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Michael Marti Eliane Kraft Felix Walter Prestations, utilité et financement de communautés religieuses en Suisse Synthèse du projet FAKIR (analyse financière des Eglises) réalisé dans le cadre du PNR 58 «Collectivités religieuses, Etat et société» Rüegger Verlag

Prestations, utilité et financement de communautés ... · Prof. Nils Soguel, docteur ès sc. pol., conseiller scientifique de l’équipe de recherche, IDHEAP Lausanne Hansruedi

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Michael MartiEliane KraftFelix Walter

Prestations, utilité et financement decommunautés religieuses en Suisse

Synthèse du projet FAKIR (analyse financière des Eglises) réalisé dans le cadre du PNR 58 «Collectivités religieuses,Etat et société»

Rüegger Verlag

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Extrait: Résumé et conclusions
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Equipe de rechercheMichael Marti, docteur ès sc. pol., Eliane Kraft et Felix WalterEcoplan, Forschung und Beratung in Wirtschaft und Politik

Groupe d’accompagnementKhaldoun Dia-Eddine, Fédération d’organisations islamiques de Suisse FOISWilf Gasser, docteur méd., Verband evangelischer Freikirchen und Gemeinden in der Schweiz VFGFrank Jehle, docteur théol., ancien président du synode de l’Eglise évang. réf. du canton de Saint-GallDaniel Kosch, docteur théol., Conférence centrale catholique romaine de SuisseProf. émérite Alfred Meier, docteur ès sc. éco., conseiller scientifique de l’équipe de rechercheDaniel A. Rothschild, Fédération suisse des communautés israélites FSCITheo Schaad, Fédération des Eglises protestantes de Suisse FEPSMarc Schinzel, docteur en droit, Office fédéral de la justice, observateur de la Confédération au seindu PNR 58Prof. Nils Soguel, docteur ès sc. pol., conseiller scientifique de l’équipe de recherche, IDHEAP LausanneHansruedi Spichiger, Direction de la justice, des affaires communales et des affaires ecclésiastiques ducanton de Berne

Seul l’équipe de recherche assume la responsabilité des résultats de la recherche et de leur interprétation.Ses opinions peuvent diverger de celles du Fonds national suisse ou du groupe d’accompagnement.

Cet ouvrage est publié avec le soutien du Fonds national suisse de la recherche scientifique, de la Con-férence centrale catholique romaine de Suisse et des organisations ecclésiastiques cantonales catholiquesromaines des cantons d’Argovie, de Fribourg, de Lucerne, de Saint-Gall, de Thurgovie, de Vaud, deZoug et de Zurich, de la Fédération des Eglises protestantes de Suisse, de la Fédération suisse des com-munautés israélites et du Verband evangelischer Freikirchen und Gemeinden in der Schweiz.

TraductionGeneviève Grenon

Deutsche Originalversion: «Dienstleistungen, Nutzen und Finanzierung von Religionsgemeinschaftenin der Schweiz»

Mode de citation recommandéAuteurs: Michael Marti, Eliane Kraft et Felix Walter (Ecoplan)Titre: Prestations, utilité et financement de communautés religieuses en SuisseSous-titre: Synthèse du projet FAKIR (analyse financière des Eglises) réalisé dans le cadre du

PNR 58 «Collectivités religieuses, Etat et société» Lieu: BerneAnnée: 2010

Information bibliographique de la Deutsche NationalbibliothekLa Deutsche Nationalbibliothek a répertorié cette publication dans la Deutsche Nationalbibliografie;les données bibliographiques détaillées peuvent être consultées sur Internet à l'adresse http://dnb.d-nb.de.© Rüegger Verlag • Glaris/Coire [email protected]: 978-3-7253-0967-2Maquette (mise en page et composition): Rüegger Verlag Glaris, Barbara GronemeierJaquette: Senger und Partner, Ines SengerImpression: Südostschweiz Presse et Print AG, Glaris

