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Université de Lyon Université lumière Lyon 2 Institut d'Études Politiques de Lyon La Gouvernance Économique Mondiale au XXIème siècle: un cadre de lutte contre les crises systémiques? Charlyne Fabre-Restivo Mémoire de Master Revisiter l'articulation globalisation, commerce et développement. 2011 - 2012 Sous la direction de : Emmanuelle Ganne & Mustapha Sadni-Jallab Membres du jury :- Mustapha Sadni-Jallab - René Sandretto (Soutenu le : 3 septembre 2012 ) Charlyne Fabre-Restivo 2012 1

Mémoire de Master. Charlyne Restivo. Institut d'Etudes Politiques de Lyon

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Page 1: Mémoire de Master. Charlyne Restivo.  Institut d'Etudes Politiques de Lyon

Université de LyonUniversité lumière Lyon 2

Institut d'Études Politiques de Lyon

La Gouvernance Économique Mondiale au XXIème siècle: un cadre de lutte contre les crises systémiques?

Charlyne Fabre-Restivo

Mémoire de Master

Revisiter l'articulation globalisation, commerce et développement.

2011 - 2012

Sous la direction de : Emmanuelle Ganne & Mustapha Sadni-Jallab

Membres du jury :- Mustapha Sadni-Jallab- René Sandretto

(Soutenu le : 3 septembre 2012 )

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La Gouvernance Économique Mondiale au XXIème Siècle: un cadre de lutte contre les crises

systémiques?

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SommaireRemerciements 2

Introduction 3

Chapitre I : Un système de gouvernance contemporain inadapté à la mondialisation et à ses crises. 6

1. La crise de la globalisation 6 1.1 La crise des subprimes, une crise de la mondialisation. 6 1.2 La globalisation financière et le risque systémique. 11 1.3 Instabilité croissante et déséquilibre du Système Monétaire International. 19

2. Le multilatéralisme enlisé 19 2.1. La gouvernance globale en panne. 19 2.2 Monde multipolaire et concurrence des capitalismes. 23 2.2 Les institutions de la gouvernance en crise. 26

Chapitre II: Une nouvelle gouvernance économique mondiale pour lutter contre les crises systémiques. 33

1. Refondre le multilatéralisme. 33 1.1 L’objectif de stabilité financière 33 1.2 Propositions pour une gouvernance rénovée 42 1.3 Le G20, nouveau forum de la gouvernance globale. 51 2. Réformer la finance et le système monétaire international. 63 2.1. Définir la nouvelle architecture du système monétaire international. 63 2.2 Construire une nouvelle architecture financière internationale. 77 2.3 Les chantiers de réflexion du G20. 87 Conclusion 92

Glossaire 93

Bibliographie 94 Allocutions et déclarations officielles 94 Rapports et dossiers 97 Revues 97 Ouvrages 97 Articles 99 Sites web 100

Annexe 1 : Le triangle d’incompatibilité de Robert Mundell (1961) et Dani Rodrik (2000) 104Annexe 2. Les Modèles de Gouvernance: un essai de comparaison. 105Annexe 3. Les deux coordonnées de la mondialisation. 106Annexe 4. Indicateurs macro-prudentiels. 107

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Remerciements

Je tiens tout d’abord à remercier mes maîtres de mémoire, Emmanuelle Ganne et Mustapha Sadni-Jallab, pour leur expertise et leur disponibilité malgré leur emploi du temps à l’OMC que j'imagine chargé.

Je remercie monsieur Sadni-Jallab pour son ouvrage sur le G20 et les défis de la gouvernance globale dont je me suis inspirée pour ce travail. Ses analyses pointues et détaillées m’ont grandement guidées dans ma démarche.

Je remercie également René Sandretto pour avoir accepté de faire partie du jury de soutenance. J’ai particulièrement apprécié son cours de Finance Internationale lors du premier semestre de ma quatrième année à l’I.E.P de Lyon. Sa clarté, sa pédagogie et ses anecdotes m’ont encouragée à choisir un sujet traitant d’économie internationale.

Je souhaite aussi remercier ma mère et mon grand-père qui me montrent un soutien inconditionnel dans tout ce que j'entreprends.

Je voudrais remercier mon ami pour son soutien moral et son esprit critique qui a stimulé ma réflexion.

Enfin, je souhaiterais dédier cette recherche à la mémoire de mon grand-oncle, Robert Fabre, à qui je dois beaucoup.

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Introduction

« Moraliser le capitalisme » tel était l’objectif que s'était fixé la présidence française du G20 à Cannes en novembre 2012. Or la tâche se révèle très difficile, comment demander au loup de s'assagir alors qu'il est déjà dans la bergerie?

Le modèle financier contemporain a dévoilé au grand jour ses faiblesses et ses excès lorsqu’il est entré dans une crise profonde en août 2007. Partie des États-Unis, cette crise financière a plongé la plupart des économies développées dans la récession. Le monde n'avait pas connu de telles crises depuis l'épisode traumatisant de 1929. La crise a révélé de sérieuses failles dans la mondialisation. A la suite de ces évènements, Ban Ki-moon, le Secrétaire général de l'ONU, a lui-même déclaré que « la crise économique et financière mondiale a prouvé que le système actuel de gouvernance économique mondial n'était plus adéquat pour répondre au défis qui se posent aujourd'hui1 ». L'échec de la gouvernance et de la réglementation internationale à s'adapter aux changements profonds du monde appelle à refondre le capitalisme et impulser un nouvel ordre mondial.

La crise qui a submergé l’économie mondiale en 2008 a bousculé les certitudes à l’égard de l’architecture économique mondiale élaborée par les accords de Bretton Woods en 1944. Elle a mis en lumière un certain nombre de vulnérabilités passées jusque là inaperçues. Cette crise a pris par surprise la plupart des experts et des responsables politiques. L’efficacité des instituions internationales et des mécanismes de prévision ont rapidement fait l’objet d’interrogations : pourquoi les États et les instances internationales n’ont-ils pas été en mesure de prévenir cette crise? Aurait-elle pu être géré plus efficacement? La crise a également posé la question de la viabilité des modes de fonctionnement de la finance globalisée. L’économie mondiale est-elle condamnée à aller de crise en crise ? Peut-elle échapper à la domination de la finance? Enfin, les bouleversements liés à la crise de 2007 conduisent à s'interroger sur l’avenir de cette structure de gouvernance: doit-elle et peut-elle être adaptée? En d'autres termes, une meilleure gouvernance mondiale est-elle possible ?

La réforme du système actuel des relations économiques internationales est à l’ordre du jour. Depuis l’éclatement de la crise des subprimes, le besoin de gouvernance économique mondiale est devenu une des priorités de l’agenda

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1 Allocution du Secrétaire Général des Nations Unies, "Le système de gouvernance économique mondial est inadéquat" , Réunion spéciale de haut niveau du Conseil économique et social (ECOSOC) - 27 avril 2009, siège de l'ONU, New York, Etats-Unis.

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politique international. La gouvernance économique mondiale a justement pour seule raison d’être que d’améliorer la coopération internationale. Gouvernance mondiale ne signifie pas gouvernement mondial. La gouvernance doit être comprise comme « le cadre au sein duquel la coopération internationale et la coordination des politiques peuvent se déployer et sur lequel l'action collective des États peut prendre appui »2. En ce sens, la gouvernance est un multilatéralisme. Pour beaucoup d’observateurs, le multilatéralisme s’impose comme une réponse à la crise et aux enjeux de la globalisation. L’absence de gouvernance globale serait à l’origine de la transmission de la crise économique à l’ensemble des économies. Ce constat justifie l’urgence d’une nouvelle organisation économique. La crise a en effet révélé qu’il était temps de moderniser les institutions internationales. Le consensus semble fort et s’est déjà traduit par des efforts de renfoncement de la coordination des politiques économiques et la construction d’une gouvernance globale. A la lumière de la crise, le Groupe des Vingt a fait un certain nombre de recommandations pour améliorer la régulation bancaire et financière. Certaines propositions ont déjà été mises en oeuvre, mais beaucoup reste à faire. Les sommets du G20 se sont réunis lorsque la crise battait son plein et ont de ce fait donné de la visibilité et de l’impulsion au débat de la gouvernance économique mondiale. Le G20 s’est ainsi présenté comme le nouveau cadre informel de la gouvernance globale.

Bien que la littérature sur la question de la gouvernance économique globale soit prolifique depuis que la crise a éclaté, il convient de s'intéresser à la faisabilité et la forme que peut prendre une nouvelle gouvernance économique mondiale. Par ailleurs, il est nécessaire d’établir le bilan de ce qui a été fait en matière de régulation, d’analyser les succès et de comprendre les échecs. Par ce travail de réflexion, nous déterminerons les éléments nécessaires à la construction d’une gouvernance économique durable et efficace. Notre problématique est la suivante: En quoi une nouvelle gouvernance économique mondiale se présente-elle comme le cadre pour lutter contre les crises systémiques du XXIème siècle?

Pour répondre à cette question, ce mémoire va d’une part se consacrer à l’analyse historique de l’avènement d’un nouvel ordre économique mondial depuis 2008. D’autre part, cette recherche s’attachera à l’analyse théorique des proposions de réforme émises par les théoriciens. Ce travail s’inspirera également des opinions des experts et d’autres grands acteurs de la gouvernance mondiale pour éclairer le débat.

L’objet de ce mémoire sera d’apporter des éléments de réponse à la question de l’organisation d’une gouvernance économique mondiale durable et

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2 Soret, T., & Védrine, H. (2010). Crise dans la gouvernance économique mondiale. Paris: Fondation Jean Jaurès.

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efficace. Il convient de mesurer l’importance de cet enjeu pour le monde, mais aussi de comprendre les défis auxquels cette refonte du système s’expose. Dans l’optique d’apporter des réponses aux interrogations sur l’avenir de la gouvernance mondiale, cette réflexion va se concentrer sur l’architecture politique et institutionnelle d'un tel système de gouvernance. Ce travail s’attache donc à éclairer les divers aspects de l’interdépendance internationale. Dans le but d’établir une plus grandes clarté quant aux objectifs d’une meilleure gouvernance économique mondiale, il apparait nécessaire d’engager une réflexion de plus grande portée sur les principes de la gouvernance internationale et la nature des instituions. Au final, ce travail se consacre à analyser les obstacles auxquels une coopération internationale renforcée se heurte, et s’attache à émettre des propositions quand aux moyens de les surmonter.

Dans une premier chapitre nous verrons en quoi le système de gouvernance actuel est inadapté à la mondialisation et à ses crises ( Chapitre I ) Une attention particulière sera portée aux leçons que l’on peut tirer de la crise des subprimes pour réformer la gouvernance économique mondiale. L’analyse des insuffisances et des défis de la gouvernance actuelle aura pour objectif de montrer la nécessité et les enjeux de la construction d’une nouvelle gouvernance économique mondiale.

Le deuxième chapitre sera consacré aux modalités de la réforme de la gouvernance économique mondiale afin d’en faire un cadre de lutte efficace contre les crises ( Chapitre II ). Le rôle du G20 dans l’émergence d’une nouvelle gouvernance économique sera au coeur de cet analyse. Nous verrons que cette réforme s’appuie sur deux axes majeurs: la construction d’une nouvelle architecture monétaire et financière internationale. Dans le cadre de l’analyse de la faisabilité de telles réformes, de nombreuses propositions seront passées en revue, et un bilan des efforts sera établi.

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Chapitre I : Un système de gouvernance contemporain inadapté à la mondialisation et à ses crises.

1. La crise de la globalisation 1.1 La crise des subprimes, une crise de la mondialisation

1.1.1 Récapitulatifs des faits.

Au mois d’août 2007, la crise des subprimes éclate au grand jour. Celle-ci frappe de plein fouet les marchés financiers. Partie des États-Unis, la crise se mondialise alors rapidement. Ce fut la secousse financière la plus sérieuse depuis la fin des années 1920. Cette crise financière et économique a pris progressivement plusieurs dimensions, elle touche à la fois au social, à l’humain, à l’éthique et au gouvernement des États. La crise des subprimes est une crise unique, qui a fait coulé beaucoup d’encre, et qui mérite d’être étudiée : c’est l’histoire d’une crise de la mondialisation comme le monde en avait jamais connu auparavant. C’est également une crise systémique, qui s’est répandu très rapidement à tous les pays industrialisés par un effet de contagion. Selon plusieurs observateurs, cette crise a sonné l’entrée dans le XXIème siècle de part son caractère global et systémique. C’est une crise qui perdure, les effets se font encore sentir aujourd’hui (...). Au final, la crise des subprimes a remis en question la façon de penser la mondialisation. Elle a l’avantage d’avoir mis en lumière les failles d’un système -ou non système- inadapté aux changements perpétuels liées à la libéralisation des économies mondiales. 3

Dans un premier temps, il convient de revenir sur les origines macro et micro économiques de ce phénomène afin de bien comprendre l’étendue et les enjeux des crises systémiques du XXIème siècle.

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3 Dujardin, Vincent, La crise économique et financière de 2008-2009, l’entrée dans le 21ème siècle? Bruxelles: P.I.E Peter Lang, 2010, Introduction.

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La crise de grande ampleur qui s’est déclenchée en 2007 est principalement d’origine bancaire. A la suite d’un développement excessif du crédit aux États-Unis, des risques ont étés diffusés à l'ensemble du système bancaire et financier international via les techniques de titrisation. Une série d’établissements bancaires mondiaux se sont alors trouvés surexposés à des risques qu’ils avaient sensiblement sous-estimé. Cette crise est en effet la résultante d’innovations financières largement dispersées à travers la sphère financière. L’effet déclencheur de la crise est constitué par des prêts hypothécaires à hauts risques (les crédits subprimes) développés aux États-Unis, à la fin des années 1990. Les prémisses de la crise se font sentir dès juin 2007, lorsque la banque d’affaires américaine Bear Stearn, suivie de la BNP Paris Bas se trouvent dans l'incapacité de rembourser leurs clients. Les bourses s’inquiètent, le processus d’un crise systémique est lancé.

Dès le mois d’août, la confiance s’estompe entre opérateurs bancaires, ils cessent de se prêter; le marché entre alors dans une phase dite de crédit crunch (resserrement du crédit). C’est alors que le « carburant du moteur économique vient à manquer »4: les liquidités disparaissent du marché financier. Dès lors, la crise se révèle son caractère systémique. Une grande insécurité se développe parmi les agents économiques et entre les marchés. Cette insécurité et le manque total de visibilité des risques engendre une crise de confiance qui atteint tous les agents économiques, y compris les consommateurs. Cette perte de confiance sur le marché interbancaire a elle-même un effet amplificateur de la crise5.

La crise des subprimes fut incontestablement brutale, profonde et globalisée. Malgré les réels progrès de la théorie économique en terme de techniques de prévision et de gestion des risques, ce phénomène n’a guère été anticipé, que ce soit par les experts, les banques, ou les gouvernements. Comment une telle catastrophe économique a-t-elle pu se développer?

1.1.2 Comment en est-on arrivé là?

Dans le cadre de l’étude des défaillances de la gouvernance globale, il semble important de revenir sur le contexte règlementaire dans lequel s’est développée la crise des subprimes.

Au cours de ces trente dernières années, nous avons assisté à divers mouvements de dérégulation qui se sont accompagnés d’un recul généralisé de la régulation publique dans le secteur économique. Ce retrait de l’État a offert un cadre particulièrement propice au développement des crédits subprimes. Dans sa contribution, Bernard Remiche explique ce recul de la régulation publique par la domination du paradigme du

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4 Cassis, Youssef (2010), La crise financière de 2008, une perspective historique, La crise économique et financière de 2008-2009, l’entrée dans le 21ème siècle? Bruxelles: P.I.E Peter Lang, 2010, p41

5 De Ruyt, Jean (2010), Causes, effets et leçon de la crise financière, La crise économique et financière de 2008-2009, l’entrée dans le 21ème siècle? Bruxelles: P.I.E Peter Lang, p35.

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Market Failure sur la société d’avant crise 6. Ce concept issu des théories néoclassiques indique que les marchés doivent avoir la priorité dans le règlement des difficultés. Par conséquent, l’intervention publique a un rôle subsidiaire. Une première modification réglementaire fondamentale fut l'abandon progressif de l’interdiction du modèle de banque universelle, «les banques sont ainsi retombées dans les travers du modèle de la banque universelle ou de la banque mixte, mis en lumière par la crise des années 1930»7. La crise de 1929 est précisément à l’origine du Glass Steagal Act adopté en 1933 par le Congrès Américain dans le but d’interdire aux banques de détenir des participations dans d’autres compagnies financières. En 1999, le Grammm-Leach Billey Act mit fin à cette interdiction. Tant aux États-Unis qu’en Europe, de larges groupes financiers ont put alors combiner l’activité bancaire classique à des activités d’investissement, de production et de création de nouveaux instruments financiers d’assurance, de fusion et acquisitions (etc.) Cela a donné naissance à des méthodes de titrisation et à tout les dangers qu’elles comportent.

Le second problème résulte de l’absence de contrôle sur le processus de globalisation du marché des capitaux. En effet, la globalisation financière a répandu à travers le monde des produits dérivés « aussi appétissants qu’opaques » sans qu’aucune règle, qu’aucune architecture ne soit plus en mesure de contrôler le risque couru par l’investisseur. C’est le recours à la technique de titrisation qui a permis de diffuser sur le marché mondial ce type de crédit en créant de surcroit une opacité totale quand au risque qu’il comportait. Le recours à la titrisation permet une large commercialisation de ce type de prêt qui vont être abondamment diffusés par les intermédiaires financiers. Une caractéristique fondamentale des dérivés et de la titrisation de ceux-ci est qu’elles créent une asymétrie totale d’information: les détenteurs des titres ignorent tout de la composition finale de leur panier et du risque réel attaché à ces produits. L’information est asymétrique puisque certains agents sont mieux informés que d’autres. On peut donc en conclure que le cataclysme provoqué par les échecs de la titrisation remet en cause la théorie de l'efficience des marchés et l’idée d’une “main invisible” chère à Adam Smith. En outre, la globalisation financière ne s’est pas accompagnée d’une restructuration fondamentale de la régulation; les outils de régulations se sont avérés trop insuffisants. Bien que des coordinations aient été mise en place (voir infra Bâle I et Bâle II), la régulation est restée majoritairement nationale. En effet, peu d’États préconisent des modifications qui aboutiraient à un abandon de leur souveraineté. Ainsi « de nombreux pays membres de l’UE ne sont pas prêts à accepter un régulateur unique (par secteur d’activité) pour des raisons de souveraineté nationale » précise André Lévy Lang 8. De sorte, les États privilégient la solution du renforcement de coordination plutôt que des règles internationales gérées par des organismes supra-nationaux. A titre

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6 Remiche, Bernard, (2010) La crise économique et financière, pour une régulation entre la légalité et l’opportunité économique. La crise économique et financière de 2008-2009, l’entrée dans le 21ème siècle? Bruxelles: P.I.E Peter Lang, , p71

7 Ibid

8Lang, A. (2012). Il faut maîtriser la finance: qu'en pensent les économistes ?. Paris: Eyrolles.

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d’exemple, on peut citer les règles de Bâle qui ne peuvent être appliquées que par des régulateurs nationaux. Ces règles ne peuvent pas être imposées, elles dépendent donc de la bonne volonté des États. Ainsi, les États-Unis ont toujours adapté les règles de Bâle à leurs propres conditions. Ces règles couvrent toutefois que les banques, pas toute la finance.

Au final, la crise de 2008 aura dévoilé les conséquences catastrophiques d’un système financier international dérégulé. Quels enseignements et observations peut-on tirer de cette crise? Quelles sont les conséquences en terme de coopération internationale?

1.1.3 Quelles conséquences pour la gouvernance globale?

En mettant en évidence l’aveuglement et l’absence de contrôle des marchés financiers, la crise pose la question de la viabilité des modes de fonctionnement de la finance globalisée. Nous sommes dans une nouvelle étape appelée à redéfinir ou transformer la gouvernance globale. Dans ce contexte, plusieurs questions émergent: l’économie mondiale est-elle condamnée à aller de crise en crise ? Peut-elle échapper à la domination de la finance? En somme, une meilleure gouvernance mondiale est-elle possible ?

Pour certains observateurs, la crise est synonyme de rupture avec un certain « minimalisme post-moderne » qui perçoit le marché comme capable d’assurer seul le fonctionnement de l’ordre international9. En d’autres termes, la crise aurait provoqué la fin d’une époque régie par les dogmes de l’argent facile et le « néolibéralisme triomphant » , où en cas de crise quelques règles informelles couplées d’une coopération minimale sont considérées suffisantes. La crise a sonné la défaite de la croyance en le marché et en une « main invisible10 » qui le guiderait . En ce sens, elle peut également s’interpréter comme un réel coup d’arrêt dans le modèle économique actuel. En faisant imploser les marchés financiers mondiaux, la crise a révélé le caractère illusoire des bulles pour impulser la croissance. Faut-il alors changer de modèle économique et abandonner le régime de croissance?

Quoi qu’il en soit, changer de modèle économique impose de trouver des nouvelles régulations, tant au niveau international qu’à celui de la gouvernance des entreprises. Désormais, c’est un besoin d’Etat, de régulation et de supervision qui domine depuis la débâcle financière, et qui s’est imposé au coeur du débat public. Bernard Remiche (2010) soutient que la crise a renforcé la volonté d’interférer dans le fonctionnement de l’économie par des dispositions législatives, des règlements et des

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9 Ben Hammouda Hakim et Sadni Jallab Mustapha, Le G20 et les défis de la gouvernance globale, Paris: De Boeck, 2011.

10 La “main invisible” est un concept formulé par l’économiste Adam Smith dans son livre “La Richesse des Nations” (1776). Selon lui, la main invisible est un phénomène naturel qui guide les marchés grâce au mécanisme de mise en concurrence pour la possession de ressources rares.

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institutions diverses. La profondeur et la globalisation de la crise actuelle, sa rapidité, ne peuvent que conduire à des réformes substantielles dans le domaine de la gouvernance. Au final, la principale leçon de la crise est la nécessité de refonder une gouvernance globale afin de faire face à l’instabilité croissante du monde. La littérature est unanime à ce sujet: la crise financière de 2008 a ouvert le débat sur la nécessité d’une gouvernance qui réponde aux attentes de l’ensemble des acteurs du système financier.

Un nouveau pas vers la coopération internationale?

La crise financière semble donc avoir mis fin à l’ère de la « mondialisation heureuse ». L’ordre du monde se retrouve bouleversé par la récession dans les pays industrialisés et la croissance rapide des pays émergents. Le contexte international est marqué pas de nombreux déséquilibres globaux, des rivalités et des tensions internationales.

Toutefois, face à cette crise sans précédent, il semblerait que les gouvernements se soient engagés dans un climat de coopération internationale. Bon nombre d’économistes s’accordent à dire que la crise a mise en lumière l’effet bénéfique d’une coordination mondiale des politiques de relance budgétaire et monétaire, sans laquelle un effondrement encore plus spéculaire aurait pu avoir lieu 11 . En effet, ce regain de multilatéralisme s’est d’abord traduit par une utilisation massive de ce type de politique publique. Les autorités monétaires et politiques ont déployé des mesures tout à fait exceptionnelles. Les banques centrales ont été les premières à agir, en abaissant leurs taux directeur dès le début de l’année 2008, mais surtout en prenant des mesures spécifiques visant à fournir d’avantage de liquidités dans les marchés monétaires gagnés par la crise de confiance. La constitution d’un nouveau forum de coopération, le G20, a lui aussi marqué le passage vers un climat propice à la coopération. De grands principes ont été réaffirmés entre les sommets de Washington en novembre 2008 et celui de Séoul en 2010, tels que : le rejet du protectionnisme, la coordination des politiques macroéconomiques, la renaissance du FMI ainsi que des projets de régulation financière pour éviter l’apparition de nouvelles crises de ce type. La contribution du G20 a permis une certaine réduction des déséquilibres mondiaux. Dans la sphère financière, une série de réformes ont été adoptées et sont mises en œuvre; d’autre sont en cours d'examen. Ces réformes seront passées en revue dans le deuxième chapitre de cette recherche.

Bien que des solutions immédiates aient déjà été fournies, ce travail de pompier n’est malheureusement pas terminé. En effet, tous ces remèdes ne suffiront pas à assurer la relance ni a nous éviter de retomber dans les erreurs passées. Les dangers persistent, le secteur financier présente toujours d’importantes vulnérabilités.

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11 Bénassy-Quéré Agnès, Farhi Emmanuel, Gourinchas Pierre-Olivier, Jacques Mistral, Jean Pisani-Ferry Hélène Rey, Réformer le système monétaire international, CAE, Paris, 2011 - ISBN : 978-2-11-008719-5

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1.2 La globalisation financière et risque systémique

1.2.1 Les interdépendances et le risque de systémique.

La globalisation financière est un des phénomènes marquant de l’économie mondiale. Le système financier fait figure d’ossature de la société contemporaine. Depuis le début des années 1980, un vaste marché mondial des capitaux s’est constitué, brassant des sommes de plus en plus importantes. Les marchés de biens sont de plus en plus intégrés ; les entreprises font des choix de production à l’échelle mondiale; les investissements direct à l’étranger et le nombre de firmes multinationales se sont considérablement accrus. De même, les marchés de capitaux sont devenus internationaux. Un des bénéfices majeur lié à la globalisation financière et qu’elle offrirait aux pays émergents une puissante opportunité de financer leur développement. Quand à l’aspect très controversé de la globalisation financière est son caractère intrinsèquement instable. En effet, la globalisation financière se traduit par l’instabilité des marchés ainsi que part l’accumulation de nombreux déséquilibres.

L’interconnexion des économies est propice à la propagation de risques. Les développements de la finance (titrisation et produits dérivés), et la globalisation de l’économie ont fortement accentué les interdépendances. La crise a mis en évidence les liens étroits entre les économies et les marchés financiers du monde: un choc subi par un grand pays se propage rapidement à l’ensemble du système, c’est ce qu’on appelle le risque de système. Jean-François Lepetit définit le risque systémique comme « un risque de dégradation brutale de la stabilité financière, provoqué par une rupture dans le fonctionnement des services financiers et répercuté sur l’économie réelle »12. Une des formes commune d’expression du risque systémique est l’effet de contagion - c’est-à-dire l’impact que les mesures économiques prises dans un pays peuvent avoir sur un autre pays du fait de la mondialisation financière13. A cet égard, la transmission des effets déstabilisateurs de la crise des subprimes a non seulement démontré la forte interconnexion des économies, mais à aussi souligné les dangers liés à l'absence de gouvernance globale et de coordination internationale. Paradoxalement, la globalisation de la finance et de l’économie n’a pas été accompagné d’une plus grande coordination entre les instituions financières. L’interdépendance et l’absence de coordination ont fait que la crise des subprimes est devenue la plus grande crise financière depuis celle de 1929. C’est alors que les pays industrialisés ont compris l’importance de définir et de mettre en place des politiques et des mécanismes de coordination de leurs actions au niveau international.

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12 Lepetit J-F. (2010), Rapport sur le risque systémique, Ministère de l’économie, de l’industrie et de l’emploi, Avril 2010

13 Définition donnée par le FMI, sur www. imf.org

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1.2.2 Un processus d’intégration financière rythmé par des crises récurrentes.

