N O u V A U T

• Hergé suscite décidément les

études de toutes sortes, d'intérêt

fort divers. Ces derniers mois, sont

parus chez le même éditeur, Le-

francq, deux volumes qui éclairent

le travail du père de Tintin d'une

lumière inattendue. Le premier,

Trace R.G.(325 F), nous vient de

Hollande, où il est initialement paru

voici quelques années. Son auteur

Huibrecht van Opstal a recensé tous

les emprunts qu'Hergé a pu faire à

droite et à gauche pour constituer ce

qui deviendra ensuite son style, la

fameuse « ligne claire ». On savait

qu'au cours de ses années de forma-

tion, Hergé avait bien regardé cer-

taines bandes américaines (Bringing

Vp Father de McManus, en particu-

lier). D'un encyclopédisme sans

limite, les recherches de van Opstal

nous permettent de voir qu'Hergé

avait également fait son miel du

travail de ses contemporains dans le

domaine de l ' i l lus t ra t ion , du

cinéma, du dessin de presse, de lapublicité, etc. Touffu, traduit assez

approximativement (certains pas-

sages frisent le sabir), Trace R.G.

s'avère pourtant passionnant en ce

qu'il permet de voir le style hergéen

se constituer sur un laps de temps

finalement assez court. Une fois les

fondations de son style posées,

Hergé n'en bougera plus et ne fera

ensuite qu'affiner, soustraire, par

souci de lisibilité maximum.

Le second volume, Tintin chezVerne (129 F) aborde l'œuvred'Hergé dans les rapports qu'elle

entretient avec les romans de Jules

Verne. Les auteurs, Tomasi et

Deligne, l'un « vernien » et l'autre

« tintinophile » ont mis en commun

leurs connaissances et montrentcomment, malgré les déclarations

d'Hergé, qui niait toute influence de

l'écrivain nantais sur son propre

travail, Verne a pu nourrir son ima-

ginaire et sa création non seulement

par le texte, mais également par les

nombreuses illustrations qm accom-

pagnaient les premières éditions

Hetzel. Il faut avouer que la somme

des convergences s'avère troublante.

I A l'occasion de l'exposition que le

Musée de la bande dessinée consacre

à Raymond Macherot, les éditions

Mosquito ont édité une monographie

qui rend l'hommage qu'il mérite au

père de Chlorophylle et Sibylline.

Une interview-fleuve, plusieurs ar-

ticles et une bibliographie exhaus-

tive permettent de remettre à sa

place (l'une des premières) l'un des

maîtres de l'école franco-belge.

L'iconographie, constituée pour

l'essentiel d'inédits ou de documents

rares, est remarquable.

J.P.M.

ART

I Chez CERA-nrs Éditions, deBruno Munari : Les Machines de

Munari (119 F). Voir rubrique

«Chapeau!..p. 22.

I Chez Mango Jeunesse I Réunion

des Musées Nationaux de Olivia

Barbet-Massin et Caroline Lar-

roche : Une Année au musée : un

tableau pour chaque jour (99 F).

365 tableaux pour 365 jours : ce

livre au format carré est un calen-

drier perpétuel où à chaque jour

correspond une œuvre. Certains

tableaux marquent exactement

« l'événement » : 3 mai (« Le Trois

Mai » de Goya), 21 juin (« L'Eté »

de Puvis de Chavanne), 14 juillet

(« Rue pavoisée » de Dufy), 15 août

(« L'Assomption de la Vierge » de

Poussin). Mais ce principe n'est pas

systématique (pas de référence au

printemps pour le 21 mars, rien sur

le poisson pour le 1er avril). On a

l'impression parfois que certaines

œuvres auraient pu se trouver à

d'autres dates. Toutefois le choix

des peintres est très large (des Pri-

mitifs flamands à la peinture

contemporaine) et les reproductions

sont de qualité. Chaque tableau est

accompagné d'une courte explica-

tion et d'une question se rattachant

à la scène représentée. Un job' objet

qui reste toutefois limité pour une

initiation à l'histoire de l'art.

I Chez Mila Editions, de MilaBoutan : Vitraux (149 F). D'emblée

le petit lecteur est interpellé par le

tutoiement. Mila Boutan l'invite à se

rappeler comment il voit les vitraux

lorsqu'il les regarde dans une église.

Elle le place immédiatement dans

l'observation et la perspective. Em-

ployant les termes précis (plomb,

feuille de verre, paraison...), elle

explique la fabrication d'un vitrail

et montre comment les contraintes

techniques ont été judicieusement

détournées par les artistes (la dispo-

sition dans l'espace, la séparation

des scènes par le plomb donnent des

perspectives saisissantes, le décou-

page par petits espaces permet de ra-

conter une histoire et de juxtaposer

plusieurs scènes, la gamme restreinte

de couleurs devient un « code »).

