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Bilan de Campagne ARVALIS - Institut du végétal 4 CHOISIR ET DECIDER 2012 Alsace Variétés et Traitements d'Automne Bilan de la campagne blé 2011-2012 en Alsace UNE CAMPAGNE BIEN CHAHUTEE ! Le gel printanier aura marqué les esprits lors de cette cam- pagne qui avait pourtant « trop » bien commencée. Si elle se termine avec un rende- ment moyen tout à fait correct avec environ 72 qx/ha, ce qui correspond à la moyenne quin- quennale, la campagne blé 2010-2011 montre de gros écarts de rendement qui illus- trent les différents problèmes observés. JNO, ennoiement de certaines parcelles, gel de dé- but février, maladies, séche- resse de début montaison, la liste des « fléaux » est longue. Les parcelles les « plus moches », « les plus gelées » ont été le plus souvent retour- nées ce qui permet d’assurer une moyenne régionale à peu près correcte. Celles qui ont été conservées malgré leur piètre état font souvent moins de 50 qx/ha. Au final, les cri- tères de qualité technologiques (PS, Protéïnes, Hagberg) sont corrects sans plus en tout cas pour la majorité des parcelles récoltées avant les pluies de juillet. Revenons sur quelques élé- ments marquants de la cam- pagne. § FORTE DIMINUTION DES SURFACES Alors que les mesures de lutte contre la chrysomèle (rotation 1 an/6) ont amené les agriculteurs à semer plus de blé depuis la campagne 2011, l’épisode de gel a finalement tout remis en cause. Des 48 000 ha estimés ense- mencés à l’automne 2011, le comité des céréales pour l’Alsace de FranceAgriMer annonçait environ 36 800 ha au mois de juin soit une diminution d’environ 25%. Ils se répartissent en 21 300 ha dans le Bas-Rhin (moins 30%) et 15 500 ha dans le Haut-Rhin (moins 15%). Les autres céréales à paille restent peu présentes avec 5450 ha d’orge. La proportion d’orge d’hiver a baissé passant de 92% à 68% à cause du gel. Au con- traire, celle d’orge de printemps a augmenté passant de 8% à 32%. On trouve aussi 1750 ha de triti- cale et 900 ha de céréales se- condaires (seigle et avoine). § APACHE RESTE EN TETE Les 350 enquêtes culturales de FranceAgriMer permettent de connaître assez précisément les surfaces par variété cultivées en Alsace en 2011-2012. Comme les enquêtes ont été réalisées au mois de juin, les effets du retour- nement des variétés les plus impactées par le gel se font sentir dans les % de surfaces. Apache reste dominante avec 29% des surfaces (- 2 points par rapport à l’année précédente). Arezzo passe en 2 ème position grâce à sa bonne résistance au gel 2012 avec 14% des surfaces (+5 points) Viennent ensuite Altigo, Arlequin, Prémio, Goncourt et Alixan avec chacune environ 6% des sufaces. Remarquons la baisse de Prémio (-6 points) et la progression de Goncourt (+5 points) Enfin, signalons l’apparition significative des hy- brides avec 6% des surfaces (Hystar 4% - Hymack 1% - As de cœur 1%). Au final, 71% des variétés cultivées figurent dans la liste des variétés recommandées par la meunerie (VRM) et 74% sont dans la liste des blés pani- fiables pour la meunerie française (BPMF) Variété % surface APACHE 29 AREZZO 14 ALTIGO 7 ARLEQUIN 6 PREMIO 6 GONCOURT 5 ALIXAN 5 HYSTAR 4 MERCATO 2 SOISSONS 2 ALIGATOR 2 § UN AUTOMNE DOUX Les semis réalisés dans de bonnes conditions durant le mois d’octobre sont suivis d’une pé- riode douce au niveau des tempé- ratures particulièrement remar- quée en décembre et début jan- vier. Durant 40 jours, les tempéra- tures moyennes enregistrées sont au niveau des plus chaudes de- puis 20 ans ! Les céréales profi- tent de ce climat pour se déve- lopper, taller et atteindre pour certaines variétés la fin de la vernalisation. Des vagues de pucerons favorisées par le climat infectent certaines parcelles ou du moins des portions de celles- ci. Les symptômes ne s’exprimeront qu’à la fin du prin- temps avec des plantes nanifiées plus ou moins jaunâtres et rou- geâtres. Des pertes de rende- ment sont alors attribuées à cette contamination. Signalons aussi quelques parcelles hydromorphes largement ennoyées durant l’hiver

