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69 MARINE&OCÉANS N° 252 - JUILLET-AOÛT-SEPTEMBRE 2016 À l’occasion de cette seconde édition du cahier Environnement de Marine & Océans réalisé avec le soutien de la Fondation Prince Albert II de Monaco, nous souhaitions mettre en avant notre en- gagement dans le domaine des Aires marines protégées (AMP) et notamment notre soutien au ren- forcement des AMP existantes. Au cours de ces der- nières années, nos efforts se sont tout particulièrement concentrés sur le Sanctuaire Pelagos. Crée en 1999, ce Sanctuaire s’étend sur trois pays : la France, l’Italie et la Principauté de Monaco pour une superficie totale de 87 500 km 2 , soit près de 4 % du bassin méditerra- néen. Il est devenu la première zone transfrontalière de la Méditerranée dédiée à la protection des mam- mifères marins et représente, depuis 2001, la plus grande Aire spécialement protégée d’importance mé- diterranéenne (ASPIM)... Depuis la presqu’île de Giens jusqu’à celle de Fosso Chiarone au sud de la Toscane en passant par la Corse et le nord de la Sar- daigne, ce Sanctuaire accueille un grand nombre d’es- pèces symboliques comme le rorqual commun, le ca- chalot et de nombreuses espèces de dauphins. Dans le cadre de la Convention pour la diversité biologique et de la Convention de Barcelone, la com- munauté internationale s’est engagée à atteindre l’objectif 11 d’Aïchi : 10 % de zones marines et cô- tières protégées d’ici à 2020 à travers le monde. Cet objectif est encore loin d’être réalisé en Méditerra- née. Malgré les quelques zones protégées en cours de création, moins de 6 % de la mer Méditerranée sont sous un statut de protection, un pourcentage qui chuterait à 1 % si le Sanctuaire Pelagos venait à être exclu, faute de gestion efficace. Le Sanctuaire Pelagos s’est en effet bien éloigné de ses ambitions initiales, plus de seize ans après sa création. L’aspect peu contraignant de l’Accord si- et Philippe Mondielli Directeur scientifique de la Fondation Prince Albert II de Monaco de Giuseppe Di Carlo Director WWF Mediterranean Marine Initiative Éditorial PHOTO : WWF MEDITERRANEAN MARINE INITIATIVE « Nous devons protéger l’océan comme si nos vies en dépendaient. Et c’est précisément le cas. » Sylvia EARLE, biologiste, exploratrice, ambassadrice de l’Appel de l’océan pour le climat gné par les trois pays concernés a abouti à une vo- lonté politique faible dans les actions de protection du Sanctuaire. Ce manque de volonté en ce qui concerne la politique commune de gestion ainsi que la fermeture du secrétariat permanent et les moyens limités, ont entravé la gestion efficace de Pelagos au cours des dernières années. À l’initiative de la Fondation Prince Albert II de Monaco, du WWF, de l’UICN et de MedPAN, un appel aux trois États responsables du Sanctuaire a été lancé le 24 mars 2015. Cet appel demande aux États de donner un nou- vel élan au Sanctuaire au travers de moyens aug- mentés et d’une nouvelle approche à la gouvernance, effort indispensable à sa survie. Il a été signé par 17 autres ONG françaises, italiennes et monégasques dont Greenpeace, la Fondation Nicolas Hulot et France Nature Environnement. Cet engouement montre l’enjeu de conservation que Pelagos repré- sente au niveau international. Les ONG signataires de cet appel ont entre autres demandé aux États de renforcer leur collaboration afin que Pelagos de- vienne l’exemple international de conservation de la biodiversité marine qu’il devrait être. Ces ONG ont aussi offert leur soutien et conseil quant aux pos- sibles pistes d’amélioration. Cet appel a reçu un retour positif de la part des gouvernements qui, à la dernière Réunion des Par- ties à l’Accord, se sont engagés à des améliorations significatives en termes de gouvernance et fonc- tionnement, notamment en dotant le Sanctuaire d’un statut juridique propre, d’un budget de fonctionne- ment adéquat et d’un nouveau plan de gestion. Tous les acteurs méditerranéens souhaitent aujourd’hui que Pelagos retrouve un nouvel élan et redevienne une Aire marine protégée exemplaire. PHOTO : FPA2 Pelagos L’urgence d’un nouveau départ LE CAHIER ENVIRONNEMENT DE MARINE&OCÉANS Sommaire 69 Editorial « Pelagos, l’urgence d’un nouveau départ » par Guiseppe Di Carlo et Philippe Mondielli. 70 Préserver la grande nacre de Méditerranée. 72 La « perle » de Koh Rong. 74 Infos. PHOTO : WWW.SOUFFLEURSDECUME.COM Avec la Fondation Prince Albert II de Monaco Cachalot dans le sanctuaire Pelagos en Méditerranée. Pelagos est un espace maritime de 87 500 km² mis en œuvre par un accord entre l’Italie, Monaco et la France pour la protection des mammifères marins.