Depuis plus de quinze ans, la mondialisation et la globalisation financière ont fortement impulsé la croissance mondiale. Le capitalisme international, productif et financier, a « assis sa domination sur l’économie mondiale », contribuant à une forte croissance 14. Cette croissance a été instable et les crises se sont multipliées. L’histoire économique contemporaine est marquée par toute une série de crises financières d’une fréquence inégalée. A commencer par la crise de la dette des pays du tiers-monde en 1982 qui a été suivie de la crise du SME en 1992-1993; la crise mexicaine en 1994-1995; la crise asiatique de 1997-1998; la crise russe et la faillite du fonds LTCM en 1998; les crises du Brésil en 1999 et en 2002; le krach des de la bulle internet et la crise turque en 2000; la crise argentine en 2001-2003; la crise des subprimes en 2007, et la dernière crise en date est celle de la dette publique grecque de 2010. Comme en témoigne cet inventaire non exhaustif, les crises ne sont plus des phénomènes exceptionnels. Leur coût peut être extrêmement élevé dans la mesure où elles affectent non seulement le système financier, mais également l’ensemble de l’économie, ou même plusieurs économies par contagion. Pour C. Mathieu et H.Sterdyniak (2009), cette succession de crise révèle les risques en termes de stabilité et de soutenabilité d’un mode de croissance impulsé par les firmes multinationales, les marchés financiers et par des stratégies nationales non coordonnées, sans institutions de gouvernance mondiale.

1.2.3 Des marchés de nature instable et des risques difficiles à évaluer

Le marché des produits dérivés conduisent à de nouvelles formes d’instabilité de nature systémique. L’instabilité est une caractéristique inhérente aux marchés de capitaux issus du processus de globalisation financière. Les marchés de la globalisation sont aujourd’hui décloisonnés et internationalisés15. Les marchés financiers ne servent plus seulement à placer ou à financer mais servent aussi à des opérations purement spéculatives. A cet égard, le développement des subprimes aux États-Unis a mis en lumière tous les risques liés à la titrisation. Les marchés de produits dérivés (marchés à terme, d’options et de swaps) constituent un progrès pour les acteurs économiques, ils leur offrent des instruments efficaces de couverture contre le risque. Ce fonctionnement des marchés financiers permet théoriquement de diversifier et de disséminer, donc de réduire les risques, mais il en crée aussi de nouveaux. Par conséquent, ces produits dérivés peuvent être un important facteur d’instabilité. D’une part, parce qu’ils représentent l’un des principaux leviers à la disposition des spéculateurs; d’autre part, et surtout, ces instruments peuvent conduire à de nouvelles formes d’instabilité, de nature systémique. Les raisons de cette instabilité sont multiples: l’imprévisibilité des variables financières, la fluctuation au hasard (random walk) ; la psychologie des acteurs et les comportements moutonniers; et enfin l’écart par rapport aux fondamentaux. Les

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14 Mathieu C.& Sterdyniak H. (2009), La globalisation financière en crise, revue de l’OFCE, Juillet 2009.

15 Marché obligataire - marché primaire - marché des dérivés: marché des CDS - marchés à terme

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marchés financiers n’utilisent pas au mieux toute l’information disponible; ils ne fonctionnement pas selon le principe de la rationalité parfaite et des anticipations rationnelles. Une telle instabilité du système financier prouve que les marchés sont loin d’être efficients. C. Mathieu et H.Sterdyniak (2009) expliquent que le processus de globalisation financière est particulièrement mal contrôlé puisqu’il est marqué par des innovations continuelles que les autorités nationales peinent à contrôler. De plus, les règlementations sont très souvent contournées en étant comptabilisées dans les paradis fiscaux16 . En outre, les nouveaux produits financiers sont particulièrement opaques, cette caractéristique leur permet de contourner les règlementations. Enfin, comme l’a démontré la crise des subpimes, la notation fournie par les agences spécialisées dans ce domaine n’est pas toujours fiable (voir infra). Dans un tel contexte, nul ne peut réellement évaluer les risques pris par les institutions financières.

La crise de la finance globale et la multiplication des crises à caractère systémique souligne les dangers de l’absence d’une gouvernance mondiale effective. La crise actuelle pose simultanément des défis et des questions multiples. Il faut dès aujourd’hui nous attacher sérieusement à élaborer l’ordre architectural du monde financier de demain. Il ne s’agit pas de simplement remettre le système financier et bancaire en état de marche. Dorénavant, il faut se poser la question d’un nouveau fonctionnement de la finance. Le monde sera-i-il capable de mettre en place une architecture financière adaptée à la globalisation?

Bien que des réponses à la crise de 2008 ait été apportés par la relance budgétaire et monétaire, les dangers persistent; en effet, aucunes réponse n’a encore été apporté aux faiblesses structurelles présentes de longue date dans les dispositifs monétaire internationaux.

1.3 Instabilité croissante et déséquilibre du Système Monétaire International

1.3.1 Système ou non système?

Un régime monétaire international se définit comme « un ensemble de règles qui contraignent, ou du moins influencent, les décisions des États en matière de régime de change, de politique monétaire et de réglementation des flux de capitaux »17. Le système monétaire international (SMI) est étroitement lié au système financier international étant donné que son fonctionnement dépend en particulier des modalités de l’approvisionnement de liquidité. Le régime monétaire de Bretton Woods mis en place

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16 parmi lesquels : les îles Caïman, les îles anglonormandes - c.f la liste noire publiée par l’OCDE en 2010 sur demande du G20

17 McKinnon, 1993 cité dans Bénassy-Quéré et al, 2011

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au lendemain de la Seconde Guerre mondiale avait instauré un système de change fixe. Ce système était caractérisé par une certaine stabilité, si bien que les accords de Bretton Woods sont souvent présentés comme « l’exemple même d’une coopération internationale réussie dont l’on n’ose plus rêver aujourd’hui »18. La régulation du système monétaire international était assuré par des autorités publiques nationales et internationales. Chaque État était autonome et maître de sa propre politique économique; un tel choix impliquait le contrôle des mouvements des capitaux, comme l’explicite « le triangle d'incompatibilité »19 de Dani Rodrik. (c.f annexe 1 - Figure 1). L'abandon de la convertibilité en or du dollar en 1971 a ouvert la voie à un système moins régulé de changes flottants. La dislocation de l’ordre de Bretton Woods a fait place à une régulation fondée sur un plus libre fonctionnement des marchés. Le système monétaire et financier actuel s’en est trouvé dominé par la finance privée, ce qui a constitué en somme « l’abandon de l’esprit des lois Bretton Woods »20. Le monde n’est pas prêt de revenir au système de Bretton Woods et aux changes fixes. Par le triangle d’incompatibilité, Robert Mundell en a démontré l’impossibilité même. (c.f annexe- Figure 2).

Les crises monétaires et financières sont plus fréquentes depuis l’effondrement de Bretton Woods. Les crises de change se sont multipliées dans les années 1990:La crise du système monétaire européen en 1992-1993; crise mexicaine en 1994-1995; crise asiatique en 1997; crises russe et brésilienne en 1998; crise argentine en 2002.

Les changes flottants posent de nombreux problèmes du fait de leur instabilité et de la complexité qu'ils apportent aux échanges21. Depuis l’abandon des systèmes de change flottants, le dollar a connu de nombreuses fluctuations: baisse à la fin des années 70, hausse brutale au début des années 1980; épisode de hausse mi-1990; baisse dans les années 2000. L’ampleur de ses variations, comme ses irrégularités, sont inédites. La fluctuation frénétique des taux de changes est le résultat de mouvements de capitaux volatils et de grande ampleurs. Les flux financiers ont significativement augmenté au cours de ces 20 dernières années, si bien que le montant global des transactions financières journalières atteint aujourd’hui 8000 milliards de dollars22. La littérature admet à l’unanimité que le flottement des monnaies affectent les échanges internationaux, ce qui contribue à alimenter les tensions internationales.

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18 Chavagneux Christian, La stabilité financière internationale est-elle un bien public mondial? AFSP/Section d’Etudes Internationales-colloque ‘les biens publics mondiaux’ 2010

19 Le compromis de Bretton Woods reposait sur un respect fort des critères “d’États-Nation” et de participation politique.

20 Allegret Jean-Pierre et Sandretto René,, La nouvelle architecture du système monétaire international;, L'Actualité économique, vol. 76, n° 3, 2000, p. 437-456.

21 Siroën, J. (2002). Relations économiques internationales. Rosny-sous-Bois (Seine-Saint-Denis): Bréal.

22 Voir les derniers chiffres publiés par la Banque des Règlements Internationaux (BRI) en décembre 2010

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1.3.2. Un système très instable qui présente tous les aspects d’un “non système”.

La configuration monétaire actuelle qui est issue de l’effondrement de Bretton Woods est qualifiée de « non-système » par de nombreux observateurs. En effet, aucune structure de gouvernance globale n’assure actuellement la régulation et la coordination des décisions de politique économique au niveau mondial. Cette absence de médiation affecte sensiblement la stabilité économique mondiale. Tout laisse à penser qu’au vu de l’instabilité effective des taux de change, le SMI actuel va continuer à faire figure de « non-système » pendant longtemps. Quels sont les caractéristiques de ce « non-système »? En quoi est-il porteur d’instabilité?

Les déséquilibres internationaux facteurs d’instabilité.

Le système monétaire international est caractérisé par des déséquilibres internationaux entre pays excédentaires et déficitaires. La balance courante établie l’ensemble des flux échangés entre un pays et le reste du monde. D’un côté, il y a les pays excédentaires, qui exportent plus qu’ils importent. Parmi eux, on retrouve de nombreux pays émergents, dont le premier exportateur mondial: la Chine. Ces dernières années, ces pays ont connu une nette amélioration de leurs performances commerciales du fait de la progression rapide leur compétitivité par rapport aux vielles puissances. Par conséquent, ces pays se sont retrouvés à accumuler d’importants excédents des balances courantes. Les pays développées accumulent également des excédents, c’est notamment le cas du Japon et de l’Allemagne. De l’autre côté de la balance courante, se trouve les pays déficitaires. Avec un déficit béant qui atteint 3.2% de son PIB, les États-Unis en sont l’exemple type23 . Cet accroissement du déficit américain proviendrait de la hausse des dépenses liées aux interventions militaires en Irak et en Afghanistan, ainsi que de la hausse de la consommation de produits importées provenant des pays émergents. Un tel déficit s’explique également par le rôle du dollar au niveau international: à la fois moyen de paiement et de réserve, le dollar fait l’objet d’une forte demande. Les États-Unis n’est pas le seul pays développé à souffrir d’un inquiétant déficit de la balance courante, la Russie, le Japon, et l’Australie souffrent également de déficits conséquents.

Ces déséquilibres mondiaux sont d’importants facteurs d’instabilité et de turbulence au sein de l’économie mondiale. D’une part, ils sont à l’origine d’importantes fluctuations de la valeur des monnaies et des taux de change. D’autre part, ces déséquilibres incitent les pays déficitaires à utiliser des politiques de dévaluation compétitives pour stimuler leurs exportations. Selon une expression commune, ces politiques ne font « qu’exporter la déflation chez le voisin ». Dès lors, ces politiques non conventionnelles n’apportent aucunes réponses au problème des déséquilibres, elles les accentuent même dans la mesure où les pays sont liés par leurs balances courantes : « les déficits des uns sont les excédents des autres » (Siroën 2002).

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23 Ben Hammouda, H., & Sadni-Jallab, M. (2011). Le G20 et les défis de la gouvernance globale. Bruxelles: De Boeck.

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Un régime de change flottant à l’origine de tensions monétaires.

Le régime de change flottant mis en place après l’effondrement du système de Bretton Woods présente deux problèmes majeurs. Tout d’abord, la flexibilité du change est à l’origine d’un risque de change, source de nombreuses incertitudes pour les agents économiques. En effet, le flottement des changes est imprévisible, cette flexibilité provoque donc d’importantes tensions. D’autre part, le régime actuel est caractérisé par une volatilité démesurée des taux de change: leur variation est excessive et s’écarte trop des fondamentaux. Des fluctuations fortes et durables mettent les économies ouvertes de petites tailles en difficultés, entraine des distorsions au sein du système, et affecte durablement l’allocation des ressources. Le régime de change flottant est donc source de nombreuses tensions et déséquilibres. Le deuxième problème majeur d’un tel régime est que les politiques de changes sont utilisées comme outil de compétitivité, renforçant de ce fait les tensions monétaires et commerciales. Par le biais des leurs monnaies, les grands pays se livrent une guerre sans merci. Le conflit entre le dollar américain et le yuan chinois est une bonne illustration des dangers liées à la « guerre des monnaies ». Les pays de moyennes tailles sont les victimes collatérales de cet affrontement. Alors que le yuan est maintenu à un niveau bas et que les États Unis mènent des politiques des politiques expansionnistes laxistes, la monnaie des ces économies de tailles moyennes de trouvent réévaluée. En 2 ans, le réal brésilien à connu une appréciation de 30%. Ces politiques non conventionnelles provoquent un afflux massifs de capitaux vers ces pays émergents, qui sont à l’origine d’une forte réévaluation de leur monnaie, et donc d’une perte de leur compétitivité commerciale. Le spectre d’une guerre des devises est donc aujourd’hui bien présent. Après la crise financière et économique, la crise monétaire représenterait la une troisième phase de la crise actuelle (Ben Hammouda & Sadni Jallab 2011).

Faiblesses de la surveillance multilatérale et l'insuffisance des mécanismes de régulation.

Toutes ces tensions mettent en évidence les faiblesses de la surveillance multilatérale et l'insuffisance de mécanisme de régulation face aux déséquilibres internationaux. Ceci représente bel est bien un élément de non système aux yeux de Christian De Boissieu24. A cet égard, les lacunes de la surveillance multilatérale s’illustrent dans « guerre des monnaies » où l’absence de « juge de paix » empêche les pays excédentaires et déficitaires de s’accorder. Une instance de médiation, à l’image de l’Organe des Règlements des Différents de l’OMC, permettrait de trouver le bon équilibre entre les uns et les autres25. La surveillance qu’assure le FMI est clairement insuffisante. Le Fonds a pour mission de surveiller les pays en déséquilibres interne ou externe et d’effectuer des pressions sur ces derniers pour qu’ils effectuent les

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24 De Boissieu C. 2011, La réforme du système monétaire international, Le G20 et la nouvelle gouvernance économique mondiale, sous la direction de Jacques Mistral, Editions Puf, Paris

25 Ibid.

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ajustements nécessaires. Or, cette surveillance s’est souvent révélée inefficace et a permis à de nombreux pays d’accumuler des déséquilibres sur de longues périodes. Pour Michel Camdessus et al. (2011), « les crises de ces 20 dernières années résultent de l’échec du FMI à produire des ajustements nécessaires des politiques financières et économique de ses membres »26. Il souligne que par ailleurs que les carences de la surveillance multilatérale comportent 3 risques majeurs qui menacent la stabilité monétaire internationale:

«(a) la réapparition de déséquilibres prolongés et, finalement, insoutenables des comptes courants, pouvant conduire à de graves désordres, (b) des tensions inflationnistes mondiales si de trop nombreux pays mènent des politiques budgétaires et monétaires trop expansionnistes ou, à l’inverse, (c) un effet de resserrement sur l’économie mondiale si de trop nombreux pays tentent simultanément de dégager des excédents de leur compte de transactions courantes.»

Les difficultés de gestion de la liquidité mondiale.

Nous avons vu qu’il y avait une absence patente de discipline efficace assurant un ajustement global. Beaucoup d’observateurs accusent le FMI d’une mauvaise coordination des politiques monétaires. Comment cette mauvaise coordination favorise-t-elle l'instabilité? La carence de coordination des politiques monétaires se traduit par des difficultés de gestion de la liquidité mondiale. De Boissieu (2011) avance que l’abondance de liquidité empêche l’économie mondiale de trouver un équilibre satisfaisant. Cette abondance de liquidité a d’ailleurs favorisé la crise en alimentant le risque de bulle. D’autre part, la gestion même de la crise par les banques centrales n’a fait que renforcer l’excès de liquidité dans le monde. La politique monétaires des banques centrales, qu’elle soit expansionniste ou restrictive, ne prend pas en compte les externalités internationales qu’elles produisent 27 . Ces politiques se traduisent souvent par une accumulation excessive de réserves de change par les pays émergents. De peur de voir leur monnaie s'apprécier et de devoir face à une sorite précipitée de capitaux étrangers, comme ce fut le cas lors de la crise asiatique de 1997-1998, les émergents réagissent en accumulant leurs réserves de change. Cette accumulation excessive est source de déséquilibres. C’est pourquoi la régulation et l’offre de liquidité doivent faire l’objet d’une réforme.

L’hégémonie du dollar à l’origines d’important déséquilibres.

La dépendance de l’économie mondiale vis-à-vis du dollar représente un autre aspect problématique du SMI actuel. Premièrement, les États-Unis ne peuvent pas régler leur déficit puisque le reste du monde a besoin de dollar pour assurer ses paiements et ses réserves. Deuxièmement, les réserves en dollar subissent les variations de changes

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26 Camdessus, M., Padoa-Schioppa, T., & Lamfalussy, A. (2011). La réforme du système monétaire international, une approche coopérative pour le 21ème siècle. Paris: Initiative du Palais Royal

27 Arthus P, (2011), Il est très difficile de croire à la coordination des politiques monétaires, Le G20 et la nouvelle gouvernance économique mondiale, sous la direction de Jacques Mistral, Editions Puf, Paris

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important, puisqu’elles sont soumises aux aléas des politiques de changes américaines. En effet, l’excès de liquidité et des taux d'intérêt bas résultant des politiques expansionnistes américaines, se traduisent par des flux de capitaux spéculatifs vers les pays émergents. L’excès de liquidité mondiale contribue également au gonflement des bulles sur les actifs et provoque la hausse des prix des matières premières.

Le sort des principales monnaies est donc pour l’instant marqué par la volatilité croissante des marchés et par les tensions internationales, qui a elles toutes menacent la stabilité de l’économie mondiale. Là se trouve tout le défi de la coopération internationale.

1.3.3 La nécessité de réforme du système monétaire actuel.

La crise de 2008 a mis en lumière les vulnérabilités du système financier des principales économies avancées, ces difficultés se sont ensuite rapidement étendues à l’ensemble du système monétaire et financier international28. Par conséquent, la crise financière et monétaire pose la question de l'organisation d'un système monétaire international plus stable et plus régulé. Il y a certes matière à controverse quant au lien entre ces déséquilibres et la crise financière récente. Toutefois, il est clair que le système actuel ne favorise pas les ajustements. Le rôle du SMI dans la genèse de la crise met en évidence l’urgence de la réforme. Avec la crise financière et les difficultés économiques durables qui découlent de ce « non-système », une reconfiguration est devenu urgente. En effet, les risques du système actuel sont trop importants pour être négligés. Comme le rappelle M. Camdessus « aussi longtemps que les problèmes du système monétaire international ne seront pas traités, l’économie mondiale en voie d’intégration croissante sera de plus en plus vulnérable » 29 . Ces faiblesses empêchent le SMI de remplir durablement sont objectif fondamental qui est de « fournir un cadre facilitant les échanges de biens, de services et de capitaux entre nations et favorisant une croissance économique saine » (c.f article IV des statuts du Fonds Monétaire International). Par conséquent, plus d’attention et d’importance doivent être portés au SMI. C’est ainsi qu’au Sommet de Toronto les dirigeants du G20 se sont accordés sur l’objectif de « construire un système monétaire international plus stable et résistant »30. L’enjeu est de trouver un équilibre entre la liberté des marchés et la provision de biens publics destinés à stabiliser l’économie mondiale. Il nait de cet enjeu une réelle nécessité d’ajustement.

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28 Rappel: L’interruption soudaine des flux de capitaux à provoqué une pénurie de liquidité; les investisseurs ont alors tenté de réduire leur exposition au risque et limiter leurs financements par l’emprunt.

29 Camdessus, M., Padoa-Schioppa, T., & Lamfalussy, A. (2011). La réforme du système monétaire international, une approche coopérative pourle 21ème siècle. Paris: Initiative du Palais Royal.

30 Déclaration du Sommet G20 à Toronto, les 26 et 27 juin 2010, Communiqué final.

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La crise de 2008 et le spectre d’une « guerre des monnaies » tirent la sonnette d’alarme sur la nécessité d’une gouvernance mondiale effective. Dans un monde aussi étroitement interconnecté, les performances de chaque pays dépendent majoritairement des évolutions et des décisions prises ailleurs. Ainsi, il est nécessaire d’imposer des règles et des procédures contribuant à garantir cette cohérence globale. «Il faut [oser] espérer que la communauté internationale, [sous l’égide du G20] , adopte des règles communes permettant de corriger par une action collective les distorsions de taux de change réels ou de fixer des normes explicites de pilotage macroéconomique, dont la combinaison peut assurer une plus grande stabilité systémique» 31 estime André Cartapanis.

2. Le multilatéralisme enlisé 2.1. La gouvernance globale en panne.

2.1.1 Pourquoi parler de gouvernance globale?

Le terme de « gouvernance » est un néologisme utile parce qu’il désigne la façon dont l’économie mondiale est gouvernée, par rapport au terme usuel de « gouvernement » qui porte plutôt une connotation de centralisation. Le concept de gouvernance trouve son origine dans la théorie de l’entreprise. La gouvernance exprime le problème de base de l’organisation économique internationale : comment gouverner sans gouvernement ?32 Rappelons que dans ce mémoire, l’approche de la gouvernance mondiale se veut économique, tout en traitant des institutions et de l’architecture de celle-ci. La gouvernance peut se définir comme « un mode d’ajustement des points de vue » (ibid., p33). Dans cette logique de gouvernance, les hiérarchies sont précaires et discutables, le pouvoir étant quelque chose qui ne cesse de circuler. Dans un tel univers, le mode de gestion par excellence est la négociation.

Comme le rappelle Gilles Andréani33, le thème de la gouvernance mondiale n’est pas exactement nouveau. Une certaine forme de gouvernance mondiale s’est mise en place depuis l’après guerre. De nombreuses régulations internationales sont apparues dans le prolongement de la création des institutions de Bretton Woods (FMI et Banque Mondiale) et de l’accord de San Francisco sur la Charte des Nations Unies et de

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31 Cartapanis A. (2009) Sous l'égide du G20 , Dossier IV : Réformer le capitalisme financier ? Revue de l'OFCE 2009/3, Editeur Presses de Sciences Po 2009/3 (n° 110) - Cairn.info

32Jacquet, P., Pisani-Ferry, J., & Tubiana, L. (2002). Gouvernance mondiale. Rapport, Paris: La Documentation française.

33 Andréani, G. (2001). -. Gouvernance globale: origines d'une idée. Combler le décalage entre économie mondiale intégrée et ordre international fragmenté (pp. pp. 549-568). Dossier: Politique étrangère, nº 3, 2001.

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la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et du Citoyen. Ces régulations internationales ont permis l'ouverture du marché mondial et ont énoncé une première base éthique universelle (ibid). C’est l’actualité économique internationale de la fin du XXème siècle qui a remis le concept de gouvernance au gout du jour. Les crises internationales de 1997-1998 (asiatique, russe, brésilienne...) ont donné à la gouvernance et à l’idée d’architecture une place prépondérante dans les débats internationaux. Les événements du 11 septembre et la crise financière et économique internationale de 2008 n’ont fait qu’accentuer la « demande » pour une nouvelle gouvernance mondiale (ou pour une gouvernance tout court, nouvelle ou pas...). Un des enjeux de ce travail de recherche est de savoir si « l’offre » va suivre, et à quelles conditions des points de vue économiques, géopolitiques, institutionnels et démocratiques.

La gouvernance comme réponse à la crise de l’Etat Nation

Du point de vu institutionnel et démocratique, la gouvernance s’impose aux premiers abords comme une réponse à la crise des Etat-Nations. Si l’on parle de plus en plus de gouvernance, c’est parce que l’Etat, et sa position de surplomb sur la société est partout remise en question. En effet, la société politique à indiscutablement perdu son pouvoir et son autorité sur la société économique34. Il existe un réel rapport de force entre ces deux sphères. La légitimité idéologique du marché s'étant considérablement accrue, le rapport de force est inégal; il est aujourd’hui favorable à la régulation privée pour la simple raison que l’État n’a pas encore une vision très claire de ce qu’est le bien commun 35. (voir infra la stabilité financière comme bien public mondial). L’État serait encore prisonnier d’une vision très classique de sa souveraineté, et continue à se désintéresser d’enjeux qu’il considère encore comme trop technique, mais dont l’influence est pourtant essentielle tant qu’elle est structurante (voir infra normes comptables). Il apparait donc que l’État traverse une réelle crise de transformation. La question de la gouvernance surviendrait alors en réponse à cette crise, en se désignant capable de fournir la stabilité financière tant recherchée.

La gouvernance mondiale ne peut plus reposer sur la fiction des relations entre États souverains.

Pour les auteurs du rapport sur la gouvernance mondiale36, « la fiction des États souverains » réduit la gouvernance mondiale à des relations diplomatiques entre États. Cette conception de l’Etat est héritée du traité de Wesphalie, qui a plus de 250 ans. C’est cette conception de l’Etat, son inadéquation à la réalité du monde d’aujourd’hui qui est

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34 Selon Zaiki Laidi “les raisons de cette évolution découlent de transformations culturelles majeures liées à l’individualisme des préférence et des choix, ainsi qu’une transformation du rapport au politique” (2002). volume III. Les enjeux de la gouvernance mondiale (p. 17). volume III, Paris: Annuaire Français des Relations Internationales, AFRI.

35 Vercauterren P., (2010) Crise financière et crise multiple; la gouvernance globale et l’intervention de l’Etat. La crise économique et financière de 2008-2009, l’entrée dans le 21ème siècle? Bruxelles: P.I.E Peter Lang, p177

36 Calame P., (2001b) Refonder la gouvernance mondiale pour répondre aux défis du 21ème siècle, L’alliance pour un monde responsable pluriel et solidaire, Paris: Editions Charles Léopold Mayer.

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en cause. « La crise des relations inter-étatiques est le reflet de la crise des États, en général et des États-Nations en particulier »37. Selon cette théorie, la gouvernance mondiale actuelle souffre du fait que ses acteurs fondamentaux, les États, sont eux même en crise. L’Etat est encore considéré comme un niveau essentiel de la gouvernance. Or, cette conception de l’Etat est inadéquate à la réalité du monde d’aujourd’hui. « L’Etat doit être considéré comme un niveau parmi d’autres, articulé aux autres, avec des autres instances supra et infra-nationales38 ». Pour les partisans de cette théorie, affirmer que seul le pouvoir de l’Etat est important ne peut conduire qu’au morcellement des territoires ( à l’image des Balkans), à des rivalités pour la maitrise d’un seul et même territoire (à l’image du conflit Israël-Palestine), ou la multiplication des conflits internes. Pour ces auteurs, la souveraineté Etatique relève tout simplement de l’utopie.

Par conséquent, la gouvernance se présente comme la meilleure réponse face à ces rivalités. Son concept vise à assurer à la fois l’unité et la diversité de la communauté et a promouvoir l’apprentissage d’une culture de paix et la gestion pacifique des conflits, afin de garantir la sécurité de chaque pays39. Les agences des Nations Unies ont été conçues pour traiter une certaine catégorie de problème, de façon multilatérale, par le dialogue entre États, c’est ce qui explique leur blocage aujourd’hui d’après Pierre Calame (2001b). Cet auteur considère que le débat sur l’Etat a trop longtemps été de nature purement idéologique. « Ce biais dogmatique [aurait contribué] à déconsidérer le concept de gouvernance lui-même, au moment où il est le plus nécessaire ». Par conséquent, il faut élaborer une autre philosophie de l’Etat et en impulser la réforme afin de consolider la gouvernance mondiale elle-même. « L’architecture de la gouvernance mondiale ne peut se concevoir sans une refondation des États nationaux, sans une redéfinition de leur rôle, de leur modalités de fonctionnement et de leur articulation avec les autres ordres politiques» (ibid).

