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Principe 1 Une nouvelle relation au temps…

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Principe 1 Une nouvelle relation

au temps…

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1.1 Travaillez mieux sans pour autant travailler plus…

Ceux qui emploient mal leur temps sont les premiers à se plaindre de sa brièveté.

La Bruyère

Le gagnant est… « je n’ai pas le temps… ». Eh oui, cette expression arriverait sans doute en tête des expressions dans l’entreprise. Le temps est devenu aujourd’hui une denrée rare. Une ressource qui prend chaque année de la valeur du fait de sa rareté. Tout le monde est en quête de temps. La fonction qualité n’est pas épargnée, bien au contraire. Elle croule sous les activités opérationnelles, elle réalise de plus en plus de reporting, elle est conviée à de nombreuses réunions, elle gère des projets tout aussi nombreux… Aujourd’hui, la performance d’un collaborateur ne peut se résumer uniquement à son temps de présence dans l’organisation. On ne peut plus raisonner de cette manière.

J’aiconnul’époqueoùcommencertrèstôtlematinetfinirtrèstardlesoirétait,au regard des autres, un signe de responsabilité. J’ai connu l’époque où prendre des « devoirs » le soir était synonyme d’engagement professionnel et de sérieux. Bien entendu, il peut exister des périodes exceptionnelles à plus forte activité qui nécessitent un plus fort engagement. Le travail avec des responsabilités est rarement linéaire. Le danger survient quand l’exceptionnel devient la règle. La fatigue se fait sentir. On devient de moins en moins productif et de ce fait on est obligé de travailler encore plus pour réaliser la même charge de travail. On prend du retard. On est très facilement irritable. Inconsciemment, on peut très bien brasser des données inutiles pour se rendre utile et se sentir submergé de travail alors que la réelle valeur ajoutée de toute cette agitation est minime.

Dans leur ouvrage Re-Work, Jason Fried et David Heinemeier Hansson vont encoreplusloindansleurréflexionenprécisantque«cetteattitudeestnonseulement inutile mais aussi idiote. Travailler plus ne signifie pas être plus dévoué ou plus productif. Travailler plus veut seulement dire… travailler plus. Les bourreaux de travail tentent de résoudre les problèmes en multipliant les heures qu’ils y consacrent. Ils essaient de compenser la paresse intellectuelle par la force brute, ce qui donne des solutions inélégantes. Ils ne cherchent pas à devenir plus efficacesparcequ’enréalitéilsaimentfairedesheuressupplémentaires.Ilsaimentse prendre pour des héros. Ils créent des problèmes (souvent involontairement) pour pouvoir continuer à se défoncer ». Le manager qualité 2.0 doit ainsi avoir une relation moderne avec le temps. Il ne peut pas se contenter de mesurer la performance de son activité au nombre d’heures réalisées.

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Le temps est une ressource et comme toute ressource c’est un moyen et non une finalité.Laperformancesurlesrésultatsd’undossiern’estpassystématiquementproportionnelle au temps consacré. Bien au contraire. Trop de temps peut laisser place à du vide et on va chercher à combler ce vide par du « détail ».

Soyez honnête : vous arrive-t-il souvent de ne pas utiliser tout le délai dont vous disposez pour un travail ? Cette « loi » a été énoncée en 1958 par le professeur C. Northcote Parkinson littéralement sous la forme suivante : «Work expands to fill the time available for its completion» (le travail s’étend de telle sorte qu’il occupe in fine le temps mis à disposition pour sa réalisation). Cela signifieque,siunmanageradixpersonnessouslamainpourexécuterunetâche dont pourraient s’acquitter cinq personnes en une semaine, vous pensez, arithmétiquement,qu’ilenaurafiniauboutdedeuxjoursetdemi.Ehbien,non.Il rajoutera ce qu’il faut de complications, de réunions, de consultations… pour que le chantier dure effectivement une semaine à dix personnes. Nous avons tous tendance à respecter ce principe « une tâche nécessite tout le temps dont on dispose pour l’effectuer ».

