,tillll" ull¡;idU'. IICllt-f~h'1~, fUimno f(~ suppo,¡onl mUet, pt
2-H.T.île .Mi!im<M.(V.Xcltit-, y. rit., t. V,p. :W,4).'•
I, 177. Après Afji ip|i.i |w cinq Irnfs furent i'immiiri>;ni"iil cnifiloy»"'
|>ar U'S i«cf.iilii|tt'>s( et 011 k'$ vi-rru ivjiitt'iiiliti kuii.^ tiien dos funn>s divoist^s «luis la
tnitgjtii? ai];iiiiiciitaliou du St;\Uis. Onles ivlnuive inissi «Unis le 1 ôsiimt! de l)i(i;;i'ii<'
• IX. i|O f( m/ It f»n( iiilim'llrtniï'v Hii*i, |>. *Ï7, qm- <l;in>> ei> |kn«i< 4pn-
pow i' oiiroi,f.> iIimiikt mot tlr>if;nr, ii'tn !<•* wptii|iiM <'ii ;;éin>i;il, mais U's
rtï-ittiot i)nn\ il a i-l>; <fin-4|i«n <»»["•« (il»« twiul.
304 uvm ni – at&HTM n.
près, il est aisé de voit* qu'ils ne sont pas, comme Si'vtns sciwbic
lu dire, une simplevariante de cens d'/Knésidème.
De l'ancienne liste, deux seulement sont conserves, celui du
désaccord et celui de ta relativité. A vrai dire, on peut consi-
dérer les littit autres cominrcompris
et résumes sous le nom de
relativité ils n'expriment en effet que les différentes relationsdes choses particulières avec l'esprit. Tout ce qu'il y a d'essentiel
dans l'ancienne liste se retrouve donc dans la nouvelle. Mats les
trois autres présentent un caractère touf différent ils portent
uniquement sur lit forme de la connaissance, tandis que les pré-
eédents sont plutôt relatifs a la.niatière. Nous dirions en langage
moderne que les deux anciens sont suggérés purla théorie de lit
connaissance, tes autres, pur (a U>giijue cm la dialectique: ils
correspondent aux* conditions tte tutttidéjnonstnttion.
En outre, les dix troues, sauf le dernier, portaient tous, ott
l'a vu, sur ta connaissance sensible. Ceux-ci, au contraire, atta-
quentà la fois les sens et l'intelligence Sextus a soin de te faire
remarquer. «»t consacra à charnu de ces deux pointsune dé-
monstration particulier!> r
III. Les dixtropes d'/Knésidùnie tendaient à prouver que
la
certitude n'existe pas en fait les cinq tropes d' Agrippa veulent
établir qu'il ne saurait logiquement y avoir d« certitude". Par
là, »n peut mesurer la supériorité des derniers sur lespre-
miers.
liirzel('iji-cit. p. 1 31) remarqueIrv? judicieusementque, à partir J'A^Tipjia,le scepticismeitifTôrcen un point imporlantde ct>([n'avaientenseigné lespremierspyrrhoniens, Suivant leur point '!<• vue en effet, la iiwiierclie (Çitthots) n'a [tasen-
mre pjussi,maisellepeut rcussir laquestion resteouverte. tes Iropcsd'Aj;ri|i|Mla condamnent absolument et sans réserves. Nmn sommes ici bien ptus voisin» du
point 'le vue îles académiciens (|im de relut ilii pyrrlionisme, et l'inlliieuce <1<?la
nouvelle Académie sur le nouveau scepticisme se manifeste fort rlnireinenl. Il faut
ajouta' pourtant <|ti<' Sextus prétend rester l'uiih à l'idée primitive il jjarde te nom
dt; ïnti)T«<is(P. I, u). Comment il conciliait cette prétention avec l'approbation
qu'il itonnp suttropM il'Agripp*, c'est ce qu'il n'wt pas facile de romprendre. On
pi'iit rcmari|ui>r toulcliiis que re ihiiii d« ïntimmî iyayv u'apparall qu'une fuis
dans toute sim <i'iivif (/ ~t ).
LES St'GCRSSEtJltS ItM&i&ffrëMIC. – AtiBIPPA. 303
En Olllic. ce n'est iiliisi fn ilnnnnî<i<;nn<*(> «ciwtfili. l'
30
En outre, ce nW; plus la connaissance sensible,Wnnnhn
communequ'ils mettent on
suspicion c'est la science même ou
le raisonnement.
On peut dire aussi qu'en un sens, les tropes d'Agrtppa IVin-
portent mène sur lesarguments d'/tindsidème, relatifs aux
causes et aux signes. Si générales que soient tes conceptions
critiquées par /Endsidène, elles ont encore un contenu déter-
miné; les arguments «l'Agrippa atteignent, non seulement telle
ott telleproposition, mois toute
proposition quelle qu'elle sait. Ë
non seulement certaines vérités, mais toute vérité, envisagéedans les conditions les
plus immédiates et lesplus essentielles de
fa connaissance. Si on veut mesurer le chemin parcouru d'/Kné-
sidème àAgrippa, il suffit de comparer les arguments des deux
philosophes sur In vérité. /Knésidème discute taquestion en
dialecticien et e» métaphysicien. Agrippa en logicien. C'est le
concept«le la vérité, pris en lui-môme, qu'il trouve en dé-
faut ce n'estpas comme son
prédécesseur,en le
rapprochantd'autres concepts, et en cherchant si le vrai est sensible oit in-
telligible, qu'il parvient ù en récuser la valeur. Mémo les huit
tropes contreJ'étiologic présentent un autre caractère
que
ceuxd'/lgripp». Ils sont ilirif>és contée une manière détermi-
née du raisonner, contre l'application de l'idée de causalité
les tropes d'.Vgrippa s'attaquent tout raisonnement quel qu'ilsoit.
C'est hien àAgrippa qu'il font faire honneur de ta découverte
de ces tropes. Sans doute, les diverses- manières de raisonner
qu'il a réunies avaient tUp 6W<employées avant lui cela est
incontestablepour
teIropedu désaccord, pour celui de la rela-
tion peut-être Timonavait-il déjà invoqué l'argument de l'hy-
pothèse. Et il serait invraisemblablequ'il en fût autrement. Mais
•'< Nous ne pouvons !mii«Tir>; t» l'opinion «h- llintvl (|>. |3<> ) qui coihmK-i-o le*
<:mi{ Impes comiw detliaés à mnpimr les Imit teapm (t'.CntWdvmc amlce les
.iiiws. l.c paSMjjir deSeilns(/J, iK.'i) signifie ijup les ciitif lro|<-« |icuvciil rem-
placer tes Imit, t-<f ([tii va de soi ils |wnrcnt même, en i-.iison ili> leur oiraclèiv
gi'-iiiVal et lin uii'l n'inplan't' loin Icmaiilivs. Mais li"j imil tmps m> s,-mr;n<>nl rpm-
300 LIVRE lli. – UtAl'mUÏ VI.>>v\> I.IVUIV lit. tilt.11'1 IIIIV VI.l.
Agrippa u paraH é"lre hpremitïr qui
ait vit renchttfnemitnt de ces
tropes, et quiou ait
aperçu I» portée abstraite-, il est lepremier
qui en ait fait un système C'est à ce titre qu'il en est l'inventeur.
Les cinq tropes peuvent dire considérés comme ta l'annule I»
plus radicale d k plus précise qu'oit ait jamais donnée ctti scepti-cisme. En un sens, encore aujourd'hui ils sont irrésistibles.
Quiconque accepte la discussion sur lesprincipes, quiconque ne
les déclarepas supérieurs au raisonnement et connus
par une.
immédiateintuition de P esprit
admis par un acte du foi primi-
tif, dont ott n'a pas à rendre eoinptu. et qu'on n'a pas besoin de
justifier, ne saurait échopperà cette subtile
dialectique. Encore,
l'effort par lequel le dogmatisme «te tous lestemps
se soustrait
à l'étreinte élu scepticisme a-t-il été prévu par Agrippac'est ce
qu'il appelle l'hypothèse, l'acte de foi par lequel on poseles
principes ranime vrais, Il a seulement tort de tf déclarer arbi-
traire. te n'est pas arbitraire f[»'il faut dire^maisjibrj;. 0n est
libre sans doute de refuser soit adhésion aux véritésprimor-
diales voilà ce qu'Agrippa a bien vu. Mais on est fibre aussi de
ta leur accorder. Or. entre ceuxijui refusent <'ett« adhésion et
cettï qui ta donnent, la balance n'est pas égale, comme le croit
lesceptique la nature nous incline d'un côté, celui de ta vé-
rite, et le fait qu'on peut ne pas user de ta liberté, ou en abu-
ser, neprouve rien contre l'usage légitime qu'on
en peut faire.
Pourtant, si on fait. ainsi usage de sa liberté (et c'est ceque le
dogmatisme atoujours fait. ce
qu'il doit faire j, il faut avouer
qu'on donne en un sens raison ait sceptique. On convient que ta
rajsonjne peut pas tout justifier, qu'elle est impjùssaniej réduite
à ses seules forces, a produire tous ses titres, qu'il faut cher-
cher ailleurs le principe de ta vérité et de la science.u_u_
En résumé, le scepticisme ;• parcouru trois étapes. Avec l'yr-
plir le niètiieodice, et les tlêtii libte" W", ilettemf-lit(listill(.Ie.(:elleptir te mi>iin.- office; et les ilwu listes il.-m<îini-ul irès nettement distitiilos. Colle
iV.KniJsiilèiin; i'sl plutôt une liste ciV-rcetirs nu tte sophismes qtf une série il'nrjjn-
ineiils •iicliaini-s erilri; euï et a|iplirahles .i Imi* les ras possibles.
VaCorp i |). 3ot} ne ïtmi^ |»ar;itt |i,i^ reuiliv juvlift; à A|çrtpj»a.
LES SiJCCKSSKtiliS «'.«NÉSIDÈME. ..WlitPPA. Ml
rho», il cuiitcsU1 1» légitimité tic lu eeiHiaissaitee «lisible, et d»
i'o|)i»ioti«'oiBiBiitit;. Avet: /Enésidème il réVus<»I» science, Avec
Agrippn» s'tîlevniit à un plus haut degré (l'abstraction, il déclare
impossible*la. vérité quelle qu'elle soit. C'est k> dei'iiter mot du
$fu|)ttcisine diaiectiqui». Les successeurs d'/tgri{»j»a ru* pourront
que répéter, souvent en les alïailttissunt ses arguments. Les
sce|)tif|iius modernes les iTpraifuirunl aussi, sans y rien ajouter
d'essentiel.
Dans l'avi'iMr, lo snepticisme conservera soigneusement les
thèses soutenuespar
ses fondateurs, il n'y a peut-iHre pas dans
l'histoire- d'autre exempta d'une <[«elrin« quise soit développée
avec une pareille continuité, et soit demeurée aussi fidèle à elte-
mé*me. A ebnque «Hape, on y njitufn quelque chose, mais sans
rien perdre de ceque
les aurions ont acquis. S'il n'est pas de
philosophie qui les arguments avec plusde
profusion,
il n'en estpus
non plus qui se soit montrée plus avare des ri-
chessesacquises. Sous la l'orme nouvelle que
nous allons lui
voir prendre, nous retrouverons tous les arguments d'/fênésidème
etd'Agrippa;
mats nn autre élément s'y ajoutera l'alliance
du scepticismeavec la médecine leur donnera une signification
et une physionomie nouvelles.
LIVRE IV.
LE SCEPTICISME EMPIRIQUE.
CHAPITRE PREMIER.
LES «BDEC1X8 SCEPTIQUES,- MÈXODOfBCT SEXWS BMPtfUetlS.
Lescepticisme empirique
ne diffère pas essentiellement du
scepticisme dialectique; il se sert des omîmes arguments et
adopteles mêmes formules ses représentants
sont les fidèles
disciples d'.Enésidèroi.1 et d'Agrippa. Us trouvent sans doute de
nouveau* arguments, mais ces arguments w modifientpas
le
fond de la doctrine ils sont. comme des variations infiniment
diversifiées sur un thème déjà connu. Le principal mérite des
sceptiques de Ja dernière période est d'avoir systématisé et coor-
donné les arguments de leurs devanciers. Rassembler ces été-
ments épars, en former un tout qui. par sa consistance, par
l'union étroite des parties, parJa puissance de synthèse qu'il
suppose,soit l'égal des systèmes dogmatiques
les plus célèbres,
et pourtant conclue contre tout dogmatisme telle paraitavoir
été leur ambition.
Toutefois, si, par le fond de leurs idées, les sceptiques empi-
riques ne se distinguent pas nettement de leurs prédécesseurs,
l'esprit dont ils sont animés, le butqu'ils poursuivent, quelques-
unes des conclusions auxquellesils sont conduits. leur assignent,
selon nous, une placeà
part.C'est
pourquoi.contrairement à
laplupart
des historiens, nous avons distingué le scepticisme
empirique et le scepticisme dialectique.
Enésidème et ses successeurs immédiats n'étaient, croyons-
310 I.IVRK IV. – CHAt'I'i'RB I..r r.r r.u "1'. cnrr.ac a r rsrs r.
nous que des dudcetieiens* ilspoursuivaient
iniu finpurement
négative et ne songeaient qu'à renverser le dogmatisme. Lit
M'ietiee supprimée, ifs m» mettaient rien à saplace,
et se conten-
taient, dans in viepratiqua, d'une routine réfjtée sur l'opinion
commune. Les sceptiques «te la dernière période sont îles mé-
decins s'ils veulent aussi, et de lu môme manière, détruire le
dogmatisme (*« tu philosophie, c'est pour tu remplacer par fart,
l'undt* sur l'observation par lu médet-im. c'est-à-direpr
une
sorte de science.- Ils sont |Hirentetit et ouvertement plfénomé-
tristes, mais ils ont une méthode et en fout même lit théorie.
lis combattent te dogmatisme ,comfne de nos jours les positivistes
combattent lu métaphysique: laphilosophie
ilsopposent l'ex-
périence ott l'observation (rypno-is), comme aujourd'hui on
oppose la science positive a tamétaphysique.
par suite, il y a lieu de distinguer dans leur doctrine deux
parties l'une négative ou destructive, l'autre positiveou con-
strurtive. et cette dernière n\»st pas ta moins curieuse ni la
moins originale. On ne trouve rien de pareil chez les sceptiques
de ta période précédente. Ladialectique
n'estplus
cultivée ou
aimée pour etle-méine. elle est mise au service de l'empirisme
elle est un instrument qu'on emploie,mais
qu'on rejette après
s'en être servi, et qu'au fond oh méprise.
Nullepart ailleurs, si ce n'est peut être pendant
certaines
périodes pou connues de lïpieurisme. on n'a vu éclater dans
l'antiquité le débat<{iii
divise aujourd'hui lesesprits
entre la
science positive et lu métaphysique. A ce titre, l'histoire du
scepticisme empiriqueest
pour nous d'un haut intérêt. Les
mêmes questions qui nous passionnent aujourd'hui s'y retrou-
vent. présentées en des ternies différents et vues sous un autre
angle.
Avant d'exposer ta doctrine sceptique sous In forme définitive
quelui a donnée Sextus Kmpiricus, dont les ouvrages pour-
raient titreappelés la
tourne de tout le scepticisme,nous devons
indiquer ce qu'il nous est possible du savoir des philosophesde
retle dernièrepériode.
MKXMUTKet sexths empihicus. anf
t. Méaottaltî, de Nicum&lie, est If premier swptifjue (jai
ikmi& soit donné, ett lutines formels Ji, comme un médecin em-
pirique.Son contemporain, qui avilit été avec lui disciple d'An-
liocbus, Tliéodos >%Kde Laodicée, fut aussi certainement un
médecin empirique '31. (l'est à partir de ces deux philosophes
qu'est définitivement, réalisée l'alliance du scepticisme et de la
médecine empirique.
H est bien difficile «le fixer la date de ces deux contemporains.
Sprengel f indique pot» \lénodote 81 après S. Al., et pour
Théodas, 117; Ditreinbergîr' pourtous les deux, jo- 19a. Mais
il j Il certairtement non erreur daas le raleiit «IfeSj*r»*«(»«l Mé-
nodnte doit, en eiïet, avoir survécu à Théodas, j)tiist|uii,fl«n>
la liste de Diog&itt?,(jui; nous avons si .souvent citée, nous voyous
tjue c'est li Ménodote fjue succéda Hécodofe. La date indiquée
par Darcmborg ne semble pasexacte non
plus,si l'on son;;e que
Sextus (t 80-3 10 ) «'est sé|iar< de nos deux philosophe» <{tie par
une génération. Haas101, en se servant rl'un livre de Galîcn,
calcule qu'ilsont di\ vivre vers i.r>o aj>rès J.-C. Cette solution
setuble bien la[ilits probable.
Nous savons peu «le chose sur Tliéodas. Il avait composédeux
ouvrages*71: Eiaayayrf et KeÇdteta, assez importants pour que
Galien ait écrit contre eux un commentaire isK Théodas paraît
s'être occupé surtout des divisions de ta médecine: il distinguait1'
!)»(> IX, 1 16- Pseudo-Gale».. /««/ '1, vol. XIV, |i. fi8.'i Tiit cfjscipixiis
•opoéffînow. |ieÔ' oit MwdJoTO* xii %êîios ai xù ÎKptPîi ixpitwav tirni'.
Cf. ScxL. 1,39a (avec la corrocltaiulft Falirioiu») ytwiitrw «iî Xivtr-
alinfoi', ovxm yàp p&ioîei totmif tjpof'JÎnifai' ivs alitteaf (sr. «kcsîooIs i.
!')Appelé
BtmSïf par Dioip'w», deoitt par Galii>n (On Mr. prnpr., IX.
vol. XIX. [t. 'M\. Qcvfe par Suidas lart. BeoUni'n). i.
»' (ial.. Thtr.mtA., Il, vu, vol. X, p. 1/19.
l! l'enaeli cher fn^nmlitchm GtwJiirhlf rfci- Arzmikmute [>. O.">8 (llnllc,
Gcbrauer, 1H00).
llul. déficience' médicale*, p. i fin. Pari*. HicbeMe. t8jo.
M:(Jjfi. <i(., p. 8. Zcller (IV, p. 'i83, 11. > ) pl.10! Ménmtole «lan* la Jemienw!
partie d» ti* siMp après J.-(;.
">Gai.. /Aî/itr. pmyn- IX. col. XIV,|>. ÎW.t:r.Silida«. lie. rit."i ft>i.l.
(ialcit., tle •Mlijiftioatmat .ininrini |>. u, |-tlii. limini'l. Bimn. iH-;i.
•mû mvrb ri'. – triiAPrrttK f.
trois parties tigmtiva, euntlim, mmitiva. Il ajoutait que la cou»
itaissiince médicale s'obtient par l'observation, l'histoire, le
jwssttj'o du semblable au semblable c'est la doctrine constante
de l'empirisme: nous It retrouverons plus loin, uvec les correc-
tions que Thôodas et surtout, Ménodole y ont apportées. Théodas
parait iMre le premier M> (|ui susuit servi du mat observation
(Wjmkt») pour désigner eu qu'on appelait jtjs«|u*u lui atho^ta.
Il semble aussiqu'il
ait ou à e»ur demontrer® que
lesetnui-
rifjui'Sfont usage de fa raison, et ne se bornent
pasà amasser
machinalement des observations.
Méiiodote avait ccritphisionrs ouvrages; nous savons: seu-
leitu'iitijiic
l'un d'eux, compost; de onze livres, était dédié &
Sévérus II avait aussi réfutéAsetéptade
;1' avecbeaucoup de
vigueur, à ce qu'il «iiiblc. et mène de passion, car il se départitde la réserve
sceptique, et déclara <jue tes théories de son adver-
saire étaient certaiiieutr.'nt fausses'5*. Peut-être avait-il aussi
écrit un ouvrage pour recommander l'étude des arts et des
sciences ebose qui surprendrait clieg un sceptique, si on ne
savait que les sceptiques avaient une manière de définir l'art ou
ta science purement empirique, qu'ils conciliaient oucroyaient
concilier avec leurs négations' Enfin, il nous paraît extrême-
ment probable que Galien avait sous les yeux un livre de Méno-
dote *s nous ne saurions dire lequel et qu'il le suivait de très
près, lorsqu'il composa le De subfiguralioiw empirica.
Méiiodote a été un écrivain assez considérable pour que Ga-
lien ait écrit contre lui deux livres '*J. fl le prendà
partieavec
Oiifen.t De tubfgavaûaue emyinat, 3g.
1)1 /W.,4o,G6.
lialen.. De tibr. ;«»/«• IX, vol.XIX,p. 38.(l' Oaleu., De uat. foc., t, «iv, vol. Il, p. 5a Kaitei xà ftiv KoKhiwiSoti
Miï~e~oTff o ètta=rFrxâs d(.'vrtrmt èttlé)
Oalc»., Subjijj., j>. 64.
A i'ii juger par te titra di! l'oiivr.iije de Galien {De tibr. jimpr., toc. cil.)
l'ci/iivov tupa^p^vj'oO tov MnvofÔTOv apotpmlixiif ïéyoi est là; si-fvîi.°*
Voy. ri-dpMUii*, ch. m.
Voy. ri-<ifî>soust p. lij t.
De libr. irufir. Iw. cil.
MÉNOUQTÊET SKXÏUSEMPiBIGIS. 313
vivueitd et paraft m&neavoir pour fui peu d'estime {ll>Peut-être
no faut-ii pas s'en rapporter trop fiteileiueni au k!nu%nu(je d'un
adversaire. Mais, à en croire Galien. Ménodote aurait été un
médecin peu recommandable, ne voyant dans la médecine qu'un
moyen d'arriver à la richesse ou à la gloire". Cn(lui parait
certain » c'est qu'ilmalmenait fort ses adversaires il avait tau-
jours, dit Galien < l'insulte ù la bouche, aboyant comme un
chien ou injuriant comme un bouffon. Ces procédés rappellent
assez bien la manière de Timon.
Quels qu'atout été les défauts personnelstte Ménodole, ii a
été un puissant esprit; personne,dans
l'antiquité, n'aeu un
sentiment plus vif de ce quedevait être la méthode des sciences
(le la nature. Nous montrerons plus loin1*' que c'est lui quia
a donné il la méthode empirique une précision «t une rigueur
inconnues jusqu'à lui..Ménodote, si nous ne nous trompons, a
lepremier étroitement
uni f empirismeet le scepticisme
et donné
h cette dernière doctrine un sens et une portée toute nouvelle.
A Ménodote succéda Hérodote de Tarse. Fabrkius !5! et
2e lier 'o; croient que cet Hérodote est ie médecin du même nom
dont Galien !7> parleà
plusieurs repriseset (lui vécut il Borne ;s'.
Mais Diogène ne nous dit pas qu'Hérodotele sceptique
ait été
médecin. S'il l'a été, ilappartenait
non à la secte empirique,
niais à l'école pneumatique, ce quia un certain intérêt, parce
qu'Hérodote a été le inuttre de Sextus Empirtcus. Le sceptique
!»Il l'appelle(De <•<».«cf., IX, vol.XI, p. 277) muiti HmoSotet.
Degtm.tiipfocr.et Maton., IX, vol. V, p. -fit.
Subfig. cmp., (i;i «Metiodoitis, qui nuiiquaui rfefccit ait injuria et bomo-
locbiaadvenus médian vot manifestelatrans rient canir, vetMmplictterinjiHianssicul lioino qui ect in platea, aut vitupérai» tiomotocltire dirais eus drimyiiioros,
et (Irimylconcj,et (l.itii-otos.«f imillisaliis talibusiiominibui nuncii|>ai»tlagma-licosqui ante ipsimiiin'dicuset philosophes.
'« Cli. m.W
llibl<,ll>.gnec.,tU.
'"l Op. cil. p. 6.
"» Gateii., vol.XIII, 788, 601; XI, Sug, 'i3o, 44a.
<* Galcn.,ïot. VIH.îSj.
(w (jal., vot. XI, p. 43». Voir, sur ce point, Pappeuiieitii Ubeimvrltàltmue
Sert. Kmp,, p. i,'>. 3<>. Berlin. 187a.
314 UVRIv IV. – CHAPITRE I.
empirique avait-»! reçu les leçons dW dogmatique ?'Petrt«étra
ya-t-ii ici une nouvelle confusion de noms. Peul-eire aussi
Hérodote n-t-il fait aceidentelfeiuent i'tUoge du pneuniatisme.
comme on verra plus tard que Sextus {ui*tn<hue a «lissympathie*
pour la secte des inétiioclrqttos.
Tout ce que nous savons dv cephilosophe, c'est qu'il avait
pris plaisir, suivant le procédé habituel de»sceptiques
à à montrer
les contradictions des sens. Ainsi il soutenaitque
tes substanees
lesplus
douces citmmfe les plus anièrus ont te mente pouvoir
iistrinyt'Ht ;i H 'vécut vraisemblablement vers t5o-t8o après=
I.-C.
Nous avons sur son successeur. Sextushntpiricus.
«u du
moins sur sa doctrine, un peu plus de renseignements. Il faut|
étudier îleprès
«_personnage, l'un des pins fjraiufc noms de i
l'école sceptique.
II. iiii l)ia|<r;i|)lii(> tiii Sextus Kinpirtcus, comtne celle dMsnë-
sidème ('td'Agrippa, t'st fort peu connue, ("est il peine si notts
|mtiv«tnsKxer avec
(j!«>lqne précisionIn date de sa vie. U est cité
par t)io|;ène -1.mais la date de
Diogèneest aussi
sujetteà cou-
(
Iroverse.et jiiirlois un se sert. tic cette mention de Sextus [tour la odéterminer. Pourtant on s'accorde assez
généralement
a le
placer
vers le milieu du ni' siècle après S.-{' et connut* Diojjène cite.
outre Si'xtus. sun successeur Satiiniinus. il est clair que notre
philosophe l'a précédé au moins d'une génération. On pourrait
èlte tenté de cr«ire,avec Brandis i3;.qoeSexhis
vivait au conuiten-
ceinent fin in" siècle; maisil nous dit lui-nié'meqHe.de son temps,
les stoïciens étaient les principaux adversaires des sceptiques'1';
or. au in'siècle, après
les Antonins. l'école stoïcienne était en
r"(ial.. Ihumpi.
mcilu:ump. et fat., l. ,'î'j. vol.
p. /ifts. hh'.i.
IX. «7- itii.
<3" (ienhirhle iti-rEnlirnkflililj; tli'r gnerhitilun l>h%Lu<'i>hu'
M* 11. p. ao<)
(llcrliii, lli'lliu'r. (SOI). ).
fl>t, (<.ri Ksii toit \aii<s'% ilfiir îii'inîofnvptai iw Jo^fiinxo» tmt ixo
n~~ XtMf.
WÉXOItOTK ET SKXTUSËMPUUCKS. 3t5 J
ntiiîii.. itiSi>:iiti*iii'it • Il tiai-iiil iluiir nii'il fnnl faîd* riMiiMifei' tu
pleinedé"ca«We Vf. il parait d«»e cju'it
faut faire remonter la
date de Sextus à mit» époqueantérieure il serait alors le eon-
teroporain «Je Galien. (jui mourut v»ts fan aoo.
Lm* cireonsfanee plaideen faveur de cette hypothèse c'est
qu'il était, au témoignage de Diogène a» disciple d'Hérodote,
dont Gulit'ii parle souvent: it est vrai que c'esl, comme l'a
remarquéHaas dans k>»ouvrages qu'il composa
vers la 6n de
sa vie. Mais une autre difficulté se présente comment se faif-U.
si Sextus aété le "Contemporain
de Galieit.que
ce dernier tte
fait jamais nommé? II cite pourtantun grand nombre de mé-
decins de son temps, et attaque surtout les empiriques i or. il
semble queSextus ait
appartenu,au moins pendant quelque
temps, a culte école et on nous dit mêmequ'il
en fut un des
principaux représentants*.
On peut toutefoi» diminuer cette difficulté en admettant, avec
Pappenlieini que Sevlu* n'a pas <>» comme médecin tout
l'éclat quelui attribue le pseudo-Galien;
aussi bien le livre qu'il
arait écrit sur la médecine avait fait peude bruit, puisqu'il
fut
perdu de bonne heure, et nf nous est connu que par la mention
qu'il en fait lui-mênn1" Il est possibleenfin qu'il ne soit devenu
«Itef d'école qu'aprèsla publication
desprincipaux
écrits de
Galion. On peut donc, malgréla difficulté signahV. fixer la date
tïtfee philosophe au dernier quart du second siècle, entre iSo
et aoo ou peut-être ato aprèsl.-C.
•>' Rittcr. PkiU. auc. tnà. Ti«ot. t. IV. |i. hjÎ. Cf. Z«ltcr. I. V. p. S,
1 IX. i»t>.
<i! Op. CI»., |>. -K.
''' Voy. ci-ii^ssoiis. p. 817-
Pscmltvtîalen.. lt«g., vol. XIV. 51. 68S Mirruijotaf lit Sifrcf si xn'i
aïpiSi'f èxpir.ne jv'i- i«. tri' êar«c«iir lipfsir. 1.
UbtnsvrrluUlmfff de! Stx:. tuif.. |i.S iBcflin, i^r>.
VtlV. CÎ*it^\y^tt> p. 3-Ji>.
' Los hi»l>wii<ns insistent, pour ùwr ia ilalc di* Soslns. «ir ce fait ijii'il nommi>
le stmnon Ba<iM<« (M.. VIII. -mS'. «jn'-w ivjante gônfralcmenl comme tm dc<
iiiailr.it tle \far>lnn'l>1. Mais- Wt^r 3 in:>ntr>; .jo'il >agit pr-ttl -<*fr*»i i .î'un autremail" tie \(al'l-' \111'1". "ai, 7."¡¡,'r a us.mU,· 'Inïl-i¡it P1-l11-,I(I'" i,i ,1'1111 3nfr"
Basili.t«. rom|iri-- H»n« la ti*1 <!<•<vin; <tAi<-inn< 'l»nl sen li\i;;m.'nl >(.• Dinp-Bc
nvi<mim>nt piihlio par \a!. ll(W- llrrmn. I. :i-n. lîcrlin. j •>»>(• nnn« l»il
«6 UVRE IV. tmAHTlÉlvI.
JI est eer itttn que Sextas était un Grec*'1, «tais nousne 'pouvons
savoir ni tià il était né, ni où il «eiisi'ipé. Divers
passages tfe
ses écrits nousindiquent qu'il n'était ni d'Athènes1*1 ni
i
d'Atcxuadriu i connaissaitpourtant Athènes '«, peut-être Alexan-
drie W, et onpeut conjecturer qu'il a
passé ait moinsquelquc
ttt
temps ù Koni» 5;. Tout ce que nous savons de certain, c'est qu'il tfut chef du l'école
sceptique Metqu'il enseigna «t mène endroit
où son maître avait enseigné(7!.
Le surnomli'Euipiricus, sous lequel il est désigné déjà (»ar
Diogène, semble-indiquer qu'il était médecin de la secte
empi-
rique. Lui-même nous ditqu'il était médecin'5', et un autre
témoignage fortprécis-' Je range aussi parmi les
empiriques.Enfin nous savons par lui-mâne110' qu'il avait écrit un ou
peut-ôtre deux ouvrages de médecin». <
D'aulre part. cependant un passage desHypotypoml11' indique
qu'if inclinaitpfufùl vers l'école
méthodique. Ilreproche à l'em-
pirisme d'affirmerdogmatiquement que les choses invisibles sont
connaître les noms. Au surplus, quand il serait acquis par là que Sextus est postérieurà Marc-Auiëfe,ce fait ne jetterait pasuik>jjraijif»hinmw sur {'époqueprécisedeta vi«. j
•"M., 1. iS6; l' l, lia; P., III, un, ail. Comme ra montre Pabricius {
{P. mi.,p. XIX, «lit..(.. i8'u), c'est par erreur que Suidas (arl. Esfro*) l'appelle tLybien. le mime Suidas te confond aussi avec Seilu» de Cliérouéc, neveu de
Pfutarqiw (Fabi-ic, ibiii.). '•:
W .1/ I. •jW.W «., VIII, i'.5.(l!
.11.,t. ai-'f il,, X, ta. On ne peut rien concluredeces telles, car Sextusprentl le nom d'Alexandrie pur exemple, à cause de sa célébrité, comme ailleurs
(iforf. %) if prendpour cxem|>teun homme habitant Rhodes.w II connaît tes lois romaines (P., t%, t5a, i5C), ceqtti, à vrai dire. ne
prouve pas grand'eboso. Comme son nwilre Hérodoto avait été un célèbre médi-cinà Rome (Pseud.-Gal.. De puU., IV, m, vol. VIII. p. 75i ), peut-être Sextus avait-il 1
aussi njsidc dan» cette ville. r
'> Diog.. Inc. cil. '(•" y», m, no.
"> M, I, :l6o. l'»*
1'scud.Oalen., hag., !i, vol. XIV. «. 683."»>Jf.,¥lt. «os; Jtf., l.6i.
I, ;i.1(> l'i ianupia ixtbm aeei TtT* àx»r«AmJi« têv «Jif/.wi» SnSiSttioij xi
«. -M., VIII. 3»;.
MÉNODOTR KT SEXTUS EMPHlfCUS. 317
tricoinprélwiisiWeK.tes
inéf|iudiquf.vsen s'attachant
uniquementaux phénoBièBcs, sans se
préoccuper des choses, cachées, soit
pour les alîïîmer, soit pour lesjiior, s'accordent mieux" avec les
sceptiques.
Il est vrai que, dans un autre passage (t>, il semble se contre-
dire en ullirmunt que sceptiques etempiriques sont d'accord iiour
déclarerque
les choses cachées sont incompréhensibles.Pour résoudre ces difficultés, il n'est pas nécessaire de sup-
poser, avec Pappeulieira®, qu'il n'y a, dans te second texte de
Sextus, qu'une expression maladroite qui trahit sapensée.
Sextus a fort bien pu, sur unpoint (lui n'intéresse après tout
que la théorie de la connaissance, modifier les assertions des
empiriques, et y apporter plus de réserves, sans cesser pour cela
d'êtreempirique m. Nous trouverons dans l'exposition de la
doctrinetrop
depreuves de la fidélité de Sextus à
{'empirisme
pour pouvoir douterqu'il ait bien mérité son surnom. Il convient
d'ailleurs deremarquer'*1 que, dans le second texte, il dit sim-
plement que, d'aprèsles
empiriques et les sceptiques, les choses
cachées lie sont pas comprises (pu xarahz(£éve<j6at). C'est un
simple fait qu'il constate, ce n'est pas une atlirmatton dogma-
tique qu'il soutient. Enlin, il est encore possible, comme l'a
pensé Philippson (ii, qu'il se soit exprimé comme il le fait dans
H. fiaÙ. simplement parw* im'il reproduisait un passage d'un
écrivain antérieur.
Nouspossédons trois ouvrages de Sextus les Uufiftoivetot ùita-
ivnéom et, réunis à uneépoque récente sous le titre de ïipot
(laOnfUTiHom. deux ouvrages, dirigés l'an contre les sciences en
général. !`autreeon_tre,tesyltïfost3r~iyes<i~r,r~t.~tit~ucs. Ils formentgénéral. raulracoD^Je^lijjo^j^sjip^^jijpcs. Ils forment
onze livres. mais vraisemblablement il n'y en avait que dix à
'' M., VIII ,191 Oi fin" Çum> nvti (ta iiit/.i) (iii «««iwtfiSaVajflin éaisep ot
àno Tiîs ifiactphs ùrpoi xii ol inù sas ^xc^evi £moVo$oi.
(>! Of.rit, b.»0.
" <XZellcr,I. V,p. ko.
(*' Njlorji (p. i56) Mt du ni^mc :im,
Of. rit.. |>. fia.
31» MVKR IV. – ClIIAfrTUK l.
l'origine; tes doux livres Hpès yuaiitépcii et 'ïtfSs dpiOfjtmtxois,
Août l'un est furt court, n'avaientpas
encore été séparé^
Le premiur de ees «ivrayes., ainsi que l'indique le titre, est
un résumé ut comme un bréviaire duseeplieisine.
(I est divisé
en trois livres le premier définit et justifie directement le scep-
ticisme; tes deux autres te justifient indirectement et renferment
une réfutation sommaire du dogmatisme.
Dans le ïtpfe (ta.On(intmvs-, Sextus pusse en revue toutes les
sciences connues de sontemps. (ta êyxvxha, (ua(?i/f/*T<x)
et s'ef-
force de démontrer que toutes leurs allirinutious ne réposent
sur rien, qu'on peut leur opposer sur eh;u|ue poiul des iilliriua-
lious cofjlraires et d'égide valeur. Li'Sgranmiaii'ieus, les rhéteurs,
les géomètres, tes arithméticiens, les astronomes, les musiciens
sont successivementpris
àpartie
dans les SM livres dont se com-
pose l'ouvrage.
C'est auxphilosophes qu'est
consacrée» la troisième œuvre de
Sextus des cinq livres dont elle est formée» la réfutation des
logiciens occupe les deux premiers; celle desphysiciens, les deux
suivants le dernier est dirigé contre les systèmes de morale
On est en droit d'ulBnnerque
les ouvrages de Sextus ont été
composés dans l'ordre suivant11' i" lesthjpolijjmsex; a° le livre
contre les philosophes: 3" le livre contre les savants. En elfet.
'' CVst pur c" motif mm doufp i|iic DiojjiHiu (IX. itti) dit en [Ktrlanl de
Scïtus Ov xm ti Séxt -r»v oxenitxûy *ai aiia x»7/io7«. Kt'IIer a liicn montré,
contre Pa"nheim (I)e ,ljerri lilllpiri.:i librorum "u") CI 6rdi'lr. l!eclilt, \e"r,«mire ['u|i|ji>nlieiiri ( fh Serti fimpirià libeorum iimuhto et ordme, llcrliii, Welwr.
«Xj'i. Cf. Dk iropen «fergrt'w A. Skepl. p. i(>, a; livriiii, t H85J (ju'il ne s'agit pas
ici des dix tiopes allriliin.'s ù jEiiésittûiiic, fît non à Sextus, mais t/iun de dix (ivres.
Suicliis jiai te aus«idp» Séxi vxizîtxi. I'iMiIh>|m> son tcinoigna);? a-t-il un peu |iln*
de vateur <|tt*f iv* ttti en atlrilitie Xt*Hcrt fi, un lien de ctmsïdi'rcr Suidas cfiiiim^ un
«impie copiste df Diiigcmsa» admet, ihcc Nivlischc ( Ittu-in. Mm., iKUâ, |>. 'iaK), .1,
qu'il a piiW à la m^in» smpec.
A TetKiu\Jh de Zollir, i-t jiour (Jus'!< simplicifv nous ritecous les deus
ouvrais (Il> Seitus sous le titrt* collectif Wpàt [mOnp'iTiKo'Ji «aits les distiujgtti'r
îtiitrvRioitt «|ti<^ par h: numéro des ïïvros.
:iiPappcrtlieifii (De S. Emp. lil/r. mim. et tnliwi croit i|no fc- Hp. (iifl. «I 11'
premier ouvrage di1 Si>s(ik; il ; rtic«ui«r<! d'-< tr:ici'< île ji.'nii<fssi> et un sci-plifisnii'
moins décidé >|tt» d»n» Im anlrc>. Zfllrr, avrr raisin, setou iioiii, fonili.it rett»
upininn. S'il y a des >liflftr*rm> »t n c-llc? ont <|iiij(|ii<- ifnpnrlani:i>, i-llo» prnvieiiiit'fil
MIÎN'ODOÏK ET SEXTUS KttPIMCtS. 319
le smiontl d« ces ouvrages est htmé par Sextus tui-méme'1'
comme la continuation du premier. En outre, <!<>nombreuxpas-
sages disent expressément que les mènes questions ont déjà été
traitées ailleurs et font manifestement allusion auxHypotyposes;'21.
D'autrepart, Sextus, dans le
Hpàî pafitifMaatait, rappelle plu-
sieurs fois !ï! los arguments qu'il a dirigés contre lesphysiciens.
Un passage de cet ouvrag«!>' sembleaussi renvoyer
auxllypo-
itjfmm !s>.
