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Pédagogie et Musique

ROBERT RESSICAUD

LA

M U S I Q U E DANS L'

E D U C A T I O N

Préface de Maurice MARTENOT

Avec la participation

de Jean-Marc DEHAN

La symphonie de notre vie se construit avec les motifs de notre jeunesse

J O S WUYTACK

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La loi du 11 mars 1957 interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l 'auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contre-façon sanctionnée par les articles

425 et suivants du Code pénal

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A TOUS LES MIENS

A MA MÈRE

A MON FRÈRE ÉRIC

A CEUX QUI ONT BIEN VOULU ÊTRE MES PARENTS MARIE ET ANDRÉ NOVAT

Leur sens exceptionnel de la famille, leur générosité, leur ouverture sur la vie, leur écoute du monde des Enfants, leur respect de chacun....

Autant de valeurs d'une inestimable qualité qui m'ont permis de chercher, de réfléchir, de vivre une certaine forme de pédagogie.

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Dessin de Daniel C A C O U A U L T

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PRÉFACE

— Peu à peu, les hommes ont discerné qu 'il leur était possible, dans une lar- ge mesure, de forger leur destin. Les plus sages d'entre eux, comprenant l'impor- tance de l'Éducation, se sont efforcés de nous transmettre force préceptes.

— Dans les bibliothèques du monde entier, les ouvrages traitant de l'Éduca- tion tiennent une place considérable. Ont-ils atteint leur but ? On est en droit d'en douter, devant le triste tableau que représente encore l'humanité actuelle ! Aussi, dans un sourire désabusé, est-on tenté de dire : « Encore des conseils d'éduca- tion, à quoi bon, nous en avons déjà tellement lu... ».

— Pourtant vous auriez bien tort de refermer cet ouvrage, dont vous ne pou- vez manquer d'apprécier tout d'abord la profonde sincérité. A travers maints exem- ples pris sur le vif, Robert Ressicaud amène le lecteur à discerner combien on peut être dupe lorsqu'on a pour seul objectif : L'ÉDUCATION DE L'ENFANT. Comme si celle-ci pouvait simplement s'obtenir par une application scrupuleuse (encore faudrait-il y parvenir) d'une collection de préceptes soigneusement cata- logués et mémorisés. Ou, prenant les choses de plus haut, par l'agrément à des principes philosophiques indiscutables.

— Tout au contraire, l'auteur nous amène à reconnaître que l'éducation des enfants sera ce qu'est la nôtre, qu'elle commence par la nôtre. Que nous soyons éducateurs ou parents, c'est d'abord cette position d'humilité qu'il nous faut pren- dre, alors pourra s'instaurer un début de travail sur nous-même, dont les fruits seront à la mesure de notre persévérance.

— L'importance des « contacts », la qualité des relations entre l'éducateur et l'enfant font l'objet d'une attention particulière. On y perçoit les réactions de celui-ci variant suivant la nature de ces contacts, suivant la « disponibilité » de l'éducateur.

— Le grand mérite de l'auteur tient à ce qu 'il écarte le plus possible les recet- tes. Au contraire, les multiples et remarquables citations, qui appuient ses pro- pos, tendent à nous permettre de discerner que cette disponibilité ne vient pas seu- lement du savoir et de la bonne volonté, mais surtout de notre qualité d'être.

— Tout au long de l'ouvrage, le rôle de l'éducateur par l'ART et plus spé- cialement par la musique, apparaît de plus en plus clairement et, pour toutes ces raisons, j 'aurai plaisir à conseiller sa lecture à la plupart de nos professeurs d'édu- cation musicale ; c'est dire l'intérêt que j 'y porte.

Maurice MARTENOT (1898-1980).

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(Phrase inscrite sur les murs de Paris en mai 1968)

PRELUDE

Cet ouvrage n'est pas un « traité » de pédagogie écrit dans le but d'inciter le lecteur à appliquer « ma » méthode, mais une suite de réflexions rédigées à la lumière de mon expérience d'enseignement musical dans les écoles primaires, et tendant à mieux cerner la pédagogie « de vie » que nous recherchons au sein de notre équipe pédagogique.

