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74 LES 100 L’HEBDO 18 MAI 2006 100 PERSONNALITÉS QUI FONT LA SUISSE ROMANDE FORUM DES 100 Qui sont les entrepreneurs du Jura qui fabriquent des cartes d’identité pour Hong Kong? Qui est venu du Portugal créer une marque horlogère haut de gamme? Quels sont les jeunes talents de la politique et les aventuriers qui font rêver les Romands? U ne native de Villars-sur-Ollon est allée planter des igloos sur les hauts de Monthey après avoir été avocate dans la City de Londres. Un Canadien a choisi Saint-Prex pour installer une usine phar- maceutique et promet de créer, d’ici à 2008, 360 emplois. Un ex-requérant d’asile argentin préside un parti politique genevois qui cartonne dans toutes les élections depuis plusieurs mois. La biologiste à l’origine du yaourt LC1 lance une start-up pour développer des traitements antialzheimer. A La Chaux-de-Fonds, un leader mondial des implants médicaux recru- te septante employés en dix-huit mois. Une archiviste genevoi- se se prend pour un cyborg et mixe à Berlin et à Londres. A des degrés divers, dans l’ombre ou très médiatisés, toutes et tous font la Suisse romande, incarnent un dynamisme que les déficits des comptes publics et les taux de chômage dissimulent. En créant l’an dernier le Forum des 100, L’Hebdo a souhaité rassembler chaque année ces énergies sur le papier, mais aussi autour de quelques débats essentiels pour l’avenir de la Suisse romande. Pourquoi 100 personnalités et pas 1000 ou 50? nous demande-t-on souvent. La liste des 100 n’est pas un GaultMil- lau économico-socio-politico-culturel dans lequel on gagnerait ou perdrait des points. C’est un instantané des talents que L’Heb- do repère parce qu’ils innovent, réussissent, agacent, construi- sent, créent, rayonnent. En choisir une centaine chaque année nous a semblé une ambition noble et raisonnable. S’il est un lieu de débat, le Forum des 100 se veut aus- si un point de rencontre, une occasion de mettre en contact des gens qui n’ont pas forcément l’occasion de se croiser. Dans ce réseau naissant, certains lauréats de 2005 ont parrainé ceux de 2006. Aux côtés des journalistes de L’Hebdo et de Largeur.com, ils signent donc les textes de présentation originaux. A L’Université de Lausanne ce jeudi 18 mai, autour des lauréats de 2006 et de 2005, ce sont plus de 400 invités qui débat- tront des emplois de demain. Comme l’an dernier, L’Hebdo ren- dra compte dans ses prochaines éditions de leurs propositions et de leurs réflexions. Bonne lecture! | CT D ESSINS ORIGINAUX DE D ENIS KORMANN DANIEL BRÉLAZ Syndic de Lausanne et député au Grand Conseil vaudois (Vert). ISABELLE CHASSOT Conseillère d’Etat fribourgeoise (PDC). PHILIPPE SENDEROS Footballeur. CARLOS DIAS Fondateur et patron de Roger Dubuis. CLAUDE HAUSER Président du conseil d’administration de Migros.

L’HEBDO 18 MAI2006 - labs.letemps.ch · Lauener Dominique Rappaz Bernard Syz Eric Bouchat Théo Danial Omar Perruchoud-Massy Marie-Françoise Ferdman Guerrier Bettina Pictet Stéphane

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74 LES 100 L’HEBDO 18 MAI 2006

100PERSONNALITÉSQUI FONT LA SUISSE ROMANDEFORUM DES 100 Qui sont les entrepreneurs du Jura

qui fabriquent des cartes d’identité pour Hong Kong?

Qui est venu du Portugal créer une marque horlogère

haut de gamme? Quels sont les jeunes talents de la

politique et les aventuriers qui font rêver les Romands?

Une native de Villars-sur-Ollon est allée planter desigloos sur les hauts de Monthey après avoir été avocate dans la City de Londres. Un Canadien achoisi Saint-Prex pour installer une usine phar-maceutique et promet de créer, d’ici à 2008,

360 emplois. Un ex-requérant d’asile argentin préside un partipolitique genevois qui cartonne dans toutes les élections depuis plusieurs mois. La biologiste à l’origine du yaourt LC1 lance unestart-up pour développer des traitements antialzheimer. A LaChaux-de-Fonds, un leader mondial des implants médicaux recru-te septante employés en dix-huit mois. Une archiviste genevoi-se se prend pour un cyborg et mixe à Berlin et à Londres.

A des degrés divers, dans l’ombre ou très médiatisés,toutes et tous font la Suisse romande, incarnent un dynamismeque les déficits des comptes publics et les taux de chômage dissimulent. En créant l’an dernier le Forum des 100, L’Hebdoa souhaité rassembler chaque année ces énergies sur le papier,mais aussi autour de quelques débats essentiels pour l’avenir dela Suisse romande.

Pourquoi 100 personnalités et pas 1000 ou 50? nousdemande-t-on souvent. La liste des 100 n’est pas un GaultMil-lau économico-socio-politico-culturel dans lequel on gagneraitou perdrait des points. C’est un instantané des talents que L’Heb-do repère parce qu’ils innovent, réussissent, agacent, construi-sent, créent, rayonnent. En choisir une centaine chaque annéenous a semblé une ambition noble et raisonnable.

S’il est un lieu de débat, le Forum des 100 se veut aus-si un point de rencontre, une occasion de mettre en contact desgens qui n’ont pas forcément l’occasion de se croiser. Dans ceréseau naissant, certains lauréats de 2005 ont parrainé ceux de2006. Aux côtés des journalistes de L’Hebdo et de Largeur.com,ils signent donc les textes de présentation originaux.

A L’Université de Lausanne ce jeudi 18 mai, autour deslauréats de 2006 et de 2005, ce sont plus de 400 invités qui débat-tront des emplois de demain. Comme l’an dernier, L’Hebdo ren-dra compte dans ses prochaines éditions de leurs propositions etde leurs réflexions. Bonne lecture! | CT

D E S S I N S O R I G I N A U X D E D E N I S KO R M A N N

DANIEL BRÉLAZSyndic de Lausanne et député au Grand Conseil vaudois (Vert).

ISABELLE CHASSOTConseillère d’Etat fribourgeoise (PDC).

PHILIPPE SENDEROSFootballeur.

CARLOS DIASFondateuret patron de Roger Dubuis.

CLAUDE HAUSERPrésident du conseild’administration de Migros.

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G t D 1

76 LES 100 L’HEBDO 18 MAI 2006 L’HEBDO 18 MAI 2006 LES 100

LA LISTE DESACTEURS 2006

ESPOIRSet éminencesgrisesPages 78 à 88

Hodgers Antonio Collins OrianneMaradan OlivierSchwab NicoleSenderos Philippede Courten DidierFaller ChristofKaufmann-KohlerGabrielleRonga SanjaBooth StephanieBourgeois Jacques

Tabin Marie-ClaireBise Sandra

Falquet Nicolas et Loris

Hayward TarikBenhadj Sami

Meldem Guyde Quattro Jacqueline

Herren AlexandreJun Liu

LEADERSPages 90 à 103

Emch Arlette-ElsaFontugne StéphanieKoopmann AndreasLambert JérômeLevrat ChristianBraunwalder PeterHaemmerli AndréMorand Jean-PierreThibaudeau NicolaChassot IsabelleCramer RobertJauslin Jean-FrédéricPettigrew MichelPoupon BernardBroulis Pascal

de Weck Anne-MarieMauvernay Rolland-YvesReuland Ruud J.Bolzhauser BeatBrélaz DanielGehriger WillyHauser ClaudeBaume-SchneiderElisabethKellenberger JakobThiébaud FrançoisWeiss Pierre

PENSEURSet scientifiquesPages 104 à 110

Leyvraz Serge Lenstra ArjenPfeifer AndreaRichter Jacques et Dahl Rocha Ignacio Tschopp JürgBassi AndreaDanthine Jean-PierreRahier Martinede Haller JacquesGarelli StéphaneHernandez Nouria

BÂTISSEURSPages 112 à 123

Bourquard Frères Cardis BertrandHaug LaurentMorrissey MichaelNova NicolasRitchey StevenSoutham AnneStaehli Johnde Meyer Sofiade Rubertis FrancescoRimer David et NeilZocco GiuseppeNordmann Jean-Luc

Riedo AlainArditi MetinDias CarlosLauener DominiqueRappaz BernardSyz EricBouchat ThéoDanial OmarPerruchoud-MassyMarie-FrançoiseFerdman GuerrierBettinaPictet StéphanePietri MarlyseRenninger StefanZaugg Beat

ARTISTESet provocateursPages 124 à 136

Antille Emmanuelle de Roulet DanielGétaz EmmanuelGyger PatrickKissling JérémieKohler PierreChappatte PatrickHohl FrédéricLoleMelgar FernandConstantin ChristianImmi LoriOechslin LudwigZiegler JeanAgudin FacundoCahen Antoine et PhilippePoggia MauroWater LillyBaier LionelFreysinger OskarMoser ManuelVœgeli AlainLambiel Yann

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JEAN ZIEGLERRapporteurspécial des Nations Unies pour le droit à l’alimentation.

OSKAR FREYSINGERConseillernational valaisan (UDC).

ELISABETHBAUME-SCHNEIDERPrésidente duGouvernementjurassien(socialiste).

ROBERTCRAMERConseillerd’Etat genevois (Vert).

YANN LAMBIELHumoriste.

ARLETTE-ELSAEMCHMembre de la direction générale de Swatch Group.

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78 LES 100 L’HEBDO 18 MAI 2006

Espoirset éminences grises

30 ans, députéau Grand Conseil,

président des Vertsgenevois.

A N T O N I O H O D G E RSLE VERT INNOVANT

Il est à l’image des Verts en cette période de succèsélectoraux: conquérant mais prudent, innovateurmais rassurant. Et ça tombe bien parce qu’il préside

justement depuis trois mois aux destinées genevoises de ceparti chargé de nouvelles responsabilités gouvernemen-tales. A 30 ans tout rond, Antonio Hodgers incarne la muede ce qui était à l’origine un rassemblement hétéroclited’antinucléaires amateurs ou non du tir au lance-roquettesen une véritable formation politique capable d’appliquerdes solutions concrètes et globales aux problèmes del’époque.Or l’époque a besoin de solutions originales et nouvellespour dépasser les rigidités et pesanteurs d’un environne-ment politique marqué par les obstacles en tout genre.Antonio Hodgers en est convaincu. Avec dix ans d’expé-rience parlementaire dans sa besace et quelques bellesannées à user ses fonds de culotte au sein du Parlementdes jeunes de Meyrin, il sait aussi la valeur de la mobilitéd’esprit en politique, pour changer de point de vue et abor-der les problèmes autrement. En bon militant vert, il privi-légie les approches plurielles et novatrices, au risque par-fois de perdre en «traçabilité».Dépasser les barrières culturelles pour participer à la vie dela collectivité tout en cultivant le respect des origines(argentines pour sa part), s’affranchir des frontières parti-sanes pour octroyer via l’Association «J’y vis, J’y vote!» desdroits civiques aux étrangers au plan communal, passerdans le camp des entrepreneurs pour lancer Mobilidée,jeune société de conseil en modes de déplacement... Anto-nio Hodgers avance au gré des défis, avec créativité etpragmatisme, sans égard pour les schémas traditionnels.En adepte de la mobilité averti, il n’a qu’une chose àcraindre: la fuite en avant!

PA R P I E R R E M A U D E T,P R É S I D E N T D U PA R T I R A D I C A L G E N E V O I S

Sous les feux de la rampe depuis peu ou encore en coulisses,

espoirs et éminences grises tracent l’avenir de la région sans

que l’on en ait encore pris conscience. « L’Hebdo» parie que,

d’ici peu, ils figureront dans la catégorie des leaders.

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Il incarnela mue dece qui étaitun rassem-blementhétéroclited’anti-nucléairesen unevéritableformationcapabled’appliquerdessolutionsconcrètes.

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GÉNIE GENEVOIS DU FOOTPA R PA U L A C K E R M A N N

«J’adore ma ville et je suis très fier d’être Genevois. D’ailleurs,ici, à Londres, je n’arrête pas d’en parler aux gens qui m’en-tourent.» Philippe Senderos serait-il notre meilleur ambas-

sadeur? Il l’est en tout cas pour le bout du lac, lui qui, comme tousses concitoyens genevois, est plus attaché à sa ville qu’au restede la Suisse romande.Ce fils d’immigré espagnol précise pourtantqu’il est également très fier de son pays,de le servir par son talent dans l’équipenationale et de prouver par là que l’im-migration enrichit la Suisse: «Depuistoujours mon père m’a dit que la Suis-se était notre pays, celui qui nous avaittout donné», dit-il, sur ce ton humblequi le caractérise.Il n’est donc pas paradoxal qu’unsegundo soit le pilier de la défense(footballistique) helvétique (tout ens’étant imposé dans la défense desLondoniens d’Arsenal, finaliste dela Champions League). Pour-quoi donc le qualifier d’espoiralors qu’il est déjà titulairedans un des deux plusgrands club d’Europe? Par-ce qu’il n’a que 21 ans (lui quiest né le jour de la Saint-Valentin 1985) et que chaquefan de foot suisse espère au fondde lui-même que la Nati, aprèsavoir brillé à la Coupe du Mon-de de juin, remporte chez ellel’Euro en 2008. Et, pour cela, ilfaudra un géant, il faudra unSenderos encore plus fort, luiqui n’est pas encore Michel Pla-tini mais déjà bien plus queHakan Yakin.

8180 ESPOIRS L’HEBDO 18 MAI 2006 LES 100

BÉATRICE DEVENÈS PIXSIL

Du 8 au 11 juin prochain,150 à 200 jeunes leaders(Young Global Leaders)

se réuniront à Vancouver, sousl’égide du World EconomicForum (WEF). Quels seront lesproblèmes que devrontrésoudre les élites de demain?Pour en débattre, des hommeset des femmes âgés de moinsde 40 ans et issus de l’écono-mie, de la politique, dessciences ou de la culture serencontrent régulièrement.Nicole Schwab est la chevilleouvrière de ce forum. Avec sapetite équipe, elle repère etsélectionne ces jeunes leaders,mais anime et prépare surtoutles réunions.Une subtile alchimie permet laréussite de ce type de projet.

Pour cela, la Genevoise peutpuiser dans son propre par-cours, peu banal: études debiologie moléculaire à Cam-bridge (Grande-Bretagne),postgrade à Harvard et à laKennedy School of Government,mandats pour le Ministère boli-vien de la Santé, la Banquemondiale et l’OMS…De 20 à 30 ans, elle s’est for-mée à des réalités très diffé-rentes. Mariée, elle a choisi degarder le nom de son père,Klaus, fondateur du WEF.Aujourd’hui, elle a «posé» sesvalises à Genève.Le temps d’organiser la prochaine rencontre des jeunesleaders ou de participer à l’un des nombreux forumsdécentralisés du WEF.

31 ans,directriceau WorldEconomic

Forum.

O R I A N N EC O L L I N SRÉALISATRICE DE RÊVESPA R PA U L A C K E R M A N N

Depuis longtemps, Orianne Collins et son mari Philrecevaient beaucoup de demandes venant d’enfantstalentueux à la recherche de soutien financier. En février

2000, ils se sont dit: «Un chèque n’est qu’un chèque, avec notreréseau, nous pourrions donner plus que de l’argent, du conseil.»C’est ainsi qu’est née Little Dreams, une fondation qui offre àsoixante-deux jeunes talents sportifs ou musicaux, dont unemajorité de Romands, un soutien financier et humain. Désormais,ces enfants sont effectivement parrainés par des professionnelscomme Claude Nobs, Tina Turner, Stephan Eicher, Olivier Panis,Amélie Mauresmo ou Yannick Noah.Aujourd’hui, malgré la séparation du couple, Orianne Collinscontinue de diriger ce beau projet. Pour elle, «contrairement àla Star Academy, Little Dreams n’offre pas du rêve mais unvrai projet sur le long terme». Le but avoué de la fondationest en effet de donner aux enfants «toutes les cartes» pourqu’ils puissent vivre de leur passion. Bref, leur donner unmétier. Concrètement, les musiciens font des concertsdevant des milliers de spectateurs en première partiede Phil Collins ou au Montreux Jazz, les sportifspeuvent voyager à travers le monde pour participerà des compétitions. Résultats: Joni Fuller aremporté la finale anglaise de l’Eurovision junior,Jessy Putallaz va de victoire en victoire lors deschampionnats juniors d’équitation, NicolasPeifer est champion de France junior detennis handisport et on connaît lessuccès tennistiques deTimea Bacsinsky.Que de rêves déjàréalisés…

33 ans,présidente

de la FondationLittle Dreams.

fustige la pression «exponen-tielle et démesurée» exercéepar certains responsables dumonde du travail sur les adoles-cents. «L’école peut certes fairemieux, mais elle ne peutrésoudre à elle seule ce problè-me central de la société postin-dustrielle.» Au passage, il griffe certainsmédias, qui présentent comme

O l i v i e r M a r a d a nDIPLOMATE DE L’ÉDUCATIONPA R D AV I D S P R I N G

Le Fribourgeois OlivierMaradan fait partie desrares personnes qui pos-

sèdent une vision d’ensemble

tutionnels relatifs à la formationle concerne de près. Il a la char-ge de piloter le délicat projetHarmoS (harmonisation natio-nale de la scolarité obligatoire).Olivier Maradan estime quenotre système de formation est«adéquat et toujours perfec-tible». Mais l’un de ses «pro-blèmes majeurs réside dans latransition vers la formation pro-

fessionnelle». Une déclarationde Peter Keller, responsable dela formation pour Coop, l’énerveencore: ce cadre a indiqué queseul un jeune sur cent qui seprésente pour une place d’ap-prentissage de vendeur remplitles critères demandés, et enrejette la faute sur l’école.Olivier Maradan parle d’«irres-ponsabilité et d’arrogance» et

48 ans, secrétaire général adjoint de la Conférence suissedes directeurs cantonaux del’instruction publique (CDIP).

modèles les «héros de paco-tille» des reality shows. Pourla Suisse romande, OlivierMaradan rêve de la créationd’un «conservatoire populaireromand pour le plurilinguis-me», une école permettantl’accès aisé et bon marché àl’apprentissage des langues,locales, nationales et de lamigration.

N i c o l eS c h w a bELLE TRAQUE LES ÉLITES DE DEMAINPA R R O L A N D R O S S I E R

P h i l i p p eS e n d e r o s

21 ans, footballeur.

de l’école en Suisse. Depuis2003, il assume la direction dudomaine de coordination «sco-larité obligatoire» auprès de la

Conférence suisse des directeurscantonaux de l’instructionpublique (CDIP), à Berne. Autantdire que la votation du 21 maisur les nouveaux articles consti-

LES 100 ESPOIRS L’HEBDO 18 MAI 2006

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MAGALI GIRARDIN

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8382 ESPOIRS L’HEBDO 18 MAI 2006 LES 100

S a n j aR o n g aUNE FEMME POURTOUTES LES AUTRES

PA R C H A N TA L TA U X E

Il n’y a que 9% de femmes dansles conseils d’administration desplus grandes sociétés suisses.

Un chiffre calamiteux. Trop souvent,celles qui décident de mener carrièrese heurtent au «plafond de verre».Plutôt que de s’en désoler les brascroisés, Sanja Ronga a repris la prési-dence du réseau des Business & pro-fessional Women (BPW), section suis-se. Le BPW compte 38 clubs dans toutle pays mettant en réseau 2400 femmescadres. Au niveau international, il estprésent dans 80 pays, et regroupe35000 femmes. Forte de cette expé-rience, Sanja Ronga estime que lesfemmes doivent se montrer pluslucides dans l’analyse de leur potentielet plus mobiles pour faire carrière. LeCV de cette énergique Genevoise de34 ans témoigne de la méthode préco-nisée: licenciée en sciences politiquesde l’Université de Genève, elle s’estspécialisée en marketing, et s’est éga-lement formée à l’IDHEAP. Elle a tra-vaillé dans une banque privée à Genè-ve puis à Zurich avant de rejoindre en2003 l’Office fédéral des assurancessociales, à Berne, comme économiste,cheffe du secteur «Générations, socié-té et questions sociales».

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À LA GLOIRE DU GOÛTPA R E R I C F E L L E Y

En 2005, le cuisinier Didier de Cour-ten a fait une ascension fracassanteau guide GaultMillau en obtenant un

19, le sésame qui l’a fait entrer au royau-me des grandes toques suisses, des Rochat,Ravet, Rabaey, Pierroz et Chevrier.

D I D I E R D E C O U R T E N

34 ans, présidente BPW Suisse.

En reprenant l’Hôtel Terminus à Sierre, grâ-ce à l’investissement des frères vigneronsRouvinez, il a pris la tête d’un superbe éta-blissement et d’une brigade de 35 personnes.Pour le Sierrois, c’est un pari sur l’avenir sansconcession, d’autant que les «gastros» doi-vent lutter ferme pour conserver leur clien-tèle et s’en faire une nouvelle.Mais la table de Didier de Courten nemanque pas de la poésie gourmande qui

peut détendre les estomacs les plus stres-sés. La carte est essentiellement créative,subtile, fantaisiste parfois. Certes le chef estun peu discret lorsqu’il quitte ses fourneauxet il n’a pas l’exubérance de certains de sespairs coutumiers des caméras. La pressionest là. Il sait qu’on l’attend au contour d’uneassiette imparfaite: «Ce qui est difficile dansnotre métier, ce n’est pas d’être bon un jour,mais d’être bon tous les jours.»

