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Pour citer cet article : Futier E, Bazin J-E. Utilisation de la ventilation non invasive dans la période postopératoire. Le Praticien en anesthésie réanimation (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.pratan.2014.03.009 ARTICLE IN PRESS Modele + PRATAN-477; No. of Pages 6 Le Praticien en anesthésie réanimation (2014) xxx, xxx—xxx Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com RUBRIQUE PRATIQUE Utilisation de la ventilation non invasive dans la période postopératoire Use of non invasive ventilation during the postoperative period Emmanuel Futier 1 , Jean-Etienne Bazin ,1 Service d’anesthésie réanimation Estaing, pôle médecine périopératoire, CHU de Clermont-Ferrand, 1, place Lucie-et-Raymond-Aubrac, 63001 Clermont-Ferrand cedex, France MOTS CLÉS Ventilation non invasive ; Aide inspiratoire ; Insuffisance respiratoire postopératoire ; Complications respiratoires postopératoires Résumé Le terme de « ventilation non invasive » (VNI) regroupe l’ensemble des techniques d’assistance ventilatoire visant à maintenir une ventilation alvéolaire en prenant en charge tout ou partie du travail respiratoire en l’absence de dispositif intratrachéal. L’utilisation de la VNI a pour objectif de compenser tout ou partie des atteintes de la fonction ventilatoire liées à la chirurgie en diminuant le travail des muscles respiratoires, en améliorant la ventilation alvéolaire, les échanges gazeux et en diminuant les atélectasies. Lors de la période postopé- ratoire après une chirurgie lourde, l’application précoce d’une ventilation non invasive à visée prophylactique peut permettre de réduire le risque de complications respiratoires. L’utilisation de la VNI pour le traitement curatif de patients présentant une insuffisance respiratoire aiguë postopératoire doit être prudente, respecter les contre-indications et éliminer une complica- tion chirurgicale. La place de la VNI dans le traitement des insuffisances respiratoires aiguës postopératoires est encore mal établie, en raison principalement du manque de puissance des études randomisées contrôlées actuellement disponibles. © 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (J.-E. Bazin). 1 Photo. http://dx.doi.org/10.1016/j.pratan.2014.03.009 1279-7960/© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Utilisation de la ventilation non invasive dans la période postopératoire

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Le Praticien en anesthésie réanimation (2014) xxx, xxx—xxx

Disponible en ligne sur

ScienceDirectwww.sciencedirect.com

RUBRIQUE PRATIQUE

Utilisation de la ventilation non invasivedans la période postopératoire

Use of non invasive ventilation during the postoperative period

Emmanuel Futier1, Jean-Etienne Bazin ∗,1

Service d’anesthésie réanimation Estaing, pôle médecine périopératoire, CHU deClermont-Ferrand, 1, place Lucie-et-Raymond-Aubrac, 63001 Clermont-Ferrand cedex, France

MOTS CLÉSVentilation noninvasive ;Aide inspiratoire ;Insuffisancerespiratoirepostopératoire ;Complicationsrespiratoirespostopératoires

Résumé Le terme de « ventilation non invasive » (VNI) regroupe l’ensemble des techniquesd’assistance ventilatoire visant à maintenir une ventilation alvéolaire en prenant en chargetout ou partie du travail respiratoire en l’absence de dispositif intratrachéal. L’utilisation de laVNI a pour objectif de compenser tout ou partie des atteintes de la fonction ventilatoire liéesà la chirurgie en diminuant le travail des muscles respiratoires, en améliorant la ventilationalvéolaire, les échanges gazeux et en diminuant les atélectasies. Lors de la période postopé-ratoire après une chirurgie lourde, l’application précoce d’une ventilation non invasive à viséeprophylactique peut permettre de réduire le risque de complications respiratoires. L’utilisationde la VNI pour le traitement curatif de patients présentant une insuffisance respiratoire aiguëpostopératoire doit être prudente, respecter les contre-indications et éliminer une complica-tion chirurgicale. La place de la VNI dans le traitement des insuffisances respiratoires aiguëspostopératoires est encore mal établie, en raison principalement du manque de puissance des

études randomisées contrôlées actuellement disponibles.© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Pour citer cet article : Futier E, Bazin J-E. Utilisation de la ventilation non invasive dans la période postopératoire. LePraticien en anesthésie réanimation (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.pratan.2014.03.009

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (J.-E. Bazin).

