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Une étude expérimentale des prévisions des analystes

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UNE ÉTUDE EXPÉRIMENTALE DES PRÉVISIONS DES ANALYSTESET DE L'EFFICIENCE INFORMATIONNELLE DES MARCHÉS Thanh Huong Dinh et Jean-François Gajewski Lavoisier | Revue française de gestion 2005/4 - no 157pages 189 à 202

ISSN 0338-4551

Article disponible en ligne à l'adresse:

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion-2005-4-page-189.htm

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Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Huong Dinh Thanh et Gajewski Jean-François, « Une étude expérimentale des prévisions des analystes et de

l'efficience informationnelle des marchés »,

Revue française de gestion, 2005/4 no 157, p. 189-202. DOI : 10.3166/rfg.157.189-202

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Les prévisions des analystesfinanciers sont très utilesaux investisseurs sur lesmarchés financiers. Denouvelles recherchesmontrent cependant que des prévisions biaisées sontsusceptibles de constituerdes sources d’inefficience.Les auteurs construisentainsi une série de 10marchés expérimentaux surlesquels les prévisions desanalystes, diffusées auxinvestisseurs, peuvent êtrebiaisées et divergentes.Leurs conclusions montrentque les imperfectionscontenues dans cesprévisions entraînent desdéviations des prix detransaction par rapport à lavaleur fondamentale.L’ajustement des prix àcette valeur dépend dudegré de concordance desprévisions et de leurconvergence vers le résultatnet. De surcroît, la volatilitédes taux de rentabilité estd’autant plus grande que les prévisions des analystessont dispersées.

Le rôle principal des analystes financiers consiste àfournir des prévisions et des recommandationsd’achat ou de vente de titres au marché et, en par-

ticulier, aux investisseurs. Ils collectent ainsi des informa-tions auprès de différentes sources pour les interpréter, lesretraiter et les restituer de manière synthétique et intelli-gible afin de permettre aux investisseurs de prendre lesdécisions optimales. La fonction des analystes est doncfondamentale pour la communauté financière. De nom-breux articles ont ainsi examiné le contenu de ces prévi-sions et ont confirmé leur utilité pour les investisseurs(Stickel, 1991). De fait, Park et Pincus (2000) prouventqu’elles affectent directement les anticipations des inves-tisseurs et leur comportement à l’annonce des résultatscomptables. L’effet de surprise engendré par l’annonce durésultat provoque une réaction des investisseurs d’autantplus importante qu’elle est consécutive à une révision

D O S S I E R

PAR THANH HUONG DINH,JEAN-FRANÇOIS GAJEWSKI*

Une étude expérimentaledes prévisionsdes analystes

et de l’efficienceinformationnelle des marchés

* Les expériences ont été réalisées au Centre interuniversitaire pour larecherche en analyse des organisations de Montréal, grâce au soutienfinancier de l’IRG et de l’Institut de recherche de la Caisse des dépôtset consignations. Nous remercions C. Montmarquette pour son aideprécieuse et J. Héroux pour son assistance technique. Nous remercionségalement M. Albouy et I. Laudier.

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moyenne des prévisions de même sens. Lamoyenne de ces prévisions sert autrementdit, via le consensus, de référence aux inves-tisseurs pour estimer la fraction non anticipéedu résultat annuel. Les études empiriquesprouvent en effet que l’intensité de la réac-tion du marché à la publication des bénéficesest liée au degré de surprise correspondant(Gajewski et Quéré, 2001). Cette fractionnon anticipée estimée à partir des consensusexplique bien mieux les mouvements de prixà l’annonce que celles calculées par réfé-rence à des modèles économétriques tels quecelui basé sur une marche au hasard des pré-visions de résultat (Bamber, 1987).De multiples recherches prouvent cependantque les prévisions des analystes sont affec-tées de biais systématiques. Selon Abarba-nell et Bernard (1992), en utilisant desmodèles fondés sur les séries temporelles derésultat, les analystes finissent par com-mettre des erreurs de même nature que celledes investisseurs bien que leur magnitudesoit inférieure. Quelle que soit cette magni-tude, ces biais ont tendance à persister dansle temps et sont d’origine comportementale.Sont notamment recensés dans la littératurele biais d’optimisme (O’Brien, 1988; Dre-man et Berry, 1995), de pessimisme (Brown,1996), de sur-réaction (Debondt et Thaler,1990) et de sous-réaction (Abarbanell, 1991;Abarbanell et Bernard, 1992). Ces effetspeuvent avoir des influences mutuelles etEasterwood et Nutt (1999) montrent notam-ment que le biais d’optimisme est suscep-tible de conduire les analystes à sous-réagir àune mauvaise nouvelle et inversement à sur-réagir à une bonne nouvelle.Les biais de prévision des analystes peu-vent naturellement, en vertu de leur rôled’intermédiaire, influencer de manièreconsidérable le comportement des investis-