PHOTO : FPA2 biologiste, exploratrice, Pelagos L’urgence d ......PHOTO : FPA2 Pelagos L’urgence d’un nouveau départ LE CAHIER ENVIRONNEMENT DE MARINE&OCÉANS Sommaire 69 Editorial

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Page 1: PHOTO : FPA2 biologiste, exploratrice, Pelagos L’urgence d ......PHOTO : FPA2 Pelagos L’urgence d’un nouveau départ LE CAHIER ENVIRONNEMENT DE MARINE&OCÉANS Sommaire 69 Editorial

69MARINE&OCÉANS N° 252 - JUILLET-AOÛT-SEPTEMBRE 2016

À l’occasion de cette seconde édition du cahierEnvironnement de Marine & Océans réalisé

avec le soutien de la Fondation Prince Albert II deMonaco, nous souhaitions mettre en avant notre en-gagement dans le domaine des Aires marines protégées (AMP) et notamment notre soutien au ren-forcement des AMP existantes. Au cours de ces der-nières années, nos efforts se sont tout particulièrementconcentrés sur le Sanctuaire Pelagos. Crée en 1999, ceSanctuaire s’étend sur trois pays : la France, l’Italie etla Principauté de Monaco pour une superficie totalede 87 500 km2, soit près de 4 % du bassin méditerra-néen. Il est devenu la première zone transfrontalièrede la Méditerranée dédiée à la protection des mam-mifères marins et représente, depuis 2001, la plusgrande Aire spécialement protégée d’importance mé-diterranéenne (ASPIM)... Depuis la presqu’île deGiens jusqu’à celle de Fosso Chiarone au sud de laToscane en passant par la Corse et le nord de la Sar-daigne, ce Sanctuaire accueille un grand nombre d’es-pèces symboliques comme le rorqual commun, le ca-chalot et de nombreuses espèces de dauphins.

Dans le cadre de la Convention pour la diversitébiologique et de la Convention de Barcelone, la com-munauté internationale s’est engagée à atteindrel’objectif 11 d’Aïchi : 10 % de zones marines et cô-tières protégées d’ici à 2020 à travers le monde. Cetobjectif est encore loin d’être réalisé en Méditerra-née. Malgré les quelques zones protégées en coursde création, moins de 6 % de la mer Méditerranéesont sous un statut de protection, un pourcentagequi chuterait à 1 % si le Sanctuaire Pelagos venait àêtre exclu, faute de gestion efficace.

Le Sanctuaire Pelagos s’est en effet bien éloignéde ses ambitions initiales, plus de seize ans après sa création. L’aspect peu contraignant de l’Accord si-

et Philippe MondielliDirecteur scientifique de la Fondation

Prince Albert II de Monaco

de Giuseppe Di CarloDirector WWF Mediterranean Marine Initiative

Éditorial

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« Nous devons protéger l’océan comme si nos vies en dépendaient. Et c’est précisément le cas.»

Sylvia EARLE, biologiste, exploratrice,

ambassadrice de l’Appel de l’océan pour le climat

gné par les trois pays concernés a abouti à une vo-lonté politique faible dans les actions de protectiondu Sanctuaire. Ce manque de volonté en ce quiconcerne la politique commune de gestion ainsi quela fermeture du secrétariat permanent et les moyenslimités, ont entravé la gestion efficace de Pelagos aucours des dernières années.

À l’initiative de la Fondation Prince Albert II deMonaco, du WWF, de l’UICN et de MedPAN, unappel aux trois États responsables du Sanctuaire aété lancé le 24 mars 2015.

