Temps et travail: l’intensité du travaildamiencartron.free.fr/textes/dublint1.pdf · À propos des auteurs Pierre Boisard, Damien Cartron et Antoine Valeyre sont chercheurs au

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  • Temps et travail:lintensit du travail

    OFFICE DES PUBLICATIONS OFFICIELLESDES COMMUNAUTS EUROPENNES

    L-2985 Luxembourg

    Temps et travail: lintensit du travail

    Depuis quelques annes, de plus en plus d'acteurs de la vie conomique etchercheurs font le constat d'une intensification du travail. L'enqute sur lesconditions de travail ralise en 2000 par la Fondation europenne pourlamlioration des conditions de vie et de travail montre que cette tendance l'intensification ne s'est pas inverse. Les rsultats de cette enqutepermettent aussi de progresser dans la comprhension des tenants et desaboutissants de l'intensit du travail. L'intensification du travail est lie auxprofondes transformations de l'organisation des entreprises et de la vieconomique. Les contraintes pesant sur le rythme de travail des salaris ontun impact sur les pnibilits, les risques et les nuisances auxquels ils sontexposs. Cet impact dpend du type prcis de contraintes et, plusgnralement, de la qualit de l'organisation.

    La Fondation europenne pour l'amlioration des conditions de vie et de travail est unorgane tripartite de l'EU, dont le rle est de fournir aux dcideurs en matire depolitique sociale des conclusions, des connaissances et des conseils partir derecherches comparatives. La Fondation a t fonde en 1975 par le Rglement (CEE)n 1365/75 du 26 mai 1975.

  • Temps et travail: lintensit du travail

  • propos des auteursPierre Boisard, Damien Cartron et Antoine Valeyre sont chercheurs au CEE-CNRS (Centre dtudes delemploi - Centre national de la recherche scientifique, France) et Michel Gollac au CEE. Pierre Boisards'intresse particulirement l'amnagement du temps de travail, Damien Cartron aux formesd'intensification et d'organisation du travail, Michel Gollac aux transformations de l'organisation du travailet l'usage des nouvelles technologies, Antoine Valeyre aux liens entre formes d'organisation et formesd'efficacit des entreprises.

  • Temps et travail: lintensit du travail

    Pierre Boisard, Damien Cartron, Michel Gollac et Antoine Valeyre,

    avec la collaboration de Jean-Baptiste Besanon

    Wyattville Road, Loughlinstown, Dublin 18, Irlande. - Tl. (353-1) 204 31 00 - Fax (353-1) 282 64 56E-mail: [email protected] - site web: www.eurofound.ie

  • Une fiche bibliographique figure la fin de l'ouvrage.

    Luxembourg : Office des publications officielles des Communauts europennes, 2002

    Fondation europenne pour l'amlioration des conditions de vie et de travail, 2002

    Toute demande d'autorisation de reproduction ou de traduction devra tre adresse au directeur de la Fondation (European Foundationfor the Improvement of Living and Working Conditions, Wyattville Road, Loughlinstown, Dublin 18, Irlande).

    La Fondation europenne pour l'amlioration des conditions de vie et de travail est un organe indpendant de l'Union europenne, qui at cr pour aider la formulation de lignes de conduite futures sur les questions sociales et professionnelles. Des informations complmentaires peuvent tre obtenues partir du site Internet de la Fondation www.eurofound.eu.int

    Fondation europenne pour l'amlioration des conditions de vie et de travailWyattville RoadLoughlinstownDublin 18IrlandeTl. (353 1) 204 31 00Fax (353 1) 282 64 56E-mail : [email protected]

    Printed in Ireland

    Le papier utilis pour cette publication est exempt de chlore et provient des forts naturelles protges d'Europe du Nord. Pour chaque arbre coup, au moins un arbre nouveau est plant.

  • Avant-propos

    Favoriser la conciliation entre travail et vie hors-travail est une condition essentielle si lon veutfaciliter dune part lentre des citoyens sur le march du travail et dautre part leur permettre de semaintenir dans lemploi.

    Ce rapport bas sur une analyse seconde de la Troisime enqute europenne sur les conditions detravail en Europe (2000), fournit des informations importantes sur lvolution de lorganisation dutemps de travail en Europe. Collectivement et en moyenne, la rduction du temps de travail sepoursuit. Ces moyennes cachent toutefois dimportants carts entre pays, catgoriesprofessionnelles, secteurs, ainsi quentre hommes et femmes. Certains groupes sont ainsi plusconcerns par les horaires atypiques, ou par des dures de travail leves, dont on sait quilsnuisent plus particulirement la sant.

    Souhaitons que ce rapport, qui runit un grand nombre dinformations utiles sur ces volutions,puisse contribuer un meilleur dbat au niveau europen sur lorganisation, lamnagement et larduction du temps de travail en Europe pour quentreprises, salaris et acteurs gouvernementauxensemble trouvent les solutions qui rconcilient au mieux les intrts et proccupations de tous.

    Raymond-Pierre Bodin, Eric Verborgh, Directeur Directeur adjoint

    v

  • vii

    Table des matires

    Avant-propos v

    1 Les dterminants de lintensit du travail 1

    Contraintes de rythme et organisation des entreprises 1

    Diffusion et structuration des diffrentes contraintes de rythme 4

    Les interruptions de tche, une forme particulire dintensit du travail 12

    2 Lintensit ressentie par les salaris 17

    Indicateurs utiliss 17

    Lintensit du travail chez diffrentes catgories de salaris 19

    Effets combins des variables structurelles sur l'intensit du travail

    et catgories de main-duvre les plus exposes 24

    3 Dterminants du rythme de travail et intensit subjective 29

    Intensit ressentie du travail et dterminants du rythme de travail 29

    Intensit ressentie, contraintes de rythme, latitude dcisionnelle et

    soutien social 30

    4 Intensit, autonomie et soutien social dans le travail 37

    Autonomie procdurale et contraintes de rythme 38

    Les principaux facteurs de tension dans le travail 40

    Catgories les plus exposes la tension dans le travail 42

    5 Rythmes de travail et conditions de travail 45

    Leffet des contraintes de rythme sur les conditions de travail:

    mthodologie 46

    Effets de lorganisation du travail sur les conditions de travail 48

    6 Intensit du travail et troubles de sant 53

    Difficults mthodologiques 53

    tude des liens entre intensit du travail et troubles de sant 55

    valuation subjective des effets de lintensit sur la sant 58

    Maladies avres et travail intense 61

  • 7 Lvolution de lintensit du travail 63

    Accroissement de lintensit ressentie 63

    Transformation des contraintes de rythme 64

    Le salaire rgulateur de lintensit? 66

    Conclusion 69

    Bibliographie 73

    Annexe 75

    Annexe I Intensit ressentie du travail chez diffrentes catgories de salaris 77

    Annexe II Les catgories de main duvre les plus exposes lintensit du travail 83

    Annexe III Contraintes, autonomie et soutien social chez diffrentes catgories

    de salaris 85

    Annexe IV Glossaire du vocabulaire spcifique 87

    Table des tableaux

    Tableau 1 Contraintes de rythme de travail par groupes professionnels 5

    Tableau 2 Contraintes de rythme de travail par secteurs dactivit conomique 7

    Tableau 3 Lien entre les diffrents dterminants de lintensit du travail 8

    Tableau 4 Effet des dterminants du rythme de travail sur le risque

    dinterruptions quotidiennes: rsultats dune rgression logistique. 13

    Tableau 5 Pourcentage de salaris exposs des interruptions 15

    Tableau 6 Perception des interruptions par les salaris y tant quotidiennement

    exposs 16

    Tableau 7 Intensit du travail ressentie en fonction de ses dterminants 29

    Tableau 8 Effet des dterminants du rythme de travail sur lintensit

    ressentie du travail: rsultats dune rgression logistique. 33

    Tableau 9 Effet des dterminants du rythme de travail sur le risque

    dinterruptions perturbatrices: rsultats dune rgression logistique 35

    Tableau 10 Autonomie procdurale selon lintensit et les contraintes de rythme 38

    Tableau 11 Effets de lorganisation du travail sur les conditions de travail

    vcues par les salaris: rsultat dune rgression logistique 48

    Tableau 12 Effet de lintensit du travail sur la sant: rsultat dune rgression

    logistique 56

    viii

    Temps et travail: lintensit du travail

  • Tableau 13 Effet de lintensit du travail sur le sentiment quon ne pourra pas

    faire 60 ans le mme travail quactuellement. Rsultat dune

    rgression logistique 60

    Tableau 14 Exposition aux contraintes de rythme et lintensit du travail en

    fonction du nombre de jours darrt maladie non lis au travail au

    cours des 12 derniers mois 61

    Tableau 15 volution de lintensit du travail ressentie 64

    Tableau 16 volution des contraintes de rythme 65

    Tableau 17 Effet des contraintes de rythme sur le salaire 68

    Tableau 18 Intensit ressentie du travail par groupes professionnels 77

    Tableau 19 Intensit ressentie du travail par statut demploi 77

    Tableau 20 Intensit ressentie du travail par genre 77

    Tableau 21 Intensit ressentie du travail par tranches dge 78

    Tableau 22 Intensit ressentie du travail par secteurs dactivit conomique 78

    Tableau 23 Intensit ressentie du travail par statuts dtablissement 79

    Tableau 24 Intensit ressentie du travail par taille dtablissement 79

    Tableau 25 Effet des variables structurelles sur lintensit ressentie du travail

    (modles conomtriques logit) 79

    Tableau 26 Contraintes, autonomie et soutien social par groupes professionnels 85

    Tableau 27 Contraintes, autonomie et soutien social par secteurs dactivit 85

    Table des graphiques

    Graphique 1 Analyse des correspondances multiples des contraintes de

    rythme de travail (premier plan factoriel) 9

    Graphique 2 Contraintes de rythme de travail par professions 10

    Graphique 3 Contraintes de rythme par secteurs dactivit conomique 11

    Graphique 4 Lintensit du travail par groupes professionnels 19

    Graphique 5 Intensit du travail par professions 21

    Graphique 6 Intensit du travail par tranches dges 22

    Graphique 7 Intensit du travail par secteurs dactivit conomique 23

    Graphique 8 Intensit du travail par statut dtablissement 24

    Graphique 9 Intensit du travail par taille dtablissement 25

    Graphique 10 Les situations de travail et leurs effets dans le modle de Karasek 31

    Graphique 11 Contraintes et autonomie par professions 39

    ix

    Table des matires

  • Graphique 12 Analyse des correspondances multiples des pressions temporelles,

    de lautonomie, de ltendue cognitive et du soutien social

    (1er plan factoriel) 41

    Graphique 13 Pressions temporelles, autonomie et soutien social dans le travail

    par groupes professionnels 43

    Graphique 14 Pressions temporelles, autonomie et soutien social dans le travail

    par secteurs dactivit conomique 44

    x

    Temps et travail: lintensit du travail

  • Depuis quelques annes, de plus en plus dacteurs de la vie conomique et de plus en plus dechercheurs font le constat dune intensification du travail. Lenqute sur les conditions de travailralise en 2000 par la Fondation montre que cette tendance lintensification ne sest pasinverse. Les rsultats de cette enqute permettent aussi de progresser dans la comprhension destenants et des aboutissants de lintensit du travail. Lintensification du travail est lie auxprofondes transformations de lorganisation des entreprises et de la vie conomique. Lescontraintes pesant sur leur rythme de travail ont un impact sur les pnibilits, les risques et lesnuisances auxquels les salaris sont exposs. Cet impact dpend du type prcis de contraintes et,plus gnralement, de la qualit de lorganisation.

