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Constantine Capitale de la Culture Arabe 2015 lemqam Numéro 04 - juillet 2015 www.qasantina2015.org MIRIAM MAKEBA, Ana hourra fi El Djazaïr Une alchimie sonore pour des miracles plein les oreilles DE AMAR EZZAHI À AMAZIGH KATEB VIVA L ALGeRIE One i TWO i THREE i I I

Maqam numéro 04 fr juillet 2015

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Revue culturelle (02 cahiers mensuels) en arabe, français, anglais et tamazight, publiée dans le cadre de la manifestation Constantine capitale de la culture arabe 2015.

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Page 1: Maqam numéro 04 fr juillet 2015

Constantine Capitale de la Culture Arabe 2015 lemqam

Numéro 04 - juillet 2015

www.qasantina2015.org

MIRIAM MAKEBA,

Ana hourra fi El Djazaïr

Une alchimie sonore pour des miracles plein les oreilles

DE AMAR EZZAHI À AMAZIGH KATEB

VIVA L ALGeRIEOnei TWOi THREEi

I I

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L’Office national des droits d’auteur et droits voisins (ONDA) a rendu début juil-let à Alger un vibrant hom-

mage à Cheikh Namous, de son vrai nom Rechedi Mohamed, en signe de reconnaissance à son long et riche parcours de musicien talentueux.À cette occasion, marquée par la présence du ministre de la Culture, Azzedine Mihoubi, un Trophée hom-mage lui été remis par le directeur

général de l’ONDA, Sami Bencheikh El Hocine.Outre la projection d’un film docu-mentaire retraçant le parcours du musicien, la soirée hommage a été animée par quatre artistes de la chanson châabi que sont Cheikh Abdelkader Chercham, Kamel Aziz, Nardjess et Tarek Difli. Né le 14 mai en 1920 à Alger, Cheikh Namous débuta très jeune sa carrière de musicien (banjo) avec

l’orchestre de Cheikh Abderahmane Sridek.En 1951, Rechedi Mohamed intègre l’orchestre de musique «Elak» dirigé par cheikh Noreddine comme musi-cien professionnel.L’artiste qui boucle ses 95 ans cette année, a côtoyé de grands artistes de l’époque, notamment cheikh El Hadj M’hamed El Anka, Mrizek, Mé-nouer, Taleb Rabah, Slimane Azem et d’autres encore.

L’ONDA procédera à la sortie de deux cof-frets de musique du patrimoine culturel traditionnel du genre Chaâbi, interprétée par Nacer Mokdad et Sid Ahmed Lahbib. Deux disques du mérite ’’ONDA’’ seront décernés par monsieur le Premier Mi-nistre à ces deux artistes, pour leur contri-bution à l’enregistrement des œuvres du patrimoine culturel traditionnel.

OFFICE NATIONAL DES DROITS D’AUTEUR ET DROITS VOISINS

Vibrant hommage au musicienCheikh Namous

Promouvoir notre patrimoine culturel

Ph

oto Un

e : Walid

Ham

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Maqam numéro 04 - juillet 2015

« Les yeux baissés » face à

« La soudure fraternelle »

De nombreux écrivains algériens ont séjourné au Maroc et ont aimé ce pays sans le moindre complexe. Mou-loud Mammeri y a vécu une partie de son enfance, entre 1928 et 1932. Il y est retourné, 30 ans plus tard, en ne quittant le Royaume qu’après l’indépendance de l’Algérie. Rachid Boud-jedra a enseigné à Rabat durant les années 70. Rachid Mi-mouni s’y est établi en famille; à Tanger plus précisément ; et Mohamed Arkoun, le rénovateur de la pensée islamique y est enterré. Tous ces intellectuels qui ont suffisamment connu le Maroc, ses devantures et ses arrière-cours, n’ont jamais osé dépasser les limites de la correction, en évoquant occasion-nellement ce pays à travers leurs sorties médiatiques. Mieux, ils ont tous exprimé le sentiment de bien-être chez soi, jouant parfaitement leur rôle d’une élite éclairée et visionnaire dont le regard dépasse la conjoncture politique. Ils ont été tout simplement lucides, académiciens et pédago-gues. Ainsi, ni La colline oubliée, ni L’escargot entêté, ni La pensée arabe, ni encore L’honneur de la tribu n’ont été « bê-tement » souillés par l’infamie. Ces œuvres et leurs auteurs sont donc demeurés loin, très loin du démarchage politicien cyclique, préférant concentrer toute leur énergie à comprendre le fait social dans sa dimension maghrébine la plus nuancée. Mammeri, Boudjedra, Mimouni et Arkoun ont continué à culti-ver dans leurs écrits, l’Eloge de l’amitié, à l’opposé de l’auteur de ce roman qui vient d’exécuter un sale « contrat » commandi-té par des enjeux électoralistes venus d’ailleurs qu’aucun écri-vain digne de ce nom n’aurait accepté. Moha le fou, Moha le sage, l’auguste membre de l’Académie Goncourt, s’en est pris violemment à l’Algérie, en utilisant un procédé et un lexique indignes de son statut littéraire. Son « coup de gueule », qui ressemble curieusement à une récente déblatération anti-algérienne perpétré par une person-nalité politique française, véhicule une haine monstre contre un pays où il n’y a jamais mis les pieds. Une attitude qui pue l’intolérance. A l’inverse de Mammeri, Boudjedra, Mimouni et Arkoun qui ont fait preuve d’une remarquable clairvoyance et d’une hauteur d’esprit propre aux gens de Lettres, l’auteur de La nuit de l’erreur est tombé dans les travers de la manipula-tion gratuite, Les yeux baissés.

M. M.

ÉDITORIAL

DIRECTEUR DE PUBLICATIONSami Bencheikh El Hocine

RÉDACTEUR EN CHEFMohamed Mebarki

RÉDACTION Hamid Ali-BouacidaDjamel BelkadiIkram Ghioua Ranida-Yasmine MerazFarah FerielMohamed Bouhabila

DIRECTION ARTISTIQUEWalid Hamida

DESSIN / CARICATUREFerhat Ilies

PHOTOGRAPHIEMohamed Lamine Hamida

Contact : Revue Maqam

Siège : Centre International de Presse (CIP), Boulevard Zighoud Youcef [email protected]

www.qasantina2015.org

Impression ENAG

La reproduction intégrale ou partielle des articles est soumise à l’accord de la rédaction

Revue publiée par le Commissariat de la manifestation Constantine capitale de la culture arabe 2015

www.advercorp.dz

ADVERCORP119 A lot Eriad Ain SmaraConstantine - Algérie.T. 031.97.26.54E. [email protected]

lemqam

Par Mohamed Mebarki

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Le FoNd et La Forme

Hommage

En lettres capitales

Hommage

p.6 p.12

p.26

Memoire

L’artisan émérite du premier projet culturel national

Invitation

Ahl El Djazaïr

Ana hourra fi El Djazaïr

Gracieuse et enchanteresse

Une vie dans le théâtre

p.19

p.17-25

p.11

p.16

p.24

L’oasis rouge telle que Boudjedra ne l’a pas racontée

fondouk VIVA L’ALGeRIE

One TWO THREE

I I

UN ÉTÉ 62

SOUAD ASLA

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Ana hourra fi El Djazaïr

Istikhbar

Soleils sonoresMaqam offre à ses lecteurs un numéro

tout en musique pour célébrer toutes ces voix qui ont jailli, à force chants et à force gorges, pour fêter la patrie,

glorifier l’Indépendance et perpétuer l’esprit patriotique chez une jeunesse qui, aujourd’hui, dans une poussée flamboyante, n’a de cesse de nous prouver et prouver au monde entier son at-tachement à son algérianité.D’illustres artistes, chanteurs et musiciens, femmes et hommes de ce cher pays, ont consa-cré leurs vies à la réappropriation, la préserva-tion puis la transmission d’un riche patrimoine culturel identitaire que le colonialisme prémédi-tait de gommer dans une tentative monstrueuse de dépersonnalisation de tout un peuple.

Aujourd’hui, ce socle identitaire, cet immense patrimoine culturel matériel et immatériel hérité, de part sa diversité, ses ramifications, ses muta-tions et ses territoires, fait l’objet d’un intéresse-ment scientifique, institutionnel et social jamais égalé auparavant.Moment décisif, historique même, car nous considérons qu’il constitue le prélude, ou en-core, cet Istikhbar intelligent à une modulation savamment orchestrée, une jonction de tous les efforts, tant pour sa sauvegarde, sa réhabilita-tion, son enrichissement que pour sa promotion et sa revalorisation.

En déclarant récemment que : « La culture se construit par la société et non par l’adminis-tration. », l’homme de culture et ministre de la Culture, M. Azzeddine Mihoubi, à bien précisé cette conscience et cette volonté institutionnelle d’aller vers une politique de rationalisation glo-bale. Une politique qui, forcément, induit, outre

une crispation financière sur laquelle se sont étroitement et indûment focalisés les médias, une volonté de « défolklorisation » de ce patri-moine culturel. Une vision qui implique, surtout, la prééminence d’une approche prospective porteuse d’une signifiance empirique, symbo-lique, syncrétique et consciente des risques et des enjeux de la globalisation et ceux inéluc-tables de la modernité.

À l’image de ces initiatives de patrimonialisation des savoirs traditionnels, des process scien-tifiques de leur réhabilitation et des politiques de leur mise en branle, nous compterons avec satisfaction et une grosse attente quant à leur aboutissement salutaire, ces démarches pers-picaces portées par des actants de la société civile et tendant à inscrire et à verser au patri-moine mondial la musique classique algérienne.

Une musique qui, aujourd’hui, avec la formation d’un ensemble national de musique andalouse (ENAMA) qui rassemble sur une même partition les écoles musicales ; le Gharnati de Tlemcen, la Sanaâ d’Alger et le Malouf de Constantine, revendique avec mérite d’être légitimement re-connue comme étant une musique universelle. Et ce statut, n’est-il pas déjà là quand l’Algérie est célébrée en ce début du mois d’août, à l’oc-casion de l’Exposition universelle de Milan 2015, avec un récital absolument inouï, exécuté avec grâce et distinction par cet Ensemble national de musique andalouse.

C’est là, croyons-nous, l’apport inestimable de la culture algérienne et du peuple algérien à toute l’humanité.

Gracieuse et enchanteresse

Par Dj. Belkadi

Dj. B.

fondouk

SOUAD ASLA

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VIVA L’ALGeRIE

En lettres capitalesFÊTE DE L’INDÉPENDANCE ET DE LA JEUNESSE

Onei TWOi THREEi

I I

Illustration Walid Hamida

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Lorsque cet air fut inventé au début des années 80, par les vétérans du Hittisme, ces jeunes collés aux murs fissurés des centres historiques des grandes villes, personne ne se doutait qu’il allait traverser la terre entière au rythme d’un hymne céleste pour devenir le « cri » de ralliement de tous les Algériens à travers la planète.

d’une troupe façonnée dans le fou rire. A cette époque, Hasna de Béchar, le groupe Kahina de Batna, Khaled, Idir et Nouredine Staïfi charmaient les foules, et Amar Zahi entrainait ses admirateurs vers les rivages calmes d’un Chaâbi « habité » par les es-prits. En ce qui concerne le grand écran, Les cinéphiles algériens avaient l’embar-ras du choix entre des superproductions affichées en avant-première mondiale, comme ce fut le cas pour Apocalypse Now de Francis Ford Coppola, des projections rares du patrimoine cinématographique abritées par des cinémathèques de longue tradition, et un programme de haute fac-ture présenté par la télévision nationale.