2.1.2 Qu’elle perspective pour la gouvernance mondiale au regard de la crise?

Pour répondre à cette question, on peut s'appuyer sur la figure stylisée de Dani Rodrik40 (2000) elle-même inspirée du triangle d'incompatibilité de Robert Mundell, bien connu des spécialistes de politique économique (c.f annexe 1 p104). Rodrik croit pouvoir établir un triangle d’incompatibilité entre trois aspects du monde contemporain : la démocratie, la souveraineté nationale, et l’(hyper)globalisation économique. On peut avoir deux de ces aspects en même temps, mais pas les trois à la fois. En établissement un lien entre économie et politique, Dani Rodrik pose qu’il est

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37Siroën, J. (2002). Relations économiques internationales. Rosny-sous-Bois (Seine-Saint-Denis): Bréal.

38 Jacquet, P., Pisani-Ferry, J., & Tubiana, L. (2002). Gouvernance mondiale. Rapport, Paris: La Documentation française

39 ibid.

40 Rodrik. D 2000, The globalization Paradox, Democracy and the Future of the World Economy,

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impossible d’avoir simultanément des États-nations souverains, un gouvernement démocratique et une intégration économique mondiale poussée. A cet égard, il semblerait que la crise économique et financière soit encore une autre manifestation de ce que Rodrik appelle « le trilemme politique de l’économie mondiale » : globalisation économique, démocratie politique et les États-nations sont mutuellement irréconciliables. Pas plus de deux axes ne peuvent agir concomitamment. La démocratie n’est compatible avec la souveraineté nationale que si la globalisation est bridée. Si nous encourageons la globalisation tout en conservant l’État-nation, nous devons alors sacrifier la démocratie, si nous voulons globalisation et démocratie, nous devons écarter l’État-nation et nous efforcer de renforcer la gouvernance internationale. Il semblerait qu’il soit impossible de renoncer à la globalisation et encore moins à la démocratie. De ce fait, nous n’avons pas d’autre choix que de consolider la gouvernance internationale, au détriment de l’Etat-Nation. De part cette figure, on peut également conclure que la globalisation réduit considérablement l’éventail des choix politiques...

2.1.3 Les limites et faiblesses de la gouvernance globale dans la gestion de la crise.

Dans un premier temps, les limites et les faiblesses de la gouvernance mondiale vont se révéler à l’occasion des crises économiques et financière des années 199041, suscitant de la sorte des critiques à son encontre. La multiplication de ces catastrophes économiques sont des symptômes non négligeables de la crise de la gouvernance, et ont contribué à son impopularité. La responsabilité de ces crises a largement été attribuée aux recettes du Consensus de Washington. De plus, cette succession de crise, plus ou moins bien gérées par le FMI, donnent le sentiment d’une globalisation financière mal maîtrisée, dans laquelle le processus de libéralisation n’a pas été accompagné de la définition de nouvelles régulations ou règles du jeu. De fait, « la crise de la gouvernance mondiale » n’est pas un phénomène nouveau. Les critiques avancées à l’égard des instituions existaient avant même l’éclatement de la crise des subprimes.

Dresser un état des lieux du multilatéralisme semble nécessaire pour mieux saisir l’ampleur de la crise de gouvernance et la complexité de la tâche. La crise de 2008 nous interpelle sur les insuffisances de la gouvernance globale: L’impression semble alors s’imposer que la gouvernance globale est en recul. Comment les États et les institutions internationales n’ont-ils pas été en mesure de de prévenir cette crise?

D’une part, l’incompétence du FMI a détecter une situation d’urgence est mise en cause. A ce sujet, dans un bulletin daté du 6 mars 2009, le FMI admet certaines carences42. Malgré la menace grandissante de crise, le FMI reconnait n’avoir donné aucun caractère d’urgence aux mises en garde sur la concentration des risques dans le

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41 Mexique en 1994-1995, Asie orientale à partir de juillet 1997, Russie en août 1998, Brésil en 1998-1999, plus récemment et en cours Turquie, Argentine...la responsabilité de ces crises a été attribuée, du moins en partie, aux recettes du consensus de Washington

42 Le FMI invite à repenser la gestion des risques systémiques mondiaux. (6 mars 2009,). Bulletin du FMI en ligne, consultable sur www.imf.org

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secteur financier et les perspectives de déséquilibres mondiaux. La première conclusion que l’on peut tirer de cet échec est que les institutions de la gouvernance ne disposent pas d’ un dispositif d’alerte compétent. Ce même bulletin pointe également du doigt la mauvaise volonté des États. En effet, les autorités auraient fait preuve d’un certain manque de volonté à coordonner une action de riposte face à la crise. Au risque de déclencher une nouvelle vague de panique bancaire, elles ont préféré se précipiter au secours de leurs banques nationales. En l'occurrence, ces initiatives prises au niveau national ont parfois amplifiés les effets de la crise (voir infra).

Au final, la crise aura rappelé avec force que les messages doivent être plus clairs et qu'il faut davantage, et non pas moins, de coopération internationale dans un grand nombre de domaines de l’économie et des finances.

2.2 Monde multipolaire et concurrence capitalismes Il semble clair que la négociation soit aujourd'hui plus que jamais nécessaire. Nous sortons d'un système international compétitif où les décisions essentielles étaient prises à l'échelle des nations. De nos jours, la mondialisation fait prévaloir le principe d'interdépendance. Autant dire que la mondialisation s'impose logiquement comme un accélérateur de la négociation internationale. Néanmoins, le constat établi dans le bulletin du FMI cité précédemment nous pousse à nous demander: le multilatéralisme est-il à bout de souffle ? Certains observateurs parlent d’une faillite du multilatéralisme. La coopération internationale ne progresserait que très difficilement. Selon Thierry Soret (2010) « La mondialisation, tout en rendant la négociation plus que jamais nécessaire, multiplie les obstacles à sa réalisation ».

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2.2.1 Le manque de volonté politique

Il semblerait que les négociations sur la scène internationale se heurtent à de plus en plus d'obstacles. L'un des plus importants étant le manque de volonté politique. La période contemporaine est caractérisée par une nouvelle réparation des influences et des pouvoirs. Par conséquent, il convient d’adopter une perspective réaliste de la mondialisation : celle de la multipolarisation. La multipolarisation du monde s’est accompagnée de grands changements. A commencer par l’affaiblissement de l’hégémonie Américaine. Initiateurs, voire pivot de ce qui existait de gouvernance économique mondiale, la position des États-Unis était jusqu’alors hégémonique. Ils contribuaient activement à l’organisation de l’économie mondiale. Concurrencée par les émergents, le poids relatif des États-Unis sur la scène internationale a baissé. L'irruption des puissance émergentes a brouillé les repères établis. D’une part, « l’arrivée des émergents modifie en profondeur les données de la compétition » 43 , ce qui tend à produire une résistance de la part des anciennes puissances. D’autre part , ces pays entendent affermir leurs succès encore limités et fragiles avant de s’engager dans des efforts en vue d’une meilleure gouvernance mondiale. Ces tensions entre les puissances classiques et puissances émergentes est une caractéristique de la multipolarisation et contribuerait à bloquer le processus coopération.

Cependant aujourd’hui, Bertrand Badie explique que « l'enjeu de la négociation n'est plus une compétition de puissance mesurable dans un espace-temps restreint, mais l'aménagement de biens communs»44 or un tel aménagement est étalé dans le temps. Dans un contexte de crise, où les opinions attendent des avantages immédiats, la machine de la négociation se retrouve complètement bloquée.

2.2.2 Divergences d'intérêts et clivages idéologiques

Les divergences d'intérêt et les clivages idéologiques constituent un autre obstacle à la coopération internationale. En effet, la diversité des convictions et la variété des intérêts interdisent l’affirmation d’engagements plus spécifiques, du moins en amont de négociations45. Par conséquent, les discours sur les finalités collectives à l’échelle mondiale dérivent généralement assez vite vers des généralités sans contenu : chacun s’accorde aisément pour souhaiter des échanges dynamiques, la stabilité financière, et une croissance vigoureuse, soutenable et génératrice de développement.

Une des conséquences de cette divergence est que nous assistons aujourd'hui à un retour préoccupant du bilatéralisme: le choix bilatéral se présente comme une sorte d’alternative devant les blocages de la négociation multilatérale46. Ainsi, les États-Unis

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43 Badie, B. "Les puissances occidentales doivent revoir leur méthode de négociation. Le Monde.[En ligne] [ modifié le 5/07/2012] -[ Consulté le 20 juillet 2012 ]

44 ibid.

45 Jacquet, P., Pisani-Ferry, J., & Tubiana, L. (2002). Gouvernance mondiale. Rapport, Paris: La Documentation française.

46 Siroën, J. (2002). Relations économiques internationales. Rosny-sous-Bois (Seine-Saint-Denis): Bréal.

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contournent fréquemment les rigueurs du multilatéralisme par des accords bilatéraux avantageux. Selon l’expression de Richard Haas, les États-Unis seraient adeptes d’un « multilatéralisme à la carte »47. Il s’est avéré que l’idée d’une gouvernance globale demeure peu séduisante pour les États-Unis. Depuis les années 1980, les États-Unis ont progressivement durcit leur attitude vis-à vis des accords et structures coopératives, ils sont moins sensibles aux contreparties qu’ils y trouvent, ou beaucoup plus exigeants. Les États-Unis restent attachés à l’ordre Westphalien, fondé sur la souveraineté des États et la résolution politique des conflits entre ces derniers (ibid). De ce fait, ils portent d’avantage attention aux atteintes à leur souveraineté nationale. Cet isolationisme et l’internationalisme unilatéral les poussent à minimiser la prise en compte des intérêts extérieurs dans la définition leur choix. Le refus de ratifier le protocole de Kyoto traduit cette réticence. Leur négligences face à leur déficit courant, l’effondrement de l’aide publique au développement, ainsi que les tentations protectionnismes expriment également cette tentation de retrait (ibid). Par conséquent, le défi de la reconstruction (ou construction) d’une gouvernance mondiale est d’autant plus exigent que les désaccords persistent.

Enfin, les clivages idéologiques et culturels sur la conception de la gouvernance ont également tendance a bloquer le processus d’un renforcement de la coopération internationale. Il existe en effet des divergences entre les attentes et bienfaits de la gouvernance mondiale. Pour de nombreux pays, l’un des avantages d’ une gouvernance globale multilatérale tient à la protection qu’elle procure face au risque d’unilatéralisme des plus puissants. Cette avantage peut contrebalancer l’ inconvénient que représente la réduction du champ de la souveraineté qui accompagne les engagements multilatéraux48. Au delà des clivages politiques et idéologiques, il existe des clivages tactiques notamment entre l’Europe et les États-Unis. Alors que l’Europe se plutôt montre sensible à l’architecture de la mondialisation, les États-Unis prêtent plus attention aux résultats tangibles qu’ils peuvent en tirer. L’exemple pouvant illustrer cet argument peut être la pression à la libéralisation de l’agriculture qu'exerce les États-Unis sur l’Europe49. De son côté, l’Europe résiste encore à redéfinir sa représentation au sein des organes multilatéraux. Les pays membres sont représentes individuellement au sein du FMI et de la Banque Mondiale ce qui rend l’Europe incapable de « parler d’une seule voix » et d’affirmer ses objectifs en matière de coopération ou politique extérieure.

Au final, ces choix fragmentés ont un effet global négatif, rendant la mondialisation d'autant moins gouvernable. Selon Bertrand Badie, nous nous trouvons dans la logique d’un double cercle vicieux: d’une part, on s'aperçoit qu'à mesure que la crise s'aggrave, la tentation de faire cavalier seul se renforce. Or, plus les États sont amenés à faire des choix égoïstes, plus la crise globale s'aggrave. D’autre part, plus les

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47 « What you’re going to get from this administration is “à la carte multilateralism”» a déclaré Richard Haass, directeur du Policy Planning Staff du State Department, lors d’une conférence par le Nixon Center, précisant : « We’ll look at each agreement and make a decision, rather than come out with a broad-based approach », cité par Thom Shanker (2001).

48 Jacquet, P., Pisani-Ferry, J., & Tubiana, L. (2002). Gouvernance mondiale. Rapport, Paris: La Documentation française.

49 ibid

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contrastes seront forts au sein de l'espace mondial et plus les réflexes égoïstes seront prononcés ; plus le besoin d'un ordre commun redéfini vient à s’imposer et plus les puissants ont intérêt à miser sur « l'immobilisme, la connivence et la diplomatie rhétorique ». Voilà pourquoi Rio 2012 (conférence des Nations Unies sur le développement durable) restera dans l'histoire comme une diplomatie des mots, tandis que les G8 et les G20 s'imposent comme « des temples de l'immobilisme » 50.

2.2.3 La crise de finalité du multilatéralisme Selon plusieurs auteurs, la gouvernance globale souffrirait d’une crise de finalités. Un des obstacles fondamental placé sur le chemin de la gouvernance mondiale serait « l’absence d’unité de vue sur les tenants et aboutissants de la croissance économique à l’échelle internationale » (Jacquet & al. 2002). L'intégration économique est devenue fin en soi. La vision de la coopération internationale se base en effet sur une sorte « d’utopie économie » dont les mots d’ordres sont le libre-échange et la libéralisation financière. Trop souvent, de façon implicite ou explicite, les instituions internationales et de nombreux économistes du commerce international promeuvent l’idée que la libéralisation commerciale serait une condition nécessaire et suffisante du développement51. Or ce lien est loin d’être affirmé. La libéralisation fait des gagnants et des perdants. Selon cette même théorie, nous serions dans une période de « concurrence des capitalismes » où les pays occidentaux s’accrocheraient encore désespérément à leurs succès passés. Cette concurrence des capitalismes entre les puissances émergentes et les pays occidentaux conduirait à une vision désunifiée de l’avenir. La réorientation vers des objectifs communs se présente donc comme une condition du succès du multilatéralisme. Pour cela, « un message crédible sur la libéralisation [est nécessaire] [il] doit être plus précis, et parler des coûts, de leur répartition, et de leur gestion, autant que des bénéfices »52.

2.3 Les institutions de la gouvernance en crise.

2.3.1 Etat des lieux

Les institutions économiques internationales furent crées afin que l’économie mondiale ne retombe pas en récession et sous-emplois, comme ce fut le cas après la crise de 1929 qui a conduisit à la deuxième guerre mondiale. Jacques Fontanel constate que le processus de globalisation a semblé ouvrir une voie plutôt favorable à ces organisations à vocation mondiale53. Aujourd’hui, les organisations internationales

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51 Badie, B. "Les puissances occidentales doivent revoir leur méthode de négociation. Le Monde.[En ligne] [ modifié le 5/07/2012] -[ Consulté le 20 juillet 2012 ]

52ibid

53 ibid

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inter-étatiques gèrent une architecture complexe de relations économiques internationales qui connaissent de nouveaux développements. Force est de constater qu’en ce début de XXIème siècle, l’architecture institutionnelle des relations internationales est devenue extrêmement dense. Dans l'architecture d’ensemble du système institutionnel international, on retrouve en premier plan le système des Nations Unies et celui de Bretton Woods, tout deux hérités de l’après-guerre. Comme l’explique Thomas Boisson54, le système institutionnel né lors des accords de Bretton Woods signés en 1944 repose sur deux principes fondamentaux: la spécialisation et la coordination. Les instituions internationales sont spécialisées dans des domaines particuliers. Voici une liste non exhaustive des principales institutions internationales spécialisées : développement (Banque Mondiale,); finance (Fonds monétaire international); commerce (Organisation Mondiale du Commerce); santé (Organisation Mondiale de la Santé); travail (Organisation Internationale du Travail); maintien de la paix (Organisation des Nations Unies). Ces agences spécialisées construisent au fil du temps une expertise dans leur domaine de compétence. Jean Tirole nous rappelle que les institutions internationales ont pour mission de pallier la défaillance du marché55. Ces instituions spécialisées sont des entités autonomes disposant de moyens et de structures de gouvernance propres. Elles produisent des politiques publiques, et exercent une action normative. La légitimité et la mission de ces agences découlent de leur mandat définit par traité. Selon Thierry Soret, ces institutions assument un rôle central au sein l’architecture multilatérale: elles sont les représentantes de la gouvernance économique mondiale 56.

L’autre caractéristique du système de gouvernance mondiale établi après 1945 est sa structure hétérogène: certaines institutions relèvent du système des Nations Unies (PNUE, OMS, OIT) -d’autres- du régime des institutions de Bretton Woods, et l’OMC et Banque des Règlements Internationaux d’un statut spécifique. Parallèlement à ce système institutionnel, des regroupements informels d’États formés sur une base collégiale restreinte se sont progressivement constitués: G7 ; G10; G20... Thierry Soret (2010) explique l'émergence de ces « laboratoire de gouvernance » 57 par ce qu’il décrit comme un paysage institutionnel « éclaté et peu performant » . En effet, les institutions multilatérales souffrent d’une crise d'efficacité et de légitimité en raison de l'absence de consensus politique et du fait de système de gouvernance obsolètes ou inadéquats. L’inertie des instituions à laquelle s’ajoute des d'intérêts nationaux divergents, pousse les gouvernements à former des groupes de coopération ad hoc pour traiter de

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54 Fontanel, J. (2007) L’essor des organisation économiques internationales: régionalisation vs globalisation, Economie politique internationale, Introduction, volume VIII, Paris: AFRI

55 Tirole J. (2002) La gouvernance des instituions internationales, Gouvernance mondiale, Rapport de synthèse, Jacquet P. et al, p286-296

56 Boisson T. (2002) Panorama analytique des instituions de la gouvernance mondiale, Gouvernance mondiale, Rapport de synthèse Jacquet et al, p146-152

57 Terme emprunté à Jacques Fontanel

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questions d’intérêt commun. Ces groupements informels (les G-n) sont une manière « ancienne et réaliste » de bâtir de la coopération internationale 58.

Selon Thierry Soret (2010), l’architecture de la gouvernance économique mondiale souffre de trois déficits qui entravent l’action collective face au défis globaux: le déficit d'efficacité, de légitimité et de coordination. Ces déficits affectent l’ensemble du système de coopération économique internationale en se manifestant à la fois dans les institutions internationales classiques (treaty-based) et dans les groupes informels de coopération (informal arrangements): les « G-n ». Du fait de ces trois déficits, les instituions multilatérales font l’objet de vives critiques dans l’opinion publique. Ces critiques portent tant sur leur missions que sur leur mode de gouvernance. Jacquet et al (2002) proposent d’examiner les difficultés des instituions sous « trois critères classiques »: l'efficacité, l’équité et la responsabilité démocratique, tout en reliant cette analyse à une question plus générale de la légitimité.

2.3.2 Les institutions souffrent d’un « déficit » d'efficacité et de crédibilité.

On constate que les mécanismes actuels de coopération n’ont pas permis de réduire de manière significative les déséquilibres économiques et financiers mondiaux. L’efficacité des instituions telle que le Fond Monétaire International et la Banque Mondiale sont largement mis en doute. « L’action de ces instituions multilatérale est critiquée car elle ne convainc pas »59. L’action du FMI en matière de prévision des crises est largement critiquée, comme en témoigne la succession des crises ces 20 dernières années, jusqu’à celle des subprimes. Le FMI aurait ignoré les alertes lancées par certains experts. De même manière, l’efficacité de l’aide que fournie la Banque Mondiale est contestée, puisque cette dernière ne semble pas parvenir à tirer de la pauvreté un grand nombre de pays en développement. Selon les estimations, 1,29 milliard de personnes vivraient avec moins de 1,25 dollar par jour en 2008, soit 22 % de la population du monde en développement60. Enfin, ces deux instituions seraient également victime du réquisitoire contre la mondialisation néolibérale et ses effets néfastes, qui comprennent les critiques sur le lien entre ouverture commerciale et financière , le développement et la réduction de la pauvreté.

Pour illustrer le manque de crédibilité du système institutionnel international, Thierry Soret (2010) prend l’exemple du FMI. Le FMI s’est révélé essentiel dans le maintien de la stabilité économique. Sur décision du G20 61, il à été désigné principal « sauveteur » de l’économie mondiale après la crise des subprimes. Toutefois, ce regain

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58 Soret, T., & Védrine, H. (2010). Crise dans la gouvernance économique mondiale. Paris: Fondation Jean Jaurès

59 ibid, p54

60 http://web.worldbank.org

61 Le Sommet du G20 de Londres en avril 2009 à renfloué les caisses du FMI de plus de 750 milliards de dollars de crédit disponible.

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de popularité n’efface pas les raisons qui ont conduit à sa perte de crédibilité des années précédentes cette dernière crise. La plus part des pays en développement entretiennent une certaine méfiance à l’égard du FMI. Les désastres économiques du Consensus de Washington62 restent gravés dans les mémoires. D’autre part, la crédibilité du FMI est entamée en raison d’une « représentation dépassée et poussiéreuse des équilibres économiques » : son système de pondération des voix est discutable du fait de la surreprésentation des européens dans son conseil d’administration (8 directeurs exécutifs sur 24). La gouvernance du FMI est un sujet controversé: le FMI jouit d’une autonomie non négligeable et de peu de contrôle sur sa politique. Les agendas et les votes sont tenus secret, les citoyens n’y ont pas accès. Le FMI est composé de 24 administrateurs qui prennent souvent leur décision par consensus, sans que leur vote ni les opinions contraires ne soient publiés. Il y a là une absence patente de transparence dans les processus de décisions.

Il paraît évident que l’opacité réduit considérablement l’efficacité et la portée des missions confiées aux institutions internationales. Le FMI est également souvent critiqué pour ses missions floues et ses recommandations irrationnelles. Ses analyses des crises financières internationales se focaliseraient trop souvent sur les symptômes, ce qui le conduit à recommander d’éliminer ces symptômes plutôt qu’essayer de traiter les racines du mal. En ce sens, le FMI fait preuve d’irrationalité. Parmi les nombreuses critiques qu’adresse Joseph Stiglitz au FMI, une des principales est que le Fond ne prête aux pays en difficultés seulement si ils acceptent de suivre une politique économique restrictive, ce qui in fine aggrave encore plus la mauvaise passe qu’un pays peu traverser63. Rappelons que l’objectif initial du FMI était d'améliorer la stabilité du système économique mondial. Or, selon Joseph Stigllitz, le FMI a contribué a crée un monde plus instable, et la promotion de la libéralisation des marchés des capitaux, qui caractérise entre autre les recommandations du Consensus de Washington, en est une des principales raisons64.

En outre, les institutions internationales font face à un dilemme entre légitimité et efficacité. L’OMC rassemble de manière inclusive tous les États désireux de mettre en oeuvre un système commercial multilatéral ( soit 153 membres). L’OMC jouit d’une grande légitimité grâce à la règle du consensus qui régit la prise de décision dans ses principaux organes de décision (Conférence ministérielle et Conseil général). Cependant cette légitimité se fait au détriment de son efficacité. Comme en témoigne l’échec du cycle de Doha65 , l’OMC ne réussit pas à endiguer certains blocages du fait de la multiplicité de ses membres et des divergences de leurs préférences. Ce blocage s’est d’ailleurs traduit par une hausse des accords bilatéraux et régionaux dans le

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62 Selon les principes du Consensus de Washington, pour qu’un pays prospère, le libre-échange, un Etat de faible taille, des impôts peu élevés, la propriété privée et la dérégulation doivent prévaloir dans tous les domaines.

63 Stiglitz, J. (2011). La gouvernance mondiale est-elle au service de l’intérêt général global? Revue de l'OFCE, n°2011-19, Paris.

64 Cet argument peut se retrouver dans les nombreux ouvrages de Joseph Stilglitz.

65 Le cycle de Doha, tenu en 2001, désigne la ronde de négociations portant sur le thème de la libéralisation du commerce international dans les PED . Elle fut marquée du fait des désaccords permanent et insoluble entre les différents États, notamment sur la libéralisation de l'agriculture.

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domaine du commerce international. La construction d’un consensus entre des intérêts et des préférences collectives pas toujours convergents constitue un défi de taille pour la gouvernance économique mondiale.

2.3.3 Une crise de légitimité.

Les institutions internationales souffrent également d’un « déficit de légitimité ». Ce manque de légitimité se manifeste à la fois par la critique de l’opinion publique et des contre-pouvoirs (ONG). C’est principalement la crédibilité des institutions internationales à produire une action régulatrice qui est ici remise en cause.. Les institutions internationales n’intègrant pas suffisamment l’immense majorité des pays en développement dans leurs processus de décision, les modes de régulation seraient entre les mains des acteurs les plus puissants. Par exemple, seul les États-Unis possèdent un droit de véto au sein du FMI. Les droits de votes sont déterminées par l’étendue du pouvoir économique fixé a la fin de la deuxième guerre mondiale, par conséquent les puissances émergences y sont sous-représentées. La composition du G20 est également problématique. Les européens y sont sureprésentés, avec 8 représentants, alors que cette région ne représente pas plus d’un tiers de la communauté internationale en terme de poids économique, politique ou démographique66. Les instituions « auto-proclamées» n’ont pas de légitimité réelle puisqu’elles reposent sur une logique de club, quand bien même la légitimité découle de la représentativité. Néanmoins, les critiques à l’encontre du G20 ne font pas l’unanimité. Pour certains experts, les débats sur la légitimité du G20 sont inutiles et illusoires, premièrement parce que les décisions prises en son sein n’ont pas de valeur juridique, et deuxièmement parce que les pays exclus sont voués à éternellement remettre en cause son caractère illégitime67. A cet égard, pour Philippe Moreau Desfarges, le concept même de gouvernance implique la transformation de la question de la légitimité. « La légitimité d’une action ou d’une politique n’est plus seulement enfermée dans un vote (...), elle ne s’appui plus que sur l’unique approbation du peuple concerné(...). La légitimité repose sur l’opinion publique mondiale, les ONG, les autres gouvernements et opérateurs financiers »68. Les instituions très spécialisées tirent tout particulièrement leur légitimité de la précision des mandats qui leur on été confiés et de leur capacité à en rendre compte. Or aujourd’hui, les mandats des institutions restent assez imprécis.

Le Déficit d’équité et ses conséquences sur la légitimité : le déficit démocratique.

Pierre Calame établit un constat selon lequel « les modes de régulation actuels, déséquilibrés au profit des acteurs les plus puissants, ne confèrent pas à la gouvernance une réelle légitimité ». Le système international actuel n’est pas équitable, alors même

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66 Le G20 et la gouvernance économique mondiale, les défis de la présidence française, Séminaire organisé à l’Ifri le 1er décembre 2010 en collaboration avec le CIGI

67 ibid

68 Moreau Defarges P. (2000), G7-G8 et la gouvernance économique mondiale, Annuairefrançais de relations internationals, vol. I. Paris.