Elle donne quelques exemples de

thèmes récurrents dans l'art du

vitrail (scènes religieuses, présenta-

tion des métiers...). Puis, un petit

historique nous montre comment cet

art a évolué du Moyen Age, temps

des cathédrales jusqu'au XXe siècle

où des artistes comme Chagall ou

N° 185 FEVRIER 1999/71

N O u V A U

Matisse s'y sont essayés. En find'ouvrage, comme dans tous les ou-vrages de la collection, l'enfanttrouvera le matériel nécessaire pourréaliser son propre vitrail avec desgommettes autocollantes. Commepour les Mosaïques, le grand formatcarré permet une qualité des re-productions pleine page. La mise enpages est toujours aussi attrayanteet aérée.

I A Paris Musées I Editions duRouergue, dans la collection L'Œilamusé, de Philippe-Jean Catinchi :De l'eau de l'eau (76 F). Entrez,entrez, la visite va commencer« sous le regard bienveillant dugardien Joseph » comme l'annoncela couverture. Prenez des œuvresdiverses des collections des musées dela Ville de Paris, des illustrationsd'auteurs pour enfants, agencez letout dans une mise en pages agréableteintée d'humour et vous obtenez unlivre d'art original. Le mélange quin'était pas évident est pourtant assezréussi et offre un regard différent surl'art. Des enseignes aux porcelaines,de la gravure à l'illustration, de laphotographie à la peinture, de l'af-fiche à la publicité, tous les arts ontdroit de cité avec pour point communl'eau. L'eau dans tous ses états : lesmythes, les rivières, les bateaux, lescanalisations..., l'eau à toutes lesépoques : de l'Antiquité à nos jours,l'eau sur tous les supports : le papier,la porcelaine, la pierre, le bois... Lesassociations aiguisent le regard. Unlivre à feuilleter dans tous les sensavec tous ses sens. Le droit d'entréeest de 76 francs.

I À La Réunion des Musées Natio-naux, de Caroline Desnouettes : LeMusée du potager (79 F). Un nouvelimagier, cette fois sur le thème du

Vitraux, M. Boutan, Mila Éditions

potager avec un choix classiqued'oeuvres diverses. Les fruits, leslégumes, les fleurs sont classés parsaisons (vert pour le printemps,jaune pour l'été, marron pour l'au-tomne, gris bleuté pour l'hiver), undégradé léger permet de distinguerles trois catégories. On fera lesmêmes remarques que pour lesautres titres de la collection : unmanque de lien entre les œuvres etla gêne que procurent les encadre-ments de couleur. Mais la qualitédes reproductions et le petit formatdonnent un livre agréable.

Dans la collection L'Enfance del'art de Marie Sellier : B commeBruegel (85 F). Que dire d'originalpour ce nouveau titre de la collec-tion Enfance de l'art ? Le principe

des 26 thèmes, un par lettre de l'al-phabet fonctionne toujours aussibien et la mise en pages est encoreune fois soignée. L'univers foison-nant et plein d'humour de Bruegelest mis à jour, regardé à la Loupe :Diablotins, Mendiants, Œufs,Harpies, les scènes de Kermesse, deNoces ou de l'Enfer, les mythescomme la chUte d ' Icare. . . Uneplongée réussie dans la réalité fan-tastique de Bruegel.

I Aux Éditions du Rouergue dansla nouvelle collection Touzazimutd'Olivier Douzou et Frédéric Rey :Authentiques exploits et cruellesdésillusions ; de Jochen Gerner etFrédéric Rey : Prospectus Box ; deFrédérique Bertrand et FrédéricRey : Tour de marché (49 Fchaque). Ce ne sont pas réellementdes livres d'art que les éditions duRouergue nous proposent. Mais cespetits livres pleins d'humour s'amu-sant avec le graphisme, faisant réfé-rence à certains domaines du designsont mine de rien une initiation ar-tistique et graphique pour les ado-lescents. Olivier Douzou détourneles objets pour en faire de petitsbolides, auteurs des plus grands ex-ploits ; Prospectus box met à l'hon-neur le packaging, se moquantparfois férocement des modes d'em-ploi des produits. La publicité estmise en boîte au sens propre commeau sens figuré. Le Tour de marchéde Frédérique Bertrand honore lesétiquettes des produits comme cellesdes prix, les cris des vendeurs quiharanguent le client, la petite listepour ne rien oublier. Le graphismeet la mise en pages sont pleins detrouvailles, de clins d'oeil. Ceslivres, dans l'air du temps, amènentun vent nouveau dans l'éditionpour enfants.

