Rétablissement de l’état de droit et administration de la justice pendant la période de transition dans les sociétés en proie à un conflit ou sortant d’un conflit

Embed Size (px)

Citation preview

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    1/30

    Nations Unies S/2004/616*

    Conseil de scurit Distr. gnrale23 aot 2004FranaisOriginal: anglais

    04-39530* (F) 110804 230804

    *0439530*

    Rtablissement de ltat de droit et administrationde la justice pendant la priode de transitiondans les socits en proie un conflitou sortant dun conflit

    Rapport du Secrtaire gnral

    * Nouveau tirage pour raisons techniques.

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    2/30

    2 0439530f.doc

    S/2004/616

    Table des matiresP aragraphes P age

    Rsum . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3

    I. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 5

    II. Renforcement de la justice aprs un conflit ou des exactions . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 5

    III. Forger une conception commune de la justice dans le systme des Nations Unies 58 6

    IV. Fonder lassistance sur les normes internationales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 910 7

    V. Dfinir le rle des oprations de paix de lONU. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1113 8

    VI. valuer les capacits et les besoins nationaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1416 9

    VII. Soutenir les partisans locaux de la rforme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1718 10

    VIII. Comprendre le contexte politique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1922 11

    IX. Adopter des dmarches intgres et complmentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2326 12

    X. Remdier labsence de lgalit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2733 13XI. Renforcer les systmes nationaux dadministration de la justice . . . . . . . . . . . . . . 3437 15

    XII. Tirer les enseignements de lexprience des tribunaux pnaux ad hoc . . . . . . . . . . 3848 17

    XIII. Conforter la Cour pnale internationale dans son rle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49 21

    XIV. Faciliter ltablissement de la vrit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5051 21

    XV. Assainir la fonction publique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5253 22

    XVI. Mettre en uvre les rparations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5455 23

    XVII. Coordonner nos efforts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5659 24

    XVIII. toffer nos fichiers dexperts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6063 25

    XIX. Pour aller de lavant : conclusions et recommandations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6465 26

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    3/30

    0439530f.doc 3

    S/2004/616

    Rsum

    Depuis quelques annes, lOrganisation des Nations Unies prte une attention

    accrue aux questions relatives ladministration de la justice pendant une priode detransition et au rtablissement de ltat de droit dans les socits en proie un conflitou sortant dun conflit, et cette exprience est riche denseignements pour sesactivits futures. La russite dpendra dun certain nombre de facteurs dcisifs, dontla capacit de fonder les normes internationales sur une base commune et demobiliser les ressources que ncessite un investissement durable dans la promotionde la justice. Nous devons apprendre aussi viter les solutions toutes faites etlimportation de modles trangers, et appuyer plutt notre action sur desvaluations nationales, la participation des acteurs nationaux et les besoins etaspirations locaux. Pour tre efficaces, nos stratgies devront renforcer la fois lescapacits techniques et la volont politique dentreprendre des rformes. Il faut doncque lONU soutienne les partisans locaux de la rforme, aide accrotre les moyensdont disposent les institutions judiciaires nationales, facilite les consultationsnationales sur la rforme du systme judiciaire et ladministration de la justicependant la priode de transition et contribue remdier labsence de lgalit qui estmanifeste dans tant de socits sortant dun conflit.

    La justice, la paix et la dmocratie ne sont pas des objectifs qui sexcluentmutuellement, mais au contraire des impratifs se renforant les uns les autres. Lesfaire progresser toutes les trois sur un terrain fragilis par un conflit exige une planification stratgique, une intgration rigoureuse et un chelonnement judicieuxdes activits. Nous nobtiendrons pas de bons rsultats si nous axons nos efforts surune seule institution, ou si nous nous dsintressons de la socit civile ou desvictimes. Sagissant du secteur de la justice, nous devons prendre en comptelensemble des institutions interdpendantes qui le composent, tre attentifs aux besoins des groupes clefs et veiller la complmentarit des mcanismes

    responsables de ladministration de la justice pendant la priode de transition. Notrerle principal nest pas de mettre en place des structures internationales sesubstituant aux institutions nationales, mais daider renforcer les capacits localesdans le domaine de la justice.

    Dans certains cas, des tribunaux internationaux ou mixtes ont t tablis pourjuger les crimes perptrs par le pass dans des socits dchires par la guerre. Cestribunaux ont aid rendre justice aux victimes et leur redonner lespoir, luttercontre limpunit des auteurs dexactions et enrichir la doctrine en matire de droitpnal international. Leur cot a toutefois t lev et ils nont gure contribu doterles pays concerns de capacits durables dans le domaine de ladministration de la justice. La Cour pnale internationale suscite un nouvel espoir de voir limpunitreculer durablement: aussi convient-il dencourager de plus nombreuses ratifications

    de son statut.Mais si les tribunaux jouent un rle important, lexprience que nous avons

    acquise en ce qui concerne les commissions de vrit montre aussi que ces dernires peuvent les complter utilement dans les efforts en faveur de la justice et de larconciliation, parce que leur dmarche est centre sur les victimes et quelles aident tablir les faits et recommander des mesures rparatrices. De mme, en soutenant

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    4/30

    4 0439530f.doc

    S/2004/616

    les processus dassainissement de la fonction publique, nous avons constat que ces processus sont un lment vital de ladministration de la justice pendant la priodede transition et, lorsque les droits des victimes comme des accuss sont respects, unmoyen essentiel de restaurer la confiance du public dans les institutions nationales.Aider les victimes ncessite aussi des programmes dindemnisation bien conus, qui

    sont en eux-mmes le gage que la justice ne sintresse pas seulement aux coupables,mais aussi celles et ceux qui ont souffert par leur faute. Intensifier lassistancefournie par lONU dans tous ces domaines exige que nous nous efforcions deresserrer la coordination entre tous les acteurs, que nous toffions nos fichiersdexperts et renforcions nos moyens techniques et que nous consignions, analysionset prenions en compte de manire plus systmatique les enseignements tirs lafaveur de lexcution des mandats approuvs par le Conseil de scurit, des processus de paix et des oprations menes dans le cadre des missions de paix delONU.

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    5/30

    0439530f.doc 5

    S/2004/616

    I. Introduction

    1. Le 24 septembre 2003, le Conseil de scurit sest runi au niveau ministrielpour examiner le rle de lOrganisation des Nations Unies dans linstauration de lajustice et de ltat de droit dans les socits se relevant dun conflit1. Au cours dune

    sance publique tenue le 30 septembre 2003, les tats Membres ont t invits contribuer ce processus2. Dans une dclaration publie lissue de la sance du24 septembre3, le Prsident du Conseil de scurit, sexprimant au nom de cedernier, a not la somme de comptences et dexprience acquises par le systmedes Nations Unies en la matire et soulign la ncessit dexploiter ces comptenceset cette exprience afin que lon puisse tirer les enseignements du pass et aller delavant. Le Conseil de scurit a accueilli favorablement ma proposition de luisoumettre un rapport propre lclairer dans la poursuite de sa rflexion sur cesquestions. sa sance du 26 janvier 2004 sur le point intitul Rconciliationnationale aprs un conflit : rle de lOrganisation des Nations Unies , il ma invit tenir compte, dans ce rapport, des vues sur la question qui avaient t exprimesau cours du dbat4. Le prsent rapport est soumis conformment ces demandes.

    II. Renforcement de ltat de droit et de ladministrationde la justice aprs un conflit

    2. Le prsent rapport a pour objet dappeler lattention sur les questionsessentielles et les principaux enseignements tirer de lexprience de lOrganisationen ce qui concerne la promotion de la justice et de ltat de droit dans les socits enproie un conflit ou sortant dun conflit5. Il ressort clairement de notre expriencede ces 10 dernires annes quil nest possible de consolider la paix dans la priodequi suit immdiatement la fin dun conflit, et de la prserver durablement, que si la population est assure dobtenir rparation travers un systme lgitime derglement des diffrends et dadministration quitable de la justice. Dans le mme

    temps, la vulnrabilit accrue des femmes, des enfants, des prisonniers et dtenus,des personnes dplaces, des rfugis et autres minorits, que lon constate danstoutes les situations de conflit ou postrieures un conflit, fait du rtablissement deltat de droit un impratif urgent.

    3. Or, aider des socits dchires par la guerre rtablir ltat de droit et rparer les exactions massives commises dans le pass, alors mme que lesinstitutions sont dvastes, les ressources puises, la scurit compromise et la population traumatise et divise, est une tche formidable, souvent crasante. Ilfaut prter attention dinnombrables dficiences, parmi lesquelles labsence devolont politique en faveur dune rforme, le manque dindpendance desinstitutions judiciaires, des capacits techniques nationales inadquates, desressources matrielles et financires insuffisantes, un gouvernement qui na pas laconfiance du public, une administration bafouant les droits de lhomme et, demanire plus gnrale, une situation o la paix et la scurit font dfaut. Au fil desans, lOrganisation des Nations Unies a acquis une exprience considrable de lamanire de faire face chacune de ces dficiences majeures. Des dpartements, desorganismes, des programmes et des fonds, ainsi que des spcialistes de lensembledu systme, ont t mobiliss pour contribuer dans de nombreux pays en transition,dchirs par la guerre ou sortant dun conflit, laccomplissement de ces tches

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    6/30

    6 0439530f.doc

    S/2004/616

    complexes mais vitales que sont la rforme et le dveloppement des institutionsgarantes de ltat de droit.