Autrementdit,unetâchegrossiraenimportanceetencomplexité(perçue)àla mesure du temps alloué à sa réalisation. C’est la magie des dates butoirs imminentes. Si je vous donne 24 heures pour achever un projet, cette pression de temps vous oblige à vous concentrer sur l’exécution et vous n’avez d’autres choix que de faire l’essentiel et rien que l’essentiel. Bien entendu, cette loi doit être consommée avec modération. Il ne faut pas non plus tomber à l’extrême car sinon tout devient vitesse, exécution, réalisation… un comportement qui se caractérise souvent par un manque de profondeur. La rapidité est souvent synonymed’approchesuperficielle.

Ainsi, le manager qualité 2.0 doit travailler mieux sans pour autant travailler plus.Ildoitêtreperformantetnonplussimplementefficace.Ladifférenceestsubtileentrecesdeuxapproches.Êtreefficace,c’estfairedeschosesquivousrapprochent de vos objectifs. Être performant, c’est accomplir une tâche donnée (qu’elle soit importante ou non) de la manière la plus économique possible. On verra tout au long de cet ouvrage la déclinaison du « travailler mieux » par des exemples concrets. Le manager qualité 2.0 doit ainsi réorganiser son temps de travail pour sortir de ses rituels opérationnels et s’accorder du temps « pour le mieux » au détriment du « plus ».

Travailler mieux, c’est être capable de gérer ses dossiers sans stress négatif et ceci dans les délais impartis. Travailler mieux, c’est être capable de rester en situation de vigie par rapport à son domaine d’activité (écoute active du marché). Travailler mieux, c’est être capable de se former tout au long de la

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vie pour éviter l’obsolescence de ses connaissances, c’est pouvoir gérer des projetsquipréparentl’avenir.Travaillermieux,c’estenfinassurerunedélégationdeconfianceaveclespartiesprenantes.Autantd’élémentsquitémoignentdecette nécessité du changement.

Témoignage personnel

Il est tard et je suis encore en train de travailler. Je suis donc le parfait « contrexemple » de ce que je viens d’écrire. Et pourtant, je ne suis pas stressé. Je suis au contraire satisfait de ma journée même si celle-ci se prolonge. Alors, pourquoi cette contradiction ? Je suis peut-être en train de retomber dans la logique du travailler plus ? Un véritable retour en arrière par rapport à mes principes ? Eh bien non, je crois comprendre que la réalité est ailleurs. Ma journée se prolonge non pas pour rattraper le retard mais au contraire pour préparer l’avenir. J’ai la disponibilité intellectuelle pour faire des choses en plus de mes activités opérationnelles. J’ai le temps de réaliser des activités sans effet immédiat. Je ne suis pas en retard donc je suis serein donc je peux faire autre chose de plus constructif. Ces « heures supplémentaires » ne sont pas pour moi une contrainte. Elles ne sont pas comptabilisées en tant que telles. Au contraire, elles sont comme une bouffée d’oxygène qui me sort de mon quotidien.

Bien entendu, ce surplus doit être réalisé avec modération car si l’exceptionnel redevient le « normal » alors c’est toute mon approche au temps qui s’écroule. Mon « travailler mieux » s’évalue au plaisir que je prends dans mon travail. En effet, les activités que l’on peut rattacher au « travailler plus » sont rarement gratifiantes, et de ce fait rarement motivantes. Le « travailler mieux » est au contraire signe d’enrichissement personnel en permettant d’aborder des sujets à haute valeur ajoutée (immédiate ou différée). J’essaie ainsi, en permanence, de réguler ces deux approches pour m’accorder au moins 20 % de mon temps dans des activités pour « travailler mieux » avec une volonté d’augmenter progressivement ce pourcentage…

1.2 Faites du temps votre allié et non votre ennemi…

Devenir manager qualité 2.0 nécessite ainsi une nouvelle relation au temps, faute de quoi le changement n’aura pas lieu. Il faut arriver à maîtriser le temps plutôt que le subir. Le manager qualité 2.0 doit ainsi devenir, selon l’expression deJeanLouisServan-Schreiber,un«maîtredutemps».Ledéfiestambitieuxmais réaliste. Il est illusoire de croire que l’on va changer quelque chose si l’on maintient un mode de fonctionnement « à l’identique ». Ainsi, il va falloir mettre en place un véritable dispositif pour gagner du temps dans votre organisation en éliminant progressivement les activités inutiles, celles à faible valeur ajoutée, ou celles que vous réalisez pour le compte d’autres acteurs… Un véritable programmed’efficacitéprofessionnelledontlafinalitéestdedégagerdutempspour faire autrement.

