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16 octobre 1946 – 16 octobre 2012. Voilà soixante-six ans, les condamnés à mort au « grand » procès de Nuremberg étaient pendus. Joachim von Ribbentrop, Ju- lius Streicher, Fritz Sauckel, Arthur Seyss-Inquart, Ernst Kaltenbrunner, Alfred Jodl, Wilhelm Keitel et les autres… A travers les chefs vaincus, la « civilisation » avait condamné le national-socialisme. Une condamnation « GÏQLWLYH HW QRQ VXVFHSWLEOH GH UYLVLRQ » selon les termes de l’article 26 des statuts du Tribunal militaire international (TMI). Mais les digues élevées par les légistes ne sauraient contenir bien longtemps OHV ÐRWV GH OD YULW 6L OD UYLVLRQ GX SURFV GH 1XUHPEHUJ QÊD SDV HX OLHX HW ne pourra jamais avoir lieu sur le terrain légal, elle s’effectue sur le terrain de l’Histoire par le biais de la libre recherche historique. Depuis plus de trente ans, grâce à des chercheurs indépendants, les découvertes se multiplient qui réduisent à néant des pans entiers du « jugement » de Nuremberg. L’équipe de 6DQV &RQFHVVLRQ s’honore de participer à cette fabuleuse aventure pour la justice et la vérité, l’une n’allant jamais sans l’autre. Depuis 2004, notre revue reste en première ligne dans le combat révisionniste. Dans ce 78 ème numé- ro, nos lecteurs trouveront un dossier explosif sur la vie au camp d’Auschwitz. L’étude se fonde sur un récit très peu connu (et pour cause) : celui de l’ancien dé- porté juif Szymon Laks. A Birkenau, il faisait partie de l’orchestre du camp. Son témoignage parut pour la première fois en 1948, c’est-à-dire à une époque où la WKVH RIÏFLHOOH TXL IDLW GÊ$XVFKZLW] XQ l HQIHU VXU WHUUH x QÊWDLW SDV HQFRUH GÏ- nie. D’où des descriptions totalement sidérantes pour les générations actuelles. Dans ce numéro également, deux documents historiques peu connus du grand public et qui jettent une lumière nouvelle sur l’Action Reinhardt, une action pré- VHQWH SDU OD WKVH RIÏFLHOOH FRPPH OH PHXUWUH GH SUV GH WURLV PLOOLRQV GH MXLIV En vérité, il s’agissait de la récupération des biens saisis aux juifs qui étaient refoulés dans les territoires de l’Est. Nous soumettons également aux lecteurs le « témoignage » totalement gro- tesque d’un soi-disant rescapé de Treblinka, Chil Rajchman. Qu’un fou puisse raconter qu’à Treblinka, le « sang des dizaines de milliers de victimes ne [pou- vait] reposer en paix », donc qu’il « remont[ait] à la surface » et qu’il lui arriva même, par « miracle », de « s’embraser comme du combustible » pendant deux jours, passe encore. Mais que ce « témoignage » soit publié en 2009 avec la mention : « il s’inscrit parmi les plus grands » permet de mesurer la crédulité ambiante lorsqu’il s’agit de l’ « Holocauste ». 'DQV FHWWH OLYUDLVRQ HQÏQ QRXV SXEOLRQV XQ DUWLFOH VXU XQ VXMHW WUV DFWXHO OH « mariage » homosexuel. Nous y démontrons qu’avec où sans François Hollande, ce « mariage » sera un jour autorisé, car il est l’aboutissement logique de la phi- losophie des droits de l’homme. Le combat continue, bonne lecture à tous. Marie Pererou M. Urbain Cairat C.P. 1528 CH-1820 Montreux Suisse [email protected] http://sansconcession.max.st Directeur de publication Joseph Renand Directeur Louis Leroy Ventes et abonnements [email protected] : Marie Bruchet, Raphaël Launay Rédactrice en chef Marie Pererou Secrétaire général de la rédaction Pierre Guérin - [email protected] Conseiller éditorial Julien Lemaître Conception graphique - iconographique Joseph Martin - [email protected] Maquette Pascal Barteaux Conseiller scientifique Vincent Reynouard Documentation André Germain - [email protected] Site internet Benoit Quillet, Sébastien Ribot, Lucas Collin Direction commercial et marketing Stéphane Petit - [email protected] Assistant de direction commerciale Pascal Mary - [email protected] Titres et chapôts sont écrits par la rédaction Les opinions exprimées dans les articles n’engagent que leurs auteurs. Couverture : © Joseph Martin Sans Concession Des révisions inévitables

Sans Concession n° 78

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Revue révisionniste animée par Vincent Reynouard

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Page 1: Sans Concession n° 78

16 octobre 1946 – 16 octobre 2012. Voilà soixante-six ans, les condamnés à mort

au « grand » procès de Nuremberg étaient pendus. Joachim von Ribbentrop, Ju-

lius Streicher, Fritz Sauckel, Arthur Seyss-Inquart, Ernst Kaltenbrunner, Alfred

Jodl, Wilhelm Keitel et les autres… A travers les chefs vaincus, la « civilisation »

avait condamné le national-socialisme. Une condamnation « G�ÏQLWLYH�HW�QRQ�VXVFHSWLEOH�GH�U�YLVLRQ » selon les termes de l’article 26 des statuts du Tribunal

militaire international (TMI).

Mais les digues élevées par les légistes ne sauraient contenir bien longtemps

OHV�ÐRWV�GH� OD�Y�ULW���6L� OD� U�YLVLRQ�GX�SURF�V�GH�1XUHPEHUJ�QÊD�SDV�HX� OLHX�HW�ne pourra jamais avoir lieu sur le terrain légal, elle s’effectue sur le terrain de

l’Histoire par le biais de la libre recherche historique. Depuis plus de trente

ans, grâce à des chercheurs indépendants, les découvertes se multiplient qui

réduisent à néant des pans entiers du « jugement » de Nuremberg.

L’équipe de 6DQV�&RQFHVVLRQ s’honore de participer à cette fabuleuse aventure

pour la justice et la vérité, l’une n’allant jamais sans l’autre. Depuis 2004, notre

revue reste en première ligne dans le combat révisionniste. Dans ce 78ème

numé-

ro, nos lecteurs trouveront un dossier explosif sur la vie au camp d’Auschwitz.

L’étude se fonde sur un récit très peu connu (et pour cause) : celui de l’ancien dé-

porté juif Szymon Laks. A Birkenau, il faisait partie de l’orchestre du camp. Son

témoignage parut pour la première fois en 1948, c’est-à-dire à une époque où la

WK�VH�RIÏFLHOOH�TXL�IDLW�GÊ$XVFKZLW]�XQ�l�HQIHU�VXU�WHUUH�x�QÊ�WDLW�SDV�HQFRUH�G�Ï-

nie. D’où des descriptions totalement sidérantes pour les générations actuelles.

Dans ce numéro également, deux documents historiques peu connus du grand

public et qui jettent une lumière nouvelle sur l’Action Reinhardt, une action pré-

VHQW�H�SDU�OD�WK�VH�RIÏFLHOOH�FRPPH�OH�PHXUWUH�GH�SU�V�GH�WURLV�PLOOLRQV�GH�MXLIV��En vérité, il s’agissait de la récupération des biens saisis aux juifs qui étaient

refoulés dans les territoires de l’Est.

Nous soumettons également aux lecteurs le « témoignage » totalement gro-

tesque d’un soi-disant rescapé de Treblinka, Chil Rajchman. Qu’un fou puisse

raconter qu’à Treblinka, le « sang des dizaines de milliers de victimes ne [pou-

vait] reposer en paix », donc qu’il « remont[ait] à la surface » et qu’il lui arriva

même, par « miracle », de « s’embraser comme du combustible » pendant deux

jours, passe encore. Mais que ce « témoignage » soit publié en 2009 avec la

mention : « il s’inscrit parmi les plus grands » permet de mesurer la crédulité

ambiante lorsqu’il s’agit de l’ « Holocauste ».

'DQV�FHWWH�OLYUDLVRQ��HQÏQ��QRXV�SXEOLRQV�XQ�DUWLFOH�VXU�XQ�VXMHW�WU�V�DFWXHO���OH�« mariage » homosexuel. Nous y démontrons qu’avec où sans François Hollande,

ce « mariage » sera un jour autorisé, car il est l’aboutissement logique de la phi-

losophie des droits de l’homme.

Le combat continue, bonne lecture à tous.

Marie Pererou

M. Urbain Cairat

C.P. 1528

CH-1820 Montreux

Suisse

[email protected]

http://sansconcession.max.st

Directeur de publication

Joseph Renand

Directeur

Louis Leroy

Ventes et abonnements

[email protected] : Marie Bruchet,

Raphaël Launay

Rédactrice en chef

Marie Pererou

Secrétaire général de la rédaction

Pierre Guérin -

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Conseiller éditorial

Julien Lemaître

Conception graphique - iconographique

Joseph Martin - [email protected]

Maquette

Pascal Barteaux

Conseiller scientifique

Vincent Reynouard

Documentation

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Site internet

Benoit Quillet, Sébastien Ribot,

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Direction commercial et marketing

Stéphane Petit - [email protected]

Assistant de direction commerciale

Pascal Mary - [email protected]

Titres et chapôts sont écrits par la rédaction

Les opinions exprimées dans les articles

n’engagent que leurs auteurs.

Couverture : © Joseph Martin

Sans Concession

Des révisions inévitables

Page 2: Sans Concession n° 78

SommaireS a n S C o n C e S S i o n n ° 7 8 / o C t o b r e - n o v e m b r e 2 0 1 2

Brèves

P 4 > Un “monde sans nazisme” en congrès à

Strasbourg

P 5 > Ayrault et le camp des Milles : le comble

du cynisme

P6 > Auschwitz : “A vot’ bon cœur, m’ sieurs

dames”

P7 > Oradour : l’éternelle hypocrisie

P10 > Katyn : après des fosses découvertes,

une fausse découverte

Société

P12 > Le mariage homosexuel, conséquence de

la philosophie des droits de l’homme

Page 3: Sans Concession n° 78

Dossier

“J’étais dans l’orchestre de

Birkenau”

P 24 > Un livre qui révèle les mensonges par

omission de la thèse officielle

P 26 > Conditions de vie au camp : des

responsabilités partagées

P 30 > Le mythe de la fraternité universelle

entre détenus

P 34 > Déportés privilégiés

P 36 > Les trafics dans les camps

P 44 > Détenus et SS dansent, chantent

et trinquent ensemble

P 47 > Réponse aux objections

P 53 > Conclusion

Recherches

P 56 > Lumière sur l’ « Action Reinhardt »

P 68 > Vers la fin des lois antirévisionnistes...?

P 69 > Nouveau retour sur Katyn à Nuremberg

Page 4: Sans Concession n° 78

Brèves

Sans Concession N° 78

4

L’organisation non-gouvernementale (O.N.G.) « Un monde sans nazisme » a été

créée le 22 juin 2010 à Kiev (Ukraine) par Boris Shpigel. Les 8, 9 et 10 octobre 2012, elle a tenu sa première assemblée générale à l’hôtel Hilton de Strasbourg.Dans sa déclaration de constitution, l’organisation s’inquiète en ces termes : « Après la victoire [de 1945], la communauté internationale plaça les principes antinazis parmi les fondements de la civilisation contemporaine. Mais peut-on être aujourd’hui certain que le processus de G�QD]LÏFDWLRQ� IXW� FRPSOHW�et irréversible ? De nouvelles générations sont venues qui n’ont pas connu cette douleur et qui n’ont pas été immunisées contre le nationalisme d’ex-trême droite et contre les idées misanthropes » (source : http://stopnazism.net/?page_id=141). Et de se lamenter : « On enregistre un accroissement du

nombre de groupes d’extrême droite et ultranationalistes. Les événements politiques et les marches des nazis contemporains avec des vétérans des troupes de Hitler deviennent tous les jours réalité. Les voix des partisans de la négation de l’Holocauste résonnent à nouveau, et parfois même ces propos sont tenus par des chefs d’État ou de partis politiques ».« Un monde sans nazisme » propose donc la création d’un « système international de réaction structurelle au néonazisme et au nationalisme d’extrême droite ainsi qu’aux tentatives d’effacer les crimes des nazis et de leurs complices ». Cette structure prévoirait notamment :- la création d’un « système international de première alerte » qui surveillerait la diffusion des idées nazies ;- l’établissement d’une coordination entre « les systèmes juridiques nationaux, européens et internationaux DÏQ� GÊHPS FKHU� WRXWH� PDQL�

festation de néonazisme » et « de combattre ceux qui nient l’Holocauste » ;- « l’incorporation dans le système d’éducation des États membres du Conseil de l’Europe (et plus tard des autres États) de programmes obligatoires sur la Seconde Guerre mondiale et sur l’histoire de l’Holocauste » ;- la « perpétuation de la mémoire des victimes de la Seconde Guerre mondiale et de l’Holocauste, des héros de la Résistance et des soldats libérateurs » (id).La première assemblée générale GHYDLW� SHUPHWWUH� GH� G�ÏQLU� OH�programme de l’organisation, de mettre au point le système de veille antinazi et d’adopter un plan d’actions pour 2013. « Un monde sans nazisme » regrouperait actuellement 140 organisations dans 30 pays.L’action de cette organisation FRQÏUPH�TXH�OD�JXHUUH�FRQWUH�OH�national-socialisme se poursuit et que, dans cette guerre, le prétendu « Holocauste » reste l’arme n° 1 de nos adversaires.

Un “monde sans nazisme” en congrès à Strasbourg

FRÉDÉRIC MORIN

Page 5: Sans Concession n° 78

5

Sans ConcessionN° 78

Brèves

«Sachons, nous aussi, rechercher et mettre en lumière la vérité historique, avec lucidité et sans complaisance. »

Cette phrase n’a pas été prononcée à l’O.N.U. par Mahmoud Ahmadinejad, mais par le Premier ministre français, Jean-Marc Ayrault. C’était le 10 septembre dernier, lors de l’inauguration du site-mémorial du camp des Milles (d’où sont partis des convois pour Auschwitz).Sans surprise, le Premier ministre n’a pas caché le message politique adressé aux jeunes par ce nouveau « lieu de Mémoire » dont le slogan est : « un lieu témoin prend le relais des témoins ». Dans son discours, il a clairement déclaré :« Nous sommes ici aussi pour transmettre aux jeunes générations XQ� PHVVDJH� GH� FRQÏDQFH� GDQV�l’avenir, car c’est l’objet même de

ce Mémorial : combattre l’oubli, éduquer et éveiller les consciences, lutter contre toutes les formes de xénophobie, de racisme et d’antisémitisme ; rendre à jamais impossible le retour de la barbarie.« (…) Ma présence parmi vous, ainsi que celle de nombreux membres du gouvernement, témoigne de la volonté de la République française de veiller sur la mémoire des martyrs du camp des Milles. De ces femmes, ces hommes, ces enfants, qui ne sont jamais revenus. C’est pour nous un devoir sacré.« (…) Ce Site-Mémorial est d’abord tourné vers la jeunesse. Il sera un lieu d’histoire, de pédagogie et de transmission, comme l’ont voulu les hautes personnalités qui ont accompagné le projet depuis ses débuts (…). Le travail de mémoire, avec sa dimension éducative, est essentiel. Il est aussi un lien entre les générations.

« (…) l’histoire des Milles est aussi une histoire européenne et nous devons faire vivre aujourd’hui les valeurs fondamentales que nous avons voulu promouvoir après 1945. Pour une Europe de la paix et de la démocratie, où le rejet de l’autre n’a pas sa place.« (…) Sachons, nous aussi, rechercher et mettre en lumière la vérité historique, avec lucidité et sans complaisance. Sachons combattre l’obscurantisme, la haine et l’intolérance. Sachons UHVWHU� ÏG�OHV� DX[� YDOHXUV� GH� OD�République. » (source : http://w w w. g o u v e r n e m e n t . f r /premier-ministre/discours-au-camp-des-milles-a-aix-en-provence).Dans un pays qui a promulgué la loi Gayssot et qui a jeté un homme en prison en vertu de cette loi, ces derniers propos sont d’un cynisme sans borne…

Ayrault et le camp des Milles Le comble du cynisme

LOUIS LEROY

Page 6: Sans Concession n° 78

Brèves

Sans Concession N° 78

6

AÏQ� GÊDVVXUHU� XQH� P�PRLUH� SRXU�l’éternité, la Fondation pour la préservation d’Auschwitz-Birkenau (Auschwitz-Birkenau Preservation Fund) a un objectif : « amasser un

montant de 120 millions d’euros pour le Fonds perpétuel. Avec un intérêt annuel de 4 à 5 millions GÊHXURV��LO�VHUD�SRVVLEOH�GH�SODQLÏHU�HW�GH�U�DOLVHU�systématiquement des travaux de conservation essentiels » (source : http:// en.auschwitz.org/ m/ index.php)/ « Museum »/ « Foundation » ).Pour l’heure, aidée par le gouvernement polonais, la Fondation est en quête de 13 millions d’euros. Ils devraient lui permettre de préserver le site, y compris en remplaçant les arbres morts par des arbres de la même variété.Le 26 juillet dernier, lors de sa visite du Centre de l’Holocauste juif à Melbourne, le Premier ministre australien, Julia Gillard, annonça que son gouvernement allait répondre à l’appel en versant un don de 500 000 $ (env. 400 000 €). A cette occasion, elle déclara :« (…) il y a une réponse civique et morale à l’Holocauste qui nous concerne tous ; nous devons assurer que l’Holocauste reste un signe et un avertissement pour toutes les générations — d’autant plus que nous sommes confrontés à la possibilité d’un monde sans les survivants.

Aussi doit-on être les témoins des témoins. Nous devons être les gardiens de ces dossiers, de ces KLVWRLUHV�� GH� FHV� REMHWV� HW� GHV� OLHX[� DÏQ� TXH� OD�négation ne puisse jamais triompher […]. Plus on s’éloigne de la Shoah et plus il est impératif d’assurer que la mémoire ne s’affadisse pas, que l’histoire ne soit pas réécrite, que l’Holocauste et ses enseignements soient présentés à chaque génération, que nous ne manquions jamais de témoigner. Telle est la mission du Centre de l’Holocauste juif et de ses homologues en Australie et dans le monde entier. Mais aucun lieu ne parle de façon plus crue et plus envoûtante de la Shoah qu’Auschwitz-Birkenau. C’est, peut-être, l’endroit le plus infâme de la terre […]. Auschwitz-Birkenau est un fait irréfutable. Il ne peut pas être effacé de la connaissance. Il ne peut pas être nié […].Nous faisons ce don parce qu’Auschwitz est un lieu et une histoire pour toute l’humanité et pour tous les temps. De lui et les autres camps, six millions de morts crient à travers les âges pour la justice et pour la mémoire. » (source : http://www.jwire.com.au/news/australia-donates-500000-to-auschwitz-birkenau-preservation-fund/26779).Venant d’une instance laïque, ce discours aux DFFHQWV� UHOLJLHX[�FRQÏUPH�TXH� OÊ� l�+RORFDXVWH� x�est devenu la (contre-)religion de notre monde moderne.

Auschwitz : “ A vot’ bon cœur, m’sieurs dames ”

FRÉDÉRIC MORIN

Page 7: Sans Concession n° 78

7

Sans ConcessionN° 78

Brèves

Cette affaire pourrait s’intituler : l’arroseur arrosé. Le 14 septembre 2012, en effet, un

rescapé du drame d’Oradour-sur-Glane, Robert Hébras, a été condamné à 1 € symbolique de dommages et intérêts et à 10 000 € de frais de justice par la cour d’appel de Colmar (celle qui avait condamné Vincent Reynouard à un an de prison ferme dans l’affaire de la « brochure de seize pages »). Motif : avoir… « outrepassé la liberté d’expression ». Dans sa brochure intitulée Oradour-sur-Glane, le drame heure par heure, il avait mis en doute le caractère forcé de l’incorporation des Alsaciens dans la Waffen SS.Je n’insisterai pas sur cette affaire qui n’aura aucune répercussion sur la thèse RIÏFLHOOH�GX�GUDPH�HQ�OXL�P PH��J’ignore tout de l’incorporation des Alsaciens dans la Waffen SS. L’important est ailleurs… L’article du Populaire du Centre qui annonçait la condamnation

de Robert Hébras était illustré par une photo du condamné. La légende portait : « Lassitude. Robert Hébras aimerait que tous les acteurs du drame d’Oradour prennent la parole » (voy. Le Populaire du Centre, 15 septembre 2012, p. 5). Pour parler librement ? Non ! Robert Hébras explique : « j’ai toujours pensé qu’il serait important pour l’histoire qu’un jour un de ces soldats dise “j’y étais, j’ai participé à ce massacre, je n’ai pas pu faire autrement, je le regrette” » (id.). Telle est la conception de la liberté d’expression à Oradour : on veut bien que tout le monde parle, mais à condition de tenir un discours conforme à la thèse RIÏFLHOOH�Soulignons qu’à ce jour, aucun des Waffen SS alsaciens qui étaient à Oradour le 10 juin tragique n’a parlé — au moins publiquement. Y compris lors des deux procès de Vincent Reynouard à Limoges. Le seul « témoin » qui lui fut opposé était un rescapé du drame,

Marcel Darthout. Pourtant, si un Alsacien ancien Waffen SS était venu confesser sa culpabilité et dire que la thèse de Reynouard était erronée, aux yeux du grand public, le débat aurait été clos (« un des assassins lui-même a avoué ! Ce Reynouard est un charlot »). Ce manque est révélateur des zones d’ombre qui planent sur le drame.Lors de son enquête, Vincent Reynouard a désespérément tenté de faire parler des anciens Waffen SS. Il a tout tenté, tout. En vain. Par l’intermédiaire d’un de ses amis, un ancien « incorporé de force » rescapé du camp de Tambow, Monsieur Bober (aujourd’hui décédé), il a simplement réussi à obtenir un résultat : un Alsacien présent le jour du drame (dont nous tairons le nom, ignorant s’il est mort) a bien précisé que l’église avait explosé. Ce fut tout. Supplié par sa femme en pleurs, l’ancien Waffen SS a refusé d’en dire plus ; il a également refusé tout nouvel entretien.

L’éternelle hypocrisie d’Oradour

MICHEL CHAUVET

Page 8: Sans Concession n° 78

Brèves

Sans Concession N° 78

8

On comprend la crainte des gardiens de la Mémoire d’Oradour… Les gens là-bas n’ont pas le comportement de victimes innocentes, mais de menteurs inquiets.Suite à la condamnation de Robert Hébras, un comité de soutien s’est créé, composé de « simples citoyens [qui] ne

souhaitent pas que l’histoire

soit écrite par la justice » (voy. Le Populaire du Centre, 1er octobre 2012, p. 5). Voilà qui est prometteur. Hélas, la suite réduit à néant nos espoirs, car les défenseurs du condamné ajoutent : « Le devoir de la

justice est de condamner le

révisionnisme et en l’occurrence,

il semble qu’elle aura du travail.

Mais elle ne peut pas condamner

le doute » (id.). Pas d’espoir, donc, pour les révisionnistes…On soulignera que, dans cette affaire, les gens mélangent tout et se comportent d’une façon très hypocrite. Voici la transcription d’un reportage diffusé le 24 septembre dernier sur « France Bleu Limousin » :« Robert Hébras condamné,

intenable pour plusieurs

professeurs d’histoire qui sou-

haitent le soutenir désormais.

Bernadette Malinvaud, ensei-

gnante à la retraite : “Quelqu’un

qui a souffert dans sa chair alors

qu’il était très jeune à Oradour

et qui a su à un certain moment

passer outre pour raconter de

façon très objective à la fois le

massacre, mais aussi il a travaillé

sans cesse pour le rapprochement

des peuples allemand et

français. Aujourd’hui il a 87 ans,

humainement on ne peut pas

OXL� LQÐLJHU� XQH� WHOOH� QRXYHOOH�douleur”. Des milliers et des

milliers d’élèves l’ont écouté. Il

a témoigné pour les historiens,

les documentaristes, pourtant

la cour d’appel de Colmar le

condamne au silence. Vincent

Brousse, professeur d’histoire

et signataire de la pétition :

“Qu’est-ce que c’est que ces

prétoires où tout d’un coup on

va dire à monsieur Hébras : vous n’êtes pas le témoin susceptible de pouvoir… d’avoir la capacité de jugement”. Au-delà, ces

enseignants refusent que ce soit

la Justice qui dise quelle mémoire

doit prévaloir sur l’autre. [Vincent

Brousse] :“Il y a eu des Alsaciens

Résistants et des Alsaciens

enrôlés de force et des Alsaciens

collaborateurs. Il y a eu des

Limousins… voilà… Résistants,

il y a eu aussi effectivement des

Limousins qui ont choisi d’autres

voies, nous le savons.” » (source : http://soundcloud.com/france-bleu-limousin/un-comit-de-soutien-pour).Les considérations exposées par Bernadette Malinvaud sont totalement hors sujet : peu importe ce qu’a pu vivre, souffrir et faire Robert Hébras ; peu importe son action en faveur du rapprochement franco-allemand… L’affaire portait sur les doutes qu’il avait émis à propos de l’incorporation de force des Alsaciens présents à Oradour le 10 juin tragique.

Vincent Brousse, pour sa part, refuse « que ce soit la Justice

qui dise quelle mémoire doit

prévaloir sur l’autre. » Or, il y a bien longtemps qu’avec les lois U�SULPDQW� FH� TXH� OÊRQ� TXDOLÏH�« d’apologie du nazisme et de la collaboration », la Justice dit que la mémoire des vainqueurs doit prévaloir sur celle des vaincus. Monsieur Brousse s’élève en outre contre « ces prétoires

où tout d’un coup on va dire à

monsieur Hébras : “vous n’êtes

pas le témoin susceptible de

pouvoir… d’avoir la capacité de

jugement” ». Il est dommage qu’en 2004, au moment où Vincent Reynouard était très lourdement condamné par le Tribunal de Limoges, ses collègues ne se soient pas levés pour dire : « Qu’est-ce que c’est que ces prétoires où tout d’un coup on va dire à monsieur Reynouard : “vous n’êtes pas le chercheur susceptible d’avoir la capacité de jugement” ». C’est toujours le même deux-poids-deux-mesures…Dans cette affaire, Vincent Reynouard a apporté son soutien à Robert Hébras « au

nom de la simple liberté, qui

implique celle de douter et

d’exprimer publiquement son

doute ». Le 12 octobre, il a envoyé un courrier électronique à Bernadette Malinvaud qui centralise les signatures de la pétition en faveur du condamné. Apparaîtra-t-il dans la liste des signataires ? Mystère…

Page 9: Sans Concession n° 78

9

Sans ConcessionN° 78

Brèves

Le Populaire du Centre, 15 septembre 2012, p. 5

Page 10: Sans Concession n° 78

Brèves

Sans Concession N° 78

10

Le 11 septembre dernier, le blog du quotidien Le Monde titra : « TOP SECRET – Massacre de Katyn : des archives apportent la preuve que les États-Unis ont protégé l’U.R.S.S. »

(source : http://bigbrowser.blog.lemonde.fr/2012/09/11/top-secret-massacre-de-katyn-des-archives-apportent-la-preuve-que-les-etats-unis-ont-protege-lurss/). Il y était question d’archives américaines rendues publiques la veille…Or, le fait que les Américains aient protégé l’U.R.S.S. dans cette affaire n’est plus un secret depuis des années. Les archives de Nuremberg (accessibles depuis longtemps) renferment deux documents capitaux. Le premier fut rédigé par Fabian von Schlabrendorff, un conjuré du 20 juillet 1944 qui avait eu la vie sauve et qui, après la défaite, s’était mis au service des Alliés dans le cadre de la préparation du procès de Nuremberg. Le 26 octobre 1945, il adressa une lettre au général américain William J. Donovan qui dirigeait l’instruction. On lisait

sous sa plume : « Je recommande d’urgence l’abandon, dans l’acte d’accusation, du point PHQWLRQQDQW� OH� PHXUWUH� GH� ���� RIÏFLHUV�(sic) dans la forêt de Katyn. Autrement, la Défense serait dans la mesure d’appeler un grand nombre de témoins qui savent que les ���� RIÏFLHUV� SRORQDLV� GDQV� OD� IRU W� GH�.DW\Q�ont été tués par les Russes ». Loin d’en être surpris, le 6 novembre 1945, William Donovan écrivit à l’un de ses collègues : « Le meurtre de ���� RIÏFLHUV� SRORQDLV� GDQV� OD� IRU W� GH�.DW\Q�SHXW� SU�VHQWHU� XQH� GLIÏFXOW�� DX� SURF�V�� /D�Défense pourrait vouloir en faire une affaire et SURGXLUH�GHV�W�PRLQV�TXL�YRQW�FHUWLÏHU�TXH�OH�meurtre a été commis par les Russes ».Preuve qu’à l’époque, les Américains connaissaient parfaitement la vérité. Mais parce qu’il fallait présenter les vainqueurs comme des croisés entièrement blancs et les vaincus comme des démons entièrement noirs, ils voulaient éviter que cette vérité dérangeante ne soit proclamée à la face du monde entier, ce qui revenait à protéger l’U.R.S.S.