Outre ces trois ouvrages, iiuu&tnwrons encore dans le teste
mdme de Sextus d'autres titres, tels «jue ÀtTipp»jt«oi– TA
«fepi <r\uyt,dw* – ^M&tiïtxà ûitopviliïavi, – 2Sxar?ixa – llep!
tîs <7xsw7«x>?s aj-iij'flf Ilvppaîi'Ew. Faut-il v voir desouvrages
distincts des précédents etqui auraient «?l<?perdus, ou seule-
plutût des modèles <(iic Si'itus avait sons tes rein, l'Iulipp-on (fA- l'kilwiemi libto,
|i. fil, lierliii. 1S81, «lis», inaug. ) *(• (ironuiire [jour t'anlérioiilô il» ITp. Soyya-
imois sur tes itypolyptan, (i»r c«HI« raison que, itain ce demfcr «uvra/;o, Sextua
pi'iiclte ïer* Ifs iiK;lhu<tiinic>(. tiniln «pu- dans l« jiieniicr, it esl jilus favorable au»
iiii)|>irii|iies ( voyez ci-ilesiiis, ji.(17). \ih l'arj'iimeiil !»voi|iié par l'Iiilippsoit un
nous srmble |i«î pouvoir Otii? mis en balance a»w |i>< |ir<<iive« dérism-s qui rosullciil
du texte mi-nu' de Sextus. Si on admet ((lie S<>jtu« n comjju-iij ses ouvrajjes dans
un autre ordre i|uc celui du leur juiMiration et tes a corrigés pour n'iivoyer de
l'un h i'aiilr», nu ne voit pas |ioiirt|iioi il n'aurait pas en mAiie temps effueè dans
te llp. Soyfi. le* traces de IV»i|pirmtie (lui amit cessu de lui pu-iilre rji.!lî
JU., Vit, t.
w M., VII. 9<J. et /> I, »! il., VII. Uû. et I, 36; M., IX. 19», et
III. 1»; ;W., XI, t/i/i, et aâ.
»» AI., t 35, et IX, ii>»; ht., III, 1 il», et IX, »7f(.(« Af., I, 33, A P., Kl. sf»!). Mai»c'est [mit-iitre une allusion « V. XI. »36.
(" Non coulent de rall.irher te livra conlm tes dogmatiques aux Ifypolypotit,
Zfller croit pouvoir ajouter ijue fes //j/joljpscj annuncetit le llp. lîoyfiir. Il y«irait <|iip|quc cliow! de singulier :i renvoyer il'avanci» à un oimiijje futur. En tout
ras, tes deux textes cités |kir Zellor peuvent s'expliquer autrement 1° Quand
Scittisdil (P.,l, 31) » |iro(iosdii crilûriinu île la vérité Hepi oi i» tût àitippn-
tixy Ac$ofiei> Zetter, aïecr'ahricius.croilijHil fait alittûniv au passagi» M.. Vil, .?(),
où la indine ifiieslinn est eu effet traitée. Mais uVsl-il pas plus iiaturol <le penser
qu'il songe au II' livre dis tli/futyyusts i'i,où il Imite aussi !'• niériie sujet'/ La
criti(|iie du dogmatisme cnlcepriio de* les Hyiiotypiim c»l appelée aussi itnlp-
pmoit {! It, 17); 'i" f)e même te |i.is«;;e Il, uii Ilepi Se «Xav xori pipant
AaAcfu'fitfo «ai iv to« Çvwxoif Si /.tyoftàuis scmbfff annonror .If., IX. 3ïi.
tliapitr>* iiililuté tlcpi iitov »ai pipuvs. Mnis il est |ïo;si!de aussi cl plus prelnlile
cju'it s^rapporte ;ut rliiipitrc- dos tltfp/ihfjinsi's, fit, nK.
M UVRE IV. UHUMÏHE h
~nt.1;ment des désignations dift'dreutes de ces intimes ouvrages? Ccst
pour ce dernier parii qu'on se prononce après un examen attentif
des textes. On retrouve, en effet, soit dans tes Hy\mUjpom,soit
dans les deux autres ouvrages, tous les passages auxquelsSexttis:
fait allusion quand it mentionne ces différents titres
H y a pourtant(tes ouvrages de Sextus qui ne sont pas arrivés
jusqu'à nous; ce sont les îcnptxà vitopvtf[ia.Ttx m, identiques
sans doute aux tpnuputà Citoptvïfnara w, et le tiepl •tyvxniMî.
111 Ainsi »* ktntppmmii Xûyai {P., l, at) désigne soit St. Vil, 39, soit
plutôt Il, t4. – a* II. alotxtiuv (M., X. &}, cité » propos (te (a question du
ride, se rapporte :t Ht, ni, passage compris dan* un dëveton|>einimt intitulé
II. iXutir àpxjSv; le mut <x7oijj«W est employé comme équivalent de ip^û» (P.,
fil, .}-).– ,1° Ijgt <r«ir7«i iisopripii* sont iii>iiiiiiiJs trois fuis A..V., 1, 2g,
A/n5s« iitopoi»; oa rotrouïtt A II, 80 ÀvtinafiXTo; eoîiti iV<ii>fd««. – B. K propos
de fa (tiTOonstrjtion, M., Il, iol> Otf&V e'o7ii> jno%i$r;. Cf. P., Il, tlt't Kvv-
napxriJs itrttv H âitofeôf. – C. A propos (f« la voiï, .1/ VI, 5s i Ti^t» Çûvnv
àmvtpHrm: Eu rorrigeanl l(> tettv, comme h1 Fait l'.ifj|ieiïlipiin pour faire droit à
une objection de FabriciiK, et vu lisant Àirà tits rûv ioyftviixû» ôpiUas au lieu
ili> pxpTvpia; ott ri'tnmvt1 l'éi|iiivaleiil dans M. VIII 1 1 Otîx ioa Miv ri pûvn.
– Il' Les oxtrûixi Hitil cités à proposile lit notion de corps, M, I, nfi; la môme
chose se retrouve dam P., lit, 38 Aea&n^tav w <j«(ia. Cf. M., tX. S5(j. –
5* te Utpi tijf OKtrtiiHiif ifttfUt, oit il est question du critérium (M., VIL, tig),
semble faire allusion i P., I, ai. ti* VLvpp'àvetx, où il est (|ucslion du temps
(St., Vf, Ot), n'est autre «pie P., III, «30 (llspi %pivov). C(. M, X, 169.– Dp
même, .V., VI, 58 renvoie à M.. VIII. i3i. il y apourtant ici itiu- ditlicultR
signalée par Fakiicim ( .V. V| ,r>)i h. ). Lemême ouvrage est encore cité M. l
aSj, à propos iii> la lecture ilt's jwrti's. l'alninns remai-que <|ifim ne trouve |ai
trace, dans les ouvrages <l>>S«xtm, du piissaj-e atiifuel il est fait allusion. i'»p<
penlieim (<>p. cil.) croit te trouver dans I, 1 •'«7 i5o. Mais il signale lui-même
nne difliculté qu'il ne surmonte pas. H se pourrait que, seul» parmi les ouvrages
que nous venons de citer, les nvppaWii f«s«ent titi livre perdu de Sexhu. – Re-
marquons encore qu'un deux endroits des Ihjfahjfinei S'entus fait allusion à des
développements qu'il a dû itonner ailleurs et qu'on ne tienne pas dans les ouvrages
(lui nous tout parvenu') 11 a 1 <) à propos de la division 11/iTiitcpoi' cV 4/ /ois
SafoÇofitOx et il j<( Kai ciniOit Aa/.cfd(ic6i. – Le fait que les quêtions
relatives ail syllofpsni' ù la dclinitiun, aux |;cnrfs cl aux cspéci/S lie sont pastrait»» dans le II. c<i)|i. donne à [tenser que Sextus avait examinées ailicuis en
détail.
« M., VII, «03.
.ff.t I, 61. l'.ippenlii>ttn, qui avait d'ïliord adopté retle upinioil (De Sejt.
Emp. libr. itilm. et ttrtl.), snnlilf plus tard, et sans dire p6urcpiui, dispiné» I'uIkici-
doiitioi ( Ubetunerh Sext. lîmp.. t « ).1
M., Vt.aSîX.skU.
MfeNOBOTE m SEXTIiS KHPiattllîS. 321
r · ·
!l
k'H trois ou. si «« rèurtit te tk'ux feniere sous «ii nitinie
ttlro, los deux ouvrages de Swrtus présentent entre eut le» plusétroites analogies. Ils sont écrits dans le mente esprit et renfer-ment les mêmes arguments, exprimés quelquefois dans lesmêmes fermes- 0» peut dire
que. in second est lu continuationdu premier; plus exactement, dans le Hpâ? (ta&rptaTwous, IW
teur reprend etdéveloppe les arguments qu'il «avait
qu'indiqués<taits les deux dernière livres
des %»typaw. Ce dernier ouvrageest une sorte «l'abrégé du scepticisme, écrit peut-être à
f usage«les commençants.
Ces deux ouvrages sont un vasterépertoire
de tous tes argu-mente dont les
sceptiquess étaient servis contre leurs adversaires.
II semble que j'auteur se soitproposé pour but de n'en omettre
aucun, de ne laisser perdre anémieparcelle de
l'héritago de ses
devanciers. Surfltaque point, au risque de se répéter cent fois,
ilreprend un à un tous les griefs qu'on petit formuler contre
les dogmatistes. Il réfute lu dogmatisme sur lesquestions géné-
rales; il le réfute encore sur les([«estions particulières, bien
qu'il sache et diseque la première réfutation suffit. 11 ne fait
grâce d'aucun détail. Parfois, il semble s'apercevoir de ce quesa méthode » de fastidieux et de rebutant: il annonce l'inlenlion
d'abréger, d'éviter les redites, mais sa manie estplus forte que
sa volonté, et bientôt il retombe dans son péché d'habitude.
Une seule réfutation surchaque point particulier ne le «intente
pas; il. en écrira dix, il en éerira vingt, s'il le peut il ramassetout ce qu'il trouve, entassa tes argutnents sur les arguments; à
vrai dire,il compile. Dans l'auteur qui l'anime, dans .sa fureur
de destruction contre toutes tes thèsesdogmatiques, tout lui i>st
bonil prend (le toutes mains, il tilt flèche de tout bois. A «ôié
d'arguments très profonds, d'objections sérieuses et de grande
portée, an trouve dessophismes ridicules ou passe brusquement
(te rintérèt et do la curiosité mêlée d'udutiratioiiqu'éveillent
toujours, mente quand «u m: lespartage pas, les idées d'un
esprit puissant etpénétrant, à
l'impatience et à l'irritation quedonne»! U's
dispuleurs sans lionne f»i. Il n'estpas toujours dupe
MiLI MVKtë fV. – tîHAPITKB 1.
de ses arj»itltfs: parfois il se moque hti-méïne de ses arguments:
seslhj[)oltji>wi> se
terminent sur une sorti1 de vii»»netnent. Mais
il tnt semble que contre les JogmatistL-s fous les moyens sont
bous. Aussi bien, eu s« qualité <te sceptique, il nu pas h faire
de choix, cuire t« bonnes raisons et les mauvaises ii nedoit pas
savoir, ut ne sait pas.s'il y a entre elles une
différence, tl pousse
;i ses dernières limites t*iitij*îirtï»l*léà leur égard, et il explique
ironiquement qu'à Tevenij^e des médeetns, t|«i jtroiiortiunnt'iil
l'énergieries remettes à ta. ffravité des cas, le s«!jiîtt|tte
tbii se
servir également demisons fortes et tte raisons faibles les fortes
guériront ceux *(«i sont- Fiirtéiuénf attitebés àtt «l((«;i«iitist»ie: les
faibles, cetix (jitin'v (ienneul tjuc f»ibiement. Ainsi tous seront
sauvés tle l'oij'ui-it t-t de la présomptiondu. do'gnuttisnio c'est
sa manière d'être j)liiUiiitltro|K!»'
Cette multiplicité d'arguments et cette bigarrure donnent à
penser ijhc Sextus n'exprime pasdes idées originelles et se borne
à rejnHerce que d'aulws oui dit avant lui il est incontestable
<{ii'ila fait ù ses devanciers de largfs emprunts.
Au surplus,il
«Vn fait |«ts mystère, (,'e n'est point en soit propre nom. à titre
de pensées originales et personnelles. <|tnl présente ses argu-
ments c'est toujours -le sceptique» ((tri prie.Itien de moins
personnel que celivre c'est Tuiiivrc collective d'une érote. c'est
ta somme de tout le sceptieismi'. Les maîtres même. sauf/Knésr-
dème. n'ysont pas nommés Agrippa n'est pas cité une l'ois; est
une (|uesttonde savoir si Ménodole l'est même une luis. Pour-
tant tous tes |ihtloKOpbes des autres étotes tiennent- une grande
place danste npèsfjta#>/f*»TiWs;
leurs opinions y sont longue-
ment exposéescl distillées: Sexlus n'est muet que sur les siens.
Quelles sont les sources ott ii a puisé? \vait-ilsous les yeux
un ouplusieurs
modèles 1 Vena-l-il un qu'il ait suivi depréfé-
rence? Toutes questions auxquellesta pénurie de nos renseigne-
ments ne nous permet pas«li«faire une réponse
certaine. Zeller'
nmjerturr- que e esl surtout d'. Knésidème que Sexlus s'est inspiré
111.>« :Ô ^ùnen'tHut.'!<im îtfiv'lpwis sïi'ii.. x. t. '
«;».> i. v. 'u. :r VhII.
ttÊSOITOTR KT SBXTWS RWPmMliîS. ai»
a .t. 1-.il en donne pour raison <pte. parmi les auteurs cité» par lui, ilen est bien peu (jot soient postérkws au milieu du i" siècleavant J.-C. C'est certainement là un fait
important et tjui mérited'être
pis on sérieuse considération car nous savonspar Sextus
lui-même »pi« le scepticisme eut de son temps de redoistaiilcs
advepsakesi, t«!sijuc
les stoïciens, et il est«tranyï? »|u'ii n'aii |j«s
on l'occasion <le mmimw e«s advorKaires, ou mime sespropres
jir(îd&esseurs. Pourtant ît faitt|«el«j»efois allusion à tles théories
certainomont[wstértcurfls à /Rn&ittëiw!. par «xei»{»li>auv
l'iiicjtropes d'ABri|i{ia et aux d««x
lro|ios (j«i y furent plus tanl s»jb-stitii.5s'«. En otrfre, toutes tes fois .|u'/Km?si*'me aduptu les
«pûtions tTHénacliti», nous voyons i|ue Sextus sesépare de lui,
et il lui arrive de te combattre; directement' Si ancompare
avec les livres île Sextus inrapide analyse fja<?Photitis iwus ;t
conservée de celui d'/Kn&idènic. on constate aisément, commeil fallait s'y attendre, (pie les
mêmes questions principales sont
traitées par les deux auteurs; il y a pourtant des différenceslissez notables. L'ordre des
«pestions n'est pas le mftne: (tue cesoit à Sextus oa a un antre «ju'il faille en attribuer Fhonncur. ilest certain
<ju« leplan de Sextiic est mieux c.tmi-n et mi<>u\
or<lonné. De plus, /Enésidème avait consacre trois livres surImit aux .ptesiions morales; Sextus. soit dans les
ll^iotifpo^x.soit dans le Ttpèç itaOnfictriKovs, leur fait une part bien moins
laifje: il esl visible <|ii*iln'insistepas volontiers sur ce sujet if
n'en parle, «pi'à son corps défendant, et. si oupouf. «lice, par
acquit de conscience. Enfin, il ne paraît pas .juMinéstdènie ait
ea, comme Sexttis. te fjoftt des roeberebes et descomparaisons
historiques. Pholitts nous dit bienipi'il avail pris soin, au début
de son livre, de distinper nettement lescepticisme do fa nouvelle
Académie; maissaus «toute c était dans uniijtér*Hdepure p(déini(|ti(<
Scxlu* fuit fiWB .illn$i«ii » .« >i,:ltl>ii).>nls |HB[éri«uis ;i l-n^.id,» n.livre •mipAu t' t, 84. ,w it iiommo IVmpwiir TiWn.; | ,». ,r, i| ,i,.soit Slànmlnl. s«il !lm«l«t<>iU..ti. ti*. <«'i ,™raii |o
nm.Kl'H..nn3î;«Ki», .“hiiiporaiit il',tul?M<>; W.. t. li ù <«> fni.iv.- !<• nui» ,|u p,-i i(..il.-liri.>n Vl*m.
i|iii esl ilu t" «il iln ii' siiVk- <| |v-n. rhn>lii>mif
'> Vf.. VU.:iC,?i.
:m LI VIIH IV. – CHAPITRE i.
et afin d'espliquer et dk* justifiersa désertiuir11. aesfus, au con-
traire, s'attache. dans lestl y poli/posez,
à distinguer te seeptieisme.
hou seuleiiwBt «le la nouvelle AviuléuiRMiKiis «icoro *l« toutes
tes doctrinesqui présentaient
avec lui uneanalogie»
même loin-
laine. De mente, dans le Iïp« paftfpcmxGtfc, il est visible qu'il
traite avec (joiUles
questions historiques il s'y attarde volontiers,
et il y apporteune impartialité",
un souci d'exactitude et une
précision auxquels il «'est que juste tle rendre Iwmniage. Ses
expositions de doctrine sur lecritérium de la -vérité, par exemple»
et sur la théorie- de lit connaissance des stoïciens, ont rétendue
et lu valeur d'une véritable' exposition Historiquet on oublie
presque,en les lisant que
ces théories ne sont si bien exposées
que pourêtre réfutées, et q u'elles
ne sont la que pour faire mieux
ressortit- te mérite des conclusions sceptiques.
Nous sommes fort loi» de vouloir dire que ce ti'est pas cl'iEtié-
sidèuieque
viemiunt la plupart(les arymnents exposés par
Sextus; c'est, iiu contraire, notre opinion ([ii*il faut attribuer à
ce philosophe tout ce qu'il y a d'essentiel dans lapartie critique
du nouveau seepiieisme. Ses sucresseurs n'ont guère fait autre
choseque
d'étendre il de nouvelles questionsles procédés
de
discussion dont il s'était servi: its sf sont inspires «le son esprit,
et ont continué son œuvre à peu près dans lit direction que lui-
même avait marquée. Mais cequi
nous semble difficile, c'est
d'admettre que Sf\tus se soit attaché au texte même d'/Knési-
dènw, Il faut sonjjer que, dans l'intervalle qui sépare,tes deux
philosophes,bien des écrits
sceptiquesavaient été publiés, dont
le dernier venu a flù faire son profil. Petit-éUrc, il est vrai, le
livre it'/Knésidèiiie avait-il servi de modèle à tous ces écrits scep-
tique' etformait-il connue le thème auquel its ajoutaient
des
variations. En tout cas, il ne semble pas que nous ayons le droit
de refuser à Seslus le triplemérite d'avoir donné à l'œuvre une
forme plus régulière, d'avoir réuni autour des arguments «PyEné-
sidèrne tous ceux que la subtilité sceptiqueavait inventés après
'-t-tt-i. tt- -t't~.
MiÎNODÔÎE ET StiXTUS KttPHUClia 325
lui, èt de tes avilir fortifiés dé toutes tes e«nstdf5ntti«>nshistoriques
«font nous venons de. parler l.
Outra tes titres d* .fênésidènK.\ est certain mie Sextus a eu
sou» les yeux ceux d'un {jrand nombre d'autresphilosophes, feus
ne saurions ici nous donner ta lâche du rechercher toutes les
sourcesauxquelles if a puisé bornons-nous à iiuti<[uer quelques-
unes de «ellesqu'il désigne iui-nrcW, et qtti intéressent parti-
culièrement fhistuire du scepticisme.Sextus cito
trop, souvent Timun, avec -Piuditratioir [jrn'ise des
ouvrages mu(|ucls il l'ait des emprunts, pour (pi'on puisse douter
ipi'il itiunul fris exactement tes ouvrages (tel silla«raphe. Il s'est
é> mêmeinspire des livres des aeafiemiriciis, U(»(ainuicul de
i-eux deCltituiiisiquo et d' Antionhus. Des pages entières, relies
entre autres où il expose tes arguments île ùmmule contre les
l)ieux, sont empruntées il(îlitoiuin|uc, et la
comparaison de ces
textes avec rem où Cieéronexpose les minuta idées ne laisse
pasde doute surf exactitude du résumé qu'il nous dotme. Il est
mène assezplaisant de l'entendre se
plaindre;ii de (» prolixité
avec latpjt'lli! tes acadéimiriens ontdéveloppé fktrripptKrts. Le
soin tpj'il prendM
d'indiquer partout techapitre auquel il fait
des emprunts nous rassure sur leur exactitude.Parmi le» écrivains qu'il ne cite guère, mais (tout il s'est
te plus inspiré, il faut«erlrtinenienf placer Jtémidofe c'est li-
vrai maître de Sextus, s'il est vrai que son prédécesseur immé-
diat, Hérodote, ail été. mi médecinjHwuinatitjue. eVst-à-tlire
dogmatique. On verraplus loin, par l'exposition dis doctrines,
quele
scepticisme de Sexkis nerévoque en doute
que les vétités
métaphysiques, celles qui se démontrent dialediquement. ta
sciencealistraite et «priori desdogmatistes il veut substituer tiuii-
(li .Somwnl St'ilm seml.lc tn<tii|iiei' ifu'il eui|)i-iii>lo ses ;tcj[imieiil» ài|ii«|t|in-
(Icvimi-HM-, Im^jtif jnr cxmn|ile. it dit Tikjt >ij u,m ( M.. Ht .Si i 1l' \U, iH.'l, ofr.) l'aifiits. il wiiilil.; ij»'il ajimte lui-Riiinu1 im ai^uinciit iiuuv.iiii•V., WH, iG(i Vw<isi« ui Ufov toi«st'.i> Cf. Il, ni't. •>(c, ,.(
H. ••»'[.
1M.,tV..
''M..VII, .“. L
m fJVltB IV. – CltAPlTKR t.
«tentent encore i«t housans quelque émouvras, une sunenu science
ott d'art, fondéeuniquement sur l'observation, sur des
phénomènes etde leurs luis de succession, (le scepticisme
est ce
queuqms
appelons aujourd'huile
positivisme.Cest [à sa
marque
distinctive, c'est le caractère nouveau duscepticisme tte
ia der-
nièrepériode. Or, ftîtle métltutlc nouvelle, sinon dans ses traits
essentiels au moinspu-
la rijjitotir aveclaquelle
cll« estap|>li-
est.cette dt* Méitoftod1. N»l doute
(jueScxtus no
procède
lUrcetoiient tic Mf'nudule. (Certainsrliajtttrus, par (txcjiijJile
celui
<[tiiest cunsiti'iv à ta
tvfutatkm (les sophismes' sont probable'
iiiontinspirés pu'
lepremier sceptique
nu'ttcuin.
Tooft'fois. si Sextus a fait de iiuiitlireuxemprunts
t on ne
smiail voir «>» lui un vulgaire coaipitulcui'ou ne doit
paslui
«dresser k1*i-t'proeÏH's «juis Diog&tie mérite si bien. Le soin
qu'il
prend de recourir aux textesoriginaux, de
citer même longue-
ment lespropres paroles
des auteurs<jn'ii combat,
n'estpas
le
tiiif d'unesprit
tnultentifqui
veuts'épargner ia peine
depenser
et deroiiiprendre:
c'est pftitùt |« soitci d'un historien conseien-
tieux etettéEhodùpie. ijtti
tu* veut rien avancer à lit Légère: c'est
le scrupulehonorable d'un
écrivain (jiiine veut ni afl'.iiblir. ni
travestir lapensée de
ses adversaires, et niel sa {jloire àexposer
iittpartiaieineut leurs opinions.Peut-être faut-il voir là un lieu-
ri.'jix eilV't de celle inéiliode d'observationprécise <pie
Méitodole
venait d'introduire dans la scienct1.
Kji cas niènii' au milieu de <e fatrasd'arguments qu'il
reproduit d'après autrui, Sevttissait garder
une sorte (roril,,i-
naltlé. Il n'estpas besoin
de le lireloiiîjfetnps pour s'apercevoir
i|it*mia affaire à un
esprittrès net et très très maître de
sapropre penser;,
clfort capable
de >*as>imil':r celledes autres.
Ilprend
unplaisir iMdt'iit, <;l souvent
beaucoup |ilus qu'il ne
faudrait, à se jouer an milieu des subtilités de ladialectique.
ï.f n'estpas qu'il
se fasse illusion .sur l'utilité de cette scienre
il sait lui dire son fail à l'occasion, et il luiarrivi' d'opposer
fort
K II.
ttiïXODOTK KT SKXTtLS lïtfPMKItFS. 327
simsfhnimt l'inatiité desarguments invoqués par
les dialecticiens
à la précision utile des faits surlesquels raisonnent te&tn4decms>
i\'éamnoins on diraitqu'il veut montrer aux do^màtistes qu'il
•sicapable de rotowitor coiitm eux leurs «nues favorites, et
qu'ilsuit tes manier avec dextérité; il
y met une sorte decoquetterie»,
et il n'est [Kis fôclié «le montrer aux dialecticiens deprofession
«[«'il pourrait au besoin leur en remontrer. S'il commet parfoisde
pitoyables sophismes, ce n'estpas,
oa l'a vu, par ignorance
«tu par faiblesse d'esprit, mais de propos délibéré et par dilet-
tantisme Malgré toutes ses subtilités,, son style, .d'une séche-resse et d'une
précision scofastiques»san*ajr«flatioti ni recherche
de lausse t'li;ga«ct*, estpresque (oujours parfaitement efair il
ne vise[tas
à feflet. tû dittoujours exactement ce qu'il veut
dire.
Historien ûrudit, dialecticien et médecin, Sexlus EmpiricuK,un suppnsiinl mC'ine, ce i|ui n'est nullement
prouvé qu'il n'ait
rien tiré deson propre fonds, garde encore une assez belle part.
Ses livres, maigre leurs défauts, comptent parmi lesplus pré-
cieux muiuiimnits que l'ai(!i([uité nous a laissés. Sextus a bien
mérité de nouspar lis mmibreux
renseijjncments iiistdrirjues
qu'il nous a transmis. H ;i surtout bien mérité de smt école. C'est
h luiqu'elle doit d'être la mieux connue de toute
l'antiquité.•\«ns tte connaissons pas bien les
sceptiques, mais, jrmee a
S«;xtus. nouspouvons coimaitre parfailtMimnl le scepticisme.
A SextusËmpirtcus succéda, dans la direction de l'école
sceptique, Satuntiutiscuititiuipuraiti de Dio^ène Uierce;ti, dont
«mis ut' savonsqu'une
chose, c'estqu'il fut. lui aussi, un mé-
decin cin|>iriipie.
fên dehors desphilosophes
deprofession qui reçurent direc-
OiililiiaiK li> Ivvh'iti' l)!<ij;<'iii!(.t\. i ili) l'3iv(yfit>Af« Krfm'i». l'cisouiH'
ua |»H «iuorc <>(|>lii|iHT m «uriuiiM <li' (àiIk-iuis. Il mm- >omlilf eviitmil (|ii"il liml
Km» mPiufti Mb: ttmvet'mn i»s| in<lii|ih<> par Mîohsclh*, Itritriige :tir tyurl-tatlmutle uml knuhés /.«ni., y. n>. IW^I. Sïlmtt/ iS-n. l'itit-.Hli' im>si
{Illlll'lttil-Oll liiv r', ;x Krfnpis.
m UVRB fV4 – CH*H'PRE f.
(emciif l'héritage des tiiaîtri;s,ii neparait [tas ijtte le scepticisme
«il recrutébeaucoup d'adhérents il en eut moins ipte t;i (loti–
vetlo Académie. Sénèque ne parie pas de cette école et semble
«i ignorer l'existence. Les se«lspartisans «lu scepticisme dont
tes noms suient arrivés jusi|u*à nous sont Lieiiiius Sura, à qui
lUtue le Jeune ' adressa deux lettres, et Favwiims. Ce dentier,
bien qu'à vrai dire il îùt nmins un philosophe qu'un littérateur
ami de la |>tiitoso|>t>fc. mérite de nous arrêter un instant.
Favtiriims itiM|uttà Arles vers So-cjo après J.-C.
:K il tml|«jur
maîtres îïion Chrystistome et |jeut-ôtrt> Kjjïelète • contre
iw[net il écrivit plus tard un Uvre15'. A Athènes, il rencontra
fô-monav. et se lia trune étroite amitié avec Hcrodi>.<Wtîrus>
(mis il séjourna lattgtenrps à Rouie et eut |iour disciple Auîu-
(ii'llc, (|iiiresta toujours tm df ses plus fervents admirateurs
il lut iHis<i l'ami tlePiiitarque. <|tti (ut dédia un de ses ou-
vraj»«s"i'. H nimiriil vers fan lâoaprès J.-C.
Favoriitus étaitcmuicjue ou lienniiphrodite''1' eirconstance
i[tii lui valut plus d'une raillerie miellé. commeon peut le voirdans le Mimum de Lucien. Vukï le
portrait qu'onnous fait de
lui ' «Tunsani frontein, gemts molles, os laïiun, cervieem
tenueni crassa erura podes plenos quasi rouyestis pulpis, vot-em
reniineani. vcrlnt niuliobria, mcinlira et arliculos mimes sine
vigore laxos ft dissolûtes, n C'était uu tieau prieur, également
'" IV, :io; Vfl,
Suidiis dit i|ii'il iiiKjuil soi* Tntjaii et wciil ju^u'au Idiips if.VJricii. To»t(.«-
Euis, it ifciil èln> mi j.Iiis |ùl. <•!» i'titr»K|tie > Quasi, ome., VIII, s, ï) parfe ito lui
«itiime ifitti écrivain «iitjà félétuv. J>'autr(» part, Miiic-inl Anln-lîclle (S.A., Il,
'•i,, il cmiiiiit f''r»nlua;ijtr»s
<o» ammht, ( t-Voitlou fut cuikiiI <> iVi. tt iloit
.ii'iir MiiviW-ii à Wrien.
l'liH«str. Vit.tnpkût., l, mu, t.
(«-II., .V..I., XVII. if|. tj.il., Ili-o/il. ilm:lr., I lui.l,|i. ii; Dttibr. pmpr..»ol. X! 1>. 4ï.5
liai.. ii.iV/.
" l.iiei>*n« Dèiimiitix, i». l'l>il'i-tr. bit. cit.
V. I..II. :!l):l||. !(,.
('tlinfiiH, Ihldiolh. jrruv. V, |>. tli't.
fbttosfr.. f"< ci'. $uMsi«. Liii-içn, /h/i«ix, \t.•'
Val. IW.U. /;••
II.71.
L
«Ê1WD0TEET SEXTUSEttPIlUCttH. 329t 9-r 1 1 ~a
fiabifr* dans f,i l»ft|pi«; grecque et dans la langue latine, combletic discourir
longtempsav-tse une érudition abondante et facile
sur tousles sujets» mémo les phts rnest^iins. Il no
nantît pas
queles vrais
philosophes, comme D&nonax aient (*«pour lui la
iiiuirult'ti estime.
Favorinus, d'après Suidas, avait composé un grand nombre
d'ouvrages; il tîlait fort instruit, très au courant des doctrines
philosophiques, mais plus particulièrement attaché à la rhéto-
rique. Parmi ceux d«.ses livres qui oui trait à laphilosophie, il
faut signaler: i ïlav-toStiin) (Copiât; a" les A7rotipni*ovev(tavx;
Fliojjène Lacrcc s'est servi de- ce» deux ouvrages; Ènnotitf'l\
qui n'est pwul-étre qu'un thajntre de lit ïlmvaScati fc'iopfai;h"
Kupuvaixa'i* 5" Ikpï Ô/so/pot*<roft«sl:ii: (*"Flepï Uvppwtla»
rpimm^h f trois livres Uspï tirs xotràkyntttxm ^wwxks yi8"
nAci/To/p^os # erspî T»/!r \x7$>)nztxi)<; hafHcrzvs Un de ses
livres était consacré hprouver que le soleil Itii-int'int! tte petit t
ùltc perçu- Il avait aussicompost1 un liait« Yirèp ÊutxTnW*.
(i't'Sl unequestion de savoir s'il finit
compter F»vuriuus|)!inni
lespartisans du nyrrhonisiue ou
parmi ceux tlo la nouvelle Aca-
démie. Jîeller tientpour la première opinion Haas
pour la
seconde. Il est certain que Favorinus professa une gnmde adiiii-
ralion pour l'yrrhon5*, «t il avaitexposé
les dix tropi-s dVEiw-sidème. Toutefois, par bien des traits, il se
rapproche plutôt dela nouvelle Académie. Il était bien, commeArcésilas et Curnéadc,un diseoureur habile, qui se servait de la philosophie plutôt qu'ilne la servait: on nous dit d'ailleurs, qu'H avait l'habitude de
f"Stcpb. Ifwaul., i*>jxâs.
(i)St«'[il(. Itjz.ml., kXtZaiptu.
<» Sui.lat.
<« OH.,XI, f, 5."•' Gai., De Vfl. ihctr. vnl. f |>. du.
<') /4k/.
tGirf. M);~ rVH 1fA/UV ëfFbi X2rœÀI,n1~1"
< Gai.. lk lil>r. impr.,tu. vol. ViX,|>. V'i.81 l'hittxlr., /w. rit. f, mi, «k tWti., Xi, v,
"••i'II.. KV. i V«lim un! i|ii.i'ivrc i|uit| o>Ulinn'i». Stis l'iiim -oliliitn i-sw
un- |ir« <tisi-i()liiia meUr, '[u.iiii «ilo. iiM|iiin>n! i»iij;is i|iinm (Ictvrncrc. S«l <[(i;e*«
330 LIVItE IV. – CHAt'lîttH I.
(iissiu'tiif sur toutes choses, à la imtnwe de» «"H'ndéinieions. mm
rien décider. Deplus,
comme Art'ésilas et Carnéade, ainsi que le
titre d'un tk' ses livres en fait fui, ils'attaqua
surtout à ta théorie
stokienue de la représentation cauniréliunsh'e. lùiliu, dans l'ar-
gumentation, contre les oraclesque rapporte Atitu-Geltu
o» 1«
voit combaltre la théorie stoïcienne par les mêmes arguments
ûmit se serraient lus nouveaux acudéraiefens ii insistaitiJ> nu-
taimiieitt sur l'incompatibilité du libre arbitra avec lu divination
et iVstun argument dont it ne parait pas tjueles
pyrrlioniens
se sttieut servi*»,
H ne semble |>as, d'iiîlleurs, que- Favorinus ait rien ajouté
d'importantà fa tradition de ses maîtres. Au stirptusjt's rapports
entre les deux écoles étaient assez étroits pour ijtte Favorinus se
considérât eimime appartenant à toutes deux. Entre les acadé-
miciens, i[tiilioienl savoir
qu'ilsne savent rien, et lus scepti-
ques, qui n'en sont pas siirs, il n'y a pas un abîme'3*.
Siri.'uiii C.irji.-n ti'i1i-cfijcc |)utili,|i.T>• itinkiiti-i istis ili>|nila!ionuui aaulomici^.n
CI",thti. ,t),-if). ttoctr., vu!. t,p. '10.
V..I., t. Il font «ignakr cette fitrimik, tunto iicailL'mieiwnio -Exit-
wttiti uiili'iii nui) uiliriiliiutli ijiMliii in;;eiiii .m «jinitl it<i *ii« jinlicatoinie osislimare!
nan ffaln.t» ihi'ii ».»
Mut. -iaiit vent fit tninimp ti'r^ii*t(iiit r^t^haf, iftioit umt hiluIu i*asu^ i»i
•«l'iilit, «jikp lînniiviil iMtriii'iii.'Us, *;d t-uiisilin i|imijiw Iiuiriimn» ipsi, iiiiiiliarias
»?t varias votuilii*U< a|)|}i^ilit)ti<.>^|tiu et ttt't'litiattimc-f, et foi'hutHs tX'[tL'HllHOS(|U(î Ht
!i i.»«imi< ii-liiis aiiïiiiui'Uiii iitiji'tus. receisusnut". luureri ajjilariijue dusujwr e cmlu
[Hilai'cfit."
<nll. M. v. S.
LE SCEPTICISME. – IWKTItë DESTHUCT1VË. 331
CHAPITRE II.'
ÏM SCEPTICISME BMPHUQUE. PARTIE DRSTlUiCTiV'K.
Uansle scepticisme empirique, iei que l'expose Sexfus, if y a
lien, selon nous, de distinguer deuxparties que Sevlus confond, <
mais qui sont loin d'êtreidentiques b légitimité (te la distinc-
tion ([ik nousproposons se justifient dVItc-uiénus croyons-nous, 1
par l'expositiondes différentes thèses du
scepticisme empirique.Les
sceptiques sont d'ntiord desphilosophes ils s'attachent à
ruiner le dogmatisme sous toutes ses formes c'est lapartie tics-
trutlive de leur œuvre, eell»; à laquelle ils paraissent avoir att;i-
tin! kplus d'importance. Mais its sont en même iemps des mé-
detiiiii il fautqu'ils jiislifit.-ftt ht science- ott ptittùl l'art ([u'ifs
cultivent. Ile là un certain nombre de (héses positives, qu'ilslaissaient volontiers au swond plan, mais qui sont pour nous du
plus liaul intérêt et. qu'on peut considérer connue lapartie
<-on-
struttive de leursystème. En un mot dans le
scepticisme empi-
rique, il convient de distinguer le seeptieisme et l'etnpirisme.
L'exposition duscepticisme proprement dit
comprend elle-
même deux subdivisions. Lapremière délinit le
scepticisme,formule, ses
principeset ses
arguments, explique tes termes dont
il se sert. La seconde prend 'l'offensive contre le dogmatisme':
passant en revue les troisparties de la
philosophie, elle expose
imprtmtenieiil le pour et tecontre sur chaque question, et con-
clut ill'impossibilité
de rien savoir. Nous résumerons les tUm\
parties de l'œuvre do Sextus en usant librement de ses trois ou-
vrages. H serait impossible de parler de tous tes iu|;unu.Mits que
l'iiilatiijahle sceptique acciininle nous choisirons lesprincipaux
non les meilleurs, mais ceux (lui ininsparaîtront les
plus propresà donner une idée exacte <le t'ai^umcuiutiou et à
reproduire
332 UVRE IV. – CliAlUTRE li.
dans un résumé aussi hrefque possible, {« vraie physionomie
de l'ensemble.
t. Le scepticisme consiste à comparer et àopposer
entre elle*,
de toutes les manières possibles» les chosesque les sens perçoi-
vent, et celles que rinteittgciice conçoit0'. Trouvant que les rai-
soks ainsiopposées
ont tin poids égal (iaaaQévmx), lesceptique
est conduit à la suspension du jugement (iir^f) et a l'ulariixie.
Cette suspension du jugement ne tloit pas s'enleiulve eu un
sutts trop large. Lorsqu'il y est contraint par une sensation
tju'il sttlrit, k:seoptique ne s'interdit pas d'allirmer. S'il a chaud
oit froid il ne (lira pas je crois que je n'ai pas chaud ou froid (-K
it ne doute jauuii&ik-s pltûuanièui's ' ..Maïs s'il s'agit d'une de
ces choses tactiées (£&*>.&)queles sciences prétendent con-
naître 'v, il (loÏÏtctoujours.
le >wmis rieu'* jette ilêfuiis rien pas plutôt ceei que
cela '7|
peut-tin' oui pcul-t'lre non" tout est iucûinpréltettsibte^'x voilà les
formules >'ont il se sert pour exprimer son doute, à moins que.
les trouvant encore trop atlinuatives, il nepréfère recourir des
interrogations,et
dire: pouvquoiceâ plutôt qwedu tl>!1 Mais dans
tous les cas, il faut bien entendre que jamais il n'affirme rien,
au sens absolu dti mot il dit seulement ce qui luijwn.ul. Ainsi,
quandil dit
qu'ilne sait rien. ou que tout est
incompréhensible,
ou qu'à toute raison s'oppose une raison d'égale valeur, il ne
faudrait [tas lui reprocher de se contredire en uflirtnant une pro-
position qu'il tient pour certaine. Il ne la tientpas pour
absolu-
ment certaine la chose lui paraît ainsi, maispeut-être
est-elle
/l, H.
i-f.
P., |, HJO, ttjHt «JOO.
• K.l, ii
/Uni.
P.. 1.11,7./[. iMH.
' 'f, '<Jft-
i> r, ioo.
•'p., 1,1%.
LKSCEPTIf.ISMH– PARTIR DESTRUCTIVE.333
autrement U1. Mne parle jamais que peur laî-nieW ï chacune
«le ses formules sons»c«teinl â refi'iîi me semble®. Toutes ses
formuless'appliquent
à olles-mèues elles s'enveloppent eîles-
mômes. lin purgatif, en même*temps qu'il entraîne tes humeur»
ducorps, disparaît avec elles (ï|. De mi'ino, les formules scepti-
ques, e» supprimant toute certitude, sesugjn-JnièntîîHSs-mènes.
