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Place de la biologie dans l’exploration d’une fièvre au retour de voyage Journées de Biologie Necker Pasteur 18/01/2010 Dr Paul Henri Consigny Centre Médical Institut Pasteur

Place de la biologie dans l’exploration d’une fièvre au … · antipaludique) – Chronologie des symptômes rapportés • Fièvre (ancienneté, intensité, périodicité) •

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Place de la biologie dans l’exploration

d’une fièvre au retour de voyage

Journées de Biologie Necker Pasteur

18/01/2010

Dr Paul Henri Consigny

Centre Médical

Institut Pasteur

Aucun conflit d’intérêt.

Le tourisme des français en 2009

Près de 6 Millions

de voyageurs par an

hors Europe USA

Les problèmes de santé pendant un séjour dans un pays en

voie de développement et leur conséquences

100 000

10 000

1 000

100

10

1

Tout problème de santé maladie ou

utilisation de médicaments

Sensation de maladie

Consultation à l'étranger ou au retour

alitement

Incapacité de travail au retour

Hospitalisation à l'étranger

Evacuation par avion

Décès à l'étranger (mission humanitaire)

Décès à l'étranger (voyageurs normaux) (adapté d ’après Steffen,1987)

Fréquence mensuelle des problèmes de santé

pendant un séjour dans un pays en voie de

développement

100%

10%

1%

0,1%

0,01%

0,001%

Poliomyélite paralysante

Choléra

Légionellose (Méditerranée)

Poliomyélite asymptomatique

Typhoïde (autres régions)

Infection par le VIH

Hépatite B (expatriés)

Typhoïde (Inde, Afrique du Nord et Nord-Ouest, Pérou)

Ulcération génitale (0,1 %)

Morsure d ’animaux (0,1 %)

Hépatite A

Ecoulement génital (0,6 %)

Dermatoses (1,2 %)

Infection aiguë fébrile de l ’appareil respiratoire

Paludisme (pas de chimioprophylaxie - Afrique de l ’Ouest)

Soleil (10 %)

Piqûre d ’insecte (13 %)

Diarrhée du voyageur (50%)

(adapté d ’après Steffen 1987;Peltola 1983)

Problèmes de santé au retour de voyage, vus

en consultation de maladies infectieuses et tropicales

* Chiffres pour 1000 personnes

(adapté d’après Freedman NEJM 2006)

Au retour de voyage…

* Chiffres pour 1000 personnes

Problèmes de fièvre au retour de voyage, vus

en CS de maladies infectieuses et tropicales

(adapté d’après Freedman NEJM 2006)

Au retour de voyage…

Démarche générale en cas de fièvre au

retour de voyage

• Eliminer l’urgence vitale : choc septique

• Eliminer le paludisme +++

• Recueillir les éléments d’orientation étiologique

(anamnèse, examen clinique soigneux)

• Prescrire des examens complémentaires

• Décider du lieu de prise en charge

• Mettre en route (ou pas) un traitement anti-

infectieux : quand? Comment?

La démarche clinique (1)

• Interrogatoire FONDAMENTAL ++

• Eléments concernant le séjour :

– Lieu et période de séjour • Epidémiologie des maladies infectieuses / tropicales

• Notion de contexte épidémique local pour une maladie donnée

– Durée de séjour, datée, délai de survenue des symptômes / exposition, retour

• Délai d’incubation

– Caractéristiques du séjour

• Conditions du séjour, d’hygiène alimentaire

• Exposition à un risque particulier

Epidémiologie des maladies tropicales

La démarche clinique (2)

• Interrogatoire FONDAMENTAL ++

• Eléments concernant le séjour :

– Lieu et période de séjour • Epidémiologie des maladies infectieuses / tropicales

• Notion de contexte épidémique local pour une maladie donnée

– Durée de séjour, datée, délai de survenue des symptômes / exposition, retour

• Délai d’incubation

– Caractéristiques du séjour

• Conditions du séjour, d’hygiène alimentaire

• Exposition à un risque particulier

Délai d’incubation

Incubation potentiellement illimitée (avec le palu à P malariae)

La démarche clinique (3)

• Interrogatoire FONDAMENTAL ++

• Eléments concernant le séjour :

– Lieu et période de séjour • Epidémiologie des maladies infectieuses / tropicales

• Notion de contexte épidémique local pour une maladie donnée

– Durée de séjour, datée, délai de survenue des symptômes / exposition, retour

• Délai d’incubation

– Caractéristiques du séjour

• Conditions du séjour, d’hygiène alimentaire

• Exposition à un risque particulier

Exposition à des risques particuliers

La démarche clinique (4)

• Eléments concernant le voyageur : – Terrain particulier? (pathologie sous-jacente, grossesse)

– Modalités de prévention suivies? (Vaccins, chimioprophylaxie antipaludique)

– Chronologie des symptômes rapportés • Fièvre (ancienneté, intensité, périodicité)

• Symptômes associés (digestifs, urinaires, cutanés,…)

– Présence de cas groupés? (TIAC, rickettsioses,…)

• Examen clinique soigneux – Point d’appel infectieux?