Les chiffres de la liesseCette période fut celle de la culture sous toutes ses formes, en Algérie et dans le monde. Même le foot était imprégné culturellement et certains chants des gra-dins, portés par une intense ferveur, ont traversé, des villes et des peuples, avant de s’élever vers un ciel constellé. Repris 30 ans plus tard par de jeunes chanteurs, 1, 2,3, viva l’Algérie, que les radios brési-liennes enregistraient à plein tube sur la

Par Mohamed Mebarki

One, two, three viva l’Algérie grandit et gronda pour la première fois au stade du 5 juillet à Alger, lors d’un match amical disputé par

l’équipe nationale algérienne qui se prépa-rait à son baptême mondial prévu en terre ibérique. Ce fut une symphonie frappée du sceau de la jeunesse, célébrée, dans un stade plein à craquer, par une rue qui savait dessiner le triomphe. Le « coup de foudre » a tonné dans un ciel printanier de l’année 1982, et l’Algérie entière fut submergée par un amour juvénile écla-tant dans un énorme brouhaha. C’était l’époque des voitures italiennes et japo-naises destinées aux classes moyennes, et les confortables allocations touristiques en devises fortes qui offraient l’Europe à une jeunesse certes impatiente, mais qui s’est vite ressaisie au moment de faire le choix entre la tentation occidentale et l’ap-pel de la terre mère, en s’enracinant da-vantage dans la société. A cette époque, l’activité culturelle arrivait à imposer son mode de vie. Slimane Benaïssa et Ab-delkader Alloula plantaient des milliards de graines dans des esprits asséchés et assiégés. Le Théâtre régional de Constan-tine inondait de son humour hallucinant une Algérie conquise par le style loufoque

One, two, three, viva l’Algérie

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monte à loin quant à ses motivations psy-cho-sociales, si on revient à cette époque inoubliable que l’Algérie a connue après le Cinq juillet 1962, et à cette liesse incom-mensurable qui s’est emparée des Algé-riens.

Al Hamdou lillah ma bqach istimar fi bladna!La joie de tout un peuple épris de liberté fut célébrée par de nombreux artistes dont l’inimitable El Hadj M’hamed El Anka et son Al hamdou lillah ma bqach istimar fi bladna. Fraichement sortie d’une nuit co-loniale dure et obscure, la foule n’était pas encore habituée à chanter à l’unisson. Ce sont donc les artistes qui canalisèrent le bonheur d’une liberté arraché de haute lutte, exprimé par tout un peuple. Dieu soit loué avait jubilé l’indétrônable patriarche au rythme d’une harmonie musicale ma-gistrale, mariant subtilement le traditiona-lisme chaâbi aux nouveautés patriotiques. El Anka a interprété majestueusement une liesse populaire, en la faisant planer sur des airs qui sentaient le jasmin et la menthe au beau milieu d’un « Ouast Ed-

main courante du stade du 5 juillet, par une soirée printanière de l’année 1982, fait toujours vibrer les cœurs. Habitués à l’exu-bérance populaire, les Brésiliens n’avaient pas tardé à détecter toute l’énergie cumu-lée dans 1, 2, 3, viva l’Algérie. Et ils ont vu juste. Chez nous, les trois chiffres se mul-tipliaient déjà à une très grande vitesse, et réinvestissaient, ruelle par ruelle, les lieux populaires où ils ont vu le jour, la première fois, en arborant un bel emblème, verdure et blancheur unies par les liens du sang de l’étoile et du croissant. Le chant est désor-mais partagé par des millions de jeunes. Il est présent à chaque performance algé-rienne. Il est à présent un titre fédérateur à la gloire de l’Algérie. Le 5 septembre 1993. Tout le monde se souvient de la situation qui prévalait, en ce moment, en Algérie. Ce jour là, et malgré la tragédie, 1, 2, 3, viva l’Algérie raisonna dans tout le pays, dans la foulée du record mondial décro-ché par Nordine Morsli à Rieti en Italie. Ce fut un sursaut d’orgueil de la part d’une jeunesse qui luttait âprement contre la dé-prime, et un cri dégagé par des millions de poitrines pour dire non à la mort, non au désastre. Oui, 1, 2, 3, viva l’Algérie a tou-jours constitué un acte de résistance. Un acte populaire dont la filiation ne s’arrête pas aux performances sportives, mais re-

Dessin Abderrahmane Chaouane

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dar », patio au style mauresque baigné par une nuit d’été. Dans la chorale qui l’ac-compagnait, une jeune silhouette portée par un sourire flamboyant se distinguait déjà. C’était celle de Hachemi Gueroua-bi qui allait s’imposer lui aussi comme un Cheikh incontestable de la « sanaâ ». Les couches populaires étaient encore sous le coup de l’émotion, et ce sont les artistes qui avaient su traduire l’exceptionnel senti-ment d’apaisement des Algériens toujours sous l’emprise d’une allégresse enivrante. La radio a fait pénétrer la voix du maitre El Anka dans les demeures et dans le cœur d’une population passionnée par l’indé-pendance, avant que la télévision n’élar-gisse l’audience d’un maitre qui venait de signer un « single » époustouflant à travers lequel le mandole a dansé sur le fil. Il a sa-lué l’Algérie en y mettant tout son talent, et il a réussi ; à sa manière, à la manière des maestros. Dans un autre registre ar-tistique, légèrement influencé par les ten-dances musicales modernes de l’époque, Abderrahmane Aziz composa et interpréta Ya Mohamed mabrouk alik Al Djazaïr ra-jaât lik. Une chanson qui inscrira son nom en haut du répertoire musical algérien pendant des années, et un texte reflétant toute la dimension d’un bien sacré que les Algériens se sont réappropriés en offrant tout ce qu’ils avaient de meilleur.

Lillah ya Djazaïr !D’autres chanteurs et d’autres artistes dans le cinéma et le théâtre ont emprunté cette voie. Saliha, Nora, Ahmed Wahbi, Ha-cène El Annabi, Khélifi Ahmed, Hacène El Hassani, Mahiedine Bachtarzi et Boualem Titiche, pour ne citer que quelques uns, ont glorifié l’indépendance, chacun selon ses propres fibres, dans des contextes plus ou moins différents, mais toujours avec le même enthousiasme vivifiant. Plus tard, Khaled est arrivé à se frayer un chemin

vers la lumière du jour, en faisant briller les plus beaux bijoux du Raï. La complainte bédouine et la mélodie oranaise ont scin-tillé de mille feux au beau milieu des an-nées 80, illuminées par la voix ensoleillée de l’enfant d’Eckmühl. Loin d’être consi-déré comme un chanteur engagé, Khaled a toujours fait acte de présence lors des célébrations nationales. En dix ans, du-rant lesquels il avait augmenté de volume, artistiquement parlant, en côtoyant Safy Boutella et Jean-Jacques Goldman, le roi du Raï a réussi à atteindre le niveau d’une vedette internationale confirmée. Sa noto-riété est désormais établie à Beyrouth, au Caire, à Marseille et à Marrakech, et son amour pour Bakhta et Aïcha dessiné par une florale d’accents, du Liban au Maroc. Ensuite, son attachement à son pays a fini par faire tomber tous les préjugés cultivés au sujet d’un genre musical « dévergon-dé », aux yeux de beaucoup, en donnant naissance à une des plus belles chansons dédiées à l’Algérie. « Lillah ya Djazaïr », un texte dense et limpide, composé par Lotfi Bouchenak, le plus algérien des Tu-nisiens, et chanté par le King lui-même, mit du baume à des millions de cœurs meurtris, et propulsa Khaled au sommet des hit-parades pour une très longue du-rée. De l’avis de nombreux mélomanes, le clip « Lillah ya Djazaïr » constitue un concentré d’amour pour l’Algérie qui ne sera jamais démodé. A vrai dire, ce n’est pas la première fois qu’un troubadour du Raï convertisse son art en une profession de foi patriotique. Un enregistrement par-tagé sur les réseaux sociaux nous rappelle que l’énigmatique Cheikha Djenia avait eu, elle aussi, l’insigne courage de s’opposer frontalement au terrorisme, dans une de ses chansons. Toujours au registre du Raï, Nasro avait essayé, à sa manière, d’exor-ciser les vieux démons, en implorant le ciel de protéger l’Algérie.

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Ya Er rayeh ! En un mot comme en mille, la beauté de l’Algérie a été exaltée par un nombre incal-culable d’artistes dans tous les domaines, même si la chanson s’est accaparée de la part du lion, grâce à son ancrage populaire prononcé. De Blaoui Houari à Beggar Had-da, et d’Akli Yiahiaten à Souad Massi, en passant par Hocine Lasnami, Amazigh Ka-teb et Cheb Akil, chacun de ces chanteurs a essayé d’exprimer ses attaches à ce pays comme il les ressentait, et suivant sa voca-tion artistique et culturelle. En 53 ans, l’Algé-rie a été fêtée en paroles et en musique par des générations de compositeurs et d’in-terprètes dont certains ont pu accéder au statut d’immortels à l’image de Dahmane El Harrachi et Ouarda El Djazaïria. Même les chanteurs qui ont opté pour le « coup de gueule » et la contestation, à l’instar de Matoub Lounes, la troupe Debza ou Nezzar Nouari, lui ont rendu hommage.

En dépit des vexations res-senties par les uns et les tra-jectoires contrariés des autres, l’amour, l’espoir et la vie dans un pays réconforté sont demeu-rés des valeurs sûres partagées par la majorité des chanteurs algériens.

En vérité, rares sont ceux ou celles qui ont été touchés par le déracinement l’alié-nation culturels. Rachid Ksentini, El Bar Amar, Idir, Horria Aïchi, Rachid Taha et tant d’autres ont été suffisamment nourris aux sources de l’algérianité pour ne pas succomber à l’appel des sirènes d’une in-tégration hexagonale réfléchie et mise en œuvre par les tenants du jacobinisme. L’Al-gérie est demeurée profondément enraci-née dans le cœur et l’esprit de ces artistes au talent reconnu. Ce sentiment d’appar-tenance à la patrie n’est certainement pas unique au monde. Il est partagé par d’autres peuples et d’autres artistes qui ont chanté et aimé des terres considérées par eux comme des parcelles de paradis. Il est toutefois singulier dans sa dimension émotionnelle. Car, aimer l’Algérie est au-jourd’hui une griffe et un label revendiqués par une jeunesse qui ne reprend pas seu-lement à son compte une vieille ovation qui provoque toujours la même émotion, mais qui innove. Si 1,2,3, viva l’Algérie inspire encore les artistes et le show-biz, c’est grâce à l’engouement porté par cette jeu-nesse. Le « tube » est vécu avec une inten-sité pareille à celle qu’il avait, il y’ a 33 ans. Les temps changent, mais le ton demeure dans le plus pur style d’une société aux traditions orales bien ancrées. En interpré-tant magistralement Ya Er rayeh, Dahmane El Harrachi a résumé parfaitement l’irré-sistible appel de la patrie qui transcende toutes les structurations sociales, cultu-relles et politiques. Au lendemain de I’Indépendance, des icônes de la chanson algérienne s’étaient attelés et ont réussi à traduire les senti-ments partagés par l’ensemble des Algé-riens. Vingt ans plus tard, la génération des vingt ans, plus ou moins marquée par l’esprit conquérant des ainés, mais mieux adaptée aux effets de l’indépendance et de la liberté, renverse la vapeur. Dé-sormais, c’est beaucoup plus la foule qui inspire les chanteurs. Depuis, l’influence entre les chanteurs et la société navigue dans les deux sens

M. M.

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Ahl El DjazaïrCela remonte à très loin et à réécouter ces chansons patriotiques qui passaient en boucle à la radio, une vague infinie de nostalgie m’envahit. Comment oublier ces journées brûlantes de juillet 62 où l’oreille collée au «TSF» familial ou à ce qu’on appelait « transistor », radio portative que le grand frère baladait à la place de «la Brèche», vécues dans l’ambiance des chants patriotiques ?

