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Actualités pharmaceutiques Supplément formation au n° 534 1 er trimestre 2014 12 La dermatite atopique formation Mots clés - dermatite atopique ; homéopathie ; phytothérapie ; probiotique ; stress Keywords - atopic dermatitis; homeopathy; phytotherapy; probiotics; stress Note 1 Les essais cliniques concernant la prise en charge de la dermatite atopique par l’homéopathie sont rares. Ils ne permettent pas de mettre en évidence de différence significative avec le placebo. © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés http://dx.doi.org/10.1016/j.actpha.2013.12.022 Place des thérapeutiques complémentaires et alternatives dans les dermatites atopiques Aussi largement utilisées par les patients que décriées par les médecins, les thérapeutiques complémentaires sont absentes des recommandations et des conférences de consensus en raison de l’extrême faiblesse de leur niveau de preuve. Pour autant, certaines représentent une alternative crédible en fonction des individus. Elles peuvent participer à la personnalisation du soin des patients, notamment ceux atteints de dermatite atopique. Complementary and alternative therapeuties in atopic dermatitis. As widely used by patients as they are criticised by doctors, complementary therapies do not feature in any recommendations or consensus conferences due to the lack of strong evidence of their efficacy. However, some of these therapies can represent a credible alternative depending on the individuals. They can form part of patients’ personalised care, notably those suffering from atopic dermatitis. L es thérapeutiques alternatives et complémentaires (Complementary alternative medicines, ou CAM) sont de plus en plus utilisées en association aux traitements médicamenteux de référence dans les pathologies dermatologiques, particulièrement en cas de dermatite atopique (DA) [1]. Des études effectuées aux États-Unis, en Australie, en Allemagne et en France indiquent qu’entre 34 et 49 % des patients atteints d’affections cutanées inflammatoires ont recours à ces thérapeutiques [2]. En effet, la chronicité de ce type d’affection ainsi que la corticophobie peuvent conduire les patients atopiques à recourir aux CAM. Ainsi, l’homéopathie, la phyto- thérapie, l’aromathérapie, les probiotiques, les acides gras essentiels (AGE) d’huiles de poissons, mais égale- ment l’acupuncture, l’hypnothérapie ou encore la psychanalyse, la relaxation et, plus largement, les techniques de gestion du stress sont testés et employés sur des bases scientifiques et cliniques hétérogènes. La gestion du stress Si le stress peut favoriser la survenue des poussées de DA, il est probable que la maladie elle-même soit une cause d’anxiété, enfermant l’atopique dans un cercle vicieux. Son traitement diminue probablement le stress des patients : une étude montre que la détresse psycho- logique des enfants décroît avec la diminution de l’intensité des signes cutanés et du prurit. Inversement, la dépression et l’anxiété, fréquentes chez les atopiques, induisent une augmentation de la sécrétion des immuno- globulines E (IgE) et des éosinophiles, ce qui tend à accroître les symptômes de DA [3]. Une prise en charge de l’anxiété est donc utile. Plutôt que de recourir à l’hydroxyzine (Atarax ® ), les thérapeutiques alternatives jouant sur les facteurs psychologiques et émotionnels (psychothérapies cognitive et comportementale notam- ment) peuvent contribuer à l’amélioration des symp- tômes de la DA. Cependant, des études randomisées, en double aveugle, complémentaires, sur cohortes importantes d’adultes et d’enfants seraient nécessaires pour le démontrer [4]. En outre, l’éducation thérapeu- tique, par l’écoute des patients et la mesure de l’altéra- tion de leur qualité de vie, permet d’intervenir sur l’équilibre psychique du patient. L’homéopathie L’homéopathie, dépourvue de risques, présente un rapport bénéfice-risque favorable. Aussi, en cas de dermatose chronique en rapport avec le terrain (circons- tances d’apparition de l’eczéma, facteurs d’améliora- tion/aggravation, aspect et localisation des lésions, etc.), diverses souches homéopathiques peuvent être propo- sées par le médecin en traitement de fond. Quelques souches peuvent également être conseillées en cas d’érythème, œdème ou démangeaisons, à raison de 5 granules 3 à 4 fois/jour (tableau 1). Cependant, l’absence de données scientifiques validées est à déplorer 1 . Si une étude récente non contrôlée © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés © 2013 Elsevier Masson SAS. All rights reserved *Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (S. Derbré). a Université d’Angers, UFR des Sciences pharmaceutiques et ingénierie de la santé, 16 bd Daviers, 49045 Angers cedex 1, France b Pharmacie du Grand Maine, Rue du Grand-Launay, 49000 Angers, France Séverine DERBRÉ a,* Maître de conférences en pharmacognosie, pharmacien François LAUNAY b Docteur en pharmacie

