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Mesure des èches vertébrales par le télémètre laser. Évaluation de la abilité de la mesure de la èche lombaire Measure the vertebral height with the laser telemeter. Reliability assessment of the height lumbar measurement a 124, avenue Jean-Jaurès, 38320 Eybens, France b École de kinésithérapie, institut de formation en kinésithérapie de Grenoble, IUP santé kinésithérapie sport, CHU de Grenoble, 19A, avenue de Kimberley, 38130 Échirolles, France Reçu le 17 octobre 2012 ; reçu sous la forme révisée le 11 mars 2013 ; accepté le 24 mars 2013 INTRODUCTION La prise en charge kinésithérapique doit débu- ter par un examen an d'établir le diagnostic nécessaire à l'élaboration des objectifs de prise en charge. Pour le rachis, un examen articulaire du tronc est nécessaire, il s'effectue en statique puis en dynamique. L'examen, réalisé dans les trois plans de l'espace, comporte un premier temps d'observation qualitative complété par une prise de mesures permettant de réduire la part de subjectivité liée à l'appréciation de l'observateur. La pra- tique basée sur la preuve [1] en complément de l'expérience accumulée par le praticien devrait permettre de contribuer efcacement Florent Allier a Sandrine Monnet b Mots clés Fiabilité Flèches vertébrales Reproductibilité Télémètre laser Keywords Laser telemeter Reliability Reproducibility Vertebral height Auteur correspondant : F. Allier, 124, avenue Jean-Jaurès, 38320 Eybens, France. Adresse e-mail : [email protected] RÉSUMÉ Dans l'examen morphostatique, les èches vertébrales sont mesurées habituellement par la technique du l à plomb dont la validité n'a pas été prouvée. L'objectif de ce travail a été d'évaluer les qualités métrologiques du télémètre laser (TL) an de trouver un outil plus able. Les résultats ont permis de conrmer la abilité et la reproductibilité du TL pour la mesure de la èche lombaire. Une étude complémentaire vient de valider cet outil pour la mesure de la èche cervicale. Niveau de preuve. Niveau II. © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. SUMMARY In the morphostatic exam, vertebral heights are usually measured using the plumb line method. However, the validity of such a method has not been proven yet. The objective of this work has been to evaluate the metrological qualities of the laser telemeter in order to nd a more reliable tool. The obtained results allowed the validation of the reliability and reproductibility of the laser telemeter for the lumbar height. A complementary study has also validated this tool for the measure of the cervical height. Level of evidence. Level II. © 2013 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Kinesither Rev 2013;13(142):4146 Savoirs / Mise au point © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.kine.2013.03.013 41

Mesure des flèches vertébrales par le télémètre laser. Évaluation de la fiabilité de la mesure de la flèche lombaire

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Mesure des flèches vertébrales parle télémètre laser. Évaluationde la fiabilité de la mesurede la flèche lombaire

Measure the vertebral height with the laser telemeter.Reliability assessment of the height lumbarmeasurement

Florent Allier a

Sandrine Monnet b

a124, avenue Jean-Jaurès, 38320 Eybens, FrancebÉcole de kinésithérapie, institut de formation en kinésithérapie de Grenoble, IUPsanté kinésithérapie sport, CHU de Grenoble, 19A, avenue de Kimberley, 38130Échirolles, France

Reçu le 17 octobre 2012 ; reçu sous la forme révisée le 11 mars 2013 ; accepté le 24 mars 2013

Mots clésFiabilitéFlèches vertébralesReproductibilitéTélémètre laser

KeywordsLaser telemeterReliabilityReproducibilityVertebral height

RÉSUMÉDans l'examen morphostatique, les flèches vertébrales sont mesurées habituellement par latechnique du fil à plomb dont la validité n'a pas été prouvée. L'objectif de ce travail a été d'évaluerles qualités métrologiques du télémètre laser (TL) afin de trouver un outil plus fiable. Les résultatsont permis de confirmer la fiabilité et la reproductibilité du TL pour la mesure de la flèchelombaire. Une étude complémentaire vient de valider cet outil pour la mesure de la flèchecervicale.Niveau de preuve. – Niveau II.© 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