seurs sur les marchés financiers. DeBondtet Thaler (1990) prouvent que ceux-ci peu-vent expliquer jusqu’à 50 % de la sur-réac-tion du marché. D’après Abarbanell et Ber-nard (1992), les tendances boursières à longterme seraient même engendrées par la cor-rection de sous-réactions à court terme dumarché au titre d’un ensemble d’informa-tions antérieures dont font précisément par-tie les prévisions de ces analystes. Ces biaissystématiques n’empêchent pas les inves-tisseurs de continuer à accorder du créditaux prévisions des analystes.L’enjeu de cet article est ainsi d’analyser leseffets des prévisions des analystes sur lecomportement des investisseurs et sur lesprix qui se forment à l’équilibre. On pourraitpenser que la publication de ces prévisionsparticipe de l’efficience des marchés puis-qu’elle contribue à accroître le substrat d’in-formations qui l’alimente. Notre étude remeten cause le caractère systématique d’un telprésupposé pour précisément s’interrogersur l’influence positive ou négative de leurscaractéristiques sur les erreurs moyennes desprix et leur degré d’ajustement vers la valeurfondamentale. L’efficience informationnellepeut être également appréciée à partir duniveau de volatilité des taux de rentabilitésqui, dans le contexte d’un marché efficient,devraient d’un point de vue théorique évo-luer dans des marges raisonnables.L’impact des prévisions sur l’efficience desmarchés est ainsi examiné par la méthodeexpérimentale sous trois angles distincts :les erreurs qui les affectent, leur processusde révision et enfin, leur divergence.Contrairement à ce qui prévaut dans lesmarchés réels ou de multiples élémentsinteragissent, dans la méthode expérimen-tale, ces prévisions peuvent, bien entendu,être isolées d’autres sources d’information

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et d’autres facteurs de risque. Elles sont dif-fusées gratuitement et simultanément à tousles participants au début de chaque périoded’échange. Il n’existe donc pas d’asymétried’information entre les investisseurs et laseule source d’incertitude provient de cefait de la divergence et des erreurs de prévi-sion commises par les analystes. L’ap-proche expérimentale permet en effet demesurer l’incidence individuelle d’unevariable tout en maintenant l’autre à unniveau déterminé. Dans cette logique l’im-pact de la divergence des prévisions d’ana-lystes peut être estimé lorsque que leserreurs de prévision correspondantes sont« contrôlées » et réciproquement.Par construction, puisqu’il s’agit des seulesvariables prises en compte, les résultats del’étude montrent que même si les prévi-sions des analystes sont biaisées, elles ontune incidence sur les équilibres de prix desmarchés expérimentaux. Ce phénomènen’est pas propre aux expériences puisque laréalité montre que les investisseurs s’ap-puient de manière constante sur de tellesprévisions, même si elles sont biaisées. Lesinvestisseurs ne suivent donc ni naïvement,ni rationnellement les analystes et parvien-nent même à compenser partiellement leurserreurs dans la plupart des cas. De fait, lesopérateurs ont un avantage temporel dans lamesure où ils formulent leurs anticipationset prennent des décisions après la diffusiondes prévisions des analystes. De manièreimplicite, la vitesse d’ajustement des prix àla valeur fondamentale est corrélée positi-vement à la vitesse d’ajustement des prévi-sions des analystes au résultat net. Cet ajus-tement n’est cependant pas linéaire etdépend de l’hétérogénéité des prévisions,car les expériences montrent l’existenced’une relation croissante entre la volatilité

des taux de rentabilités et la dispersion desprévisions.L’article est organisé de la manière sui-vante. La première partie permet de faire lasynthèse des hypothèses et de décrire lesprotocoles expérimentaux alors que laseconde partie permet de présenter et d’ana-lyser les résultats obtenus.

I. – LA SYNTHÈSE DES HYPOTHÈSES

ET LA DESCRIPTION DES PROTOCOLESEXPÉRIMENTAUX

1. Les hypothèses

En construisant des expériences sur la basede prévisions systématiquement biaisées etdivergentes, un des enjeux de cet article estd’examiner comment les investisseursréagissent à ces écarts de prévisions. Lesmodèles à anticipations naïves et à antici-pations rationnelles permettent de caractéri-ser la réaction des individus à ces prévi-sions. Le premier modèle prédit que lesinvestisseurs suivent aveuglément les pré-visions et recommandations des analystes,alors que le deuxième modèle suggère aucontraire que les investisseurs parviennentà compenser partiellement les erreurs desanalystes. Cependant, ces deux modèlessemblent difficilement validés sur les mar-chés réels. Les opérateurs peuvent avoirtendance à suivre les analystes dans un pre-mier temps lorsqu’ils sont non expérimen-tés. Au fil du temps, l’acquisition d’expé-rience et de compétence devrait les aider àadopter un comportement plus rationnel encommettant moins d’erreurs. Ce phéno-mène d’apprentissage devrait permettred’observer une situation plutôt semi-ratio-nelle des marchés sur lesquels des investis-