1 Photo.

http://dx.doi.org/10.1016/j.pratan.2014.03.0091279-7960/© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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2 E. Futier, J.-E. Bazin

KEYWORDSNon invasiveventilation;Airway pressuresupport;Postoperativerespiratory failure;Postoperativerespiratorycomplications

Summary The term ‘‘non invasive ventilation’’ (NIV) includes all ventilatory supportive tech-niques to maintain alveolar ventilation by assuming all or part of the work of breathing withoutintratracheal device. The aim of NIV is to offset all or part of the affected lung functionassociated with surgery by reducing the work of breathing muscles, improving alveolar ventila-tion, gas exchange and reducing atelectasis. During the postoperative period of major surgery,early application of prophylactic non invasive ventilation can reduce the risk of ventilatorycomplications. Using NIV to assist patients with acute postoperative respiratory failure shouldbe done cautiously, respecting contra-indications after excluding a surgical complication. Theplace of NIV in the treatment of acute postoperative respiratory failure is still not established,mainly due to the lack of power of randomized controlled trials currently available.© 2014 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

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ntroduction

’utilisation de la ventilation non invasive (VNI) a étéroposée dès la fin des années 1990 pour traiter les insuf-sances respiratoires aiguës (IRA) d’origine cardiogénique,

es décompensations aiguës de bronchopathies chroniquesbstructives et pour éviter une intubation orotrachéalerolongée avec son risque de complications spécifiquesprès transplantation d’organes. La place de la VNI danse traitement des IRA postopératoires est encore mal éta-lie, en raison principalement du manque de puissance destudes randomisées contrôlées actuellement disponibles.ependant, son utilisation pour prévenir une ré-intubationrachéale (utilisation préventive) ou pour traiter une IRA enostopératoire (utilisation curative) a été rapportée danses études observationnelles et/ou randomisées portant sure petits échantillons de patients après chirurgie thora-ique, abdominale ou cardiaque. Une enquête conduite en001 en France a rapporté que la VNI était utilisée comme leraitement de première intention d’une IRA postopératoirear 69 % des réanimateurs [1]. Les objectifs de cet articleont de rappeler le rationnel en faveur d’une utilisation dea VNI en postopératoire, de présenter les résultats princi-aux de quelques travaux ayant évalué l’intérêt de la VNIréventive et curative dans le contexte de la chirurgie et deappeler les précautions de son utilisation dans ce contexte.

ationnel de l’utilisation de la VNI enostopératoire

a survenue d’une hypoxémie postopératoire est observéeans les suites opératoires chez 30 % à 50 % des patientsprès chirurgie abdominale et/ou thoracique [2]. Il a étéapporté que 5 % à 10 % de tous les patients chirurgicauxt que 9 % à 40 % de ceux opérés d’une chirurgie abdomi-ale développent au moins une complication pulmonaireostopératoire (atélectasies, pneumopathie ou insuffisanceespiratoire aiguë) [3].

Pour citer cet article : Futier E, Bazin J-E. Utilisation de la vePraticien en anesthésie réanimation (2014), http://dx.doi.org/

La survenue d’une complication respiratoire postopéra-oire est très fréquemment le mode de révélation d’uneomplication chirurgicale (fistule anastomotique, abcèsntra-abdominal, etc.), et impose un diagnostic et un

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raitement précoces. La chirurgie, ce d’autant que son sitest proche des effecteurs de la commande ventilatoire, laouleur postopératoire et l’anesthésie générale, par la dimi-ution résiduelle du tonus musculaire, sont responsables’une dysfonction ventilatoire postopératoire [4]. Cette dys-onction ventilatoire, qui intéresse aussi bien la fonctionompe (c’est-à-dire les muscles respiratoires et tout par-iculièrement le diaphragme) que la fonction échangeur (leoumon lui-même), peut persister plusieurs jours après lahirurgie [5] et expose au risque d’une insuffisance respi-atoire aiguë (IRA) postopératoire. L’intubation trachéalet la ventilation mécanique constituent le traitement deéférence d’une IRA postopératoire. Plusieurs travaux ontontré qu’une ré-intubation pour IRA expose le patient aux

omplications spécifiques de l’intubation [6] et de la ven-ilation mécanique (complications infectieuses notamment)insi qu’à une augmentation de la mortalité postopératoire7].