Kn un mot, et c'est nupoint sur lequel Sextus insiste souvent,
le sceptique ne fait jamais qu'exprimer l'état purement sttbjecttf-où il se trouve sans rien affirmer tic ce tjut est hore de lui, sans
rien dire <{»iîait unepoj-tdc générale
Par conséquent, le sceptique n'est d'aucune secfe(!y), d'aucune
«colc, à ntuins qu'on iv'enfeiulepar !à une disposition » suivre,
conformémcRt à ce «piu les sens nous montrent, certaines rai-
sousqui conduisent à bien vivre (nott pas au sens monit, mais
a» sens larç;e du mot /!«•«)> ol àsuspendro son jugement. L«s
raisonsque
suit lesceptique lui apprennent à vivre d'après tes
coutume», les lois, les institutions de sa patrie, et les disposi-tions
quitui sont
propres.Le
sceptique a un eriti'-rimn, non pour distinguer le vrai dit
faux, niais pour se conduire dans la jjjpCe critérium, cest le
phénomèneou la sensation s» hic, et qui s'impose, sur laquelle
la volontTn'a siuctine prise !*>. Nepouvant demeurer tout a fait
"» P.,f, i;>,i<ji,!>o3,clc.m.
f, m>6.
ll! P., t, ti> T<i éïstâ Ciii-Jfiei'uif ié>ei xù to •uiflos dviyyi>?ci m éwtoï
àSoiiaiais pnlièv aspl vis iç-Jlev Otroxiifiii'ur iitSiStuovyttvut. l'S. I il).
tl est iiii[io«ïhte <!«>lnuluin> i<- mut «jajif donl so sert Sextns, et qu'il op-
pow: au mol »i'pr»i« trop (tu;;inaliquc à son j;rc ( P.. I, rC). Les mots »«•(«, rfw-
Iriue, lira, institution, pwfeai'm direction expitum-aieul (oujiiurs une i>l<k>trop
(jusiliic, o>iii<iii(|uci'iiiciil de cl;ti-té. ~ott'<* lallllllu, ami" (t<*t:t jx~cition, jà,a pas .1..
iikiU pour cou nuiinres sulililos 1 1 jjuiisj'i».nus nous servirons, a l'oco.ision, ilis
nuits rente «il ntuifintmtnt, IjJvii i|u'il> Suicnl atiMÎ a-M-7. inijini|irO5 il faiuha fi'uU
ini'iil ciiliMiiliv <|u'il lie 5u|;ii [os «Tint curps dit ihiclrini's liw et dwluré inwiinnblc,
mais sctiiommit il'mt |p-uii|n> d'opinions l'imiiiiiincs à un certain nombre d'hommes,
i:t afJujitOis par eux, ai» si!irs i|di vit'nl dMtn; dit eVsl-à-din' a«cc rêswïo*. «.( sans
huir altnliiKr une vak'irr nljsoliK.
1 '! Kl' xsciaa yip x ji àëov/.iiiw tiiOei tteijièvti iMnitos c'oîiv.
»ft IJV'HKIV.– Cft.4l»trttlSIL
inacfif.'to seeptiqiu1 vil sans- avoird'opinion. nnit|iii;tn<!ti(
attelle
auxaujxirences,
et auxpratiques d<- ta vif coiumuinj.fi obéit
aux suggestions de la nature, et fait isaj*»! de son intelligence,
comme le premier- venu: il sttitl'impulsion
do «sespassions,
nutnjfes'il a faim, boit, s'il « soit.
Bespectuettx (tes lois et cou-
tumes tic s»ki pays, it regarde ta piélé comme un bien, l'impiétécomme itu mal il
apprendet cultive lt»s arts. QttVn ne fucntse
donc pas tte s'enfcrmiïr dans l'oisiveté. Ai veut êtretruiisr>(|ucul
avt»c htt-niôjnc, et «le tomber dans l'absurdilâ et ios contrïxtir-
t'utm, «IVln1 forcé par exemple,si un tyran lui ordonne tic faim
who maifvitiso action ,'dc choisie entre le crime- cl la tnori» ce«[tri
est foiitt"»ii"(! « hcs inuNtiucs1-. Raisoiutpv ainsi, c'est oublier(|«o
l« sff|itif[ir<ikv se conduit pas d'après- des rfjjles pliilosojihitjtips
ils't'ik rap|M>i'te
à l'observation et àtVxjnti-i«iee'->t, <[ui
n'ont rien
à faire avec taphilosophie. S'il
est mis eh ilciitcurepar tin tyran
de taire «ne action défendue, suris s'inspirer d'autre chose <piedes lois de- sa
patrie,il saura prendre uno décision: car il peut,
comme tout le monde,préfén-r
certaines choses, et en éviter
d'atitres.
l*»r là, il atteint le but qu'ilse
propose, et([ni est l'nlamxir
à l'éfjiird (tes opinions, la métriapathie h l'égard des «-luises tpif»mit ne peut éviter' Le
dojjmalisle ipiia une opinion sur le
bien et sur te mal, tjui croitpar exemple que
la pauvreté est un
mat est deux fois malheureuxparce «pi'il n'a pas re <[u'il désire,
et parce mi'ilse
travaille pour l'obtenir. O»ltenl-il la richesse'' t
il est trois fois malheureux, parce ipi'ilse laisse aller à
une joio
immodérée, parce fju'ilfait tous ses efforts pour garder ses tré-
sors, parce rpj'il est torturé à l'idée de lesperdre''1'.
Toutes ci«s
peines sont éporjjnées au sceptique. Il est vrai qu'il n'échappe
pas plus queles autres aux
douleurs sensibles: il pourra souffrir
do ta faim, de la soif ou du froid. Mais si ta douleur dont il
J/ Xt. lli'i.
M., VI, tiij\yû'i<soyùt nipuiK.
l.rt.•- .«., XI.i'ni-itio.
Uï SCKÎ'TICtSMlï. – t»AItTÏE MS'FRlJC'nVfi ;««
s'agitest très vive, elle dure
peusi elle dure, d'ordiiurtre eifc
n'est[Mis
très- vive, et oupeut y apporter quelque soulagement.
Fût-elle très vive, ta faute tCen seraitpas
ausceptique, «jais
:t
ta nature, et le.sceptique
» du moins évité la seule fauteque lus
hommes(missent commettre eu pareil cas, celle «le s'infliger <\
soi-mAnte une foule de maux par les idées<ju*ou
m fait du bien
fa <l« mal. Celui <jui ne se figure pas «juela douleur est un niai
ne souffre (|u« île l'impression présente; celui «pji la regardecomme un mal double sr. souffrance.- On voit parfois l'homme à
»|uioh l'oujie un rni'iitbrc, souffrir sans
pâliret sans gémir les
assistants au contraire, dès <|t"t'iisvoient eouloi-
le sang,s<» met-
tent à trembler et ù pleurer; tant il est vrai(lue l'idée d'un mal
peut tîtropfiis pénible que le mal lui-même.
Voilà continent le sceptique, bien plus facilement »|tie Je
(lograatiste. arrive à être heureux, il est comme «•«peintre | <jui
ayant voulupeindre l'waine d'un cheval, et désespérant d'v par-
venir, jeta de dépit contre son tableau'l'éponge qui lui servait M
nettoyer ses pinccitux elle atteigait te cheval, et IVctinte se
trouva fort bien représentée. Lesceptique
aussidéVspérnnf
d'atteindre rationnellement ï'alarasic, parce qu'ila vu le désac-
cord dns sens et de l'ititolligmf e suspend son jugement: ft parunc heureuse rencontre, l'ataraxie survient, comme l'ombre suit
lecorps
•i!.
Divers chemins conduisent à «etleperfection morale. On
ap-
pelle tropes, les moyens d'arriver à la suspension du jufjemeut.Il y a des tropes gi;nérau.v, au nombre de trois on
peut oppo-ser les sens aux sens ainsi une tour vue de loin est ronde t de
près, elle est carrée: ou l'intelligence à l'intelligence ainsi
l'ordre du monde prouve qu'il ya une
providence; les malheurs
des honnêtes gens. <[u'il n'y en apas; enfin l'intelligence aux
sens: ainsi la neige parait blanche, mais Anaxagore prouve
qu'étant de l'eau condensée, elle doit être noire.
Il y a encorebeaucoup d'autres tropes plus particuliers tels
'•" P., h *K.
p.r l, -"t.
330 LIVRE IV. – CHAPITRE II.
sont les dix tropes tl' -Knésidenie, les cinq iMgrippa, les deux
qui y l'ui'f utplus Uinl substitua, îes huit «".Etiésidème contre
les partisansdes ranges ".
II. Réfutationdu dogumtlsuw (àv-itfân&K). – La tâche du
sceptiqueest moins d'expliquer son (toute que tfe combattre les
croyiiiKeseu ceux
(jiiiire doutent pas. il
parle«le lui-inétne te
moins possible, aiiti de donner moins (te prise sa principale
preo<Tii[j;ition.c'est de
parlertfcs autres, ott
plutôt contre les
autres, il ne se dûfomt guère, n'ayant rien à garder; mais if
excelle dans f 'attaque: son ouivro propre est de détruire. Aussi
la l'éTtilation du dogmatisme, ï'ârtfpfrvriscomme il
l'appelle,est-elle de beaucoup la
partiela plus importante de l'ouvrage de
St'XlUS.
Elue famlrail pas seméprendre
sur le sens de ce mot réfuta-
tion que nous employons tank' d'un meilleur, et en tirer contre
lescepticisme,
un argument Taciteque
Sextus aprévu,
etauquel
il « répomfu il'avanee. Il ne réfute pas les dojjrnalistes en ce
sens (ju'il voudrai!prouver qu'ils ont tort ce serait une llièse
affirmative. Il se contente de monlrer qu'ils n'nptjas raison, ou
du moinsqu'à
leurs raisons ott «eut opposer des raisons égides
il se borne à les contredire. Knlre les raisons contraires, Sevtiis
se garde de faire un choix, et comme on pourrait s'y nii'jn'endre.
il lerappelle souvent, quand il achève une de ces discussions où
il a examiné minutieusement toutes les hypotUèscs qu'on peut
faire, et môme quelques-unes que personne n'a jamais songé à
foire.
sceptique règle ses mouvements sur eeuv de l'adversaire
qu'il veut harceler, et l'duTt'fâmrif comme laphilosophie
elle-
niihuese divise en trois parties l'attaque porte sur ta logique,
la physique ni la morale.
t° Contre leslogiciens.
–D'après les logiciens, les choses
apparentes {<p<zw6(tsva, èvnpyii) sontconnues directement au
Vuir ci-<i(?s«!is ji. afi'i, aliâ, Soi
1.1'- 1'tit'riE 11 [-.S'r fi (. t*r 1 l~ ÏK
âitnuttîs ,.1.~ L~t.t.jC,C~ t*moyeu «lu erîtefiam, tes choses «idiées
(«4xa) ««[ireçtcmeut.ail inuyeu des signes et du la démgtistiation. H faut evmmnet'
leurs tinsses it ce doublepoint de vue
h: critérium dont il s'agit ici n'est pas celui dont il a été
question plus haut, et(|iti permet de choisir entre
plusieursactes
possibles tians la viejirahijue ecsl l<>rrtt<*riutu (lui \mv~
mut duftisiinjjuer le vrai et le liiiiv.
On jjcuI distinguer Iroi* sorte» de critisrium. suivant <[ir'onmnsidèïf «« k
sujet »jmvsl censé nmnaitffr lit vérité
(xpmlpiov
(ÎÇ'off), o« riiistrument à l'aideiluifuel il la commît
(StoSj. ou
rctnpjoijmrficiïïiei1 (lui est l'ait elec-el iuslmmciii iWi'Ç. «oo^-
€3A~M}ct~~o-M\
Qu'il n'y ait dt; critérium eu aucun sens. cVsf ce.nue tiumtiv
Wwrd le désaccord desphilosophes. Suivant Xénupli.-iue. t*ro-
taj»oras,(ior(}ias. il n'y a [loiul tk> fritiytutn il» tout. Pour Ana-
xsigore. les pythagoriciens, Démoerito. Partuéuidc et l'Iaton.c'est In raison seule à l'exclusion des sens, ijui jh>u( jii('er h
vérité; encore, l'entendent-its divcrsimiont. SuivantRmpi>dorlc<.
il v <t six critériums: pour les stoïciens, il n'y en aqu'un, la
sensation com|iri'he«sive les ««uténùciens nient lu ceiiilode. t't
naîu^tenTTpî^tir^rolialjilité;enfin c'est nu* sens seulement
({tioles
cyrénaii|iii>set les
épicuriens accordent leur confiante.
Est-ced'abord Hnmiiiie ([i»t est le i-ritorinm ou. comme nous
(lirionsplutôt aujourd'hui, le
juge de la vérité.? Matsqu'est-t-e
•jue l'homme? Nous nepouvons
le savoir, jms utème nous en fairetune idée r. Les
philosophes ont donné de l'homme bien dest
définitions aucune ne résiste à t'etumen. Laplus célèlw est
cellequi voit en hti un animal raisonnable, mortel, capable de
science etd'intelligence. Mais c'est définit' l'homme
pr sesipia-
lîtés accidentelles, et les accidents sont autre chose que lesujet.
fcn outre, nous n'avons rien à faire avec la mort, tantque
nous
vivons; et dira-t-on que tes ignorants, les fous, les gens entier-mis ne sont
pasdes hommes? Knlin. les autres auiittauv «ml
1 u.. vu.. -iâ. i\. h, si./II. J3.
m livkk rv.. «tirAPfïiiK tr.
aussi mortels; doués d'tntrf%ottw\ et jusqu'à «rt eertitin poiitfde science. Les sceptiques aimaient à «l'iiuiiH-rtfi' t»Hij;utniv«itCtfs
iii;fuii(«'iifs qui prouvent i|tK' l'iitlolli(;i'[iL'c des animaux
n'est
jjuère inférieure à celte du l'homme.
D'ailleurs, si riiouimepeut se connaître,
il s'yemploiera
tout
entier. ou if n'y emploiera i|u'ituo partie de lui~mêm«. S'il s'y
emploie touti-iitii'j'. il hi> restera
plusrien à connaître; et s'il
n'emploie qu'une partie île tui-tné'me, est-cepar le corps
t ju'il romwilru lus »;ns et la fteiiséc ?Maïs lecor|is;
est sourd H.
s;uis raisuo il ne |>uut rien i-uiri|)rcm(re; il faudrait il*aill''iii's
ifu'il({('vint
jiiiatiijjtit'a vu
(jiu fst connu n:v «''est-ii-ilire- aux
itl<V>et au\ st'usattims; il ttm'itMitlKnt dwwl'objet tle sapropre
reeherclie en«jui
est alisitidc. lîsl-«(« par tes sens qu'il eonmild'n
leiorps
ft la punsée"' Mais les sens sont privés ilo rais»n et no
savent rie» la vue même ne peut jiercct'oir «jue f étendue su-
perlicielle et non laprofondeur: autrement elle saurait distin-
guer les statues d'or de celtes qui ne sont que dorées. Enfin les
setts ne sauraient connaîtreijue
desqualités, et non le corps
lui-même. Bien phts ils ne se connaissent pas eux-mêmes
comment la vue connaîtrait-elle la vue? Est-ce par ta pensée qu'il
connaîtra U>.corps
et les sens 1 Mais la|ieijsi!e devra devenir ana-
logue à ce qu'elle connaît c'est-à-dire corporelle et sensible, et
il n'y aura plus rien qui puisse connaître. Et la pensée ne peut
pas même se connaître elle-même autrement elle connaîtrait le
lieu où cite se trouve. cl les philosophes ne seraient pas aussi
embarrassés pour dire si elle réside dans l»>cerveau ou dans le
cuitir.
L'idée luiuw d'un critérium ne peut s'entendre. Ceux qui
se croient en possession d'un critérium l'affirment-ils sans dé-
monstration ?On pourra avec un droit égal leur opposer une
assertioncontraire. Apportent-ils
une démonstration:' Pour en
juger la videur, il faudra un critérium sur lequel tout le nrondr
Sfihis sctiitil" .i[i|iii'|M-i- f»n* [inliii-li in.tsiiii'' .iristoMirtenne, ijuc le s«nr-
Malilt: |miI "'iil miuiiiilr" li> M'itiliblil". "il <|iif l<; sujH <'l t'okji'I <l>; til eoHIiais-
fiincf m> iiiiif<.int«il iliini farli' il«r riii»)iii«<aiu'i'.,t"_
v
I.K St'.BmtîfSMB. IMftTlB DSSTttUCTtVE..139
Ai »*••'soit d'accord et il n'y en a
jias. 'kunnse tous«eux qui croient
avoir un critérium sont en désaccord entre eux, il faudra Un cri-
térium pour uousranger
à l'avis des un» etrepousser celui des
autres. Si ce critérium est différent de tous ceux qu'on propose, 1il sera lui-me'me en question or, ce
«jui a besoin de preuve ne
saurait servir à prouver. S'il est d'accord avec l'un d'eux il aura
comine lui besoin dMtro justifié» et par conséquent ne sera pasun critérium.
Endésespoir de cause, choisira-t-on parmi les dogmatistes
unphilosophe que l'on déclarera juge suprême de ta vérité ? Sera-
ce un stoïcien, où un épicurien, ou un cynique? Et s'il est au-
jourd'hui le plus savant des hommes, nepeut-il en
apparaîtreun demain qui soit plus savant'? Et le plus habite homme du
monde n'est-il pas exposé il setromper? D'ailleurs, si on lui ac-
cortle ce titre. c'est en raison de son âge, ou de son travail, ou
(le son intelligence et de sapénétration. Mais tics hommes de
même âge, Platon, Démoerile, Zenon, sont en désaccord entre
eux. Tous ceux qui ont combattu pour la vérité étaient des
hommes laborieux. Tous aussi ont montré une hauteintelligence
et on sait qu'il y a des jeunes fjens plus intelligents que des
vieillards,
Dira-t-onqu'il faut tenir compte du nombre des
partisansd'une doctrine? Mais stoïciens, péripatéfieiens. épicuriens son)
en nombre apen près égal. H arrive dans la vie
pratique qu'unseul ait le
coup d'œilplus stlr que la foule, et it peut en être de
même enphilosophie. Enfin ceux
qui sont d'accord sur une
doctrine sont toujours moins nombreuxque toutes les autres
sortes réunies c'est donc avec ces dernières qu'il faudra se mettre
d'accord.
Examinons maintenant le critérium au deuxième sens du mol .•
c'est l'instrument qui sert à distinguer la vérité. Cet instrument
nepeut
tonque
les sens, ou la raison, on tous les deux à la
fois.
Les sens sont mauvais juges. Ils sont allectés par la couleuri: P., II. 38- W
3W MVIltë IV. – «ÎH.-W'ITRBII.
Ottle son Kuttï« alternent pus e«>qui est eulorwou sonore, us
m1peuvent unir lest diverses parties «l'un sujet, far l'addition
n'est pas une sensation. Enfin un sait avec quelle lin'itité ifs se
trompent.La raison ne vaut {{uèremieux. Quelles dHféroneesentre la
raison tl'Héruclite et celle de Goi^ias, l'un soutenant que tout
est vrai, l'aiitre tjuo rîftt n'ust vrai* Puis, avant tic connaître itt
vérité, t;i raison devrait se (ounttiliv elle-miîiiitM'ominerarclu-
tt'ck*"eotinait le ttroït et l'oWitjtie avant«l« se servir tin runi|tiis;«r «tt a vu «|u'ellene s<»connaît [»iis.Ëuiin entre fil raison fit les
sitost'Xs» trouvent tt;s sens tuû itit«ive|it«at la vue d« la péililt!.
Séjiaréo des chosesvisibles par la vmL,îles elioscs sonores parl'ouïe, la raison est coi'!iiiiM!iii|>rrsonnêe,et nepeut sortir d'elle-
/lUllllf',
Hennir les si>»sà ta raison ne conduit |ias à un [iii'iHi'iirré-
sultal. Raisonnant sur le fait »p> |i«mtttl \n\tu\l doux aux uns.
amer attx mitres. Démoerite«omitit qu'il n'est ni l'un ni l'autre.
Iféraelile, qu'il a tes deux qualités. De jilus. les sens ne font
pas rtHiiiaftrf à la raison les eltuses l'tii's-mèiiics. maisseulement
la manière ({ont ils sont aifectés la sensation (lu chaleur est
autre rhose que le IVti car »{!«*ne brnle |>as. Kt les sensations
fussent-elles semblables aux choses, la raison serait «limsTira-
possibilité de wrilier cette ressemblance.
Accordons pourtant. j»ar grâce, que l'homme peut connaître
la réalité il est certain qu'elle lui apparaît toujours sous la forme
d'une idée ou d'une sensation particulière, ("est le troisième
sens du mutcritérium je veux«lire l'application ou la tléteriui-
mitton particulière de la sensation.
La sensation compréhensive des stoïciens, définie non pas
grossièrement connue une impressionfaite sur la cire. maisainsi
ipie In voulait Clinsippc. comme une modification survcnirn
dans la partie principal*; de Tânie, ne se comprendre. Com-ment les nouveaux changements.. en s'ajoutanl aux anciens, ne
les font-ils pas disparaître'' De plus, si quelque chose subit un
clian{jr>n)i>nlce n«' peut t'ire que ce qui subsiste ou w qui ne
Liv sckptiuismk. – nnn& lymnmïmti m
subsistepas.
<x> n'est pas «iqui subsiste, cap tt n'y aurait pas
dechangement
et eeitV'st jms
et»<|ui
ne subsiste|ias, car, avant
disparu, on ne peut dire qu'il ait changé. Eu outre, l'aine neon ne l'eut 1Il'1' ..111 ait, IIIIIH' 'Il IJlltt'I~. ¡ÍJUI! lie
confiait Jamais que ia sensation, et non la causequi
taprovoque
«'t à mains de dira que la cause et l'elfet sontidentiques, on ne
pourra soutenir que la sensation soit la ittdiuc choseque sa
cause, etqu'elfe se perçoive en m«?ure
temps qu'elle.Entre (es diverses sensations. à moins de dire avec Proiagoras
qu'elles sont toutes vraies, il faut faire un choix. D'après quel
principcHxsacadémiciens et surtout Carnéade out assez nton-
tre que ce eltoiv esl Hupssibie. etqu'il n'y a
point An tliiférenre
s[iécili(|ue entre ta sensation i-ompréhensîve et les autres. La
thèse des stoïciens sur cepoint repose sur une pétition de prin-
fij«>•'=.Qttanrf on leur demande ce
sjuVst ia si'ti.intion foiiijirélH'M-siv«. ils disent «pie c'est mm sensation gravée et imprimée dans
l'Amepar une chose réelle, de telle façon (tu'une chose non réelle
ne saurait enproduire une pareille, Et
cjuaud on leur demande
cetju'esl une chose réelle, ils répondent «pie c'est celle«lui pro-
voque une sensation compréhensive. ft faut connaître ce qui est
pour distinguer une sensation cimipréheirsive, et on ne «mitait
cequi est ipie si nu a ilistiiifjué la sensation conipiviiejisive.
Supposons pourtant qu'il y ait »» critérium il tte servira à
rien, caril n'y a pas de vérité.
S'il y aquelque chose de vrai, c'est ce
<pii est apparent ou ce
qui <'st caché. Mais re n'estpas
ce«gui est
apparent car on voit
apparaître dans le sommeil et lit folie Uieii des choses tpji ne
sont pas. Et ce n'est ps ce qui est caché; car despropositions
contradictoires connue (vlles-ei le nmnhre des étoiles tsl im-
pair:le nombre des étoiles est
pair, i:alenienl cachées, devraient
être également vraies. Il ne faut pas dire nonplus qu'on doit
laire un choix entre les choses cachées et les chosesapparentes:
car il n'y pas de critérium.
lieplus, si tfueltfur
»/«».« est vrai tout est vrai: car lotit»!
»/ VII.',«{,.
H. m;.
•MÛ LIVRE !V.- t:tt.U~'t'H Il.
chose est quelquechose; «t ce
qu'on peutattîrfHer tîtt genfo, «h
twl «»t tlrott «le l'attirint'i1 îlel'espèee.
Kt si tout est vrai, rien ne
sera fans, pasmême cette proposition que
rien n'est vrai. l*«»tr
les inôaws raisons, si quelque chose est faits, tout est faux,
compriscette proposition qu'il y « de la vérité. Et si quelque
chose est à la luis vrai et faux, les conséquences sontencore plus
car de toutes choses il faudra (lire qu'elles sont à la
fois vraies et fausses, etqu'elles
ne sont ni vraies, ni fausses.
De mène te vrai n'est ni absolu, car s'il ne dépendait pasde
nos dispositions particulières,tous les hommes le connaîtraient
tel qu'ilest et il n'y aurait pas
tte désaccord entre eux; ni rela-
tif, car un rapport n'existant quedans l'intelligence qui le per-
çoit, le vrai ne serait que dans noire esprit, non dans la réa-
lité.
Et .Knésidème a prouvé: que le vrai n'est ni sensible, ni
intelligible, ni tous les deux à la fois, ni aucun des deux.
A défaut d'une vérité que l'esprit puisse apercevoirdirecte-
ment et sûrement, y a-t-il quelquechose qu'il puisse
atteindre
indirectement'? C'est à cettequestion que répend l'argumenta-
tion contre les signes et contre la démonstration.
Parmi les choses obscures, c'est-à-direque l'esprit n'aperçoit
pas du premier regard, il en est qui nous sont pour toujours
inaccessibles (xaOdnaÇ a«5>jAa) par exemple, j'ignoresi le
nombre des étoiles est pairou
impair,et combien il y a <le
grains de sable dans les déserts de la Lybie. Laissons de côté
ces sortes de questions.
Il est d'autres choses, actuellement obscures, mais quine le
sont pas absolument. Je ne vois pas Athènes en ce moment,
mais je puisla connaître il y a des cliosus momentanément
cachées («pcsxaipw &S»>a). k n'aperçois paslus
poresde la
peau, ni le vide, s'il existe il ya des choses cachées par
nstare
( $wnt oi&fXeij je puis pourtant U* «oiinaitre parh ruisemu;-
iiu'iit. (À- qu'onsait di- ces choses cachées, ou IVppremlpar
les
:> Vl.l. (i-lIl-MH. |l. >
.«.. VIII. t't.V<>«.• H, <; -i *(
Uv SCKmCISMB. – PARTIE DËSTUtCTIVE. 343
9.~ -1signes t«tranime tes éuxws «rchè-s sant «te «l«>tKsortis, il y a
detjvespèces
desijjn«s. Le
sîjjno etinmténiofntif(tfifMeiw i/'iro-
Itpnaitxir) révèle, les «pis xaupw <$uX«; {<•sij{ne iitdic«tif(cr. &-
SémutA») les ^û<rgj <&ifA«.Parexemple le mut Athènes, si
déjàje commis colle ville, w'y fera {««user: la fumée me
fera penserau feu la cicatrice à la blessure voilà
îles sifjnes eoimnémora-lifs. La sueur, en coulant sur In peau, me révélera itu'il v a dès
[tores; tes immraiients dwcorps
me feront connaître l'ûme, in-
visible |mr elk>-ui<?iiie ce sont déssignes.in(liçaj|fs.
Contrelos^d|(|ie£^mrâw»|alilk/les sccptMjuus
ne soulèvent
a'uciin<>fiitHculté. Bien «it contraire, ifs se défemient d'y porterta moindre atteinte ils veulent rester d'accord .*vec le se»* cwti-
iiunt, ils ne sanjjent pas à bouleverser toutes les lialiiliides1'1».Les siynes de celle nalure sont fondes mie un grand nombred'observations le
sceptique est ave<- ceuv<|iri y croient simule-
menl, sans dugittatiser; it ne s'élève<|ite contre tes [nvlmlioiis
des savants, Ouverra plus loin ([ue cette théorie du signe rot»-
ntémoratif est poar Swtjis le 4>okl -de-tlépart-tkloiitçjini! "doc-
Iriiie de IWt ou de^ptalifjue.et «Tune sorte «le dogmatisme.
C'est uni(|iienient au sijjue indicatif «JuTTeh vetïï71f 'dttiitefort de son existence, re
tjui en son langage signifie ijn'il n'y ena
pas.
Quand on se sert des signes indicatifs, on formule deux pro-
positions dont l'une (la chose?signifiée) est ta
conséquence né-
cessaire de l'autre(le si(;ne). Par
exemple si une femmo a du
lait, elle a conçu. De là cette définition du sifjiie indicatif
«Ccst uneënoncifttion «pn dans un tnvrtytpisvm' correct est l'an-
lécédenl, et qui découvre la vérité duconsi:(|ii(»it
Dans la logique stoïcienne, et chez tous tes dogmatistes, toute
'•'<K.tl. ioa.
M., MU, :th.>: XÇiùiwi s» Syici wnwàvv H-^nyniftsvov tima/-vsîuoi> t. «
'lijwtoî. VS. II, imi.<>!C«II« il.-liiiiliini atail d'ahwi «(• chei Ifs s(on-i«>s, .•Ile ttu si;;n.- ,m |rouei,il
(vny. rid.'ssiis, |<. -itii), mit., t). Qicimt ott «iH Ctil b .listnu linn crili,. |.w cl..iustirliw ik>
sijjnes, ''Ile s'.i|i|ili(|iin !iiii<|ii.iii.iil ;iu sij;m: imliralif: <;t niiiiii, ,v si,;i,u
I piiisi|«'il si'rt :« I»il.WMrHtrjlii.il) <st t.? sijji»- |r <i-f|t.-u«-.>. Mm- .|if S-vIi'k.
:i'i'i LtVttE IV. – catAl'i't'ttK t(.
déiiiotistratimi avait pour [«•'fuisse un awnfiuivw tïe re genrec'est ht majeur».! tl<» presque- tous les .syllogismes «;t sorties, le.
nerf do (mîtes lus preuves, l 1'cxî.steiti'c (les signe* indicatifs
est doue liée toute' lu théorie de hi démonstration. Lessceptiques,
après «voit* refusé ùl'esprit humain I» coniiaissainf directe de la
vérité, devaient essayer tl«* lui arracher encore celle dernière
arme ilsn'y ont
pas mampté.
Tout d'abord, lesjjjue
ne saiiruit exister absolument et partui-nvhiM1 il est une celaUtm. lit». <-ltose n'est un signe tjuo si
»n la met enrapport avec ce dont elle est le signe, l'ar suite,
le sijjue et la chose signifiée «luirait élre pensés en même temps:de même (fii'on tic put penser » fa droite «ptVn l'opposant à la
•piuriw. Mais si. en connaissant k» si|jne, on romiatt la chose
st{j»ifî«.;e, » «ftiwi sert le si*jii t* H«enous apprend rien (joe nous
v'jiit'jvini'Hu-itl » l'aïKii'ittre !wiwn<>!t>j;i<* stiHcii'ime, l*ii[>|n'tie jiiiip|i;uu'iit 1'! sijjn».Ce*t « (|ii! ivsout uni> iliRîcuttv i|»i a
«•uliarra^i* \almp i |i. i /i3). Si ou It! atlculi-
venicnt tes «b-iit |)a-.s;iji.>s ik» S.'il»s ( I» Il io'i et .W. VIII, a.'i3 ), on voit fluire-
iiiBiif i|n<; ibim Tint et ilans l'anln», r'wt iik'iiilu si|>in> initiialif iju'il s'ajjtt. Un pouavant f<>
proiuinr A; ea< pas^aj; i'i>ïpii^i(ni (par li«(ii«ltc .Si>x(iisiiimuiice le dcTOlop-
|»"ine»t >fni v;i siiiuv v!x iv:r.ipxtr,v Itiia tu irStanutiv viipcîov ei'utuf ionov-
Ux'kss imli<jti.> Iiifiti «|iift c'est du st|;ne inilintlif «pi'il v«ul parler. Kl <(!«• le scconil
passage Itaiti* aussi la mi'iiie i|u.-lion. i-Vst <•<»ipi'nlli'sti; tout le <lév4:lappcni<"iilJiint il lait |ijrlii', et lu |i.ï«a|[o l •!•]'>) où l'aiili'iir upp»MCle sij;ni. soit si'B-
silita. suit inl-HijfiliW, mais toujuitts iud'natif, ni si|;ne ciiiiinii-iuuratil' ùcoiep«rot* if iT lô tnftsitn; i^'iot »vtù Çvmv iytst «pot i«i
îvhixwiQ*i oi^l Ji ixsfoo
Utiv ejjei iwhixuKm' t«5i> iliiïwp. tt «t vrai tpte parmi jcî (.«scitiplcs, Sextus
tiidiquo un >i;pn' iiiarHrr-stciiii'nt <:uiiitiit>iii<iialif e! ji/.i lyei Hic. Mai< cela
|iroi(Vi; «HN|it>'iiii>at i jiti! la (|ni'<<liim «<? »• [uisait pas (mue k>s <.l(ii<-i«n«™miin' pcmrSintliis, «|ii" la «lislini.lion «ntn> Im ilmin «>rti"s «tesignu «l'était pas -rnrorc fuite Le
j;iaii<l jiuinl pcitir les ^uiok'fii, «t <|uVnlnt le si|;nc <•( h ehuse sij[iii(i«i' it v ait
im (ion niWMiin* tîxwo'/jii, m^tmii j. Kir ce swit*. Itur iWiniliull pent s'an-
pliqu-r à 'rt.cins >i;;u« ('rinun<'ii>i>rafil's m.iis minw aloiï ils IViiIl'IkIcuI tout aii-
ln>«»«il <pn- !•< ".Hptii|in's. l.'c»iiipl« tt joi/.» iyja iïSi »'(<! pas un sijjm» puni' i-m
.m «mis mi !•<»w|ilii|uis
l'ciiliiiKliMil ( c 'i:il-à-.liri! fiimiiiu fouili- sur uni! assuciatiim
i!ii!i;Si-iu|>ii iipii' | iTiTii ïsl pas mi si|;iic vatalih' pour tas -n'|i(ir|u">, an sens oit
I i'iiti>iiilrnl lis stonii'ii» ( i;'p<t-;i-ilir.' couiiiii' oxpriiiiaiit un lien uvcaMiire entre
<le_n\ iln>Sl. Il n'y a pour (m slnirii'iis, rnmniR le prniiïi» rlain>in(!nt i« telle SI.,
Ml t 'i "> if ii'iiii simiI sijjnc ilij;ne «!•• o> nuin r'i-sl l« »i»n« inilicilif celui i|ui
jiniiiM! îk Tiiii'&f $i<tevi un KtaMKiiiutl1.. tt. ni! t. On voit di1* lorsqu'il n'yva iii-oti.- raison puni- suppiM'i-, i-lii;ue le fiiil \atorp mi jicn liâtivi'iiii'iit, <pn'
h-
[ot^a;^ H. lut f'ht iutoriKilt^
I.K St:KPTI<:iS%fK. PAKÏIB DESTHUCTfVK. 345
ün u·W eHi.itaW · Iw n~a. n.a.s~a.· _e~A.
tte sachions la chose
si|jirtfh?e
est connue
parette-mônie, non
par le signe.
Le mène
argument peut
être
présenté
sous uneForme
plus
saisissante, it est
impossible (pte
le
signe
soit connu avant la
chose
signifié»,car en dehors «le son
rapport
aveceJl«,
il n'est
pas
un
signe.
H ne
peut pas
non
plus
are connu en mène
temps
qu'elle •. car
étant connue, la chose
signifié"»n'a
plus
besoin <fe
signe.Et it serait
trop
absurde d« dire
ijn'tl
est connu
après.
Le
signe est-il, connu parles sens,,
où
par laraison? Les épi-
curiens tiennent
pour
la
première opinion
les stoïciens
pour
ta
seconde. Mais
comment justifier l'une
ou t'attire? H faudrait une
démonstration mais la
démonstration suppose qu'on
connaît
des
signes
ou des
preuves,
et c'est ce
(lui
est
en question.
IWra-l-on néanmoins
<|ue
le
signe
est chose sensible (lom-
ment
com|)rendrealors le tlésnrroni des
philosophes?
Il
n'y
a
pas
de dësaeeord sur les routeurs, sur tes saveurs. Au contraire
philosophes
et médecins
interprètent
tes mêmes
signes
tie cetil
laçonsdifférentes. De
plus, pour
connaître les choses sensibles.
il n'est
pas
besoin d'éducation au contraire, si l'on veut
gou-
verner unnavire,
it faut
apprendre quels signes
atmom-cHi la
(cinpiUo
nu le beau
temps;
et il e« est «le même dans la méde-
cine. Hitfin. si le
signe
est chosesensible,
it doit être connu
par
trn sensdistinct, comme
la couleur
'\wl
est ce sens? 1
Suivant tes
stoïciens,
c'est la raison
([u'ijappartient dceon-
italtc<! les sij»uest
Ils CRibarrsissciit ce
sujet
d'une foule de dis-
tinctions subiiles. et
disent que
le
si^rle _esjLjinejmi|iositioii
simple, capable
de servir d'itntéf&lwtt à un
<nn>n(*pi^i>wl'! rc«j«-
lier, cld'en découvrir te
eonsécf tient..Mais y
a-t-il des
proposi-
tions
simples •'? C'est
une
question
et eotittnenl la résoudre,
sans recourir à une démonstration, c'est-à-dire à un
signe?YY
t.eavnifjficiv.il'
tl(>s »liiicii>it4 i>sl h i-i'iininn il<v ilcm|iro|)">iliinis,
ilont ta
|ir<
niiw. «m«iilcii;'(fcii(r, «si
ta ("iiililiuu ta swobiW. un
cunswjiiitnlc. Ust'Hijila
sisi
!<•
<in|i«
<!meut l'ùtiK* l'vistc.
11 "s a;;tlici du t.sxxov ritms/H,
<\urUs ^louiiMis ili- I.iiviiI
iiioiyipjxl,
cl
iliml h"«
••|tirtti ii.-lisirw'lil
Crsisli'ilii'. H, Mi'l.
3ft« LIVREt¥.– €«.U>ITKBH.«*v u* mi tr. utl.'tt i t tllï tl.
a-l-it tt8*<yt»i»!fip(é'«réguliers? Onn'en sait rien. EtsVan'omptu,
ceux*|tti »e savent pas ce
qu'est une proposition simple, et n'ont
pus apprislu
dialectique, ne devraient pas savoir ce qu'eut un
signe. Ne voit-onpas pourtant des pilotes sans culture, et des
laboureurs, interpréter très exactement les signes célestes? lit
l«j chien necomprend-il pas des signes quand il suit une piste?r
S'il estétabli qu'il n'y a point de signe» indicatifs, il est éta-
bli par là mômequ'il n'y at pas de démonstration car lu dé-
monstration est formée de signes o« de preuves. Cependant, il
tant faire voirque la démonstration
proprement dite, telle quela tféf missent tes dogmatistes et surtout les stoïciens, est chose
absolument inintelligible.
La démonstration en général (ysvtm'} est chose obscure,'
car m» en dispute, l'our mettre fin ait débat il faudrait une
preuve, e'esl-à-dire une démonstration. Mais comment recourir
à une démonstration particulière, lorsqu'on ne saitpus si la
démonstration en général estpossible On a le choix entre le
cercle vicieux et la régression à l'infini. Prcndra-t-onpour point
oie départ une démonstration particulière qu'on déclarera vraie,
par exemple celle qui établit l'existence des atomes et du vide,
et inl'érera-l-on de tit(lue
la démonstration en général est pos-sible? ( l'est faire «ne
hypothèsemais
l'hypothèse contraire sera
tout aussi légitime.
D'ailleurs, quand nous exprimons la première prémisse, ta
seconde et la conclusion n'existentpas encore quand nous
exprimons la seconde, la première n'existeplus. Or,. un tout ne
petit exister si les parties n'existent pas ensemble. Donc, iln'y
apas de démonstration
Les dolytnatistes répondent 11ne faut pas demander (lue tout
soit démontré. On doit poser d'abord (t?£ ùisdHmus >.ap6n»eii>)certains principes évidents, si on veut que le raisonnement1
puisse avancer. Mais. répond lesceptique, il n'est pas nécessaire
que le raisonnement avance. Et comment avancera-t-il? Si tes
(' II. 1V1.
.1 I.K SKKPTICISMK. – P.illTlB MSTHL'UTIVK. 347
prémisses sont (tonitées- comme <fcsimples apparences, tout ce
qu'on en tirera ne seraqu'apparence et on n'aura
pas atteint le
véritable but de la démonstration. Vouloir atteindrepar ce moyen
la réalité ou {'être, c'est le fait de gens qui renoncent à se servir
du saut raisonnement, ets'emparent violemment de ce qui n'est
pas nécessaire, mais seulement possible.A vrai dire, c'est d'hypothèses de cette sorte que les dognia-
listes font dériver toutes leurs démonstrations et toute leur phi–
lesophie. Maïs, autretju'à
«nehypothèse on peut toujours op-
poser unehypothèse contraire,
ce qu'on pose par hypothèse est
vrai ou faux. Si c'est vrai, à quut bon recourir à l'hypothèse f c'esttaire tort à la vérité. Si c'est faux «c'est faire tort à ta nature et
te reste sera fans aussi. Dîcu-t-onqu'il
suffit de tirer rigaureuse-raeut d'une
hypothèsece
qu'elle confient? Mais à ce compte, si
oit commencepar supposer que trois est égal à quatre, on pourradémontrer que six est égal à huit. Puis, à
quoi bon ce détour?
tard faire que de recourir à deshypothèses, mieux vau-
draitsupposer tout de suite que ce qu'on veut
prouver est cer-
tain. Oh dirapeut-être que l'hypothèse
estjustiliéc par ce fait
que tescmiséquenccs correctement tirées sont conformes à la
réalité? Mais comment prouver ta vérité de cesconséquences,
puisqu'elles ne sont eHes-indmes justifiées que par les pré-misses ? Et combien de fois n'arrive-t-il pas que de
prémissesfausses on tire des conclusions
quise trouvent être vraies ?