Katyn : Après des fosses découvertes,

une fausse découverteVINCENT REYNOUARD

Page 11: Sans Concession n° 78

11

Sans ConcessionN° 78

Brèves

Ci-dessus : Fragment de la lettre de Schlabrendorff à DonovanCi-dessous : Lettre de Donovan à l’un de ses collègues dans le cadre du procès de Nuremberg.

Page 12: Sans Concession n° 78

Société

Sans Concession N° 78

12

La France se prépare à légaliser le « mariage » homosexuel. Pour s’y opposer, certains invoquent… les droits

de l’homme. Il est vrai que la Déclaration universelle des droits de l’homme des Nations unies stipule dans son article 16 : « A partir de l’âge nubile, l’homme et la femme (…) ont le droit de se marier. » Quant à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (C.E.S.D.H.L.), elle déclare dans son article 12 : « A partir de l’âge nubile, l’homme et la femme ont le droit de se marier et de fonder une famille selon les lois nationales régissant l’exercice de ce droit ». A chaque fois, donc, le mariage est décrit comme l’union d’un homme et d’une femme.

Le 10 octobre 1986, d’ailleurs, dans l’arrêt Rees c/ Royaume-Uni, la Cour européenne des droits de l’homme précisa que l’article 12 de la C.E.S.D.H.L. visait « le mariage traditionnel entre deux personnes de sexe biologique différent » et que l’interdiction, par le Royaume-Uni, du mariage homosexuel n’en constituait pas une violation. On lisait :« 49. Aux yeux de la Cour, en garantissant le droit de se marier l’article 12 (art. 12) vise le mariage traditionnel entre deux personnes de sexe biologique différent. Son OLEHOO�� OH� FRQÏUPH� �� LO� HQ� UHVVRUW�que le but poursuivi consiste essentiellement à protéger le mariage en tant que fondement de la famille.50. En outre, l’article 12 (art. 12) le précise, ce droit obéit aux lois

nationales des États contractants pour ce qui concerne son exercice. Les limitations en résultant ne doivent pas le restreindre ou réduire d’une manière ou à un degré qui l’atteindraient dans sa substance même, mais on ne saurait attribuer un tel effet à l’empêchement apporté, au Royaume-Uni, au mariage de personnes n’appartenant pas à des sexes biologiques différents » (1).Seulement voilà : dans nos sociétés modernes, la plupart des normes sociales sont susceptibles d’évoluer. Dès 1981, dans l’arrêt Dudgeon c/ Royaume-Uni, la Cour européenne des droits de l’homme avait déclaré :« 60. […] On comprend mieux aujourd’hui le comportement homosexuel qu’à l’époque de

LE MARIAGE HOMOSEXUELconséquence de la philosophie des droits de l’homme

VINCENT REYNOUARD

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Sans ConcessionN° 78

Le mariage homosexuel : conséquence de la philosophie des droits de l’homme

l’adoption de ces lois et l’on

témoigne donc de plus de

WRO�UDQFH� HQYHUV� OXL� �� GDQV�la grande majorité des États

membres du Conseil de l’Europe,

on a cessé de croire que les

pratiques du genre examiné ici

appellent par elles-mêmes une

répression pénale ; la législation

interne y a subi sur ce point une

nette évolution que la Cour ne

peut négliger […] » (2).La Cour reconnaissait donc qu’en matière d’homosexualité, les lois des différents pays évoluaient, une évolution qu’elle-même devrait en prendre en compte (en PRGLÏDQW�VD�MXULVSUXGHQFH��Mais pourquoi les lois peuvent-elles évoluer ? Autrement dit : pourquoi n’existe-t-il DXFXQ� LQWHUGLW� G�ÏQLWLI� "� 7RXW�simplement parce que, dans nos sociétés occidentales modernes, OHV�ORLV�QH�VRQW�SDV�OH�UHÐHW�GÊXQ�ordre naturel intangible ; elles émanent de la volonté du peuple. Dans son article 6, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 stipulait : « La Loi est l’expression

de la volonté générale. » Cette caractéristique se retrouve dans la Déclaration universelle des droits de l’homme des Nations unies dont l’article 21, troisième alinéa, est rédigé ainsi : « La volonté du peuple est

le fondement de l’autorité des

pouvoirs publics ». Sachant que les autorités édictent les lois, on en déduit logiquement que les ORLV� VRQW� OH� UHÐHW� GH� OD� YRORQW��générale.

Mais la volonté générale est susceptible d’évoluer au cours GX� WHPSV�� $X� VXMHW� GX� PDULDJH�homosexuel, la récente enquête de l’I.F.O.P. le démontre : alors que 51 % des interrogés y étaient favorables en 1995, ils étaient 65 % en août 2012. En moins d’une génération, donc, on est passé de la moitié aux deux tiers environ.On me répondra que cette évolution est à mettre sur le compte de la propagande étatique en faveur de tolérance face à l’homosexualité. J’en conviens sans peine. Mais pourquoi cette propagande est-HOOH� HIÏFDFH� "� 3DUFH� TXÊHOOH� IDLW�appel à des « valeurs » que, dans OHXU� PDMRULW��� OHV� )UDQ�DLV� �HW�les autres peuples européens) approuvent au fond d’eux-mêmes. Il y a bientôt 50 ans,

l’universitaire Alain Girard déclara :« Aucun gouvernement, mais

surtout aucun mode de vie,

régissant les relations entre les

hommes, ne peut avoir quelque

durée, sans l’accord tacite, sinon

explicite, de tous ou du plus grand

nombre. La vie normale d’une

société suppose le consentement

de ses membres aux valeurs qui la

VXSSRUWHQW�HW�OD�G�ÏQLVVHQW�

Il n’est pas besoin que les hommes

soient conscients de ces valeurs,

car elles s’expriment dans leurs

conduites. Il n’est pas besoin que

l’opinion publique, fondement du

pouvoir, se manifeste pour être.

Ce qu’elle a de plus profond et

d’essentiel, pourrait-on dire sans

nul paradoxe, demeure le plus

souvent caché » (3).Or, les peuples sont attachés à deux choses : l’égalité entre tous et la défense des droits individuels, deux notions qui émanent directement de la philosophie des droits de OÊKRPPH�� &HUWHV�� MH� VDLV� TXH� OH�petit bourgeois tolérant centriste RX�GLW�l�GH�GURLWH�x�PÊREMHFWHUD� ��« L’égalité de tous et le respect des droits individuels… oui, PDLV� MXVTXÊ�� XQ� FHUWDLQ� SRLQW�� x�Il ignore cependant que les idées ont leur logique et que cette

logique agit au sein de la société. Dans un livre posthume paru en 1865, l’abbé Louis-Antoine de Salinis rappelait : « La logique

des nations est aussi rigoureuse

que la vérité de Dieu même. Un

individu peut reculer devant des

conséquences, la société, jamais » (4). Cet avertissement s’applique parfaitement au « mariage » homosexuel. Voici pourquoi :Le mariage fait partie des droits

Le mariage fait partie des droits individuels si chers au Français. Le Code Civil français précise : « Le droit au

mariage est un droit individuel d’ordre public qui ne peut donc se limiter ni s’aliéner. »

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LQGLYLGXHOV� VL� FKHUV� DX� )UDQ�DLV��Le Code Civil� IUDQ�DLV� SU�FLVH� ��« Le droit au mariage est un droit individuel d’ordre public qui ne peut donc se limiter ni s’aliéner. » (5) Ni se limiter, ni s’aliéner… On ne saurait être plus clair : tous les citoyens respectables devraient y avoir accès. Or, l’homosexualité entre personnes consentantes étant une « orientation sexuelle » aussi respectable que les autres (voir les lois contre l’homophobie), les homosexuels doivent y avoir accès.On me répondra que le mariage dont parle le Code Civil reste l’union entre un homme et une femme. Il est vrai que si ce code QH� G�ÏQLW� SDV� OH� PDULDJH�� VH�bornant à énoncer les conditions pour contracter une union et les obligations qui en découlent, l’article 144 est rédigé ainsi : « L’homme avant dix-huit ans révolus, la femme avant quinze ans révolus, ne peuvent contracter mariage ». Implicitement, donc,

le Code Civil ne considère que l’union hétérosexuelle.Mais la défense des droits individuels pour tous (donc sous couvert de l’égalité) a un nom : l’individualisme. Dans le Guide Républicain, on lit :l� LQGLYLGXDOLVPH� VLJQLÏH�DXVVL� HW�plus profondément un système de

valeurs unique, caractéristique des sociétés modernes-démocratiques-laïques, posant l’individu libre et égal comme la valeur centrale de notre culture. Avec les Modernes, pour la première fois dans l’histoire, sont consacrés les principes de liberté humaine et d’égalité de WRXV� GHYDQW� OD� ORL� �� OÊLQGLYLGX� HVW�devenu le référentiel de l’ordre démocratique » (6).Jusque-là, rien à dire. Mais lisons la suite :« Est d’essence individualiste la société qui, récusant la religion

ou la tradition comme source du savoir et de la loi, voit dans les hommes les seuls auteurs légitimes de leur mode d’être ensemble. […] nul ne doit plus être contraint d’adopter telle ou telle doctrine et de se soumettre aux règles d’une vie dictée par la tradition. […] droit de

FRQGXLUH� VD� YLH� VHORQ� VRQ� JU�� ��l’individualisme apparaît comme le code génétique des sociétés démocratiques modernes. Les Droits de l’Homme en sont la traduction institutionnelle » (id.).Or, l’union d’un homme et d’une femme est la vision traditionnelle du mariage, une vision issue des religions. Elle n’a donc rien d’obligatoire et peut parfaitement évoluer si les mentalités évoluent.$MRXWRQV� �� FHOD� OH� SULQFLSH�d’égalité entre tous les citoyens GHYDQW� OD� /RL�� 7RXMRXUV� GDQV� OH�Guide Républicain, on lit :« Il n’y a pas de véritable liberté sans égalité. […] une liberté n’a de sens que si chaque citoyen peut effectivement l’exercer. Que vaut la liberté, pour tous, de voyager, si seuls quelques-uns ont les PR\HQV� ÏQDQFLHUV� GH� YR\DJHU� "�Que vaut la liberté, pour tous, d’aller au cinéma, si seuls des privilégiés peuvent se payer le WLFNHW�Q�FHVVDLUH�"�x (7)L’auteur aurait pu continuer ainsi : « Que vaut la liberté, pour tous, de se marier, si seuls les hétérosexuels peuvent en

Evolution de l’opinion face à la question : pensez-vous que les couples homosexuels devraient avoir le droit de se marier en

France ? (sondage Ifop)

Nos sociétés individualistes promeuvent l’égalité entre l’homme et la femme, une égalité stricte qui se manifeste dans la parité exigée en politique ou ailleurs…

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Le mariage homosexuel : conséquence de la philosophie des droits de l’homme

SURÏWHU� "� x� (K� RXL� �� 6DQV�P PH�parler de la théorie du genre (le « gender »), dans la logique des droits de l’homme, au nom de l’égalité devant la Loi, il faut autoriser les homosexuels à se marier…Adoptons maintenant une autre approche. Nos sociétés individualistes promeuvent l’égalité entre l’homme et la femme, une égalité stricte qui se manifeste dans la parité exigée en politique ou ailleurs… Dans son ouvrage L’un est l’autre, Elisabeth Badinter constate avec raison :« Les stéréotypes de l’homme viril

et de la femme féminine sont

pulvérisés. Il n’y a plus un modèle

REOLJDWRLUH� PDLV� XQH� LQÏQLW��de modèles possibles. Chacun

tient à sa particularité, à son

propre dosage de féminité et de

masculinité » (8).Cela dit, ouvrons encore une fois le Guide Républicain. Que lit-on au chapitre « sexisme » ?« C’est la grande subversion

introduite par le féminisme depuis

XQ�VL�FOH� �� OH� IDLW�GÊ WUH�Q��ÏOOH�RX�garçon ne détermine plus un

destin préétabli. »

C’est vrai : grâce à l’évolution des mœurs (donc des lois), à la libéralisation de la contraception et de l’avortement, aux avancées de la médecine qui permet de changer de sexe, à la reconnaissance du transsexualisme, le fait d’être né ÏOOH�RX�JDU�RQ�QH�G�WHUPLQH�SOXV�un destin préétabli. Mais alors, SRXUTXRL�OH�IDLW�GH�QD¤WUH�JDU�RQ�empêcherait-il de se marier

avec un être de sexe masculin ? (W�SRXUTXRL�OH�IDLW�GH�QD¤WUH�ÏOOH�empêcherait-il de se marier avec un être de sexe féminin ? Cette limitation à notre destin est insupportable ; changeons donc tout cela et autorisons le mariage KRPRVH[XHO��Nous sommes ici au cœur de la philosophie des droits de l’homme. Quand vous lisez ces droits, un constat vient immédiatement à l’esprit : on

n’y trouve aucune référence à un ordre supérieur, qu’on le TXDOLÏHUDLW� GH� QDWXUHO� RX� GLYLQ��L’Homme (avec un grand H) est bien le centre, c’est-à-dire le référent absolu. La conséquence est vertigineuse : en l’absence d’ordre supérieur dans lequel LO� DXUDLW� XQH� SODFH� ELHQ� G�ÏQLH��l’Homme se construit lui-P PH�� VHORQ� VD� VXEMHFWLYLW�� �� LO�n’a donc pas une nature propre qu’il devrait accomplir et qui lui imposerait des limites. Le réel fondement de l’individualisme, il est là : c’est la négation de tout ordre naturel ou divin pour que l’être humain puisse vivre au gré de sa seule volonté, au mépris des lois naturelles. Élisabeth Badinter note : « il est indéniable

que tous nos efforts convergent,

à long terme, pour ôter aux

organes du corps leur caractère

impérialiste […]. La sacro-sainte

QDWXUH� HVW� PDQLSXO�H�� PRGLÏ�H�HW� G�Ï�H� DX� JU�� GH� QRV� G�VLUV�[…] » (pp. 300 et 301). En résumé, l’homme individualiste se considère comme un petit dieu, FÊHVW���GLUH�XQ� WUH�DXWRVXIÏVDQW�et sans limite : « nous nous

éprouvons nous-mêmes comme

une totalité en soi, écrit Élisabeth Badinter. Nous avons le sentiment

plus ou moins prononcé d’être

un exemplaire représentatif de

Evolution de l’opinion face à la question : pensez-vous que les couples homosexuels devraient avoir le droit d’adopter, en tant que couple, des enfants ? (sondage Ifop)

Nous sommes ici au cœur de la philosophie des droits de l’homme. Quand vous lisez ces droits, un constat vient

immédiatement à l’esprit : on n’y trouve aucune référence à un ordre supérieur.

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toute l’humanité. Un succédané de la totalité divine. Nous nous YRORQV�FRPSOHWV�HW�DXWRVXIÏVDQWV

�Â�� x� �S�� ������ 'ÊR®� FH� UHMHW�de toute tradition et de toute

religion, à l’origine d’interdits

absolus, c’est-à-dire de limites

infranchissables.

Or, quand on veut défendre

la vision traditionnelle du

mariage, donc de la famille

avec, en premier lieu, le père

comme chef et la mère comme

épouse dévouée, on est obligé

d’invoquer un ordre supérieur

au sein duquel l’Homme et la

Femme auraient, par nature,

une place différente. Dans un

manuel de Morale publié en

1881, à propos des devoirs du

mariage, l’auteur explique que

OÊKRPPH��MH�VRXOLJQH��l�est le chef naturel de la famille » et que si la

femme prétendait s’affranchir

de l’autorité de son époux, « elle oublierait sa nature propre » (9).

Plus net encore ; dans cet autre

manuel de morale publié un

an plus tôt, l’auteur parlait du

mariage « tel qu’il existe dans les desseins de Dieu et tel que le réclame le cœur de l’homme » (10).

&Ê�WDLW�OÊDIÏUPDWLRQ�H[SOLFLWH�GÊXQ�ordre divin éternel, gravé dans

la conscience humaine par le

Créateur. Cet auteur expliquait

que si « les devoirs du mariage se UDP�QHQW���XQ�VHXO���G�YRXHPHQW�réciproque et, par conséquent, �JDOH� ÏG�OLW�� GHV� GHX[� �SRX[ »,

« ce dévouement, en raison de la diversité des facultés » — encore

un rappel de l’existence d’un ordre

naturel qui différencie l’homme

HW�OD�IHPPH��QH�VÊH[HU�DLW�SDV�GH�OD�P PH� ID�RQ� �� l�Chez le mari, il se manifeste par la protection, l’activité, le courage, l’esprit de décision ; chez la femme, par la douceur, la résignation, la patience. Cette différence n’en assurera que mieux l’accord des volontés et des intelligences » (id).

Il va de soi que cette vision

des choses est totalement en

désaccord avec l’individualisme

fruit de la philosophie

anthropocentrique des droits de

OÊKRPPH�� 7RXMRXUV� DYHF� UDLVRQ��Élisabeth Badinter écrit :

« Cette morale égocentrique met en péril l’éthique christiano-kantienne. L’altruisme qui la fonde n’est guère compatible avec notre individualisme militant. A force de proclamer le devoir d’épanouissement personnel (Moi d’abord, Moi totalement), OÊLG�H�GX�VDFULÏFH�QÊDSSDUD¤W�SOXV�que sous l’aspect négatif d’une automutilation » (11).

'ÊR®� OH� UHMHW� GH� OD� QRWLRQ�

traditionnelle du couple, donc du

mariage :

« Jadis, le couple constituait l’unité de base de la société. Formé de deux moitiés qui chacune avait à cœur de jouer sa “partition”, il représentait une entité transcendante à chacune des parties. Socialement et même psychologiquement, il était entendu que l’Un était incomplet sans l’autre […].La tendance actuelle n’est plus à la notion de transcendante du couple, mais à l’union de deux personnes qui se considèrent moins comme les moitiés d’une belle unité que comme deux ensembles autonomes. /ÊDOOLDQFH� DGPHW� GLIÏFLOHPHQW�OH� VDFULÏFH� GH� OD� PRLQGUH� SDUWLH�de soi. L’hypertrophie du moi et l’individualisme militant sont de rudes obstacles à la vie à deux telle que nous la désirons […].[…] A présent, l’Autre a un prix à ne pas dépasser. Il est désiré s’il enrichit notre être, rejeté s’il lui GHPDQGH�GHV�VDFULÏFHV�x (12).

Mais si le mariage n’est plus que

l’alliance — temporaire ou non —

de « deux ensembles autonomes »,

on ne voit pas pourquoi ces deux

ensembles ne pourraient pas être

des personnes de même sexe.

Peut-être me répondra-t-on que

ces unions sont illégitimes parce

TXH�VW�ULOHV��&HW�DUJXPHQW�ÏJXUH�en bonne place dans l’arsenal

des opposants au mariage

homosexuel. Dans un ouvrage

publié en 1970, le docteur René

Nicoli écrivait :

« Il ne saurait […] exister d’union

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Le mariage homosexuel : conséquence de la philosophie des droits de l’homme

conjugale homosexuelle. Ceci paraît évident car cette dernière réaliserait peut-être une union à la fois voluptueuse et enrichissante mais incapable d’assurer la procréation. Elle ne répondrait donc plus à l’exigence de la survie du couple au-delà de la mort » (13).Certes, mais au sein du système philosophique des droits de l’homme, cet argument est irrecevable ; car lorsque l’auteur parle d’une « exigence de la survie du couple au-delà de la mort », il invoque, sans le dire, un ordre naturel supérieur qui exigerait cette survie. En effet, aucune loi républicaine ne contraint les époux à procréer pour que leur couple dure au-delà de la mort. Dans nos sociétés occidentales modernes, l’individu reste libre d’avoir ou de ne pas avoir d’enfant. D’où l’autorisation de la contraception et de l’avortement (là encore, c’était fatal). Auteur d’un livre intitulé Marriage is Hell (Le mariage, c’est l’enfer) paru en IUDQ�DLV�VRXV� OH�WLWUH�Le mariage en accusation, Kathrin Perutz écrit : « S’agit-il de la conception biblique qui veut que les rapports humains ayant des buts autres TXH�OD�SURFU�DWLRQ�VRLHQW�SHUYHUV�"�Dans ce cas, autant condamner immédiatement tout système de contrôle des naissances » (14). Sachant que désormais, l’amour peut se concevoir en dehors de toute procréation, l’auteur déclare : « L’amour homosexuel est un amour authentique qui ne diffère pas de

l’amour hétérosexuel » (id.). Et de conclure :« Si l’homme a le droit à la vie, à la liberté et à la poursuite du bonheur, aucun législateur n’a le droit de lui dire quand il a la permission d’avoir une érection. Nous devons reconnaître et accepter le mariage homosexuel. Si deux hommes ou deux femmes choisissent de vivre ensemble comme un couple marié, ils seront VRXPLV� DX[� P PHV� LQÐXHQFHV� HW�partageront les mêmes illusions que des partenaires hétérosexuels ; ils trouveront plus de stabilité, plus d’intimité, moins de risques de maladies vénériennes, plus de sécurité affective. Plus responsables aussi, ils seront, à deux, meilleurs parents que seuls. Rien ne s’oppose valablement à ce que les couples homosexuels adoptent des enfants. Un couple qui désire un enfant est prêt à l’aimer, probablement davantage que ceux qui deviennent parents

par accident ou qui ont déjà une nombreuse famille » (15).Dans la logique des droits de l’homme, ce raisonnement est imparable. Par conséquent, loin d’être un allié des opposants au mariage homosexuel, l’argument du docteur René Nicoli se retourne contre ceux qui OÊXWLOLVHQW�HQ�MXVWLÏDQW�OÊDGRSWLRQ�d’enfants par les couples gays et lesbiens.On ne sera donc pas surpris de voir les instances européennes évoluer en faveur du mariage homosexuel.En 1989, un transsexuel britannique, M. Cossey (devenu Mlle Cossey) attaqua son pays d’origine au motif qu’il refusait de reconnaître son « mariage » avec un homme contracté aux Pays-Bas. Le 27 septembre 1990, la Cour européenne des droits de l’homme débouta le plaignant, mais en précisant :« 46. Sans doute certains États

Pourcentage de personnes pour le mariage homosexuel par tranche d’âge (sondage Ifop)

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contractants considéreraient-ils à présent comme valable un mariage entre une personne dans la condition de Mlle Cossey et un homme, mais l’évolution enregistrée jusqu’ici […] ne saurait passer pour la preuve d’un abandon général du concept traditionnel de mariage.Dès lors, la Cour ne juge pas qu’il lui soit loisible d’adopter

une démarche nouvelle en interprétant l’article 12 (art. 12) sur le point dont il s’agit » (16).&Ê�WDLW� G�FODUHU� TXH� OH� MRXU�R®� VXIÏVDPPHQW� GH� SD\V�membres de l’Union européenne auraient permis le mariage KRPRVH[XHO�� OD� &RXU�PRGLÏHUDLW�VD�MXULVSUXGHQFH�&H� MRXU� QÊHVW� FHUWHV� SDV� HQFRUH�venu, mais il arrive. En décembre 2000, la Charte des Droits Fondamentaux de l’Union européenne fut adoptée lors du congrès de Nice. L’article 9 déclarait : « Le droit de se marier et le droit de fonder une famille sont garantis selon les lois nationales qui en régissent l’exercice. » /ÊH[SOLFDWLRQ�RIÏFLHOOH�SU�FLVDLW��« Cet article se fonde sur l’article ���GH�OD�&('+�TXL�VH�OLW�DLQVL� ��Ç$�partir de l’âge nubile, l’homme et la femme ont le droit de se marier et de fonder une famille selon les lois nationales régissant l’exercice de ce droit.” La rédaction

GH�FH�GURLW�D��W��PRGHUQLV�H�DÏQ�de recouvrir les cas dans lesquels les législations nationales reconnaissent d’autres voies que le mariage pour fonder une famille. Cet article n’interdit, ni n’impose l’octroi du statut du mariage à des unions entre personnes du même sexe. Ce droit est donc semblable à celui prévu par la CEDH, mais sa portée peut être plus étendue

lorsque la législation nationale le prévoit » (17).Malgré cette réserve, un nouveau pas était franchi. La Cour européenne des droits de OÊKRPPH� OH� FRQÏUPD� ORUVTXH�dans son arrêt Christine Goodwin F��5��8���UHQGX� OH���� MXLOOHW�������elle déclara :« La Cour constate également que le libellé de l’article 9 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne adoptée récemment s’écarte — et cela ne peut être que délibéré — de celui de l’article 12 de la Convention en ce qu’il exclut la référence à l’homme et à la femme » (18).Un an plus tard, on put lire dans le procès-verbal d’une session du Parlement européen sur la « situation des droits fondamentaux dans l’Union européenne » :« Le Parlement européen,[…]77. demande une fois encore

aux États membres d’abolir toute forme de discrimination — législatives ou de facto — dont sont encore victimes les homosexuels, notamment en matière de droit au mariage et d’adoption d’enfants ;78. se félicite que plusieurs avancées aient été enregistrées en 2002 en Autriche (abolition de l’article 209 du code pénal), en Finlande (reconnaissance des droits des transsexuels) et en Belgique (mariage des homosexuels). »La machine est lancée, rien ne pourra désormais l’arrêter. Pourquoi ? Non parce qu’il existerait un « complot » en faveur des gays, mais parce que, nous l’avons démontré, le mariage homosexuel est la conséquence logique des principes profonds qui sous-tendent la philosophie des droits de l’homme. Dès lors, avec RX� VDQV� )UDQ�RLV� +ROODQGH�� OD�France républicaine autorisera XQ�MRXU�RX�OÊDXWUH�OH�PDULDJH�GHV�gays et des lesbiennes.Je sais fort bien que beaucoup de petits bourgeois républicains centristes ou dits « de droite » refusent catégoriquement cette révolution sociétale. Mais l’avertissement de l’abbé de Salinis rappelé plus haut devrait être gravé dans tous les esprits ; il éviterait bien des désillusions. Nos petits bourgeois se revendiquent des droits de l’homme et du libéralisme MXVTXÊ�� XQ� FHUWDLQ� SRLQW�� ,OV�ignorent cependant que chaque

Hitler qui, dans Mein Kampf, rappelait en plusieurs endroits la nécessité de se soumettre aux lois de la Nature.

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Le mariage homosexuel : conséquence de la philosophie des droits de l’homme

génération pousse un peu plus loin les conséquences logiques des principes adoptés. Pour le mariage homosexuel, le sondage de l’I.F.O.P. le démontre avec �FODW���SOXV�OHV�JHQV�VRQW�MHXQHV��plus le pourcentage de ceux qui l’acceptent est élevé. Ils sont 44 % chez les plus de 65 ans, et 81 % chez les 18-24 ans. Mais c’est parce que depuis plus de deux siècles, les principes philosophiques individualistes sont admis, que chaque génération est davantage perméable à la propagande et que le mariage homosexuel sera bientôt autorisé.On comprendra donc pourquoi MH� SU�I�UH� +LWOHU� TXL�� GDQV�Mein Kampf, rappelait en plusieurs endroits la nécessité de se soumettre aux lois de la Nature. Certes, il n’est pas question de refuser toutes les OLEHUW�V� G�ÏQLHV� SDU� OHV� GURLWV�de l’homme. Nombre d’entre elles sont même légitimes et

à défendre. Mais ce qu’il faut combattre, c’est la philosophie anthropocentrique des droits de l’homme, une philosophie qui génère l’individualisme mortifère.Dernière remarque pour ÏQLU� �� QRV� SHWLWV� ERXUJHRLV�« de droite » font bien sûr preuve d’antinazisme et, pour MXVWLÏHU� OHXU� G�PDUFKH�� LOV�commencent par croire au prétendu « Holocauste ». Ils feraient bien de lire l’ouvrage de Fabrice Midal : Auschwitz,

l’impossible regard, paru en septembre dernier aux éditions Seuil. Le chapitre 16 est intitulé : « L’essence de l’être humain en question ». On lit :« La Shoah implique qu’il y aurait

une essence de l’être humain

qui permettrait d’en exclure

un certain nombre — le paria

sous tous ses visages. Les juifs

ne sont pas pour les nazis une

humanité inférieure mais bien

pire encore, “une antirace, un

élément corrupteur sans essence

propre”. Il y a là un aspect décisif

du nazisme.

Pour cette raison, refuser le

nazisme, c’est refuser toute

détermination d’une essence de

l’être humain. C’est accepter le

vertige qui le constitue. Assumer

que l’être humain soit un être des

lointains. Qu’il n’a pas d’identité

Ï[H�� TXÊLO� HVW� WRXMRXUV� GÊDYDQFH�travaillé par la différence d’avec

lui-même. Il n’y a pas d’essence

de l’être humain. Il n’y a pas

d’essence du juif, du chrétien ou

du musulman, de l’homme et de

la femme » (19).Quand on sait que l’ « Holo-causte » est un bobard qui sert Big Brother, on n’est guère étonné qu’il permette d’attaquer FH� TXL�� SU�FLV�PHQW�� G�ÏQLW� OD�pensée de droite : la croyance en l’existence d’une nature humaine dérivant d’un ordre naturel supérieur, lui-même issu de la volonté du Créateur.