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Carc’estbienlàquesesituevotredéfi.Letempsgagnéserapourvousunmoyen de sortir de votre quotidien, un moyen d’observer votre environnement, de vous former, de passer plus de temps avec les collaborateurs internes… Un progrès qui sera perceptible par tous et ceci aussi bien au niveau professionnel quepersonnel.Sedégagerdutempsn’estpasensoiunefinalité,lanatureayant horreur du vide cette disponibilité sera rapidement utilisée. L’objectif est ailleurs. Il faut travailler « mieux » pour se dégager une disponibilité intellectuelle qui permet d’avoir le courage, la force et les ressources nécessaires pour accompagner le changement dans les organisations. Un responsable qualité « usé » par le quotidien est rarement force de proposition pour porter de nouveaux projets, pour améliorer en permanence des situations existantes, pour échanger avec les autres collaborateurs…

Un responsable qualité usé est un responsable qualité en danger. Il est dans une course infernale qui le place dans une situation de suiveur. Il passe son temps à rattraper le retard. Un comportement qui focalise son attention sur le passé en le détournant du présent et du futur. Les psychologues estiment que la proportion d’attention consacrée au passé par rapport au présent et au futur est un excellent indicateur de la santé mentale d’un individu. Un être sain d’esprit se tourne, selon eux, vers son présent et son avenir. Il évite d’avoir en permanence la « tête dans le guidon ». Le manager qualité 2.0 doit ainsi devenir un « maître du temps », c’est-à-dire avoir la capacité de gérer sereinement ses activités professionnelles (logique de court terme basée sur l’exécution de rituels) tout en pilotant de nouveaux projets (logique d’amélioration et de long terme). Il doit être intellectuellement en forme pour être ouvert au changement, à la nouveauté, au dialogue. Le manager qualité 2.0 doit également être disponible à tous les niveaux. Pour lui et pour les autres. Il se distingue par une maîtrise de son temps qui est un allié et non pas un ennemi. Pour ce faire, il existe de nombreusesméthodespourgagnerenefficacitépersonnelle.

Dans son ouvrage, Le Nouvel Art du temps, Jean-Louis Servan-Schreiber sépare distinctement les « voleurs de temps externes » des « voleurs de temps internes ». Comme leur nom l’indique les premiers viennent d’autrui, les seconds sont liés à notre propre problématique personnelle. « Emprisonner » ses voleurs de temps est le début d’une démarche pour faire du temps un véritable allié. L’objectif est d’abolir progressivement toutes les activités dites « chronophages », c’est-à-dire les activités qui consomment du temps avec un faible ROI (Return on investment) autrement dit, à faible valeur ajoutée. Bien entendu, il y aura toujours dans son activité des « voleurs de temps » maisl’objectifestd’enavoirconscienceafindelesréduireàleurplussimpleexpression.

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Tableau 1.1 Des exemples de voleurs de temps

Voleurs de temps d’origine externe Voleurs de temps d’origine interne

- La réception pléthorique de mails uniquement pour « information ».

- Des appels téléphoniques impromptus.

- Des collègues venant exposer leurs problèmes ou faire la conversation.

- Du personnel insuffisamment formé.

- Un turnover important.

- La participation à des réunions inutiles trop fréquentes, trop longues, ou mal préparées.

- La politique de la « porte ouverte » (devoir de disponibilité).

- La relation avec son N + 1 (mauvaise gestion des priorités, consignes mal définies…).

- Urgent qui prédomine sur l’important.

- Méthode de travail peu efficace dans la gestion des « tâches ».

- Focalisation sur le travail en retard.

- Tendance à faire trop, logique de perfectionnisme.

- Manque d’ordre (bureau mal rangé, mauvais classement des dossiers informatiques…).

- Inaptitude dans le traitement des conflits.

- Résistance systématique au changement.

- Difficulté à dire non.

