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Médecine palliative — Soins de support — Accompagnement — Éthique (2014) 13, 278—280 Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com PRATIQUE DU SOIN Sédation pour détresse en phase terminale : guide d’aide à la décision Sedation for distress in final stage: decision-making guidelines Véronique Blanchet a,, R. Aubry b , M.-L. Viallard c , S. Chapiro d , S. Dauchy e , J.-C. Tournigand f , Lucas Morin g a Hôpital Saint-Antoine, AP—HP, 75012 Paris, France b CHU de Besanc ¸on, 25000 Besanc ¸on, France c Hôpital Necker, 75007 Paris, France d Hôpital Paul-Brousse, 94800 Villejuif, France e Institut Gustave-Roussy, 94000 Villejuif, France f Hôpital Henri-Mondor, Créteil, France g Haute Autorité de santé, 93210 Saint-Denis, France Rec ¸u le 23 mai 2014 ; accepté le 14 juin 2014 Disponible sur Internet le 17 septembre 2014 MOTS CLÉS Sédation ; Guide d’aide à la décision ; Phase terminale Résumé Introduction. — À la suite des recommandations de bonnes pratiques de la sédation pour détresse réalisées en 2009 par la méthode du consensus formalisé d’experts, la Haute Auto- rité de santé (HAS) a contacté les coordinateurs du groupe de pilotage. La demande de l’HAS était d’élaborer des critères de qualité dans le cadre de sa mission « d’élaborer les guides de bon usage des soins ou les recommandations de bonnes pratiques, procéder à leur diffusion et contribuer à l’information des professionnels de santé et du public dans ces domaines ». Méthodes. — La méthode a été imposée par l’HAS. Elle comporte plusieurs étapes : (1) la constitution du groupe de travail 1 : trois personnes ayant participé à l’élaboration des recom- mandations et trois nouvelles personnes choisies parmi le comité scientifique de la SFAP. L’HAS avait délégué un correspondant, garant de la méthode ; (2) la sélection d’objectifs et de cri- tères de qualité. Après discussion, le choix a été fait de limiter la démarche de la prise de décision de sédation ; (3) phase de test des critères « dans la vraie vie » par des professionnels 1 V. Blanchet, R. Aubry, M.-L. Viallard, S. Chapiro, S. Dauchy, J.-C. Tournigand, L. Morin. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (V. Blanchet). http://dx.doi.org/10.1016/j.medpal.2014.06.003 1636-6522/© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Sédation pour détresse en phase terminale : guide d’aide à la décision

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édecine palliative — Soins de support — Accompagnement — Éthique (2014) 13, 278—280

Disponible en ligne sur

ScienceDirectwww.sciencedirect.com

RATIQUE DU SOIN

édation pour détresse en phase terminale :uide d’aide à la décision

edation for distress in final stage: decision-making guidelines

Véronique Blancheta,∗, R. Aubryb, M.-L. Viallardc,S. Chapirod, S. Dauchye, J.-C. Tournigandf,Lucas Moring

a Hôpital Saint-Antoine, AP—HP, 75012 Paris, Franceb CHU de Besancon, 25000 Besancon, Francec Hôpital Necker, 75007 Paris, Franced Hôpital Paul-Brousse, 94800 Villejuif, Francee Institut Gustave-Roussy, 94000 Villejuif, Francef Hôpital Henri-Mondor, Créteil, Franceg Haute Autorité de santé, 93210 Saint-Denis, France

Recu le 23 mai 2014 ; accepté le 14 juin 2014Disponible sur Internet le 17 septembre 2014

MOTS CLÉSSédation ;Guide d’aide à ladécision ;Phase terminale

RésuméIntroduction. — À la suite des recommandations de bonnes pratiques de la sédation pourdétresse réalisées en 2009 par la méthode du consensus formalisé d’experts, la Haute Auto-rité de santé (HAS) a contacté les coordinateurs du groupe de pilotage. La demande de l’HASétait d’élaborer des critères de qualité dans le cadre de sa mission « d’élaborer les guides debon usage des soins ou les recommandations de bonnes pratiques, procéder à leur diffusion etcontribuer à l’information des professionnels de santé et du public dans ces domaines ».Méthodes. — La méthode a été imposée par l’HAS. Elle comporte plusieurs étapes : (1) la