(1) : KWWS���ZZZ�MXULFDI�RUJ�DUUHW�CONSEILDELEUROPE-COUREUROPEENNEDESDROITSDELHOMME-19861017-953281.(2)���KWWS���SOGK�RUJ�PRRWFRXUW�GRFV�MXUL�dudgeon_fr.pdf. L’arrêt en question date du 22 octobre 1981.(3) : Voy. A. Girard, « Structures sociales et structures de l’opinion », in L’opinion

publique (éd. Chronique sociale de France, Lyon, 1966), p. 130.(4) : Voy. abbé Louis-Antoine de Salinis, Divinité de l’Église, t. I (éd. Tolra et Haton, Paris, 1865), p. 103.(5) : Voy. Code Civil, art. 144, commentaires, al. 4 : « Clauses de célibat ».(6) : Voy. collectif, le Guide Républicain,

(éd. Delagrave, 2004), p. 51.(7) : Ibid, p. 41.(8) : Voy. Élisabeth Badinter, L’un est l’autre (éd. Odile Jacob, 1986), p. 301.(9) : Voy. Henri Marion, Leçons de morale (Librairie Classique Armand Colin et Cie, Paris, 1882), pp. 305 et 306.(10) : Voy. Ad. Franck, Éléments de morale (Librairie Hachette et Cie, Paris, 1881), p. 76.(11) : Voy. E. Badinter, op. cit., p. 310.(12) : Voy. E. Badinter, op. cit., pp. 306-307.(13) : Voy. Docteur René Nicoli, L’univers de

la sexualité (éd. Resma, 1970), p. 158.(14) : Voy. Kathrin Perutz, Le mariage en

accusation (éd. Calmann-Lévy, 1974), p. 162.

(15) : Ibid., p. 168.(16) : Voy. l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Cossey c/ Royaume Uni, réf. 16/1989/176/232 (http://host.uniroma3.it/progetti/cedir/cedir/Giur_doc/Corte_Stras/Cossey_UK1990.pdf).(17) : http://www.europarl.europa.eu/charter/pdf/04473_fr.pdf.(18) : Voir le texte de l’arrêt Christine *RRGZLQ�F��5��8���UHQGX�OH����MXLOOHW�������disponible à l’adresse suivante : http://www.france.qrd.org/texts/Europe/goodwin.html.(19) : Voy. Fabrice Midal, Auschwitz,

l’impossible regard (éd. du Seuil, 2012), pp. 137-138.

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TiTre de la rubrique

Sans Concession N° 78

20

En 2009 est paru aux éditions Le Livre de Poche le témoignage d’un prétendu survivant de Treblinka, Chil Rajchman. Son titre : Je suis le dernier Juif. Treblinka

(1942-1943).Notons tout d’abord que la couverture est trompeuse. La photo n’a pas été prise à Treblinka, mais à Majdanek. Elle montre la double rangée de barbelés qui séparaient les différents blocs du camp. Mais il y a beaucoup plus grave…Au sujet des « chambres à gaz », l’auteur écrit :« La chambre à gaz mesure sept mètres sur sept. Au milieu

de la pièce, il y a des pommeaux de douche, par lesquels le

gaz arrive. Un tuyau court le long du mur pour extraire l’air.

Les portes sont entourées de rembourrage. Le bâtiment

compte dix chambres à gaz comme celle-ci » (p. 37). &HWWH�GHVFULSWLRQ�HVW�FRPSDWLEOH�DYHF�OD�WK�VH�RIÏFLHOOH��Elle est toutefois trop vague pour être analysée.Au sujet des prétendues fosses de crémation, il en donne des dimensions également compatibles avec ce que l’on peut lire ailleurs : cinquante mètres de longueur, trente mètres de large et « d’une profondeur équivalente

à plusieurs étages d’habitation, quatre selon mon

estimation » (p. 80).Deux bons points, donc, pour ce « témoin ». Mais rapidement, on sombre dans le grand guignol révélateur du mensonge. A la page 79, ainsi, Chil Rajchman prétend décrire les victimes des grandes chambres à gaz, où la mort survenait en 45 minutes environ. On lit :« ils avaient le visage tout noir, comme s’ils avaient été

EU°O�V�� OHV� FRUSV� �WDLHQW� JRQÐ�V� HW� EOHXV�� ,OV� DYDLHQW�tellement serré les mâchoires qu’il était impossible de

les leur desserrer pour accéder aux couronnes en or, il

fallait parfois arracher les vraies dents pour leur ouvrir la

bouche » (p. 79). Je passe rapidement sur le visage noirci ; pourquoi pas, si le gazage était réalisé avec de la fumée d’échappement d’un moteur diesel ? Mais je rappellerai :

“Miracles”à Treblinka

Rajchmann, Je suis le dernier Juif, p. 37

Rajchmann, Je suis le dernier Juif, p. 79

Rajchmann, Je suis le dernier Juif, p. 80

Rajchmann, Je suis le dernier Juif, p. 90

ETIENNE LEJEUNE

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Sans ConcessionN° 78

“Miracles” à Treblinka

- qu’une intoxication au monoxyde de carbone laisse le corps rouge, et non bleu ;�� TXÊXQ� FDGDYUH�QH�JRQÐH�SDV� HQ�TXHOTXHV�GL]DLQHV�GH�minutes ;- que la raideur des muscles, même si elle pouvait survenir rapidement, ne peut empêcher d’ouvrir la bouche du cadavre.Plus loin, Chil Rajchman prétend que le sang des gens enterrés dans les fosses remontait à la surface pendant la nuit et repoussait la terre. Sans rire, il explique ce phénomène par le fait que « le sang des dizaines de PLOOLHUV�GH�YLFWLPHV�QH�SHXW�UHSRVHU�HQ�SDL[��,O�UHPRQWH���la surface ». C’est totalement grotesque.Mais le paroxysme du ridicule arrive un peu plus loin, à la page 104, lorsqu’il raconte qu’un jour, le feu fut mis par accident à une fosse d’inhumation :« Le sang d’un quart de million de personnes s’est HQÐDPP�� HW� D� EU°O�� MXVTXÊDX� OHQGHPDLQ� VRLU�� /D�direction du camp au grand complet est venue contempler le miracle. Elle a admiré ce feu grandiose. Le sang est remonté à la surface et s’est embrasé comme du combustible� x� �S�� ������ /H� VDQJ� TXL� VÊHQÐDPPH�miraculeusement ! Si l’on veut croire à ce miracle, il faut en déduire que Dieu aidait les Allemands dans leur tâche… Désolé, mais je ne marche pas.Dernière remarque. Le témoin raconte qu’au moment GH�YLGHU�OHV�IRVVHV�DÏQ�GH�IDLUH�GLVSDUD¤WUH�OHV�FDGDYUHV��des bûchers à haut rendement furent construits avec des rails. Leurs dimensions : trente mètres de long sur un mètre cinquante de large. Il explique : « on dispose une première couche de femmes, des femmes particulièrement grosses, le ventre contre les rails. » (p. 100). Puis on jette d’autres corps pour former un tas pyramidal « MXVTXÊ��GHX[�P�WUHV�GH�KDXW » (id.). Cela fait, nous dit-il, « MXVTXÊ��GHX[�PLOOH�FLQT�FHQW�FDGDYUHV�VXU�OH�bûcher » (id.). Or, je rappelle que cinq corps entassés en désordre occupent un volume d’environ 0,5 mètre cube (voy. SC, n° 76, juillet-août 2012, p. 41). Un rapide calcul montre que pour entasser 2 500 corps sur un tel bûcher, la hauteur du tas pyramidal devrait atteindre plus de 80 m. Chil Rajchman raconte donc n’importe quoi. Il est l’exemple typique de ces faux témoins qui pullulent depuis 1945…

Rajchmann, Je suis le dernier Juif, p. 104

Rajchmann, Je suis le dernier Juif, p. 100

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J’ÉTAIS DANS L’ORCHESTRE DE BIRKENAU

Dossier

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Sans ConcessionN°78

23“J’étais dans l’orchestre de Birkenau”

J’ÉTAIS DANS

L’ORCHESTRE

DE BIRKENAU

“ ”´� Un livre qui révèle les mensonges par

RPLVVLRQ�GH�OD�WK�VH�RIÏFLHOOH

´� &RQGLWLRQV�GH�YLH�DX�FDPS���GHV�responsabilités partagées

´� Le mythe de la fraternité universelle entre

détenus

´� Déportés privilégiés

´� /HV�WUDÏFV�GDQV�OHV�FDPSV

´� '�WHQXV�HW�66�FKDQWHQW�HW�WULQTXHQW�ensemble

´� 5�SRQVH�DX[�REMHFWLRQV

´� &RQFOXVLRQ

VINCENT REYNOUARD

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Sans Concession N°78

24

L’étude qui va suivre est partie de la lecture d’un livre que j’ai uniquement pu consulter dans son édition originale sous forme d’un microfilm. Il s’agit d’un témoignage sur Auschwitz écrit par Szyman Laks (en collaboration avec Roger Coudy) et intitulé : Musiques d’un autre monde [1]. Au départ, je voulais uniquement rédiger une note de

lecture. Mais certaines informations étaient si surprenantes que j’ai voulu les recouper avec d’autres documents. D’où un travail qui s’est considérablement épaissi. Je crois toutefois que c’était nécessaire, afin de répondre à l’habituelle objection que formulent les fanatiques de la Mémoire quand on leur présente un témoignage qui contredit leurs thèses : « C’est une exception, donc cela n’a aucune valeur », répondent-ils. Naturellement, cette étude n’est pas exhaustive. Aussi ne permet-elle pas de porter des conclusions générales concernant la vie dans les camps. Mais je crois qu’elle suffit pour démontrer la fausseté de la thèse officielle, notamment lorsque celle-ci brosse un portrait des camps en noir et blanc, sans aucune nuance. C’est déjà un premier point. La suite, c’est-à-dire la conquête de la vérité sur le système concentrationnaire allemand, ne pourra être réalisée que par équipes organisées. Car la tâche est immense. Tout reste à faire...

UN LIVRE QUI RÉVÈLE LES MENSONGES PAR OMISSION DE LA THÈSE OFFICIELLE

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25“J’étais dans l’orchestre de Birkenau”

En 1948 parut en France un livre encore peu connu malgré une réédition et deux traductions en langues étrangères : Musiques d’un autre monde. L’auteur, Szyman Laks,

était un survivant d’Auschwitz-Birkenau. Dans le camp, il avait été affecté au « Commando Lager Kapelle », c’est-à-dire à la fanfare qui, entre autres, accompagnait le départ des commandos vers leur lieu de travail (2). Il écrit : « Deux ans se sont écoulés depuis la libération et, malgré toutes les enquêtes qui ont été faites, malgré la quantité de livres parus, PDOJU��P PH� OHV� ÏOPV� WRXUQ�V� VXU� OHV� FDPSV�de concentration, mes interlocuteurs sont toujours stupéfaits chaque fois qu’il m’arrive de parler d’Auschwitz en général et de son activité musicale en particulier » (p. 10). Preuve que, dès le début, les vainqueurs occultaient tout ce qui pouvait contredire la thèse — leur thèse — selon laquelle les camps étaient des enfers sur terre. Dans son ouvrage, d’ailleurs, l’auteur apporte des précisions qui, même aujourd’hui, en surprendraient plus d’un. Il déclare : « Le camp UHFHYDLW� OHV� TXDQWLW�V� GÊDOLPHQWV� VXIÏVDQW�� HQ�théorie, à la nourriture de tous les détenus. Des UDSSRUWV�RIÏFLHOV��FRQFHUQDQW�OD�SHUFHSWLRQ�HW�OD�distribution des denrées, étaient journellement fournis au centre de ravitaillement allemand. &HV� UDSSRUWV� VS�FLÏDLHQW�� HQWUH� DXWUHV�� OHV�quantités de produits de choix alloués aux enfants, aux faibles, aux malades, aux vieillards et aux femmes enceintes »(p. 137) Et plus loin : « Nous avions un hôpital quasi moderne, avec XQ� SHUVRQQHO� TXDOLÏ��� DYHF� GH� QRPEUHXVHV�installations thérapeutiques et avec des rations supplémentaires de nourriture prévues pour les malades, telles que pain blanc, semoule, sucre, pâtes alimentaires, etc. » (id.). Szyman Laks évoque également la maison close qui existait à Auschwitz et dont le « personnel » était choisi par les SS (p. 165). L’existence de cet établissement permettait d’éviter ou au moins de limiter les relations

homosexuelles comme il y en eut par exemple au Struthof (3). L’accès en était toutefois réglementé : « Il existe, certes, une maison SXEOLTXH� RIÏFLHOOH� ��$XVFKZLW]� ,� �� OÊXVDJH� GHV�détenus, mais tout le monde n’y est pas admis. Ne peuvent y aller, et périodiquement, à tour de rôle, que ceux qui ont été désignés par le service contrôleur » (4). D’où de nombreux déportés qui forniquaient ailleurs, notamment avec OHV�IHPPHV�HW� OHV�ÏOOHV�GX�FDPS�GHV�W]LJDQHV��Szyman Laks explique : « Les tziganes sont des fumeurs invétérés. Nous voyons fréquemment GHV� JDU�RQV� HW� GHV� ÏOOHV� GH� KXLW� �� GRX]H� DQV�IXPHU�RX�PHQGLHU�GHV�P�JRWV�� /HV�ÏOOHV�� SRXU�

se procurer des cigarettes, se prostituent au plus offrant. Il y en a de fort jolies qui coûtent jusqu’à dix cigarettes. Il y en a aussi que l’on peut avoir pour une somme plus modique, une ou deux cigarettes, même pour la moitié d’une. Certaines ont la réputation de s’offrir pour une ou deux bouffées seulement. Cela étant connu de tous, nombreux sont ceux qui souhaitent faire partie d’une corvée au camp tzigane [...]. Aussi le camp tzigane regorge-t-il de visiteurs de toutes catégories et son aspect rappelle singulièrement celui d’un marché oriental (p. 146) ». &HV�G�FODUDWLRQV�FRQWUHGLVHQW�OD�WK�VH�RIÏFLHOOH�selon laquelle dans les camps, et notamment à Auschwitz, les détenus étaient très vite réduits à l’état de loques humaines. Car dans ce cas, les déportés n’auraient pas cherché à forniquer au point de rendre le camp des tziganes semblable à un bazar.

« Nous avions un hôpital quasi moderne, avec un personnel qualifié, avec de nombreuses

installations thérapeutiques et avec des rations supplémentaires de nourriture prévues

pour les malades, telles que pain blanc, semoule, sucre, pâtes alimentaires, etc.»

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Le cas des tziganes

L’auteur balayait à l’avance la thèse

RIÏFLHOOH� VHORQ� ODTXHOOH� �� $XVFKZLW]��les Allemands auraient volontairement

laissé mourir les tziganes faute de soins.

,O� FRQÏUPH� TXÊDX� FDPS� GHV� W]LJDQHV��« enfants, femmes, vieillards et hommes valides »

vivaient en communauté, dans une « odieuse

promiscuité » où la « saleté [régnait] en maîtresse »

et, donc, qu’il en résulta l’apparition de « maladies

contagieuses » (p. 145). Loin, toutefois, de laisser

les malades mourir, les autorités réquisitionnèrent

« une demi-douzaine de baraques pour constituer

une ambulance-hôpital au seul usage de ce camp »

(p. 145). Preuve qu’elles s’inquiétaient de leur sort.

Malgré cela, la mortalité fut très élevée, notamment

chez les enfants. Certains en déduiront que, dans

leur perversité, les Allemands avaient construit des

LQÏUPHULHV�PDLV�VDQV�OHV�SRXUYRLU�HQ�P�GLFDPHQWV��Ils se trompent. L’auteur explique la raison de

cette mortalité élevée : « Les tziganes sont opposés

systématiquement aux soins médicaux et ce n’est

que lorsqu’ils ne peuvent plus tenir debout que les

malades consentent à se faire hospitaliser. Aussi

leur hôpital n’est-il qu’une antichambre de la

mort » (id). Toujours à propos de cette population,

l’auteur donne cette autre précision importante :

« Les membres d’une même famille vivent les

uns sur les autres. Les pères privent les enfants

et les femmes de leurs rations pour les échanger

contre des cigarettes ou d’autres fantaisies. Les

jeunes, d’ailleurs, leur rendent la pareille, quand

l’occasion s’en présente » (pp. 145-146). Gardons-

nous donc d’attribuer à la « perversité nazie »

CONDITIONS DE VIE AU CAMPDES RESPONSABILITÉS PARTAGÉES

Buchenwald,juin 1944. Photo prise clandestinement par Georges Angeli

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27“J’étais dans l’orchestre de Birkenau”

tous les malheurs qui survenaient dans les camps. En certaines occurrences, ces malheurs étaient dus à des facteurs extérieurs, indépendants des autorités.

Anciens et nouveauxCertains pourront me reprocher de prendre l’exemple particulier des tziganes pour formuler une déclaration à caractère général. Je leur répondrai que même à se désintéresser de cette minorité, on découvre que bien des aspects de la vie concentrationnaire étaient dus à certains déportés eux-mêmes. Revenons au livre Musiques

d’un autre monde. Lorsque Szyman Laks arriva à $XVFKZLW]��OÊDQLPDWHXU�RIÏFLHO�GX�&RPPDQGR�/DJHU�Kapelle était un Allemand (ou, plus exactement un mi-Allemand, mi-Polonais) répondant au nom de Kopka. Mais le véritable animateur était un... juif, André. Ce dernier était en effet le seul « à posséder

les capacités d’un chef de musique » (p. 38). Il était notamment capable « d’harmoniser et d’orchestrer

n’importe quel morceau de musique », même s’il n’en avait qu’une ligne et même s’il était obligé de le reconstituer de mémoire (id.). Aussi était-ce lui qui avait « la charge d’écrire toutes les orchestrations

pour [la] musique, de diriger les répétitions, en

mettant au point tous les détails d’exécution » (id.). Le rôle de Kopka « aurait dû se réduire à battre le

tambour » (id).S’il en allait autrement, c’est tout d’abord parce que Kopka était d’ascendance allemande ; mais aussi — et surtout — parce que celui-ci était, dans le groupe de musiciens, le plus ancien. L’auteur explique : « Ceux qui se trouvent au camp depuis

longtemps ont des numéros moins élevés que ceux

nouvellement arrivés. Les premiers jouissent, a

priori, d’avantages indiscutables. Les autres, appelés

dédaigneusement “millionnaires”, sont relégués au

dernier plan. Les anciens ont le droit de malmener

les “millionnaires”, de leur faire exécuter les corvées

pour leurs besoins personnels, de les battre, de

les punir, bref, de les avilir sans qu’ils puissent

protester » (p. 39). Dans son témoignage paru sous le titre Vingt mois à Auschwitz, la polonaise Pelagia

Lewinska fait la même constatation : « Les couches

supérieures, écrit-elle, traitent les inférieures avec

hauteur et mépris » (Lewinska, p. 135). L’auteur de Musiques d’un autre monde précise : « Kopka,

Allemand, numéro de la série 11 000, chef de

musique par-dessus le marché, est, pratiquement

tabou. Seuls les SS peuvent lever la main sur lui.

Lucien et André [deux autres membres du Lager Kapelle] appartiennent à la même génération des

���������+HLQ]������������$OL[�������������HQÏQ��PRL�même, 130 000. En l’occurrence, c’est donc moi le

“millionnaire”. Comment ne pas expliquer à présent

cet air de supériorité que prennent mes confrères

et même cet Alix qui pourtant n’est arrivé au camp

qu’à peine trois semaines avant moi. Je trouve alors

presque naturel le tutoiement de mes camarades,

tandis que je n’ose pas me permettre cette liberté à

leur égard » (p. 39).On le voit : comme dans tous les mondes clos, une hiérarchie et des règles de jeu très strictes s’étaient instaurées à Auschwitz, sans que les gardiens ne soient intervenus. Les « anciens » régnaient sur les « nouveaux », les « bleus », les « millionnaires ». Connaissant tous les aspects du camp, ils en organisaient la vie, souvent même FRQWUH� OHV� GLUHFWLYHV� RIÏFLHOOHV� �QRXV� OH� YHUURQV�GDQV�OH�FKDSLWUH�FRQVDFU��DX[�WUDÏFV������/ÊDQFLHQQH�déportée Pelagia Lewinska souligne d’ailleurs que les « détenus gradés pénétraient la vie du camp

bien plus profondément et mieux que ne l’eussent

pu faire les Allemands en uniforme » (Lewinska, p. 174). Preuve que l’existence était en grande partie organisée par eux, pas par les gardiens. Mais de cette constatation en découle logiquement une autre : puisque les « anciens » organisaient l’existence, ils étaient, au moins en partie, responsables de certains désagréments survenus au camp...

Comme dans tous les mondes clos, une hiérarchie et des règles de jeu très strictes

s’étaient instaurées à Auschwitz.

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Le cas révélateur du StruthofA ce sujet, il me semble utile de mentionner le cas très révélateur du Struthof. Ce camp était entièrement géré par les déportés eux-mêmes. Un ancien déporté, Aimé Spitz, souligne : « La direction civile, c’est-à-dire la direction interne du FDPS���WDLW�FRQÏ�H�SDU�OHV�Ç66È���GHV�G�WHQXV�SRXU�la plupart allemands condamnés de droit commun. Ceux-ci accomplissaient la besogne. Ils étaient maîtres absolus de la vie de leurs camarades » (5). $IÏUPDWLRQ� FRQÏUP�H� SDU� XQ� DXWUH� DQFLHQ� GX�camp, André Ragot, qui raconte : « On nous explique que le camp est un camp de travail qui s’administre lui-même, avec des détenus à tous les rouages, ce qui ne laisse aux SS qu’un rôle de surveillance (...) » (Ragot, p. 15). Par conséquent, si une fraternité indestructible avait lié tous les détenus, les conditions de vie auraient dû être sinon bonnes, au moins très supportables. Mais ce n’était pas le cas. Comme ailleurs, elles étaient dures, très dures même.

Naturellement, certains pourront répondre que la faute première revenait aux « nazis » qui ne donnaient pas les moyens aux détenus gradés d’organiser comme il le fallait le camp. C’est cependant oublier qu’un ancien déporté au Struthof, François Kozlik, n’a pas hésité à écrire que : « (...) par l’attitude de ces derniers [les Kapos], les misères des détenus s’aggravèrent de beaucoup » (Kozlik, p. 4.). Plus net encore, André Ragot parle d’un « bon Kapo », un certain Guttmann, et laisse échapper cet aveu : « Si tous les Kapos avaient ressemblé à celui-là, nous aurions eu une vie acceptable dans les blocks » (Ragot, p. 71). Preuve que les mauvaises conditions de vie étaient souvent dues aux « détenus gradés », et à eux seuls. D’ailleurs, un autre ancien du Struthof, Eugène Marlot, déclare que, si au camp, les rations étaient inférieures à celle prévues, « les prélèvements

effectués par les Kapos […] n’y étaient pas pour rien » (6). Et après avoir raconté l’assassinat, par d’autres détenus, d’un « mauvais » Kapo admis à OÊLQÏUPHULH��$QGU��5DJRW�VÊH[FODPH���l��Le malheur, c’est que nous n’ayons pas pu tuer tous ces Kapos, déchets de la population » (Ragot, p. 74.). A aucun moment, André Ragot ne dira cela pour les SS... On ne saurait en être surpris. Car quand les « SS » étaient informés des agissements malhonnêtes d’un détenu gradé, ils agissaient. Un exemple ÐDJUDQW� HVW� FHOXL� GX� .DSR� %HVVHU�� $X� 6WUXWKRI��Besser surveillait les prisonniers qui transportaient des pierres dans des brouettes. Ayant en charge les sandwichs du midi, il retaillait les croûtons de pain, volait du saucisson ou de la margarine, si bien qu’il « grossissait à vue d’œil » pendant que les membres du commando, eux, maigrissaient (Spitz, p. 20). Ses agissements vinrent à la connaissance d’un autre Kapo, un allemand, qui surveillait le « commando du charbon » (Kohlenbunker). Après s’être assuré, par l’observation discrète, que les accusations portées contre Besser étaient fondées, il prévint le chef du camp : « Celui-ci se cacha et, en compagnie du Kapo du “ Kohlenbunker ”, observèrent Besser. Subitement, les deux surgirent de leur cachette et se ruèrent sur Besser. D’un coup de poing, le “Lagerältester” lui cassa le nez puis il fut roué de coups en notre présence. Le “Lagerältester” alla prévenir les “SS” de ce qui venait de se passer. Besser fut cueilli par eux et amené au commando “Kartoffelkeller” où il dut charrier au pas de gymnastique des brouettes chargées de rochers. Un “SS” avec chien policier le suivait. Chaque fois que Besser voulait se reposer, le “SS” le faisait mordre par son chien. Besser suait le sang. Ainsi durant plusieurs jours notre Kapo dut IDLUH� OD�P PH�PDQÄXYUH�SRXU�ÏQDOHPHQW� WUH�PLV�en prison » (ibid., p. 21.). Besser fut « envoyé dans un autre camp, mais il mourut lors du voyage, assassiné par des déportés “vengeurs” » (id.).Cette anecdote est intéressante pour deux raisons : D�� HOOH� FRQÏUPH� TXH�� GDQV� OHV� FDPSV�� FHUWDLQV�détenus eux-mêmes contribuèrent à la dégradation des conditions de vie qui n’étaient

Tronquer ses souvenirs ou ceux d’autrui est chose facile...

Dossier

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29“J’étais dans l’orchestre de Birkenau”

déjà pas très brillantes (ici, un Kapo sous-alimente

davantage ses camarades) ;

E����VXSSRVHU�TXH�%HVVHU�DLW�ÏQDOHPHQW�VXUY�FX���VD�déportation, il aurait pu raconter partout que dans

le commando où il avait travaillé, les SS l’avaient

contraint à transporter des pierres au pas de course

et l’avaient fait mordre par leur chien dès qu’il

voulait se reposer. Il aurait pu le raconter la main sur

le cœur, jurant que c’était vrai, en omettant toutefois

de dire qu’il s’agissait d’une punition parce qu’il

avait volé ses camarades... D’où la question que l’on

peut se poser : combien de déportés ont-ils raconté

des événements exceptionnels (survenus lors de

punitions par exemple), en les présentant comme

quotidiens ?

Certains pourront m’accuser d’exagérer. Mais le

public à tendance à ignorer combien il est facile de

WURQTXHU� OHV� VRXYHQLUV� DÏQ� GH� EURVVHU� XQ� WDEOHDX�beaucoup plus sombre que ne l’était la réalité.

Ouvrons par exemple l’ouvrage de l’ancienne

déportée Suzanne Birnbaum. Sur Bergen-Belsen,

on peut extraire le passage suivant : « On nous met

700 dans un block de 300, et comme il n’y a pas de

OLW��RQ�FRXFKH�VXU� OD�ÏEUH�GH�ERLV��SDU� WHUUH� >���@��'HV�disputes, des bagarres éclatent. Nous nous écrasons,

nous nous enchevêtrons, nous nous poussons, nous

nous disputons deux centimètres de terrain : coups de

poings, coups de pieds, coups de gamelles qui durent

toute la nuit » (Birnbaum, p. 141). Il est alors aisé de

dire : « Voyez quelles furent les conditions terribles

qui régnaient dans le camp de Bergen-Belsen ». Or,

trois paragraphes plus haut, Suzanne Birnbaum a

l’honnêteté de dévoiler les causes de cet entassement

dans une baraque trop petite. Elle raconte que, dans

un premier temps, elles avaient été logées dans

un block en toile peinte, avec charpente en bois.

Là, chaque déportée avait sa couchette avec sa

couverture. Mais peu après, une bourrasque se leva,

comme elle « n’en avai[t] jamais vu », « avec pluie,

éclairs, tonnerre » (ibid���S��������/H�YHQW�VRXIÐD�VL�IRUW�que six ou sept blocks en toile furent détruits, dont

celui où Suzanne Birnbaum résidait. Ce fait obligea

les autorités à reloger les sans-abris dans d’autres

baraques déjà occupées, d’où surpopulation (ibid.,

pp. 140-141). Mais cette situation fut temporaire.

Deux jours plus tard, les déportées furent menées

dans un block « construit en bois cette fois », avec

des « lits à trois étages superposés » et, au fond, « un

lavabo avec eau courante et W.C. » (ibid., pp. 142-143).

Suzanne Birnbaum ajoute : « Dès le premier jour, on

nous distribua un gros paquet de lessive pour deux.

On pouvait ainsi se laver et laver son linge, c’était

presque trop beau » (ibid., p. 143). Tout était donc

rentré dans l’ordre...

Voilà pourquoi la prudence est de mise face

aux témoignages qui dépeignent une situation

entièrement noire. Tronquer ses souvenirs ou ceux

d’autrui est chose facile...