Cet appel demande aux États de donner un nou-vel élan au Sanctuaire au travers de moyens aug-mentés et d’une nouvelle approche à la gouvernance,effort indispensable à sa survie. Il a été signé par 17autres ONG françaises, italiennes et monégasquesdont Greenpeace, la Fondation Nicolas Hulot etFrance Nature Environnement. Cet engouementmontre l’enjeu de conservation que Pelagos repré-sente au niveau international. Les ONG signatairesde cet appel ont entre autres demandé aux États derenforcer leur collaboration afin que Pelagos de-vienne l’exemple international de conservation de labiodiversité marine qu’il devrait être. Ces ONG ontaussi offert leur soutien et conseil quant aux pos-sibles pistes d’amélioration.

Cet appel a reçu un retour positif de la part desgouvernements qui, à la dernière Réunion des Par-ties à l’Accord, se sont engagés à des améliorationssignificatives en termes de gouvernance et fonc-tionnement, notamment en dotant le Sanctuaire d’unstatut juridique propre, d’un budget de fonctionne-ment adéquat et d’un nouveau plan de gestion. Tousles acteurs méditerranéens souhaitent aujourd’huique Pelagos retrouve un nouvel élan et redevienneune Aire marine protégée exemplaire. ■

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PelagosL’urgence d’un nouveau départ

LE CAHIER ENVIRONNEMENT DE MARINE&OCÉANS

Sommaire69 Editorial

« Pelagos, l’urgenced’un nouveau départ»par Guiseppe Di Carloet Philippe Mondielli.

70 Préserver la grande nacre de Méditerranée.

72 La « perle » de Koh Rong.

74 Infos.

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Avec la Fondation Prince Albert II de Monaco

Cachalot dans le sanctuaire Pelagos en Méditerranée. Pelagos est un espace maritimede 87 500 km² mis en œuvrepar un accord entre l’Italie, Monacoet la France pour la protectiondes mammifères marins.

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71MARINE&OCÉANS N° 252 - JUILLET-AOÛT-SEPTEMBRE 2016

70MARINE&OCÉANS N° 252 - JUILLET-AOÛT-SEPTEMBRE 2016

Préserver la grande nacrede Méditerranée

Lorsqu’au printemps 2014, la Fonda-tion Prince Albert II de Monaco m’asollicité pour développer une étude

sur la grande nacre de Méditerranée bienprésente dans les Bouches de Kotor auMonténégro, j’ai accepté avec enthou-siasme. Travailler dans ce véritable fjordde l’Adriatique était pour moi un nou-veau challenge.

La grande nacre, coquillage endémiquede Méditerranée, était menacée de dis-parition il y a trente ans, détruite par lesancres des bateaux, par le chalutage etpar les pollutions littorales qui affectaientle développement larvaire. Dans le mêmetemps, la restructuration des rivages, lebétonnage du littoral faisait disparaitreses lieux de reproduction. Et pourtantPinna nobilis est un indicateur de la qua-lité du littoral au même titre que l’her-bier de Posidonie qui est son milieu deprédilection. Ce coquillage bivalve quipeut atteindre une taille de plus d’unmètre à l’état adulte, enregistre tous lesparamètres du milieu marin. Comme ilvit très vieux – plus de quarante ans –toute l’histoire de l’évolution du milieudurant sa durée d’existence est inscritedans sa coquille.

Les Bouches de Kotor, au Monténé-gro, sont un endroit idéal pour l’étudier.Les populations de grandes nacres y sontrelativement à l’abri car la pêche n’y estpas très importante et les mouillages li-mités. Les conditions hydrologiques ysont aussi très particulières. Les tom-bants collinaires qui arrivent dans le fjordapportent de l’eau douce et des sels mi-néraux qui favorisent la productionplanctonique et le développement decertains organismes comme les co-quillages, filtreurs de plancton. Ces ap-ports favorisent l’installation, par petits

Coquillage emblématique et véritable « baromètre » de la qualité du littoral, la grande nacre fait l’objet d’une étude dans les Bouches de Kotor,

au Monténégro, destinée à parfaire sa connaissance et sa protection. Explication.

Par NARDO VICENTEProfesseur émérite à l’université d’Aix-Marseille

Responsable scientifique de l’Institut océanographique Paul Ricard

En savoir + :www.fpa2.com

www.institut-paul-ricard.org

pulation de nacres rencontre des condi-tions plus favorables qui leur permettentd’atteindre des tailles plus importantes etune durée de vie plus longue.