Decetteapprochegénérale,ilestintéressantd’identifierles«voleursdetemps»spécifiquesàlafonctionqualité.Bienentendu,cettelisten’apaslaprétentiond’être exhaustive, chaque manager qualité doit la compléter en fonction de son contextespécifique:

Tableau 1.2 Les voleurs de temps spécifiques à la fonction qualité

Voleurs de temps d’origine externe(pour la fonction qualité

Voleurs de temps d’origine interne(pour la fonction qualité)

- Les ajustements de planning (programmation/déprogrammation/reprogrammation) comme par exemple pour les audits internes, les revues de processus…

- La veille réglementaire (notamment pour les managers QSE) et la nécessité de s’assurer de la conformité réglementaire.

- La préparation des audits de certification avec la revue de paquetage préalable et l’organisation des audits.

- Des marottes de certains auditeurs externes qui détournent parfois l’attention sur leur perception des priorités.

- La réalisation d’activités pour le compte d’autres fonctions (exemple : évaluation des fournisseurs pour le compte des achats, évaluation de la satisfaction clientèle pour le compte du marketing…).

- La préparation de la revue de direction qui nécessite un long travail de synthèse pour présenter les résultats du système de management de la qualité.

- Le « maternage » nécessitant un rappel des délais et des échéances (exemple : suivi des actions correctives et préventives, pilotage des processus…).

- La juxtaposition de « surcouches » dans le pilotage de son système de management de la qualité.

- La gestion de rituels sans remise en cause des pratiques (logique de récurrence et de reconduction à l’identique).

- La difficulté à simplifier le pilotage du système de management de la qualité (volonté de trop vouloir bien faire).

- La peur de l’auditeur externe.

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Témoignage personnel

Au début de ma carrière professionnelle et pendant de longues années, j’ai été victime de ce manque de temps. J’ai été un bourreau de travail. J’ai vécu ces moments difficiles. Mon organisation personnelle était orientée sur le passé. Ma priorité était en permanence de rattraper le retard. Il était difficile pour moi de me projeter et d’envisager autre chose car j’avais déjà du mal à gérer le quotidien. J’étais peu réceptif aux idées nouvelles car elles venaient s’ajouter à mes tâches en retard.

Cette époque est désormais révolue et sans aucun regret. J’ai appris à faire du temps un allié et non un ennemi en réorientant mes activités professionnelles. Je suis sorti de l’enclave dans laquelle je m’étais isolé. Ce n’était pas la faute des autres, c’était de ma responsabilité. J’ai pris seul ce chemin avant de comprendre qu’il y avait d’autres opportunités. J’ai dû combattre des valeurs personnelles. J’ai dû faire des choix, prendre des décisions, et accepter des changements. J’ai dû apprendre à déléguer, à faire confiance. Faire du temps un allié est un véritable combat quotidien qui se poursuit chaque jour. L’équilibre est fragile. Il faut être en permanence vigilant pour ne pas retomber dans les travers du passé.

Je ne me considère pas comme un « maître du temps » selon l’expression de Jean-Louis Servan-Schreiber mais je sais qu’aujourd’hui je dois beaucoup à mon organisation personnelle du travail. J’essaie d’adopter en permanence une démarche « Lean » pour optimiser mon temps et ceci avant même que les problèmes n’arrivent. J’investis dans les « phases amont » pour gagner du temps ultérieurement. Je sais que cet investissement est rentable. J’investis sur le « P » (Plan) du PDCA de Deming avant de déployer le « D » (Do). J’anticipe car j’ai horreur de perdre du temps dans la gestion de problèmes ou de conflits. Je crois que cela représente réellement mon véritable moteur dans cette quête de la « productivité ».

1.3 Attention au perfectionnisme…La perfection, ce n’est pas quand il n’y a plus rien

à ajouter mais plus rien à supprimer.

Antoine de Saint-Exupéry

La qualité possède une image d’excellence, de perfection. De nombreux res-ponsables qualité veulent avoir la même image dans l’organisation. Ils visent en permanence la perfection. Ils n’osent pas lancer des projets, des activités tant que tout n’est pas parfait. Les procédures sont lues, relues, triturées dans tous les sens avant leur diffusion. Il faut que tout soit parfait : la forme (mise en page, structure du document…) mais aussi le fond. Le perfectionnisme est certes une qualité personnelle mais peut également s’avérer une contrainte au changement. Aujourd’hui il faut apprendre à faire vite et bien. Les deux composantes sont essentielles. L’une ne peut plus vivre sans l’autre. La vitesse d’exécution prouve une capacité à travailler rapidement, à s’adapter à un nouveau contexte, à faire preuve de professionnalisme.