SUMMARYIn the morphostatic exam, vertebral heights are usually measured using the plumb line method.However, the validity of such a method has not been proven yet. The objective of this work hasbeen to evaluate the metrological qualities of the laser telemeter in order to find a more reliabletool. The obtained results allowed the validation of the reliability and reproductibility of the lasertelemeter for the lumbar height. A complementary study has also validated this tool for themeasure of the cervical height.Level of evidence. – Level II.© 2013 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

INTRODUCTIONréalisé dans les trois plans de l'espace,

Auteur correspondant :F. Allier,124, avenue Jean-Jaurès,38320 Eybens, France.Adresse e-mail :[email protected]

La prise en charge kinésithérapique doit débu-ter par un examen afin d'établir le diagnosticnécessaire à l'élaboration des objectifs deprise en charge. Pour le rachis, un examenarticulaire du tronc est nécessaire, il s'effectueen statique puis en dynamique. L'examen,

© 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.http://dx.doi.org/10.1016/j.kine.2013.03.013

comporte un premier temps d'observationqualitative complété par une prise de mesurespermettant de réduire la part de subjectivitéliée à l'appréciation de l'observateur. La pra-tique basée sur la preuve [1] en complémentde l'expérience accumulée par le praticiendevrait permettre de contribuer efficacement

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à l'amélioration du processus de prise en charge kinésithéra-pique. Ainsi pour satisfaire à l'obligation de moyens à laquellele masseur kinésithérapeute est soumis, ce dernier doit avoirà sa disposition des outils performants, afin d'établir un diag-nostic le plus précis possible [2–4].

Différents outils évaluent cliniquement les courburesvertébrales tels que le flexicurve, le cyphomètre, mais

le plus couramment utilisé est le fil à plomb. Cedernier permet d'apprécier l'importance des différentescourbures par l'intermédiaire des flèches vertébrales.

Cependant, peu d'études ont été réalisées afin de démontrer lavalidité et la fiabilité du fil à plomb, elles sont contradictoires etne nous permettent pas de conclure d'une bonne efficacité dufil à plomb [5–7].Nous nous sommes donc interrogés sur un autre mode d'éva-luation plus performant. Notre choix s'est porté sur le télémètrelaser (TL), un outil permettant d'apprécier des distances et quenous cherchons à adapter pour la mesure des flèches rachi-diennes. Nous avons évalué sa fiabilité lors de la mesure de laflèche lombaire dans le plan sagittal, rentrant ainsi dans unedémarche de validation d'outil diagnostic.Notre problématique était de savoir si le TL présentait unefiabilité satisfaisante en intra- et en interobservateur lors de lamesure de la flèche lombaire sur une population ne présentantpas de pathologie vertébrales. Pour cela nous avons procédéen deux étapes. Dans un premier temps, nous avons évalué lafiabilité du TL en tant qu'outil de mesure en réalisant lesmesures sur un mannequin. Puis nous avons évalué la métho-dologie utilisant le TL lors de la mesure de la flèche lombairesur des sujets. La mesure de la flèche lombaire correspond à ladistance linéaire entre l'apex de la courbure lombaire et la

Figure 1. a, b : matériel utilisé : a : mesu

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verticale passant par l'apex de la courbure sacrée et thora-cique. Sachant que l'alignement vertical de l'apex des cour-bures thoracique et sacré n'est pas observable chez toutes lespersonnes, nous avons fait le choix de calculer la flèchelombaire selon deux méthodes distinctes : la première mesu-rait la distance entre l'apex de la courbure lombaire et l'apex dela courbure sacrée. La deuxième méthode mesurait la dis-tance entre l'apex de la courbure lombaire et l'apex de lacourbure thoracique.