    4. Certes, en matire de justice et de lgalit, quelques mesures prventivesvalent mieux quune lourde intervention une fois que le mal est fait. Si lONU a

    conu ses efforts de faon que la population puisse constater de manire tangiblequils tiennent compte de lurgence de ses besoins dans le domaine de la scurit etvisent rparer les graves injustices commises pendant la guerre, elle na souventrien fait pour liminer les causes premires du conflit. Or, cest en sattaquant auxcauses du conflit, par des moyens lgitimes et justes, que la communautinternationale peut aider prvenir une future rsurgence du conflit. La paix et lastabilit ne peuvent prvaloir que si la population peroit la possibilit de rsoudre,par des voies lgitimes et justes, des questions politiquement sensibles telles que ladiscrimination fonde sur lappartenance ethnique, lingalit daccs aux richesseset aux services sociaux, les abus de pouvoir, le dni du droit la proprit ou lacitoyennet, et les diffrends territoriaux entre tats. De ce point de vue, prvenirest le premier impratif de la justice.

    III. Forger une conception commune de la justicedans le systme des Nations Unies

    5. Des concepts tels que ceux de justice , d tat de droit et dadministration de la justice pendant la priode de transition sont essentiels pour comprendre les efforts de la communaut internationale visant promouvoirles droits de lhomme, protger les personnes de la peur et du besoin, rgler leslitiges en matire de proprit, stimuler le dveloppement conomique, promouvoirune gouvernance responsable, et rsoudre pacifiquement les conflits. Ils nous permettent de dfinir tout la fois nos objectifs et nos mthodes. Pourtant, cesconcepts sont dfinis et compris de multiples faons, mme parmi nos partenairesles plus proches dans ce domaine. Au niveau oprationnel, ils recoupent en grande

    partie dautres concepts connexes, tels que rforme des institutions charges de lascurit, rforme de lappareil judiciaire et rforme des mthodes de gouvernement.Cooprer efficacement dans ce domaine exige une comprhension commune desconcepts clefs.

    6. Le concept d tat de droit ou de lgalit sinscrit au cur mme de lamission de lOrganisation. Il dsigne un principe de gouvernance en vertu duquellensemble des individus, des institutions et des entits publiques et prives, ycompris ltat lui-mme, ont rpondre de lobservation de lois promulgues publiquement, appliques de faon identique pour tous et administres de manireindpendante, et compatibles avec les rgles et normes internationales en matire dedroits de lhomme. Il implique, dautre part, des mesures propres assurer le respectdes principes de la primaut du droit, de lgalit devant la loi, de la responsabilit

    au regard de la loi, de lquit dans lapplication de la loi, de la sparation despouvoirs, de la participation la prise de dcisions, de la scurit juridique, du refusde larbitraire et de la transparence des procdures et des processus lgislatifs.

    7. LOrganisation des Nations Unies conoit la justice comme un idal deresponsabilit et dquit en ce qui concerne la protection et de revendication desdroits et la prvention et la punition des violations. La justice implique la prise enconsidration des droits de laccus, des intrts de la victime, et du bien-tre de la

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    7/30

    0439530f.doc 7

    S/2004/616

    socit tout entire. Cest un concept enracin dans toutes les cultures et lestraditions nationales, et mme si ladministration de la justice ncessitehabituellement des mcanismes judiciaires formels, les mcanismes traditionnels derglement des diffrends nen sont pas moins eux aussi pertinents. La communautinternationale sefforce depuis plus dun demi-sicle de dfinir collectivement les

    conditions de fond et de procdure que requiert une bonne administration de lajustice.

    8. Le concept d administration de la justice pendant la priode de transition qui est examin dans le prsent rapport englobe lventail complet des divers processus et mcanismes mis en uvre par une socit pour tenter de faire face des exactions massives commises dans le pass, en vue dtablir les responsabilits,de rendre la justice et de permettre la rconciliation. Peuvent figurer au nombre deces processus des mcanismes tant judiciaires que non judiciaires, avec (le caschant) une intervention plus ou moins importante de la communautinternationale, et des poursuites engages contre des individus, des indemnisations,des enqutes visant tablir la vrit, une rforme des institutions, des contrles etdes rvocations, ou une combinaison de ces mesures.

    IV. Fonder lassistance sur les normes internationales

    9. Le fondement normatif de nos efforts pour promouvoir ltat de droit est laCharte des Nations Unies elle-mme, que compltent les quatre piliers du systmejuridique international moderne : la lgislation internationale en matire de droits delhomme6; le droit international humanitaire; le droit pnal international; et le droitinternational des rfugis. Ces sources comprennent les nombreuses normesrelatives aux droits de lhomme et la justice pnale qui ont t labores au coursdes 50 dernires annes par lOrganisation des Nations Unies7. Il sagit l de normesdapplication universelle qui ont t adoptes sous les auspices de lONU et quidoivent donc constituer le fondement normatif de toutes les activits entreprises par

    elle en vue de promouvoir la justice et ltat de droit.10. Les normes de lONU ont t labores et adoptes par les pays du mondeentier et incorpores lensemble des systmes juridiques des tats Membres, queceux-ci soient fonds sur la common law, le droit romain, le droit islamique oudautres traditions juridiques. De la sorte, ces normes possdent une lgitimit donton ne saurait dire quelle caractrise les modles nationaux exports qui, bien tropsouvent, traduisent davantage les intrts ou lexprience propres des donateurs etfournisseurs dassistance que les intrts rels ou les besoins en matire derenforcement du systme juridique des pays bnficiaires. Elles dfinissent en outrele cadre normatif de lengagement de lONU, en cela, par exemple, que sestribunaux ne peuvent en aucun cas autoriser la peine capitale, que les accords de paix entrins par lONU ne peuvent en aucun cas promettre lamnistie pour les

    actes de gnocide, les crimes de guerre, les crimes contre lhumanit ou les atteintesgraves aux droits de lhomme, et que, partout o lONU a reu pour mandatdassumer des fonctions dcisionnelles ou judiciaires, les mcanismes mis en uvre par elle doivent, dans ladministration de la justice, appliquer scrupuleusement lesnormes internationales en matire de droits de lhomme.

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    8/30

    8 0439530f.doc

    S/2004/616

    V. Dfinir le rle des oprations de paix de lONU

    11. Toutes les oprations de paix nont pas pour mandat de soccuper des activitsrelatives ladministration de la justice pendant la priode de transition et ltat dedroit. Les administrations transitoires mises en place au Kosovo (Mission

    dadministration intrimaire des Nations Unies au Kosovo) et au Timor oriental(Administration transitoire des Nations Unies au Timor oriental/Mission dappui desNations Unies au Timor oriental), avaient toutefois des responsabilits directes dansladministration des services judiciaires, de police et pnitentiaires. Ltat de droit etla justice constituaient un important volet dautres missions, notamment celles quiont t envoyes en El Salvador (Mission dobservation des Nations Unies en ElSalvador) et au Guatemala (Mission de vrification des Nations Unies auGuatemala), ainsi que plus rcemment en Cte dIvoire (Mission des Nations Uniesen Cte dIvoire/Opration des Nations Unies en Cte dIvoire), au Libria (Missiondes Nations Unies au Libria) et en Hati (Mission des Nations Unies pour lastabilisation en Hati), preuve de lattention accrue que lONU apporte cesquestions.

    12. Au Sige, lappui aux oprations de paix en ce qui concerne le renforcementde ltat de droit et ladministration de la justice pendant la priode de transitionrevt diffrentes formes : valuation des besoins, planification de la mission,slection et dploiement de fonctionnaires spcialiss, et conseils et soutien fournisaux lments des missions chargs de faire respecter ltat de droit. Sur le terrain,les missions de lONU se sont efforces, entre autres, de renforcer les institutionsnationales charges de faire appliquer la loi et dadministrer la justice, de faciliterles consultations nationales sur la rforme de la justice, de coordonner lassistanceinternationale en matire de renforcement de ltat de droit, dobserver lefonctionnement des tribunaux et de faire rapport ce sujet, de former les magistratset fonctionnaires de lappareil judiciaire national, dappuyer les organismes locauxchargs de la rforme du systme judiciaire, et de conseiller les institutions du paysdaccueil charges de faire respecter la lgalit. Nos oprations ont aid les autorits

    nationales assainir les services de police et la magistrature assise et debout et slectionner les nouveaux fonctionnaires, rdiger une nouvelle constitution, rviser les lois, informer et duquer le public, mettre en place des mdiateurs etdes commissions des droits de lhomme, renforcer les associations davocats pnalistes, instituer un service dassistance juridique, crer des instituts deformation juridique, et accrotre la capacit de la socit civile de contrler lefonctionnement des institutions judiciaires. Les missions de paix ont aussi aid lespays daccueil rparer les violations passes des droits de lhomme, en mettant surpied des tribunaux, des mcanismes dtablissement de la vrit et de rconciliation,et des programmes dindemnisation des victimes.

    13. Ces diffrentes activits sont difficiles en toutes circonstances. Elles le sontdautant plus que lONU est souvent appele planifier les lments des oprations

    de paix relatifs la promotion de ltat de droit dans des dlais extrmement courts,sur la base de brves missions dvaluation auprs du pays hte, et avec unminimum de ressources humaines et financires. Compte tenu du nombre limit defonctionnaires soccupant des questions lies la promotion de ltat de droit et ladministration de la justice pendant une priode de transition, lONU a eu le plusgrand mal mener bien la planification de nouvelles missions, tout en appuyantles activits de renforcement de la lgalit menes dans le cadre des oprations en

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    9/30

    0439530f.doc 9

    S/2004/616

    cours. Le Secrtariat devra sassurer sans tarder que les services centraux desdpartements concerns disposent de ressources suffisantes pour rpondre lademande croissante de soutien aux oprations de paix en ce qui concerne lertablissement de ltat de droit. Jai lintention de demander au Comit excutif pour la paix et la scurit dexaminer ces questions en vue de soumettre aux tats

    Membres des propositions tendant renforcer ces ressources.