UNE CAMPAGNE BIEN végétal du Institut...mois de juin avec des densité épis très élevées. Les parcelles hydromorphes du sud de la ré-gion ont également souferts. Les f niveaux

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Bilan de Campagne

Ó ARVALIS - Institut du végétal 4 CHOISIR ET DECIDER 2012 Alsace Variétés et Traitements d'Automne

Bilan de la campagne blé 2011-2012 en Alsace

UNE CAMPAGNE BIEN CHAHUTEE ! Le gel printanier aura marqué les esprits lors de cette cam-pagne qui avait pourtant « trop » bien commencée. Si elle se termine avec un rende-ment moyen tout à fait correct avec environ 72 qx/ha, ce qui correspond à la moyenne quin-quennale, la campagne blé 2010-2011 montre de gros écarts de rendement qui illus-trent les différents problèmes observés. JNO, ennoiement de certaines parcelles, gel de dé-but février, maladies, séche-resse de début montaison, la liste des « fléaux » est longue. Les parcelles les « plus moches », « les plus gelées » ont été le plus souvent retour-nées ce qui permet d’assurer une moyenne régionale à peu près correcte. Celles qui ont été conservées malgré leur piètre état font souvent moins de 50 qx/ha. Au final, les cri-tères de qualité technologiques (PS, Protéïnes, Hagberg) sont corrects sans plus en tout cas pour la majorité des parcelles récoltées avant les pluies de juillet.

Revenons sur quelques élé-ments marquants de la cam-pagne.

§ FORTE DIMINUTION DES SURFACES Alors que les mesures de lutte contre la chrysomèle (rotation 1 an/6) ont amené les agriculteurs à semer plus de blé depuis la campagne 2011, l’épisode de gel a finalement tout remis en cause. Des 48 000 ha estimés ense-mencés à l’automne 2011, le comité des céréales pour l’Alsace

de FranceAgriMer annonçait environ 36 800 ha au mois de juin soit une diminution d’environ 25%. Ils se répartissent en 21 300 ha dans le Bas-Rhin (moins 30%) et 15 500 ha dans le Haut-Rhin (moins 15%). Les autres céréales à paille restent peu présentes avec 5450 ha d’orge. La proportion d’orge d’hiver a baissé passant de 92% à 68% à cause du gel. Au con-traire, celle d’orge de printemps a augmenté passant de 8% à 32%. On trouve aussi 1750 ha de triti-cale et 900 ha de céréales se-condaires (seigle et avoine).

§ APACHE RESTE EN TETE Les 350 enquêtes culturales de FranceAgriMer permettent de connaître assez précisément les surfaces par variété cultivées en Alsace en 2011-2012. Comme les enquêtes ont été réalisées au mois de juin, les effets du retour-nement des variétés les plus impactées par le gel se font sentir dans les % de surfaces. Apache reste dominante avec 29% des surfaces (- 2 points par rapport à l’année précédente). Arezzo passe en 2ème position grâce à sa bonne résistance au gel 2012 avec 14% des surfaces (+5 points) Viennent ensuite Altigo, Arlequin, Prémio, Goncourt et Alixan avec chacune environ 6% des sufaces. Remarquons la baisse de Prémio (-6 points) et la progression de Goncourt (+5 points) Enfin, signalons l’apparition significative des hy-brides avec 6% des surfaces (Hystar 4% - Hymack 1% - As de cœur 1%). Au final, 71% des variétés cultivées figurent dans la liste des variétés recommandées

par la meunerie (VRM) et 74% sont dans la liste des blés pani-fiables pour la meunerie française (BPMF)