Le développement d’une dysfonction ventilatoire post-pératoire, mais aussi et surtout, la nécessité d’éviter leecours à une intubation orotrachéale, constituent le sup-ort physiopathologique d’une assistance ventilatoire nonnvasive postopératoire. L’utilisation de la VNI postopéra-oire, en utilisant une PEP seule (CPAP pour continuousositive airway pressure) ou associée à de l’aide ins-iratoire (AI), peut se concevoir de deux facons : laremière consiste en une application « prophylactique »u préventive afin d’éviter l’apparition d’une insuffisanceespiratoire postopératoire ; la seconde consiste en unepplication « curative » chez des patients présentant uneRA. L’utilisation de la VNI a pour objectif de compenser toutu partie des atteintes de la fonction ventilatoire en dimi-uant le travail des muscles respiratoires, en améliorant laentilation alvéolaire, les échanges gazeux et en diminuantes atélectasies [8].

rincipes généraux d’utilisation de laentilation non invasive

ntilation non invasive dans la période postopératoire. Le10.1016/j.pratan.2014.03.009

e terme de « ventilation non invasive » regroupe l’ensemblees techniques d’assistance ventilatoire visant à mainte-ir une ventilation alvéolaire en prenant en charge tout

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ou partie du travail respiratoire en l’absence de disposi-tif trachéal. Le choix de l’interface patient—ventilateur(masque naso-buccal habituellement, plus rarement nasalou par casque intégral), guidé par la morphologie du patient,la présence d’une sonde gastrique et le type de modeventilatoire utilisé [9], est primordial en déterminant latolérance du patient et l’importance des fuites (respon-sables d’asynchronies patient—ventilateur) et conditionnefréquemment l’efficacité du traitement [10]. Si aucun typed’interface n’a montré sa supériorité dans le contexte de laVNI postopératoire, il est souvent recommandé de pouvoirdisposer de plusieurs types d’interface afin de s’adapter aumieux aux caractéristiques de chaque patient. De même,plusieurs types de ventilateurs peuvent être utilisés maisil est souhaitable, lors de l’utilisation de ventilateur deréanimation (par opposition aux ventilateurs « dédiés VNI »),de disposer de ventilateurs dotés de logiciels prenant encompte les fuites (compensation des fuites) afin de limiterle risque d’asynchronie et d’améliorer le confort du patient[11].

Deux types de régimes ventilatoires sont utilisés en rou-tine clinique : la ventilation spontanée en pression positivecontinue, VS-PPC (ou CPAP), et la ventilation spontanéeavec aide inspiratoire (VS-AI) associée à une pression expi-ratoire positive (PEP) (ou BIPAP pour bilevel positive airwaypressure). La CPAP est une méthode délivrant une pressionpositive continue, inspiratoire et expiratoire, grâce à un dis-positif générant un haut débit de gaz (plus rarement uncompresseur portable). L’augmentation de pression intra-thoracique générée en CPAP permet :• de limiter le collapsus des voies aériennes ;• de prévenir ou limiter la formation d’atélectasies ;• de maintenir la capacité résiduelle fonctionnelle (CRF) ;• de réduire la post-charge ventriculaire gauche et

d’augmenter le débit cardiaque [8].

En outre, la CPAP permet de réduire modestement le tra-vail respiratoire en contrebalancant partiellement la chargeinspiratoire imposée par la présence d’une auto-PEP (ou PEPintrinsèque) chez certains patients obstructifs.

Le mode VS-AI est un mode ventilatoire asservi à lacommande ventilatoire du patient. La pressurisation desvoies aériennes, jusqu’au niveau de pression sélectionnée,prend effet lors de la détection d’une chute de débit (oude pression) au moment de l’effort inspiratoire du patient.L’expiration survient en réponse à la détection d’une modi-fication de débit ou d’une chute de pression en dessous duseuil (ou trigger) expiratoire sélectionné (habituellementfixé à 25 % du débit inspiratoire maximal du patient). Lasingularité du mode VS-AI repose sur la possibilité pour lepatient de contrôler sa fréquence respiratoire et son tempsinspiratoire. L’efficacité de la CPAP sur les échanges gazeuxprocède principalement d’une augmentation de pressionalvéolaire et de pression partielle alvéolaire en oxygène(PAO2). Contrairement à l’utilisation d’une PEP seule, l’aideinspiratoire fournit une réponse physiologique plus adaptée(notamment en termes de diminution de charge venti-latoire) et permet une diminution plus marquée de la