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seurs expérimentés et non expérimentéscoexistent. À l’équilibre, les prix tiennentcompte des corrections apportées par cer-tains opérateurs et se rapprochent de lavaleur fondamentale. Cet ajustementdépend de la précision des prévisions desanalystes qui peut être mesurée par l’erreurde prévision, le biais de prévision ou encorele degré de concordance des prévisionsentre elles. Ceci permet ainsi de poser lapremière hypothèse.H1. À l’équilibre, les prix reflètent d’autantmieux la valeur fondamentale que les prévi-sions des analystes sont précises (sans biaiset concordantes).Si les erreurs de prévisions ne sont que par-tiellement compensées par les investisseurs,les prix d’équilibre se rapprochent de lavaleur fondamentale sans toutefois l’égaler.Il est par conséquent logique de s’intéresserà la vitesse de convergence des prix d’équi-libre vers la valeur fondamentale. Cettevitesse de convergence peut dépendre deplusieurs facteurs, et en particulier de lavitesse de convergence des prévisions versle résultat net et de la concordance des pré-visions. Ceci conduit à poser l’hypothèse 2suivante.H2. L’ajustement des prix à la valeur fon-damentale dépend du degré de concor-dance des prévisions et de leur convergencevers le résultat net.Dans un marché efficient, la volatilité desrentabilités boursières ne devrait pas êtreexcessive malgré les mouvements de fac-teurs tant endogènes qu’exogènes. Dansle cadre des marchés expérimentaux, leseul facteur exogène susceptible d’affec-ter la volatilité est constitué des prévi-

sions des analystes. Dans ce contexte, lavolatilité est par hypothèse positivementliée à la dispersion des prévisions desanalystes.H3. La volatilité des taux de rentabilité estpositivement corrélée à la dispersion desprévisions des analystes.

2. Les protocoles expérimentaux1

Dans l’expérience, les 81 participants sontregroupés en 10 marchés de 7 à 9 opéra-teurs. Chacun des participants commencel’expérience avec une dotation de20 actions d’un même titre et de 2000UME (unité de monnaie expérimentale).Leur rétribution provient des gains expéri-mentaux convertis en dollars canadiensauxquels s’ajoutent 10 dollars de prime departicipation. Les gains expérimentauxd’un participant proviennent de la précisionde ses anticipations et de la performance deses échanges. La rémunération s’élève à25 dollars canadiens en moyenne pour1h30 de participation.Le mécanisme de fonctionnement des mar-chés est celui des doubles enchères. Neufd’entres eux contiennent 12 périodesd’échange et un marché 6 périodes seule-ment. Chaque période peut être considéréecomme étant une année. À leur arrivée, lesparticipants reçoivent les instructionsécrites précisant les protocoles du jeu quisont ensuite expliqués oralement. Les sujetsont la possibilité de poser des questionspour comprendre clairement les règles dujeu. Ils doivent ensuite répondre à toutes lesquestions qui apparaissent graduellementsur l’écran de leur ordinateur avant de com-mencer l’expérience.

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1. Les instructions distribuées aux participants au début de l’expérience peuvent être demandées auprès des auteurs.

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Le mécanisme de formulation des prévisions des analystes

Sur chaque marché, il y a six analystesfinanciers informatisés qui donnent, audébut de chaque ronde d’échange, des pré-visions sur le résultat net. Ces dernièressont déterminées parmi les nombres natu-rels allant de 60 à 140 de manière à ce queleur moyenne soit toujours un nombre natu-rel. Le résultat annuel est la différence entrela moyenne des prévisions des analystes(partie anticipée du résultat) et un termed’erreur (partie non-anticipée du résultat).Le terme d’erreur contient un aléa et unetendance. Le terme aléatoire est tiré au sort,à la fin de chaque période, parmi lesnombres - 3, - 2, -1, 0, 1, 2 et 3. Samoyenne est égale à 0 et son écart-type à 2.Ce terme a pour objet de générer un lienincertain entre la moyenne des prévisionsdes analystes et le résultat annuel. Contrai-rement au terme aléatoire qui est défini dela même manière pour tous les résultatsannuels, le terme de tendance est déterminéde manière différenciée afin de pouvoirengendrer des prévisions optimistes, pessi-mistes ou sans biais. Le terme aléatoireintroduit un bruit dans la prévisionmoyenne des analystes alors que le termede tendance introduit un biais.Il s’agit d’analyser la divergence des prévi-sions des analystes tout en contrôlant leserreurs de prévision. Nous construisonsdonc 3 groupes de marchés avec des erreursde prévision de mêmes caractéristiques àl’intérieur de chaque groupe. Ces erreursreprésentent respectivement les prévisionsoptimistes, pessimistes et sans biais. Pourles prévisions optimistes, le terme de ten-dance est défini de manière à ce que leterme d’erreur soit toujours positif quelle

que soit la valeur finale du terme aléatoire.Il varie en effet de 6 à 9, ce qui entraîne quele terme d’erreur n’est jamais en dehors del’intervalle [3 ; 12]. De même, le terme detendance des prévisions pessimistes estconstruit de manière à toujours générer unterme d’erreur négatif. Il se situe effective-ment entre -6 et - 9. Cela a pour consé-quence que le terme d’erreur varie entre -3 et -12.