Déportés du camp de Neuengamme construisant le canal Dove-Elbe, en 1941-42.L’homme entouré est un Kapo. Son occupation : surveiller les travaux.

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Sans Concession N°78

30

Dans sa brochure intitulée :

L’Impossible oubli. La déportation dans les camps nazis, la F.N.D.I.R.P.

cite un ancien détenu à Dachau, le

Révérend Père (RP) Roth, qui, plus

tard, écrivit : « Notre expérience fondamentale fut celle-ci : nous étions des hommes de diverses nationalités, de toutes les couches sociales, de toutes les conceptions philosophiques ; mais en tant qu’hommes différents, nous étions des Allemands, des Français, des Hollandais et des Russes. Nous étions, sauf exceptions, des camarades. Oui, nous étions des Allemands, des Français, des Hollandais et des Russes. Nous étions des ministres du culte catholique et du culte protestant et des communistes. Mais quelque différents que nous fussions, selon la nationalité, l’état social, les convictions philosophiques, nous étions et nous le sentions, des hommes et des frères. « Détenus, nous prouvions qu’il est possible de s’estimer malgré toutes les différences, d’admettre le point de vue des autres sans s’entre-déchirer. Chez nous, au camp, il était courant de voir le prêtre catholique et le pasteur protestant partager le dernier morceau de pain avec le Russe bolchevique, et le communiste appeler le prêtre auprès d’un camarade mourant quand celui-ci demandait le secours de la religion. Le religieux catholique

s’intéressait au communiste et celui-ci faisait tout pour sauver le religieux. Nous apprîmes que, malgré toutes les divergences idéologiques, nous pouvions être unis dans l’amour, nous comprendre et nous entraider [...]. Des barrières tombaient, des possibilités d’entente naissaient, nous apprenions à nous estimer les uns les autres » (7).A cela, on peut opposer un autre détenu à Dachau,

Georges Briquet, qui, dans une plaquette parue peu

DSU�V�OD�ÏQ�GH�OD�JXHUUH��UDFRQWD���« L’histoire de la tour de Babel recommence : confusion des races, confusion des langues ! Comme on a mélangé, en outre, les “politiques” et les “droits communs”, les Russes rouges et les Ukrainiens, des luttes sournoises s’esquissent, le vol est permanent, la rixe quotidienne. [...] il est, en Europe, des races plus voleuses que les autres et lorsque [au moment

de la toilette du matin] vous vous courbez sous le robinet, ne vous étonnez pas, en vous relevant, si votre serviette a disparu avec votre pull-over ou tous les autres objets qui étaient exactement au-dessus de votre tête. C’est un drame parce qu’il est pénible de voir disparaître les quelques petites choses qui vous donnent encore l’illusion que quelque chose vous appartient. C’est un drame, parce qu’il est douloureux de constater que ce sont vos compagnons de captivité qui vous volent, vous rendant ainsi plus dure une vie que vos geôliers

LE MYTHE DE LA

FRATERNITÉ UNIVERSELLE ENTRE DÉTENUS

L’histoire officielle, telle qu’elle est présentée au grand public, prétend que, dans les camps, une fraternité universelle aurait soudé l’immense majorité des détenus. Lorsque la réalité dicte des conditions de vie aussi rigoureuses, cette conception humaniste du monde cède le pas aux règles du milieu.

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31“J’étais dans l’orchestre de Birkenau”

communs s’appliquent déjà à rendre impossible » (8). On peut également opposer un ancien détenu au Struthof, François Kozlik, qui déclare : « A elle seule déjà cette promiscuité avec des criminels représentait pour tout homme honnête un supplice terrible et de plus elle était un obstacle à toute union entre les détenus contre les SS » (9).Ces descriptions sont certes moins réconfortantes que la première, mais elles sont, hélas, plus conformes à la nature humaine. Sans surprise, d’ailleurs, Szyman Laks détruit ce mythe de la fraternité universelle entre déportés. Dans son ouvrage, il parle de la « vie insouciante que menaient les détenus privilégiés » alors que les « pauvres » trimaient, du « mépris des forts pour les faibles », de l’ « indifférence avec laquelle les bien-portants croisaient un mourant », de la « joie LUU�Ð�FKLH�x�DYHF� ODTXHOOH� OHV�G�SRUW�V�WUDÏTXDQWV�(j’y reviendrai plus loin) accueillaient l’arrivée d’un nouveau convoi de juifs, sachant qu’on allait saisir les bagages des nouveaux venus (p. 135). Il n’est SDV�OH�VHXO��3HODJLD�/HZLQVND�TXDOLÏH�$XVFKZLW]�GH�« “jungle” où l’égoïsme brutal, la ruse, [le] manque d’égard envers les êtres physiquement plus faibles, dominaient le sens de la solidarité humaine » �/HZLQVND�� S�� ������ /HV� DQHFGRWHV� TXL� FRQÏUPHQW�ces assertions sont nombreuses. En voici quelques-unes. Dans son témoignage sur Dora, André

5RJHULH�UDFRQWH�VRQ�V�MRXU���OÊLQÏUPHULH�DORUV�TXH��suite à une épidémie de typhus, la mort faisait un « ravage inouï ». Il écrit : « [...] pendant que les Français maigrissent et disparaissent les uns après les autres, les Polonais, eux, se nourrissent. Je ne veux pas juger un peuple sur le nombre de ceux qui vécurent dans les camps, mais dans toutes mes

résidences forcées en Allemagne, j’ai pu constater que les Polonais sont odieux. Dans ce block où tant de misères sont accumulées, où nous mangeons le minimum de nourriture pour ne pas mourir trop vite de faim, la Croix-Rouge polonaise donne à ses ressortissants du pain presque à volonté et de la soupe trois fois par semaine, et quelle soupe ! L’odeur nous en arrive aux narines [...]. Mais jamais il n’y a de soupe pour nous, jamais il n’y a de pain »(Rogerie, p. 59).De son côté, André Ragot explique que lors de son séjour au Revier du Struthof, la chambre qu’il occupait était peuplée par huit Norvégiens — car

Comme dans tous les mondes clos où les conditions de vie étaient dures, des règles

non écrites surgissent et les populations sont séparées en classes bien distinctes

Dessin de David Olère

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le médecin chef était un Norvégien qui privilégiait ses compatriotes — et un Polonais. Il écrit : « Deux fois par semaine, le Polonais reçoit un colis de sa famille et, chaque fois, il fait partager le reste du précédent par le Stubiendienst norvégien qui garde presque tout pour lui. Et pourtant, les Norvégiens viennent de recevoir leur premier colis de la Croix-5RXJH�GDQRLVH��XQ�FROLV�PDJQLÏTXH�HQ�TXDQWLW��HW�en qualité. Mais ils gardent tout égoïstement et ils agiront toujours ainsi par la suite » (Ragot, pp. 64-65). Lorsque, plus tard, le docteur Ragot devint médecin au Revier, il dut changer tout le personnel, car « on avait découvert dans les placards des LQÏUPLHUV�GHV�TXDUWV�UHPSOLV�GH�FRQÏWXUH�SU�OHY�H�sur la ration des malades » (ibid., p. 72). Ce fait ne saurait surprendre ; un prisonnier au Struthof, Aimé Spitz, qui avait passé quinze jours à l’hôpital du camp, raconte :�l�-ÊDL�YX�OHV�WUDÏFV�TXL�VH�IDLVDLHQW�GDQV� FHV� E�WLPHQWV� GÊLQÏUPHULH�� /HV� LQÏUPLHUV�russes, polonais, allemands, norvégiens n’avaient que peu de souci des malades. Ils s’accaparaient [sic] au détriment des malades les soupes de régime, meilleures que nos soupes habituelles. Au lieu de donner au malade la quantité lui revenant, ils en soustrayaient des bouteillons entiers qu’ils mangeaient ou distribuaient à leurs amis. Je n’ai vu nulle part autant de “coulage” de nourriture comme au Revier » (Spitz, p. 27).$QGU��5RJHULH��TXL�ÏW�SDUWLH�GÊXQ�FRQYRL�GH�PDODGHV�envoyés par train du camp de Dora à Auschwitz, rapporte que lors du voyage, le chef du wagon, « un juif polonais médecin », « fort et solide »��VH�ÏW�« une place pour dormir à coups de sabots de bois », c’est-à-dire en frappant les malades pour les écarter, au point d’en tuer deux... (Rogerie, p. 61). Citons également Guy Kohen, juif français déporté à Auschwitz, qui souligne l’existence d’un « racisme » antifrançais dans le camp. Il écrit : « être Français était au camp la plus noire référence », « on [nous] reprochait d’être sales, de ne pas avoir de sentiment de camaraderie, d’être hypocrites », à tel point que les Français étaient « mis à l’index et traités de brebis galeuses, tant par les Allemands que par les Polonais et tous les autres internés ». Prévenus,

certains juifs partis de Drancy tentaient de se faire passer pour des... Belges (Kohen, pp. 70-72).Dans les camps, les prisonniers dont le comportement était jugé condamnable et ceux qui avaient mauvaise réputation ne faisaient l’objet d’aucune pitié de la part de leurs codétenus. Et OHXU� HQWU�H� �� OÊLQÏUPHULH� VLJQLÏDLW� ELHQ� VRXYHQW�la mort... provoquée. Cette réalité, certains fanatiques de la mémoire voudraient bien l’effacer. Dans son témoignage sur le Struthof, ainsi, Eugène Marlot mentionne le docteur Ragot qui raconte TXH��IDXWH�GH�P�GLFDPHQWV�HQ�TXDQWLW��VXIÏVDQWH��il fallait choisir les malades « que l’on soignerait et ceux que l’on ne soignerait pas ». Et Eugène Marlot de s’exclamer : « Choisir ! Terrible dilemme que celui-ci, et qui a dû terriblement tourmenter un professionnel aussi consciencieux et humain que le docteur Ragot. Dilemme auquel ont été confrontés tous ceux qui ont eu des responsabilités dans les camps de concentration, et que tous, hélas ! n’ont sans doute pas affronté avec autant de conscience que lui » (Marlot, p. 36). On imagine le docteur Ragot, la tête dans les mains, choisissant dans la douleur les compagnons d’infortune qu’il abandonnera à leur triste sort. C’est certes très beau et très WRXFKDQW�� PDLV� FÊHVW� IDX[�� ,O� VXIÏW� GH� VH� UHSRUWHU�au livre d’André Ragot pour découvrir une réalité bien différente. Au sujet du choix, il écrit : « Voici le critérium : certains sont arrivés, précédés d’une fâcheuse réputation, d’autres ont été coupables de dénonciation durant leurs interrogatoires, d’autres se conduisent mal dans le camp. Tous ceux-là sont abandonnés » (Ragot, p. 67).Toutes ces histoires — il y en aurait encore beaucoup GÊDXWUHV�Æ�PHWWHQW� ��PDO� OD� WK�VH� RIÏFLHOOH� VHORQ�laquelle, dans les camps, une fraternité aurait lié tous les détenus (excepté les Kapos) face à leurs gardiens. Comme dans tous les mondes clos où les conditions de vie étaient dures, des règles non écrites surgissaient qui devaient être respectées, les populations étaient séparées en classes bien distinctes, les forts écrasaient les faibles, les faibles se bousculaient pour devenir forts, les « brebis galeuses » ne faisaient l’objet d’aucune pitié, etc.

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Kopka ne rejoindra cependant jamais l’armée allemande, car peu après l’annonce de sa libération surviendra un événement qui mérite d’être raconté dans le détail, tant il paraîtra incroyable, même aux révisionnistes. Kopka était encore le chef de la Lager Kapelle d’Auschwitz. Devenu nerveux à cause de sa libération prochaine, un jour, il se disputa gravement avec André, le juif qui animait l’orchestre. L’auteur raconte  : «  Nous apercevons Kopka s’agiter comme un dément, hurlant et menaçant chacun de son poing brandi en l’air. Il semble donner à André un ordre que celui-ci refuse d’exécuter. C’est alors que, d’un geste imprévisible, il repousse Georges loin du poêle, saisit le plat qui cuit, le lance par terre, après quoi il s’approche de la table où travaille l’horloger [Heinz] et, de son bras, balance tout en l’air. Nous l’entendons maintenant crier dans une rage folle, à l’adresse d’André  : — Je vais tout raconter au Lagerführer [commandant du camp] ! Tu vas venir avec moi chez lui et tout de suite  ! André se dirige tranquillement vers son manteau, l’endosse et, ouvrant la porte, s’incline avec ironie pour laisser passer Kopka. Nous avons le sou"e coupé par l’algarade et nous nous demandons comment cela va se terminer. Les deux hommes se dirigent

en e#et vers le bâtiment des SS. Nul doute qu’ils ne se présentent devant le commandant Schwarzhuber. Je suis terriblement inquiet pour André. Entre Kopka, aryen, Allemand, presque soldat d’armée matricule 11  000 et André, juif, 49  000, le résultat de l’arbitrage peut-il laisser l’ombre d’un doute ? » (p. 82).Puis vient le dénouement  : «  Les vingt minutes pendant lesquelles nous réparons les ravages opérés par Kopka nous semblent une éternité. Nous sommes en proie à une nervosité extrême. André et Kopka reparaissent en$n à l’extrémité de l’avenue. Nous nous plantons tous devant la baraque pour les voir venir. Kopka, l’air tout penaud, se traîne péniblement derrière André qui marche allègrement et le devance de plus en plus. Quelques-uns d’entre nous se précipitent au devant de lui, en demandant :— Et alors ?André nous montre quelques lambeaux de soie noire qu’il tient à la main. Nous reconnaissons l’ancien brassard, avec la lyre en argent, qui ornait, il y a peu de temps encore, le bras gauche de Kopka. Nous apprenons que Kopka a été magistralement gi%é par notre commandant qui lui a, de plus, arraché son brassard pour le

remettre, symboliquement, à André, le nommant ainsi, o&ciellement, chef de musique »(pp. 82-83).Vous avez bien lu  : un jour de 1943, le commandant du camp des hommes d’Auschwitz-II, Johann Schwarzhuber, a violemment dégradé le chef du commando Lager Kapelle, un Allemand, pour con"er cette charge à un... juif français.Sans surprise, cette histoire est toujours occultée. Jamais je ne l’ai lue dans une seule étude consacrée à Auschwitz. Elle — et bien d’autres, comme celle du juif a#ecté à la surveillance des pompes du camp — permet, par exemple, de mesurer l’impudence de Myriam Anissimov, biographe de Primo Levi, lorsqu’elle déclare que dans la structure hiérarchisée d’Auschwitz, les juifs se trouvaient toujours «  au bas de l’échelle » (12).Quant à Kopka, il mourut « abandonné de tous  » «  la veille du jour $xé pour son relâchement » (p. 83). L’auteur ne nous donne aucune précision sur sa mort, mais tout porte à croire qu’il a préféré mourir (sans doute par suicide) plutôt que d’abandonner la belle vie d’Auschwitz pour l’enfer de la guerre... Pourtant, il est aujourd’hui compté parmi les «  victimes de la barbarie nazie ».

Et le SS préféra le juif à l’aryen

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Parmi les détenus privilégiés, surnommés les « proéminences » �S�� ����� ÏJXUDLHQW�bien entendu les Kapos. L’auteur de Musiques d’un autre monde raconte que, deux ou trois fois par semaine et

malgré un règlement qui l’interdisait, les Kapos organisaient, dans leurs chambres privées, après l’appel du soir, des mini-concerts en invitant deux ou trois musiciens choisis parmi les meilleurs membres de l’orchestre (p. 72). Ceux-ci étaient bien rétribués en « denrées » et en « cigarettes », « excitant ainsi l’envie des autres » (id.). Ils devaient WRXWHIRLV�OHV�SDUWDJHU�DYHF�.RSND�DÏQ�TXH�FHOXL�FL�fermât les yeux sur ces mini-concerts illégaux (id.).

Mengele surprend un concert illégalUne seule fois, un concert pirate fut découvert. Il avait été organisé en plein jour, dans le camp des tziganes, pour l’anniversaire d’un Allemand, le chef de la baraque de désinfection installée en ce lieu. Les « SS de service [étant] de connivence » (p. 147), SHUVRQQH� QH� VH� P�ÏDLW�� /H� FRQFHUW� VH� G�URXODLW�« au milieu d’un nombreux auditoire manifestant sa joie » (id.). Mais soudainement, en « plein milieu d’un morceau de jazz », apparut... le docteur Mengele. La musique cessa immédiatement, et

« pris de panique », les membres de l’orchestre s’interrogèrent sur la raison de sa présence. L’homme dont on fêtait l’anniversaire se précipita au devant du docteur pour lui expliquer la raison de cette petite fête. Que décida le docteur Mengele que l’on présente aujourd’hui comme l’un des plus grands criminels de l’histoire ? Szyman Laks écrit : « A notre grande surprise, il nous fait signe de continuer »� �S�� ������ $ÏQ� GH� G�WHQGUH�l’atmosphère, un membre de l’orchestre, Bobby, qui possédait « dans son répertoire quelques numéros d’une drôlerie irrésistible » fut invité à se produire. Le docteur regarda, puis : « Devant la fantaisie endiablée de notre amuseur, Mengele retient de sa main libre un rire qui allait fuser et, comme contrarié par son manque de volonté, il part subitement sans proférer une parole » (p. 148). Là encore, cette anecdote contredit la thèse RIÏFLHOOH�TXL�SU�VHQWH�OH�GRFWHXU�0HQJHOH�FRPPH�un monstre sorti de l’enfer.

Détenus qui « gagnent » bien leur vieSzyman Laks précise que, malgré leur talent, ni André ni Heinz ne jouaient pour les Kapos. Par peur ? Non, tout simplement parce qu’ils n’avaient « nullement besoin de recourir à ce

D É P O R T É S PRIVILÉGIÉS

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PR\HQ� GH� ÇJDJQHU� OHXU� YLHÈ�� �WDQW� VXIÏVDPPHQW�pourvus de tout ce dont un détenu ose à peine rêver. Outre leur garde-manger bien garni, ils ont tous les deux des costumes rayés faits sur mesure, cintrés à la taille et dont le pantalon, élargi par en bas, porte toujours un pli impeccable. Leur crâne est rasé chaque samedi part un coiffeur “privé”, généreusement payé en cigarettes qu’ils détiennent en quantités considérables » (p. 73.). La « fortune » d’Heinz, un juif allemand, provenait du fait que, dans le civil, il travaillait comme horloger. A Auschwitz, on le « payait » pour réparer les montres en cachette. Les montres des SS ? Oui, mais pas seulement. L’auteur explique : « Chaque SS, quel que soit son rang, chaque Kapo, chaque chef de baraque, chaque détenu-fonctionnaire, quelle que soit son importance, bref, chaque détenu qui se respecte, possède un ou plusieurs bracelets-montres. Une montre — c’est une sorte de passeport, de visa de survie et une preuve indiscutable d’un solide établissement dans le camp » (id).De son côté, André subvenait à ses besoins « en donnant des leçons de français et d’anglais à quelques internés, hauts fonctionnaires du camp. Parmi ses élèves se trouv[ai]ent : le chef-

cuisinier, le cantinier et le chef du magasin d’approvisionnement » (p. 74). D’où des revenus « presque aussi importants que ceux de l’horloger » : « (André) est payé en saucissons ou pains entiers, en pommes de terre, en semoule, en paquets de margarine ou de cigarettes, souvent même en pâté et jambon » (id.).Généreux, André pensait à ses camarades. Il parvint à obtenir d’un de ses élèves, le chef de cuisine, « un tonneau de vingt-cinq litres de soupe supplémentaire pour la musique, tous les jours », ce qui améliorait sensiblement l’ordinaire des musiciens les plus « pauvres ». André avait également sauvé la vie à un prisonnier russe, un certain Georges, joueur de basse, qui était arrivé épuisé à la Lager Kapelle et qu’il avait suralimenté. Depuis, ce prisonnier était devenu son aide de camp. L’auteur écrit : « Tous les soirs, après l’appel, je vois Georges éplucher, dans un coin de la baraque, des pommes de terre et des oignons, les faire cuire, et revenir ensuite avec de la margarine et des tranches de saucisson. Il obtient ainsi deux grosses gamelles d’un plat savoureux et QRXUULVVDQW��4XDWUH���FLQT�KRPPHV�HQ�E�Q�ÏFLHQW��dont moi-même et, parfois, Kopka, à court de victuailles de source personnelle » (p. 75).

Orchestrede détenus,1941.

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Trafic au « Canada »

Un peu plus loin, Szyman Laks UDFRQWH� OH� WUDÏF� TXL� DYDLW� OLHX� DX�« Canada », c’est-à-dire dans la partie du camp où étaient triées et stockées les marchandises

volées aux juifs que l’on déportait plus loin vers l’Est (10). Pas seulement à eux, d’ailleurs. Dans son témoignage déjà cité, Pelagia Lewinska écrit à propos de son arrivée au camp : « Des

Allemands, des détenues âgées passent parmi

nos rangs en contrôlant nos vêtements et en

fouillant, et nous enlèvent nos provisions [...].

C’est seulement après que j’ai compris comment

il se faisait que les détenues privilégiées avaient

toujours une masse de mangeaille, parfois même

des douceurs » (Lewinska, p. 40). Il en allait de même dans les autres camps. Ancien déporté au Struthof, le Français André Ragot se souvient : « On attend. Les anciens du camp sont là ; ils font

le ramassage des colis Croix-Rouge que certains

avaient reçus au départ de Paris, des cigarettes, à

OHXU�SURÏW��YLGHPPHQW��1RXV�YR\RQV�GLVSDUD¤WUH�les quelques provisions mises précieusement

de côté en prévision de jours sombres et nous

LES

TRAFICS DANS LES CAMPS

Photographie prise par Walter

Bernhard ou Ernst Hoffman du camp

d’Auschwitz I le 28 mai 1944.

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regrettons de ne pas avoir tout englouti pendant le voyage au risque d’une indigestion » (Ragot, p. 15).Quoi qu’il en soit, huit cents déportés travaillaient au « Canada », gardés par un « nombre restreint de surveillants SS », ce qui ne permettait pas un « contrôle parfait » GHV�G�WHQXV�HQ�ÏQ�GH�MRXUQ�H�(p. 115). Ces derniers pouvaient donc aisément voler. Certains avaient muni leur uniforme rayé de poches « d’une profondeur appréciable et [de] cachettes savantes, confectionnées par un tailleur spécialisé » (id.). D’autres faisaient un l�SDTXHW�ELHQ�ÏFHO��x de ce qu’ils avaient volé ; sur le chemin de retour, ils le lançaient « par-dessus les barbelés à l’intérieur du camp » (p. 116) : « Ce qui permet de se présenter en règle au contrôle, c’est-à-dire “rien dans les mains, rien dans les poches”. Les complices, qui guettent le retour du commando, se chargent de cacher le colis jusqu’à l’heure des répartitions équitables entre les intéressés » (p. 116).

Or, pierres précieuses, dollars, lingerie fine...Dans son ouvrage, Pelagia Lewinska parle de ce WUDÏF�HW�SU�FLVH�TXH�JU�FH��� OXL�� OHV�SULVRQQLHUV�obtenaient « par troc du linge, des souliers, des peignes, des médicaments, etc. » (Lewinska, p. 146). Qu’est-ce qui se cache derrière ce « etc. » ? L’auteur de Musiques d’un autre monde soulève un coin du voile. Plus précis que Pelagia Lewinska, il écrit : « Pierres précieuses, alliances, bagues, dollars en or et en papier, montres, FLJDUHWWHV��DOFRROV��SDUIXPV��OLQJH�ÏQ��Y WHPHQWV��chocolat, jambons, poulets, lard fumé, conserves, lait condensé et autres articles de choix, VÊLQWURGXLVHQW�DLQVL�GDQV�QRWUH�SULVRQ��HQ�XQ�ÐRW�ininterrompu, souvent grâce à l’aveuglement bénévole des gardiens » (p. 116) L’ancien déporté $QGU�� 5RJHULH� FRQÏUPH� ORUVTXÊLO� �FULW� TXÊ��Birkenau, « le commerce de l’or se pratiqu[ait] activement » (Rogerie, p. 80)./HV�SUHPL�UHV�E�Q�ÏFLDLUHV�GH� FH� WUDÏF��WDLHQW�les déportées dont la mission consistait à entretenir le « Canada ». Elles vivaient là,

sans jamais sortir de l’enceinte qui leur était réservée. L’auteur écrit : « La majeure partie de ce personnel sont des femmes jeunes, jolies, élégamment habillées — non de rayé — et on serait tenté de croire que ce sont des dames de la haute société, dans une grande ville, en temps de paix. La seule différence est qu’elles ont, comme tous les détenus, le numéro matricule cousu en évidence sur leur poitrine [...]. [Elles] demeurent dans de petites baraques pourvues de fenêtres à rideaux et aménagées avec le maximum de confort. Elles dorment dans des lits individuels, avec des draps régulièrement changés et des couvertures épaisses, coquettement disposées.

Elles possèdent des fards, des parfums, de l’eau de Cologne, des bas de soie. Leurs coiffures semblent sortir des mains caressantes du premier coiffeur de Paris. Sauf la liberté, elles ont tout ce dont une femme peut rêver. Elles connaissent même l’amour, que la proximité des hommes, prisonniers et SS, rend inévitable » (pp. 132-������ /�� HQFRUH�� 3HODJLD� /HZLQVND� FRQÏUPH� HQ�écrivant que les « détenues fonctionnaires » « possédaient tout, y compris le droit à l’ “amour” [des SS hommes et des détenus] » (Lewinska, p. 135).

Marchandises volées au Reich8Q�DXWUH�WUDÏF�FRQVLVWDLW���YROHU�OHV�PDUFKDQGLVHV�et les denrées fournies par les autorités du Reich pour la bonne marche du camp. L’auteur précise : « Certaines places privilégiées permettaient à leurs préposés de prélever une partie considérable de ce qu’ils manutentionnaient pour le mettre dans le courant des “affaires”. A la cuisine, à la cantine, au magasin d’habillement, au magasin d’approvisionnement et même à l’hôpital, viande,

« Certaines places privilégiées permettaient à leurs préposés de prélever une partie

considérable de ce qu’ils manutentionnaient pour le mettre dans le courant des “affaires” ».

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graisse, légumes, vêtements, linge, médicaments destinés à l’approvisionnement des détenus, �WDLHQW�VRXVWUDLWV�DX[�U�SDUWLWLRQV�RIÏFLHOOHV�SRXU�devenir propriété privée » (p. 117). Au Struthof, les Kapos avaient détourné plus de 150 chemises HW�FDOH�RQV�DÏQ�GH�VH�FRQIHFWLRQQHU�GHV�KDELWV�destinés à leur usage personnel (Spitz, p. 23). Pour le commando d’Allach (à Dachau), l’ancien déporté Georges Briquet parle d’un « odieux marché noir » qui portait en premier lieu sur le pain et la margarine : « Les Polonais, les Russes, plus anciens que nous à Allach, se “procurent” [...] ces précieuses denrées et les revendent contre des cigarettes qui leur permettent d’acheter d’autres denrées par l’intermédiaire de leurs camarades prisonniers de guerre, qu’ils voient à l’usine » (Briquet, pp. 26-27).

Auschwitz et commerce extérieurA Auschwitz, il y avait même un « commerce extérieur » : « Tel un pays indépendant et respectable, nous avions aussi notre commerce avec l’étranger. Notre clientèle comprenait notamment un nombre élevé d’ouvriers civils affectés à titre de techniciens

à certains commandos et qui étaient grands consommateurs de linge, de vêtements et de chaussures que, seuls les détenus du camp de Birkenau étaient en mesure de leur fournir. Dans les rangs des commandos qui sortaient le matin au travail, nombreux étaient ceux qui, sous leurs uniformes à rayures, portaient un complet civil presque neuf et qui étaient chaussés de façon superbe. Dans leurs poches, plus d’un bijou de valeur, plus d’une pièce en or

étaient soigneusement dissimulés. Le soir, ils revenaient avec de vieilles chaussures ou de vieux sabots et n’avaient que leur tenue réglementaire sur le dos. Mais, en contrepartie de ce qu’ils avaient laissé dehors, leurs poches recelaient de belles bouteilles d’eau-de-vie, de beurre frais, de la charcuterie paysanne et des cigarettes allemandes des meilleures marques » (p. 118)./H� WUDÏF� �WDLW� J�Q�UDOLV��� 0 PH� OHV� 66� \�participaient. A. Rogerie raconte : « Le vol est organisé à la cuisine. Quand on a mis la margarine dans les autoclaves de trois cents litres de soupe et que le SS s’est assuré que le compte y est bien, le cuisinier essaye se repêcher le morceau avant qu’il ne soit fondu. Ainsi, il pourra s’acheter au magasin de vêtements, une paire de chaussures ou un pantalon que son collègue, là-bas, soustraira du stock par une astuce semblable. Il faut se débrouiller et les cuisiniers ont souvent affaire à nous pour cacher leurs butins. Margarine, boîtes de conserve, tout G�ÏOH��P PH�OHV�ERXWHLOOHV�GH�VFKQDSV��/H�66�GH�garde vole, lui aussi, des pains de margarine pour que l’un des cuisiniers, lui, achète du schnaps à un prisonnier qui travaille avec les civils et qui aura cette bouteille en donnant une veste obtenue en échange de margarine. Vous YR\H]�TXHO�WUDÏF���x (Rogerie, pp. 79-80).