– Hépatomégalie, splénomégalie, ictère, adénopathies?

– Eruption? Signes hémorragiques?

– Signes neurologiques?

– …

> 50% fièvres au retour sont

d’origine cosmopolite (PNA,…)

Rickettiose

Dengue

Démarche générale en cas de fièvre au

retour de voyage

• Eliminer l’urgence vitale : choc septique

• Eliminer le paludisme +++

• Recueillir les éléments d’orientation étiologique

(anamnèse, examen clinique soigneux)

• Prescrire des examens complémentaires

• Décider du lieu de prise en charge

• Mettre en route (ou pas) un traitement anti-

infectieux : quand? Comment?

Le « bilan biologique d’orientation »

minimal d’urgence comprend :

(résultat en 1 à 2h*)

NFS*

transaminases* (+/ créatinine)

CRP* (ou autre marqueur inflammatoire)

recherche d’hématozoaires* (FGE-TDR)

hémoculture

cytologie urinaire* (BU)

avec transmission médico-biologique des éléments

cliniques pertinents

Mais selon l’examen clinique, ce « bilan

biologique » pourra être d’emblée plus large,

vers des examens de confirmation :

- coproculture, voire examen parasitologique des selles,

- ECBU,

- sérologies virales, bactériennes, parasitaires,

- antigènes viraux, PCR,

- ponction lombaire, - radiographie thoracique,

- échographie abdominale,

- ponction de moëlle,…(en milieu hospitalier)

- …

Eléments d’orientation biologiques

• Eléments d’orientation indirecte : vont permettre d’affiner l’analyse clinique, sans tirer de certitude diagnostique – Vont pouvoir orienter vers des examens d’orientation

directe

– Sont tirés de l’analyse de la biologie simple d’urgence • NFS, transaminases, CRP

• Eléments d’orientation directe : – Mise en évidence de l’agent infectieux à l’examen

direct ou d’un de ses fragments (Ag, ADN/ARN)

– Mise en évidence par mise en culture

– Sérologies bactériennes, virales, parasitaires, voire fongiques.

Eléments d’orientation biologiques

• Eléments d’orientation indirecte : vont permettre d’affiner l’analyse clinique, sans tirer de certitude diagnostique – Vont pouvoir orienter vers des examens d’orientation

directe

– Sont tirés de l’analyse de la biologie simple d’urgence • NFS, transaminases, CRP

• Eléments d’orientation directe : – Mise en évidence de l’agent infectieux à l’examen

direct ou d’un de ses fragments (Ag, ADN/ARN)

– Mise en évidence par mise en culture

– Sérologies bactériennes, virales, parasitaires, voire fongiques.

Orientation selon les anomalies de la NFS

Leuconeutropénie

L < 4 000/mm3, PN < 1 500/mm3

Hyperleucocytose (à PNN)

L > 10 000/mm3, PN > 7 500/mm3

Hyperéosinophilie

PNE > 500/mm3

Thrombopénie

P < 150 000/mm3

Causes virales : arboviroses

(dengue), VIH, FHV,… Causes bactériennes : typhoïde,

rickettsiose, fièvre Q, brucellose Causes parasitaires : paludisme,

leishmaniose viscérale

Causes bactériennes : leptospirose,

borréliose récurrente, shigellose, salmonellose, foyer infectieux à pyogène

Causes parasitaires : amibiase tissulaire, trypanosomose africaine (THA)

(Causes virales : CMV)

Causes parasitaires : bilharziose en

phase d’invasion, trichinose, distomatose, lymphangite filarienne,

toxocarose ou autre larva migrans viscérale

Causes virales : arboviroses (dengue),

FHV, VIH,… Causes bactériennes : leptospirose, fièvre

Q, rickettsiose, fièvre Q Causes parasitaires : paludisme, THA,

leishmaniose viscérale

Anomalies de la NFS : synthèse

Leuconeutropénie :

-Virus -Bactéries intracellulaires

-Paludisme, leishmaniose

Hyperleucocytose :

-Bactéries extracellulaires -Amibes, trypanosome

-(CMV)