Variété % surface

APACHE 29

AREZZO 14

ALTIGO 7

ARLEQUIN 6

PREMIO 6

GONCOURT 5

ALIXAN 5

HYSTAR 4

MERCATO 2

SOISSONS 2

ALIGATOR 2

§ UN AUTOMNE DOUX Les semis réalisés dans de bonnes conditions durant le mois d’octobre sont suivis d’une pé-riode douce au niveau des tempé-ratures particulièrement remar-quée en décembre et début jan-vier. Durant 40 jours, les tempéra-tures moyennes enregistrées sont au niveau des plus chaudes de-puis 20 ans ! Les céréales profi-tent de ce climat pour se déve-lopper, taller et atteindre pour certaines variétés la fin de la vernalisation. Des vagues de pucerons favorisées par le climat infectent certaines parcelles ou du moins des portions de celles-ci. Les symptômes ne s’exprimeront qu’à la fin du prin-temps avec des plantes nanifiées plus ou moins jaunâtres et rou-geâtres. Des pertes de rende-ment sont alors attribuées à cette contamination. Signalons aussi quelques parcelles hydromorphes largement ennoyées durant l’hiver

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dans le Sundgau avec des pertes de pieds.

§ DES DEGATS DE GEL SPECTACULAIRES Les températures chutent bruta-lement le 1er février et restent très en dessous des normales jusqu’au 13 février. A titre d’exemple, le 7 février, les mini atteignent -13.6° à Entzheim, -20.2° à Bâle et -14.2° à Meyeheim. Dans les 3 stations, les maxi ne dépassent pas -8.4° ce jour. L’hygrométrie de l’air est aussi très faible à ce moment, en partie due à un vent du nord ou d’est. L’absence de couche pro-tectrice de neige accentue le phénomène. On remarque d’ailleurs que les parcelles si-tuées à l’extrême sud de la région ne sont pas touchées car elles bénéficiaient de quelques cm de neige comme le montre la carte ci-dessous.

Les conséquences sont catastro-phiques pour de nombreuses parcelles avec des plantes qui jaunissent et ne se remettront pas ou seulement que partiellement. Nous reviendrons plus en détail dans l’explication des phéno-mènes dans le chapitre suivant. En résumé, on dira que les varié-tés qui étaient déjà à la fin de leur vernalisation, c'est-à-dire qui étaient prêtes à l’initiation florale, ont été les plus touchées car leur résistance au froid est alors for-tement diminuée. Il faut souvent attendre plusieurs semaines poir connaître la capacité de récupé-ration des céréales. Se pose alors la question du retournement des parcelles de blé et d’orge. Si

pour les plus touchées, la ré-ponse est vite trouvée, il y a quel-quefois des calculs à faire pour celles qui le sont moins. Les assurances climat sont mises à contribution et proposent souvent de retourner les parcelles plus indécises. Des semis sont alors réalisés en orge ou blé de prin-temps, mais le plus souvent c’est du maïs (voire un peu de sorgho ou de soja) qui sera mis en place.

§ LES STADES SONT DANS LA NORMALE Pour les parcelles non affectées par le froid, les premiers apports d’azote sont réalisés début mars dans d’assez bonnes conditions et assurent le tallage. Les précipi-tations se font alors rares et il faut attendre la mi avril pour réel-lement voir des pluies consé-quentes. Comme le stade épi 1cm intervient dans la 1ère décade d’avril, les apports d’azote faits à ce moment sont assez bien valo-risés. Quelques situations n’ayant pas ou peu profité des pluies de mi avril, sont irriguées en plaine pour optimiser l’apport d’azote. Dans l’ensemble, les irrigations ne démarreront vraiment que vers la mi mai. Les blés des parcelles les plus séchantes ont pu être irriguées 4 fois (contre 6 en 2011) mais en règle générale 1 à 2 irrigations au plus sont réalisées cette campagne. Du côté du désherbage, on note de nom-breuses questions relatives au salissement des parcelles affec-tées par le gel. La faible densité de plantes laisse passer de la lumière favorable à la levée d’adventices estivales comme les chénopodes ou les mercuriales. L’épiaison intervient vers le 20 mai.