Des difficultés particulières peuvent être soulevées au sujet du
syllogisme dont tes dojjmatïstes sont si fiers. Quand on ditque
tout homme est animai, on ne te sait que parce que Sacrale.Platon. Dion, étaient à la fois des hommes et des animaux. Si
donc on ajoute Sociale est homme, donc it est un animal, on
commet une pétition de principe car la majeure ne serait pasvraie si la conclusion n'était <l«'jà tenue pour telle"
II n'y apas non plus d'induction. On veut trouver l'universel
à l'aid«>dus casparticuliers { itio » xntà.
pépot aiaiovofixi n
K.Il, ,<
S'të UYM IV. CHAPITRE If.
Il ..ti
«J • **»¥ Ht# If. till:li I I II IV If.
xa&jAw)1: mais si on ne considère que ([nclijUfS cas, l'induction
n'est (mis solide; si ou prétend les considérer tous, on tente l'im-
possible, car les casparticuliers
sunt en nombre1 infini.
It faut <<n«lire mitant des définitions, auxquelles les dognrn-tistes attachent tant d'importance. On ne
peut liélinir ce ({«'on«e connait
jiaset si on le connaît, u tjuoi bon le tlûtinîrf Et ù
vouloir tout définir oit tombe dm»frle progrès à Knfini8'.
H n'yil dont' tir signe, ni détnoust ration. Mais, arrivé au
tenu» de futte longue argumentation, le spepltrjuc n'est-il pas
pris en flagrant délit de contradiction, et tes dognuttistes ne
vont-ilspas retourner contrit lut ses propres armes ? Ou vos pa-
roles, diront-ifs, ne signifient rien et alors à quoi bon tant de
discours?- Ou elles ont une valeur: elles sont «les signes et «les
preuves, et alors f|tie devient votre thèse 1/e mène, ott it n'v »
pas tle démonstration, et alors vous n'avezpas prouvé qu'il n'y
en apas: on vous l'avez prouvé, et alors il n'est pas vrai qu'il
n'y ait pas de démonstration.
.\fitjs le sceptiquea
réponse à tout. Je n'ai pas nié, dit-il,
l'existence des signes eominémoratifs, tuais seulement celle des
signes indicatifs. C'est clans lepremier sens qu'il faut
prendrenos paroles elles
n'apprennent rien ou ne signifient rien, mais
servent seulement àrappeler
à la mémoire les arguments invo-
qués centre les signes.
Quant à la démonstration, jVcorde que je n'ai rien prouvé,il est seulement
probable qu'il n'y a pas de démonstration voiliti
cequi
meparait en «'<*moment: ]« n'affirme
[tas qu'il en sera
toujours (te même l'inconstance de fhonuiM est si grande!
OhjeeCi'rail-on que lesceptique n'est pas persuadé
de la valeur
de ses arguments, qu'il n'est pas de bonne loi? Qu'en sait-on?
La persuasion ne se rouimaiide pas on ne peut pas plus prou-ver u un homme qu'il n'est pas persuadé qu'on ne peut prouverà lin Imuune triste
qu'ilm;
l'est pas.
M'oublionspas
d'ailleursque le sceptique n'affirme rien. (le
ll.i.
II.
u-: scKrnms.UË. – i'ahtie hkstihjctive. m1,1. ~H'.I~H' – r~Ktm tm¡'lIuHd1VI~. :E!>~
qu'il opposeaux (ïaginaiistes, ce sont des paroles vides
(f^è»&6m Ùyap). lît fût-il vrai
que son argumentation est triom-
pliante il ne s'ensuivrait pas qu'elle se détruise «He-mème, et
s'exclue en s'établissait*. Il y a bien des choses qu'on dit en
sous-enfendant une exception par exemple, si on ditque
Jupiter est le père des Dieux et des hommes, on sous-entend
qw'il n'estpas
sonpropre père. De môme en disant «fii'il e.4
impossible de rien démontrer» onpeut sous-entendre sauf
cette proposition moine. Accordons pourtant que cette argumen-tation s'exclut elle-même elle ressemble au feu qui su consume
lui-même en nwîme temps que la matière rpii l'alimente, oit ai
cespurgatifs «pri sont chassés- en mi'me temps ipw (es humeurs
qtr'ils entraînent. Etpeut-eire enfin le
sceptique resseinlite-t-it
iVl'hommetpii, arrivé ait faite, repusse du
pied IVchelle (lui
IV a conduit. (,'ontcnt «l'avoir démontré qu'il n'y apas de dé-
monstration, il n'a plus besoin de cette démonstration, et il
l'abaudonni!.
«' Contre les pltt/siciem, C'est surtout dans lesquestions de
physique ijuese manifeste la
présomption des (lojjmalislesmais lit encore il est aisé de démontrer l'inanité de leurs pré-tentions. 11 suffit pour cela d'examiner les
principes et les idées
les plus essentielles, telles fpie celles de Dieu, de la cause.
active ou passive, du tout et de la partie, ducorps, du lieu, du
mouvmuent, du temps,du nombre, de la naissance et de la
mort.
Dans la question de l'existence des Dieux, plus encore (lue
partout ailleurs, Sextus s'attache à tenir la balance égale entre
l'allirmalion et la négation, ilexpose longuement et
impartiale-ment les arguments des doginatistes, et réfute même en passant
quelques-unes des objections qu'on t dirigées contre eux a tire
cette partie de son œuvre, on leprendrait pour un
croyant. Il
semblequ'il ait à cœur de ne
pas mériter le reproche d'impiétéen insistant avec
trop de complaisance sur lesarguments néga-
tifs. i'l on voit dans toute cette discussion percer le souci de ni;
35M MVKK IV.-CIUlMTRfi il.
passe mettre en
upjiasîtionavec tes «'avances commîmes. Ltt
sceptiquene veut pas se laisser confondre avec les athées, et il
s'enferme strictement dans- son rôle d'avocat, qui plaidealterna»
tivement le pour et le contre, sans conclure. Au reste. la thèse-
négative n'y perd rien, et elle est exposée à son tour avec les
mômes égards.
Les trois preuvesstoïciennes de Tesistenee de Dieu, tirées.
Tune du consentement universel, l'autre de l'ordre du monde,
la troisième des inconséquences où tombent les athées, sont pré-
sentées et discutées tour à tour. Dans cette critique,Sextus se u
borne à reproduireles arguments de Carnéade, que nous avons I
résumés ci-dessus il est inutile d'y revenir ici. <
Nous n'indiquerons pas tous les arguments invoqués par les
Nce|)ti(|uescontre l'wlfo de cause, la etef de voûte de toute expli- 1
«ation physiquede l'univers. Vraisemblablement, chacun des
sceptiques qui se sont succédé a tenu à honneur d'inventer une
ttitliciiité nouvelle, et de tancer sa flèche contre l'idole.
Trois cas peuvent être examinés ou l'on parle de l'agent
(cause active), ou de i'ngcnt uni .-tu patient (principe passif Ott
matière),ou du
patientseulement. :i
Pour la cause active lK sansparler des arguments d'/Ënési- a
dème, exposés plushaut. il est clair
qu'elle appartient, comme
le signe et la démonstration, à la catégorie des choses relatives
une cause ne peut èlre appeléede ce nom (lue si on a û;;ard à
son ell'el. et de même l'effet est inintelligible sans la cause; il
est donc impossible de comprendrece qu'est une cause en elle-
même. Et pourla même raison, on lie peut dire ni que
la caust;
précède Feiïet, puisqueavant l'effet, elle n'est
pas encore cause;
ni qu'elle l'accompagne, puisque l'un et l'autre étant donnés
onstmible on ne peut distinguer lequelest la cause, lequel
est
l'ettet; ni rpi'elle le suit, car ce serait trop absurde.
En outre, s'il y a des causes, cequi est en repos n'est pas la
cause de ce (lui est en repos, ni ce (luiest en mouvement de ce i
''• M.AX, a»-. (;f. P., Ml, a i Rappelons (|ti« r elle ni-gumeiitalion "'stattri-
l»uée, à tort cruvniis-nnm à .Enésiilsmi1, par Sais»* Vov«* ci^tvssi», p. -t.
I
M-: mmmmmi j'aktik hesthim;tivb. 35» 1
qui i>st en mauifemeiit; car «tans te deus cas. faprétendue
«
cause «t leprétendu effet sont indiscernables. Voici une roue en
mouvement; celuiqui la tourne est aussi en mouvement et de
«fuel droit direque te mouvement de lit roue est l'effet plutôt
que la cause du mouvement de celui(lui
ta tourne? Mais d'autre
part, ce qui est en repos ne peut pns plus être lu cause du
mouvement, que le (Voici ne peut réchauffer, ou le chaud re- v
froidtr; et de mène cequi est en mouvement, n'ayant pas en ï
soi leprincipe du
repos, nepeut produire le
repos, Comme il
n'y apas de
cinquième hypothèse, il faut direqu'il n'y
apas
de l
cause.
Dira-t-011que la cause active
n'agit pas seule, mais de cou-ceri avec le
principe passif ou la matière? On verra bien d'autres l
absurdités. D'abord oh aura deux noms, ceux d'agent et de pa-fient, pour une mène chose le
patient sera aussi actifque
?
l'agent, et l'agent aussi passif que lepatient. Le feu ne sera
pasplus la cause de la combustion
que le bois qu'il consume.
Deplus, pour agir et
pàtir, il faut toucher et être touche*.
Mais l'agent tout entier nepeut toucher le patient tout entier:
car ce ne seraitplus un contact, mais une union. Une partie de
t'un louchera-l-eile une partie de l'autre? No», car si elle tou-
chait cettepartie tout entière, elle se confondrait avec elle; et
si elle n'en touchaitqu'une partie, la mc?me difficulté se
repro-duirait, el ainsi a l'infini. Il est de même
impossible (lue le toutsoit en contact avec ta partie, ou la
partie avec le tout; iar letout devenu coexlensible à la partie lui serait égal, ou inverse-
ment. 11 11e restepas
d'autrehypothèse.
Quant ir la cause passive, si elle est. en tant qu'elle a une
nalure propre, elle ne peut êtrepassive: car elle est déterminée
en elle-même autrement que par le fait d'êtrepassive. Elle le
peut encore moins si elle n'a pas de naturepropre. Par
exemple,Socratc ne meurt pas tandis qu'il vit et il lie meurt
pas non
plus quand il n'est plus. Une chosequi s'amollit n'est pas pas-
sive tantqu'elle reste dure: et
quand elle il cessé de l'e*tre. elle
n'a plus rien à subir.
352 LIVREH. Clf U'tTKKII.
Ilepms,
«ne chose m1petit
otrepassive- que par
sanni-aitimi 1
addition ou altération. Mais la soustraction est chose inintelli-
gible u'. Les mathématiciens st> moquenttin momie car ils par-
ient «le couper on doux une %ne droite. La ligne» suivant eux,
estcomposée
depinte
comments'y prendre {tour couper
une
ligue composéed'un nombre impair
de |ioiuts. de neuf par
exemple?0» ne put diviser le cinquième point puisque
le point
est sans étendue: et si »m ne le divise[ias,
les d<i«vparties,
au
lieu d'être égales, auront l'une quatre»l'autre
cinq points. Pour
la même raison on ne peutdiviser un cercle en deux, et uni*
t
ligue droite ne peut eu cotiper une autre. Ainsi encore on ne peut
1
retraticber un nombre d'un autre,par exemple cinq
de six. Car
pour retrancher une chose «Tune autre, il faut qu'elle y ««il t
contenue. Mais sicinq
est contenu en six, quatresera contenu i>
en eimj.trots en
quatre,deux en trois, un en deux ajoutez
tout cela, et vous trouvez que six contient quinze,et tjue cinq
contient dix. On pourrait montrer ainsi. observe judicieusement
Sextws. quele nombre six renferme une inlimté. de nombres. Et
voilà pourquoila soustraction est impossible.
Oit nous dispenserad'insister sur les raisons analogues qui 1
prouvent que l'addition et l'altération sont impossibles.
Le tout et la partiesont aussi inintelligibles Si le tout existe. i
ou bien il est distinct «lesparties,
il a une existence propreet
indépendante,ou il n'est que l'ensemble des parties. Mais il
n'est pasdistinct des parties;
car si on supprime les parties,il
n'est plus il stillil même pour le faire disparaîtred'enlever une
.seule partie. Le tout lie peut d'ailleurs être défini que dans sa
relation avec les parties.Et si ce sont les parties qui
forment le
tout, diia-t-on quece sont toutes les parties,
ou seulement
quelques-unes?Dans ce dernier cas il aurait des parties (lui
ne seraient pasdes parties du lotit, ce qui est absurde. De plu»,
il faudrait renoncer à définir le tout comme on te fait d'ordi- J
naire, une chose à laquelle ne manqueaucune de ses parties.
Si
• M.. IV, 4«:t..M..IX.S3S.
c
LE SCEPTICISME. PAKTfK DESTRUCTIVE. 353
»;>
ce sont toutes les parties qui forment le tout, le tout par lui-
m&ne n'est plus rien, etpar suite il
n'y a plus même de partiestout et parties sont choses corrélatives commele haut et le bas,
la droite et la gauche.
Mêmes dilficulk'sà propos du corps11'. On définit le corps une
chose(lui a trois dimensions longueur, largeur, profondeur.
Mais lalongueur n'est rien car la
longueur, c'est la ligne, et
la ligne, disent les mathématiciens, c'est un point qui s'écoule.
Mais le point n'existe pasil n'est ni
corporel, car il n'a pas dédimensions, ni
incorporel, car comment pourrait-il engendrer(tes
corps?Ce
qui engendre ii'agil que par contact, et ce quin'a pas de parties nu
peutêtre on contact avec rien. Le point ne
peut mêmepas former la ligne en s'&oulant; car, s'il demeure
au môme endroit, il reste unpoint, et ne devient
pas une ligne;s'il
passe d'un endroit dans un autre, abandonne-t'il entière-
ment le licuqu'il quitte?
Dans le lieu nouveau qu'il occupe, il
est un point, et non une ligne. Ne l'atiandonne-t-il pas, et oc-
cupe-t-il à la fois le lieu ancien et le lieu nouveau ? Si ce lieu
est indivisible, le point n'est toujours qu'un point; s'il ne l'est
pas, le point sera divisible comme lui, et ne sera plus mène un
point.
La ligne n'est pas davantage une série de points, car si les
pointsne se touchent pas, on ne
put direqu'ils
forment une
seule ligne et comment se loucheraient-ils, n'ayant pas depar-
ties, et nepouvant se toucher sans se confondre;?
On démontre de inàne (lue ht surface et le solide sont choses
inintelligibles.
Il nous semble inutile. après avoir résumé les arguments
sceptiques sur les points lesplus importants, <lo
poursuivrecette exposition dans le détail des autres
questions. C'est tou-
jours la mt?me méthode ce sont toujours les mômes procédés.on
pourrait dire les mêmes artificesdialectiques.
Ce que nous
avons dit sullit amplement à en donner l'idée. Nous nous hor-
' M., ix. :«*.
m LIVRE IV. -CHAPITRE H.
nut'ons doue « indiquer les autres questions sur lesquelles porte
le débat.
On no saurait se faire une idée «lu lieu car il n'estpas
un
corps.et ne
peutêtre vide. De plus, puisque. par définition, it
contient tes corps, et doit par conséquent être hors d'eux, il
faut qu'il soit ou la matière ou la forme des corps, ou l'inter-
valle qui sépareles {imites (les corps, ou, connue disait Aiislofc.
ces limites m&nes toutes hypothèses inadmissibles.
Le mouvement estimpossible car or ne
peut comprendre ni
qu'un mobile soit mis en mouvement parun autre corps»
ni
qu'ilse mette en marche de lui-môme, Les sceptiques s'appro-
prient en outre l'argument de Zenon d'Ëlée un corps ne peutse mouvoir, ni dans te lieu où il est, ni dans le lieu où il n'est l"|
pas. Restent enfin tes dtllieultésque soulève ta question de sa- <
voir si te mobile, le temps, le lieu, sont ou non divisibles à l'in-
fini nil'opinion des stoïciens, qui admettent la divisibilité à
l'infini, ni relie desépicuriens, qui reconnaissent des indivi-
sibles, ni celle de Straton te physicien, qui admet l'indivisibilité
dans letemps, mais refuse de la reconnaître dans tes mobiles et v
dans le lieu. rie résistent à On retrouve dans cettecurieuse discussion la
plupart des arguments qui sont encore
invoqués de nos jours par tes partisans et tes adversaires de
l'infini actuellement réalisé.
Comme le mouvement et le lien, !<temps ne peut
ni être
conçu, ni exister-, car it ne saurait «Hit; ni uni, ni infini, ni divi-
sible, ni indivisible: it ne peut ni commencer, ni finir; il est
l'omit' du passé, qui n'estplus,
et de l'avenir, qui n'est pas en-
core; enfin it n'est nicorporel, tit incorporel.
Le nombre est impossible car il n'est ni une essence distincte
des choses nombrées, ni uni»propriété
des choses nombrées. Kn
outre, quoi qu'aient dit tes pythagoriciens, on ne peut connaître
l'unité; et, comme t'avait montré Platon, on ne peut pas non
plusconcevoir qu'une unité, s'ajoutant
à une autre unité, cesse
d'fHre l'unité et devienne le nombre deux.
linlin on ne peut comprendrela naissance et la mort, lie qui
i
Uv SKKPTItiSMR. – PUtTIK l>ESÏtll.-«:Tf V-JE. 355
-j.'i.
ttmfo, c'est ihi
«•> qui i>\îsk\ oit «•«;qui
n'existepas mais
ce «nri
existe n'apas
à naître, et à cetftti
n'existepas,
on »«peut attri-
buer aucunequalité, |)u nrênm «ne chose ne
peut naître ni «le
ce(lui existe, ni «le ce qui n'existe pas. Les mènes raisons mon-
trettt l'impossibilité de in mort.
'A° Contre les moralistes. Laquestion capitale en morale
est celle-ci Qu'est-ce quele bien ? Le sceptique répond qu'il
n'y apas «le bien*
Tout le monde- aecordeque le feu produit de la chaleur, et
la neige du froid. Si le Jiïen existait naturellement, il feraitaussi sur tout te inonde la même impression. Mais d'une
part,
pour les hommes incultes oh ignorants, le bien, c'est tantôt la
santé, et tantôt les plaisirs do l'amour; c'est de s'emplit- de vin
ou de nourriture, ou encore de jouer aux dés, ou d'avoirplus
d'argent (lue les autres. D'autre part, parmi les philosophes; les
titis, comme les péripatéticiens. distinguent trois sortes de
biens, ceux de l'Ame, ceux ducorps,
et les biens extérieurs; les
autres, comme les stoïciens, en admettent trois sortes aussi,
mais ils l'entendent autrement, et distinguent les biens inté-
rieurs, comme lus vertus, les biens extérieurs, comme les amis.
et les biens qui ne sont ni intérieurs, ni extérieurs, comme
l'honnête homme. Kpîcure est d'un mis tout différent, cl on a
entendu unphilosophe dire J'aimerais mieux être fou
quede
me. livrer auplaisir.» Entre toutes ces théories il n'y a aucun
moyen de choisir. il n'y a pas de critérium.
Km outre, le bien est-il le désir(lue nous avons d'une chose,
ou cette iltosi; elle-même/ O n'estpas
le désir, car nous ne
ferions aucun effort pour obtenir enque nous désirons, puisque
la réussite ferait cesser le désir. tët ce n'estpas la chose; car,
ou elle serait hors de nous et alors, si elle produisait sur nous
une impression agréable, ce nVsl pas par elle-même qu'elle se-
rai! tin bien; et si elle non produisait pas. elle ne seraitpas un
P.. IU. 17.
356 UVRE IV. UKAl'ITHK II.
bien, et ne provoquerait de notre partaucun effort. Ott elle
sentit en nous mats elle ne peut être dans le corps, qui est
étrangerà ta raison: et
(juantil l'Ame, outre
que peut-êtreelle
n'existe pas» si elle est composée d'aloines, comme le veut fêpi-
eure, comment eompreudre tjue dans un groupe d'atomes, le
plaisirou le jugement puissent apparaître ?
tët iln'y
apas
moins
de clillkultés si on définit l'âme à la manière des stoïciens.
Eulin d'iiHiombi'ables exemples prouvent que les hommes,
sefnn los temps et les lieux, ont les itlét's lesplus différentes sur
le bien et sur le mal sur le juste et t'injuste. Sextus reprendici ï
tous tes faits «{ti'ilil défit énuinérés à propos du dixième trope
»
d'-Enésidènte, et il en ajoute beaucoup d'autres. En présencel!r'
tfe tant (le contradictions» it ne resteplus qu'a suspendre
son
jugement.
Allons plus loin. Fut-il vrai que lo bien et Je mal oxistent, il
serait impossible de vivre heureux. Le malheur a toujours pour
cause un trouble, et te trouble vient toujours de ce qu'on pour-
suit, ou qu'on fuit une chose avec ardeur. Or, on ne poursuit
et oh ne fuit «ne chose que para1 qu'on ta croit bonne ou mau-
vaise. Maistjuiconipte
a «ne opinion sur te bien et sur le tnat t
est malhetiretjv. soil que jouissant deci'
qu'il croit être un bim», t
il craigne d'en êlre privé, soit que, à l'abri de ce qu'il croit ïslre ti
un mal, ii redouttt de nepas
t'être toujours. D'ailleurs, k- mal
t>st, de l'aveu <&dogniatistes,
si voisin «tu bien,qu'on
nepeut
avoir l'un sans l'autre ainsi, celui 'lui aime l'argent devient
avare; celuiqui
aime la gloire est bientôt tilt ambitieux. Enfin
la possession du bien ne satisfait jamais celuiqui
l'a obtenu.
Riche, il désire accroître sa fortune, et il est jaloux de ceux(lui
possèdent plus qtit: lui.
Cependant, les dojjmatisles prétendent qu'il ya un art de
vivre heureux et ilsl'appellent
la sagesse. Mais lorsqu'il s'agita
de définir cet art, ils sont en désaccord. Les stoïciens, qui afii-
chent à cesujet les plus hautes prétentions,
avouent qu'il n'y at
pas de sage parfaitil n'y a donc point de
parfaitbonheur.
D'ailleurs on a vuplus
haut que la science en général est im-
1
i
LE SCEPTICISME. – PARTIE DESTRUCTIVE. 3SÎ
possible i il nesaurait donc y avoir «lu science de bien vivre. La
science et l'art se reconnaissent à leurs œuvres Fart du méile-
cin à lu guérison «jn'il produit, l'art dupeintre
à ses tableaux.
Mais il n'y apoint if œuvre
propre à la sagesse entre tes actions J
accomplies par te commun des hommes et celles du prétendu
sage, il n*y apoint de différence honorer ses parents, rendre
un dépôt, voilà des choses dont tout le monde est capable.
Enfin, lesage no peut être
appelé vertueux (juit s'il doit
lutter contre des appétits contraires à la raison l'eunuque n'est
pas continent, et ceux qui ont l'estomac malade ne sont passobres. Si on dit que la vertu consiste à vaincre ses
appâsls, le
sage n'est pas heureux, puisque sesappétits sont pour lui une ;=
cause de trouble- et sa sagesse ne lui sert à rien.
Y eut-il un art de vivre heureux, il serait impossible dp l'en-
seigner. Trois choses sont requises pour tout enseignement il J
faut qu'il y ait une chose à enseigner, puis quelqu'un qui en-
seigne, enfin quelqu'un qui reçoive l'enseignement. Mais il n'y ;
a rienqu'on puisse enseigner. Car on enseignerait ce cpii est, ou j
ce(lui nVsl pas. Enseigner ce
qui n'estpas serait absurde. Si
onenseigne
cequi
est, ont'enseigne
en tantqu'il
est. ou en
tantqu'il possède quelque qualité.
Dans lepremier cas, la chose
enseignée est un être, et par conséquent doit èire évidente. Le
second cas est également impossible; car l'être- n'a point d'acci-
dent ou depropriété qui ne soit un être.
Onpeut montrer de mène que ta chose enseignée ne saurait
être ni corporelle, ni incorporelle; ni vraie, ni fausse; ni arti-
ficielle, ni naturelle; ni claire, ni obscure.
Il n'y a non plus personne qui puisse instruire ou cire instruit.
Il serait absurde deprétendre que celui
qui sait instruit celui
qui sait, ou que celui qui ne saitpas instruit celui ijui ne sait
pas. Et celuiqui
sait nepeut instruire celui qui ni; sait
pas: car
ce dernier est comme l'aveugle qui nepeut voir, ou le sourd
quine peut entendre. Kt par quel moyen l'instruire? Ce n'est ni
par
l'évidence, car cequi est évident n'a pas besoin d'être enseigné;
nipar la parole, car la parole ne signifie rien par nature, puis-
3i8 LlVttË IV. – CHAPITRE II.
(jUt*les Grecs «e
«MRprettueiit pustus barbares, ut rtfcittfoijtte-
meftl i si lu parole a tut stsus. c'est en vertu «l'une convention
on m» peut «loue la comprendre qu'en surappelant
les choses
qu'on«'st convenu di*
désigner partes mois el cela
suppose
«ju'mi k's t'uuiuUt déjà.
fi n'y » (finie pas pius-c{<>vérité certaine en morale «{ii'il n'y
ïu a on p!tvsH|«K*et eu logitjue. Suspendreson
jujjw»cmtvoilà
la si'dti! chose raisonnable et «jni puisse donner te tioultcur. Si
t4l« Jte mi't pas l'homme à l'abri du tous lescoups
du sort, si
elle ne k jiivserve pastle ta faitu. de la soif, de la maladie, du
Mioins elle supprime twus ces tuai» imaginaires dont l'homme
se tourmente lui-même: et les maux inévitables, comme on Fa vu
mIpssus. elle Iw rend toujours plits supportables.fi
i
n
L'EMPIRISME. PAUT1B COKSTKUttTim 359 l
CHAPITRE
I,E SCEPTICISMBBMPifttQUB. PARTIE CONSTRUGTIVK.
Lu suspension absolue du jugement devrait logiquement
conduire, dans la pratique,à l'inertie absolue. Etre incertain
dans ses jugements mène tout droit à é*tre irrésolu dans ses
actions; leparfait sceptique, s'il
étaitconséquent
avec fui-mémo,
so désintéresserait de la vie. Lu doule se traduit, dans la vie
pratique, par l'inditlercnre. MaisPyrrhon est le seul qui ait usé
avouer cetteconséquence
sesdisciples sont
plustitttides. Vivre
à l'aventure, demeurer inerte, s'isoler du monde, ne s'intéresser
à rien voilà une manière d'êtrequ'il était difficile de recom-
mander sérieusement et qui avait peu de chances de plaire. En
Grèce surfout, lesapôtres d'une telle doctrine n'auraient guère
échappé au ridicule; c'est à peine si lessceptiques y échappèrent
en adoucissant singulièrement tes conséquences de leur principe.
Il faut vivre voilà ceque répètent
ù l'envi les adversaires des
sceptiques; et les sceptiquesen conviennent. Dès tors, ils sont
forcés d'admettre un minimum de dogmatisme. Nous avons vu
comment lespremiers pyrrlioniens et les nouveaux académiciens
reconnurent cette nécessité, et s'y soumirent. Les sceptiquesde
ta dernière époque n'échappent pasà cette lai. Ils
reprennentles vues de leurs devancière, mais y ajoutent quelque chose;
l'empirisme leur fournit un nouveau moyen de répondre aux
exigences de la vie pratique et du sens commun. Par suite, cette
partde
dogmatisme inavoué qu'onretrouve au fond de toute
doctrinesceptique, prend t\wt eux une importance plus grande.
Ce n'estpas qu'ils
la niellent volontiers en lumière, et s'y arrêtent
avec complaisance ils 1» laissent plutôt au second plan sentant
bien que là est Ifpoint
faible du système. Mais, par la force
360 LIVRK IV. CtfAMTHH [Il.t 1: P
des choses, ils sont amenés de temjjs en temps à sV-xpli^tter sur
cette question délicate; onpeut démêler chez eux quelques as-
sertions postées. Il y a comme une construction de modeste
aspect et de cliélivos dimensions à côté des ruines qu'il»ont
amoncelées, Recueillons avec soin ces indications dispersées: le
scepticisme nous apparaîtrasons tilt aspect assez différent de
celui qu'ilnous a montre jusqu'ici et présentera avec plusieurs
doctrines modernes (les analogies assez inattendues.
l. Nous ne voulons pasaller à l'encontre du sens commun t
ni bouleverser la vie, disent les sceptiques'•'>, nous ne routons »
pas rester tira? tifs !-K» Tout en laissant de côté la science dogma-
tique, reconnue impossible, il y a une manière empiriquedo
vivre il v a une observation pratiqueet sans
philosophiet
qui peut suffire.
Cette conformité à la vie eunmitino comprend quatre choses55'
i" Suivre les suggestions de la nature le sceptiquea des sens,
il s'en sert; il a une intelligence, il se laisse guider par elle et
cherche ce qui Illi est utile; a* Se laisser aller à l'impulsion de
ses dispositions passives t» sceptique maiifje s'il tr faim, boit
s'il a soif; 3° Obéir aux lois et coutumes de sonpays
le scep-
tiquecroit que la piété «si un hien.au
pointde vue pratique
(0iùnmv>), l'impiété un mal; h" Ne pasrester inactif et exercer
certains arts.
Les trois premières de ces règles prescriventun simple retour
au sens commun il faut vivre à la manière dessimples, voila
Sextiis, ,M., VIII, t.j^ OiSî (i»^ôps5« «« xoiviU tiv iiépiavv epo-
\w\tatv, O'jèi ttvj-/i^tv roi' plot.(lî Seil., I, ->3 Mij A'SvepjuToi mviivmn tivii. u'i Ovk wsi'ïpjniof
èaatv eV fût mpvtpGinqÈtv tv/vitt.<J| H, u'ifi lvfi«l(îii* Kit iiuiinTvs xxti lie xi.iri( tnpiiacit te xii V(<i-
XvttK J5ioîi> mspi tmc sV SoyptunUt Tssçtspy'vit xii pi/.to"i& lîu iS« {Siamxûf
^pji'if i.eyottèf<i»i èvè/awi,
î« 11,-54:1, a.. V. Xt, »«.=>. t. aï; Iil,]3.r»..tooiTo?(winpi|5K.
fttùtttxrï r\\pftfjiç.» l».,»,»3.
L'ËMPmiSMJÏ.PART1B G0NBTBUCT1VR 3G1~sm "II! 4V1
ce que répond te sceptique à laquestion obstinée de ses adver-
saires. Séduit un moment par (es promesses des dogmattstes (luifaisaient briller à ses
yeti* l'espoir d'une explication de toutes
choses, d'un» science qui, en satisfaisant son esprit, lui per-mettrait d'agir en
pleine connaissance de cause, il a pu les
écouter et les suivre. Réflexion fuite, ils'aperçoit que ces pro-
messes sonttrompeuses, ces
espérances fallucieuses; ify renonce
et revient à sonpoitit de
départ. Apres cotte aventuraspécula-
tive, itreprend, désillusionne"* sa
place dans la foule, il redevient
homme du commun comme devant; la seule différence entre lui
et l'homme du peuple, c'est que celui-ci ne se demande pas s'il
ya une explication des choses, tandis que le
sceptique croit
qu'il n'y en a pas ou qu'elle est inaccessible, an moinspour
le
moment. C'est un retour fortpeu naïf à la naïveté |irrmitive.
Etresceptique, dit-on souvent, c'est douter de tout. Cette for-
mule n'estpas tout a fait exacte. Le vrai sceptique ne doute pas
desphénomènes-, des sensations
qui s'imposent à lui avec néces-
site'; il distingue ses états subjectifs de la réalité située hors de
lui. Quand ilparle
dessuggestions (le la nature, de ses disposi-
tions passives, des lois et coutumes de son pays, ce sont (le
simples faits, sentis ouéprouvés par lui, qu'il a en vue; il ne
lesjuge pas. il n'ailirnte rien au delà des phénomènes.Il y a bien la une sorte de croyance ou de
persuasion
(«re7<r<s)îts. Mais cette persuasion involontaire etpassive (A»
âëovhfty mâOetxstftévit), il la distingue de l'adhésion réfléchie
et voulue que d'autres accordent aux préfendues vérités de
l'ordrescientifique. C'est Me rien croire
quede ne croire
qu'aux
phénomènes.
Lesceptique ne s'en tient pas là. Il recommande l'action,
l'exercice de certains arts, (l'est icique nous voyons apparaître
l'idée nouvelle dessceptiques
de la dernièrepériode.
Il y aquelque embarras dans les discours de Sextus a ce
sujet. Tantôt ce n'estpas seulement la science, mais l'art même
"'•/».,( l3.
3(52 LIVKK IV. CHAPITKK fil.
(ré^pn) «jtt'H proscrit-, et s'il recoimnamfc «l'apprendretes arts*,
il a démontré wltaiirs fort savamment qu'il est impossible d©
rienapprendre* Mats
il se tire d'allbire parnue distinction. L'art
qu'il admetest
puruiiient ciiipiriijiiu, <iilVainhi do toutprincipe
général c'est une routine. Platon, dans le Gorgiax, opposeà
peu près «lelit utàite manière ta mutine à la scicnce.
Lorsqu'il passe on revu») toutes les sciences connues de son
temps fNwr en montrer te néant, Sexfusa soin de nous prévenir
(jueses coups ne visent pas certaines priitii^ucs <|ui n'ont de ta
science que l'apparence, «H sont umcjtiementfondées sur t'expé-
cience et l'bbservatitfii. lutre chose est, par exempte,cette
partie
de ta grammaire qu'on apprend anï enfants, (lui leur l'ait con-
naître les éléments titi discours, les lettres et leurs combinaisons,
ff(lui
est i'art tie lice et d'écrire; mitre chose cotte sciencepré-
tentieusequi
veut cutmaître lu nature titèue des lettres et
leur origine. <|iii distingue tesvoyelles
et les consonnes et se
perd dans une l'oirte de distinctions sttUtdes- Contre la pre-
micro il n'a rien à dire: tout le monde convientqu'elle
est utile
à tous, au savant comme àiignorant.
De même quela médecine,
elle a un grand mérite elle donne un remède contre l'oubli, et
lesceptique
lui sait un jjré infini de lui permettre de sauver et
de transmettre à la postérité ses arguments contre t'autre gram-
maire.
De même, s'il n'aque
sévérité et ironie [tourla
rhétorique
prétentieuse des savants, il n'attaque pasla connaissance des
mots ni le boit ushjjc de la langue. Seulement il estime que
l'habitude et IMdtiriition libérale suffisent à les faire connaître'31,
et il préfère le laiifpfje sinijdeet familier des ignorants aux
beaux discours des rhéteurs. Ainsi encore il ni' blâme pas l'usage
des nombres nmis seulement la science arithmétique, et il ne
i-onfondpas
l'astronomie mathématique. i't surtout l'astrologie
f' t. :t T~/t'M' ~«XJt~M.
~f.. t. ~tf! .:a.
V.. 11,77-/ttt..r,
L'EMiMllISMB. – PARTIE UOtfSTRUâiVK. 303
des (JltiiIJt't'ns uvtM' cetto «bservittion |H'.tti({ue <{t» p«nnet tle
ptWii-ela
pittte, kliwm temps et tes tremblements de terre Ui.
Mais c'est surtout en médecin»? que cette distinction a une
grande importance, La médecine savante» celle desdognmtti juhs,
qui su flatte d'atteindre tes causes et <t<;connaître tWence des
maladies, paraît à Scxlus vaine et stérile; l'autre, celle desempi-
riques,ou
plutôtencore celle des
Méthodiques, tjui, négligeant
IomIo considération transcendante, se bornent ù constater des
phénomènes, a en observer la liaison, à en prévoir le retour.
lui scinbto excellente11'. Il décrit fort bien ks procédés de cette
dernière w: «En médecine, si noussavons qu'une lésion du cœur
entraîne la mort, ce n'est pas a fit suite d'une seule observation,
mais après avoir constat élitmort (hï Dion, nous constatons cellede Théon de Sociale et de bien d'autres. j> La science empi-
tif jue' (lid'èrc de l'utitn* «s» ce *jvie ses règles gûnériites sont
toujours obtenues à la suite d'un grand uombre d'observations ;i
faites directement ou ronscrvcVs par l'histoire.
ili's passages nous montrentque
tes médecinssceptiques
avaient parle* leur attention sur les moyens d'atteindre la véritédans k's sciences tfobservnJion ils avaient unis sorte de
logique.IWrt différente ;V coii|jsùr de cell» ti'Aristot» et des stotViens,(»n
plutôt une méthodologie, dont tes rèjfles et lespréceptes for-
maient uncorps de doctrine. Mathoiirausement, dans les ouvrages
tle Sevtus «jue nous avons, cespréceptes
ne sontindiqués qu'en
passant etpar allusion son but étant principalement de com-
bat -Ire le do|;niatisine. il n'a pas h insister sur ce sujet. H est
|l! M., V. i, a.
t. •••')(>. Cl. II. a'iO: Èf-cir.aa te xtt ilaÇioîùn jrati jit xairii
tnpvieti Te kiï Gpcthiim ,Si«w. Cf. aâ.'l. tt. -ÙK t» ixio'm liyvn riip hl
iw vptypixm •uip^xntuifhmv. M., VIH, tiSH Svy%upMopa> eV mis
Çmaptivait iwatiUMtttP tir* éyttiv ixofmOiw xnO' wv fumuwiiw til'j (ics-t ihw
ziOïvpnvxi:<« rii'«
-srpi m"j!i>, x-ii ara usti tiV» ix ïi'u i£rvpotiaw izax'îéaiu'i
*i'*t»î«VTai vk Mme.
"'M., V, i«,'i.
.1/ Vtil. ><jt H cv tr;(s ^iivj!i:voii aîptijojiéiin U)(im.' Hiiil.
Sàyip t«c Eu/ixtc T£T»|ii)p£iwf iï iif'mpnitinrr cwïitii i« ivr
.?c!8'pnFl.jt~'J! ~M~t'TFtf.
304 UVRErV.– CHAPITREFil.
bienpotable <p* si ses ouvrages de médecine nous étaient
parvenus, nous aurions sur cesquestions de plus amples éclair-
cissements, etejue
nouspourrions mous faire une idée à tu lois
plu* exacte «tplus précise do ce que nous avons
appeléla
partie©instructive de Peinpiiisrae sceptique.
A défaut du témoignage direct de Sestns,n»us trouvons elte»
Gatien des textes précis qui montrent avee laplus gronde clarté
fjueles médecins empiriques avaient mûrement réfléchi sur kw
questionsde méthode, et <[u'iis
avaient une théorie savamment
élaborée. Voici les principaux points de cette théorie, tels quenous pouvons les reconstituer d'après te De sertis >'• de Galion.
et surtoutd'après le Ik
subji'gumltoue'* empirteo, du ni&ne
auteur.
Lesempiriques sautiennenl
([ttela science médicale est
fondée, non pas, comme te disent les (lo|;m;i(i<[ues, sur l'expé-rience unie à fa démonstration niais sur
l'expérience seule'ïf.
Il y a trois sortes d'expériences l'expérience directe ou pre-mière vue
(autours), appelée aussi par Théodasw observation
(rripncrtf); l'histoire*, et le passage du semblable au semblable
(n iou iftoku (iSTot'feWfs)31.
Voùserration ou autopsie peut être ou naturelle, c'est-à-dire
due à une simple rencontre (mepiitivais), par exemplesi un
nomme soutire de la tt'te fait une chute, s'ouvre la veine eu
front, saigne etéprouve
unsoulagement ou improvisée (atÏTO-
vxéftov), par exemple si, dans une maladie, on éprouve du
soulagement ou une ;ij;f;raviition pour avoir bu instinctivement
de l'eau ou du vin, en tin mot, toutes tes fois qu'on essaie un
moyen suggéréen songe ou tout autrement; ou enfin imitatwe
Kilit. kuliii, vol. f, p. (ili W spij.
Le U\lf jjrcc >|p cet (jiiïrnjjo a iH« |ichIh nous n "avims tjiip il-s (railuclions
laliiies qui liaient il» xiv' siivle. U |<rinfi[«li' tl<- o-s Iraducliuiis, «••> il<> Xicolaus
niip(;imi<. n cti! rt>|)i"i[iiile an.c <ju--i>jms cwrectiuiu par liuiim.1, fk C. dakui
slihjig. imptr. 1)01111,1X73.!t
Stthjijf.einp., p. SU.'"
U»,t.,v. :•'*' ItiiiL. p. 'Mi. (X lie «.(.(.. «il. I, (i. t)<i.
I.'BMHKISMK. – l'ABTIK C0SSTRI1CT1VK. 365 Si. mi iiimiii), inativi \,fti\n i n lit. I IV I». Ma
(fiijttinKtl), si onexpérimente à diverses
reprises, dons des
afflictionsidentiques, des moyens quelconques qui ont nui ou
soulagé, soit accidentellement, suit par hasard.