Par Alioua Bouchoua

Il y en avait de tous les genres, du chaâbi pur avec El Hadj El Anka qui délaissa le temps du devoir sa grande satire sociale pour consa-crer à l’Algérie une superbe produc-tion «El Hamdoulillah, mabkache

istîmar fi bledna», à la variété qui s’y mit avec Abderrahmane Aziz avec « Ya Moha-med mabrouk alik» (celle-là qui repassera trente ans plus tard quand Mohamed Bou-diaf reviendra de son exil), en passant par d’autres chansons qui résonnent encore dans la tête comme les cloches d’un pas-sé à la fois lointain et intact…Je me sou-viens de ce foisonnement de chansons interprétées par d’illustres inconnus qui lui-ront le temps d’un succès repris par toutes les générations, avant de disparaitre défi-nitivement. Les sexagénaires se rappellent

Nostalgie

UN ÉTÉ 62

de « Ahl el djazaïr», « nar ya istîmar» à la célèbre « Watan el akbar» interprétée par une pléiade d’artistes égyptiens dont Ab-delhalim Hafez, Chadia, Nadjat Essaghira. Un chef-d’œuvre composé par Mohamed Abdelwahab que la télévision a la bonne idée de transmettre à chaque fois qu’il y a massacre à Ghaza, c’est-à-dire plusieurs fois…Pour dire que cet été est resté gravé dans la mémoire. Pour sa luminosité, pour sa solidarité, pour tout l’espoir qu’il charria auprès de la population. Du haut de mes dix ans, je m’accrochais aux bennes des camions Berliet pour crier l’indépendance retrouvée et du côté de l’ordinaire, il n’y avait aucun souci à se faire : les trottoirs et les seuils des maisons regorgeaient de plats de couscous posés à même le sol et en libre service! A la tombée de la nuit

et sur injonction de mon père, je rentrais la mort dans l’âme laissant la place de la Brèche s’illuminer de mille feux et ça dan-sait jusqu’à l’aube. Aujourd’hui avec le recul et l’âge qui a fait son œuvre, je crois bien qu’en ces journées lumineuses de ce juillet 62, nous avions entrevu l’Algérie telle qu’elle était rêvée, avec sa paix et sa quiétude revenues, le gigantesque élan de solidarité qui s’instaura au sein de la popu-lation, la joie de vivre retrouvée et surtout le goût de l’effort parce qu’il faut rappeler que l’année 1963 sera marquée par une récolte record de céréales. Du jamais vu. Ahl El Djazaïr avaient au prix du sang, ré-cupéré leur pays.

A. B.

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Ana hourra fi El Djazaïr

Sa vie a été une lutte continue contre l’injustice et le despotisme. Son combat ne plaisait pas beaucoup aux producteurs, mais son talent les a forcés à l’accepter. Anticonformiste jusqu’aux bouts des ongles, elle se marie en 1969 avec Stokely Carmichael, le chef des Black panthers. Cette liaison lui coûte son séjour aux Etats-Unis. Durant la même période, elle accède au statut de citoyenne d’honneur dans dix pays africains dont l’Algérie. Elle a été proclamée algérienne par Houari Boumediene.

HommageMIRIAM MAKEBA, LA VOIX DE LA RÉVOLUTION

Par Ikram Ghioua

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Elle a chanté la douleur et l’insou-mission. Elle a jubilé l’amour et la gloire. Elle n’a pas seulement transcendé les siens, mais elle a réussi à emporter par sa puis-sance vocale et la force de son

art, des milliers de fans vers le sens de la liberté. Elle est forcement et sans aucun doute la beauté du rythme Africain. Elle, c’est la voix de la révolution, de la vérité et une expression artistique du déman-tèlement de l’apartheid. Elle c’est Miriam Makeba, l’ambassadrice du rêve Africain, de la justice et de la bonne volonté. La voix de la chanteuse sud-africaine disparue le 9 novembre 2008 à l’âge de 76 ans n’ar-rive peut-être plus à se faire entendre au beau milieu de cette formidable fusion de rythmes et de sonorités, mais elle continue de réveiller la nostalgie de toute une géné-ration d’Algériens qui ont écouté ses chan-sons ou assisté à ses galas organisés à Alger depuis le festival panafricain de 1969.

Un amour africainEn se produisant à Alger, elle n’a fait que suivre à la trace son héro, Nelson Mande-la, le leader et le symbole, qui avait effec-tué un « pèlerinage » en terre algérienne dès 1963. Son passage en Algérie dans une conjoncture marquée par la lutte an-ti-impérialiste est resté gravé dans les mémoires. Elle l’a signé d’une fort belle manière, en laissant son âme crier : « ana hourra fi El Djazaïr » alors qu’elle exécutait son légendaire tube Ifriqiya, Afrique, Afri-ca, intitulé en trois langues. Une déclara-tion d’amour dédiée à l’Afrique que Miriam Makeba avait partagée avec la mythique chorale de l’ex-RTA, Radio télévision algé-riennes, lors d’un magnifique tour de chant en Anglais, en Arabe et en Français. Privée de ses droits les plus fondamentaux dans un pays où une oligarchie financière origi-

naire des Pays-Bas et de Grande Bretagne exerçait une domination sauvage sur des millions d’êtres humains parqués comme des animaux dans des bantoustans sans droit, elle a retrouvé en Algérie la terre d’asile « promise » à tous les opprimés de la terre.

L’exil en trois décenniesZenzi, comme on aime l’appeler, est née le 4 mars 1932 à Johannesburg. A 20 ans, elle commence à user de sa voix. De condi-tion sociale assez modeste, elle est obligée d’élever seule sa fille tout en prenant soin de sa mère. Les affres de la vie, l’injustice et la ségrégation raciale ont fini par éveil-ler sa conscience politique. Après Cuban Brothers, elle devient choriste du groupe Manhattan Brothers, avec un nouveau nom de scène, Miriam. Son métier lui permet de dénoncer le régime de l’apartheid. En 1956, avec son tube « Pata, Pata », qui signe-ra son plus grand succès, elle fera le tour du monde entier. Son engagement contre ce régime impérialiste et de son apparition dans le film anti-apartheid Come Back, Afri-ca du cinéaste américain Lionel Rogosin, lui sera fatale, puisqu’elle est forcée à un exil de longue durée. Elle est même empê-chée d’assister, en 1960, aux obsèques de sa propre mère. Son retour dans son pays natal n’interviendra qu’après la libération de Nelson Mandela, dont elle avait épousé la cause pour militer à sa façon en chantant en zoulou, en xhosa, en tswana, en swahili et en arabe, Ana hourra fi El Djazaïr à l’oc-casion des Jeux africains de 1978. Depuis ce pays qui avait connu les affres de l’occu-pation et qu’elle considérait comme le sien, ses mélodies qui expriment la tolérance et la paix ont été diffusées sans la moindre contrainte, comme elle ce fut le cas aux États-Unis, en Guinée ou même en Eu-rope. Ses chansons traduisaient la dignité d’un peuple par lesquelles elle devient le symbole de la lutte anti-apartheid. Avant de mettre fin a sa carrière en 2005, elle publie son autobiographie Makeba « My Story ». La diva rêvait d’une grande Afrique unie, en faisant appel au pardon. Elle est à l’ori-gine de l’expression, « Il faut nous laisser grandir. Les Noirs et les Blancs doivent ap-prendre à se connaître, à vivre ensemble ». C’est en Italie, et à l’âge de 76 ans ; un certain 9 novembre 2008, que la voix de la révolution s’est éteinte, laissant derrière elle un combat légendaire

I. G.

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Une alchimie sonore pour des miracles plein les oreilles

Loin de proscrire la pensée, le silence en est l’acte de naissance, sa germination profonde. Il en est son recueillement, son fiat (le Soit). Verbe antérieur à la parole et creuset du chant, la matrice de toute création artistique et la condition de son apparaître au monde.

LLe retrait du grand maître du chaâbi, Amar Ezzahi, de la scène médiatique artistique et culturelle nationale à, incontestablement, fait de lui cet homme sage et humble à la générosité

légendaire et grandement respecté, non seulement dans le microcosme du chaâbi mais également dans l’imaginaire de toute la société algérienne. Icône incontournable de ce patrimoine ancestral que constitue le chaâbi, en tant que chanson, musique, mais surtout, en tant que mode et art de vivre, avec ses codes, sa ritualité, ses modes, son parler, ses ambiances et sa convivialité, Amar Ezzahi a su préserver l’âme de cet art et son authenticité, ceci tout en prolongeant la noblesse de cet héritage en lui assurant un renouveau esthétique certain chez la jeunesse d’aujourd’hui.Refusant la gloire et le faisceau des projecteurs, il reste pour ses fans et tous les algériens, un virtuose de la race des géants qui, avec son apport multidimensionnel, constitue un pilier monumental de l’identité nationale.Que n’a-t-il pas déterré et sorti de l’oubli ces

Légende

DE AMAR EZZAHI À AMAZIGH KATEB

Photos Lamine Hamida

Par Dj. Belkadi

pièces rares du répertoire inépuisable du Melhoun, du Medh, des joyaux inédits, et ces textes poétiques fabuleux, des perles menacées d’ensevelissement ? Que n’a-t-il pas, aussi, avec les prouesses de sa voix mélodieuse, cristalline et envoutante par ses inflexions déroutantes, revisité le terroir pour en extraire cette alchimie saisissante et toute cette mystique riche d’allégories et de métaphores puisées dans les grands diwans d’anciens cheikhs, de bardes et de conteurs de tout le Maghreb, et même bien au-delà ? Que n’a-t-il pas, encore, avec une aisance et une maitrise magistrales dans son jeu de mandole, fait plier la fermeté des cordes par des improvisations audacieuses, des transpositions et des interversions sur des métriques musicales aussi inouïes et surprenantes qu’inattendues.Possédant le répertoire le plus étoffé de cet art populaire, Amar Ezzahi a savamment capitalisé

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l’essentiel des savoirs de ses prédécesseurs. Plus que ses contemporains, il a su en tirer les meilleures séquences pour les réhabiliter sous un habillage esthétique, pédagogique et technique novateurs. Ce travail laborieux, à institué un courant et a fait école, réussissant malgré tous les clivages à restaurer cette filiation intergénérationnelle avec ses référents à une tradité trop souvent ébranlée par les soubresauts de l’histoire.Musique de la magie de l’instant, musique des humbles, le chaâbi est cet univers ou se traduit l’âme du peuple et ou se perpétue la tradition poétique orale du Grand Maghreb. Avec l’apport de Amar Ezzahi, cette musique, tout en préservant ses spécificités et son socle profond, s’est encore ouverte sur d’autres géographies et d’autres champs musicaux et esthétiques.Dans une étude pertinente consacrée au grand maître et chef de file du chaâbi, El Hadj M’hamed El Anka, le Cardinal comme le nommera le grand reporter Halim Mokdad, l’intellectuel et musicologue Bachir Hadj Ali expliquait que : « La musique chaâbi aide, a sa manière, à sauvegarder une dimension essentielle de la personnalité de notre peuple. Elle stimule des attitudes dynamiques. Elle est partie prenante de l’engagement culturel. Elle fertilise le sentiment patriotique ».