Place des thérapeutiques complémentaires et alternatives dans les dermatites atopiques

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Actualités pharmaceutiques

• Supplément formation au n° 534 • 1er trimestre 2014 •12

La dermatite atopique

formation

Mots clés - dermatite atopique ; homéopathie ; phytothérapie ; probiotique ; stress

Keywords - atopic dermatitis; homeopathy; phytotherapy; probiotics; stress

Note1 Les essais cliniques concernant la prise en charge de la dermatite atopique par l’homéopathie sont rares. Ils ne permettent pas de mettre en évidence de différence signifi cative avec le placebo.

© 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

http://dx.doi.org/10.1016/j.actpha.2013.12.022

Place des thérapeutiques complémentaires et alternatives dans les dermatites atopiquesAussi largement utilisées par les patients que décriées par les médecins, les thérapeutiques

complémentaires sont absentes des recommandations et des conférences de consensus

en raison de l’extrême faiblesse de leur niveau de preuve. Pour autant, certaines

représentent une alternative crédible en fonction des individus. Elles peuvent participer à

la personnalisation du soin des patients, notamment ceux atteints de dermatite atopique.

Complementary and alternative therapeuties in atopic dermatitis. As widely used by patients as they are criticised by doctors, complementary therapies do not feature in any recommendations or consensus conferences due to the lack of strong evidence of their efficacy. However, some of these therapies can represent a credible alternative depending on the individuals. They can form part of patients’ personalised care, notably those suffering from atopic dermatitis.

L es thérapeutiques alternatives et complémentaires (Complementary alternative medicines, ou CAM) sont de plus en plus utilisées en association aux

traitements médicamenteux de référence dans les pathologies dermatologiques, particulièrement en cas de dermatite atopique (DA) [1]. Des études effectuées aux États-Unis, en Australie, en Allemagne et en France indiquent qu’entre 34 et 49 % des patients atteints d’affections cutanées inflammatoires ont recours à ces thérapeutiques [2].En effet, la chronicité de ce type d’affection ainsi que la corticophobie peuvent conduire les patients atopiques à recourir aux CAM. Ainsi, l’homéopathie, la phyto-thérapie, l’aromathérapie, les probiotiques, les acides gras essentiels (AGE) d’huiles de poissons, mais égale-ment l’acupuncture, l’hypnothérapie ou encore la psycha nalyse, la relaxation et, plus largement, les techni ques de gestion du stress sont testés et employés sur des bases scientifiques et cliniques hétérogènes.

La gestion du stressSi le stress peut favoriser la survenue des poussées de DA, il est probable que la maladie elle-même soit une cause d’anxiété, enfermant l’atopique dans un cercle vicieux. Son traitement diminue probablement le stress des patients : une étude montre que la détresse psycho-logique des enfants décroît avec la diminution de l’intensité des signes cutanés et du prurit. Inversement, la dépression et l’anxiété, fréquentes chez les atopiques,