Ce projet d’étude, financé par la Fon-dation Prince Albert II, vient de débuteravec les premiers recensements de po-pulations. Il a été élaboré en collaborationentre l’Institut de biologie marine de Ko-tor, l’Imedmar de Calpe près d’Alicante– un laboratoire marin de la Costa Blancaespagnole –, et l’Institut océanographiquePaul Ricard installé dans le Var. Il consisteà comparer la dynamique des popula-tions de grandes nacres dans chacun deces trois sites, ainsi que dans la Réservemarine du Larvotto, à Monaco, afin defavoriser, à terme, leur préservation.

Un volet génétique du projet doit per-mettre de voir s’il existe des relationsentre les diverses populations. Le déve-loppement larvaire de l’espèce n’ayantjamais été obtenu en totalité à ce jour,son étude embryologique a été entre-

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Les Bouches de Kotor au Monténégro et, en médaillon, grande nacre dans un herbier de Posidonies. « Les populations de grande nacre sont là encore relativement à l’abri des activités humaines. » Professeur NARDOVICENTE Marine & Océans remercie le site www.all-free-photos.com pour sa photo des Bouches de Kotor.

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Le professeur Nardo Vicente.

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sions de radio et de télévision sont pré-vus pour illustrer et expliquer la vie de cecoquillage. Des échanges d’étudiants etde chercheurs des trois laboratoires vontégalement avoir lieu pendant toute ladurée du programme.

À l’issue de ces études, des proposi-tions seront faites aux organismes de tu-telle pour la protection de certaines zonesdes Bouches de Kotor. L’écosystèmed’une richesse incomparable de ce fjordde l’Adriatique mérite en effet claire-ment d’être protégé.

Ces études vont également permettrede relancer un Réseau – créé en 1990mais jusque là resté en sommeil –, d’ob-servation, d’étude et de protection de laGrande nacre. Il permettra à d’autres la-boratoires du pourtour méditerranéende collaborer à la connaissance et à laprotection de ce coquillage bivalve em-blématique de la Mare nostrum. ■

fonds, d’une pelouse de cymodocée,plante marine caractéristique des milieuxlagunaires, dans laquelle de grandesnacres parviennent à se reproduire. Maisleur croissance et leur durée de vie sontlimitées alors qu’en profondeur, où sedéveloppe l’herbier de Posidonies, la po-

Inspection d’un collecteur larvaire par le professeur Nardo Vicente. « Les collecteurs chargés de larves de nombreuxgroupes zoologiques constituent de véritablestémoins de la biodiversité locale. » ProfesseurNARDO VICENTE

Contrôle d’une filière de pleine eau avec sacs de captage larvaire. Ces derniers

sont installés, de mètre en mètre,jusqu’à vingt mètres de profondeur.

prise. Afin d’obtenir des juvéniles, des fi-lières de pleine eau ont été installées dansles divers sites. Elles sont équipées, jus-qu’à vingt mètres de profondeur, de col-lecteurs larvaires installés, de mètre enmètre, sur le cordage qui constitue la fi-lière. Ces collecteurs sont de simples sacsà oignons ou à oranges dont les maillespermettent l’installation de nombreuseslarves comme celles de Pinna nobilis. Im-mergées au printemps, les filières sontrelevées à l’automne. Les collecteurs

chargés de larves de nombreux groupeszoologiques constituent de véritables té-moins de la biodiversité locale. La crois-sance des nacres juvéniles ainsi captéesest régulièrement suivie. À partir d’unecertaine taille, ces nacres pourront êtreréimplantées dans le milieu marin.

Les résultats de toutes ces études vontfaire l’objet de publications scientifiques,mais également de conférences destinéesaux écoles et à un large public. Différentstypes de documents, des films, des émis-

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72MARINE&OCÉANS N° 252 - JUILLET-AOÛT-SEPTEMBRE 2016

73MARINE&OCÉANS N° 252 - JUILLET-AOÛT-SEPTEMBRE 2016

LE CAHIER ENVIRONNEMENT DE MARINE&OCÉANS

Le 16 juin dernier, le ministre de l’Agri-culture, des Forêts et de la Pêche duCambodge a officiellement annoncé

le classement de l’archipel de Koh Rongen Aire marine protégée sous le nomd’Aire marine de gestion des pêches 1.Une première au regard de la superficie– 405 kilomètres carrés – de ce nouvelespace dans lequel l’objectif est de fa-voriser une pêche durable – dont 80%des habitants dépendent pour leur sub-sistance –, tout en préservant la biodi-versité et l’éco tourisme.