Inventeur du MP3 Sur-round – une méthodede compression des

fichiers musicaux qui permetde conserver le son «enve-loppant» utilisé au cinéma etsur DVD –, Christof Fallerest déjà passé à autrechose. «La propriétéintellectuelle du MP3Surround est déte-nue par l’InstitutFraunhofer, lasociété AgereSystems etThomson, quise chargent de

sa commercialisation.» LeThurgovien préfère en effetse concentrer sur sesrecherches à l’EPFL. «Jedéveloppe actuellement unesolution pour améliorer ladiffusion du son stéréo surl’ensemble d’un espacedonné.» Une technologietrès spécialisée qu’il aura

de la peine à vendre

aux entreprises romandes.«Mes recherches ne sont susceptibles d’intéresser quedes grands groupes commeSamsung ou Sony.» ChristofFaller ira donc chercher àcommercialiser ses inventions(licence) à l’étranger. Mais ilprécise que ce manque dedébouchés est «davantage unproblème européen qu’unproblème suisse ou romand».Et les collaborations restentpossibles: la société vaudoiseMerging Technologies est unpartenaire potentiel pour lechercheur. Un ancrage localqu’il pourrait concrétiser parla création d’une start-up.«Pour autant que je constateque mes applications ont unpotentiel commercial ici»,conclut-il.

C H R I S T O F FA L L E R UNE PASSION POUR LE SONPA R J U L I E Z A U G G

32 ans, chercheurau Laboratoire de

communicationaudiovisuelle

de l’EPFL.

38 ans,maître queux

de l’HôtelTerminusà Sierre.

Passionnée par ses deux métiers –professeur de droit et arbitre dans deslitiges juridiques internationaux –

Gabrielle Kaufmann-Kohler trouve en chacunde nombreuses sources de motivation. «Entant que professeur, j’aime susciter l’intérêtpour une matière chez les étudiants.» Commearbitre, elle apprécie «la diversité des litiges,l’analyse pour tenter de trouver une solution,le caractère transnational et transculturel del’activité.»La Suisse, notamment avec Genève, est uneplace majeure d’arbitrage. «Cette activité vaencore se renforcer, car l’arbitrage continue àse développer comme le mode de règlementdes différends du commerce international.»Reste que «la concurrence d’autres placesd’arbitrage, notamment Paris, Londres,

Stockholm ou Vienne est de plus en plusacharnée». Les plus de 1000 membres del’Association suisse d’arbitrage – longtempsprésidée par Gabrielle Kaufmann-Kohler –témoignent de la vitalité d’une longue tradi-tion helvétique. Les meilleurs ambassadeursde son développement restent les arbitressuisses de renom. Ils sont appelés à se pro-noncer non seulement à Genève ou Zurich,mais aussi à l’étranger: «J’arbitre plus sou-vent à Washington, Londres, Paris ou Franc-fort qu’à Genève.»Récemment élue au Conseil d’administrationde UBS, cette juriste polyglotte y apporterases connaissances approfondies de droit com-paré et sa maîtrise de nombreux systèmesjuridiques; ainsi qu’un savoir-faire éprouvédans la gestion de procédures complexes.

G a b r i e l l eK a u f m a n n -K o h l e r«L’ARBITRAGE VA ENCORESE DÉVELOPPER EN SUISSE»PA R G E N E V I È V E B R U N E T

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53 ans, avocate, associée au cabinet Schellenberg Wittmer, professeur de droit privéinternational à l’Université de Genève.

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84 LES 100 ESPOIRS L’HEBDO 18 MAI 2006

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Depuis 1999, Marie-ClaireTabin est présidente duSyndicat des enseignants

romands (SER). Cette Valaisanneconsidère que les écoles privées«sont des alternatives néces-saires». Mais «pas question»d’instaurer un bon scolaire. En Suisse romande, plusieurschantiers sont ouverts. D’abord,répondre au «réel besoin» demoyens romands d’enseigne-

ment du français, qui constitue-ront un outil important pourl’harmonisation. Ensuite, ame-ner sur la place publique l’idéeque «l’école ne doit pas sélec-tionner, mais former». DesAssises romandes de l’éducationauront lieu le 23 septembre, surle thème «Réussir ensemble,bannir l’exclusion». Si Marie-Claire Tabin se réjouitdes efforts de coordination en

cours, elle estime toutefois que«notre système d’éducationn’est pas adéquat. Notre sociétéa besoin de gens créatifs,capables de changer souventd’orientation professionnelle.»Or, souligne la président du SER,le système éducatif est «fermé»,cloisonné en filières, et n’orientepas les élèves en fonction deleurs compétences. Le moded’évaluation utilisé, fondé sur

les manquements plutôt que surles acquis, pénalise plus d’unélève. Ainsi, un jeune excellenten sciences et peu doué en fran-çais sera «cassé». La sélectiondoit survenir après l’école obli-gatoire.

Stephanie Booth, 31 ans, se pré-sente comme une «conseillèreen weblog». Un métier qu’elle

s’est créé sur mesure: «C’est quel-qu’un qui en sait plus sur les blogsque les autres et qui essaie de mon-trer tout ce qui devient possible avecce nouveau média», explique-t-elle.Pionnière du blog en Suisse roman-de, elle commence à vivre de sesconseils et prévoit même de finan-cer ainsi ses études à la Haute Ecolepédagogique (HEP) vaudoise à par-tir de la rentrée prochaine.Stephanie Booth a entrepris son acti-vité de conseillère en weblog début

2005, elle donne par ailleurs desconférences et se rend dans les écolespour informer enseignants et élèvesdes dangers du blog. «Les adolescentsne se rendent pas compte que tout lemonde a accès à leur blog.» Elle espè-re toutefois que cette activité de pré-vention sera intégrée dans les cursusscolaires d’ici à quelques années.Pour l’heure, «la plupart des profes-seurs sont dépassés». Et pour cau-se: «La Suisse romande est en retardpar rapport au monde anglo-saxonou à la France en matière de blogs.Il faudrait regarder davantage ce quise fait autour de nous, pour enprendre de la graine.» Cette Lausan-noise croit à l’avenir économique dublog. «On verra apparaître des métiersdu blog, comme on l’a vu avec l’in-ternet.»

BLOGUEUSE PROFESSIONNELLEPA R J U L I E Z A U G G

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HJ A CQ U E SB O U R G E O I SLE PAYSAN PRÊTÀ DÉFIER L’EUROPEPA R M I C H E L G U I L L A U M E

Le nombred’exploita-tions agri-

coles baissera d’untiers ces cinq à dixprochaines années.A la tête de l’Unionsuisse des paysans,Jacques Bourgeoisa donc une redou-table mission à remplir à l’heure où leConseil fédéral envisage de conclure unaccord agricole avec l’Union européenne.Ce fils de paysan de Vullierens, reconvertidans la défense professionnelle à la suited’ennuis de santé, devra montrer degrosses qualités de négociateur. En tem-pérant l’ardeur du gouvernement pourobtenir des mesures d’accompagnementqui pourraient se chiffrer de 1 à 3 mil-liards. Et en convainquant sa base quel’UE n’est pas qu’un fossoyeur de l’agri-culture suisse, qu’elle peut aussi lui ouvrirun marché de 450 millions de consomma-teurs, sur lequel les fromagers sontd’ailleurs en train de s’imposer. Travail delongue haleine … Ça tombe bien. JacquesBourgeois est un sportif d’endurance quicouvre le petit parcours de la Patrouilledes glaciers en cinq heures et demie.

31 ans,conseillère en weblog.

M a r i e - C l a i r e Ta b i nL’ÉCOLE NE DOIT PAS SÉLECTIONNER, MAIS FORMERPA R D AV I D S P R I N G

55 ans, présidente du Syndicatdes enseignants romands.

48 ans, directeurde l’Union suisse des paysans.

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86 LES 100 ESPOIRS L’HEBDO 18 MAI 2006

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Körner UnionDES TRAVAILLEURSDE L’IMAGEPA R M I R E I L L E D E S C O M B E S

Ne vous fiez pas à leur allure d’extra-ter-restres planants. Sortis de l’Ecole cantonaled’art de Lausanne (Ecal) en 2003 avec un

diplôme en communication visuelle, les LausannoisSami Benhadj, Tarik Hayward et Guy Meldemcumulent déjà les expositions collectives et lesrécompenses, dont une bourse de la Fondation Lee-naards. Le nom de Körner Union (adopté lors d’untravail à l’Ecal) comme leur discours un brin surréa-liste cachent une philosophie amusée de la vie etde la création qui leur fait revendiquer de pratiquerindifféremment la photographie, l’illustration, laproduction d’affiches ou d’objets.Cela n’empêche pas leurs images de garages ouleur série de channes qui se déglinguent d’êtreparfaitement efficaces. «Notre seule logique, c’estde nous retrouver dans ce que l’on fait», commen-tent-ils. Ni artistes, ni graphistes, ni designers, lestrois compères n’ont pas encore trouvé le juste ter-me pour définir leur pratique. Ils se verraient assezbien en travailleurs mais cherchent encore.Depuis l’école, ils ont inventé une manière de fonc-tionner à trois en se fixant des règles comme… dan-ser ou faire du sport une fois par semaine. Et celuiqui les enfreint risque une amende.

S a n d r aB i s eFONCEUSE!PA R A L A I N R E B E T E Z

Elle travaillait pour John-son&Johnson, à trois kilo-mètres de là, et a passé

en août dernier chez StrykerSpine SA, à La Chaux-de-Fonds.Deux concurrents directs, deux

leaders mondiaux en matièred’implants chirurgicaux, deuxentreprises américaines attiréespar la promotion économique etqui contribuent à implanterdans le canton de Neuchâtel

une culture biotech, vrai contre-point à la culture horlogère.Stryker Spine SA fabrique desimplants en titane ou en acierinoxydable pour des opérationssur la colonne vertébrale. Il y a18 mois, il n’y avait rien. L’usinea été construite entre mars etnovembre 2005, les engage-ments ont débuté en août, et la production a commencédans le courant du mois dernier. D’ici juin, l’usine fonctionnera à plein, avec trois équipes quise relayeront 24 heures sur 24,et à la fin de l’année, il y aura

70 employés, dont 30% de fron-taliers. Sandra Bise a géré toutela politique d’engagement decette implantation et elle incar-ne cette génération de jeunescadres très pointus qui se for-ment dans le domaine de la pro-duction médicale. A 32 ans, cette ancienneemployée de commerce, diplô-mée d’une école de cadres deNeuchâtel, a appris à avancervite. Elle adore cette pression,«surtout quand cela n’exclutpas un véritable esprit d’entrai-de entre les employés».

LE FREERIDE DÉRIDE LES ALPESPA R PA U L A C K E R M A N N

Nicolas et Loris ont un surnom qui exprime le côté déjan-té des figures qu’ils exécutent, la tête en bas, sur de gigan-tesques barres rocheuses. Ce surnom, c’est «Huck and

Chuck». En anglais et en gros, cela veut dire «se lance et se jet-te». Et quand on parle du tourisme alpin romand à ces deux nou-veaux génies du freeride, quand on leur demande si le Valaisles aide en profitant de leur image à l’étranger, c’est avec la mêmespontanéité qu’ils répondent: «Les stations comme Verbier sonttrès frileuses lorsqu’il s’agit de travailler avec les riders quifont la réputation du lieu. Pour eux, nous sommes dangereux.»C’est que les deux Vaudois ont commencé par sauter n’importeoù et n’importe comment. Aujourd’hui, ils se calment et tententde faire par eux-mêmes des films «qui racontent une histoire enmettant l’accent sur la beauté du geste» et en parlant de leurpropre vie. Leur prochaine production sortira «théoriquement»en novembre et parlera de la relation avec les proches qui res-tent, parfois inquiets, à la maison pendant qu’ils dévalent lesmontagnes du globe. «Pour moi, nous faisons du divertisse-ment», explique Nicolas qui rejette le côté «performance» du skiextrême pour ne retenir que le spectacle. The show must go onfor Huck and Chuck.

32 ans, directrice de RH StrykerSpine SA.

Sami Benhadj, 28 ans, Guy Meldem, 26 ans,et Tarik Hayward, 26 ans, créateurs.L

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27 et 25 ans, Nicolas et Loris, skieurs extrêmes.

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J a c q u e l i n ed e Q u a t t r oPOUR UN RENOUVEAU DU PARTI RADICALPA R T I T U S P L AT T N E R

Jacqueline de Quattro préside l’undes groupes de travail pour lerenouveau du Parti radical suisse.

Cette réflexion intitulée «La Suisse del’équilibre» abordera la difficile

question de la solidarité entregénérations, remise en cause.En octobre 2007, l’avocate de45 ans, qui vient d’être élue à

l’Exécutif de La Tour-de-Peilz,devrait briguer un mandat auConseil national. Du coup, leParti radical vaudois – qui asouvent écrasé les candidaturesféminines – pourrait se retrou-ver avec une majorité defemmes à Berne, Isabelle Moretdevant remplacer Yves Christenà la fin de cette année déjà. Onpeut parier qu’elle saura sefaire entendre au Parlementfédéral si elle est élue: née àZurich, parlant le dialecte, ellea aussi été championne suissede katas de judo. Pragma-tique, humaniste et europhile,elle ne craint pas de se mon-trer impopulaire: en 2003, elleavait ainsi soutenu la retraiteà 67 ans. Aujourd’hui,consciente que cette positionest difficilement défendable,

elle préfère évoquer des incitations quine pénaliseraient plus ceux qui tra-vaillent au-delà de 65 ans.

PA R B R U N O G I U S S A N I

Liu Jun aime les métaphores. «Je suisune poule chinoise qui pond des œufssuisses», dit-il. Une centaine d’œufs

par an, pour être précis, sous forme d’ar-ticles et de photos sur les Helvètes publiésdans le Guangming Daily, le quotidien dontil est correspondant à Genève et qui a autantde lecteurs que la Suisse a d’habitants.Jun, qui parle français sans accent, a publiéplusieurs livres sur notre pays et traduit desauteurs suisses. A 42 ans, il «couvre» éga-lement l’ONU, comme une demi-douzai-ne d’autres journalistes chinois, mais sapassion est l’actualité suisse. «Je suis néun 1er août», m’informe-t-il comme pourindiquer une prédestination à «faire» la Suis-se et la Suisse romande aux yeux des Chi-nois. «Mes compatriotes sont très intéres-sés par la façon dont ce pays est géré par

les activités des quelque 600 entreprises quisont également actives en Chine, par la pro-tection de l’environnement», dit-il. Il aimela Suisse, et pense que sa stature interna-tionale «a grandi ces dernières années».Mais il met en garde contre «une certainearrogance» et contre l’affaiblissement decaractéristiques fondamentales pour l’at-trait du pays, telles la sécurité et la pro-preté. Et si l’industrie touristique veut s’ou-vrir aux Chinois (il y en a eu 110 004 l’an der-nier dans les hôtels suisses), il faut «au moinsqu’elle apprenne que pour nous, le thé estvital!». Pour souligner que ce n’est pas uneboutade, il sort de son cartable un petit potcontenant du thé. «Nous en avons toujoursavec nous, mais ici, si on demande de l’eauchaude dans un bar, on nous facture2 francs: pour un Chinois, c’est une insul-te.» L’entretien est terminé, je lui indique labouilloire.

45 ans,avocate au barreau,municipalede La Tour-de-Peilz.

PA R D AV I D S P R I N G

Décidé, exigeant et direct:Alex Herren a créé sa pre-mière société alors qu’il

fréquentait la Faculté des lettresde l’Université de Lausanne. Ilfustige le peu de confiance accor-dé aux jeunes qui se lancent:«Même avec une idée géniale,vous ne trouverez personne pour

vous financer.» Depuis, ce Valai-san a fondé etudiants.ch, site quirassemble une communauté estu-diantine en ligne. Soit un réseaude plus de 37 000 étudiants actifs,60 000 anciens et plus de500 entreprises. Il publie le magazine gratuit etu-mag, dont les 45 000 exemplairessont distribués dans les hautesécoles. Des inquiétudes pour la

Suisse, «ce cocon»? Le «nivelle-ment vers le bas» au secondairesupérieur. L’argent dépensé aumauvais endroit: «Nos hautesécoles sont équipées comme desparcs d’attractions luxueux, etl’encadrement manque.» Unrêve? La création d’un départe-ment fédéral de la jeunesse quiregrouperait l’emploi et la forma-tion. Ses projets? Promouvoir

schoolhelp.ch, pour en faire laréférence du soutien scolaire.Lancer la plateforme skool.ch, quirassemble les 13-18 ans.

L I U J U NL’HOMME QUI PARLE DE NOUSAUX CHINOIS

42 ans,correspondant

du Guangming Daily.

32 ans, fondateur et managerd’etudiants.ch.

A L E X H E R R E N «LA SUISSE EST UN COCON»

LES 100 ESPOIRS

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L’HEBDO 18 MAI 2006 LES 100

Leaders

58 ans, membre dela Direction généralede Swatch Group.

A R L E T T E - E LSA EMCHLA REINE DE LA MONTRE BIJOU

Cette ancienne journaliste licenciée en ethnologiea réussi une brillante carrière au sein de SwatchGroup, le leader mondial de l’horlogerie avec ses

18 marques et son chiffre d’affaires de 4,5 milliards defrancs en 2005. Arlette-Elsa Emch pilote non seulementles marques CK Watch & Jewelry Co. Ltd, DYB (Dress YourBody) et Léon Hatot, pour lesquelles travaillent quelque550 collaborateurs dont les emplois ont tous été créés cesdix dernières années, mais elle est aussi responsable desmarchés du Japon et de la Corée du Sud pour un groupedont elle est encore devenue un membre influent de ladirection générale. Née à Porrentruy avant de vivre la fièvre de la grandeépoque de la naissance du canton du Jura, Arlette-ElsaEmch aime que le monde bouge. Les défis, elle adore.Elle n’a pas hésité à foncer lorsque le groupe biennois acommencé à développer ses propres lignes de bijouterie-joaillerie. Que les jeunes se le disent! Il y a là un terreaud’emplois à l’avenir assuré dans des professions extrê-mement pointues. «Nous avons besoin de maîtresjoailliers, de sertisseurs manuels, de cadraniers, bref degens créatifs capables d’apporter du rêve et de la poésieà nos produits.» Arlette-Elsa Emch lance cet appel avectant de fougue et d’enthousiasme qu’on ne doute pasqu’il soit entendu.

PA R M I C H E L G U I L L A U M E

Chefs d’entreprise, politiciens, horlogers, banquiers, recteurs,

ils prennent les décisions qui font le quotidien des Romands.

Responsables dans leurs secteurs de compétences, ce sont eux

qui gèrent, administrent, développent le cadre de vie

économique, politique et social. Ils définissent ainsi

les conditions de la prospérité de la région.

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«Nousavonsbesoinde genscréatifscapablesd’apporterdu rêve et dela poésie à nosproduits.»

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9392 LES 100 LEADERS L’HEBDO 18 MAI 2006 LEADERS L’HEBDO 18 MAI 2006 LES 100

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REJ é r ô m e L a m b e r tLE LUXE INTERNATIONAL À LA VALLÉE DE JOUXPA R J U L I E Z A U G G

A n d r e a sK o o p m a n nLA FORCE TRANQUILLEPA R R O L A N D R O S S I E R

Andreas Koopmann semble aussi solidequ’une machine-outil du groupe vaudoisBobst, qui emploie près de 6000 collabora-

teurs. Il est fiable, sérieux, efficace, symbolisantle swiss made. L’entreprise basée à Prilly faitson bonhomme de chemin, encaisse les crisessouvent très fortes dans ce secteur industriel, et les traverse.Cet ingénieur de l’EPFZ, qui a complété ses étudestechniques par un MBA décroché à l’IMD de Lausanne, a parfaitement négocié tous les viragesde la globalisation. Il a su, à temps, investir enEurope, puis en Chine, en Inde, au Brésil. Avantde rejoindre Bobst à l’âge d’à peine 30 ans, il avaittravaillé dans ces obscures firmes industriellessuisses où la technique est érigée sur un piédestal:Bruno Piatti AG à Dietlikon et Motor Columbusà Baden. Après la «souriante» Argovie, le retoursur Vaud ce n’est que du pur bonheur. AndreasKoopmann a aussi œuvré, dans le New Jersey, au sein de la filiale américaine du groupe.Le Vaudois est également vice-président du conseild’administration de Nestlé, et siège au sein de Swissmem (fabricants de machines) etd’un conseil du Credit Suisse. Quant au conseild’administration de Bobst, il se féminise: le 3 maidernier, Maia Wentland Forte, spécialisée dans lagestion d’entreprise et vice-recteur de l’Universitéde Lausanne, a été nommée au sein de ce cénacled’industriels.

LE SYNDICALISTE INDISPENSABLE

Je ne peux guère faire plus d’élogesà un conseiller national que j’en feraisà Christian Levrat. Il est devenu le fer

de lance, éloquent, bilingue, proche de labase, qu’il faut au mouvement pour ladéfense du service public. Il conjugue aus-si bien que possible les arts complémen-taires de la lutte et du compromis. Il ani-me son syndicat avec rigueur et énergie.Et il a d’autres cordes à son arc; son expé-rience professionnelle par exemple lui adonné une solide expertise dans le domai-ne de l’asile. En plus, il a de l’humour etde la convivialité. Il a de beaux combatsdevant lui. La privatisation de Swisscom nelui résistera pas et, s’il le faut, il ira lui por-ter le fer jusqu’à Arena avec une efficacitéque ses contradicteurs savent déjà redou-table. Défendre avec des résultats concretsl’idée que les prestations d’intérêt généralet les économies de réseau ont plus d’ave-nir dans une logique de service public quedans celle du profit et du marché, c’est pos-sible, mais c’est difficile dans un contexteeuropéen où les élites pensent le contraire.L’alliance sur ce point entre monde syndi-cal et Parti socialiste, que Christian incar-ne, est la condition pour y arriver. Il en serale garant. Tout cela, c’est beaucoup pourquelqu’un qui est au Conseil national depuisdeux grosses années. Il a donc un sacré ave-nir. Il lui faudra, comme à nous tous, assezd’exigences envers lui-même pour conso-lider ses qualités sans s’émousser, sansperdre en capacité d’indignation ce qu’ilgagnera encore en savoir-faire. Je le lui sou-haite, mais surtout je nous le souhaite, par-ce qu’il est devenu indispensable.