induisent une augmentation de la sécrétion des immuno-globulines E (IgE) et des éosinophiles, ce qui tend à accroître les symptômes de DA [3]. Une prise en charge de l’anxiété est donc utile. Plutôt que de recourir à l’hydro xyzine (Atarax®), les thérapeutiques alternatives jouant sur les facteurs psychologiques et émotionnels (psychothérapies cognitive et comportementale notam-ment) peuvent contribuer à l’amélioration des symp-tômes de la DA. Cependant, des études randomisées, en double aveugle, complémentaires, sur cohortes importantes d’adultes et d’enfants seraient nécessaires pour le démontrer [4]. En outre, l’éducation thérapeu-tique, par l’écoute des patients et la mesure de l’altéra-tion de leur qualité de vie, permet d’intervenir sur l’équilibre psychique du patient.

L’homéopathieL’homéopathie, dépourvue de risques, présente un rapport bénéfice-risque favorable. Aussi, en cas de dermatose chronique en rapport avec le terrain (circons-tances d’apparition de l’eczéma, facteurs d’améliora-tion/aggravation, aspect et localisation des lésions, etc.), diverses souches homéopathiques peuvent être propo-sées par le médecin en traitement de fond. Quelques souches peuvent également être conseillées en cas d’érythème, œdème ou démangeaisons, à raison de 5 granules 3 à 4 fois/jour (tableau 1).Cependant, l’absence de données scientifiques validées est à déplorer1. Si une étude récente non contrôlée

© 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

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*Auteur correspondant. Adresse e-mail :

[email protected] (S. Derbré).

aUniversité d’Angers, UFR des Sciences

pharmaceutiques et ingénierie de la santé,

16 bd Daviers, 49045 Angers cedex 1, France

bPharmacie du Grand Maine, Rue du Grand-Launay, 49000 Angers, France

Séverine DERBRÉa,*

Maître de conférencesen pharmacognosie,

pharmacien

François LAUNAYb

Docteur en pharmacie

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• Supplément formation au n° 534 • 1er trimestre 2014 • 13

La dermatite atopique

formation

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incluant 17 patients atteints de DA chronique a révélé une amélioration marquée après l’introduction d’un traitement homéopathique (souches variées selon le terrain) [5], seule une étude randomisée et contrôlée, effectuée en Allemagne sur 60 patients, a été publiée : aucune diffé-rence significative dans la survenue de DA entre les groupes d’intervention et placebo n’y a été constatée [6].

Les probiotiques F Les probiotiques sont des organismes vivants,

capables de coloniser le tube digestif. Leurs effets béné-fiques sur la santé sont souvent revendiqués. Leur utilisa-tion, pour prévenir et traiter la DA, est basée sur [7,8] :• la théorie hygiéniste, puisque la prévalence de la DA

est plus élevée dans les pays occidentaux que dans ceux en développement, dans les villes que dans les campagnes. Les facteurs environnementaux associés au mode de vie occidental (risques infectieux moindres notamment) pourraient ainsi diminuer l’exposition globale aux stimulations microbiennes pendant la petite enfance. En conséquence, l’immu-nité Th-1 ou à médiation cellulaire est moins stimulée pendant cette période ;

• le fait que les jeunes enfants atteints de DA pré-sentent, comparativement aux nourrissons non ato-piques, un tractus digestif moins colonisé par les entérocoques et les bifidobactéries pendant les pre-miers mois de vie. F Les effets des probiotiques sur la prévention et le trai-

tement de la DA de l’enfant ont été étudiés clini quement. Ils semblent avoir un rôle préventif : une supplémentation maternelle avant (2 mois) et après l’accou chement (au moins 2 mois) associée à un allaitement exclusif (même sur une

période courte, 2 à 3 mois) induit une diminution de sa symp-tomatologie chez l’enfant. Diverses souches de Lactobacil-lus rhamnosus réduisent significativement le risque de DA (environ 5 semaines avant et 6 mois après l’accouchement) [9-13]. Quelques compléments alimentaires renfermant cette souche à des doses similaires à celles proposées lors des études précitées sont regroupés dans le tableau 2.En revanche, aucune étude récente n’a pu démontrer un réel intérêt des probiotiques dans le traitement de la DA une fois celle-ci diagnostiquée, qu’il s’agisse de la qualité de vie ou de l’amélioration du Scoring Atopic Dermatitis (SCORAD) [9].