Un florilège Khalouipour chatouiller les sensEt nous retrouvons intacte toute la magie de cet art, restituée avec sa beauté envoûtante et son raffinement esthétique par une nouvelle génération qui, dans sa ferveur d’ouverture au monde, reprend avec une extraordinaire fierté d’appartenance et beaucoup de dignité le répertoire chaâbi.Amazigh Kateb, fils d’un autre pilier de l’identité culturelle algérienne, Kateb Yacine, est de ces jeunes qui ont su puiser avec tact et mesure dans ce patrimoine incommensurable. Son père, l’auteur de Nedjma, l’avait déjà précédé en réalisant une incursion lumineuse dans l’univers artistique du chaâbi. Grâce à

l’entremise de Mohamed Zinet, l’auteur du célèbre long métrage Tahya Ya Didou, Kateb Yacine, au début des années 1970, obtient un entretien exceptionnel avec Le Phoenix, El Hadj M’hamed El Anka. Un enregistrement vidéo de cet entretien d’une durée de 49 minutes circule sur les réseaux sociaux, ainsi qu’une photo sur laquelle figure ces trois monuments de la culture algérienne. En revisitant les trésors du terroir, Amazigh Kateb réussira à déterré et à remettre au goût du jour le patrimoine musical Gnaoui, d’où d’ailleurs le nom de son premier groupe Gnawa Diffusion. Pour le bonheur d’une jeunesse qui l’a tout de suite adopté, il le chantera sur toutes les scènes aussi bien en Algérie qu’à travers le monde. Pour investir l’univers chaâbi, tout autant que le maître Amar Ezzahi, Amazigh, n’a trouvé mieux que de s’appuyer sur le même Bras (Joueur de banjo) de ce dernier. Effectivement, le grand P’tit Moh, de son vrai nom Mohamed Abdennour, a révolutionné la technique de jeu sur le Banjo et la Mandole algérienne, sans pour autant verser dans ce « chaâbi-twist » que fustigeait de son vivant l’illustre Mohamed El Badji. Par leur ouverture sobre et intelligente sur d’autres horizons musicaux, ces deux fieffés artistes, adulés et portés aux cimes par les jeunes d’aujourd’hui, démultiplient les expériences et tentent des fusions inspirées, explorant des pistes musicales tout à fait audacieuses, en préservant ce lien direct avec les coutumes et les valeurs sociales transmises à travers cet art qu’est le chaâbi. C’est dire enfin, qu’une tradition musicale ne peut se maintenir et survivre que par l’ouverture aux autres et par l’innovation constante.Pour conclure, nous reviendrons sur cette réponse du Cardinal à une question de Kateb Yacine : « tu n’es pas sans ignorer, cher ami, que chaque génération a son peuple et chaque peuple a son élément préféré. Les jeunes qui sont à pied d’œuvre aujourd’hui ont acquis la célébrité. Je remercie Dieu de m’avoir prêté vie afin que je constate de visu que l’art pour lequel j’ai tant donné a profité à ces jeunes »

Dj. B.

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Valeurs

L’artisan émérite du premier projet culturel national

« Dans un carrousel presque sans fin, se succèdent Touchia et Incirafate, H’waza et Aâroubiate, Q’çaïd et Khlassate. Cette véritable Halqa (séance) musicale, née de l’esprit d’El Anka, sera appelée Chaâbi, en 1946, par El Boudali Safir ».

Nour Eddine SaoudiMusicologue et interprète

El Boudali Safir est né le 13 janvier 1908 à Saïda au sein d’une grande famille conser-vatrice, pieuse et lettrée. Il ef-fectue une scolarité studieuse qui le mène jusqu’à l’école nor-

male de Bouzaréah à Alger. II est ensuite admis au cycle supérieur à Saint Cloud en France où il décroche trois certificats de licence en lettres et un titre de profes-seur des écoles normales. Pour avoir été empêché de concourir pour l’agrégation des lettres et ce, pour des raisons pure-ment discriminatoires, El Boudali décide en 1929 de s’installer à Mascara où il exerce en qualité de professeur de lettres à l’École primaire supérieure. II exercera les mêmes fonctions à Mostaganem et Tiaret avant d’être affecté d’office à Chlef en 1942 au sein d’un collège en tant que professeur de lettres arabes sous le gou-

Mémoire

EL BOUDALI SAFIR

vernement de Vichy. Ce sont tous ces es-paces culturels et artistiques qui s’offrent à lui à travers tout le pays où il anime des conférences sur le patrimoine lyrique na-tional d’une manière générale, se spé-cialisant dans ce domaine en aiguisant sa plume lors des tournées qu’effectuait Mahieddine Bachtarzi à travers l’Ouest algérien en collaboration avec le journa-liste Mahmoud Benkritly au sein de l’Echo d’Oran, d’Oran Républicain et de la Voix des humbles.

El Boudali est recruté au sein de Radio-Al-gérie à l’ORTF dès sa réorganisation en 1943 en qualité de directeur artistique des émissions en langues arabe et kabyle qu’il occupera d’une façon exemplaire jusqu’en 1957. Durant l’exercice de ses fonctions, il mettra sur pied cinq ensembles musicaux permanents.

On trouve également trace de sa parti-cipation dans de nombreux colloques; séminaires musicaux, notamment en Tu-nisie, au Maroc, en France ainsi que dans l’Organisation africaine de la radio et de la télévision. El Boudali se retire de la scène artistique en 1985 et quitte le pays en 1987 pour s’installer à Paris. II meurt le 4 juin 1999 à l’âge de 91 ans.Grâce à son immense travail les Algériens découvrent les genres musicaux du ter-roir dans toute leur diversité. Pour cela, il s’entourera des maîtres de chaque genre auxquels il insufflera une dynamique intel-lectuelle qui leur ouvrira de nouvelles pers-pectives artistiques.Aux dons de chercheur, il aura su allier ce-lui de rassembleur, galvanisant toutes les énergies autour d’un véritable projet cultu-rel national.

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fondouk

La grande salle de spectacles Ahmed Bey se souviendra long-temps de leur belle prestation. Une fusion sonore impeccable ac-

compagnée d’une noble poésie interpré-tée avec une prestance artistique inouïe. Des doigts qui filent des cordes qui mènent jusqu’au Hoggar ancestral. Et une tenue qui met en valeur l’allure et le jeu limpides du groupe. Nous avons été gâtés, ma parole. Imetawan, Ténéré et azamen ont transporté le public dans les airs de l’Ahaggar. C’était sublime et très professionnel. En fin de compte, même si ça va choquer quelques puristes, n’est-il pas temps de reconnaitre que l’introduction de la guitare électrique a

libéré les sons de l’Imzad ? « L’Imzad est au Touareg ce que l’âme est au corps. La guitare est notre moyen d’expression » tels sont, d’ailleurs, le fondement cultu-rel et l’image de marque d’un groupe de jeunes qui puise sa matière d’un territoire regroupant le Hoggar, le Tassili, Kidal et l’Adrar des Ifoghas en plus du Téné-ré. Le groupe s’est chargé, en peu de temps, de démontrer musicalement que l’Imzad, l’instrument culte et sa tonalité d’origine n’ont pas été altérés par la mo-dernité. Bien au contraire, cette sophis-tication des sons de l’Imzad, qui est loin de constituer une menace, a amplifié le métissage réussi entre le Tindi et le beat emprunté au reggae. Connu en Algérie

où il est apprécié pour la qualité de sa création musicale et la portée humaine de ses textes, Imzad est en train d’opé-rer aujourd’hui une percée fulgurante en Occident. S’inspirant intelligemment des sonorités produites par Tinariwen, le célèbre groupe touareg malien, crée en Algérie par des jeunes réfugiés, l’en-semble de Tamanrasset a su tirer profit du succès international enregistré par le groupe touareg malien, crée en 1982 en Algérie, en préservant l’instrument initial et en multipliant ses capacités sonores à travers une expression musicale mo-derne, considérée par les connaisseurs comme une copie conforme à l’original.

GroUPe ImZad

Le culte libéré

Le passage du groupe Imzad à Constantine, un ensemble targui alliant les chants traditionnels aux instruments contemporains laissera sûrement une empreinte indélébile dans le cœur des Constantinois.

I. G.

Photo Lamine Hamida

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« Ana Djazaïri », la voix de l’Algérie plurielle

L orsque le souffle de Ghar-daïa caresse la sensibilité constantinoise ; quand la mélodie oranaise enlace la poésie de Bejaïa ; alors

que le métissage musical de Bé-char séduit le lyrisme algérois, et lorsque les Aurès sont fascinés par le tempo targui, c’est l’Algérie en-tière qui fredonne à l’unisson. Na-cereddine Hora, Souad Asla, Dou-nia, Tin Hinane, Mouati El Hadj, Azzou, Rym Hakiki, le groupe Imzad, la troupe Jaouhara et la troupe Ithren sont tous venus à Constantine pour offrir un plateau de rêve aux amoureux de la belle musique et des beaux rythme. Ils sont venus « casser » la douleur et « briser » la monotonie d’un été constantinois étouffé par la ca-nicule. Artistes talentueux et très inspirés, ils ont réussi à créer une ambiance du tonnerre, en chan-tant l’Algérie et l’amour de la patrie. Porteurs d’un message de paix et de tolérance, ces artistes se sont distingués par leur spontanéité, et les paroles de leurs chansons ont vite trouvé le chemin des cœurs et des esprits. Ils n’ont pas fait de discours. Ils ont déclaré et clamé leur amour en chantant et en dan-

Rythmes

sant ; en communiquant leur bonne humeur à un public aux anges, en présence d’un invité de marque, Rabah Driassa en l’occurrence. Ce dernier n’a pas d’ailleurs essayé de dissimuler son admiration de-vant la prestation des chanteurs, des choristes et de l’Orchestre na-tional dirigé par le maestro Farid Ouameur. Des tours de chants ma-giques et un spectacle de grande classe que le public présent dans la grande salle Ahmed Bey ne va pas oublier de sitôt ! On a chanté l’amour, la conscience, l’histoire, la vie, le pardon et l’Algérie. Tous les chanteurs qui se sont succédé sur scène ont dégagé une énorme énergie et un grand engouement pour l’art qui forcent le respect. Ils ont choisi d’aimer, car ils ne savent pas haïr, de vivre car ils ne craignent pas la mort et de résister car ils ne connaissent pas la peur. Ils savaient que la puissance de leurs voix et l’authenticité de leurs paroles vont atteindre un public qui a saisi au vol le message de « Ana Djazaïri », une chanson culte et in-terprétée par tous les chanteurs à la gloire de l’Algérie plurielle et en hommage à Rabah Driassa ému jusqu’aux larmes. Photos Lamine

Hamida

HOMMAGE ÉMOUVANT À DRIASSA

Ikram Ghioua

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Gracieuse et enchanteresse

Pour de nombreux algériens, elle ne constitue plus une ré-vélation, mais la confirmation d’un talent immense mis au service de la tradition Gnawa,

des us imposés par El Ferda et de la ri-tuelle Hadra. Originaire de Béchar qui est un lieu de brassage de multiples in-fluences afro-amazigh, elle est porteuse d’un style à travers lequel on décèle toute la panoplie des rythmes recrées par Alla le Foundou, le maitre incontesté du luth et Hasna, l’une des rares algériennes à « apprivoiser » la guitare électrique. Digne héritière d’un riche répertoire, cette « al-gérienne de l’Afrique », comme elle se définit elle-même, doit sa réussite dans la revitalisation et la mise à jour d’une pro-duction folklorique unique en son genre, à sa formation théâtrale. Et ça se voit dans ses expressions vocales et corporelles. Son passage remarqué sur la scène de la grande salle de spectacles Ahmed Bey a ébloui. Superbe avec son look au charme exotique prononcé ; généreuse dans son étalage d’énergie, Souad Asla a conquis la foule en moins de deux mouvements exécutés les pieds nus. L’échange entre elle et le public a eu lieu dans l’allégresse. Et pourtant, il n’y a pas si longtemps, elle doutait encore de ses capacités.