Auschwitz : « monde économique prodigieux »/ÊHQVHPEOH�GH�FHV� WUDÏFV�DYDLW�ÏQL�SDU� IDLUH�GH�Birkenau : « un monde économique prodigieux, avec ses classes privilégiées et prolétariennes, DYHF�VHV�SUL[��DYHF�VHV�ÐXFWXDWLRQV��DYHF�XQH�FRWH�boursière. Une monnaie s’était imposée depuis longtemps et personne ne songeait à la contester. C’était pour nous une valeur or. Sans elle, aucune évaluation d’un article n’était possible. Cette unité monétaire, c’était la cigarette. A l’instar GH� OÊLQÐDWLRQ�� OÊDERQGDQFH� GH� PDWL�UH� IXPDEOH�provoquait la baisse de valeur. Sa rareté nous amenait à recourir au fractionnement de l’unité. Les mégots avaient aussi leur valeur. En temps « normal » — c’est-à-dire lorsque la cadence des

« un monde économique prodigieux, avec ses classes privilégiées et prolétariennes, avec ses prix, avec ses fluctuations, avec une cote boursière. Une monnaie s’était imposée depuis longtemps : [...] la cigarette. »

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arrivages était régulière — un pain valait douze

cigarettes, un paquet de cinq cent grammes de

margarine en coûtait trente, une montre entre

quatre-vingt et deux cents, et un litre d’alcool

quatre cents » (pp. 117-118).

'DQV� OH�FDPS�� OH� WUDÏF�GHV�PDUFKDQGLVHV�DYDLW�été baptisé : « organisation ». L’auteur écrit :

« Ç2UJDQLVHUÈ� VLJQLÏH� VH� SURFXUHU� QÊLPSRUWH�quelle chose à l’aide d’un des moyens suivants :

achat, donation, échange, mendicité ou vol.

On “organise” un bout de pain ou dix pains, un

FKLIIRQ�TXHOFRQTXH�RX�GX�OLQJH�ÏQ��XQH�FLJDUHWWH�ou mille cigarettes, un litre de soupe ou un

tonneau de soupe, une planche ou une baraque

entière ! On “organise” un peu de sel, un seau

de charbon, un camion de bois de chauffage,

un médicament, un pull-over, une paillasse,

une couchette, on “organise” tout ! » (11). Les

�FKDQJHV�DYDLHQW�OLHX�OH�VRLU��/D�WK�VH�RIÏFLHOOH�déclare qu’après le dernier appel, les détenus

épuisés s’affalaient sur leurs paillasses avec une

seule idée en tête : dormir pour oublier l’enfer

HW�WHQWHU�GH�U�FXS�UHU��DÏQ�GH�VXUYLYUH�XQ�MRXU�de plus... L’auteur, lui, nous brosse un tableau

différent pour Birkenau : « Après l’appel du

soir, la plupart des détenus s’affairent autour

de “ l’organisation ” qui se prolonge souvent au-

delà de l’heure de l’extinction des feux. Chacun

“organise” ce qu’il peut et le camp entier est

parsemé de petits groupes d’hommes d’affaires

gesticulant avec acharnement et se dispersant

avec précipitation à la vue d’un uniforme

allemand » (p. 120).

Trafics des « pauvres », trafics des « riches »

Pour pouvoir « organiser » plus tranquillement,

les « prolétaires » (comprenez, les détenus plus

pauvres) se rendaient à la latrine transformée

en véritable « marché aux puces » : « Elle se tient

dans une baraque, semblable extérieurement

à toutes les autres, mais transformée en

cabinets d’aisance et pouvant hospitaliser

simultanément six cents clients. C’est là que

Au cours de l’année 1944, un orchestre fut formé au camp des femmes : « Les musiciennes logent dans une baraque à part, aménagée en salle de répétition et pourvue d’une estrade pour les performances individuelles. Elles touchent, o!ciellement, des suppléments de nourriture. En dehors des services musicaux, elles ne travaillent pas, peuvent s’adonner, soit aux études, soit à de menus ouvrages personnels. Le seul point commun avec nous est l’obligation de se présenter aux sélections, comme toutes les autres femmes » (p. 155).Peu à peu, cet orchestre comporta « violons, mandolines, guitares et violoncelle. Quelques chanteuses et même un piano à queue, amené d’on ne sait où, le compl[étèrent] bientôt. Avec le temps, il se procur[a] un répertoire convenable composé, surtout, de musique douce » (p. 154).Un musicien du camp des hommes fut chargé de donner deux fois par semaine des cours à une débutante en contrebasse, a"n d’ « enrichir la sonorité de ce délicieux ensemble féminin » (p. 155). L’auteur poursuit : « Les deux commandants des camps respectifs [Schwarzhuber pour le camp des hommes, Hössler pour le camp des femmes], ont même créé une sorte de rivalité entre les deux orchestres, chacun louant les qualités de sa “Kapelle”. Cela aboutit à quelques “échanges culturels”. Un dimanche, c’est notre musique qui donne un concert chez les femmes, l’autre dimanche, c’est l’ensemble féminin qui vient se faire applaudir chez nous » (pp. 154-155).

Rivalité d’orchestres

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Sans Concession N°78

VH� WLHQW� OD� JUDQGH� IRLUH� GHV� SHWLWV� WUDÏTXDQWV��On peut y échanger des lames de rasoir contre

XQH� UDWLRQ� GH� VDXFLVVRQ�� GX� ÏO� �� FRXGUH� FRQWUH�un litre de soupe de la veille, une ration de pain

moisi contre quelques mégots, une cuillère

GRQW� OH�PDQFKH� D� �W�� ELHQ� DIÏO�� SRXU� VHUYLU� GH�couteau contre un bout de fromage, un peu de

saccharine contre quelques pommes de terre

crues ou cuites. On peut y échanger tout contre

tout, en calculant la valeur de la marchandise

d’après celle d’une cigarette. La latrine, c’est la

bourse du prolétariat, la cour des miracles, le

marché aux puces du camp. Aucun détenu qui

se respecte ne saurait y venir pour une autre

raison que physiologique, à moins que ce ne soit

à titre de curiosité. D’ailleurs, un petit coin des

latrines est strictement réservé aux Kapos et aux

très sommités du camp. Un vulgaire détenu ne

saurait s’y aventurer sans être roué de coups ou

jeté, à titre d’avertissement pour l’avenir, dans la

fosse d’aisance » (pp. 120-121).

Pour les détenus « riches », les « proéminences »

et les « caïds », l’ « organisation » se faisait

ailleurs. L’auteur raconte : « Un tout autre

genre de séances boursières se tient dans les

chambres privées des représentants des classes

possédantes. L’isolement de ces compartiments

permet aux opérations, souvent délicates et

risquées, de se dérouler en toute sécurité. Des

montres, des bijoux, des dents en or, des dollars,

des bagues, des pendentifs sont troqués contre

des cigarettes par centaines, des victuailles

et friandises, contre de la main-d’œuvre et du

matériel de construction et, quelquefois, avec

la complicité d’un SS, contre des uniformes

militaires allemands, devant faciliter une

évasion projetée » (p. 121).

La vie des « proéminences »Dans son témoignage sur Dachau, Georges

Briquet écrit que les Kapos vivaient « presque

royalement » (Briquet, p. 27). Il en allait de même

à Auschwitz. Grâce à l’ « organisation », les Kapos

HW�OHV�FKHIV�GH�EDUDTXHV��TXL�ÏJXUDLHQW�SDUPL�OHV�« caïds », logeaient « à deux ou trois dans des

pièces séparées, très confortablement installées,

avec des couchettes individuelles munies de

draps propres, de coussins, de couvertures

Photographie prise par Walter Bernhard ou Ernst Hoffman du camp d’Auschwitz I le 28 mai 1944.

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41“J’étais dans l’orchestre de Birkenau”

HQ� TXDQWLW�V� VXIÏVDQWHV�� DYHF� GHV� SR OHV� VXU�lesquels ils peuvent cuisiner. Ces chambres sont

pourvues de fenêtres à carreaux, de rideaux, de

tapis et autres articles qui, pour eux, semblent de

première nécessité » (p. 122). Pelagia Lewinska fait la même constatation : « Les chambrettes

des surveillantes du camp (“Lageräelteste” [sic]) et des blocs avaient les murs et le plancher

couverts de tapis. On y trouvait des rideaux, des

robes de chambre, du linge, les choses les plus

belles dont on disposait en Europe » (Lewinska, p. 146).L’auteur de Musiques d’un monde ajoute : « On

tolère également que chaque privilégié ait à sa

disposition un “Kalifaktor”, sorte de domestique,

préposé au nettoyage de la pièce, à la cuisine et

à toutes sortes de services dont son patron peut

avoir besoin. C’est au “Kalifaktor” qu’incombe

généralement le soin d’ “organiser” pour son

PD¤WUH��HQ�Q�JRFLDQW�FH�TXH�FH�GHUQLHU�OXL�FRQÏH�en rentrant chaque soir et qu’il doit céder au

prix le plus avantageux. D’où provient donc tout

ce matériel de construction, planches, parois,

contre-plaqué, piliers, portes, vitres, toitures,

ayant servi à l’aménagement de ces petits salons

privés qui sont au nombre de quatre en moyenne

par baraque ? Ce matériel qui n’a pas été fourni

par les Allemands, pour la simple raison qu’il

n’était pas prévu dans le plan de construction du

camp d’Auschwitz, est du matériel “organisé”,

donc “soutiré” au Reich par toute une pléiade

d’intermédiaires avant d’atteindre les principaux

intéressés » (p. 122). Pelagia Lewinska va jusqu’à écrire que les détenus « riches » « se procuraient

parfois plus de choses que n’en pouvait rêver un

soldat SS allemand qui nous gardait. Les soldats

SS étaient au courant, mais ils n’avaient pas

accès aux magasins » (Lewinska, p. 147).

Les « proéminences » étaient mieux en captivité qu’en liberté

Dans une Europe à feu et à sang, soumise aux restrictions, les membres de la Lager Kapelle, les « planqués » et les détenus « riches » étaient ÏQDOHPHQW� GHV� SULYLO�JL�V�� 3HODJLD� /HZLQVND�écrit que les détenues privilégiées « n’avaient

jamais probablement été entourées en liberté

d’un luxe qu’elles se procuraient au camp »

« La majeure partie de ce personnel sont des femmes jeunes, jolies, élégamment habillées — non de rayé — et on serait tenté de croire que ce sont des dames de la haute société, dans une grande ville, en temps de paix.»

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Sans Concession N°78

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(Lewinska, p. 146). De son côté, André Rogerie

concède : « Même d’un camp de concentration, on garde de bons souvenirs » (Rogerie, p. 81). Et

de raconter le Noël 1944 passé à Auschwitz : « Ce soir, c’est Noël. Grâce à Rousseau, qui est pipel des SS, de la cuisine, nous parvenons à mettre de côté de la margarine et du sucre. Nous avons UDFO�� XQ� WRQQHDX� GH� FRQÏWXUH�� *UDQGHODXGH� HW�Stouff ont volé, disons “organisé” puisque telle est l’expression du camp, de la farine. Il nous reste à savoir où nous allons faire la fête. Un jeune juif polonais qui parle français occupe une place de surveillant des pompes à eau du camp. Il possède une petite pièce à côté de l’une des pompes. C’est

là qu’à la nuit tombante, nous commencerons à faire cuire des pois et à confectionner des crêpes avec de la farine et de l’eau. Puis nous nous installons sur des tabourets, dans un petit réduit au-dessus du bassin d’eau. On ne peut pas tenir debout, mais assis cela va très bien, et nous commençons un bridge. Nous sommes installés depuis une demi-heure que le Kapo de la désinfection arrive. Nous sommes des “types” à ménager car nous avons le ravitaillement facile. Il commence par nous exhorter à rentrer DX�EORFN��8QH�FU SH���OD�FRQÏWXUH�OH�IDLW�ELHQ�YLWH�changer d’avis et il nous demande seulement de bien nous cacher. Ainsi, la nuit de Noël se passe gentiment. Nous avons ce soir, nous aussi, notre réveillon » (Rogerie, p. 81).

En ce Noël 1944, beaucoup de petits Allemands,

dans les villes dévastées par les « libérateurs »,

auraient certainement rêvé d’un tel réveillon...

A propos des nouvelles, bonnes ou mauvaises,

qui venaient de l’extérieur, l’auteur de Musiques d’un autre monde écrit : « (...) en quoi ces nouvelles peuvent-elles nous concerner ? Elles proviennent d’un monde que nous avons connu,

certes, autrefois, mais qui reste enseveli pour nous à tout jamais. Notre univers, beaucoup plus concret, diffère totalement de ce monde perdu, et les vagues échos qui nous parviennent de là-bas ne peuvent rien y changer. Notre vie est à nous. Nous vivons en musique, nous mangeons à notre faim, nous goûtons les joies de l’amour, en un mot, notre vie actuelle est sans doute plus confortable que ne l’est celle de bien des gens libres » (p. 114).

Une inquiétude : une éventuelle… libération

Pour les « proéminences » allemandes, surtout,

qui étaient en âge de prendre les armes, mieux

valait vivre à Auschwitz que de se battre sur le

front de l’Est. Si bien qu’à partir de 1943, ces

déportés d’origine germanique redoutèrent

d’être... libérés. Cela peut paraître fou, mais c’est

la réalité. L’auteur raconte par exemple qu’un

jour, Kopka revint d’une convocation au bureau

de la Gestapo (à Auschwitz I) en annonçant

Ï�UHPHQW� TXÊLO� DOODLW�  WUH� OLE�U��� &HSHQGDQW�� LO�note : « Au fond, cette libération inattendue est ORLQ�GH�OÊHQFKDQWHU��6D�ÏHUW��QÊHVW�TXH�IDEULTX�H��Cela ne lui plaît pas trop de quitter un bon poste au camp pour aller dans un enfer. Car personne n’ignore, et Kopka moins que les autres, que les rares Allemands libérés du camp doivent obligatoirement rejoindre les rangs de l’armée allemande et que c’est là le prix de leur libération. Pensez donc, descendre du piédestal de chef de musique au rang de simple deuxième classe et se voir, peut-être, dirigé sur le front russe où la bataille fait rage ! Mieux vaudrait rester ici, le plus longtemps possible, et jouir tranquillement de la vie confortable que lui assurent ses “protégés” ». Nous apprenons bientôt que Kopka

ne sera relâché qu’après un mois d’observation

médicale préventive. Il en paraît ravi et, à

plusieurs reprises, manifeste son contentement

parmi son entourage immédiat : « — C’est autant de gagné, la guerre peut être terminée d’ici là » (pp. 78-79).

« Notre vie est à nous [...] en un mot, notre vie actuelle est sans doute plus confortable que ne l’est celle de bien des gens libres. »

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43“J’étais dans l’orchestre de Birkenau”

L’auteur de Musiques d’un autre monde déclare qu’à Auschwitz, le plus grand «  organisateur  » était le Kapo principal du commando du bâtiment, un Allemand répondant au nom de Reinhold. Il écrit  : «  Interné depuis une dizaine d’années, Reinhold a séjourné dans presque tous les camps allemands pour échouer !nalement à Auschwitz. Titulaire d’un triangle vert —  on dit qu’il avait été arrêté pour d’importantes fraudes !scales — il a été, tout récemment, dispensé du port de tout triangle, en récompense de ses “mérites exceptionnels ”. En fait, il est le seul détenu jouissant de ce privilège et tout le monde le considère comme un “détenu d’honneur”. Il s’est également vu octroyer la faveur de laisser pousser ses cheveux, faveur dont il ne peut pro!ter, en raison d’une calvitie totale. Le train de vie de l’Oberkapo Reinhold en impose à tout le monde. Son petit déjeuner se compose d’œufs et de jambon, arrosés d’un bol de vrai café, au vrai lait entier. On dit que sa table est de beaucoup supérieure à celle de notre commandant. Il possède une petite cave, dissimulée sous le plancher de sa chambre, comportant les meilleurs vins allemands et français, des liqueurs de marque et des dizaines de litres d’alcool pur. Les SS considèrent comme un grand honneur d’être invité à ses repas. Dehors, au

chantier, où Reinhold se rend tous les jours avec son commando, un petit baraquement a été installé pour son usage personnel et pourvu de tout le confort que l’on peut imaginer en un tel endroit. Le tra!c que Reinhold déploie, du fait de sa situation, pourrait faire l’objet d’un livre à part. Contrôlant, à lui tout seul, l’ensemble du matériel de construction des baraquements mis à sa disposition par les dirigeants du camp, il en use comme bon lui semble et, pratiquement, sans en rendre compte à personne, bien qu’il soit o#ciellement astreint à fournir, tous les trois mois, un rapport détaillé de la consommation en matériel et des travaux e$ectués. Reinhold se trouve à la tête d’un commando de huit cents personnes, dont une demi-douzaine de Kapos, ses “éminences grises” en ce qui concerne l’  “organisation” et qui se chargent de l’échange du matériel de construction contre les denrées de choix ou des objets de valeur. C’est par leur intermédiaire que Reinhold fournit aux détenus privilégiés de tous les camps environnant Auschwitz les matériaux qui leur servent à construire et à aménager leurs chambres privées. L’hiver, pendant la pénurie de combustible, tabourets, tables, couchettes entières disparaissent, sans compter, dans les fourneaux de chau$age. Mais ce sont les Allemands eux-mêmes qui forment la clientèle

la plus nombreuse et la plus !dèle de Reinhold. Une vingtaine d’ébénistes spécialisés travaillent sous la direction de ce dernier à l’exécution des commandes venant des SS, o#ciers, sous-o#ciers et soldats. Ces commandes ont trait à la confection de meubles de luxe destinés à leurs habitations situées à proximité du camp. Des salons, des cabinets, des chambres à coucher, des voitures d’enfants, des ustensiles de sport, soigneusement parachevés, savamment vernis, sont livrés régulièrement aux Allemands, au détriment du plan d’installation des baraquements du camp d’Auschwitz. Depuis quelque temps, il est question de libérer Reinhold. Lors d’une réception organisée — dans les deux sens du mot  — à cette occasion, et après plusieurs tournées, Reinhold a avoué avec bonhomie, en présence de quelques SS, ses invités, avoir dilapidé, au cours des derniers six mois, le matériel de trente-cinq baraques  ! On a ri de bon cœur à cette excellente histoire et, pour glori!er l’admirable exploit de Reinhold, chacun a bu à sa santé, à la santé du commandant et, pour !nir, à celle du Führer » (pp.  123-125). Déportés et SS qui, à Auschwitz, trinquent ensemble à la santé d’un Kapo, du commandant du camp et du Führer : nous sommes loin des descriptions unilatérales de la thèse o"cielle...

Reinhold, le déporté

richissime

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44

La salle de musique s’embellit grâce à l’ « organisation »

Revenons cependant à la Lager Kapelle. Son existence ne cessa pas avec le départ de Kopka. Bien au contraire. La chambre de musique fut constamment embellie grâce

à l’ « organisation » de marchandises, une « organisation » que les autorités du camp avaient elles-mêmes recommandée aux musiciens, puisqu’elles ne possédaient pas les matériaux nécessaires pour effectuer les transformations projetées. L’auteur raconte : « Notre bureau

de musique a eu son agrandissement et son

embellissement “organisés” de toutes pièces, car

si les Allemands nous avaient autorisés à effectuer

les travaux indispensables, ils ne nous en avaient

pas donné les moyens de réalisation. “Organisez-

vous tout cela” nous avaient-ils recommandé. Et

c’est le commando du bâtiment — qui loge dans

notre baraque — qui nous a fourni la main-d’œuvre

et le matériel, et ceci contre des leçons d’accordéon

avec, pour le contremaître du commando,

l’autorisation de s’exercer dans la pièce agrandie.

Ainsi, notre musique a “organisé” une coquette

pièce, luxueusement aménagée, tandis que le

contremaître est ravi d’avoir “organisé” ses leçons

de musique à si bon compte » (pp. 119-120).

Les SS viennent écouter la musique des détenus

La Lager Kapelle devint ainsi un lieu très prisé. Certains SS y venaient pour écouter de la musique. L’auteur se souvient notamment du

DÉTENUS ET SS DANSENT, CHANTENT, TRINQUENT ENSEMBLE

Dossier

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45“J’étais dans l’orchestre de Birkenau”

SS Unterscharführer Bischop qui raffolait de la musique... juive et qui « organisait », pour lui, des concerts illégaux : « Un camarade disponible est posté en sentinelle à chaque porte de la baraque pour guetter et signaler une arrivée inopportune. C’est alors que les musiciens jouent l’un après l’autre les airs juifs préférés de Bischop, et celui-ci est aux anges » (p. 159).L’auteur évoque également un SS Unterscharführer répondant au nom de Wolff : « (...) ses fréquentes visites sont celles d’un camarade qui veut se distraire intellectuellement plutôt que celles d’un représentant de l’autorité » (p. 166). Il poursuit en précisant que, après avoir écouté les musiciens dans les morceaux qu’ils avaient choisi de lui jouer : « [Wollf reste]à discuter amicalement avec l’horloger Heinz et André. Ces discussions ont pour origine le fait que le SS et Heinz sont tous les deux natifs de la même ville d’Allemagne. C’est un bon prétexte pour évoquer, de part et d’autre, quelques souvenirs. Nous assistons ainsi à la naissance d’une vraie camaraderie entre le SS Unterscharführer Wolff et l’horloger Heinz Lewin, détenu juif. Chaque fois que Wolff rentre d’une permission de quelques jours, Heinz lui demande des nouvelles de sa ville natale. Et, sans paraître remarquer qu’il transgresse la consigne sur la fraternisation avec les détenus [preuve qu’il y en avait beaucoup, sans quoi aucune consigne n’aurait été nécessaire (NdA)]��:ROII�OXL�IDLW�XQ�U�FLW�ÏG�OH�GH�VRQ�YR\DJH��comme il le ferait à un membre de sa famille. Il lui dévoile ainsi que la ville a beaucoup souffert du bombardement des Alliés, bombardement qui se poursuit sans répit sur toutes les autres villes DOOHPDQGHV�� ,O� �QXP�UH� OHV� UXHV�� OHV� �GLÏFHV�� OHV�monuments particulièrement éprouvésé » (p. 166).

Le cas de Pery BroadMais l’auteur se souvient surtout du SS Pery Broad, qui avait travaillé dans les services de la Gestapo à Auschwitz. Son cas est intéressant. En effet, après la guerre, Pery Broad, fait prisonnier, rédigea un témoignage terrible sur les horreurs

qui s’étaient — prétendument — passées dans le camp. Dans la version qui nous est parvenue (car le manuscrit original a — comme par hasard — disparu (13)), l’auteur évoquait un « camp maudit » (14) où « chaque jour des milliers d’êtres humains étaient torturés à mort » (ibid., p. 105) ; il parlait des crématoires II et III pourvus de chambres à gaz dans chacune desquelles « près de 4 000 personnes pouvaient être gazées simultanément » (ibid., p. 136), du « plus horrible homicide massif au cours de l’histoire de l’humanité » (ibid., p. 148), des « 2 à 3 millions de juifs » qui avaient été assassinés au camp, « sans parler de Polonais, de Russes, de Tchèques, de Yougoslaves, etc. » (ibid., p. 104). La déclaration attribuée à Pery Broad servit à bâtir ce qui DOODLW� GHYHQLU� OÊ� KLVWRLUH� RIÏFLHOOH� GÊ$XVFKZLW]��Cependant, le style et les estimations données étaient tels qu’en 1980, Pierre Vidal-Naquet lui-même classa ce document parmi ceux qui donnaient « l’impression d’adopter entièrement le langage des vainqueurs » (15). Autant dire que le célèbre antirévisionniste considérait cette déclaration comme très suspecte. Neuf ans plus tard, d’ailleurs, Jean-Claude Pressac écrivit : « la forme et le ton de sa déclaration sonnent faux » (16). Il ajouta que, selon lui, le texte de l’ancien SS avait été « “légèrement” retravaillé par les Polonais » (« “slightly” reworked by the Poles », id.), la présence de guillemets laissant entrevoir que le remaniement du texte n’avait pas été si léger que cela...Il est donc intéressant d’étudier ce que l’auteur de Musiques d’un autre monde écrit à propos de Pery Broad. Va-t-on retrouver l’ancien SS plongé dans un monde d’horreur, où la mort était partout ? Nullement. On découvre un SS passionné de musique, qui joue et noue des relations cordiales avec la Lager Kapelle. L’auteur écrit : « [Pery Broad] est un exécutant de premier ordre, capable de prendre place dans les meilleurs ensembles internationaux. Son instrument, c’est l’accordéon, le grossier accordéon. Mais c’est sous ses doigts, ÏQV�HW�DJLOHV��PDQLSXODQW�DYHF�DUW� OHV� WRXFKHV�HW�

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les registres, que nous comprenons tout ce que cet instrument est capable de rendre, lorsqu’il est tenu par un interprète de classe. Et c’est grâce à lui que nous sommes arrivés à nous réconcilier avec cette “orchestration” généralement méprisée. Broad est épris de jazz pur. Tout le répertoire européen et américain lui est familier. Et le choix des morceaux TXÊLO�SU�I�UH�HVW�XQH�SUHXYH�GH�VRQ�JR°W�UDIÏQ���,O�VH�plaît à jouer avec les meilleurs éléments de notre orchestre et lorsqu’il a l’occasion d’innover des variations sur l’air exécuté, c’est pour nous un vrai régal. Parfois, il se met à la batterie. Là encore, ses S�ULOOHXVHV�LPSURYLVDWLRQV�U\WKPLTXHV�FRQÏUPHQW�la haute opinion que nous avons de sa science et de son art. Nos accordéons, échantillons de série, endommagés par les intempéries, ne pouvant le satisfaire pleinement, Broad nous apporte un MRXU�OH�VLHQ��&ÊHVW�XQ�PDJQLÏTXH�LQVWUXPHQW�QHXI��muni de toutes les basses possibles et comportant plusieurs registres. Sa charpente de bois verni est parsemée de petites croix gammées incrustées. Maître absolu de son accordéon personnel, Broad se plaît à jouer pour nous en soliste, provoquant notre sincère admiration. Mais, en artiste toujours insatiable, il aimerait ajouter à son instrument un registre supplémentaire pouvant imiter la sonorité des trompettes en sourdine. Notre luthier-horloger [Heinz] se charge de la besogne. Pendant plusieurs semaines, il reste penché sur l’accordéon de Broad pour tailler, à la main, toutes les pièces nécessaires à la confection de petits leviers d’engrenage servant à actionner ce mécanisme de précision. Lorsque le travail est terminé, Broad, ravi, récompense l’artisan d’un généreux cadeau : deux cent cinquante cigarettes » (pp. 164-165). Dans la déclaration, pourtant détaillée, attribuée à Pery Broad, ces souvenirs ont, comme par hasard, disparu. On ne trouve rien sur l’orchestre et les relations d’amitié franche qu’il noua avec lui. Preuve que le « témoignage » de l’ancien SS QÊHVW�DEVROXPHQW�SDV�ÏDEOH���

Chants, danses et verres levés...Revenons cependant à la chambre de musique. Lorsqu’elle fut embellie, des fêtes s’y déroulèrent presque tous les jours, durant lesquelles SS et déportés de marque chantaient, dansaient et trinquaient ensemble. L’auteur écrit : « Notre superbe chambre à musique est devenue le lieu de pèlerinage des SS ainsi que des sommités du camp. Notre baraque retentit d’airs joyeux presque tous les soirs; on y chante, on y danse. Des anniversaires sont fêtés avec éclat et des SS y assistent en buvant l’eau-de-vie que les détenus leur offrent » (p. 89).Sans surprise, la plus belle fête fut organisée pour la libération du Kapo Reinhold (qui, visiblement, n’allait pas partir sur le front de l’Est). Non seulement de nombreux déportés, mais aussi « presque tous les SS » y assistèrent (p. 128). L’auteur raconte : « Reinhold fut réveillé d’abord par une aubade-fanfare exécutée par la totalité de l’orchestre. Sortant de son lit en pyjama de soie, tout en se frottant les yeux, il se dirigea d’un pas lourd vers son armoire et en sortit des centaines de cigarettes qu’il distribua généreusement aux musiciens. Puis, prenant quelques bouteilles de OLTXHXU�� LO�QRXV�ÏW�ERLUH� OÊXQ�DSU�V� OÊDXWUH��HQ�VHUUDQW�cordialement la main de chacun. Nous le remerciâmes en exécutant un deuxième morceau, tandis que l’on se pressait de tous les côtés pour le féliciter. Et quand, une demi-heure après, Reinhold, comme un beau prince, G�ÏOD� HQ� W WH� GH� VRQ� FRPPDQGR� GX� E�WLPHQW� SRXU�rejoindre son chantier de travail et d’ “organisation”, nous interrompîmes la marche encours pour jouer l’air qu’il préférait. Le soir, un banquet monstre eut lieu dans notre baraque, suivi d’un bal de nuit, qui n’avait rien à envier à ceux des quartiers les plus chics des grandes cités mondiales » (p. 128). Là encore, WRXWHV�FHV�LQIRUPDWLRQV�QH�ÏJXUHQW�QXOOH�SDUW�GDQV�OD�littérature réservée au grand public.La vie se déroula ainsi, calme et tranquille, jusqu’à l’évacuation du camp, en janvier 1945. L’auteur VXUY�FXW���WRXWHV�FHV�S�ULS�WLHV�HW�UHQWUD�ÏQDOHPHQW�en France.