    VI. valuer les capacits et les besoins nationaux

    14. Au moment de formuler des recommandations ladresse du Conseil descurit, de planifier le mandat et lorganisation des missions, et de concevoir des programmes dassistance, il est impratif que, tout comme doit le faire le Conseillui-mme, le systme des Nations Unies considre attentivement les besoinsparticuliers de chaque pays daccueil en matire de renforcement de ltat de droit etdadministration de la justice. Nous devons donc prendre en compte quantit defacteurs, comme la nature du conflit initial, les volonts des parties, toutes exactionsmassives commises dans le pass, lexistence de groupes vulnrables, tels que

    minorits ou personnes dplaces, la situation et le rle des femmes, la situation desenfants, les incidences des accords de paix en ce qui concerne la promotion de ltatde droit, et la situation et la nature du systme, des traditions et des institutionsjuridiques du pays.

    15. Malheureusement, lassistance fournie par la communaut internationale enmatire de renforcement de la lgalit na pas toujours t adapte au contexte local.On a trop souvent privilgi les experts, les modles et les solutions de ltranger au dtriment de la recherche damliorations durables et de lacquisition decapacits durables. Certes, les experts, nationaux et internationaux, jouent un rlevital. Mais nous avons appris quune intervention efficace et durable commence parune analyse approfondie des capacits et des besoins nationaux, avec le concoursaussi large que possible des comptences prsentes dans le pays. De plus en plus,

    lONU sintresse des stratgies dvaluation et de consultation mises en uvre par les autorits nationales avec la participation active et concrte de toutes lesparties prenantes au sein de la socit, y compris les fonctionnaires de la justice, lasocit civile, les associations professionnelles, les chefs traditionnels, et desgroupes clefs tels que les femmes, les minorits, les personnes dplaces et lesrfugis. Lvaluation du secteur de la justice est alors effectue sous la direction deladministration nationale, qui mobilise cet effet les juristes nationaux et lance desconsultations et des tudes nationales sur ladministration de la justice pendant la priode de transition. Dans ce cadre, lONU peut faciliter les runions, fournir desconseils dordre juridique et technique, encourager la participation des femmes etdes groupes traditionnellement exclus, appuyer le renforcement des capacits etaider mobiliser les ressources financires et matrielles, tout en laissant auxpartenaires nationaux la matrise du processus et des dcisions.

    16. De mme, les tentatives les mieux abouties en matire dadministration de la justice pendant une priode de transition doivent en grande partie leur succs lampleur et la qualit des consultations menes auprs du public et des victimes.Les consultations locales permettent de mieux comprendre la dynamique desconflits passs, les formes que revt la discrimination et le profil des victimes.Mme si la communaut internationale a, parfois, impos de lextrieur tel ou telmodle dadministration de la justice, on voit se dessiner, dans des pays comme la

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    10/30

    10 0439530f.doc

    S/2004/616

    Sierra Leone et lAfghanistan, une dmarche plus ouverte ayant davantage uncaractre consultatif. Les enseignements tirs des efforts passs dans ce domaineclairent certes la conception des efforts futurs, mais le pass ne peut tre quunguide. Les solutions prconues ne sont gure avises. Mieux vaut utiliserlexprience acquise ailleurs comme une simple base de dpart pour des discussions

    et des dcisions lchelon local.

    VII. Soutenir les partisans locaux de la rforme

    17. En dfinitive, aucune rforme des institutions garantes de ltat de droit,aucune reconstruction de lappareil judiciaire, ni aucune initiative en matiredadministration de la justice pendant une priode de transition na de chancesdaboutir durablement si elle est impose de lextrieur. Le rle de lONU et de lacommunaut internationale devrait tre de se montrer solidaires des initiativeslocales, et non de se substituer elles. On la vu, il est essentiel de sappuyer surune participation relle du public, en associant ces efforts les membres des professions juridiques, les pouvoirs publics, les femmes, les minorits, les groupes

    affects et la socit civile. Dinnombrables projets conus a priori ou imports,aussi mticuleusement rflchis et lgamment organiss quils aient t, ont chousur le plan de la rforme du secteur de la justice. Sans des campagnes desensibilisation et dducation du public et des initiatives visant le consulter, il nefaut pas compter que celui-ci comprenne et soutienne les efforts en faveur dunerforme nationale. Les organisations de la socit civile, les associations nationalesde magistrats et de juristes, les groupes de dfense des droits de lhomme et lesdfenseurs des victimes et des groupes vulnrables doivent tous tre entendus aucours de ce processus. Par-dessus tout, nos programmes doivent viser les partisanslocaux de la rforme, les appuyer et leur donner les moyens dagir. Il faut donc queles oprations de paix aident de manire plus efficace les partenaires nationaux affiner leur propre vision de la rforme, leurs propres priorits, leurs propresconceptions de ladministration de la justice pendant la priode de transition, etleurs propres plans et projets. Le principal rle que nous pouvons jouer est defaciliter les processus par lesquels diverses parties prenantes dfinissent de concertles lments dun plan national en vue de rparer les injustices commises dans lepass, et dinstaurer une justice durable, en accord avec les normes internationales,les traditions juridiques locales et les aspirations nationales. Pour ce faire, nousdevons apprendre mieux respecter et promouvoir les efforts dappropriationlocaux, les dirigeants locaux et les partisans locaux de la rforme, tout en restantfidles aux normes de lOrganisation des Nations Unies.

    18. Les appuis en faveur de la rforme doivent tre cultivs dans toutes lescouches de la socit, y compris les lites, les ex-combattants et les lments (noncriminels) des anciens rgimes qui, tous, doivent avoir la garantie dtre protgsdes reprsailles illicites et injustes et se voir offrir une chance vritable de rintgrer

    la socit. Enfin, dans les situations daprs conflit, et lorsquil sagit de mettre sur pied des mcanismes dadministration de la justice pendant une priode detransition, les victimes constituent un groupe particulirement important. LONUdoit dterminer leurs intrts et en tenir compte lorsquelle conoit et met en uvrede telles mesures. Les victimes et les organisations qui les dfendent mritent que lacommunaut internationale leur prte la plus grande attention.

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    11/30

    0439530f.doc 11

    S/2004/616

    VIII. Comprendre le contexte politique

    19. Si, pour tre efficace, toute stratgie de renforcement de ltat de droit doitncessairement tre axe sur les besoins juridiques et institutionnels, elle doitgalement prendre dment en compte les facteurs politiques. Le rtablissement des

    mcanismes dadministration de la justice, la planification des rformes visant renforcer ltat de droit et la mise en place concerte dappareils judiciairestransitoires sont des mesures vitales pour lintrt public. Leurs aspects, tant politiques que techniques, doivent donc faire lobjet dune consultation et dundbat public vritable. On ne peut raisonnablement valuer les institutions bnficiaires de lassistance internationale sous le seul angle des gains defficacitsans tenir compte de leur attachement la dfense des droits de lhomme ou de lamaturit de leur discours. Dans certains cas, les autorits nationales se sontdavantage soucies de consolider leur pouvoir que de renforcer ltat de droit,souvent peru par elles comme une menace. Mes hauts reprsentants sur le terraindoivent donc semployer appuyer sur le plan politique les rformes relatives ladministration de la justice et au renforcement de ltat de droit. Par leurs bonsoffices, ils peuvent contribuer de manire dterminante donner aux rformateursune place dans le processus politique, protger les institutions charges de faireappliquer la loi des manipulations politiques et mobiliser des ressources pourrenforcer le secteur de la justice.

    20. Or, la communaut internationale a souvent sous-estim le degr de la volont politique ncessaire pour appuyer des rformes efficaces tendant renforcer ltatde droit dans les pays sortant dun conflit, de sorte quelle na pas suffisamment fait pour faciliter les consultations publiques sur les questions relatives la rforme.Cest ainsi que les stratgies et les programmes dassistance en matiredadministration de la justice ont parfois nglig daider les principales partiesprenantes saccorder sur la nature et le rythme des rformes et la mise en place denouvelles institutions. LOrganisation des Nations Unies a l aussi un rle jouer.Tout comme nous avons appuy les consultations nationales sous la forme

    dlections et de rfrendums, nous devons appuyer et faciliter celles qui visent dterminer la politique nationale en ce qui concerne ladministration de la justicependant la priode de transition ou la rforme des institutions garantes de ltat dedroit.

    21. Tout aussi important est le fait que les rformes tendant renforcer ltat dedroit et ladministration de la justice dans la phase de transition ont souvent lieu enmme temps que les premires lections organises aprs le conflit et que lestentatives fragiles pour restaurer la paix. Le succs et la lgitimit de ces processusexigent un calendrier tabli avec soin. La justice et la paix ne sont pas des objectifsantagonistes; au contraire, convenablement mises en uvre, elles se renforcent lunelautre. La question nest donc en aucun cas de savoir sil convient de promouvoir la justice et dtablir les responsabilits, mais bien de dcider quand et comment le

    faire. Il faut reconnatre cet gard que, quelques notables exceptions prs, lesoprations de paix des Nations Unies sont planifies comme des interventions decourte dure, alors que la recherche des responsabilits, le renforcement de ltat dedroit et la promotion de la dmocratie sont des activits de longue haleine. Cest pourquoi lon devrait tenir compte, ds les premiers stades de la planificationstratgique, de la ncessit de procder par tapes et de prvoir lissue de la

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    12/30

    12 0439530f.doc

    S/2004/616

    mission la fourniture dune aide internationale dans ces domaines, notamment en cequi concerne le dveloppement long terme.

    22. Le choix de la date des lections constitue un problme connexe. Lexpriencercente montre que des lections tenues sans prparation suffisante sur le plan

    politique et dans le domaine de la scurit et un dsengagement prmaturpouvaient nuire au renforcement de ltat de droit au lieu de le faciliter. Pourtant, lacommunaut internationale encourage encore parfois la tenue dlections ds la findun conflit dans lespoir quelles confreront une certaine lgitimit aux dirigeants,aux processus et aux institutions politiques. Or, des consultations lectorales prmatures ne peuvent dboucher, au mieux, que sur une dmocratie de faade.Bien souvent, les lections tenues sous haute surveillance interdisent une vritableparticipation de certains groupes clefs, tout en exposant la population des risquesinutiles. Dans dautres cas, les candidats et les partis issus de lancien rgime, peuenclins respecter les principes dmocratiques et les droits de lhomme, mettent profit une consultation prmature pour asseoir leur pouvoir. Dans les cas extrmes,les lections peuvent radicaliser le dbat politique, voire relancer le conflit.