Ce propos n'est pas limité au seul enseignement musical. La musique est essen- tiellement, à mon sens, une ouverture aux hommes et au monde ; c'est pourquoi mon témoignage fait largement appel à tous les événements du quotidien, d'autant plus que l'acte d'enseigner n'existe qu'en fonction de la conception que nous pou- vons avoir de l'enfant, de l'être humain, de la vie. Or, à tout moment, l'homme engage sa personnalité et sa responsabilité. Nous sommes, à mon avis, autant res- ponsables de nos petits actes et modestes décisions que des engagements qui modi- fient notre existence. Ce n'est pas une question d'âge, ni même une question de droit mais plus précisément une possibilité quotidienne de choisir, d'être responsable.

C'est par notre comportement, notre manière d'être, que l'autre, enfant ou adulte, peut apprécier, aimer ou refuser ce que nous représentons. Si, au fil des années, l'enfant est habitué à choisir, il sera plus apte à construire ses propres conceptions à partir de « modèles » qui auront été vécus, et non imposés.

Pour moi, il n'a donc jamais été question d'être un dresseur capable de don- ner à la société des « enfants-fauves » sagement disciplinés, devenus dociles et aveugles à tous les signes de la vie. Je pense au contraire que tout éducateur doit prendre les distances indispensables pour ne pas reporter sur l'enfant ses propres conceptions de la vie. Non par démission, mais par respect de la liberté de l'enfant.

Il découle de cette conception que notre pédagogie n'est pas un ensemble de recettes, mais une recherche continuelle. Elle suppose une remise en question per- manente, la recherche d'une vérité bonne pour un jour, mais qui sera remise en question dès le lendemain...

« A ma naissance, le sein était ma vérité, celle qui me suffisait jusqu 'au jour où la vérité s'est mise à marcher, à courir, à gravir et à rechercher une autre vérité qui ne sera acquise qu ' au jour de ma mort. »

Robert OLIVIER.

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24 MAI

Aujourd'hui les classes de l'école sont désorganisées car la plupart des élèves qui doivent participer demain à une compétition sportive effectuent leur ultime répétition. Mon effectif est ainsi réduit de quarante à vingt-cinq enfants, âgés de neuf à onze ans et demi.

Après une séance de chant d'un bon quart d'heure, je décide d'interrompre le tra- vail vocal pour dialoguer avec eux, et les incite à me poser des questions. (Je viens d'avoir vingt sept ans et il y a six ans, jour pour jour, que j'ai donné mon premier cours de musique dans une école primaire).

— Est-ce que l'on peut poser des questions sur vous ?

— Je n'en vois pas l'intérêt mais si vous y tenez...

— Est-ce que vous aimez la musique ?

— Évidemment, sans cela je crois que je n'aurais pas continué ce travail.

— Mais pour vous la musique qu'est-ce que c'est ?

— Pour moi, ce n'est RIEN. Avoir une voiture ou une machine à laver ça sert à quelque chose, mais la musique ne sert à rien. Toutefois, imaginez un appartement sans fleurs, ou bien que l'on supprime de votre chambre l'objet, le jouet que vous pré- férez, ou bien encore que vous soyez séparés de la personne que vous préférez. Vous seriez à coup sûr fort tristes, et il vous semblerait que quelque chose d'important vous manque. Eh bien la musique c'est cela : c'est quelque chose qui m'accompagne par- tout, et je crois bien que si elle n'était pas avec moi, je serais très triste. Je ne peux plus m'en passer.

— Quels autres métiers avez-vous fait avant d'être prof ?

— Menuisier, manœuvre, releveur de compteurs d'eau.

— Pourquoi avez-vous choisi ce métier ?

— Il me comble pleinement car il me permet de vivre à la fois pour la musique et pour les enfants.

— Où avez-vous donné votre premier cours ?

— Dans un village du département de l'Ain (près de Tenay) et cela fait six ans aujourd'hui que j'ai débuté dans l'enseignement.

— Racontez votre premier cours.

Je leur raconte alors de façon humoristique l'accueil que m'a réservé, lors de ma première visite, une institutrice qui me prenait pour un représentant.

Puis, à leur demande, je lis un texte dans lequel est glissée une phrase de Mau- rice Martenot « La valeur de l'ART dans l'éducation est IRREMPLAÇABLE ». Immédia- tement un enfant me pose une question judicieuse :

— Vous dites que la musique ça ne sert à rien, et maintenant vous dites que c'est irremplaçable ? Il faudrait tout de même savoir !...