Dossier

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47“J’étais dans l’orchestre de Birkenau”

Face à ce genre d’étude, les historiens exterminationnistes apportent une réponse en trois points :a) Les déportés que vous citez, disent-ils, étaient des exceptions dans les camps. Leur témoignage ne saurait donc remettre en cause le fait que, dans les bagnes nazis, l’immense majorité des prisonniers connaissaient l’en-fer : la misère, les tortures et la mort ;b) Le fait que des déportés privilégiés aient administré les camps était dû à la perversité GHV� QD]LV�� 7HO� XQ� VFLHQWLÏTXH�sadique qui aime voir les rats de laboratoire se « bouffer » entre eux, les nazis voulaient voir leurs ennemis organiser eux-mêmes leur enfer. Par conséquent, leur existence, loin de remettre en FDXVH�OD�WK�VH�RIÏFLHOOH��UHQIRUFH�au contraire la condamnation portée contre le nazisme.c) Dans les témoignages que vous citez, vous prenez bien soin de biffer toutes les références aux chambres à gaz homicides et à l’ « Holocauste ». Ainsi laissez-vous accroire que les déportés privilégiés auraient, bien involontairement, ap-porté de l’eau au moulin des révisionnistes. C’est malhonnête.

A cela, je réponds ce qui suit :1°) Au sujet des chambres à gaz, dix, cent, voire mille témoignages restent sans force face aux conclusions d’une expertise matérielle non réfutée. Or, depuis 1988, il y a eu le Rapport Leuchter, puis l’expertise de John Balkl, puis le Rapport Rudolf. Tous ont conclu à l’inexistence des prétendues chambres à gaz d’Auschwitz. Et aucune réponse sérieuse ne leur a été apportée. Dès lors, je ne vois pas pourquoi il faudrait prendre en compte les déclarations des anciens déportés concernant ces prétendus abattoirs humains.Allons plus loin. Oui, oublions toutes ces expertises. Des-cendons sur le terrain de nos adversaires et relisons les récits mentionnés tout au long de notre étude. Un fait mérite d’être souligné : aucun des témoins cités ne prétend avoir vu une chambre à gaz homicide de ses yeux. S’ils en font une description, c’est sur la foi de ouï-dire. Un bon exemple est celui d’André Rogerie. A la page 72 de son témoignage, l’ancien déporté décrit ainsi un processus de gazage : « [Les

condamnés] pénètrent dans une

salle souterraine dans laquelle

ils se déshabillent. De larges

écriteaux leur indiquent qu’ils

trouveront leurs vêtements à

la sortie, là où ils les laissent,

puis ils entrent dans une salle

de douches. Au plafond, les

appareils sont prêts à dispenser

leurs eaux bienfaisantes. Tout

y est. Ils sont entassés peu à

peu dans la salle, et cela ne

manque pas de commencer à

s’effrayer. Puis quand tous sont

là, complètement nus, bien serrés

les uns contre les autres, ce n’est

pas de l’eau chaude qui arrive

mais le gaz qui tue. Peu après,

les cadavres, montés dans les

chambres supérieures, s’en vont

brûler dans les fours électriques

qui débitent plus vite que les

abattoirs de Chicago (...). La

fumée, noire et épaisse, monte par

l’énorme cheminée. Il y a quatre

fours crématoires à Birkenau » (Rogerie, pp. 72-73). Un néophyte pourrait croire qu’André Rogerie a vu tout cela. Mais le « témoin » a l’honnêteté de préciser qu’il contemplait la scène... du dehors, couché sur l’herbe du stade (près du camp F, le camp hôpital), durant sa convalescence (17). 1HXI� SDJHV� SOXV� ORLQ�� HQÏQ�� LO�dévoile la vérité : le processus de gazage lui a été décrit par un autre déporté, un certain Cambier. Mais lui non plus n’a

RÉPONSE AUX OBJECTIONS

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rien vu ! Il a juste fait partie des FRPPDQGRV� FKDUJ�V�� �� OD� ÏQ�de l’année 1944, de démanteler les crématoires. André Rogerie écrit : « Cambier (...) me décrit

l’installation intérieure que lui a

pu voir. C’est donc de la bouche

même d’un témoin oculaire que je

tiens la description des fameuses

chambres à gaz à l’allure de salles

de douches avec les écriteaux

hypocrites » (voy. André Rogerie, op. cit., p. 82.).Notons que Cambier était un piètre « témoin oculaire ». En effet :- les fours crématoires de Birkenau ne fonctionnaient pas à l’électricité ;�� GÊDSU�V� OÊKLVWRLUH� RIÏFLHOOH��dans les crématoires II et III (car du camp F, André Rogerie contemplait le crématoire III), le gaz ne sortait pas directement SDU�GHV�DSSDUHLOV�Ï[�V�DX�SODIRQG��il aurait été jeté sous forme de granulés le long de colonnes en grillage. Tout porte donc à croire que Cambier, qui a peut-être participé au démantèlement des crématoires, a rapporté à son camarade de simples bruits.Dans le cas de Georges Briquet, ancien déporté à Allach (commando de Dachau), c’est encore plus net. A propos d’une conversation entre déportés, un soir ou un dimanche, il raconte : « Nous parlons de Dachau et

un de nos camarades évoque

la fameuse chambre à gaz

FDPRX�H� HQ� VDOOH� GH� GRXFKHV� ��un jour, au hasard, on appelle

une cinquantaine de prisonniers

pour aller aux douches. Arrivés

dans la salle, ceux-ci, déshabillés,

s’aperçoivent bientôt que, au lieu

d’ouvrir les appareils à douche

Ï[�V� DX� SODIRQG�� FH� VRQW� GHV�ouvertures pratiquées dans le

sol qui sont libérées pour laisser

échapper le gaz mortel. Asphyxie

et folie ont vite fait leur œuvre.

Perfection de l’organisation

allemande, la salle des gaz est

voisine du four crématoire. Ainsi

disparaissent sans témoins des

camarades qu’on a vus partir un

jour et dont on ne sait pas ce qu’ils

sont devenus » (Briquet, p. 40). Aujourd’hui, cependant, même ceux qui persistent à croire en l’existence d’une chambre à gaz homicide à Dachau déclarent qu’elle n’aurait jamais servi. Il est donc patent que le camarade de Georges Briquet rapportait un bruit sans aucun fondement. N’oublions pas en effet que les rumeurs les plus folles circulaient dans les camps. A Dora, par exemple, le Débarquement allié fut annoncé... début janvier 1944. L’information fut toutefois rapidement démentie : « nous

avons su aussitôt, écrit André Rogerie, que c’était un bobard, un

de ces affreux bobards qui courent

dans les camps » (ibid., p. 51). Un ancien déporté à Dachau raconte : « Dans notre cour,

les nouvelles arrivent malgré

le cordon de silence qui nous

entoure. Elles volent de block en

block par les fenêtres et il semble

bien que la source se situe à

OÊLQÏUPHULH� DXWRXU� GÊXQ� SRVWH�récepteur clandestin. Mais que de

déformations, que d’exagérations

dans ces “bouteillons” » (Briquet, p. 20).Un autre exemple, encore plus révélateur, concerne l’affaire des quatre (ou sept) résistantes du réseau Buckmaster exécutées au Struthof et incinérées dans le four crématoire du camp en juillet 1944. Plus tard, le bruit circula parmi les prisonniers que, durant l’incinération, des cris avaient été entendus, provenant de l’intérieur du four, et qu’un corps avait tenté de se redresser. Interrogé à ce sujet lors du « procès de Natzweiler », un accusé qui avait participé à l’exécution et à l’incinération, Werner Rohde, répondit que c’était faux et qu’aucun prisonnier n’aurait de toute façon pu voir une telle scène, puisqu’il était impossible d’observer depuis les baraques des détenus ce qui avait pu se passer dans la salle du crématoire. Il expliqua les déclarations macabres de certains en disant : « Je sais que

dans les camps, qu’ils soient

des camps de prisonniers ou

des camps de concentration,

les rumeurs les plus incroyables

concernant les choses les plus

impossibles sont courantes » (18).Aujourd’hui, l’histoire de l’enfournée vivante au Struthof est abandonnée ; preuve qu’il s’agissait d’un simple bobard. Même un menteur comme Eugène Marlot — il va jusqu’à écrire : « Respectons les légendes quand

elles symbolisent la liberté » (Marlot, p. 13) — n’en parle plus.

Dossier

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49“J’étais dans l’orchestre de Birkenau”

Dans son ouvrage sur le Struthof, il mentionne l’exécution, sans donner un seul détail sur la crémation (ibid, p. 31).Poursuivons cependant. Chez les autres anciens déportés cités, on ne trouve aucune description, même sommaire, d’une chambre à gaz ou d’un processus de gazage. Certes, le sujet est bien souvent abordé, présenté comme une réalité incontestable, mais toujours de façon extrêmement vague. L’examen des récits démontre qu’à Auschwitz et ailleurs, les crématoires étaient sans cesse l’objet des plaisanteries méchantes ou macabres, faites pour amuser ou pour blesser un détenu. Dans son témoignage, ainsi, Georges Briquet raconte qu’à son arrivée à Dachau, le chef du block de quarantaine, un certain Messarian, dit aux Français qui venaient d’arriver :« Vous voyez là-bas, cette fumée, c’est celle du crématorium, ce sont des copains qui brûlent ! Vous y passerez tous, salauds que vous êtes, ordures comme seule la France peut en produire ! (Briquet, p. 15) »Guy Kohen fait un récit similaire. Il raconte que, le jour même de son arrivée à Auschwitz, un Polonais qui détestait les Français le prit par le bras et lui « dit méchamment » :« Le four crache de la fumée noire et épaisse, c’est ton convoi, ce sont les cochons de Français qui brûlent » (Kohen, p. 71).Plus tard, alors qu’il se sentait

faiblir, un Kapo lui lança : « Tu as froid, Drecksau (sale truie), n’aie crainte, le four te réchauffera bien » (ibid., p. 83).De son côté, André Rogerie se souvient que, malade, il fut sélectionné par le docteur Thilo. Celui-ci lui inscrivit sur le torse un « F ». Un camarade qui avait reçu la même marque lui dit : « cela veut dire : “Four” », et tous les deux en rirent (André Rogerie, p. 69). Deux jours après, ils furent transférés au... camp F, le camp hôpital (id.).Dans cette ambiance, on ne sera pas surpris que de nombreux déportés aient cru, sur la foi d’indices (qui leur paraissaient) suspects, assister à un meurtre de masse. On sait par exemple que, pour aller au Sauna central, les déportés nouvellement arrivés à Birkenau passaient entre les crématoires II et III. On sait également qu’Auschwitz était un immense complexe industriel où des tas de cheminées fumaient sans arrêt (cheminées des usines, tours de refroidissement, cheminées des cuisines...). Dès lors, certains ont cru, de bonne foi : a) voir des convois entiers aller à la mort (alors qu’ils se rendaient à la désinfection) ; b) vivre dans un endroit où l’on brûlait constamment des corps (alors que la fumée ou la vapeur venait des usines ou des cuisines).Voilà pourquoi il ne faut guère attacher d’importance à tous les « témoignages » vagues, qui parlent uniquement de

gens allant aux crématoires et de cheminées crachant de la fumée. L’ouvrage Musiques d’un autre monde en est un exemple ÐDJUDQW�� QRWDPPHQW� ORUVTXH�l’auteur écrit :« D’interminables colonnes d’hommes, de femmes HW� GÊHQIDQWV� G�ÏOHQW� GHYDQW� QRV�yeux dilatés par l’épouvante. Venant de la gare et se dirigeant vers les chambres à gaz, ils ne savent pas où ils vont » (p. 88). Et plus loin : « Dehors, c’est la fumée des crématoires pendant le jour et la rougeur du ciel pendant la nuit » (p. 89). Parfois d’ailleurs, le mensonge apparaît nettement. Ainsi lorsque Pelagia Lewinska raconte : « Une sélection eut lieu au quartier en question. On chargea des femmes sur des camions devant le bloc 25. Les camions vont et viennent. Des ÐDPPHV� VRUWHQW� GHV� FKHPLQ�HV�des fours crématoires » (Lewinska, p. 84). Or, on sait que, sauf incendie accidentel, aucune ÐDPPH�QH�VRUW�GÊXQH�FKHPLQ�H����Pelagia Lewinska n’a donc jamais vu ce qu’elle prétend. Ailleurs, elle déclare que les Allemands ont lutté contre une épidémie de typhus en sélectionnant les malades. Puis elle assène : « Tous les malades et tous ceux qui paraissent suspects furent envoyés dans les chambres à gaz. Environ 2 000 hommes malades périrent ainsi dans une seule journée » (ibid., p. 115). A aucun moment, l’ancienne déportée ne prend en compte l’hypothèse selon laquelle ces déportés ont pu être évacués ailleurs, soit

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dans une autre partie du camp (par exemple dans le camp de quarantaine), soit dans le camp hôpital de Bergen-Belsen (créé en octobre 1943). Faute de date, il HVW�K�ODV�LPSRVVLEOH�GH�Y�ULÏHU���Mais j’entends déjà les exterminationnistes s’écrier : « Dès que des déportés GLVSDUDLVVHQW�� YRXV� DIÏUPH]�qu’ils ont été transférés ailleurs. C’est trop facile ! » C’est aussi facile que de dire qu’ils ont été gazés et incinérés à la chaîne. Pour les révisionnistes, l’ennui HVW� TXÊLO� HVW� WU�V� GLIÏFLOH� GH�Y�ULÏHU� OHV� DOO�JDWLRQV� GHV�« témoins », car, le plus souvent, HOOHV� VRQW� WURS� ÐRXHV� �DEVHQFH�de date, notamment). Toujours, GRQF�� OHV� KLVWRULHQV� RIÏFLHOV�privilégient l’hypothèse la plus sinistre. Je reste toutefois SHUVXDG�� TXH� VL� OD� Y�ULÏFDWLRQ�était possible, l’accusation de meurtre tomberait.Qu’on me permette d’ailleurs de citer deux exemples précis :a) Le premier est le récit d’une jeune juive déportée à Birkenau, Suzanne Birnbaum. Elle raconte que, le 30 octobre 1944, alors qu’elle était malade, une « sélection » eut lieu, au cours de laquelle elle fut choisie avec 3 000 autres femmes. Le lendemain, après une nuit affreuse passée à attendre, elles quittèrent le camp et furent mises dans un train, à 70 par wagon à bestiaux. Elle écrit : « Destination inconnue. Des

bruits circulent : des transports

entiers ont été gazés dans les

wagons mêmes, ou bombardés

exprès en cours de route » (19). Mais elles ne furent ni gazées, ni bombardées. Leur destination fut Bergen-Belsen. Gageons que celles qui restèrent au camp racontèrent plus tard que, le 30 octobre 1944, 3 000 femmes sélectionnées avaient disparues, donc qu’elles avaient été gazées. Or, ces 3 000 personnes étaient à Bergen-Belsen.b) Dans le deuxième exemple, un recoupement ayant pu facilement être effectué, il s’est révélé que les déportés disparus n’avaient pas été exterminés. L’auteur de Musiques d’un autre

monde parle du « camp Tchèque » à Birkenau, c’est-à-dire du camp spécial (dans le secteur BIIb) où avaient été parqués, à partir de septembre 1943, les juifs venus de Theresienstadt. Il précise : « [Le camp tchèque] est peuplé

de juifs qui y vivent en famille.

Ils gardent leurs cheveux, leurs

vêtements personnels, reçoivent

des lettres et des colis. De plus,

ils ne travaillent pas. Leur

traitement privilégié est une

énigme pour nous et ne cesse de

susciter notre envie. Ils ont aussi

un ensemble composé d’une

quinzaine de musiciens, dont

quelques-uns viennent parfois

dans notre camp pour y copier

la musique dont ils ont besoin » (pp. 89-90).De mars à juillet 1944, le « camp tchèque » fut liquidé (20). L’auteur raconte qu’un jour, on donna à l’orchestre d’Auschwitz une douzaine de pupitres. Il écrit : « Nous reconnaissons ces

objets. Ils proviennent du camp

WFK�TXH� HW� FRQÏUPHQW� OÊDWURFH�nouvelle qui s’est répandue

depuis la veille : les quatre mille

Tchèques ont été exterminés par

les gaz, en une nuit, après six mois

d’une vie confortable dont nous

étions jaloux !... » (p. 90). Pour les déportés, donc, cela ne faisait donc aucun doute : le camp ayant été liquidé et les pupitres étant restés, les juifs avaient tous été passés par les gaz, en une seule nuit. Or, dans son ouvrage sur Auschwitz, Léon Poliakov a publié les « souvenirs d’un enfant » qui avait vécu au « camp Tchèque ». Il déclare qu’à partir du 6 juin 1944 : « II y eut

des sélections. Les hommes et

femmes capables de travailler

partirent ailleurs. Il ne resta que

les vieillards et les enfants » (21). C’est clair : l’ « atroce nouvelle » qui s’était répandue dans le camp — et qui est constamment reprise encore aujourd’hui — était fausse. Lorsque le camp fut liquidé, les hommes et les femmes en âge de travailler (parmi lesquels se trouvaient sans doute les possesseurs des pupitres) disparurent certes, mais pas parce qu’ils auraient été exterminés pour autant. Ils étaient partis ailleurs, pour travailler. Très probablement vers des camps comme Ravensbrück (pour les femmes) ou Buchenwald (pour les hommes). Rappelons que durant l’été 1944, avec l’offensive soviétique et le Débarquement

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51“J’étais dans l’orchestre de Birkenau”

allié en Normandie, l’Allemagne avait plus que jamais besoin de main-d’œuvre pour tenter de soutenir l’effort de guerre.J’ajoute qu’en août 1944, le camp des tziganes fut à son tour liquidé. Or, cette fois, OÊKLVWRLUH� RIÏFLHOOH� DGPHW� TXH�les hommes et les femmes en âge de travailler ne furent pas exterminés. Dans Auschwitz

vu par les SS, on apprend que, le 2 août, 1 408 tziganes (813 hommes, 105 garçons âgés de 9 à 14 ans et 490 femmes) furent conduits à Auschwitz I. A 16 heures, ils partirent en train pour Buchenwald (voy. Auschwitz

vu par..., p. 49, note 69).Preuve que l’égalité : 1 déporté disparu = 1 déporté exterminé, est fausse.Reste le cas des inaptes au travail : petits enfants, vieillards, PDODGHV�� /ÊKLVWRLUH� RIÏFLHOOH�déclare qu’ils ont été gazés. Mais tout porte à croire qu’ils sont simplement restés au camp MXVTXÊ��OD�ÏQ��FÊHVW���GLUH�MXVTXÊ��la libération par les Soviétiques. Car comment, dans le cas contraire, expliquer les photos prises par ces derniers en février 1945 et qui montrent notamment un grand nombre de femmes, d’enfants, d’affaiblis... ? On comprendra donc pourquoi, dans les témoignages cités, j’ai laissé de côté tout ce qui concerne les gazages homicides. De façon évidente, les anciens déportés ne faisaient que colporter des rumeurs sans fondement. Et même si ce n’était pas le cas,

je répète que dix, cent, voire mille témoignages ne peuvent rien contre les conclusions des expertises matérielles...

2°) Sur les détenus qui administraient les camps, OÊKLVWRLUH� RIÏFLHOOH� \� YRLW� XQH�volonté délibérée des Allemands — un « choix intentionnel » déclare Eugène Marlot (Marlot, p. 54) —, DÏQ� TXH� FHX[� TXÊLOV� YRXDLHQW� ��l’extermination organisassent eux-mêmes leur enfer. Dans l’ouvrage Camp de concentration

Natzweiler-Struthof, on lit : « Mais

on sait que la grande trouvaille

des SS fut de faire assurer

l’administration intérieure du

camp par des détenus auxquels

ils déléguaient leur pouvoir de

contrainte et de mort. C’est ce qui

rendait la lutte pour la vie si féroce

dans le camp » (22).Je réponds tout d’abord que cette allégation n’est fondée sur rien : à ma connaissance, aucun document n’a jamais été produit, dans lequel Himmler aurait demandé expressément aux chefs des camps d’en laisser DX[�G�WHQXV�OÊDGPLQLVWUDWLRQ�DÏQ�de transformer ces lieux en des enfers organisés.J’ajoute que si, vraiment, des directives semblables avaient existé, il n’y aurait eu ni « bons » Kapos ni « bons » commandos de travail, ni même « bons » gardiens. Or, les témoignages cités en mentionnent. On se souvient qu’au Struthof, André Ragot a connu le bon Kapo Guttmann (Ragot, p. 71). André

Rogerie, pour sa part, reconnaît avoir été inscrit, à Auschwitz, « dans un petit commando assez

sympathique », où le travail n’était pas dur et où la soupe était « assez abondante » (Rogerie, p. 78). De son côté, Aimé Spitz évoque avec émotion un chef de EORF�� 9DOWLQ�� ÏOV� GÊXQ� LQGXVWULHO�sarrois, qui leur l� ÏW� YUDLPHQW�connaître des heures calmes » et qui, « très compréhensif,

chercha à atténuer toutes [leurs] souffrances » (Spitz, p. 20) ; « aussi lui gardons-nous un

excellent souvenir », conclut-il. A l’usine où elle travaillait, Suzanne Birnbaum vit une juive hongroise tomber d’inanition : « Une de

nos gardiennes allemandes (...) alla chercher deux tartines

qu’elle avait apportées pour elle

et les donna à [la] pauvre gosse

de Hongroise qui s’était trouvée

mal » (Birnbaum, p. 160).Mentionnons également un fait intéressant rapporté par André Ragot. Dans son témoignage sur le Struthof, il constate que les médecins français, habitués à l’investigation clinique, étaient bien plus compétents que les autres, adeptes de la seule analyse en laboratoire (23). Si, vraiment, l’organisation des camps avait été étudiée pour en faire des abîmes d’horreur, les médecins français, trop compétents, donc susceptibles de trop bien soigner les malades, auraient été écartés. Or, c’est le contraire qui advint. André Ragot écrit : « Peu à peu, tout de

même, notre supériorité devient

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évidente (...). La conséquence est que, en août 1944, les médecins du Revier seront en quasi totalité des Français, alors qu’en mars, il n’y en avait pas un seul » (Ragot, p. 68). Preuve que, malgré la pénurie de moyens, on se souciait de la santé des détenus.Toutes ces petites anecdotes fragilisent grandement la thèse selon laquelle l’administration des camps par les détenus eux-mêmes était « une des inventions les plus diaboliques des nazis » (Briquet, p. 27), destinée à transformer les camps en enfers.On pourra me répondre que ces anecdotes ne sont guère nombreuses. C’est sans doute vrai. Mais elles existent tout de même, démontrant qu’il n’existait pas de politique V\VW�PDWLTXHPHQW�G�ÏQLH�J’ajoute que dans cette affaire comme dans bien d’autres, avant de prêter aux accusés des intentions sinistres, il faut raisonner avec bon sens. Considérons n’importe quelle école : dans chaque classe, des individus sont choisis parmi les élèves pour être responsables de la propreté, de la discipline durant les intercours, du bon ordre lors des déplacements... Il en va de même dans les colonies de vacances et, plus généralement, dans toutes les structures où il existe des « chambrées » nombreuses. A chaque fois, des responsables sont choisis parmi les membres de ces chambrées, car ils y vivent en permanence, donc

ils en pénètrent bien la vie. Les équipes dirigeantes sont, quant à elles, assez réduites. Pourquoi en aurait-il été différemment dans les camps de concentration ?Seulement voilà : lorsqu’il est question de choisir quelqu’un pour assurer l’ordre, on ne va pas désigner un faible, un timoré, une personne qui se laissera vite déborder. On lui préfère tout naturellement un fort, sans quoi l’anarchie surviendra fatalement. Or, dans les camps, dès le début, les forts étaient les « verts », c’est-à-dire les « droits communs », ainsi que les militants communistes de base. Par la suite, cela a pu changer ; certains « politiques » et certains prisonniers disciplinaires ont pu se hisser dans la hiérarchie. Mais en règle générale, les Kapos restèrent des individus peu éduqués, bourrus, violents, parce qu’ils étaient les mieux placés pour maintenir l’ordre à coups de trique. Voilà pourquoi je concède sans peine que les « bons » Kapos furent une minorité. Il ne faut toutefois pas y voir une preuve de la « perversité nazie », mais une simple conséquence de l’esprit humain, tel qu’on le retrouve partout.3°) J’en termine avec l’allégation selon laquelle la population des camp aurait été séparée en deux classes bien distinctes : d’un côté quelques « proéminences », de l’autre une masse de « crevards » harassés, exténués, réduits à l’état de loques humaines, dénués de tout, uniquement

soucieux de survivre un jour de plus.S’il en avait été ainsi, comment expliquer qu’à Auschwitz, il ait existé un « marché aux puces », la latrine, pendant que les « proéminences » se OLYUDLHQW��� OHXU�JUDQG�WUDÏF�GDQV�leurs chambres particulières ? Comment expliquer qu’il y ait eu des prostituées « de luxe », qu’il fallait payer dix cigarettes, d’autres que l’on pouvait avoir pour une, deux ou trois cigarettes HW��HQÏQ��FHUWDLQHV�TXL�VÊRIIUDLHQW�pour une ou deux bouffées seulement ? Tout cela démontre qu’à Auschwitz (et sûrement partout ailleurs), existaient des classes intermédiaires entre les « proéminences » et les « crevards ». Des classes qui ne pouvaient ni fréquenter les prostituées « de luxe », ni « organiser » dans les chambres particulières, mais qui avaient tout de même assez de ressources pour, le soir, se OLYUHU� DX� WUDÏF� HW� IRUQLTXHU�� /��encore, c’est le bon sens même. Sachant qu’il existe des gens plus ou moins chanceux, plus ou moins généreux, plus ou moins débrouillards, une société qui pratique le libre échange ne peut pas être une société strictement bipolaire. Dès qu’une société se livre au commerce libre avec une monnaie d’échange (dans les camps, c’était la cigarette), les riches et les pauvres ne sont que les deux extrémités d’une chaîne composée de multiples classes intermédiaires.