Le déroulement de l’expérience

Toutes les périodes se déroulent de la mêmemanière. Au début de la période, les prévi-sions individuelles des six analystes sontdiffusées à l’ensemble des participants. Cesderniers disposent alors de trente secondespour observer les prévisions. Ils doiventensuite communiquer leur propre antici-pation du résultat net correspondant à lapériode. La phase suivante est réservée auxéchanges entre les participants. Lespériodes sont indépendantes, donc lesordres non exécutés d’une période ne peu-vent pas entrer dans le carnet d’ordres de lapériode suivante. De plus, les dotations ini-tiales sont renouvelées au début de chaqueronde.L’expérience se déroule ainsi. Toutd’abord, les titres et l’argent initialementmis à la disposition des opérateurs sont vir-tuellement inscrits dans un compte infor-matique. À chaque période, les participantsplacent des ordres d’achat et/ou de vente àcours limité. Les ordres (caractérisés par laquantité, le prix et l’heure d’entrée) appa-raissent en continu sur tous les écrans d’or-dinateur, en précisant les meilleurs prix àl’achat et à la vente et le prix de transac-tion, le cas échéant. Les ordres sont centra-lisés dans un ordinateur qui permet de cal-

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culer immédiatement le prix d’exécution. Ily a transaction entre deux investisseurs dèsqu’ils soumettent des ordres compatiblesde sens opposé ou des ordres compatiblesavec un ou plusieurs ordres déjà dispo-nibles en carnet. Lorsque deux ordres sontassortis de la même limite, la priorité estdéterminée en fonction de l’heure de place-ment des ordres. Sinon, une exécution pro-portionnelle va s’appliquer à tous lesordres identiques en termes de prix, dequantité et d’heure. Les ventes à découvertne sont pas autorisées. Les ordres qui nesont pas encore exécutés peuvent être, aucours d’une période, modifiés, éliminés ougardés jusqu’à ce qu’il y ait des ordres desens opposé susceptibles d’entraîner uneexécution.À la fin de la période, un tirage au sort parordinateur permet de déterminer le termed’erreur et le terme de tendance et de cal-culer ensuite le résultat annuel de l’annéeéquivalente. Ce résultat est par définitionla différence entre la moyenne des prévi-sions des analystes diffusées au début dela période et le terme d’erreur déterminé(somme du terme aléatoire et du terme detendance). La valeur fondamentale du titreest par hypothèse égale au résultatannuel2. Il est donc possible de détermi-ner pour chaque opérateur ses erreursd’anticipation du résultat net ainsi que sesgains provenant de ses transactions effec-tuées au cours de la période. L’ensemblede ces chiffres est divulgué à chaque par-

ticipant de manière individuelle immédia-tement après l’annonce du résultat annuel.Au cours de l’expérience, les sujets ont ledroit de noter toutes les prévisions desanalystes diffusées au début de la périodeainsi que le résultat net annoncé à la fin dela période, à l’exclusion de toute autreinformation.

II. – LES RÉSULTATS ET LES INTERPRÉTATIONS

Avant de présenter les tableaux de résultatset leurs interprétations, il s’agit de préciserla manière dont les variables sont mesurées.Tout d’abord, l’erreur de prix est calculéepar la différence entre le prix de transactionet la valeur fondamentale du titre rapportéeà la valeur fondamentale. L’erreur de prévi-sion est calculée par la différence entre laprévision et le résultat net rapportée aurésultat net. La variation de prix (respecti-vement prévision) est mesurée par la diffé-rence entre les prix (respectivement prévi-sions) de deux périodes consécutives,normée par le prix moyen précédent (res-pectivement prévision moyenne précé-dente)3. La volatilité des taux de rentabilité estmesurée par l’écart type des taux de renta-bilité successifs à l’intérieur d’une mêmepériode. La dispersion des prévisions desanalystes est calculée par l’écart type desprévisions rapporté à la moyenne de toutesles prévisions.

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2. Cette hypothèse, non dévoilée aux opérateurs, est faite dans un objectif de simplification des calculs. Il serait pos-sible de faire une hypothèse plus complexe, mais ceci n’aurait aucun effet sur les résultats.3. Chacune des variables a d’autres mesures que celles susmentionnées en faisant varier la norme parmi les troisnormes suivantes : la prévision moyenne, le prix moyen et le résultat annuel (ou la valeur fondamentale). Cepen-dant, dans les tableaux de résultats qui suivent, une seule mesure est considérée. Les autres mesures donnent lesmêmes résultats.

