COMME HUMAIN

N° XLI II

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© 1992 - éditions Brouillons de CULTURE

9 square Charles Dullin 35200 Rennes

ISBN : 2 - 909731 - 00 - 6

dépôt légal 2 semestre 1992

— collection — VAGUES D'ÉCRITS

ISSN : 1167 - 5497

direction de la collection : Cathy PERSON Il a été tiré de ce livre :

300 exemplaires destinés à la vente numérotés de 001 à 300, 100 exemplaires hors vente numérotés de I à C.

Thierry Jacques Vilfroy

COMME HUMAIN

— collection —

impression et façonnage : Service de Reprographie Rennes 2 composition et mise en page : Selim Marc ROGLER

couverture : Éric CHÂTEL et Stéphane TILLY illustrations : Stephane TILLY

préface

«À quoi rêvent les jeunes filles ?» se demandait-on au début du siècle.

La question ne se pose plus. Du moins pour les jeunes gens. Les jeunes gens ne rêvent plus leur avenir, les jeunes gens ne rêvent pas le cauchemar.

Thierry Jacques Vilfroy a choisi la voie de la science-fiction pour décrire ce monde de toutes les violences où le dialogue n'a plus court, où l'on se cotoie sans chercher à se connaître, à se comprendre.

Pourtant que de tendresse inassouvie au fil de ces pages. Dur de quitter la chaleur de l'enfance, le cocon familial. Dur de découvrir la haine et la bêtise. Dur de grandir.

La vision que nous renvoie Thierry de notre monde est effroyable.

C'est un appel. Avant que ne déferle la haine ?

Marie-Annick MOIZAN

Bibliothèque Municipale de Saint-Brieuc

Bernard PLOUZENNEC

Bibliothèque des Côtes d'Armor

J '

a i m e courir sur la plage. Pendant les vacances, chez notre grand-mère, je descendais le long du chemin, plus petit chaque année au fur et à mesure que je grandissais. Au passage,

plongeant les mains dans les hautes haies d'épineux, j'échangeais quelques gouttes de sang contre ces si savoureuses mûres sauvages dont le rouge éclat ne manquait jamais de m'attirer. Tout en les en- gloutissant je m'enfonçais entre les deux murs du tunnel conduisant à la plage. Le jour, voilé par les amas de branches et de feuilles sur- plombant les façades humides, instantanément devenait nuit. Je m'arrêtais. Le temps pour mes yeux de s'habituer et je me libérais de mes chaussures. Ici, je pouvais sentir la terre grasse respirer sous mes pas. Là, je pouvais lentement me glisser jusqu'au cercle lumineux qui s'ouvrait un peu plus bas devant moi. Prenant garde de nepas heurter les grosses racines se contractant sur le sol, je franchissais les quelques secondes qui me séparaient de l'air libre. Je renaissais enfin.

Je m'asseyais sur le sable, ouvrais mon cahier et inspirais à gran- des bouffées l'air de plus en plus pollué. D'un timide coup d'œil je caressais la pointe de granit écrasée par l'immensité voutée du ciel. Elle était couverte sur sa base d'une épaisse touffe d'arbres rapide- ment remplacée par la lisse lande qui se découvrait sur un bout de roche brute s'érodant en fins cristaux dans les creux de la mer. Je dressais l'oreille afin de percevoir la douce berceuse du clapotis des vagues perdues sous le grondement du vent. Mon regard voguait sur les eaux montantes. Je scrutais le sol, la mer et le ciel essayant de fixer un point où tous trois pourraient se rencontrer.

Lorsque je pensais l'avoir trouvé j'ôtais mes vêtements et me lançais, lentement d'abord, puis petit à petit le vent qui ne faisait que filer sur mon corps se durcissait pour enfin me cingler le visage. Plus

rien ne me touchait. Je me trouvais seul, seul avec moi-même. Je fermais les yeux et voyais l'azur du ciel se perdre dans l'horizon bleu de l'océan. Je fermais la bouche et goûtais l'acide odeur de l'air qui, s'infiltrant dans mes narines toutes dilatées, s'engouffrait au fond de mes poumons. Au creux de mes oreilles rabattues plus aucun son ne sifflait, alors je pouvais écouter les battements de mon coeur. Tous mes muscles se tendaient, s'étendaient et se détendaient. Je sentais les vibrations de mes foulées tout le long de mon corps. Contre cet air qui ne pouvait s'insinuer, j'étais libre; contre ce vent qui ne pouvait m'arrêter, j'étais libre. Seul et libre. Mais je voulais plus, encore plus que la liberté, je voulais être moi, rien que moi. Alors je bondissais, haut et loin. Et l'air que jusqu'alors j'affrontais en un saut disparaissait. Et le mur que jusqu'alors j'en- fonçais en un bond s'effaçait. Je n'avais plus de corps, plus rien n'existait. J'étais moi, rien que moi...

■ est une association qui s'efforce de faire connaître ce que les jeunes de Bretagne écrivent. De fait, ils sont très nombreux à écrire : des lettres, des poèmes, des nouvelles, des écrits libres, un journal personnel, un ro- man...

L'écriture est devenue pour eux un moyen privilégié d'ex- pression. ■ -affiliée à l'association nationale «Vivre et l'écrire»- sou- haite faire découvrir à tous les jeunes que leurs écrits peuvent être aussi un formidable moyen de communication entre eux, et aussi avec bien des adultes !... ■ -association loi 1901, sans but lucratif- propose aux jeunes et aux adultes :

une correspondance : dès la première lettre, quelqu'un de Vagues d'Écrits répond personnellement au courrier. La correspondance est libre : pas de jugement, ni de ta- bou ! des animations d'écriture spontanée : en centres so- ciaux, collèges, lycées, bibliothèques, et tous autres points de rencontres-jeunes. des conférences-débats : avec des parents, des profes- seurs, des éducateurs et avec des jeunes eux-mêmes sur divers thèmes... une banque de dépôt et archivage : jeunes et adultes peuvent confier leurs écrits à l'association. une collection de livres écrits par des jeunes : ouvrages collectifs ou individuels tels «M. COMME HUMAIN», premier livre de la collection «VAGUES D'ÉCRITS», aux éditions «Brouillons de CULTURE».

Chaque jeune, avec le soutien de l'association Vagues d'Écrits, peut découvrir et expérimenter les moyens d'être édité.

☞ Si ces activités et ces projets vous intéressent, n'hésitez pas à nous contacter :

VAGUES D'ÉCRITS ☎ 96 44 36 12 2 Avenue Kennedy 22200 GUINGAMP