La phytothérapieComme pour la prévention et le traitement d’autres affec-tions dermatologiques, la phytothérapie est traditionnel-lement employée par voie orale (phytomédicaments et compléments alimentaires) et par voie cutanée (topiques contenant des extraits végétaux) en cas de DA.

F L’Agence européenne du médicament (EMA)

reconnaît l’usage traditionnel de sept plantes en cas d’inflammation mineure de la peau ou de sécheresse cutanée :• le grain de l’avoine ;• le capitule floral de calendula (souci des jardins) ;• la graine de fénugrec ;• l’écorce et les feuilles d’hamamélis ;• l’huile de graine d’onagre ;• les sommités fleuries de millepertuis ;• la feuille de sauge.

F Par ailleurs, des études pharmacologiques et

cliniques ont été menées. Ainsi, parmi les drogues végétales d’intérêt figurent notamment celles contenant

Tableau 1. Souches homéopathiques employées pour limiter certains symptômes de la dermatite atopique.

Dilutions homéopathiques Modalités

Apis mellifi ca 9 CH UrticaireŒdème brûlant, piquant, rouge-roséAmélioration par l’application d’eau froide

Urtica urens 5 CH UrticaireŒdème brûlant, piquantAggravation par le grattageAggravation par l’application d’eau froide

Croton tiglium 15 CH Eczéma avec démangeaisons intenses

Staphysagria 15 CH Eczéma suite à une contrariété, un stress

Graphites 15 CH Eczéma aux plis de fl exionVésicules laissant s’échapper un liquide visqueux jaune d’or (miel)Aggravation par la chaleur et le lavageAmélioration par le frais

Mezereum 15 CH Eczéma avec présence de croûtes

Arsenicum album 9 CH EczémaSquames sèches, fi nes

Liste non exhaustive.

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formation

[12] Wickens K, Black PN, Stanley TV et al. A differential effect of 2 probiotics in the prevention of eczema and atopy: A double-blind, randomized, placebo-controlled trial. J Allergy Clin Immunol. 2008;122:788-94.

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[15] Wright S, Sanders TAB. Adipose-tissue essential fatty-acid composition in patients with atopic eczema. Eur J Clin Nutr. 1991;45:501-5.

[16] Agence européenne du médicament (EMA). Herbal medicines for human use. www.ema.europa.eu/docs/en_GB/document_library/Herbal_-_Community_herbal_monograph/2012/04/WC500124923.pdf

des acides gras essentiels (AGE) oméga 6 (graines et huiles végétales d’onagre, de bourrache et de pépins de cassis) et un extrait riche de plantule d’avoine.

Huiles d’onagre, de bourrache et de pépins de cassisLes AGE, non synthétisés par l’organisme, sont néces-sairement apportés par l’alimentation. Sont distingués les acides gras (AG) oméga 6, dont les acides linoléique et γ-linolénique (GLA) qui nous intéressent ici, et les AG oméga 3. L’organisme convertit l’acide linoléique en GLA grâce à une Δ6-désaturase. Le GLA permet ensuite la synthèse de l’acide arachidonique, précurseur des éicosanoïdes (prostaglandines, leukotriènes, thrombo-xanes), impliqués notamment dans le contrôle de l’inflam mation (figure 1). Une diminution de l’activité de la Δ6-désaturase conduisant à un taux de conversion

plus faible de l’acide linoléique en GLA a été observée chez les patients atopiques en comparaison avec des sujets sains [14,15]. Si l’acide linoléique est souvent présent dans les huiles végétales, le GLA est beaucoup plus rare. Les huiles d’onagre, de bourrache et de pépins de cassis sont riches en GLA et ont été proposées pour limiter les symptômes de la DA.