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Table des matières

Avant-propos du président du Comité de direction . . . . . . . . . . . . . 9

Avant-propos et remerciements des auteurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

1 Introduction: Thème traité et démarche suivie . . . . . . . . . . . 13

Introduction: Pourquoi enquêter sur le coût et l’utilité des communautés religieuses? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

Objet de la recherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14

Fondements théoriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

Etat de la recherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

Plan de la recherche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16

Enquêtes effectuées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

Limites du projet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

Informations complémentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

2 Partie I: Coût et financement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21

2.1 Fondements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21

Comment les rapports entre l’Eglise et l’Etat sont-ils organisés en Suisse? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21

Quelles formes de financement sont susceptibles d’être distinguées? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

Quelles structures organisationnelles et flux financiers caractérisent les communautés religieuses examinées? . . . . . 24

2.2 Coût et financement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29

Que coûtent l’Eglise évang. réf. et l’Eglise cath. rom. de Suisse à leurs membres respectifs? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29

Que coûtent l’Eglise évang. réf. et l’Eglise cath. rom. de Suisse à la collectivité (personnes morales et pouvoirs publics)? 32

A combien se montent les recettes respectives de l’Egliseévang. réf. et de l’Eglise cath. rom. provenant des impôts ecclésiastiques et fonds publics? . . . . . . . . . . . . . . . 34

Comment les communautés religieuses locales se financent-elles? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36

De quelles ressources financières dispose une communauté religieuse locale? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38

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6 Page de matières

Quel est le volume de travail non rémunéré fourni sur une base volontaire ou à titre honorifique au sein des communes ecclésiastiques et descommunautés évangéliques libres locales? . . . . . . . . . . . . . . 40

3 Partie II: Prestations et utilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43

3.1 L’offre de prestations des communautés religieuses . . . . . . . 43Quelles sont les prestations offertes par les communautés religieuses à l’échelon local? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44

Quelles prestations les communautés islamiques et israélites offrent-elles? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45

A quelles offres de prestations les collaborateurs consacrent-ils leur temps de travail? . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48

A quelles offres de prestations le travail bénévole est-il affecté? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51

3.2 Evaluation de l’utilité des offres de prestations respectives de l’Eglise évang. réf. et de l’Eglise cath. rom. . . . . . . . . . . . 53

Comment l’importance des diverses offres religieuses est-elle évaluée? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53

Quelle est l’étendue de la propension à payer pour l’offre de prestations des Eglises? . . . . . . . . . . . . . . . . 55

Quels facteurs influencent la propension à payer? . . . . . . . . 57

4 Partie III: Comparaison utilité-coût . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59

Quelles prestations à caractère social en valeur contrebalancent le coût pour la collectivité? . . . . . . . . . . . . . . . 59

Quelle est la relation entre l’utilité et le coût des offres de prestations respectives de l’Eglise évang. réf. et del’Eglise cath. rom. dans le canton de Berne? . . . . . . . . . . . . . . . 63

5 Résumé et conclusions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67

6 Annexe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77

7 Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79

7.1 Ouvrages cités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79

7.2 Autres sources bibliographiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80

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5 Résumé et conclusions

Le projet FAKIR – il faut le répéter avec insistance – n’a pas évalué l’utilitéde la religion ou de la foi ni jugé l’importance que revêtent les communau-tés religieuses en tant qu’institutions de la société (transmettant notammentdes valeurs). En revanche, FAKIR a fourni des éléments permettant une ana-lyse économique du financement de communautés religieuses données enSuisse, de leur offre de prestations et de l’utilité qui leur est attachée. Danscette démarche, il a été fait appel à des concepts des sciences financières etde l’économie de bien-être. Quant aux apports de ce travail méritant d’êtresoulignés, ils sont les suivants:

• Le projet FAKIR a rassemblé pour la première fois à l’échelon de l’ensem-ble de la Suisse des données sur les recettes provenant des impôts ecclé-siastiques des deux grandes Eglises nationales.