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1. L’impact des prévisions des analystessur l’ajustement des prix à la valeur fon-damentale

Dans le contexte d’un marché efficient, leprix des titres reflète la valeur intrinsèque.Comme on connaît la « vraie valeur » desactifs sur les marchés expérimentaux, lesmesures d’efficience informationnelle peu-vent être fondées sur les distorsions entre lesprix de transaction et la valeur fondamentaledes titres. Nous reprenons ici une mesured’efficience de marché, notée EDM, fondéesur la différence à chaque période entre leprix et la valeur fondamentale du titreconstatée a posteriori (Theissen, 2000).Comme chaque marché expérimentalcontient 12 périodes, cette mesure d’effi-cience est calculée à partir de la moyennedes valeurs absolues des erreurs de prix detransaction rapportées à la valeur fonda-mentale comme suit :

(1) EDM = ^12

t = 1

où p t désigne le prix moyen des transactionset vt la valeur fondamentale de la période t.Cependant, une telle mesure ne fait pasapparaître le sens de la réaction du marché.Selon Fama (1998), les sous et sur-réac-tions peuvent se compenser. Le marchépeut sembler globalement efficient malgréla coexistence de ces deux phénomènes dits« anormaux ». Cependant, la constructiondes marchés expérimentaux de cette étudene fait pas apparaître ce phénomène, dans lamesure où il y a un contrôle des prévisionsen termes de biais et de divergence. Alors,nous pouvons déterminer un autre indica-teur qui est la moyenne des erreurs de pré-vision rapportées à la valeur fondamentale :

(2) EDMR= ^12

t = 1

où p t est le prix moyen des transactions et vtla valeur fondamentale de la période t.Les deux mesures d’efficience ci-dessusrésultent de la moyenne des erreurs de prixsur l’ensemble des périodes d’un marché.Deux autres indicateurs, révélant l’erreurmoyenne des prix de transaction sur uneseule période, peuvent également être utili-sés :

(3) EDMt = ^n

i = 1

(4) EDMRt = ^n

i = 1

où pit désigne le prix de la transaction i et nle nombre de transactions de la période t.Le tableau 1 montre que les prix de transac-tion dévient significativement de la valeurfondamentale. Ce résultat est établi que l’onconsidère les erreurs de prix de transactionavec ou sans valeur absolue. Ce résultat estaussi vérifié quel que soit le type de biais deprévision considéré. Même lorsque les pré-visions des analystes sont sans biais, lesprix d’équilibre ne reflètent pas la valeurintrinsèque.Les mesures d’efficience (EDM etEDMR) sont inférieures aux moyennesrespectives des écarts de prévision parrapport au résultat annuel, sauf sur lesmarchés où les prévisions sont sans biais.Cela prouve que les opérateurs tiennentcompte des erreurs de prévision et/ou desbiais de prévisions. Ils compensent par-tiellement les erreurs contenues dans lesprévisions des analystes et introduisentdes biais où il n’y en a pas. Deux raisons

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Tableau 1L’AJUSTEMENT DES PRIX À LA VALEUR FONDAMENTALE PAR TYPE

DE BIAIS DE PRÉVISION SELON LES DIFFÉRENTES APPROCHES

Moyenne des erreurs Moyenne des erreursType deMarché de prévision EDM de prévision EDMRprévision

en valeur absolue en valeur relative

Prévisions Marché 1 0,012 0,040** 0,007 – 0,025**sans biais Marché 2 0,010 0,016** 0,003 –0,012**

Marché 3 0,059 0,026** 0,059 0,013**Prévisions Marché 4 0,059 0,029** 0,059 0,029**optimistes Marché 5 0,064 0,063** 0,064 0,044**

Marché 6 0,065 0,038** 0,065 0,024**

Marché 7 0,057 0,041** –0,057 0,037**Prévisions Marché 8 0,051 0,036** –0,051 – 0,026**

pessimistes Marché 9 0,049 0,054** –0,049 –0,032**

Marché 10 0,054 0,047** –0,054 –0,039**

Note : pour chaque marché, la moyenne des erreurs de prix et la moyenne des erreurs de prévision ont été calculéessur 12 périodes en valeur absolue et en valeur relative. *, ** et *** désignent le degré de significativitérespectivement aux seuils de 10 %, 5 % et 1 %.

Note : à chaque période, la moyenne des erreurs de prix (sans valeur absolue) sur les 10 marchés a été déterminéeen considérant les trois catégories de biais. *, ** et *** désignent le degré de significativité respectivement auxseuils de 10 %, 5 % et 1 %.