« Si ma musique continue de s’enrichir, si j’ai réussi ce métissage c’est grâce à la diva Hasna. Ma rencontre avec elle eut lieu à Paris, et c’est elle qui m’a motivé et encouragé à aller vers ma propre décou-verte. Je n’ai jamais cru en moi, l’essen-tiel était le théâtre, mais elle a tellement insisté, surtout après m’avoir écouté, que j’ai fini par me jeter dans le bain », re-connait-elle lors du petit entretien qu’elle nous a accordé. Sensible à tout ce qui touche à la condition humaine, elle n’hé-site pas à interpréter les multiples tragé-dies africaines. « C’est très important, de se rappeler d’où on vient ; qui sommes nous, d’évoquer nos joies, mais aussi nos chagrins. C’est même une obligation et un devoir envers l’histoire. Je suis de ceux qui tiennent à leurs racines et à leur identité », nous confie-t-elle avec une spontanéité déroutante.Mais pour le moment, elle est concen-trée sur un projet qui lui tient énormé-ment à cœur : organiser en octobre prochain, un spectacle animé exclu-sivement par des femmes. « Je tiens à ce spectacle plus que tout, il faut impo-ser une relève c’est indispensable, pour notre identité et notre mémoire », rap-pelle-t-elle.

Photo Lamine Hamida

SOUAD ASLA

Auteur compositeur et interprète, Souad Asla fait partie de cette nouvelle génération d’artistes issus du Sahara qui se sont engagés courageusement dans la préservation et la revalorisation du patrimoine musical et poétique propre à cette vaste région.

Ikram Ghioua

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Massari-Azzou : Deux genres du rap dynamique

Massari de son vrai nom Sari Aboud, le rappeur canadien d’origine libanaise est un grand admirateur de Khaled le roi du Raï qu’il considère comme un artiste unique. Il ne l’a pas révélé dans les coulisses, mais en public, au beau milieu de la scène de la grande salle de spectacles Ahmed Bey, entre deux tours de chant magiques.

S on spectacle a été éblouis-sant de bout en bout, au grand ravissement d’un public qui sait surfer sur

les vagues du Rap et du R&B. Mondialement connu à travers une dizaine de singles dont Smile for me, Be easy et Real love, le rappeur était aussi apprécié par les jeunes algériens. D’ailleurs, une partie du public a bien repris ses chansons. Très content de se produire en Algérie pour la se-conde fois, il a tenu à l’exprimer de fort belle manière, en scandant One, two, three, viva l’Algérie, sus-citant la joie du public. Impressionné par le parcours révolutionnaire de l’Algérie, il l’a vivement exprimé en portant le drapeau algérien sur les épaules. Pour lui, « l’Algérie est un exemple de combat dans le monde, un exemple à suivre». Il a apporté, non seulement un, mais des plus à cette soirée ou il accordera à ses fans, une exclusivité et une première en leur offrant en live un tube qu’il a enregistré en duo avec le Libanais Ragheb Alama. Il a su séduire en rendant hommage à Cheb Khaled qu’il considère comme son idole. Sa musique originale a fait le reste incitant le

public à prêter une oreille intéres-sée à ses textes engagés. Il n’est pas du genre à jouer sur les fan-tasmes. Lui, ce sont les blessures de Gaza et la souffrance des Li-banais qui le préoccupent en pre-mier lieu. Très sensible, portant un amour particulier à ses parents et à son pays, Il sait aussi exprimer sa révolte face à l’injustice. Tout le temps à la recherche du meilleur et de la qualité, il est demeuré lui-même, simple et accessible à son public. « J’ai une grande respon-sabilité envers mon public et je n’ai pas le droit de le décevoir ». Sa relation avec le public respire l’amitié et la sincérité accom-pagnées de roses offertes à un groupe d’admiratrices. Inoubliable soirée inaugurée par Azzou, un Algérien à l’immense talent qui monte dans le milieu du Rap. Azzou n’a jamais revendiqué le titre d’enfant terrible du Rap al-gérien, mais il ne se prive pas de créer des morceaux corrosifs. En même temps, il entretient des po-sitions patriotiques quand il s’agit des grands défis que rencontre l’Algérie. Il a chanté en l’honneur de l’ANP avec conviction et as-surance. Il a chanté Ghardaïa. Il a été très professionnel.

Photos Lamine Hamida

AUX SOURCES DU HIP-HOP

Rythmes

Ikram Ghioua

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Ahellil,la magie desancètres

L e public constantinois ne s’est pas trompé en prenant d’as-saut la grande salle de spec-tacles Ahmed Bey, le 13 juillet dernier. On était loin du record

d’affluence, mais les centaines de per-sonnes qui ont assisté à la soirée musi-cale animée par une troupe venue de Ti-mimoun et dédiée à Ahellil, ont été ravies de faire la connaissance avec un genre musical qu’ils découvrent, du moins en ce qui concerne beaucoup d’entre eux, pour la première fois. Ce fut une ambiance de fête au rythme d’un chant mondiale-ment connu que la troupe de Timimoun a recréée à l’intention d’un public « ra-madhanesque » composé de familles et de jeunes qui commence à s’intéresser au Sahara et à tout ce qui provient de ces lointaines contrée mystérieuses et mys-tiques. Puisant son verbe et ses sonorités d’un patrimoine amazigh et arabe où l’on détecte aussi quelques influences afri-caines, Ahellil subjugue et fascine grâce à son tempo saccadé et ses voix qui savent transformer le tumulte en une musique vocale pleine de vibrations.

Répertorié et classé au patrimoine im-matériel mondial depuis 2005, grâce aux efforts soutenus de nombreux musiciens et chercheurs en musicologie, Ahellil constitue aujourd’hui une richesse cultu-relle précieuse que les Algériens sont en devoir de protéger et de préserver, en exploitant intelligemment les opportuni-tés qu’offre actuellement la technologie. Il est à noter que dans ce domaine, une prise de conscience est en train de naître parmi les universitaires et une partie d’un public avisé. Que ce soit pour le spirituel ou pour le romantisme, Ahellil possède un répertoire inépuisable en paroles et en tonalités que les artistes peuvent consulter et s’y inspirer. Invité à découvrir ce genre musical, le public constantinois a été à la hauteur de sa réputation de grand connaisseur. Il a apprécié le jeu de la chorale et le lyrisme émanant de ses complaintes « majeures ».

Ikram Ghioua

Photo Lamine Hamida

Naïma Dziria, une des meilleures voix féminines, les plus inven-tives et les plus percutantes de sa génération, a animé, à

quelques jours de l’Aïd, une soirée abri-tée par la grande salle de spectacles Ahmed Bey. Raffinée jusqu’au bout des ongles, elle n’a pas fait moins que d’offrir un plateau de choix à un public connais-seur qui n’a pas manqué, à son tour, de rendre la politesse à cette artiste ac-complie. Elle a été longuement applau-die ; ses mélodies ont eu leur part de youyous et ses rythmes ont fait danser. Elle a été tout simplement fabuleuse ! Il faut reconnaitre que son coup de cœur a porté. Les spectateurs ont partagé avec elle des moments inoubliables. El maqnine ezzine, chanté de la manière la plus rustique et la plus austère par Mo-hamed El Badji, taillé comme un diamant par Guerouabi et rafraichi par Amar Zahi, est repris majestueusement par une chanteuse au large registre vocal. Cette chanson culte qui a permis à la musique chaâbi de pénétrer des territoires in-soupçonnables opte pour un parfum fé-minin nommé Naïma Dziria. Cette chan-son que seuls les ténors du Chaâbi ont pu maîtriser est passée au mode « Elle » avec une belle réussite. Artiste de tempérament paisible, Naïma a toujours réussi ses passages avec brio, lors des galas qu’elle a animés depuis le début de sa carrière. A Constantine, son tour de chant a enchanté.

I. G.

NAÏMA DZIRIA

El Maqnine ezzine survole les youyous

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FESTIVAL DE LA MUSIQUE ANDALOUSE

Constantine s’empare du podium

Le musicien Mohamed-Cherif Nasri et son ensemble ont remporté le 1er prix de la 9ème édition du Festival national du malouf qui vient de se dérouler du

24 au 28 juillet dernier. Le second prix a été décroché par l’association Maqam quant au 3ème prix, il a été décerné à la troupe d’Amine Chanti. Les trois formations constantinoises vont représenter la ville des Ponts et l’Algérie au prochain Festival international du malouf du mois d’octobre. Concernant les distinctions individuelles, Hamza Benkadri a été élu meil-leure voix masculine, alors que Zakia Benha-cine, Sabrina et Chahra Bestandji ont été sélectionnées au titre des meilleures voix fé-minines. Le festival a été marqué par le vibrant hommage rendu à titre posthume à des ténors du malouf constantinois, à l’instar de Tahar Benkartoussa, Larbi Belamri, Abdelkader Tou-mi, Omar Chakleb et Mostéfa Bachkhaznadji. associé exceptionnellement à la manifestation Constantine, capitale de la culture arabe 2015, le festival a vu la participation d’une dizaine de formations provenant de Skikda, Mila, Tlem-cen, Sétif et Souk-Ahras.

I. G.

Photos Walid Hamida

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Rythmes

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MOUACHAHATE

Organisées dans le cadre de l’exposition intitulée «Aswat à la Nouba » et sous l’égide du département du patrimoine im-

matériel et des arts vivants, dépendant du Commissariat chargé de la manifestation Constantine, capitale de la culture arabe 2015, les deux conférences assurées par Anas Ghrab, un universitaire tunisien et Manuela Cortès Garcia, une académi-cienne espagnole, n’ont pas manqué d’in-térêt. Supervisées avec beaucoup de tact par un Abdallah Hammadi, érudit et très communicatif, les interventions des deux spécialistes en musicologie ainsi que le débat qui a vu la participation d’éminents chercheurs et de musiciens ont réussi à apporter un nouvel éclairage sur l’histoire de la musique en général. Le professeur tu-nisien, enseignant à l’université de Sousse et ancien directeur d’un centre spécialisé dans l’étude de la musique arabe et médi-terranéenne, a fait un exposé à propos de l’influence de la civilisation gréco-romaine et son impact sur la culture arabe. Quant à l’universitaire espagnole, enseignante à l’université de Grenade, a mis en relief l’apport grandiose de la civilisation musul-mane qui a permis à la musique andalouse d’atteindre les cimes de la perfection. Tout en notant l’absence d’archives, Manuela Cortès Garcia a appelé les spécialistes maghrébins et espagnols à plus de coo-pération dans le but de constituer une banque de données qui pourrait devenir un élément important dans la préservation de ce patrimoine qu’est la musique anda-louse sous ses formes maghrébines.