Cette dernière forme del'expérience, surtout lorsqu'elle n été
précédée, comme on le verraplus loin, du passage du semblable
au semblable et qu'elle est devenuel'expérience savante
(-rpi-
€rxtf)fl!, constitue l'art. Quand on a imité non seulement une oudeux fois, mais très souvent (on «e fixe pas Je nombre tle cas
pour échapper à l'argument dusortie ^j le traitement qui a
soulagé une première fois, et constaté la régularité des effets,
«m arrive ait théorème(s-eaip^a), qui est l'ensemble de tous les
cas semblantes. L'art est la réunion de ces théorèmes celui quiles réunit est médecin !S>.
Ménodoli»'1' paraît avoir ni complété la théorie des anciens
empiriques. Dans l'observation imitative, on ne (toitpas. selon
lui, se contenter d'enregistrer tes cas favorables; il faut encore
s'assurer si le même remède aproduit le même résultat Ott tou-
jours, ou teplus souvent, ou si te nombre des succès égale le
nombre des échecs, ou si l«; suceès est rare. Faute deprendre
cette précaution, on n'a qu'une expérience incomplète et désor-
donnée, xaià fiiptof èfiTtsifitap àaùvOstw thtctpxpi/crav.Il
importe aussi de distinguer avec soin les caractèrespropres
et les caractères communs des maladies et ries remèdes. Pourles maladies. il faut considérer d'abord les
symptômes. Un
symptômeest un cas contraire n ta nature !il. La maladie est un
concours[owSpopil) de plusieurs symptômes qui surviennent,
fle uxt., j>. Gti Tifi» -eeïpit' tivttji» r>)v hophn» ni -toi ôjLaiov psnSiau
Tp~tjt~t' Jt!t)c'~)t'.
'•«S«bf.i8.
m De sert., lut. cit..
Galion, il est vrai, u'ittltiljiic |ws oi|>ie^meiit celle corrodinn à Mriiwlulc;mais cest Mùnoilotti {Sub/ig., 38) ijui a ilomui sou nom i fcxiiûricute itinmi-
plèle, et. par suite, il wmbli' bien «pie c'est lui qui a fait l>» pn>mior lu distinction.
Mënodote tient mie lell<> place lions te Uembfiguraliom tmpirîta qu'on peut
rroire «ju'ila servi<l«niudùlcou de guide » Galieu(wiif l'expositionde laméthode
empirique.'>'
Subjig., 44.
M6 LtVttK IV. – UHU'ITIUUH.
persistent- drintiattent etdisparaissent
en mêmetemps;ii. hea
«us sont «Hjstants (awî<5p««»'T«), les autres accidentels {mift-
ëjsiWra).H
ya aussi des conditions internes ou externes
qui
doivent vutrêr en 'ligne decompte l'âge,
lu tempérament, le
climat. Je sol, la saison" Cette étude attentive de la maladie,
fondée sur la simple observation, et en écartant toute considéra-
tion descauses cachées, s'applle non fa
dëleemiitàtioi^1 (tenue
dogmatique), niais la dùtiuction de I» makdie. Klle conduit non
à latté/initimt (terme dogmatique), mais à la ilesmf'mn (ùvo-
7pa$tr ùitoii-rr'jXTts).
Cependant la vif est courte. It est impossible au médecino
d'étudier lui-mènie tous les cas iiitéressaufs, IIprofitera donc
des observations de ses devancier); c'est l'histoire (l<rioph). u
Tous tes um|)irit[ues ont fait h l'histoire s» [rart. Ménotlote a g,
doimé à leur doctrine, sur ce point, plus de précision et de
rigueur.Selon lui '•*• il faut soumettre les
lémoifjiiaijesà l'exa-
men, tenir compte de leur accord entre eux, d«* la situation et
de la valeur moral»! des témoins, enfin et surtout, de fa concor-
dance des faits attestés avec ceux <|u'on peut directement ob-tt
server.il
Enfin, il v a des maladies que nous n'avons jamais observées•
et que l'histoire ne nous l'ail pas connaUn». If y a des remèdes cdont on n'a
puvérifier directement IVtJicacité wt
qu'on ne peut 5(se procurer: là intervient le passade du semblable au semblable
(il toû ifiialw ptrd&»Tts\. l'.fpassage
.se fait de pltiskurs rna-
niètX'S;r>1cf après la rcssemblaïKc desparties du corps le remède
qui a réussi au bras pourra réussir à la jambe d'apèsia tvs-
scinblance des tnabidies dans les mêmesparties
du corps on
Is"k-'
'>-y
'«De art. ,r'i. 83.
IJ
Snkji! i>i. ï.'??l bitMi piolidbl^iiK'iit eiïcoto Mt-uotiot*? (|in u pr«?scritfit siih- C
slituliun fie IM'HK'S i'i;;niireu«;iiii-nl •tiipiri<|iii-j;tui .X|tivi,iuiis <lo[jiii,iti<|iii!s
aille-
fiottrf'iiient usi(<s. Ou <mi vern pln^ Iimh tin ïtttd-i1i*xwnf>l<*
a prop"^ (f^
( ppitn~~jxW r.
lGui.it. L
W.ll/ ;>'l. t.f. U-'WI. ÙH
S,
L'KMHHÏSKK. PABTIK.c:oNSTB[!CTI¥& 3&7
tflKA(lïïr Ffi Éti.Aiï'tn• uivt. I.V. tht .t. I 1 é%traitera do la nrôii'ie manière fa diarrhée <•(fa dysenterie; enfin
d'après la ressemblance des remèdes. Il faut avoir soin seule-
ment, quand on veut substituer un remède à tut autre, de tenir
compte des différences eu mêmetemps que des ressemblances.
L'expérience monde en effet que les ressemblances do forma,de couleur, de dureté, de mollesse, assurent rarement la ressem-
blance des effets. U en est autrement des ressemblantes d'odeur
et de saveur, surtout si tes deux derniers caractères sont réunis.
Ici encore, Ménodotc a perfectionné litthéorie empirique.
Lepassage du semblable au semblable était aussi admis
par les
dogmatiques, mais dans \u\ tout autreesprit. Los dogmatiques
prétendaient tirer leurs conclusions de la nature intime dit fait
observe ils se flattaient d'atteindre l'essence des choses et d'ar-
river à fa vérité par la seule force dit raisonnement. Ils se fon-
daient, «nnine nous dirions aujourd'hui, sur desprincipes «
priori. Suivant tes empiritptes l'induction (car «-'est bien l'in-
duction que les anciensappellent passage du semblable au sem-
blable) nerepose sur aucun
principe logique. Elle nesuppose
(lue le .semblable doive produire le semblable, nique le
semblable réclame k* semblable, nicpte
les semblables se com-
portent sernblnblcmenl. Seule, l'expérience nous aappris que,
dans des cas semblables, (les remèdes semblables ont réussi.
Et, pour bienmarquer celte différence, que Ménodole n'a
pasinventée, mais sur
laquelle il insiste plus que personne, il veut
rjue lesempiriques se distinguent des
dogmatiques, même dansles mots le raisonttenienl qui permet de passer du semblable
ait semblable s'appellera lion pas. eomme le veulent les
'>Catien, Tlarap. melh. 7. Kitlm, ml. X.p. ia(I V.iphxciit (i» xix Tijs
acifxte 10 <U;a</J',F, i/j' ,,ix ii è.uÇwo\ftvov vï îlj o-jfiîr» • xii en iovio tûv
SfntipaiC-v otâe'n èfiÇiiveobsi Çn-jt tûié tiw iA » xaiioi yt ixoimtcï» Xifo-jftiroh TyJs xxi opoijyeîofe» m-h ir,Qie xii
mipvmp^sui lui: tvèt, mi ,vsi'naoai' tiir tv/yw xnpvaiv rs xii fii'tijiim $zmv ûvu ni ri me wi, xm ti wpôtivos mi ti («tî uvos aoXiixts èûpxtit. Tw mw e£ oiiîijf ii,t toi Upx') fi2logWomt ùfpipevov ifyvpûrxctv t» ixô/m'Jm' îvi-j t«< w£/pls 4viiihis xi! e«r.cmr
e'oîi oesonTd'te. Cl". Dci/tl. wtt.. 1 '1.K.. I, i/ii|.'•
Sut,fil;î,t,.
368 UVRE IV. -CHAPITRE lil.
lKjut»s,«iiafo|jts»«', niais é^ikj*îmiei}i. Par Ki rt sera bien entendu
qu'il nu s'agit pas d'une é'muHxtnttioit mais d'unesimple
consta-
tation de mccensious.
De plus, et c'est utt point capital, Ménodote® estime que le'
passage du semblable an semblable fait connaître non la réalité,
tuais lapossibilité. Tant
que l'expériencen'a
pas prononcé,on ne
dépasse pas la vraisemblance. L'induction n'est ps la découverte
(eSpsms}.En revanche, aussitôt que l'expérience a vérifié les
conclusions tirées de ta ressemblance, n'eùt-on fait qu'une seule
expérience, on possède une certitude complète53'. Par là. l'ex-
rienee savante {tp&mtf) diffère de l'expérience îtuilalive', qui
exige que la mène observation ait été fréquemment répétée.
En mèaie temps qu'il insiste sur l'origine empirique de toute
connaissance médicale, Ménodoie se distingue avec soin do ceux
qui se contentent d'une, simple routine et ne font aucun usage
du raisonnement1' Entre ledogmatisme, «pu,
ù l'aide des seuls
raisuttni'iinMits logiques, prétend arriver à la vérité, et l'érudition
sans eiiticpte, quise borne à amasser des faits, il y a un moyen
terme on peut faire une place à ta raison sans lui faire ttne
place exclusive Jî. Le véritableempirique constitue un art; il
instruit tes autres' Ménodote" appelle Irikicas et tribonieos tes
observateurs irréfléchis qui s'en tiennent aux seules données de
l'expérience. Pour parlerte langage moderne, c'est vraiment la
méthode expérimentale, et non le vulgaire empirisme, dont il
trace les règles.
Xiityr/f.titî TVocansppïtu;[ïsiiMiinhocfurliimi.i f X.'itf.Cf..Sprengelop.eii.t
p. (i-j i I." mut épilogume n'est |«is n'ii[voiiit;uii le Inirnf rln'i Aiislole et Kpicun;.
\[iii> tii M|;nitica(iuii |Kirtii:ulièi'e iju'il (Jteml chei tes ciu|iiii([ii('S p,nnil dater <t>;
,t6!IIIIftVU·.
=IHJ., .r>3, 55.
t"/tuf., ;>3, 55.
Iliitl. 'iy Uilît-rt(nnjiine ab va qui irraliniialcmcrtidilioiiemjier-Iractal.n a
111Ibid.. ijb -\lcnutii)liis, multoliens ([tiï<l>'in inlnuliiriiis aliml terlium pralor
Riemoriam, et mnsum, uiiiil aiiud jionens quant epilugisuuunt
Ihiil., ig -Constiitiit arl'-in. c! docel alioî.
Ibui, ,r>c>.H distingue I» tribaeat <( Iriioiiiro* des tnlionet, qui .«ont l''s vuls
vrais «avants.
L'EMMiSBE. l'AHTIK (ÎONSTHUCTIVJB. 369
'i ~1
Telto est» dans ses If ails essentiels, t;i méthode des médecins
l'iwjiiiitjnes. If serait intéressant do savoir s'ils Pont découverte
ou empruntée, et àtjttelle époque ces idées se sont introduites t
dans laphilosophie grecque.
Sur ce point, nous nupouvons
nous flatter d'arriver à des conclusions- certaines if est possible,ï
du moins» tio réunirquelques probabilités. 1
La secteempirique fut fondée, suivant
Celsef",[jar Sérapiond'Alexandrie, «gui vécut au milieu du in" siècle avanf î.-(j., et,suivant Galie» ®t par Pititinus de Cos
(cuntempoiain de Pto-It'-mée Lajji ^!i3-a83). Eu tout i-as, vers 98t»-!i5o, l'école était
formée. 2
Le médecin Glaucias™, dans un livre intitulé le Trépied, ex- ïi
posa les troisprocédés de
l'expérience «fuenous avons décrits
<'i-<lessus(aÛTO^iot, fotopfa. $ rov
èptolov (UtéSoimsj. l
D'autre part, nous savons *pie les épicuriens avaientadopté
-"
une mélhode tout a fait analogue (tous en avons la preuve dans
ce(|iti nous a été conservé di> Zenon i'lipicurien. contemporain
et maître dis (iicéron, dans le livre de l'hilodème ïtepï cnt\u>iwx»i <r>i(te«û<rew retrouvé à llcmilaiiuiu. Selon
Ëpicure, ni les Z
sens tout seuls, quoique leurs données ne soient point fausses,
ni la démonstration, ne mous permettent d'arriver à lu vérité.
Mais tes sens fournissent lespremiers matériaux indispensables
delitsfïeim:: la mémoire réunit lesfaits et prépare l'anticipation
(upiXtityis); vient alors le raisonnement (Uyioitos). nécessaire
avec les données des sens pour atteindre la réalité(par exemple
dans la |ircuvo do l'existence duvide). Zenon, modifiant ta
doctrine d'Kpicure in, ajouta Us passage du semblable au seni-
biabie (expression «ju'il (>m[H-unEavraisemblablement auxeiupi-
rMjites)101; cette o|)ératïon permet, suivant lui, de connaître,
d'après lespropriétés communes des choses visibles, la nature
Mfilir, promu.
Vi#;f., :(;">. VA. l'scuil.-ljiileii., KkIih, vol. XIV, |>. tiSX
Snl'Jitf., ('».{.
1l'liiti|i|i.nii. /)« Milmhni ftln» </i« iM H. anptiuv xii ntpetéacaii |t. •»(, XL
Ih-rtiii, lliicMriirkvi'oi-Actti'ii-tH'sctlsclian. iKhr.
lltitl. (t. V.» ;«li.
M» LIVRE IV.-CUAPITRK IIL
tics choses invisibles ($uat»«KrJUi)> /enoti ne parait pus cepen-dant avoir non fait, pour l'induction, qui ressemble aux travaux
d'un Bacon ou d'un Stuart MiH, it ne s'éleva guère'1' au-dessus
de l'induction fieratumeratioaem
iimplicem.
Entre les épicuriens etles
empiriques, il yavait
pourtant des
différences. Pour les épicuriens, l'anticipation (s> se fait toute
seule» naturellement. Pour tes empiriques, il fautrépéter fré-
qm'ttunentla même observation l'attention et ta réflexion sont
nécessaires. Mais surtout l'épicurien se flatte par ce moyen d'at-
teindre au delà des phénomènes les réalités ou les causes; i'em-r
pirique, au contraire, borne la connaissance aux phénomènes et, a
plus hardi dans la négation queles sceptiques déclare tes causes k
incompréhensibles. £
il n'estpas possible qu Épicttre ait emprunté sa méthode aux t
empiriques, puisqueson livre fut écrit vers la fin du ive siècle
etque l'école empirique ne fut ouverte que vers i8o-aâo. On
pourrait supposer que tes empiriques ont fait desemprunts aux
épicuriens, s'il n'était bien plus naturel de croire que les uns et
tes autres ont puiséà une source commune.
`.Nous voyons en effet qu'avant Glaueias Nausiphanes & qui .j
fut le maître d'Épicure.avait écrit un livre intitulé le Trépied.
C'est vraisemblablement de m livre que s'inspirèrent etÉpicun* Lv
et Glaucîas. ^l
Est-ii possible de remonter encore plus haut? Suivant une
conjecture ingénieuse et plausible de Philippson Aristote
serait le mat'tre dont se serait inspiré Xausiphanes. On trouve,
en effet, chez le Stagyrilo tf'. la description des procédés employés
plus tard par les épicuriens ot les empiriques, et ils sont pré-
sentés en des termes presque identiques. Pour Aristote, comme
pour tes empiriques, la science commence par la sensation
(afoQricrts). continue par la mémoire (pvt/utf sroXXa'xfsnv avnû
''PIlilippon. 'il. g
!l Cic, ,V«<. ilenr.. l, <mi. A».n
Diog.. X. i/i.
(If. cil., p. al.
$'•.iuld/l. ftith'r.. il» tin<
rt
r/EMNRlSM-B. PARTIE fiONSTRHCTfVK. »7t l
:t l
ytmndvwt Arisk; panfon rw «roXAéeiï dxmihas àffléprw. Ëm-
pir.)» s'achève par lacomparaison dos semblables {$ rtôèpalw
Swpfa, Arist.'1'; d rav èpofav itsrékcrts, Ëmpir.). La science, ou
l'art. est définie par Aristote -aiMa tn$ ijmsipks iwotfwut 3r;
par les empiriques -aélkou ipiieipki.Est-il possible de faire encore un
pas de plus et (te trouver
avant Aristote lespremière linéaments de la méthode empi-
rique ? Les documents nous font défaut, et il faut borner ià nos
recherches
Mais si la méthodeempirique, envisagée en ce
qu'ellea d'es-
sentiel, est fort ancienne, il est un point que l«s historiens de
laphilosophie n'ont pas assez mis en lumière c'est
que Méao-
doteparaît être le premier qui ait donné il cette méthode une
précision et une rigueur scientifique. Jusqu'à lui, il semble bien
que lesempiriques
se soient contentés d'indications unpeu
vagues et sommaires; ils faisaient granit cas de l'observation,
mais ne dépassaient guère ceque Bacon appelle experientk vaga.
La grande place que Ménodote tient dans le De subfgmatioiw
empivka tleGalien donne à penser que c'estd'après lui que Galien
décrit la méthodeempirique'*1. En tout cas, plusieurs des cer-
rections les plus importantes apportées à celte méthode lui sont
formellement attribuées. C'est Ménodotequi prescrit
de sou-
mettre à une critique attentive les renseignements historiques,ait lieu de les admettre tous indistinctement sur lit foi du pre-
<»Top., l, mi, 8.
I»ilélai>L,i, i, 5.
W Ott peat admettra, nvec Pliili|>|>«ii»(p. 55), qu'Acislolc ayant attribué parvoie (!<• am<ùftenN! A IWinorrite ™tt'> ttovlrim» <|n« les ap|Kirom-<>» «-nsililci son!
vrains (re tjitn fiii-uirnic. u'aitruit pas iiitmis) (rf. Zi-llor, I. I. p. H-jn). Naiisipliams
H'up|)ro|iria wdc manière «le »oii-, <jui fut «iksî par la suitn c* il'(v|iknn.>.
\ii(ui[> (op. cil., p, i li-j et nq. ) ruiroum cliei Mnlon tui-iiii>iiic! iminliri: «h>pa«-
sages (notamment Gor/ Soi, t., ( Rep., VII, 5i(J, <) mi il est fait allitsimi à
une sorte d'empirisme. Avec beaucoup de siilililik- et i('in|j«'niosili-, \atar|i fait
remonter ju«|«'à l'rol.ij;orîK l'origine di> lu uii'tliwlu (>ni|iiri({iii>. Tout ro que nom
poinroux lui accorder, c'est que Pioliijjftras a en le pressent imwil de ce ij«o devait
i:tre cfltli* inélliod». Rion ti'autoriso à lui altrihucr sur ce point dea nm |>riVisp« <•!
dw idws îHTdl«(*s comme celles <|ti^on trouv** clu*z ïcseui»in'|iii?>.
X.llol j> I \>. t.">IJi llliliiM' i-is hi in,'»»' (i|ii/ii<in.
m LIVREIV. – CfiAMTttKM.
iititu1 venu, C'est probablement lui qui (tans t*o>;pt'Fit*nroimita-
tive (ce (jue nous appelons l'expérimentation}, recommande de
tenircompte
exactement des échec» et des succès, en d'autres
termes, d'introduire, avee la mesure et te calcul. la rigueur
scientifique,("est lui", enfin, (jiii considère le passajje du sem-
blable au semblable comme donnant setilement la probabilité,
et non la certitude, aussi longtemps du moins que les conotu-
sions nu sont pas confirmées par des expériences expressément
insu' tuées pour les vérifier, Kn môme temps, it modifie ia termi-
nologie,substituant des termes purement empiriques- aux expres-
sions équivoques qui «valent servi jusque-là aux dogmatiques et
aux empiriques.Avec toute raison, selon nous, Phiiippson, en
décrivant la méthode des empiriques, évoque le nom do Stttart
Mil!. Maisce n'est |«w tux empiriques en général, c'est à iVîéno-
tlote qu'il faut faire cet honneur: rest lui (luia eu, aussi claire-
ment qu'un le pouvait à cette époque, et en s'oerupant d'une
science telle que la médecine, qui aujourd'hui encore ne com-
porte {;uèrc une rigoureuse application des procédés de la mé-
thode inthietive. quelques-unes des vues les plus importantes
du logicien anglais, li est aussi fin autre nom qui vient àl'esprit
quand on considère, l'œuvre du médecin grec c'est celui de
notre Claude Bernard. Qu'est-ce autre chose, en effet, queces
ressemblances qui font connaître te possible, non le réel, et ne
donnentque
I» probabilité tant (lue l'expérimentation n'a pas
prononcé,sinon
l'hypothèsesi bien décrite par te savant français
ist dont te rôle essentiel dans la science a été si victorieusement
démontré parses théories et ses découvertes? En tout cas, si un
telrapprochement paraît trop ambitieux, on ne peut contester
que Mi'noiliile a fait preuved'un véritable esprit scientifique.,
qu'il « ou l'idée nette etprécise
de ceque
devait «'Ire la méthode
"' Un fait <[ui iiioiilri» bien l'originaliti- île Mi-nodule tt continue la supposition
i|ue nous avons éini«" en disant <|in' < *e4 par Mùnoiiulo que s'est laitu la cirncilifiliuii
In «'plirisini' • •!<; rempirNin», •'•wl <|«e t« pyrilroiiii'iiOawiiii romlMiteil
Yi'iuçhn <l« fôjiftio» fiers?*;» (G«l.. Sulif. emy.. '10). (1V>I Tliniilas i't M«no<t<ili-
(fut ont ''(Mitt'Ht! hs pr>:niifis pacmi ios Si'«k|)tit|ti<^ la lt!|*itiiiiitô do < faîson*-
iraml.
»/GMPHilSME. – PARTIR €ONSTBU«T1VK. 37»
expérimentele. fît if <i eu le rare mérite de ne pas exagérer le
rôle dol'expérience, d'éviter te pur empirisme..Su méthode
est
celle qui éclaire et féconde i'ovjiérwiice par le raisonnement, et
se délie d'une vaine dialectique sans se borner à anmsser des
faits. G'est In vraie.
Ce que nous savon» avec certitude tic Ménodote et desempi-
riques, avons-nous le droit de l'étendre à tous les sceptiques? `t
La méthode que nous venons de résumer, et qui est celte des
emjiiiupies, est-elle aussi celle dessceptiques, et notamment
celle do Séxtus Ëmpirieus? Aucun doute nie peut s'élever sur ce ï
point. Si Ménodote est médecin, il est en nuirne temps uu des
chefs de l'écolesceptique. Sextus Etupiricus en inême
tenips^
(pt'il estsceptique,
est médecin.D'après
sonpropre témoi-
j;na{jeit!, ils'inspire tle Ménodole. Son nont même indique à
quelle secte il appartient. S'il lui arrive decritiquer
les empi-
riques' et de se séparer d'euxpour se rapprocher des métlio-
diqut's, c'«st sur unpoint seulement: et d'ailleurs les méthodiques
neprocèdent guère autrement
queles
empiriques. S'il ne décrit
pas la méthodeuinpit-ïque dans les ouvrages que nous avons de
lui, c'estque
ce n'étaitpoint
sonsujet. Très vraisemblablement
ses livres de médecine, si nous tespossédions,
nous montreraient
qui-, sur lesquestions
de méthode, rien ne sépare Méimdole et
Sinltis. Même, à nous en tenir aux seuls ouvrages quenous
ayons, toute la théorie des signes commémorait! chez Sextus,
est ûvideuimeut la tnûiw: qui; celle des empiriques. Enli», dans;
le livre «les Hypoiypotte*. on trouve un très curieux chapitre (n
qui est toutimpréjpié
del'esprit de .Méitodole c'est t'elui où
l'auteur montre que te seul iimycn de résoudre les sophtsnies
<|ui ont tant embarrassé les dialecticiens est de recourir à l'ob-
servation cl àl'expérience.
On nous dit !vi de môme que Méiio-
;'l i, ••
Voy. «i-<li'>5iis, p. Sifî.
''H.J3IJ.
IjaKii.. Suhfy. tilt: l>e «relu Mit. I, |». }7
374 LtVftK IV. – CHAPITRE lit.
dote regardait ïépihgisme comme nu excellent moyen de -réfuter
lessuphisnies.
Nous sommes donc en droit d'affirmerque
(otite la théorie
de ta méthode est le bien commun'" desem|)ii'i(|Ui's et des
scu|>ttE|uesel quek's titres de Sextus ([tic nous avons ne nous mon-
trent qu*ini<>face de l'empirisme sceptique, A côté de la science
qu'its nient, it y a une sorto de science, ou d'art, en laquelleles
sceptiquesuni contiunce. Une exposition complète de leur
doetrinc doit donc renfermer, outre la partie destructive que
nous avons résumée unepartie
constructive surlaquelle
nous n'avons malheureusement flue des indications incom-
plètes.
Ces cieux parties peuvent-elles se concilier Pmie avec l'autre?t
N'y a-t-il pas contradiction à combattre le dogmatisme, comme
le t'ait Sextus, pour admettre ensuite une science ou un art,
mêmeempirique ?
Nous lecroyons, |>our notre part.
Cet art
empirique, que Sexlus oppose à la sciencethéorique,
an fond
et sans s'oit rendre uncompte exact, il l'entend autrement qu'il
ne le définit et qu'il ne lo faudraitpour que
sa distinction fût
tout à fait légitime. A une seule condition, en effet, cette dis-
tinctionpourra
<*tn.»maintenue c'estque,
l'art empirique,
les assertions qu'on se permet. ta persuasion oà l'on est. s'appli-
quent uniquementa des
phénomèneset ne tes dépassent
en
aucune façon. En est-il ainsi citez Sexliis- H ne le semble pas.
'fi\:i(iirp (p. t'ifi, !} nuits [Lirait s« tromper tufsiju'il fait mie différence witm
ta Tufiii.-ixn m*À(.v5ih des sceptiques nt l'et |in'-s!ut) anatufjtu*, à propos des cm|ii-
iii|uik, ([«'ou Inmvfrelu» (ialicii i :i(j. t^t <i|>ittticatioii «tt'*<leu* expressions «4
\i-iliknifnl fa inèiio. t'.t. Sovlus. If., Vit! atfs'. Il ».• pui-.iit |i.i> nuii plu» c|ii
mtU'i» tirt'r aiicitnt1 v.>ntln>ûiH <t^ fat^i'Urt* i!:itvt fi^ rarfï ttûfimit'iiU etupil'Upii'S
ipie n«iw aïiin». il«t'iptwsiniis
Mw *t iviveoCaQn. Nalnrp ivcoimait d'ail-
Inin la l'onl'iiriiiili- <1<>l.i doctrine dit Sctlus à coll. dits empiriques.
Non* anins •'(<;heureux île trouver dans t' iivn; il» .Naturp (p. i J7, et jiiwiui) t
des vues niialiijuw. Nalnrji ailnnl comme nous et <léinuiit(« avec beaucoup de
fniT'1qu'il y j.il:iii« le scepiirisme,unepartiepositive, unetendancescicnlifiipiP.Il sniiiieul MMili'iiieiil (|uo cette tendance se manifeste- dés te détint du pyrrhonisme
il la trouve cliei .finiHid'-m'1. thn Timon (p. tâ8), mimncha Pmtaffina. Xous
rr«voii3i|uV»IIenes'ist montréequeplus tant. En tout ras, à partir de Ménodnlc,
"Ile est ilirnnte<t<ibK
kBMIMIUSMË. – PAKTIK CONSÏttUCITIVK. 375
L'art (tu la médecine en elïut, pour no parier (jm* dit celui-là,tel
qu'ilIVnkmd et lu
pratiquem s'arrête
(tas scrupuleusement
h la constatation desphénomènes; it s'élève, tes textes cités en
sont 1» preuve, jusqu'à despropositions générales (Seapituitav
miaidaets). Il arrive même que Sextus, oubliant tous les argu-
ments qu'ila
répétés à ta suite d'iEnésidème, se laisse aller à
parler (te fa découverte de la cause (<xhiov) d'une maladie. Et ce
n'est pas ici mie chicane de motsque
nous lui cherchons. Ce n'est
pas seulement le mot qui est employé par lui; if a l'idée que ce s
mot exprime. Y a-t-it d'ailleurs une médecine possible» si unrenonce à conuaitro des lois générales, des règles qui permettentde
profiter de l'expérience passée et d'en appliquer les résultats
auprésent
et à l'avenir? Mais, dèsqu'on
s'élève h la connais-
sance des lois, qu'on le veuille ou non, on dépasse l'expériences
proprement dite; o»prête trn caractère d'universalité et de né-
cessité auxphénomènes observés; on introduit un élément
rationnel dans la connaissance; on renonce auphénoméinstue
sceptique. C'est, bon gré, mal gré, une sorte de dogmatisme.
On est, si l'on vent, dogmnlisto autrement que ceux qui affir-
ment des nkitités intelligibles et absolues on n'est plus tout à
faitsceptique.
Soyons indulgents pourtant pour l'erreur où Scxtus est tombé.
car nous voyons encore aujourd'hui nombre de philosophes
commettre la même faute de raisonnement. Il y a, en ctlet,
entre les doctrines du médecinsceptique
et le positivisme mo-
derne, des analogies qu'il importe de signaler.
Il. La description que fait Sexlusdc fa méthode d'observation,
son passade du semblable au semblable font penser naturelle-
ment il la théorie de J. Stuart Mill sur les inférenecs du parti-
culier au particulier^ Ces ouvriers(lui jettent les couleurs de
manier*; à produire les plus inajjnitiques teintures, et sans
pouvoir rendre raison de ce qu'ils font; ce (gouverneur de
Sijstèmr tk lo/fu/iie. I. 11, m..1, jj. <ii:<. trad. l'i'isso. l'aiis. La(lr.in|;i!.
«6 yVKÉ IV. – CHAPITRE Hl.
colonie, d'au Ijoii sens pratique, auquel tuftt Mansfieid réeonr-
inmidu de cendre la justice sans jamais motiver ses arrêts, w
possèdent-ils (Hts une sorte de connaissance empirique fort ana-
lojjue « celle dont Settus admet la possibilité? En considérant
les lois comme des faits généralisés, en expliquant les principes
tes plus générauxdo fa science
par l'association des idées quin'est
i|u*uh prolongementde l'expérience, les logiciens anglais
ont bien, comme Sextus. la prétention de s'en tenir aux pliéno-
uiènes et de n'y rien ajouter. Avec plus do précision et une
analyse psychologique jncoropariiblviiteul supérieure à tout ce
que St'xtus pouvait tenior. Stuart Mill el 51. Bain reprettnenl lit
ittùiuo thèse: ietir phénoinénisme est. au fond, la môme chose
qoe j'eropirisme de Swtus.
C'est surtout ewitre laphilosophie considérée comme science
des causes et (les substances:, c'est-à-dire ce que nousappelons
aujourd'hui la métaphysique, quesont dirigés les arguments (les
sceptiques et s'ils visent aussi toute.* les sciences, s'ils attaquent
les physiciens autant que lesmétaphysiciens, c'est que la
science,
tellequ'un
ta mneevait alors, ne seséparait pas
de la méta-
physique; elfe procédait, comme elle, « priori et montrait le
lucun.' dédain del'expérience. Si tes médecins sceptiques s'étaient
Ire .tvés en préseace d'une science comme la physique moderne,
fondée uniquement sur l'observation et l'étudi' directe des phé-
nomènes, ils s'y seraient certainement ralliés. Leur langage est
à peu près celui i[iw tiennent aujourd'hui les positivistes ne
disent-ils pas que, s'il y a des substances et des causes, il est
impossible d'en rien savoir et qu'il ue faut dire ni qu'elles sont
ni qu'elles ne sont pas?
Lespositivistes protesteraient peut-être contre le nom île
sceptiques, et ils en auraient |i> droit, car iU allirinenl beau-
coup,et
quelquefois trop de choses. Lessceptiques,
de leur
côté,repoussaient
le nom de savants. Mais la différence est ici
dans les mots plutôt qui; dans les choses. Tout positiviste est
sceptique, au sens où l'entendaient les médecins comme Sexlns;
tout sceptique était positiviste, au s«n» (pie ilon lient aujourd'hui
L'EMPIRISttK. PARTIE CON&TKUCTITC 377
si pu iiint rnnf mit l'nnt ineitntit t .ne h ni; enitt epadtutiiBt rtlt mi-k ce mol ceux(jui
t'ont inventé. Los uns sontsceptiques
en mé-
taphysique, les autres ne sontsceptiques qu'en inul;ifjliy.si«jue
c'estbien près
d'étra la môme chose.
(I y a toutefois des différences ((u'il ne faut pas omettre. Les
sceptiques usent et abusent de lit dialectique; d'une manière quenu saurait
approuveraucun positiviste. Par là, ils tiennent
encore aux doctrines qu'ifs combattent c'est en métaphysiciens
qu'ils luttent contre la métaphysique, (;'est qu'ils n'avaient pas
d'autres armes & leur disposition, Ils auraient raisonné autre-
ment, si lesprogrès
des sciences de la nature leur avaient fourni
d'autres raisons. Mais, par des moyens différents, ils tendent au
m£me but; l'esprit qui les anime est le même. Pour les uns»
comme pour tes autres, I» jjrande affaire est d» détourner l'ac-
tivité del'esprit
dos études purement théoriques, pour l'amener
auxquestions pratiques
ils sont l'^iifcniotit utilitaires.
En outre, les thèses négatives tiennent, «;hez les scejitiques,
bien plus de place que chez les positivistes. Les noms des duc-
trines sont à cetûjjard. très significatifs. Les sceptiques insistent
surtout sur leur doute, ils le soulignent. Les positivistes, ait
contraire, <mt surtout la prétention d'être do{;malistes ce siml
leurs ailintiutions qu'ils tnettent en avant; leurs doutes resteut.au
second plan. Touteluts, en allant au fond des ciiuses. on ;i
pu su demander si leur doctrine n'est pas surtout une doctrine
de négation. Mais, sans insister ici sur cette question, ce qu'il
y a, à notre sens, d'essentiel dans le positivisme, c'est la ligne
de démarcationqu'il
a tracée entre la métaphysique et la science
c'est l'affranchissement de k science qu'ila
proclamé.Mous
savons bien que celle vue ne lui appartient pas en propreDes-
cartes avait <hi le sentiment del'indépendance
de la sciciirc à
l'égard de la métaphysique; fiant en avait eu l'idéo claire, et.
bien avant cesphilosophes,
les savants du .vvif et du xvm''siècle
avaient fait mieux ils avaient constitué la science sans se préoc-
cuperdes
problèmes métaphysiques. Néanmoins, si les positi-
vistes n'ontpas
eu cotteidée, qui
n'estplus, croyons- nous,
contestée p;ir pei sonne, ils se la sont c» quelque sorte tf|»|irojiiïc»;
m Lrmiv.-ciiAPtTKE ni.
par l'ardeur avec («quelle ils l'ont défendra?, par l'importance,
oxuyéréc souvent, qu'ils lui ont attribuét'.jiai' tes coiisûqiuuuTS.
souvent excessives. qu'ilsen ont tirées. Or, cette idée, qui
est le
fond de leur doctrine, et peut-être toute leur doctrine. les scep-
tiques l'ont eue comme eux. Certes. ils ne s'eu sont pas rendu
un compte exact et n'ont pas su en tirer grand parti par là,
ils demeurent tort au-dessous (le leurs modernes continuateurs.
Ils sont pourtant les véritables ancêtres du positivisme. Quelque
ti[)irttoii, d'ailleurs, qu'on ait sur ce point, cequi est incontes-
table, c'est qu'ils ont essayéde fonder un art pratique tout à fait
analogue à ce([ne
nousappelons aujourd'hui la science positive,
ne relevant que de l'expérience et n'ayant besoin, pour se con-
stituer, d'aucune solutionmétaphysique.
Ce n'estpas
un mince
mérite ils réalisaient en cela un véritableprogrès
et devan-
çaient l'esprit moderne.
Peut-être n'est-ce pas par insttdisanee de génie qu'ils n'ont
pas tiré de leur idée un meilleur parti s'ils avaient cherché leur
art pratique plutôt dans la physique que dans la médecine, ou
si cet art avait pu réunir un assez grand nombre depropositions
évidentes ou vérifiées, peut-être se seraient-ils enhardis à lui
donner le nom de science. Malheureusement, c'est à la médecine,
la plus complexede toutes les sciences do lit nature et
qui, an-
jourd'hui mène, commence à peine à devenir une science expé-
rimentale, qu'ils se sont d'abord attaches leurs efforts n'ont pas
été et ne pouvaient pasêtre assez tôt couronnés de succès
pour
justifier une telle hardiesse. Il ne leur a manqué peut-être que
d'arriver par un autre chemin au point qu'ilsont atteint, pour
doter l'esprit humain, quelquessiècles [dus tôt, de la méthode
expérimentale.
En revanche, il est unequestion
où les sceptiques nous pa-
raissent reprendre l'avantage. Cette réserve, cette sorte dopudeur
logique, qui leur interditd'usurper
le nom de sciencepour
une
doctrine fondée uniquement sur l'expérience, leur conserve une
physionomie à part et les dislingue nettement de tous les mo-
dernes. De nos jours, on estporté
à direque,
seuls, les phéno-
f.'EMIUÏUSME– PARTIECOXSTtUICTlVB.379
mènes sont objets de science; pouf les anciens il ne pouvait y>
avoir de science la où il n'ya
quedes
phénomènes. Ilssa faisaient
de tu science unetrop
haute idéepour
admettre un instant
qu'elle pAt avoir affaire à autre chose qu'à rabsotu, qu'àl'im-
imiiible. Pour eux iln'y
a du scienceque
de ce (luine passe
pasla science est essentiellement inébranlable, et ils n'auraient <
pas admis qu'on désignât de ce nom, comme le fait par exemple
Stuart Mill des vérités qui pourraientêtre autres, si nous étions
autrement constitués,»! eessent peut-être d'être vraies «dans utt
des nombreux firmaments dont l'astronomie sidérale compose
l'univers». Voifà pourquoi les sceptiques se sont contentés du
nom d'art, d'observation pratique. \\<)nw en niant ta science,
ils s'en faisaient une idée plus haute que ceux qnr s'eir montrent
aujourd'hui les plus zélés apologistes.
Voilà donc le earaetèi-e distinelif, l'idée principaledes der-
niers sceptiques, ils n'ont si vivement attaqué la -philosophieet
la science que pourfaire
placea cette autre science qu'ils pres-
sentent. mais qu'ils n'ont point faite. Leur doctrine est un posi-
tivisme qui n'n pastrouvé sa formule.
Par là, outre tes différences quiont déjà été signalées entre
l'ancien et le nouveau scepticisme, on voit .que les deux doctrines
ont des tendances sensiblement différentes. Le but de l'ancien
.scepticismeest de conduire a i'ataraxie il se propose
une fin
purement morale. Son idéal est l'homme affranchi de tout souci
et de toute pensée, détaché da tout ce qui l'entoure presque
étranger au inonde où il vit. Le nouveausceptique
ne renonce
pasà cette tradition c'est bien encore la pratique qu'il oppose
à la théorie. Mais il l'entend autrement, Il se inêie au monde et
prendintérêt aux choses qui s'y passent. H exerce une profession
il est observateur, attentif. prudent et avisé; it a de l'expérience
et sait s'en servir. L'ancien sceptiqueest désintéressé: li1nouveau
est utilitaire. Le premier n'enseigne que If moyen d'être heu-
reux; te secondapprend
à être habile, et s'il néglige les choses
inutiles, c'est pour s'attacher d'autant mieux aux biens positifs.
380 LIVBB IV. -CHAPITRE- ML
L'ut) a ttos amis; t'attire, une ctieutôk». f<u mut iiiitilFt''ri'iiw
(âSiafpapi»}* (|tte Pyrrlioft avait toujours à la bouelie. tte se
trouve pas une fok dans lus troisjjros
livre!»de Sextus. Ïa\ tl«c-
trine a fait du l'IuMiiiu i(e|Ptiis le pauvre ascète Pyrt'hoa j(is(|tt'au«ivaot médecin Sextus Kt»|iiricus.
I.K l'YIUUIONfôME ET LA NOUVELLE ACADÉMIE. 381
CHAHTUE IV.
Ll?PVnlUlUNISHRET LANOUVELLEACADÉMIE.