Tableau 2L’AJUSTEMENT DES PRIX À LA VALEUR FONDAMENTALE PAR PÉRIODE

Toutes les données Prévisions optimistes Prévisions pessimistes

Période 1 – 0,080* – 0,039** – 0,105*

Période 2 – 0,045** – 0,043* – 0,053**

Période 3 – 0,030** – 0,023** – 0,036**

Période 4 – 0,043** – 0,050** – 0,047*

Période 5 – 0,035** – 0,043* – 0,035**

Période 6 – 0,034** – 0,035** – 0,043*

Période 7 – 0,026** – 0,040** – 0,017**

Période 8 – 0,046** – 0,060** – 0,039**

Période 9 – 0,030** – 0,022** – 0,036**

Période 10 – 0,039** – 0,044* – 0,042

Période 11 – 0,039** – 0,060 – 0,024**

Période 12 – 0,035** – 0,011** – 0,057**

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peuvent expliquer cette capacité des opé-rateurs à corriger les biais de prévision.Premièrement, les investisseurs bénéfi-cient d’un avantage temporel et ne pren-nent des décisions qu’après connaissancedes prévisions. Deuxièmement, sur lesmarchés, la concurrence entre les inves-tisseurs entraîne moins de distorsions duprix d’équilibre par rapport à la valeurfondamentale.Le tableau 2 permet de retrouver les résul-tats du tableau 1. Que l’on raisonne parmarché ou par période, les prix dévientsignificativement de la valeur intrinsèque.Le tableau 2 prouve également que leserreurs de prix n’évoluent pas de manièresignificative dans un sens particulier surl’ensemble des périodes. Le processusd’apprentissage ne semble pas validé dansla mesure où les erreurs de prix ne semblentpas diminuer au fur et à mesure despériodes.

L’influence des caractéristiques des prévi-sions des analystes sur les mesures d’effi-cience est analysée dans le tableau 3.Globalement, quel que soit le type de biaisde prévision, l’erreur de prévision moyennedes analystes financiers a un impact positifsur les 2 mesures d’efficience des marchés.Donc, lorsque les prévisions des analystescomportent des erreurs (aléa ou biais), lesindividus ne parviennent pas à compenserentièrement ces erreurs. Les prix d’équi-libre qui découlent de leurs transactionsintègrent ces erreurs. La déviation des prixde transactions de la valeur fondamentaleest d’autant plus forte que la prévisionmoyenne des analystes diffère du résultatfinal. En effet, des prévisions qui contien-nent des erreurs influencent les opérateursqui forment, par voie de conséquence, desanticipations erronées. Les ordres soumisconduisent alors à des équilibres de prix quis’écartent de la valeur intrinsèque.

Une étude expérimentale des prévisions des analystes 197

Note : la variable dépendante désigne une mesure d’efficience (mesures 3 et 4). La divergence des prévisions estmesurée par l’écart type des prévisions des analystes, rapporté à la moyenne de toutes les prévisions. L’erreur deprévision est calculée par la différence entre la moyenne des prévisions et le résultat annuel. Le nombred’observations est de 114 si on regroupe toutes les données, 48 (respectivement 48) si on ne tient compte que desprévisions optimistes (respectivement pessimistes). *, ** et *** désignent le degré de significativité respectivementaux seuils de 10 %, 5 % et 1 %.

Tableau 3L’INFLUENCE DES PRÉVISIONS DES ANALYSTES SUR L’AJUSTEMENT

DES PRIX À LA VALEUR FONDAMENTALE

Toutes les données Prévisions PrévisionsVariable optimistes pessimistes

EDM EDMR EDM EDMR EDM EDMR

Constante 0,003 0,009** – 0,023 0,05*** – 0,012 – 0,045***

Divergence des prévisions

0,071 0,151** 0,015

Erreur de prévision 0,563*** 0,631*** 0,73*** 1,252*** 1,025*** 1,48***

R2 ajusté 12,4 % 39,9 % 28,3 % 32,7 % 12,4 % 39,9 %

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De manière significative, les erreurs de pré-vision des analystes financiers ne permet-tent pas de considérer les prix de transac-tion comme des signaux parfaits de lavaleur fondamentale des actifs. Néanmoins,toutes données confondues, les coefficientsdes erreurs de prévision dans les régres-sions du tableau 3 sont plus petits que 1.Les investisseurs parviennent donc àdétecter et à compenser pour partie leserreurs de prévision. Ils commettent ainsides erreurs d’anticipations dans la mêmedirection que les analystes avec unemoindre amplitude. En d’autres termes, leprix devient positivement (respectivementnégativement) de la valeur intrinsèquelorsque les prévisions sont optimistes (res-pectivement pessimistes). Ces écarts deprix sont inférieurs aux erreurs de prévi-sion. On retrouve le résultat mis en évi-dence dans le tableau 1.Alors que les erreurs de prévision influen-cent négativement l’ajustement des prix à lavaleur fondamentale, la divergence des pré-visions n’a un impact sur l’efficience quedans le cas des prévisions optimistes. Encas de biais d’optimisme des analystes,l’accroissement de la dispersion des prévi-sions génère une plus grande déviation desprix de transaction, de la valeur intrinsèque.En effet, une plus grande dispersion ne per-met pas aux investisseurs de former desanticipations précises quant au résultat netfutur. La probabilité de se tromper dans leprocessus d’anticipations est plus forte, eten ce sens, les prix d’équilibre qui décou-lent des ordres soumis par les investisseursreflètent moins bien la valeur fondamentale.Il y a cependant une asymétrie de relationentre les prévisions optimistes et les prévi-sions pessimistes. Dans le second cas, leur