Je lui fais remarquer qu'au siècle dernier une personne qui ne savait pas lire ni écrire pouvait cependant vivre normalement. Mais que depuis, l'école obligatoire a per- mis l'alphabétisation de tous et que plus récemment l'on a accordé une part impor- tante à l'éducation artistique qui fournit aux hommes d'autres moyens d'expression qui complètent les premiers.

— Quand vous étiez élève, quel genre d'élève étiez-vous ?

— A vous dire la vérité, je n'étais pas un très bon élève.

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— Qu'est-ce que ça veut dire pas très bon ? — J ' é t a i s t o u j o u r s c l a s s é e n t r e l e 3 0 e t l e 3 3 e .

A ce moment là de nombreux « HOU » fusent et on entend la petite voix d'une fil- lette de neuf ans : « C'est pour ça qu'il fait toujours des fautes ! »

Mais depuis, j'ai dû travailler par correspondance pour compenser ma paresse et, rapidement, je leur explique en quoi cela consiste. Un garçon commente : « Ben, ma mère elle le fait et c'est pas marrant ».

— Si vous n'aviez pas fait ce métier, qu'est-ce que vous auriez fait à la place ? — Jamais musicien, mais je me serais dirigé vers un métier d'éducateur pour

enfants handicapés ou pour délinquants. — Et pourquoi ? — Parce que je pense que l'on peut vivre aussi bien avec des enfants différents

et que je pourrais également leur faire partager les joies et les plaisirs de la musique. — C'est bien joli, vous nous faites des leçons avec des méthodes modernes, mais,

quand on ira en sixième on va avoir des vieilles méthodes et on va être complètement dégoûté, comme l'a été mon frère !

— Pourquoi n'êtes-vous pas marié ? Voilà une question bien embarrassante. Je dois avouer que la réponse est loin de

satisfaire leur curiosité. Je leur réponds en effet que c'est un choix qui pourrait éven- tuellement se modifier dans l'avenir.

Je livre maintenant à votre réflexion la question la plus percutante. — Vous faites votre métier pour la musique ou pour les enfants ? — Je ne peux et ne veux pas vous répondre. A vous d'apprécier si je travaille pour

l'un, pour l'autre ou pour les deux.

A ce moment-là, une petite guerre se déclenche dans la classe. Les uns disent que c'est pour la musique, les autres pour les enfants. Mais je n'ai pas le droit de les mettre sur une voie : je ne veux exercer aucune pression sur leur opinion.

Dans le courant de la conversation, un enfant me pose la question suivante : « Qu'est-ce qu'un psychologue ? »

Avant même que j'ai le temps de formuler une réponse, un jeune garçon de 10 ans, François, se lève et déclare : « Moi, je sais, c'est un monsieur qui s'occupe des fous ».

Je reprends alors la conversation en main, car la mère de François fait justement un séjour dans un hôpital psychiatrique. François cherche en fait à savoir si oui ou non sa mère est folle, puisqu'elle est soignée par des psychologues. Je réponds aussitôt, surtout pour rassurer François et pour ne laisser de doute à personne : « Tous ceux qui s'occupent des autres sont appelés à faire de la psychologie, que l'on soit méde- cin, professeur, prêtre, instituteur ou infirmier. Votre maître et moi-même (ce qui est faux) nous avons fait des études de psychologie. La psychologie c'est apprendre à mieux connaître les autres. Ce n'est pas du tout réservé aux fous. »

Je ne sais si les psychologues sont satisfaits de ma réponse mais il faut avant toute chose rassurer François.

Quelques mois après cette discussion je perds ma mère. A cette occasion beau- coup d'enfants me manifestent leur sympathie. Peu après une maman me relate une conversation entre elle et son fils Christophe, qui concluait ainsi : « S'il aime tant sa maman, pourquoi n'en donnerait-il pas une à un petit garçon ? »

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C'est la seconde fois que je me vois interrogé à ce sujet et je constate que certains enfants n'arrivent pas à imaginer qu'un individu puisse être célibataire. Souvent ils me questionnent, certains disent que j'ai raison, d'autres ne comprennent pas et manifes- tent un peu de révolte dans leur attitude. Mais un garçon, Jean-Pierre, me pose une question différente à ce propos : « Si tu te maries, est-ce que tu t 'occuperas de nous de la même manière ? ». Je dois lui expliquer que je m'efforcerai de poursuivre mes activités avec eux, mais que la priorité devra aller à ma femme et à mes enfants ; à cela il répond : « Mais alors, il ne faut pas te marier ». Les réactions divergent en fonc- tion de la maturité de chacun et surtout en fonction des discussions que les enfants peuvent avoir en famille.