72 / LA REVUE DES LIVRES POUR ENFANTS

I Aux Editions Scala, dans la col-lection Tableaux choisis, de ClaireFayolle : Le Design (98 F). Lesobjets familiers sont avant toututiles et on oublie souvent que leurcréation fut parfois une petite ré-volution, non seulement dans leprogrès technique mais aussi dansleur esthétique. La chaise n°14 deThonet, le siège « Sacco » sont desnoms ignorés alors que nous nousasseyons dessus sans le savoir,d'autres objets sont devenus desnoms communs : le stylo Bic, lamontre Swatch, la colonne Decaux,la Vespa. C'est cette petite histoiredes objets industrialisés et des élé-ments qui font partie de notre viequotidienne que Claire Fayollenous raconte. Douze « objets »sont plus particulièrement mis enlumière, chacun ayant été dans undomaine particulier (mobilier, gra-phisme, packaging, produits manu-facturés, haute couture...), une ré-volution. Elle les rapproche

d'autres objets qui ont marquéleur époque ou font partie de notreunivers familier (la bouteilled'Evian ou celle de Coca-Cola, lerasoir et le briquet Bic, l'horoda-teur, l'appareil photo jetable...).Elle montre l'évolution incroyablede cette discipline, comment elle aenvahi grand nombre de domaines.Les nombreuses illustrations mar-quent ce foisonnement et permet-tent de mieux cerner ce que re-couvre le mot « design ».

Musique

I Chez GaEmard Jeunesse Musiquedans la collection Découverte desmusiciens, de Paule Du Bouchet,illustré par Charlotte Voake : Jean-Sébastien Bach ; de ChristianWasselin, illustré par CharlotteVoake : Hector Berlioz (85 F).

« Tango » le vélo pliant le plus plat du monde« Urban Solutions »

Le Design, Éditions Scala

Après les Premières Découvertesde la musique, voici une collectionpour les plus jeunes consacrée auxgrands musiciens. Chaque volumeprésente une courte biographie,une œuvre musicale de l'artisteillustre chaque étape de sa vie. Unencadré invite l'enfant à écoutersur le CD qui accompagne lelivre, le morceau retenu. En find'ouvrage quelques œuvres ma-jeures sont présentées. Bien quela mise en pages et l'illustrationne soient pas extraordinaires, cesont de premières biographieshonnêtes.

Dans la collection Musiquesd'ailleurs, d'Emmanuel Viau,illustré par Olivier Tallec : Antonet la musique cubaine ; de LeighSauerwein, illustré par EmilyWalcker : Bama et le blues (95 Fchaque). Une fiction met en scèneun jeune garçon doué pour lamusique et qui grâce à son talentsortira de son milieu défavorisépour jouer dans un groupe célèbre.Sur le haut de la page court unefrise donnant des renseignementsdivers qui éclairent certains pas-sages de l'histoire (lieux où l'his-toire se déroule, noms de musicienscélèbres, aperçus historiques...).Puis, l'ouvrage présente un enfantbien réel celui-là qui a vécu unehistoire similaire à celle du héros.En fin d'ouvrage, on trouve lesparoles en version originale et leurtraduction du CD qui accompagnele livre ainsi qu'une discographiepour se mettre au rythme du blues.On se demande pourquoi lesconcepteurs n'ont pas pris le partide raconter directement l'histoirevécue. La fiction n'apporte riensur la musique. Les deux premierstitres d'une collection qui laissesur sa faim de musique.

N° 185 FEVRIER 1999/ 73

N O uI Chez Gallimard JeunesseMusique l Cité de la musique dansla collection Carnets de la dansede Marie-Christine Vernay, illus-tré par Jean-Philippe Chabot : LaDanse Hip Hop ; de la compagnieBeau geste, illustré par Jean-Phi-lippe Chabot : La Danse moderne(98 F chaque). Une nouvelle col-lection consacrée à la danse.Chaque volume présente un genre.Les titres sont divisés en troisparties. Un historique retrace lesévolutions de chaque style et lesgrands noms de groupes pour lehip hop (les boys du Bronx, lesZulu...), et de chorégraphes es-sentiels pour la danse moderne(Isadora Duncan, Serge Diaghilev,Merce Cuningham...). Une partieest consacrée à la technique : lesdifférentes figures pour le hip hop(la coupole, le scorpion, le moon-wave...) ; des exercices pour pra-tiquer librement dans le cas de ladanse moderne. Un CD accom-pagne le livre et permet de mettreimmédiatement ses connaissancesen pratique. Enfin un carnet pra-tique donne adresses, lieux despectacle, définitions de termesspécifiques.