Arrivé à la tête de Jaeger-LeCoultre en 2002, JérômeLambert dit avoir la pas-

sion des montres depuis l’en-fance. D’abord engagé commecontrôleur de gestion auprès dugroupe horloger, il reprendrapidement la direction desfinances, puis celle de lamanufacture du Sentier, tom-

bée dans l’escarcelle du groupe

Richemont en 2000. A 33 ans, àpeine six ans après son entréechez Jaeger-LeCoultre, JérômeLambert en devient le directeur,succédant à Henry-John Belmont,l’artisan de la remontée de lamarque. Il poursuivra l’œuvre deson ancien patron, confirmant larenaissance de la manufacture duSentier. Sous sa direction, l’entre-prise s’internationalise encore

davantage. Elle mise sur l’Asie, les Etats-Unis et le haut de gammepour dynamiser sa croissance.Avec ses 900 employés, Jaeger-LeCoultre fait partie des poidslourds horlogers, autant dire uneaubaine pour la vallée de Joux.Fort de ses excellents résultats,l’horloger cherche d’ailleurs àrecruter une quarantaine de collaborateurs supplémentaires.

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S T É P H A N I EF O N T U G N E

Stéphanie Fontugne mène,pour l’heure sans heurt, labarque – ou plutôt le paquebot

– des TPG (Transports publics gene-vois) depuis janvier 2005. Une mai-son qu’elle connaît depuis quatre ans:elle en était la directrice financièreen 2002. Cette Parisienne quadragé-naire dirige une entreprise en crois-sance. En termes d’effectif, les TPGregroupaient 1320 collaborateurs –dont une poignée de collaboratrices– en 2003 contre environ 1500 aujour-d’hui. Son objectif est clair: «Notre ambi-tion est de faire des TPG l’acteur prin-cipal de la mobilité durable dans larégion.» L’entreprise doit répondre àune mobilité accrue. Elle doit aussise préparer à une ouverture accruedu marché des transports publics.Comme directrice générale, elle sesoucie désormais davantage, à côté

des axes stratégiques, du volet res-sources humaines. «A ce poste, onapprend à être très humble.» Elle citedes mots comme «écoute» ou «cohé-sion», et se voit en «cheffe d’or-chestre». Pour motiver ses troupes,Stéphanie Fontugne peut aussi s’ap-puyer sur son parcours: formée engestion d’entreprise, elle a occupédivers postes à responsabilités dansdes secteurs industriels aussi diversque l’informatique, le textile, la phar-macie ou le tabac. En 2000, elle quit-te Paris pour Genève. Marque untemps d’arrêt dans sa vie profes-sionnelle, passe davantage de tempsavec ses trois enfants, peint, sculpte,et donne même des cours de gym-nastique. Un beau jour, elle revientaux affaires. En 2002, sur plus de 80 candidatures, c’est la sienne quiest retenue au poste de directricefinancière des TPG.

55 ans, président du directoire de Bobst Group.

OBJECTIF: RAYONNERPA R R O L A N D R O S S I E R

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37 ans,directeur

général de Jaeger-

LeCoultre.

36 ans, président du Syndicat

de la communication,conseiller national

fribourgeois(socialiste).

PA R P I E R R E - Y V E S M A I L L A R DC O N S E I L L E R D ’ É TAT VA U D O I S

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94 LES 100 LEADERS L’HEBDO 18 MAI 2006

PA R G E N E V I È V E B R U N E T

«Ce qui me motive le plus, c’est de créer avecmon équipe.» Peter Braunwalder se réjouitdu chemin parcouru depuis qu’il a pris la tête

de HSBC Private Bank (Suisse) en mai 2002. L’andernier, sa banque a enregistré une progression de35% des fonds sous gestion, désormais supérieursà 140 milliards. Et le nombre de collaborateurs aaugmenté de 9% pour atteindre 1929 personnes.Au titre de première banque étrangère en Suisse,ce Bernois préfère celui de «troisième banque enSuisse pour la gestion des fonds privés». Si l’onexclut les fonds institutionnels des avoirs sous ges-tion, son établissement se classe derrière UBS et le Credit SuissePrivate Banking pour la gestion de fortune. Une place que PeterBraun-walder entend consolider. Optimiste sur l’avenir du private ban-king, il estime que la sélection de produits et de gérants doit resterune compétence exercée depuis la Suisse. Et de préciser qu’il y a laplace dans la banque autant pour les amoureux des chiffres que pourles gens dotés de compétences sociales prêts à conquérir de nou-veaux clients à l’étranger.

A N D R É H A E M M E R L I

UN INDUSTRIELDANS SESMONTAGNESPAR GABRIEL SIGRIST

Né à La Chaux-d e - F o n d s ,André Haem-

merli reste attaché à sarégion. «J’apprécie sanature, son calme…pas ses impôts!».Il étudie d’ailleursla microtechnique àl’Université de Neu-châtel avant de partirauxEtats-Unis obtenirson doctorat. Sonexpérience profes-sionnelle, il l’accumule de retour en Suis-se, notamment chez Portescap, Pfizer,Nivarox-Far et Sulzer-Medica. Depuis2001, il dirige Johnson&Johnson à Neu-châtel, filiale du géant américain spécia-lisée dans la fabrication de matérielmédical, notamment des valves pour letraitement de l’hydrocéphalie. Dans lecanton, J&J emploie 250 personnes à Neu-châtel et 700 au Locle. «L’un des avan-tages de cette région vient du prixdes ter-rains et de l’infrastructure: nous occupons26 000 m2. Le même espace nous coûte-rait une fortune sur l’arc lémanique. Parailleurs, nous bénéficions d’allégementsfiscaux et d’une main-d’œuvre techniquequalifiée. Certes, ce n’est pas toujoursfacile de faire venir des cadres interna-tionaux pour travailler au Locle… «Ceuxqui ont l’habitude des grandes villes,notamment les Parisiens ou les Londo-niens, ont du mal. Ceux qui apprécientnature et sécurité s’installentvolontiers.»Pour André Haemmerli, les cantonsromands devraient uniformiser leurs pro-grammes scolaires. Il regrette l’absenced’une spécialisation en technologie médi-cale, et notamment un master en quali-té, dans les filières universitaires suisses.«A Neuchâtel, il manque aussi une éco-le internationale qui faciliterait la venuede cadres étrangers. Et bien sûr, il fautalléger les impôts, et introduire les for-faitsfiscauxpour lespersonnesphysiques,comme dans d’autres cantons.»

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Rare femme dans le milieu très mas-culin de la mécanique, Nicola Thi-baudeau fut pour cette raison très

médiatisée lorsqu’elle dirigeait Mecanexjusqu’en 2002. Mais elle a quasi disparu del’infosphère depuis qu’elle a pris la direc-tion de MPS, une petite entreprise biennoisede mécanique de précision. «Cela m’arran-ge bien, car la notoriété ne me sert plus àrien, dit-elle en riant. Avant, je m’en ser-vais pour faire du lobbying pour l’Agencespatiale européenne.»Discrètement, la Québécoise a énergique-ment redressé la barre de MPS, qu’elle areprise à la sortie d’une lourde restructu-ration. Depuis son arrivée, il y a trois ans,le chiffre d’affaires a doublé et devraitatteindre 36 millions en 2006. L’effectif estpassé de 145 collaborateurs, en janvier 2005,à 200 actuellement, répartis sur les sites de

Bienne et de Bonfol (JU). «Nous avons dumal à trouver des techniciens et des méca-niciens spécialisés, et nous sentons démar-rer une surenchère inquiétante dans larégion de Bienne.»MPS fabrique des roulements à billes de hau-te précision, ainsi que des micromoteurset des systèmes mécaniques miniaturisésdestinés à l’automation, à l’horlogerie ou àdes applications médicales. «La Suisse a long-temps eu le problème de former, notam-ment à l’EPFL, des ingénieurs trop acadé-miques, éloignés de la réalité technique etconcrète des entreprises. Heureusement,cela s’est beaucoup amélioré ces dernièresannées.» En début d’année, Nicola Thibau-deau s’est installée à Neuchâtel avec son mariet ses deux garçons. «A la maison aussi, jesuis entourée d’hommes. Je suis mieux avecles mecs, c’est ma personnalité qui veut ça.»

N I C O L AT H I B A U D E A U

45 ans, directrice

de MPSà Bienne.

55 ans, prési-dent et ChiefExecutive Offi-cer de HSBCPrivate Bank(Suisse) SA.

SOLEIL QUÉBÉCOIS DANS UN MONDE D’HOMMESPA R G A B R I E L S I G R I S T

PA R E R I C F E L L E Y

C’est en 2001 que Jean-Pierre Morand, de Marti-gny, fils de Louis Morand,

célèbre grâce à son eau-de-viede poire, la Williamine, a reprisles rênes de la société Téléver-bier, cotée à la Bourse de Paris.Avec Les Quatre Vallées, l’en-treprise valaisanne propose leplus grand domaine skiable deSuisse pour 45 millions dechiffre d’affaires. La sociétémise sur un important déve-loppement avec un complexeimmobilier à Verbier et un vil-lage de vacances à Brusonconstruit par la société inter-nationale Intrawest (entre 200et 300 millions d’investisse-

ments). Téléverbier se confondaujourd’hui avec Verbier, où lesprix du terrain ont pris l’as-censeur, à tel point qu’ils sontaussi élevés qu’à Paris. Jean-Pierre Morand est un Valaisanen exil, installé à Genève, oùil s’est spécialisé dans le droitdu sport. Last but not least, ilmonnaie ses bons offices à l’or-ganisation de la Coupe del’America à Valence dans lesillage du Team Alinghi.

LA LOI DU SPORT

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53 ans, directeurgénéral de John-son&Johnsonà Neuchâtel.

P e t e rB r a u n w a l d e r«NOUS AVONS TRANSFORMÉ CETTE BANQUE»

Le Vin Suisse, toujours une découverte

Le 12 février 1541, Orellana part de Quito avec Gonsalo Pizarro à la conquête de l’Eldorado. Sur son chemin, il découvre

l’Amazone

Sur une terrasse à Sion, Jacques et Sylvie découvrent le caractère charnu, solidement charpenté et complexe de la

SyrahAOC Valais

L'inlassable vitalité du végétal que domestique la main de l'homme a trouvé dans la Syrah unaccomplissement généreux. Elle s'y décline dans un cépage puissant, serpenté d'arômes, d’épices et de baies noires avec des tanins réglissés.

www.vinsduvalais.ch

A D É G U S T E R A V E C M O D É R A T I O N .

47 ans, avocat, président du CAde Téléverbier.

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9796 LEADERS L’HEBDO 18 MAI 2006 LES 100

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J e a n - F r é d é r i cJ a u s l i nPÈRE DE MÉMOPOLITIQUEPA R I S A B E L L E FA L C O N N I E R

Après quatorze ans passés à la tête de la Biblio-thèque nationale Suisse à Berne, qu’il a réor-ganisée, agrandie et fait entrer dans la moder-

nité numérique, Jean-Frédéric Jauslin succède enavril 2005 à David Streiff à la direction de l’Office fédé-ral de la culture.Depuis, il s’attaque en manager de la culture aux dos-siers prioritaires que sont la modernisation du Muséenational, la loi sur l’encouragement de la culture, laloi sur les langues ou la coordination des institutionsculturelles au sein de la Confédération.

Né au Locle en 1954, habitant d’Auvernier, ce féru dejazz et de musique classique, docteur en informa-tique, inventeur du mot «mémopolitique», soit la poli-tique de la mémoire, lorsqu’il a créé en 1995 Memo-riav (Association pour la sauvegarde de la mémoireaudiovisuelle), est persuadé qu’«être un manager,c’est régler les problèmes, qui sont en grande majo-rité des problèmes humains».La culture, créatrice d’emploi? «Evidemment! La cul-ture et l’économie sont indissociables et doivent dia-loguer plus. Dans la conservation du patrimoineconstruit, lorsque l’Etat investit 1 franc, ce franc génè-re pour 8 francs de travail? C’est l’un des meilleursrapports que l’on puisse avoir. La culture devientun facteur de société prépondérant. Quant au tou-risme, c’est indiscutable: il dépend étroitement del’offre culturelle. Le tourisme urbain est exclusive-ment culturel. La Suisse romande n’a pas encore com-plètement compris cela.»

PA R A L E X A N D R E Z E L L E R ,P R É S I D E N T D E L A D I R E C T I O N

G É N É R A L E D E L A B C V

Si Reitzel est aujourd’huil’un des fleurons de l’indus-trie agroalimentaire suisse,

c’est bien grâce à Bernard Poupon.Issu d’une famille dont le nom estlié de près à l’excellence françaisedans le domaine, il a su faire fructi-fier l’alliance de la tradition hexa-gonale et de la rigueur helvétique.Du commerce des denrées colo-niales mené par Hugo Reitzel audébut du siècle, l’entreprise d’Aigleest passée numéro un dans le cor-nichon en marque distributeur(supermarchés, etc.) et en restaura-tion sur les marchés suisses etfrançais. Le groupe mené par Ber-nard Poupon est désormais un véri-table exemple de réussite dans un

domaine où la concurrence mon-diale est des plus rudes. Maisl’homme a sa vision. Il a comprisqu’il est essentiel pour une entre-prise de se construire une stratégiequi tienne compte de la donnemondiale plutôt que de compter surla pérennité hypothétique d’unprotectionnisme dépassé. C’est ain-si que le groupe franco-suisse pos-sède des ramifications en Espagne,en Roumanie, en Turquie et, depuisl’an dernier, en Inde, où Reitzelpeut assurer, dans les meilleuresconditions climatiques, la produc-tion de cornichons adaptés en tailleet en qualité à la demande du mon-de entier. En Suisse, où se concen-trent les emplois à valeur ajoutée,Bernard Poupon récolte certesencore quelques cornichons, maisaussi des prix d’excellence enentrepreneuriat.

PA R R O L A N D R O S S I E R

A ce rythme, la Suisse romande n’aurabientôt presque plus à rougir par rapport àBâle, dans le secteur des sciences de la vie.

La compagnie d’origine scandinave Ferring – quiconstruit un nouveau site à Saint-Prex – estl’exemple même du type d’entreprise à attirerdans ce coin de pays. Et Michel Pettigrew, directeur opérationnel de ce groupe pesant plusd’un milliard de francs de chiffre d’affaires et employant 2700 personnes, estle portrait même du cadre international dont rêve tout directeur de promo-tion économique. Ce Canadien bilingue a été embauché chez Ferring en 2001.Fiscalité douce, infrastructures efficaces, position centrale en Europe: pourMichel Pettigrew, tous ces éléments ont joué leur rôle dans la décision d’im-plantation. Les jobs suivent: d’ici à fin 2008, il pense pouvoir employer envi-ron 360 salariés. Des professionnels qu’il trouve sans peine dans la région:«Nous y avons recruté du personnel de qualité sans aucune difficulté.»

R O B E R TC R A M E R

52 ans, président-directeurgénéral de Reitzel.

52 ans, directeur de l’Office fédéral de la culture.

PROFESSION: ARBITRE DE GENÈVEPA R R O L A N D R O S S I E R

Il boit encore du petit-lait, le conseiller d’Etat écolo Robert Cramer, aprèssa brillante réélection au gouvernement genevois, en novembre 2005.Avec son pote David Hiler, les deux magistrats Verts ont le poids politique

nécessaire pour faire la pluie et le beau temps à Genève, entre les socialistes etle camp bourgeois. Mais la période de grâce est en train de s’achever. La dettegenevoise est comme un socle tellement dur à bouger. Et le canton resteembourbé dans sa crise du logement.Si Robert Cramer est toujours l’homme du RER genevois, et si sa bonhomie luipermet de tisser les indispensables liens avec les élus français de la région, resteà connaître sa capacité à tirer en avant l’ensemble du gouvernement afin derésoudre, en plus des questions du logement et des finances publiques, le grosproblème qui plombe Genève: l’emploi. Avec un taux de chômage de 7%, le canton détient toujours ce triste record national.Aussi attachant que farouche indépendant, l’ancien scout et amateur depétanque Robert Cramer doit désormais mieux fédérer les énergies locales. Etdégager les priorités. A quand l’annonce de l’arrivée de nouvelles entreprisesd’importance à Genève? Dans ce domaine, le canton est à la traîne…

En la personne de Pascal Cou-chepin, la Suisse a, sur le papier,un ministre de l’Education.

Mais dans les faits, la formation obli-gatoire étant de compétence canto-nale, la toute nouvelle présidente dela Conférence des directeurs canto-naux de l’instruction publique(CDIP), aura un rôle prépondérantà jouer dans ce qui est devenu uneobsession des élites suisses: amélio-rer la qualité du système de forma-tion. Première femme à occuper ceposte de coordination de l’action descantons, la conseillère d’Etat fri-bourgeoise saura donner les impul-sions nécessaires.Parfaite bilingue, née à Granges-Pac-cot de mère autrichienne, juriste deformation, rodée comme peu deconseillers d’Etat aux subtilités de laBerne fédérale où elle a conseillé suc-cessivement Arnorld Koller et RuthMetzler, Isabelle Chassot à les idéesclaires sur la création d’emplois et lerôle que le système éducatif doit jouer

en amont: maintenir une économiediversifiée avec des emplois à hautevaleur ajoutée, mais aussi de proxi-mité; développer les compétencesparticulières de la Suisse et, notam-ment, la gestion de la multiculturali-té; encourager les filles à s’intéresserà des filières moins traditionnelles(elle-même raconte volontiers s’êtreoffusquée qu’un camarde de classes’étonne qu’elle ait envie de faire desétudes); enfin ne pas redouter de s’ex-patrier, non pas parce que la Suisse nefournirait pas assez de places de tra-vail, mais parce que«les expériencesprofessionnelles acquises dans uneautre région linguistique ne peuventqu’être encouragées».La démocrate-chrétienne, qui n’a passouhaité briguer la succession Deiss,devrait être réélue sans difficultés cetautomne au Conseil d’Etat. Agée de 41ans, elle a tout le temps d’attendre quele Conseil fédéral soit devenu un lieude pouvoir plus constructif selon lesvaleurs qu’elle souhaite défendre.

41 ans, conseillère d’Etat

fribourgeoise(PDC).

B E R N A R D P O U P O NDE L’EXCELLENCE DES CORNICHONS

I S A B E L L EC H A S S O TMINISTRE SUISSEDES ÉCOLESPA R C H A N TA L TA U X E

53 ans, directeur opéra-tionnel chez Ferring.

M i c h e l P e t t i g r e wPOUSSE DANS LA PHARMA D

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DR

LES 100 LEADERS L’HEBDO 18 MAI 200652 ans,conseillerd’Etatgenevois(vert).

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9998 LES 100 LEADERS L’HEBDO 18 MAI 2006 LEADERS L’HEBDO 18 MAI 2006 LES 100

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P a s c a lB r o u l i sLA VICTOIREDES PETITS PASPA R T I T U S P L AT T N E R

Il n’est ni spectaculaire ni fort engueule. La méthode de PascalBroulis, c’est les petits pas, les

un-tiens-vaut-mieux-que-deux-tu-l’au-ras, les doses homéopathique, mais qui,ensemble, auront été un vrai remède decheval. Après quinze ans de déficits, lecanton de Vaud vient de renouer avecles chiffres noirs. La dette publique esten passe de retrouver un niveau accep-table. Ministre des Finances depuismars 2002, Pascal Broulis, 41 ans, aimeles chiffres: il faut dire qu’il était promisà une belle carrière dans la banque.Mais il a aussi une attention réelle pourles personnes qui sont touchées par sesdécisions. Fils d’immigré grec contrô-leur chez Hermes Precisa à Sainte-Croix,il rappelle sans cesse ne pas oublierd’où il vient. Pascal Broulis est un radi-cal humaniste. C’est peut-être là sonplus grand handicap, lorsqu’il s’agira detrouver un successeur à Pascal Couche-pin. Le ministre vaudois des Financessera-t-il jugé sur l’étiquette (un tendre)ou sur les faits (un excellent gestion-naire)?

PA R R O L A N D R O S S I E R

Des mots simples, quivont droit au cœur.«C’est gentil de penser

à moi, mais il existe des tas degens qui sont meilleurs quemoi.» Et Rolland-Yves Mau-vernay, fondateur du groupepharma vaudois Debiopharm,désigne du menton les deux

Fondée en 1893, L’Eco-le hôtelière de Lausan-ne est «probably the

most prestigious hotel schoolin the world», comme l’écri-

vait avecune sobre assu-rance anglo-saxonne le

Financial Times, il ya tout juste deuxans. Mais le titre

commence à êtredisputé. L’Universi-

té de Cornell, aux Etats-Unis, l’Ecole hôtelière deLa Hague, auxPays-Bas,prétendent au mêmeniveau d’excellence. Ils’agit donc de ne pasdéchoir. Ruud Reuland,

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56 ans, directeurde l’Ecole hôtelièrede Lausanne.

qui a repris la direction de l’éta-blissement lausannois en 2002,vient justement de l’école concur-rente hollandaise, où il occupaitla fonction de doyen.Son arrivée à Lausanne ne s’estpas faite sans remous. Succé-dant au Valaisan Maurice Zuffe-rey, qui avait fait exploser leseffectifs en passant, enquelques années, de 700 à 1200étudiants, Ruud Reuland a eu lacharge de stabiliser l’école etd’en garantir le niveau de quali-té, tout en l’intégrant au réseaude la HES-SO. Homme à poigne,c’est ce qu’il a fait, n’hésitantpas à limiter le nombre d’étu-diants pour augmenter leur

niveau, ce qui l’a conduit àlicencier 7 enseignants l’autom-ne dernier.Reste une école extraordinaire-ment internationale, où, sur1450 étudiants, une petite moitié(48%) sont Suisses, tandis queles autres proviennent de87 pays, et où la moitié descours sont donnés en anglais.Voilà pour le haut du panier destop managers. Pour les autres,l’Ecole hôtelière de Lausanne apassé des accords de formationavec des établissements àDubaï, Beyrouth, Mexico ouNew Delhi. Et même avec Pékin,pour préparer les structuresd’accueil des JO 2008.