POPULATION ET MÉTHODE

La population était constituée de 60 sujets volontaires dont30 du genre féminin et 30 du genre masculin, âgés de 19 à47 ans. Ces personnes ne devaient pas présenter de patho-logie rachidiennes et devaient être capable de se tenir deboutsans troubles de l'équilibre.Le TL (Fig. 1) est un boîtier permettant de mesurer des dis-tances, il coulisse verticalement sur un mât et dispose d'unmode de mesure continu retenant la distance minimale etmaximale de la zone balayée. Le mannequin était matérialisépar une lame d'aluminium que nous avons modelé afin dereprésenter 31 profiles vertébraux différents. Il était placé surle support (Fig. 1), les trois courbures étaient modelées parune tierce personne. L'ordre de passage des deux évaluateurseffectuant les mesures était fixé par tirage au sort. Pour lesmesures en intra-observateur, un évaluateur a réalisé deuxséries de mesures à deux instants différents. Pour les mesuresen interobservateur, le second évaluateur a réalisé une seulsérie de mesure. Les évaluateurs étaient étudiants en troi-sième année à l'IFMK de Grenoble. Un second tirage au sortétait effectué pour connaître l'ordre entre les mesures

res sujets ; b : mesures mannequin.

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Figure 2. a–c : mesure thoracique (T), lombaire (L) et sacrée (S).

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thoracique (T), lombaire (L) et sacrée (S). L'observateurbalayait alors les trois courbures dans l'ordre pré-établi(Fig. 2), les mesures thoracique et sacrée correspondaientà la valeur minimale et la mesure lombaire correspondait à lavaleur maximale affichée sur le TL. Une série de mesureconsistait à balayer six fois ces trois courbures et ainsi obtenirsix valeurs thoraciques, lombaires et sacrées. L'utilisation duTL n'a pas nécessité d'entraînement préalable. Une pose decinq minutes était respectée entre chaque série de mesures.Le placement des sujets et la prise de mesure était identiqueau mannequin (Fig. 1). Le sujet devait respecter la consignesuivante : « Fixez la marque au mûr et restez le plus immobilepossible, en conservant une respiration régulière durant toutela mesure. ». Une cible était placée face au sujet à la hauteurde ses yeux. Une seconde consigne était donnée entrechaque série de mesures : « descendez du support, réalisez

Figure 3. a, b : mesure de la flèche lombaire sur sujets et surmannequin.

en marchant un aller retour dans la pièce et asseyez-vous ».Le calcul de la flèche lombaire était le même sur le mannequinet sur les sujets, il a été réalisé selon les deux méthodesdétaillées précédemment. La première consistait à soustrairela mesure lombaire à la mesure thoracique (L-T) et la secondeconsistait à soustraire la mesure lombaire à la mesure sacrée(L-S) (Fig. 3). Ainsi pour une série de mesures, nous avonsobtenu six valeurs de flèches lombaires avec le calcul L-Tet sixavec le calcul L-S.Nous avons voulu évaluer la fiabilité des flèches avec uneseule mesure puis avec la moyenne de deux mesures, puis lamoyenne de trois mesure jusqu'à moyenner les six mesures.Ainsi, nous avons cherché à savoir le nombre de mesuresmoyennées nécessaire afin d'obtenir une fiabilité satisfai-sante. Pour évaluer cette concordance nous avons réaliséun traitement statistique avec le calcul du coefficient de cor-rélation intraclasse (CCI). Le CCI était calculé entre les sixvaleurs moyennées en intra- et interobservateur. Nous avonspris la valeur du CCI, ainsi que l'intervalle de confiance (IC)à 95 %. La valeur d'un CCI varie de zéro à un. La fidélité estd'autant meilleure que le CCI est proche de 1. Nous avonsutilisé l'échelle de Fermanian étant la plus récente et la plusexigeante [3]. La reproductibilité est très bonne si le CCI estsupérieur ou égal à 0,90, bonne si le CCI est compris entre0,70 et 0,90, modérée si le CCI est compris entre 0,5 et 0,70,médiocre si le CCI est compris entre 0,30 et 0,50 et trèsmauvaise si le CCI est inférieur à 0,30.Ainsi, nous avons considéré que les mesures étaient fiables siles CCI ainsi que l'IC dépassaient 0,70. Nous avons égale-ment utilisé la représentation graphique de Bland et Altman [8]afin de vérifier si les mesures les moins reproductibles avaientune variabilité plus importante.