La mise en pages se veut bran-chée, le ton familier, bien que lepropos reste très sage. On auraitespéré, surtout pour le hip hop,un peu plus de fantaisie. Difficilede croire que les adeptes de cettedanse se retrouveront pleinementdans cet ouvrage. Toutefois, l'ini-tiative de créer une collection dedanse qui laisse une place à ladanse dite de rue est à saluer. Parailleurs ce livre permettra auxjeunes de voir qu'entre les dansesun lien existe et qu'elles s'enri-chissent entre elles.

CE.

V E

SCIENCESHUMAINES

U

I Chez Actes Sud Junior, Voyageautour de la Terre, un atlas enrelief (149 F) de François Michel,ill. Philippe Mignon, propose en sixdoubles pages un tour de la Terresous forme de livre animé. Le livreaborde successivement la place dela Terre dans le système solaire, lesdifférents milieux et modes de viepuis chacun des cinq continents.Les animations sont diversifiées -tirette, dépliant, livret... - et, tou-jours utilisées à bon escient, per-mettent de hiérarchiser l'informa-tion. Ici un disque permet decomprendre la rotation de la Terresur un axe incliné de 23°, là, unautre disque de connaître les esti-mations de la population desgrandes mégapoles du monde, iciencore, un petit livret apportequelques informations complémen-taires sur les Touaregs ou sur lesmodes de vie traditionnels. Descartes physiques et politiques pourchacun des continents, la liste despays avec leur drapeau, leur super-ficie, leur population viennent com-pléter leur carte d'identité. Si lesinformations données sont suc-cinctes elles constituent néanmoinsune bonne première approche de laquestion pour les enfants de 8 à 12

I Chez Albin Michel, dans la col-lection Carnets de sagesse, Parolesaborigènes (59 F), éd. de ThomasJohnson. La tradition aborigène ditqu'à la disparition des Grands an-cêtres ont subsisté la Loi et lesrêves. « A chaque Rêve correspondle récit d'une fraction de ce quis'est passé lors du Temps mytholo-

gique ». C'est cette mythologie,cette forme de spiritualité particu-lière, que nous fait découvrir cerecueil à travers des textes et desillustrations. Les peintures d'ar-tistes aborigènes, en regard destextes, sont la reprise des motifstraditionnels qui étaient exécutésdans des grottes sacrées, sur lescorps ou dans le sable lors de céré-monies. Images éphémères à l'ori-gine, elles sont transmises par cesartistes aujourd'hui. Comme pourles autres titres de la collection, àla qualité des textes et des imagescorrespond l'élégance et la réussitedelà mise en pages.

I Chez Autrement jeunesse, L'En-fant de la Taïga (89 F) de BlidAlsbirk, trad. Carione Chichereau.Au fil de la vie quotidienne deHarhru, un enfant de 7 ans, lelecteur découvre un mode de vietraditionnel dans la taïga, au nordde la Mongolie, une vie essentielle-ment consacrée à l'élevage desrennes, qui souffre beaucoup de lafermeture des frontières entre laMongolie et la Russie. Un beau re-portage photographique qui souffreun peu de la faiblesse du contenudocumentaire.

I Chez Bayard Editions, dans lacollection Encyclopédie Vivre en-semble, Vivre ensemble. L'Argent :guide pour un enfant citoyen(59 F) de Laura Jaffé, Laure Saint-Marc, ill. Catherine Proteaux, Béa-trice Veillon, Régis Faller. Le prin-cipe et les qualités des titresprécédents de la collection se re-trouvent ici. Un thème abordé parle biais d'une fiction, des séquencesdocumentaires, des jeux-tests sonttrois voies d'accès à la réflexion.L'écriture est simple et accessible,

74 / LA REVUE DES LIVRES POUR ENFANTS

N O u V U T

les définitions proposées sont claireset précises. Le texte sait éviterl'écueil du cours de morale. Les des-tinataires supposés (enfants dès 7ans) se prendront-ils au jeu sansune inévitable médiation d'unadulte ? C'est là toute la question.

I Chez Casterman, Atlas des Roisde France (142 F) de NathalieBailleux, Brigitte Coppin, ill. Jean-Michel Payet. Clovis, Pépin le Bref,Charlemagne... des rois mérovin-giens aux Bourbons, cet atlas relatele règne des différents monarquesqui ont marqué l'histoire de Franceainsi que l'histoire de quelques lieuxqui, d'une manière ou d'une autre,leur sont liés : Reims, Saint-Denis,

•v. -

« Un enfant du Béarn »,in Atlas des Rois de France,

Casterman

les châteaux de la Loire, le Louvre,Versailles... Un texte clair et acces-sible donne les éléments principauxde chaque règne et est enrichi parde nombreux encadrés qui appor-tent des informations complémen-taires. Une iconographie variéemêlant illustrations, cartes, arbresgénéalogiques et documentsd'époque, contribue à l'intérêt du