À LA TÊTE DU PHAREDE L’HÔTELLERIEMONDIALE

PA R G E N E V I È V E B R U N E T

Première femme à intégrer le collège des associés d’unbanquier privé suisse, Anne-Marie de Weck n’a pas com-mencé sa carrière dans la banque. Avocate de formation,

elle a d’abord travaillé comme juriste avant de devenir associéede KPMG-Fides Suisse. Une activité moins éloignée qu’il n’yparaît de sa fonction actuelle de responsable de la clientèle pri-vée chez Lombard Odier Darier Hentsch & Cie: «J’ai toujourstravaillé dans un environnement de partnership, en étant assezproche des clients privés.»Une clientèle qui entretient avec son banquier des rapportscomparables à ceux qui se nouent avec un médecin: «L’essen-tiel de mon activité consiste à accompagner des personnesdans leur projet de vie, en les aidant à trouver les meilleuressolutions pour conserver, faire fructifier et transmettre leurpatrimoine.» En toute discrétion. Une des qualités essentiellesde ce métier qui contraint à ne pas pouvoir en partager lesaspects les plus passionnants en famille ou avec des amis.A la tête d’une division de plus de 300 personnes, en comptantles activités de support, Anne-Marie de Weck tente de répartirson temps entre «60% de management et 40% de contactsavec les clients».Optimiste à propos de l’avenir économique de ce pays, elle sou-ligne que, dans son domaine, «la capacité de sélectionner lesmeilleurs produits financiers doit rester en Suisse». Les étu-diants d’ici ont accès à une formation de qualité, «notammentdans les écoles polytechniques». Et il ne tient qu’à eux de pro-fiter des possibilités qui leur sont offertes d’effectuer une partiede leur cursus à l’étranger.

41 ans, chef du Départementdes finances, président du gouverne-ment vaudois (radical).

PA R A L A I N

R E B E T E Z

«MON FILS ME SURPASSE»

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R o l l a n d - Y v e sM a u v e r n a y

proches collaboratrices quisont dans son bureau. Il estcomme ça, et rien ne pourra lechanger. «Mon fils Thierry mesurpasse. Trop de responsablesd’entreprise ne veulent pasengager des gens qui leur sontsupérieurs. Ils commettentune erreur. Si j’ai un conseil àdonner aux cadres et aux diri-geants, c’est d’aller chercherdes jeunes plus capables. Cesont les jeunes qui sont garantsde l’avenir.» L’œil vif, le fon-dateur de cette compagnie quis’est spécialisée dans le déve-loppement de produits phar-maceutiques – sans activité derecherche ou de production –

ajoute: «J’ai aussi appris àaccepter l’échec. Le mot réus-site est trop fragile, trop super-ficiel. La réussite ne dure quele temps d’une rose.» Pourtant,Rolland-Yves Mauvernay peutêtre fier de lui: son groupe,situé à Lausanne, chemin Mes-sidor, dans les anciens bureauxdu négociant André, aujour-d’hui failli, occupe environ300 collaborateurs. Et assureses investissements sansles béquilles des banques.Debiopharm est une sociétéfamiliale fondée en 1979:Thierry, le fils, et Hermine, lafille, y occupent des respon-sabilités.

83 ans,président

du groupeDebiopharm.

51 ans,associé-gérantde LombardOdier DarierHentsch.

DR

A n n e - M a r i ed e W e c k

«SOUTENIR DES PROJETS DE VIE»

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101100 LES 100 LEADERS L’HEBDO 18 MAI 2006 LEADERS L’HEBDO 18 MAI 2006 LES 100

JÜR

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Cinquante-six ans, 1 m 90,160 kilos. Premier Vert, touspays confondus, à avoir

été élu dans un Parlementnational. C’était en 1979. Pre-mier Vert suisse, c’était en2001, à avoir accédé à la pré-sidence d’une grande vil-le, où il vient d’être brillam-ment reconduit. A coup sûr,le plus populaire des politi-ciens vaudois, coté si haut quel’on parle souvent de lui com-me du «huitième conseillerd’Etat vaudois». En plus,un art de maîtriser lesdossiers les plus dif-ficiles et les plusdélicats, qui en faitun candidatpresque incontour-nable, au cas où lesVerts suisses déci-deraient de tenterleur chance pour leConseil fédéral.Mathématicien deformation, syndic de Lau-sanne et député au GrandConseil, Daniel Brélaz est

convaincu que les technologies de l’en-vironnement et de l’énergie «vont être

la grande source des emplois dedemain».Un domaine où la Suisse était enpointe dans les années 80, mais

où elle a été rattrapée, «faute d’unsoutien suffisant des milieux éco-nomiques». Fort heureusement,rien n’est perdu. Autour de l’EP-FL et de l’IMEDE, la région lau-sannoise s’est constitué un pôled’excellence de «start-up prêtes

à occuper tous les nouveaux cré-neaux».

Daniel Brélaz imagine aussice qu’il appelle des

«ricochets» sur l’industriedu bâtiment. La haussedu prix du pétroleaidant, il y aura «redé-ploiement pour unparc immobilier qui

consomme moinsd’énergie».

56 ans, syndicde Lausanne

et député au Grand Conseilvaudois (vert).

C L A U D E H A U S E R

C’est dans une halle industriellede 130 mètres de long, 60 mètresde large et 15 mètres de haut à

Bienne que Beat Bolzhauser dirige uneéquipe en lutte contre la concurrencepolonaise et chinoise. La trajectoire deStadler Stahlguss est de celles que Nico-las Hayek applaudit, tant elle représenteun cas extrême de la «nécessaire ré-industrialisation de la Suisse» qu’il necesse de promouvoir. La fonderie s’appe-lait Swiss Metal Casting jusqu’à sa failli-te en 2004. C’est là qu’un entrepreneurcourageux (Peter Spuhler de Stadler Rail)a engagé Bolzhauser,43 ans, manager avec une formationd’ingénieur, lui confiant la tâche derecomposer l’équipe et d’investir 12 mil-lions de francs pour faire rugir à nou-veau les fours et les chaudières et revivrela grande halle. Démonstration qu’il estencore possible, en misant sur la qualité,la précision et l’innovation, de tenir têteà des concurrents qui paient des salairescinq fois plus bas, même dans une activi-té de masse comme la fonderie. StadlerStahlguss est une petite entreprise, et lepari n’est pas encore gagné. Mais si laSuisse veut conserver un tissu industrieldynamique, l’expérience de Bolzhauser,ce patron moderne d’une industrieancienne, est de celles à observer avecattention.

Parce qu’il est naturellement attaché àses racines et à son passé, on pensevolontiers du monde agricole qu’il

n’est pas forcément, dans notre pays, ungrand producteur de visionnaires. Willy Geh-riger est la preuve vivante du contraire. Pré-occupé depuis près de vingt ans du futur del’agriculture suisse, cet ingénieur agronomea commencé par réunir les paysans suissesautour d’une entité économique qui leur apermis de s’adapter, en douceur, aux chocssuccessifs de la mondialisation dans ledomaine agricole. Il en a fait une success sto-ry inespérée puisque aujourd’hui, fenaco estun groupe puissant et profitable qui affiche

un chiffre d’affaires de quelque 4 milliardsde francs et propose près de 7000 emplois.Mais sa vision, Willy Gehriger ne l’affichepas que dans la réussite de fenaco. Il compteparmi ceux qui, avant tout le monde, ont vu leparti à tirer de la carte agricole dans labataille essentielle de notre siècle naissant:celle de l’énergie. Lorsqu’on l’entend parleravec passion de la transformation du colza enbiocarburant, on se dit que l’agriculture suis-se, si elle ne manque plus de bras depuislongtemps, s’est pourvue de têtes bien faites.

Depuis l’an 2000, c’est un Romand quidirige le plus grand groupe de distri-bution de Suisse, la Migros, 20 milliards

de chiffre d’affaires, 80 000 collaborateurs.Claude Hauser, 64 ans, a réussi à se hisser àla plus haute marche par un concours decirconstances et par sa bonne gestion de lafédération genevoise: «Migros est une entre-

prise basée en Suisse alémanique et la Suis-se romande y est peu représentée, mais lasensibilité romande doit y exister.»Claude Hauser se veut un «médiateur»,notamment entre les grandes fédérationsalémaniques. Il représente l’entreprise dansle Food Business Forum, organisation faî-tière internationale des grands groupes dedistribution. Il en est même le président pourcette année encore: «Nous comptons 175membres, dont tous les plus gros distribu-teurs du monde. Et c’est un Suisse qui tientla baguette de cet orchestre!» rigole-t-il.

Si Claude Hauser a la vision macroécono-mique de la branche, il sait aussi aller dansle détail. D’un pays à l’autre, il va sur le ter-rain pour repérer les innovations. Et si cer-tains peuvent penser que, à 64 ans, il est déjàsur le départ, il répond avec enthousiasme:«La retraite pour les membres du conseil estfixée à 70 ans. C’est un job fabuleux, unechance incroyable de faire ce métier. Noustouchons aux besoins physiologiques desgens, au plaisir de bien manger. Je peuxapporter des choses importantes et une com-plémentarité qui est ma valeur ajoutée.»

64 ans,président du conseil

d’administrationde la Fédération des coopératives

Migros, Zurich.

W i l l y G e h r i g e r

VISIONNAIRE AGRONOMEPA R O L I V I E R S T E I M E R , P R É S I D E N T D U

C O N S E I L D ’ A D M I N I S T R AT I O N D E L A BCV

54 ans, président de la direction de fenaco.

43 ans, CEO de Stadler Stahlguss Bienne.

D A N I E L B R É L A ZLE PLUS MÛR DE TOUS LES VERTSPA R P I E R R E - A N D R É S TA U F F E R

B e a tB o l z h a u s e rTENIR TÊTEAUX CHINOISPA R B R U N O G I U S S A N I

MONSIEUR MIGROSEST GENEVOISPA R E R I C F E L L E Y

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103102 LES 100 LEADERS L’HEBDO 18 MAI 2006

CHRISTIAN LUTZ

SAGESSEPRÉSIDENTIELLEPA R PA U L A C K E R M A N N

En 2002, les socialistesjurassiens cherchent unefemme pour conquérir un

deuxième siège socialiste auxcôtés du sortant Claude Hêche.Hésitante, Elisabeth Baume-Schneider accepte le défi. «Il fautdire que personne n’y croyaitvraiment», se rappelle son fidèlesoutien d’alors, Nathalie Bar-thoulot. Mais le peuple choisitcette riante Franc-Montagnar-de, accessible et compréhensive.La toute jeune ministre jurassiennede l’Education commence alors sonpremier mandat par une rupture decollégialité. Aujourd’hui, ElisabethBaume-Schneider est présidente ettrois ans de pouvoir exécutif l’ont renduesage. «Il ne faut pas perdre son âme,explique-t-elle. Mais contribuer àla construction d’un projet com-mun.» Car, si elle revendique «undébat animé», elle veut qu’il soit«intellectuellement décent».Autrement dit, elle se bat pour unsystème éducatif fort et accessibleà tous, mais quand les villages seplaignent que l’école leur coûte tropcher tout en refusant toute fermeturede classe, elle tique. Et, désormais, ellese résout à supprimer ces classes dequatre, cinq ou six élèves: «Ellescoûtent trop cher et, pédagogique-ment, je ne crois pas que l’on aidedes enfants à se socialiser dansde si petits groupes.»A la fin de l’année, avec lesdéparts de Jean-François Roth etde Gérald Schaller, au moins deuxmembres du gouvernement serontà leur tour de petits nouveaux,idéalistes et vindicatifs. Et en casde réélection, la jeune Franc-Mon-tagnarde fera, elle, partie desanciens. A elle d’enseigner l’art dela sagesse aux jeunes premiers.

E l i s a b e t hB a u m e - S c h n e i d e r

MONSIEUR FUSIONPA R T I T U S P L AT T N E R

Pierre Weiss est un Janus. Il y a d’abordle côté face, farceur, plein d’autodéri-sion et toujours prêt à dégainer une

bonne blague assassine; et puis il y a le côtépile, l’homme froid et méthodique, incisif,avec un bataillon d’arguments chiffrés pourdénoncer tel ou tel gaspillage de l’Etat. Entréau Grand Conseil genevois en 2001, très bienréélu en 2005, chef du groupe libéral, PierreWeiss y est à la fois craint et respecté. Si l’onajoute à cela sa fonction de directeur de la

communication de la Fédération des entre-prises romandes et celle de «taupe dedroite» au sein du département de socio-

logie de l’Université de Genève, où il estchargé de cours, on comprend pourquoi

il est l’une des (rares) figures incontour-nables de la droite genevoise. L’an dernier,lorsque la presse lui a demandé s’il était can-

didat au Conseil d’Etat, il a préféré être lepremier à déclarer très officiellement sa can-

didature au Conseil national, en octobre 2007.Cela le fait rire encore aujourd’hui.Depuis une année, Pierre Weiss est aussi res-ponsable politique de l’Union libérale-radi-cale (ULR), qui, à terme, devrait mener à lafusion entre les deux formations. Seulement,

si elle a su s’épanouir au niveaufédéral, l’ULR est à la peinedans les cantons de Vaud,Genève, Bâle ou Neuchâtel.«C’est vrai, reconnaît PierreWeiss, il peut arriver que nous fas-sions un pas en arrière pour deuxpas en avant.» Depuis quelquesmois, on a plutôt l’impres-sion que c’est l’inverse: unpas en avant et deux pas enarrière. Le Genevois sau-ra-t-il recoller les mor-ceaux le 10 juin àDelémont, lors dela prochaineg r a n d eréunion del’ULR?

P I E R R E W E I S S

PÈRE DE LA T-TOUCHPA R A L A I N R E B E T E Z

Sa conviction, c’est qu’il n’y a pas d’avenirpour l’horlogerie suisse sans le moyen degamme: «Un boulanger fait du pain tous

les jours, et du gâteau seulement le dimanche»,explique ce Français originaire de Franche-Com-té, avec cette spontanéité joviale qui est un traitdu personnage et qui tranche sur les attitudesvolontiers pisse-froid de la branche. Or le roi dumoyen de gamme en Suisse, c’est lui, patron de lamarque Tissot, au sein du groupe Swatch, dont ila pratiquement triplé les ventes depuis son arri-vée au Locle, en 1996, passant de 840 000montres à plus de deux millions.Dans la renaissance de l’horlogerie suisse, entrele triomphe high-tech de la Swatch bon marché etle prestige gonflé de tradition de la montre deluxe, le milieu de gamme a longtemps peiné,comme s’il n’était rien, n’étant ni l’un ni l’autre.François Thiébaud a changé cela, donnant uneidentité à la marque et lui assurant même un

triomphe, avecl’apparition de laT-Touch.Cette montre tacti-le, bourrée defonctions que l’oncommande dudoigt sur lecadran, est néed’un conseil dedirection élargi dugroupe Swatch, en1997. Des cher-cheurs du groupeétaient venus présenter la technologie tactile,François Thiébaud a levé la main et emporté lemorceau. Cela a débouché sur le produit phare dela marque, qui fait blêmir d’envie la concurrenceasiatique. Cet automne, d’ailleurs, Tissot sera lechronométreur officiel des Jeux d’Asie, au Qatar.Aurea mediocritas, disait Horace. La médiocrité –au sens de position moyenne – est décidémentprécieuse…

F r a n ç o i s T h i é b a u d

Il occupe peut-être la position poli-tico-diplomatique la plus sensible etla plus influente à laquelle un Suisse

peut accéder: la présidence du Comitéinternational de la Croix-Rouge. Et il s’ap-plique à y cultiver une discrétion savam-ment dosée. «Il faut savoir choisir si l’onveut avoir de l’influence ou être présentdans les médias», explique sentencieu-sement Jakob Kellenberger.Cette option d’influence dans la discré-tion, bien dans la tradition du CICR, n’apas empêché Jakob Kellenberger de grim-per en première ligne, et parfois en pre-mière page. En décembre dernier, en arra-chant la reconnaissance internationale ducristal rouge – le nouvel emblème recon-nu, aux côtés de la croix et du croissant –il trouvait une solution à un ancien et dif-ficile différend avec Israël.Mais c’est surtout depuis l’intervention

américaine en Afghanistan, l’ouverture de la prison de Guantanamo, puis l’inter-vention en Irak, qu’il s’est mis en évidencecomme défenseur du droit internationalsur les prisonniers de guerre. A plusieursreprises, depuis plus de deux ans, parpetites touches discrètes mais opiniâtres,il a dénoncé le principe des détentionssecrètes ou les méthodes d’emprisonne-ment pratiquées par les Américains. Et cela sans jamais rompre avec l’adminis-tration Bush, malgré des critiques parfoistrès violentes émanant des milieux répu-blicains.De la très haute diplomatie, digne de cetancien secrétaire d’Etat aux Affaires étran-gères, proeuropéen convaincu, fils decommerçant appenzellois et qui a com-mencé sa carrière, il y a quarante-cinqans, par un simple apprentissage de com-merce.

J A K O BK E L L E N B E R G E R

L’INFLUENCE DISCRÈTEPA R A L A I N R E B E T E Z

42 ans, présidente du gouvernementjurassien (socialiste).

LEADERS L’HEBDO 18 MAI 2006 LES 100

61 ans,président du CICR.

59 ans, patron de Tissot,au Locle.

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54 ans,responsable politique del’Union libérale-radicale,chef du groupe libéral auGrand Conseil genevois.

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104 LES 100 L’HEBDO 18 MAI 2006

Penseurset scientifiques

55 ans, médecin-chefdu service clinique

d’oncologie du CHUV.

SERG E LEY V R A ZL’ONCOLOGIE SOUS TOUTES SES FORMES

Vaudois de souche, Serge Leyvraz s’est toujourspassionné pour l’oncologie. C’est parce qu’il s’af-firme «typiquement clinicien» que ce médecin a

participé à la création du Centre coordonné d’oncologieambulatoire au CHUV qui réunit «toutes les compétencesthérapeutiques autour du patient».Aujourd’hui, il dirige le service clinique d’oncologie del’hôpital vaudois, qui prend aussi en charge les patientshospitalisés. Une lourde charge, qui n’a toutefois pasempêché le clinicien de se lancer dans la recherche, endéveloppant «l’immunothérapie cellulaire». Ce traite-ment original, qui vise à aider le malade à mobiliser sonsystème immunitaire contre les cellules malignes, faitactuellement l’objet d’essais cliniques prometteurs.Mais Serge Leyvraz n’était pas homme à s’arrêter en sibon chemin. Il prend actuellement une part active à lacréation d’un Centre du cancer. Une structure aux objec-tifs fort ambitieux et dont il n’existe pas d’équivalent enSuisse. Jugez plutôt: créée sous les bons auspices duCHUV, de l’UNIL, de l’Institut Ludwig, de l’ISREC et del’EPFL, elle réunira toutes les forces du canton de Vaud enla matière. Avec pour objectif de «faire interagir l’en-semble des cliniciens, des chirurgiens aux radiologues»,et de leur permettre de collaborer, plus étroitement encore que par le passé, avec les chercheurs. Ce centre,dont Serge Leyvraz dirigera le volet clinique, devrait êtremis en place à la fin de 2006.

PA R E L I S A B E T H G O R D O N

La Suisse occidentale fourmille de chercheurs

aussi talentueux qu’inconnus du grand public.

Pour la seconde édition du Forum des 100, « L’Hebdo»

distingue ceux qui assurent à la place scientifique romande

un rayonnement bien au-delà des frontières,

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Il prendune partactive à la créationd’un Centredu cancer,unestructuredont iln’existepas d’équi-valenten Suisse.

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107106 LES 100 PENSEURS L’HEBDO 18 MAI 2006 PENSEURS L’HEBDO 18 MAI 2006 LES 100

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BIOLOGISTE ET PDGPA R E L I S A B E T H G O R D O N

Sa voie semblait toute tracée. Aprèsdes études de pharmacie et de phar-macologie en Allemagne, son pays

d’origine, puis une formation postdoctoraleaux Etats-Unis, Andrea Pfeifer aurait pupoursuivre une brillante et traditionnellecarrière de biologiste. Mais les travauxpurement académiques n’étaient pas pourelle. Ce qui la motive, c’est de «pouvoir uti-liser les résultats de la recherche pour ima-

giner des produits et créer de la valeur».Pari tenu. Après avoir complété son bagagescientifique par une formation en gestionet en management, elle se retrouve direc-

trice du Centre de recherche de Nestlé. Placée à la tête d’un groupe de quelque600 personnes, elle est d’ailleurs à l’origi-ne du yaourt LC1, «le premier produit ali-mentaire ayant des effets favorables sur lasanté», souligne-t-elle avec fierté.«C’est dans mon caractère d’être entrepre-neuse», affirme Andrea Pfeifer. En 2003,elle passe à l’acte et participe à la créationd’une start-up, AC Immune, qui se spécia-lise dans la mise au point de traitementscontre la maladie d’Alzheimer. Dans ce secteur porteur, l’entreprise développe desmédicaments originaux, dont les essais cliniques vont bientôt démarrer. Avec un telprogramme, la PDG a réussi à lever 24 mil-lions de francs. Trois ans après sa création,l’entreprise est en croissance et elleemploie treize personnes.

R I C H T E R E T D A H L R O C H AUNE ALCHIMIE LATINO-HELVÉTIQUE

Des logements, des bureaux,un bâtiment d’entretien pourles CFF, un refuge dans le Jura

ou la rénovation du siège de Nestlé,leurs réalisations sont aussi multiplesque diverses et jalonnent, notam-ment, le paysage architecturalromand. Jacques Richter et IgnacioDahl Rocha viennent en outre de ter-miner l’extension de la clinique LaPrairie à Clarens et le nouveau res-taurant et Centre de recherche del’IMD à Lausanne. L’un arrivé de Lausanne, l’autre deBuenos Aires, ils se sont rencontrés,en 1983, dans un programme post-grade à la Yale School of Architectu-re. Entre les deux architectes et leurfamille, la sympathie fut immédia-te. En1990, ils se retrouvent donc àLausanne pour travailler ensemble,

conjuguant d’une façon toute per-sonnelle l’héritage des grandsclassiques de la modernité, leur admi-ration pour Mies van der Rohe, pourle Mexicain Luis Barragán, pour lePortugais Alvaro Siza Vieira et la leçondu Vaudois Jean Tschumi. «L’essen-tiel, c’est ensuite de trouver son âme,sourit Jacques Richter. Avec, pournous, deux mots-clés: authenticité etintemporalité. Mais sans dogmatis-me. Nous ne recherchons pas un sty-le a priori mais un langage concretpour un problème donné. C’est sansdoute le mélange de nos cultures lati-no et helvétique qui rend notre pro-duction atypique.» Une démarchedont témoigne un nouveau livreconsacré à leur production récente,à paraître en septembre, chez Bir-khäuser.