    IX. Adopter des dmarches intgres et complmentaires

    23. Lexprience acquise confirme quen matire de renforcement de ltat de droitet dadministration de la justice pendant la priode de transition, les stratgies aucoup par coup sont voues lchec dans les pays ravags par la guerre ou desatrocits. Pour tre efficaces, les efforts de promotion de ltat de droit et de la justice doivent avoir un caractre global et associer lensemble des institutions, publiques et prives, du secteur de la justice, llaboration et la mise en placedun plan stratgique unique conu et excut linitiative des autorits nationales.Il importe dans ce cadre de prter attention aux normes relatives la justice, aux loisqui les codifient, aux institutions qui les appliquent et aux mcanismes qui lescontrlent, ainsi quaux personnes qui ont besoin dy avoir accs.

    24. Ce sont l des leons durement apprises, la faveur de plusieurs dizainesdannes de prsence de lONU sur le terrain. Dans certains cas, par exemple, lacommunaut internationale a centr son action sur le rtablissement des services depolice, en se dsintressant plus ou moins dautres aspects du secteur de la justice,comme lactivit lgislative, la prvention de la criminalit, le renforcement delappareil judiciaire, lenseignement du droit, la rforme du systme pnitentiaire, lerenforcement des capacits du ministre public, la protection des victimes et laide leur fournir, lappui apport la socit civile, la rglementation sur la nationalit etlidentit et le rglement des litiges relatifs la proprit. Tous ces aspects sontpourtant des facteurs essentiels et interdpendants du respect de la lgalit. Ignorerlun a invitablement pour effet daffaiblir tous les autres.

    25. Dans dautres cas, la communaut internationale sest empresse de prescrire

    un mcanisme transitoire particulier, en mettant laccent sur les poursuites pnales,ou sur la recherche de la vrit, sans donner pralablement aux victimes et aux partenaires nationaux loccasion de dcider de la solution la plus quilibre. Lacommunaut internationale doit comprendre que ladministration de la justicetransitoire exige bien plus que la mise en place de cours et de tribunaux. Lesdifficults propres aux situations daprs conflit obligent concilier divers objectifs,notamment la recherche des responsabilits et de la vrit, lindemnisation des

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    13/30

    0439530f.doc 13

    S/2004/616

    victimes, la prservation de la paix et le renforcement de la dmocratie et de ltatde droit. Toute stratgie globale devrait aussi tre particulirement attentive auxexactions commises lencontre des groupes les plus touchs par le conflit,notamment les minorits, les personnes ges, les enfants, les femmes, lesprisonniers, les personnes dplaces et les rfugis, et prvoir des mesures spciales

    pour assurer leur protection et leur indemnisation dans le cadre des processusjudiciaire et de rconciliation. Ainsi, des dispositions spciales telles que audiences huis clos, prenregistrement des tmoignages, vidoconfrence et recours des pseudonymes peuvent tre utiles pour protger lidentit des mineurs appels tmoigner.

    26. Lorsquil est ncessaire de mettre en place des mcanismes transitoires, ilconvient dadopter une dmarche intgre menant de front les procs en matire pnale, les rparations, la recherche de la vrit, la rforme des institutions, laslection ou la rvocation des fonctionnaires, ou combinant judicieusement cesdiffrents lments. LONU doit procder une planification et des consultations pralables en vue dexaminer les interactions entre diffrents mcanismestransitoires et de sassurer quil ny a pas conflit entre eux. Cest ainsi quon

    saccorde dsormais pour reconnatre que les commissions de vrit peuventcomplter utilement les tribunaux pnaux, comme ce fut le cas en Argentine, auProu, au Timor-Leste et en Sierra Leone. Au Timor-Leste, le Groupe de la luttecontre la criminalit et la corruption a en outre travaill en troite collaboration avecla Commission Accueil, Vrit et Rconciliation, comme le prvoyait le rglement2001/10 de lAdministration transitoire des Nations Unies dans lequel a t dfini lemandat de la Commission.

    X. Remdier labsence de lgalit

    27. Aprs un conflit, il nest pas rare que les textes lgislatifs portent la marquedune accumulation de ngligences et de manipulations politiques, contiennent des

    dispositions discriminatoires et sont rarement conformes aux normes internationalesen matire de droits de lhomme et de justice pnale. Lois dexception et dcretsexcutifs sont souvent monnaie courante. Lorsque des lois appropries sont envigueur, le grand public nen connat pas toujours lexistence et les agents de ltatnont parfois ni les capacits, ni les moyens ncessaires pour les appliquer. Dans la plupart des cas, lappareil judiciaire, les services de police et le systme pnitentiaire ne disposent plus des ressources humaines, financires et matriellesncessaires leur bon fonctionnement. Le conflit et les exactions les onttransforms en instruments de rpression, de sorte quils ont souvent perdu toutelgitimit. De telles situations favorisent invariablement la prolifration des armes,la violence sexuelle et sexiste, lexploitation des enfants, la perscution desminorits et des groupes vulnrables, le crime organis, la contrebande, la traitedtres humains et dautres activits criminelles. Dans de pareils cas, les groupes

    criminels organiss disposent souvent de ressources suprieures celles dugouvernement local et sont mieux arms que les forces de lordre. Restaurer lescapacits et la lgitimit des institutions nationales est une entreprise de longuehaleine. Il faut nanmoins prendre durgence les mesures qui simposent pourrtablir la scurit des personnes, le respect des droits de lhomme et ltat de droit.Cest pourquoi les missions de paix de lONU sont souvent appeles aider remdier labsence de lgalit.

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    14/30

    14 0439530f.doc

    S/2004/616

    28. De fait, nous avons eu parfois la difficile tche de mener des oprations de paix en labsence totale de mcanismes de justice pnale capables de fonctionner.Les membres du personnel des oprations de maintien de la paix sont alorsconfronts des lments criminels se livrant de graves exactions, qui constituentune menace directe pour les civils et pour la mission elle-mme. Les composantes

    militaires des oprations de paix nont gnralement pas la formation, lescomptences, ni les ressources ncessaires pour faire face de telles situations.Dans le mme temps, les composantes civiles, y compris celles qui sont chargesdassurer la police, sont souvent dployes trop lentement et rarement habilites exercer des fonctions excutives, en procdant par exemple des arrestations. Or,cette absence de lgalit peut gravement compromettre le succs de toute oprationde paix. Aussi, lONU devra-t-elle, de concert avec les tats Membres, repenser sesstratgies conues pour remdier labsence dtat de droit, notamment en ce quiconcerne le rle, les capacits et les obligations des composantes militaire et depolice civile.

    29. Dans certaines situations extrmes, la police civile des missions de paix a tinvestie de pouvoirs excutifs, notamment en matire darrestation et de dtention.

    Si, dans la plupart des cas, la police civile des Nations Unies se contente de fournirun appui et des conseils oprationnels et na aucun pouvoir excutif, elle doitassumer des responsabilits de plus en plus complexes. Elle joue partant un rle clefdans le rtablissement de ltat de droit et mriterait dtre mieux soutenue et dotede ressources accrues. Aprs un conflit, la seule prsence dlments des forces delordre dans les rues peut rduire considrablement les cas de pillage, deharclement, de viol, de vol et de meurtre. Cest un domaine dans lequel il serait bon que lONU, forte de quelque 20 ans dexprience, entreprenne un examenapprofondi en vue denvisager des moyens de renforcer son action.

    30. Toutefois, mme si les activits de police sont, on vient de le voir, essentielles la continuit de ltat de droit aprs un conflit, il importe de soutenir aussi lesautres institutions et rouages du systme judiciaire. Le renforcement des capacits

    de la police (ou de la police civile des Nations Unies) en matire darrestation ne peut contribuer au rtablissement de ltat de droit en labsence de lgislationmoderne, de centres de dtention traitant humainement les dtenus, dots deressources suffisantes, adquatement contrls et capables daccueillir les personnesarrtes, dun appareil judiciaire en mesure de juger ces personnes dans le respectde la loi et sans dlai, et davocats pour les dfendre. Des progrs ont t accomplisdans ce domaine au cours des dernires annes; cest ainsi quon a mis en placeplusieurs projets spciaux visant laborer des codes provisoires, des directives etdes orientations en matire de renforcement de ltat de droit, conformment auxrecommandations formules dans son rapport par le Groupe dtude sur lesoprations de paix des Nations Unies8. Bon nombre de ces nouveaux outils serontprts dans les prochains mois.

    31. La cration de commissions nationales des droits de lhomme indpendantesest une mesure complmentaire qui promet de faciliter le rtablissement de ltat dedroit, le rglement pacifique des litiges et la protection des groupes vulnrableslorsque le systme dadministration de la justice nest pas encore pleinementoprationnel. De nombreuses commissions de ce type ont t cres dans dessocits en proie un conflit ou sortant dun conflit, avec notamment pour mandatdexercer des fonctions quasi-judiciaires, de rgler le conflit et de mettre en placedes programmes de protection de la population. Des exemples rcents en sont les

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    15/30

    0439530f.doc 15

    S/2004/616

    institutions nationales de dfense des droits de lhomme cres en Afghanistan, auRwanda, en Colombie, en Indonsie, au Npal, Sri Lanka et en Ouganda dontchacune joue prsent un rle important dans ce domaine. Par ailleurs, lONU a de plus en plus souvent recours des mcanismes exceptionnels d'tablissement desfaits, tels que les commissions denqute internationales ad hoc cres pour juger les

    crimes de guerre commis dans lex-Yougoslavie, au Rwanda, au Burundi et auTimor-Leste.