M. M.

Ca y’est, c’est fait. La troupe Chouyoukh salatine Al arab a réussi magistralement son

baptême constantinois, dans une ambiance chaleureuse et conviviale. Originaire d’Alep, l’ensemble qui s’est déjà taillé une réputation à la me-sure de son art à travers les pays du Moyen-Orient s’est produit auparavant à Alger, et y a laissé une très bonne impression. Auteurs d’un parcours riche orienté vers la récupération et la promotion du patrimoine musical arabe, les Syriens sont considérés aujourd’hui comme les meilleurs inter-prètes des mouachahate. Et c’est en cette qualité, incontestable d’ailleurs, qu’ils se sont produits à Constantine dans le cadre d’une manifestation dédiée à la Nouba, organisé par le département du patrimoine immaté-riel et des arts vivants, dépendant du commissariat chargé de la manifesta-tion Constantine, capitale de la culture arabe 2015. Dommage que le public n’est pas venu nombreux, car le spec-tacle valait vraiment la peine. Ceux qui

Le savoir au service de la musique

y ont assisté ont été fascinés, empor-tés par les voix célestes d’un quatuor en or massif et la musique « distillée » par un orchestre inspiré. Il y’ avait de l’émotion dans l’air et les Constanti-nois n’ont pas manqué d’exprimer leur joie, et en même temps leur solidarité à l’endroit d’un pays meurtri, qui re-fuse de se laisser abattre. Chouyoukh salatine Al arab leur ont offert gracieu-sement une belle soirée omeyade. C’était beau, c’était fabuleux. Alep, cette cité millénaire où, selon une lé-gende racontée en Syrie, un maqam avait été érigé à la gloire d’un passage du prophète Ibrahim, doit continuer à vivre et à espérer. C’est en quelque sorte, ce message que la troupe a transmis délicatement à une assistan-ce ravie et pleine de reconnaissance. Touchés dans leur âme par une tragé-die à grande échelle, les membres de la troupe Choyoukh salatine Al arab continuent d’exalter les charmes d’une patrie profondément enracinée dans l’histoire de l’humanité.

M. M.

Alep au premier maqam

ASWAT A LA NOUBA

Photo Walid Hamida

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Quand on évoque le théâtre à Constantine, on pense tout de suite aux ténors du TRC qui nous ont fait rire aux éclats dans

Rih samsar, Nas El houma ou Hada yjib hada. On se rappelle alors de Bouberioua Hacène, Benzerari Hacène, Hellal Antar et Zermani Allaoua. Et on ose même des ré-trospectives pour parler du rôle joué par Re-dha Houhou et des contributions de l’actuel ministre de la Culture, Azzedine Mihoubi. Lorsqu’on cite le théâtre de Constantine, on déroule forcément le film de ses scènes et on finit indubitablement à une rencontre avec l’association El Belliri. Parler de cette association et de sa création, c’est dévoi-ler le vécu d’un groupe exceptionnel né du croisement de quatre destins « dévorés » par l’amour du théâtre. Tout a commencé au début des années 1980, quand le sort a ramassé Achour Wahid, Hamza Moha-med Foudil dit Hamoudi, Hichem Daoudi et Khaled Belhadj dans le même panier.A cette époque, Achour Wahid, à peine âgé de 13ans, mais possédant déjà quelques connaissances sur le jeu théâtral, était considéré par ses amis et son entourage comme un jeune comédien talentueux.

Expression

L’appellation El Belliri désigne le narcisse qui est une fleur populaire, simple, humble, avec une senteur très agréable … « Les qualificatifs de cette fleur en font le symbole de l’âme qui anime notre troupe caractérisée par la popularité, la simplicité et la modestie» affirme Wahid, un des membres fondateurs de la troupe théâtrale portant le même patronyme. C’est Khaled Belhadj, un autre pionnier qui a eu l’idée de cette dénomination.

Une vie dans le théâtre

ASSOCIATION EL BELLIRI

Ainsi apprécié, il est alors sollicité par un de ses amis, qui n’est autre qu’un certain Hamza Mohamed Foudil, plus connu sous le prénom de Hamoudi, afin d’évaluer un « semblant » de scénario d’une pièce de théâtre, écrit par ce dernier. En réalité, Wa-hid fut surpris par ce qu’il venait de lire. Il nous déclare à ce propos : « Le soit disant semblant de scénario était en fait une pro-duction digne d’intérêt».

Le génie et la générositéLe duo fut par la suite rejoint par Daoudi Hichem, et à trois ils apportèrent quelques modifications et quelques arrangements au texte proposé, ce qui a permis la création d’une représentation intitulée Al liqaa, (les retrouvailles). L’aboutissement de ce travail collectif est à l’origine de la naissance d’El Belliri. Quelques mois après la réussite phénomé-nale d’Al liqaa, un certain Khaled Belhadj, qui venait de rentrer de France avec un ba-gage artistique assez riche, (ayant fait du

théâtre professionnel au conservatoire de Lille), a été « accroché » par le génie, la gé-nérosité dans le jeu, la facilité à monter une pièce, mais aussi comment gérer les obsta-cles. C’était ce que Khaled n’avait pas trouvé ailleurs. Ce dernier, de par sa compétence et son expérience, constituait le maillon qui manquait à la troupe. Son intégration a ren-forcé davantage l’homogénéité de l’équipe. A quatre, il fallait bien trouver un endroit dé-cent pour pouvoir répéter, ils se sont alors approchés de Salim Merabia, directeur du Théâtre régional de Constantine de l’époque qui a mis à leur disposition un local pour abri-ter les activités de la troupe qui portera dé-sormais le nom de « Masrah El-Madrassa » ou « Théâtre-école » dont l’objectif était de former de jeunes comédiens pour assurer la relève. Le temps passe et les activités du théâtre-école se multiplient et les disciples formés qui disposaient d’un niveau appré-ciable faisaient l’objet d’une forte demande des différents théâtres du pays. Pour assu-rer à ces jeunes, formés sur le tas, un sta-tut digne leur permettant d’exercer dans un cadre organisé, une association venait de naître.

Ranida-Yasmine Meraz

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LA SYMPHONIE DE CONSTANTINE

La pièce transforme les planches en un musée, mais un musée pas comme les autres, puisque ses objets sont animés

et vivants. Ils nous font visiter les ruelles de la ville d’antan, ses anciennes habitudes et nous content, avec un accent bien constan-tinois, ses vieilles histoires d’amour, de tra-hison, de haine, de bravoure, de courage et bien d’autres aussi intéressantes, le tout ac-compagné d’un chant de Aissaoua.Cette production a pour but de faire revivre l’antique Cirta et dévoiler, ou plutôt rappe-ler, les faces oubliées de la ville. «Constan-tine ne se limite pas au malouf et aux ponts, mais elle est bien plus que çà, c’est le mes-sage que je tiens à véhiculer à travers cette pièce» nous déclare Wahid. Par ailleurs, le réalisateur nous fait part des difficultés rencontrées lors de la mise en scène de cette symphonie dédiée à la Ville, et la difficulté principale était de pouvoir adapter le texte à une pièce théâtrale, vu qu’au début c’était un poème destiné à un monologue. « Il n’était pas facile de faire pas-ser d’un style narratif à un autre dramatique et transformer un monologue en une pièce in-

terprétée par pas moins de 11 comédiens », ajoute notre interlocuteur.Le spectacle a été joué durant trois soirées successives, et à dire vrai, les planches du TRC n’ont pas connu un tel show depuis l’inauguration du programme du départe-ment Théâtre de la manifestation. La salle était comble à chaque représentation et le torrent d’applaudissement en disait long sur l’appréciation du public. Enfin, le réalisateur précise: «L’ensemble des acteurs sont des disciples d’El Belliri et 7 d’entre eux assu-ment pour la première fois un rôle devant un public. Nous citerons à titre d’exemple les jeunes Naziha Filali et Mohamed Ayoub, âgés d’à peine 11ans et 14ans ».Un autre succès s’ajoute au parcours d’El Belliri, et une fois de plus l’association réus-sit haut la main sa mission d’honorer la ville. Et en attendant que les efforts de Wahid et sa troupe soient honorablement reconnus, nous espérons de notre coté que l’associa-tion sera de plus en plus sollicitée et impli-quée dans les activités artistiques, notam-ment théâtrales, de la ville vu le plus qu’elle pourra apporter.

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L’association «El Belliri» a présenté, le soir du 8 juillet au TRC, la générale de sa pièce « La symphonie de Constantine », une production mise en scène par Wahid Achour et écrite par Chafika Loussif dans le cadre de Constantine Capitale de la Culture Arabe.

Depuis sa naissance, El Belliri a crée ou adapté une trentaine de pièces théâtrales. Nous citerons entre plusieurs travaux, El Morstane en 1996, Cirta ma maison en 1998, Des artistes mais... également en 1998, Bourzima en 1999, Sanhadji en 2000, Djouha en 2007, la liste est encore longue Tabib en 2013 et La symphonie de Constantine produite et mise en scène dans le cadre de Constantine Capitale de la Culture Arabe 2015 .

L’association capitalise aujourd’hui une bonne expérience scénique et enre-gistre plus d’une dizaine de distinctions à son tableau de bord. Ces prix ont récompensé la meilleure mise en scène, le meilleur spectacle, la meilleure in-terprétation, le meilleur monologue ou encore la meilleure pantomime. La notoriété de l’association vient d’être traduite par une participation au Festival international expérimental d’Egypte et au Festival international de Carthage.

La pièce traite de l’histoire de trois amis qui, em-portés par les préoccupations de la vie, se sont perdus de vue. Le premier était garçon de café « Qahwadji », le second, journaliste et le troi-sième, sans emploi. Après des années de sé-paration, ils ont fini par se retrouver et se mettre à raconter chacun ce qui lui est arrivé durant la période de rupture.La pièce a connu un franc succès auprès du public qui a apprécié la mise en scène de su-jets d’actualité de grande teneur, notamment la situation politique et sécuritaire du pays durant les années 90.

Tableau de bord Al Liqaa

R-Y.M

Une poésie qui dévoile les autres facettes du Rocher

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L’oasis rouge telle que Boudjedra ne l’a pas racontée

Si Malek Haddad a encensé Constantine dans plusieurs de ses œuvres, et si Mohamed Dib a réussi à immortaliser La grande maison à travers un décor tlemcénien en noir et blanc, Il a fallu que Timimoun attende Rachid Boudjedra pour que son nom soit enfin répertorié sur le registre de la littérature majeure.