PA R E L I S A B E T H G O R D O N

Biophysicien de forma-tion, biochimiste parvocation, il est aussi deve-

nu entrepreneur par conviction.Jürg Tschopp, Bâlois d’origineet installé à l’Unil depuis 1982,est un chercheur de renomméeinternationale. Mais il n’est pashomme à se contenter dedécouvertes fondamentales. S’ils’est «toujours intéressé à la mortcellulaire», ce n’est pas unique-ment pour en étudier les méca-nismes; c’est aussi parce que cephénomène est à l’origine dudéveloppement des cancers etdes maladies inflammatoires.«Je souhaite que mes décou-vertes puissent être utiles à lamédecine», souligne-t-il.Pari tenu, puisque plusieursmolécules issues de son labo-ratoire font l’objet d’essais cli-niques. Mieux: en découvrant«l’inflammasome», facteur-clédans le déclenchement de l’in-flammation, Jürg Tschopp est àl’origine d’un médicament quisoigne une forme sévère d’ur-ticaire, le syndrome de Muck-le- Wells; la substance pourraitd’ailleurs servir au traitementde la goutte. Dans un doublesouci de financer ses rechercheset de les valoriser, Jürg Tschopp

s’est aussi fait entrepreneur. «Ilfaut avoir l’esprit américain etoser se lancer, même si l’onn’est pas sûr d’avoir du succès.»Apoxis, la start-up lausannoi-

se qu’il a cofondée en 1999 pourdévelopper des médicamentsanticancéreux, emploie 40 per-sonnes et a reçu le prix SwissTechnology Arward en 2004.

Apotech, société de 80 employésdont le siège est aux Etats-Unis,vend aujourd’hui ses réactifspour la recherche «dans le mon-de entier».

cien. Et même l’un des mathématiciens lesplus reconnus au monde dans le domaine desalgorithmes de cryptographie. Son parcoursacadémique se partage entre des universitéset des instituts de recherche privés. En 1996, ildonne à sa carrière une nouvelle dimension:Citibank, à New York, le nomme vice-prési-dent, en charge notamment de la sécurité destransactions électroniques. En l’an 2000, il

démontre qu’il conserve tout son talent dethéoricien en acceptant simultanément unefonction de professeur à l’Université technolo-gique d’Eindhoven. Il renoue aussi avec la Hol-lande, son pays d’origine. Depuis le début decette année Arjen Lenstra a rassemblé toutesses compétences et son énergie sur un seulcampus: celui de l’EPFL. Il y développe désor-mais sa vision de la sécurité dans les systèmesd’information. Une vision audacieuse qui viseà repenser fondamentalement la sécurité en

fonction des besoins et des pratiques des utili-sateurs. Et ainsi gagner en sûreté tout en noussimplifiant la vie, parfois bien difficile avec lesnombreuses couches logicielles et dispositifsempilés au cours des années et au gré desfailles détectées. Dans un pays comme la Suis-se, particulièrement sensible à la sécurité desdonnées, la venue de personnalités commeArjen Lenstra représente, tant pour la forma-tion que pour la recherche, de formidablesperspectives de recherche et d’innovation.

J Ü R G T S C H O P PLE CHERCHEURDEVENUENTREPRENEUR 55 ans,

codirecteurdu départementde biochimieà l’UNIL.

Ignacio Dahl Rocha, 50 ans, et Jacques Richter, 51 ans,architectes.

49 ans, PDG d’AC Immune.

A n d r e aP f e i f e r

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A R J E N L E N S T R A VERS UN CENTRE SUR LA SÉCURITÉ INFORMATIQUE

ALAIN HERZOG

PA R M I R E I L L E D E S C O M B E S

PAR PATRICK AEBISCHER,PRÉSIDENT DE L’EPFL

Recherche fondamentale ou appliquée?Source de connaissance à long terme oud’innovation immédiate? L’EPFL a la

particularité d’être les deux à la fois. De par samission, elle assure un flux constant deconnaissances, depuis les découvertes fonda-

mentales jusqu’aux partenariatsindustriels. Cela signifie une gran-de diversité de personnalités et dedisciplines sur son campus. Maiscertaines d’entre elles sortent del’ordinaire, car elles ont réussi à lierrecherche théorique et expérien-ce pratique au plus hautniveau. Arjen Lenstra en est

l’exemple le plus récent. Mêmes’il a principalement fréquentéles facultés d’informatique, sestravaux scientifiques le profilentd’abord comme un mathémati-

50 ans, professeur de cryptolo-gie, directeur du Centre de

sécurité de l’information.

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108

PA R A L A I N R E B E T E Z

Elle voulait devenir ingénieur mais a viré à la bio-logie en entendant un professeur horriblementenrhumé donner un cours sur les systèmes

sociaux des fourmis. «Je me suis dit que si, dans untel état, il arrivait à être aussi passionnant, c’est quela matière devait être fantastique.» Martine Rahier adonc embrassé le monde des insectes – «Ils repré-sentent la moitié des espèces vivantes sur terre!» Bel-ge, formée à Bruxelles, à Bâle et aux Etats-Unis, elleenseigne à Neuchâtel depuis1994. En 2001, elle obtient ladirection du centre de compé-tence Survie des plantes, quiassocie 140 chercheurs en Suis-se. Cela donne une visibilité depremier ordre à son institut et leplace au cœur d’un réseau puis-sant, puisque toutes les équipesassocient des chercheursd’autres universités, à Fribourg,à Berne et à Zurich. Les résultatssuivent, avec des publicationsdans les revues Science et Nature, mais aussi des pro-jets de transferts technologiques avec des PME. Dansle futur, Martine Rahier se préoccupe, chez les jeunes,«d’une forme de désintérêt pour les carrières scienti-fiques». Observable en Occident, ce phénomène estalimenté par l’image négative qui pèse sur les indus-tries pharma, agroalimentaires ou chimiques. «Je trou-ve cela inquiétant, car l’objet de la science, comprendrela base des choses et leur fonctionnement, c’est essen-tiel pour une société.» Cette «éternelle curieuse» voiten tout cas là un enjeu fondamental pour l’avenir.

PA R G E N E V I È V E B R U N E T

Diriger le Swiss FinanceInstitute – créé en janvier2006 pour promouvoir une

formation de qualité des cadresbancaires et développer unerecherche de haut niveau – luiprend le plus clair de son temps.Il s’agit de repérer les ensei-gnants que l’on souhaiterait fairevenir pour compléter les compé-tences disponibles dans les uni-versités helvétiques; avant dedéfinir avec eux les programmesde recherche de demain.L’enjeu étant d’inscrire le paysparmi les meilleurs pour l’ensei-

gnement et la recherche enfinance: «Si ça fonctionne, d’ici àdeux-trois ans, onne reconnaîtra pasle paysage univer-sitaire dans cedomaine!» s’en-thousiasme Jean-Pierre Danthine. Ledéfi est de taille,mais il n’est pas

pour déplaire à celui qui se défi-nit lui-même comme un «profes-

seur-entrepre-neur».Cet universitaire aparticipé à la créa-tion du Journal ofFutures Markets.Nommé professeurà HEC Lausanne à30 ans, il est enco-re de la création del’Institut debanque et finance,puis de FAME.

Venu auxétudes

économiques par «envie de trou-ver des solutions dans le champdu social, et pour cela il faut com-prendre l’économie», il a décou-vert de profondes satisfactionsdans la recherche. «Sur lesquatre à cinq ans qui s’écoulententre le début d’un travail et lapublication de l’article dans unerevue scientifique, la phase laplus amusante est celle où l’on seréunit pour définir le problème etimaginer comment le résoudre.»Ses recherches personnellesattendront, mais la transforma-tion de la formation universitairesuisse est en cours.

J e a n - P i e r r e D a n t h i n e

«JE SUIS UN PROFESSEUR-ENTREPRENEUR»

A N D R E A B A S S IA L’ÉCOLE DES VILLASPA R M I R E I L L E D E S C O M B E S

56 ans, directeurdu Swiss Finance

Institute et professeur à HEC

Lausanne.

Dans le milieu de l’archi-tecture, Andrea Bassi estassocié à ses élégantes vil-

las genevoises. Plein d’humour, ilne s’en offusque pas. De ce savoir-faire, il a tiré une force et une ori-ginalité qui lui valent d’avoir à sonpalmarès deux écoles (à Neuchâ-tel et à Genève) et de réaliser lesiège de la Banque Pictet & Cie auxAcacias. Un projet d’une certainesolennité pour lequel il a ima-giné un «gratte-ciel couché»en béton poli. Né en 1964 àLugano, il a fait ses étudesau Tessin et à Genè-ve avant de devenirchef de projetdans l’atelier

Burkhalter & Sumi à Zurich. En1994, conscient «qu’à trop se trou-ver près des haut-parleurs, ondevient sourd», il revient à Genè-ve et réalise alors ses premièresmaisons. Son secret? «Je parle peud’architecture avec mes clients.Une maison n’est pas un objet ensoi mais un lieu à construire enprenant en compte les espacesextérieurs et intérieurs.» Proches

de leur environnement sans êtreécologiquement militantes, sesmaisons cultivent la fluiditéspatiale en privilégiant la trans-

parence. Des qualités quel’on retrouve dans sesautres projets. «Je suisquelqu’un de la conti-nuité, insiste-t-il. Etma chance, c’est

d’être un peu endehors. Cela

me permetune petitedistancecritique.»

52 ans, professeurd’écologie et d’ento-mologie à l’Universitéde Neuchâtel.

41 ans, archi-tecte (BureauBassi Carellaarchitectes).

M a r t i n e R a h i e rLA PASSION DES PLANTES

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PA R E L I S A B E T H G O R D O N

La passion de cette scientifique sedécline en trois lettres: ADN. Gene-voise d’origine, Nouria Hernandez

a développé très tôt un penchant pourla biologie moléculaire, doublé d’une prédisposition pour la mobilité.Après avoir soutenu sa thèse de doctorat à l’Université de Heidelberg en Allemagne,

elle s’embarque pour les Etats-Unis et seretrouve rapidement au prestigieux ColdSpring Harbor Laboratory à New York, où elle est nommée professeur.Mariée à un scientifique américain, ellerevient toutefois en 2005 avec époux etenfants sur les bords du Léman. Bien lui en prend. En septembre de la même année,elle est nommée directrice du Centre intégratif de génomique (CIG), un institutcréé par l’UNIL, en collaboration avecl’UNIGE et l’EPFL.A la tête d’une équipe de 170 collabora-teurs, elle développe la génomique. Le CIG – et sa directrice avec lui – est promis à un bel avenir.

J a c q u e sd e H a l l e rCONTRE LE BLUESDES BLOUSES BLANCHESPA R M I C H E L G U I L L A U M E

Mais qu’est donc allé faire sur le ring politiquece généraliste genevois qui a tenu un cabinetdurant vingt et un ans à Plainpalais? Jacques de

Haller, le nouveau président de la Fédération des méde-cins suisses (FMH), est certes un esprit vif et brillant.Mais face aux puissants lobbyistes de tout poil, des assu-reurs aux hôpitaux, en passant par les cantons, cet homme tout en nuances semblait manquer de pun-ch. «Asséner des slogans ne sert à rien. L’obstinationidéologique empêche le débat d’avancer», répondJacques de Haller, qui ne tient pas à se profiler en lea-der «anti-Couchepin», le ministre de la Santé. Il n’em-pêche: la FMH a marqué un point le 1er avril dernieren mobilisant 12 000 généralistes sur la place Fédéra-le à Berne, et en recueillant 300 000 signatures de soutien. Autant de paraphes pour le libre choix du médecin que contestent les caisses. D’ailleurs, PascalCouchepin vient d’assouplir sa positionà ce sujet. Dans ce marché en pleinecroissance (5% par an) qui offre 10%des emplois en Suisse, les médecinsont le blues car ils craignent pourla qualité des soins. Jacques de Hal-ler se dit prêt à certaines conces-sions. «Quelles que soient les pres-sions économiques, on ne peut pasappliquer sans autre lesrègles du marché à la san-té. Mais nous sommesprêts à accepter certainscritères d’économicité.»

54 ans, professeur

à l’IMD, directeur du

Centre pour lacompétitivité

mondiale.

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49 ans, directrice du Centre intégratifde génomique à l’Université de Lausanne.

«PASSIONNÉ PAR LES IDÉES»PA R G E N E V I È V E B R U N E T

«La Suisse est malade de songouvernement, pas de son éco-nomie», assène avec conviction

Stéphane Garelli. A ses yeux, le poidsde la fiscalité helvétique en regard duPIB est à un bon niveau: il ne faudraitni l’alourdir ni l’alléger, sous peine dene pouvoir faire face aux coûts futursdu vieillissement de la population. Auxgouvernements fédéral et cantonauxde gagner en efficacité en acceptant«plus de centralisation dans certainsdomaines, comme l’éducation ou lasécurité». Le directeur du Centre pourla compétitivité mondiale s’intéresseaux pays qui, comme la Suisse ou lesEtats-Unis, affichent des comptespublics dans le rouge alors que leuréconomie va bien. Un sujet de

réflexion de plus pour ce professeur àl’IMD, conférencier, président duconseil d’administration du quotidienLe Temps, «passionné par les idées».Le défi étant d’«avoir la bonne idéeau bon moment». Celle qui a décidéde sa carrière était de s’intéresser àla compétitivité: «Je voulais savoir cequ’il y avait derrière les chiffres clas-siques de l’économie.» Depuis, deschiffres, il en publie chaque annéedans le «Rapport annuel sur la com-pétitivité mondiale.» Il s’est imposécomme une référence . StéphaneGarelli n’a rien perdu de son envie decomprendre. Son dernier livre, TopClass Competitors, analyse «com-ment les nations, les entreprises etles personnes peuvent réussir dans lenouveau monde de la compétitivité». 54 ans,

président de la FMH.

N o u r i a H e r n a n d e zUNE PRÉDISPOSITIONPOUR LES GÈNES

DR

GAETAN BALLY KEYSTONE

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Bâtisseurs

Pascal et Jean-Pierre, 49 ans et 52 ans, administrateurs et présidents de toutes les sociétés du groupe Futuris (Biwi SA, Locatis SA, SPC SA, ISWP SA, Trüb AG, Pibor Iso SA, Cyberis SA,Winter AG).

L ES B O U RQ UA R DLE JURA TECHNOLOGIQUE ET FLORISSANT

Le produit phare de 2006, pour la famille Bour-quard, s’appelle Locatis. Cet objet, plus petit qu’untéléphone mobile, peut être localisé à quelques

mètres près grâce aux systèmes GSM et GPS. «Si l’on volevotre vélo et que sous la selle vous avez un Locatis, vouspouvez, grâce à l’internet, aller sonner à la porte duvoleur», explique Pascal Bourquard qui, avec son frèreJean-Pierre, dirige le groupe familial, Futuris. Ce produit,fabriqué et développé dans le canton du Jura, s’ajoute àune quantité impressionnante de succès accumulés parles différentes sociétés sœurs du groupe, dont Biwi àGlovelier. Ainsi, l’argovienne Trüb, qui fabrique les cartesd’identité suisses et les cartes de crédit Visa, vient dedécrocher un contrat pour réaliser les 40 millions de per-mis de conduire anglais. La République tchèque et HongKong se sont également tournés vers eux pour leursdocuments d’identification. «Ces pays nous choisissentpour notre niveau technologique et pour des questions desécurité. La Suisse a des compétences et sa mission estd’exporter», dit le patron jurassien. Il passe d’ailleurs sonprintemps entre la Chine et l’Inde. Mais, contrairement àce que pourrait laisser croire la mode des délocalisations,ce n’est pas pour y fabriquer ses produits qu’il se renddans ces puissances naissantes, mais pour les vendre:«Quand il s’agit de haute technologie, nous bénéficionsici d’un bassin de compétences exceptionnel, explique-t-il en parlant du Jura et de la Suisse. Il faut le vendre,être à l’attaque. Mais il n’y a pas besoin d’aller fabriquerailleurs.»

PA R PA U L A C K E R M A N N

A première vue, ce sont les jumeaux des leaders.

Mais tous les « bâtisseurs» 2006 nommés comme

tels par « L’Hebdo» ont en commun d’avoir créé

et développé leurs affaires avec un talent, une audace

et un succès tout particuliers.

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«Quand il s’agitde hautetechnologienousbénéficionsd’un bassinde compé-tences ex-ceptionnel.»

113L’HEBDO 18 MAI 2006 LES 100

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114 LES 100 BÂTISSEURS L’HEBDO 18 MAI 2006 BÂTISSEURS L’HEBDO 18 MAI 2006 LES 100

PA R A L A I N R E B E T E Z

C’est une des plusgrandes entreprises aumonde de biopharmacie,

créée il y a vingt ans et quiconnaît une spectaculaire crois-sance à deux points ces der-nières années. Basée à Summit,dans le New Jersey, Celgeneétait une entreprise qui produi-sait ses médicaments unique-ment pour le marché américainet qui, pour le reste du monde,passait des licences avecd’autres entreprises. Désor-

mais, cela va chan-ger. Pour le «rest ofthe world», elle esten train de construi-re une usine à Bou-dry, près de Neu-châtel, qui fabrique-ra tous ses nou-veaux médicamentsdestinés à l’exporta-tion en dehors desEtats-Unis.Michael Morrisseyest le maîtred’œuvre de cetteinstallation. Anglo-Irlandais d’origine,mathématicien et physicien deformation, il a fait l’essentiel desa carrière dans le groupeRoche, avant de rejoindre Cel-gene, en février 2005. Quand ilest arrivé à Neuchâtel, il n’yavait rien, pas même un bureau

ou un ordinateur.«J’étais devant unefeuille blanche, toutétait à créer.»Sur une parcelle de31 hectares, deuxbâtiments sontactuellement enconstruction, l’unadministratif etl’autre de produc-tion, pour un inves-tissement de 50 mil-lions. Trente per-sonnes ont déjà étéengagées, surtoutl’encadrement, dont

un tiers d’étrangers, et une cen-taine de personnes travaillerontsur le site début 2007. Le pre-mier médicament qui y seraproduit, le Revlimid, contre lecancer du sang, vient d’êtrereconnu par la FDA et attend

l’homologation européenne. Il faudra un an de validation desprocédés de fabrication avantqu’il puisse être vendu.Tout près de là, à Bevaix, uneautre pharma américaine aunom très proche, Isolagen, qui venait d’acquérir une usinepour produire un nouveaumédicament, a annoncé il y aquelques semaines le gel deson projet. Pourrait-on craindrede même avec Celgene? «Il y adeux grosses différences, rassure Michael Morrissey.D’abord notre médicamentvient d’être reconnu auxEtats-Unis et nous sommes trèsconfiants qu’il le sera aussi enEurope. Ensuite, nous nesommes plus une start-up,nous avons les reins solides. Lapreuve? Tout l’investissementde Boudry est autofinancé.»

M i c h a e lM o r r i s s e y

DU NEW JERSEYÀ BOUDRY

115

Steven Ritchey, 36 ans,John Staehli, 30 ans,Laurent Haug, 29 ans,Nicolas Nova, 28 ans,les organisateursde LIFT (Life, Ideas,Futures. Together).

PA R D A N I E L B O R E L ,F O N D AT E U R D E L O G I T E C H

Réflexe de Pavlov– on mentionne le nomde Bertrand Cardis et on y associe Alin-ghi. Normal. Qui ne se souvient de cet-

te victoire historique etde la qualité du bateauconstruit par Cardis et son équipe deDécision SA. Un pays de lacustresqui dame le pion à des pays demarins!Ce succès aurait tourné la têtede n’importe qui, mais pascelle de Bertrand Cardis. Quiest surpris lorsque qu’on sug-gère qu’il est le mieux qualifiépour construire le prochainAlinghi. Rien n’est acquis.

Il faut faire ses preuves. Et de vous raconterla difficulté de convaincre, les défis tech-niques, les remises en question, les doutes,avec ce souci de la précision et cette intensi-té qui font penser à ces horlogers en quêtedu mouvement parfait. Et pourtant, Alinghin’est que la pointe de l’iceberg, une toutepetite partie des réalisations et du parcourshors du commun de cet ingénieur sorti del’EPFL avec un diplôme en mécanique, etpassionné de voile.

Une année de bourlingue autour du mon-de avant de prendre la direction du

chantier naval Décision à l’âge de 27ans. Une période difficile qui l’oblige-ra à licencier du personnel avant deremonter la pente... grâce notamment

à la fourniture de 600 perches

de trolleybus en fibre de verre et aluminiumpour les transports publics. Pas «glamour»certes, mais une inspiration qui débouchesur l’utilisation des matériaux compositesdans un contexte original.Se remettre en question, remettre en ques-tion les acquis, sortir du moule. C’est à lafois cette humilité, cette ambition de fairetoujours mieux et de repousser les limitesqui permettent à Bertrand Cardis d’avoir àson actif des réalisations aussi diverses queles nouvelles navettes solaires qui traversentla rade de Genève, des parois radiotranspa-rentes pour la centrale Swisscom du Säntis,un mouvement de montre géant et un dia-phragme de 9 mètres de diamètre pour desgrands horlogers genevois, et bien sûr lesDécision 35 qui ont donné un nouveausouffle au Bol d’or.Bertrand Cardis, c’est la Suisse telle qu’on larêve: passionnée, cultivant l’excellence, maissans ostentation, avec des valeurs fortes,une curiosité et une ouverture d’esprit horsdu commun.