    Les facteurs qui dterminent le rythme et lintensit du travail (ou contraintes de rythme) seclassent en deux grandes catgories, les contraintes industrielles et les contraintes marchandes.Chacune de ces catgories correspond un mode dorganisation des entreprises. Les contraintesindustrielles affectent surtout les groupes professionnels ouvriers et les activits du secteursecondaire, alors que les secondes se rencontrent davantage dans les catgories de cols blancs etdans les activits tertiaires.

    Cependant, on assiste une hybridation croissante des modes dorganisation industriel etmarchand: les logiques marchandes pntrent aujourdhui au cur des organisations industrielles,soumettant leurs salaris des contraintes nouvelles lies aux impratifs de la demande. linverse, certaines entreprises marchandes industrialisent leur activit. Ce cumul contrarie lesstratgies mises en place par les salaris pour grer chaque registre de contrainte.

    Contraintes de rythme et organisation des entreprises

    Organisation industrielle et organisation marchandeLe mode dorganisation des entreprises conditionne fortement la nature des contraintes pesant surle rythme de travail de leurs salaris. On distingue schmatiquement deux modes principauxdorganisation, lentreprise marchande et lentreprise industrielle (Eymard-Duvernay, 1987).Dans le premier cas, les entreprises tendent ajuster leur production aux fluctuations du march,et les cadences de travail sont alors essentiellement dtermines par la demande extrieure. Dansle second, elles sefforcent au contraire davantage danticipation, tentant de rgulariser et destandardiser leur production. Le rythme de travail est alors fonction de lorganisation et descontraintes de loutil productif (vitesse automatique dune machine), de limposition de normesde production, de lorganisation collective du travail (dpendance au rythme de travail descollgues)

    Dans une organisation industrielle comme dans une organisation marchande, les cadences detravail augmentent si les effectifs diminuent production constante, ou si leffectif reste constantmalgr laccroissement de la production. Dans le cas des organisations industrielles, cetaccroissement des cadences passe par laugmentation des normes de production assignes auxsalaris. Par ailleurs, la suppression de postes hors production ou de postes doux aura pour effetdaccrotre la proportion de salaris exposs aux diffrentes contraintes de rythme.

    Les dterminants de lintensit dutravail

    1

    1

  • Les entreprises sont aujourdhui affectes par des transformations organisationnelles de grandeampleur, qui engendrent une intensification sensible du rythme de travail. Tel est notamment le casde la production allge (lean production), organisation qualifie par Philippe Askenazy (1998)de no-stakhanovisme: dans la production allge en quipes, les agents de production se voientconfier les oprations de maintenance, de contrle qualit et de rectification des dfauts, ce quipermet de supprimer les interruptions de la production lies la maintenance des quipements ouaux rectifications, tout en vitant les retouches en fin de chane.

    Hybridation des logiques industrielles et marchandesCes deux logiques dorganisation constituent cependant des idal-types, qui ne se rencontrentque rarement ltat pur dans les entreprises concrtes: on assiste en effet lhybridationcroissante des modes dorganisation industriel et marchand. Le poids des logiques marchandessest accru dans les organisations industrielles. Lvolution de la relation managers-actionnairesconduit notamment favoriser une gestion sur le court terme et un ajustement accru auxfluctuations du march. Les politiques dexternalisation de pans entiers de lactivit vers la sous-traitance transforme des relations intra-entreprise en relations inter-entreprises. Enfin,lorganisation des diffrents services dune mme entreprise en centres de profit distincts lis parune relation client-fournisseur introduit les rapports marchands au sein mme de lentreprise; ledveloppement des organisations industrielles fondes sur la tension des flux va dans le mmesens. linverse, des secteurs traditionnellement organiss sur le mode marchand se sontindustrialiss, comme la distribution.

    Les contraintes de rythme de travail spcifiques chacun de ces modles (contraintesindustrielles dune part, contraintes marchandes dautre part) se cumulent donc frquemmentdans la ralit. Ce cumul des contraintes, qui apparat comme une caractristique des nouvellesorganisations, sest considrablement dvelopp au cours des quinze dernires annes (Gollac etVolkoff, 1996; Gollac et Volkoff, 2000). Par ailleurs, ce cumul est source de contraintes spcifiques.Comme la fait remarquer Serge Volkoff, la contrainte industrielle engendre une pression forte etpeu flexible, mais plutt stable et prvisible. Loprateur expos cette forme de pressiontemporelle peut la grer essentiellement par des stratgies, individuelles et collectives, dconomie(defforts et/ou de temps). La contrainte marchande est plus flexible mais moins prvisible.Loprateur peut cette fois faire appel des stratgies danticipation et de prparation, en profitantdes temps faibles pour ne pas tre pris au dpourvu quand le temps fort sera venu. Si lesoprateurs ne peuvent dployer ce type de stratgies, ils se retrouvent dans une forme deprcipitation qui induit une dgradation des conditions de travail. Quand contrainte marchande etcontrainte industrielle se cumulent, les stratgies adaptes chaque registre de contrainte peuventtre contraries par la prsence de lautre registre: la contrainte industrielle restreint les tempsfaibles et vacue les temps de prparation; la contrainte marchande multiplie les sollicitationsimpromptues et contrarie les stratgies dconomie stabilises; ne restent plus alors que laprcipitation, et les dgts qui laccompagnent plus ou moins court terme. Si cette hypothse estexacte, le cumul dune contrainte industrielle et dune contrainte marchande va engendrer unedgradation des conditions de travail suprieure celle engendre par la plus grave des deux1.

    2

    Temps et travail: lintensit du travail

    1 Commentaires de Serge Volkoff lors de la prsentation de D. Cartron et M. Gollac du papier Fast-work et mal travail au sminaireIntensification du travail du 1er mars 2001 (http://www.cee-recherche.fr).

  • Le reprage des dterminants organisationnels de lintensitLenqute europenne sur les facteurs qui fixent le rythme de travail permet didentifier cinq desprincipaux dterminants organisationnels de lintensit du travail:

    contraintes automatiques lies la vitesse automatique dune machine ou au dplacement dunproduit2

    contraintes de normes lies lexistence de normes quantitatives de production contraintes hirarchiques lies au contrle direct du chef les contraintes horizontales lies au travail fait par dautres collgues les contraintes de la demande lies aux demandes directes des clients et assimils (usagers,

    passagers, lves, patients, etc.)

    Dans les organisations modernes, lintensit du travail est cependant de moins en moins rductible un effort quantitatif (faire plus de fois la mme chose en un temps donn) et ses aspectsqualitatifs doivent tre pris en compte, quil sagisse de qualit dun produit ( travers la mise enplace de normes de qualit industrielle) ou de qualit dun service (lie au contact plus ou moinsfrquent avec le client ou lusager, qui implique une qualit minimale de rponse ses demandes).On prendra donc en compte:

    Les contraintes de qualit, mesures travers lexistence de normes de qualit3

    Le contact direct avec des clients ou des usagers4

    Parmi les dterminants du rythme de travail, nous dfinissons donc les indicateurs suivants:

    des contraintes de type industriel au sens strict: les contraintes de type automatique; les normesquantitatives en labsence de contrainte automatique (il est rare quil y ait contrainteautomatique sans norme).

    des contraintes de type industriel au sens large: les contraintes relationnelles, lies au travaildes collgues et au contrle des chefs.

    une contrainte industrielle en un sens encore plus large (car elle ne porte pas directement surle rythme): les normes de qualit.

    une contrainte marchande au sens strict: la contrainte lie la demande. une contrainte marchande au sens large: celle qui rsulte de la prsence constante ou presque

    constante (au moins 3/4 du temps) des clients ou usagers.

    Nous dfinissons galement trois indicateurs de double contrainte (industrielle et marchande): ausens strict (contrainte industrielle au sens strict et contrainte marchande au sens strict); au senslarge (contrainte industrielle au sens large et contrainte marchande au sens large); au sens le pluslarge (contrainte industrielle au sens le plus large et contrainte marchande au sens large).

    3

    Les dterminants de lintensit du travail

    2 Q22 : le libell exact des questions de lenqute se trouve dans le glossaire en annexe de cet ouvrage. 3 Q24_1: votre travail implique-t-il le respect de normes de qualit prcises?4 Q12_7: dans quelle mesure votre travail implique dtre en contact direct avec des personnes qui ne sont pas employes sur votre lieu de

    travail, comme par exemple des clients, des passagers, des lves, des patients, etc.? (tout le temps / presque tout le temps / environ les3/4 du temps / environ 1/2 du temps / environ 1/4 du temps / presque jamais / jamais).

  • ces contraintes de rythme de travail sajoutent les contraintes temporelles lies aux interruptionsde la tche en cours pour en effectuer une autre non prvue5. Ces contraintes sont spcifiques etseront traites de faon distincte dans une section suivante intitule Les interruptions de tche,une forme particulire dintensit du travail.

    Lenqute europenne ne permet en revanche pas de rendre compte des contraintesvnementielles (Valeyre, 2001), qui se manifestent dans les situations de traitement durgence desalas, des dysfonctionnements ou des problmes critiques. Elles concernent plus particulirementle travail en processus continu ou semi continu. Les enqutes franaises sur les Conditions deTravail montrent quelles se sont diffuses rapidement au cours de la priode 1984 1998, en lienavec le dveloppement de lautomatisation.

    Diffusion et structuration des diffrentes contraintes de rythme

    Diffrentes analyses montrent que les diverses contraintes industrielles sont fortement corrlesentre elles et constituent un univers cohrent. De mme, les diverses contraintes dordre marchandsont troitement associes les unes aux autres. En revanche, on ne constate pas doppositionmarque entre ces deux univers, qui napparaissent pas mutuellement exclusifs: si les contraintesindustrielles opposent clairement cols bleus et cols blancs, activits industrielles et activitstertiaires, cette opposition tranche ne se retrouve pas pour les contraintes marchandes, mme sielles restent plus rpandues chez les cols blancs et dans les activits tertiaires. Ces lmentsconfirment la pntration des logiques marchandes dans lunivers industriel.