Dans la collection Des Enfants dansl'Histoire, Au temps de la GrandeGuerre (50 F) de René Ponthus, ill.Ginette Hoffmann, est un nouveautitre d'une collection qui som-meillait depuis plusieurs années. Enrespectant le principe initial de lacollection, le récit de la vie quoti-dienne d'un jeune garçon, Antoine,dans son village de Saint-Martin,sensibilise le jeune lecteur à l'his-toire de la guerre de 14-18. Si leparti pris de départ - situer la scèneinitiale en avril 1918 pour faire unehistoire à rebours - est convaincant,le texte est souvent trop allusif. Ilréussit assez bien à restituer des no-tations d'ambiance mais passe soussilence les causes de la guerre. Lesinformations sur le déroulementmême de la guerre - excepté unechronologie et deux cartes - sontassez sommaires. Toutefois des sé-quences documentaires à la finde chaque chapitre abordent demanière intéressante quelquesthèmes tels que la situation en 1918,le rôle des femmes, le renouveau del'armement, Verdun, le rôle del'aviation... Des illustrations unpeu conventionnelles traduisentbien dans l'ensemble le propos,sans éviter parfois un décalageentre le texte et l'image (p. 21 : lebonheur quand le père rentre dufront face à l'annonce du décès dufils de la voisine).

Dans la collection Les Détectives del'Histoire (95 F chaque), Les Az-tèques ; L'Egypte ancienne, dePhilip Ardagh, trad. Florence Ma-ruéjol , i l l . Colin King. Deuxvolumes d'une nouvelle collectionqui obéissent aux mêmes principes :un premier volume purement docu-mentaire aborde le sujet par unesuccession de doubles pages théma-tiques. Outre un texte général quidégage les principaux aspects de lacivilisation étudiée, chaque doublepage comprend une rubrique « Petitmusée » centrée sur des objets, desmonuments, des peintures et nousen livre une interprétation. Undeuxième volume inséré dans la cou-verture du premier propose une ap-proche ludique du sujet par le biaisd'une enquête policière qui invite lelecteur à se reporter au volume do-cumentaire pour trouver les ré-ponses à ses questions. Une dé-marche pertinente sur le fond maisqui déçoit quant à la forme. L'as-pect ludique des volumes ne réussitpas à faire oublier la minceur dupropos sur des sujets rebattus, desillustrations et une mise en pagesquelconques.

I Chez Circonflexe, dans la collec-tion Aux couleurs du monde, LeMonde des sous (69 F) de Jean-Marie Albertini est une histoire dela monnaie depuis le lointain cauri,jusqu'à la naissance de l'Euro. Letexte, toujours clair et précis,montre bien les différentes fonctionsde la monnaie au cours des siècles.Monnaie manuelle, monnaie fidu-ciaire, monnaie scripturale, autantde formes et de fonctions diffé-rentes, expliquées ici de manièretout à fait accessible. Une iconogra-phie variée contribue à la réussitedu volume.

N° 185 FEVRIER 1999/75

N O u V A U T

Et avant ? Mille ans d'histoire en remontant le passé,

ill. S. Hochain, L'École des loisirs-Archimède

B A L 'Ecole des loisirs-Archimède,Vapeurs de résistance (79 F), deFabian Grégoire, a pour objectifd'apporter aux plus jeunes enfantsquelques idées sur la DeuxièmeGuerre mondiale et plus particuliè-rement sur la Résistance chez lescheminots. L'histoire de ce petitgarçon qui voyage en train pour re-joindre son grand-père semble êtreun prétexte pour raconter lecourage des cheminots pendant laguerre. L'auteur a voulu parler detout : de la résistance des commu-nistes, de la situation des Juifs, desproblèmes de ravitaillement, de laquestion des réfractaires au STOainsi que de la collaboration. Le ré-sultat est un texte peu vraisem-blable et artificiel où rien n'est ex-pliqué. Qui trop embrasse . . .

Heureusement il reste de bellesillustrations sur la vie du rail.

Et avant ? Mille ans d'histoire enremontant le passé (79 F) de Phi-lippe Brochard, ill. Serge Hochain.Comme l'indique le sous-titre, ils'agit d'un flash-back historiquetrès rapide. Au point de départ,l'étonnement d'un enfant, MarinLafontaine surpris que son nomassez banal se retrouve aussi auCanada. Argument qui sert de pré-texte à remonter de génération engénération à la recherche d'unancêtre commun jusqu'à l'an mil oùapparaissent les premiers patro-nymes. Pour chaque étape unedouble page présente une scène em-blématique de la période : port colo-nial en Indochine vers 1910, usine

textile dans la vallée du Rhône...Trois niveaux de lecture se complè-tent : une illustration qui occupetoute la double page, un textecontinu en bas de page, et la reprisedes illustrations en fin de volume,sous forme de vignettes, encadréespar un texte apportant un complé-ment d'informations sur la période.La démarche retenue, l'intérêt desillustrations servies par le grandformat du volume contribuent à laréussite de ce titre, bonne sensibili-sation à la recherche de ses ancêtreset à la découverte du passé.