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La qualité d’exécution prouve la capacité à produire des choses pertinentes. Le manager qualité 2.0 doit ainsi combattre le perfectionnisme s’il est victime de ce symptôme car il risque de « payer de sa personne ». La charge de travail étant en permanence grandissante, le perfectionnisme vient alimenter la pile des « choses à faire » et in fine du stress.

LeDrSapadinaffirmeque« les perfectionnistes sont extrêmes dans leur raisonnement : s’ils font quelque chose, pensent-ils, ils doivent le faire de leur mieux. Il n’y a pas d’intermédiaire acceptable… Confrontés à une tâche difficile, les perfectionnistes se retrouvent inévitablement face à un dilemme : donner tout ce qu’ils ont ou abandonner… »

Ilnefautpasconfondrelafinalitédelamission(recherchedel’excellence)avec la fonction en tant que telle. À l’inverse, le manager qualité 2.0 ne doit pasbâclerlestâchesquiluisontconfiées.«Fairepourlefaire»n’estpasplus productif. Cela a l’avantage de diminuer le stock des « choses à faire » mais souvent c’est une approche à court terme car il faut reprendre sa copie.

Ainsi, le manager qualité 2.0 doit trouver le point d’équilibre entre le perfec-tionnisme(troplent)etlebâclage(tropsuperficiel)pourtrouverdesréponsesappropriées au pilotage de ses activités. Le perfectionnisme peut ainsi être mis en opposition avec une démarche de progrès permanent. Dans cette dernière approche, on vise la perfection en réalisant progressivement des améliorations. On accepte que la situation idéale ne soit pas atteinte immédiatement. Cela fait partie des règles du jeu. On essaie de faire le mieux possible au premier essai et ensuite on améliore progressivement l’existant.

Dans mon expérience professionnelle, il m’arrive fréquemment d’animer des séances de travail avec des perfectionnistes dans la salle. Leur contribution au groupe est souvent intéressante mais ils n’acceptent pas la « demi-mesure ». Ils ont du mal à accepter le consensus « on va débuter de la sorte et on améliorera par la suite ». Ils sont dans la logique du « tout ou rien ».

Cette approche binaire est parfois constructive (fait avancer les idées du groupe) mais peut aussi être un frein au changement en décalage avec la réalité du terrain. Il vaut mieux parfois lancer et tester une idée, un projet, un document, une procédure de manière simple que de vouloir viser la perfection immédiate. Detoutefaçon,cetteapprocheestleplussouventutopiquecarlaperfectionnécessite une démarche itérative, un retour d’expériences, une certaine maturité de l’organisation. De plus, une telle approche est chronophage dans les organisations. On cherche à régler le moindre détail. On tente de prévoir toutes les situations qui nécessitent beaucoup de temps pour s’apercevoir que la copie ne sera jamais exhaustive sans une expérimentation « sur le terrain ».

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Aujourd’hui, la perfection est généralement en opposition avec le rythme du changement imposé dans les organisations. Être perfectionniste dans un monde oùtoutchangerapidementestdeplusenplusdifficile.Laperfectionn’estplusde mode en termes d’attitude et de comportement. On est désormais habitué à ce progrès permanent.

À titre d’exemple, les applications informatiques (applications Iphone ou Android) sont rapidement lancées sur le marché même si leurs fonctionnalités ne sont pasexhaustives.Detoutefaçon,peuimporte,lesdéveloppeurspréfèrentréagir aux demandes et aux commentaires (les évaluations des internautes) que de tout prévoir dans leur première version. On télécharge constamment les évolutions et on s’émerveille devant les « nouveautés ». Ils utilisent à mer-veille le principe de l’amélioration permanente qui en prime crée une relation durable avec les clients. Bien entendu, pour qu’un tel principe fonctionne, il faut tout de même que leur première version soit pertinente et réponde à un réelbesoin.Sinon,lasanctionestimmédiate.Lasuppressionestdéfinitive.Je pense que le mode de fonctionnement du manager qualité 2.0 doit reposer sur ce principe de l’amélioration permanente en opposition avec la perfection immédiate. Il faut lancer quelque chose de bien du premier coup mais qui est perfectible, en tenant compte des avis et des commentaires des utilisateurs.