• L’étude menée sur la propension à payer est à notre connaissance la pre-mière tentative jamais lancée d’appliquer la méthode de l’évaluation con-tingente (Contingent Valuation Method) pour estimer l’utilité des presta-tions proposées par des Eglises.

L’enquête a porté sur l’Eglise évang. réf., l’Eglise cath. rom., les Eglises évan-géliques libres membres de la VFG ainsi que sur des communautés islami-ques et israélites choisies à titre d’exemples. En matière de financement, cer-taines données touchant les deux grandes Eglises nationales ont pu êtreétablies pour l’ensemble de la Suisse tandis que les autres résultats présentésreposent sur l’enquête menée auprès des communes ecclésiastiques dans lescantons de Berne, Saint-Gall et Neuchâtel, et des communautés islamiqueset israélites retenues comme exemples, ainsi que sur un sondage dans le can-ton de Berne.

Les principaux résultats sont résumés et évalués ci-après.

a) Financement

Le financement public des Eglises en Suisse est important dans sa globalité,mais varie considérablement d’un canton à l’autre: le financement de l’Egli-se évang. réf. et de l’Eglise cath. rom. assuré directement par la caisse publiquedes cantons et des communes ainsi qu’au travers de redevances prescrites parl’Etat s’élève en tout à 556 mio de CHF. Un peu moins de la moitié de cettesomme, soit 264 mio de CHF, provient des impôts ecclésiastiques des person-nes morales. Quant au total mentionné, il correspond à quelque 1,0% des dé-

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penses globales des cantons. Comparativement, ces derniers consacrent 2,6%de leurs dépenses à la culture et 17% à l’aide sociale (base: 2007).34 Pour lescantons, le financement public des Eglises représente une charge plutôt faible,tandis que pour les Eglises elles-mêmes, il s’agit de sommes globalement im-portantes. L’Eglise évang. réf. profite davantage du financement public – celaglobalement et par membre – que son homologue cath. rom. dans la mesureoù, traditionnellement, les cantons réformés ont toujours versé plus d’argent(Berne, Zurich et Vaud).

Les membres des deux grandes Eglises nationales paient au niveau suissedes impôts ecclésiastiques de plus d’un milliard de francs: l’Eglise évang.réf. et l’Eglise cath. rom. ont perçu en 2007 auprès de leurs membres pourprès de 1,3 mia de CHF d’impôts ecclésiastiques dus par les personnesphysiques. Les différences considérables entre cantons dans ce domaine nes’expliquent que partiellement par les disparités de capacité financière. Ilsemble au contraire que la diversité des traditions historiques joue un rôledéterminant à cet égard. Ainsi, dans le canton de Saint-Gall, qui figure dansla moyenne inférieure de l’indice des ressources de la Confédération, lesmembres des deux confessions acquittent, toutes proportions gardées, desimpôts ecclésiastiques très élevés.

Le financement privé est la première source de revenus de toutes les com-munautés religieuses analysées: les finances des confessions étudiées sontalimentées principalement par leurs membres.35 Tandis que le financementprivé au sein des communes ecclésiastiques évang. réf. et cath. rom. et de lacommunauté israélite de Bâle est assuré par les impôts ecclésiastiques despersonnes physiques, celui des Eglises libres et des deux communautés isla-miques analysées consistent en des dons et contributions de membres.

Le cadre institutionnel joue un rôle décisif pour la situation financière etla composition du financement:

• La situation financière des deux grandes Eglises nationales est étroitementtributaire du cadre institutionnel en vigueur. Si les impôts ecclésiastiquesdes personnes physiques perdaient leur caractère obligatoire, les membrespaieraient des sommes bien inférieures (du moins à long terme), commeil en va à Genève et à Neuchâtel. Force est de constater dès lors que lesEglises nationales profitent de leur statut dans la plupart des cantons.