Qu'il. yait entre le. scepticisme et la nouvelle Académie des
analogies suturante* pour que l'historien sait autorisé à réunir
sous tw i»e*me lilio l'étude de ces deux écoles, c'est cequi
ne
saurait <Hre contesté. Mats jusqu'où vont ces analogies? Y a-t-il
aussi dos différentes notables, ou bien, à aller au fond des
choses» esl-ee la mène doctrine que, sous des noms différent»,
{«•sdeux écoles ont détendue? (l'est une question que les Grecs,
ait témoignage «i'Aulu-Gelie avuienf souvent agitée, et (|iii les
divisait. Les historiens modernes S<>»1 aussi[»arta|{és.
Comme
k>s sceptiques de Pdeolc d'iEiiésidème ont fait «le grands efforts
pour se distinguer de ceux qu'ils regardaient n»tnme des rivaux,
nousdevrons, avant d'essayer h notre tout' de résoudre ta tjues-
tion, iitdicfiier les raisons du'ils ont invoquées.
l. On a vu plus hautK que. d'après le résumé de Pliolius.
/Knésidèiiie.au début de son livre, éntimérait avec complaisance
k'sdilïereiiecsqui sé|>arenl
tes deux écoles. Les nouveaux acadé-
miciens sont dogmatistes ils affirment certaines choses comme
indubitables, ils en nient d'autres suis réserve. Lesceptique
n'affirme el ne nie rien il ne dit pas querien lie soit
compré-
hensible; il en doute. Pour lui, rie» n'est vrai, ni Taux, vrai-
semblable, ni invraisemblable.
En outre, les nouveaux académiciens se contredisent sans
s'en apercevoir. Ils di.->lïii(juenl le vraisemblable- et rinvraisem-
blalilc, le bien et le mal. Mais de deux choses l'une: ou ou
A. 4., M. à.
'• »». -is.
m UVRE IV. CIUPITRE JV.
a to- ï
ignore ce qui est vrai et cec|ut est faut. ce qui
est bien et ew
qui est niai, et alors il faut dire que tout est incompréhensible
ou on peut faire clairement cette distinction, soitpar
tes sens,
soitpar la raison, et alors il faut dire avec les autres philosophes
que tout est compréhensible.
Sextus Eniuiricus1" reprendles mêmes arguments, et en
ajouteun autre. Tandis que tes académiciens distinguent des
degrés dans la probabilité,les
sceptiquesdéclarent
qui»toutes
les représentation»sont épies, et qu'aucune ne mérite l'assen-
timent. Il est vrai quedans la vie
pratiqueil faut choisir entre
le bien et le mal. tlais ce choix, tes ucadémieiell~ le font parce
quele bien leur paratt plus vraisemblable; tes
sceptiquesle font
sans se prononcer, sans opinion (à£oi&i*ius)* simplement pour ne
pas rester inaetifs. Par suite, on peut bien dire que sceptiques
et académiciens donnent également leur assentiment à certaines
représentationsmais (iarnéade et
CUtomaquele donnent de
propos délibéré, par réflexion; ils lu donnent de tout cœuris)
(perà fspoaxKiaeoK crÇoSp&s). Les sceptiques suivent leurs idées
sans conviction et sans choix ils se bornent a ne pas résister
ils obéissent à la coutume et il leurs instincts, presquemachi-
nalement, comme l'enfant suit son pédagogue.
Nous ne sommes pas surpris que ces raisons n'aient pas paru
décisives aux anciens. et qu'on ait persisté à mettre les académi-
ciens et tes sceptiquesà
peu près sur le mente rang. Incontesta-
blement la position prise par les sceptiques est au point de vue
logique plusfacile à défendre. N'affirmant rien au delà des
phé-
nomènes actuellement donnés, its mi donnent aucune prise. Il
est plus rigoureuxde dire Je ne sais
pass'it y a une vérité, que
d'allirmer qu'il n'yen a
pas.Mais si, négligeant ta forme exté-
rieure de l'argument. on va au fond des choses, il faut bien
convenir que les deux théories reviennent au mène!l;. Ni l'une
!1<P., I. aafi.» P., I, *3o.
Sam n>> pouvons nous eu>|jdcb<>r île penser i|iii' Saissel ( |i. } t) (iront! un |«>ii
trop iiti *f'*n»MKta (fctiwtiott faite par .Kn^itft'tiits ettfu'tl fait ù ci* pltil<KO(>hf*(a
IM M HltHÛNfSMtë CT i.A NOUVELLE AMD&ttlE. 383
lit l'autre n'accorde hl'esprit humain te pouvoir de connaîtra te
vrai et c'est lit l'essentiel. Disons, si. i'mi vuut, que les deux
écoles ne diffèrentque commis les espèces
d'un genre. Au sur-
plus, nous avons vu qu'Jïné'sidème avait commencé par ôlre
académicien, et qu<- son livre était dédié à un autre acudduii-
cien, Tubéron»
Quant « l'assentiment que réclame ta vie pratique,ta dis-
tinction faite par Sextus tison importance. Toutefois,quece soitt
pour une raison ou pour une autre, il est certainque scep-
tiques et académiciensdonnent en certains cas leur assentiment,
et en cela ils se ressemblent. C'est parcu que nous y sommes
forcés par les exigences de la vie pratique, disent les sceptiques.
Mars ce n'est pas pour une autre raison que Ips académiciens, du
moins- ceux (lui suivent (,'iilornu<|tie. préfèrent aux autres les re-
présentations qui s'accordent entre elles. Il y a une différence, si
t'on veut, puisque te choix imposé par tes conditions de l'action
est guidé chez tes académiciens par une règle, laissé au hasard
ou aucaprice
de la coutume chez lessceptiques
mais il faut
beaucoup deboune volonté pour voir lu une distinction capitale-.
Bien mieux, lescepticisme,
dans sa dernière période, n'a-t-il
pas faitpeu près la Hoirie chose, lorsqu'il a cherché dans
l'expérience, dans tareproduction
constante des mènes séries
tle phénomènes, un moyen d'en prévoir le retour? Ce n'est. pasla science, si on veut, mais c'est une sorte de probabilité. L'as-
sociation des idées, tette que ta décrit Sextus, ressemble de bien
près à l'accord des idées telque te
définit Carnéade.
Onpeut
donc tlire que Sextus, embarrassé par le formalisme
sceptique,et cherchant des différences dans les ternies mêmes
dont se servaient les académiciens, a mal défendu sa cause. C'est
moins dans tes formulesqu'il faut chercher ta différence entre
part trop liolle. Nous ne rrovoni \kk non plus qu'il y ait lieu de (iistingiii'i' le* ara.
ilémiriciiï et les sr0|>li<jncseu cp wib <juoles premiers auraientnié mène les
phénomènes internes, (je qu'ils ntniiml it'iiecont aive les MV|>tique!i, r'<>sl la farnlU'*
te ('millilitre l;i "rùililé absolut). Ils nient 4 peu les |>liénomèin'.<i !iil'1riu'«, <[tc ô'st
I» «ju'ils IroùvtMil le» (|i'|;rrâ' île lu |>r«li3l>il>té l'est l'orfln" on l'acrainl il>>s ivpre-
wnlalioii- principeUiul .Mihjetiir, >|ni Iciii'mjiI île (H cotuliiclrair.
38S LIVRE IV. – tillAl'ITKË IV.
k's deux écoles ijue dans {"esprit qui tes anime, dans leurs (en-ttances, dans leurs méthodes.
Il, l'anui les nwdcnius plusieurs historiens ntrles regiinlenl
pas comme fort éloignées l'une de l'autre. Ifayle les confond à
'peu près Zeller n'est pas loin d'en faireautant1". Cependant
l'historien anglais Siaceolt ti} seprononce dans un sens tout dif-
férent et les raisons qu'il invoque valent lapeine d'être eva-
minées.
Suivant MaccoH, les ikutv set*tesdiffèrent par tour origine, t
par leurobjet, par leur métitodu. Le pyrrhonlsme paraît à une
Iépoijue où la (irèee, épuisée par ta jjrand eiïort de lu
conquête·
«le l'Asie, retombeé|»uiséi. L'esprit {{ree décline en mtim temps
«j«e tes libertés des cités grecques leur sont enlevées c'est une i
époque de misohfrle.vl laphilosophie de
l*yrrlton est unephilo-
sophie de désespoir. Tout autres sont les circonstances où appa-raît la nouvelle Académie
cinquante ans plus tard, intervalle
considérable fiiez tm peuple tel que les Grecs. La puissancematérielle d'Athènes est «hUruitu sa force intellectuelle n'a ja- smais été plus jjrande. Elle est lt? rendez-vous de tous les philo- t
sophes du monde iîéno» est Phénicien Héiilliis vient de f.'ar-
tlra«{e. l!Vsl alors qu'on voit naître et prospérer toute nue flo- o
raison de systèmes dont ht force et le stucès attestent la vitalité-
du jjénie grec. Le stoïcisme etl'épicuiïsnte s'élancent à la pour-
suite de la vérité, «t ne doutentpas qu'on puisse l'atteindre.
Cest cette ardeur même et celle confiance illimitée qui leur
suscitent des rivstnt Areéstlas, sans jjrande conviction peut-être, prend plaisir à contredire Zenon. Le
j>j rrhonisme était né
à uneépoque de dépression et d'affaiblissement la nouvelle Aca-
démie naît d'unsurcroît d'activité, d'une sorte d'exubérance doliait ri'uu surernit ( ê!dmte, d'urte surte (1(-
lapensée yreeque. Telle est la puissance du mouvement, que
Carnéade lui-même ne se contente pasde nier «l de rlétruire.
A celteépoque
de renouveau, il faut quand ineW des croyances
Uw t'Inlrnuphiii iU-l- iirierlurn t. V |j. I ">. :t' Allll.
Tint '»'Stfjiins. I.oih1»m iimt (!,iiu|iii(l);i', iff(it), Miinuilbii, |i. ij«, i<if|.
Mï MRBUOlWSteEBTU MHWAAMAGAMvMlR385t
••il'•II.IIUlltlil'llt
« on eontlmt tu science follequ'on l'avait conçue jusque-là, c'est
[lotir lui substituer une autre sorte d'aHirnmtion plus tempéréeet plus modeste. Ménii> tes académiciens m; sont pas «mu'inis de
la science ils la cherchent etl'espèrent.
L'icéron croit à sa pos-
sibilité, autant que les stoïciens Catun et Balhus.
te but despyrrhoniens est d'atteindre Je
repos, l'ataravie. A
cetteépoque, tous tes
philosophes sont unanimes à ne voir
dut» laphilosophie qu'un moyen d'arriver ait bonheur. Cnr-
néade ne fait pas exception mais cent ans après la mort de
Zenon, il il moins du confiance dans la vertupratique
des
systèmes. Il a vu successivement tontes tes finsque l'activité (ut-
muiiiepeut su proposer, toutes les théories, conduire à des con-
séquences inadmissibles, et ne pas tenir leurs promesses. Aussi
renonce-t-il à faire un choix entre fautes ces lins il se tient à
égale distance de l'ascétisme stoïcien et du lit froide immobilité
du pyrrhonisme. C'est unephilosophie
dejuste milieu, c'est lit
philosophie (lit bon sens.
Les nouveaux académiciens diffèrent encore despyrrhontmts
par leur méthode. Lu pyrrhonisine lie s'aperçoit pas qu'ilse dé-
truit lui-même. Itton de mieux que d'attaquer, comme .tënési-
tlèine. la causalité, et d'éitumérer les huittropes
de la cause,
ou, connut' Sextus, de mettre en pièces laludique stoïcienne.
Mais attaquer en mèiiie temps la théorie du la démonstration
c'est anéantir sui-nu'ine sonouvrajfe,
el briser dans sa main
l'arme dont o» se sert. Carnéade et(.'litomaqtte
ne commettent
pas mu: pareille faute ils se servent, de lalogique pour
dé-
truire, mais ils se {{ardent bien de détruire, la logique. Il est vrai
qu'ils attaquent la diulei-iicfuc. insistent sur les absurdités aux-
quelleselle conduit. et la comparent à un
polype quise dévore
lui-uie'nie. Mais de la part de dialertteiens aussi exerces, (le telles
attaques ne pouvaient être bien sérieuses on ne renonce pas.
aussi facilement a un art on ou excelle. Au fond, ils veulent
substituer à la seii'iico de la réalité, rwonnuo impossible, une
science toute tonnelle, Ott ladialectique
et lalogique occupe-
ront laplus |jrande place
ce sera la systématisation, ou la
3W WïftE IV. – CU.tPITltB IV..csr s c. aaes.ti t W 41 1'
coordination descoueepts. Tel est te sens, telle est b portëe tlu
probtdiilisme. On le verraitplus clairement si tes idées de fav-
néade établit mieux «ouïmes, si sesnégations
n'avaient fait
fjruiid tort il la partie positive de son système.
Hl. H y a, selon nous. des vues 1res justes clans cette péné-trante et ingénieuse comparaison. Il est vrai, et nous croyons
l'avoir montré par des raisons purement historiques, qu'il y a
une différence d'origine entre le scepticisme et la nouvelle Aca-
démie. Le pyrrlionisme a des affinités avec laphilosophie (le
Déinocrite. La nouvelle Académie reconnaît Platon et Soerato
pour ses ancêtres. C'est par des chemins différents futé pyrrho-niens et académiciens sont arrivés au même point, peu prèscomme les
cyrémûques de leur côté, et par une voie (jui leur
estpropre, aboutissaient à des conclusions analogues. Les deux
doctrines sont comme deux fleuves(lui
serejoignent, mais dont
les eaux, mêmeaprès
la rencontra» demeurent distinctes.
Kn effet, de cette différence d'origine en résultent deux autres
dansl'esprit (jdndrat des detti écoles, et dans l'attitude qu'elles
prennent à l'égard de leur ennemi commun, le dogmatisme.
D'abord si nous avons bien interprété ta philosophie de Pyrrhonc'est par lassitude par dé^otit par dédain de la dialectique et de
ses infinies subtilités qu'il est arrivé au renoncement sceptique.Au contraire, c'est par le goàl passionné, et l'habitude invétérée
de ladispute, c'est par amour tie la dialectique, que les acadé-
miciens ont été amenés à combattre le dogmatisme. Les tradi-
tions de leur école, autorisées par les grands noms de Sot-rate,
de Platon cl d'Aristote, leur faisaient un dr-voir d'examiner sur
chaque question le pour et le contre. A propos des doctrines
éteintes, des philosophies mortes, il leur fallait prendre le
conln:-pied de tout et'qui avait été aliirmé, et découvrir le
pointfaible de toute
opinion. A combien plus forte raison ne devaient-
ils pas appliquer eettt» méthode,lorsqu'ils avaient devant eux
une doctrine vivante, qnise
jetaitdans la lutin avec toute l'ar-
deur et la présomption d<>la jeun<wsi»? Les nouveaux aradéini-
LE t'VHMiONlSMK ET LA 30 WELLS ACAD&UIL 387
.1.~ 1..1" 1
•t.
riens étaient pur rftat obligé» dé «inibùttré le stoïcisme» aiws
mômeque
des rivalités personnelles et dis Jalousies de cou-
disciples n'auraient pas cuvoniiné le débat.
Plus (uni, avec /tëitésidèwe, lu scepticisme, .suivait! peut-étro
l'exemple de lit nutivelle Académie1, abusa à sou lom- «le la dia-
luctic[(t(;. Miictoll u biuii montré foiuiucitt lessceptiques ruini'itt
ladiul<!cti(|uo ujji'ès s'en titre servis, tandis
que les académiciens,
bien qu'ils aicmt pu avoir d(!s mots durs pour leur «xeréite favori
lui conservent au fond une cortaino tendresse Jo cœur.
De l'origine platonicienne! de la nouvelle Académie résulte
encore »u« |«jrti<ulai'ité <jui h« nous semble1 pirs avoir été asse/.
mise en Itjinière. Ceijue
tes académiciens, différents on cela des
sceptiques, attaquent surtout chez li-s stoïciens. tW luur suu-
sualisme. Par là, ils se montrent les véritables héritiers d«r Fla-
ton. Nousn'allons jms ]usï|u'ù admettre avec saint Augustin'"
ijue leui1» négations n'étaient que poor la montre,«ju'ils se pro-
posaient avant tout de combattre avue sesprupres armes te «ia-
té*rialism« régnant qu'au fond ils étaient des idéalistes convain-
cus, attendant des temps meilleurs pour laisser paraître au grand
jour leur vraie doctrine. Si séduisante qu'une [Mireille supposi-tion puisse paraître, elle
s'appuie sur des preuves trop insulli-
santes saint Augustin est un témointrop éloigné pour qu'où
puisse s'y rallier, et lui-uièiie doute trop ticl'hypothèse qu'il
insinue pour que nous puissions y croire. On comprendrait mal
d'ailleurs une l«sll« timidité de la part de cesinfalijpblesdispu-
tcurs. Et puis, Caméade serait un singulier représentant du paridéidisKie Mais, sans aller
jusqu'il attribuer «us -académiciens
une doctrine de derrière la téfe, il est certain qu'ils répugnaientau sensualisme stoïcien its l'ont combattit de tout leur cœur.
L'histoire a vraiment été injuste pour lu nouvelle Académie.
Le titre de dogmnl isles dont se cuivrent tes stoïciens a créé un
préjugé en leur faveur. On a fermé les jeux sur les insiilfisamcs
de leur dogmatisme par celle seule raison qn'ils avaient, .mv
\«iï rï-tltsstis,|i.
là.
*JAi:. tt. «viii, tin.
388 MVRR IV.– CIIAIUTRIÎ IV.
yeux de leurs juges, te mérite d'élïe dôgmàtîstes. Et on n*a su
aucun gré aux académiciens des bonnes raisons qu'ils invo-
quaient, parce qu'ils su donnaient ic tort du s'attaquer à des
dogmatistes. On les appelle desdisciples dégénérés de Platon.
Il faut bien te dire pourtant Platon, s'il eût vécu, n'eftlpas vtt
d'un d'il favorable ie stoïcisme. C« sensualisme lui etU rappelécelui de l'mlngows jamais
il n'eftt admis que les sens puissent
embraser, comprendre la véritable réalité; it aurait appelé tes
stoïciens, comme les matérialistes de son leinps, des «fils de
Cadmus». (laruéade etClïïômaque étaient quoi qu'on puisse
dire, dans la vraie tradition platonicienne, lorsqu'ils s'élevaient
avec tant de vigueur contre les thèses df Chrvsippe. Ils étaient f
encore Bdèiesà l'esprit de leur école, quand, renonçant a saisirl'
ta réalité matérielle ils cherchaientdans|eswjej;| dansjTaecojïI
dj^repréjientatonSj/te qu'on peut connaître dfiJioérité. Socrate
aussi clienhait dans lesconcepts
lavérité; q«o les sens n'attei-
gnent pas: les idéesde PîâTôlv. l'acte dfArislo((r notaient pas
non plus des réalités matérielles, Sans doute, car il ne faut rien
exagérer, Carnéade etClttomacjue s'éloijjnaient beaucoup du
dogmatisme idéaliste de leurs maîtres ils leur ressemblaientdu moins
puisqu'ils étaient idéalistes jus(lue dans tescepticisme.
Leur doctrine est à vrai dire une protestation contre le sonsita-
tisme_âioîcien. l'ar fa encore ils diilèrent notablement des scep- |
tiques. En leurqualité (le médecins, les sceptiques de ta dernière
période ont un pencltant marqué vers le matérialisme épicurienil arrive a Sextus Hinpirieus de |»arler comme un véritable épi-curien.
Maraoll nous paraît avoir bien justenmnt caractérisé la nou-
velle Académielorsqu'il l'appelle une école de juste milieu.
dette assertion est exacte à la lois aupoint de vue moral et ait
point de vue lu|jique.
En morale, Carnéade ni Ciitoinaqiic ressemblent aux scep-
tiques lorsqu'ils rejettent fontes les lliwirii's sur le souverain
bien, dont ils ont vit les exagérations, et qu'ils croient inca-
pablesde tenir leurs promesses. Mais tes
sceptiquesà leur tour
i
Li PWnaOMSMB KT I*A NOUVELLE ACADÉMIE. 388
tombent dans nn antre excèsqui
no sauraitdavantage
Satis-
faire des esprits sages et éclairés. Vivre selon la eoutumu, ù la
façon dessimples vivre d'une vit» instinctive et. on quelque
sorte, machinale, se laisserporter par tes événements, et re-
noncer à se gouverner soi-même, voilà une extrémité àlaquelle
des hommes intelligents lie sauraient que difficilement su ré-
soudre. Entre ces deux excès, tes académicien»prennent
mi
moyen terme. Sans doute, on suivra la nature, on cherchera les
biensqu'elle,
recommande depoursuivre mais dans eetto re-
cherche, on ne renoncera pas à faire usage de son hou sens, à
faire lui choix. On utilisera son intelligence, puisque aussi bien
on en a une à défaut de certitude an s'attachent à inprobabi-
lité. Si on ne se flatte pas d'arriver aïi iMërTubsolii ù la perfec-
tion en soi chimères que les dogmatisies sont"seulsà poursuivre
du moins on fera pour le mieux. Ou s'arrangera de façon à passer
commodément letemps de la vie, en tirant le meilleur parti
possihle des moyens dont on dispose. A coup sur, cen'est pas là
une morale très élevée; telle qu'elle est, elle est supérieure la
morne indifférence dessceptiques
eu tout cas, elle est autre
chose.
Au point de vuelogique aussi, la doctrine de lu nouvelle
Académie est un juste milieu. U'accord avec tous lesphilosophes
(le son temps, elle rellousse le i(hijjniajisme_jdéaKsteJdlePlaton
et d'Aristote. |)'acconl avec les sceptiques, elle repousse le dog-matisme sensualiskyk's stoïciens. Mais tandis
que les sceptiques,
se jetanTS" roxtï'^tiitté opposée, s'en tiennent, aux seules appa-
rences, Carnéade et sesdisciples adoptent
uninoyc'nterméiTlo
a
probnbititi'. (le n'estpis la science, et ils en conviennent mais
ce n'est pas non plus las>in)pie^sus|)ension du .jugenwat. CVst
une sorte d'équivalent, uneapproximation
de la science à dé-
faut de lu science objective, c'estla^eience subjective/
II est permis de penser avec Maccolt qu'un luiuiiuc tel queCarnéade avait mûrement réfléchi sur ce
point. Rien ne serait
plusintéressant
pournous
enmde savoir comment
il justifiait
cette situation intermédiaire, et ce qu'il entendait exactement
•M& LIVRÉ IV. CHANTRE IV.
par probabilité. Mattioureusemi'itt, ta pénurie de nos renseigne-ments nous réduit 4 des conjectures.
Faut-ii croire, avec Maccoll, que cette sorte de seienee se ré-
duisait à une combinaison, à un système deconcepts,
tVune
connaissancepuremeHyimnelle, que l'œuvre
de l'esprit humain
devait «Stroseulement, selon Carnéude, du ctasser ses idées selon
le meilleur ordre possible, sans se préomipërlle savoir si elles
correspondent à une réalité? Ilest possible à la
rigueur cjue cette
-interprétation soit exacte t ellene serait alorsqu'un retour aux
vues de Socrate, dont la philosophie a été si justement appelée ht «
philosophie des conceptsToutefois, rien de ce
que nous con- *
«âjssôTîFne^usniîFëélte hypothèse. Autantqu'on
en peut juger
par les résumé assi'a étendus que Sctins nous a conservés des u
doctrines de Carnéade, cephilosophe se préoccupait moins des
concepts, et de l'ordre abstrait selonlequel ou peut les
dispo-
ser, que de l'accordentre TjltedeS-rëprésentatïôns ou sensations
actuelles, d'après lesquelles nous devonsrnofl3"gn1ïfëFdans la vie
ils'afjit par exemple de distinguer une corde d'unserpent, tut
Fantôme d'une réalité1. Le philosophe seplace à un point de
vue utilitaire et pratique ici, comme partout au temps de Car- !»
néade, la théorie «si subordonnée à lapratique. Ce qu'il y
a de
plus important dans les idtws, c'est la manière de s'en servir. (,
Ainsi interprétée, cettephilosophie est moins platonicienne, t
mais plus voisine du stoïcisme et de l'épicurisme elle est davan-
tage de sou temps.
Utvi conséquence trop peu remarquée de l'effort de Caméado
pour trouver un moyen terme entre le dogmatisme et le scepti-
cisme, c'est qu'il devait attacher plus d'importance à l'élude
dujsujet. Les sceptiques avaient Itni par ôlre surtout des dia- »
lecticiens les nouveaux académiciens sont aussi despsycho-
»
iogues. La théorie do l'association des idées à un point (teviTo |j
purement psvcholn^ique. l'étude attentive d<;s<;ts où unerepré-
sentaûon s'accorde avec jcs autres, exigeaient une réflexion sur u
soi-môtne, des analyses et des- observations, dont nous ne re-
trouvons les ;hi;iIi>|;ucn dans aucun autre système dephilosophie
t
il
WîmUÈHONfSMK BT M NONVËLLE KLVBÉMIE. ,19t
aitëfomie. C'est ta première fois peut-être qu'ondécouvre uu
essai d'analysetlo l'entendement.
(l'est probiSîêmëut par suite des ruôtiios éludes que Carnéade
et tes académiciens ont été amenés à examiner ta question du
libre arbitre, et a combattre le déterminisme stoïcien. Nous
avons malheureusement trop peu de renseignements sur ta ma-
nière dont tes nouveaux académiciens résolvaient cette ques-
tion, intéressante entre toutes. Il est à noter au moins que
lessceptiques
ne s'en préoccupent pas. Ils semblent admettre,
i! est vrai, avec presque tous leurs contemporains, que notre
assentiment, h une représentation f|uelconfjp dépend jejK>«9»
mais nulle part,dans tes trois grands ouvrages dé Sextus, la
question n'est discutée pour elle-même, comme elle l'a été ccr-
tainementpar
Gaméade.
En résumé, le pyrrlionismeet la nouvelle Académie ont une
grande ressemblance, puisque l'un et l'autre combattent te dog-
matisme, et, par la force des choses, sont souvent amenés «\
employer tes tm'me arguments. Mais tes deux éeoles mènent la
même campagne de deux manières différentes, et l'histoire ne
doit pas les confondre. Le pyrrlionisme aspire a ruiner toute
démonstration et toute dialectiquela nouvelle Académie vil de
démonstration et de dialectique. Le pyrrhonismeest ttne doc-
trine radicale c'est le pur phénoméiiismeen logique, c'est
l'abstentiuii et le renuiicement en morale. La nouvelle Académie
est une doctrine de juste milieu elle remplace la science par
une sorte d'équivalent;elle donne en morale des préceptes de
conduite, et assigne un but à la vie humaine. Enfin les nouveaux
académiciens sont des psychologues ils ont sinon l'idée, du
moins lepressentiment que
c'est pur une analyse de l'entende-
ment que doit commencer la philosophie.
Il est toujours dangereux de comparer les doctrines anciennes
aux modernes trop de raisons s'opposentà ce
quede telles as-
similationspuissent jamais
être entièrement exactes et elles ont
pour l'ordinaire plus d'inconvénients que d'avantages, Pourtant,
392 LIVRE IV. CHAPITRE IV.
si on voulait à toute forée faire «n rapprochement on pourraitdire
que le scepticisme, par sadisposition à tout dériver de
l'expérience parsu secrète connivence avec la sensualisme
épicurien, ressemble davantage au. phénoménisine uiaderne
/Enésidèwe et surtout SextusËrapiricus font, à certains égards,
penser à David Hume. Carnéade, par sa disposition à interroger¡
l'esprit lui-même, à réfléchir sur les données et les conditions
de fa connaissance humaine, offre plus d'analogie avec Kant.
Mais n'insistons pas sur cesrapprochements.
If est trop clair
que Uarnéade n*a ni le sériëu* moral, ni la haute élévation
d'esprit d'un Kanl ildiffère du philosophede
KoMjigsberj* bien
plus encore qu'il fui ressemble. /Rnésîdènie de son côté diffère
en bien des manières de David Hume sans parler même du t
système de métaphysique par lequel il semble avoir couronné •
sonscepticisme, sa fa<;ond'argumenter et sa dialectique abstraite
lierappellent
en rien les riflesanalyses du philosophe écossais.
Mais s'il est téméraire de faire un parallèle entre les hommes,
il n'en est pas tout à fait de même des doctrines. Parce qu'ellessont moins personnelles, et ne
dépendent pas, en ce qu'ellesont d'essentiel, du caractère particulier de leurs auteurs, et des
circonstances qui ont dirigé le cours de leurspensées,
elles ,i
peuvent avoir entre elles deplus notables ressemblances. Ainsi
on pourrait direque les théories d'Kiiésidèrae et de Sextus tout I
pressentir les doctrines modernes suivant lesquelles l'esprit ue
connaîtque
desphénomènes et leurs fois empiriques. Les nou-
veaux académiciens, cherchant un moyen terme entre te dog-
matisme, idéaliste ou sensuuliste, et lepur pyrrlmnisrae. ont
tenté uneentreprise analogie « celle (lite Kant a réalisée. En
dernière analyse, il y a entre h» p\ rriionisinc et la nouvelle Ani- |
demie n peu prèsla même différence qu'entre le positivisme
phénoméiiisli: de notre temps et le criticisme Kantien. t
il
CONCLUSION.
La célèbre formule, si souvent reflétée depuis RoyeivCollard
« Onne fait pas su scepticisme sapart dès qu'il a pénétré dans
l'entendement, il l'envahit tout entier», est peut-être le plus bel
élojje qu'on ait jamais fait du scepticisme. Il semblerait, à fa
prendre au piedde la lettre, que
tu raison soit désarmée eu
présence des raisonnements dessceptiques, qu*eilis soit vaincue
d'avance si elle accepta la lutte. Le mieux serait de fermer les
jeux et île se boucher les oreilles, comme on fait pour échapper•-
à d'irrésistibles séductions. Encore uu peu on ferait défense aux.
philosophes de s'occuper de ces questions, comme on défend
aux enfants de jouer avec le feu. H est inutile de remarquercombien une pareille crainte Pen la supposant fondée, serait
contraire à l'esprit philosophique;mais elle est ait moins l'oit
exagérée. Ni le scepticisme ne mérite cet honneur, ni la raison
cet excès d'indignité.
La formule de Koyer-Collard si elle est philosophiquementsans valeur, exprime cependant assez bien l'état de
beaucoup
d'esprits, d'ailleurs excellents» à l'égard de ceux qui s'aventurent
h discuter le scepticisme «ne ira et studio. Si art fait au scepti-
cisme sapart, ou même une part quelconque, tout aussitôt
on
est accuse de pactiser avec t'ennïmii. On est suspect, dès qu'on
parlemente avec lui la moindre concession prend aux yeux de
personnes trop effrayées, les proportions d'une trahison.
La crainte de paraître complice ne nous arrêtera pas [dus que
la peur d'être emmené en captivité. Sans vouloir nous laisser
envahir, sans consentir non plus à nous laisser enrôler parmiles
pyrrlioniens. en fort bonne compagnie, nous oserons examiner
m ctmcimum.
les thèses sceptiques en tonte liberté d'esprit, essayer d'en dé»
luMer lt> fort et li> faible, leur donner raisonquand
il nous
paraîtra qttt*ta raison est
pour elles, les condamner quand ilr
nous: sera prouvé qu'elles ont tort. Nous essaieronsd'accomplir j
culte tâche sanspassion,
carquoi
de plus inutile? sans faiblesse I
lion plus,et sans complaisance pour les doctrines que nous
avonslongtemps
étudiées, car quoi *fe plus ridîeuk*, au temps
où nous sommes, qu'une apologie (lu scepticisme ? Si, comme
il est à .craindre, nous ne réussissons pas, ta (lillicnlté de t'en-
treprisesera notre excuse. Si nous n'échouons
pas complètement
c'est que, vu de près* lo monstre est moins redoutable quil.no1
paraît:on
s'apercevra qu'il n'était pas besoin d'un Œdipe pour
résoudre les questions de ne s|)liinx. Nous ejilrous dans unt|
tiéyrinthe, mais il n'y a pas de Minotiuiie.
I. Considérée dans son ensemule et dégagée de la multitude
infinie ttes détails dans lesquels elle s'est trop souvent complue
et égarée, l'arjjMMientatton sceptique peutse ramener à trois
chefs principaux i" Elle récuse ta connaissance directe on in-
tuitive (le la réalité. L'intuition sensible (personne ne parlant t,
plusde t'intuition intellectuelle il l'époque oti te scepticisme
s'est
constitué) est jujjée par elle radicalement impuissante.
a" Klle récuse lit emunnssatiee indirecte de la réalité, soit parb
le raisonnementproprement
dit. soit par le principede cau-
satité. S'atlaeliant, non plusà
l'expérience vulgaire, mais à la
science tulle quela définissent les philosophes,
elle s'efforce de
démontrer que cettescience est impossible.
.")" Enfin, se plaçantà fin point de vue encore plus général,
envisageant non plus l'expérience ou la science, mais l'idée
même île la vérité telle que tout le monde la conçoit, elle veut v
montrer quecette idée n'a pas d'objet. Par définition, la vérité <•
serait cequi s'impose
ill'esprit:
or rien, ni en l'ait, ai en droit,;l
nes'impose
ill'esprit.
Malgré leurs hnbiludt>s d'ordre i«tde précision,les sceptiques
Il
I
CONCLUSION. 305
n'ont pas totijaitm distingué tesphases do leur arfjtimentatiurt
aussi nettementque
nous le faisons ici; Sistus W mêle con-
stamment. Mais, historiquement, ces trois thèses se sont déve-
loppées «tans l'ordre mémo que nous indiquons. Les (lit tropes,réunis par /Knésidôme, connus avant lui, et tes arguments
[dus subtils do (amende condamnentl'expérience c'est une
analyse psychotonique. Puis jfênésidènio démontre dialeetique-inent l'impossibilité de ta science. Enfin tes cinq trapes (t'Agrippaservent à établir lo{ji(|iiemei)t qu'aucune vérité ne nous est ac-
cessible.
Ainsi enchaînés, ces trois arguments forment certainement la
réquisitoire le [dus redoutable qu'on ait jamais dirigé contre ta
raison humaine. Qtielb est ta valeur de chacun d'eux?
Sur tepremier point, pour établir qtte nous n'tti teignons pas
directement la réalité, la jmmïplt! raison des sceptiques, celte
dont ils ont tant abnsû, est le trope du désacconl, la célèbre ]
preuve tiréadcliicontrndictiondesopinioiislminuineb". Ce médiocre
lieu commun inmmit |>as eu «ne si brillante fortune, si souvent
ses adversaires ne l'avaient fortilié par leur manière de I« com-
battre.Presque toujours ils' perdent leur temps ù discuter pied
à pied la question de fait, àpuilier
les cuntradictioim,à ctiercher
un accord entre des opinions opposées c'est courir ù un échec
certain. Il fautpasser
cundainnittioii sur faquestion
de fait.
d'est dans le raisonnement ([tic tescepticisme montre toute sa
faiblesse. H est clair, en oli'cf que du désaccord des opinionset des systèmes on ne pourra conclure li*ititiienient à
l'impos-
sibilité, pour l'esprit humain, d'atteindre lu véritéqu'à une
con-
dition, c'est clue ce désaccord ne puisse sVvpliquer que s'il n'y
a pas de vérité ou si elle nous est inaccessible. Oâ-,on peutl'ex-
pliquer autrement, fl peut venir et il rient, en eltel, non do ce
que tous les hommes nepeuvent connaître la vérité mais du ce
qu'ils ta cherchent mal; il a pour origine mi défaut de méthode.
Objecle-t-on qu'il n'est pas vraisemblable que. pendant tant de
siècles, l'esprit humain, avide du vérité, ait l'ait iaussse route.
ma conclusion.
s'il était capable de trouver te bon chemin? C'est d'abord
changer de thèse, car, puisqu'on raisonne, ce 'n'est pas de vrai-
semblancequ'il s'agit. Mais surtout, que
ce suif vraisemblable
ou non, il est possible qu'après de» longues recherches, l'esprit
humain n'aitpas
roncoiitré lu vraie méthode; il est possible qu'il
la rencontre pins t«rd. S'il y avait encore, de nos jour», des
sceptiques,l'avènemetit de lu méthode expérimental» et les
progrèsdes sciences leur fermeraient définitivement la houcitc.
Il est trop clair qu'un long égarement ne prouve rien contre la
possibilité de trouver le «-hemin le désaccord passé ou présent
t»e prouve rien contre l'aceurd possible dans l'avenir; et. en fait,
nous votons que cet accord se réalise peu il peu dans les
sciences. Enfin, une analyse psychologiquetrès
simplemous
montre que les croyances des hommes, mè*me les pltrs savants et
les plus grands, dépendent. (Kitir une notable part,île leurs
sentiments et de leurs passions. Dès lors, comment imputerù
l'infirmité d» leur intel!i}j«iice cequi peut être te fait de leurs-
passit»ns, essentiellement jKissayères et changeantes*
Pris un lui-même. l'argumeHl Vérité eu deçà de» Pyrénées,
erreur mt delà, est donc sans valeur, il séduit bien des jjens par
sa simplicitéet par les développements interminables qu'il coin-
porteau fond, il n'est bon qu'à amuser les badauds. Convenons
toutefoisque
la rélnlatitiitqui;
nous venonsd'c<>qui$ser implique
l'abandon de la thèse de l'intuition directe. Il deviendrait fort
dimeiie d'expliquerles eonlradiiliojis humaines, si on se repré-
sentait l'esprit humain comme un miroir qui reflète les choses.
Les sceptiques étaient donc après tout dans leur droit en invo-
quanti-i-targument contre les partisans de l'intuition.
C'est surtout par les neuf autres tropes qu'ilsont montré le
caractère relatif de la cunuaissatu-e sensible. Ici. il est impossible
de contesterqu'ils
aient raison. DepuisP.irménide et Démocrite
jusqu'à Descartes et Kant, c'est un lieu commun, parmi lesphi-
losophes, (pie les sens ne nous font pas connaître la réalité telle
qu'elle est. Il y a bien peu de personnes aujourd'hui (pli ne
considèrent tes sensations comme «les si<jm« correspondant,il
tt()N(~1,USION. ?7
t·. t. gr
ni frai, « certaines réalité?, maisressemblant aussi peu h
ices
réalités que tes mots ;iu\ choses qu'ils dikijment. Reid liii-
fuéiue l'admettait. On peut doue considérer eu point comme
acquis.
Il «si vrai, car it faut se garder d'exagérer le mérite tles scep-
tiques, quela
psychologie moderne se refuse à admettre que les
sens nous trompent. Confirmant cequ'Ai'isfoti; et fêpieure avaient
déjà dit, elle h établi que, prises en elles-ineîmi's et tlé|jaj;ées de
tout ce «|»e t'usant y itj<tate les mterpr<!ter. {psttttttn~'sdes sons ne sont
jamaisfausses. Mais elles ne sont
psvraies
trait |)l(ist; fur ([atïlla .sipulicafion c« ittot |iofarait-il avoir Aèa
t'iiislaut <nùm reuuncc il considérer les sensations contint' des
eojiiesfiitèks div lu n'alité ? fia vérité, contint! Furreur, réside •
uniquement dans les cviubititiisons, dnns tessynthèse!* formées
de plusieurs sensations. (l'est ce que ti;s .sceptiques n'ont |iascompris.
Leursanalyses,
sauf celle de Carnwule,qui
s'estap-
proché bien prèsde la vérité, sont ituromplèles et superlicielles.
Mais, pour les jiujer équitablcinent it faut se souvenir de la
thèse <pi"ils voulaient combattre. Que emyaît le sens commun,
et avec tut la plupart (les philosophes? Que les sens, soit toujours,
soit oh certains cas. nousreprésentent exactement fes- choses
tellesqu'elles sont.
(ï'était lit tlièsiMies stoïciens. Les
sceptiquesétaient certainement dans le vrai en leur prouvant
qu'ils se trompaient.
H y a bien des sophisme* parmiles arguments que
les scep-
tiques uni dirigés roiitre le raisonnetnenl ou ta théorie de ta
preuve mais il faut i<-i néjjlijjer les détails pour ne voir que
l'essentiel. Or. le raisonnement pris en lui-même, ikmis permet-
il d'otteindre la réalité? Le propre du est d'établir
a prion un lien de nécessité absolue entre les tenues qu'il unit, t
et cette nécessité se ramène ù l'identité comuie nous disons au-
jourd'hui, h- raisonnement est essentiellement analytique. Kn
d'autres termes, la conclusion ne faisantqui; répéter
cequi
est
déjà contenu dans les prémisses le raisonnement ne nous ap-
39» CONCLUSION.
prendrien par fui-itiène. Il est inutile d'insister sur ce
point,
«•eut fois mis «n lumière,
Strii'teuwnl parlant. si l'on veut rester fidèle au principe
d'identité, le ntisouiieiuent est impossible, ll'itne chose ou d'un
terme on ne peuttirer
cjuecette chose ou ce tenue. Dès fors, il
faut choisir ou renoncer à l'application rigoureuse du principe
d'identité,par conséquent
au raisonnement, car un affirment
entre tes choses dos rapportsconstatés rationnellement ou einpt-
rifjuement, tuais non démontrés; la vérité sera dans les pré-
misses, non dans le raisonnement ou s'en tenir strictement a»
principe d'identité, et alors l'esprit est enfermé dans chaquu
définition. il est prisonnier de ses idées; tous les éléments de la
«' pensée sont isolés les uns des autres, reTractuires à toute combi-
naison, matériaux inutiles d'une sciencequi
ne se fera jamais.