    32. De plus, les mesures visant acclrer le rtablissement de ltat de droitdoivent aller de pair avec des plans de rinsertion des civils dplacs, ainsi que desex-combattants. Les processus de dsarmement, de dmobilisation et de rinsertionjouent un rle clef dans le retour une situation normale lissue dun conflit. Pourles populations traumatises par la guerre, ces programmes sont lun des signes les plus tangibles du rtablissement progressif de la paix et de la scurit. De mme,des programmes spciaux sont ncessaires pour faciliter le retour des personnesdplaces. Conues avec soin, des mesures damnistie peuvent contribuer au retouret la rinsertion de ces deux groupes et mritent donc dtre encourages, mais,nous lavons vu, elles ne doivent en aucun cas tre utilises pour excuser des actes

    de gnocide, des crimes de guerre, des crimes contre lhumanit ou des atteintesgraves aux droits de lhomme.

    33. Enfin, il convient de mettre en place des garanties plus efficaces, de faon queles interventions mmes qui visent protger les groupes vulnrables et victimesdexactions, notamment les femmes et les enfants, naboutissent pas de nouvellesexactions. Dans de telles situations, il nest pas rare que les femmes soient la foismaltraites dans leur foyer et prises pour cibles dans la vie publique. La lutte contreles violences sexuelles, lexploitation et la perscution dont ces groupes sont bientrop souvent victimes dans les situations de conflit et daprs conflit exige descomptences, des ressources et des mcanismes particuliers pour sassurer que lesforces de lordre, les membres du personnel des oprations de maintien de la paix etles autres acteurs qui sont en contact avec eux ne contribuent ou najoutent pas

    involontairement leurs souffrances. Il est galement essentiel que ceux qui tententde les perscuter ou de les exploiter aient rpondre de leurs actes. En effet, leprincipe mme de ltat de droit est que nul nest au-dessus des lois, et le personneldes oprations de maintien de la paix ne fait pas exception la rgle. Cest pourquoi jai publi une circulaire sur les dispositions spciales visant prvenirlexploitation et la violence sexuelles (ST/SGB/2003/13), dfinissant des rgles deconduites minimales applicables lensemble du personnel de lONU, ainsi que lesmesures ncessaires pour prvenir lexploitation et la violence sexuelles.

    XI. Renforcer les systmes nationaux dadministrationde la justice

    34. Certes, la communaut internationale est tenue dintervenir directement pourassurer la protection des droits de lhomme et la scurit des personnes lorsquunconflit a sap ou mis en chec les institutions nationales charges de faire respecterla lgalit, mais aucune mesure spciale, transitoire ou impose de lextrieur neremplacera jamais un systme judiciaire national efficace. Cest pourquoi, depuis plusieurs dcennies, un certain nombre dorganismes des Nations Unies aident

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    16/30

    16 0439530f.doc

    S/2004/616

    divers pays renforcer leur propre systme dadministration de la justiceconformment aux normes internationales.

    35. Les stratgies de renforcement des systmes nationaux dadministration de la justice doivent, pour tre efficaces, tenir dment compte des lois, des processus

    (formels et informels) et des institutions (publiques et prives). Il est essentiel que lalgislation soit conforme au droit international relatif aux droits de lhomme etadapte la situation et aux besoins actuels du pays concern. Au cur de toutsystme fond sur la primaut du droit, il y a un appareil judiciaire fort, indpendantet dot des pouvoirs, des ressources financires, du matriel et des comptences quilui sont ncessaires pour protger les droits de lhomme dans le cadre deladministration de la justice. Tout aussi importantes sont les autres institutions dusecteur de la justice : il faut notamment des services de police lgaux, des prisonstraitant les dtenus humainement, un ministre public quitable et des associationsdavocats pnalistes comptentes (institutions qui, bien quindispensables, sontsouvent oublies). En dehors de la sphre pnale, il importe galement de prvoirdes mcanismes juridiques capables de juger les litiges civils, notamment en matirede proprit, de donner suite aux plaintes administratives et aux plaintes relatives

    la nationalit et la citoyennet, et de rgler les autres problmes juridiquesfondamentaux qui surgissent au lendemain dun conflit. Un systmedadministration de la justice pour mineurs doit tre mis en place de faon que lesdlinquants juvniles soient traits comme il convient, dans le respect des normesinternationales pertinentes. Les institutions du secteur de la justice doivent treattentives aux sexospcificits et la rforme de ce secteur prendre galement encompte les femmes et leur confier des responsabilits accrues. Lducation et laformation dans le domaine du droit et lappui apport lorganisation de lacommunaut juridique, notamment par lintermdiaire des barreaux davocats, sontdimportants moyens de favoriser un renforcement durable de la justice.

    36. Nos programmes doivent galement faciliter laccs la justice, en levant lesobstacles dordre culturel, linguistique, conomique, logistique ou sexiste qui sont

    monnaie courante. Les programmes en matire dassistance juridique et dereprsentation publique jouent un rle essentiel dans ce domaine. De plus, tout enaccordant une attention particulire linstauration dun systme dadministrationde la justice efficace et respectueux des normes internationales, il est indispensable,en particulier dans un premier temps, de rechercher les moyens dassurer le bonfonctionnement de mcanismes complmentaires et ayant un caractre moinsformel. Les commissions nationales indpendantes pour les droits de lhomme peuvent jouer un rle essentiel en ce qui concerne ltablissement desresponsabilits, les indemnisations, le rglement des litiges et la protection de lapopulation pendant la priode de transition. De mme, il convient daccorder toutelattention quils mritent aux mcanismes traditionnels autochtones et informels enmatire dadministration de la justice ou de rglement des litiges, afin quilspuissent conserver leur rle souvent essentiel, en se conformant la fois aux normes

    internationales et la tradition locale. Dimportantes fractions de la socit risquentde ne pas avoir accs la justice sil nest pas tenu compte de leur existence ou deleurs dcisions. Aprs un conflit, en particulier, les groupes vulnrables, exclus,victimes dexactions ou marginaliss doivent pouvoir participer eux aussi audveloppement de ce secteur et bnficier de laction des nouvelles institutions.Dans de telles situations, les mesures visant assurer la prise en compte dessexospcificits dans le secteur de la justice sont dune importance vitale. En ce qui

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    17/30

    0439530f.doc 17

    S/2004/616

    concerne les enfants, il convient galement dappuyer les nouvelles institutionscharges de leur protection et de la justice pour mineurs, en vue notammentdadopter des mesures pnales autres que la dtention et de renforcer les capacitsdes institutions juridiques dans le domaine de la protection des enfants.

    37.

    Lexprience rcemment acquise dans divers pays donne penser que laralisation de ces objectifs complexes est facilite par la mise sur pied dun processus national, guid par un plan national pour la justice et conduit par desinstitutions nationales indpendantes cres cet effet par exemple descommissions judiciaires ou juridiques. Le soutien que nous apportons cesprocessus et ces organes peut aider garantir que les activits de dveloppementde ce secteur disposeront des ressources ncessaires, seront convenablementcoordonnes, conformes aux normes internationales et menes linitiative et sousla direction des autorits nationales. Lorsque des moyens importants sont de surcrotmis en uvre en vue de soutenir le renforcement des capacits dans le secteur de la justice, les oprations des Nations Unies ont les meilleures chances de contribuer promouvoir durablement la justice et ltat de droit.

    XII. Tirer les enseignements de lexpriencedes tribunaux pnaux ad hoc

    38. Au cours de ces 10 dernires annes, lONU a cr ou aid crer toutessortes de juridictions pnales spciales. Ce faisant, elle sest efforce de faireavancer la ralisation dun certain nombre dobjectifs, parmi lesquels : traduire en justice les responsables de graves violations des droits de lhomme et du droithumanitaire; mettre un terme ces violations et empcher quelles se reproduisent;rendre justice et dignit aux victimes; tablir lhistorique des vnements passs; promouvoir la rconciliation nationale; rtablir ltat de droit; et contribuer larestauration de la paix. Divers modles institutionnels ont t conus cet effet.Parmi eux figurent les tribunaux pnaux internationaux ad hoc pour lex-

    Yougoslavie (Tribunal pnal international pour lex-Yougoslavie) et pour le Rwanda(Tribunal pnal international pour le Rwanda) tablis par le Conseil de scurit entant quorganes subsidiaires de lONU; un tribunal mixte pour la Sierra Leone, cr par un trait; un tribunal mixte pour le Cambodge, dont la cration a t proposedans le cadre dune loi nationale spcialement promulgue conformment untrait; un tribunal mixte (organis comme un tribunal dans un tribunal ) sous laforme dune chambre spciale du Tribunal dtat de Bosnie-Herzgovine; un groupedot dune comptence exclusive pour les crimes graves au Timor-Leste, institu parlAdministration transitoire des Nations Unies au Timor-Leste; la dsignation dejuges et de procureurs internationaux sigeant aux tribunaux du Kosovo en vertu desrglements promulgus par la Mission dadministration intrimaire des NationsUnies au Kosovo; et une commission denqute sur les groupes de scurit illiciteset les polices prives clandestines au Guatemala quil est prvu de crer en vertudun accord entre lONU et le Guatemala, sous la forme dun groupe internationaldenqute et de mise en accusation relevant du droit interne guatmaltque. Desdiscussions sont en cours concernant les termes de cet accord.