34 OFS, Finances publiques en Suisse 200735 Cette affirmation ne serait pas valable pour les cantons de Vaud, du Valais et du Tessin où aucun impôt ecclésias-

tique n’est perçu par les communes ecclésiastiques ou dans de rares cas seulement.

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• Plus une communauté religieuse est institutionnalisée, plus le versementde contributions par les membres est réglementé et moins les dons indivi-duels occupent de place.

Le travail bénévole est une ressource très importante: le travail non rému-néré constitue une ressource significative pour toutes les communautés reli-gieuses. Les Eglises nationales, en tant qu’Eglises multitudinistes, disposentcertes d’une large base de membres, mais dont bon nombre sont peu actifs.A l’inverse, dans les petites communautés religieuses, l’engagement de l’en-semble des membres – actifs et passifs – y est en moyenne plus élevé. Ainsi,dans les Eglises libres, on enregistre le double de travail bénévole par rapportà celui rémunéré, tandis que dans les communes ecclésiastiques des Eglisesnationales, le travail bénévole représente entre le quart et la moitié des acti-vités salariées.36

b) Offres de prestations

Les prestations à caractère social font partie intégrante de l’offre de toutesles communautés religieuses. Ces prestations constituent un volet impor-tant de l’offre de toutes les communautés religieuses étudiées, quelle que soitleur situation financière. Cela correspond aussi à la conception que les com-munautés religieuses ont de leur mission: de un quart à un tiers du travailaccompli consiste en effet en des prestations sociales.

L’institutionnalisation favorise le professionnalisme. Une institutionnalisa-tion accrue va de pair avec un professionnalisme plus poussé. Dans les Egli-ses nationales, des représentants de diverses professions sont à l’œuvre. Cescollaborateurs sont nettement plus spécialisés que ce n’est le cas des person-nes au service des Eglises libres.

L’institutionnalisation coûte cher. L’institutionnalisation plus forte desEglises nationales entraîne aussi des coûts plus élevés.

• Les coûts salariaux des Eglises nationales pour le personnel affecté à des tâ-ches administratives ou auxiliaires, notamment de secrétariat, de gestionfinancière et de conciergerie, sont nettement plus élevés qu’au sein desEglises libres. Cette différence s’explique en partie par les exigences que

Résumé et conclusions 69

36 Landert (2000) évalue à 1:1 le rapport entre travail rémunéré et travail bénévole au sein de l’Eglise évang. réf. ber-noise. Ce résultat s’explique par le fait que Landert n’a pas tenu compte dans son calcul de la rémunération desecclésiastiques par l’Etat.

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doit satisfaire une institution de droit public (p.ex. dans le domainecomptable).

• Les activités à titre honorifique (autorités) représentent une part essentiel-le du travail non rémunéré. Au sein de l’Eglise évang. réf., aux structuresdémocratiques particulièrement développées, elles représentent près dutiers des heures fournies bénévolement.

c) Utilité

Le sondage réalisé auprès de la population en général au sujet de l’utilité descommunautés religieuses a été mené uniquement dans le canton de Berne etn’a porté que sur l’offre des Eglises chrétiennes. Aussi, les affirmations quisuivent ne valent que pour ce canton.

L’Eglise revêt une importance significative pour la majorité des sondés:près de 60% des personnes interrogées au sein de la population en généralconsidèrent que l’Eglise est «importante pour eux à titre personnel et pour lasociété». Un petit quart estime que l’Eglise est «importante uniquementpour la société».

Les offres à caractère cultuel sont plus importantes que celles relevant dudomaine social: la population attribue en moyenne une importance plusgrande aux offres cultuelles qu’aux prestations de type social de l’Eglise.