dispersion n’influence pas significative-ment l’ajustement des prix à la valeur fon-damentale. Ceci peut provenir d’une moinsgrande sensibilité des investisseurs aux pré-visions entachées d’un biais de pessimismelorsque leur dispersion s’accroît. Soit laprévision moyenne des analystes joue alorsun rôle plus important pour les investis-seurs, soit les prévisions sont moins suiviespar les investisseurs.

2. L’effet des prévisions des analystessur la vitesse de convergence des prixvers la valeur fondamentale

Globalement, sur les marchés expérimen-taux, les prix de transaction ne reflètent pasparfaitement la valeur fondamentale. Ledegré d’ajustement des prix à la valeurintrinsèque dépend de la précision des pré-visions, appréciée au travers de leur biais,de leur erreur et de leur concordance. Desprévisions, entachées de biais ou d’erreur,ou très hétérogènes détériorent la conver-gence des prix de transaction vers la valeurintrinsèque.L’intérêt de cette partie est de mesurer àquelle vitesse les prix vont converger versla valeur fondamentale. Cette vitesse, notée(βt), peut être mesurée par la différenceentre les prix de 2 périodes consécutives(pt -pt-1), divisée par la différence entre lavaleur fondamentale du titre à la période t(vt) et le prix de la période précédente (pt-1).La valeur fondamentale est par hypothèseégale au résultat annuel annoncé à la fin dechaque période.

(5) βt =

La vitesse de convergence de la prévisionvers le résultat annuel (VAP) est déterminée

pt – pt – 1}}vt – pt – 1

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de la même manière en remplaçant le prixpar la prévision et la valeur fondamentalepar le résultat annuel.Le tableau 4 met en évidence un coefficientsystématiquement inférieur à 1 dans le casdu biais d’optimisme. Les prix ne conver-gent pas rapidement vers la valeur fonda-mentale. En revanche, si les prévisions sontsystématiquement pessimistes, le coeffi-cient dépasse l’unité sur certaines périodes.En d’autres termes, les prix convergent trèsrapidement vers la valeur fondamentaleavec un effet de sur-réaction.La vitesse de convergence des prix vers lavaleur fondamentale dépend surtout de lavitesse d’ajustement des prévisions aurésultat net. Lorsque les prévisions sont

révisées et s’écartent de la valeur fonda-mentale, les prix d’équilibre s’éloignentégalement de la valeur fondamentale. L’er-reur de prévision moyenne éloigne égale-ment les prix de la valeur fondamentale,mais ce de manière non significative. Ladivergence des prévisions a tendance à rap-procher le prix de la valeur fondamentale,mais non significativement.Comme la qualité de la révision des prévi-sions des analystes affecte la vitesse d’ajus-tement des prix à la valeur fondamentale,elle devrait logiquement expliquer les driftsbousiers. Cette relation « révision-drift »rejoint les résultats de plusieurs recherches.Dische et Zimmermann (1999) ontconstruit une stratégie consistant à acheter

Une étude expérimentale des prévisions des analystes 199

Tableau 4LA VITESSE D’AJUSTEMENT DU PRIX À LA VALEUR INTRINSÈQUE

SUR LES 11 PÉRIODES

Toutes les données Prévisions optimistes Prévisions pessimistes

Période 2 0,382 0,358 0,193

Période 3 1,533 0,992 2,405

Période 4 0,972 0,883 1,123

Période 5 0,365 -0,219 0,777

Période 6 0,789 0,965 0,331

Période 7 1,028 0,633 1,425

Période 8 1,245 0,905 1,623

Période 9 0,847 0,827 0,969

Période 10 1,193 0,401 1,977

Période 11 0,696 0,667 0,674

Période 12 0,460 0,922 – 0,358

Note : la vitesse d’ajustement des prix à la valeur intrinsèque a été mesurée d’une période à l’autre à partir de ladeuxième période. Pour chaque période, une moyenne a été calculée sur les 10 marchés. Les observations quiprésentent un dénominateur égal à 0 ont été exclues de l’échantillon (soit 3 observations au total).

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des titres dont la révision des prévisions esten hausse et vendre des actions dans le cascontraire. Cette stratégie génère des profitsanormaux. Womack (1996) prouve que lesprix sont influencés par les recommanda-tions des analystes et que cette influence n’apas un effet immédiat au moment de l’an-nonce des recommandations, mais dans lesquelques mois qui la suivent. Ce retard meten évidence l’existence de tendances bour-sières exploitables.