§ DES MALADIES Cela faisait quelques années que les maladies foliaires n’avaient pas fait autant parler d’elles. C’est bien sûr la septoriose qui en est la vedette mais la rouille brune a été aussi d’actualité. C’est surtout

les zones les plus arrosées comme le sud de la région qui ont été le plus touchées par la sep-toriose. Si l’innoculum a été mis à mal par le froid de février, la ma-ladie est restée discrète en mars vu les faibles précipitations puis a progressé à la faveur des pluies de mi à fin avril. Début mai, c'est-à-dire 3 semaines plus tard, les premiers symptômes sont alors visibles sur les feuilles basses. Les conseils de traitement sont donnés vers le 10 mai alors que les blés sont au stade « sortie dernière feuilles ». la rouille brune est également signalée. Elle ne se développera réellement que plus tard vers la mi juin. La pré-sence de pluies au moment de la floraison des blés n’est pas bon signe vis-à-vis de la contamina-tion en fusariose de l’épi. Les symptômes sont effectivement observés dans certaines par-celles à partir de la mi juin.

§ A PRIORI, PAS D’ECHAUDAGE Avec des températures de fin de cycle non excessives, le remplis-sage des grains qui débute après la floraison et se poursuit jusqu’au stade fin grain laiteux s’est passé dans de bonnes con-ditions. La pluie était aussi au rendez vous à ce moment. On remarque néanmoins que les pmg sont correct sans plus, en tout cas bien inférieurs à ceux de 2011. Les peuplements épis sont faibles à moyens et on aurait pu s’attendre à des compensations plus élevées.

§ RECOLTE ENCORE PLUVIEUSE Comme c’est maintenant le cas chaque été, la récolte qui com-mence fin juin est interrompue par les pluies de juillet. C’est seulement début août que l’ensemble des parcelles est moissonné. Au final, les PS sont tout juste bons avec 76-77. Les hagberg, révélateurs de la germi-

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nation sur pied sont bons, surtout avant les pluies et la qualité sani-taire quelquefois mise en défaut. La teneur en protéïnes est juste dans les valeurs souhaitées (11.5 à 12%) Le rendement régional est proche de 72 quintaux/ha soit à peu près la même chose que l’an passé. On aurait pu s’attendre à mieux car ce sont les parcelles

les plus belles qui ont été gar-dées après le gel. Il reste néan-moins des blés qui auraient méri-té d’être retournés et il y a quelques déceptions parmi des parcelles très (trop) belles au mois de juin avec des densité épis très élevées. Les parcelles hydromorphes du sud de la ré-gion ont également soufferts. Les

niveaux de rendement s’étalent de 30 à 100 quintaux. Si on fait abstraction des extrêmes, on trouve souvent des parcelles qui procurent environ 80 quintaux dans des situations qui en fai-saient 10 de plus en 2011.

Comportement des variétés dans l’essai de Wolfisheim (68) semé le 24 octobre 2011

VARIETES APACHE BERMUDE PREMIO SOISSONSEpi 1 cm 6-avr. 3-avr. 5-avr. 5-avr.Epiaison 20-mai 23-mai 18-mai 15-maiGrains semés/m² 350 350 350 350Tiges + 3 F/plante 1.5 1.75 2.3 1.85Epis/m² 615 541 642 674Grain/m² 16970 18411 20019 20849Grains/épi 28 34 31 31PMG (g) 50.5 42.8 51.7 43.6PS 76.3 73.4 76.4 79.0% Protéines 12.6 11.8 12.2 13Humidité 10.6 11 10.6 11.1Rendement (qx/ha) 85.7 78.8 103.5 90.9

Comportement des variétés dans l’essai de Rustenhart (68) semé le 26 octobre 2011

(essai grélé début juillet – non récolté)

VARIETES APACHE BERMUDE PREMIO SOISSONSEpi 1 cm 5-avr. 10-avr. 3-avr. 2-avr.Epiaison 17-mai 25-mai 18-mai 15-maiGrains semés/m² 350 350 350 350Plantes SH/m² 178 157 261 198Tiges + 3 F/m² 1.8 1.3 1.85 2.4Epis/m² 638 665 706 723

Le graphique présente l’élaboration du rendement pour une variété témoin depuis une quinzaine d’année dans des sols de limons.