Les non-membres des Eglises nationales reconnaissent également une uti-lité à l’offre de ces dernières: les non-membres (personnes sans confessionou d’une autre religion, à l’exception des Eglises libres) ont manifesté unepropension à payer non négligeable pour l’offre de prestations des Eglises.

Les membres des deux grandes confessions assistant aux services religieuxtirent une plus grande utilité de l’offre des Eglises: ces fidèles ont une pro-pension à payer plus élevée que la moyenne des membres des Eglises sondésau sein de la population générale.

d) Comparaison de l’utilité et du coût

Afin de mettre en balance l’utilité et le coût de l’offre de prestations, deuxestimations ont été effectuées. Des conclusions ne peuvent être tirées deschiffres établis que dans d’étroites limites et ne sauraient être extrapolées àl’ensemble de la Suisse:

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La valeur des prestations à caractère social des Eglises nationales corres-pond en gros au financement officiel de ces dernières dans les cantons ana-lysés: la valeur de ces prestations, même estimée prudemment, correspondgrosso modo aux coûts engendrés pour la collectivité, comme le révèlent lesestimations faites pour les cantons de Berne et de Saint-Gall. Pour celui deNeuchâtel, qui ne verse pas de fonds publics aux Eglises à l’exception de fai-bles montants dans le cadre de contrats de prestation, le bilan est nécessaire-ment positif. Comme le financement officiel dans le canton de Berne estrelativement élevé, on peut émettre l’hypothèse que, dans la plupart des can-tons, la valeur des offres à caractère social est supérieure au financement éta-tique. En d’autres termes, rien ne laisse présager l’existence d’un déséquili-bre entre services à caractère social et financement public. Cependant, lesexemples retenus pour notre analyse ne permettent pas non plus d’affirmerque la valeur desdits services dépasse systématiquement de beaucoup les con-tributions étatiques.

Dans le canton de Berne, l’utilité tirée de l’offre de prestations des Eglisesest légèrement inférieure au coût global de ces dernières: la propensionagrégée à payer de la population en général pour l’offre de prestations desEglises (prestations cultuelles et à caractère social), qui s’inscrit dans unefourchette de 196 à 315 mio de CHF, est inférieure au coût global de prèsde 325 mio de CHF. Les Eglises sont toutefois bien davantage que des four-nisseurs de services. Vu que ce «plus» n’est pas chiffrable, il n’est pas possiblenon plus d’établir l’utilité globale des Eglises en tant qu’institutions. Néan-moins, la plus-value qu’elles recèlent est reconnue indirectement aussi par lapopulation: comme le sondage réalisé auprès de la population en général l’amontré, près de 85% de la population jugent les Eglises importantes, que cesoit pour des raisons personnelles ou sous l’angle de la société.

Dans le canton de Berne, l’utilité des Eglises nationales que les non-mem-bres reconnaissent à ces dernières tend à dépasser leur participation au fi-nancement public. Les non-membres, soit 17% de la population bernoise,tirent de l’offre de prestations des Eglises une utilité dont la valeur oscille en-tre 14 et 43 mio de CHF. Celle-ci est à mettre en balance avec le coût assu-mé qui est de l’ordre de 18 mio de CHF (17% des impôts ecclésiastiques despersonnes morales et des dépenses de l’Etat pour la rémunération des ecclé-siastiques). Il est permis de penser que la valeur attribuée par les non-mem-bres à l’offre de prestations des Eglises ne dérive pas au premier chef du pro-fit direct qu’ils en retirent, mais d’une utilité indirecte, telle l’importanceque lui attachent leurs proches ou la société en général.

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72 Résumé et conclusions

e) Evaluation sous l’angle économique et autres questions

D’un point de vue économique, il est intéressant, dans le cadre du projet FA-KIR, de se demander si le cofinancement par l’Etat des communautés reli-gieuses est justifié et s’il respecte les principes généralement admis dessciences financières publiques. Les trois résultats principaux susmentionnésde l’analyse sont-ils utiles pour répondre à cette question?