RÉSULTATS

Les résultats sur le mannequin montrent que l'ensemble desCCI ainsi que leur IC sont supérieurs à 0,98 dès la premièremesure pour les quatre conditions. L'utilisation du TL permetd'obtenir une reproductibilité excellente en intra- et en

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Figure 4. Représentation graphique du coefficient de corrélationintraclasse en fonction du nombre de mesures moyennées pour la

condition L-S en intra-observateur.

Figure 6. Représentation graphique du coefficient de corrélationintraclasse en fonction du nombre de mesures moyennées pour la

condition L-T en intra-observateur.

F. Allier, S. MonnetSavoirs / Mise au point

interobservateur sur un mannequin. L'augmentation du CCI dela première à la sixième mesure est inférieure à 0,5 % pour lesquatre conditions. La répétition des mesures est donc inutile,n'entraînant pas d'augmentation significative. En conclusion,le TL est un outil fiable pour le calcul des flèches vertébralessur un mannequin. Sur les sujets, ne présentant pas depathologies rachidiennes, les résultats en condition L-S enintra-observateur (Fig. 4) montrent un CCI présentant unebonne reproductibilité dès la première mesure (0,82). L'ICest également supérieur à 0,70 (0,71 ; 0,88). La tendanceobservée sur l'évolution du CCI en fonction du nombre demesures moyennées est à l'augmentation, l'ajout d'une nou-velle mesure entraîne une amélioration systématique du CCIpour obtenir une reproductibilité très bonne à la deuxième

Figure 5. Représentation graphique du coefficient de corrélationintraclasse en fonction du nombre de mesures moyennées pour la

condition L-S en interobservateur.

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mesure. En interobservateur (Fig. 5) le CCI présente unebonne reproductibilité dès la première mesure (0,86). L'ICest également supérieur à 0,70 (0,76 ; 0,92). La tendanceobservée, et non vérifiée statistiquement, sur l'évolution duCCI en fonction du nombre de mesures moyennées est à l'aug-mentation obtenant une reproductibilité très bonne à la qua-trième mesure.

En conclusion, la mesure est reproductible dès lapremière mesure en condition L-S en intra- et en

interobservateur.

Les résultats des mesures réalisées sur les sujets en condi-tion L-T en intra-observateur (Fig. 6) montre un CCI présen-tant une bonne reproductibilité dès la première mesure (0,74).L'IC quant à lui est supérieur à 0,70 à partir de la deuxièmemesure (0,75 ; 0,89). Dans une démarche de qualité, nouschoisissons de conclure à une bonne reproductibilité qu'àpartie de la deuxième mesure afin d'obtenir un CCI et un ICsupérieur à 0,7. La tendance observée, et non vérifiée sta-tistiquement, sur l'évolution du CCI en fonction du nombre demesures moyennées est à l'augmentation obtenant unereproductibilité très bonne à la cinquième mesure. En inter-observateur (Fig. 7), le CCI présente une bonne reproducti-bilité dès la première mesure (0,82). L'IC est supérieurà 0,70 à partir de la deuxième mesure (0,72 ; 0,87). Dansune démarche de qualité, nous choisissons également deconclure à une bonne reproductibilité qu'à partir de la deu-xième mesure afin d'obtenir un CCI et un IC supérieur à 0,7. Latendance observée, et non vérifiée statistiquement, sur l'évo-lution du CCI en fonction du nombre de mesures moyennéesest à l'augmentation obtenant une reproductibilité très bonneà la sixième mesure.

En conclusion la mesure est reproductible dès ladeuxième mesure en condition L-T en intra- et en

interobservateur.

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Figure 7. Représentation graphique du coefficient de corrélation

Kinesither Rev 2013;13(142):41–46 Savoirs / Mise au point

intraclasse en fonction du nombre de mesures moyennées pour lacondition L-T en interobservateur.