I Chez Gallimard, Atlas de l'ar-chéologie (225 F) de Mick Astonet Tim Taylor. Voir Rubrique« Chapeau !» p. 23.

Le livre des Philosophes (99 F) deLaurent Dechery, i l l . PeterLawman. Toute la question est desavoir si ce genre d'ouvrage est vrai-ment utile à la promotion de la phi-losophie. Présenter la philosophiecomme une activité de questionne-ment, mais faire défiler ensuite cer-taines figures de la philosophie- avec des lacunes notables commecelle de Rousseau - en indiquantsommairement les thèses qui per-mettent de les identifier est contra-dictoire. On ne présente pas, eneffet, les démarches réflexives quiconduisent à ces thèses, et l'on courtle risque d'enfermer les philosophesévoqués dans des formules-clichés.Toutefois, dans les limites du genre,l'ouvrage peut présenter un intérêt,à ceci près que le texte sembleparfois trop allusif, trop codé, pourprendre sens auprès de jeunes gensde 13-14 ans. C'est le cas notam-ment de l'évocation des philosophesmodernes, trop schématique et tropabstraite, en raison du caractère la-pidaire des formulations.

76 / LA REVUE DES LIVRES POUR ENFANTS

I Chez Hachette, dans la collection

Le Livre de poche Jeunesse Senior,

Gandhi, Une âme pour la liberté

(33 F) de José Féron Romano et

Judith Abehsera. Après un volume

consacré à Martin Luther King, celui-

ci est consacré au parcours du

Mahatma Gandhi. Le récit retrace

simplement les grandes étapes de sa

vie et de son action, en Inde comme

en Grande-Bretagne et en Afrique du

sud. L'écriture est accessible et le

volume complétera utilement le

volume des éditions Mango sur le

même sujet.

I Chez Mango Document, dans la

collection Regard d'aujourd'hui

Henri IV & son temps (99 F) de Do-

minique Gaussen et Patrick Henry.

Sur le même mode à la fois humoris-

tique et rigoureux que pour les

autres titres de la collection, c'est

une véritable radiographie d'une

époque de l'histoire de France - les

guerres de religion, l'arrivée au

pouvoir et le règne d'Henri IV - que

nous propose ce volume. Là encore

l'alliance des recettes de la commu-

nication et d'un texte pertinent fait

merveille pour décrire avec préci-

sion une période contrastée, des

détails de la vie quotidienne à une

perspective d'ensemble des enjeux

politiques de l'époque. La mise en

pages sollicite tous les registres de

l'iconographie (illustration, bande

dessinée, documents d'époque re-

visités) et ne recule devant aucun

détournement pour mieux dé-

peindre les multiples facettes du

règne. Serez-vous pendu ? En vous

reportant page 16, vous saurez si

vous êtes un bon catholique. A si-

gnaler aussi une in téressante

double page sur « la parladure du

XVIe siècle » ou comment s'en tirer

avec quelques expressions. Et bien

entendu la recette de la poule au

pot ne manque pas à l'appel. Si ce

livre s'adresse clairement aux plus

grands car certaines connaissances

préalables sont indispensables, il

ne déçoit pas.

I Chez Milan, dans la collection

Les Essentiels, Guide du conseil

économique et social (25 F) par

Véronique Le Marchand et Laurent

Michon, est un utile mémento sur

une institution méconnue, son his-

toire, ses champs d'action, sa com-

position et son mode de fonctionne-

ment. Il complète utilement la série

de volumes du Centre de vulgarisa-

tion de la connaissance consacrée à

nos institutions.

Le Flamenco entre révolte et

passion (25 F), de Gabriel et Ber-

nardo Sandoval, aborde le sujet

sous un angle triple : histoire du fla-

menco dans son contexte socio-éco-

nomique, canons, rituels et autres

normes, nouveaux chemins. Loin

des clichés habituels sur le sujet, le

texte est toujours intéressant et

complet. L'analyse historique ex-

plique clairement l'évolution d'une

musique, d'un chant, porteur d'une

réalité sociale. Les auteurs s'élèvent

contre un conservatisme et un

purisme excessif pour défendre le

chemin étroit entre tradition et mo-

dernité qu'ont su ouvrir certains

musiciens - Camaron de la Isla,

Paco de Lucia, le groupe Ketama -

sans dénaturer pour autant l'esprit

du flamenco ni le couper de ses

racines.