3. L’impact des prévisions d’analystessur la volatilité des taux de rentabilités

Parmi les études qui abordent la réactiondes marchés à l’annonce d’une information,certaines examinent la volatilité des taux derentabilité (Beaver, 1968). En effet, uneaugmentation de la volatilité peut traduirel’arrivée d’information sur les marchés. Cetaccroissement de volatilité est peut-être lié

à l’imprécision de l’information contenuedans les prévisions des analystes dans le casprésent. Ceci nous conduit à tester la rela-tion entre la divergence des prévisions desanalystes et la volatilité des taux de rentabi-lités. En régressant la volatilité sur la diver-gence des prévisions, nous obtenons lesrésultats du tableau 6.Le tableau 6 montre que la volatilité destaux de rentabilités est expliquée en partiepar la dispersion des prévisions. Cette dis-persion génère un type de risque lié aumanque d’informations ou à l’imprécisionde l’information contenue dans les prévi-sions des analystes.Les résultats obtenus permettent deconclure que les inefficiences de marchédécoulent non seulement de l’utilisationincorrecte des informations disponiblespar les investisseurs mais aussi de l’im-perfection des informations elles-mêmes.

200 Revue française de gestion

Tableau 5L’IMPACT DES PRÉVISIONS DES ANALYSTES SUR LA VITESSE

D’AJUSTEMENT DES PRIX À LA VALEUR INTRINSÈQUE

Toutes les données Prévisions PrévisionsVariable optimistes pessimistes

Constante – 0,284* 0,772*** – 0,874*** – 0,208 – 0,293 – 0,414

Adjustement des prévisions 1,124*** 1,111*** 1,056*** 1,375***

Erreur de prévision 3,029 0,477 4,343 – 3,7411

Divergence des prévisions – 0,991 – 0,492 – 2,355 1,182

R2 ajusté 39,5 % 1,3 % – 0,5 % 38,4 % 65,4 % 37,1 %

Note : la variable dépendante représente la vitesse d’ajustement du prix à la valeur intrinsèque. L’échantillon globalcomprend 104 observations. L’échantillon des prévisions optimistes (respectivement pessimistes) comprend 44observations (respectivement 44). Les observations qui présentent un dénominateur égal à 0 ont été exclues del’échantillon (soit 3 observations au total). *, ** et *** désignent le degré de significativité respectivement auxseuils de 10 %, 5 % et 1 %.

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En présence des prévisions biaisées, lecomportement des investisseurs ne semontre ni naïf, ni parfaitement rationnel,mais plutôt semi-rationnel. Une desconséquences est que les erreurs com-mises par les analystes expliquent unepartie des « inefficiences » des prix. Ceconstat est cohérent avec ceux des étudesempiriques antérieures comme celle deDeBondt et Thaler (1987) qui montrentque la sous-réaction des analystes peutexpliquer jusqu’à 50 % des tendancesboursières.

CONCLUSION

En construisant des marchés expérimentauxsur lesquels l’information est gratuite et dif-fusée à tous les individus simultanément,l’objectif de cet article est d’examiner l’in-fluence des prévisions des analystes surl’ajustement des prix de transaction à la

valeur fondamentale. Les résultats montrenttout d’abord qu’il y a des distorsionsmoyennes du prix de transaction par rap-port à la valeur fondamentale significative-ment différente de zéro. Le degré d’ajuste-ment des prix à la valeur fondamentale estloin d’être parfait et dépend de la précisiondes prévisions des analystes. Des prévisionsbiaisées et hétérogènes influencent négati-vement la convergence des prix vers lavaleur fondamentale. La vitesse d’ajuste-ment des prix à la valeur intrinsèque estcorrélée positivement à la vitesse deconvergence des prévisions vers le résultatannuel. De surcroît, la volatilité des taux derentabilité devient plus forte lorsque la dis-persion des prévisions des analystes s’ac-croît. Ces sources d’inefficience sont nonseulement liées à l’utilisation incorrecte desinformations diffusées, mais aussi à l’im-perfection de l’information contenue dansles prévisions d’analystes.

Une étude expérimentale des prévisions des analystes 201

Tableau 6L’IMPACT DE LA DIVERGENCE DES PRÉVISIONS DES ANALYSTES

SUR LA VOLATILITÉ DES RENTABILITÉS

Toutes les données Prévisions PrévisionsVariable optimistes pessimistes

Constante 0,018*** 0,014** 0,021***

Divergence des prévisions 0,174*** 0,253 0,127***

R2 34,4 % 44,2 % 31,2 %

Note: la variable dépendante représente la volatilité des taux de rentabilité. La divergence des prévisions estmesurée par l’écart-type des prévisions des analystes rapporté à la moyenne de toutes les prévisions. L’échantillonglobal comprend 114 observations. L’échantillon des prévisions optimistes (respectivement pessimistes) comprend48 observations (respectivement 48). *, ** et *** désignent le degré de significativité respectivement aux seuils de10 %, 5 % et 1 %.

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