Anomalies cytologiques sur le frottis

sanguin

• Syndrome mononucléosique

causes virales:

hépatite virale, mononucléose

infectieuse, infection à CMV, primo-

infection VIH

causes parasitaires:

toxoplasmose, trypanosomose

Orientation selon les anomalies des

transaminases

Transaminases > 5N

• Hépatite virale aiguë

• Leptospirose ictéro-hémorragique

• Fièvre hémorragique virale (y compris dengue sévère)

• Fièvre Q

• Médicaments

Transaminases < 5N

• Paludisme

• Arboviroses

• Typhoïde

• Rickettsiose

• Borréliose

• CMV, MNI, HIV,

• …

Orientation selon les anomalies

inflammatoires

• Choix du paramètre inflammatoire : – VS : intérêt à la rigueur dans les infections subaigües

(amibiase tissulaire, leishmaniose viscérale, trypanosomose)

– CRP :

• Protéine de l’inflammation, non spécifique

• N < 10 mg/l

• précoce: s’élève dès la 6ème heure

• pic 24 à 48 h après le début

• se normalise rapidement: 7 à 14 jours

• sensible: variations pathologiques: 10 à 300 mg/l

– PCT : meilleur paramètre discriminant vis-à-vis des infections

virales, grande sensibilité dans les infections bactériennes

Infections virales : CRP normale ou légèrement augmentée :

10 à 30 mg/l

Infections bactériennes: CRP très élevée : 50 à 300 mg/l

Infections parasitaires : CRP élevée (bilharziose,

paludisme), voire très élevée (amibiase tissulaire) : 40 à 150

mg/l

Orientation selon les anomalies de la CRP

Rester prudent malgré tout…

• Attention à ne pas surestimer la valeur des paramètres biologiques : – 10% des typhoïdes ont une

hyperleucocytose

– La thrombopénie peut être absente dans le paludisme

– L’éosinophilie peut manquer à la phase initiale d’invasion d’une bilharziose

– …

Eléments d’orientation biologiques

• Eléments d’orientation indirecte : vont permettre d’affiner l’analyse clinique, sans tirer de certitude diagnostique

• Eléments d’orientation directe : – Mise en évidence de l’agent infectieux à l’examen

direct,

– Mise en évidence d’un « fragment » d’agent infectieux (Ag, ADN/ARN)

– Mise en évidence après mise en culture

– Sérologies bactériennes, virales, parasitaires, voire fongiques.

Eléments d’orientation biologiques

• Eléments d’orientation indirecte : vont permettre d’affiner l’analyse clinique, sans tirer de certitude diagnostique

• Eléments d’orientation directe : – Mise en évidence de l’agent infectieux à l’examen

direct,

– Mise en évidence d’un « fragment » d’agent infectieux (Ag, ADN/ARN)

– Mise en évidence après mise en culture

– Sérologies bactériennes, virales, parasitaires, voire fongiques.

Frottis sanguin mince

• Examen fondamental +++

• Avantages : • Lecture facile

• Permet de préciser l’espèce, le stade évolutif, et de mesurer parasitémie en % d’hématies parasitées

• Mise en évidence : – d’hématozoaires : Plasmodium, Babesia, Trypanosoma,

– de spirochètes : Borrelia

– D’inclusions intra leucocytaires (morulae): Ehrlichia, Anaplasma

• Inconvénients : • Lecture longue: 20 à 30 mn pour négatif

• Moins sensible que la goutte épaisse

Mise en évidence directe (1)

Sensibilité dans le diagnostic du paludisme :

GE (5-10 p/mm3) > TDR (50 GRp/mm3) # Frottis (50-100 GRp/mm3)

Plasmodium falciparum

Plasmodium vivax

Plasmodium ovale

Plasmodium malariae

Autres agents infectieux (1)

Borréliose récurrente

Trypanosoma

Morula d’Ehrlichia Babesia microti

Goutte épaisse : technique de référence

• Avantages :

• Technique (désormais) rapide: 15 mn

• Lecture possible de la totalité du dépôt (2 l)

• Très bonne sensibilité

• Inconvénients :

• Nécessite un œil expérimenté

• Espèce souvent difficile à préciser (parasites libres et un peu altérés)

• Parasitémie établie en nb parasites / mm3

= Intérêt dans les paludismes peu parasitémiques (frottis ou TDR négatif)

= ne pas hésiter à renouveler Frottis et GE en cas suspicion

Mise en évidence directe (1)

S

Plasmodium falciparum

Eléments d’orientation biologiques

• Eléments d’orientation indirecte : vont permettre d’affiner l’analyse clinique, sans tirer de certitude diagnostique

• Eléments d’orientation directe : – Mise en évidence de l’agent infectieux à l’examen

direct,

– Mise en évidence d’un « fragment » d’agent infectieux (Ag, ADN/ARN)

– Mise en évidence après mise en culture

– Sérologies bactériennes, virales, parasitaires, voire fongiques.