42 ans, gérant de Celgene International.

LA SUISSE TELLEQU’ON LA RÊVE

50 ans, directeurde Décision.

A n n e S o u t h a mLE GOÛT D’ENTREPRENDREPA R T H I E R R Y B A R B I E R - M U E L L E R ,P R É S I D E N T E T A D M I N I S T R AT E U R - D É L É G U É

D E L A S O C I É T É P R I V É E D E G É R A N C E

En résumant son parcours, Anne Southam évoquevolontiers son père, un des premiers «capital-risqueurs de Suisse, qui pense toujours que les

filles ne sont pas faites pour les affaires». On retrouvedans cet exemple ce qui fait la force et la richesse de lapersonnalité et du parcours d’Anne Southam: elle puisece qu’il y a de meilleur dans la tradition et l’héritage dupassé, tout en sachant se libérerdes conventions inutiles.C’est ce double tempérament qui l’a amenée à fonder,avec Armand Lombard, Genilem, un concept d’ac-compagnement d’entreprises innovantes endémarrage qui a durablement changé le «pay-sage entrepreneurial romand». Suivra quatreans plus tard Bisange (Business Angel). C’esttoujours le même tempérament – et la mêmepassion entrepreneuriale – qui s’exprimeaujourd’hui dans la mise surorbite du club d’in-vestisseurs Hôtels et Patrimoine, fondé il y a troisans et qui compte déjà deux – bientôt trois – hôtelsà son actif en Suisse romande, exploités selonun concept novateur. C’est une femmede projets et d’idées, mais – c’est plusrare – elle sait aussi les concrétiser etles faire vivre durablement.

PA R B R U N O G I U S S A N I

C’est une histoire d’enthou-siasme et de pixels qui aamené ces quatre jeunes gens

à organiser en février une conférencequi a attiré à Genève des vedettesinternationales de la blogosphère,du design, de l’humanitaire et desmédias numériques. L’an dernier,Laurent Haug (29 ans, consultant entechnologie) s’était rendu à uneconférence à Copenhague, Reboot,consacrée à l’impact des technolo-gies émergentes sur la vie quoti-dienne. Il en est revenu électrisé par la richesse et la diversité des discussions – et par le fait que peu de ces idées circulaient en Suis-se. Il en a parlé d’abord à NicolasNova (28 ans, chercheur à l’EPFL).Ensemble ils ont convaincu John

Staehli (30 ans, il s’occupe de com-munication dans une boîte de micro-finance) et Steven Ritchey 36 ans,designer d’interfaces pour unebanque privée) de les rejoindre pourorganiser un événement similaireà Genève, «où il manquait une confé-rence internationale à la hauteur dela réputation internationale de la vil-le: on l’oublie, mais c’est ici qu’ona inventé le web», dit Haug.C’étaitun risque: les sponsors ont hésité,les quatre n’avaient aucune expé-rience dans ce genre de choses. Maisils ont fait le pari de l’ouverture enorganisant le tout – c’était une pre-mière – pratiquement en public, àtravers un blog, demandant conseil,exprimant des doutes, discutantavec des speakers et participantspotentiels sous les yeux de tous. Ilsont eu des doutes, géré des tensions,échangé des milliers d’e-mails, cou-su ensemble un budget minimal etun programme exceptionnel. Résul-tat: LIFT (pour «Life, Ideas, Futures.Together», sur www.lift06.org) s’estdéroulé à guichets fermés, avec35 orateurs et 350 participants, et aimmédiatement conquis sa placedans le circuit des conférences euro-péennes où il faut être. Prochaineédition en février 2007.

41 ans, cofondatrice du club d’investisseurs

Hôtels et Patrimoine.

STEVEN RITCHEY,JOHN STAEHLI,LAURENT HAUG,NICOLAS NOVA

ALAIN GAVILLET

THIERRY PAREL

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Page 22: L’HEBDO 18 MAI2006 - labs.letemps.ch · Lauener Dominique Rappaz Bernard Syz Eric Bouchat Théo Danial Omar Perruchoud-Massy Marie-Françoise Ferdman Guerrier Bettina Pictet Stéphane

117116 LES 100 BÂTISSEURS L’HEBDO 18 MAI 2006

PA R R O L A N D R O S S I E R

Il a transformé un brontosaure en gazelle. L’ancien et lourd groupe industriel Condensateurs

Fribourg/Montena est devenu une société agile: Maxwell Technologies. Le Fribourgeois Alain Riedo vient d’êtrenommé numéro 2 de cette entreprise quivend des composants à l’industrie spatiale et aéronautique (pour Airbus),et dont le siège est situé à San Diego.Voyageant fréquemment, il était déjàhabitué au grand écart par-dessus l’At-lantique, entre la Californie et Rossens(FR). Comme les affaires se développentaussi en Asie, Maxwell va planter unnouveau fanion en Chine, à Shenzhen.Cet ingénieur-mécanicien qui participe àla Patrouille des Glaciers a su complétersa formation par un postgrade en straté-gie, à Stanford. «J’y ai appris l’impor-tance de la prise de risque, la rapidité, la nécessité d’une maîtrise des coûtsdans l’innovation industrielle.» Pour lui,en intégrant ces paramètres, la Suissegardera ses atouts de place industrielle.Le succès de Maxwell Technologies (280 personnes dont 110 à Rossens, 120 d’ici peu, valeur en Bourse de 300 millions de dollars au 31 mars 2006)le prouve.

A S S O C I É SD ’ I N D E X

V E N T U R E S

Ex-avocate à la City de Londres, Sophia de Meyer gèredepuis deux saisons un camp de «pods» aux Cerniers,sur les hauts de Monthey. Ces petits igloos, entièrement

recyclables, attirent des visiteurs du monde entier, séduits parce concept d’écotourisme qui vise à faire mieux connaître, etdonc respecter, les Alpes vaudoises (lire L’Hebdo du 2 mars).Le succès est au rendez-vous: le camp Whitepod a bénéficiécet hiver d’un taux d’occupation de près de 85% pour un chiffred’affaires de quelque 200 000 francs. Sophia de Meyer chercheaujourd’hui à exporter son concept, à travers un système de fran-chises. «Nous avons des demandes en provenance d’Angleterre,d’Argentine, de Suède, de Nouvelle-Zélande et de Tasmanie»,relève cette native de Villars-sur-Ollon. Sophia souhaite aussi

continuer à exploiter l’installation des Cerniers, une manière de réinjecter ses bénéfices dans l’économie locale. Whitepod emploie ainsi 26 personnes, dont six à plein temps. Lesdenrées utilisées sont achetées sur place et, à terme, Sophia de Meyer prévoit de subventionner des projetsen faveur de la communauté loca-le. «Lorsque je suis arrivée aux Cerniers, les installations de skiétaient en faillite. Si la région neveut pas tomber dans l’oubli elle doit s’intégrer dans l’agglo-mération de Monthey, une ville florissante.» Un mouve-ment vers la ville qui dépendtout autant des subventionscommunales que des initia-tives privées, comme la sienne,selon elle.

BÂTISSEURS L’HEBDO 18 MAI 2006 LES 100

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NA l a i nR i e d o

61 ans, présidentde NordmannHolding.

49 ans, numéro 2de MaxwellTechnologies.

«IMPORTONSLA PRISEDE RISQUE!»

Les bureaux d’IndexVentures à Genèvemisent sur un ameu-

blement moderne et le personnel n’a rien de compassé. La décontractionapparente n’enlève rien au sérieux des affaires quise traitent ici. Les septassociés d’Index Venturessont des professionnels ducapital risque, spécialisésdans l’investissement à unstade précoce dans lesentreprises innovantesmisant sur les technologiesde l’information ou lessciences de la vie. Leur flairest largement reconnu

depuis que Skype – le systè-me de téléphonie gratuit surinternet – , qu’ils avaientsoutenu quasi au démarra-ge de son aventure, a étéracheté par e-Bay pour2,6 milliards de dollars.Outre Genève, Index Ven-tures a des bureaux àLondres et Jersey. Les partenaires entendentsurtout être actifs auprès dejeunes pousses euro-péennes, pour autantqu’elles visent un marchémondial.David Rimer préside parailleurs Le Réseau, uneassociation visant à amélio-

rer les conditions cadresen Suisse pour favoriser lacréation d’entreprises etleur financement. Il estimeque pour offrir demain desemplois intéressants auxjeunes générations, la Suisse doit créer plus devaleur. Il faudrait pour celaque la législation soitadaptée «pour donner auxpersonnes qui acceptent de travailler pour une jeuneentreprise une chance d’êtreensuite associées à la création de richesse». Plus globalement, la prisede risques devrait êtremieux rémunérée .

LE PATRON QUI SAIT RIRE DE LUI-MÊMEPA R R O L A N D R O S S I E R

Dans quelle catégorie ranger Jean-Luc Nordmann?Est-ce un homme de théâtre? Un Fribourgeoispassionné par l’avenir de son canton?

Un commerçant? Un fou de cinéma parce qu’il en construitdix en plein centre ville? Un prince de l’immobilier? Un peu de tout cela, assurément. Il est surtout drôle, mais franchement drôle, et on passerait des jours entiersà l’écouter, à bavarder avec lui, à boire un verre, à se balader en parlant des choses de la vie. Jean-Luc Nordmann est rare. Il est donc précieux. A plus de60 ans, au moment où de nombreux managers calculentl’argent qu’ils auront à leur retraite, le patron de ManorFribourg investit 50 millions. Comme ça. Tout simplement

parce qu’il croit encore à l’avenir, à celui de Fribourg, à celui de la Suisse, à celui de la planète entière.Cette importante opération immobilière, commerciale etculturelle, il l’entreprend avec un regret: renoncer à produire l’édition 2006 de la revue Fribug. Car, commeaucun Fribourgeois ni aucune Fribourgeoise dignes de cenom ne l’ignore, Jean-Luc Nordmann est aussi producteurde ce spectacle satirique, dans lequel il a joué personnelle-ment, aux côtés de l’avocat genevois Charles Poncet et dupoliticien neuchâtelois Claude Frey. Il l’a produite, maisil n’a pas voulu manquer le plaisir d’en être aussi l’un des acteurs. Il est donc doté d’une qualité rare dansle monde des affaires: savoir rire de lui-même.

ANGES GARDIENSDE START-UPPA R G E N E V I È V E

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S o p h i a d e M e y e rLE TOURISME DURABLEPA R J U L I E Z A U G G

De gauche à droite, les quatre associés (sur sept au total) basés à Genève: Francesco de Rubertis (36 ans), David (37 ans) et Neil Rimer (42 ans), Giuseppe Zocco (40 ans).

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38 ans, fondatricede Whitepodaux Cerniers (VS).

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118 LES 100 BÂTISSEURS L’HEBDO 18 MAI 2006

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M e t i nA r d i t iDU BUSINESSÀ L’ÉCRITUREPA R R O L A N D R O S S I E R

Chaque année, le Genevoisd’adoption Metin Arditi est deplus en plus inclassable. Promo-

teur immobilier dans les années 80 et90, il a ensuite bifurqué en direction de la gestion de patrimoine, et dupatrimoine familial en particulier.Parallèlement, il s’essaie à l’écriture,s’y plaît. Il plaît, aussi, car il se livredans ses bouquins, pas après pas. Sa Dernière lettre à Théo, inspirée de la vie du célèbre peintre hollandais Van Gogh, a été adaptée au théâtre, à Genève (Le Poche) et à Lausanne(Théâtre de Vidy). Et son dernier livre,La pension Marguerite, édité chezActes Sud, vient d’être auréolé parune distinction, le prix Lipp, considérécomme le plus important prix littérairede Suisse romande.Né à Ankara, élevé dans un internat du canton de Vaud, il se passionnepour la physique, enseigne à l’EPFL,complète sa formation à Stanford,avant de se lancer dans l’immobilier. Il réoriente ensuite une partie de sesactivités. Mécène, il préside l’AGFA(Association genevoise de fondationsacadémiques), une société qui regrou-pe d’autres entités. Les affaires, l’écriture, le mécénat? Et la musique,bien sûr. Metin Arditi préside avecbonheur l’Orchestre de la Suisseromande, qu’il a réussi à redynamiser. Inclassable, on vous dit.

61 ans, financier et écrivain.

PA R M I C H E L AU D É TAT

C’était il y a cinqans, et celasemble déjà la

préhistoire. Ancien deL’Hebdo entré à la TSRen 1996 pour y créer unerubrique économique,puis correspondant auxEtats-Unis jusqu’à l’été2001, Bernard Rappazse rappelle le climatdépressionnaire danslequel furent jetées lesfondations de TSR mul-timédia: «La bulle inter-net venait d’éclater ettout le monde disait qu’on était àcontretemps.» A ses débuts, le site de la TSR n’ac-cueillait guère que 7000 visiteurs parjour; ils sont 70 000 aujourd’hui. Lesvidéos avaient alors un format detimbre-poste; Bernard Rappaz pro-met une qualité d’image équivalantà celle de la télévision dans les pro-chains mois. Autre nouveauté à l’ho-rizon de l’été: un portail vidéo quipermettra d’accéder à toutes lesémissions mises en ligne durant cesquatre dernières années.Le défi du rédacteur en chef de TSRmultimédia? «On évolue vers la téléoù je veux, quand je veux, comme

je veux. Ce qui disparaît ainsi, c’estl’ancien modèle télévisuel où l’ons’adressait aux téléspectateurs àheures fixes et sans qu’ils disposentd’une voie de retour.»L’interactivité est déjà fondamen-tale pour une émission comme Infra-rouge, et Bernard Rappaz comptebien la développer, notamment avecle projet d’utiliser des webcams dansle cadre de Nouvo. En cinq ans, lapetite équipe de TSR multimédia n’aguère grandi, mais elle s’est mise àtravailler avec toujours plus de par-tenaires au sein de la grande maison.Et c’est ainsi qu’elle la transforme enprofondeur.

D o m i n i q u eL a u e n e rUNE FOISANS BORNEPA R A L A I N R E B E T E Z

Y aurait-il une traditionanti-patronale chez lesLauener? En 1905, l’arriè-

re-grand-père avait créé sapropre entreprise de décolletagepour échapper à la tyrannie deson patron. Un siècle plus tard,Dominique Lauener a soutenu sans faiblir les gré-vistes de Swissmetal, n’hésitant pas à prendre laparole lors d’une manifestation de soutien. Parceque, en tant que client, il n’accepte pas qu’on mépri-se un savoir-faire et les employés qui le détiennent…A 46 ans, Dominique Lauener n’a pourtant pas peurde la mondialisation. Depuis son arrivée dans l’en-treprise, en 1988, le chiffre d’affaires a triplé, ilemploie aujourd’hui 96 personnes à Boudry, et 40 àShanghai, dans une filiale ouverte en 2002 pour lemarché chinois. L’horlogerie haut de gamme («DeIWC à Schaffhouse jusqu’à Patek à Genève, toutes lesgrandes marques sont nos clients»), la connectiqueet le médical sont ses trois domaines d’activité, avecdes projets dans le secteur médical: «Plutôt que descomposants, l’idée est d’aller de plus en plus versdes produits finis.» Dominique Lauener garde une foisans bornes dans l’avenir industriel de la Suisse. Lapreuve: il ne s’est pas contenté de soutenir les gré-vistes de la Boillat, à Reconvilier; à la tête d’un poolde clients, il était prêt à investir dans son rachat.

C A R L O SD I A SLE DYNAMISMESWISS MADEPA R J U L I E Z A U G G

Auteur de treize calibres debase, de dix collections et dequelque deux cent cinquante

nouveaux modèles par an, la manu-facture horlogère Roger Dubuis, fon-dée en 1995 à Genève, fait mentir latraditionnelle lenteur helvétique. «Nousvenons de présenter six nouveaux calibresau Salon international de la haute horloge-rie, qui sont déjà en production», indique lecréateur et patron de la marque, Carlos Dias,50 ans.L’entrepreneur d’origine portugaise, arrivé enSuisse à la fin des années 80, n’en estplus à son coup d’essai: avantd’être horloger, il a été consul-tant, éditeur et créateur d’ac-cessoires de mode. Ses projets:élargir son réseau de distribu-tion à l’étranger, ouvrir de nou-velles boutiques, agrandir lamanufacture et, surtout, créer dèsla fin de l’année quelque trois centsemplois supplémentaires pourcompléter les quatre cent trenteemployés actuels. «Nous figurons par-mi les premiers employeurs du canton deGenève.»Un impact sur la région que Carlos Diasvoudrait voir mieux reconnu par lesautorités. Il déplore notamment lemanque de main-d’œuvre qualifiée.«Nous devons faire appel à de nom-breux collaborateurs de l’arc fron-talier.» Les écoles devraient davan-tage promouvoir les formations horlogères, selon lui. «La main-d’œuvre à disposition, détentriced’un diplôme, ne correspond même pas à 10% de la demande.Il y a une grave pénurie. L’Etat doitmieux anticiper.» Carlos Dias propose aussi la mise sur pied de centres de forma-tion qui pourraient enseigner les métiers del’horlogerie aux personnes au chômage ou en quête de reconversion professionnelle. «C’est un secteur sûr et qui paie bien.»

50 ans, fondateur et patron de Roger Dubuis.

45 ans, rédacteur en chef de TSR multimédia.

46 ans, patron deLauener et Cie SA,à Boudry.

E R I C S Y Z«NOUS VOULIONS CRÉER UNE BANQUE DIFFÉRENTE»PA R G E N E V I È V E B R U N E T

Eric Syz – fondateur avecAlfredo Piacentini et PaoloLuban de la banque qui

porte son nom – évoque volon-tiers la complémentarité entreeux trois, qui a largement contri-bué à transformer en succèsl’idée de départ d’une banqueuniquement centrée sur la ges-tion de fortune et la performancedes portefeuilles.Dix ans après sa naissance, legroupe gère quelque 15 milliardsde francs. Une croissance rapide,mais la taille de la société per-met encore aux trois créateurs«de gérer eux-mêmes et d’être

confrontés à la clientèle». Labonne compréhension desbesoins du client étant «aussiimportante que l’obtention de laperformance souhaitée». Uneperformance qui passe par l’uti-lisation de gérants externes:«60% des actifs sont gérés pardes tiers et 40% par nous-mêmes». Autre ingrédient clé dusuccès: «Les 200 collabora-teurs». «Le capital de notrebanque arrive le matin et part lesoir», illustre Eric Syz.En vrai entrepreneur – «J’avaisla chance de connaître le métier,l’envie d’entreprendre, l’énergieet le capital. Il aurait été presque

criminel de ne pas créer uneentreprise!» – Eric Syz estconvaincu qu’il est possible defaire régulièrement mieux queles indices, «à condition de seremettre en question tous lesjours et de se demander si on araté quelque chose».Cet amateur d’art contemporainexpose des œuvres dans leslocaux de sa banque et se réjouitdu débat ainsi créé dans l’entre-prise. Pour dessiner à la Suisseun solide avenir économique,Eric Syz mise sur l’éducation: «Il faut apprendre à nos enfantsà être compétitifs, ambitieux; àvouloir conquérir le monde.»

48 ans, cofondateuret actionnaire majoritaire dela banque Syz.

B e r n a r d R a p p a zLA TÉLÉ DE DEMAIN

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120 LES 100 BÂTISSEURS L’HEBDO 18 MAI 2006

M a r i e - F r a n ç o i s e

P e r r u c h o u d - M a s s yLA FEMME VALAISANNE,L’AVENIR DE L’HOMMEPA R E R I C F E L L E Y

Lors des élec-tions au Conseilnational d’oc-

tobre 2003, Marie-Françoise Perruchoud-Massy a obtenu lequatrième résultat surla liste démocrate-chrétienne avec 22 104voix. Docteur en éco-nomie, elle est une fineconnaisseuse duValais, où elle dirigel’Institut économie ettourisme avec unetrentaine de profes-

seurs et de scienti-fiques. Engagée dansles rangs du PDC,longtemps députée auGrand Conseil, elle estune des rares person-nalités féminines quiémergent dans la poli-tique cantonale valai-sanne. En 2009, elleest bien placée pourdevenir la premièrefemme à accéder àl’Exécutif valaisan etelle ne cache pas sesambitions. Les diri-geants du PDC tien-

dront-ils leur promes-se de porter une fem-me au Conseil d’Etat?Elle a des cartes enmain, mais ce n’est pasencore la voie royale.

T H É O B O U C H ATPATRON DE PRESSE À SUCCÈSPA R C H A N TA L TA U X E

Le Matin Bleu aurait-il autantde lecteurs si Le Matin orangene lui avait pas préparé le ter-

rain en passant au demi-format, pluspratique à lire, en 2001? Directeur despublications Le Matin, mais aussi deTéléTop, de Femina et de Bilan, ThéoBouchat a depuis quelques mois,enregistré quelques beaux succès. Ila coaché la nouvelle formule Femi-na, fait passer le mensuel Bilan aurythme bimensuel, et mis sur le mar-ché le premier quotidien gratuit deSuisse romande.Avant d’être un éditeursachant motiver seséquipes, il a été jour-naliste en Allemagne,correspondant à Ber-ne pour la TSR, rédac-teur en chef de L’Illus-tré avant d’être appelé àdiriger RingierR o m a n d i e ,puis Edipres-se Suisse. Auxcôtés de

Jacques Pilet et de Roger de Diesba-ch, il est donc un de ceux qui ont for-gé la génération actuelle de journa-listes. Ce Jurassien devenu lémanique reste optimiste sur les perspectivesd’emploi dans la presse: elles sontbonnes, dit-il: «Avec quelque 250 000lecteurs réguliers six mois après sonlancement, Le Matin Bleu joue dansla cour des grands, alors que la taillede son équipe – 35 personnes –devrait, selon les canons de la profession, le classer parmi les petitstitres de province qui peinent à augmenter leur audience malgré leur longévité. L’irruption des gratuits

force les journaux payants à revoirleur offre, à se redéfinir en termesde contenus et de valeur ajoutée.Ce processus inéluctable peut aus-si définir de nouveaux emplois ou

en réformer d’autres. Au total,la branche aura gagné

en performance, en diversité, enattractivité etpostes de travail.»

t i tTITRES I G N AT U

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PA R R O L A N D R O S S I E R

Sans rénovation, un hôtel dépérit peu à peu.Cette donne de base, Omar Danial l’a par-faitement intégrée. Ce Genevois né d’un père

syrien et d’une mère bernoise semble presque obsédé par l’investissement hôtelier. Il a sorti de sespoches, et de celles des banques, environ 50 millionsde francs ces dernières années pour les six éta-blissements genevois de son groupe Manotel(trois et quatre étoiles, totalisant environ600 chambres et employant quelque 200 collabora-teurs). Les dirigeants du groupe en ont profité pouren renommer deux: hôtels «Jade» et «Kipling», cela fait tout de même plus rêver que Ascot ou Chantilly. Cerise sur le gâteau: 12 nouveaux millionsont été dépensés pour rafraîchir le Royal et le doterde 30 chambres supplémentaires. Un chantier quis’achève ces jours.Après avoir fait le plein à Genève, Omar Danialcherche désormais à s’étendre à Zurich. De genevois, son groupe deviendrait alors suisse. Ce fonceur est aussi actionnaire de la vénérable CGN (Compagnie générale de navigation). Ce pro-priétaire-hôtelier est notamment convaincu que lesacteurs du tourisme n’utilisent pas suffisamment unatout naturel de la Suisse: ses lacs et ses fleuves.