Tableau 1.3 Logique de perfectionnisme versus logique d’amélioration continue

Logique de perfectionnisme Logique d’amélioration continue

Je peaufine mon projet de procédure dans les moindres détails, je la fais valider en interne et je la diffuse auprès des intéressés.

Je rédige mon projet de procédure, je la teste pendant 2 semaines dans l’organisation, je prends en compte les observations des utilisateurs (retour d’expériences) et je la diffuse pour validation en interne.

Je mets en place des plans d’actions sur toutes les observations suite à cet audit externe même s’il ne s’agit pas de « non-conformités ». Je veux tout traiter pour être parfait lors du prochain audit.

Je traite toutes les « non-conformités » du rapport d’audit externe. Je sélectionne les suggestions d’amélioration (ou pistes de progrès) à forte valeur ajoutée pour notre organisation.

Je ne lance pas ce projet car tout n’est pas prévu dans les moindres détails.

Je lance ce projet en m’assurant que les principaux risques sont maîtrisés. Je me mets en position de suivi pour ajuster le dispositif au fur et à mesure des retours d’informations. J’avance par expérimentation.

Je n’investis pas dans cette solution informatique de « maîtrise documentaire », elle ne répond pas à 100 % à mes exigences.

J’ai bien étudié les fonctionnalités de cet outil de « maîtrise documentaire ». Les fonctionnalités prévues vont nous aider à progresser même si elles ne sont pas 100 % conformes à nos besoins.

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1.4 Accordez-vous du temps pour la réflexion…

Le temps de la réflexion est une économie de temps.

Publius Syrus

Laqualitén’aplusletempsdelaréflexion,elleestplongéedansl’action.Lafonction qualité souffre d’une surcharge opérationnelle comme de nombreux autres acteurs de l’entreprise. Elle est victime d’une juxtaposition progressive de missions. On lui affecte en permanence de nouvelles attributions. La fonc-tion qualité passe beaucoup de temps à gérer le quotidien avec la plus grande difficultépoursortirdecetengrenage.«Onfait,onréalise,onexécute,onproduit,oncontrôle…».Letempsdelaréflexiondevientunluxepourlafonctionqualité alors que cela devrait être une priorité absolue. Le temps de l’action prédomine sur tous les autres sujets. Cette agitation permanente ne permet plusdeseposertranquillementpourréfléchir,analyser,écouter…puisagir.Aujourd’hui,leschémaestsouventinversé:onagitpuisonréfléchitaprèssurles impacts de sa décision.

Dans un environnement où tout s’accélère, le temps prend ainsi une nouvelle dimension. Il faut être capable de gérer le court terme et de se projeter dans un avenir plus ou moins lointain. Il faut instaurer une cohabitation positive entre ces deux approches et ceci de manière équitable. Et pourtant, le rapport de force est souvent déséquilibré : le court terme prédomine. L’entreprise est câblée sur les résultats immédiats pour se rassurer et rassurer les « parties prenantes ».

La fonction qualité est également prise dans cet engrenage du court terme qui nelaisseplusletempsdelaprojection(analysestratégique),delaréflexion,de la relation aux autres et de la créativité.

Dans son ouvrage Trop vite !, Jean-Louis Servan-Schreiber précise qu’il existe une véritable pandémie du court-termisme, fruit d’une accélération constante et d’une volonté d’aller toujours plus vite. « En accélérant, nous avons obtenu des résultatsinespérés,maisnousavonsperdu,enproportioninverse,enréflexionet en approfondissement ». La fonction qualité ne doit pas être prise dans cet engrenage.Elleaétégénétiquementconçuepourprendredurecul,analyserdes situations et contribuer positivement à l’amélioration de l’organisation. Ce mode de fonctionnement fait partie intégrante de son ADN.

Tout comportement inverse est destructeur. Il est utopique de croire que l’on peut être source de progrès dans une organisation sans avoir un temps « non productif ».