Peut-on vraiment décrire une ville où la magie a épousé la nature ? Si Mouloud Mammeri était encore parmi nous, il aurait sans doute répondu à cette question, lui a

connu et aimé Timimoun. Mais qui oserait transcrire en mots la beauté de cette cité enlacée par les dunes ? Qui pourrait parler de cette contrée du Gourara et de cette terre nourricière irriguée par les Foggaras millénaires, et bénie par la clémence divine, sans ressentir cette crainte de ne pas trouver les termes appropriés à la beauté d’un site séculaire sculpté par des mains savantes et habiles, et habité par des âmes vastes et chastes qui ne connaissent aucune limite à la bonté ? Rachid Boudjedra a tenté l’expérience, en entreprenant un long voyage dans une extravagance nommée Timimoun. Il s’en est sorti indemne grâce à son savoir illimité

Invitation

TIMIMOUN

Photos Lamine Hamida

Par Ikram Ghioua

en narration rétrospective et en diagonal. Mais, est-ce qu’il a tout dit ? Absolument pas ! Des bribes et des monceaux de destins enchevêtrés. Et le reste ; tout le reste. Il reste à découvrir, car l’Oasis rouge et ses ksour clairsemés dans l’erg sont un véritable musée à ciel ouvert, sauf qu’entre le Tinerkouk et Ouled Saïd, des milliers de vies cultivent la vie et animent ce musée, en perpétuant des traditions et des modes

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de penser puisés d’un riche fonds culturel. Située entre le Grand erg occidental, au nord, et le plateau du Tademaït, au sud, Timimoun donne l’impression de fuir la modernité. Ce n’est qu’une allusion. La ville a relativement préservé son calme, sa quiétude et sa beauté saharienne. Elle change, mais garde toujours la même couleur ocre qui va si bien à Bab Essoudane, la Porte du Soudan, situé aujourd’hui au cœur de la ville, cet arc construit dans un style soudanais ouvrait autrefois le passage aux caravanes vers le grand Sahel que certains continuent d’appeler le Soudan.

Ahellil, le chant langoureux des temps lointainsQui osera raconter Timimoun l’ensorceleuse et son mystérieux charme qui a fait succomber Perez de Cuellar, alors secrétaire général des Nations-Unies, et Chadli Bendjedid, alors président de la République algérienne ? On va oser, rien que pour le

geste, en effleurant son argile rouge, ses pailles et ses troncs de palmiers. Quand à sa splendeur, elle se déguste sur place et en grandeur nature. Timimoun est une ville qui sait séduire et elle le fait avec un art consommé. Sa Casbah, son vieux port asséché surplombant un fleuve fossilisé et ses lopins de terre verdoyants la dotent d’un panorama unique en son genre. Quand la nuit s’installe et lorsque Ahellil, ce chant mystique ramené du fond des âges, amplit le ciel, Timimoun se pare de ses plus beaux habits et part en transe dans un mouvement de foule fascinant, à la gloire du prophète Mohamed, et à l’occasion du « Sbou », le septième jour du Mouloud. C’est en ces moments qu’elle dévoile aux visiteurs son patrimoine culturel aux origines diverses. A Timimoun, la culture amazighe et l’arabité portée par un Islam ouvert et humain font bon ménage et se complètent pour imprimer à la ville son cachet si particulier. A Timimoun, les louanges à Allah se mêlent facilement aux palabres zénètes sans que cela ne fasse l’objet d’un quelconque procès. A Timimoun, tous les éléments du sentiment national émancipé sont réunis. C’est peut-être pour cette raison que Rachid Boudjedra a jeté son dévolu sur cette parcelle algérienne chère à Aïcha Labgaâ, la diva locale.

I. G.

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L’Agence Algérienne pour le Rayonne-ment Culturel (AARC), en partenariat avec l’Établissement national de télé-vision (ENTV) et l’Entreprise nationale de radiodiffusion sonore (ENRS), à en-tamer le 20 juillet dernier une série de projections en plein air dans le cadre de Ciné Madina et Ciné plage.

Le réalisateur algérien Hassen Fe-rhani a décroché, début juillet, le premier Prix du 26éme Festival in-ternational de Cinéma de Marseille (France) pour son dernier film « Dans ma tête un rond-point ».Le jury de la 26éme édition du Fes-tival a été séduit par cette plongée dans les abattoirs d’Alger, les plus vieux abattoirs d’Afrique encore en activité.Ce premier long métrage de Hassen Ferhani se déroule dans des lieux que les algérois croient connaître et que le réalisateur invite à redécouvrir tout en s’intéressant

aux différents parcours et aspira-tions d’ouvriers qui vivent sur place.D’une durée de 100 mn, « Dans ma tête un rond-point », produit par la cinéaste algérienne Narimane Mari, a été présenté en avant pre-mière mondiale à Marseille.Hassen Ferhani a fait ses premiers pas dans le cinéma en réalisant un court métrage en 2006 « Les baies d’Alger », qui sera suivi en 2010 par « Afric hotel » coréalisé avec Nabil Djedouani.En 2013 il réalise le court métrage « Tarzan, Don Quichotte et nous ».

Le long métrage de fiction « Fadhma N’sou-mer » du réalisateur Belkacem Hadjadj sera projeté en compétition officielle du 36e Fes-tival international du film de Durban (DIFF), en Afrique du Sud. « Printemps tunisien » de la tunisienne Raja Amari et « Fièvres » du marocain Hicham Ayouch, entre autres, comptent parmi les films en compétition.Sorti en 2015, « Fadhma N’soumer » est consacré à Fadhma Si Ahmed Ouméziane, grande figure de la résistance populaire en Kabylie au début de la colonisation fran-çaise de l’Algérie, ainsi qu’à Cherif Bou-baghla, autre figure marquante et principal organisateur d’un mouvement insurrection-nel contre l’occupant au début du 19e siècle dans la même région.« Fadhma N’soumer » avait remporté en mars dernier l’Etalon d’argent de la Yennen-ga au 24e Festival panafricain du cinéma d’Ouagadougou (Burkina Faso) ainsi que les prix du meilleur scénario, du meilleur montage et du meilleur son.

Du cinéma en plein airà travers 35 villes

Le premier Prix pour« Dans ma tête un rond-point »

Fadhma N’soumer de Belkacem Hadjadjen compétition

AGENCE ALGÉRIENNE POUR LE RAYONNEMENT CULTUREL

26éme FESTIVAL INTERNATIONAL DE CINÉMA DE MARSEILLE

à l’affiche

Ciné Madina animera simultanément plusieurs wilayas des régions Sud, Est et Ouest du pays, avec des séances cinéma étalées sur 4 jours et acces-sibles à tout public puisque l’initiative comprend des films d’animation, le do-cumentaire Algérie vue du ciel de Yann Arthus Bertrand, Abdelkader, une réa-lisation de Salem Brahimi qui retrace l’histoire de l’émir Abdelkader, Harraga Blues et Parfums d’Alger seront égale-ment au programme. Les projections se feront en plein air, en centre-ville et débuteront à 21h 30.Les villes côtières ne manqueront pas à l’appel et auront également un programme spécifique durant le mois d’août avec cette fois des projections en bord de mer qui dureront 7 jours à raison d’un film par soir pour plusieurs villes.Avec pas moins de 35 wilayas concer-nées, l’AARC entend bien sillonner l’Al-gérie jusqu’au 6 septembre prochain.

FESTIVAL DE DURBAN

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Le ministre de la Culture Mr Azzedine Miho-ubi a reçu ce dimanche 19 juillet 2015, Mr Farrokh Derakhshni le directeur du Prix d’Ar-chitecture de la Fondation Aga Khan. Au cours de cette audience, les deux parties ont évoqué les opportunités de la coopéra-tion dans les domaines de la restauration et conservation du patrimoine culturel.Mr Farrokh Derakhshni a exposé les diffé-rentes actions que mène la fondation Aga

Khan à travers le monde, notamment celles relatives au Prix d’architecture auquel l’Algé-rie va postuler.Le Ministère de la Culture et la Fondation Aga Khan ont également convenu dans le cadre des échanges d’organiser les 5 et 6 décembre 2015 un Colloque international de haut niveau sur la conservation et le dévelop-pement architectural ainsi qu’une exposition sur le Prix Aga Khan d’architecture.

Mise en place par le Comité communal des fêtes d’Ath Yanni, la traditionnelle fête du bijou d’Ath Yenni est de retour pour sa 12éme édition. Cette région de Tizi Ou-zou organise, du 30 juillet au 7 août, une expo-vente autour de la joaillerie, activité ancestrale du village. Les festivités auront pour thème cette année « Le bijou d’Ath Yenni, un art et une économie » et regrou-peront plusieurs artisans bijoutiers locaux venus de plusieurs wilayas d’Algérie mais aussi des artisans de métiers tels que la broderie, la tapisserie, la vannerie et la po-terie.Ne se limitant pas à l’expo-vente de ses bijoux kabyles traditionnels, Ath Yenni prévoit aussi des conférences autour du bijou traditionnel et des émissions radio-phoniques en direct avec la participation d’artisans bijoutiers.

L’Algérie va postuler au Prix d’architecturede la Fondation Aga Khan

Le bijou d’Ath Yenni, un art et une économie

CONSERVATION DU PATRIMOINE CULTUREL

FÊTE DU BIJOU TRADITIONNEL D’ATH YENNI

Sous le haut patronage de son excellence Monsieur le Premier ministre Abdelmalek Sellal et sous l’égide de monsieur le Mi-nistre de la Culture monsieur Azzedine Mihoubi, l’Office national des droits d’au-teur et droits voisins (ONDA), à organisé le 15 juillet dernier, au niveau du salon d’honneur du Palais de la culture Moufdi Zakaria, une cérémonie de versement des droits au profit des auteurs, artistes et producteurs de phonogrammes et vidéo-grammes nationaux. Pour les répartitions de droit de l’exercice 2014, l’ONDA a versé un montant global de 600 millions de dinars, soit 60 milliards de centimes, au profit de 3 127 titulaires de droit d’auteur et droit voisins, dont 357 mil-lions de dinars au profit de 1767 auteurs d’œuvres, 156 millions de dinars au profit de 150 producteurs de phonogramme et de vidéogramme et 84 millions de dinars au profit de 1210 artistes interprètes.Le reliquat des répartitions de droits d’auteur au titre de la radiodiffusion des œuvres sera versé à partir du début du mois de septembre en raison de la trans-mission tardive des programmes radio.

Le chanteur de renommée internationale et star de la musique algérienne d’expres-sion Kabyle, Takfarinas, a animé le 5 juillet à Alger, un concert grandiose dans le cadre des festivités marquant le 53éme anniver-saire de l’Indépendance et de la fête natio-nale de la jeunesse.Organisé par le ministère de la Jeunesse et des sports, ce méga concert tenu à l’espla-nade Riadh El Feth, monument historique très évocateur, était un rendez-vous pour Takfarinas qui a retrouvé son public avec lequel il a célébré dans l’émotion la Fête na-tionale. Il s’est dit heureux de retrouver le public al-gérien en cette occasion marquant la célé-bration du double anniversaire de l’Indépen-dance et de la jeunesse, en scandant « Vive l’Algérie, vive la jeunesse ».

Témoignant son respect à la mémoire des martyrs de la Révolution, Takfarinas dit qu’il était un « devoir moral » de marquer une minute de silence envers les symboles de la liberté.