Pour citer cet article : Futier E, Bazin J-E. Utilisation de la vePraticien en anesthésie réanimation (2014), http://dx.doi.org/

dyspnée [8]. L’essentiel de l’expérience clinique rapportéede l’utilisation de la VNI chez des patients chirurgicaux alongtemps été cantonnée à celle d’une utilisation de la CPAPafin de prévenir le développement d’une IRA postopératoire

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PRESSratoire 3

utilisation prophylactique) mais pas à une utilisation de laPAP à visée curative [12].

rincipaux réglages des modes CPAP etS-AI en VNI

’utilisation d’une pression de 7 à 10 cmH2O est habi-uellement requise en CPAP pour maintenir une pressionrachéale positive durant la totalité du cycle respiratoire.n revanche, il est difficile de proposer un réglage univer-el ou une seule combinaison du couple AI et PEP en VNI,eux-ci devant être idéalement adaptés pour chaque patienttitration individuelle) pour réduire la dyspnée et améliorer’oxygénation. Il est toutefois possible de retenir que :

le niveau d’aide inspiratoire (AI) doit être initialementde 3 à 5 cmH2O et augmenté par paliers de 2 cmH2O afind’obtenir un volume courant expiré (VTe) de 6—8 mL/kgde poids idéal théorique (PIT) ;le niveau de PEP peut être réglé à 3—5 cmH2O en débutde séance, puis augmenté progressivement sans dépasserune assistance totale (AI + PEP) de 25 cmH2O ;la FiO2 est réglée initialement à 100 % puis rapidementdiminuée pour maintenir une SpO2 (ou SaO2) ≥ 92 % ;le trigger inspiratoire (c’est-à-dire l’effort inspiratoireque doit fournir le patient pour déclencher l’insufflationet la pressurisation des voies aériennes), qu’il soit endébit ou en pression, doit être réglé à la valeur minimalesans générer d’auto-déclenchement ;la pente de pressurisation (ou temps de montée en pres-sion, c’est-à-dire le temps nécessaire pour atteindre ledébit maximal) doit être la plus rapide possible (entre 0 et0,2 sec) chez les patients présentant une IRA. La pentepourra être diminuée si le débit inspiratoire est jugé tropimportant par le patient ;le trigger expiratoire conditionne la durée du temps ins-piratoire. Le cyclage expiratoire peut être réglé en % dudébit inspiratoire maximal ou selon un temps inspiratoiremaximal. Il est habituellement recommandé de conserverle réglage par défaut de 25 % du débit inspiratoire maxi-mal, à l’exception des patients obstructifs pour lesquelsun cyclage jusqu’à 60 % du débit inspiratoire maximal peutêtre requis pour limiter les asynchronies.

Il n’existe pas de recommandations formalisées quant àa durée optimale des séances de VNI. Il est habituellementroposé d’administrer des séances de facon séquentielle. Laurée des séances et l’intervalle entre séances peuvent allere 30 à 60 minutes toutes les 2 à 4 heures lors d’une VNI pré-entive, à 60—90 minutes toutes les 2 à 3 heures en curatif.l est important de rappeler que l’absence d’améliorationvoire une aggravation) de la symptomatologie présentéear le patient en situation d’IRA, en dépit de réglages adap-és, ne doit pas faire retarder une intubation trachéale.l a été montré que le retard d’intubation de patients’aggravant sous VNI est un facteur de risque de surmortalité13].

Enfin, la surveillance des patients traités en VNI est un

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lément essentiel et indissociable du traitement lui-même.elle-ci repose essentiellement sur des données cliniquesn faveur d’une diminution des signes de lutte, d’unemélioration des signes d’hypercapnie et/ou d’hypoxie et

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ur l’évaluation de la tolérance/confort du patient. Laecherche de complications, notamment de lésions cutanéesu escarre, et de signes d’intolérance (sécheresse oculaireu buccale) doit être systématique.