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que «l’équité est une des conditions majeures de la gouvernance»69. L’ordre international contemporain ne donne pas la possibilité aux plus faibles de faire entendre leurs voix et de faire prévaloir leur points de vue face aux plus puissants. Cette absence d’équité se traduit par une succession de dissymétries. Par exemple, il y a dissymétrie en ce qui concerne l’établissement des agendas. Seul l’agenda des pays riches est pris en compte: ils fixent ce qui est acceptable de négocier ou non. Pierre Calame donne comme exemple les permis négociables pour les émissions de gaz carbonique, qui contrairement à la propriété des ressources naturelles, sont ouverts aux négociations. Les pays riches exercent un réel monopole des stratégies sur les délibérations portant sur des problèmes à caractère international. L’exemple même est encore une fois le Consensus de Washington qui traite des modalités de développement des pays pauvres. Pour Bertrand Badie, les pays développés répondent à la montée en puissance des émergents par une « diplomatie de connivence70», qui les conduit à former des clubs très fermés, tels que le G7 ou G20. Or tant que les pays riches prétendent à ce monopole de la puissance, la gouvernance mondiale, et les contraintes qui en découlent ne seront acceptés que du bout des lèvres part les pays en développements; ces peuples ne se sentiront pas impliqués, ni engagés par ce que leurs élites auront éventuellement négocié en leur nom. La structure de décision pyramidale qui caractérise les instituions pose également problème dans la mesure où les spécialistes de certaines questions sont exclus des discussions et des négociations. En outre, des intérêts privés peuvent plus facilement prévaloir dans un système pyramidal de négociation, ce qui rend le processus de décision encore plus défaillant. Ces asymétries du système international confèrent à la gouvernance globale un caractère illégitime. Ce déficit de légitimité empêche la gouvernance mondiale de mettre à bien ses objectifs de stabilité. Ces faiblesses résulteraient d’une vision trop étroitement économique dont feraient preuve les institutions. La problématique de la gouvernance mondiale doit donc aujourd’hui impérativement intégrer une réflexion sur les questions d’équité et de légitimité.

2.3.4 Une architecture institutionnelle qui peine à se réformer

Nous l’avons vu, les formes actuelles de gouvernance sont devenues obsolètes en raison de l’accroissement des interdépendances et de la nouvelle répartition des pouvoirs. Au cours de ces 60 dernières années, la nature des problèmes et des actions a considérablement changé. La crise des institutions internationale découle de leurs difficultés à se réformer pour s’adapter aux changement liés à une globalisation plus poussée. Confronté aux difficultés conjoncturelles et a l’apparition de nouveaux besoins, le système de gouvernance réagit dans la « continuité institutionnelle » : chaque institution répond aux enjeux émergents sur les questions qui relèvent de son mandat. En d’autres termes, elles ont la capacité de s’adapter à de nouvelles situations mais sans jamais se réformer ni réviser leurs fondements. Le FMI modifie ses instruments de réponse aux crise financières, il peut par exemple décider d’allouer des

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69 Calame P., (2001b) Refonder la gouvernance mondiale pour répondre aux défis du 21ème siècle, L’alliance pour un monde responsable pluriel et solidaire, Paris: Editions Charles Léopold Mayer.

70 Badie, B. (2011). La diplomatie de connivence: les dérives oligarchiques du système international. Paris: La Découverte.

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droits de tirages de spéciaux. Il s’agit là d’une bonne capacité de réaction, cependant ces actions n’apportent qu’une réponse limitée aux enjeux de la gouvernance. Le FMI et la Banque Mondiale illustrent les dangers de l’absence de réforme profonde de leur mandat et organisation. Ces deux institutions se sont aujourd'hui éloignés de leurs missions principales pour devenir des outils d’action des pays riches sur les pays pauvres, avec tout cela compote d’unilatéralité et d’absence de légitimité71.

Charles Wyplosz résume cette situation par l’idée que l’économie serait en avance sur les institutions72. Pour Pierre Calame (2001b) cette dérive provient du fait que « les systèmes de régulation mondiale ne sont [tout simplement] plus à l’échelle des défis de l’humanité ». Le système économique contemporain est inadapté aux réalités du XXIème siècle et d’une globalisation poussée. Pour Jean-Marc Siroen (2002), cette inadéquation s’explique par un système économique international fondé sur l’internationalisation73 et non pas la globalisation. Les organisations internationales on été fondées pour traiter de l'internationalisation, et non pas de la globalisation. En reconnaissant la pertinence des frontières politiques et l’autonomie relative des États, elles ont pour mission d’assurer la coordination des politiques misent en oeuvre par les gouvernements. Or, la société contemporaine s’inscrit dans un processus de globalisation profond; nous avons dépassé le simple cadre de l’internationalisation. Dès lors, la globalisation annoncerait l'extinction des États-nations, ou encore la mise en place d’instances « mondiales » de régulation selon de nombreux auteurs. Il existe donc un réel problème d’adaptation des instituions vis à vis de ces nouvelles réalités. Christian Boissieu parle «d’écart critique » pour désigner le décalage entre l’évolution des systèmes et l’adaptation des modes de gouvernance74. L’idéologie et le politique ont pris un retard sur une économie en pleine mutation du fait de l’essor de la libéralisation et du renfoncement des interdépendances Ce grand décalage entre les problèmes économiques contemporains et les concepts et idéologiques archaïques, rend inadéquat le mode de gestion des défis contemporain. Par ailleurs, la persistance d’un tel écart nourrit différentes formes d’instabilités: les crises financière, la volatilité des bourses et des changes, la fragilité de certaines d’institutions financières, etc. Pour cet auteur, la crise de la gouvernance mondiale s’explique donc par la stagnation des systèmes de pensée et des institutions par rapport à une société en pleine évolution. Ainsi, les drames sociaux liés à la crise financière de 2008 seraient le résultat de l’absence de cadres de régulation flexibles et solides face à la mondialisation des marchés financiers.

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71 Jacquet, P., Pisani-Ferry, J., & Tubiana, L. (2002). Gouvernance mondiale. Rapport, Paris: La Documentation française.

72 Wyplosz C.(2002) La mondialisation: l’économie en avance sur les institutions, Gouvernance mondiale, Rapport de synthèse, Jacquet et al, p296-307

73 Le concept d’internationalisation est liée à celui l‘interdépendance, et insiste sur les interaction entre éléments qui restent séparés (les États-nation), alors que l’intégration implique une dissolution dans un marché mondial unique, une intégration

74 Boissieu C. (2002), Commentaire, Gouvernance mondiale, Rapport de synthèse, Jacquet et al, p117-125

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Faute de gouvernement mondial, les institutions internationales sont gravement défaillantes. Cet idée fait consensus parmi les experts des relations économiques internationales. La crise économique de 2008 a rappelé que la gestion du monde assurée par des relations diplomatiques entre États nationaux souverains était dépassée. La crise économique à renforcé un constat déjà bien établi : une plus grande interdépendance entre les économies et les États implique des espaces et des mécanismes de coopération internationale renforcés. Ce fut l’objet du premier chapitre de démontrer une telle nécessité.

Le premier chapitre a dressé un état des lieux sévère mais lucide de la crise de gouvernance aujourd'hui. Ce diagnostic est nécessaire avant de formuler des pistes de réflexion pour faire évoluer la gouvernance mondiale. Le chapitre suivant consiste à savoir à quelle conditions et sur quelles bases peut-on bâtir une gouvernance économique mondiale, alors même que la mondialisation est une compétition permanente.

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Chapitre II: Une nouvelle gouvernance économique mondiale pour lutter contre les crises systémiques.

1. Refondre le multilatéralisme: 1.1 L’objectif de stabilité financière ou comment concevoir la gouvernance mondiale.

1.1.1 “Problèmes globaux, réponses globales”

Aujourd’hui le multilatéralisme est en crise du fait de la complexité des sujets, et de l’hétérogénéité de valeurs et de préférences de la multitude d’acteurs concernés. Les politiques doivent répondre à des défis de plus en plus complexes et entremêlés. Les pays sont devenus « hypersensibles » aux politiques menées par d’autres du fait de l’intégration économique financière et commerciale. Ainsi, quand l’activité économique ralentie aux États Unis, la Chine, le premier exportateur mondial en ressent les conséquences. Le prolongement de la crise économique a entrainé avec elle une crise alimentaire et pétrolière. L'inquiétude des marchés après la crise des subprimes a fait des produits agricoles des valeurs refuge, ce qui a accru considérablement leur cours. De même pour le prix du baril de pétrole qui a atteint le seuil historique de 145 $ en été 2008. Imbriquées, ces crises sont porteuses de risques à la fois pour les individus et pour leur environnement. Pour tous, les interdépendances se sont accrues et constituent une contrainte incontournable. Une telle interconnexion implique donc une approche globale de ces problèmes. Le monde est plus interdépendant que jamais ce qui appelle à une intensification de la coopération internationale.

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Depuis l’éclatement de la crise des subprimes, le besoin de gouvernance économique mondiale est devenu une des priorités de l’agenda politique international. La gouvernance économique mondiale a justement pour seule raison d’être que d’améliorer la coopération internationale. Hubert Védrine souligne avec pertinence « qu’il n’y a pas à proprement parler de crise dans la gouvernance économique mondiale puisque il n’y a pas encore de gouvernance mondiale », mis à part selon lui, celle exercée par les États-Unis sur les marchés déréglés, ou par le dollar75. De nombreux observateurs dressent le même constat: le marché est défaillant. L’autorégulation et la main invisible ont déçu. Ces défaillances sont encore plus évidentes après la crise financière. Il y a donc consensus sur ce point: il faut rendre la mondialisation plus juste, efficace et démocratique. En d’autres termes, il faut une meilleure gouvernance économique globale. Le réalisme oblige à prendre en compte cette nécessité du fait de l’approfondissement continu des interdépendances, du caractère global de certains enjeux et du caractère systémique de certains risques « qui rendent la souveraineté, même la plus puissante, vulnérable »76. De ce fait, les gouvernements ne peuvent pas faire l’impasse sur la coopération internationale. D’ailleurs nul n’en rejette le besoin. Ceux qui remettent en cause la coopération s'attaquent plutôt aux formes actuelles du cadre multilatéral, et appelle à un multilatéralisme plus représentatif des réalités mondiale du XXIème siècle. La montée des problèmes globaux souligne la nécessité croissante d’une action internationale cordonnée. La liste des problèmes globaux est longue et s’allonge continuellement. Ce travail s'intéresse plus particulièrement à l'objectif de stabilité financière qui pose de manière récurrente des problèmes d’action collective. Cet enjeu nécessite une solidarité internationale qui transcende les frontières traditionnelles des l’Etat-Nations. Pour l’opinion publique, la stabilité financière est vite apparue comme une question liée (positivement ou négativement) à la mondialisation. La prise de conscience croissante de l’'interdépendance économique et financière est pour la gouvernance mondiale une mutation de très grande portée77 . En effet, c’est cette prise de conscience globale des effets négatifs de la mondialisation qui incite la collectivité internationale à étendre le champ des problèmes globaux qu’elle doit prendre en charge.

Cette prise de conscience globale s’est accompagnée de l'émergence d’une conscience civique planétaire dont le volume d’ activité a connu une progression continue au cours de ces dernières décennies78. Cette « société civile globale »

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75 Soret, T., & Védrine, H. (2010). Crise dans la gouvernance économique mondiale. Paris: Fondation Jean Jaurès. p10

76 ibid, p15

77 Jacquet, P., Pisani-Ferry, J., & Tubiana, L. (2002). Gouvernance mondiale. Rapport, Paris: La Documentation française. p57

78 ibid p61

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s’exprime de plusieurs manières: contestataire ou non, institutionnalisée (ONG), ou informelle (Forum de Davos). Ces formes d’expression citoyennes reflètent une grande diversité d'intérêts, d’aspirations ou de propositions. Malgré ses divisions et ses problèmes de représentativité(...), ce qui se construit dans le réseau des ONG est bien un début de conscience civique planétaire qui ne peut être ignoré. En ce sens, l'émergence de la société civile constitue une réponse logique à la monté des enjeux de la gouvernance globale.

« Elle traduit d’ abord la perception du fait qu’une part croissante des décisions à caractère économique relève de discussions ou de négociations au niveau international, et une volonté de peser sur les choix à ce même niveau. Elle reflète ensuite une sensibilité aux problèmes globaux et un désir de participer à la définition des réponses adaptées. Elle exprime enfin des préoccupations touchant à la répartition du revenu mondial, entre les États et au sein des États. Dans ces différents cas, la revendication est en outre nourrie du sentiment d’ un déficit démocratique prononcé dans la décision internationale » 79

La gouvernance globale se trouve au coeur d’un consensus entre les politiques, les experts, les pays en développement et les pays développés. De même, si l’on en croit un récent sondage80 les opinions publiques apparaissent aussi vouloir plus de coopération internationale. Rien de surprenant étant donné que le but fondamental de la gouvernance économique mondiale n’est d’autre que le développement partagé. Quand bien même il semble y avoir un consensus général autour de la nécessité de la coopération pour répondre aux défis planétaire, les gouvernement éprouvent de grandes difficultés à se mettre d’accord. Ce paradoxe s’explique par ce que nous avons vu dans le Chapitre I. Les institutions internationales ont des difficultés à mener à bien leur agenda que ce soit en matière de régulation financière, de système monétaire, ou de stabilité économique. Les mécanismes de coordination sont défaillants, si bien que les États ont souvent tendance à préférer l’unilatralité, ou la négociation bilatérale au multilatéralisme. Thierry Soret (2010) définit le bilatéralisme comme « la loi du plus puissant imposée aux autres ». A l’opposé, « le multilatéralisme c’est la démocratie instaurée au plan international: toutes les voix comptes, et chaque pays en a une, de sorte que les intérêts de tous sont pris compte » . La tentation de faire cavalier seul met à mal tout objectif de coordination globale pour répondre aux enjeux de stabilité financière.

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79 ibid p 68

80 “Most Publics Around the World want their governments to be more Cooperative” Décembre 2009, www. wordpublicopinion.org cité dans SORET T, 2010, p2,1

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Aujourd’hui, la coopération multilatérale semblerait avoir besoin d’un nouveau souffle. Un renouveau du multilatéralisme se révèle en effet indispensable pour résoudre la crise de la gouvernance. Réformer le multilatéralisme est devenu une exigence urgente du fait du caractère global de crise et du consensus appelant à une refonde en profondeur de l’ordre international. Ce nouvel ordre doit en l'occurrence « refléter les nouvelles réalités des économies ouvertes »81 . La crise économique nous a fait entrer dans une économie mondiale multipolaire. Thierry Soret (2010) explique que cette même crise a provoqué une accélération du mouvement de rattrapage des grands émergents. Dès lors, le multilatéralisme doit impérativement prendre en compte cette nouvelle géopolitique de la mondialisation: le monde devient multipolaire et le nombre de pays impliqués s’accroit. Il est donc nécessaire de moderniser le multilatéralisme pour qu’il s’adapte à la nouvelle répartition du pouvoir. Thierry Soret précise que « le renouveau du multilatéralisme passe par le renforcement de la coopération entre les États souverains qui restent les pierres angulaires du système international ». L’auteur rappelle également que cette action collective doit être à la fois légitime efficace et cohérente pour que le multilatéralisme demeure un cadre pertinent de coopération82.

Partant de ce postulat, l’objectif de la gouvernance économique mondiale doit être de « susciter et de maintenir une volonté politique partagée entre des entités disparates, aux intérêts rarement convergents, jalouses de leur souveraineté et de leur puissance actuelle ou en devenir»83. Au XXIème siècle, l’objectif fondamental de la gouvernance économique mondiale est le développement partagé et la stabilité. Pour Kemal Dervis, le système de gouvernance économique mondial doit permettre de « gérer les problèmes mondiaux, de fournir des biens publics mondiaux, et de mener des actions collectives efficaces »84. Sans objectif de développement partagé, les risques d’instabilité politique et de conflits augmentent considérablement. La coopération internationale est nécessaire à la fois pour relever les défis planétaires, mais aussi pour assurer la poursuite du développement et du bien être dans les pays industrialisés (Soret 2010). Au final, le multilatéralisme est le cadre le plus approprié à la poursuite du développement partagé. Aujourd’hui en crise, il est urgent de s’atteler à le réformer et le moderniser.

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81 Ben Hammouda, H., & Sadni-Jallab, M. (2011). Le G20 et les défis de la gouvernance globale. Bruxelles: De Boeck. p57

82 Soret, T., & Védrine, H. (2010). Crise dans la gouvernance économique mondiale. Paris: Fondation Jean Jaurès. p14

83 ibid p15

84 Dervis K. (2009), A Way Forward: Formal and Informal Aspects of Economic Governance, dans Re-Defining the Global Economy, n42, Dialogue on Globalization, Occasional Papers New York.

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1.1.2 Penser l’action publique à l’échelle internationale: l’approche de la stabilité financière internationale par les biens publics mondiaux

La mondialisation financière actuelle est plus sujette aux crises qu’avant. Dès lors, la stabilité financière est un des objectifs prioritaires de la coopération internationale. Elle a en outre la particularité d’avoir des effets systémiques. C’est donc bien un problème de dimension transnationale. Dans un premier temps, la recherche d’une action coordonnée s’est exprimée par l'élaboration de normes. Elle s’est également traduite par la multiplication de négociations parallèles sur les accords internationaux. Toutefois, de nombreuses questions se posent quand à la capacité de ces normes à influencer durablement les pratiques. Quels sont les moyens pour que les normes négociées s’appliquent? Comment éviter les comportements de passager clandestin?

L’incertitude quand à l’effectivité de ces normes a mis en avant « la théorie des biens publics », qui s’est ensuite étendue à la notion de « bien public mondiaux ». Les biens publics mondiaux se définissent comme des ressources bénéficiant à l’humanité tout entière; ils sont nécessaires à sa survie et à son épanouissement. Le marché ne peut pas systématiquement assurer leur production. Selon l’interprétation par les BPM, le rôle de l’intervention publique doit être double: assurer la transparence du marché et apporter les fonds nécessaire pour mettre fin à une situation d’incertitude. Résultant d’externalités, ou insuffisamment produite à l’échelle mondiale, l’instabilité financière relève d’une défaillance de marché. Suivant cette logique, la stabilité de l’économie mondiale présente toute les caractéristiques d’un bien public global.

Joseph Stiglitz suggère que le phénomène de mondialisation implique que « la réflexion sur la gouvernance mondiale doit partir de la notion de bien public mondial » 85 En d’autres termes, la mondialisation nécessite le développement et la production de biens publics mondiaux. La théorie des BPM permettrait d'atteindre des objectifs cruciaux tels que la stabilité économique et financière. En effet, en donnant un fondement rationnel à l’action cordonnée, la notion de bien public mondial permet de penser l’action publique à l’échelle internationale. Rappelons que la coordination de action publique internationale est au coeur des réflexions sur la gouvernance mondiale. Selon Stiglitz, la production des BPM doit être relayée par les instituions internationales puisqu’elles ont précisément été crées dans le but de d’accroitre la stabilité économique

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85 Stiglitz, J. (2011). La gouvernance mondiale est-elle au service de l’intérêt général global? Revue de l'OFCE, n°2011-19, Paris.

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à l'échelle globale. Au final, pour Joseph Stiglitz, l’approche de l’action internationale par les PBM a pour but de mettre la gouvernance économique mondiale au service de l'intérêt général.

Certains BPM font déjà l’objet de conventions internationales : tel est le cas de du secteur bancaire qui fait déjà l'objet d’une règlementation par les accords de Bâle signés en 1988. Ces accords ont pour but de favoriser la stabilité bancaire en imposant aux banques un certain ratio de fonds propres (voir infra). La crise de 2008 nous pousse cependant à relativiser l’effectivité de cette convention. N’étant dotée d’aucun caractère coercitif, sa mise en oeuvre effective et son respect dépend de la seule bonne volonté des États. Puisque les règles de Bâle n’impliquent aucune contrepartie de la part des ces derniers, elles sont alors perçues comme un asservissement inutile. Les Etats ont donc tendance à contourner de telles réglementations en opposant le principe de leur souveraineté86. C’est le cas des Etats-Unis qui n’ont jamais réellement appliqué les ratios inscrits dans ces accords. En ignorant ces ratios, le secteur bancaire s’engage dans des techniques à haut risque et met en péril la stabilité de l’économie. L'instabilité financière produit des externalités mondiales, par conséquent il est nécessaire de prendre des mesures correctives aux niveaux national et mondial. Dès lors, la communauté internationale doit s’accorder sur la nature et la gestion des biens publics mondiaux. L’approche de la stabilité financière par les biens publiques mondiaux revient à définir des règles pour sa gestion et sa protection.

La théorie des biens publics globaux pour assurer la protection de la stabilité financière ne fait cependant pas l’unanimité chez certains experts. Pour Christian Chavagneux, l’approche des dysfonctionnements de la finance internationale par les BPM n’est pas convaincante 87. Elle ne comporte pas de dimension politique et occulte les rapports de force politiques globaux. Cette «vision politique idéaliste» s’illustrerait d’ailleurs par l’approche volontariste du PNUD vis-à-vis de la stabilité financière. Le programme des Nations-Unies pour le développement propose une nouvelle approche globale des crises mondiales, il s’attache à promouvoir une coopération internationale en faveur de la stabilité financière en trois points auxquels il est naturellement difficile de s’opposer tant ils paraissent évident88(...). Le PNUD propose une vision très dépolitisée de la stabilité financière, or une telle approche illustre une certaine naïveté pour Christian Chavagneux.

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86 Calame P. (2001), Refonder la gouvernance mondiale pour répondre aux défis du 21ème siècle, Cahier des propositions pour le 21ème siècle, Editions Charles Leopold Mayer, Paris. P 46

87 Chavagneux C. 2001 La stabilité financière internationale est-elle un bien public mondial ? AFSP /Section d’Etudes Internationales — Colloque « Les biens publics mondiaux », Pau-25 et 26 octobre 2001

88 Pour plus d’informations le site web du pnud: www.pnud.org

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En outre, l’histoire financière contemporaine a montré la difficulté et les échecs de la coopération. Le système de Bretton Woods « devait tout à la volonté du leader hégémonique (États-Unis) et peu à une coopération internationale » selon l’auteur. L’approche de la stabilité financière par les BPM tend donc à oublier que la coopération résulte « de décisions politiques d’acteurs privés et publics assez influent pour écrire les règles du jeu de la finance mondiale »89. La question fondamentale est donc de savoir si la stabilité financière est réellement la priorité de l’acteur hégémonique dominant la finance internationale.

Lutter contre l’instabilité financière internationale requiert par conséquent une analyse des dimensions politiques de la finance internationale, devenue sujette à des crises particulièrement fréquentes. Toute réflexion sur l’avenir de la gouvernance mondiale doivent admettre un paramètre fondamental, à savoir qu’il existe une asymétrie entre les États. Les États Unis écrivent encore les règles du jeu de la finance internationale. Ils ont décidé du passage aux changes flottants, de l’ouverture des frontières pour le financement des déficits publics, ils prennent les décisions des formes d’action en cas de crise, etc. Dès lors, ce constat nous interroge sur la faisabilité d’une construction d’une gouvernance économique mondiale au service de l'intérêt général.

1.1.3 Peut on réellement mieux gouverner la mondialisation?

Les problèmes de nature globale se sont multipliés. L’action des États est quand

à elle restée cantonnée aux limites des frontières nationales alors même que le monde des affaires s’est internationalisé. Ce phénomène s’est principalement illustré par la hausse des investissements directs à l’étrangers, les échanges accrus des biens et des services et la multiplication des firmes multinationales. La question est de savoir comment mettre la mondialisation politique au niveau de la mondialisation économique. Beaucoup d’espoirs ont été placés dans les groupements du type G7, G8 et maintenant G20. Tous tentent de répondre au besoin de gouvernance. Cependant, force est de reconnaitre que les conditions de leur succès sont loin d’être remplies.

Depuis quatre ans, l’architecture économique internationale a permis de faire face à la crise en évitant le pire, mais elle manque aujourd’hui de dynamisme. Depuis le sommet de Londres en avril 2009, il ne se passe plus grand chose du coté du G20; il donne l’impression de piétiner : Pittsburg a délivré un mécanisme de surveillance macro-économique collective; Toronto n’a pas été concluent, Séoul a faillit déraillé dans un climat monétaire international détestable. Le contexte économique actuel rend

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89 Strange 1986, 1998 citée dans Chavagneux 2001.

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encore plus difficile la définition de réponse à la crise et de régulation financière. En effet, la crise des dettes souveraines marque une nouvelle étape dans la crise financière. Les États sont en premières lignes et sont contraints de réduire leur dépenses, et ce pour les années à venir. Il n’est donc plus possible d’ouvrir aussi facilement les vannes des budgets publics et des banques centrales. En outre, la réforme du FMI n’avance qu’à petit pas (voir infra ) et les doutes sur l’efficacité du G20 se répandent rapidement. Le G20 doit être capable d'exercer un leadership pour définir quelles seront les stratégies de sortie de crise, achever de coordonner les réformes financières, et la modernisation des institutions internationales. La mutation de l’ordre international est loin d’être accomplie, la diversité de réactions que suscite le G20 en est l’illustration même.

Comment gouverner quand il n’y a pas de société politique? Comment faire accepter la réforme de la gouvernance globale? Ce sont le type de questions que se posent bon nombre d’économistes (Jacquet et al, 2002). Malgré une intégration économique très poussée de l’ensemble des pays, l’économie demeure fragmentée. Pierre Jacquet (2002) fait que remarquer que « l’économie mondiale est aujourd’hui plus fragmentée qu’il y a cent ans- ce qui d’ailleurs peut être interprété comme un signe de dysfonctionnement de la globalisation financière »90. Toute réflexion sur la gouvernance mondiale doit prendre en compte la réalité que certes, les interdépendances sont fortes, mais l’économie mondialisé est fragmentée. Par ailleurs, il semble difficile de croire à une coordination internationale des politiques économiques étant donné l'hétérogénéité persistante des préférence collectives. Force est de constater que même après plusieurs années de libéralisation et d’intensification des échanges, les préférences collectives demeurent très disparates, y compris entre les économies du même niveau de développement. Un exemple peut être donné par la politique de change: les choix nationaux face au dilemme entre fixité et flexibilité des changes ne manifeste aucune convergence. Le simple fait que le débat soit posé en termes antinomiques témoigne de la diversité des préférences. Dès lors, tout semble mener à une thèse de la persistance des disparités de préférences. La polarisation des politiques de change semble révéler que « l’intégration économique agisse comme un révélateur des différences profondes autant ou plus que comme un facteur d'homogénéisation »91. Par ailleurs, la diversité des politiques économiques nationales est de nature à entretenir ou du moins susciter l’hétérogeinété des préférences collectives. Enfin, une difficulté supplémentaire s’ajoute aux défis de faire accepter une réforme de la gouvernance globale. Ce même rapport (Jacquet & al, 2002) souligne que l’unanimité concernant la nécessité de nouvelles régulations mondiales et de leur mise en place effective, est loin d’être faite. « Les

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90 Jacquet, P., Pisani-Ferry, J., & Tubiana, L. (2002). Gouvernance mondiale. Rapport, Paris: La Documentation française.

91 ibid, avant-propos

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initiatives nouvelles sont d’autant plus suspectes qu’elles sont issues des pays riches »92 - beaucoup craignent que ces nouvelles régulations visent à mettre les pays pauvres sous tutelle des pays riches. Les nouvelles puissances du Sud se montrent particulièrement méfiantes vis-à-vis de l’idée de gouvernance globale et de tout ce qui peut évoquer un impérialisme occidental.