    Les contraintes de rythme selon les professions et les secteurs dactivit Lexamen de la diffusion des cinq principales contraintes de rythme (contraintes automatiques, denormes, hirarchiques, horizontales, de demande) au sein des diffrents groupes professionnels etsecteurs dactivit conomique rvle de profondes disparits.

    Les contraintes de rythme les plus rpandues sont les contraintes de la demande, qui touchent les2/3 des salaris (67%). Viennent ensuite les contraintes horizontales6 (48%), les contrainteshirarchiques (38%), les contraintes de normes (31%) et enfin les contraintes automatiques (21%).(voir Tableau 1).

    Les disparits des contraintes de rythme selon les groupes professionnelsLa diffusion des diffrentes contraintes de rythme de travail varie considrablement selon lesgroupes professionnels (voir Tableau 1). Lanalyse de ces variations met en lumire trois catgoriesde contraintes de rythme:

    les contraintes de type industriel au sens strict (contraintes automatiques et de normes), quiaffectent principalement les diffrentes catgories de cols bleus (avec des disparitsparticulirement marques):

    4

    Temps et travail: lintensit du travail

    5 Q23a: quelle frquence devez-vous interrompre une tche que vous tes en train de faire pour en effectuer une autre non prvue?(plusieurs fois par jour / quelques fois par jour / plusieurs fois par semaine / quelques fois par semaine / jamais)

    6 Pour la dfinition des diffrents types de contraintes, voir prcdemment Le reprage des dterminants organisationnels de lintensit.

  • Les contraintes automatiques simposent plus de la moiti des ouvriers de type industriel,et plus dun tiers des ouvriers de type artisanal et, linverse, moins dun salari sur sixdans les diffrentes catgories de cols blancs (en particulier chez les cadres non dirigeants:4%).

    De mme, les contraintes de normes sont subies par plus de la moiti des ouvriers, etseulement par 16% des employs du commerce et des services. On notera cependant que lescadres dirigeants y sont galement fortement astreints (39%).

    Tableau 1 Contraintes de rythme de travail par groupes professionnels7

    Contraintes de rythme de travail

    automatiques de normes hirarchiques horizontales de demande

    Cadres dirigeants 14% 39% 26% 58% 83%

    Cadres non dirigeants 4% 22% 22% 41% 79%

    Professions intermdiaires 17% 24% 30% 46% 75%

    Employs administratifs 14% 22% 42% 46% 75%

    Employs commerce et services 11% 17% 34% 44% 85%

    Ouvriers agricoles et pcheurs 23% 38% 44% 47% 43%

    Ouvriers de type artisanal 35% 50% 50% 56% 52%

    Ouvriers de type industriel 52% 54% 50% 54% 47%

    Travailleurs non qualifis 29% 30% 42% 42% 43%

    Militaires 8% 25% 54% 63% 53%

    ENSEMBLE 21% 31% 38% 48% 67%

    Sur-reprsentationSous-reprsentation

    Lire ainsi: 14% des cadres dirigeants sont exposs des contraintes de type automatique.

    les contraintes de type industriel au sens large (contraintes hirarchiques et horizontales), pourlesquelles les disparits entre groupes sont moins marques:

    Les contraintes hirarchiques touchent au premier chef les militaires (54%), les ouvriers etdans une moindre mesure les employs. Lencadrement et les professions intermdiaires ysont moins soumis.

    Les contraintes horizontales se rpartissent de faon plus uniforme. Elles atteignent leursplus hauts niveaux de diffusion chez les militaires (63%), les cadres dirigeants (58%) et lesouvriers, et leurs niveaux les plus bas chez les cadres non dirigeants (41%) ou les travailleursnon qualifis (42%).

    les contraintes lies la demande concernent au premier chef les diffrentes catgories de colsblancs, alors que les cols bleus y sont nettement moins soumis:

    Elles simposent principalement aux employs du commerce et des services (85%) et auxcadres dirigeants (83%), la moiti des ouvriers environ, et seulement 43% des travailleursnon qualifis ou des ouvriers agricoles.

    5

    Les dterminants de lintensit du travail

    7 Sauf indication contraire, les tableaux de ce rapport ont pour source les donnes des enqutes europennes sur les conditions de travail.

  • Les disparits des contraintes de rythme de travail selon les secteurs dactivit De mme que pour les professions, les disparits des contraintes de rythme de travail par secteursdactivit conomique savrent trs importantes (voir Tableau 2).

    Tableau 2 Contraintes de rythme de travail par secteurs dactivit conomique

    Contraintes de rythme de travail

    automatiques de normes hirarchiques horizontales de demande

    Agriculture, pche 23% 37% 42% 48% 45%

    Industries extractives 45% 53% 23% 61% 62%

    Industries agro-alimentaires 48% 57% 45% 50% 49%

    Textile, habillement 46% 62% 60% 57% 53%

    Bois, papier, carton 58% 60% 41% 46% 40%

    dition, imprimerie 39% 55% 39% 49% 65%

    Chimie, plastique 47% 59% 52% 53% 39%

    Mtallurgie, mcanique 45% 60% 42% 53% 50%

    lectrique, lectronique 41% 61% 48% 52% 56%

    Fabrication matriels transport 55% 71% 51% 59% 36%

    Industries diverses 25% 42% 43% 48% 55%

    lectricit, gaz, eau 10% 30% 35% 60% 60%

    Btiment 22% 38% 52% 60% 56%

    Commerce 16% 25% 35% 42% 83%

    Htellerie, restauration 17% 21% 40% 60% 86%

    Transports terrestres 28% 29% 42% 43% 71%

    Autres transports 39% 23% 32% 55% 68%

    Postes et tlcommunications 25% 41% 32% 50% 64%

    Activits financires 12% 32% 40% 42% 81%

    Services aux entreprises 13% 25% 36% 50% 69%

    Administration publique 9% 15% 37% 46% 63%

    ducation 4% 14% 22% 29% 81%

    Sant et action sociale 8% 11% 28% 52% 84%

    Services aux particuliers 12% 16% 30% 37% 67%

    Services domestiques 4% 8% 31% 12% 39%

    Ensemble 21% 31% 38% 48% 67%

    Sur-reprsentation

    Sous-reprsentation

    Lire ainsi: 23% des salaris du secteur de lagriculture et de la pche sont exposs des contraintes de rythme de travail detype automatique.

    Ce sont nouveau les contraintes industrielles au sens strict qui prsentent les plus fortesdisparits, consacrant une opposition marque entre activits industrielles, trs exposes, etactivits tertiaires, relativement pargnes:

    Les contraintes automatiques sont particulirement fortes dans les activits industrielles,notamment dans lindustrie du bois, papier et carton (58%) et la fabrication de matriels de

    6

    Temps et travail: lintensit du travail

  • transport (55%), ainsi que dans le secteur du transport, mais touchent beaucoup moins lessalaris des activits tertiaires et atteignent leur minimum dans les services domestiques oulducation (4%).

    Une hirarchisation sectorielle voisine sopre avec les contraintes de normes (niveaux trslevs dans les activits industrielles, trs bas dans les activits tertiaires).

    Les contraintes industrielles au sens large (hirarchiques et horizontales) prsentent des disparitssectorielles sensiblement moins leves que dans le cas des contraintes industrielles au sens strict,avec une opposition moins systmatique entre activits industrielles et tertiaires:

    Les contraintes hirarchiques sont lgrement plus prsentes dans les activits industrielles,notamment dans des secteurs comme le textile (60%) ou la chimie (53%) mais sont galementrelativement marques dans les activits tertiaires (transports terrestres, htellerie, activitsfinancires). Elles sont leur minimum dans la sant et lducation.

    Avec les contraintes horizontales, lopposition entre industrie et tertiaire est galement moinssystmatique. Ainsi, les niveaux les plus levs sont atteints dans des industries commelindustrie extractive (61%), le btiment (60%), la fabrication de matriels de transport (59%) etle textile et habillement (57%), mais aussi dans des activits tertiaires comme lhtellerie etrestauration (60%) ou les transports non terrestres (55%). Les proportions sont au plus bas dansdautres activits tertiaires comme les services domestiques (12%), et, un moindre degr,lducation (29%).

    linverse des contraintes industrielles, les contraintes dues la demande concernent davantageles activits tertiaires que les activits industrielles:

    Elles simposent plus de 80% des salaris dans des secteurs comme lhtellerie et restauration(86%), le commerce, la sant-action sociale et lducation. A loppos, elles concernent moinsde 40% des salaris dans la fabrication de matriels de transport (36%) ou la chimie (39%).

    Cependant, elles restent trs prsentes dans certaines activits industrielles comme ldition-imprimerie (65%) ou les industries extractives (62%).

    Contraintes industrielles et contraintes marchandes: des univers spcifiques sans tremutuellement exclusifsUne analyse des corrlations (Tableau 3) entre les diffrents types de contraintes qui psent sur lerythme de travail confirme la pertinence du classement des contraintes entre industrielles etmarchandes: les diverses contraintes industrielles (au sens strict et au sens large) sont associespositivement entre elles, de mme que les diverses contraintes marchandes.

    En revanche, le lien entre contraintes industrielles et contraintes marchandes apparat trs faible(statistiquement non significatif), ce qui peut sexpliquer par la coexistence dorganisationspurement marchandes, dorganisations purement industrielles et dorganisations hybrides. Deplus, lopposition entre contraintes industrielles et contraintes marchandes a tendance sattnuerdans le temps (voir Tableau 16 Chapitre 7). Les deux logiques ne sexcluent pas mutuellement etlhybridation des modes dorganisation industriels et marchands peut provoquer un cumul descontraintes associes chacun.