ndications de la VNI en postopératoire

NI prophylactique

n chirurgie abdominale, la période postopératoire est mar-uée par une hypoxémie chez 30 à 50 % des patients. Si lalupart sont réversibles sous traitement standard (oxygéno-hérapie et kinésithérapie), 8 à 10 % des patients nécessitentne mise sous ventilation mécanique contribuant à aug-enter la morbidité, la mortalité et les durées de séjour

n réanimation et à l’hôpital [14]. Plusieurs travaux ontvalué l’intérêt de la VNI préventive en postopératoiree chirurgie abdominale majeure et ont montré un béné-ce de la VNI (CPAP principalement dans cette indication)’autant plus important que les séances étaient instau-ées précocement (dès l’extubation) et rapprochées lorses premières heures après extubation. Dans une étuderospective multicentrique incluant 209 patients randomi-és en deux groupes — un groupe traité par VNI (CPAP de,5 cmH2O, n = 105) et un groupe contrôle recevant une oxy-énothérapie conventionnelle au masque facial (n = 104) —quadrone et al. [14] ont montré que les patients trai-és par CPAP en présence d’une hypoxémie (définie parn rapport PaO2/FiO2 < 300) en postopératoire de chirur-ie étaient moins à risque d’intubation (1 % versus 10 %,

= 0,005), de pneumopathie (2 % versus 10 %, p = 0,02) et deepsis (2 % versus 9 %, p = 0,03) que les patients du groupeémoin. Kindgen-Milles et al. [15] ont étudié l’effet d’unepplication systématique d’une CPAP de 10 cmH2O pendant2—24 heures en postopératoire d’une chirurgie de cure’anévrysme de l’aorte thoraco-abdominale. Les patientsraités de facon préventive en CPAP présentaient moinse complications respiratoires (hypoxémie, atélectasies eté-intubation) et une diminution de la durée de séjour hos-italier.

Une étude physiologique d’Aguilo et al. [16] a montrée bénéfice (en termes d’amélioration de l’oxygénation)t la faisabilité de la VNI à visée prophylactique chez0 patients opérés d’une chirurgie de résection pulmo-aire. L’étude francaise de Perrin et al. [17] a évaluée bénéfice de la VNI prophylactique (administrée pen-ant 7 jours en pré-opératoire et 3 jours en postopératoire’une résection pulmonaire) par rapport à un groupe deatients bénéficiant d’une prise en charge standard. Lesolumes pulmonaires et la PaO2 à la 2e heure postopéra-oire étaient significativement plus élevés dans le groupeNI que dans le groupe non traité. En postopératoire (à j1,2 et j3), la PaO2 était significativement améliorée dans leroupe VNI et la PaCO2 significativement plus basse. La durée’hospitalisation était significativement plus longue dans leroupe témoin.

Le syndrome restrictif après chirurgie cardiaque est

Pour citer cet article : Futier E, Bazin J-E. Utilisation de la vePraticien en anesthésie réanimation (2014), http://dx.doi.org/

énéralement moins marqué qu’après chirurgie thoraciqueu abdominale [4]. Dans une étude incluant 96 patients ran-omisés en 3 groupes, Matte et al. [18] ont évalué l’effete l’utilisation préventive de la VNI dans les 2 jours après

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PRESSE. Futier, J.-E. Bazin

hirurgie : le premier groupe de patients bénéficiait d’uneeure de VNI (niveau moyen d’AI de 12 cmH2O et une PEPe 5 cmH2O) toutes les 3 heures ; le second groupe rece-ait une heure de CPAP à 5 cmH2O toutes les 3 heures ; ete troisième groupe, 20 minutes de spirométrie incitativeoutes les 2 heures. L’utilisation de la VNI, que ce soit à unu deux niveaux de pression, était associée à une amélio-ation de l’oxygénation et une diminution moins marquéees volumes pulmonaires. Toutefois, l’incidence des até-ectasies était comparable (12 à 15 %) dans les 3 groupes.asquina et al. [19] ont comparé les effets de l’applicationystématique de 30 minutes de CPAP à 5 cmH2O et de VS-AIAI + 10 cmH2O, PEP 5 cmH2O) chez 2 groupes de 75 patients.e groupe VS-AI présentait un meilleur score radiologiqueans différence statistiquement significative des paramètres’oxygénation entre les groupes. Plus récemment, dans unetude prospective randomisée incluant 500 patients opérés’une chirurgie cardiaque, Zarbock et al. [20] ont rap-orté l’intérêt d’une CPAP prophylactique de 10 cmH2Oppliquée 6 h/jour (groupe intervention) par rapport à unerise en charge standard associant 10 minutes de CPAP

10 cmH2O toutes les 4 heures (groupe témoin). Danse groupe interventionnel, l’utilisation de CPAP réduisait’incidence des complications pulmonaires (pneumopathiest ré-intubation) et le taux d’admission en réanimation.