Au final, la fragmentation de l’économie et l'hétérogénéité des préférences collectives viennent nuancer l’image d’une gouvernance globale idéalisée et perçue comme une scène ou tous se retrouverait. A cet égard, la vision selon laquelle la mondialisation n’est qu’un processus d’intégration ne rend pas compte ni de la montée des problèmes globaux ni de la manière dont les opinons publiques appréhendent les questions internationales. Les auteurs du rapport du la gouvernance mondiale (Jacquet & al, 2002) proposent donc de résumer ce constat par un graphique qui rassemble deux axes - « les coordonnées de la mondialisation »- donnant une vision plus juste des conséquences des conclusions que nous venons de tirer pour la gouvernance mondiale. C.f annexe 2, p 105

L’insuffisance de l’offre de biens publics mondiaux est manifeste tout comme l'interconnexion croissante de ces problèmes. « Les problèmes mondiaux, par leur nature ne peuvent avoir de solutions que mondiales » souligne Jacques Mistral93. Il faut quelque chose de plus efficace et légitime que le système actuel des Nations Unies. Est-ce utopique de vouloir créer un système démocratique mondial comprenant un aspect législatif qui traite des négociations, et un aspect judiciaire et exécutif capable de faire respecter par les États une forme d'intérêt collectif? Un tel schéma est-il réaliste? Une chose est sûre, il faut de l’ambition et de l’enthousiasme pour venir à bout d’une telle ambition (Mistral 2011).

Pour faire accepter la réforme de la gouvernance globale, l’action collective doit être légitime efficace et cohérente (Soret 2010). Il convient donc de reformer les différents modes de coopération - groupes informel et le système institutionnel multilatéral- et leur articulation. Depuis le sommet de Londres où 5 axes de réflexions majeurs ont été dégagés, le G20 conduit la réflexion et les réformes à apporter à l’ordre économique international. Qu’elles sont les solutions à apporter à la crise et les réformes à mettre en place afin de de construite une nouvelle architecture internationale, capable de gérer le risque systémique croissant? Le monde sera-i-il capable de mettre en place une architecture financière adaptée à la globalisation?

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92 ibid, avant-propos

93 Mistral J (2011), Le G20 et la nouvelle gouvernance économique mondiale, Les cahiers du cercle des économistes, Paris : Descartes & Cie.

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1.2 Propositions pour une gouvernance rénovée

1.2.1 Comment concevoir la gouvernance économique et financière mondiale?

Le concept de gouvernance économique et financière internationale est apparu en réponse aux crise récurrente du XXème et du début de XXIème siècle. Façonnée par l’histoire et la mutation des idées économiques et politiques, la gouvernance n’a cessé d’évoluée faisant ainsi l’objet d’interprétations diverses quand à son concept. Les institutions de Bretton Woods représentent le premier véritable modèle de gouvernance économique et financière mondiale. Le système de gouvernance contemporain s’est développé dans un contexte marqué par la guerre froide et l’hégémonie américaine. Nous l’avons vu, la question de la réforme de la gouvernance économique est financière internationale s’impose du fait de l'accélération de la mondialisation, de l’affaiblissement consécutif des États nations ainsi que la contestation croissante des normes établies par les institution institutions internationales. Comment gouverner et humaniser la mondialisation sans gouvernement mondial? Telle est la question au coeur de la problématique sur le système de gouvernance actuel. Pour répondre à cette interrogation, deux grandes visions de l’ordre économique international s’opposent l’une à l’autre.

La première conception repose sur des règles de jeu stables qui ont pour fonction de cordonner les actions des États et celles des agents économiques. Échangeant strictement sur le plan économique, les États ne sont pas tenus de partager des valeurs ou des finalités communes. Cette approche de la gouvernance trouve ses fondement dans le caractère incomplet de l’intégration économique et l'hétérogénéité des préférence collectives (Jacquet & al, 2002). En évacuant largement le politique, cette vision de la gouvernance de l’économique mondiale réaliserait « l’idéal libéral ». En effet, cette conception dépolitise autant que possible les questions de gouvernance globale, en les renvoyant, au nom de la subsidiairité, sur le niveau national. Les organisation multilatérales sont donc elles même dépolitisées, leur rôles se limitent à pallier aux défaillances du marché. Les règles générales ne sont revues et complétées qu’en cas de comportement délictueux (instabilité financière-ou de défaillance identifiée des marchés). C’est cette conception qui a codifié l’échange international et les traités de commerce jusqu’à présent. L’avantage d’une telle approche est qu’elle permet d'identifier et de définir de manière claire les missions des organisations multilatérales.

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La deuxième conception présuppose au contraire l’existence d’objectifs et de finalités communes, telle que la stabilité monétaire. La finalité et le fondement de la gouvernance sont de ce fait différent de la première conception. Dans cette logique, la gouvernance se définie à partir de buts que les nations se fixent d’atteindre ensemble. Cette approche de la gouvernance trouve son fondement dans l’existence d’enjeux globaux appelant à une action collective. Cette vision de la gouvernance mondiale se rapproche de la conception de la gouvernance nationale en ce qui concerne la nature de ses objectifs. Répondant ainsi à une logique politique, ce modèle confère aux organisations internationales un caractère politique irréductible. C’est en l'occurrence cette conception qui régit les relations économiques internationales contemporaines. Toutefois, la conception alternative émerge souvent dans les réflexions sur l’avenir du multilatéralisme, notamment dans les critiques adressées au FMI94. La communauté internationale se trouve aujourd'hui à la croisée des chemins, elle doit choisir entre poursuivre les efforts d’une reconstruction de la gouvernance économique globale, ou revenir au « minimalisme post-moderne » qui nous a mené à la crise. La difficulté actuelle est donc de concilier les deux logiques que nous venons de voir.

Quel rôle pour l’Etat dans la Gouvernance économique mondiale?

Le concept même de gouvernance tente de rendre compte de la complexité qui est issue de ces deux logiques puisqu'il relativise le rôle de l'État en le considérant comme un des acteurs de la gouvernance parmi d'autres95. La "bonne gouvernance" tend d'ailleurs à prendre la place de l'idéologie néo-libérale en réaffirmant le rôle de l'État, mais d'un État obéissant à certaines normes et aux pouvoirs relativisés par une multitude d'autres acteurs du marché. En somme, la conception de gouvernance amène à redéfinir le rôle de l’Etat pour plusieurs raisons.

Un des impacts de la crise économique se manifeste dans la conception de l’Etat et de son rôle. Il est évident que la crise financière a fait bouger les lignes des idées et des programmes politiques. Par exemple, le plan Paulson96 , adopté par Georges W. Bush, aurait auparavant été jugé contre nature aux États Unis. Pour l‘Etat, la crise

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94 Jacquet, P., Pisani-Ferry, J., & Tubiana, L. (2002). Gouvernance mondiale. Rapport, Paris: La Documentation française.

95 Siroën, J. (2002). Relations économiques internationales. Rosny-sous-Bois (Seine-Saint-Denis): Bréal.

96 Le Plan Paulson, nommé d’après le secrétaire du Trésor américain Henri Paulson, désigne le plan de sauvetage des banques mis en place en réponse aux faillites bancaires de la crise des subprimes. Le Trésor américain à du débourser plus de 700 milliards de dollars pour sauver le système bancaire.

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actuelle est révélatrice du paradoxe de situation qui existe entre d’une part l’Etat en crise de transformation en raison de ses limites (...), et d’autre part les attentes pesant sur l’Etat « roue de secours ». Les avis des économistes restent divergents quand à l’intervention de l’Etat dans la sphère économique. Dans le milieux académique, il n’y a pas non plus de consensus réel sur la place de l’Etat et le rôle qu’il doit endosser dans la définition d’une nouvelle gouvernance économique mondiale. Reste à savoir jusqu’où il convient d’envisager un retour de l’Etat. Pour parvenir à re-fonder la gouvernance mondiale, il faut d’abord examiner les fondements conceptuels et idéologique du système actuel. La crise de la gouvernance mondiale relève de problèmes dans ses fondements idéologiques. Par conséquent, certains auteurs exigent un réexamen de la conception de l’Etat et de son rôle.

Dans le Chapitre 1, nous avons vu que la gouvernance implique la mise en retrait de l’Etat, n’en faisant qu’un acteur parmi d’autres. Dès lors, la notion de gouvernance affaiblie le concept de souveraineté étatique comme il est défini dans le traité de Westphalie. Selon Pierre Vercauterren 97 , le glissement du concept de « gouvernement » vers celui de la « gouvernance » est un phénomène sans équivoque. La gouvernance est présentée comme susceptible d’apporter des solutions aux problèmes de légitimité et d'efficacité que connaissent les démocraties. Par sa logique, la gouvernance a porté et stimulé un mouvement de dérégulation voire de dérèglementation 98 Dès lors, les principales instances de gouvernance mondiale ont exercé une pression externe sur l’Etat, en faveur de retrait de celui-ci, c’est ainsi qu’est survenu le phénomène de glissement entre du « gouvernement » vers la gouvernance » . La gouvernance serait donc à l’origine même du retrait et de l’affaiblissement de l’Etat Nation. Pour Pierre Vercauterren (2010), une des principales faiblesse de la gouvernance réside au coeur de son propre processus. La gouvernance, par la mise en retrait de l’Etat qu’elle implique, et par la pratique d’une logique d’horizontalité, a affaibli la capacité de l’acteur étatique à contrôler, voire même simplement à assurer une coordination. Ainsi, l’efficacité censée être favorisée par le processus de gouvernance s’en trouve être réduite. Ce constat conduit à un paradoxe: la gouvernance, par le mouvement de dérégulation et de retrait de l’Etat qu’elle implique, a tellement contribué à contourner le politique que celui si s’en est trouvé affaibli, et n’a pu de la sorte empêcher la crise de la gouvernance.

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97 Vercauterren P, (2010) Crise financière et crise multiple; la gouvernance globale et l’intervention de l’Etat. La crise économique et financière de 2008-2009, l’entrée dans le 21ème siècle? Bruxelles : P.I.E Peter Lang,

98La régulation se réfère au processus d’arrangement informel entre acteurs; la règlementation est définie comme l’ensemble des normes formelles établies par l’autorité publique et régissant les rapports entre acteurs.

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Quel modèle institutionnel pour la gouvernance économique mondiale?

Deux formes institutionnelles « classiques » s’opposent pour offrir un cadre de gouvernance mondiale stable et légitime : le gouvernement mondial ( le fédéralisme mondial) vs. la coopérative des nations ( l’intergouvernementalisme). Bien que ces deux modèles n’offrent pas de schéma complet pour l’économie mondiale, ils constituent toutefois des étapes nécessaires dans la réflexion sur la gouvernance mondiale.

Le concept de gouvernement mondial fait référence à l’idée de “fédéralisme global” développé par Dani Rodrik (c.f annexe 1). Le modèle fédéral reviendrait à transposer au niveau mondial le type de gouvernement démocratique des États fédéraux, lequel s'appuierait sur un corps juridique surveillé par un parlement mondial. Malgré l'apparition de certaines formes de fédéralisme, notamment au sein de l’UE, cette conception demeure de l’ordre de l’utopie (Jacquet & al. 2002). Tout d’abord, les préférences collectives sont tellement hétérogènes qu’il est difficilement concevable que le sentiment d’appartenance à une communauté mondiale soit assez fort pour qu’une minorité reconnaisse la légitimité d’une décision à la majorité (surtout si elle lui est défavorable). Au final, «il ne pourra y avoir de gouvernement mondial tant qu’il n’y aura pas de peuple mondial » ibid. En somme, l’idée d’une gouvernement mondial ne s’apparente qu’à un fantasme. Le concept de « gouvernement mondial » reste tout de même utile pour réfléchir estime Pierre Jacquet et al.

De nos jours, la coopération institutionnalisée des nations suit une logique intergouvernementale: les États sont la source exclusive de légitimité et s’organisent pour coopérer en fonction des besoins. Néanmoins, les États peuvent déléguer la mise en oeuvre de certaines politiques à des agences spécialisées, mais ces dernières demeurent sous leurs contrôle. Cette approche « wesphalienne » qui a largement dominé l’après-guerre montre ses limites à plusieurs égards. En effet, ce modèle de coopération s’est démontré mieux adapté à la gestion des interdépendances qu’au traitement des problèmes globaux. En d’autres termes, il n’offre qu’une réponse limitée à la problématique des bien public mondiaux. D’ailleurs, la légitimité de ce modèle est aujourd’hui largement discutée. Les critiques se focalisent sur les principes en vigueur dans les instituions internationales (Assemblée Générale des Nations Unies, de l’OMC, du FMI, et de la Banque Mondiale). « One country, one vote » soit « un vote par pays » est un principe dans lequel les absents ne comptent tout simplement pas. Le très faibles poids des pays en développements dans les institutions de Bretton Woods est un facteur de défiance à l’égard des décisions qui y sont prises. Les décisions ne seront pas légitimes tant que la question de pondération des voix ne sera pas revue. En outre, ce modèle intergouvernemental a prouvé les limites de son efficacité dans la mesure où

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des intérêts nationaux différends peuvent donner lieu à la formation de coalition et à l’élaboration de compromis. Les décisions prises au sein de ces coalitions sont par ailleurs souvent opaques: aucuns documents officiels ne transparait quand à ses fondements.

Au delà de ces deux modèles principaux, il existe des modèles émergents des formes institutionnelles de gouvernance. Le tableau pertinent proposé par le rapport rédigé sous la direction de Pierre Jacquet99 s’attache à dresser une comparaison de ces différents modèles. C.f Annexe 3 « les modèles de gouvernance: un essai de comparaison ».

1.2.2 Fonder une gouvernance globale légitime, efficace et démocratique.

Tant la situation paraît critique, chacun sent aujourd’hui le besoin de construire un nouvel ordre politique international qui soit durable et plus efficace. Il est essentiel de réfléchir aux grandes lignes qui permettront de fonder une vision partagée de la mondialisation, associant les sociétés civiles et susceptible de restaurer la légitimité et l'efficacité de l’approche multilatérale. Comme le rappelle Bertrand Hugonnier « une pause dans l’action multilatérale de l’action publique ouvrirait le champ à la progression des régulations privées et la recherche de solutions nationales, bilatérale ou régionales » 100. En d’autres termes, une telle évolution faciliterait le jeu des grandes entreprises et alimenterait l’unilatéralisme. D’autre part, réaffirmer le bien-fondé de l'approche multilatérale traditionnelle reviendrait à nier la crise du système actuel de gouvernance globale. Maintenir cette approche contribuerait à alimenter une perte croissante de légitimité et nuirait à la crédibilité des instituons.

De nouveaux fondements et de nouvelles règles de fonctionnement pour les institutions économiques et financières internationales sont donc requis d’urgence. Cependant, aucun des modèles de gouvernance cités précédemment ne fournissent un cadre complet autour duquel organiser la gouvernance mondiale. Par conséquent, une « gouvernance hybride », fondée sur différentes catégories de ces modèles, permettrait de répondre à ce défi. Par ailleurs, pour rompre avec le modèle contemporain, l’élaboration d’une nouvelle gouvernance mondiale doit répondre à des objectifs généraux d’efficacité, de légitimité et de transparence (Soret 2010, Jacquet et al. 2002). La littérature propose plusieurs principes pour établir une gouvernance qui respecte ces

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99 Jacquet, P., Pisani-Ferry, J., & Tubiana, L. (2002). Gouvernance mondiale. Rapport, Paris: La Documentation française.

100 Hugonnier, B. (2011). Changer de modèle économique. Paris: Economica.

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critères. Dès lors, il convient de se demander: qu’elles sont les conditions du succès d’une nouvelle gouvernance mondiale?

En ce qui concerne le volet normatif et institutionnel de la nouvelle gouvernance, deux grandes idées dominent: il faut plus de pragmatisme et transparence. Tout d’abord, l'instauration d’une gouvernance mondiale efficace requiert la reconnaissance de l’existence d’un monde multipolaire: l’Ouest n’est plus seul; le « reste » du monde compte aussi et de plus en plus (c.f l’expression « the West and the rest » - voir infra). Le G20 représente donc un large progrès par rapport au G8. En effet, les réunions du G8 sont incompatibles avec un monde multipolaire. Seulement, pour être réellement multipolaire le G20 doit être réformé, et doit s’ouvrir (....). Ce sera l’objet de la partie suivante.

Deuxièmement, de nombreux observateurs s’accordent sur la nécessité de sortir des dogmes néolibéraux qui ont conduit à la crise. Les interventions des institutions internationale semblent, aujourd’hui encore, fondées sur des principes dogmatiques plutôt que sur les leçons de l’expérience. Pierre Calame soutient que les institutions multilatérales sont en effet incitées à propager un dogme néolibéral et « à défendre les intérêts de leurs actionnaires » 101 . Cette situation s’explique notamment par l’incapacité politique de l’Union Européenne de parler d’une seule voix pour proposer une vision alternative. Par conséquent, il est indispensable que l’Union Européenne prenne clairement position sur les objectifs assignés aux instituions si ont veut sortir de la doctrine néolibérale. Pour Bernard Huggonier (2011), les réponses politiques mis en oeuvre s’inspirent trop du passé et rarement le modèle de pensée, qui a conduit à la crise, n’est remis en question alors qu’il faut définitivement « changer et de carte et de compas »102. La « quasi-idéologie » qui a mené le monde durant ces dernières décennies, connue sous le nom du Consensus de Washington103, doit être impérativement repensée. La crise économique met en avant un vérité essentielle: contrairement à ce qui est soutenu, les entrées de capitaux ne sont pas toujours bénéfiques au pays en développement, notamment lorsqu’ils sont de courts terme et spéculatifs. La crise financière en Islande et en Irlande sont des exemples de l’actualité qui illustrent parfaitement cet argument. Toutefois, Huggonier reconnait qu’il faut une certaine « détermination pour reconnaitre que la crise actuelle est le fruit des théorie

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101 Calame, P. (2001a). La réforme des institutions financières internationales. IRG : Institute for Research and Debate on Governance - An international network to encourage debate around public governance. Consultable en ligne.

102 Hugonnier, B. (2011). Changer de modèle économique. Paris: Economica. p11

103 Selon les principes du Consensus de Washington, pour qu’un pays prospère, doive prévaloir le libre-échange ans tous les domaines, un Etat de faible taille, des impôts peu élevés, la propriété privée et la dérégulation sont également les maîtres mot.

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économiques traditionnelles et d’erreurs politiques répétées »104 . L’indispensable renouveau de l’ordre économique et politique doit impérativement s’accompagner d’un renouveau des idées. La crise actuelle doit être l’occasion de repenser notre système économique en modifiant un certains nombre de fondamentaux: l'intérêt général, l’éthique, la redistribution des richesse. En outre, la libéralisation des échanges ne devrait pas être présentée comme une fin en soi dans les accords multilatéraux. Beaucoup d’auteurs s’accordent sur ce dernier point.

Par ailleurs, les auteurs du rapport sur la gouvernance mondiale (Jacquet & al. 2002) avancent l’argument d’une “re-spécialisation” des instituions afin de répondre aux exigences démocratiques d’une gouvernance mondiale sans gouvernement. Cependant, cet argument peut sembler paradoxal pour beaucoup d’observateurs. En effet, la mise en oeuvre du principe de spécialisation soulève des problèmes. Les institutions de Bretton Woods en sont un exemple type. Le FMI a souvent été critiqué pour sa focalisation sur les seuls objectifs de stabilité macro-financière. Seulement pour ces auteurs (Jacquet & al. 2002), l'absence de gouvernement mondial souligne l’importance de préserver la spécialisation des instituions. Le G20 fait l’objet de plusieurs critique justement parce que son statut et son mandat du n’ont jamais été définit clairement105. Les institutions internationales peuvent être considérées comme légitimes dans la mesure où leur fonction est définie pas un traité ou un mandat. En outre, c’est justement grâce à la spécialisation que la société civile peut exercer un rôle critique sur la manière dont les instituions mènent à bien leurs missions (Jacquet & al. 2002). Ainsi, la spécialisation des instituions est essentielle pour la responsabilité démocratique. Toutefois, les auteurs soulignent que le principe de spécialisation doit impérativement se concevoir dans un contexte d’évolution des missions. Ce n’est donc pas en étendant leur domaine d’action que les organisations internationales pourront asseoir leur légitimité. Par conséquent, il est suggéré que le périmètre des institutions , la définition de leurs missions, et les instruments dont elles sont dotés, doivent être régulièrement réexaminé. Par ailleurs, le principe de spécialisation doit aussi s’étendre et s’appliquer à l’organisation de coopérations entre instituions (ex: le Fond de Stabilité Financière). Au final, pour être efficace, la coopération doit reposer sur des principes clairs et des procédures codifiées. D’autres experts sont partisans d’un élargissement du mandat des instituions. Comme Pierre Calame l’explique, « le contexte dans lequel ces institutions opèrent et leur rôle ont radicalement évolué sans que leur mandat et leur mode de fonctionnement

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104 ibid

105 Ben Hammouda, H., & Sadni-Jallab, M. (2011). Le G20 et les défis de la gouvernance globale. Bruxelles: De Boeck. p105

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évolue en conséquence »106. Nous l’avons vu en dans le premier chapitre, les instituions font face à un problème d’inadéquation et peine à se rénover. Aujourd’hui le FMI semblerait montrer la voie. À la suite de la récente crise mondiale, le FMI a entrepris de clarifier et de rénover son mandat pour l’étendre à l’ensemble des questions macroéconomiques et financières ayant une incidence sur la stabilité mondiale. Alors président du FMI, Dominique Strauss-Kahn avait souligné la nécessité d'un mandat plus clair pour traquer les risques pesant sur la stabilité économique et financière mondiale. Le conseil d’administration du FMI envisage différentes possibilités pour renforcer la surveillance multilatérale, financière et bilatérale107. La réforme de la gouvernance du FMI est d’ailleurs fermement soutenue par le G20. Quelles sont les conditions à remplir afin de fonder une gouvernance légitime et démocratique?

La réforme du FMI est une étape importante sur le chantier de la reconstruction de la gouvernance économique mondiale108. La gouvernance du FMI est néanmoins un sujet très controversé. L’insertion de l’organisation dans le système institutionnel multilatéral, le mode de gouvernance de l’institution, son contrôle politique, et son champ d’intervention 109 sont autant de sujet à débat qui divise les opinions. Le FMI souffre d’un problème flagrant de légitimité: il est essentiellement contrôlé par un pays, les États-Unis, ce qui affaibli sa légitimité et son autorité. Depuis ses premiers sommets, le G20 s’est empressé de faire de la réforme des instituions de Bretton Woods une des question centrales de son programme. Face aux déséquilibres de représentation, il est apparu impératif de réformer le FMI, et de renforcer sa légitimité en accordant une place plus importante aux pays émergents. Le Sommet de Séoul a donné lieu a un accord négocié par le conseil d’administration du FMI. Cet accord assure une présence plus forte des pays émergents. Cet accord comprend une augmentation du capital du Fonds, qui s’élève dorénavant à 750 milliards, au lieu de 374 milliards. Dès lors, les pays émergents ont pu sensiblement accroitre leurs parts dans le capital global du Fond. La Chine est ainsi devenu le troisième pays contributeur derrière les États-Unis et le Japon. Certes les États-Unis

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106 Calame, P. (2001a). La réforme des institutions financières internationales. IRG : Institute for Research and Debate on Governance - An international network to encourage debate around public governance.

107 pour plus d’informations: imf.org

108 Ben Hammouda, H., & Sadni-Jallab, M. (2011). Le G20 et les défis de la gouvernance globale. Bruxelles: De Boeck.

109 faut-il étendre son approche des problèmes de stabilisation macroéconomique et financière aux politiques structurelles et à la lutte contre la pauvreté, ou faut-il au contraire, comme l’ont réclamé un certain nombre de voix aux États-Unis , « recentrer » le FMI sur ses missions initiales ?

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reste le membre le plus important du FMI, mais on assiste à une montée en force des pays émergents. L’Europe a également fait des efforts et a cédé neuf de ses sièges (sur 24) aux pays émergents. Cette augmentation de capital a donc été source d’importants changements de rapports de force au sein du FMI. De nombreux pays on d’ailleurs salué cette réforme, et s’attendent à un “changement de cap” des politiques du FMI. Après les catastrophe du Consensus de Washington, les pays émergents espèrent que le Fonds portera plus d’attention aux questions de développement. Ce premier bilan appelle donc à renforcer les efforts de réorganisation du FMI en fonction des nouveaux équilibres. Cette nouvelle répartition des pouvoirs requiert que les États-Unis jouent le jeu du multilatéralisme. De leur côté, les pays émergent doivent se laisser réguler sans chercher à d’abord rattraper leurs retards. L’Europe quand à elle doit avoir le courage de se présenter unie et de parler d’une seule voix.

1.2.3 Le G20 et la nouvelle gouvernance économique mondiale.

Le G20, nouveau forum de la gouvernance globale.

Le G20 a surgit sur a scène médiatique en même temps que la crise financière catalysée, en 2008, par l’éclatement de la bulle immobilière américaine. Il aura donc fallu attendre la crise des subprimes pour voir émerger à nouveau un climat de coopération internationale et la fin de quatre décennies de gouvernance informelle et ad hoc. En effet, toutes les discussions sur la transformation de l’ordre international issu de la deuxième guerre mondiale avaient jusqu'à présent échouée (c.f les négociations sur la réforme du Conseil de sécurité des Nations Unies, ou les multiples commissions pour refondre les institutions de Bretton Woods)110. C’est face à cette crise globale d’ampleur inégalée que les pays développés ont pris conscience que leur réponse se devait d’être globale et concertée. Au delà de l’utilisation massive des politiques budgétaires et monétaires, un nouveau forum de coopération à émergé: le G20. Le G20 est immédiatement apparu comme le nouveau cadre de la gouvernance globale et de la gestion de l’instabilité économique. Comme à d’autres époques111, ce moment d’amplitude rare dans l’histoire internationale oblige à repenser la régulation des

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110 Ben Hammouda, H., & Sadni-Jallab, M. (2011). Le G20 et les défis de la gouvernance globale. Bruxelles: De Boeck. p105

111 référence au tournant décisif de 1945 et la création du système onusien et les instituions de Bretton Woods

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relations internationales et à faire preuve de « créativité diplomatique ». Le G20 symbolise en l'occurrence « le miroir de ce moment historique» 112 .