    7

    Les dterminants de lintensit du travail

  • Tableau 3 Lien entre les diffrents dterminants de lintensit du travail

    Contrainte Contrainte Contrainte Contrainte Normes Contraintes Clients

    auto- de normes horizon- hirarchi- de qualit de la prsents au

    matique tale que demande moins 3/4

    du temps

    Contrainte automatique + 0,39 + 0,19 + 0,20 + 0,21 0,13 0,15

    Contrainte de normes + 0,39 + 0,18 + 0,20 + 0,25 0,04 0,12

    Contrainte horizontale + 0,19 + 0,18 + 0,20 + 0,16 + 0,08 0,04

    Contrainte hirarchique + 0,20 + 0,20 + 0,20 + 0,12 0,02 0,08

    Normes de qualit + 0,21 + 0,25 + 0,16 + 0,12 0 0,05

    Contraintes de la demande 0,13 0,04 + 0,08 0,02 0 + 0,33

    Clients prsents au moins 3/4 du temps 0,15 0,12 0,04 0,08 0,05 + 0,33

    Lire ainsi: Le lien mesur par le coefficient j est de 0,39 entre les contraintes automatiques et les normes quantitatives8. Lecoefficient est dautant plus lev que le lien entre les variables est statistiquement fort. Son signe indique le sensde ce lien. Par exemple, lobligation de respecter des normes quantitatives est plus frquente chez les salarissoumis des contraintes automatiques que chez ceux qui ny sont pas soumis. Il est au contraire moins frquentchez ceux dont le rythme de travail est soumis la demande des clients.

    Les diffrentes dimensions selon lesquelles se dploient les diverses contraintes temporelles derythme de travail et dinterruption de tche peuvent tre mises en vidence de faon synthtique laide dune analyse des correspondances multiples effectue sur la population des salaris9

    (voir Graphique 1).

    Comme le montre le premier plan factoriel de lanalyse, le premier axe est trs largement structurpar les contraintes industrielles, automatiques ou de normes, et dans une moindre mesure, par lescontraintes relationnelles, hirarchiques ou horizontales. Le second axe est principalementstructur par les contraintes de la demande et par les contraintes dinterruptions frquentes dutravail. Lanalyse factorielle confirme donc la structuration des contraintes de rythme autour dedeux ples principaux: les contraintes industrielles et les contraintes marchandes. tre soumis un de ces deux types de contraintes nimplique ni nexclut cependant dtre expos lautre:lanalyse factorielle confirme donc galement les tendances lhybridation des deux logiquesexposes prcdemment.

    La projection de variables combinant des contraintes de rythme de travail comme variablessupplmentaires dans le premier plan factoriel permet daffiner lanalyse. En effet, elle faitapparatre deux types de contraintes particulirement discriminantes. Il sagit dune part des

    8

    Temps et travail: lintensit du travail

    8 La formule qui dfinit ce coefficient est :

    = pxy pxpy

    o Px est la proportion dindividu pour lequel litem x est vrifi et o qx = 1 pxpxqxpyqy

    9 Lanalyse des correspondances multiples est effectue sur six variables de contraintes temporelles: les cinq contraintes de rythme de travail(automatiques, de normes, hirarchiques, horizontales et de demande) et la contrainte dinterruptions frquentes du travail. Les deuxpremiers axes de lanalyse contribuent 49% de la variance totale (28,4% pour le premier et 20,6% pour le second). Par ailleurs, desvariables supplmentaires sont introduites dans lanalyse. Il sagit de combinaisons de contraintes temporelles de travail, destines affiner la dtermination des composantes les plus discriminantes: trois variables de contraintes temporelles composes sont introduitescomme variables supplmentaires dans lanalyse en correspondances multiples des contraintes de rythme de travail: une variable decontraintes industrielles (automatiques et de normes/automatiques et sans normes/ de normes et non automatiques/non automatiques etsans normes); une variable de contraintes relationnelles (hirarchiques et horizontales/ hirarchiques et non horizontales/horizontales etnon hirarchiques/ ni horizontales, ni hirarchiques) et une variable de contraintes de demande (dues des interruptions frquentes lies des demandes extrieures/ autres contraintes de rythme imposes par la demande /autres).

  • contraintes industrielles cumules, la fois automatiques et de normes (selon le premier axe) etdautre part des contraintes dinterruption frquentes du travail par la demande (selon le secondaxe).

    Graphique 1 Analyse des correspondances multiples des contraintes de rythme detravail (premier plan factoriel)

    Lgende: Les variables actives apparaissent sur le graphique: les modalits positives (prsence de la contrainte mesure) engras et les modalits ngatives (absence de la contrainte) en italique. Les variables supplmentaires sont soulignes.

    9

    Les dterminants de lintensit du travail

    pas automatiques et pasnormes

    pas automatiques etnormes

    automatiques et pasnormes

    automatiques et normes

    pas hirarchique et pashorizontale

    pas hirarchique ethorizontale

    hirarchique et pashorizontale

    hirarchique ethorizontale

    aucune contrainte dedemande

    autres contraintes dedemande

    interruptions par demande

    pas interruptionsinterruptions

    pas normes

    normes

    pas horizontale

    horizontale

    pas hirarchique

    hirarchique

    pas demande directe

    demande directe

    pas automatiques

    automatiques

    -1.00

    -0.50

    0.00

    0

    1.00

    1.50

    2.00

    -1.50 -1.00 -0.50 0 0.50 1.00 1.50

    Axe 1

    Axe

    2

  • Les deux types de contraintes les plus discriminantes (contraintes industrielles cumules,associant les contraintes automatiques et les contraintes de normes, et contraintes pressantes dela demande, correspondant des interruptions frquentes du travail dues la demande extrieure)peuvent servir de base ltablissement de typologies des professions et des secteurs dactivit.

    Comme le montre le Graphique 2, la typologie des groupes professionnels selon ces deux axes meten vidence deux classes contraintes fortes et contrastes: dune part les ouvriers de typeindustriel et dans une moindre mesure les ouvriers des mtiers de type artisanal, soumis descontraintes industrielles leves, associant contraintes automatiques et contraintes de normes deproduction, et dautre part les cadres dirigeants, astreints de fortes contraintes de la demandecorrespondant notamment des interruptions frquentes et imprvues dues la demandeextrieure. Aucun groupe professionnel ne subit en revanche simultanment des contraintesindustrielles cumules et des contraintes pressantes de la demande.

    Graphique 2 Contraintes de rythme de travail par professions

    10

    Temps et travail: lintensit du travail

    Cadresdirigeants

    Cadresnon dirigeants

    Professionsintermdiaires

    Employsadministratifs

    Employscommerce service

    Ouvriersagricoles

    Ouvriers des mtiersde type artisanal

    Ouvriers de type industrieITravailleurs

    non qualifis

    Militaires

    0

    0.1

    0.2

    0.3

    0.4

    0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5

    Contraintes industrielles cumules

    Interruptions frquentes dues la demande

  • La typologie des secteurs dactivit conomique (Graphique 3), construite selon le mme principe,montre que les contraintes industrielles opposent de faon trs marque les activits industrielleshors nergie et btiment et les activits tertiaires hors communications. En revanche, cetteopposition tranche ne se retrouve pas pour les contraintes de la demande, mme si elles sontglobalement plus leves dans le tertiaire que dans lindustrie: ceci confirme nouveau lapntration des logiques marchandes dans le secteur industriel.

    Les situations les plus contrastes opposent dune part des industries comme la fabrication dematriels de transport, le bois, papier et carton, le textile, habillement et cuir ou la chimie,caractrises par des contraintes industrielles leves et des contraintes de la demande trs faibles,et dautre part des services comme les institutions financires ou la sant et laction sociale,caractriss linverse par des contraintes industrielles trs basses et des contraintes de lademande importantes.

    Graphique 3 Contraintes de rythme par secteurs dactivit conomique

    11

    Les dterminants de lintensit du travail

    Services domestiques

    Services aux particuliers

    Sant, action sociale

    ducation

    Administration publique

    Services aux entreprises

    Activits financires

    Autres transports

    Transports terrestres

    Htellerie, restauration

    Commerce

    Btimentlectricit, gaz, eau

    Industries diverses

    Mtallurgie, mcanique

    Chimie, plastique

    dition imprimerie

    Bois, papier, carton

    Agro-alimentaire

    Industries extractives

    0

    0.1

    0.2

    0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5

    Contraintes industrielles cumules

    Fabrication matrieltransport

    Fabrication lectriqueet lectronique

    Interruptions frquentes par la demande

    Postes et tlcommunications

    Agriculture, pche

    Textile, cuir

  • Les interruptions de tche, une forme particulire dintensit du travail

    Les interruptions de tche en cours dues la ncessit dentamer une autre tche non prvue sontplus frquentes et plus rpandues dans les organisations marchandes, mais lorganisationindustrielle-bureaucratique et les contraintes qui en dcoulent ne les font nullement disparatre,alors mme que lorganisation industrielle est fonde sur la prvision et la recherche du contrledes situations de travail.

    Une analyse conomtrique confirme que les contraintes marchandes augmentent le risque que lesalari soit expos des interruptions quotidiennes de sa tche, mais que les contraintesindustrielles ne diminuent pas ce risque. Par ailleurs, le cumul de contraintes na gure deffetspcifique. Autrement dit, lapparition dlments marchands dans une organisation industrielleaccrot le risque dinterruptions autant que si on se trouvait dans une organisation pleinementmarchande et lapparition dlments industriels rgularisant une organisation marchande nediminue pas ce risque.

    Interrogs sur les causes de ces interruptions, les salaris tendent les imputer la nature mmede leur activit. Pour le reste, leurs dclarations confortent les rsultats de lconomtrie: lesinterruptions apparaissent donc lies en priorit aux demandes des clients, des collgues ou deschefs.

    Mme si ces interruptions sont souvent perues comme naturelles, elles sont la plupart du tempsvcues comme perturbantes, ou au mieux sans effet. Le caractre perturbant des interruptions estparticulirement ressenti par les ouvriers de type industriel.

    Devoir sinterrompre dans son travail pour effectuer une nouvelle tche non prvue10 est quelquechose qui arrive, au moins occasionnellement, la trs grande majorit des salaris. Lepourcentage de ceux qui sont labri est mme infrieur celui des salaris qui cela arriveplusieurs fois par jour (29%). La moiti des salaris connaissent de telles interruptionsplusieurs ou quelques fois par jour et plus de 20% plusieurs ou quelques fois par semaine.

    Cette problmatique apparat comme intermdiaire entre dterminants organisationnels delintensit du travail et conditions de travail vcues. Elle ne relve pas compltement desdterminants organisationnels dans la mesure o les interruptions peuvent avoir des causesdiverses, ni des conditions de travail au sens strict car les interruptions peuvent tre diversementvcues.

    Nous allons tudier dans un premier temps le lien entre les diffrents dterminants du rythme detravail et les interruptions dans le travail. Puis nous verrons comment les salaris expliquentlorigine de ces interruptions, et enfin comment ils en jugent limpact sur leur travail.