1

constitution du groupe de travail : trois personnes ayant participé à l’élaboration des recom-mandations et trois nouvelles personnes choisies parmi le comité scientifique de la SFAP. L’HASavait délégué un correspondant, garant de la méthode ; (2) la sélection d’objectifs et de cri-tères de qualité. Après discussion, le choix a été fait de limiter la démarche de la prise dedécision de sédation ; (3) phase de test des critères « dans la vraie vie » par des professionnels

1 V. Blanchet, R. Aubry, M.-L. Viallard, S. Chapiro, S. Dauchy, J.-C. Tournigand, L. Morin.∗ Auteur correspondant.

Adresse e-mail : [email protected] (V. Blanchet).

http://dx.doi.org/10.1016/j.medpal.2014.06.003636-6522/© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Sédation pour détresse en phase terminale : guide d’aide à la décision 279

de soins palliatifs ; (4) analyse des commentaires de la phase test par le groupe de travail ; (5)rédaction finale des critères de qualité et guide d’utilisation.Résultats. — Cet article présente le « Guide d’aide à la décision dans la mise en œuvre d’unesédation pour détresse en phase terminale ».© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

KEYWORDSModel decisionsupport;Palliative sedation;Decision-making

SummaryIntroduction. — French Palliative Sedation Recommendations were published in 2009. TheFrench Health Authority (HAS) contacted a group of experts to ask them to elaborate qua-lity criteria within the frameworks of elaboration and diffusion of guidelines for good use ofcare or practice recommendations. These data had as aim to be diffused to health workers andwide audience.Method. — Method imposed by the French authorities included several steps: (a) workgroupneeded to be composed with 3 experts who have worked to the elaboration of the recommen-dations and three experts from the scientific board of the French society of palliative medicineand a member of the authority who guaranteed the strict respect of the methodology; (b) aselection of goals needed to be reached and quality criteria. It was chosen to limit the work tothe decision-making process for a decision of sedation after several experts’ discussion; (c) atest of the criteria which was retained ‘‘in real clinical situation’’ with palliative care profes-sionals; (d) an analyze of the commentaries and results of the test phase by the workgroup; (e)redaction of the final criteria and of utilization instructions.Results. — This work presents the criteria which was definite and the helping guide for decision-making of a sedation during palliative phase for distress proposed in France.Conclusion. — An instruction guide support and strict criteria are needed to help French Health-workers to practice easily and ethically a sedation in terminal phase for distress while there isa passionate debate about the end of life and an artificial opposition between euthanasia andterminal sedation in the country.© 2014 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

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ppame

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Le médicament de première intention pour la sédation

Aider à la prise de décision pour améliorerles pratiques

Deux indications peuvent amener un patient et/ou uneéquipe médicale à envisager une sédation pour détresse :• les complications aiguës à risque vital immédiat (hémorra-

gies cataclysmiques, détresses respiratoires asphyxiques,etc.) ;

• la persistance de symptômes réfractaires, vécus commeinsupportables par le patient et qui ne peut être soulagéen dépit des efforts réalisés pour trouver un protocolethérapeutique adapté sans compromettre la consciencedu patient.

Mais si ces indications cliniques sont facilement identi-fiables, la décision de mettre en œuvre une sédation soulèvedes questions pour lesquelles il n’existe aucune réponsesimple : seule une discussion en équipe, avec le patient etavec ses proches, peut permettre de trouver un compromisface à la complexité d’une telle décision. Cette discussiondoit être structurée autour des questions qui —– même sielles ne trouvent pas de réponse —– doivent nécessairementêtre posées.