L'EDIT DE NANTES : HENRI IV ENTRE LES PROTESTANTS ET LES CATHOLIQUES

Henri IV et son temps, Mango Document

N° 185 FEVRIER 1999/ 77

Dans la collection Les Dicos essen-tiels, Le Dico des sectes (58 F), deAnnick Drogou et le Centre Roger-Ikor. Informer et prévenir est lafonction principale de ce petitvolume sur le phénomène des sectes.S'il ne prétend pas recenser l'en-semble des sectes, il propose néan-moins près de 400 entrées sur lesujet (principaux groupes sectaireset notions de base sur la question).Une introduction développéepropose une analyse de la questionavec une définition et l'étude desprincipales interrogations que soulè-vent les sectes : rapport entre secteset hérésie, buts des groupes sec-taires, moyens de lutte contre cephénomène... Un parcours fléchésuggère un choix d'une soixantainede définitions essentielles à une pre-mière approche du sujet. Si dansl'ensemble les notices sont claires etsynthétiques, la principale difficultédu volume réside dans la forme mêmedu dictionnaire appliquée à ce typede sujet. Extraites d'un contextegénéral, certaines notions, certainesentrées peuvent déconcerter.

I Au Père Castor-Flammarion,Dans la collection Castor DocSociété, Du Troc à l'euro (38 F) deNicolas-Jean Brehon, ill. JérômeFélix, n'est ni le premier ni ledernier livre sur l'histoire de lamonnaie, à l'heure de la naissancede l'Euro. Celui-ci explique biencette histoire, de l'époque du trocjusqu'à nos jours. Il aborde le sujetsous des angles multiples - histo-rique, symbolique, politique, écono-mique et social... - et traite de lamonnaie sous ses différentes formes(troc, métal, papier, chèque, cartede paiement...). De nombreux en-cadrés complètent l'informationprincipale. Le texte est pourtant un

peu bavard et ne distingue pas tou-jours l'essentiel de l'accessoire.L'âge du destinataire visé (11-12ans) peut sembler un peu ambitieuxen raison de la difficulté du propos.Il faut signaler cependant un bonchapitre sur la monnaie unique. Re-grettons, de manière générale, quela maquette de cette collection depoche soit un peu rébarbative etpropose des illustrations peu li-sibles.

Dans la collection Castor Doc ; His-toire, Chez nous au Moyen Age(34 F) de Brigitte Coppin, ill.Raïssa Lanéelle, propose une ap-procheglobale de la société auMoyen Age. Quatre parties princi-pales composent l'ouvrage : ceuxqui combattent, ceux qui tra-vaillent, ceux qui prient, le Roi.Si on peut regretter l'absence deréférences et de repères chronolo-giques pour cette très longuepériode de l'Histoire, chacune desparties analyse d'une façon claireet concise les différentes compo-

santés de la société de cette époque.Des paragraphes courts, un vocabu-laire précis, des explications enmarge sont parfaitement adaptés àune utilisation à des fins d'exposépar un public scolaire dès l'âge de10/11 ans. Si l'illustration à base dedocuments anciens est intéressante,regrettons toutefois la banalité desdessins.

Dans la collection Castor Doc ; Civi-lisations, Les Grandes religionsd 'aujourd 'hui (38 F) de OdonVallet, ill. Claude Cachin. Levolume repose sur trois parties : lesenfants d'Abraham, les religionsvenues d'Inde, les religions d'Ex-trême-Orient. Dans l'ensemble lesinformations sont précises mais laforme question-réponse, retenue ici,alourdit artificiellement le propos.Le texte mélange souvent l'anecdo-tique (est-il essentiel de savoir queles missels étaient souvent reliés àLimoges car grâce aux vaches limou-sines cette ville est la capitaledu cuir) et l'essentiel. Enfin la

Zappe la guerre, ill. Pef.Rue du Monde

78 / LA REVUE DES LIVRES POUR ENFANTS

N O u V A U

quasi-absence du continent afri-

cain est un peu déconcertante.

I A La Réunion des musées natio-

naux, dans la collection Drôles

d'époques (79 F chaque) : Néfertari

princesse d'Egypte, de Roberta An-

geletti ; Vulca l'Etrusque, de Béa-

trice Masini, ill. Roberta Angeletti.

On ne sait ce qui déçoit le plus dans

cette nouvelle collection : une

fiction insipide et sans intérêt ou la

platitude des illustrations. Une

rapide partie documentaire conclut

les volumes. On est habitué à mieux

chez cet éditeur.