La zone protégée comprend des récifscoralliens, des mangroves, des herbiers etdes plages de sable fin. Cet accord est lefruit de cinq ans de collaboration entrel’Administration des pêches du gouver-nement royal du Cambodge 2, les com-

Le gouvernement cambodgien vient d’annoncer la protection de l’archipel de Koh Rong, mobilisant les communautés locales

autour d’un ambitieux projet de développement durable.

munautés locales et les organisations internationales de protection de l’envi-ronnement comme Fauna & Flora Inter-national, une ONG anglo-saxonne sou-tenue par la Fondation Prince Albert II deMonaco et par le fond Arcadia, investiedans le projet depuis 2012.

Pour Kate West, en charge des littorauxet des projets maritimes au sein de l’as-sociation, « cet engagement du gouverne-ment cambodgien constitue une étape cruciale pour la préservation de l’envi-ronnement et des ressources marines dansl’archipel de Koh Rong ». Fauna & FloraInternational travaille principalement àdévelopper les capacités du Cambodge àmieux connaître, contrôler et gérer dura-blement son espace maritime. Elle a no-tamment contribué à la mise en place, en

2005, d’un master scientifique de conser-vation marine à l’Université royale dePhnom Penh avec pour ambition de fa-voriser l’émergence d’une génération deleaders investis dans les enjeux environ-nementaux.

Les trois pêcheries communautaires del’archipel sont directement concernéespar cette reconnaissance de Koh Rongen Aire marine protégée. Leurs respon-sables ont été formés à l’identification descoraux et des espèces.

Des zones de pêche ont été strictementétablies, suivies de près par l’administra-tion des pêches qui y patrouille pour em-pêcher les prélèvements illégaux. Les dif-férents partenaires du projet ontégalement été formés à l’utilisation deSMART (Spatial Monitoring and Repor-

ting Tool). Cet outil de surveillance spatialepermet de synthétiser sous forme de sta-tistiques, de cartes et de rapports, toutesles informations remontées du « terrain »par les différents responsables de sites.

Le Cambodge est le premier pays dela région à appliquer cette technologieSmart au milieu maritime, celle-ci ayantété, jusque-là, plutôt utilisée dans les ré-serves naturelles à terre. Elle va assuré-ment contribuer à aider l’administrationdes pêches à prendre des déci-sions de gestion plus efficaces.

Koh Rong, chapelet d’îles pa-radisiaques, est situé au large deSihanoukville dans le golfe deThaïlande. Sa protection par legouvernement cambodgien s’ins-crit dans le cadre, voire en ac-compagnement de son fort dé-veloppement touristique. Prochede la Thaïlande et du Vietnam,l’archipel est en effet l’une desdestinations privilégiées de l’Asiedu Sud-Est. C’est ici qu’en 2012la télévision française a tournél’émission Koh-Lanta…

Ce développement touristiqueconstitue à la fois une opportu-nité et une menace pour les tra-ditions et l’environnement naturel descommunautés locales. Consciente de cetenjeu, l’association Fauna & Flora inter-national a engagé des discussions avec denombreux acteurs privés pour le finan-cement, à long terme, de la préservationde cet espace naturel unique. Paradoxa-lement, les perspectives offertes par letourisme aux populations locales ont ré-veillé chez elles la conscience du « trésornaturel » qu’elle détienne et de la néces-sité qu’elles ont aujourd’hui de le gérerde manière durable. ■

Par JEAN-STÉPHANE BETTON

1. En anglais : Marine Fisheries Management Area.(MFMA) !2. En anglais : Royal Government of Cambodia’sFisheries Administration

En savoir + :www.fauna-flora.org

www.fpa2.comwww.arcadiafund.org.uk

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La « perle » de Koh Rong

Pêcheurs de Koh Rong au Cambodge.

L’archipel a été classé en Aire marine protégée,

dans un objectif de développement durable,

en juin 2016.

Nota : cet article a été réalisé sur la base d’un texte ori-ginal de Kate West de l’association Fauna & Flora in-ternational traduit par Noémie Hertzog. Les imagesont été généreusement offertes par le photographePaul Colley OBE. Marine & Océans les remercietous infiniment pour leur collaboration.

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Ci-dessous, Mangrove dans l’archipel de Koh Rong

La très richebiodiversité de l’archipel de Koh Rong, au large de Sihanoukville, au Cambodge.