    12

    Temps et travail: lintensit du travail

    10 Q23a: quelle frquence devez-vous interrompre une tche que vous tes en train de faire pour en effectuer une autre non prvue?(Plusieurs fois par jour / quelques fois par jour / plusieurs fois par semaine / quelques fois par semaine /jamais)

  • Les dterminants organisationnels travers des tris croiss simples, on constate que les interruptions quotidiennes (plusieurs ouquelques fois par jour) sont lies positivement presque toutes les contraintes mais surtout auxcontraintes marchandes: 54% des salaris dont le rythme de travail dpend de la demandedclarent tre exposs de telles interruptions contre seulement 35% des autres (En ce quiconcerne la prsence des clients au moins les trois quarts du temps, lcart est de 54% contre 45%).

    Les carts sont plus minimes en ce qui concerne les contraintes industrielles au sens strict: 48%contre 47% pour les normes quantitatives. Le lien est mme invers pour les contraintes de typeautomatique: 45% contre 48%. Si on tend la notion de contrainte industrielle, on ne trouve un lienfort que pour la dpendance aux collgues (53% contre 43%), mais lcart est plus tnu si onconsidre le contrle par les chefs (51% 46%) ou les normes de qualit (49% contre 44%).

    Les interruptions de tche frquentes sont donc plus rpandues dans les organisations marchandesmais lorganisation industrielle-bureaucratique ne les fait nullement disparatre. En fait le cumulde contraintes industrielles et marchandes (au sens le plus large) saccompagne dunaccroissement considrable de la frquence des interruptions quotidiennes: 54% contre 37%.

    Toutefois, en raison des liaisons statistiques entre les diverses contraintes de rythme, il convientdessayer disoler leffet de chacune. Pour ce faire, on a procd une rgression logistique11, dontles rsultats figurent dans le Tableau 4.

    Tableau 4 Effet des dterminants du rythme de travail sur le risque dinterruptionsquotidiennes: rsultats dune rgression logistique.

    Contrainte Effet

    Contrainte automatique -0,06(0,04)

    Normes quantitatives (sans contrainte automatique) +0,02(0,04)

    Dpendance aux collgues + 0,32(0,03)

    Contrle par le chef + 0,21(0,03)

    Normes de qualit + 0,17(0,04)

    Demande des clients + 0,54(0,05)

    Clients prsents au moins 3/4 du temps + 0,45(0,04)

    Clients prsents 1/4 1/2 du temps + 0,64(0,05)

    Cumul contrainte industrielle + contrainte marchande (sens large) +0,00(0,05)

    Lire ainsi: Leffet de la soumission des contraintes automatiques est estim par un coefficient qui sinterprte en termesdcart la population de rfrence: les salaris non soumis des contraintes automatiques. Lcart type delestimation du coefficient est indiqu entre parenthses. Les effets significatifs au seuil de 5% sont en gras.

    13

    Les dterminants de lintensit du travail

    11 En raison de lextrme htrognit des taux de sondage, notamment en fonction de ltat-membre, nous avons utilis des rgressionspondres, leffectif global demeurant celui de lchantillon, ce qui permet des tests approchs.

  • Les contraintes marchandes augmentent nettement, toutes choses gales par ailleurs, le risque quele salari soit expos des interruptions quotidiennes de sa tche, ce qui semble logique dans lamesure o lorganisation marchande est fonde sur ladaptation constante aux fluctuations de lademande.

    Cependant il est remarquable qu lexception peut-tre des contraintes automatiques (pourlesquelles le rsultat nest pas statistiquement significatif), les contraintes industrielles nediminuent pas le risque dinterruptions, alors que lorganisation industrielle est fonde sur laprvision et la recherche du contrle des situations de travail. Bien au contraire, plusieurscontraintes dordre industriel accroissent le risque dinterruptions: cest le cas de la dpendanceaux collgues et de la dpendance aux chefs et, un moindre degr, des normes de qualit. Ladpendance au travail des collgues est particulirement frquente dans les organisations fondessur la tension des flux, qui importent dans des systmes industriels des lments dorganisationmarchande. Cette dpendance au travail des collgues est quoi quil en soit le signe dun modedorganisation industrielle plus souple que dans le cas des normes ou des contraintesautomatiques.

    Enfin le cumul de contraintes na gure deffet spcifique. Autrement dit, lapparition dlmentsmarchands dans une organisation industrielle accrot le risque dinterruptions autant que si on setrouvait dans une organisation pleinement marchande et lapparition dlments industrielsrgularisant une organisation marchande ne diminue pas ce risque.

    Les causes dclares par les salarisLenqute europenne explore les causes des interruptions telles quelles sont expliques par lessalaris12. Pas moins de 45% des salaris considrent que la nature de leur travail les expose devoir sinterrompre pour faire face une tche non prvue. Pourcentage considrable, surtout silon remarque que 70% environ des salaris sont confronts de telles interruptions. En fait lanature du travail serait en cause dans 75% des cas o les interruptions surviennent plusieurs foispar jour et dans 62% des cas o elles surviennent quelques fois par jour, le pourcentage tantencore suprieur 50% quand elles sont plus rares. Pourtant les rgressions logistiques exposesci-dessus montrent que les interruptions ont des causes assez prcises. Plutt que de les attribuer des caractres vraiment spcifiques du travail, on peut donc conclure que les salaris sontenclins, pour peu quon les y pousse comme le faisait le questionnaire, trouver naturelles lesinterruptions de tche auxquelles ils sont exposs.

    Nanmoins, les salaris sont galement capables de rapporter les interruptions des causesprcisment identifies, et leurs dclarations tendent plutt conforter les rsultats delconomtrie. Les causes les plus souvent mentionnes sont les demandes des collgues et dessuprieurs (30% des salaris et 45% chez ceux qui sont exposs des interruptions quotidiennes)et, quasiment galit, les demandes des clients (29%; 44%). Les autres causes sont nettement

    14

    Temps et travail: lintensit du travail

    12 Q23b: ces interruptions sont-elles surtout dues (la nature de votre travail / la mauvaise organisation du travail/des demandes descollgues ou des suprieurs / des demandes externes (clients, etc. ) / un mauvais fonctionnement de machines ou dquipements / unemauvaise conception du lieu ou de votre poste de travail / autre (spontan)? Cette question nest pas aisment utilisable: on admet commecause des interruptions la nature du travail. Mme si la rponse oui est fort rpandue, cette nature reste bienmystrieuse. Manifestement, dans bien des cas, elle recouvre les autres items. Car que reste-t-il de la nature dun travail abstraction faitede lorganisation, des collgues, des suprieurs, des clients, des quipements et du lieu de travail? En fait les salaris estiment sans doutesouvent que de telles interruptions sont normales dans leur profession, mais on ne peut que le prsumer.

  • moins mentionnes: dans lordre dcroissant la mauvaise organisation (8%; 11%), lemploi deladjectif fortement connot mauvais rendant toutefois le rsultat peu probant, le mauvaisfonctionnement des machines et des quipements (7%; 9%) o la mme remarque vaut en partie,la mauvaise conception du lieu ou poste de travail (3%; 4%) et les autres causes (3%; 3%). En outreles demandes des clients, des chefs et des collgues sont associes des interruptions frquentes(de mme que la mauvaise conception des lieux de travail), alors que les dysfonctionnements delorganisation et surtout des quipements nentranent des interruptions que plus rarement.

    La frquence et les causes dinterruptions sont trs variables selon la situation professionnelle (voirTableau 5): le risque dinterruptions quotidiennes est ainsi de 75% pour les cadres dirigeants vs28% pour les ouvriers industriels.

    Tableau 5 Pourcentage de salaris exposs des interruptions

    Pourcentage de salaris exposs des interruptions

    de toute quoti- dues dues la dues aux dues dues aux dues

    nature diennes la nature mauvaise collgues, aux machines au lieu

    du travail organisation aux chefs clients de travail

    Cadres dirigeants 90% 75% 66% 9% 46% 46% 6% 4%

    Cadres non dirigeants 73% 48% 55% 7% 32% 31% 4% 2%

    Professions intermdiaires 78% 57% 50% 9% 37% 38% 6% 3%

    Employs administratifs 75% 57% 48% 7% 39% 41% 5% 2%

    Employs commerciaux 67% 53% 46% 4% 22% 31% 2% 1%

    Ouvriers agricoles 57% 29% 38% 6% 20% 19% 13% 3%

    Ouvriers artisanaux 71% 39% 40% 12% 30% 22% 13% 4%

    Ouvriers industriels 52% 28% 29% 10% 18% 11% 16% 4%

    Travailleurs non qualifis 54% 31% 32% 6% 21% 14% 8% 2%

    Militaires 57% 45% 46% 9% 38% 11% 15% 4%

    Ensemble 70% 48% 45% 8% 30% 29% 7% 3%

    Sur-reprsentation

    Sous-reprsentation

    Lire ainsi: 90% des cadres dirigeants subissent des interruptions de toute nature.

    Comme on pouvait sy attendre, ce sont les ouvriers qui dclarent le plus dinterruptions dues auxproblmes des machines. Ils sont galement les plus nombreux se plaindre des consquences dela mauvaise organisation du travail et de la mauvaise conception du lieu de travail, mais, choseplus surprenante, ils sont en ces domaines suivis par les cadres dirigeants. Ces derniers invoquentaussi trs souvent les demandes des clients, des collgues et des chefs, ainsi que la nature de leurtravail, toutes causes dinterruption rarement mentionnes par les ouvriers, surtout industriels.

    Les hommes invoquent plus souvent que les femmes les dysfonctionnements des machines: mmesi les femmes utilisent largement les machines informatiques, les machines mcaniques oulectromcaniques sont sans doute plus utilises par les hommes. De faon surprenante, il en vade mme pour les dysfonctionnements organisationnels: rien ne permet de penser que les femmestravailleraient dans des organisations meilleures. Les rponses rsultent probablement la fois desproblmes rencontrs et des exigences des diffrentes catgories sociales et de genre.

    15

    Les dterminants de lintensit du travail

  • Comment sont vcues les interruptions?Mme si les interruptions sont souvent perues comme naturelles, la majorit des salaris jugeces interruptions perturbantes ou au mieux sans consquence13. Nous nous intresserons dans ceparagraphe aux salaris exposs des interruptions quotidiennes. Parmi ceux-ci, 37% estimentque ces interruptions perturbent leur travail, et seulement 11% quelles sont positives (soit un soldede -26 = 11 - 37). 44% jugent quelles sont sans consquence et 7% ne se prononcent pas.

    Ce sont les interruptions dues la mauvaise conception des lieux de travail, la mauvaiseorganisation et au mauvais fonctionnement des machines qui sont juges les plus perturbantesavec des soldes de -65, -61 et -47 respectivement. Le sens de la causalit est toutefois loin dtrevident, car les lieux de travail, les organisations et les quipements ont dautant plus de chancesdtre jugs mauvais que leurs consquences pour le salari sont dommageables. Lesinterruptions dues aux collgues ou aux chefs ont un solde de -30, celles dues aux clients de -25seulement: la rfrence au client justifie beaucoup de contraintes (Cartron, 2000). Lanature du travail nest finalement pas tellement mieux tolre que les clients (solde de -21).