A vrai dire, cet»rguiiK>tit n'appartient pas
ci*propre
aux
sceptiques.Les éléates, les sophistes, IcsiHégariijues s'en étaient
servis avant eux: mais l'ancienneté d'unargument
note rien à
sa valeur. Platon lui-même en avait été vivementfrappé;
c'est
probablement pour résoudre- cette itilliiufté (ju'ilécrivit le Par-
ménide et le Sophiste. Il avait bien vu tEtte proclamerla valeur
absolue et satis réserves du principe d'identité, c'est rendre la
science impossible; aussi admettait-il fa pmiicipalion(tes idées,
c'est-à-dire t'uniim, constatée comme une toi primordialeet irré-
ductible, mais non ilédititeni jiistidéeanalytHiueinent,ou
de choses différentes les unes (ha autres, identifiées néanmoins
sous certains rapports. Mais quoi! déclarer que des choses diffé-
rentes, le sujet et l'attribut d'un jujjement.pur evemple, ne tant
«|u'u!i;fju'iiHecliost;estlaiiiâHie(|u'uneimtre;(jueeette chose n'est
pas ce (|u*ellc est, puisqu'elle eu est en mônu.' tempstitie autre,
n'est-ce l'as fouler aux pieds la loi suprême de la pensée?Platon
eut pleine conscience du scandale lo|jirpii! ampiel il était conduit;
avec la décision des grands esprits, il en pritson
partiet. par
la formule dont il se servit, il eut soin de souligner, de mettre
en lumière la hardiesse de sa doctrine. «Il faut, pournous
défendre, soumettre a l'épreuve la parole de notre père l'armé-
conclusion. m
nide; et prouver qui»l« non^tre «st sVijuelquofr égards et ijiw, do
son côté, sons certain» rapports, faire «"est jmsît!.»
En iitdnie temps qu'il résolvait à sa manière lu difficulté,
Platon faisait droit ii l'objection. Lis sceptiques oublièrenton ne
comprirent pasI»
réponse;ils retinrent l'objection. Ils étaient
dans leur droit, ait point d» vue (Je la dialectique, vis-à-vis d'ad-
versaires qui n'admettaient pas, eux non plus,la solution plato-
nicienne. Il faut convenir avec eux(tue
le raisonnement pur, (u
déduction toute seule, ne suffisent pasà fonder la science:. Il faut
d'autres principes qui; le principe d'identité, des principes syn-
thétiques, comme l'a montré kaiit» c'est-à-dire des données
premières, qu'on accepte sans les faire dériver d'un principe
supérieur,sans les déduire. Les sceptiques
n'eussent peut-être
pas accordé qu'il existe de tels principes, mais ils ont bien vu
l'insuffisance du principe d'identité et ils auraient pu invoquer
en leur faveur le témoignage de Platon.
Au défaut de la démonstration, la science atteint-elle la vé-
rité parla recherche et la découverte des causes ? De nos jours
on confond souvent celte manière de procéder avec la précé-
dente nous voyons à chaque instant donner le nom de dé-
inonstratioit a des raisonnements où le principe de causalité joue
leprincipal
rote. Lessceptiques
les distinguaient et ils avaient
raison. Le raisonnementproprement
dit ne pose que des iden-
tités à chacun (les degrés qu'il parcourt, nous savons, nous
comprenons quetes termes
quise subtituent tes uns aux autres
sont identiques ou équivalents. Mais, quand on parle de cause
et d'effet, le lien qui unit tes termes est fort différent; la cause
ne saurait éire conçue comme identique à l'effel. Entre deux
choses posées et maintenues comme distinctes, on allirmc une
relation sui jpneris; on conçoit dans ta première une force, une
énergie quisuscite et amène à l'existence la seconde. Par suite,
CiS-iphisl., ait, D. Tôk toû ««{M* KapfievWoi» 't.ùynv ivvyHtfa» ii(ii»
cr'(iw(/f<cV</is ialu {kawifap xii Çiiietfat v) xc («il «Suùt Mt tutti ti *«•' tô
iv ai sraiii» iis «tix év'n m.
MO CONCLUSION.
«ta*. twittt rtr^vtùl •»( i»i **i-t itnn itftiicn tiPAfflttf lin- fHIitf finun petit constater qa une
cause produit un ellef on ne saurait
prévoirl'elll't dans la cause; ou ne peut
l'on déduire. Cependant,
comme celte action transitive de la cause estreprésentée
euinme
nécessaire il arrive fréquemment qu'on ta confondu avec la re-
lation d'identité, nécessaire, etl« aussi, quoique«l'une manier»
fort différente. On raisonne sur la cause pour eu déduire les
effets, comme sur une définition pouren déduire les consé-
quences; unne
(~rend pas jjarde que,si ces effets n'étaient
«Minus (Finance par d'autres moyens, en ne saurait les prévoir;
par suite, que la déduction ttest qu'apparente. Humele
pre-
mier, Kant surtout. parla célèbre distinction des jugements
aiiitlvliijdL'Set des jinjeiucnts synttiéliques.
nous uni mis en
garde oinfre ire défaut. Les gi-ands philosopltes n'ysont d'ailleurs
pastouiJws. |>ans la physique de Descartes, dans celle de Male-
bntttchcf, <l;«is toute la ftittks'opfiiu (le Spinoza,ta notion (le
cause (rau-sitive ne joue aucun rote.
Les sceptiques, quifaisaient fort bien celle distinction, con-
sacraiettt, ou l'a vu, à ht causalité toute mie série d'arguments
particuliers. D'alwrd rc.vrsk'nce des causes foliosque
les entend
naïvenit'iil le vulgaire,la réalité hors de nous de choses qui.
sans rapport ni avec d'autres choses ni avec l'esprit, seraient d<*s
causes, est manifestement impossible.Une chose ne saurait être
par elfe-jiit'me une cause elle ne devient telle que si elle a un
effet, tën d'autres termes, la causalité est un rappwf.ot non une
chose en soi elle fait partie deschoses relatives t'JSp mpis tt.
Aucune contestation sérieuse n'est possible sur ce point.
Mais, s'il en est ainsi. la causalité ne peutrien nous n\t-
prendre sur la nature des choses. L'ambition de la science serait
d'cxplique-rles effets par tes causes; mais voilà que nous ne
pouvons connaître les causes que ([uandles ell'els nous sont
connus, car un rapportne se conçoit pas sans les Im-nies qu'il
unit. C'estparce que
l'ellet est donné que nous .saisissons la
cause; il ne faut donc pas dire que nous allons des causes aux
l! Traite de lu mil. hum., lit, • p.10S. iraJ. Heooinier et l'illou. Ibris.
187S.
l.4F t! i.afa lt i3 ~t\a roi 1
tint il ntlfiinpik. rfcfti>ftiWfc*f.îf n*% Àf«w*- niiliiainhnt à
»(>(i
1 1.1
offieis. Comment, «J'oilbsirr», pourrait-il en Ôtro autrement, s'ilest vrai que l'effet soit différent de la cause? D'une chose, l'ana-
lysene saurait tirer autre cliose
qu'eHe-mâmB,Il no resterait
qu'à concevoir expressément dans la cause ce qu'il s'agit d'ex-
pliquer:nui» il est clair qu'alors on n'expliquerait rien. C'est
«près coup, quand l'expérience nous a appris à connaître l'effet,
que, par une sorte de retour, nous nous avisons de le retrouver
dans la cause; nous Cuisons comme ces prophètes qui prédisent
l'avenir après qu'il est arrivé, liéduits it nous-mêmes et avec
l'aide du seul principedu causalité nous ne saurions a priori (et
sans cela ii n'y « pas de science) trouver aucuneexplication.
Anrisque*
d'étonner nos lecteurs, nous avouons nepas
voir
ce qu'on pourrait opposer cette argumentation. La llièse tT/Ené-
sùlème a été reprise etdéveloppée
avec une précision supérieure
par D. Hume; on n'a jamais, ilue nous sachions, répondu rien
de sérieux à eetlo pagedw philosopheécossais W «Je hasarderai
ici une proposition que je crois générale et sans exceptionc'est
qu'il n'y y pusun seul cas
assignableoù la connaissance du
rapport <|iii est entre tu cause et l'effet puisse être obtenue a
priori; mais qu'au contraire cette connaissance estuniquement
due à l'expérience, qui nous montre certains objets dans une
connexion constante. Présente:: an plus fort raisonneur (lui soit
sorti «les mains de ta nature, à l'homme qu'elle a doué de la plus
haute capacité,un
objet qui lui soit entièrement nouveau-, laissez-
le examiner scrupuleusement sesqualités sensibles; je le délie,
après cet examen, depouvoir mdiqner «ne seule de ses cattses
ou un seul de ses cflets. Les facultés rationnelles d'Adam non-
vellement créé, en lessupposant
d'une entière perfectiondès le
premiercommencement des choses, ne le mettaient pas en état
de conclure de la fluidité et de la transparence de l'eau que cet
élémentpourrait
lesuffoquer,
ni de la lumière et de la chaleur
dn feu, qu'il serait capable de le réduire en cendres. [I n'y aa
point d'objet qui manifeste parses qualités sensibles les causes
Estais plntosvphiijMS II" l'ssai, p. hn, liad. [Wiioiivicr et l'illon, Paris,
1878.
ili
kti'i CONCLUSION.
(|tà font produit, ni tes effets qu'il produira ù son (ouï-, et nuire
raison, dénuée du secours th< f«ï|)«rî«in;ctnc Jiruro jamais ta
moindre induction qui concerne les faits et les; réalités.
•«telle proposition Que ce n'est pas la misait, mais ^expérience,
qui mus instruit des cames et es effets, est admise sans difficulté
toutes les fois que nous nous souvenons dutemps où les objets
dont il s'agit nous étaient entièrement inconnus, puisque alors
nous. nous rappelons l'incapacité totale où nous étions de pré-
dire, à leur première vue. les effets qui en devaient résulter.
Montrez deux pièces tic marbre polià un homme (lui ail autant
de boit sens et de raison qu'on enpeut avoir, mais
qui n'ait au-
cune teinture de philosophie naturelle; il ne découvrira jamais
qu'elles s'attacheront l'une à l'autre avec une force quine
per-
mettra pas de les séparer en ligne directe sans faire de très
grands efforts, pendant qu'elles ne résisteront que légèrement
aux pressions latérales. Ou attribue aussi sanspeine
ù l'expé-
rience la découverte de ces événements qui ont peu d'analogie
avec le cours connu de la nature personne ne s'imagine que
l'explosion de la poudre » canot) ou l'attraction de l'aimant
eussent puêtre
prévues en raisonnant apriori. H en est de
mènelorsque
les effetsdépendent
d'un mécanisme fort com-
pliqué ou d'une structure cachée: en ce cas encore on revient h
l'expérience. Qui se vantera depouvoir expliquer par
des raisons
tirées des premiers principes pourquoi le lait et lepain
sont des
nourritures propres pour l'homme et n'en sontpas pour
le lion
ou pour le tigre?»
Qtt'on veuille bien teremarquer ce passage
de Hume n'est
pas nécessairement lié à la théorie du mêmephilosophe
suivant
laquelle l'idée de causalité transitive serait sans objet, parce
qu'elle ne correspond à aucune impression sensible. Admet-tons. si l'on veut, la théorie de Maine de liiran déclarons
que l'idée de cause nous estsuggérée par
ta conscience de Pef-
fort, que le moi se connaît lui-même comme cause active. Mais
une fois en possession do cette notion, quel besoin avons-nous
<fi*la transporter hors de nous ? Quelle nécessité lirais contraint
«ONCMiSm». 40»
>(>.
à concevoir sous Ions Inx phénomène!) «•sté'rimirii, des énergies,
des forces analogues à ci»ll**«[ne nuits avons connue en nous-
montes? Si nous le faisolls (et peut-cire avons-nous le droit de
le faire), ait moins faut-il reconnaître que nous n'y sommes pas
forcés c'est une hypothèse qui nous est commode, c'est une
explication quenous nous offrons à nous-mé*me«* mais qui ne
s'impose pas. La preuve qu'elle ne s'impose pas, c'est queta
science moderne a dû l'éliminer ses progrès (latent du jour où
la cause étant définie l'antécédent invariable d'un phénomène,
on a exclu de la cause la notion de causalité transitive, c'est-à-
dire vidé l'idée de son contenu et gardé le mot en changeantla
chose. Enfin, fut-il avéré qu'il ya hors de nous des causes ana-
logues au moi, toujours est-ilque
ce n'est certainement pas la
connaissance directe de ces causes qui nous permet de prévoir
leurs effets. Nous ne connaissons ces oifiets que par l'expérience
c'est après que nous les rattachons à des causes.
Kant, convaincu plus que personnede la sotidité de l'analyse
de Hume, a bien essayé de ressaisit le principe de causalité.
On sait comment ce philosophe, après avoir reconnu queco
principe est synthétique, soutient qu'ilest en même temps
a
priori; il en fait une loi de la pensée, une condition nécessaire
que l'esprit impose aux phénomènes,sans laquelle les phéno-
mènes n'auraient. pour ainsi dire, aucun accès même dans l'ex-
périence.telle théorie est déjà bien éloignée de celle que
combattent les sceptiques, puisque Kant renonce expressément
à l'idée de causalité transitive, puisquela toi de causalité s'ap-
plique, suivant lui, exclusivement à desphénomènes,
et non
aux choses en soi. Telle qu'elle est, elle se heurte pourtant encore
à une difficulté insurmontable. Si la toi de causalité est imposée
a priori par l'espritaux
phénomènes,il reste à rendre compte
du détail de l'applicationde cette loi aux phénomènes,
lin phé-
nomène étant donné, illaut qu'ilait une cause, c'est-à-dire un
antécédent invariable quellecause ? quel antécédent ? Voilà ce
qu'aucun principe ne nous permettra jamais de savoir « priori.
Que et- soit tel phénomène ou tel autre, les exigences do la
m conclusion.
pensét* seront également satisfaites,(!W
par l'observation, l'hy-
pothèse, l'expérimentation, qu'un peut déterminer fa omise
réelle. Comme instrument de connaissance, te principe, de I»
causalité est sans utilité et il est souvent dangereux. ii nousarrive
souvent del'appliquer
a tort et à travers, comme dans le so-
phisme si fréquentPost hoc, eego proptvr hue. Le grand définit
tle la théorie (le Kant, c'est(ju'elle
se prête mal ti l'explication
des erreurs. Induit à lui-même le principe de causalité n'a
jamais permis de distingue»' une vhi\è d'une erreur. C'est un
pvilton f|(iirauvre
trop souvent d<>la conti-ebando de science.
ti'est Kous-iuèmes; comme l'a fort lm«a moiitivHume, (jui
introduisons la nécessité dans les connexions empiriques, c|tii
scults nous sont données. Tantôt à la suite d'une observation
uih(|(k> et sommaire, lirais alors nous avons mille chances de
noua tromper: tantôt. ;hi contraire, à la suite d'observations
minutieuses. dVj>reuves et deeontre-fyreuves
nous déclarons
i|n'nne succession de faits est permanente et universelle; nous
érigeons le fait en loi, nous lui conférons la dijjnite' d'un prin-
cipe, nous le revêtons de laxpecies (etevittUttis. Je ne dis |ias que
nous ayons tort de le faire, mais c'est il nosrisques
et périls que
amis hasardons ce coup d'autorité. Aucune nécessité ne nous y
contraint, du moins aucune nécessité lo{[i<jtie; car, pour la néces-
siti»pratiipie,
c'est autre chose. Ilimporte peu, «railleurs, pour
la question qui nousoccupe, que
l'idée de cette connexion néces-
saire nous ait été suggérée comme le veut Hume par l'habitude
et l'association des idées, ou qu'elle soit, suivant la théorie df
Kant. une loia priori
de l'esprit. Toujours est-ilque l'application
de celle forme à une matière renferme qaoltjiie chose d'hypo-
thétique et nous fait courirquelque risque. La loi de causalité,
sinon dans sa formule abstraite, au moins dnns ses applications,ne peut atteindre que lt prohabilité, comme le disait Hume
'Ile justifie la croyance, non la certitude. Les sceptiques l'avaient
liiou dit.
Hresteraità examiner si leprimijje tle causalité, manifes-
ii'fwnl impuissant comme instrument de connaissance, n'est
nosrcLUsïos. 405
pas indispensablecomme garantit! de lit si'iottœ.
Supposezun
instant qu'ilnu soit pas fondamentalement certain, et rien ne
nous assure que lus phénomènes seront demain ce qu'ilssont
aujourd'hui l'eMiliee do fil science s'écroule comnio tes pierres
d'un mur sans ciment. Imaginez qu'ilne soit pas la toi intime et
esseiilietle îles choses et do ta pensée comment comprendre
que les mêmes successions de phénomènes se reproduisentinva-
riablement et qu'il y ait de véritables luis? L'existence des. lois-
est urt fait qui doit être expliqué. Si c'est l'expérience «fuidé-
couvre les lois et fait enquelque
sorte le gros œuvre de la
science, le principe de causalité, pourrait-on dire, l'achève et
lui donne lu consécration suprême. C'usl peut-êtreun tort do
faire honneur de l'œuvre entière il cet ouvrier de la dernière
heure i mais,sans lui, elle ne serait pas complète.
A vrai dire, nous ne croyons pas que ce soit parler correcte-
ment (pie d'appeler le principe de causalité la garantie de la
science. Est-ce le principe qui ([araiitilla science, ou la science
qui garantit le principe?Nous inclinons, pour notre part, vers
cette dernièreopinion.
A parler strictement, on n'a le droit
d'affirmer le principe que dans la mesure où l'expérience le con.
firme il y aquelque
témérité il l'étendre au delà et il lui
donner une portée absolue. Mais, en tout cas, reste vrai que
croire à la science, c'est croire à une loi permanentc des choses,
à un ordre invariable, en d'autres termes, au principetle causa-
lité. Lacertitude de la science et la foi de causalité ne sont pas
deux choses dont l'une (lérive de c'est la mène chose
sous deux «oins. C'estprécisément
ainsi queKant
posete pro-
blème. La certitude de la science étant admise et élevée au-
dessus de toute contestation, il se demande comment elle est
possible, et l'analyse des opérations qu'elle suppose ramène à la
découverte des loisprimordiales
de la pensée, qui sont en réalité
celles des choses, des seules chosesque
nous puissions connaître.
Par là, la métaphysique redevient possible: mais, au lieu de se
trouver à l'orifjiuo des sciences, elle su trouve à la fin. Du moins,
si les premiers principes sont pour quelque chose dans la science.
ftOtt CONCLUSION.
.est à la manière dont les racines d'oui arbre travaillent à en
nourrir le feuillage et les branches on ne voit bien leur rôle
que quand leur tâché estaccomplie. L'esprit humain fait d'abord
la seiunee.sans se préoccuper de savoir comment it ta fait: c'est
ù son œuvre quese connaît co merveilleux artisan.
Cette fois, nous avons bien décidément échappé au scepti-
cisme: c'est par une manœuvre des plus hardies, par «ne inter-
version des rôles ([esplus singulières. Au lieu de s'attarder à
chercher, ainsi qu'il settiMe naturel, sur quels principes doit
reposerla science. l'esprit humain court au plus pressé
il mon-
trera ses tih'es plus tard. quandil les aura conquis: il fait la
science et, son œuvre achevée, ou tout au moins suffisamnicnl
avancée il revient sur sespas
et réiWchit sur ses actes. Au lieu
de se demander comment la science est possîMe avant de l'avoir
faite, it se pose cette question après qu'elle est faite, il prouve
la vérité en la trouvant, 11 pusse outre aux objectionsdes scep-
tiques et, la certitude obtenue, devenue universelle, irréfragable
it montre triomphalement son œuvre et s'en sert, comme d'un
deyré, pour monter plushaut.
Toutefois, ù cluelle condition cette victoire a-t-elie été obtenue? 1
A condition do renoncer à spéculer sur les choses en soi et de
s'en tenir à l'étude des phénomènes et de leur succession. €'est
précisément ce que recommandaient tes sceptiques, Ils ont eu le
mérite de comprendre ce que devait être la véritable méthode
leur tort a été de ne pas savoir ou de ne pas pouvoir l'appliquer
assez longtemps. Oh l'a vuplus IkuiI ils auraient cessé d'être
sceptiques,s'ils avaient poussé plus avant dans ia voie où ils
étaient entré. Ils succombent donc avec honneur, et il reste
vraique,
contre le dogmatismetel
qu'onl'entendait de leur
temps,tel que l'entend peut-être
encore plus d'un philosophe.
ils avaient raison.
H nous reste à examiner la troisième argumentation des scep-
tiques, celle qui déclare impossible toute certitude, inaccessible n
toute vérité, de quelque manière qu'on entende la certitude et
i
CONCLUSION. k97
h vente, Ici encore, il importe do bien marquer fepoint
de vue
auquelse
placentles
sceptiques et le terrainqui leur estcommun
avec leurs adversaire». Pour les uns comme [mur tt'satitrus, la
vérité est cequi s'impose
à l'adhésion, cequ'il ust impossible»
de contester, coqui
force lacroyance. S'ils lie s'expriment pas
précisément en ces tonnes, il est aisé do voirque celle concep-
tion domine toutes iiiiirs discussions. Pourquoi auraient-ils
insiste, puisque tout le mondecomprenait
la vérité de la mène
manière? De luj&joiirs encore r combien n'y a-t-il pas de ptiito-
soplu-s (lui partagent, expressémenton non, cette manière de
voir?
La thèse des sceptiques est celle-ei. Knsupposant ihio la dé-
monstrationapporte
avec elle cette iiuVesstté sans Impclio il n'y
a pas de vérité et c'est un poînl «jue, d'ailfeuF», ilstimtestent),
lesprincipes sur lesquels repose toute démonstration n'ont pas
ce caractère de et, par conséquent, il fait défaut à la
démonstration tout entière. En eUet.déinontre-t-ort tes axiomes?
C'est un progrès à Pinlint. à moins <j«e ce ne soit u» itiallMe.
Xe les tiéinontre-t-oH pas!1 Ce sont tic simples liypotltèiii^, ijii'ouest libre de
rejeter ou d'admettre. D'ailleurs la contradiction
tics opinions humaines montre qu'on n'est pas d'accord sur ces
hypothèses. On ne contraint pas, on ne peut contraindre l'adhé-
sion de personne voilà ce(pie les chkj tropes (t'Agrippa établis-
sont clairement.
Cette fois encore, au risque d'être nous-nièiu1 accusé de
paradoxe, nous n'hésitons pasà dire epic nous ne voyons rien à
opposer à rarguinentatian sceptique. Qu'ont répondu les Journa-
tistes de tous les temps? Qu'il y a despropositions
si claires, si
évidentes, qu'elles s'imposent «l'elles-mè'mesa l'esprit sans dé-
monstration qu'elles forcent l'adhésion. f,essceptique; ont prévu
la réponse ce sont cespropositions
très claires, mais non dé-
montrées, qu'ils appellent des hypothèses.– Des hypothèses!
se récrient les«logmalistes. Appeler hypothèses des propositions
(elles que celles-ci deux et deux font quatre le tout est 1)lus
grand que tapartie!
– En tenant ce langage, riposte tescep-
40$ CONCLUSION.
tiqtiOvjo veux simplement dire que ces propositions ne s'imposent
pasà ma
croyance avec une absolut1 nécessité, et je le prouve,
non en disant ({«'elles son! fausses, mais ei» ne letu' donnant
pasmon assentiment. l^est après tout, une reproduction de
l'argument trop vante de Diogène prouvantle mouvement en
marchant. – Vous n'êtes pas de bonne lot ((ira le dogïnatiste.Vos lèvres seules refusent ait assentiment <|tie, dans votre for
intérieur, votreesprit
lie peut s'euipéVlier d'accorder, – VoiliV
l'uluma ratio on arrive vite, dans Eus discussions de ce genre,
aux personnalités blessantes.
Hais, d'abord,- (lui ne voit le danger de cette méthode?
Nul n'a le droit de s'ériger en juge de la bonne foi des autres.
Historiquement combien n'y a-t-if pas depliiiosoplics
au-dessus
du sottpçott qui ont tenu pour douteuses desproposition» <|tie
la bonne foi d'autres philosophes leur interdisait (le mettre on
suspicion; Quand Descartes faisait l'hypothèse du malin génie,
ne révoquait-il paseu doute des propositions analogues à celles
«jue nous venons de prendre pour exemples ? Ce ijim Descarlcs
u fait, sans trop y croire, il est vrai, ethyporbolùpiieuneiit,
cumule if le dit, d'autres philosophes ne peuvent-ils le faire clans
toute la sincérité de leur cœur? |
Mais laissons ces considérations et examinons l'argument en J
lui-m<?me. Les mots dont il est réduit a se servir en désespoir [
de cause, cette expression de bonnefoi, ne devraient-ils pas<
avertir le dogtnalisle (pi'il déplace laquestion
et donne, sans
s'en douter, gain de cause à sw\ adversaire ?Qu'entend-oii par
bonne foi, sinon un acte moral où le scnliinent entre pour
•juelc pie chose et la volonté pour beaucoup ? Le mol 60» le mot
foi 11e sont [tas du langage de l'intelligence ta raison pure n'a
rien à voir avec la bonté, mais avec ta vérité; elle n'a pas de
foi, mais prétend à la certitude. C'est la raison pratique qu'on
invoque pour vaincre les liésilations de la raison pure c'est le •
ecimr et la volonté <[u'on appelle son aide. On fait bien assii- s
muent on ne peut ni ne doit faire autrement. Mais en ne réfute '<
pas tessceptiques, qui prétendent que la raison pure ne suilit à
CONCLUSION. WJ
rien. Il no faut pas, ijtmiul on nous a accordé un axiome, faire
comme si nous l'avions arraché: quand nous avonst'uttuppel
à la
bomievoltmté.ttnefautpasatitiliiter tant l'honneur de la victoire Z
à la nécessité. On ne saurait trop admirer la naïveté do certains-
doginatistes (|tti croient avoir vaincu le scepticisme ait momentmôme où ils lui accordent tout ce
qu'il demande et chaulent vie-
loiro art moment même où ils sont ses prisonniers. IMions-nous
d'ajouter queles grands dogmatistes n'ont pas commis une faute Z
si yrave» JoulFroy tl!, jiouc «b citerqu'un exemple, déclarait avec
son admirable sincérité que le scepticisme est tlidoriquemeitt
invincible.
Lacritiqua du scepticisme nous a conduit à un singulier
résultai il triomphe sur toute lu ligne. H a raison contre Fin-
luiliom il a raison contre le raisonnement; il a raison contre
riHlellectunlisine. Bien plus, il serait aisé de montrer, si nousen avions le loisir. que, de tout
temps,le dogmatisme ne sVf.l
fait aucun scrupule d'employer le premier des arguments scep- ']
tiques contre l'empirisme; on a plus d'une fois réfuté l'idéalisme
u priori ù l'aide du second argument; et, si on ne peut dire que »
le (formalisme ait toujours eu recours au troisième, du moins
certains philosophes, tels que tes stoïciens et Descartes, n'ont
pas craint d'admettre, d'accord en cela avec lessceptiques, que
la nécessité ne décide pas toute seule de nos croyances, et
même de la certitude elles dépendent, ait moins pour une pari
de la volonté.
Pourtant, il est impossible (le s'en tenir là. Hfaut maintenant
tourner la médaille et voir Je revers.
il. L'histoire nous montre que, de tout temps, tes sceptiques
ont été bien peu nombreux. Maljjré la force «le leurs arguments,
àlaquelle nous venons de rendre pleine justice, il ne semble
pas que lespyrrhonîens soient jamais parvenus à se faire prendre
au sérieux. C'est à peine si oit peut dire qu'ils ont fait école.
Mélanges, Ih sceplicànw.
410 tlONCÏLOSKhV.
Aucune école, en tout cas, 'n'offre autant de lacunes et tt'iiityr-
ruptiuns. A plusieurs reprises, te pyrrtiouisme disparaît, pourrenaître
plus tant, il est vrai. mais sans jamais, sauf peut-êtredans ta dernière période, jeter un grand éclat. ii
ya une
éclipsedu pyrrhouisme après Pyrriion au temps de Cicéroit. le scep-
ticisme est encore tout à fuit inconnu. Après /Enésidème, nou-
velle disparition Sénèquene
parle ([u'avec déduin des idées do
Pyrriion. La nouvelle Académie, qu'ana trop confondue avec le
scepticisme, dure plus longtemps et obtient plus de succès. Elle
finit cependant, phénomène peut-être unique dans l'histoire de
laphilosophie, par abdiquer ouvertement, et cela au profil do
ses anciens adversaires. Lit subtilité dos arguments sceptiquesl'effort d'esprit considérable qu'ils exigent pour être compris, ne "•
sauraient expliquer leur peu de succès chez un peuple tel queles Grecs. tt y avait quelque chose encore de plus fort
quela
dialectique d'/Ënésidùm«'etd'Agri|>pa, et quia vaincu te scepti-
cisme.
C'est que le sceplicismcabsolu est une gageure, qu'on peut bien
tenir tant qu'on reste dans l'abstraction, mais qui devient sin-
gulièrement embarrassante quand on rentre dans la vie réelle.
Ne rien croire aurait polir conséquence naturelle ne rien faire t:
et c'est aine extrémitéù laquelle
on ne se résoutpas aisément. h
Ce n'est pas qui; nous ayons l'intention d'invoquer contre le
scepticisme t'«r/j-umc«<«m biteulinum ou d'essayer de renouveler
les plaisanteries de Molière dans le Mariage forcé. la comédie
peut couvrir de ridicule les plus grands esprits, même Socrate,
même Aristote, au chapitredes chapeaux. Si décisives
quedes
raisons de ce genre puissent paraître à bon nombre de per-
sonnes, la réflexion laplus superficielle suflit à montrer
qu'elles
passent à côté de la question. Le sceptique crie ou fuit quand
on le frappe u-t-il donc jamais nié le phénomène de la douleur,
ou un phénomène, une sensation quelconque? Arrivât-on, d'ail- >
leurs, a prouver qu'en fait il croit à des choses dont, suivant >
sesprincipes,
il ne peut démontrer l'existence par des raisons v
valables. on aurait prouvé qu'il se contredit, mais non pas que
(iONCLKSION. 411
mhb&wexistent. ipjiart'HJifit'iit lus coups ne mnlpaSNous aurions honte d'insister, et
-avons--.si 'Ut.. il'lu'uUÎÍUUIt.nuv .1. 1...A,I:n. I\n,U6
anmmm ««labfos existent. Apparemmoiir lus coups lie mnlpaSdes raisons. Nous aurions honte d'insister, et
ptml-tHre avuiis-
nous déjà litit trop d'honneur aux de ta comédie. Nous
«'en aurions m4mepas prié, si trop souvent on ne les retrou-
vait chez certains philosophes, sous une forme moins gaie mais,
au- fond, non moins plaisante,
( "est tout au treeliose d'interroger les Hceptkjues sur leur théorie
delà viepratùfue. La question de savoir comment l'homme doit
agir est trop grave pour qu'aucune philosophie puisse s'en cMsin-
térosscr il faut s*esplii|uer. Telle est la sommation <[ue, dès
r.iiitKjtiilé, lesiulvetsitlves des sceptiques feur ont adressée avec
uiw persistance infatigable, et les sceptiques- se sont exécutés
sinon de bonne |;i'aee dit moins en essayant de faire bonne
contenance, Ils ont bien faitquelques plaisanterie* sur celte
télé de Gorgone dont oh les menace toujours; mais, linalemeni.
ils ont accepté la discussion et fourni lusexplications réclamées.
Il est vrai qu'elles sont passablement embarrassées c'est ici le
talon d'Achille du système.
L'objection est très simple. Vivre, c'est agir; et agir, c'est
choisir, préférer, entreplusieurs
actionspossibles, celle qu'on
juge la meilleure. Point d'action sans jugement. Que devient
alors ta maxime sceptique il faut suspendre son jugement?
Il n'y a(lue deux partis à prendre. On peut renoncer à s'oc-
cuper de la vie pratique et de l'action, la jeter enquelque
sorte
par-dessus bord. S'enfermant dans le monde d'abstractions où
il s'est placé, le sceptique dira que, cherchant les raisons théo-
riques de la croyance, il n'en trouve aucune. Qu'on ne vieimo
paslui
parler de lu vie pratique il l'ignore, (l'est déplacerla
question que de la porter sur ce terrain. Que, dans lit vie réelle
l'homme agisse ou n'agisse pas, peu importe au sceptique.Tout
cequ'il
veut établir, c'est que théoriquement,c'est-à-dire ration-
nellement, l'homme n'a le droit de rien affirmer. Sa tâche est
remplie quand il a établi ce point. Si on veut réfuter ses argu-
ments, il est pré*t à la discussion: si on lui parle d'autre chose.
il ferme ses oreilles. Que si, d'ailleurs. il lui arrive à tui-inènic
M2 CUKCL-ttSIOK.M2 CUKCL-ttSIOK.
d'agir et d'alMFUier. eh tient il se contredit. Cefei- prouve que lacontradiction est partout. Il est dilHciie, eoimno dit
Pyrilton, de
dépouiller le vieil homme. Une contradiction de plus ou «le
moins n'est pas pour effrayer un pyrrlionien. La contradiction
est son élément il y vit et s'y complaît.
Voilà l'attitude en quelque sortehéroïque que
tessceptiques
auraient pu prendre. Ils ne l'ont pas fuit, et en vérité on ne
saurait tes en blâmer. Prescrire aux hommes de no faire dans
ta vie pratique-aucun usage de leur intelligence, de vivre comme
ranimai, c'était tomber dans te ridicule. llefuscr à l'homme le
pouvoir tie distinguer entre le bien et le mal, déclarer la vertu
impossible, renoncer toute monde, c'était tomber dans l'odieux.
A «neépoque
surtout ou la morale était unanimement regardéecomme la partie principale de la philosophie, où la fonction
essentielle duphilosophe,
sa raison d'être était de définir le
souverain bieuel la vie Heureuse, raisonner ainsi, c'eût été ab-
diquer. Déjà des historiens refusaient de compter tessceptiques
parmi les philosophes, parce qu'ils n'avaient pas d'opinion. lis
se seraient mis eux-mêmes hors de la philosophie, sils avaient
déclaré ne pas s'occuper «le la viepratique.
Il fallut dont bien faire mie théorie de l'action.Quelques-uns
essayèrent de se dérober à celle lâche en remarquant que l'in-
stinct peut de lui-même, sans aucune affirmation réfléchie, porterles animai» et l'homme à l'action. Mais l'insulltsancc d'une telle
théorie éclatait d'elle-même c'était réduire l'homme à l'état de
l'animal. D'aiîlenrs, la question n'était pasde savoir si l'homme
agit quelquefois par instinct, mais comment il doitagir lorsqu'il
n'obéit pas à t'instinct. Force était donc d'en venir à une véri-
table théorie. Les sceptiques, on l'a ru, se défendaient éncrgi-
>|uemcnt de vouloir bouleverser la vie, et, sous le nom de
critériums pratiques, ils formulèrent diverses règles de conduite.
C'était introduire l'ennemi dans la place et tomber clans des
contradictions que toute leur subtilité ne parvint pas à déguiser.
Formuler des maximes générales, si simples qu'elles soient, c'est
s'élever au-dessus des phénomènes, c'est sortir du point d«; vue
GÛStCLUSl'ON. mi
pm|»irw|ueet «mcrfet foire une théorie e'estitedevottii1 justiciable
do l.tlogique.
Avec Pyrrhottte
sceptique déclare que suspendant son juge-
ment en toute question théorique, ne sachant rien, nocompre-
nant rien, il se conformera aux opinions admises de sontemps
par ceux au milieudesquels
il doit vivre. Faire comme tout h'
monde, suivre la mode, voilà sa devise. En parlant ainsi, il se
(latted'échapper
à toute contradiction de n'affirmer rien au delà
des phénomènes observas. Mais, à moins de n'être plus qu'une
simple machine, le pur pyrrhonien. |«>ur se eonfoniter ans
opinions reçues,a
présentesà
l'espritcertaines règles générales,
certaines façons (le comprendre la vie. Quoi qu'if lasse, l'expé-
rience acquise et la tradition se codifient enquelque manière
sons la forme (t'axiomes. «le maximes- ou de proverbes. Sans
doute, pour lie pas fournir d'armes à ses adversaires, il évitera
de formuler ces lois {générales en seront-elles moins les inspi-
ratrices de ses actions f II ne les aihYmera peut-être pas: il fera
mieux, il les observera: il ne dira pas qu'il v croit se dispen-sera-t-il d'y croire réellement, s'it les applique? Une croyance
•si tout aussi réelle et positive lorsqu'ellese manifeste par des
actes au lieu de se tradttiiv par des paroles elle t'est peut-être
davantage.La foi la [tins sincère est la foi qui agit.
Ainsi quoi qu'ilen dise. IHitIiod dogmatise. Son dogmatisme
est sans doute un pauvre dogmatisme c'est la philosophie du
sens commun. Nous avons déjà en l'occasion tie signaler cette
singularité le pyrrhonisme. qu'on regarde volontiers comme
l'antipode du sens commun n'est qu'un retour au sens commun.
Est-ce la peine de faire tant île chemin, de mettre en mouvement
tout l'appareil de tadialectique, pour en venir là ?Le pyrrho-
nien, qui,ait fond, n'est
pas exempt d'orgueil, a laprétention
den'être pas dupe des théories des philosophes, de ne pas se
payer de mots. Kl il quoi cela le mène-t-il ?A se faire volontai-
rement l'esclave despréjugés
de la foule et des erreurs de la
tradition, à s'interdire toutprogrès,
à se mettre au nivetu des
plus humbles c'est une philosophie de simples. Encore n'n-l-il
4!ft (ÎONKr.USION.
pas fexet»se de croire vraies le» idées- qu'il suit H sait ft amis'en tenir. C'est bien moins
quela foi du charbonnier. Mais, si
réduit sichétif tjtt'il soit, ce dogmatisme enfantin est un dogma-
tisme. C'est vainement que lepyrrhonien se flatte
d'échapper»\
ta contradiction.
Quant à la nouvelle Académie, elle dogmatise de sonpropre
aveu. Elle dogmatise avec mesure, prudemment,à bon escient.
Elle déclare que la vérité existe, quoiquenous ne
soyons jamaissûrs de la posséder loin do nous décourager, elfe veut quenous ne cessions pas de la poursuivre. elle aime et cultive la
science elle a toutes les curiosités, On lui a souvent reproché,de se contredire. Nous reviendrons tout à l'heure sur ce point;ce qui dès à
présent n'est pas douteux, c'est qu'elle a des
croyances, fju'eîle dogmatise.
Enfin, nous avons montre, dans le chapitre précédent, qu'il
y a, chez Sextus et tes sceptiques de la dernière période, une
partie positive, c'est-à-dire un véritable dogmatisme. Nous avons
déjà eu l'occasion de leremarquer plusieurs fois, les
sceptiques
empiriques sont les véritables ancêtres du positivisme. Réduire
la connaissance à l'observation des phénomènes et des séries
qu'ils forment, s'interdire la recherche des causes, substituer
l'induction à la démonstration et décrire l'association des idées
comme ils t'ont fait, c'est bien, en ce qu'elle a d'essentiel, la
thèse de nos modernes positivistes. Or, ce n'est pas faire injureaux positivistes que de les considérer comme des dogmatistes. et
même comme tes plus dofjmatistes de tous les hommes. Non seu-
lement ilsprétendent posséder la science, mais ils
ajoutent (luehors d'eux il n'y a ni vérité, ni certitude. Étrange renversement
des idées et des mots, et spectacle instructif entre tons! Les
savantsd'aujourd'hui sont tes
sceptiques d'autrefois les mômes
doctrines, auxquelles on refusait jadis expressément le caractère
de la certitude, sont cellespour lesquelles aujourd'hui on reven-
dique exclusivement la certitude. Ni; nous faisonspas toutefois
d'illusion sur la modestie des médecins empiriques. S'ils n'ont
pas oserevendiquer pour leur élude le nom «le science, s'ils se
t;ONCI<U9'ION; 416
-~t. .t'.t J~ ~t: Aisont contentés do celui dWt ou do roulino, c'est jimit-ëtre parce
que leurs maladroits essais pour appliquerla méthode d'obser-
vation ne leur ont donné que do «natures résultats. Il» auraient
sans doute été plus heureux si, au lieu d'appliquer leurs procédés
ù la médecine in plus dillicile et tuplus complexe des sciences
expérimentales ils les eussent transportés dans taphysique. Très
probablement te succès les aurait enhardis, et, rejetant le titre
desceptiques, ils se seraient proclamés des savants, les seuls
savants, et on les aurait vus dogmatiser d'importance. Disons
donc, si on veut, que leur théorie est un dogmatisme dans t'en-j t
fonce, undogmatisme qut
ne se connaît ni ne se possède encore l
pleinement on ne peut refuser d'y voir un dogmatisme.