F Par voie orale, l’EMA recommande 2 g d’huile d’onagre par prise (≈ 10 %, soit 200 mg de GLA), 2 à 3 fois/jour afin de soulager les démangeaisons des peaux sèches (usage traditionnel) [16]. Par précaution, elle conseille de ne pas excéder 8 semaines d’utilisation et d’éviter l’usage avant l’âge de 12 ans. En effet, les études cliniques ne sont pas suffisantes pour asseoir un usage bien établi [17]. Quelques méta-analyses assez récentes tendent néanmoins à montrer que l’huile d’onagre est efficace à forte dose pour soulager le pru-rit et améliorer l’état cutané des atopiques (1 à 8 g/jour d’huile d’onagre, 3 à 16 semaines de traitement) [18,19]. Des études complémentaires sont en cours [6].Ne présentant pas de monographies à l’EMA sur la base de leur usage traditionnel, les huiles de bourrache (18-25 % de GLA) et de pépins de cassis (10-25 % de GLA) ne peuvent entrer dans des phytomédicaments. Par ailleurs, les études cliniques sur ces huiles végétales sont moins nombreuses et ne permettent pas de conclure aux effets constatés avec l’huile d’onagre.Finalement, comme les huiles de bourrache et de cassis, l’huile d’onagre est commercialisée en France exclusi-vement sous la forme de compléments alimentaires, à effets physiologiques et non thérapeutiques (posologies journalières conseillées par les fabricants faibles) (tableau 3). En effet, les posologies journalières sont faibles au regard de celles susceptibles d’avoir un effet sur les symptômes de la DA.

F En usage externe, ces huiles végétales riches en GLA entrent également dans la composition de crèmes émollientes utilisées dans la prévention de la sécheresse des peaux atopiques. La filaxérine, composée d’acide 10-hydroxydécanoïque inducteur de filaggrine, et d’huile d’onagre, intègre la plupart des produits de la gamme

Tableau 2. Compléments alimentaires à base de probiotiques ou symbiotiques (probiotiques + prébiotiques) pouvant être proposés en prévention de la dermatite atopique.

Complément alimentaire Composition Posologie

Ergyphilus® enfants sachets Lactobacillus rhamnosus GG +++, L. fermentum, Bifi dobacterium infantis, fructo-oligosaccharides

1 sachet/jour

Ergyphilus® plus gélules L. rhamnosus GG +++, L. paracasei, L. acidophilus, B. bifi dum, fructo-oligosaccharides

2 à 4 gélules/jour

Florinov® immuno gélules L. rhamnosus, L. acidophilus, B. lactis, B. bifi dum, vitamine D, vitamine C

1 à 4 gélules/jour

Liste non exhaustive.

Acide linoléique (C18:2)

Acide γ -linoléique (C18:3)

Acide arachidonique

Cycloxygénases (COX)Lipoxygénase (LOX)

Eicosanoïdes

Δ6-désaturaseActivité enzymatiquediminuée chez les atopiques

Figure 1. Schéma simplifi é de la synthèse des éicosanoïdes dans l’organisme à partir de l’acide linoléique via l’acide γ-linolénique.

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Références

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La dermatite atopique

formation

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[25] Hwang I, Cha A, Lee H et al. Park, n-3 Polyunsaturated fatty acids and atopy in Korean preschoolers. Lipids. 2007;42:345-9.

[26] Bath-Hextall FJ, Jenkinson C, Humphreys R, Williams HC. Dietary supplements for established atopic eczema. Cochrane Database Syst Rev. 2012;2:CD005205.

Déclaration d’intérêts 

Les auteurs déclarent ne pas

avoir de confl its d’intérêts

en relation avec cet article.