Wolfisheim, (K 2012) se situe dans la moyenne avec un pmg de 43.6 g et 20849 grains/m2. La fertilité (31 grains/épi) est correcte sans plus. Au final, le rende-ment de 90.9 quintaux/ha se situe dans les bonnes années. Pourtant, au 15 mars 2012, le % de feuillage détruit par le gel a été estimé à 70 %. Elle figurait par-mi les variétés particulièrement touchées. En fait, les dégâts visuels de feuillage bruni voire détruit, ne reflé-taient pas l’état réel de la plante, ni sa capacité de rattrapage. Pour certaines variétés de l’essai, les ob-servations étaient mieux correlées au résultat final. Par exemple, Aubusson et Oregrain, très touchés visuel-lement n’ont pas dépassé 20 qx/ha, alors que Arezzo ou Laurier apparement sans dégâts de gel produisent plus de 100 qx/ha.

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Pluviométrie décadaire à Entzheim, Meyenheim et Altkirch de septembre 2011 à août 2012

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Gel 2012 et comportement des variétés vis-à-vis du froid

IMPACT DU GEL EN FRANCELa vague de froid qui a touché la France au début du mois de Février 2012 a provoqué de forts dégâts sur les céréales à paille, tout particulièrement dans le grand ¼ nord – est du pays. Selon les situations, les dégâts sont allés d’extrémités de limbes desséchés (zones protégées par la neige) à des destructions complètes de parcelles sur l’ensemble de la Lorraine, une partie des plateaux de Bourgogne et de Champagne Ardennes et en Alsace. Selon les estimations, c’est de l’ordre de 120 000 ha d’orges d’hiver et escourgeons et 230 000 ha de blés qui ont été retournés dans le grand-est avec près de 15 000 ha en Alsace (sur 48 000 ha semés).

Observation visuelle des dégâts de froid (feuillage) le 2 mars 2012 à Rustenhart (68)

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Céréales d’hiver – Gel 2012

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LA RESISTANCE AU(X) FROID(S) : UNE CARACTERISTIQUE COMPLEXELa « résistance » des céréales à paille au froid est en réalité une combinaison d’aptitudes que les plantes ont génétiquement, ou acquièrent ou perdent au cours de leur développement. A l’échelle des tissus, ceci se traduit par la capacité de la plante à synthétiser des molécules « antigel » dans leurs cellules, qui abaissent le seuil de cristallisation de l’eau dans la plante.

Pour résister au froid, les céréales d’hiver ont besoin de s’acclimater, c'est-à-dire d’être exposées à des températures fraîches (pas forcément gélives) : on parle d’endurcissement. En l’absence d’endurcissement, les différentes espèces présentent la même sensibilité au gel (de l’ordre de -5°C). Plus l’endurcissement est long et/ou réalisé en conditions fraîches, plus le seuil de résistance au froid sera abaissé. L’acclimatation peut

par ailleurs être rapide : 2 à 3 jours sont suffisants pour accroître la résistance au froid. Les conditions automnales françaises permettent donc presque systématiquement d’acquérir au minimum un début d’endurcissement avant l’arrivée du froid hivernal.

Toutes les variétés ne s’acclimatent pas de la même manière : les variétés hiver et très hiver répondent mieux à l’endurcissement que les variétés alternatives ou de printemps. Ainsi elles présentent des niveaux maximum de résistance au froid plus élevés.