1. L’utilité tirée de l’offre de prestations des Eglises est inférieure à leur coûtglobal dans le canton de Berne.

Ce constat à lui seul ne permet de tirer aucune déduction au regard desprincipes des finances publiques. La comparaison directe de l’utilité et ducoût global n’est en effet pas pertinente par rapport à l’Etat dans la mesu-re où les coûts sont financés principalement par les membres.37 En outre,les Eglises, ainsi que cela a été dit, non seulement fournissent des presta-tions mais encore transmettent des valeurs. Du fait de cette fonction spé-cifique, un soutien des Eglises se justifierait dans la mesure où les valeursvéhiculées peuvent être considérées comme un bien public au sens très lar-ge, notamment en tant que fondement du système libéral d’économie demarché.38 Or, dans les argumentaires politiques actuels, le financementpublic des Eglises est justifié surtout par l’offre de prestations de ces der-nières dans le domaine social ainsi que dans ceux de la formation et de laculture.

2. L’utilité attribuée par les non-membres aux Eglises nationales du canton deBerne tend à dépasser la participation de ces personnes au financementpublic desdites Eglises.

On peut y voir une sorte de «test du principe de l’équivalence» (ici forte-ment simplifié dans le sens: «seul paie celui qui tire profit»). Si les non-membres devaient payer beaucoup plus que l’utilité qu’ils retirent, celaposerait problème. La fourchette de l’utilité des non-membres révèle tou-tefois qu’il n’en est rien. L’utilité relativement élevée déclarée par ces der-

37 Pour une analyse coût-utilité du financement public, il y aurait lieu d’établir le coût marginal et l’utilité marginaleen tant que coût et utilité additionnels d’une extension progressive ou d’un démantèlement progressif dudit finan-cement.

38 Cette revendication est souvent étayée par cette affirmation de Böckenförde: «Der freiheitliche, säkularisierte Staatlebt von Voraussetzungen, die er selbst nicht garantieren kann. Das ist das große Wagnis, das er, um der Freiheit willen,eingegangen ist. Als freiheitlicher Staat kann er einerseits nur bestehen, wenn sich die Freiheit, die er seinen Bürgerngewährt, von innen her, aus der moralischen Substanz des einzelnen und der Homogenität der Gesellschaft, regu-liert. Anderseits kann er diese inneren Regulierungskräfte nicht von sich aus, das heißt, mit den Mitteln des Rechts-zwanges und autoritativen Gebots zu garantieren versuchen, ohne seine Freiheitlichkeit aufzugeben und – auf säku-larisierter Ebene – in jenen Totalitätsanspruch zurückzufallen, aus dem er in den konfessionellen Bürgerkriegenherausgeführt hat.» Böckenförde (1976), Staat, Gesellschaft, Freiheit.

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niers est l’indice d’effets externes possibles de l’offre de prestations desEglises qui justifieraient d’un point de vue économique un cofinancementpar l’Etat.

3. Le bilan du financement public des Eglises nationales et de la valeur de leursprestations dans le domaine social est quasi équilibré dans les cantons analysés.

Le bilan global plutôt positif révèle que le financement public peut êtrejustifié en tant que contre-prestation pour des services fournis. Si l’offredes Eglises est souhaitée par le monde politique, rien ne fait obstacle à laconclusion de contrats de prestation d’un point de vue économique. Dansmaints cantons, les Eglises bénéficient aujourd’hui déjà d’un soutien éta-tique en vertu des services qu’elles assurent à la société dans son ensemble(comme le prévoient, p. ex., la nouvelle loi ecclésiastique zurichoise ou lesconventions de subventionnement dans le canton de Vaud). En cas de bi-lan négatif, il y aurait lieu de conclure que le financement public ne se jus-tifie pas économiquement (à moins de l’envisager en tant qu’indemnisa-tion pour leur contribution à la transmission de valeurs, comme cela adéjà été affirmé plus haut).