En lin (te compte, lescepticisme échappe chaque fois
qu'on
croit le saisir. Considérez un sceptique quelconque, un scep-
tique concret et vivant, suivez-le jusqu'au bout, et toujours il
arrive un moment où il se transforme en Journaliste. Tout scep-
ticisme recèle un dogmatisme implicite et ne subsiste que par là.
Si on cherche à déterminer la valeur exacte du mot scepticisme,
la réalité concrète à laquelle il correspond, on ne trouve rien.Le scepticisme
n'estplus qu'une différence entre divers dogma-
» tismes; on n'estpas sceptique par soi-même,
maispar rapport Il
autrui le scepticisme n'est pas une chose, mais une relation,une différence, une limite, ou, pour parler comme les scolas-
tiques, une privation. C'est un dogmatisme qui ne s'avoue pas
ou se déguise; c'est moins une doctrine que l'envers d'une doc-
trine. C'est une attitude que prendun dogmatisme pour en
combattre un autre; c'est an pur non-ôtre tescepticisme n'est
qu'unnom de guerre.
Enfin, si nous cessons de nous placer au point de vue des anciens,
pour embrasser dans son ensemble leproblème
duscepticisme,
il
n'est pas douteux que lesprogrès
de la science aientporté
au scep-
ticisme un coup dont il ne se relèvera pas. Qui donc oserait au-
jourd'hui seproclamer sérieusement sceptique? Il y a certes bien
des choses dont on peut douter s'il s'agît du scepticisme partiel,
il y a ura toujours dessceptique*. Mais de sceptiques complets.
«tf CONCttlSiOS.
q«it en auenn ras, n'osent dire ni uni ut mm. de sceptique»
qui se tiennent toujours sur ta réserve, de sceptiques suivant la
formule, il n'y en a [ittis; c'est uneespèce disparité. Si tes an-
cien* sceptiques pouvaient revenir, ilsseratentde ferventsapôtres
du progrès; et si quelqu'un essayait de reprendre leur rôle, te
ridicule en aurait bientôt fait Justin.
Dira-t-o» qu aiKruter les vérités de la science, c'est reprendre
précisément la thèse des anciens sceptiques, puisque la science
lûilfirmc que des phénomènes et des lois? Nous avons reconnu
lis- rapports quiunissent
l'empirisme sceptiqueavec la science
de nos jours nous avons fait auscepticisme
«nepart
assez
larjpj. Maisrapprocher
à ce point la science et l'empirisme scep-
tique, déclarer que le scepticisme est (a science ouque ta science
est lescepticisme, ce serait faire aux mots et aux choses une
étrange violence. En affirmant les lois de la nature, la science
moderne a lapréienfion. fort légitime d'ailleurs, de
dépasserles
phénomènes. Elle no craint pas d'étendre ses fois aux tempsles plus reculés du
passé;elle les prolonge dans l'avenir le plus
lointain. Mlle ne se borne pas à attendre passivementet machi-
nalement, commepouvaient
le faire l«.àssceptiques, la repro-
duction des phénomènes qu'ellea observés. Elle les
prévoit, «Ile jttes
prédit elle est sArf qu'ils arriveront. Si «diepèche par quelque
endruit. ce n'est assurément pas pardéfaut d'assurance et de
confiance en elle-même. Où trouvera-t-on la certitude, si elle
n'est pas là. et (pùippelierons-nousvérités absolues, si nous
refusons ce nom aux lois toujours vérifiées de l'astronomie ou de
laphysique ? La science va iiu'iiie plus loin elle ose s'attaquer
aux choses en soi elle aentrepris
d'atteindre l'atome, de le
mesurer, de le définir. Que nous voilà loin del'empirisme
des
sceptiques! C'est avec raison que ces derniersappelaient modes-
tement leurs connaissances un art ou une routine; c'est avec
raison que les modernes: ontrevendiqué pour tes leurs le nom
de science. Les sciences de la nature, celles-là mê*me dont les
sceptiques contestaient le plusvolontiers la légitimité, sont de-
venues ta science par excellence.Quelques rapprochements qu'on
<:<~MMON. h!~
f k 1. M ~r i
ttfMMMn;t,de
IIUl'1ue
'17r
paisse faire, il y u un uhfm» «ittre le scepticisme d'autrefois ut ta
science d'niijonrd'hirii 1«scepticisme doit être relégué parmi tes
cltatM» quirtnt
disparu pour ne plus revenir.
Nous voici encore arrivé' à titi résultat singulier. Tout à l'heure
lus arguments des sceptiques nous paraissaient invincibles à
présent le scepticisme n'est plus qu'une umhru. Voilà une anti-
logie comme celles oft seeomplnisaii'nt
tespyrrhoniens.
Mais
«île-ci n*a rien de redoutable elle provient- d'un malentendu
sur la nature de la certitude, d'une équivoque sur la définition
de ta vérité.
lll. Le- mot certitude déàipe, tlans te tangage ordinaire,
l'udhêsiou pleineet entière de Pâme à une idée la certitude
est caractérisée par t'abetae actuelle de doute. A co compte, il
nous arrive souvent tl'élru certains du faux. Dans le tangage plus
précis (tes philosophes,la certitude n'est plus
seulement une
aiiliésioii pleineet entière elle est l'adhésion à la vérité à l'élé-
ment subjectif s'ajoute un élément objectif la certitude est
caractérisée non seulement parl'absence de doute, ntais par
l'impossibilitéde douter, cette impossibilité
étant entendue dans
un sens absolu, ^'étendant il l'avenir autant qu'au présent. Ilest
clair qu'on ce sens, on ne peut être certain ttu faux certitude
et vérité sont termes synonymes. Toutefois, y a-t-il entre ces
deux termes équivalence complète?Peut-on dire, si on quitte
les définitions abstraites, quisont cc qu'on veut qu'elles soient,
si on s'attache à la réalité, qu'il n'y ait certitude que quand
nous possédonsla vérité, que
la vérité, vue par l'esprit, entraîne
toujours la certitude? Nous ne voudrions pas rentrer dans ce
débat, qui a déjà été maintes fois soulevé on nous accordera
sans tropde
j^ine, croyons-nous, que la certitude, si elle ne
mérite son nom (lue quandelle s'applique
à la vérité, est cepen-
dant, autre chose quela vérité. La vérité est comprise par
l'in-
telligence: la certitude relève de l'Ame tout entière, comme
disait Platon dit! est autre chos»; iju'une simple intellection.
plie suppose l'uitewiitiond'un (acteur personuct, de quelque
418 UONOMJSMm
nom qu'onveuille Papjjelcr, scnliiitunt on volonté, et cela «si
vrai Af toutes h1» formes de la certitude. Kit admettant que la
rectitude seproduise
nécessairement enprésence
de la vérité, M
tout le moins nous nceordera-l-on qu'il *'«[jit ici non d'une né-
cessitélogique, mais, comme lu disait Descaries, d'une nécessité
morale, ijui laisse un certain jeuà ce facteur personnel, sans
lequel il n'ya
pasde certitude complète. Bref. l'adhésion (tonnée
si une «fée est autre chose que cette idée nous mettons toujours
dn nôtre clans noscroyances.
même certaines. C'est un point
que les sceptiques ont contribué il mettre eu lumière, mais que
leurs adversaires leur aceordak'Bl..Mai» ce n'est pus là. pour ta
question quinous occupe. l'essentiel qu'on distingue ou non
la certitude de la vérité. la grande affaire est de définir la
vérité.
On ta définit d'ordinaire raccord de nos idées avec les choses. »
la conformité de nos idées aux choses. Le moindre des inconvé-
nients de cette définition, c'est qu'elle ne peut être acceptée de
tout te monde. Elle affirme tout de suitequ'il y a des choses
distinctes de t'espritet
qu'on peut tes connaître c'est ce quetes
idéalistes n'accorderont pas. Cette définition est unepétition
de
principe. D'ailleurs, quelle notion précise peut-onse faire de
cet accord, de cette conformité entre des choses aussi hétéro-
gènes que nos idées, et une réalité qu'ons'efforce de concevoir
en dehors de toute relation avec nos idées? Enfin, la définition
de ta vérité est équivoque.A
quoidirons-nous que les idées
mathématiquessont conformes? Non pas
assurément aux choses
réelles, car tout le inonde accorde qu'il n'y a pas, dans la
réalité. depoints
sans dimension, de lignes sans épaisseur. Les
objets des mathématiques sont des concepts,c'est-à-dire des
idées. Si on les appelledes choses, il y aura^des choses qui
ont une existence idéale. et d'autres quisont (le vraies choses.
Reinplacwa-l-onte mot chose
parle ternie plus vague d'objet?
Mais. ou bien ce mot désignera une réalité, une chose indé-
pendante de lapensée,
et on retombera dans les difficultés pré-
cédentiw; ou bien on désignera par là un des termes corrélatifs
CttNCMSKm tt't
*~t* t.. t~f ~– t~t i t~~ t 't~de lit représentation oit le définira en «lisant que toute idée
implique nti sujet et un objet mais alors il n'y a plus ni vérité
ni objet en ce sens, une idée fausse a un objet étoile lui est
conforme seulement cet objet n'existe pas. Ecartons donc cette
définition insullisanU*.
Il n'y » «le véritéque dans les jugements, et c'est seulement
ilans le tien qui unit les termes d'un jugement queréside lu
vérité, Un jugement vrai est un jugementtel
que nous ne puis-
sions malgré les plus grands efforts, séparer tes termes qu'il
unit. C'est la nécessité(lui caractérise la vérité. La vérité ne
saurait chiiujjer: c'est parce qu'ils sont nécessaires <|tie les juge-
ments vrais sunt immuables. La vérité est In mêmepour
tous
les esprits: c'est parce qu'ils sont nécessaires que les jugements
vrais sont universels. (Test en ce sens encore qtte la vérité est
absolue elle ne dépend pas de nous, elle domine nos indivi-
dualités et nos personnes, elle s'impose. Bemarquons qu'il s'agit
ici d'une nécessité tout intellectuelle, et non pas de la nécessité
de croire. Que l'adhésion soit libre ou nécessaire, c'est une ques-
tion dont nous avons dit quelquesmots ci-dessus mènie si
l'adhésion est libre, on peut comprendre qu'il y ait des syn-
thèses nécessaires en ce sensqu'on n'en puisse disjoindre
les
termes sansque
lapensée
soit hors d'élat de s'exercer. C'est
uniquementcette dernière nécessité
qui caractérise la vérité.
Il y a deux sortes de vérités les vérités de. raisonnement ou i
apriori;
les vérités de fait oua posteriori
Dans lepremier cas,
la nécessité qui unit les termes est directement connue par la
pensée; l'espritdécouvre im« identité sous la diversité appa-
rente des termes, et, des lors, il ne peut plus lesséparer
sans
se contredire. Dans le second ras, la nécessité résulteunique-
ment de ce que les sensations, queles termes
expriment,sont
toujours données dans le même ordre par l'expérience.Si nous
essayons de modifier cet ordre, l'observation nous donne infail-
liblement un démenti. Que cette nécessité soit le fond même de
fa rénlité, ou qu'il n'y ait dans l'absolu que (le la contingence,
toujours est-il queles
pbt-nomènes murs apparaissent nntis sont
ftift CONCLUSION.fl15U t,.IJI,hl,U.1 \II',
dunnés comme soumis h h nécessité, et la science de ta nature
n'est possible qu'àcette condition.
( lette distinction entre tes vérités de raisonnement et les vérités
«le fait est iinivi-rsoUtmicat admise de nos jours. Elle eorres|ionct
à la dilïérence de la déduction et de l'induction. Sluart Mrll
distingue une logique de la conséquence, (lui détermine les loisIi
de la penséeen tant
qu'elleveut rester d'accord avec elle-même
et une logiquede I» vérité qui
détermine les lois de la pensée
en tant qu'elle veut être «l'accord avec l'expérience. Lit distinc-
tion faitepar
ce philosopheentre la logique
déductive et la
togtqueînductive (nous aurions. pour
notre part, d'expresses
réserves à faire sur cepoint)
est devenue classique.A deux sortes
de vérités correspondent deux sortes de certitudes on distingue
dans les cours de philosophie,une certitude mathématique «'l
une certitude physique, qu'on placesur te môme rang. Il est
vrai qu'iln'est Jamais question
de cette dernière qu'au chapitre
de la certitude partoutailleurs ou raisonne comme s'il n'y
avait qu'un typede certitude cello que
Kant aappelée apatlie-
tiiiue. Quoi qu'il ensoit. savants et philosophes
sont d'accord
pour appeler vérités art mène titre les vérités de fait ut tes vérités
mathématiquesil serait ridicule de considérer les unes comme
moins certaines quetes autres; le même mot science désigne éga-
lement ta connaissance des unes et des autres.
Nous avons ici un remarquable exempledes modifications (lui
.s'introdarsvnt, sans qu'on y prenne garde, dans le sens des mots
et qui préparentles plus regrettables
maie» tendus. Un mot
prend une signification nouvelle, pour des raisons d'ailleurs fort
légitimes; il garde en même tempssa signification ancienne, ni
notre espritobéissant à des habitudes d'origines diverses. oseille
de l'une de iressignifications
à l'autre et les confond. C'est ce (lui
est arrivé pourtes mots. scionre t't certitude.
Jamais les anciens philosophes n'auraient consenti à i-mploviTu
ces mots dans lis sens que nous leur donnons aujourd'hui, l'our
eux. savoir, c'est comprendre or, il faut bien en convenir, dans
les sciences de ta nature, nous savons sanscomprendre.
Nous
i
conclusion. m
8 1savons lu en nous constatons
«piecertains |*heïiomeile.'i s'uccom-
»«gueitl toujours; nous m1 savons pas, nous nocomprenons |ui!»
pourquoi il on est ainsi. H nous arrive bien do ramener une loi
particulière a une loi générale, c'est-à-diro de reconnaître une
relation d'identité, et notre. esprit obtient alors le genre do satis-
• faction que lui donno la découverte dos vérités mathématiques;
mais ta loi (jèiê'rato elle-mùino n'est pas expliquée:elle est tou-
jours une proposition syjilhétûjue dont tes termes ne sauraient
logiquement se ramener l'un à l'autre. Pour les savants d'autre-
fois, la science véritable était uni(|ueraent la découverte du vérités
nécessaires a priori. La connaissance mathématique a une telle
sûreté et ttue telle clarté, elle est relativement si facile elle
donne il l'esprit une telle conscience de sa force et le satisfait si
pleinement, que tout naturellement elle a été prise pour la
science par excellence, Les «titres sciences, fa métaphysique, tu
physique, ont été conçues d'aprèsce
principe unique. Descartes
et Malebranclie veulent encore déduire laphysique
a priori, et
on sait quel dédain Spinoza professait pour l'expérience. L'ob-
servation et l'expérienceavaient bien leur place dans la
physique
de Descartes, mais une place restreinte, un rôle subordonné.
Encore aujourd'hui, n'avons-nouspas quelque peine à ad-
mettre <{u'on puisse séparerces deux termes savoir et com-
prendre ?
fi n'y a pas, d'ailleurs, à revenir sur cette extension du mot i
science aux connaissances de fait elle est consacrée par l'usage
et pourraitse
justifier par de fort bonnes raisons. Bien plus, les
rôles sont renversés. La science par excellence était autrefois la
science « priori s'il fallait choisir aujourd'hui entre elle et la
scienceexpérimentale, laquelle aurait la préférence?
Nous ne songeons pas il contester(lue les sciences de la nature
aient une certitude égaleà celle des sciences de raisonnement:
mais, si elles sont également certaines, nous avons bien te droit
de dire qu'elles le sont autrement, et de cette différence résultentcertaines
conséquences importantes. L'espritmoderne,
pourrait-
on dire, n'a pas encore admis toutes les conséquences du triomphe
Mi «ONULliStOH.
de la méthode expérimentale, ou if ne s'y est pas e»co«'
résigné.
Le propre des vérités de raisonnement, c'est ([u'iiussiiot «iper«
eues, elles sont définitives et iaiinuublcs; onpeut
en découvrir
de nouvelles, mais le progrès du la science ne changent rien il
celles quisont connues le progrès se fait
par additions succès- t
sivos, non par transformation. En peut-on dire autant des sciences
de la nature? Précisément parce ou»,»nous constatons les lois de
la nature sans les comprendre, c'est-à-dire sans reçonmiitr» ui»e
identité logique entre les termes qu'unit chaque synthèse, nous
ut? puuvonsêtre sûr*, du
premier coup, d'avoir découvert une
véritable* lui c'est par des expériences successives, des vérifica-
tionsmultipliées,
en ti« mot, par beaucoup de tâtonnements,
que nous arrivons il nous mettre h l'abri de l'erreur <*>.Encore
faut-il ajouter <|u'i(it terme de toutes ces opérations, nous pou-
vons couseiverquelque inquiétude.
Les défenseurs lesplus
résolus de la certitude .scientifique ne font aucune difficulté
d'avouer, ils prodatiieitt ujèiue vo}<m(iecs. que si im fait nouveau,
bien coiislalé, vient contredire une toi connu* la formule de lit
lui devra être atodiu'ét*. Or, pouvons-nous jamais connaître tous
les faits? Ou cite dans l'histoire des sciences un assez grand
nombre de lois tenues longtemps pour définitives etqu'on
a du
y niodificM"par Jasuite. En d'autres fertiles;, les .cienws de tu imitiiv
jsoiit toujours dans le devenir. On définit assez bien les lois
qu'elles déterinineut, en disantqu'elles
sont deshvjiothèses
vé-
rifiées. Il n'est peut-être pas une de ceslois qu'on puisse
consi-
dérer comme définitivement acquise. Sans doute, cela ne nous
empêche pas d'avoir en quelques-unes d'entre elles une confiance
absolut'logiquement
on peut faire des réserves. Encore une
fois. nous ne voulons pas ébranler cette certitude tout au con-
' M. K. \avitle, diin* «s bfil«« •Indes Mlr I.i PIiuv <d- Vliypilluse liant lu(J
teienca t fkn. plaint., 1871», t. H, |>. ftçi et n3|, ;t iHuiitM- neltoiiMiiit fl «rimt»
miiuit'fe di-'ljuitivtï <^ut! Ui\ibt tiiicutivert'î ^cichtj^uif a roiimtcffO: pic t!lro une livpti-
Ilii»". Nous ne fitvoiH >'il i'ti*li" nu* lAgùpu dv l'hypi&ett les d>Mi mots »i»il
nn |j«rti >urprf^ <!•' *•* tnttivcr lafiprorfK*», tu.'t^ *iti moihs il n'y a [tas de vt'rik'
ail'litjio'tii-*».
I:ON(;I.QSION.'t:t3
t..tt~–tt'-t<t't,t-train-, nous estimons qu'elle est fort légitime, e! titèm»«{tt'tt n'y
••Ha pus d'autre. Mais farterdu coi'htudt: provisoire, de vérit»';
i|iii peut elianyor, c'est assurément faire de ces mut» unemploi
assez iiotm-au et, au premier abord, inquiétant.
Il ya
plus celle [taride
conjecture et d'Iiipothèse f|uenous
trouvons duos les sciences de la nature les pins soudeiuenl éta-
blies, nous l'apercevons aussi, sous une l'unira différente, il «si
vrai, miltnedaus les sciences niitllwiimli(|ues. h^ conséi|t»ences
t{u'on y déduit. sont absolument et rigoureusement certaines,
pourvu «|u'on accorde les axiomes et tes définitions qui ont nervi
(te |)oint de départ. Tant ([ii'on reste dans l'abstrait, aucune dif-
ficulté n'est possible. Mais ces sciences, après tout, n'ont d'i«-
téro't et d'utititû '{uesi nous pouvons
enappliquer
les formatai
« ta réalité. Les iiiatlKUiali(|Ui;s garderaient-elles tout« leur vajduc
!>i nous nepouvions
assurerque
les choses se conformeront à
leurs lois Nouspouvons l'assurer, mais seulement si lil réalité
remplit, soit absolument, soit avec une approximation sullisaale
les conditions présupposées jiar le raisoniieiuunt or it n'appar-
tient pas aux uuilWniatiqttes de s'assurer que ces conditions
sont remplies. C'est (loin: toujourssous condition, liypothé-
liqueinent, que les matliéinatii|iies sont vraies, au sens absolu
du mot.
Dans tut antre ordre du sciences Ilui sont l'honnmir et la
Ijloire de notre siècle, les sciences historiques,il est plus aisé
l'iieore (le retrouver une part fie conjecture cl d'hypotlièse.
Toutes les sciences humaines ont été soumises à lu subtile et
pénéinwte critique des pyrrltoniens et se sont entendu dire par
eux de cruelles vérités. Seules, les sciences historiques ont
éclmppé. Ce n'est pas la faute des sceptiques: elles n'étaient pas
nées; mais nous y avons perduun beau morceau de
dialectique.
Sans vouloirreprendre
ici unjeu qm;
nous no sauriutisjouer
sériuHseinent, on peut se faire mit' idée, fort incomplète sans
doute, mais sufltsatiie, du parti qu'un ivnésidème ou un Se.Uus
aurait su tirer de ce tln'ine. lui laissant (le e«té tes faits aiia-
lo'jiH's ii ceux qui font J'intérèl de l'Antufwim-, du Waltcr Seolt.
«KS (ÏQNCtOSfOl*.
nous avons vit, de nos jours, des histoires bati&es, teni
(tant de lonirs siècles nuur jilisutimiimi iWnim*: /«
nous avons vu, de nos jours, des histoires bati&es, tenuespen-
dant de longs sièclespour absolument certaines, ts'effondrer
tout àcoup sons tes
coups dé litcritique et être convaincu)'!»
d'imposture. Combien de récits, jadis authentiques, nevoyons-
nous pas passer a l'état de légendes! Combien de faits eontrou-
vésqu'on rectifie en atttentiant
que la reetitieation soit corrigée!Quelle inquiétude ne soinmes-uous
pas en droit de concevoir
pour lesvérités historiques» certaines aujourd'hui, et
(lui demain
peut-être auront cessé de l'Are! Si I on songe tapeine que
nous devons prendre pour nous assurer d'un faitcontemporain
dont les témoins- sont vivants, pour lequel les documents abon-
dent, que penser de ces hardies reconstructionsd'époques dis-
parties? Notre siècle aurait bien (les raisons d'êtresceptique.
Nousprions instamment
qu'on ne nous prenne pas pourun
apôtre de ce scepticisme nous sommes priJt à faire un acte de
foi dans la vérité de l'histoireprise dans sou ensemble. Mais
outrepassons-nous notre droit de logicien si nous concluonsque
les sciences historiques, comme tes sciences de la nature, sont
provisoires? Leurs progrès témoignent de leur instabilité.
Kn toute science humaine, il y a donc unejtart de conjecture
et iritvpotlà'so voilà ce qui ne saurait être sérieusement con-
testé. Maiss'exprimer ainsi, e'est, qu'on
le sache ou non, revenir
àl'antique jnubabilisiut.1.
La certitude, suivant le dogmatisme traditionnel necomporte
ni restrictions ni réserves elle est absolue et définitive, on elle
n'ijsl pas. Dansl'ancienne terminologie, une probabilité qui peutsW-ruitre indéfiniment demeuro toujours infiniment éloignée de
la certitude. Nous ne faisons plus tant de façons nous sautons
à pieds joints au-dessus«le cette bamèrtMHi réalité toute factice,
nouspassons
d'emblée lit limite, et nous avons bien raison.
Mais il n'en estpas
moins vraique
ceque
nousappelons
ait-
jourd'hui wrtilud»! est re qu'un appelait autrefois probabilité.Nous sommes probabilisk-s sans le savoir. La science est proba-bilistc Disons plutôt qtto
tepiolwbiltsnri; est
scientifique.tt n'y
ilpas, ilans toute l'histoire de la
philosophie, de serti*
CONCLUSION. 425
~4- 1-qai ait été plus injustement traitée quefécole |)robal>ifisto. 0»
lui les marquesd'un déttuin quVtio nu mérite pas, ut
il est piquant du remarquer (|iio beaucoup do ceux((tii trompés
par uiio différence do mots, s'en moquentau nom de ta science
moderne, reviennent précisément mi mômepoint qu'elle. Que
disait, Oit effet, la nouvelle Académie? Que nous pouvons apji ro-cher sans eusse de la vérité qu'il
faut croire les faits scrupu-
leusement observés, après s*ëtr<!assuréque
rien ne vient les
contredire; quetn scieiree est possible qu'elle peut Caire de con-
tiniK'ls progrès; qu'il faut travailler sans relâche à réaliser ces
progrès, l'eut-ôtre avait-elle tort d'ajoiitor que nous no souinies
janiiiis absolument sors, si près (jtionous en approchions, d'at-
teindre la vérité-, mais, en cela, elle ne rainait qu'accepter la
définition donnée par le dogmatisme cite avait de lu science
unetrop haute idée, aussi ces
philosophesont-ils
Irwj»cédé à leur
pcnebanl à la cliicaue encore faut-il ajouter qu'ils
avaient affaire aux plus relurs de tous les disputeurs;et s'ils ont
tant insisté sur les côtés négatifs de leur doctrine, c Y' tait pour
faire échec au dogmatisme étroit etinsupportable
des stoïciens,
et» quoi ils avaient bien raison. N'oublions pus, d'ailleurs, quela restriction qu'ils apportaient à la certitude était toute théo-
rique, et n'eiupëchatt nullement la confiance pratique et l'action.
Qui blâmerait aujourd'hui un savant s'il (lisait que la toi de l'at-
tractionuniverselle est vraie jusqu'à
cequ'un
fait nouveau vienne
la contredire'/ Les probabilisles ne disaient pas autre chose
quand ilssoutenaient que nous ne sommes jamais absolument
sûrs île posséder la vérité. Qu'il v aurait du choses à dire si nous
voulions entreprendre une réhabilitation queces excellents plii-
sophes ont trop loii|i'iii|is attendue! Ils avaient bien raison de
remarquer quela probabilité tient dans la vie humaine plus de
place que la certitude dans les circonstances les plus graves,
c'est sur desprobabilités que nous nous décidons. C'étaient des
esprits fermes, .sérieux, modérés, connaissant bien les limites de
l'intelligence humaine mais très*disposés à la laisser agir libre
ment eu deçà de ses limites. Encore aujourd'hui, nous pouvons
4~ t:ONCt<titS~N.
t.t.At.Ï-t~-t-~–t irtrouver eb«s eux de très bonnes leçons de modestie, de réserve,
de tolérance Cieéron est un fort bon maître.Beaucoup de phi-
losophes, beaucoup do savants roéïne auraient tout il gagner à
séjourner quelque temps à l'école de la itutiveile Académie. Mais
ce n'est pas ici ta lieu d'insister sur cette apoluyie. liomoiis-nuusà
répéter que leur théorie de la connaissance est précisémentcelle qui prévaut de UOIIjours. Ce sont oux, et non pus les
.scuji-
tiques, ijui sont les précurseurs de la science moderne t Gar-
néade est l'aucêtre de Claude Bernard.
Il iuiit faire justice d'une objection banale cent fois invoquée F,contre le prouabilisine. Si nous iw pouvwis atteindre tu vérité,
rdit-o» comment nous assurer
que nous enapprochons? f mpro- 7
babilité est une mesure et qu'est-ce qu'une mesure sans une
unité? Mais, ett supposant que la vérité j»ouséchappe tout il fait, u
ne pouvons-nous la concevoir comme un idéal ? Les élémentsIl
ne nous fout pas défaut pour concevoir cet idéal. Ni les proba-bilités ni les
sceptiques n'ont jamais contesté que les phéno-mènes s'imposent à nous avec certitude ta science parfaiteserait celle dont les vérités
générales s'imposeraient à nous de la
même manière; et It science est d'autant plus parfaite (jtietes
rpropositions dont elle est formée s'imposent à notre esprit avec ,1
plus de force qu'elles sont confirmées par plus d'expériences,
qu'elfes ne sont jamais en opposition avec un fait avéré. C'est·
précisément ce que disait Garnéade.Pour revenir ait scepticisme, on voit à présent 011 est le
malentendu que nous signalions tout à l'heure comme l'originede toutes les difficultés. lléfinit-i>« la certitude suivant l'ancienne
formule La prend-on pour l'adhésion à une vérilé non seule-
nienl -immuable et universelle, maisdéfinitivement et pleinement
possédéi! des 'à présent par l'esprit, si bienqu'it y
aéquation t
complète entre la pensée et son objet, que nous soyons au
cœur de IMlrc? Alors le scepticisme a raison le dogmatismen'a rien de sérimix lui opposer. Ktilcttd-oii, au contraire,
n
«'omuii! nous le faisons tous les jours, par .certitude, fudlu-sion
à miii vérité, immuable sans doute et absolue en eUc-iuême,
Il
il
CONCLUSION. hit
mais dont uotts ne pouvons que nousrapprocher pr des
éitapes
successives, dont nous n'avons peut-être pus encore lu formule
définitive,, telle en lin quenotre coirtiaissiince
puisse faire des
|)ivii);r(;s, que nous devons chercher toujours Et nous obstiner à
lu poursuite du vrai f Alors le scepticisme est vaincu. Tous ses
arguments viennent échouer coutre te dogmatisme ainsi entendu,
(l'est unepuérilité
do refuser de rien ullirmor sousprétexte que
nous nu possédons pis actuellement toute la vérité.
Le dogmatisme traditionnel et lescepticisme sont «feux ex-
(renies, Le dogmatisme aplacé
le but trou haut. Pour pénétrer
au cœur des choses, pour tes connaître dans leur nature intime,
jiuur tes voir, nour ainsi dire, du dedans, il faudrait un esprit
plus puissant que h: nôtre it faudrait dire Dieu. Même en Dieu,
c'est une question de savoir si la raison pure explique le monde
pa? oHe-même elfe ne crée que des possibilités; il faut une
volonté pour les faire passer à l'acte. Cmmacnt unu intel-
ligence bornée pourrait-elle déduire les décrets d'une volonté
libre ? On a fait de lu certitudequelque
chose de surhumain
quoid'étonnant si l'humanité ne l'a
pasatteinte? Telle
qu'on la définit d'ordinaire, elle est un idéal c'est dire que nous
ne l'attciynous [tas.
Le scepticisme a bien vu cette impuissance, mais il a désespéré
tropvite. Entre (.'uarvMe et Scyfla, il y a un passage celui
que la science moderne a franchi toutes voilesdéployées, il y a
un dojjmatistiie tempéré et modeste, nuicroit à la vérité el .s'ef-
force de s'en rapprocher. Moins orgueilleux, mais non moins
confiantque l'ancien, il ne croit jamais son wuvre achevée, il ne
se repose jamais il ne décourage aucune tentativepour trouver
de nouvelles vérités ou corriger d'anciennes erreurs; s'itprofile
beaucoup du passé, il attend davantage encore de l'avenir; et,
chose 'ju<; l'ancien dogmatisme ne taisait pas volontiers, il a
assez de couiiauce dans la vérité pour ne pus craindre la discus-
sion, jiout laisser remettre en question les solutions eu appa-
rence les plus définitives pour livrer le monde aux dispute?, de
c«rnv <}uiIVludiriil cl compter sut* le triomphe final du vrai.
m CONCLUSION.
Qu'au vetftftu biutt k retnïH'queï, en (téltnissant ainsi h» dog-eu n'est pas un t'l' 1 nous tr~'otts. un vmumatisme, ce n'est pas un plan uU'oI qn« nous traçons, un vœu
nous exprilliolis, C'4,-Stune réalité tléci~ivoits. tque nous exprimons, c'est une réalité que nous décrivons, ho
doute universel a disparu l« science est constituée» île manière
à definr toute attaque. C'est le dogmatisme inébranlable, fondé
sur l'accord unanime df tous, t|i»ia dultnitiveinent vaincu te
scepticisme.
Est-ce trop peu? De vastesespérances s'ouvrent devant nous,
qui [Kiiveitt séduire tes esprits épris de certitude absolue. Les
rapports de plus enplus étroits de la physique et des inatlié-
matitpjes, la réduction. dmcjue jour plus sûrementaccomplie,
n
des |ihénôuiètics plttsicjuesà des mouvements, permettent d'ores
des l' tenOlllctws 1,,)'slIjUCSa (les
IllOItVl'ments'llcl'meltent 1 ores
et déjà d« prévoir le jour où le rôvo do llescartes sera réalisé,et
(1(,I«~i([te prévoir Il-- jour OU le rciv(t (e ut'scurtcs sera l'ca ISe,
oul'esprit pourra reconstruire le monde «
priori. En supposantcette tâche
accomplie, Tuncie» dogmatisme sera-l-il reconstitué? t
Nous en doutons, pour notre part, car. à l'origine de cette
série de déductions, on trouvera toujours certaines données
qu'on constatera soit comme des faits, soit comme des actes
accomplis par une volonté suprême ia pensée ne saurait tout
expliquer. Mais.après tout, cela n'est pas sur. et il ne faut,
comme disaient les sceptiques, décourager personne. Mais, si la
science parfaite peut un jour être atteinte, c'est une espérance î
qu'il faut ajourner: on facompromise à vouloir la réaliser
troptôt. Pour le présent et pour longtemps encore, lu vérité, en ce
qui concerne le monde, renfermera encore quelque chose d'im-
parfait et de provisoire elle ne seraqu'une hypothèse vérifiée.
Si la sciencepositive se contente de cette sorte de certitude
qu'on appelait jadis probabilité, il serait téméraire de penser
que htmétaphysique puisse s'élever plus haut. Elle aussi pro-
cèdepar conjecture, par hypothèse, par divination. Son infé- >
riorité a l'égard de la science, c'est qu'elle n'apas les moyens del'
vérifier directement, ducontrôler par l'expérience ses hypothèses: (
c'estpourquoi il convient du réserver le nom de certitude aux
hypothèses vérifiées et de donner le nom de croyances aux vé-
ritésMétaphysiques. Toutefois, il ne faut rien Si par
KONfiMJSIOK. m
i> nu cntciiil nînsî rm'ît nrfivn niioltiiii'fois. Pmmlvsi'métaphysique on entend, ainsi qu'il arrive quelquefois, l'imidysi'
de l'entendement, lu erifkroo de la raison, la vérité peut «Hre
atteinte aussi sûrement quedans les sciences lie lu nature, car
les opérations(le l'esprit sont des faits au mémo titre ([lie tes
autres phénomènes naturels, et une théorie de l'entendement*
tenue de*tre d'accord avec eux, se trouve parlà même soumise
à un facile etperpétuel
contrôle. Si ta métaphysiqueest l'expli-
cation do l'univers, comme il est impossibled'embrasser d'un
coup«l'œil la totalité des faits, le contrôle direct est impossible,
(l'est pourquoi les systèmes de métaphysiqueoffriront toujours
de beaux risques à courir ils seront toujoursdes ponsws dont
il faudra s'enchanter soi-même. Cependont une théorie de l'uni-
vers, sans titre complète, peut rendre i*om»le<d*unplus ou moins
grand nombre de faits comme il y a des degrés dans la {irolm-
kilité il y en a dans la valeur des systèmes. L'esprithumain
peut«lotie continuer soir «.«uvre, appliquant
au delà de l'expé-
rience les mômes procédés quilui ont réussi dans la science
c'est pourquoi ta métaphysique et la religion sont éternelles.
Ii faut seulement qu'elles ne se fassent pas illusion sur elles-
mêmes, qu'elles seproposent
sans s'imposerleur seule arme
est lapersuasion.
Lesplus
fermes défenseurs de la foi r«'li-
jjicusoou
métaphysiquereconnaissent
que l'esprit y"i<?l beau-
coup «le liii-imime, et qu'il atteint la vérité parla foi et par le
••«•Mi-,autantque par l'intelligence.
Quant à ta morale, elle présente,au
pointde vue de la cet-
titude, un caractère toutparticulier. Lorsqu'il s'agit de l'idée du
devoir, suivant une profonde reniait pte deKant. ta question n'est
plusde savoir si elle a un objet au sens ordinaire du mot on
ne demande pas si le devoir est toujours accomplisur la terre.
L'idée du devoir est un idéal, une n'jjle que l'esprittrouve en
lui-mdme etqu'il s'agit de faire passer dans ses actes. Le fait
ici, ne précède plusl'idée; il «bit se modeler sur elle. Si l'idée
du devoir s'ollre nécessairement la raison elle ne contraint
l'f Voir, sur o'Iltï <|n.>>lii»nle beau livre il<> M. Ollc-la|nune
Im rtrtiliulc
uiui-nfi-, l'aris, liclill, iH8u.
m conclusion.
pas là volonté: ici encore, il faut à Porijpiië dt> la connaissant'o
un acte «le libre initiative. Mais, imo fois que l'autorité thi devoir
a été reconnue(et
il importe peu que ce soit par obéissance ou
par persuasion J,le «bute a
disparu. L'agent moral n'aplus
be-
soin de jeter les yeux sur le monde pour raffermir ses croyance*:
c'est en lui-même qu'il découvro ta vérité; sa volonté se suffit
pleinementà elfe-même. Nul ne peut foire que l'idée «tu devoir
ne soit absolument certainepour quiconque s'est décidé lui
obéir. Ni les démentis deni les cruautés de la vie
ne sauraient affaiblir la fermeté du stoïcien te monde peuts'écrouler sans ébranler sa foi. C'est assurément le type le plus
parfait de certitude <|ue nouspuissions connaître.
sTel est le dogmatisme qu'on peut opposer sans crainte aux
i(
critiques dupyrrbonisme. Mais, si nous condamnons te scepti- j
cistne. nous ne devons méconnaître ni ses mérites ni les con-
cessions que nous avons dû lui faire. Si la science a puse
constituer définitivement, c'est à condition do faire droit à ses
principales objections elle atriomphé avec lui plutôt que
contre lui. Quoi qu'on ait pu dire, l'école sceptique est une
grande école elle a contribué pour sa bonne part au progrèsde l'esprit humain, elle a
apporté sapierre
à cet édifice qu'elle >déclarait impossible. En
dépit desapparences, Pyrrlion, Car-
1néade, /Enésidème, Agrippa ont bien mérité de l'esprit humain.
liCette science dont ils n'ont
pas voulu s'éievaiitplus haut qu'eux,
griiee h eux. pettt les compter parmi ses précurseurs. Leur
pensée négative revit dans l'œuvrequ'ils ont méconnue, et. quel-
ques restrictions qu'on doive faire, le jugement del'impartiale
postérité sera que ces puissants esprits n'ont pas perdutmit>
peine. />
(
TABLE DES W4TIKRES.
IXTtWlBl'CTKttu
I.BS OT&KhBNTS bli SCEPTICISME
tt
tCiiAwrnB t. La philosophie imlt!sticrati(|tn' t
ttiiAPreiu: II. Somiic cl les socratiques«o
LIVRK t.
WXCtKJf SCKPW.iSMB.
(iiiAPiTUEI. Division (le l'Iiisloire tin srcjilifismo 'Ait
&IAMTREII. l,cs origines di» l'iineienspcpticismeho
CijAWTae ll{. PytrtioD 5tt
tiiMPtrite IV. Ttuioii de l'iilionh1 77
LIVRE (I.
LA NOUVELLE ACAUlÎMIK.
GiniMTHB 1. Ijp* origines rfo In nouvelle Ac-ulc-iuie «|8i
ÙMHTRK II..llYV-silaS t)<)
Ciiawtrb IH. Cararâilc. – S» vie ut «1 ctocfriim t a3
Ciiai'ITrk IV*. CAurnêmk. – litomen critiqiii*«63
Chapitrc V. Les successents de CamJadc – Wiilon «le Larissc.. t8(»
Ciiawtrb Vf. Anliochus d'Ascalon '109
LIVRE lil.
I.K Si.firTICISME U1ALKCTIQCK.
Chapitref. L'étote scepti(|tic «a/
Ciuimtiib H. ;Ëm-si(lc>mp •' ft 1
Gii.vi>itre III.Ein!4dèm< – H«>ii sci'|ilicismi'^5."{
m TABLE DES MA'MftES.
Oihrtiik fV. Knisittème. – Ses rapports uvw riiitaclitfismt1.37»
tiit*miii? V. ifodâidème. – Ëvimeii critique «g»
Cittmnis VI. {a's siicct'sspurs trJîuésklènM*. –Agiijipa «gtj
LIVIU5 IV.
LK SCgt'TH.ISMK KUI'HIIQIK.
Oiiu'itrb t. Li'sniûli'cins sceptiques.
Mitaulote et SextusEni|ii-
i-ieus. $m
Cihrtkf. li. t,i- scepticismo cinpificjup.– Partie dwlnietivc1 .t.1 t
Cii-write Ht. h«? sccjrtteisim» «»mj>tcM|iio.– Partit» «instructive 35«y
Cmi'iTiu: iV. Le [lyrrlioiiMiiu1 ci la nouvelle Aiwlt'ini'1 3Si
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