Le Groupe des Vingt n’est pas nouveau, il existait déjà en tant qu’instrument de coopération économique internationale. Il est né sur l’initiative de Paul Martin, alors ministre des finances du Canada, dans le but de réfléchir à des solutions concernant la crise systémique qui avait touché le sud est de l'Asie en 1997-1998. C’est sur l'invitation de Georges W. Bush que les 20 membres se sont retrouvés pour là première fois après la crise, à Washington en novembre 2008. Le groupe des Vingts est désormais composé de chefs d’États et de gouvernements ainsi que de leurs ministres des finances. Pas moins de six sommets ont eu lieu depuis celui de Washington, ce qui démontre l'intérêt de ces pays vis-à-vis cette instance. Bien que les “G” existent depuis plus d’un demi siècle, le G20 présente un caractère inédit. En effet, le critère d’appartenance à ce groupe n’est pas d’être « du Nord » ou « du Sud », mais d’être « important sur le plan systémique ». L’affirmation du G20 comme outil de coopération internationale a mis en évidence un dépassement de la division Nord-Sud, soit la fin de « l’occident et les autres »113. Par sa seule composition (démocratie, régimes autoritaires, vieux riches, émergents, États, groupe régional) le G20 reflète les grandes évolutions de la scène internationale du nouveau millénaire.114 Katherine Poster-Vinay (2011) le rappelle dans son ouvrage, la division Nord-Sud n’a plus la netteté d’autrefois. La chute du mur de Berlin, et la disparition de l’Est et de l’Ouest à laissé place à un certain nombres d'incertitudes. En l'occurrence, le Groupe des Vingt reflète la complexité d’un ordre mondial dans lesquels les repères du XXème siècles ont été brouillés. En ce sens, il est « un miroir du nouvel état du monde »115. Il n’est désormais plus possible de voir le monde en fonction d’une division nette Nord-Sud, la constitution du G20 en est l’illustration même. Au delà d’apporter une première réponse au besoin de réforme des représentation géopolitiques, le G20 se présente également comme « le noyau de la nouvelle gouvernance globale » 116 . Le G20 serait devenu le nouveau directoire du monde. Il préfigurerait un nouveau mode de gouvernance mondiale dont la forme n’est

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112 Postel-Vinay, K. (2011). Le G20, laboratoire d'un monde émergent. Paris: Presses de la Fondation nationale des sciences politiques. p12

113 “The West and the rest” cette formule emblématique de la scène internationale des années 1990 fut inventée par le diplomate singapourien Kishire Mahbuban. Elle a progressivement servi à désigner le débat général sur la prédominance de l’Europe, relayées par les États-Unis, dans l’histoire internationale.

114 Postel-Vinay, K. (2011). Le G20, laboratoire d'un monde émergent. Paris: Presses de la Fondation nationale des sciences politiques.

115 Ibid

116 Ben Hammouda, H., & Sadni-Jallab, M. (2011). Le G20 et les défis de la gouvernance globale. Bruxelles: De Boeck.. p18

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pas encore connue. C’est pourquoi selon Postel-Vinay (2011), le G20 s’apparente à un laboratoire dans lequel « on y analyse un ordre international en pleine mutation et on s’essaie à l'organiser». Par ailleurs, le G20 se présente comme un élément de solution au dilemme de la souveraineté qui bloque le processus de coopération. Pour Paul Martin, « seul le partage de la souveraineté peut rendre la mondialisation possible pour tous »117. Par conséquent, l’adhésion a des normes internationales est essentielle pour éviter une implosion du système tout entier. Cependant, beaucoup de pays sont encore retissants à lâcher prise de leur souveraineté. C’est alors que le G20 peut contribuer à changer les mentalités concernant la souveraineté au XXIème siècle. « Le G20 est la seule table où toutes les puissances économiques peuvent négocier le partage de la souveraineté qui rendra la mondialisation possible pour tous »118. Suivant cette même logique, Colin Bradford perçoit « la diversité culturelle du G20 [comme] un atout pour la résolution des défis globaux» 119. En outre, l’ouverture de cette instance aux pays émergents constitue une réelle avancée dans la construction d’une gouvernance plus légitime. Au final, quel que soit son avenir, le G20 est entré dans l’histoire pour avoir ouvert la voie à une conception multilatérale plus représentative de la diversité du monde.

Le G20 semble donc être très prometteur pour l’avenir de la coopération internationale. Depuis son lancement à l’automne 2008, il a engendré plusieurs grandes avancées dans le domaine de la gouvernance économique. Auto-proclamé « forum de la coopération économique », le G20 conduit désormais la réflexion et les réformes à apporter à l’ordre économique international. Selon plusieurs observateurs, le G20 aurait vu le jour en réponse au manque d’efficacité et de réactivité des instituions multilatérales traditionnelles. Le G20 était le seul à pouvoir apporter la réponse rapide et cordonnée dont la crise économique et financière avait besoin. Au départ, le G20 a alors démontré une efficacité exemplaire dans sa mission de stabilisation de l’économie mondiale. On a généralement dit, même chez les « G20-sceptiques », que le premier sommet de 2008 avait été efficace parce qu’il avait permis de limiter l’expansion de la crise financière internationale. Organisés peu après le début de la crise, les sommets de Washington et de Londres ont été des étapes essentielles dans la gestion de la crise. Le Sommet de Washington a donné lieu à la définition d’une stratégie de sauvetage des

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117 Martin P. (2011), “Le G20 et me partage de la souveraineté: pour la réforme du secteur financier, Le G20 et la nouvelle gouvernance économique mondiale, Les cahiers du cercle des économistes, Paris : Descartes & Cie.

118 ibid, p30

119 Bradford C. (2011), La diversité culturelle du G20 est un atout pour la résolution des défis mondiaux, Le G20 et la nouvelle gouvernance économique mondiale, Les cahiers du cercle des économistes, Paris : Descartes & Cie. p 79,

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banques et des institutions financière au niveau mondial. Le Sommet de Londres, tenu le 15 novembre 2008, a réaffirmé la volonté de sortir des politiques nationales et de créer une initiative globale. Les efforts se sont portés sur la définition et la coordination globale de programmes de relance dans un contexte de dépression et de déflation menaçante. En outre, ces premiers sommets ont donné lieu à un certain nombre de déclarations symboliques manifestant le désir de mettre fin à tout les excès du passé. Parmi les principes proclamés et réaffirmés on retrouve: le rejet du protectionnisme, la coordination des politiques macroéconomiques, la renaissance du FMI et les projets de régulation financière. En somme, le G20 a démontré la volonté des pays de répondre d’une manière coordonnée face à la crise. Bien qu’il a été perçu comme moins efficace que les sommets précédents, le sommet de Séoul a donné naissance au projet de réforme bancaire et financière Bâle III, ainsi qu’au projet de réforme de la gouvernance du FMI. Cette réforme assurant aux pays émergent une plus grande représentativité dans les instances de décisions est le symbolique (voir supra). Ces sommets, dans leur ensemble, ont dégagé des axes de réflexion et d’action sur les solutions à apporter à la crise et les réformes à mettre en place afin de de construire une nouvelle architecture internationale, capable de gérer le risque systémique croissant. Ces chantiers de réflexions seront détaillés dans la partie consacrée à la réforme de la finance et du système monétaire international. C’est grâce à ces premiers succès que le G20 s’est institué comme le nouveau cadre de la coopération économie internationale. Aujourd’hui, le G20 cherche à sortir de la phase d’urgence (phase de gestion de crise), pour entamer une phase de réforme et de construction de l’ordre global. Nous l’avons vu, la nécessité de fonder un nouveau multilatéralisme est devenu une exigence du fait du caractère global de crise. Des réponses concrètes sont impératives afin de favoriser l'émergence d’une nouvelle architecture internationale. Cependant, au cours des ses derniers sommets, plusieurs préoccupations quand à l'efficacité et la légitimité du G20 ont émergé. Avant de vouloir prétendre à la tâche ambitieuse de réformer le système international hérité de Bretton Woods, le G20 doit faire l’objet d’un examen.

Des défis nés des faiblesses du G20

Pour beaucoup de spécialistes, le G20 doit passer d’un groupe de gestion de crise à une enceinte de gouvernance mondiale. Thierry Soret (2010) et Jacques Mistral (2011) partagent le même avis: afin d’assurer ses ambitions de réforme de l’ordre économique, le G20 doit d’abord s’imposer comme un cadre de concertation économique mondiale durable. « Faire du G20 un comité de gouvernance mondiale, Charlyne Fabre-Restivo 2012 57

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mission impossible? » C’est la question que se pose Jacques Mistral dans une de ses contributions120. Pour l’auteur, la question centrale est de savoir comment assurer cette transition. L’amélioration de son fonctionnement est pour cela absolument nécessaire. Les doutes sur l’efficacité du G20 se répandent rapidement. Le G20 doit être capable d'exercer un leadership pour définir quelles seront les stratégies de sortie de crise, et achever de coordonner les réformes financières, et la modernisation des institutions internationales. Le G20 ne doit pas perdre l’élan qui a présidé sa naissance. Dès lors, il doit pour cela produire des résultats tangibles. Des réponses concrètes sont impératives afin de favoriser l'émergence d’une nouvelle architecture internationale. Pour relever ces défis, le G20 doit accroitre sa légitimité, à la fois sur le plan de la représentativité et sur celui de l’efficacité.

L’histoire récente du G20 a été marquée par les préoccupations d’efficacité. Une fois passée l’urgence des faillites bancaire et le risque de faillite du système, le G20 a été marqué par de nombreuses divergences entre ses pays membres. Ces questionnements ont émergé à la suite du sommet de Pittsburg en septembre 2009, lorsque les membres n’arrivaient pas à s’accorder sur la politique à mettre en oeuvre pour faire face à la crise. La politique monétaire et la question des politiques de change sont également devenues sujet de discordes. La montée des tensions a favorisé les réponses nationales, faisant ainsi régresser la coopération et la coordination internationale. En effet, la multiplication des sujets de discorde rend l’espoir de déboucher sur une nouvelle architecture internationale plus incertaine. Le G20 aurait-il déjà besoin d’un nouveau souffle? Certains vont encore plus loin dans leur critique du G20. “Le G20 Finance à Washington: du bruit pour rien”121 “Le G20 ou les incertitudes de la régulation” “A Cannes, un sommet décevant”122 titrent certains journaux. Journalistes et spécialistes mettre l’accent sur les déceptions qu’engendrent souvent les sommets du G20. Ces sommets introduisent dans leurs programmes des promesses très, voire trop ambitieuses. La France avait placé la présidence du G20 sous le mot d'ordre flamboyant « Nouveau monde, nouvelles idées ». Nicolas Sarkozy promettait de « moraliser le capitalisme », de « mettre fin au scandale des paradis fiscaux » ou d'imposer un « nouveau Bretton Woods » face à la guerre des monnaies. La crise des dettes souveraines en Europe a eu raison de toute cela, et a réorienté le débat en sa faveur. Certains, déçus par ses résultats peu concrets, jugent le G20 inutile. Il faut reconnaitre que la coordination auquel le G20 aboutie est souvent “molle”. Les sommets ne

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120 Mistral J (2011), Faire du G20 un comité de gouvernance mondiale, mission impossible?, Le G20 et la nouvelle gouvernance économique mondiale, Les cahiers du cercle des économistes, Paris : Descartes & Cie. P 13

121 “Le G20 Finance à Washington: du bruit pour rien” communiqué, Avril 2011, ATTAC France

122 “A Cannes, un sommet décevant” 05.11.2011, Le Parisien.fr

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débouchent pas sur de décisions concrètes, si bien que certains se pose la question: G20 ou “G vain”?

Le premier défi qui s’est posé au G20 est liée à sa légitimité. Dès son apparition, le G20 a été confronté à de nombreuses critiques. Une des matrices des discussions sur le G20, que ce soit parmi ses promoteurs ou ses détracteurs, est que ce groupe ne serait pas assez voire pas du tout légitime (Postel-Vinay, 2011). Ces critiques reposent sur l’idée que le groupe manquerait de légitimité parce qu’il est informel, sans fondement juridique et que sa composition n’est pas universelle, ou tout au moins pas assez représentative. La question de la légitimité et la nécessité de la renforcer reste un défi majeur « qui risque même de gagner en importante à mesure que le sentiment d’urgence s’atténue » 123. En devenant le nouveau directoire des affaires économiques du monde, le G20 apparait prendre peu à peu la place du G7 et G8, et de ce fait subit les même critiques. Le G20 est confronté à la question de la légitimité et au fait qu’il soit le porte-parole des riches et puissants. Le G20 est également confronté à un problème de représentativité du fait de sa taille limitée. Dans la logique géographique, il semble évident que certaines régions du monde sont en effet sous-représentées, à commencer par l’ensemble du continent African, tandis que d’autres bénéficient d’une visibilité bien plus importante, comme l’Europe que beaucoup jugent sur-représentée. A cet égard, les pays africains et les pays arabes ont exprimé le souhait d’une plus grande présence dans le G20 à plusieurs reprises. Un de défis majeurs du G20 est donc de trouver les moyens de désamorcer le mécontentement des États non-membres et de se concilier leur soutien. En affichant publiquement le projet de peser sur l’agenda économique international, le G20 donne officiellement du grain a remoudre à ceux qui s’inquiètent de sa représentativité et de sa capacité à représenter l'intérêt général (Mistral 2011). Les Nations Unies sont par ailleurs considérées comme un meilleur directoire pour traiter des question globale du fait qu’elle représente l’ensemble des 192 pays. Dans un rapport, le prix Nobel d’économie, J.Stiglitz pose la question de la légitimité de cette instance et appelle plutôt à ce que les Nations Unies, “G192”, prenne le rôle de directoire de la gouvernance globale124. Postel-Vinay (2011) remarque que les « G20-sceptiques » les plus radicaux vont même jusqu’à craindre que le G20 ne remplace l’ONU, bien qu’il soit bien difficile de déceler quelconque intention d’OPA. Les “Pro-G20” avancent quand à eux que le déficit de légitimité dont souffre le Groupe par rapport à l’ONU est compensé par sa plus grande efficacité, et font ainsi référence aux lourdeurs de fonctionnement des Nations Unies. Pour relativiser les

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123 Mistral J (2011), Le G20 et la nouvelle gouvernance économique mondiale, Les cahiers du cercle des économistes, Paris : Descartes & Cie.

124 Ben Hammouda, H., & Sadni-Jallab, M. (2011). Le G20 et les défis de la gouvernance globale. Bruxelles: De Boeck.

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critiques à l’égard de la légitimité du G20, Postel-Vinay rappelle que l’objectif que s’est donné le G20- être un forum de discussion- est nettement plus limité que celui des principales organisations internationales, d’autant plus qu’il ne prétend à aucun pouvoir législatif ni exécutif. En outre, ceux qui opposent l’ONU comme « légitime » face au G20 « illégitime » semblent oublier les insuffisances de celle-ci dont on jugeait qu’elles nécessitaient une vaste réforme de l’organisation elle même. Par ailleurs, il apparait une certaine confusion dans le débat sur la légitimité du G20 entre légitimité et légalité. Comme le rappelle Postel-Vinay, l’informalité ne débouche pas forcément sur l’illégalité ou l’illégitimité. Les défenseurs du G20 soutiennent que ce sont au contraire les instituions de Bretton Woods et l’ONU qui sont en perte de légitimité et que le G20 pourrait contribuer à résoudre ce problème. Pour Kemal Dervis « le G20 devrait accroitre la légitimité des instituions internationales » 125. Ce groupe est finalement légitime parce qu’il est efficace, il a en effet contribué à reconstruire une confiance ébranlée par la crise financière mondiale. C’est donc en partant de ce constat que les experts et politiciens on fait la promotion du G20. Selon leur raisonnement , l’ONU ou le FMI, bien qu’elles soient des instituions formelles, ont un pouvoir d’action problématique en situation de crise est, ce qui réduit considérablement leur légitimité. Le G20 en revanche facilite les prises de décisions, ce qui le rend efficace et compense, voire annule, la question de légitimité que pose son caractère informel. Thierry Soret (2010) pense qu’avec le temps, le G20 pourrait permettre « d'aiguillonner une réforme de l’ONU » notamment en levant les obstacles à la création d’un Conseil de Sécurité économique126. En effet, le G20 peut jouer un rôle dans la réforme du Conseil de Sécurité de l'ONU, en exerçant une pression politique sur ses membres. La notion d’efficacité est aussi complexe qu’utile pour comprendre le fonctionnement et l’évolution de l’ordre mondial. Toutefois, on ne doit pas perdre de vue que « la légitimité dans les relations internationale dérive d’un jugement politique »127 . Cette notion est donc ni objective, ni absolue. On juge la légitimité d’un État ou d’une institution, ou de leurs actions spécifiques, en fonction de leur adéquation aux normes internationales. Lors de son premier sommet, les résultats ayant été conformes à son agenda, le G20 avait accompli sa mission. Cette mission est cependant sujette à des interprétations diverses puisqu’elle est souvent définie en termes général. Elle se juge donc à l’aune de ce que l’on en attend. Or cela relève bel et bien d’une question d’interprétation politique128.

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125 DERVIS K. 2009, A Way Forward: Formal and Informal Aspects of Economic Governance, dans Re-Defining the Global Economy, n42, Dialogue on Globalization, Occasional Papers New York.

126 Soret, T., & Védrine, H. (2010). Crise dans la gouvernance économique mondiale. Paris: Fondation Jean Jaurès. p64

127 Clark, 2007, cité par Postel-Vinay, 2011, p67

128 ibid, p166

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Enfin, le G20 souffre d’un problème d’organisation: son programme manque de cohérence et sa stratégie de communication n’est pas au point. D’une part, le G20 a été confronté à une grand nombre de critiques par rapport à la cohérence de son programme. A raison de s’être constitué au fil des événements et des transformations qui ont suivit la chute du mur de Berlin, Karoline Postel-Vinay (2011) note que l’émergence du G20 relève en partie de l’improvisation. C’est cette approche ponctuelle qui l’aurait empêché de se créer un programme ambitieux de réforme et de fondation d’un nouvel ordre global. Par conséquent, le G20 a besoin d’un projet global et d’une vision large pour que sont programme soit cohérent et qu’il puisse relever les défis qui s’imposent à lui. D’autre part, le G20 n’a pas mis au point une politique de communication satisfaisante. A en jugé de la réception médiatique des derniers sommet, le G20 n’a apparemment pas de stratégie concertée de communication. Le message collectif qu’il transmet sur son identité est minimal: en posant la condition “d’être important sur la plan systémique” comme critère d’appartenance, sans expliquer précisément ce que cela veut dire, les dirigeants du G20 font preuve d’arbitraire, ce qui n’est politiquement pas acceptable (Postel-vinay, 2011). Aucun documents officiel ne l’explique. Cette réduction d’identité donne alors raison au détracteur du G20 qui le considère comme un concert archaïque de puissance.

Propositions pour améliorer le fonctionnement du G20.

Le G20 actuel présente plusieurs faiblesses auxquelles il est nécessaire d’apporter des réponses. Les défis des présidences à venir consistent à améliorer l’efficacité et la représentativité du G20 pour renforcer sa légitimité. Les propositions doivent faire preuve de créativité et de pragmatisme. L’objectif sur le long terme est de faire évoluer le groupe vers un outil durable de gouvernance mondiale.

Objectif premier: rendre le G20 plus efficace.

Le rapport du G20 avec les autres institutions spécialisées peut-être source d’antagonismes. La question sous-jacente est donc: comment faire cohabiter le développement du G20 avec les autres institutions existantes dans le cadre de la gouvernance économique mondiale? L'objectif est d’améliorer et cordonner la coopération du G20 avec les organisations internationales. Pour cela, il convient de revoir les rapports et les relations du G20 avec le reste de la communauté internationale et les comités d’experts. Ces relations sont informelles et nécessitent des mesures afin de mieux définir la nature de ces rapports. La coopération entre ces institutions et le

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G20 est primordiale, puisqu’elles se chargent toutes de préparer la construction d’un ordre plus stable. Certains économistes et politiques évoquent un antagonisme potentiel entre le G20 et l’ONU. Il existe en effet un certain nombre d’interrogation quand à la manière dont les deux entités devraient s’articuler. Des mises en gardes ont été émises contre une trop grande prise de pouvoir par le G20. Cette prise de pouvoir serait préjudiciable au bon fonctionnement du système international et à la place que les Nations Unies y occupe. Par conséquent, il est fondamental de concevoir un rapport complémentaire entre les G20 et l’ONU. La question de ce rapport est directement liée aux interrogations concernant la légitimité du G20 par rapport aux NU. Par conséquent, il apparait nécessaire de clarifier cette relation afin d’assurer une plus grande convergence entre les impératifs d’efficacité et le souci de légitimité. L’enjeux est de mieux définir ces rapports et de les articuler, afin d’en faire le socle solide d’une nouvelle architecture internationale. Afin d’améliorer la communication entre le G20 et L’ONU, plusieurs propositions ont été formulées. Les mesures initiées par le 3G129 commencent déjà à porter leurs fruits: la préparation des sommets du G20 s’effectue de plus en coopération avec les agences de l’ONU. De plus, l’invitation des organisations régionales aux sommets du G20 semble être maintenant établie (Postel-Vinay, 2011). En outre, une meilleure communication entre ces deux entités procure des avantages pour chaque partie. A travers sa structure plus minimale, le G20 peut soutenir et renforcer les efforts de l’ONU. De même, l’ONU peuvent se servir des accords passés aux sein du G20 comme point de départ pour obtenir un consens global et formel (Mistral, 2011). La relation entre le G20-G8 est elle aussi source de discussion. La division du travail entre ces deux groupes parait de plus en plus artificielle. Afin d’assurer une plus grande cohérence entre ces instituions, il convient de clarifier leur rôle et leur mandat. A cet égard, on note une avancée certaine de la part du G8. Lors du sommet de Deauville de mai 2011, le Groupe des Huit semble avoir réaffirmé son identité et sa particularité par rapport au G20. Alors que le printemps Arabe battant son plein, la «famille démocratique» du G8 s’est ré-orienté vers la mission de donner « un nouvel élan pour la liberté et la démocratie »130. En laissant l’économie de côté, le G8 a ainsi permis la réaffirmation de la spécificité du G20 (Postel-Vinay, 2011). Une des missions essentielles du G20 est de contribuer à la réforme du système monétaire international. Une coopération renforcée entre ces deux instances est donc logique. Sa contribution à la réforme de la gouvernance du FMI, actée par l’accord de Gyeongju, puis approuvée par le conseil d'administration du FMI, est un des succès

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129 Le G3 (Global Governance Group) représentant les membres de l’ONU qui ne font pas partie du G20, est à l’origine de nombreuses propositions pour améliorer la communication entre ces deux entités.

130 Déclaration du G8 de Deauville “un nouvel élan pour la liberté et la démocratie”, Deauville, 26-27 mai 2011

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majeurs du G20. Les quote-parts cumulées des pays membres du G20 assurent une influence informelle certaine au G20 (Mistral, 2011).

D’autre propositions ont été suggérées afin de permettre au G20 d’accroitre son efficacité. Impliquer la société civile dans le processus de négociation semble être une condition incontournable. Pour Bertrand Badie131, la négociation internationale doit se construire à partir d'une transaction réussie entre les institutions et la société civile. Le G20 doit donc trouver un moyen d’associer des acteurs non étatiques à la négociation internationale. Le Forum de Davos est, dans le monde des dirigeants d’entreprises, exemplaire de cette démarche de construction des priorités collectives par la voie du dialogue informel (agenda-shaping). En 2008, lorsque le G20 fut transformé en club d‘États, la coopération entre gouvernement et société civile était devenue la norme dans la vie diplomatique. C’est grâce au G20 que fut lancé le concept de “B20” pour Business 20, sur l’initiative de Stephen Green, président de HSBC Shangai et HK, lors du forum de Davos en janvier 2009. Cette proposition se concrétisa l’année suivante au sommet de Toronto, où les dirigeants et ministres des Finances ont reçu des conseils de la part des représentants des plus grandes entreprises du Groupe des Vingt (Postel-Vinay, 2011). Au final, il paraît essentiel de réfléchir aux grandes lignes qui permettront de fonder une vision partagée de la mondialisation, associant les sociétés civiles et susceptible de restaurer la légitimité et l'efficacité de l’approche multilatérale.

Le G20 a des difficultés à maitriser sa stratégie de communication ce qui a tendance à miner son efficacité. Par exemple, le Sommet Séoul a été perçu comme un échec par la presse, même si il a permis d’obtenir des résultats majeurs, tel que l’approbation de Bâle III. K. Post-Vinay (2011) recommande d’accroitre la perception de l’efficacité des Sommets par le biais d’une meilleure communication sur les réalisations du G20. Le Groupe devrait également s’attacher à améliorer sa communication post-sommet par une meilleure maitrise des ses relations publiques.

Objectif second: pallier au défaut de représentativité.

Il est bien connu que la légitimité découle de la représentativité, il est donc impératif de trouver une solution à la surreprésentation de l’Europe, et la sous-représentation de l’Afrique au sein du G20. Toutefois, la question de la représentativité de ce groupe est particulièrement délicate: vaut-il mieux être hautement efficace ou hautement légitime ? Il existe un réel dilemme entre l'ouverture, s’accompagnant de la recherche d'un consensus autour du plus petit dénominateur commun, et l'efficacité de

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131 Badie, B. "Les puissances occidentales doivent revoir leur méthode de négociation. Le Monde.[En ligne] [ modifié le 5/07/2012]

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la prise de décision en comité plus restreint. Le G20 doit relever un défi de taille: désamorcer le mécontentement de États non-membres sans perdre son efficacité. (Mistral, 2011). De sorte, il est essentiel de mettre en place un mécanisme permettant de régir les relations du groupe avec les États et organisations non-membres. Dans sa contribution, J.Mistral (2011) propose la mise en place d’un mécanisme de consultation formel qui favoriserait la participation indirecte des pays non-membres par un statut d’observateur. Ce statut serait accordé soit à une organisation régionale ou à un panel d’Etat non-membres. Ce mécanisme reposerait sur un système d’invitations ad hoc, strictement limité. Etant considéré comme le groupe le plus apte à prendre des décisions qui peuvent s’appliquer à tous, il convient que les résolutions du G20 ne représentent pas exclusivement les intérêts des membres. Afin d’atténuer son déficit de représentativité, il serait souhaitable que le G20 définisse un ordre du jour qui prenne en compte les intérêts et les préoccupations des États non membres. Instaurer des rencontres régulières avec ces pays et les organisations régionales pourrait se présenter comme une solution. Une telle stratégie à d’ailleurs fait ses premiers pas lors du Sommet de Séoul, où la question du développement avait émergé grâce à un mécanisme de consultation. La présidence Coréenne avait mis en place un programme de consultation et de feedback avec les pays non-membres. Cette expérience s’étant avérée concluante, Jacques Mistral recommande l’institutionnalisation de ce programme. Promouvoir et développer ces programmes de consultation et de sensibilisation permettrait de clarifier les missions du G20 et d’inclure les intérêts des non-membres dans son ordre du jour. Enfin, l’ordre du jour du G20 doit définitivement être orienté vers la résolution des problèmes de nature mondiale. L'extension de l’ordre du jour du G20 doit porter sur la prévention de la crise au sens le plus large. Au delà du programme de réforme financière, le G20 doit s'attacher à la coordination des politiques macro-économiques et à la réforme des institutions financières internationales. Un objectif chiffré devrait être affecté à chacun de ces problèmes. Le rôle du G20 serait de faire en sorte que des progrès puissent être réellement mesurés et que des actions correctrices soient prises en cas de besoin. Toutefois, il faut éviter un ordre du jour trop large au risque d’une dispersion de l’action du groupe. Pour Jacques Mistral, « le réalisme est un gage d’efficacité », il suggère qu’il serait prématuré d’inclure dans l’ordre du jour des question trop politiques. En effet, des objectifs trop ambitieux risques de décevoir et affaiblir la légitimité du processus dans son ensemble. Il convient donc d’adopter une approche pragmatique et graduelle.

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Troisième objectif: élargir “le spectre post-crise”132

Le G20 rentre désormais dans une logique de long terme. Dès lors, il s’avère pressant de le faire passer d’un G20 de “gestion de crise” à G20 de “gestion” tout court. Certains auteurs plaident donc pour une redéfinition du rôle du G20 afin qu’il s’établisse comme institution de référence de la gouvernance économique mondiale. Afin d’assurer cette transition, il faut que le sommet deviennent « systémique, multilatéralisé, et convergent » ce qui n’est pas encore le cas. Ceci explique d’ailleurs ses problèmes chroniques de légitimité et d'efficacité 133.