    39. Les procs en matire pnale peuvent jouer un rle important dans les priodesde transition. Ils tmoignent de la rprobation publique des comportementscriminels. Ils peuvent tre un moyen direct damener les auteurs dexactions

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    18/30

    18 0439530f.doc

    S/2004/616

    rendre compte de leurs actes et loccasion pour les victimes de voir leursperscuteurs dhier rpondre de leurs crimes et dobtenir ainsi une certaine forme dejustice. Dans la mesure o les rgles de procdure pertinentes autorisent les victimes prsenter leurs vues et leur proccupations devant le tribunal, ils peuventgalement aider celles-ci reconqurir leur dignit. Les procs au pnal peuvent

    aussi contribuer renforcer la confiance du public dans la capacit et la volont deltat de faire appliquer la loi. Ils peuvent en outre aider les socits sortir dunepriode de conflit en tablissant un compte rendu dtaill et digne de foi dincidentset dvnements particuliers. Ils peuvent aider discrditer les lments extrmistes,de telle faon que ceux-ci soient exclus des processus politiques nationaux,contribuer la restauration de lordre civil et de la paix, et avoir un effet dissuasif.Il est cependant plus difficile de raliser et concilier les diffrents objectifs de la justice pnale, dont toutes sortes de contraintes limitent lexercice effectif dans lessituations de transition, quil sagisse du manque de ressources, du trop grandnombre daffaires ou de lquilibre des forces politiques.

    40. Certes, cest lappareil judiciaire national quil revient en premier dtablirles responsabilits. Mais lorsque les autorits nationales refusent ou sont incapables

    de poursuivre les auteurs dexactions sur leur territoire, la communautinternationale a un rle dcisif jouer. La cration et le fonctionnement destribunaux pnaux internationaux ou mixtes qui ont vu le jour au cours de ces 10dernires annes en est une illustration saisissante. Ces tribunaux reprsententautant davances historiques dans les efforts pour amener les dirigeants civils etmilitaires rpondre de graves violations des droits de lhomme et du droitinternational humanitaire. Ils ont fait la preuve quil est possible de rendre la justiceet dinstruire des procs quitables de manire efficace lchelon internationalaprs leffondrement du systme judiciaire national. Point plus important encore, ilstmoignent dune tendance croissante au sein de la communaut internationale ne plus tolrer limpunit et lamnistie et semployer instaurer une lgalitinternationale. Quelles que soient leurs limites et leurs imperfections, les tribunauxpnaux internationaux ou mixtes ont chang le visage de la justice internationale et

    contribu luniversalisation de ltat de droit.41. Les premiers tribunaux pnaux internationaux modernes, le Tribunal pnalinternational pour lex-Yougoslavie et le Tribunal pnal international pour leRwanda, ont jou un rle crucial en faisant progresser la cause de la justice danslex-Yougoslavie et au Rwanda. De fait, sans leur cration, la justice aurait faitmassivement dfaut dans les pays quils desservent, comme dans les pays placssous la juridiction des tribunaux mixtes, dans lesquels il faut reconnatre desvariantes du modle initial. Mais leur contribution a aussi un caractre plus gnral,puisquen laborant une riche doctrine dans le domaine du droit pnal international,ils renforcent ce pilier majeur du rgime juridique international. Grce leursdlibrations, les efforts pour amener par des moyens lgaux les auteurs dexactions rpondre de leurs actes gagneront en clart sur des questions telles que la

    qualification du viol comme crime de guerre et crime contre lhumanit, leslments constitutifs du gnocide, la dfinition de la torture, la nature de laresponsabilit pnale individuelle, la doctrine de la responsabilit ducommandement et les peines appliquer. Qui plus est, ces organismes ont inspir lacration de tribunaux mixtes dans dautres pays.

    42. Certes, ces avances ont eu un cot important. Les deux tribunaux spciauxsont devenus de vastes institutions, dotes elles deux de plus de 2 000 postes et

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    19/30

    0439530f.doc 19

    S/2004/616

    dun budget annuel global suprieur un quart de milliard de dollars soit plus de15 % du montant total du budget ordinaire de lOrganisation. Mme si lexamendaffaires complexes de cette nature serait extrmement coteux dans nimportequel systme juridique, et mme si lon ne peut pas mesurer linfluence et lactionde ces tribunaux sous langle purement financier, la simple disproportion entre les

    cots et le nombre de cas traits soulve de srieuses questions. La question descots et de lefficacit a t galement une source de proccupations lors daffaires portes devant les tribunaux mixtes. Dans la recherche dune solution ces problmes de cot, il est particulirement important de ne pas perdre de vue lancessit dinstaurer un systme dadministration de la justice efficace.

    43. Compte tenu notamment du cot lev des tribunaux initiaux, les mcanismesde financement des tribunaux mixtes pour la Sierra Leone et le Cambodge ont texclusivement fonds sur des contributions volontaires. Si la viabilit dun telsystme reste vrifier dans le cas des chambres spciales, sagissant du Tribunalspcial pour la Sierra Leone, mes doutes quant la viabilit et la scurit de sonfinancement par des contributions volontaires se sont rvls justifis. Moins dedeux ans aprs son entre en activit, et au moment mme o les procs allaient

    commencer, le Tribunal a connu une grave crise financire9

    . Il importe donc quetout futur mcanisme financier assure de manire continue une source definancement suffisante pour nommer des magistrats et des fonctionnaires, passer descontrats de services, acheter du matriel et financer les enqutes, les poursuites etles procs, et ce dans les meilleurs dlais. Cest pourquoi il reste ncessaire dans de pareils cas de recourir des contributions obligatoires. Le bon fonctionnementdorganes judiciaires ne peut dpendre entirement de financements volontairesalatoires.

    44. Le fait que les tribunaux pour la Yougoslavie et le Rwanda sont situs lextrieur des pays o les crimes ont t commis leur a permis de disposer demoyens oprationnels mieux adapts et a aid prserver leur scurit et leurindpendance. Toutefois, implanter les tribunaux sur le territoire des pays concerns

    prsente un certain nombre dimportants avantages, ds lors que cette scurit etcette indpendance sont convenablement assures : en particulier, les contacts avecla population locale sont facilits, les lments de preuve et les tmoins sont plus proches et les victimes ont un meilleur accs au tribunal. Les victimes et leurfamille peuvent ainsi venir tmoigner aux procs durant lesquels leurs perscuteursont rpondre de leurs actes. Les tribunaux ad hoc situs dans les pays concernssont galement mieux mme de contribuer au renforcement des capacitsnationales, et il leur est possible de lguer leurs ressources physiques (y compris les btiments, le matriel et les installations) aux systmes judiciaires nationaux etdamliorer les comptences de leur personnel. Les membres du personnelinternational de ces tribunaux travaillent aux cts de leurs homologues locaux, cequi peut tre loccasion dune formation en cours demploi des juristes,fonctionnaires et employs nationaux. De tels avantages, lorsque sy ajoutent des

    mesures spcialement conues pour tenir le public inform et des techniquesefficaces de renforcement des capacits, peuvent reprsenter un bnfice durablepour les pays concerns.

    45. Des enseignements ont galement t tirs en ce qui concerne les dlais de prparation et la dure des procs. Quantit de suspects prsents devant lun oulautre des deux tribunaux spciaux ont d passer une longue priode en dtentionen attendant le dbut de leur procs. Nombre de procs instruits par ces deux

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    20/30

    20 0439530f.doc

    S/2004/616

    tribunaux ont demand un laps de temps considrable, en raison notamment desdifficults que soulvent les poursuites pour crimes internationaux. Les rglementsde procdure des deux tribunaux internationaux spciaux ont t rviss de faon rduire les dlais. Lorsquil a examin le fonctionnement des deux tribunauxspciaux en 1999, le groupe dexperts que jai tabli a recommand que des mesures

    soient prises pour rduire la dure des procs et en acclrer linstruction, et que les juges jouent un rle actif dans la procdure et exercent un contrle important surson droulement. Il est donc hautement souhaitable que les personnes dsignes,lues ou nommes aux fonctions de juge au sein dun tribunal spcial ou mixtepossdent une vaste exprience des procs au pnal, de prfrence en tant que juge. cet effet, les tats pourraient organiser le droulement des carrires de leursmagistrats nationaux dune manire qui facilite le dtachement de ces derniersauprs de cours ou tribunaux internationaux et prenne pleinement en compte les priodes de service accomplies au sein de telles institutions. De plus, juger desaffaires pnales internationales est une tche ardue et prouvante, comme entmoigne le nombre lev de vacances fortuites constat dans lun et lautre destribunaux. Il est par consquent essentiel que ne soient dsignes, lues ou nommespour servir comme juges dans un tribunal international ou un tribunal mixte que des personnes en bonne sant. cet gard, il serait peut-tre bon denvisager aussidimposer aux magistrats une limite dge, comme cela se fait dans nombre de juridictions nationales.

    46. Au bout du compte, dans les pays se relevant dun conflit, la grande majoritdes auteurs de graves violations des droits de lhomme et du droit internationalhumanitaire ne seront jamais jugs, ni par une instance internationale, ni par untribunal national. Cest pourquoi la politique suivre en matire de poursuites doitviser des objectifs stratgiques, en se fondant sur des critres clairs et en tenantcompte du contexte social. Une stratgie de communication efficace doit clairer lesattentes du public. Des programmes doivent tre mis en place pour protger et aiderles femmes victimes de violences sexuelles et pour protger les tmoins. Il est enoutre essentiel que, ds la cration de tout nouveau tribunal international ou mixte,

    on rflchisse, en priorit, aux modalits de sa dissolution et ce que lon entendlguer au pays concern.

    47. De plus, il peut tre ncessaire de mettre en place dautres mcanismestransitoires dadministration de la justice pour remdier aux limites propres la justice pnale pour faire ce que les tribunaux ne font pas ou font mal en particulier, contribuer faire droit au souci naturel des parents des victimes deretrouver les personnes qui leur sont chres et de savoir ce qui leur est arriv; veiller ce que les victimes et leurs parents obtiennent rparation des torts quils ont subis;rpondre la ncessit dtablir un historique complet et dtaill des vnementsqui se sont produits durant le conflit et de leurs causes; promouvoir la rconciliationnationale et encourager lmergence de forces modres; et sassurer de larvocation des fonctionnaires du systme judiciaire et des services de scurit qui

    pourraient avoir t complices de violations des droits de lhomme ou avoir pris part la rpression.