DISCUSSION

Lors de la discussion, la première hypothèse était que l'utilisa-tion du TL permet d'obtenir une reproductibilité très bonne enintra- et en interobservateur sur un mannequin. Cette hypo-thèse est confirmée, les coefficients de corrélation intraclassesont supérieurs à 0,90 démontrant une excellente reproducti-bilité dans les deux conditions L-S et L-T, en intra- et inter-observateur. L'excellente fiabilité du TL étant démontrée nousavons pu vérifier la seconde hypothèse supposant que lareproductibilité serait moins bonne sur des sujets sains encomparaison avec le mannequin. Ce constat pouvait êtreexpliqué par les oscillations posturales auxquels le corpsest soumis. Les résultats ont montré à la première mesureune reproductibilité bonne car supérieure à 0,70 pour la condi-tion L-S en intra-observateur (0,82) et interobservateur (0,86).Pour la condition L-T la reproductibilité est modérée en intra-observateur (0,74) et interobservateur (0,69). Le CCI en intra-observateur est supérieur à 0,70 mais nous avons considéréque cette valeur n'était pas suffisante car la valeur minimale del'IC est inférieure à ce seuil (0,60). Les résultats montrent unetrès bonne reproductibilité lors des mesures effectuées sur lemannequin dès la première mesure. En revanche, les mesureseffectuées sur les sujets présentent des CCI moins bons à lapremière mesure (reproductibilité bonne en condition L-S etreproductibilité satisfaisante en condition L-T). Les CCI, pourles deux conditions, augmentent systématiquement à la répé-tition de la mesure jusqu'à atteindre une très bonne reproduc-tibilité. Dans notre étude trois types d'erreurs pouvaientengendrer des variations de mesures, l'erreur causée par lesujet, l'erreur liée à l'outil et celle entraînée par l'évaluateur.Lors de la première étape, nous avons supprimé la variabilitédu sujet en le remplaçant par un mannequin parfaitementimmobile. Les résultats étaient très bons, nous avons montréque la variance apportée par le TL est négligeable concluantà une bonne reproductibilité du TL. Lors de la seconde étape,nous avons utilisé le même TL et le même protocole sur dessujets sains mais les résultats ont été moins bons. La seule

différence entre la première et la seconde étape réside dans leremplacement du mannequin par des sujets. Par conséquent,la différence de valeurs des CCI devrait s'expliquer par lavariation amenée par les sujets. Les sujets sont non stablesà la différence du mannequin entraînant un certain niveaud'erreur pouvant être expliqué par l'oscillation posturale etles mouvements engendrés par le sujet.Sur les sujets, pour obtenir une bonne reproductibilité encondition L-T, la mesure doit être répétée une deuxième fois(intra-observateur : 0,74 et interobservateur : 0,82). Ainsi,nous démontrons que le fait d'augmenter le nombre de mesurepermet d'obtenir une bonne reproductibilité en condition L-T.La méthodologie utilisant le TL pour obtenir une mesure fiablede la flèche lombaire sur des sujets sains peut être approuvée,obtenant une bonne reproductibilité pour les deux conditionsL-S et L-T. Le thérapeute peut donc utiliser le TL pour lamesure de la flèche lombaire en répétant et en moyennantdeux mesures successives. Les résultats montrent une inertiedes CCI plus lente en condition L-T. En effet, il est nécessairede réaliser deux mesures pour obtenir une bonne reproducti-bilité en condition L-T, alors qu'en condition L-S, une seulemesure suffit. Ce constat pourrait être mis en lien avec le faitque l'oscillation posturale agit comme un pendule inverséentraînant une oscillation plus importante au niveau des éta-ges supérieurs [9]. L'oscillation serait donc plus élevée auniveau thoraco-lombaire qu'au niveau lombo-sacré, ce quinécessiterait de réaliser plus de mesures à moyenner afinde neutraliser l'effet des oscillations. Cette supposition pourraitêtre confirmée, lors d'une nouvelle étude consacrée à lamesure de la flèche cervicale. Si cette hypothèse s'avère juste,la flèche cervicale nécessiterait encore plus de mesures pourobtenir une bonne reproductibilité.En augmentant le nombre de mesures, le temps d'examenaugmente également, limitant l'intérêt pratique. Il serait alorspossible de neutraliser d'avantage les oscillations posturalesen ajoutant un point d'appui ou un rappel proprioceptif afin destabiliser le sujet. Comme nous l'avons vu précédemment,l'étude de Krejci et al. [9] a montré qu'un appui manuel contreun support vertical limitait les oscillations mais modifiait lescourbures. L'étude de Stagnara [10,11] montrait qu'un appuimanuel sur un support avec les avant-bras horizontauxn'entraînait pas de variation de posture. Cependant, la limita-tion des oscillations n'a pas été étudiée. Il faudrait évaluer lafiabilité du TL avec le recours à un point d'appui.Les bons résultats obtenus pour les mesures réalisées eninterobservateur montrent que l'utilisation du TL n'est pas« évaluateur dépendant ». Cette qualité permet un suivi à courtet moyen termes par différents praticiens sans en altérer lafiabilité de la mesure.En utilisant un raisonnement logique, nous constatons unebonne corrélation entre le TL et la mesure de la flèche lom-baire, cet outil de mesure montre ainsi une bonne validitéd'apparence. Cette conclusion est insuffisante ne s'appuyantpas sur un traitement statistique mais seulement sur un rai-sonnement logique. Il serait alors intéressant d'évaluer savalidité de critère pour démontrer sa sensibilité spécifique etainsi démontrer qu'il mesure bien se qu'il est censé mesurer.Pour cela, il faudrait comparer, grâce à un test de corrélation, lamesure de la flèche lombaire réalisée grâce au TL avec desvaleurs étalons. Le « gold standard » le plus pertinent pour cetype de mesure vertébrale serait la radiographie. Plusieursétudes sont envisageables. Une première consisteraità comparer la mesure de la flèche lombaire réalisée à l'aide