Par là-même, d’autres auteurs soulignent que ces défaillances résultent de l’absence de définition claire quand à son statut et son mandat. Le critère d’appartenance suivant l’importance systémique n’est pas satisfaisant. Le G20 en a d’ailleurs souffert: il a fait l’objet de plusieurs critiques à son encontre, même de la part de pays développés comme la Suède. Par conséquent, le défi majeur aujourd’hui consiste à définir plus précisément la portée du mandat du G20: jusqu'à quel point peut-il s’étendre, et peut-il englober des problématiques politiques? En d’autres termes, il s’agit d’élaborer un programme post-crise qui justifie le maintien de cette instance. Rappelons que le G20 n’est pas une instance exécutive, elle ne dispose d’aucun moyen de surveiller la mise en oeuvre des ses directives. En matière de stabilisation et de régulation financière c’est au Comité de Bâle et au Conseil de Stabilité Financière qu’il appartient de définir les mesures qui devront être adoptées par les États. De ce fait, l’enjeux réel du G20 est de se concentrer sur la consolidation des résultats obtenus après le sauvetage du système financier. Jusqu’à présent, le G20 a fonctionné de manière informelle; à l’image du G8, il ne dispose pas d’un secrétariat permanent qui serait en mesure d’assurer le travail de réflexion et les activités de ce forum. Comme le souligne J. Mistral « ce type de fonctionnement ne favorise pas la continué, ni l’efficience du travail du G20 »134. L’établissement d’un secrétariat est donc à l’ordre du jour. Les dossiers ne peuvent en effet avancer si ils ne sont pas bien préparés en concertation avec les pays et les organisations internationales spécialisées. Une institution doit assurer le suivi des travaux. La mise en oeuvre de statistiques et d’indicateurs sur l'avancement dans le règlement des grands dossiers mondiaux nécessite par ailleurs un travail préparatoire que seul un secrétariat permanent peu assurer. Toutefois, pour Karoline Postel-Vinay, la

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132 MISTRAL J (2011), Le G20 et la nouvelle gouvernance économique mondiale, Les cahiers du cercle des économistes, Paris : Descartes & Cie.

133 Le G20 et la gouvernance économique mondiale, les défis de la présidence française, Séminaire organisé à l’Ifri le 1er décembre 2010 en collaboration avec le CIGI

134 MISTRAL J (2011), Le G20 et la nouvelle gouvernance économique mondiale, Les cahiers du cercle des économistes, Paris : Descartes & Cie.

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question de l'institutionnalisation du G20 est secondaire, « l’essentiel à ce stade est d’avoir un cadre opérationnel dans lequel concevoir l’avenir de la coopération internationale»135. Pour cet auteur, l'intérêt principal du G20 est de nous montrer quelle forme pourrait prendre le nouvel ordre mondial. La question de son institutionnalisation est donc prématurée et secondaire.

Au final, le G20 n’apporte pas de réponses complètes à la nécessité d’une nouvelle gouvernance. Il n’a pas réponse à tout. Le monde est fortement interdépendant et de nombreuse mutations socio-économiques sont encore à venir. Un élément essentiel de la stratégie de sortie de crise est la réforme d’un système international hérité de Bretton Woods. Au delà des instituions, le renouveau de la coopération internationale doit également passer par une nouvelle architecture financière et monétaire internationale.

2 . Réformer la finance et le système monétaire international 2.1. Définir la nouvelle architecture du système monétaire international

Dans le premier chapitre, nous avons dressé l’état des lieux de l’ordre monétaire

actuel. Nous avons vu en quoi ce système ou “non système” brillait par son instabilité et de son absence de contrôle. La crise de 2008 a montré la fragilité l’ordre informel et mou de Bretton Woods II. Dans ce deuxième chapitre consacré à la reconstruction de l’ordre économique international, il convient de se tourner vers l’avenir, et de voir quels ont été les progrès engendrés jusqu'à présent, quelles sont les perspectives pour le futur, et enfin qu’elles sont les propositions concrètes de réforme du SMI. Nous allons tenter de répondre à cette question: Quel système monétaire international pour une économie mondiale en mutation rapide?

L’éclatement du système de Bretton Woods n’a pas débouché sur la construction d’une nouvelle architecture internationale capable d’assurer la stabilité du système et sa cohérence. Ainsi, la voie est ouverte à diverses tentatives de définir une nouvelle architecture monétaire. La crise est à l’origine d’un consensus sur la nécessité

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135 POSTEL-VINAY K, 2011, Le G20, laboratoire d’un monde émergent, Les Presses de Sciences Po, Editions Broché, Paris.

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de refondre l’ordre monétaire international afin de se prémunir contre les crises à répétition et les risques de défaillance du système. La question liée aux problèmes d’un nouveau SMI n’était initialement pas au centre des débats. L’attention se portait d’avantage sur la réforme financière. Suite à la multiplication des tensions monétaires, la construction d’un nouveau SMI est revenu au coeur des débats publics. Cette question nécessite un important travail technique et de négociations politiques. “La reconstruction du SMI continuera à être au centre des débats et des préoccupations de la gouvernance globale dans la mesure où elle est essentielle à la stabilité de cet ordre.136” La reconstruction d’un SMI peut ainsi s’apparenter à un « retour à l’esprit des règles de Bretton Woods » ou à ce que l’on peut nommer « un Bretton Woods III » (les lois de BW avaient pour esprit de stabilité financière et monétaire internationale). La ligne directrice de ce nouvel ordre est de sortir de la volatilité et des crises à répétitions qui on marqué Bretton Woods II. Il faut noter que les contours et les contenus d’un troisième Bretton Woods sont encore flous et font l’objet de divergences de tailles. Cependant, ces controverses et ces débats démontrent la volonté de sortir d’un Bretton Woods II géré par les marchés, et de construire un ordre monétaire plus stable137.Sous la présidence française, le Groupe des Vingt a décidé d’inclure dans son programme des thèmes ambitieux et de grande portée comme les déséquilibres internationaux et la réforme du SMI.

Ces propositions sont passées en revues et sont mise à l’épreuve de leur applicabilité concrète. Cette partie s'intéresse aux défis et difficultés que chaque aspects de la réforme du SMI rencontre sur son chemin. Qu’elles sont les réponses que le G20 peut y apporter? Quel est le rôle du G20 dans la définition de ces réformes? Longtemps laissé à la guise des marchés, la redéfinition du SMI semble indispensable à l’heure actuelle. Ce chantier pourrait bien s'avérer être plus laborieux que la redéfinition de la régulation financière.

2.1.1 Réduire les déséquilibres internationaux

Un des enjeux majeurs de la réforme du SMI est de réduire les déséquilibres internationaux auquel le système actuel est soumis. Les déséquilibres de la balances courante entre les pays excédentaire et déficitaires auraient contribué à la crise de 2008: les excédents auraient nourri les bulles spéculatives sur les marchés financiers. L’enjeux est donc de réduire ces déséquilibres afin d’éviter le gonflement -et l’éclatement- d’autres bulles spéculatives dans le futur.

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136 Ben Hammouda, H., & Sadni-Jallab, M. (2011). Le G20 et les défis de la gouvernance globale. Bruxelles: De Boeck. p147

137ibid, p144

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Les déséquilibres internationaux en perspective.

Dans le premier chapitre, nous avons vu en quoi les déséquilibres internationaux sont d’important facteur d’instabilité au sein de l'économie mondiale. Ils sont à l’origine d’importantes fluctuations de la valeur des monnaies et des taux de change. Par conséquent, la construction d’un SMI doit impérativement passer par une réduction de ces déséquilibres afin d’assurer les conditions de stabilité de l’économie mondiale. Ben Hammouda et Sadni-Jallab (2011) précisent que « l’équilibre doit être au centre du fonctionnement de l’ordre international » et que rôle des instituions est d’aider les pays à atteindre cet équilibre . Christian De Boissieu (2011) rappelle que le débat ne porte pas sur l’existence de des déséquilibres macroéconomiques (extérieurs, budgétaires): les pays excédentaire et déficitaire ont toujours coexisté dans l’ordre mondial. La question relève plutôt sur la soutenabilité de ces déséquilibres dans le temps et des seuils à partir desquels une situation tenable devient insoutenable.

Par conséquent, le défi la gouvernance économique mondiale est de créer un consensus sur l’élaboration de mécanismes d’ajustement de la balance courante des grands pays afin de réduire les déséquilibres. Ces mesures viserait principalement les déficits américains (budgétaires et extérieurs) et les excédents extérieurs chinois, japonais et allemand. La question la plus délicate est celle de l’ajustement des pays déficitaires, qui pourrait déstabiliser l’économie mondiale, surtout pour les pays développés, en renforçant le risque déflationniste. Ben Hammouda et Sadni-Jallab (2011) expliquent que la réduction de ces équilibres pourraient résulter en guerres commerciales et une forte poussée du protectionnisme. L’idée est qu’il faut éviter à tout prix “l’effet boule de neige” que l’écart entre le taux de croissance réelle et le taux d'intérêt sur la dette peut provoquer : les charges d'intérêt sur la dette aliment les déficits et la dette elle-même, ce qui augmente encore plus les charges d'intérêt. Ce phénomène de cercle vicieux peut conduire à une situation économique insoutenable.

Quelles sont les solutions envisagées par le G20?

La question des déséquilibres internationaux a pour une première fois été abordée lors du sommet de Pittburg et Toronto où le G20 a appelé les pays excédentaires, en particulier la Chine, à équilibrer sa dynamique de croissance en renforçant la demande interne aux dépens des exportations. Le G20 a également mis en place un mécanisme de surveillance des engagements des pays à effectuer les ajustements nécessaires pour réduire leurs déséquilibres. L’objectif de la présidence française du G20 était de poursuivre le débat des déséquilibres internationaux. Il est nécessaire de construire un consensus sur deux aspects essentiels: 1) Définir des indicateurs pertinents censés établir un diagnostic partagé des déséquilibres Charlyne Fabre-Restivo 2012 68

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économiques. 2) Déterminer un seul d’équilibre au delà duquel la situation serait déclarée « insoutenable » (De Boissieu, 2011). En outre, un consensus doit être trouvé sur les politiques d’incitation à mettre en place afin que les pays déficitaires résorbent leurs déficits, ces politiques doivent également rassurer les pays excédentaires sur leurs la conservation leurs garanties138 .

Qu’elles avancées sur la question?

Lors du Sommet de Séoul, la question des déséquilibres internationaux à fait l’objet de nombreux débats. Le seuil des déséquilibres, qui ont pour but de cerner les déséquilibres, sont déjà à l’origines de nombreuses controverses. Timothy Geithner avait alors proposé un seuil numérique de 4% du PIB pour les déséquilibres tolérables. En pointant du doigt « les pays qui enregistrent des excédents commerciaux persistants » le secrétaire du Trésor Américain s’était attiré les foudres de Berlin et Pékin qui ont justifié leurs excédents par la compétitivité de leur économie. Même si sa proposition n’a pas été entérinée, il faut reconnaitre à Geithner le mérite d’avoir lancé le débat. D’autre part, la détermination d’un seuil numérique suscite de nombreux débats parmi les experts(...). Le G20 a butté sur cet obstacle technique pendant un long moment jusqu'à ce qu’en février 2011, un « accord sur les indicateurs de performances économiques » soit enfin trouvé. Selon le journal Le Monde, c’est in extremis que la France a réussi à arracher à la Chine un accord sur la manière de mesurer les déséquilibres économiques mondiaux139. Toutefois, la liste d’indicateurs adoptés ne prend pas en compte l’une des mesures les plus controversée: les réserves de change. Accusée d’en accumuler des sommes énormes pour favoriser ses exportations, la Chine s’y oppose catégoriquement. Le Brésil, la Russie, l'Inde et la Chine ont également indiqué être hostiles à certains indicateurs envisagés par les pays développés. Par conséquent, les indicateurs retenus concernent seulement et les déséquilibres internes, c’est à dire: dette et déficits publics, épargne privée, déficits externes, et le taux de change.

La question des déséquilibres internationaux suscite de nombreuses divergences d’opinions et d'intérêts, elle s'inscrit de ce fait dans un objectif de long terme du G20. Faut-il pour autant se contenter d’une réforme des petits-pas? Pour De Boissieu (2011), ce qui importe c’est que le G20 ait initié et stimulé le débat sur ces déséquilibres « sans langue de bois ni dialogue de sourd ». Comme le fait remarquer Christine Lagarde, à

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138 Ben Hammouda, H., & Sadni-Jallab, M. (2011). Le G20 et les défis de la gouvernance globale. Bruxelles: De Boeck. p189

139 G20 : accord sur la mesure des déséquilibres mondiaux, LeMonde.fr 19.02.2011

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l’issu de ces négociations de Sommet de Séoul, «le système ne peut pas se refaire en un jour»140. Après chaque Sommet, les médias retranscrivent que les invités à la table du G20 se félicitent des sujets qui ont été abordés. Bien entendu, il convient de saluer les efforts d’organisation et d’encadrement du débat du G20; seulement sa mission ne se résume-t-elle qu’à stimuler les discussions? Ne doit-il pas devenir plus coercitif? A ce titre, l’accord trouvé en février 2011 constitue-t-il réellement une avancée? Une liste d’indicateurs n’a rien de réellement concret. De plus, les quelques propositions faites ne semble pas avoir de caractère contraignant. A ce rythme là, la reconstruction d’un SMI stable et résistant aux crises prendra des années voire des décennies à voir le jour. En outre, les discussions à propos de ces indices ne pourraient-elles pas inclure des indexes de bien-être comme ceux proposés par Stilgitz141? An delà des missions du G20, ne faudrait-il pas penser à appliquer des sanctions à l’encontre la Chine, par des taxes douanières? Une chose est sûre, la difficulté à parvenir à un compromis sur un sujet aussi technique en dit long sur les obstacles qui se dressent face aux ambitions réformatrices du G20. Que cela présage-t-il pour le futur de la coopération internationale? Si cette épreuve est un test en grandeur nature de la volonté de coopération non seulement de la Chine, mais aussi des pays émergents, cela ne présage rien de bon.

2.1.2 Une nouvelle politique de change pour faire face à la guerre des monnaies

La construction d’un SMI passe par la définition d’un nouveau système de change. La dernière intervention en vigueur remonte aux accords du Plaza du 22 septembre 1985, lorsque les pays industrialisés ont accepté d’intervenir sur le marché des changes afin de déprécier le cour dollar par rapport au Deutsche Mark et au Yen. Depuis, on pensait que la guerre des devises était un « héritage du passé », que l’ère des chocs monétaires été bel et bien révolue142. Cependant, la crise de l’automne 2008 a fortement ébranlé les certitudes sur la capacité du marché à assurer une convergence des monnaies vers le taux de change d’équilibre. Après son entrée dans la dépression, en automne 2010, la crise globale était sur le point de rentrer dans une nouvelle phase: celle de la « guerre des monnaies » entre les plus grandes devises mondiales. Le terme « guerre des monnaies » désigne l’utilisation de méthodes de dévaluation compétitive part les grands pays industrialisés.

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140 G20 : 24 heures d'intenses négociations, Le Figaro, 20/02/2011

141 STIGLITZ J, SEN A, FITOUSSI J.P, 2008, Rapport de la commission sur la Mesure de la Performance Économique et du Progrès Social

142 Ben Hammouda, H., & Sadni-Jallab, M. (2011). Le G20 et les défis de la gouvernance globale. Bruxelles: De Boeck. p181

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Or, ce type de tensions monétaires mettent en évidence la nécessité de reconstruire un nouveau SMI.

Mécanisme de la “guerre des monnaies”.

Confrontée à une récession et à une baisse de la demande interne, les économies développées vont chercher à exporter leur déflation aux autres pays en laissant leur monnaie se déprécier. Les dévaluations compétitives sont utilisées par les pays développés afin d’accompagner la relance économique et celle de l’emploi. Plus leur monnaie baisse, plus cela stimule les exportations et, sur leur marché, plus cela freine les importations de produits étrangers au profit de produits concurrentiels nationaux. Pour résister, les autres économies vont garder leur monnaie dépréciées afin d’imposer un véritable ajustement et une déflation chez les grands pays143.

La « guerre » des monnaies est d’autant plus rude qu’elle a lieu entre de grands pays exportateurs (Chine) et des pays affichant des déficits commerciaux importants (États-Unis, et les pays européens). Le cours du Yuan est actuellement à un niveau très élevé par rapport au dollar et à l’euro, ce qui stimule les exportations chinoises et rendent les exportations américaines et européennes moins attractives. Les grandes monnaies ont donc pris une série d’initiatives pour favoriser la baisse du yuan. Au États-Unis, cette guerre se traduit par des mesures de quantitative easing. Adeptes des politiques de “benign neglect” (douce insouciance) les États Unis se satisfont de la baisse du dollar, qui leur permet de faire face à l’augmentation du chômage et au risque de déflation. En augmentant la masse monétaire par le rachat de titre de dette de l’Etat fédéral, la FED (Federal Rerserve Bank) soutient l’économie en relançant la consommation et l’investissement intérieur. La valeur du dollar baisse donc face aux autres monnaies. A cet égard, les États-Unis sont accusés d'inonder la planète de liquidité pour financer leurs dettes, sans se soucier des dommages collatéraux pour leurs partenaires du G20. La réponse des États-Unis à ces accusations: “The dollar is our currency, but your problem”144 Suivant cette logique, les autorités monétaires chinoises baissent elles aussi leur monnaie afin de ne pas subir de conséquences fâcheuses sur leurs exportations. Elles vendent donc du yuan contre des dollars pour maintenir la parité entre les devises des deux pays. C’est alors que la Chine est accusée de manipuler sa monnaie pour accroitre compétitivité. La sous évaluation du yuan et le succès commercial Chinois qui en découle à été grandement critiqué par les États-Unis, et ce dès les premiers mois qui ont

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143 Ben Hammouda, H., & Sadni-Jallab, M. (2011). Le G20 et les défis de la gouvernance globale. Bruxelles: De Boeck. p183

144 John Connally, secrétaire du trésor sous la présidence de Nixon, s’adressant aux Européens en 1973.

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suivis la crise. Souffrant d’un très grand déficit commercial, les États-Unis appellent aujourd’hui à un retour à l’équilibre, soit une dévaluation du yuan.

Ces politiques non conventionnelles ne sont pas sans conséquences, elles font de nombreuses victimes collatérales. Tout d’abord dans la zone euro: l’euro s’apprécie contre toutes les autres monnaies. La marge de manœuvre de la BCE est limitée puisqu’elle garde pour objectif fondamental de contenir le taux d’inflation. Afin de faire face à une trop forte appréciation de l’euro, la BCE a tout de même augmenté la durée des facilités de crédit accordées pour les banques, et pourrait éventuellement renforcer l’achat des obligations d’Etat145. La Banque Centrale Japonaise a quand à elle baissé son taux directeur. Ces dévaluations compétitives frappent de plein fouet les pays de moyennes importance. En 2 ans, le réal brésilien à connu une appréciation de 30%. Ces politiques non conventionnelles provoquent un afflux massifs de capitaux vers ces pays émergents, qui sont à l’origine d’une forte réévaluation de leur monnaie, et donc d’une perte de leur compétitivité commerciale.

Le choc des monnaies suscite de nombreuses inquiétudes du fait qu’elle menace de dégénérer en crise financière et géopolitique. Elle risquerait également de compromettre les chances d’une reprise globale. De ce fait, nombreux sont ceux qui appellent à une coopération internationale afin d'empêcher la transformation de ce choc en guerre commerciale. Il convient d’apporter une réponse à l'appréciation continue de la monnaie et les conséquences sur la compétitivité. Il faut empêcher que les États n’emploient d’autres mesures de dévaluations compétitives. A cet égard, le G20 a exprimé son souhait aller vers « un système monétaire international où les taux de change sont davantage déterminés par le marché »146.

Qu’elles sont les réponses de la communauté internationale face aux tensions monétaires?

Une coalition de grands pays tente d’exercer une pression sur Pékin pour réévaluer du yuan. L'appréciation du yuan permettrait de réduire certains risques macro-économiques pesant sur les pays partenaires du commerce international. La faiblesse du yuan conduit une appréciation de leur monnaie nationale ce qui in fine traduit se en perte de compétitivité commerciale. Après avoir multiplié ses incriminations contre des pays qui maintiennent des taux de change bas, l’administration américaine a fait part de son intention d’appliquer

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145 ibid

146 Communiqué des Ministres des Finances et Gouverneurs de banque centrale du G20, Paris, 15 octobre 2011

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des sanctions à l’encontre de la Chine. Parmi ces mesures de rétorsion on retrouve l’imposition de tarifs douaniers sur les exportations chinoises. Également victime des manipulations à la baisse du yuan, l’Europe s’est jointe aux critiques américaines et plaide pour une réévaluation de cette devise. Le Brésil et Thaïlande ont quand à eux déjà pris des mesures à l’encontre des flux de capitaux étrangers. Le Brésil à augmenté la taxe d‘investissement étrangers sur le marché des obligations; la Thaïlande a mis en place une taxe de 15% sur les acquisitions de bons du trésor par les investisseurs étrangers147.

La définition d’un nouveau système monétaire de change pour éviter la « guerre des monnaies » fait face à de nombreux obstacles et occasions manquées. Tout d’abord, il est difficile de créer un consensus sur cette question du fait que deux visions s’affrontent: certains pays considèrent la politique monétaire comme un outil pour sortir de la dépression et maintiennent des taux d'intérêt à un niveau bas; d’autre mettent en avant les risques liés à de telles pratiques et les conséquences pour les pays émergents. En outre, cette question n’est naturellement pas une priorité pour les pays qui sont en excédent, tel que l'Allemagne et la Chine. Cette dernière a d’ailleurs appelé l’Europe a ne pas se joindre aux accusations américaines. Alors que le sommet du G20 de Séoul devait aborder la question de la reconstruction d’un SMI plus stable, la problématique relative à la « guerre des monnaies » a été repoussée une date ultérieure. Christine Lagarde a estimé que « cette question [était] trop compliquée »148 pour être réglée lors de ce sommet. Pour les critiques, le G20 semblerait avoir une fois encore manqué l'occasion d'asseoir sa légitimité institutionnelle en définissant un compromis sur la guerre des monnaies, au lieu de simplement espérer que la Chine ou les USA finissent par céder. L’Association pour la Taxation des Transactions financières et pour l'Action Citoyenne (ATTAC) déplore quand à elle la détermination du G20 d’aller vers un SMI « où les taux de change sont davantage déterminés par le marché ». Dans un communiqué ATTAC souligne qu’aucune mesure n’a été prise pour limiter la spéculation sur le marché des changes, alors que cette spéculation provoque d’incessants mouvements de yo-yo entre les devises, sans aucun rapport avec les fondamentaux des économies nationales 149.

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147 Ben Hammouda, H., & Sadni-Jallab, M. (2011). Le G20 et les défis de la gouvernance globale. Bruxelles: De Boeck.

148 La "guerre des monnaies" ne sera pas réglée au G20 de Séoul, estime Lagarde, (AFP) – 10 nov. 2010, Paris

149 G20 de Séoul : vive le marché libre ! Attac France, 12 novembre 2010, consultable sur attacfrance.org

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L’impuissance du G20 face au spectre de la « guerre des monnaies » a conduit à de nombreuses suggestions de la part de la société civile. D’un coté, Christian de Boissieu (2011) relativise cet échec et encourage le G20 à accorder davantage de temps au dialogue et à la négociation afin d’éloigner une possible guerre des devises et ouvrir la perspective de coopération. D’un autre coté, déçu de la lenteur des négociations, certains estiment que le G20 a manqué l'occasion de d’affirmer sa crédibilité et son rôle d'acteur décisif en situation de crise. Selon ces critiques, le G20 aurait dû suggérer aux États-Unis d'adopter une politique monétaire moins agressive et proposer aux pays émergents une appréciation substantielle de leurs devises150. Puisque l’objectif du G20 est que les taux de change soit davantage déterminé par les marchés, ATTAC suggère qu’il est impératif de taxer et réglementer drastiquement la spéculation sur les devises. Dans l’objectif plus large de définition d’une nouvelle politique de change, le choix ne doit pas exclusivement se résumer à la fixité ou au flottement mais doit favoriser des solutions plus diverses telles que: le rattachement des monnaies nationales à un panier de devises et la construction de zones de coopération monétaire. Quelques soient les mesures adoptées, il est certain que les tensions monétaires posent d’importants défis en matière de coordination des politiques macroéconomique151.

2.1.3 Les défis de la coordination internationale des politiques monétaires.

La question des déséquilibres internationaux et les tensions monétaires qu’elles engendrent constituent d’importants défis pour le G20. Les politiques monétaires des différents pays ont des effets négatifs sur les autres pays via les externalités sur les taux de changes, la liquidité disponible, le flux de capitaux, et le gonflement prix des actifs. Ainsi, la politique expansionniste que mène les Etat-Unis a des conséquences néfastes sur les autres pays partenaires des échanges.

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150 Le G20 s'attaque aux déséquilibres mondiaux, vendredi 18 février 2011, radio canada, article consultable en ligne.

151 Ben Hammouda, H., & Sadni-Jallab, M. (2011). Le G20 et les défis de la gouvernance globale. Bruxelles: De Boeck., p144

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Un des objectifs essentiels du G20 est la coordination internationale des politiques monétaires. Or pour arriver à une telle coordination cela impliquerait que les banques centrales prennent en compte que les politiques qu’elles mènent ont des effets sur les autres pays. Ces mesures viseraient principalement la Réserve Fédérale Américaine (FED), qui devrait renoncer de fait à l’utilisation de politiques monétaires expansionnistes. De même manière, les autorités des pays émergents devront renoncer à freiner l'appréciation de leurs devises. L’objectif final d’une meilleure coordination des politiques monétaires est de mieux pouvoir contrôler l’offre de réserve mondiale.

Toutefois, Patrick Arthus 152 n’est point optimiste quand aux perspectives sur la coordination des politiques monétaires. Selon l’auteur, la politique monétaire Américaine va rester trop expansionniste et les pays émergents vont continuer à freiner l'appréciation de leur monnaie, même si cela accentue l'excès de liquidité internationale. On ne peut donc pas penser à une stabilisation des taux de change. La raison est simple, les banques centrales ont des mandats nationaux et elles ne peuvent pas renoncer à leurs objectifs domestiques. Ainsi, la BCE a pour mission de contenir le taux d’inflation, elle fixe donc des taux d'intérêt pour que l’inflation future anticipée domestique soit conforme à l’objectif d’inflation. Les effets de cette politique monétaire à l’étranger n’est absolument pas prise en compte tandis que les écarts de politique monétaire avec les autres pays conduisent à des ajustement de taux de change. Pour Patrick Arthus, les déséquilibres internationaux relèvent de la responsabilité de banques centrales qui ne prennent pas en considération des externalités internationales des politiques monétaires qu’elles mènent.

La solution revient donc d’opter pour des coopérations monétaires limitées. Patrick Arthus (2001) explique que toutes les tentatives de coordination internationale de politiques monétaires qui sont « favorable globalement » mais pas pour tous les pays impliqués seraient immédiatement voués à l’échec. La condition du succès de la coopération internationale des politiques monétaires est «qu’elle doit améliorer le bien-être de tout les pays concernés ». De part ces considérations, il est essentiel que le G20 revoit ses ambitions de coordination à la baisse, il doit adopter des objectifs plus modestes si il veut être efficace.