Dans les débats publics, les résultats 2 et 3 sont interprétés dans le sens d’une«orientation des Eglises vers l’intérêt commun». Il s’agit de l’un des critè-res mentionnés dans la littérature pour la reconnaissance juridique des com-munautés religieuses.39 A cela s’ajoute que la plupart de ces dernières consi-dèrent que leurs offres sont aussi à la disposition des non-membres, voire dela collectivité dans son ensemble. On ne peut toutefois répondre aujourd’huià la question de savoir dans quelle mesure ces prestations sont effectivementutilisées en dehors du cercle des membres. Des recherches approfondies per-mettraient d’apporter des éclaircissements à cet égard, que ce soit au traversd’une analyse plus poussée de l’utilisation (qui utilise les prestations?) oudans le cadre d’une enquête sur la propension à payer pour les prestationsd’autres communautés religieuses. Les bilans sociaux dans lesquels les presta-tions des Eglises sont mesurées uniquement à leur coût ne paraissent pas suf-fisants pour établir l’étendue de l’intérêt commun qu’elles servent.

La question suivante à poser sous l’angle économique à propos des résultatsprésentés est celle-ci: peut-on se satisfaire uniquement de ce que ces bilans(2 et 3) ne soient pas négatifs?

Résumé et conclusions 73

39 Cattacin et al. (2003), Etat et religion en Suisse.

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74 Résumé et conclusions

Quand bien même les bilans 2 et 3 peuvent être qualifiés de positifs, d’au-tres questions se posent au niveau de l’efficience de l’allocation des fonds etdu respect des principes des finances publiques. Il s’agit de points que l’ana-lyse FAKIR n’a pas examinés de près mais qu’elle se doit d’énoncer briève-ment en tant que sujets à aborder également sous l’angle économique:

• Autres affectations possibles? Même si les bilans évoqués plus haut sontéquilibrés, voire légèrement positifs, les fonds publics alloués aux Eglisespourraient-ils générer une utilité encore plus grande s’ils étaient attribuésautrement? Dans une perspective d’affectation efficace des fonds publics– lesquels se font plus rares – les Eglises devraient fondamentalement êtremises en concurrence avec d’autres bénéficiaires possibles. Il y aurait lieude se demander à quel point l’affectation fixe du produit des impôts ecclé-siastiques perçus auprès des personnes morales est judicieuse dans lamesure où ces fonds échappent de ce fait, en grande partie, au processusbudgétaire de l’Etat.

• Pourquoi les communautés religieuses devraient-elles être subvention-nées pour leurs prestations dans le domaine social à l’exclusion d’autresfournisseurs éventuels? En admettant que cela soit fondé, pourquoi favo-riser uniquement les Eglises nationales? D’un point de vue économique,le statut privilégié des Eglises nationales n’est pas justifiable, et les princi-pes de l’économie libérale inciteraient à opter pour une mise au concours.

• Les instruments de financement actuels des pouvoirs publics sont-ils adé-quats? Le financement public qui, dans la plupart des cas, est assuré prin-cipalement au travers des impôts ecclésiastiques des personnes moralesdevrait être réexaminé au regard des principes de l’«imposition optimale»(par exemple sous l’angle des distorsions économiques, du coût de percep-tion, de la justice distributive, etc.).

• Les instruments de rémunération actuels sont-ils les bons (paiements for-faitaires partiels, paiements partiels liés à des mandats de prestation peudétaillés)? A cet égard, des instruments modernes ont été développés ré-cemment dans le cadre de la Réforme de la péréquation financière (RPT)notamment et qui pourraient également entrer en ligne de compte pourl’indemnisation des prestations sociales des communautés religieuses. Oncitera, par exemple, les contrats de prestation avec des contributions glo-bales, les rémunérations basées sur l’output et l’efficacité, ou la mise auconcours de prestations souhaitées.