Ce débat spontané me fait réaliser à quel point les enfants cherchent à nous con- naître. En vérité, il nous connaissent déjà bien mais ils désirent savoir si l'on répond aussi franchement qu'ils le pensent.

Ils posent de nombreuses questions sur le choix et la qualité du travail. Mais tous n'y sont pas sensibles et il est facile d'établir une relation entre les questionneurs et leur milieu familial. Ceux pour qui le travail est considéré à la maison comme une acti- vité saine et équilibrante se désintéressent de la conversation. A l'inverse, ceux qui observent dans leur entourage combien le travail pèse et étouffe l'épanouissement per- sonnel sont vivement intéressés et cherchent à savoir si le travail est aussi ressenti comme une contrainte ou alors comme une source d'évolution.

A ce propos, les rencontres avec des gens passionnés par leur métier, comme le sont la plupart des artistes, sont fort bénéfiques pour ces enfants qui entrevoient ainsi, qu'un jour, eux-aussi, pourront exercer un métier vraiment enrichissant.

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DEUXIÈME SITUATION

Un samedi matin comme un autre. Je fais mon cours de musique dans un CM2 (10-12 ans). Le maître n'est pas dans la classe.

Comme à l'ordinaire, au cours de ma leçon, j'interroge quelques élèves. Dans l'ensemble je suis assez satisfait du travail, et, poursuivant, je demande à Patrick E..., un cancre (comme il est d 'usage d'appeler « les mauvais élèves »), de bien vouloir me lire un exercice de lecture musicale. Comme il ne déchiffre pas une seule note, je le « colle » pour 11 h 30.

A l'heure dite je le surveille pendant une demi-heure, mais il ne fait pas plus d'efforts. Je renouvelle donc la colle et le samedi suivant nous nous retrouvons face à face dans la même situation d'échec. E... se refusant fermement à lire quoi que ce soit, je le menace d'autres punitions. Agacé, il réplique :

— J'peux pas y arriver puisque j'suis bête ! — Qui te l'a dit ? Répondis-je d'un ton sévère. — Mes parents ! — Et qui encore ? — Le directeur ! — Moi j'te le dis pas, mais est-ce que je te le fais sentir ? — Ouais !

Un silence assez long interrompt la conversation, puis brutalement, il reprend : — Et mes camarades aussi !

C'est alors que je réalise que j'ai affaire à un garçon qui a pris un mauvais départ dans son existence sociale et scolaire. Conscient de l'aide à lui apporter pour le sortir de l'état d'insécurité dans lequel la classe, le directeur, ses parents, moi-même et sur- tout ses camarades ont contribué à le plonger, je poursuis la discussion.

— Patrick, je t 'assure que tu n'es pas plus bête qu'un autre ! — Peuh ! (Il hausse les épaules) — Si tu le veux, tu peux rattraper tes camarades. C'est bon ! Tu peux partir. Patrick dévale les escaliers de l'école. Un instant après, je le vis réapparaître dans

la classe. — M'sieur, on est fermé dans l'école !

Comme je suis nouveau prof, je ne connais pas d'autre issue que la porte princi- pale. C'est donc lui qui déniche une sortie. Pour le remercier et rattraper notre retard, je lui propose de le ramener chez lui en voiture. Il monte à l'arrière et ne desserre pas plus les dents que moi. A l'arrivée il descend, claque la portière et me salue sèchement.

Huit jours passent et je retrouve Patrick qui accepte de sacrifier ses récréations et ses fins d'après-midi pour travailler avec moi, afin de rattraper ses camarades. Au bout de trois semaines, j'interroge Patrick devant tous ses camarades. Aussitôt, rire général : la classe estime qu'il est incapable de réussir l'exercice demandé. A vrai dire, je suis moi-même pris de panique car je sais qu'un échec serait très difficilement sur- montable pour Patrick qui constatera une fois de plus qu'il est vraiment plus bête que les autres.

Très lentement Patrick lit tout l'exercice à haute voix, sans se tromper et surtout sans intervention d'un camarade ni de moi-même. A la fin de l'exercice, « Ouf ! » : aux yeux de tous, il s 'est mis à niveau ; personne n'ose rire. La partie est gagnée !

Pour moi, ce sera le point de départ d'une pédagogie orientée sur le centre

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