I Chez Rue du monde, dans la col-

lection Histoire d'Histoire ; Zappe

la guerre (80 F) de Pef. Quatre-

vingts ans après la fin de la guerre

de 1914-1918, les morts dont le

nom est gravé sur le monument aux

morts du village décident de quitter

leur bloc de pierre tels qu' i ls

étaient à l 'heure de leur mort.

Sont-ils morts pour rien ? Ils dé-

couvrent un monde où la guerre

n a pas disparu, comme en témoi-

gnent les images d'un drôle d'engin

- la télévision - . Un gamin vient à

leur rencontre... C'est la contribu-

tion de Pef à l'anniversaire de la fin

de la Première Guerre mondiale.

Un récit contre cette guerre et

d'autres actuelles, complété par

quelques informations historiques

bien faites. Des illustrations par-

lantes, quelquefois dérangeantes

sou t i ennen t efficacement un

message parfois véhément mais qui

dégage une certaine générosité. Re-

grettons peut-être que le texte

n'évite pas quelques facilités sur la

télévision, l'automobile...

E.C.,E.M.,H.P.R,C.R.,J.V.N.

SCIENCES ET

TECHNIQUES

I Chez Albin Michel, viennent de

paraître les six premiers volumes de

l'Encyclopédie pratique Les petits

débrouillards (89 F chaque) : A la

découverte de l'eau, L'Invisible,

Vivre de mille manières , Les

Secrets de l'air, Planète Terre et

Le Monde des extrêmes. Destiné

aux 8-12 ans, chaque titre déve-

loppe une thématique très transver-

sale, subdivisée en quatre chapitres

proposant entre une quinzaine et

une vingtaine d'expériences. Plus de

350 expériences sont ainsi proposées

sous forme de petites fiches déta-

chables, facilement manipulables,

insérées dans une boîte-classeur aux

couleurs vives et aux dessins amu-

sants, boutonnée de pressions

noires. Voici, après deux ans et

demi de gestation, le fruit d'un

énorme travail éditorial qui a mobi-

lisé des dizaines de collaborateurs.

II s'est largement appuyé sur l'ex-

périence de terrain de l'Association

« Les petits débrouillards » et a

obtenu le parrainage de scienti-

fiques prestigieux comme Pierre

Lena, auteur de la sympathique

préface. Chaque fiche est conçue

sur le même modèle : énoncé de la

question, liste du matériel, manipu-

lation, explication et application

(l'explication scientifique). C'est

simple, clair, facile à réaliser et peu

onéreux puisque l'on n'utilise que

des matériaux de récupération. Un

certain nombre d'interrogations

surgissent pourtant. Ne pas décou-

per les disciplines arbitrairement,

comme le fait souvent la science,

peut être une démarche intéres-

sante, mais pourquoi traiter des

étoiles et des galaxies dans le volume

qui parle de l'invisible, en propo-

sant des expériences qui font toutes

appel à la vision ? On constate égale-

ment qu'un certain nombre d'expé-

riences ne sont en fait que des pro-

positions d'observation, pourquoi

pas ? Encore faut-il l'annoncer. Il

est plus ennuyeux que les prérequis

nécessaires à la compréhension ne

soient souvent pas à la portée des

enfants ou très rapidement « déli-

vrés » à la fin dans la notice explica-

tive. Un grand nombre de termes

scientifiques ou de notions de base

ne sont d'ailleurs pas explicités.

Mais le reproche principal qu'on

peut faire à cette collection, c'est

qu'à vouloir redistribuer le savoir

en dehors des disciplines habi-

tuelles, il arrive que l'on passe à

côté de l'essentiel. Prenons par

exemple, l'expérience proposée

pour répondre à la question « Pour-

quoi Fours polaire est-il blanc ? »,

dans « Les Richesses du monde

vivant », à la fin de Planète Terre.

Pour expliquer comment l'ours peut

résister à de grands froids, alors

que la couleur blanche renvoie les

rayons lumineux, on utilise des

tubes de plastique transparent qui

capturent et transportent la lunùère,

comme le font les fibres optiques, ce

qui est juste, très intéressant, mais

insuffisant. Les poils creux de l'ours

blanc lui assurent, en effet, une iso-

lation thermique très efficace sans

laquelle il ne survivrait pas, parce

qu'ils emprisonnent de l'air, ce que

ne dit pas l'explication finale, puis-

qu'on ne s'est intéressé qu'à la

couleur blanche de l'ours ! Reste

qu'un grand nombre d'expériences

passionneront petits et grands, que

l'aspect attrayant de l'encyclopédie

en fera un cadeau idéal et que tous

ceux qui travaillent avec des enfants

y puiseront maintes idées d'activités

scientifiques et ludiques.

N° 185 FEVRIER 1999/79