Divers arguments sont susceptibles d’être invoqués pour ou contre la solu-tion actuelle:

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Résumé et conclusions 75

Pourquoi une affectation fixeet non pas une mise encompétition avec d’autresaffectations possibles?

– Les communautés religieu-ses ont besoin de continui-té pour accomplir leurs tâ-ches.

– L’utilité de l’action exercéepar les communautés reli-gieuses n’est pas compara-ble à celle d’autres tâchesremplies par l’Etat.

– Une attribution fixe empê-che l’affectation efficacedes moyens financiers ettoute optimisation de l’uti-lité retirée.

– D’autres tâches à l’utilitédifficile à chiffrer sont aus-si à mettre en compétitiondans la lutte politique pourle partage des fonds.

Pourquoi les communautésreligieuses?

– Les communautés religieu-ses sont capables de mobi-liser de nombreux béné-voles qui ont un effetmultiplicateur des ressour-ces investies.

– Au-delà de leurs presta-tions de service, lescommunautés religieusestransmettent égalementdes valeurs.

– D’autres organisationssans but lucratif seraient-elles susceptibles d’utiliserplus efficacement l’argentmis à disposition?

– L’attribution exclusive (etla rémunération) de tâchesaux Eglises et à toute com-munauté religieuse en gé-néral est en contradictionavec la laïcité de l’Etat.

Et pourquoi seulement lesEglises nationales?

– Du fait de leurs structuresétendues à tout le pays etde leur large ancrage dansla population (Eglisesmultitudinistes), les Egli-ses nationales sont parti-culièrement aptes à rem-plir les tâches assumées(transmission de valeurset prestations sociales).

– Toutes les communautésreligieuses fournissent desprestations à caractèresocial. Privilégier financiè-rement les Eglises natio-nales ne résiste pas à uneanalyse critique

Le financement assuréactuellement par les pou-voirs publics au travers desimpôts ecclésiastiques est-ilefficace?

– Les impôts ecclésiastiquesdes personnes moralessont faciles à percevoir.Assez modiques du fait deleur large assiette, ils negénèrent quasi aucunedistorsion du marché.

– Seules les personnesmorales sont touchées, àl’exclusion d’autresacteurs économiques (parexemple, les sociétés depersonnes).

Les instruments de rémuné-ration actuels sont-ils adé-quats économiquement par-lant?

– Les fonds publics sontdéjà de plus en plussouvent liés à des contratsde prestation.

– Les allocations de fondssans lien clair avec uneprestation (p. ex. couver-ture de déficit par lescommunes politiques)sont inefficaces.

POUR CONTRE

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76 Résumé et conclusions

La liste des arguments pourrait certes être étendue au-delà. En dernier res-sort, il appartient au monde politique de débattre de la réponse à apporter àces questions. Elles reviendront encore et toujours à la surface, que ce soitdans le contexte d’une révision de loi sur le statut des Eglises ou de discus-sions sur l’impôt ecclésiastique des personnes morales.

Pour mener ces débats dans l’optique d’une politique fondée sur des faits, ilest éminemment souhaitable, compte tenu de la complexité des structuresecclésiales et du système fédéraliste, que règne la transparence sur les fluxfinanciers des communautés religieuses au sein des cantons ainsi que sur leurcoût et leur utilité. A la différence de la situation prévalant pour d’autresdomaines politiques (par exemple, le compte routier ou la statistique finan-cière), cette lisibilité n’existe pas du fait que la compétence pour les ques-tions relatives aux communautés religieuses et la réglementation de leurstatut n’appartient pas à la Confédération mais aux cantons.

Nous estimons toutefois que le projet FAKIR contribuera à structurer le dé-bat et à améliorer la transparence, cela à l’instar des communautés reli-gieuses qui nous ont fourni des données et de toutes les personnes qui, enrépondant au sondage, ont permis de mener à bien l’enquête sur l’utilité.

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