    Les jugements des hommes et ceux des femmes sont trs semblables. En revanche, on constatedimportantes diffrences entre catgories sociales (Tableau 6). Les ouvriers industriels et, unmoindre degr, les professions intermdiaires et les ouvriers artisanaux se signalent par un soldefortement ngatif. Ce solde nest au contraire que modrment ngatif pour les employs decommerce et les ouvriers agricoles, mais beaucoup dentre eux jugent en fait les interruptions sanseffet. Les cadres dirigeants ont aussi une certaine tolrance (toute relative) aux interruptions, touten ayant en gnral leur gard un jugement tranch.

    Tableau 6 Perception des interruptions par les salaris y tant quotidiennement exposs

    Pourcentage de salaris exposs des interruptions

    quotidiennes jugeant celles-ci

    perturbantes sans effet positives SOLDE

    Cadres dirigeants 40% 27% 20% 20%

    Cadres non dirigeants 43% 32% 15% 28%

    Professions intermdiaires 43% 43% 10% 33%

    Employs administratifs 35% 47% 10% 25%

    Employs commerciaux 26% 54% 14% 12%

    Ouvriers agricoles 24% 57% 8% 16%

    Ouvriers artisanaux 38% 46% 9% 29%

    Ouvriers industriels 46% 38% 7% 39%

    Travailleurs non qualifis 34% 54% 7% 27%

    Militaires 31% 55% 6% 25%

    Ensemble 37% 44% 11% 26%

    Lire ainsi: 40% des cadres dirigeants subissant des interruptions quotidiennes les jugent perturbantes.(Solde = % positives % ngatives)

    16

    Temps et travail: lintensit du travail

    13 Question Q23c: pour votre travail, ces interruptions sont-elles perturbantes, sans consquence ou positives?

  • Lintensit du travail que les salaris dclarent ressentir peut tre apprcie travers lexposition des cadences de travail leves, des dlais serrs ou un manque de temps pour terminer le travail.Cette intensit varie largement en fonction des caractristiques des tablissements (secteurdactivit, statut, taille) et des salaris (profession, statut demploi, genre, ge).

    Certaines catgories de salaris se trouvent ainsi particulirement exposes de fortes intensitsde travail. Cest le cas des groupes ouvriers, qui subissent frquemment des cadences leves etdes dlais serrs, mais aussi des cadres dirigeants, confronts des dlais serrs et un manquede temps dans le travail. Lintensit du travail varie par ailleurs considrablement dun secteurconomique lautre, avec cependant une plus grande exposition aux cadences leves et auxdlais serrs dans les activits industrielles. On constate en outre un accroissement de lintensitdu travail avec la taille des tablissements, tout au moins jusqu un seuil de 100 salaris, au delduquel le niveau de lintensit se stabilise. Enfin, lintensit du travail tend dcrotre avec lge:les salaris vieillissants (au del de 45 ans) sont moins frquemment affects par des cadencesleves ou des dlais serrs. Enfin, statut professionnel quivalent, les femmes sont davantageconfrontes que les hommes des cadences intenses et des dlais serrs.

    Lappartenance conjointe des catgories fortement exposes renforce trs nettement le risquedastreinte une forte intensit du travail. Les jeunes ouvrires des industries de production ensrie constituent ainsi une catgorie de main-duvre particulirement expose aux cadencesleves ou aux dlais serrs.

    Indicateurs utiliss

    Lenqute europenne permet de mesurer lintensit du travail ressentie par les travailleurs travers trois dimensions: lexposition des cadences de travail leves, lexposition des dlaistrs stricts et trs courts et le manque de temps pour terminer le travail14.

    Plusieurs indicateurs de travail intense sont construits partir de la frquence de cadences detravail leves et de la frquence de dlais serrs: indicateurs de travail continment intense (toutle temps) ou quasi continment intense (tout le temps ou presque tout le temps) et indicateurs detravail intense en priodes de pointe (la moiti ou les trois quarts du temps). Par ailleurs, ces deuxquestions permettent de dfinir deux indicateurs synthtiques de frquence temporelle moyennede travail intense, qui estiment la part moyenne du temps de travail effectu en cadences levesou en dlais serrs15.

    Aucune question ne peut avoir le statut de mesure parfaitement objective, indpendante du salariinterrog. Par exemple, soumis un contrle hirarchique ne se traduisant pas par des sanctionseffectives, un salari A peut considrer que son rythme de travail dpend du contrle de son chef(puisquun tel contrle existe) tandis que son collgue B estimera le contraire (puisque leffet du

    Lintensit ressentie par les salaris 2

    17

    14 Q21b_1: votre travail ncessite-t-il des cadences de travail leves? (tout le temps, presque tout le temps, environ les trois quarts dutemps, environ la moiti du temps, environ le quart du temps, presque jamais, jamais, ne sait pas)Q21b_2: votre travail ncessite-t-il de travailler selon des dlais trs stricts et trs courts? (idem)Q26_5 vous avez assez de temps pour terminer votre travail (oui / non).

    15 Ces indicateurs synthtiques de frquence temporelle sont construits en affectant chaque modalit de rponse un coefficient numriquede frquence temporelle selon le barme suivant: tout le temps = 1, presque tout le temps = 9/10, environ les trois quarts du temps= 3/4, environ la moiti du temps = 1/2, environ le quart du temps = 1/4, presque jamais = 1/10, jamais = 0, ne sait pas = 1/2..

  • contrle est insignifiant). Toutefois il est probable que ces rponses seront lies au fait que Asefforce effectivement de satisfaire les demandes de son chef tandis que B sen dispense. De sorteque leurs rponses, diffrentes, traduisent des situations objectives diffrentes. En matire dedterminants des rythmes de travail, les difficults dinterprtation lies lexistence de processusdobjectivation ou de dni des conditions de travail (Gollac, 1997; Gollac et Volkoff, 2000) sontlimites. Croire quon doit travailler en fonction de la demande, cest tre soumis aux variations decelle-ci. Sestimer affranchi des normes, cest ltre vraiment. Les chiffres ont donc une certainevaleur probante16.

    Au contraire les rponses aux questions sur les cadences leves et les dlais stricts etcourts dpendent clairement de ce que les salaris jugent tre des cadences leves ou desdlais stricts et courts. Ce sont des mesures de confort ou de souffrance psychologique (commetelles, leur caractre subjectif nest pas ncessairement un dfaut).

    Enfin, la question avez-vous assez de temps pour terminer votre travail? est relativementobjective, mme si la rponse dpend en partie de lhabilet du salari interrog: cette habilet estun dterminant dune condition de travail qui nen est pas moins relle. Nous avons cependantprfr ne pas lassimiler aux dterminants objectifs du rythme de travail, mais plutt auxconditions de travail vcues par les salaris en raison de ces contraintes. En effet on ne sait pas,au vu de la seule rponse cette question, pour quelles raisons le salari parvient ou non terminer son travail: de sorte quon obtient une information sur un niveau dintensit du travail,mais pas sur ses causes ou ses modalits. Subsidiairement, nous pensons que les termes assezde temps et terminer votre travail sont flous. Terminer son travail peut ainsi avoir un sensdiffrent selon quon prend ou non en compte des exigences de qualit. De mme assez detemps peut inclure ou non du temps extra-professionnel.

    Au final lintensit du travail est donc saisie travers neuf indicateurs:

    la frquence temporelle moyenne de cadences de travail leves et les proportions detravailleurs ayant des cadences leves continment, quasi continment ou en priode depointe

    la frquence temporelle moyenne de travail en dlais serrs et les proportions de travailleursayant des dlais serrs continment, quasi continment ou en priode de pointe

    la proportion de travailleurs manquant de temps dans le travail

    Ces indicateurs dintensit du travail sont tudis en fonction dun certain nombre decaractristiques structurelles comme les groupes professionnels, les caractristiquesdmographiques des travailleurs (genre et ge), leurs statuts demploi (CDI, CDD, Intrim) oules secteurs dactivit conomique, le statut juridique des tablissements (administrations,

    18

    Temps et travail: lintensit du travail

    16 On a aussi quelques raisons de penser que ces questions sont moins sensibles dventuels artefacts affectant la comparabilit desenqutes. Cependant, linterprtation de rsultats conomtriques sur des donnes franaises sur le travail informatis incite penser quedans les enqutes conditions de travail, certaines contraintes de rythmes ne pesant pas sur la pnibilit du travail ne sont pas dclares(par des cadres par exemple), alors quelles le seraient quand lenqute porte sur lorganisation (Gollac, 1998). Par ailleurs on peut mettre en vidence des corrlations trs troites entre lvolution des contraintes de rythme, au niveau des brancheset celle de grandeurs conomiques mesures de faon tout fait indpendante, comme la productivit du travail (Valeyre, 2001): cettecorrlation naurait aucune chance de se produire si les rponses sur les dterminants du rythme de travail taient affectes par desfluctuations dopinion sans lien avec les volutions conomiques et organisationnelles effectives.

  • entreprises publiques, entreprises prives) et leur taille. Le dtail des rsultats sur chacun de cesindicateurs se trouve dans les Tableaux 18 24 Annexe I.

    Lintensit du travail chez diffrentes catgories de salaris

    En 2000, dans lensemble des pays de lUnion europenne, 25% des salaris dclarent tre soumis des cadences de travail quasi continment leves, et 30% des dlais quasi continment serrs.Enfin, ils sont 22% dclarer manquer de temps dans leur travail. Ainsi, plus du cinquime dessalaris sont exposs des intensits fortes de travail, que ce soit par les cadences, les dlais oule manque de temps dans le travail.

    Lanalyse de lintensit du travail en fonction de diverses variables structurelles est mene en sefocalisant plus particulirement sur la dtermination des catgories de travailleurs les plusexposes. On formule en effet lhypothse quune forte intensit du travail a des rpercussionsngatives sur les conditions de travail vcues par les travailleurs qui la subissent.

    Lintensit du travail selon les groupes professionnelsDeux groupes professionnels sont plus particulirement exposs un travail intense: dune part lesouvriers de type industriel ou artisanal, qui dclarent la fois des cadences leves et des dlaisserrs et dautre part les cadres dirigeants, soumis des dlais serrs et un manque de tempsdans le travail.

    Graphique 4 Lintensit du travail par groupes professionnels

    Lire ainsi: chez les cadres dirigeants, lexposition temporelle moyenne aux cadences leves est de 36%, et de 58% pour lesdlais serrs. Par ailleurs, 31% dentre eux dclarent manquer de temps dans le travail.