OFFICE NATIONAL DES DROITS D’AUTEUR ET DROITS VOISINS

FÊTE DE L’INDÉPENDANCE ET DE LA JEUNESSE

Versement des droits pour nos auteurs et artistes

« Vive l’Algérie, vive la jeunesse »

CONCERT DE TAKFARINAS

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Chargé par le ministère de la Culture de réunir régulièrement les chercheurs et les spécia-listes pour la mise en œuvre

d’une politique de préservation et de pro-motion du patrimoine culturel immatériel algérien, le Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et histo-riques (CNRPAH) associé au département du patrimoine culturel immatériel et des arts vivants de la manifestation Constan-tine capitale de la culture arabe 2015, ont conjointement organisé deux journées d’étude, le 22 et 23 juillet derniers, sous l’intitulé thématique « Les jeux tradition-nels en Algérie et dans les pays du Ma-ghreb et du Sahel ».Ainsi, pour la diversité et la richesse de son patrimoine culturel, tant matériel qu’imma-tériel, l’antique Cirta, la Cité du savoir, a eu l’insigne privilège d’accueillir un panel de chercheurs de haut niveau, venus de Mau-ritanie, du Maroc et de Tunisie, pour entre-prendre avec leurs collègues algériens le lancement d’un projet permettant la consti-tution de la bibliographie du patrimoine lu-dique, depuis 1800 à nos jours, aussi bien en Algérie qu’au Maghreb.

Patrimoine

Chercheurs et anthropologueslancent un projet de sauvegarde

PRATIQUES LUDIQUES EN ALGÉRIEET DANS LES PAYS DU MAGHREB ET DU SAHEL

Cette rencontre scientifique portait également sur la réalisation d’un thesaurus commun des jeux traditionnels en Algérie et au Maghreb. Ce glossaire commun, une fois constitué, servira d’outil méthodologique pour l’identifi-cation et la mise en inventaire des jeux dans les différents territoires du Grand Maghreb. Par ailleurs, cet instrument scientifique constituera également un support numé-rique interactif permettant la mise à jour régulière des inventaires et représentera une plateforme idéale pour l’intégration, au titre d’une réhabilitation répondant aux intentions stratégiques, de certains de ces jeux dans le système éducatif et dans les pratiques ludiques actuelles. Devant un parterre scientifique averti et engagé dans le processus de concrétisa-tion de cette démarche, celle d’asseoir une méthodologie d’identification et de recense-ment de ces pratiques ludiques en vue de la constitution d’une banque de données com-mune, les anthropologues et chercheurs ont convenus dans leurs recommandations, la mise en place d’un groupe de chercheurs pour l’encadrement de ce projet.

A ce titre, Ahmed Hafdi, chercheur venu du Maroc et directeur de La revue des arts et de l’oralité, préconisera, lors de son inter-vention concernant l’élaboration d’une fiche unifiée de l’inventaire des jeux traditionnels, de centrer la réflexion sur l’interaction et l’in-terrelation de tous les acteurs (chercheurs, institutions, communautés, ONG….) impli-qués dans la mise en œuvre du processus de sauvegarde du patrimoine ludique.

Dj. B.

Pour la diversité et la richesse de son patrimoine culturel, tant matériel qu’immatériel, l’antique Cirta, la Cité du savoir, a eu l’insigne privilège d’accueillir un panel de chercheurs de haut niveau.

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The fascinating Gourara singing

The big display hall Ahmed Bey was full packed with people of all ages, especially the young , on July the thirteenth, all come to enjoy liste-

ning to the singing of Gourara.A musical group came from Timimoun to give an evening performance of the singing of Gourara. The audience was greatly ex-cited for the musical rhythm that was pretty new for many of them . The singing was run-ning sweet on their ears and they listened to it with enthusiasm. The young people ne-ver heard of it before and were visibly ama-zed with the discovered wonder.Up to that moment, they were ignorant of the mere existence of such music and sin-ging. They were more surprised to find out that that enjoyable music was from Sahara, the Algerian sahara.The Gourara singing was the first ‘’ product ‘’ they ever happened to see coming to them from the remote, mysterious and mysthical land called Sahara.

As the performers were in full swing , the audience got in a festive mood and the so-cial gathering became like a family party celebrating a great event in a lovely atmos-phere. The audience enthusiasm was so

Rhythms

real and great that the happy evening was felt by all as a Ramadan feast. And it was all dedicated to Ahellil.The Gourara singing draws its lyrics and so-norities from an amazigh as well as and Arab heritage with some african imprints in it. Ahellil singing subjugates and fascinates due to its staccato tempo and voices that transform the commotion and hoo-ha into a vocal music full of vibrations.Ahellil has been itemized, listed onto The world immaterial heritage in 2005 thanks to sustained efforts made by musicians and researchers in musicology.Ahellil is today a precious cultural treasure Algerians ought to protect and preserve using the cutting edge technologies avai-lable to them.It is an inexhaustible source of words, ly-rics, keys and tonalities for all the artists to draw their inspiration from.In the end, the cheerful upbeat was struck by the constantinian public who lived up to their good reputation to have besides an ear for music a witty musical mind.

Written by Ikram GhiouaTranslated by Mohamed Bouhabila

Photo Lamine Hamida

AHELLIL

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Ana horra fi El jazaïr

That’s how Miriam expressed her feelings loudly and proudly on the stage in Algiers when her people in South Africa were enduring all kinds of sufferings under the brutal and oppressive rule of Apartheid regime.

Makeba’s life has been a continuous and implacable fight against injustice and despotism and her struggle was not pleasant to the producers though. But her proven talent forced them to accept her as she was. Nevertheless, they tried hard to limit her audience and reduce her influence on the black people.

I enjoy freedom in Algeria , I am free in Algeria

CelebrationMIRIAM MAKEBA, THE FEMALE VOICE OF THE REVOLUTION

Written by Ikram GhiouaTranslated by Mohamed Bouhabila

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Non-conformist to the bones as she was by nature, she decided to wed Stokely Carmichael, the big boss of Black panthers and as a result she was deprived of her US residence permit imme-

diately after her marriage and it has been de-nied to her ever since.Shortly afterwards, she was granted the status of ‘’ Citizen of Honor ‘’ by ten African countries including Algeria.Algeria was her eternal pride, as she her-self put it, so much so that the then Algerian president Houari Boumedienne declared her Algerian citizen.

Miriam, a true african loveMiriam’s songs were on purpose about the grief, soreness, distress and pain of her people and about their rebelliousness as well. She jubilated love and glory. Not only she transcended her kindred but also at-tracted millions of fans due to her real art and her vocal power and was able to lead them onto what freedom’s meaning is.

She was for sure the beauty of African rhythm and her skills remain without a doubt unmatched till today.Miriam was the female voice of the revolu-tion, the voice of the truth and the artistic expression of Apartheid’s dismantlement.Miriam Makeba was and still is the African dream’s ambassador to the world and the African aspiration to justice, freedom and dignity and the African good will too.The voice of the great South African singer Miriam Makeba disappeared on November the ninth, 2008 . She – bless her soul - was aged 76.Her voice can hardly be heard today among a mixture of a multitude of African rhythms and sonorities. But the mere name of Mi-riam still makes thousands if not millions of

Algerians feel a wave of nostalgia for great, glorious and happy times. The generation of Algerians who got the chance to attend her galas animated in Algiers and listen to her singing live still remember that unforget-table day of the 1969 Panafrican festival in Algiers.It was more than a festival. It was markedly a jamboree.

At that time Algiers was really and truly the home of the brave and the Mecca for the free.Miriam enjoyed her repeated stays in Al-giers and never missed out an opportunity to come to Algeria following the footsteps of her hero, Nelson Mandela, the leader and the symbol of Africans’ struggle for freedom and dignity.

In 1963, the great Mandela went on a pilgri-mage to the land of Algeria newly liberated from the French cruel and savage colonial occupation.When Mandela first visited Algeria , his people were under the oppressive rule of Apartheid regime and the international climate was then anti-imperialism and at that junction Algeria was doing a lot to help African peoples get free from their oppressors , particularly from the french colonialism.That Mandela’s visit to Algeria stayed etched in the memory of Algerian people and Miriam came to visit Algeria to highlight Mandela’s fi-ght for freedom and she did it in the best man-ner possible when she let her soul cry out: ‘’ Ana horra fi El Djazair ‘’ while she was per-forming her legendary hit- song:IFRIKYA …. AFRIQUE …..AFRICAin three languages and that was a resoun-ding declaration of true love for Africa and its peoples.

The famous song was performed very well by Miriam who shared it with the mythical ex RTA chorus.Makeba was deprived of her basic rights as human being in her own country that was under the rule of greedy oligarchs who came from Britain and the Netherlands and occu-pied the country and exerted on the indige-nous population a savage domination so cruel that people were herded like brainless aminals in Bantustans with no right at all.

With this idea of oppression and domi-nation in mind, Makeba found in Algeria a warm welcoming asylum land ‘‘promised ‘’ to all the oppressed persons on Earth.

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Her exile in three decades Zenzi. That’s how everybody liked to call Miriam who was born on March the fourth, 1932 in Johannesburg, South Africa.When she was twenty years old, she started singing and nurturing her voice that was already powerful at that time. Because of her poor living conditions, she had to work hard in order to win the wherewith buy food for her daughter and her sick mother. It was not easy for her to alone bring her daughter up and take care of her mother.

The throes of life, injustices and segrega-tion aroused her political consciousness quite early.The segregation was worse than racism; it was race hatred, a denial to be human with black skin.She worked with Cuban Brothers for a while then she teamed up with Manhattan Bro-thers Group as a choir member with a new stage name: Miriam.

As an artist, she was able to denounce Apartheid regime and inform people against it and about its atrocities and abominable crimes.In 1956, she came up with her hit-song ‘’ Pata, pata ‘’ and started touring the world singing ‘’Pata, pata ‘’ that had tourned out to be her greatest success ever.She was politically engaged against Apar-theid regime and against US imperialism

and her appearance in the movie “” Come back Africa ‘’ was fateful for her although the filmmaker Lionel Rogosin was American native citizen. She was severely punished and forced to go into exile for a long period. Worse, she was not allowed to attend the funeral and the burial of her mother who died in 1960. Miriam must then have felt the sheer bitterness of the worst human injus-tice beyond imagination.

Makeba was able to return to her native country only after Mandela was freed from Apartheid prison. She started singing Man-dela’s cause in zoulou, xhosa, tswana, swahili and in arabic,Makeba had espoused Mandela’s cause from the very start and made it her own cause.‘’ Ana horra fi el djazair ‘’ was sung once again in Algiers in 1978 on the occasion of the Panafrican games in Algeria.Algeria, the country Makeba viewed and loved as hers, also suffered from the occu-pation and oppression under France brutal rule for nearly a century and a half.That’s why Makeba was feeling at home in Algeria.

Makeba’s melodies expressing tolerance and peace were broadcast without limita-tion or restriction on all channels that were operating by then.All Makeba’s songs conveyed the strong expression of dignity of African people and because of that Makeba became the living symbol of the struggle against Apartheid regime.A while before she retired in 2005, she pu-blished her autobiography under the title of: Makeba ‘’ My story ‘’.The diva was dreaming of a strong and united Africa, making an appeal for pardon and forgiveness.

Makeba originated the famous expression: ‘’ Let us grow up, White and Black people must come to know each other and learn how to live together ‘’The great Makeba breathed her last in Italy on November the ninth, 2008.She was 76. Bless her soul!Makeba and her voice passed away leaving behind a legendary combat for freedom and dignity for the new generations to learn from

Written by Ikram GhiouaTranslated by Mohamed Bouhabila

Page 35: Maqam numéro 04 fr juillet 2015

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Photo Walid Hamida

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