    48. Enfin, les efforts pour traduire en justice les auteurs dexactions passes nontpas t exclusivement le fait des juridictions des pays sur le territoire desquels cesactes ont t commis ou des tribunaux internationaux. On a vu ces dernires annesun nombre sans prcdent daffaires tre juges par les tribunaux nationaux de paystiers au nom du principe de luniversalit, un lment de la doctrine du droit

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    21/30

    0439530f.doc 21

    S/2004/616

    international jusque-l peu utilis qui veut que la gravit de certains crimes est telleque tous les pays ont un intrt poursuivre leurs auteurs. Une telle comptenceuniverselle a t invoque, avec des succs divers, dans des affaires concernant desexactions passes commises aux quatre coins du monde. Cest juste titre,assurment, que lexercice dune telle comptence exceptionnelle est rserv pour

    les crimes les plus graves et pour les seuls cas o le systme judiciaire du pays qui at le thtre de ces violations est incapable de poursuivre leurs auteurs ou syrefuse. Qui plus est, il soulve des questions complexes sur le plan juridique, politique et diplomatique. Nanmoins, ce principe est ancr dans le droitinternational et codifi par les instruments des Nations Unies, et il offre lacommunaut internationale un ventuel important recours dans sa lutte contrelimpunit. Cest pourquoi les tentatives qui ont t faites pour linvoquer au coursdes 10 dernires annes mritent dtre soigneusement tudies et analyses, en vuede trouver des moyens de renforcer et prserver cet important aspect du principe dejustice et de responsabilit.

    XIII. Conforter la Cour pnale internationale dans son rle

    49. nen pas douter, la cration de la Cour pnale internationale est la plusimportante des rcentes avances dans la longue lutte de la communautinternationale pour promouvoir la cause de la justice et de la lgalit. Le Statut deRome est entr en vigueur le 1er juillet 2002, mais dj le poids de la Cour se faitfortement sentir, car son existence avertit les ventuels contrevenants que limpunitnest pas assure et incite promulguer des lois nationales sanctionnant les crimesinternationaux les plus graves. Quelque 94 pays ont dores et dj ratifi le Statut deRome. Il est prsent crucial que la communaut internationale fasse en sorte quecette institution naissante dispose des ressources, des capacits, de linformation etdu soutien qui lui sont ncessaires pour diligenter des enqutes, poursuivre les personnes qui portent la responsabilit principale des crimes de guerre, des crimescontre lhumanit et des actes de gnocide, et juger ces personnes, lorsque lesautorits nationales sont incapables de le faire ou sy refusent. Le Conseil descurit a un rle particulier jouer cet gard, habilit quil est saisir la Courpnale internationale, mme lorsque les pays concerns ne sont pas des tats partiesau Statut de la Cour. Dans le mme temps, je demeure convaincu que tous les tatsMembres de lOrganisation des Nations Unies qui ne lont pas encore fait doiventprendre des dispositions en vue de ratifier le Statut de Rome aussi rapidement quepossible.

    XIV. Faciliter ltablissement de la vrit

    50. Les commissions de vrit sont un autre mcanisme utile pour rparer desviolations passes des droits de lhomme. Il sagit dorganes officiels, temporaires etnon judiciaires chargs dtablir les faits, qui enqutent sur un ensemble datteintesaux droits de lhomme ou au droit humanitaire commis au cours dun certainnombre dannes. Leur travail est centr sur les victimes et aboutit la rdactiondun rapport final exposant les faits constats et les recommandations de lacommission. Plus dune trentaine de ces commissions ont dj t cres,notamment en Argentine, au Chili, en Afrique du Sud, au Prou, au Ghana, auMaroc, El Salvador, au Guatemala, au Timor-Leste et en Sierra Leone. Les

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    22/30

    22 0439530f.doc

    S/2004/616

    commissions institues El Salvador, au Guatemala, au Timor-Leste et en SierraLeone ont bnfici du large concours et dun important soutien de lONU, et desmissions envoyes par celle-ci au Libria et en Rpublique dmocratique du Congosemploient aujourdhui faciliter les consultations en vue de la cration decommissions de vrit dans ces pays. Ces commissions peuvent tre dun grand

    secours en aidant les socits se relevant dun conflit tablir les faits en ce quiconcerne les violations passes des droits de lhomme, dterminer lesresponsabilits, prserver les lments de preuve, identifier les auteurs desexactions et recommander des mesures de rparation et des rformesinstitutionnelles. Elles peuvent aussi offrir aux victimes une tribune depuis laquellecelles-ci interpellent directement la nation en exposant leur histoire personnelle etfaciliter le dbat public sur la manire de refermer les blessures du pass.

    51. Parmi les facteurs pouvant limiter ces avantages potentiels figurent la faibleorganisation de la socit civile, linstabilit politique, le fait que victimes ettmoins ont peur de parler, un systme judiciaire affaibli ou corrompu, le manque detemps pour mener bien les enqutes, la mfiance du public et linsuffisance desressources financires. Le travail des commissions de vrit est invariablement

    compromis lorsque leur cration se fait dans la hte ou dans un climat politis. Un processus consultatif visant prendre en compte les vues du public en ce quiconcerne leur mandat et le choix de leurs membres apparat prfrable. Pour russir,ces commissions doivent jouir dun degr dindpendance lev et avoir tconstitues sur la base de critres et de processus de slection crdibles. Devigoureuses stratgies dinformation et de communication sont indispensables pourgrer les attentes du public et des victimes et renforcer la crdibilit et latransparence du processus. Lattention porte aux problmes des femmes et lasympathie lgard des victimes des exactions ou de la discrimination ne doivent pas tre mises en doute. Enfin, nombre de ces commissions auront besoin pourfonctionner que la communaut internationale les soutienne vigoureusement, tout enrespectant leur indpendance sur le plan oprationnel.

    XV. Assainir la fonction publique

    52. Assainir la fonction publique en rvoquant les lments qui ont pris part auxexactions passes est un autre aspect important de ladministration de la justicependant la priode de transition pour lequel laide de lONU a souvent t sollicite.Les mcanismes tablis cet effet contribuent la stabilit de ltat de droit dans lespays se relevant dun conflit. En Bosnie-Herzgovine, au Kosovo, au Timor-Leste,au Libria, comme aujourdhui Hati, les missions envoyes par lONU ont tappeles appuyer de diverses faons ces oprations dassainissement. Nous avonsaid, selon les cas, laborer des normes professionnelles, mettre sur pied desmcanismes de supervision et dfinir des critres objectifs et conformes la loi.Lassainissement de la fonction publique implique habituellement un processus

    formel visant identifier et rvoquer les fonctionnaires responsables dexactions, en particulier dans les services de police, les services pnitentiaires, larme et lamagistrature. Les lments faisant lobjet dune enqute se voient notifier lesallgations formules leur encontre et ont la possibilit dy rpondre devantlorgane responsable. Les accuss ont en gnral le droit dtre informs dans deslimites raisonnables des charges qui psent sur eux, le droit de se dfendre et le droitde faire appel dune dcision contraire auprs dun tribunal ou dun autre organisme

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    23/30

    0439530f.doc 23

    S/2004/616

    indpendant. Ces garanties dune procdure rgulire distinguent les processusdassainissement officiels des purges gnrales pratiques dans certains pays, o desrvocations et destitutions collectives sont prononces sur la base, non pas dudossier personnel, mais de laffiliation un parti, de lopinion politique ou des liensavec une ancienne institution publique.

    53. Nous avons tir de nombreux enseignements du travail accompli dans cesdomaines. Premirement, quil sagisse dorganismes administratifs oudorganismes quasi judiciaires, les mcanismes dassainissement lgitimes doiventtre mis en uvre avec le souci de respecter la sensibilit des victimes et les droitsfondamentaux des personnes souponnes davoir commis des exactions.Deuximement, il convient de consulter sans tarder la socit civile et de tenir le public inform. Troisimement, les oprations dassainissement doivent tenircompte aussi des comptences techniques, des qualifications objectives et delintgrit des intresss. Quatrimement, toutes les personnes faisant lobjet de cesmesures, quelles soient dj en fonction ou candidates au recrutement, doivent bnficier de garanties de procdure. Enfin, ces mcanismes, lorsquils existent et paraissent sacquitter de leur tche de manire quitable, efficace et conforme aux

    normes internationales en matire de droits de lhomme, peuvent jouer un rleimportant en renforant la lgitimit des organismes officiels, en restaurant laconfiance du public et en consolidant ltat de droit. Ils mritent donc de recevoir, sincessaire, le soutien technique et financier de la communaut internationale.

    XVI. Mettre en uvre les rparations

    54. LONU a galement t saisie de la question des rparations aux victimes. lasuite de la premire guerre du Golfe, la Commission dindemnisation des NationsUnies a trait prs de 2,5 millions de demandes dindemnisation et vers plus de18 milliards de dollars aux victimes de linvasion et de loccupation illgales duKowet par lIraq. La Commission des droits de lhomme a entrepris dlaborer des

    Principes fondamentaux et directives concernant le droit un recours et rparation des victimes de violations du droit international relatif aux droits delhomme et du droit international humanitaire . Dans le cadre des oprations depaix menes partout dans le monde, le personnel de lONU aide les tats mettresur pied des programmes dindemnisation pour faire face aux problmesfrquemment rencontrs aprs un conflit, comme la perte de leurs biens par les personnes dplaces et les rfugis. Lorsque des atteintes massives aux droits delhomme ont t commises, les tats ont en effet lobligation non seulement de poursuivre les responsables, mais aussi dagir au nom des victimes, en veillantnotamment ce que celles-ci obtiennent rparation. Les programmesdindemnisation des victimes peuvent tre un complment efficace et rapide laction des tribunaux et des commissions de vrit, en offrant des rparationsconcrtes, en favorisant la rconciliation et en rtablissant la confiance des victimes

    dans ltat. Les rparations peuvent comporter aussi des lments non pcuniaires,comme le rtablissement des victimes dans leurs droits lgaux, des programmes derinsertion, ou des mesures symboliques telles quexcuses officielles, monuments oucrmonies commmoratives. Une autre forme de rparation souvent utilise dansles pays sortant dun conflit est le rtablissement des droits de proprit, ou dfautune simple indemnisation. Les rparations matrielles sont peut-tre celles quisoulvent le plus de difficults, en particulier lorsquelles font lobjet de vastes

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    24/30

    24 0439530f.doc

    S/2004/616

    programmes publics. Des dcisions difficiles doivent tre prises en ce qui concernenotamment les personnes qui figureront parmi les victimes indemniser, le montantdes rparations, les types de prjudices qui seront couverts, la manire de quantifierles prjudices et les critres utiliser pour comparer et indemniser les diffrentstypes de prjudices et rpartir les rparations.