D’autre part, l’endurcissement n’est pas définitif. Il disparaît progres-sivement à partir du moment où la plante réalise sa transition florale (c’est-à-dire où l’apex passe d’un état végétatif à un état reproducteur, et qu’il cesse d’émettre des ébauches de feuilles pour constituer

des épillets). Cette phase s’opère courant tallage, selon les conditions de température, de vernalisation et de durée du jour. Les variétés précoces (alternatives ou de printemps en particulier) atteignent très vite ce stade de transition florale, et perdent donc très tôt leur résistance au froid. A l’inverse, chez les variétés très hiver, cet évènement s’opère plus tard, ce qui allonge la phase de résistance au froid.

Dernier élément concernant l’endur-cissement : lors de séquences douces voire chaudes, les plantes peuvent naturellement se « desendurcir ». Leur capacité à recouvrer leur endurcissement dépendra alors du stade de développement. Si la transition florale n’est pas engagée, alors le réendurcissement reste possible.

Lorsque la vernalisation se termine, la plante redevient plus sensible au froid

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MODE D’EVALUATION DE LA RESISTANCE AU FROID A L’INSCRIPTIONL’évaluation de la résistance au froid des variétés lors de leur inscription est réalisée par l’INRA sur un site d’altitude (1000 m), dans le Jura, avec un dispositif de serres mobiles qui empêche la déposition de neige sur les plantes. Ce type d’évaluation

permet donc un endurcissement progressif et précoce, dans un contexte frais voire froid et donc avec un développement ralenti. Les notes acquises correspondent donc à des maxima de résistance, en conditions d’endurcissement opti-

males. Elles ont pu être partielle-ment mises en défaut cette année car les conditions de gel de février ne correspondaient pas aux conditions dans lesquelles les variétés sont habituellement éva-luées.

EXPLICATIONS DES OBSERVATIONS 2011 - 2012Ce qui s’est passé cet hiver n’est pas tant remarquable par les valeurs absolues de douceur ou de froid observées que par la séquence inhabituelle et la conjonction de facteurs aggravants. Le début de la campagne 2011-2012 a présenté un fort avancement des stades, lié à un cumul de températures très excédentaire d’octobre à janvier. Ceci a conduit d’une part à de fortes

croissances et donc des indices foliaires élevés (et donc des symptômes visuels très prononcés), et d’autre part, pour des variétés à forte note d’alternativité, précoces à montaison ou semées très tôt, à un franchissement du stade « initiation florale », synonyme d’une baisse de résistance au froid. Il est important de souligner que les semaines qui ont suivi l’épisode principal de gel

ont été défavorables à une récupération des cultures : nouvelles gelées, temps sec qui pénalise la valorisation des apports d’azote, et qui dure jusque début avril, etc… Il a fallu attendre mi-avril pour que les conditions météo redeviennent favorables et permettent le rattrapage inattendu que nous avons pu observer cette année.

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Les dégâts sont plus marqués cette année qu’en 1985, année également très froide, mais tardive et avec présence de couvert neigeux. Les cultures recouvertes de neige sont moins exposées à des températures extrêmes qu’en l’absence de neige. En 2003, c’est l’alternance de gel – dégel dans des céréales gorgées d’eau qui a provoqué les dégâts dans certaines régions. Dans le cas de parcelles

touchées et partiellement détruites, la décision de retournement ou de maintien a pu être très difficile à prendre, et il n’existe pas de règle de décision universelle en la matière : il faut intégrer la densité de plantes restantes (sous réserve qu’elle soit mesurable et que le diagnostic vivant/détruit soit fiable), le climat « moyen » que l’on peut attendre dans la région pour le reste du cycle, la gamme de cultures de

remplacement et leur potentiel. Cette année, les notations de dégâts foliaires se sont avérées plus prédictives des pertes effectives de plantes lorsqu’elles étaient faites fin février ou début mars plutôt qu’entre le 15 et le 25 février (corrélation de 0.7 entre une notation précoce et les pertes de pieds, et de 0.86 entre une notation tardive et les pertes de pieds) ; lorsque cela est possible, il est donc préférable de retarder le