    Globalement, la frquence temporelle moyenne de travail en cadences leves est la plus forte chezles ouvriers de type industriel (49%) ou les ouvriers de type artisanal (46%), et dans une moindremesure chez les travailleurs non qualifis, les ouvriers de lagriculture et de la pche et lesprofessions intermdiaires. A contrario, les frquences temporelles moyennes les moinsimportantes sobservent chez les cadres non dirigeants. Cette vision globale masque cependant delgres disparits entre groupes: ainsi, les catgories les plus soumises des cadences de travailquasi continment leves sont les ouvriers de type industriel ou artisanal et les travailleurs non

    19

    Lintensit ressentie par les salaris

    9%

    20%

    21%

    21%

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    16%

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    27%

    26%

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    0% 10% 20% 30% 40%

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    52%

    53%

    36%

    35%

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    58%

    45%

    0% 20% 40% 60% 80%

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    49%

    46%

    42%

    38%

    37%

    40%

    33%

    36%

    40%

    0% 20% 40% 60%

  • qualifis, alors que les plus exposs en priode de pointe sont les ouvriers de lartisanat, delagriculture et de la pche ou les professions intermdiaires.

    Les rsultats sont nettement diffrents lorsque lon examine lexposition des dlais serrs:lindicateur synthtique de frquence temporelle moyenne de travail en dlais serrs dsigne lescadres dirigeants comme la catgorie la plus expose (58%), suivie par les ouvriers des mtiers detype artisanal (53%) et les ouvriers de type industriel (52%). Ces trois groupes sont galement ceuxqui sont le plus soumis des dlais quasi continuellement serrs. En revanche, les catgories lesplus soumises aux dlais serrs en priode de pointe sont diffrentes. Ce sont les mmes que cellesqui ont t rpertories dans le cas des cadences leves: ouvriers des mtiers de type artisanal, delagriculture et de la pche et professions intermdiaires.

    Lindicateur de manque de temps dans le travail introduit une hirarchisation galement diffrentedes prcdentes. Ce manque de temps sobserve en effet davantage dans les groupesprofessionnels placs en haut de lchelle sociale, principalement chez les cadres dirigeants (31%),mais aussi chez les cadres non dirigeants (26%) ou dans les professions intermdiaires (27%). Lesgroupes ouvriers y sont un peu moins exposs et les militaires sont les moins touchs.

    Les hirarchisations professionnelles dintensit du travail divergent donc nettement selon quonse rfre aux cadences leves ou aux dlais serrs (voir Graphique 5). Par ailleurs, leshirarchisations opres par les indicateurs de manque de temps et de dlais serrs prsentent desanalogies, mais divergent profondment en ce qui concerne les catgories ouvrires.

    Lintensit du travail selon les types demploi Dans lensemble, les travailleurs intrimaires dclarent plus frquemment des cadences de travailleves et un manque de temps pour terminer le travail, alors que les dlais serrs concernentdavantage les salaris en CDI.

    Comme pour les positions socioprofessionnelles, les statuts demploi salari ont une influencecontraste sur lintensit du travail et rvlent les multiples facettes que revt lintensit du travail(voir Tableau 19 Annexe I). Les intrimaires semblent en effet plus frquemment exposs descadences de travail leves et un manque de temps dans le travail: 30% dentre eux subissentdes cadences quasi continment leves, vs 25% chez les autres salaris (en CDI ou en CDD). Parailleurs, 26% dentre eux dclarent manquer de temps pour terminer leur travail, vs 22% parmi lestitulaires de CDI et 20% parmi les titulaires de CDD. En revanche, la situation est inverse lorsquelon sintresse lintensit du travail lie des dlais serrs: les intrimaires ont sensiblementmoins le sentiment dy tre astreints que les titulaires de CDI (frquence temporelle moyenne de38% chez les intrimaires vs 45% chez les CDI).

    Lintensit du travail selon le genre Lorsquelle est apprcie en termes de cadences de travail leves ou en termes de manque detemps dans le travail, lintensit du travail ne prsente pratiquement pas de diffrence entrehommes et femmes (voir Tableau 20 Annexe I). Seule lintensit se rfrant des dlais serrsintroduit une distinction, avec une plus forte exposition des travailleurs que des travailleuses.(frquence temporelle moyenne nettement suprieure chez les hommes: 48% vs 41%).

    20

    Temps et travail: lintensit du travail

  • Graphique 5 Intensit du travail par professions

    Cependant ces rsultats tiennent dans une large mesure aux diffrences de composition socialeentre populations de salaris et de salaries. En effet, les femmes sont plus nombreuses dans desprofessions faible intensit du travail (employes, par exemple), quand les hommes sontfortement majoritaires dans les professions ouvrires ou dencadrement, forte intensit du travail.La neutralisation des effets de composition professionnelle peut donc conduire des rsultatsdiffrents. Ainsi, lexamen des groupes ouvriers (de type industriel ou artisanal) montre quecontrairement aux rsultats concernant lensemble des salaris, les ouvrires se dclarentnettement plus astreintes de fortes intensits du travail que les ouvriers (46% des ouvrires

    21

    Lintensit ressentie par les salaris

    0.3

    0.4

    0.5

    0.6

    0.3 0.4 0.5

  • dclarent des cadences quasi continment leves, vs 29% des ouvriers, et 43% des dlais quasicontinment serrs, vs 35%).

    Lintensit du travail selon lgeLintensit du travail tend dcrotre rgulirement avec lge lorsquelle est rfre aux cadencesleves. En revanche, lorsque lon considre lexposition des dlais serrs ou le manque de tempsdans le travail, la diminution ne sobserve qu partir du milieu de la vie professionnelle; de pluschez les jeunes salaris, le manque de temps saccrot avec lge.

    Graphique 6 Intensit du travail par tranches dges

    Lecture du graphique analogue celle du Graphique 4.

    Lintensit du travail selon les secteurs dactivit conomiqueGlobalement, les salaris des activits industrielles ou du btiment subissent une intensit dutravail plus importante que ceux des activits de services, tant en termes de cadences que dedlais. Au-del de cette tendance de fond, dimportantes disparits sectorielles se font jour: ainsi,certaines activits de services comme lhtellerie-restauration sont fortement affectes par descadences leves, et dautres, comme les services de transports ou de communications,connaissent frquemment des dlais serrs.

    Le manque de temps dans le travail ne concerne en revanche pas spcifiquement les activitsindustrielles, puisquil se rencontre aussi bien dans des industries comme le bois, papier et cartonque dans des services comme la sant et laction sociale ou les services aux entreprises.

    Lintensit du travail varie considrablement selon les secteurs dactivit conomique. Lestravailleurs de lindustrie sont globalement plus exposs aux cadences de travail leves, ainsi queceux de lhtellerie et restauration, du btiment et des postes et tlcommunications. Quatresecteurs (industries du bois, papier et carton, de matriels de transport et de lagro-alimentaire ethtellerie-restauration) sont particulirement affects, avec une proportion trs importante desalaris soumis des cadences quasi continment leves (suprieure 36%) (voir Tableau 22Annexe I).

    Lanalyse sectorielle de lintensit du travail partir de lexposition des dlais serrs conduit des rsultats un peu diffrents. Si les secteurs industriels figurent toujours parmi les plus touchs,

    22

    Temps et travail: lintensit du travail

    17%

    21%

    23%

    24%

    22%

    18%

    22%

    0% 10% 20% 30% 40%

    30%

    38%

    43%

    46%

    46%

    45%

    45%

    0% 10% 20% 30% 40% 50%

    21%

    33%

    37%

    40%

    43%

    44%

    40%

    0% 10% 20% 30% 40% 50%

    Ensemble

  • ils sont rejoints par des secteurs de services de transport et de communication. Les proportions desalaris qui subissent des dlais quasi continment serrs atteignent 50% dans la fabricationlectrique et lectronique ou la fabrication de moyens de transport et dpassent 40% dans lditionet imprimerie, les services de transport terrestre ou les postes et tlcommunications. Lesfrquences temporelles moyennes de travail en dlais serrs y sont galement les plus fortes. Lesfrquences les plus basses sobservent dans les services domestiques et lducation, comme danslanalyse de lintensit du travail partir des cadences leves.

    Graphique 7 Intensit du travail par secteurs dactivit conomique

    23

    Lintensit ressentie par les salaris

    Services domestiques

    Sant, action sociale

    Activits financires

    Autres transports

    Transports terrestres

    Commerce

    Bois, papier, cartonTextile, habillement

    0.2

    0.3

    0.4

    0.5

    0.6

    0.7

    0.25 0.35 0.45 0.55

    Frquence temporelle du travail en dlais serrs

    Fabricationmatriel transportFabrication lectrique

    lectronique

    Postes et tlcommunications

    Mtallurgie,mcanique Htellerie,

    restaurationIndustries agro-

    alimentaires

    Industriesextractives

    Agriculture, pcheServices auxparticuliers

    Administrationpublique

    ducation

    lectricit, gaz, eau

    Industries diverses

    Frquence temporelle du travail en cadences leves

    Edition, imprimerie

    Services auxentreprises

    Chimie, plastique

    Btiment

  • Dans lensemble, lintensit du travail par des cadences leves et lintensit du travail par desdlais serrs savrent relativement lies entre elles, comme le montre le Graphique 7. Cependant,la comparaison des frquences temporelles moyennes du travail en cadences leves ou en dlaisserrs met en vidence des particularits sectorielles non ngligeables, qui refltent des formesspcifiques dintensit du travail. Ainsi, parmi les secteurs forte intensit du travail, sopposent,dune part lindustrie du bois, papier et carton et lhtellerie-restauration, plutt exposes descadences leves, et dautre part la fabrication lectrique et lectronique ou ldition et imprimerie,plutt exposes des dlais serrs.

    La mesure de lintensit du travail par le manque de temps pour terminer son travail fait apparatreune hirarchisation des secteurs dactivit beaucoup moins contraste et relativement diffrentedes prcdentes. Parmi les secteurs les plus touchs, ct des industries du bois, papier et cartonou de la fabrication lectrique et lectronique, figurent en effet des secteurs comme la sant etlaction sociale, les services aux entreprises ou le btiment. Dans ces secteurs, au moins le quartdes salaris sont concerns. A contrario, le secteur de lhtellerie et restauration admet la plusfaible proportion de salaris manquant de temps dans leur travail, alors quil figure parmi les plusexposs des cadences de travail leves.