Exomega® et l’huile de bourrache entre dans la composition des cosmétiques de la gamme Topialyse® pour la DA. Peu d’études cliniques ont analysé leur efficacité. Si une étude pilote avait conclu à leur effet bénéfique, les résultats restent controversés et les doses actives mal définies [6]. Toutefois, bien tolérées, elles sont présentes dans un certain nombre d’émollients, dont l’utilisation est recommandée pour espacer les appli-cations de dermocorticoïdes.

Extraits de plantules d’avoine Rhealba® en usage externeL’EMA reconnaît l’usage traditionnel du grain de l’avoine (farine) pour calmer les inflammations mineures de la peau en usage externe [16]. La farine d’avoine est alors diluée dans l’eau du bain ou incorporée à un véhicule type crème émolliente ou paraffine. Cependant, un effet indésirable possible est une allergie cutanée chez les patients atteints de DA. En effet, il est probable que l’utilisation répétée de préparations à base d’avoine sur une barrière cutanée altérée puisse entraîner une hypersensibilisation (observation réalisée chez des enfants atopiques utilisant des cosmétiques à base d’avoine) [20].Les produits de la gamme Exomega® sont très souvent conseillés comme émollients chez les atopiques. Ils ren-ferment notamment un extrait de plantules d’avoine Rhealba® et la filaxérine, précédemment citée. Afin de limiter les risques d’hypersensibilisation, de cette gamme utilisée en cas de DA, l’extrait est élaboré à

partir des plantules et non des graines. Son procédé d’obtention permet également l’absence de protéines allergisantes [21]. Les allergies croisées avec les pro-téines des graines d’avoine et d’autres céréales sont ainsi évitées. Les études tendent à montrer que cet extrait riche en saponosides et flavonoïdes est bien toléré, y compris en cas de DA [22]. Quelques études démontrent, enfin, que ce traitement adjuvant des der-matites atopiques de l’enfant diminue la sécheresse cutanée et les démangeaisons, et améliore la qualité de vie des patients [23,24].

Les huiles riches en acides gras polyinsaturés oméga 3Les huiles de poissons (poissons gras des mers froides) et l’huile de graine de caméline (Camelina sativa, Brassicaceae) sont riches en acides gras polyinsaturés oméga 3 (PUFA), tels les acides éicosapentaénoïque (EPA) et docosahexaénoïque (DHA). Elles sont retrouvées dans certains compléments alimentaires (Omegabiane® capelan bourrache, tableau 3) ou produits cosmétiques émollients (gamme Topialyse®). En effet, une diminution des PUFA dans les membranes cellulaires pourrait jouer un rôle dans l’atopie [25]. Cependant, leur efficacité cli-nique n’a pu être démontrée [26]. w

Tableau 3. Compléments alimentaires à base d’huile végétale riche en acides gras essentiels oméga 6 pouvant être utilisés en cas de dermatite atopique.

Complément alimentaireà base de plantes

CompositionPosologie proposéepar le fabricant

Huile d’onagre

Arkogélules® Huile d’onagre Huile d’onagre : 500 mg/capsuleVitamine E1

3 capsules/jour

Elusanes® OnagreOmegabiane® Onagre

Huile d’onagre : 500 mg/capsule

Huile de bourrache

Elusanes® Bourrache Huile de bourrache : 500 mg/capsule 2 capsules/jour

Omegabiane® capelan bourrache

Huile de poissons (capelan 51 % minimum, hareng, sébaste) : 311 mg/capsuleHuile de bourrache : 188 mg/capsuleExtrait de romarin et vitamine E1

2 capsules/jour

SVR Topialyse® capsules Acide γ-linolénique : 100 mg/capsuleVitamine E1

Enfant : 2 capsules/jourAdulte : 2 à 4 capsules/jour

Perles de peau hydratant® Huile de bourrache : 250 mg/capsuleHuile d’onagre : 250 mg/capsuleVitamine E1

2 capsules/jour

Liste non exhaustive. 1Antioxydant protégeant les acides gras essentiels de la dégradation.

Références