51 ans, responsablede l’Institut économieet tourisme de laHaute Ecole valaisanne.

INVESTIR, INVESTIR, INVESTIR

37 ans,présidentdu groupe hôtelierManotel.

O M A RD A N I A L

62 ans, membre de la direction générale d’EdipresseSuisse.

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JANINE JOUSSON

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123122 LES 100 BÂTISSEURS L’HEBDO 18 MAI 2006 BÂTISSEURS L’HEBDO 18 MAI 2006 LES 100

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B e a t Z a u g gL’AMÉRIQUE À FRIBOURGPA R J U L I E Z A U G G

La présence à Givisiez,dans le canton de Fri-bourg, de la société

américaine d’équipements deski, vélo et motocross ScottInternational peut paraîtreincongrue. Mais pour sonpatron Beat Zaugg 48 ans, iln’y a rien de plus naturel:«Nous bénéficions ici d’uneposition centrale en Europe,nous évitons les grandes villespolluées et leurs bouchons etnous sommes tout proches despistes de ski et de vélo, ce quicorrespond bien à la philoso-phie de la société.»Une aubaine pour cet ancienskieur professionnel, qui a faittoute sa carrière chez ScottSports, après y être entré en1987. Une manne aussi pour larégion fribourgeoise: l’entre-prise y emploie 130 personnes.

Si Beat Zaugg a le sentimentque «la Suisse romande vabien», il pense que l’avenir decette entité régionale passepar un rapprochement avec lereste de la Suisse. «Les dis-tances sont devenues pluscourtes: Lausanne, Berne etZurich ne sont plus qu’à uneheure de train.»Plutôt que de viser l’émer-gence de mégaaggloméra-tions, mieux vaut songer àcréer un réseau de petitesvilles. La qualité de vie est eneffet l’une des forces de laSuisse et il s’agit de la préser-ver, selon le Bernois. Quantaux personnes qui se lamen-tent que tout se passe à Zuri-ch, le patron de Scott Interna-tional est catégorique: «C’estune excuse bien trop facile. Ona tout ce qu’il faut ici.»

PA R G E N E V I È V E B R U N E T

Parier sur le développe-ment de l’éthique dansles entreprises, en créant

une association chargée de lesconseiller en la matière. L’idéen’allait pas de soi en 1998lorsque Bettina Ferdman Guer-rier s’associe avec LaurenceFabry Lorenzini pourfaire naître Entreprises dansla Cité. Installée dans demodestes locaux à Carouge

(GE), l’association s’est muéeen Fondation Philias, en 2000.Depuis, elle multiplie les pro-jets.Outre le développement del’activité de conseil, «pourcontribuer à diffuser les valeursà tous les niveaux de l’entre-prise et pas seulement dumanagement», la Fondation acréé un prix, «remis chaqueannée à un étudiant d’une uni-versité suisse qui a réalisé untravail de qualité sur l’éthique

en entreprise». Autre nou-veauté: un salon destiné à faci-liter les rencontres entre desassociations développant desprojets humanitaires ousociaux et des sociétés dési-reuses de les soutenir. La pre-mière édition d’Humagora s’esttenue à Genève le 9 mai dernier.De nouveaux projets en suivides activités en cours, la jeu-ne femme ne s’est guère ména-gée ces dernières années; maispeut se réjouir du développe-

ment de Philias avec l’ouver-ture récente d’un bureau à Zuri-ch et plusieurs embauches étof-fant les compétences de l’équi-pe.Parmi les emplois du futur enSuisse, cette bâtisseuse metl’accent sur ceux qu’invente-ront les entrepreneurs sociaux:«Ils imagineront demain desproduits et des servicescapables de combler desbesoins sociaux de manièrerentable.»

LES OPTIMISTES DU NETPA R J U L I E Z A U G G

Le développement commercial de l’in-ternet, ils y ont cru dès le début.Lorsque Stéphane Pictet et Stefan

Renninger lancent Virtual Network en 1998,ils sont persuadés que la Toile va révolu-tionner le monde de l’édition et des médias.«On voyait le net comme un média suscep-

tible d’attirer des annonceurs.» Le tempsleur a donné raison: aujourd’hui le portailRomandie.com et ses multiples déclinaisons(Jeux.com, Gastronomie.com, etc.) attire prèsde 4 millions d’internautes par mois etemploie 12 collaborateurs. Prochain objectif:s’étendre à l’étranger. Un nouveau site,Annonces.com, destiné à l’ensemble dumarché francophone vient de voir le jour.«Notre audience dans l’Hexagone dépasse

déjà celle des sites des télévisions fran-çaises», relève Stefan Renninger. S’il officiedans un secteur particulièrement globalisé,le cofondateur de Virtual Network ne sedésintéresse pas pour autant de son envi-ronnement local. «La Suisse romande estsous-exploitée en matière de start-up. Il y abien plus de possibilités que celles réelle-ment utilisées.» Pour lui, les Romands doi-vent davantage songer à sortir de leurs

frontières pour s’attaquer aux marchésétrangers. «On a la technologie, on a l’édu-cation: le potentiel y est.» Manque cepen-dant une prise de conscience: «Les jeunessont passés un peu à côté du phénomèneinternet. Lorsque je cherche à recruter, jetrouve peu de répondant. Le secteur du netse porte pourtant très bien et offre de nom-breux emplois à haute valeur ajoutée. Lesjeunes devraient s’y intéresser.»

S T E FA N R E N N I N G E R E T S T É P H A N E P I C T E T

PA R I S A B E L L E FA L C O N N I E R

Combativité et créativité:c’est tout Marlyse Pietri,grandie à Lausanne, fon-

datrice en 1975 des Editions Zoéà Carouge (GE). En trente ans,elle a publié 560 livres dans desdomaines aussi divers que la lit-térature suisse et étrangère,l’histoire suisse (notammentJean-François Bergier dont ellea été l’assistante), la critique, lasociologie, la photographie, lepamphlet ou l’ethnologie.Depuis 1993, ses livres sontdiffusés en France, et récem-ment, ses écrivains y ontatteint une belle visibilité: elley a vendu 18 000 exemplairesdu dernier Agota Kristof, plusde 10 000 de certains Bouvieret Catherine Lovay a venduautant de son premier romanqu’ici. Le fruit d’un travail defond: sans attachée de presse,elle fait elle-même la tournéedes libraires et des rédactions.Petit miracle dans l’éditionromande, elle vient d’engagerdeux personnes, ce qui monte

à sept le nombre de salariésde l’éditrice-diffuseuse.Elle se bat pour que soitadoptée une loi sur le livre, etdonc le prix unique. «C’est leseul moyen de conserver unediversité d’édition. Le livren’est pas un objet de commer-ce comme les autres. C’est unintermédiaire pour la connais-sance, la création, l’éducation.Et forcément créateur d’em-ploi.»«En France, aucun des parte-naires avec qui je travaillen’existerait sans la loi Lang,ajoute-t-elle. Depuis quinzeans, ici, toutes les petitesstructures, éditions ou librai-ries, sont en train de dispa-raître. Et si le livre est cher enSuisse, c’est parce que cer-tains diffuseurs exagèrent surleurs marges.» Tous les jours, elle rencontredes jeunes «motivés et for-més» qui veulent travaillerpour elle. «Tant que rien n’estfait pour renforcer le mondedu livre, je ne peux pas lesengager.»

65 ans, fondatrice et directricedes Editions Zoé.

M a r l y s eP i e t r iCOMBATTANTE ET FER DE LANCE DE L’ÉDITIONROMANDE

Stefan Renninger, 36 ans,et Stéphane Pictet,

36 ans, cofondateursde Virtual Network

(Romandie.com).

48 ans, patronde Scott Internationalà Givisiez.

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«DIFFUSER L’ÉTHIQUE À TOUSLES NIVEAUX DE L’ENTREPRISE»

37 ans,fondatrice

et secrétairegénérale de

la Fondation Philias.

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124 LES 100 L’HEBDO 18 MAI 2006

Artisteset provocateurs

34 ans, vidéaste.

EM M A N U E LL EA N T I LL EDES IMAGES POUR LE MONDE ENTIER

Son expérience lui a enseigné que «le développe-ment et la reconnaissance d’une démarche artis-tique passent souvent par l’étranger: on peut y

étoffer ses acquis, se remettre en question et dépasserses limites». Elle observe que «la culture est un vecteurd’images de plus en plus prisé par l’économie privée».Emmanuelle Antille sait de quoi elle parle. Elle montrel’exemple et le chemin. Elle a étudié à Amsterdam, expo-sé à New York. Avec une ténacité qui force l’admiration,elle mixe arts plastiques et cinéma, sons et images pourraconter des histoires oniriques frappées au coin du réa-lisme et inversement.En 2003, la vidéaste lausannoise a été la première femmeà occuper en solo le pavillon suisse de la Biennale deVenise avec son installation Angels Camp. L’an dernier,elle a mis sur pied Tornadoes of my Heart, un projet mul-timédia intégrant Rollow. Ce premier long métrage meten scène une poignée d’adolescents emportés par lesouffle de la violence et de la passion. Elle exporteactuellement ce dispositif à Rome, puis à Vancouver et,pour la première fois, au Japon. Ambassadrice universellede la création romande, Emmanuelle Antille souligne ledynamisme et la solidarité caractérisant ce milieu. Etcomme elle travaille avec de nombreux comédiens, musi-ciens et techniciens, elle se réjouit d’exporter leur talentà travers ses œuvres.

PA R A N T O I N E D U P L A N

Ils nourrissent les débats, dérangent, ravissent au gré de

leurs talents, de leurs créations, de leurs regards. Ils sont l’âme,

le rire ou le grincement de dents qui font que la région se perçoit

comme telle, ouverte au monde, à l’abstraction, comme

beaucoup d’autres quartiers du village global, mais enracinée

dans un terroir qui n’appartient qu’à elle.

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La vidéastelausan-noise a étéla premièrefemmeà occuperen solole pavillonsuisse de la Biennalede Venise.

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127126 LES 100 ARTISTES L’HEBDO 18 MAI 2006 BÂTISSEURS L’HEBDO 18 MAI 2006 LES 100

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P i e r r eK o h l e rL’HYPERACTIFJURASSIEN(ET BERNOIS)PA R PA U L A C K E R M A N N

«Je travaille encoreplus qu’à l’époque dugouvernement.» Ner-

veux mais toujours sympa,Pierre Kohler, qui, à 30 ans,était le plus jeune présidentque le Jura aitconnu, racontecomment il courtà Berne et dansson canton pour«faire bougerles choses». Ens’alliant auxAlémaniquesde l’est, il aréussi à décro-cher un budgetpour les liai-sons TGV jurassiennes. Ens’alliant à un Chinois domici-lié à Neuchâtel, il a signé uncontrat avec la plus grandechaîne TV du plus grand paysdu monde pour une série defilms de promotion de laSuisse. En s’alliant à qui levoudra bien, il entend fairebarrage à la privatisation deSwisscom, afin de sauver lesinfrastructures dans lesrégions périphériques.Le «p’tit Kol’r», comme ondit «au Jura», a aussi montéun centre de tri postal privé àTavannes, redressé l’abbayede Bellelay et engagé sonnom dans le combat de laBoillat. Il n’en finit donc plusde lancer des sociétés cen-sées promouvoir sa région.Et quand il dit sa région, il nevoit pas de frontière canto-nale: les trois dernièresactions mentionnées sontbernoises. «Je préfère agirconcrètement que par debelles paroles», dit-il. Cesactions ne concernent pour-tant pas son électorat. S’enpréparerait-il un nouveau?

PA R M I C H E L A U D É TAT

Comme les chats, Daniel deRoulet semble avoir plu-sieurs vies. Architecte de

formation et romancier par défor-mation, comme il dit, il a aussilongtemps exercé le métier d’infor-maticien avant de se consacrer entièrement à l’écriture àpartir de 1997. Depuis lors, il s’est imposé comme un écri-vain majeur, original, ironique et incisif. Mais Daniel deRoulet vient aussi de faire sensation avec Un dimanche àla montagne (Buchet-Chastel), récit dans lequel il avoueavoir incendié le chalet de l’éditeur allemand AxelSpringer en 1975. Aujourd’hui, il planche sur un nouveauroman qui remonte aux origines de la guerre froide:«C’est une histoire qui tourne autour de Los Alamos, où aété construite la première bombe atomique.» Sur lesemplois de demain, il risque une prédiction: «L’intéri-maire d’aujourd’hui pourrait figurer le travailleur dedemain.» Soit on y arrive par une flexibilisation forcenée,et c’est ce qu’il redoute. Soit on y arrive par un nouveaupartage du travail et «l’élimination des tâches imbé-ciles», et c’est ce qu’il souhaite.

J é r é m i e K i s l i n gCHANTEURDÉCOMPLEXÉPA R

C H R I S T O P H E S C H E N K

Avec son secondalbum Le ours, sortichez Naïve en 2005,

Jérémie Kisling s’est imposécomme le musicien qui faitrayonner la chansonromande en France. Deuxans après Monsieur Obso-lète, le Lausannois confirmeles espoirs placés en lui pardes musiciens comme M ouCarla Bruni, dont il a assuréles premières parties. Etcumule reconnaissancepublique, succès critique etrécompenses (Coup de cœurde l’Académie Charles Cros,Prix Talent RTL, Prix de lachanson romande).Cette réussite, Kisling ladoit autant à ses textesdrôles et mélancoliques,qu’à sa musique, inspiréede la chanson et de la popanglo-saxonne. Entrearrangements classieux etambiances plus intimistes,Le ours crée l’émotion.Quand certains voudraientvoir en lui un héritierd’Alain Souchon, il n’hésitepas à écorner cette figuretutélaire avec une tendreironie (sur J’suis plusjaloux, je m’en fous).Il s’impose comme chef defile d’une nouvelle généra-tion de chanteurs romandset n’est pas pour rien dansl’éclosion de jeunes artistestalentueux et décomplexés.

E M M A N U E LG É T A Z«LE DOMAINE CULTUREL VA ENCORECRÉER DES EMPLOIS EN SUISSE»PA R C H R I S T O P H E S C H E N K

35 ans,directeur-conservateurde la Maisond’Ailleurs,à Yverdon-les-Bains.

62 ans, écrivain.

D a n i e l d e R o u l e tROMANCIER PARDÉFORMATION

46 ans,conseillernationaljurassien(socialiste).

PAT R I C K G Y G E RDÉCOUVRIR DE NOUVEAUX MONDESPA R D AV I D S P R I N G

Le directeur de la Maison d’Ailleurs,le seul musée européen consacré à lascience-fiction et aux utopies, n’a pas

la tête dans les nuages. Une exposition dephotographies de Mario del Curto, Mondesmiroirs, vient de s’ouvrir. Début juillet, unsymposium centré sur «l’homme augmenté»,en partenariat avec le Festival internationaldu film fantastique de Neuchâtel et le Muséed’ethnographie de Neuchâtel.Cet été, la ville d’Yverdon-les-Bains devraitprendre la décision d’ouvrir un «espace JulesVerne», qui abritera une vaste collection pri-vée consacrée à l’écrivain. Surprise: uneautre montagne de documents étonnantssera probablement acquise, et trouvera saplace dans le nouveau lieu. «Je souhaite fairedécouvrir aux visiteurs des mondes qu’ils neconnaissent pas. Si ce n’est pas grâce aux

utopies que l’on peut y arriver…» souritPatrick Gyger. Le capitaine de la Maisond’Ailleurs, né au Brésil, a trois rêves pourla Suisse romande. Voir se développer unevéritable industrie cinématographique (laNouvelle-Zélande figure sur les cartesgrâce au Seigneur des anneaux). Se lan-cer davantage dans les technologies spa-tiales. Enfin, créer une promotion centrali-sée de l’offre culturelle dans la région, etdonner davantage de moyens à ce domai-ne, qui dépend presque uniquement de laLoterie romande. «La culture ne rapporterien si l’on y investit trop peu.»Historien de formation, spécialiste duMoyen Age, Patrick Gyger cite l’exemplede Newcastle, ville du nord de l’Angleter-re sortie des fumées de l’industrie par lanaissance de salles de spectacles futu-ristes et de musées audacieux.

En devenant directeur des Docks, le Lau-sannois Emmanuel Gétaz s’est attelé fin2005 à un projet ambitieux. Espérée depuis

la fermeture de la Dolce Vita, cette nouvelle sal-le rock de la capitale vaudoise est à la fois sour-ce de tensions et objet de toutes les attentes. Unepression qui n’effraie pas outre mesure le fon-dateur du Cully Jazz et ancien bras droit de Clau-de Nobs au sein du Montreux Jazz. «Les Docksrépondent à un besoin de la Ville de Lausanne,mais aussi à l’envie du public. Il faut donc bienanalyser les attentes de chacun pour y répondre.»Quant à son travail de directeur, il implique desfonctions diverses. «On ne peut plus se conten-ter d’un rôle purement artistique. Il faut être poly-valent et réfléchir à d’autres domaines, commela communication, la promotion ou encore larestauration.»

Surtout, après près de vingt ans d’expériencesdiverses dans l’organisation d’événements cul-turels, Emmanuel Gétaz a conscience de l’évo-lution et des réalités de cet univers. «En Euro-pe, ces trente dernières années, le nombre deslieux et événements liés à la culture soustoute ses formes a connu une expansionphénoménale. De la même manière,en Suisse, le domaine de la culture etdes divertissements a été un grandcréateur d’emplois depuis le débutdes années 80. Et ça n’est pas prèsde s’arrêter! Aujourd’hui encore, onexploite mal le capital historique,architectural ou naturel de notre pays,pour attirer les touristes. Un dévelop-pement est donc nécessaire pour restercompétitif.»

41 ans,directeur

des Docks.

30 ans,musicien.

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129128 LES 100 ARTISTES L’HEBDO 18 MAI 2006

Pa t r i c kC h a p p a t t eLE PLUSANGLO-SAXONDES DESSINATEURSROMANDSPA R M I X & R E M I X ,D E S S I N AT E U R , L’ H E B D O

«Hello, Patrick. How do youdo?… Nice day, isn’t it?… The spring is beautiful this year.

The sun is shining, it’s make me feelwell. Can I see your last cartoon in theInternational Herald Tribune?… hum…two capitalists are speaking… ah, ah,ah, ah! Very funny! I’m bidonning!...»Veuillez m’excuser, je parlais avec monpote Chappatte, le plus anglo-saxon desdessinateurs suisses romands. Le seuld’entre nous qui a réussi à s’exporter.D’accord, Barrigue l’a fait avant lui.Mais, parti de Paris pour venir cheznous, on n’a peut-être pas toujoursmesuré la portée de son exploit.Chappatte, quant à lui, s’il brille au firmament du dessin de presse suisse (il connaît un succès impressionnant enSuisse allemande) et rayonne à ce pointà l’étranger, c’est que le dessinateurdoué est aussi un grand professionnel.Connaissez-vous www.globecartoon.com?Rien qu’au nom, on se croirait sur le sited’un énorme syndicat de dessinateursaméricains. C’est juste le site perso denotre Patrick national.

39 ans, dessinateur au Tempset également pour l’International HeraldTribune, la NZZ am Sonntag…

PA R A N T O I N E D U P L A N

Qu’il retracel’histoire deson père,

immigré espagnolarrivé en Suisse dansles années 60 (Albumde famille), ou tire leportrait d’un carros-sier travesti de Mou-don (Remue-ménage),Fernand Melgar ne se départit jamais de l’amour des gens. Ce sentiment d’empathie atteint des sommets vertigineux dans Exit – le droit de mourir sur l’assistance au suicide, prix du meilleurdocumentaire suisse 2006. Aujourd’hui, le cinéaste prépare sa première fiction, Loin derrière la montagne, un film dans la mou-vance des frères Dardenne, qui se base sur une enquête menéedans le milieu des immigrés clandestins équatoriens. Le thème del’altérité est au centre des préoccupations du cinéaste lausannois.S’il est critique avec la Suisse, il appartient à une génération d’enfants d’immigrés qui sont «assez fiers de ce pays», susceptiblesde «questionnements salutaires». Il rêve d’une vraie politique d’intégration pour les étrangers, pense que la manufacture estl’une des richesses oubliées de ce pays. Optimiste, il déplore unrien de mollesse, une absence d’étincelle, un petit manque d’idéal. Dans ce contexte, «la culture joue un rôle essentiel. C’est elle quistimule l’imagination, et c’est l’imagination qui permet d’avoir lepetit grain de folie et d’espérer un monde meilleur.»