La check-list des questions qui suit ne porte donc que surle processus de décision visant à mettre en œuvre une séda-tion et sur l’accompagnement de cette décision, et non surles « modalités cliniques » de cette mise en œuvre (niveau

de sédation, cinétique des médicaments, etc.). d

uand parle-t-on de sédation ?

a sédation pour détresse est la recherche (par des moyensédicamenteux) d’une diminution de la vigilance pouvant

ller jusqu’à la perte de conscience.Son but est de diminuer ou de faire disparaître la

erception d’une situation vécue comme insupportablear le patient, alors que tous les moyens disponibles etdaptés à cette situation ont pu lui être proposés et/ouis en œuvre sans permettre d’obtenir le soulagement

scompté.La sédation peut concerner la phase palliative ou la phase

erminale de la maladie :la phase palliative est la période de la prise en chargedurant laquelle les objectifs des soins et des traitementssont pris en compte, y compris le maintien de la qualité devie et, chaque fois que possible, la durée de vie, malgrél’impossibilité d’une guérison ;la phase terminale correspond à la période de la prise encharge durant laquelle le décès est inévitable et proche.Les soins et les traitements n’ont alors pour seul objectifque le maintien de la qualité de la vie.

édation ou anxiolyse ?

e détresse en phase terminale est une benzodiazépine,

2

lmdps

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80

e midazolam. Or, comme toutes les benzodiazépines, leidazolam est anxiolytique : le même médicament peutonc être utilisé à la fois pour ses propriétés anxiolytiques etour ses effets sédatifs. Cette double utilisation est parfoisource de confusion.

La sédation est à distinguer de l’anxiolyse. Contrairementla sédation, l’anxiolyse n’a pas pour objectif d’altérer la

igilance du patient : elle vise l’apaisement de l’anxiété,

’est-à-dire d’un état de désarroi psychique ressenti en face’une situation éprouvante et s’accompagnant d’un fort sen-iment d’insécurité.

tded

1/S’assurer que l’équipe dispose de compétences en soins pa

Au moins un membre de l’équipe médicale et soignante a-t-ildiplômante en soins palliatifs et une expérience clinique de

Une équipe ressource en soins palliatifs accompagne-t-elle l’soignante dans le processus décisionnel ?

Le médecin responsable du patient a-t-il une connaissance etmédicaments sédatifs utilisés ?

2/Mettre en place un processus collégial et pluri-professionne

L’avis de la personne malade a-t-il été recherchéSi le malade ne peut plus s’exprimer, son avis a été recherché

de ses directives anticipées, et/ou par l’intermédiaire de lconfiance, de sa famille ou à défaut de ses proches ?

La prise de décision fait-elle suite à une évaluation de la situassociant plusieurs professionnels ?

La prise de décision fait-elle suite à une ou plusieurs réunionL’équipe a-t-elle anticipé une réévaluation régulière de la pr

durée (continue ou non) de la sédation ?Les arguments développés lors des réunions et la décision qui

inscrits dans le dossier du patient ?

3/S’assurer que les objectifs visés par la sédation sont compr

Les objectifs de la sédation ont-ils été clairement énoncés ?ont-ils été discutés au sein de l’équipe ?sur les conséquences et sur les risques inhérents de la séda

Est-il prévu d’évaluer l’effet de la sédation au regard de ses

4/S’assurer que l’ensemble des informations ont été donnéescompte de ses capacités de compréhension

Une information a-t-elle été donnée au patient:sur les objectifs de la sédation ?sur les modalités de mise en œuvre de la sédation ?sur les conséquences et sur les risques inhérents de la séda

Ces informations ont-elles été retranscrites dans le dossier mL’équipe s’est-elle assurée de la compréhension du patient ?

D

Lr

V. Blanchet et al.

ritères pour la prise de décision d’uneédation dans le cadre de soins palliatifs

ode d’emploi

vant de prendre la décision de mettre en œuvre une séda-ion, l’équipe médicale et soignante doit toujours se posern certain nombre de questions. Ce guide a pour objec-if de vous aider dans ce questionnement : il ne s’agit pas’établir un « score », mais de faciliter la prise de décision,n vous aidant à poser les questions de facon méthodique et’établir une tracabilité.

lliatifs Oui Non Impossible

une formationla sédation ?

équipe médicale et

une expérience des

l Oui Non Impossible

par l’intermédiairea personne de

ation du patient,

s collégiales ?ofondeur et de la

en résulte sont-ils

is par l’équipe Oui Non Impossible

tion ?objectifs ?

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tion ?édical du patient ?

éclaration d’intérêts

es auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enelation avec cet article.