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diagnostic et la prise de décision de retournement, afin de laisser le temps aux cultures soit de repartir, soit de confirmer leur destruction. Il y a donc une interaction entre précocité des variétés et dégâts de froid, mais cela n’explique pas la totalité des réponses variétales au froid : sur l’ensemble de nos essais concernés par des dégâts de gel, la combinaison « résistance au froid + précocité à montaison » n’explique que 50% du comportement des variétés. Il existe donc d’autres

mécanismes, d’autres facteurs qui modulent la résistance des cultivars aux différents scénarii de froid. L’effet « date de semis » qui reflète le développement de la plante au moment de l’arrivée du gel est net. Pour une même variété, les dégâts visuels (et par la suite sur le potentiel) peuvent être très différents. Cela est illustré dans l’essai « date de semis » suivi par Arvalis sur la plateforme du Comptoir Agricole à Schwindratzheim. Prémio semé le 5

octobre a été particulièrement touché (feuillage jaune) mais « rattrape » partiellement avec au final 482 épis/m2. Le semis du 26 octobre semble bien clair mais ne montre pas de disparition de plantes et affiche au final 635 épis/m2. Le semis tardif du 18 novembre n’est pas affecté par le gel mais plutôt par « le semis de novembre » et présente tout de même 591 épis/m2.

Schwindratzheim (67) – le 1er mars 2012

Semis 05 octobre Semis 26 octobre Semis 18 novembre AUBUSSON

Epis/m2 0 0 542

PREMIO

Epis/m2 482 635 591

BOREGAR

Epis/m2 501 523 504

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Céréales d’hiver – Gel 2012

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Echelle de comportement des variétés de blé tendre au froid 2012 : synthèse des observations de dégâts foliaires et pertes de plantes entre mi-février et mi-mars.

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(HAUSSMANN)

(COURTOT) ALIXAN FANION

AUBUSSON ARTDECO ( ) : peu de données Source : 52 essais 2012, France entière

Ces dégâts foliaires et pertes de plantes se sont traduits par des baisses de rendement dans les essais les plus touchés. Les variétés les plus sensibles, Fanion, Aubusson, Artdeco, sont

régulièrement en retrait dans les essais, y compris dans les régions moyennement à peu touchées, alors que Alixan a mieux récupéré. A l’inverse les variétés Arezzo, Solehio, Barok, et Croisade ainsi

que les nouveautés Laurier et Rubisko ont beaucoup mieux toléré le gel hivernal de 2012, se classant nettement en tête dans les essais de l’Est et du Centre non protégés par la neige.

CONSEQUENCES POUR LES DECISIONS DE SEMISBien que les dégâts de gel cette année aient été alarmants, il ne faut pas perdre de vue qu’ils résultent de conditions exceptionnelles. Par conséquent, ils doivent nous permettre de comprendre les mécanismes, d’en tirer les leçons, mais surtout pas d’aboutir à des conclusions hâtives. Ce qu’il faut retenir de manière opérationnelle de l’hiver 2011-2012 :

- Date de semis : anticiper les dates de semis conduit à avancer les stades, et donc potentiellement atteindre le stade critique de transition florale pendant l’hiver, au moment où des chutes de températures fortes sont encore possibles è respecter les préconisations de couple date de semis x précocité variétale. Elles visent à minimiser les risques climatiques.

- Choix de la variété : ne pas juger trop vite de certaines variétés touchées cette année, alors qu’elles passent très bien en pluriannuel. Dans les zones froides (centre et est de la France, zones d’altitude), la note de résistance au froid du GEVES reste le critère le plus pertinent pour juger de l’adaptation de la variété aux conditions hivernales, sous réserve de respecter les dates de semis préconisées.

- Conduite : les situations à plus forte croissance (disponibilité d’azote, densité élevée) sont généralement plus pénalisées dans des cas de gel, car elles accélèrent la croissance et le développement en période de forte sensibilité.

Les plus résistants

Les plus sensibles

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