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Points à retenir

� Le TL est un outil fiable et reproductible pour lamesure des flèches vertébrales.

� Le TL est un outil plus performant que le fil

F. Allier, S. MonnetSavoirs / Mise au point

du fil à plomb avec la flèche mesurée directement sur le clichéradiologique. La seconde pourrait évaluer la corrélation exi-stant entre la mesure des flèches vertébrales avec le TL etl'angle de Cobb mesuré sur le cliché radiologique. L'étude deRahali-Kchachlouf en et al. 2001 [5] a déjà démontré unebonne corrélation (0,81) entre les valeurs de la lordose lom-baire mesurées sur la radiographie et celles mesurées grâceau fil à plomb.

à plomb.� Le TL est simple d'utilisation.� Le TL n'est pas un outil « évaluateurdépendant ».

CONCLUSION

Lors de notre étude, le TL a démontré une bonnefiabilité pour la mesure de la flèche lombaire.

Une seule mesure est nécessaire en condition L-S et deux encondition LT, ce constat s'explique par des variations de mesu-res plus importantes sur les étages vertébraux supérieurs,expliqué entre autre par les oscillations posturales. Notretravail a été prolongé récemment par l'étude réalisé par NadirDesjardins, étudiant à l'IFMK de Grenoble, validant le TL lorsde la mesure de la flèche cervical. Le TL présente donc denombreux avantages, comme une facilitée d'utilisation, lamesure est automatique et précise au millimètre près, le tempsde mesure est inférieur à une minute et la mesure n'est pasévaluateur dépendant. Ces avantages éliminent les inconvé-nients du fil à plomb.

Le TL est un outil qui répond aux exigences duthérapeute, facile d'utilisation, simple et fiable.

La valeur d'achat d'un TL possédant les fonctions utiliséesdans notre étude est aux alentours d'une centaine d'euros. Lesupport utilisé pourrait être remplacé par le montant d'uneporte permettant de conserver une référence de verticale.Ces conclusions suggèrent l'intérêt d'utiliser le TL pour mesu-rer les flèches vertébrales et ainsi devenir le « gold standard »auprès des kinésithérapeutes.

Déclaration d'intérêtsLes auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d'intérêts en relationavec cet article.

RemerciementsJe tiens tout particulièrement à remercier mes deux directeurs demémoire, Sandrine Monnet et Rémy Cuisinier, pour leur aide, leurgrande disponibilité et leurs conseils avisés à chacune de messollicitations.Je remercie Flavio Bonnet pour son précieux investissement lors de laréalisation des mesures.Je tiens également à remercier toutes les personnes qui ont participéavec moi à l'élaboration de ce travail, que ce soit en me donnant leursavis éclairés, en m'aidant à améliorer ma démarche scientifique, outout simplement en me soutenant moralement.

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