Enfin, en compilant les données de 9 essais randomi-és contrôlés, une méta-analyse récente a montré uneéduction du risque de complications respiratoires post-pératoires (pneumopathies et atélectasies) et du risque’intubation trachéale par l’utilisation de CPAP en post-pératoire par rapport à l’administration d’oxygène et lainésithérapie respiratoire (réduction du risque de 0,34IC95 % 0,15—0,48] ; ceci correspondant à un nombre néces-aire de patients à traiter pour observer la réduction d’uneomplication respiratoire de 14,2 [IC95 % 9,9—32,4]) [12].

NI curative

eu de travaux (la plupart réalisés sur de petits collectifs)nt montré la faisabilité et l’efficacité de la VNI curativeprès chirurgies thoraciques et/ou abdominales [3]. Jabert al. [21] ont rapporté leur expérience de la pratique dea VNI chez 72 patients présentant une IRA en postopéra-oire d’une chirurgie abdominale. Dans ce travail prospectif,’utilisation de la VNI a permis d’éviter une intubationrachéale chez 48 (67 %) patients. Varon et al. [22] ont éva-ué la faisabilité de la VNI postopératoire chez 60 patientsrésentant une IRA après une chirurgie de résection car-inologique. Dans cette série, les auteurs rapportaientue 70 % des patients avaient évité une ré-intubation tra-héale. Dans une étude cas-contrôle, Michelet et al. [23]nt comparé l’efficacité de la VNI au traitement standardhez 36 patients présentant une IRA postopératoire aprèssophagectomie. Les auteurs retrouvaient une fréquenceoindre d’intubation trachéale, de SDRA, de lâchage anas-

omotique ainsi qu’une réduction de la durée de séjour enéanimation avec l’utilisation de la VNI. Dans une étuderospective et randomisée, Auriant et al. [24] ont montré

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’efficacité de la VNI pour traiter une IRA après résectionulmonaire. Dans ce travail, par comparaison au groupetandard (oxygénothérapie, kinésithérapie et bronchodila-ateurs), la VNI était associée à une réduction du recours

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à la ventilation invasive (21 % versus 50 %) et à une réduc-tion de la mortalité (13 % versus 38 %). Récemment, dans uneétude observationnelle portant sur 690 patients à risque decomplications après résection pulmonaire, Lefebvre et al.[25] ont confirmé la faisabilité et l’efficacité de l’utilisationprécoce de la VNI pour le traitement d’une IRA après résec-tion pulmonaire. Sur une période de 4 ans, 16 % des patientsont développé une IRA traités par VNI avec un taux de succèsde la VNI de 85 %.

Contre-indications de la VNI enpostopératoire

Les contre-indications générales de l’utilisation de la VNIont été rappelées par la conférence de consensus de laSociété francaise d’anesthésie et réanimation (SFAR) de2006. Celles-ci incluent :• environnement non adapté : patient non coopérant,

agité ;• intubation imminente ;• épuisement respiratoire ;• arrêt cardio respiratoire, instabilité hémodynamique ;• défaillance multiviscérale ;• vomissements incoercibles, incapacité à protéger les

voies aériennes ;• traumatisme craniofacial grave ;• pneumothorax non drainé, plaie thoracique soufflante.

ConclusionIndépendamment de la présence de complications post-opératoires, les chirurgies abdominales et/ou thoraciquessont responsables de profondes modifications de la fonctionrespiratoire. La survenue d’une IRA postopératoire affectelourdement le pronostic du patient chirurgical. Lors de lapériode postopératoire, l’application précoce de la VNI àvisée prophylactique peut permettre de réduire le risquede complications respiratoires. Avant d’initier la VNI enpostopératoire chez un patient présentant une complica-tion respiratoire, il est impératif d’éliminer au préalablel’existence d’une complication chirurgicale. L’utilisation dela VNI pour le traitement curatif de patients présentant uneIRA postopératoire doit être prudente, respecter les contre-indications d’usage et ne doit, en aucun cas, faire retarderune intubation trachéale. Les résultats de l’étude multicen-trique francaise NIVAS, conduite par l’équipe de Montpellier,devraient permettre de clarifier l’intérêt et la place del’utilisation de la VNI pour le traitement des patients pré-sentant une IRA postopératoire.

Déclaration d’intérêtsLes auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enrelation avec cet article.

Pour citer cet article : Futier E, Bazin J-E. Utilisation de la vePraticien en anesthésie réanimation (2014), http://dx.doi.org/

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