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53“J’étais dans l’orchestre de Birkenau”

Mon travail, commencé dans le prolongement de la lecture d’un livre, ne prétend nullement à l’exhaustivité. Il a simplement pour objectif de démontrer, à partir de quelques exemples précis, que l’ancien déporté Michel de Boüard avait certainement raison lorsqu’il déclarait : « le dossier [du système concentrationnaire] est pourri ».Finalement, les procédés de propagande alliée sur les camps de concentration n’ont innové en rien. Ils ont consisté, comme d’habitude :a) à délaisser tout ce qui pouvait y avoir de favorable, pour ne retenir que les éléments sombres ;b) à toujours présenter ces éléments sombres KRUV� FRQWH[WH� DÏQ� GH� SRXYRLU� OHV� JURVVLU�démesurément et les mettre sur le compte de la « perversité nazie » ;c) à présenter comme des vérités certaines les rumeurs les plus folles.A la suite du professeur Faurisson, les révisionnistes se sont beaucoup occupés du problème de l’ « Holocauste ». Aussi ont-ils concentré leurs efforts sur l’étude des chambres à gaz homicides dans les camps de concentration. C’était nécessaire. Mais je reste SHUVXDG�� TXH� FH� QÊHVW� SDV� VXIÏVDQW� HW� TXÊLO�faut aujourd’hui aller plus loin. Je m’explique. Robert Faurisson a raison lorsqu’il souligne que, de plus en plus, la magique chambre à gaz devient vaporeuse : personne n’est capable ni

d’en expliquer le fonctionnement, ni même d’en donner une description. A tel point que, dans les musées comme celui de Washington, les visiteurs n’en voient aucune. Et pourtant, ils sortent de ces musées convaincus de l’existence de ces abattoirs humains. Pourquoi ? Parce qu’ils ont vu les photos de cadavres prises en 1945 par les Alliés : ils ont contemplé les fosses de Bergen-Belsen, les amoncellements de Buchenwald, les crânes de Majdanek... Parce qu’ils ont vu les cheveux, les chaussures, les YDOLVHV��(QÏQ��SDUFH�TXÊLOV�RQW�OX�RX�HQWHQGX�GHV�« témoignages » de survivants, témoignages qui leur décrivent les camps comme autant d’usines de mort. Dès lors, il leur semble logique que, dans ces lieux d’extermination, de gigantesques abattoirs humains aient été construits. Comment aurait-il pu en être autrement ? Quand on veut tuer à la chaîne, on s’en donne les moyens...Aujourd’hui, ainsi, la croyance générale en l’existence des chambres à gaz homicides allemandes ne repose pas sur le fait qu’on pourrait en voir, mais sur tout ce qui est dit à propos des camps en eux-mêmes. Le raisonnement est le suivant : les camps étaient des lieux d’extermination (pour vous en convaincre, contemplez les cadavres, regardez les cheveux, écoutez ceux qui en sont revenus), donc il n’y a aucune raison de remettre en cause la thèse selon laquelle des chambres à gaz

CONCLUSION

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homicides y ont été construites. Un exemple ÐDJUDQW�GH�FH�l�UDLVRQQHPHQW�x�SHXW� WUH�UHOHY��dans la « réponse aux négationnistes » qui a été publiée en janvier 2005. L’auteur, Jérôme Ain, publie ces deux clichés avec légende :

La méthode est simple : en haut, on vous montre une sélection à Auschwitz. En bas, un amoncellement de cadavres. Au milieu, on ne YRXV�PRQWUH� ULHQ��PDLV� RQ� YRXV� OÊDIÏUPH� �� OHV�juifs étaient gazés. Pour le grand public, il n’en

faut pas plus : les chambres à gaz ont existé. C’est certain, puisque l’on peut voir les deux extrémités de la chaîne (l’arrivée des vivants, les morts entassés).Cette méthode est d’autant plus malhonnête que le cliché du bas n’a pas été pris à Auschwitz. Il a été pris à Buchenwald, en avril 1945, par la correspondante de guerre américaine Margaret Bourke-White (24). Mais qui le sait parmi le grand public ?Face à cela, le discours révisionniste perd une grande partie de sa force, car cette méthode �OÊHOOLSVH��HVW�WU�V�HIÏFDFH�Et s’il parvient parfois à s’imposer, la réponse est toujours la même : « Certes, on a sans doute exagéré à propos des chambres à gaz. Il n’y en a pas eu partout et on n’y a pas gazé autant que l’on a dit. Mais dans les camps, les gens sont de toute façon morts d’autre chose : ils sont morts sous les coups (parce qu’ils étaient sans cesse battus), de froid (parce qu’ils étaient à peine vêtus, même en hiver), de faim (parce qu’on ne les nourrissait pas), de maladie (parce qu’on ne les soignait pas)... Vous comprenez, les camps, c’étaient des lieux conçus pour exterminer. Regardez ce que les Alliés y ont trouvé en 1945. Donc peu importe comment les gens sont morts ; ils sont morts du fait de la volonté des QD]LV��SRLQW�ÏQDO��xC’est ce discours-là qu’il faut dès maintenant combattre. Or, on ne pourra le faire qu’à la condition de s’attaquer au « dossier pourri » GX� V\VW�PH� FRQFHQWUDWLRQQDLUH�� SRXU� HQÏQ�dévoiler la vérité sur la vie dans les camps. Cette mission nécessite de travailler dans les archives allemandes, d’étudier les procès d’après-guerre et les témoignages parus notamment entre 1945 et 1950. C’est un travail gigantesque, que seule une équipe indépendante et déterminée pourra accomplir. Prions Dieu qu’une telle équipe puisse voir le jour. Car sans cela, tout le travail effectué par les révisionnistes l’aura peut-être été pour rien — à vue humaine s’entend.

L’entrée du camp d’Auschwitz ou la voie de l’horreur et de la mort qui rappelle les images terribles de la péportation et de la « Solution !anle ». Mettre en doute la réalité des faits est plus qu’une simple gi"e à notre histoire.

Dossier

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55“J’étais dans l’orchestre de Birkenau”

(1) : Préface de Georges Duhamel. Éd. Mercure de France, Paris, 1948. Une version anglaise est parue en 1989 sous le titre : Music of Another World. (translated by Chester Kisiel. Evanston, IL, Northwestem University Press, 1989).Szyman Laks (1901-1983) a étudié les mathématiques à Vilnius avant d’étudier la musique au conservatoire de Varsovie, sa ville natale. De 1927 à 1929, il a été élève au conservatoire de Paris. Auteur et compositeur, il a joué du violon dans les cafés, sur des navires, il a DFFRPSDJQ��OHV�ÏOPV�PXHWV�HW�LO�a travaillé en tant que professeur de musique. En 1941 il a été arrêté et interné au camp de Pithiviers (près d’Orléans), avant d’être déporté à Auschwitz II-Birkenau en juillet 1942. En octobre 1944, il a été transféré à Dachau. Libéré au printemps 1945, il est revenu à Paris et a écrit son témoignage. (2) : « Nous sortions en musique et, HQ�SDVVDQW�GHYDQW�OHV�RIÏFLHOV��QRWUH�Kapo […] criait : “enlevez les bérets”, puis quand nous étions sur la route, l’ordre : “remettez les bérets” DUULYDLW�HQÏQ��x (voy. Guy Kohen, Retour d’Auschwitz. Souvenirs du déporté 174 949 [autoédité, 1946], pp. 70-72). C’était aussi vrai dans d’autres camps, comme Buchenwald par exemple (voy. La Renaissance Républicaine, mai 1945, l’entretien accordé par Pierre Gamel, ancien de Buchenwald, à Max Allier : « […] nous étions, dans tous nos déplacements, précédés de la fanfare du camp »). (3) : Voy. le témoignage du docteur André Ragot, ancien interné au Struthof, paru sous le titre : N. N. Nuit et Brouillard (éditions documents, 1958), p. 37. (4) : p. 146. Sur la maison close à Auschwitz, voy. également Pelagia Lewinska, Vingt mois à Auschwitz (éd. Nagel, Paris, mars 1945),

pp. 138-139 ; André Rogerie, Vivre, c’est vaincre (Hérault-Editions, 1990), p. 43. (5) : Voy. Aimé Spitz, Struthof. Bagne nazi en Alsace. Mémoire du déporté patriote 4596 (autoédité, sans date), p. 9. (6) : Voy. Eugène Marlot, Un Enfer en Alsace, (1985), p. 17. (7) : Voy. L’Impossible oubli. La déportation dans les camps nazis (éd. de la FNDIRP, 1989), pp. 75-76. (8) : Voy. Georges Briquet, Rescapé de l’enfer nazi (éd. La France au Combat, sans date), pp. 24 et 25. (9) : Voy. François Kozlik, Le mont de l’épouvante : Horreurs vécues au camp du Struthof (éd. Sedal, Strasbourg, 1945), p. 9. (10) : Naturellement pour l’auteur, ces déportés étaient gazés puis brûlés à Auschwitz (voy. par exemple, pp. 88, 90, 114, et ss). Mais lui-même n’a jamais rien vu. Il ne fait que rapporter des bruits. (11) : Voy. p. 119. Voy. Lewinska, p. 77 : « Nous appelions ce vol d’un terme convenu : “organisation” ». (12) : « Or, les nazis avaient établi des structures hiérarchisées à la tête desquelles on trouvait généralement des criminels de droit commun, des assassins, la pègre. Ainsi, chaque prisonnier pouvait devenir le persécuteur d’un autre prisonnier de catégorie inférieure, le Juif se trouvant au bas de l’échelle » (voy. Le Magazine 10/18, n° 1, janvier-mars 2002, p. 17, col. A). (13) : « the original manuscript of his declaration is not known » ; voy. Jean-Claude Pressac, Auschwitz, Technique and operation of the gas chambers (Beate Klarsfeld Foundation, New York, 1989), p. 128. (14) : Voy. Auschwitz vu par les SS (Edition Interpress, Varsovie, 1991), « Déclaration de Pery Broad », p. 104. (15) : Voy. Pierre Vidal-Naquet, Les assassins de la mémoire. « Un

Eichmann de papier » et autres essais sur le révisionnisme (éd. La découverte, 1987), p. 45. (16) : « the form and the tone of his declaration sound false » ; voy. Jean-Claude Pressac, Auschwitz..., déjà cité, p. 128. (17) : « Chaque jour, sous le chaud soleil de la Haute-Silésie, nous allons en chemise prendre l’air sur le “stad”. Or, là, je me trouve juste en face d’un des fours crématoires […]. » (p. 72). « De mon coin d’herbe où je suis couché, je vois la fumée se répandre dans l’air » (p. 73) (18) : Voy. The War Crimes Trial (éd. A. Webb, 1949), vol V, « The Natzweiler Trial », pp. 155-156. (19) : Voy. Suzanne Birnbaum, Une Française juive est revenue [Edition du Livre Français, Paris, 1945 (?)], p. 134. (20) : Jozef Garlinski prétend que cette liquidation eut lieu en une fois, le 9 mars 1944 (voy. Jozef Garlinski, Volontaire pour Auschwitz. La résistance organisée à l’intérieur du camp [éd. Elsevier Séquoia, Bruxelles, 197], p. 211). Mais les auteurs de Auschwitz vu par les SS parlent de deux actions, le 9 mars et les 11-12 juillet 1944 (voy. Auschwitz vue par..., op. cit., p. 91, note 56). (21) : Voy. Léon Poliakov, Auschwitz (éd. René Julliard, 1964), p. 173. (22) : Voy. Camps de concentration Natzwiller Struthof (édité par le Comité national pour l’érection et la conservation d’un mémorial de la déportation au Struthof, 1973), p. 21. (23) : « […] la médecine française, basée sur des procédés d’investigation clinique avant tout est, je le dis bien haut, de cent coudées supérieure » (Ragot, p. 68). (24) : Voy. Mémoire des camps (éd. Marval, 2001), p. 137, doc. n° 172.

Notes

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Le document NO-724

Nous soumettons aux lecteurs deux documents importants. Le premier (NO-724, voir p. 61) émane d’August Frank, alors chef adjoint du WVHA �OÊl� 2IÏFH� FHQWUDO� SRXU� OÊ�FRQRPLH�

et l’administration »), un organisme notamment chargé de l’administration économique des camps de concentration. Il en commandait le premier bureau (Amt A) qui s’occupait plus spécialement GHV� ÏQDQFHV�� &ÊHVW� �� FH� WLWUH� TXÊLO� VÊRFFXSD� GHV�biens saisis (volés) aux juifs lors de l’ « Action

Reinhardt ». Le 26 septembre 1942, il rédigea une lettre « Top secret » (Geheime Kommandosache !) destinée au siège social de l’administration SS �� /XEOLQ� HW� DX� FKHI� GH� OÊDGPLQLVWUDWLRQ� GX� FDPS�GÊ$XVFKZLW]��&HWWH�PLVVLYH��HQ�VL[�FRSLHV�VHXOHPHQW��concernait l’utilisation de ces biens. Loin de parler d’une extermination, l’auteur avait clairement écrit : « Objet : Utilisation des biens dans le cadre de l’installation (comprenez : la réinstallation) et de l’évacuation des juifs » (Betr. : Verwertung des Besitzes anlässlich der An - und Aussiedlung der Juden).

LUMIÈRE SUR

L’ « ACTION REINHARDT »

Pour le grand public, les valises, les vêtements, les chaussures et les autres objets personnels

que l’on montre à Auschwitz et ailleurs confirment que les juifs étaient exterminés en masse.

Pour beaucoup, par exemple, 1 valise = 1 famille exterminée, 1 robe = 1 femme exterminée,

1 paire de chaussures = 1 personne exterminée… Dans leur film sur la libération d’Auschwitz, les

Soviétiques recoururent implicitement à cet argument. De nos jours, ce genre de propagande

continue : dans son livre La Seconde Guerre mondiale, les faits, les lieux, les hommes,

l’historienne devenue directrice culturelle et pédagogique au Mémorial de Caen, Isabelle

Bournier, montre deux chaussures d’enfants « retrouvées à Treblinka et ayant servi de preuves

au procès d’Adolf Eichmann, en 1961 » (voir p. 58) [1].

MARIE PEREROU

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Lumière sur l’ « Action Reinhardt »

&HUWDLQV� REMHFWHURQW� TXÊLO� VÊDJLVVDLW� GX� IDPHX[�« langage codé » utilisé dans l’administration allemande, y compris dans les documents les plus secrets. A l’appui de leur thèse, ils avanceront deux faits :- dans cette lettre, l’auteur parlait clairement de « l’or dentaire » (Zahngold) récupéré. Preuve, diront-ils, que la récupération se faisait sur des cadavres ;- dans d’autres documents (le NO-1257, le L-18, etc.) les quantités de biens volés sont telles qu’elles trahissent une extermination massive au cours de laquelle les victimes étaient totalement dépouillées de leurs affaires.Ma réponse se fera en trois temps. Tout d’abord, je soulignerai que si, vraiment, la récupération de l’or dentaire et la quantité des biens volés démontraient, de façon évidente, l’existence d’une extermination de masse, alors l’utilisation d’un « langage codé » eut été totalement illusoire.Ensuite je souligne que, outre ces documents,les $OOHPDQGV� RQW� FRQVHUY�� WRXV� OHV� HIIHWV� WURXY�V� ��Auschwitz (valises, chaussures, habits, cheveux, HWF���� ,O� IDXGUDLW� GRQF� FURLUH� TXÊ�� SDUWLU� GH� ������OHV� $OOHPDQGV� DXUDLHQW� FKHUFK�� �� G�WUXLUH� WRXWHV�les preuves de l’ « Holocauste », dynamitant les FU�PDWRLUHV�HW�DOODQW�MXVTXÊ��IRUPHU�GHV�FRPPDQGRV�TXL�� SDUWRXW� �� OÊ(VW�� DXUDLW� H[KXP�� SXLV� EU°O�� OHV�cadavres (« opération 1005 »), et qu’en même temps ils auraient laissé subsister toutes ces (prétendues) l� SUHXYHV� x� �YLGHQWHV� TXÊLOV� DYDLHQW� �� SRUW�H� GH�PDLQ��&HWWH�WK�VH�HVW�JURWHVTXH��(QÏQ�� MH� QRWHUDL� TXH�� FRQWUDLUHPHQW� DX[�auteurs d’autres documents invoqués par les exterminationnistes, August Frank fut retrouvé et traduit en procès. Il comparut en 1947 devant un tribunal militaire américain en même temps que son supérieur direct au WVHA, Oswald Pohl, et seize autres accusés dont Georg Lörner dont je parlerai bientôt. Le document NO-724 ayant été le principal produit contre lui, il eut l’occasion de s’expliquer.A ce procès, l’accusé principal, Oswald Pohl, adopta une stratégie banale : au sujet de la prétendue extermination des juifs, il se garda bien de FRQWUHGLUH�OÊ$FFXVDWLRQ��DIÏUPDQW�TXÊLO�QÊ\�DYDLW�SDV�

pris part et qu’il n’en avait appris l’existence que très WDUG�� HQ� RFWREUH� ����� ����� -Ê\� UHYLHQGUDL� GDQV� XQH�prochaine étude. Mais d’autres accusés furent plus LQFLVLIV��&H�IXW�SDU�H[HPSOH�OH�FDV�GH�*HRUJ�/«UQHU��Ancien chef du deuxième bureau du WVHA (Amt B), il était responsable de l’approvisionnement des casernements SS et des camps de concentration en KDELOOHPHQW��$�FH�WLWUH��LO�DYDLW��W��P O����OD�JHVWLRQ�des biens volés aux juifs lors de l’Action Reinhardt et il avait eu en main le document NO-724. A son procès, son avocat lui demanda : « qu’avez-vous compris [à l’époque] par “réinstallation et déportation” » (ibid., p. 751). L’accusé répondit : « A cette époque, on savait dans une large mesure que les juifs allaient être déportés vers l’Est. Je m’imaginais qu’en vertu des diverses lois du Reich, les biens VXSHUÐXV� HW� OHV� JUDQGV� HQWUHS©WV� DYHF� OHXUV� VWRFNV�VHUDLHQW� FRQÏVTX�V�� QRWUH� SURSDJDQGH� UHSURFKDQW�aux juifs d’en posséder » (id����*HRUJ�/«UQHU�DIÏUPDLW�GRQF�TXH��PDOJU��VD�SDUWLFLSDWLRQ���OD�UHGLVWULEXWLRQ�des biens volés aux juifs, il n’avait rien su d’une quelconque extermination. L’Accusation ayant été incapable de le prendre en défaut, dans son jugement, le Tribunal déclara : « Certains éléments permettent de conclure raisonnablement qu’il savait TXH�OHV�ELHQV��WDLHQW�FRQÏVTX�V�DX[�MXLIV��PDLV�ULHQ�QH� G�PRQWUH� DYHF� XQH� FHUWLWXGH� VXIÏVDQWH� TXÊLO�aurait su que ces biens avaient été pris à des juifs tués dans les camps dans le cadre de la politique d’extermination » (ibid., p. 1009). Preuve qu’aucun lien évident n’existe entre la spoliation des juifs et leur éventuel assassinat.De son côté, August Frank fut tout au aussi net. Voici ce que l’on put entendre dans la salle du tribunal alors qu’il était interrogé par son avocat, Me Gerhard Rauschenbach :« ACCUSÉ FRANK. Je voudrais dire […] ce qui suit : quand l’Action Reinhardt est mentionnée, c’est-à-dire à cette époque particulière où j’appartenais au WVHA, cela n’aurait jamais pu être une action d’extermination. Je voudrais souligner clairement que l’Action Reinhardt, en tant que telle, fut toujours connue au WVHA comme une action économique, une action qui permettait d’utiliser les biens juifs.

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Six semaines environ après l’entretien entre Pohl [du :9+$@�HW�3XKO�>GH�OD�5HLFKVEDQN@��OH�:9+$�UH�XW�XQ�avant-projet d’ordre venu de Lublin qui portait les initiales de Himmler et qui fut la base authentique du document NO-724. Avant que je ne parle de ce document en détail, je voudrais dire que dans cet DYDQW�SURMHW�GÊRUGUH�DXFXQ�PRW�QH�ÏJXUDLW�TXL�DXUDLW�parlé de tuer ou d’une extermination, ou d’une autre sorte d’Action Reinhardt […].« Me RAUSCHENBACH. Accusé, dans ce décret que vous avez signé, c’est-à-dire le document NO-724, il est dit que les biens personnels, par exemple les montres, seraient également envoyées au bureau d’utilisation. Maintenant, je ne puis croire sans une FHUWDLQH� GLIÏFXOW�� TXÊDYHF� FH� G�FUHW� TXH� YRXV� DYH]�vous-même signé, vous ne pouviez pas comprendre ou ignorer qu’une tuerie ou une extermination se déroulait. Il est quasiment évident que de tels biens personnels ne pouvaient pas être pris sur des personnes encore vivantes. Qu’avez-vous à répondre ?« ACCUSÉ FRANK. A propos des montres, je dois dire qu’il n’était certainement pas courant que l’administration militaire s’occupe de collections de montres. Toutefois, il n’est pas absolument nécessaire qu’une montre doive provenir d’un homme mort […]. Il n’est pas nécessaire de tuer un homme pour lui prendre sa montre. Je crois que vous pourriez trouver des exemples dans toutes les armées du monde. Je crois qu’aussi longtemps que, dans le monde, il y aura des guerres, des prisonniers et des montres, ces montres seront volées […]. Alors certes, on m’accuse au motif que les lunettes et l’or dentaire ne pouvaient pas provenir de gens encore vivants ; je le savais. J’en étais conscient. Mais il m’apparaissait aussi clairement que dans un camp, ou dans une série de camps, où 50 ou 60 000 personnes, voire plus, étaient transportés, il y aurait des décès comme dans une ville normale. De même, il m’apparaissait clairement qu’à l’Est, où le typhus sévissait, le taux de mortalité serait plus élevé que dans les temps habituels�x�����&HUWHV�� OD� U�FXS�UDWLRQ� GH� OÊRU� GHQWDLUH� �HW� DXWUHV�prothèses) peut sembler amorale, voire immorale. Mais August Frank rappela que, contrairement

Chaussures

d’enfants montré

dans le livre

d’Isabelle Bournier

et ayant servi

de “preuves” au

procès d’Eichmann

Images tirées du

film tourné par

les Soviétiques

à la libération

d’ Auschwitz.

La propagande

1 valise = 1 famille

exterminée

commence

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Document NO-1257Lettre de Himmler à l’administration des campsdu 15 janvier 1943Cf. p. 62

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Top secret Le 26 septembre

1942

Chef A/Pr./B.

Journ. N° 050/42 secr. 6 copies –

VS 96/42 4ème copie

Objet : Utilisation des biens dans le cadre de l’installation [comprenez : la réinstallation] et de

l’évacuation des juifs » (Betr. : Verwertung des Besitzes anlässlich der An - und Aussiedlung der

Juden).

Au Chef de l’administration SS, à Lublin.

Au Chef de l’administration du camp d’Auschwitz.

Sans prendre en considération les régulations générales, qui seront émises durant le mois

d’octobre, à propos de l’utilisation des biens mobiliers et immobiliers des juifs évacués, la procédure

suivante doit être suivie concernant les biens qu’ils portent sur eux — des biens qui dans tous les

ordres à venir seront appelés marchandises volées, réception de marchandises volées et marchandises

de réserve :

1. a. L’argent liquide en billets de banque du Reich allemand doit être versé sur le compte du

Bureau central économique et administratif [SS WVHA] 158/1488 à la Banque allemande à Berlin-

Shoenenberg.

b. La monnaie étrangère (frappée ou non), les métaux rares, les bijoux, les pierres précieuses et semi-

précieuses, les perles, l’or dentaire et les morceaux d’or doivent être donnés au SS WVHA. Ce dernier

est responsable de la remise immédiate à la Banque centrale allemande.

c. Les montres de toutes sortes, les réveils, les stylos, les porte-mines, les rasoirs à main et les

rasoirs électriques, les couteaux de poche, les ciseaux, les torches électriques, les portefeuilles et les

porte-monnaie doivent être réparés, nettoyés et évalués dans des magasins spécialisés, puis donnés

rapidement aux troupes du front.

La livraison aux troupes s’effectue en numéraire via les services postaux. Trois ou quatre ordres de

prix seront bientôt déterminés, car on doit s’assurer que chaque officier ne puisse pas acheter plus

d’une montre. Les montres en or sont exclues de la vente, la décision de leur utilisation me revient.

Les recettes reviendront au Reich.

d. Les sous-vêtements et les vêtements masculins, y compris les chaussures, doivent être triés et

évalués. Après avoir couvert les besoins des prisonniers des camps de concentration, et à l’exception

des troupes, ces vêtements seront délivrés au Bureau de rapatriement des Allemands de souche. Dans

tous les cas, les recettes reviendront au Reich.

e. Les vêtements et les sous-vêtements féminins, y compris les chaussures, les vêtements et les sous-

vêtements d’enfants, y compris les chaussures, doivent être donnés au Bureau de rapatriement des

Allemands de souche contre paiement. Les sous-vêtements en soie pure doivent être donnés au

Ministère de l’économie du Reich conformément aux ordres du Bureau principal de l’économie et de

l’administration SS. Cet ordre vaut également pour les sous-vêtements de l’alinéa d.

Traduction du document NO—724

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Document NO—724

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f. Les plumes pour literie, les édredons, les couvertures en laine, les tissus pour costumes, les châles, les parapluies, les cannes, les bouteilles thermos, les oreillettes, les poussettes, les peignes, les sacs à main, les ceintures en cuir, les paniers, les pipes, les lunettes de soleil, les miroirs, les couteaux de table, les fourchettes et les cuillères, les sacs à dos et les valises en cuir ou en matière synthétique sont à remettre au Bureau de rapatriement des Allemands de souche. La question du paiement sera décidée plus tard.Les besoins en édredons, couvertures en laine, bouteilles thermos, oreillettes, peignes, couteaux de table, fourchettes, cuillères et sacs à dos peuvent être comblés par Lublin et Auschwitz grâce à leurs stocks et contre paiement à partir de leurs fonds budgétaires.g. Le linge, tel que les draps de lit, les protections pour lits de plume, les oreillers, les serviettes, les torchons et les nappes doivent être donnés contre paiement au Bureau de rapatriement des Allemands de souche.Les draps de lit, le linge de lit, les serviettes, les torchons et le linge de table peuvent être fournis pour les besoins des troupes à partir des stocks contre paiement des fonds budgétaires.h. Les lunettes de tout type doivent être données au Bureau médical pour être utilisées. (Les lunettes avec une monture en or doivent être données sans leurs verres en même temps que les métaux précieux). Nul besoin de tenir des comptes concernant les lunettes, étant donné leur faible valeur et leur utilisation limitée.i. Les fourrures de valeur, traitées ou non, doivent être données au SS WVHA. Les fourrures ordinaires (peaux d’agneau, de lièvre et de lapin) doivent être signalées au SS WVHA, bureau B II, et doivent être livrées à l’usine de vêtements des Waffen SS, à Ravensbrück près de Fürstenberg (Mecklenburg).k. Tous les articles mentionnés dans les alinéas d, e, et f, et qui n’ont plus que le cinquième ou des deux cinquièmes de leur valeur initiale, ou qui sont inutilisables, devront être donnés via le SS WVHA au Ministère de l’économie du Reich, à des fins d’utilisation. Concernant les articles non mentionnés sous les lettres 1. b., la demande d’une décision quant à leur utilisation devrait être faite au Chef du SS WVHA.2. Le SS WVHA fixera tous les prix au regard des prix légalement contrôlés. Cette estimation peut néanmoins être faite plus tard. Les petites évaluations qui font seulement perdre du temps et du personnel peuvent être évitées.Les prix moyens pour les articles simples doivent être établis de façon générale. Par exemple, un pantalon usé pour homme vaudra 3 RM, une couverture en laine 6 RM, etc.Pour la livraison des articles usagés au Ministère de l’économie du Reich, le prix moyen au kilo devra être établi.L’étoile juive devra être impérativement retirée de tous les vêtements d’extérieur destinés à la livraison. En outre, les articles à livrer doivent être fouillés et dépouillés d’éventuelles valeurs dissimulées dans les coutures. Cette opération doit être effectuée avec le plus grand soin.

Pour ordre :[Signé] FrankBrigadier général SS et Brigadier général de la Waffen SS

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aux Américains, les Allemands ne disposaient pas GÊXQ�LPPHQVH�WHUULWRLUH�TXL�DXUDLW��W����OÊDEUL�GH�OD�JXHUUH�� GRQF� TXL� DXUDLW� SX�  WUH� H[SORLW�� �� YRORQW���« Dès 1942, dit-il, nous avons dû commencer à improviser. Partout, nous eûmes à économiser. Nous entrions dans le quatrième hiver de guerre » (ibid., p. 760). Dans de tels moments, on récupère tout, absolument tout.-H�VRXOLJQH�TXH��VRXV�9LFK\��OD�)UDQFH��WDQW�VRXPLVH��� XQ� EORFXV� EULWDQQLTXH�� RQ� U�FXS�UDLW� GH� WU�V�nombreux « déchets et vieilles matières » (lois du ��� MDQYLHU�HW�GX����DR°W� ������� FH�TXL� FRPSUHQDLW� ��les chutes et autres débris de métaux non ferreux (arrêté du 11 mai 1942), les disques et cylindrés phonographiques hors d’usage (arrêté du même jour), les cornes, onglons et sabots d’animaux (arrêté du 26 mars 1942)… Même les cheveux étaient récupérés sous la dénomination : « déchets provenant des coupes de cheveux » (voy. J.O. de l’État IUDQ�DLV, 27 mars 1942, p. 1199).Quant aux énormes quantités récupérées, August Frank n’en avait pas été autrement surpris. Il invoquait le fait que les déportés partaient non pas avec le strict minimum, mais avec « deux, trois, quatre ou cinq valises » et qu’au camp, on ne leur laissait pour se changer qu’ « une seconde tenue ou quelques sous-vêtements� x� ����� &RQVFLHQW� TXÊLO�s’agissait de vols caractérisés, il ajouta : « Je ne nie pas que ces gens devaient abandonner tous ces effets supplémentaires, par exemple leur jupe ou leurs sous-vêtements, ce qui n’était pas facile pour eux et TXH�FHV�FKRVHV�OHXUV��WDLHQW�FRQÏVTX�HV�HQ�YLRODWLRQ�des principes de propriété ; cela, je ne le nie pas » (ibid., p. 762).-ÊDMRXWH�TXH�OHV�$OOHPDQGV�VDLVLVVDLHQW��JDOHPHQW�FH�que les juifs laissaient derrière eux. Dans une lettre GDW�H�GX����MDQYLHU�������+HLQULFK�+LPPOHU�UDSSRUWD�TXH��ORUV�GÊXQH�YLVLWH���9DUVRYLH��LO�DYDLW�LQVSHFW��l�les HQWUHS©WV� DYHF� OHV� ELHQV� SULV� DX[� MXLIV�Æ� FÊHVW���GLUH�lors de l’émigration juive [-XGHQDXVZDQGHUXQJ] » (voir le doc. NO-1257reproduit p. 59). Évoquant des « FHQWDLQHV� GH� PLOOLHUV� Æ� SHXW� WUH� P PH� GHV�PLOOLRQV� Æ� GH� YHUUHV� GH�PRQWUHV », des « tours » et des « machines à coudre », le Reichsführer des SS se

SODLJQDLW�TXH�FHV�ELHQV�JLVDLHQW�O��VDQV� WUH�U�XWLOLV�V��alors que les fabricants de montres avaient besoin des verres et les usines des outils (id.). De façon évidente, ces objets (surtout les outils) n’avaient pas été emmenés par les juifs évacués ; ils avaient été saisis chez eux après leur départ. Il en allait de même DYHF� OHV� OLWV�� OHV� VRPPLHUV�� OHV� RUHLOOHUV�� HWF�� 9RLO��pourquoi, loin d’être un signal d’alarme avertissant d’une extermination massive, les énormes quantités volées démontraient juste que les juifs expulsés étaient dépouillés de presque tous leurs biens. A son procès, Georg Lörner se vit poser la question suivante : « D’où pensiez-vous que les plumes pour OHV�OLWV�SURYHQDLHQW�"�,O�HVW�P PH�HQFRUH�SOXV�GLIÏFLOH�de comprendre comment les plumes pour oreillers auraient pu provenir des prisonniers des camps de concentration. » Loin d’être décontenancé, l’accusé répondit : « Les immenses quantités de plumes m’ont renforcé dans ma conviction que ces biens venaient GHV�JUDQGV�HQWUHS©WV�(juifs)�TXL�DYDLHQW��W��FRQÏVTX�V�et je crois encore que dans cette affaire, il s’agissait des HQWUHS©WV�� SDV� GHV� FKRVHV� FRQÏVTX�HV� DX[� G�SRUW�V (lors de leur arrivée dans les camps) » (5).Il est donc très malhonnête de laisser croire que chaque habit, chaque paire de chaussures, chaque costume, chaque paire de lunettes, etc. auraient été récupérés sur une personne tuée. La réalité est très différente. Les déportés arrivaient bien souvent avec de nombreuses affaires et les Allemands volaient en plus celles qu’ils avaient laissées derrière eux.9RLO�� FH� TXÊLO� IDXW� VDYRLU� ORUVTXÊRQ� OLW� OH� GRFXPHQW�NO-724. Le plus important en reste l’objet — « Utilisation des biens dans le cadre de l’installation et de l’évacuation des juifs » (Verwertung des Besitzes anlässlich der An - und Aussiedlung der Juden) — dont jamais Arthur Frank ne démentit la véracité. A DXFXQ�PRPHQW�LO�QH�SU�WHQGLW�DYRLU�HX�UHFRXUV���XQ�« langage codé » pour masquer — auprès de qui ? — un massacre de masse et jamais l’Accusation ne put OXL�IDLUH�DGPHWWUH�OH�FRQWUDLUH��-H�QRWH�GÊDLOOHXUV�TXH�si, au terme de son procès, l’ancien chef du premier EXUHDX�GX�:9+$�IXW�FRQGDPQ����OÊHPSULVRQQHPHQW���YLH��LO�IXW�OLE�U��VL[�DQV�SOXV�WDUG��HQ�������HW�PRXUXW�paisiblement en 1984.