    55. Il est peu probable quune seule forme de rparation donne satisfaction auxvictimes. Un ensemble judicieusement conu de mesures est le plus souventindispensable, en complment du travail des juridictions pnales et des commissionsde vrit. Quel que soit le mcanisme dadministration de la justice adopt pendantla priode de transition et de quelque faon que lon conoive les programmes derparation complmentaires, lexigence de justice et les impratifs de la paiximposent de faire quelque chose pour ddommager les victimes. Les juges destribunaux pour la Yougoslavie et le Rwanda ont du reste eux-mmes reconnu cettencessit et suggr que lONU envisage de crer cet effet un mcanisme spcialfonctionnant paralllement aux tribunaux10.

    XVII. Coordonner nos efforts56. Ladministration de la justice pendant la priode de transition et lerenforcement de ltat de droit sont de vastes domaines dintervention qui retiennentlattention de lONU depuis plusieurs dcennies11, et qui mobilisent un nombre plusgrand encore dacteurs en dehors de lOrganisation. Il est donc particulirementimportant dassurer une coordination efficace des activits dans ce domaine.

    57. Cest ainsi quen 2002, le Comit excutif de lONU pour la paix et la scurita approuv le rapport final de lquipe spciale interinstitutions charge dexaminerla manire dont lONU aborde les questions relatives la justice et ltat de droitdans le cadre de ses oprations de paix12. Lquipe spciale a constat que lesystme des Nations Unies13 disposait de ressources et de comptences riches etvaries en matire de renforcement de ltat de droit, tout en relevant certaineslacunes14. Elle a formul des recommandations sur les meilleurs moyens de mettre profit ces ressources et celles dentits extrieures lONU de manire quelOrganisation puisse mieux faire face aux problmes lis ltat de droit dans lecadre de ses oprations de paix. Le rapport de lquipe spciale dresse un catalogueutile des ressources existant au sein du systme et se rvle dores et dj dun prcieux secours pour la coordination de nos efforts. Un rseau de coordonnateurs pour les questions relatives ltat de droit, compos des spcialistes reprsentant11 dpartements et organismes, a t ultrieurement cr au Sige en vue de faciliterla coordination sur ces questions et de renforcer lappui fourni par lOrganisation pour les aspects des oprations de paix concernant ltat de droit. Il reste encore beaucoup faire. Des outils et des mcanismes additionnels sont notammentncessaires pour promouvoir lgalit des sexes devant la justice. Il nexiste

    toujours pas ce jour de base de donnes commune des instruments, outils, donnesdexprience et meilleures pratiques accumuls par le systme, et les bureauxextrieurs ne peuvent pas accder ces ressources par lInternet. Le dveloppementde ces capacits sera lune des priorits de nos activits futures. Nous prvoyonscette anne de publier un certain nombre de nouveaux outils sur les politiques derenforcement de ltat de droit et dorganiser des runions techniques ayant pourobjet de recueillir et danalyser des donnes dexprience pertinentes, dont unatelier technique sur lexprience acquise en matire dadministration de la justice

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    25/30

    0439530f.doc 25

    S/2004/616

    pendant une priode de transition, qui doit se tenir lautomne. Des outils sont encours de prparation sur les questions suivantes : cartographie du secteur de lajustice; codes pnaux applicables pendant la priode de transition; principes de base pour la poursuite des auteurs dinfractions graves par des instances nationales oumixtes; conseils concernant la manire de procder pour crer une commission de

    vrit; mthodes de supervision du systme judiciaire; examen des stratgies derconciliation; orientations concernant lassainissement de la fonction publique.Enfin, des plans sont dresss en vue de la cration de pages Web consacres ladministration de la justice pendant une priode de transition.

    58. La coordination entre les autres acteurs de la communaut internationale,notamment les donateurs bilatraux et multilatraux, les organismes daide, lesorganisations non gouvernementales et les fondations prives est tout aussiindispensable mais demeure problmatique. Toute coordination inadquate dans cesecteur se traduit par des doubles emplois, des gaspillages, des lacunes danslassistance et des conflits entre les objectifs de laide et des programmes. Pisencore, une intervention mal coordonne de la communaut internationale peutavoir pour effet de fausser les plans nationaux en matire de justice, de faire perdre

    un temps prcieux aux acteurs locaux et de ponctionner des ressourcesindispensables au dveloppement.

    59. Pour remdier ces problmes, il est essentiel que les donateurs, les missionsde paix et le systme des Nations Unies aient cur duvrer ensemble, en uneffort collectif o limpulsion est donne par les principaux acteurs de la socitcivile et du gouvernement concerns. Un simple partage de linformation ne suffit pas. Tous les partenaires doivent travailler de concert sur la base dune valuationnationale commune des besoins, des capacits et des aspirations et dun programmenational commun concernant ladministration de la justice pendant la priode detransition, la rforme du systme judiciaire et le renforcement de ltat de droit.

    XVIII. toffer nos fichiers dexperts

    60. Au fil des annes, le personnel spcialis de lONU a acquis un vaste savoir-faire et une riche exprience de laide aux pays sortant dun conflit, de la cration demcanismes provisoires dadministration de la justice, de la remise sur pied dessystmes judiciaires dsorganiss et du rtablissement de ltat de droit. tant donntoutefois la demande importante (et croissante) dans ce domaine, ainsi quelampleur de la tche, ce personnel nest pas assez nombreux. Nous sommes donc de plus en plus amens faire appel des comptences extrieures pour prter mainforte nos spcialistes. Trouver et dployer rapidement ce personnel soulvecependant de nombreuses difficults.

    61. La premire difficult est le manque dexperts runissant les comptencescomplmentaires indispensables pour accomplir le travail requis au nom de lONU.

    Nous manquons galement de personnes qualifies pour encadrer les policiers, les juges, les procureurs et les avocats, les fonctionnaires de ladministrationpnitentiaire, etc. Certes, il existe quantit de spcialistes matrisant parfaitement lefonctionnement du systme judiciaire, les lois et la langue de leur propre pays. Detelles comptences sont cependant dune utilit restreinte au regard de nos activits.Nous avons besoin de personnes possdant tout un ensemble de comptences, parmilesquelles la connaissance des normes et principes de lONU en matire

  • 8/3/2019 Rtablissement de ltat de droit et administration de la justice pendant la priode de transition dans les socits e

    26/30

    26 0439530f.doc

    S/2004/616

    dadministration de la justice, lexprience des situations daprs conflit, lacomprhension du systme juridique du pays hte (common law, droit romain, droitislamique, ou autre), une bonne connaissance de la culture du pays hte, la capacitde cooprer avec les homologues locaux, laptitude travailler dans la langue dupays hte et la matrise de plusieurs domaines du droit.

    62. Il est donc clairement besoin de constituer un fichier international fiablerecensant les personnes et les institutions (y compris les partenaires extrieurs) quirpondent aux besoins et critres susmentionns de faon pouvoir plus facilementet efficacement identifier, slectionner, recruter, former et dployer des personneshautement qualifies, et conclure avec dautres institutions des accords de partenariat efficaces en vue de mener bien nos activits dans les domaines pertinents. cet gard, nous pourrions exploiter les diverses listes dresses ettenues jour par nombre de nos partenaires, tout en maintenant nos propresmcanismes de dpistage et de slection.

    63. Une fois retenus des candidats qualifis, il convient ensuite de leur offrir avantdploiement une formation solide et systmatique, abordant entre autres questionsessentielles les systmes et les traditions du pays hte, les activits de la mission, lesnormes appliquer ou les rgles de conduite auxquelles ils sont censs seconformer. LONU a labor un certain nombre de programmes et doutilsdidactiques lintention des spcialistes de divers aspects du renforcement de ltatde droit. Dautres organisations internationales et dautres institutions de diverstats Membres ont fait de mme. Une coordination plus systmatique de ces effortscontribuerait pour beaucoup amliorer notre capacit de slectionner, former etdployer rapidement du personnel qualifi pour renforcer ladministration de lajustice et ltat de droit dans les pays sortant dun conflit.

    XIX. Pour aller de lavant : conclusions et recommandations

    A. En ce qui concerne les ngociations, les accords de paixet les mandats approuvs par le Conseil de scurit

    64. Il conviendrait de veiller ce que les accords de paix, ainsi que les rsolutionsadoptes par le Conseil de scurit et les mandats approuvs par lui :

    a) Prtent une attention prioritaire au rtablissement et au respect de lalgalit, en appelant expressment renforcer ltat de droit et ladministration de lajustice pendant la priode de transition, en particulier lorsquil est demand lONUde soutenir les processus judiciaires et relatifs aux poursuites pnales;

    b) Respectent, incorporent en les mentionnant et appliquent les normesinternationales en matire dquit, de garantie dune procdure rgulire et dedroits de lhomme;

    c) Condamnent toute mesure autorisant lamnistie pour des actes degnocide, des crimes de guerre ou des crimes contre lhumanit, y compris les actesfonds sur lorigine ethnique ou le sexe, ou de caractre sexuel, et fassent en sortequaucune amnistie antrieure ne fasse obstacle aux poursuites engages devant lunquelconque des tribunaux crs ou soutenus par lONU;

  • 8/3/2