Depuis une quinzained’années qu’il organisedes événements socio-

culturels, Frédéric Hohl a vuévoluer le regard qu’on portesur son travail: «Peu à peu, lesgens ont réalisé qu’il s’agit d’unvéritable métier.»Ancien directeur d’exploitationd’Expo.02 et député radical auGrand Conseil genevois depuis2004, il dirige la société NewEvents Production SA qui orga-nisera les manifestations des-tinées à accompagner l’Euro-foot 2008 à Genève. Son projet:

transformer la plaine de Plain-palais en vaste lieu de ren-contres et de festivités.Frédéric Hohl aime ce travailqui l’oblige à toujours se réin-venter: «Selon les projets, onchange à chaque fois de chal-lenge, d’équipe, de moyens...»Egalement patron du P’titMusic’Hohl et producteur de laRevue genevoise au Casino-Théâtre, il sait l’importance del’humour pour rendre la vieplus intense. La méthode Hohl:prendre le rire au sérieux et l’es-prit de sérieux à la légère.

45 ans,cinéaste.

F e r n a n d M e l g a rCINÉMA CONFRATERNEL

ARTISTES L’HEBDO 18 MAI 2006 LES 100

PRÊTE À ÉCLORE

L O L EPA R C H R I S T O P H E S C H E N K

Avec son premier album, The Smell of Wait (paru en2005 via Disques Office), la Neuchâteloise OliviaPedroli – alias Lole – a fait une entrée remarquée sur

la scène musicale suisse romande. Entourée de plusieursmusiciens de talent, comme le contrebassiste Mich Gerber, le pianiste Colin Vallon ou encore le chanteur Simon Gerber,elle crée des mélodies fraîches et sensuelles, mêlant folk,soul et jazz, révélant un réel talent de songwriter. Sa voixy fait merveille, entre douceur et puissance, la rapprochant de chanteuses anglo-saxonnes, commeJoss Stone. Mais plus encore que ce disque, ce sont ses prestationsscéniques qui en font l’un des meilleurs espoirsactuels. Entre la Suisse romande et la Suissealémanique, elle a enchaîné près d’unequarantaine de concerts depuis 2005, en solo ouen groupe, des petites salles aux festivals.Une générosité et une passion de la scène etdu public qui ne devraient pas tarder à luioffrir des débouchés dans d’autres payseuropéens. Il est certain que dans lesmois à venir on entendra encoreparler de Lole, sur scène comme sur disque, pour une carrièreprête à éclore.

24 ans, musicienne.

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F R É D É R I CH O H LLA PASSION DE LA MOBILITÉPA R M I C H E L A U D É TAT

43 ans, organisateur

d’événementssocioculturels.

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130 LES 100 ARTISTES L’HEBDO 18 MAI 2006 LES 100

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PA R S A B I N E P I R O LT

Un dictionnaire ambulant, le dernier humanistevivant, un rêveur de génie: voilà quelques-unesdes définitions que donnent de cet horloger doc-

teur en physique théorique ceux qui le connaissent.Auteur de nombreux ouvrages, essais et cataloguessur l’univers des montres, le système solaire, la géo-métrie ou des personnages historiques auteurs d’in-ventions, l’homme est également à l’origine de larenaissance de la marque horlogère Ulysse Nardin.De ses mains sont nés des modèles aussi prestigieuxque complexes, dont les fameuses Astrolabium, Pla-netarium et Tellurium. «La marque a encore assezde projets de ma main dans ses tiroirs pour les pro-chaines années.»Si aujourd’hui le Chaux-de-Fonnier d’adoption n’en-seigne plus ni à L’EPF de Zurich ni à l’Université deNeuchâtel, c’est qu’il consacre toute son énergie auMusée international d’horlogerie. Pour lui, donner uncours, ce n’est pas réciter un monologue, mais anti-ciper les questions des étudiants et construire sonenseignement en fonction des discussions engen-drées. «Cela demande une préparation longue et pré-cise.» Son nouveau métier de conservateur le pas-sionne: «Créer une exposition demande autant decréativité qu’inventer une horloge. Ici, nous avonsla chance d’avoir la collection la plus complète dumonde.» Et si des pièces manquent, pas de problème,ce professeur Tournesol s’enferme dans son atelier etles met au monde.

ChristianConstantin, président du

FC Sion, aurait pu êtreun grand prestidigita-teur, à l’égal de DavidCopperfield, pour faireapparaître à Martigny,

ou n’importe où, surun champ en jachère,un stade de footballtout neuf de 24 000places. Pour l’instant, iln’est qu’au début deson programme parse-mé d’effets d’annonce

perpétuels. Depuis dix ans, alors vain-queur de la Coupe et du Championnatsuisse avec le FC Sion,il n’a eu de cesse d’entretenir la querelleavec les autorités politiques ou sportives.De retour au FC Sion il y a trois ans, aprèsavoir porté tous lesnoms d’oiseaux sursa chemise Versace,il remporte un nouveau trophée en 2006. Bingo. Les affaires reprennent.«Tintin», comme on dit

près de chez lui, estreparti pour un cycle deprojets visant à renver-ser la logique du foot-ball, à pourfendre lestricheurs et à démas-quer l’adversaire sur letapis vert. Cela dit,c’est un entrepreneur àsuccès, dessinateurarchitecte de forma-tion, qui achète et venddes joueurs, comme lesimmeubles de la BelleEpoque à Montreux ouailleurs. L’entrepriseConstantin fonctionne àplein régime. La noto-riété n’a pas de prix.

J E A N Z I E G L E RL’ÉTERNEL COMBATTANTPA R D E N I S E T I E N N E

A 72 ans, toujours la même fougue, la mêmecapacité d’indignation, la rage chevillée aucœur. Celle de ses 29 ans, quand, de retour

du Congo, le sociologue publie son premier livre,Contre-révolution en Afrique (1963), celle del’époque d’Une Suisse au-dessus de tout soupçon(1976), lorsque, en dénonçant des manœuvres descapitaines helvétiques de la banque, il se révèle augrand public. Une combativité intacte et des armesidentiques, la plume, la voix, que le rapporteur spé-cial de la Commission des droits de l’homme del’ONU pour le droit à l’alimentation met aujourd’huiau service des populations qui souffrent de famineou de malnutrition. Mais l’auteur de L’empire de lahonte (2005), s’il s’en prend aux «seigneurs féo-daux», vise moins leur personne que le systèmemondialiste. Et, dans son pays, le tribun socialisteest écouté de cercles s’élargissant jus-qu’à l’ennemi de classe. Coopéra-tion envisageable: «Je me retrou-ve par exemple avec MarkusRauh, le président de Swiss-com, dans un comité contrela loi sur l’asile de Blocher.»Son avis sur l’emploi enSuisse? Il a voté oui à lalibre-circulation, «mais ilfaut combattre davantagele dumping»; et il reprendvolontiers l’antienne socia-liste du «droit fondamentalau travail pour tous». Son job à lui? Il est suspenduà la réorganisation dunouveau Conseil desdroits de l’homme, qui redéfinira lesmandats dans laseconde partie del’année. Mais si lerapporteur onu-sien s’apprête àfaire ses valises,c’est, pourl’heure, en vue de sa prochainemission en Afriqueaustrale.

PA R C H R I S T O P H E S C H E N K

Si chaque année le MontreuxJazz s’impose comme l’un desvecteurs majeurs des nouvelles

musiques, c’est grâce à elle. Depuis1997, Lori Immi travaille pour le festi-val du bord du Léman, comme pro-grammatrice, mais aussi pour tout cequi touche à la production. Initiale-ment assistante d’Emmanuel Gétaz,elle a commencé par prendre en charge l’affiche de quelques soirées auMiles Davis Hall, pour devenir ensuitela programmatrice officielle de ladeuxième salle montreusienne. Grâceà sa passion et à sa curiosité, elle aréussi à transformer le Miles Davis Hallen une scène dévolue aux artistes à lapointe dans leur genre. Du rock àl’electro, en passant par le folk, lesdécouvertes et les sensations dumoment viennent à la rencontre dupublic lors du Montreux Jazz.Lori Immi n’a pourtant pas toujourstravaillé dans le monde de la musique.Enfant, elle se voyait professeur degymnastique. Mais à l’adolescence,elle se rend compte qu’elle n’a pas

vraiment l’envie de «passer sa vie enjustaucorps». Elle entame alors desétudes de secrétariat et travaille sixans dans cette branche. Mais lamusique la rattrape et elle collabore –sur son temps libre – à divers festivalsromands. Enfin, elle décide de se pro-fessionnaliser vers le milieu desannées 90, en intégrant la société deproduction VSP, puis Volume Agency.Un parcours atypique qui lui ouvrirales portes du Montreux Jazz Festival.

72 ans, rapporteur spécialdes Nations Unies pour

le droit à l’alimentation.

54 ans, directeurdu Musée international

d’horlogerie de La Chaux-de-Fonds.

42 ans, programmatricedu Montreux Jazz Festival.

49 ans, président du FC Sion, architecte et promoteur immobilier.

L U D W I GO E C H S L I NLE GÉNIE DES MONTAGNES

LA FÉE DE MONTREUX

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C h r i s t i a nC o n s t a n t i nL’ENFANTDE LA BALLE MAGIQUEPA R E R I C F E L L E Y

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133133ARTISTES L’HEBDO 18 MAI 2006 LES 100

PA R M I R E I L L E D E S C O M B E S

Antoine est designer et Philip-pe architecte, deux métierscousins. Depuis dix ans, les

deux frères travaillent ensemble dansle cadre des Ateliers du Nord créés en1983 à Lausanne par Antoine Cahen,Claude Frossard et le graphiste Wer-ner Jeker. Ils ont à leur actif des pro-duits aussi divers que des fontainesà eau, un système de repassage àvapeur ou la fameuse Nespresso. Plu-sieurs fois primées et plébiscitées parles consommateurs enthousiastes,leurs machines à café prouvent quele design ne s’adresse pas à une

élite et qu’il peut être à la fois fonc-tionnel, ludique et élégant. AntoineCahen est très fier de la petite der-nière, deux fois moins chère que lesprécédentes. «Il y a vingt ans, ondevait se battre pour expliquer notremétier. Aujourd’hui, la seule chosequ’on en a retenue, c’est qu’il faitvendre. Mais le design n’est pas unstyle ou une carrosserie. C’est repen-ser un objet de A à Z. «Tout en chi-nant dans les marchés aux pucespour trouver de l’inspiration, il rêved’exercer son talent dans d’autresdomaines. «Après la machine à café,dit-il, pourquoi pas un scooter?»

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Philippe Cahen, 58 ans, architecte, Antoine Cahen, 56 ans, designer.

L e s f r è r e s C a h e nLE DESIGN N’EST PAS UNE CARROSSERIE

Fa c u n d oA g u d i n

PA R E R I C F E L L E Y

Mauro Poggia nebaisse pas lesbras face à un

adversaire qui sembletrop grand pour lui.Pourfendeur des assu-reurs, qu’il soupçonnede ponctionner indû-ment les ménages hel-vétiques dans le cadrede la LAMal, il a misune énergie particuliè-re pour obtenir plus detransparence dans lagestion des caisses,notamment en tant que

président de l’Associa-tion suisse des assurés(Assuas), forte dequelque 30 000membres. S’il a étéentendu, en partie, par

le Tribunal fédéral, ildoit sans cesse relancerla machine judiciairepour obtenir au comp-te-gouttes des informa-tions sur la comptabili-té des groupes. Sesadversaires, en particu-lier le Groupe Mutuel,chez lequel il estd’ailleurs assuré, bran-dissent chaque fois le«secret des affaires»pour l’empêcher demettre son nez dansleurs comptes. «Je necomprends pas cesecret des affaires dansle cadre d’une assuran-ce sociale but nonlucratif.» Dans la fou-lée, il lance cette annéeune nouvelle associa-tion pour la défensedes patients.

PA R S A B I N E P I R O LT

Un chauffe-eau à projets, une machine à déclics:voilà comment se définit le chef d’orchestre juras-sien. Il n’a pas tort. Lorsqu’on écoute ce passion-

né de musique parler de ses activités, une questionvient à l’esprit: quand se repose-t-il? Né en Argentine,c’est à Buenos Aires qu’il a vécu et a terminé des étudesuniversitaires de direction de chœur et d’orchestre. Puisil a mis le cap sur Bâle pour se perfectionner en chant eten composition historique à la Schola Cantorum. L’Ar-gentin n’est jamais retourné vivre dans son pays.A la tête de l’Opera Obliqua et de l’Orchestre sympho-nique du Jura, il est aussi directeur de «Musique desLumières», une saison musicale entamée en 2001 et quiprésente six à huit programmes annuels en Suisse et àl’étranger. Il crée des opéras à Bâle et produit des créa-tions de compositeurs suisses.Principal chef invité à l’Opéra national d’Arménie,Facundo Agudin travaille également à Erevan. Il est entrain de monter La flûte enchantée de Mozart dans letroisième théâtre le plus important de l’ex-URSS, avecune septantaine de musiciens et autant de choristes ettrente-quatre solistes d’un niveau incomparable. Unescénographe de l’Opéra de Zurich, le département detechnologie de l’image de l’Université de Bâle et OlivierFalconnier, professeur à l’Ecole supérieure des beaux-arts de Genève, collaborent au projet.

TOUT POUR LA MUSIQUE

47 ans, avocat, ex-pré-sident de l’Associationsuisse des assurés etfondateur de l’Associa-tion pour la défensedes patients.

PA R PA U L A C K E R M A N N

En mars 2005, Water Lilly sortait son pre-mier album, Sputnika. Depuis, le moteurde la navette s’est emballé. Demandée

aux quatre coins du monde, Monica Montesinos(de son vrai nom) a passé une année folle àvoyager, à créer, à rencontrer. Un exemple: leweek-end du 21 janvier, elle a dû quitter les -30degrés de Gdansk, en Pologne (où elle mixait),pour rejoindre les 14 degrés du Midem cannois(où elle représentait la Suisse romande avec sonlive explosif). Sputnika s’étant donc bien vendu,ici et ailleurs, elle se lance désormais dans unesérie de singles sur des labels étrangers. Unedémarche qui devrait déboucher sur un deuxiè-me album en 2007. Mais la Genevoise ne comptepas renier son identité romande en faisant fi desfrontières. Bien au contraire. «Je ne vois paspourquoi j’irais prétendre que je suis Berlinoiseou Londonienne, lance-t-elle. Mon identité est

romande, et, sincèrement, c’est cela que je veuxexporter.» Donc, pas de déménagement prévudans une capitale en vogue, contrairement auxautres musiciens électroniques triomphants dece coin de pays: Water Lilly est bien trop heu-reuse ici pour faire autre chose que rayonner.Un rayonnement qui se double d’une diversifi-cation. Water Lilly s’échappe effectivement dumonde underground genevois en mixant parexemple la prochaine compilation de la StreetParade ou en apparaissant dans des bars et desclubs plus populaires que l’Usine ou Weetamix.Le tout en gardant son emploi d’archiviste.Résultat: «elle n’arrête pas. C’est une dépensed’énergie positive.» Comme le lui a dit un amiquand elle a réussi sans problème à laisser tom-ber la clope: «Water Lilly ne fonctionne pascomme tout le monde, Water Lilly est uncyborg.»

CAUCHEMARDESASSUREURS

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31 ans,musicienne.

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34 ans,chef d’orchestreà Delémont.

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Aditi Metin p. 118-119Agudin Facundo p. 132-133Antille Emmanuelle p. 124-125Baier Lionel p. 134-135Bassi Andrea p. 108Baume-SchneiderElisabeth p. 102-103Benhadj Sami p. 86Bise Sandra p. 86Bolzhauser Beat p. 100-101Booth Stephanie p. 84Bouchat Théo p. 120Bourgeois Jacques p. 84Bourquard Pascal et Jean-Pierre p. 112-113Braunwalder Peter p. 94-95Brélaz Daniel p. 100-101Broulis Pascal p. 98-99

Cahen Antoine et Philippe p. 132-133Cardis Bertrand p. 114-115Chappatte Patrick p. 128-129Chassot Isabelle p. 96-97Collins Orianne p. 80-81Constantin Christian p. 130-131Cramer Robert p. 96-97Dahl Rocha Ignacio p. 106-107Danial Omar p. 120Danthine Jean-Pierre p. 108de Courten Didier p. 82-83de Haller Jacques p. 110de Meyer Sofia p. 116-117de Quattro Jacqueline p.88de Rubertis Francesco p. 116-117de Roulet Daniel p. 126-127de Weck Anne-Marie p. 98-99

Dias Carlos p. 118-119Emch Arlette-Elsa p. 90-91Faller Christof p. 82-83Falquet Nicolas et Loris p. 86Ferdman GuerrierBettina p. 122-123Fontugne Stéphanie p. 92-93Freysinger Oskar p. 134-135Garelli Stéphane p. 110Gehriger Willy p. 100-101Gétaz Emmanuel p. 126-127Gyger Patrick p. 126-127Haemmerli André p. 94-95Haug Laurent p. 114-115Hauser Claude p. 100-101Hayward Tarik p. 86Hernandez Nouria p. 110Herren Alexandre p. 88

Hodgers Antonio p. 78-79Hohl Frédéric p. 128-129Immi Lori p. 130-131Jauslin Jean-Frédéric p. 96-97Jun Liu p. 88Kaufmann-KohlerGabrielle p. 82-83Kellenberger Jakob p. 102-103Kissling Jérémie p. 126-127Kohler Pierre p. 126-127Koopmann Andreas p. 92-93Lambert Jérôme p. 92-93Lambiel Yann p. 136Lauener Dominique p. 118-119Lenstra Arjen p. 106-107Levrat Christian p. 92-93Leyvraz Serge p. 104-105Lole p. 128-129

Maradan Olivier p. 80-81MauvernayRolland-Yves p. 98-99Meldem Guy p. 86Melgar Fernand p. 128-129Morand Jean-Pierre p. 94-95Morrissey Michael p. 114-115Moser Manuel p. 134-135Nordmann Jean-Luc p. 116-117Nova Nicolas p. 114-115Oechslin Ludwig p. 130-131Perruchoud-MassyMarie-Françoise p. 120Pettigrew Michel p. 96-97Pfeifer Andrea p. 106-107Pictet Stéphane p. 122-123Pietri Marlyse p. 122-123Poggia Mauro p. 132-133Poupon Bernard p. 96-97Rahier Martine p. 108Rappaz Bernard p. 118-119Renninger Stefan p. 122-123

Reuland Ruud J. p. 98-99Richter Jacques p. 106-107Riedo Alain p. 116-117RimerNeil et David p. 116-117 Ritchey Steven p. 114-115Ronga Sanja p. 82-83Schwab Nicole p. 80-81Senderos Philippe p. 80-81Southam Anne p. 114-115Staehli John p. 114-115Syz Eric p. 118-119Tabin Marie-Claire p. 84Thibaudeau Nicola p. 94-95Thiébaud François p. 102-103Tschopp Jürg p. 106-107Vœgeli Alain p. 134-135Water Lilly p. 132-133Weiss Pierre p. 102-103Zaugg Beat p. 122-123Ziegler Jean p. 130-131Zocco Giuseppe p. 116-117

139L’HEBDO 18 MAI 2006 LES 100

L’INDEX ALPHABÉTIQUE DES ACTEURS 2006

138 LES 100 L’HEBDO 18 MAI 2006

LA LISTE 2005 Aebischer Patrick | Adler Tibère | Andrekson Andres | Barbier-Mueller Thierry | Becquelin Philippe | Bélanger-Simko Josée | Bender Léon ard | Berclaz Marc-André | Berset Alain | Bertarelli Ernesto | Bideau Nicolas | BiedermannDominique F. | Bisang Anne | Borel Daniel | Brabeck Peter | Bron Jean-Stéphane | Brunschwig Graf Martine | Burkhalter Didier | Bürki M arc | Burrin Philippe | Calmy-Rey Micheline | Chappuis Philippe | Cherix François | Chevrier

Philippe | Chevrolet Christian | Comtesse Xavier | Constantin Christian | Cook Julian | Cornelius Robin | Couchepin Pascal | Cramer Philippe | Cuche Fernand | Decrauzat Bernard | Duboule Denis | Favre Pierre-Marcel | Fleury Sylvie | Frenck Nahum | Garcia Alphonse |Genecand Benoît | Geninasca Laurent | Ghillani Paola | Gianadda Léonard | Gorgoni Joseph (Marie-Thérèse Porchet) | Gruosi-Scheufele Caroline | Guignard Philippe | Hayek Marc -Alexandre | Hayek Nick | Hayek Nicolas | Heiniger Patrick | Horn Mike | Hurst André |Jaconi Marisa | Jaggi Yvette | Jobin Jean-Pierre | Keckeis Christophe | Keller Laurent | Keller Pierre | Kleiber Charles | Kudelski André | Lambiel Stéphane | Lamprecht Carlo | Lamun ière Inès | Lamunière Pierre | Lang Thierry | Lombard Armand | Lombard Thierry | LongchampFrançois | Lyon Anne-Catherine | Magistretti Pierre | Maillard Philippe | Maillard Pierre-Yves | Marchand Gilles | Matthey Blaise | Maudet Pierre | Mayor Michel | Messadi Mehdi | M iauton Marie-Hélène | Mirabaud Pierre | Morand Geneviève | Nicod Alain | Nicollier Claude| Nobs Claude | Nussbaum Patrick | Odier Patrick | Ott-Baechler Isabelle | Pasini Willy | Passer Christophe | Piccard Bertrand | Pictet Ivan | Pidoux Philippe | Pierroz Roland | Pilet Jac ques | Poncet Charles | Proellochs Claude-Daniel | Rabaey Gérard | Rapp Jean-Marc | RavetBernard | Revaz Pierre-Marcel | Ribordy Grégoire | Rochat Philippe | Rogge Jacques | Rosselat Daniel | Rothenbuehler Peter | Rouge Nicolas | Rubin Pascal | Schwaab Klaus | Serm et Francis | Soguel Bernard | Sordet Philippe | Steiert Jean-François | Steimer Olivier | Strohmeier Alfred | Studer Jean | Wanner Christian | Wax Kate | Wenger Nelly | Zeller Alexandre