    Lintensit du travail selon le statut des tablissementsLe travail en cadences leves ou en dlais serrs est plus frquent dans les entreprises prives. Enrevanche, le manque de temps dans le travail touche surtout les salaris des administrationspubliques.

    Graphique 8 Intensit du travail par statut dtablissement

    Lecture du graphique analogue celle du Graphique 4.

    Lintensit du travail selon la taille des tablissementsDans ses diffrentes formes, lintensit du travail augmente avec la taille des tablissementsjusquau seuil de cent salaris et se stabilise au-del.

    Effets combins des variables structurelles sur lintensit du travail etcatgories de main-duvre les plus exposes

    La mise en uvre de modles conomtriques testant linfluence quexercent les diffrentesvariables structurelles sur les indicateurs dintensit du travail, confirme trs largement les rsultats

    24

    Temps et travail: lintensit du travail

    42%

    38%

    34%

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    0% 10% 20% 30% 40% 50%

    48%

    40%

    38%

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    0% 10% 20% 30% 40% 50%

    21%

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    24%

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    0% 10% 20% 30% 40% 50%

    Ensemble

  • des analyses prcdentes effectues par variables spares. Les seules divergences importantesconcernent les effets des variables de genre et de statut demploi. Les analyses conomtriques fonten effet apparatre une plus grande exposition des femmes un travail en cadences leves ou endlais serrs. Par ailleurs, elles ne confirment pas la plus forte soumission des travailleursintrimaires un travail en cadences leves.

    Graphique 9 Intensit du travail par taille dtablissement

    Lecture du graphique analogue celle du Graphique 4.

    Lappartenance conjointe des catgories trs exposes accrot trs fortement le risque dastreinte une forte intensit du travail. Les jeunes ouvrires des industries de production en srieconstituent ainsi des catgories de main-duvre particulirement touches par les cadencesleves ou les dlais serrs. Les cadres dirigeants de nombreux secteurs dactivit sont galementtrs exposs des dlais serrs et un manque de temps pour terminer leur travail.

    Mthodes utilisesLes variables structurelles dont on a analys les effets sur diffrents indicateurs dintensit dutravail ne sont pas toutes indpendantes les unes des autres. La prise en compte desinterdpendances entre variables est susceptible de modifier les rsultats, comme on a pu leconstater dans lanalyse de lintensit du travail par genres en neutralisant les effets decomposition professionnelle. Pour neutraliser systmatiquement les effets dinterdpendance entrevariables structurelles, ltude utilise des mthodes dconomtrie sur variables qualitatives detype logit. Ces mthodes permettent de mesurer limpact spcifique de chacune des variablesstructurelles prises en compte (profession, statut demploi, genre, ge, anciennet danslorganisme, secteur dactivit, statut de lorganisme et taille de ltablissement17) sur lesprobabilits de travailler en cadences quasi continment leves, sous des dlais quasicontinment serrs ou en manque de temps pour terminer le travail.

    Par ailleurs, des croisements de variables ont t effectus pour mesurer les effets combins des

    25

    Lintensit ressentie par les salaris

    42%

    42%

    44%

    41%

    40%

    40%

    34%

    29%

    40%

    0% 10% 20% 30% 40% 50%

    50%

    48%

    49%

    47%

    45%

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    35%

    27%

    45%

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    24%

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    25%

    23%

    23%

    19%

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    14%

    22%

    0% 10% 20% 30% 40% 50%

    Ensemble

    17 Lintroduction des pays comme variables explicatives supplmentaires ne modifie pas sensiblement les rsultats des analysesconomtriques prsentes ici sans les prendre en compte.

  • diffrents facteurs qui influent sur la probabilit de travailler en cadences leves, en dlais serrsou de manquer de temps pour terminer le travail. Ces croisements de variables ne peuventcependant pas tre trop pousss car les effectifs concerns deviendraient trop faibles et lescomparaisons dpourvues de signification statistique. Les combinaisons de facteurs sont donctudies sur la base du croisement de quatre variables particulirement discriminantes, laprofession, lactivit conomique, le genre et lge18. Elles permettent au final didentifier certainescatgories de main-duvre particulirement exposes.

    Effets combins des variables structurelles sur le travail en cadences levesLanalyse conomtrique montre que la plupart des variables structurelles exercent des effetsimportants sur la probabilit de travailler en cadences quasi continment leves (voir Tableau 25Annexe I). Ces effets sont particulirement importants dans le cas de la profession et du secteurdactivit, et dans une moindre mesure du genre, de lge, du statut des organismes et de la tailledes tablissements. En revanche, on nobserve pas dinfluence significative du statut de lemploi etune influence trs faible de lanciennet.

    Globalement, les rsultats de lanalyse conomtrique confirment la plupart de ceux qui ont ttablis prcdemment sur la base danalyses de tris croiss: les probabilits les plus fortes deressentir des cadences quasi continment leves se retrouvent ainsi chez les ouvriers de typeindustriel et, dans une moindre mesure, les ouvriers de type artisanal et les travailleurs nonqualifis, chez les salaris de lhtellerie-restauration, des industries du bois, papier et carton, delagro-alimentaire et des matriels de transport, ainsi que chez ceux de la sant et de lactionsociale, des postes et tlcommunications et du btiment. Les dclarations des travailleursvieillissants confirment leur moindre exposition des cadences de travail leves (qui seraient trspnalisantes pour leurs conditions de travail). Enfin, lappartenance de grands tablissements(de plus de cent salaris) ou des entreprises prives renforce lexposition des cadences leves.

    Les seules diffrences importantes introduites par lanalyse conomtrique concernent les effets dedeux variables, le genre et le statut de lemploi. De fait, on constate une plus grande exposition destravailleuses des cadences leves, diffrence qui napparaissait pas dans la comparaison sur labase de tris croiss. Cependant, une plus forte exposition des femmes avait t observe encomparant les genres au sein de groupes professionnels homognes (par exemple les ouvrires etles ouvriers). En neutralisant les interdpendances structurelles, lies notamment auxappartenances socioprofessionnelles, lanalyse conomtrique gnralise donc ce type de rsultat lensemble des salaris.

    linverse, la plus forte exposition des travailleurs intrimaires aux cadences leves, constatesur la base de tris croiss, ne se retrouve pas dans lanalyse conomtrique. Cette apparentesurexposition ne tient donc pas spcifiquement leur statut demploi, mais leur appartenancesimultane des catgories de main-duvre fortement soumises un travail en cadences leves.

    26

    Temps et travail: lintensit du travail

    18 Les expositions les plus fortes touchant des catgories de salaris qui travaillent plutt dans des entreprises prives et dans de grandstablissements, lintroduction des variables de statut des organismes et de taille des tablissements modifierait probablement peu lesrsultats, mais rduirait leur porte par la faiblesse des effectifs sur lesquels ils reposeraient. Par ailleurs, les catgories des travailleursprcaires, intrimaires ou en contrats dure dtermine, ne sont pas non plus introduites dans les combinaisons de variables car ellessont peu exposes des travaux en cadences leves ou en dlais serrs et sont trop peu nombreuses pour se prter des analysescroises.

  • En effet, les travailleurs intrimaires sont plutt jeunes, ouvriers et salaris du secteur industriel,toutes catgories qui ressentent frquemment des cadences intenses.

    Lappartenance conjointe des catgories trs exposes renforce trs nettement la probabilitdastreinte un travail en cadences leves. On peut ainsi dterminer certaines catgories de mainduvres particulirement exposes: les ouvriers de type industriel, globalement trs concerns, lesont encore davantage lorsquils travaillent dans les secteurs les plus touchs comme la fabricationlectrique et lectronique, lagro-alimentaire ou lindustrie du bois, papier et carton. Dans cesmmes secteurs, les ouvrires de type industriel y sont encore plus soumises que leurs homologuesmasculins, singulirement les plus jeunes dentre elles. En dfinitive, les jeunes ouvrires desindustries de production en srie figurent parmi les catgories de main-duvre les plus exposes(avec des frquences dexposition des cadences continment leves qui atteignent 70% 80%).19

    Effets combins des variables structurelles sur le travail en dlais serrsLanalyse conomtrique montre que toutes les variables structurelles exercent une influence surla probabilit de travailler sous des dlais quasi continment serrs (voir Tableau 25 Annexe I).Cependant, le genre et le statut demploi ny contribuent qu un faible niveau de significationstatistique et lanciennet dans lentreprise prsente des effets peu importants.

    Une fois encore, ces rsultats confirment largement ceux obtenus prcdemment par tris croiss:lexposition des dlais serrs sobserve plus particulirement chez les cadres dirigeants et lesouvriers de type industriel ou artisanal, chez les jeunes (de moins de 35 ans), dans les secteursdactivit conomique des postes et tlcommunications, de la fabrication lectrique etlectronique ou des matriels de transport, des transports terrestres, de ldition et imprimerie etde lhtellerie et restauration, dans les grands tablissements et dans les entreprises prives.

    La seule diffrence importante concerne nouveau le rle du genre. On observe grce lconomtrie une exposition lgrement plus forte des femmes, alors que les comparaisonsglobales montraient le contraire.

    Selon la mme mthode que pour le travail en cadences leves, on peut mettre en lumirecertaines catgories de main-duvre particulirement astreintes au travail en dlais serrs: onretiendra notamment le cas des cadres dirigeants dans les secteurs de lhtellerie et restauration,de la fabrication lectrique et lectronique ou des institutions financires. De mme que pour letravail en cadences leves, les jeunes ouvrires de type industriel des industries de production ensrie sont trs fortement exposes un travail en dlais serrs.

    Effets combins des variables structurelles sur le manque de temps Comme prcdemment, lanalyse conomtrique fait apparatre une influence importante de laplupart des variables structurelles sur la probabilit de manquer de temps pour terminer le travail(voir Tableau 25 Annexe I). Les seules exceptions sont constitues par les variablesdmographiques. Contrairement ce quon observe pour le travail en cadences leves ou en

    27

    Lintensit ressentie par les salaris

    19 Pour une analyse plus dtaille des catgories de main-duvre les plus exposes, voir Annexe II.

  • dlais serrs, le genre ne prsente pas deffet statistiquement significatif et lge nexerce quun effetfaiblement significatif et ngatif pour les travailleurs dge mr (35 44 ans). De fait, la prise encompte de lanciennet neutralise trs largement les effets dge. Le moindre risque dexposition un manque de temps dans le travail que rencontrent les jeunes salaris (de moins de 25 ans) estplus imputable leur faible anciennet (3 ans ou moins) qu leur jeunesse proprement dite.

    Les rsultats de lanalyse conomtrique sont l encore trs voisins de ceux observsprcdemment sur la base de tris croiss. Le manque de temps touche plus particulirement lescadres dirigeants, les secteurs de l