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LE CAHIER ENVIRONNEMENT DE MARINE&OCÉANS ❘ INFOS

En savoir + : twitter : @M2PAs

En savoir + :www.fpa2.com

www.institut-paul-ricard.org

Aires marines protégéesUn outil de financement durable pour les AMP

Xavier Sticker, ambassadeur délégué à l’environnement (au premier plan),représentant de la France à la seconde assemblée générale de l’Association pour le financement durable des aires marines protégées de Méditerranée.

Une cinquantaine d’espèces d’hippocampe ont été observées et décrites dans les eaux tempérées et tropicales du globe.

Ici un hippocampe de l’archipel de Koh Rong au Cambodge. Cette image est extraite d’une série réalisée gracieusement par

le photographe Paul Colley OBE pour la sensibilisation à la préservation de cet espace naturel transformé

depuis juin 2016 en aire marine protégée (lire article page 72).

L’Association pour le financement durable des aires ma-rines protégées de Méditerranée a tenu sa seconde as-

semblée générale, le 16 juin dernier, à l’Institut océanogra-phique de Paris. Réunie sous la présidence de Xavier Sticker,

ambassadeur français délégué à l’environnement, elle a va-lidé la stratégie et la feuille de route qui vont lui permettrede financer ses premiers projets dès la fin 2016, d’intensifiersa politique de levée de fonds auprès de partenaires publicset privés, et de poursuivre la structuration du fonds fiduciairelancé à Ajaccio, en octobre 2013 – lors du 3e congrès inter-national des aires marines protégées (AMP) –, par la Prin-cipauté de Monaco, la France et la Tunisie.

Soutenue à hauteur de 500 000 euros par la Principautéde Monaco, l’association qui a pour principale vocationla mise en place d’un outil de financement durable poursoutenir les AMP de Méditerranée a été rejointe cetteannée par deux nouveaux pays méditerranéens, l’Alba-nie et le Maroc, et par quatre organisations régionales,CAR-ASP , MedPan , WWF-Mediterranée et InitiativePIM. Le prochain grand rendez-vous sera en marge du fo-rum des AMP de Méditerranée, du 28 novembre au 1er dé-cembre 2016, à Tanger, au Maroc.

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Espèces menacéesOpération « hippocampe »

L’hippocampe est aujourd’hui me-nacé de disparition dans toutes les

mers du globe. Bien que les deux es-pèces méditerranéennes encore exis-tantes soient protégées par la Conven-tion de Berne (1999), elles subissentde nombreuses nuisances (pollution,destruction de leur habitat naturel, pré-lèvement incessant destinés aux aqua-riums privés), qui réduisent de façon in-quiétante leur population.

Fort de ce constat, la Fondation PrinceAlbert II de Monaco a décidé de re-peupler le littoral monégasque en par-tenariat avec l’Institut océanographiquePaul Ricard. Ce dernier expérimente eneffet depuis de nombreuses années, dansson centre des Embiez dans le Var, lareproduction en écloserie des deux es-

pèces d’hippocampes traditionnelle-ment présentes en Méditerranée, l’Hip-pocampus Hippocampus et l’Hippo-campus guttulatus. Familièrement appelécheval de mer, l’hippocampe est un pois-son osseux appartenant à la famille desSyngnathidae vieux d’environ 40 mil-lions d’années. Une cinquantaine d’es-pèces ont été observées et décrites dansles eaux tempérées et tropicales duglobe. L’hippocampe se déplace verti-calement grâce à sa nageoire dorsale etvit accroché par la queue à une algue

ou à une feuille de posidonie. Sa taille va-rie de 20 à 35 centimètres et son espé-rance de vie atteint quatre ans dans lemeilleur des cas.

L’objectif poursuivi par la FondationPrince Albert II est de développer lapopulation existante par l’introduction,d’ici fin 2016, dans la réserve marine duLarvotto, d’environ 70 hippocampes(Hippocampus Hippocampus) élevésen laboratoire en espérant qu’ils se re-produiront au bout de trois semaines.Afin d’impliquer le grand public dansce combat pour la préservation d’uneespèce, plusieurs formules de dons de 15à 1 500 euros lui sont proposés sur lesite de la Fondation avec à la clé, desretours originaux comme des certificatsd’adoption ou l’inscription de son nomsur une dalle personnalisée, installéesur la digue de la plage du Larvotto.