Tests de Diagnostic Rapide du paludisme

• Principe: Détection d’antigènes palustres solubles par immunochromatographie

• PfHRP2, PfLDH : Plasmodium falciparum

• PvLDH : Plasmodium vivax

• pLDH, pAldolase : communes aux 4 espèces

• Avantages: – Facile et rapide: 15 minutes

– Bonne sensibilité pour P. falciparum

• Inconvénients: – Persiste de 3 jours à 3 semaines après la disparition du parasite

(du moins pour l’Ag HRP2)

– Sensibilité /spécificité variable selon les tests utilisés

– Moins bonne sensibilité et spécificité pour les P. non falciparum

• Sensibilité : 50-100 GR parasités/ l

Mise en évidence directe (2)

TDR Palu (S Houzé, PHRC 2006)

1288 patients testés

374 accès palustres (336Pf,17Po, 11Po, 8Pm)

• Au total : – PfHRP2 = antigène le plus sensible pour P falciparum

– Qqs positifs discordants avec microscopie : PCR+ (50%)

– Pour P non falciparum, moindre sensibilité des tests, aldolase < pLDH

– Place encore à établir dans la stratégie diagnostique d’un accès palustre ++ (la référence reste le frottis- goutte épaisse)

TDR Palu (S Houzé, PHRC 2006)

Antigène NS1

• ELISA, ICT

• Diagnostic précoce de la dengue

• Sp : 97,9-100%

• Se : 58-93% J0-J5

• Acte à la nomenclature depuis fin 2010

• Résultat rapide : 30 mn (ICT) à 2h (Elisa)

Mise en évidence directe (2)

• Autres possibles :

– Ag P24 (VIH)

– Ag HBs (VHB)

– PCR : VIH, paludisme,leptospirose,…

= pas toujours en routine

Mise en évidence directe (2)

Eléments d’orientation biologiques

• Eléments d’orientation indirecte : vont permettre d’affiner l’analyse clinique, sans tirer de certitude diagnostique

• Eléments d’orientation directe : – Mise en évidence de l’agent infectieux à l’examen

direct,

– Mise en évidence d’un « fragment » d’agent infectieux (Ag, ADN/ARN)

– Mise en évidence après mise en culture

– Sérologies bactériennes, virales, parasitaires, voire fongiques.

Hémoculture

• Prélèvement : idéalement au moment d’un pic fébrile

• Intérêt : Fièvre typhoïde, Brucellose, bactériémie communautaire,…

Coproculture

• Intérêt : Shigelle, Salmonelle, Campylobacter

ECBU

Ponction lombaire,…

=> Identification, antibiogramme ++

Mise en évidence directe (3)

Eléments d’orientation biologiques

• Eléments d’orientation indirecte : vont permettre d’affiner l’analyse clinique, sans tirer de certitude diagnostique

• Eléments d’orientation directe : – Mise en évidence de l’agent infectieux à l’examen

direct,

– Mise en évidence d’un « fragment » d’agent infectieux (Ag, ADN/ARN)

– Mise en évidence après mise en culture

– Sérologies bactériennes, virales, parasitaires, voire fongiques.

Sérologies

• Positivité souvent retardée : pas de diagnostic très précoce

• Ne pas se contenter le plus souvent d’une positivité isolée des IgM (spécificité souvent moindre)

• Nécessité le plus souvent de 2 sérums à 2 à 4 semaines d’intervalle : – Séroconversion

– Ascension des taux sérologiques

• Réactivités croisées : – Souvent gênantes

– Parfois utiles • Diagnostic des rickettsioses

boutonneuses ou typhiques à partir de R conorii et R typhi (confirmation possible au CNR par microIF)

Mise en évidence indirecte

Sérologies parasitaires

• Sérologies parasitaires dont la positivité est le plus souvent immédiatement pertinente : amibiase, trypanosomose, leishmaniose.

• Mais faible sensibilité / spécificité des sérologies parasitaires pour les helminthes.

Bilharziose : positivation souvent « tardive » en phase d’invasion.

Mise en évidence indirecte

Récapitulatif : les principaux

diagnostics « tropicaux »

• Rôle du laboratoire : – dans l’orientation biologique initiale pour le clinicien

• Nécessité d’une collaboration en temps réel

– dans la confirmation diagnostique

• Sans oublier la participation : – au système de déclaration des

maladies infectieuses

– au suivi des résistances bactériennes, en lien avec les CNR.

= rôle de « vigie » au même titre que le clinicien

Conclusion