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Lumière sur l’ « Action Reinhardt »

Le document PS-3244Le deuxième document concerne Martin Bormann. A Nuremberg, l’Accusation reprocha �� OÊDQFLHQ� VHFU�WDLUH� GX� )±KUHU� GÊ WUH� GHYHQX�« l’un des réalisateurs les plus importants

du programme tendant à affamer, dégrader,

dépouiller et exterminer les juifs soumis aux lois

draconiennes des conspirateurs » (TMI�� 9�� ������Le 16 janvier 1946, le substitut du procureur général américain Thomas F. Lambert produisit OH�GRFXPHQW�36�������XQ�RUGUH�VLJQ��SDU�OÊDFFXV��le 9 octobre 1942, soit deux semaines après la rédaction du NO-724. D’après cette pièce, dit-il, le secrétaire du Führer estimait que « le problème

GH� OÊ�OLPLQDWLRQ�G�ÏQLWLYH�GH�PLOOLRQV�GH� MXLIV�GX�territoire de la Grande Allemagne ne pouvait

plus être résolu par la seule émigration, mais par

l’application de règlements impitoyables dans les

camps spéciaux de l’Est. » (TMI��9��������(Q�JXLVH�de « preuves », il en cita plusieurs extraits, dont les deux phrases suivantes :- « Il faut transporter ces juifs toujours plus loin

à l’Est et les mettre dans des camps spéciaux de

travail forcé » ;- « C’est la nature même de ces problèmes très

GLIÏFLOHV� TXL� H[LJH� TXÊLOV� VRLHQW� U�VROXV� SDU� OD�

sévérité la plus impitoyable et cela dans l’intérêt

GH�OD�V�FXULW��G�ÏQLWLYH�GH�QRWUH�SHXSOH� (Signé :) Bormann » (ibid���S�������Alors que l’analyse du substitut paraissait sinistre — les « camps spéciaux de l’Est » devaient être les « camps d’extermination » (Vernichtungslager) GRQW�RQ�SDUODLW���OÊ�SRTXH���$XVFKZLW]��7UHEOLQND��Majdanek et Belzec — la première phrase citée donnait plutôt l’impression que, loin d’être H[WHUPLQ�V��OHV�MXLIV�DOODLHQW� WUH�G�SRUW�V���OÊ(VW�SRXU�\� WUH�PLV�DX�WUDYDLO��$ÏQ�GH�Y�ULÏHU��MH�PH�VXLV�UHSRUW��DX�GRFXPHQW�36������OXL�P PH�Bien qu’il ne soit pas reproduit dans les comptes rendus du procès (TMI, série bleue), on en trouve une traduction anglaise dans la série rouge des TMI et une version française dans l’ouvrage publié sous la direction de Henri Monneray : La persécution des juifs dans les pays de l’Est

présentée à Nuremberg���G��GX�&'-&��3DULV���������voir p. 67). Voici ce que l’on peut lire :« Depuis la déclaration de la guerre, les possibilités

d’émigration ont de plus en plus diminué. D’autre

part, outre l’espace vital du peuple allemand, son

espace économique s’accroît rapidement, si bien

que, en raison du grand nombre de juifs résidant

dans ces territoires, une évacuation totale des

Déportation des juifs du ghetto de Lodz dans le cadre de l’« action Reinhart »

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juifs par l’émigration n’est plus possible.« Puisque la prochaine génération elle-même ne ressentira plus si intimement ce problème, et qu’elle ne comprendra plus aussi clairement à la lumière des expériences passées, et que cette question, une fois posée, demande une solution G�ÏQLWLYH�� OH� SUREO�PH� GRLW�  WUH� U�VROX� SDU� OD�génération actuelle.« L’éloignement ou le retrait total des millions de juifs résidant dans l’espace économique européen, constitue un besoin urgent dans la lutte pour la sécurité de l’existence du peuple allemand.« A commencer par le territoire du Reich, pour continuer dans les autres territoires d’Europe FRPSULV� GDQV� OH� SODQ� G�ÏQLWLI�� OHV� MXLIV� VHURQW�progressivement déportés dans de grands camps (traduction anglaise : « to large camps »), déjà établis ou en passe de l’être dans l’Est, où ils devront travailler, et d’où ils seront déportés plus loin vers l’Est. Les vieillards, de même que les juifs décorés (…) seront réinstallés dans la ville de Theresienstadt, située dans le protectorat de Bohème et de Moravie.« Il résulte de la nature même des choses, que FHV� SUREO�PHV�� WU�V� GLIÏFLOHV� SDU� FHUWDLQV� F©W�V��ne peuvent être résolus qu’avec une impitoyable rigueur (traduction anglaise : « ruthless severity » = sévérité impitoyable), dans l’intérêt de la V�FXULW��G�ÏQLWLYH�GH�QRWUH�SHXSOH�(6).Quand on lit tranquillement ce document, on VÊDSHU�RLW� TXH�� ORLQ� GÊDSSX\HU� OD� WK�VH� RIÏFLHOOH��il la contredit au contraire. Martin Bormann parlait d’une évacuation des juifs vers l’Est, pas d’une extermination. Quant aux « camps spéciaux de travail forcé� x�� OÊDGMHFWLI�QH�ÏJXUDLW�QXOOH�SDUW�dans le texte ; il y était juste question de « grands camps » (« large camps ») où les juifs « devront travailler ». Thomas F. Lambert avait donc tout simplement inventé pour faire croire que Martin Bormann avait directement participé, en toute FRQQDLVVDQFH�GH�FDXVH����OÊ�OLPLQDWLRQ�GHV�MXLIV���l’Est.S’il avait eu le souci de la vérité, le Tribunal DXUDLW� G°� UHFWLÏHU�� 0DLV� VDQV� VXUSULVH�� LO� QÊHQ�

ÏW�ULHQ��'DQV�VRQ�MXJHPHQW��LO�UHSULW�TXDVLPHQW�mot pour mot ce qu’avait dit l’Accusation, écrivant :« Dans un ordre en date du 9 octobre 1942, [Bormann] déclara que l’élimination permanente des juifs des territoires de la Plus Grande Allemagne ne pouvait plus être effectuée par l’émigration, mais seulement par l’emploi d’une “force impitoyable” dans les camps spéciaux de l’Est » (7).0DOKRQQ WHW�� RX� LQFRPS�WHQFH� "� -H� OÊLJQRUH��Mais quelle que soit l’hypothèse envisagée, elle FRQÏUPH� TXH� OH� l� SURF�V� x� GH� 1XUHPEHUJ� IXW�une sinistre farce.

Conclusion'ÊDSU�V� OÊKLVWRLUH� RIÏFLHOOH�� OD� G�FLVLRQ�GÊH[WHUPLQHU� OHV� MXLIV�DXUDLW��W��SULVH��� OD�ÏQ�GH�l’été ou durant l’automne 1941. Les documents 12�����HW�36������G�PHQWHQW�FHWWH�DIÏUPDWLRQ��$� GHX[� VHPDLQHV� GÊLQWHUYDOOH�� ÏQ� VHSWHPEUH�et début octobre 1942, deux hauts dignitaires nationaux-socialistes (le secrétaire de Hitler et le chef du premier bureau du WVHA) ont clairement parlé de la mise au travail des juifs et de leur évacuation vers l’Est, dans les territoires pris aux Soviétiques. Mais encore faut-il les lire KRQQ WHPHQW�� FÊHVW���GLUH� VDQV� a priori et sans idée préconçue, et ne pas invoquer un prétendu « langage secret » dont l’utilisation aurait été illusoire./D� l� 6ROXWLRQ� ÏQDOH� GH� OD� TXHVWLRQ� MXLYH� x� IXW��pendant la guerre, le refoulement des juifs vers l’Est, avec la mise au travail des juifs reconnus DSWHV�� 7HOOH� HVW� OD� Y�ULW�� FRQÏUP�H� SDU� OHV�documents. Il faudra bien un jour le reconnaître RIÏFLHOOHPHQW��

(1) : Voy. Isabelle Bournier, La Seconde Guerre mondiale, les faits, les lieux, les hommes���G��&DVWHUPDQ���������S�����(2) : Voy. TMI, série verte, vol. V, pp. 664-66 et 668.������Ibid., pp. 758-59.(4) : Voy. TMI, série verte, vol. V, p. 761.(5) : Voy. TMI, série verte, vol. V, p. 751.(6) : TMI, série rouge, vol. V, pp. 945-46.(7) : TMI��;;,,������

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Lumière sur l’ « Action Reinhardt »

Traduction française du document PS-3244

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Brèves

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�9HUV�OD�ÏQ�GHV�lois antirévisionnistes

FRÉDÉRIC MORIN

L’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme des Nations

Unies déclare :« Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit. »Le 21 juillet 2011, le Bureau du Commissaire des Nations Unies aux Droits de l’Homme a publié son « commentaire général » à propos de l’article 19. L’alinéa 49 déclare explicitement :« Les lois qui pénalisent l’expression d’opinions sur des faits historiques116 sont incompatibles avec les obligations que le Pacte impose aux États signataires en ce qui concerne le respect de la liberté d’opinion et d’expression.« Le Pacte ne permet pas l’interdiction générale expression d’une opinion

erronée ou d’une mauvaise interprétation des événements passés. »(source : http://www2.ohchr.org/english/bodies/hrc/docs/gc34.pdf).La note 116 est la suivante : « Les soi-disant “lois mémorielles”, voir Faurisson contre France, No 550/93 ».S’achemine-t-on vers l’abandon des lois dites « antirévisionnistes » ? L’équipe de Sans Concession n’y croit guère. Mais qui sait ? L’adage selon lequel l’histoire est le théâtre de l’imprévu doit rester dans nos esprits. Personne ne peut se targuer de connaître l’avenir. Pour Vincent Reynouard, les lois antirévisionnistes sont en accord avec la philosophie profonde des droits de l’homme. Mais une autre approche reste possible, selon laquelle l’égalité entre les êtres humains devrait interdire toute censure idéologique. En effet, toute censure idéologique implique qu’il existerait une partie du

peuple que l’on devrait protéger de certaines idées dangereuses parce qu’il serait trop sot pour en appréhender le danger. En conséquence, toute censure idéologique dément le sacro-saint principe de l’égalité entre tous. Si cette approche (soutenue par l’avocat Jean Stévenin) était un jour adoptée, toutes les lois liberticides seraient abandonnées.De toute façon, loi Gayssot ou pas, notre mission reste la même : dire et répéter inlassablement la vérité sans prendre de gants. Si cette mission peut être réalisée à l’abri de la répression, alors tant mieux. D’un autre côté, la répression que nous subissons (et que nous subirons peut-être encore) est un gage pour l’avenir : lorsque les peuples seront enclins à accepter le vrai, tout ce que nos adversaires nous auront fait subir d’injuste se retournera contre eux et contribuera à faire éclater cette vérité pour laquelle nous combattons aujourd’hui.

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Nouveau retour sur Katyn à Nuremberg

J’ai plusieurs fois traité du procès de Nuremberg

et, en particulier, de « Katyn à Nuremberg ».

Encore assez récemment, le 20 avril 2012, j’ai

publié un article intitulé « Retour sur Katyn à

Nuremberg » (1).

Mais on me signale qu’un internaute, dont

l’identité ne m’est pas révélée, a manifesté son

désaccord. Voici son message :

Il me semble que monsieur Faurisson n’ait pas bien étudié le procès de Nuremberg, notamment en ce qui concerne Katyn. Que Katyn !gure dans l’acte d’accusation au titre du chef d’accusation «Crimes de guerre» n’est nullement contestable. Les alliés occidentaux ont cédé au chantage des Soviétiques et ce n’est pas à leur honneur. Pour autant, monsieur Faurisson semble oublier que les articles 19 et 21 ne disent pas ce qu’il veut leur faire dire. L’article 19 vise surtout à assouplir les conditions d’administration de la preuve par rapport aux règles très strictes en la matière de la procédure anglo-saxonne. Il rejoint en fait les règles de la procédure pénale française sans attenter aux droits de la défense. C’est ainsi que, lorsque l’accusation produisit des « a#davit », les avocats des accusés purent exiger la comparution des signataires de ces mêmes «  a#davit  ». En ce qui concerne l’article  21 du statut du tribunal, l’interprétation de monsieur Faurisson rejoint celle des Soviétiques, mais non celle des autres membres du tribunal. Du reste, dans la version en anglais du statut, il est dit que, concernant les rapports o#ciels des gouvernements alliés, le tribunal « will take judicial notice », ce qui signi!e qu’il les considèrera comme recevables, sans préjuger de leur valeur probatoire. Cette disposition ne devait nullement aller à l’encontre des droits de la défense. On le véri!era précisément à propos de Katyn où la défense [a] pu imposer l’audition de ses témoins et soumettre les témoins soviétiques à un contre-interrogatoire serré, en dépit de l’opposition virulente du procureur soviétique Rudenko et de celle du général Nikitchenko, juge soviétique. C’est après cet épisode que l’on commença à évoquer la responsabilité soviétique dans le massacre de Katyn. Tout ceci est véri!able et de larges extraits des témoignages !gurent dans l’ouvrage de Jean-Marc Varaut sur le procès.

Nouveau retour sur Katyn à NurembergROBERT FAURISSON

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Cet internaute se trompe du tout au tout et certaines de ses erreurs sont graves. Il a mal lu mon article du 20 avril 2012 intitulé « Retour sur Katyn à Nuremberg » et il s’est dispensé de lire mon étude du 1er août 1990 intitulée « Katyn à Nuremberg » (2), à laquelle j’avais pris soin de renvoyer le lecteur, triple référence à l’appui.Il n’est pas allé au texte même des honteux articles 19 et 21 du statut du Tribunal militaire international de Nuremberg (1945-1946) et il n’a pas étudié l’emploi que, dans la pratique, les juges et les procureurs ont fait de ces mêmes articles. Au lieu d’aller à la source, il s’est contenté de la lecture d’un (bien mauvais) livre sur le procès de Nuremberg.Je lui conseille d’aller, en un premier temps, à l’original anglais des articles 19 et 21 (IMT) (3), puis aux traductions, très éclairantes, qu’il trouvera dans les versions française (TMI) et allemande (IMG). Il mesurera alors le cynisme avec lequel les vainqueurs ont déclaré 1) « Le Tribunal ne sera pas lié par les règles

techniques relatives à l’administration des preuves » (ce qui est terriblement inquiétant) et 2) « Le Tribunal n’exigera pas que soit rapportée la preuve de faits de notoriété publique, mais les tiendra pour acquis » (ce qui n’est pas moins inquiétant). Les phrases explicatives qui suivent chacune de ces deux G�FLVLRQV� FRQÏUPHQW� HW� DFFURLVVHQW� OHV� SLUHV�craintes. Dans le cas de l’article 19, on ajoute que le Tribunal « adoptera et appliquera une procédure expéditive et non formaliste et admettra tout moyen qu’il estimera avoir une valeur probante » ; ici une remarque :

les traducteurs français ont traduit l’anglais « expeditious� x�� TXL� VLJQLÏH� l� H[S�GLWLI� x�� SDU�« rapide ». Retenons que, de ce point de vue, le Tribunal ira vite en besogne et ne s’embarrassera pas trop des formes ; puis, au terme d’une procédure aussi désinvolte, ce même Tribunal déclarera : « Ceci est une preuve » ou « Cela n’est pas une preuve ». Dans le cas de l’article 21, on ajoute que le Tribunal « considérera également comme preuves authentiques les documents HW� UDSSRUWV� RIÏFLHOV� GHV� *RXYHUQHPHQWV� GHV�Nations Unies, y compris ceux dressés par les Commissions établies dans divers pays alliés pour les enquêtes sur les crimes de guerre ainsi que les procès-verbaux des audiences et les décisions des tribunaux militaires ou autres de l’une quelconque des Nations Unies ». Faramineux ! Voilà donc un tribunal qui, les yeux fermés, sans examen du contenu, GLUD�SDU�H[HPSOH���l�&HFL�HVW�OH�UDSSRUW�RIÏFLHO�d’une Commission de vainqueur qui a enquêté sur un crime imputé au vaincu ; il est signé de ce vainqueur ; en conséquence, il a valeur de preuve authentique » ! C’est ainsi que le tribunal des « Nations Unies » va décider d’accorder valeur de preuve authentique à toutes sortes de documents communistes dont le rapport RIÏFLHO�8566����GH� OD� &RPPLVVLRQ� VRYL�WLTXH�concluant que le crime de Katyn avait été perpétré par une unité de l’armée du vaincu. On est surpris de lire que, dans ce même article 21, on puisse parler de « faits de notoriété publique » sans préciser aux yeux de qui tel fait sera « de notoriété publique » et tel autre ne le sera pas. Comment cela se décidera-t-il ? 6XU�TXHO�FULW�UH�"�/D�U�SRQVH��GDQV�OD�SUDWLTXH��est que les juges prendront leur décision sans avoir à produire leurs raisons ; toujours dans la pratique, ils auront été « instruits » par le ÏOP�DWURFHPHQW�PHQVRQJHU�TXL�D��W��SURMHW����l’ouverture du procès (4).Autrement dit, le cas est prévu où les juges se dispenseront d’apporter une ou plusieurs preuves. Et les juges de Nuremberg useront

On est surpris de lire que, dans ce même article 21, on puisse parler de « faits de notoriété publique » sans préciser aux yeux de qui tel fait sera « de notoriété publique » et tel autre ne le sera pas.

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Nouveau retour sur Katyn à Nuremberg

surabondamment d’une telle latitude. La OLVWH� HVW� LQWHUPLQDEOH� GHV� DIÏUPDWLRQV� TXH�ce tribunal se permettra sans apport de la PRLQGUH�SUHXYH��(Q�SDUWLFXOLHU��LO�DIÏUPHUD�TXH�le vaincu a suivi une politique d’extermination physique des juifs d’Europe mais aucune preuve ne sera fournie ! IO�DIÏUPHUD�DXVVL�TXH�OH�vaincu, pour perpétrer ce crime, a usé d’armes de destruction massive appelées « chambres à gaz » ou, dans le cas de Treblinka (document 36������ �� YDOHXU� GH� SUHXYH� DXWKHQWLTXH���de « chambres à vapeur » (steam chambers) sans fournir la moindre preuve telle qu’une expertise criminelle, ce qui est un comble pour un supposé crime de cette dimension. Il DIÏUPHUD� TXH� OH� WRWDO� GHV� YLFWLPHV� MXLYHV� GX�vaincu s’est élevé à six millions sans fournir, là encore, de preuve mais au prix d’une étonnante tricherie : il dira qu’Eichmann l’a dit alors que FÊHVW� :LOKHOP� +«WWO� ���� TXL�� GDQV� XQ� DIÏGDYLW�(une déclaration écrite sous serment), a dit que Eichmann le lui avait dit, et cela dès août 1944 ! Höttl avait menti. Faisant valoir qu’une convocation de Höttl était aisée puisque, aussi bien, le personnage demeurait sur place (et collaborait activement avec l’accusation de peur d’être livré à la Hongrie communiste), les avocats de la défense avaient demandé sa comparution pour qu’il vienne s’expliquer ; le président du tribunal leur avait répondu qu’on

verrait cela plus tard mais, plus tard, on n’a ULHQ� YX� GX� WRXW� �� 3DVVH]��PXVFDGH� �6ÊLO� HVW� XQ�point particulièrement inadmissible dans le message de l’internaute, c’est l’assurance qu’il QRXV�GRQQH�DX�VXMHW�GHV�l�DIÏGDYLW� x�TXDQG� LO�ose écrire : « lorsque l’accusation produisit des ÇDIÏGDYLWÈ��OHV�DYRFDWV�GHV�DFFXV�V�SXUHQW�H[LJHU�OD� FRPSDUXWLRQ� GHV� VLJQDWDLUHV� GH� FHV�P PHV�ÇDIÏGDYLWÈ� ». Les avocats ne pouvaient rien « exiger » de tel de la part du tribunal et surtout SDV�OD�FRPSDUXWLRQ�GX�VLJQDWDLUH�GÊXQ�DIÏGDYLW��A lui seul, le cas de Höttl le prouve.Notre internaute devrait revoir sa copie là où LO�WUDLWH�GH�FH�TXH�VLJQLÏH�SRXU�GHV�PDJLVWUDWV��dans l’article 21 du statut, l’expression « to take judicial notice x�� &HOD� VLJQLÏH� l� SUHQGUH�FRQQDLVVDQFH�GÊRIÏFH�x�RX�l�DGPHWWUH�GÊRIÏFH�x��6L� XQ� MXJH� G�FLGH� GH� l� SUHQGUH� FRQQDLVVDQFH�GÊRIÏFH�x�GH�FH�TXH�l�OÊH[WHUPLQDWLRQ�SK\VLTXH�des juifs » a eu lieu, l’accusé n’aura d’autre ressource que de se le tenir pour dit, de tenir le fait pour acquis, de considérer comme DXWKHQWLTXH� OH� IDLW� TXH�� GXUDQW� OD� 6HFRQGH�guerre mondiale, le vaincu a suivi une telle politique d’extermination. En 1988, lors du deuxième procès intenté à Toronto contre le révisionniste Ernst Zündel, dont j’assistais l’avocat (Doug Christie), le juge Ron Thomas a décidé, à la demande du ministère public, de SUHQGUH� FRQQDLVVDQFH� GÊRIÏFH� GH� OD� U�DOLW�� GH�

Autopsie d’un cadavre retrou-vé dans une des nombreuses fosses de Katyn que les Alle-mands décou-vrent en février 1943

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« l’Holocauste ». Il a déclaré : « L’Holocauste est le meurtre de masse et l’extermination de (ou GHV��MXLIV�SDU�OH�U�JLPH�QD]L�GXUDQW�OD�6HFRQGH�guerre mondiale, et il sera dit (par moi) au jury GÊDGPHWWUH� FHOD� GÊRIÏFH� x� �l� The Holocaust is the mass murder and extermination of Jews by WKH�1D]L�UHJLPH�GXULQJ�WKH�6HFRQG�:RUOG�:DU��and the jury will be told to take judicial notice of that »). Je rappelle ici que seul le jury a le droit de se prononcer sur la culpabilité ou la non-culpabilité de la personne mise en cause ; au MXJH��HQVXLWH��GH�Ï[HU��YHQWXHOOHPHQW�OD�SHLQH��Toute personne, à commencer par un avocat, qui s’aviserait de contester ou d’avoir l’air de contester ce qu’on lui demande d’admettre GÊRIÏFH� HW� VDQV� SUHXYH� VHUDLW� SDVVLEOH� GHV�peines encourues pour « outrage à magistrat » (contempt of court).Quel est l’insensé qui admettrait de comparaître devant un tribunal bafouant à ce point les principes les plus ordinaires de la justice ? Un vainqueur juge son vaincu ! Il rédige le statut de son propre tribunal. Il crée jusqu’à un nouveau droit provisoire et adapté aux nécessités du moment. Ce faisant il s’accorde les droits les plus exorbitants, à commencer par celui de se passer éventuellement de preuves. Il use, par ailleurs, de la pratique de la responsabilité collective et de la rétroactivité des lois. Il décrète qu’il n’y aura aucune possibilité d’appel. Il décide que la peine de mort prononcée contre ses prisonniers sera exécutée par pendaison et non par recours au feu du peloton d’exécution, etc. La liste des crimes commis contre le droit des gens par le Tribunal militaire international de Nuremberg est longue. Les plaidoiries, c’est un comble, ont été suivies par les réquisitoires alors qu’en justice normale les réquisitoires précèdent les plaidoiries. Les vaincus QÊDXURQW� OH� GURLW�� �� OD� ÏQ�� TXÊ�� XQH� WU�V� EU�YH�déclaration. Ces plaidoiries se sont achevées le 25 juillet 1946. Le lendemain, prenait la parole le procureur général américain Robert H. Jackson, l’organisateur principal

de cette mascarade judiciaire. Il déclarait alors (TMI, XIX, p. 414-416) : « En tant que Tribunal Militaire nous poursuivons l’effort de guerre des nations alliées » (This tribunal represents a continuation of the war efforts of the Allied Nations) » : une manière comme une autre de lancer à la face du vaincu : « Vae victis ! ». Il poursuit : « En tant que Tribunal International, nous ne sommes pas attachés DX[� UDIÏQHPHQWV� SRVLWLIV� GH� SURF�GXUH� GH�nos systèmes constitutionnels ou juridiques respectifs, et nos règles n’introduiront pas de précédents dans le système interne ou la justice civile d’aucun pays ». Autrement dit : « )RLQ�GHV� UDIÏQHPHQWV� �� )RLQ�GX�GURLW� SRVLWLI� ��Nous avons inventé ces règles pour notre propre usage, pour un temps limité, et celles-ci, après usage, n’iront pas entacher les systèmes judiciaires d’un pays quelconque ».Bien entendu, le langage du vainqueur portera constamment la marque de la haute morale américaine telle que celle-ci s’illustrera plus tard dans toute une série de guerres ou d’expéditions punitives pour aboutir, par H[HPSOH�� �� OD� l� MXVWLFH� x� GH� *XDQWDQDPR�� -H�l’ai écrit et je le maintiens, ce procès d’un tribunal militaire international qui, en réalité, n’aura été ni un « tribunal », ni « militaire », ni « international » (mais strictement interallié et surtout américain) a été au XXème siècle le crime des crimes (6). En ce début du XXIème siècle il serait temps de s’en aviser.

(1) : http://robertfaurisson.blogspot.it/2012/04/retour-sur-katyn-nuremberg.html.(2) : http://robertfaurisson.blogspot.it/2010/12/katyn-nuremberg.html.(3) : http://avalon.law.yale.edu/imt/imtconst.asp#art1.(4) : http://robertfaurisson.blogspot.it/2012/02/contre-OKROO\ZRRGLVPH�OH�UHYLVLRQQLVPH�KWPO�*HRUJH���&����6WHYHQV.(5) : http://robertfaurisson.blogspot.it/2011/09/les-victoires-du-revisionnisme-suite.html.(6) : http://robertfaurisson.blogspot.it/2010/11/le-proces-de-nuremberg-1945-1946-est-le.html.