2.1.4 Qu’elle monnaie internationale?

Comme Ben Hammouda et Sadni-Jallab le rappelle, “la réflexion à l’issu de la crise globale ne saurait se maintenir à la sphère financière, les déséquilibres importants de l’économie mondiale posent immédiatement des question monétaires et plus

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152 Arthus P, 2011, Il est très difficile de croire à la coordination des politiques monétaires, Le G20 et la nouvelle gouvernance économique mondiale, sous la direction de Jacques Mistral, Editions Puf, Paris

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particulièrement le rôle de la monnaie de paiement internationale et de réserve, que le dollar a assumé jusqu’aujourd'hui” (2011,187).

Les États-Unis ont la liberté d'émettre le dollar, qui est la monnaie des paiements internationaux et de réserve. Ce privilège leur permet de financer à concurrence de 90 à 95% de leur déficit dans leur devise (De Boissieu, 2011). L’expression « le dollar, notre monnaie, votre problème » prévaut encore une nouvelle fois. Par ailleurs, de part son statut d'émetteur de réserves de change exclusif « es États-Unis exercent une fonction de locomotive sur la demande mondiale » (Siroen, 2002). Par conséquent, l’économie mondiale est soumise à la conjoncture américaine. Ainsi, les réserves en dollars subissent les variations de changes important.

Le dollar devrait-il rester la seule clé de voute du système monétaire international? Les inconvénients d'un SMI toujours centré sur le dollar sont patents. Dans le premier chapitre nous avons vu que la dépendance de l’économie mondiale vis-à-vis du dollar est à l’origine d’important déséquilibres : l’accumulation de réserves de changes chez les pays émergents, le creusement du déficit Américains et son impossibilité d’y faire face. Rappelons que l’accroissement de ces déséquilibres a nourri les vulnérabilités et les fragilités qui sont au coeur de la crise actuelle (Ben Hammouda 2011). Selon Agnès Bénassy-Quéré 153 , ces inconvénients vont s’amplifier avec le basculement de la croissance mondiale des pays industrialisés vers les pays émergents. La demande mondiale pour ces actifs sera structurellement excédentaire. Cette situation contribuera à maintenir les taux d'intérêt américains à un niveau bas. Ce bas niveau du taux d'intérêt aux États-Unis aura deux conséquences: il ralentira le mouvement de désendettement des ménages, des entreprises et de l'Etat. Or, moins d'épargne, c'est plus de déficit extérieur et donc une poursuite de l'endettement des États-Unis vis-à-vis du reste du monde. Ensuite, le bas niveau du taux d'intérêt aux États-Unis contaminera la politique monétaire de tous les pays qui surveillent leur taux de change - qui sont une majorité dans les économies émergentes. Or ces pays ont de bonnes perspectives de croissance, mais aussi un bon potentiel d'inflation et de bulles spéculatives.

La nature de la liquidité internationale est par conséquent au coeur du débat sur le nouveau SMI. La problématique de la dépendance vis-à-vis du dollar a été engagée par les autorités Chinoises et relayée par la Russie. Devant la conférence des ambassadeurs en 2010, Sarkozy a évoqué une problématique voisine. Le FMI s’est également engagé dans le débat, en déclarant qu’une discussion sur le rôle du dollar était “légitime”(Ben Hammouda 2011). Plusieurs réflexions on déjà été engagée sur le

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153 Bénassy-Quéré, A. L'euro, seule réponse au tout-dollar | Le Cercle Les Echos. [Consulté le 20 aout 2012], disponible en ligne sur Les Echos.fr

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“polycentrisme monétaire” et l'émergence de nouvelles monnaies comme l’euro et le DTS qui seraient susceptibles de prendre une part importante dans les paiements internationaux.

L’Or peut il être la référence de la liquidité internationale”?

La question du retour de référence à l’or est revenue au coeur du débat à la veille du Sommet de Séoul, lorsque le président de la Banque Mondiale, Robert Zoellick, a publié une tribune appelant à son retour. En outre, un retour à l’étalon or permettrait de réduire le privilège exorbitant dont dispose aujourd’hui les États Unis de battre la monnaie des paiements internationaux.. Néanmoins, les critiques on rappelé que les quantités en or étaient bien trop insuffisantes. Par conséquent, un retour à l’étalon or pourrait constituer un frein au développement des activités économiques et des échanges internationaux. Les critiques suggèrent plutôt l’intervention de nouvelles formes de gestion des paiements internationaux prenant en considération les nouvelles puissances émergentes.

Les Droits de Tirage Spéciaux : quel avenir monétaire pour une monnaie panier?

Le DTS est défini comme un panier de monnaie comprenant le dollar l’euro et la livre sterling et le yen. Crée en 1969 contre la crainte d’une pénurie internationale de liquidité, son rôle est aujourd’hui restreint. Certains spécialistes avancent que l’usage d’une monnaie panier réduirait le risque de change (...) et contribuerait ainsi à rééquilibrer le SMI. Cependant ce processus de composition, décomposition, et recomposition engendrerait un coût de transaction non négligeable selon Christian De Boissieu (2011). De ce part ce défaut, un rôle accru du DTS relèverait davantage d’une formule transitoire que d’une solution durable.

L’Euro comme une seconde monnaie internationale?

Agnès Bénassy-Quéré154 avance que la zone euro peut être une solution face aux problèmes du SMI. Aux côtés du dollar, l’Euro servirait à diversifier les réserves des Banques Centrales. Il ne s'agit pas de remplacer la monnaie américaine comme monnaie clef du système, mais seulement de proposer une sources de diversification pour les réserves des investisseurs publics (banques centrales) et privés. L’émulation entre la zone dollar et la zone euro pourrait être stabilisante dans la mesure où elle empêcherait que les banques centrales de s’engager dans un endettement non soutenable à long terme. L’euro se présente comme la seule monnaie crédible comme complément au dollar pour les fonctions de monnaie internationale, à condition qu’il survive (...).

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154 ibid

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Perspectives : Vers un système monétaire multi-polaire?

Le système monétaire actuel est en décalage avec l’économie mondiale. Le poids encore prépondérant du dollar fait du système actuel un système unipolaire, qui s’oppose au caractère tripolaire de l’économie mondial. En effet, les puissances émergentes asiatiques pèsent dorénavant tout autant que l’Europe ou l’Amérique du Nord. La transition vers un système monétaire « multipolaire » semble inévitable 155. Toutes les propositions citées précédemment ne font pas consensus, pour certains économistes elles ne sont pas réalistes alors qu’ un système monétaire international multi-devises se présente aujourd’hui commeun moyen fondamental pour maintenir la stabilité du système financier international. Un tel système devrait ainsi permettre d'encourager les gouvernements des pays émetteurs d'adopter une politique monétaire prudente pour maintenir la stabilité de leur monnaie et de leur dette souveraine. Le monde semble donc aujourd’hui se diriger vers la voie du polycentrisme monétaire. Quel horizon pour cette « nouvelle triade monétaire »? A condition que l’euro survive aux turbulences actuelles (...), on devrait s’acheminer vers une triade euro-yen-dollar dans les dix années à suivre selon Christian De Boissieu (2011). En effet, le yuan joue progressivement un rôle de plus en plus important au niveau international que ce soit dans les échanges commerciaux ou dans le domaines financier. Par ailleurs, son importance au niveau régional laisse présager la possibilité de l’émergence d’une zone yuan en Asie156.

Les défis de la Transition vers triade monétaire.

Il est difficile de donner un horizon fiable à l’émergence d’une triade monétaire puisque le yuan doit dans un premier temps remplir toutes les conditions d’une convertibilité. La devise chinoise peut-elle devenir une monnaie de réserve internationale dans un nouvel ordre monétaire polycentrique? Cette question est inévitablement politique157. Elle implique certaine conditions techniques auxquelles la Chine doit se soumettre. La première condition est la convertibilité totale de la monnaie internationale. Pour que le yuan soit pleinement convertible, il faudrait dans un premier temps entamer des réformes structurelles domestiques, telle que des réformes bancaires. Il faut encore du temps pour que le pays transitionne vers une convertibilité complète de

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155 Camdessus, M., Padoa-Schioppa, T., & Lamfalussy, A. (2011). La réforme du système monétaire international, une approche coopérative pourle 21ème siècle. Paris: Initiative du Palais Royal.

156 Ben Hammouda, H., & Sadni-Jallab, M. (2011). Le G20 et les défis de la gouvernance globale. Bruxelles: De Boeck. p188

157 ibid

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sa monnaie, il doit être prêt à assumer certains nombres de droits-et devoirs158 . La deuxième condition concerne la liberté de circulation des capitaux et la monnaie à l'extérieur, ainsi que la liberté de formation du taux de change sur les marchés. La transition vers un modèle polycentrique est délicate. Elle pose par ailleurs un dilemme pour les pays détenant des réserves en dollar. La Chine et l’Europe n’ont pas intérêt à précipiter l’évolution vers un système de triade monétaire; une contestation trop vive du dollar ne ferait que provoquer sa fragilité et son recul, et donc une appréciation des devises chinoises et européennes. De plus, une chute du dollar provoquerait une forte dévaluation des avoirs de ces pays. L’évolution doit donc se faire en douceur étant donné que 70% des réserves de change chinoises sont en dollar159.

Une transition qui prendra du temps.

Même si son hégémonie est remise en cause, le dollar demeure la monnaie essentielle dans les paiements internationaux: 65% des réserves internationales de change sont détenues en dollar (Ben Hammouda 2011). Les contours des nouvelles monnaies internationales sont encore floues, l’euro le DTS et le yuan éprouvent encore des difficultés à devenir à devenir des monnaies internationales. D’autres interrogations demeurent sur le lien entre système multipolaire et stabilité systémique160 . Un SMI moins asymétrique serait il par nature moins instable? Les réponses sont très variées à ce sujet. Selon certains modèles, l’hégémonie d’un pays ou d’une monnaie favoriserait la stabilité dans le temps, d’autres modèles montrent le contraire. On peut tout de même saluer les efforts du G20 qui a ouvert le débat. L’ouverture des négociations pourrait à long terme aboutir à des accords menant progressivement vers le polycentrisme monétaire et la disponibilité de liquidités internationales suffisantes pour permettre aux pays d’effectuer à la fois leurs paiements internationaux et assurer une relance du commerce international. La transition vers une nouvelle triade monétaire réduirait les privilèges des États-Unis et rééquilibrerait l’intérieur du SMI en répartissant les droits de seigneuriage entre les grandes zones monétaires. L’objectif d’une telle réforme est d’assurer une croissance équilibrée, un développement partagé, et le plein emploi.

Conclusion:

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158 De Boissieu C. (2011), La réforme du système monétaire international, Le G20 et la nouvelle gouvernance économique mondiale, Les cahiers du cercle des économistes, Paris : Descartes & Cie. p51-59

159 ibid, p56

160 ibid, p57

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Quel avenir pour la réforme du SMI? On peut le constater, la construction d’un nouveau système monétaire international est à peine entamée, elle semble donc très loin d’être achevée. « Trop compliquée » la réforme du SMI est sans cesse repoussée, ou fait l’objet d’accords arrachés loin d’être révolutionnaires. La présidence française du G20 avait ouvert le débat et avait fait part de ses ambitions (démesurées?) à ce sujet, or cette gouvernance est à présent close. En juin 2012, lors du sommet de Los Cabos, le Mexique n'a même pas retenu la réforme du système monétaire international parmi les priorités de sa propre présidence du G20. Alors que l’attention est aujourd’hui centrée sur la crise financière, le débat monnaie de référence du système monétaire promet d’être long d’autant plus qu’elle fait l’objet de nombreuses propositions différentes.

2.2 Construire une nouvelle architecture financière internationale

Après avoir analysé les causes de l’instabilité sur les marchés financiers dans un premier chapitre, il convient de voir les progrès envisageables pour réduire le risque de nouvelles crises monétaires et financières. Il s’agit d’esquisser les bases d’une régulation de la finance internationale dont la crise récente a montré à la fois l’urgence et la nécessité. L’objectif de cette partie est d’évaluer l’avenir des projets de réformes proposés par le G20. On montrera que, malgré l’ambition affichée, la portée de cette nouvelle architecture se montre très limitée.

2.2.1 Une nouvelle architecture financière placée sous l’égide du G20.

La multiplication des crises de changes et des crises financières ces 20 dernières années alimentent une intense réflexion sur le besoin de concevoir une nouvelle architecture financière internationale. De nombreuses propositions ont déjà été présentées à ce sujet, part d’auteurs isolées, des administrations économiques nationales ou part des organisations économiques internationales. D’ailleurs, une premiere tentative d’élaborer une nouvelle architecture financière avait vu le jour bien avant que la crise n’éclate. En effet, à la suite de la crise Asiatique (97-98) et l’éclatement de la bulle internet (2001), le G7 avait mis en place les premiers dispositifs de surveillance des Charlyne Fabre-Restivo 2012 80

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marchés financiers: Le FMI et en particulier au Comité monétaire et financier international (CMFI); la BRI/le Comité de Bâle; le Forum de stabilité financière (FSF). Toutefois, cette « nouvelle » architecture financière a montré ses limites lors de la crise de 2008. Ces instances se sont montrées incapables de prévenir le développement des bulles financières et immobilières. Un consensus guidé par l’action du G20 est en train de se créer sur la formation des contours de cette nouvelle architecture au sein de la communauté financière internationale.

L’experience, tout comme les théories contemporaines montrent que la fragilité financière et l’éclatement de crises spéculatives sont des caractéristiques intrinsèques de la finance dérégulée. Toutefois, il faut espérer que la finance ne soit pas condamnée à aller de crise en crise. La crise financière fait apparaitre la nécessité d’améliorer la régulation du système dans son ensemble. La globalisation financière fait que cette régulation doit être mondiale. L’un des objectifs principaux de la gouvernance économique mondiale doit être de définir et d’établir des règles ou procédures multilarales permettant d’assurer la stabilité des marchés financiers globalisés. Afin de lutter efficacement contre le risque systémique, il convient de mettre en place à la fois une stratégie de prévention et de gestion. Il est nécessaire de réglementer de manière adéquate par des réformes de diverses nature, l’instabilité intrinsèque de la finance, “à défaut de la faire disparaitre”.

Le climat est a priori favorable à la construction d’une nouvelle architecture financière. En effet, tous les grands dirigeants sont conscients de la nécessité de rupture avec l’ordre passé et les pays émergents ont désormais pris place autour de la table des négociations. C’est dans ce contexte d’urgence que le G20 a formulé ses premiers principes de réforme de l’architecture financière mondiale. Dès sa première réunion à Washington le 15 novembre 2008, le G20 a adopté un «plan d’action » en réponse à la grande crise économique et financière qui venait tout juste de débuter. Ce programme s’apparente à une feuille de route qui guide le G20 tout au long de sa mission d’extension et d’approfondissement des règlementations sur les intermédiaires financiers. C’est à l’occasion du Sommet de Londres que le G20 a officialisé les options retenues à Washington, dans la déclaration du le 2 avril 2009 sur le renforcement du système financier. L’objectif du G20 est clair: il faut mieux maîtriser les sources d’instabilité financière afin d’éviter le déclenchement de nouvelles crises systémiques. Ainsi, le Groupe des Vingt s’investit de plusieurs missions, qui seront détaillées au fil de cette partie. Parmi les mesures phares de ces déclarations, on remarque la mission de renforcer la règlementation. La novation la plus importante est selon André Cartapanis l’affirmation de la volonté d’adopter un cadre macro-prudentiel. L’objectif d’une telle mesure est «d’intégrer le risque systémique et la cyclicité

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macroéconomique dans les objectifs poursuivis par les policy makers »161. Les pays du G20 sont ainsi amenés à réfléchir à de nouveaux indicateurs de risque à intégrer dans les exigences en capitaux propres des banques. Enfin, le dernier point de réforme porte sur l’organisation de la régulation financière et des compétences des institutions internationales (Conseil de Stabilité Financière, FMI) et des États (banques centrales, Trésors publics) dans la prévention et la gestion des crises.

Le Plan d’action du 15 novembre 2008 et la Déclaration du 2 avril 2009 sont des accords politiques visant à élaborer les principes d’une meilleure régulation des marchés financiers. A la différence des accords de Bretton Woods, le plan d’action et la déclaration du G20 n’ont aucune portée juridique ou réglementaire immédiate. Ces propositions sont néanmoins à l’origine d’inflexions majeures. En effet, elles présentent des lignes de force réellement pertinentes au regard des mécanismes de la crise actuelle. Tout d’abord, elles posent un bon diagnostic sur les causes de la crise, à savoir: les dysfonctionnements des marchés financiers internationaux et à des politiques macroéconomiques incohérentes. Comme Catapanis le fait remarquer, ces propositions présentent une lecture keynésienne de la crise, en témoigne son lexique : “excès des effets de levier ; procyclicité de la finance...” De plus, ces accords ne se contentent pas de simples déclarations d’intentions, mais ébauchent de réelles stratégies de réforme des marchés financiers. La volonté d’étendre le périmètre de la supervision (paradis fiscaux, hedge funds…) et d’enrichir la nature des règles en intégrant les questions de liquidité, de procyclicité ou de risque systémique, démontre ce souci d’établir des mesures concrètes. Enfin, ces propositions comportent une innovation fondamentale, à savoir la réorientation macro-prudentielle de la réglementation des banques. L’adoption d’un cadre macro-prudentiel consiste à intégrer le risque de cyclicité macroéconomique et les fragilités de l’ensemble du système financier dans les exigences microéconomiques en capitaux propres162.

Tout laisserait présager l’avènement d’une nouvelle architecture financière internationale de nature à enrayer désormais, les sources d’instabilité financière et à rendre beaucoup plus improbable, dans l’avenir, le déclenchement d’une crise systémique.

L’avènement d’une toute nouvelle architecture financière internationale suscite cependant de nombreuses incertitudes. Tout d’abord, Oliver Klein (2010) et Catherine Mathieu (2009) soulignent la nécessité de faire aboutir ces réformes au plus vite. Le retour d’une phase euphorique ou d’un rebondissement du marché condamnerait à

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161 Cartapanis A. (2009) Sous l'égide du G20 , Dossier IV : Réformer le capitalisme financier ? Revue de l'OFCE 2009/3, Paris : Editeur Presses de Sciences Po 2009/3 (n° 110) - Cairn.info

162 ibid

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oublier les leçons récurrentes que nous apporte chaque crise financière. Si bien que Catherine Mathieu écrit “espérer que la crise soit assez profonde pour que les gouvernements et les classes dominantes se résignent à introduire les réformes nécessaires”163.

2.2.2 Réformer le secteur bancaire

La crise a engagé une grande réflexion sur la refonte du système bancaire et les questions essentielles liées à son fonctionnement.

Objectif premier: recentrer les banques sur leurs missions.

En premier lieu, il convient de réfléchir au rôle et au mandat des banques. Durant ces vingt dernières années, les banques se sont progressivement écartées de leurs missions initiales pour intervenir sur les marchés financiers, où elles ont réalisé une partie croissante de leurs profits. De cette manière, elle ont également augmenté considérablement leur exposition aux risques. Or, les banques doivent obéir avant tout à une mission de financement de l’économie. Leur rôle est de fournir des crédits aux entreprises et ménages, des placements surs, afin de stimuler la croissance et le plein emploi. Dès lors, il faut impérativement affirmer l’objectif de recentrer les banques sur leur métier. L’intervention massive des États pour renflouer les banques après la crise pose également la question du statut et du rôle de ces dernières. Pour beaucoup d’observateurs, il est urgent de régler la question du “too big to fail” (trop grosse pour faire faillite). L’aléa moral joue un rôle important dans la prise de risque. Les agents économiques sont enclins à une plus grande prise de risque dans la mesure où ils ont le sentiment que les pouvoirs publics viendront à la rescousse en cas d’échec. Fannie Mae et Freddie Mac en sont des exemples patents. Les deux géants du crédit immobilier américain fonctionnaient sur les bases d’un organisme privé (des dividendes et rémunérations étaient versées à leurs actionnaires et dirigeants) mais bénéficiaient implicitement d’une garantie de l’Etat. Pour Catherine Mathieu (2009), l’intervention étatique est une mesure temporaire visant à restaurer la stabilité mais n’incitant en rien à tirer les leçons de la crise quant à la régulation des banques. De son côté, Paul Martin déplore que la question des institutions financière dite “too big too fail” est été jusqu'à présent ignorée

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163 Sterdyniak, H., & Mathieu, C. (2009). La crise du capitalisme financier. Paris: Observatoire français des conjonctures économiques .

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par le Comité de Bâle164. Catherine Mathieu suggère que les institutions financières mise sous tutelle de l’Etat, telles que Fannie Mae et Freddie Mac, devrait être utilisé pour « reconstituer un service financier public (...) qui distribuerait des crédits basés sur des objectifs de production et d’emploi ».

L’augmentation considérable des crises bancaires pousse à réfléchir à une meilleure régulation du secteur financier. La crise a conduit à des réflexions sur le thème du renforcement de la supervision du système bancaire. Les banques occupent un on rôle déterminant dans la société, elles gèrent un bien collectif : la monnaie. A cet égard, plusieurs raisons justifient la mise en place d’une règlementation des activités bancaires.

La règlementation prudentielle et comptable.

La règlementation prudentielle s’institue comme un des piliers de la prévention des crises bancaires. La prévention des faillites bancaires repose sur une mesure de leurs fonds propres. Les normes prudentielles fixent en effet les exigences de solvabilité des banques. La nécessité de règlementation des banques s’explique par l’inefficience des marchés à assurer la transmission d’information parfaite sur les biens et services165. En 1988, le comité de Bâle à instauré le premier cadre macroprudentiel de l’activité bancaire: Bâle I. La réglementation de Bâle vise à prévenir les faillites bancaires en imposant un niveau minimal de fonds propres pour couvrir les risques. Ce premier accord a définit un ratio de solvabilité, dit “ratio de Cooke”, mis en oeuvre en 1993 dans les pays représentés au sein comité de Bâle, puis ensuite étendu à l’ensemble des pays industrialisés. Toutefois, l’accord de Bâle a rapidement été jugé insuffisant pour trois raisons. Sa faiblesse réside dans l’absence de prise en compte des évolutions de l’activités bancaire et de la composition du bilan des banques (qui peut être composé de réserves occultes). De plus, Bâle I ne fait aucune distinction entre les crédits accordés aux sociétés quelque soit leur note, et les crédits accordés aux individus. Enfin, le ratio de Cooke est vivement critiqué pour sa négligence des effets de diversification des portefeuilles bancaire et pour son silence sur les autres risques166. Le Comité de Bâle a donc été amené à réfléchir à de nouvelles mesures. Ces réflexions ont débouché sur un nouveau ratio appelé “ratio McDonough”. Le dispositif de Bâle II apporte trois modifications fondamentales ce qui explique son organisation 3 pilliers:

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164 Martin P. (2011), “Le G20 et me partage de la souveraineté: pour la réforme du secteur financier, Le G20 et la nouvelle gouvernance économique mondiale, Les cahiers du cercle des économistes, Paris : Descartes & Cie.

165 Machrouh, F. (2012). Crises bancaires, comprendre pour mieux prédire. Paris: Harmattan.

166 ibid

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- Le montant exigé de fond propre reste le même (8%) mais le premier pilier élargi l’éventail des risques couverts puisqu’il prend désormais en considération le risque opérationnel en plus du risque de crédit et de marché. Le calcul du risque est déterminé en fonction de la qualité du crédit et est établi soit par une agence de notation externe soit par une notation interne

- Le deuxième pilier instaure un mécanisme de surveillance et de supervision chargé de vérifier l’adéquation des fonds propres et l'efficacité des mesures de contrôle interne. Ce dispositif incite la banque à fournir des informations quand à la nature de son niveau d’exposition au risque, et instaure un dialogue entre les instances de surveillance facilitant ainsi une résolution de tout problème éventuel.

- Le dernier pilier vise à favoriser la discipline de marché, c’est à dire la transparence financière. Le comité de Bâle a exigé que les banques rendent publique plusieurs catégories d’informations afin que le marché puisse fournir des informations sur leur agissements, leurs niveaux de prise de risque et leurs performances.

De l’autre côté du spectre de la règlementation bancaire, on retrouve les normes comptables. Les normes comptables traduisent, en termes financiers, l'activité et les ressources des entreprises. L’adoption de norme comptable sert à améliorer la comparabilité et la transparence des comptes publiés. La méthode de comptabilisation retenue comme standard international en comptabilité est la valeur de marché. Ce principe consiste à valoriser les actifs au plus près de leur prix de marché (et non selon leur coût de revient), obligeant les banques à comptabiliser toute baisse de valeur de leurs actifs (moins-value latente) comme des pertes effectives167. Les normes comptables internationales dites “International Financial Reporting Standards” IFRS sont adoptées par l'organisme international de normalisation comptable, “International Accounting Standards Board”. Ces normes comptables internationales ont été mise en oeuvre au 1er janvier 2005 dans l’Union Européenne.

Les lacunes de la règlementation prudentielle et comptable.

L’accord de Bâle II est symbole de grand progrès dans le domaine de la règlementation prudentielle bancaire. Néanmoins, certaines limites méritent d’être soulignées. La crise financière a mis en évidence certaines lacunes de la règlementation. Une nouvelle réforme des normes est ainsi désormais envisagée, avant même la mise en oeuvre complète de la précédente réforme.

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167 La régulation bancaire à l'épreuve de la crise financière. (2009). Paris: Sénat.

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Tout d’abord, la crise financière a mis en évidence les lacunes techniques et l’existence d’effets pervers attachés à la règlementation prudentielle. Premièrement, les normes incitent à un transfert de risques. En effet, les exigences de solvabilité ont incité les établissements à transférer une large part de leurs risques au moyen d’opération de titrisation. Une nouvelle classe d’actifs est apparue: les dérivés de crédit/les produits structurés. La titrisation permet de transférer le risque hors bilan (de l’externaliser) ou vers d’autres acteurs ne faisant pas face au même exigences règlementaires que les banques. Les hedges funds sont notamment en cause dans l’envolée des crédits subprimes. La titrisation induit une forme de déresponsabilisaton des banques: elles sont moins incitées à sélectionner les crédits et à analyser attentivement les risques associés168.

Deuxièmement, les ratios de solvabilité sont critiqués pour leur pro-cyclycité. Les normes prudentielles sont suspectées d’accentuer le cycle économique, tant en période de récession qu’en période de croissance. En effet, en période de ralentissement économique, les exigences en fonds propres augmentent. Les banques sont donc contraintes de diminuer le crédit distribué (phase dite de credit crunch) , l’économie se retrouve alors en manque de liquidité. A l’inverse, en période de forte croissance, la diminution des risques incite les banques à prêter d’avantage, ce qui peut alimenter les bulles spéculatives. La normalisation comptable internationale présentent elles aussi un caractère pro-cyclique. Cet effet pervers est souvent attribué à la « juste valeur ». La crise a semé le trouble sur la valeur des titres, notamment ceux adossés à des créances immobilières, devenus « illiquides ». Ces actifs étant devenus invendables, ont vu leur prix s’effondrer. Pour d'autres, le caractère « procyclique » du cadre réglementaire tient également à la combinaison de la « juste valeur » et des normes prudentielles (...).

Le contrôle prudentiel au sein du secteur financier présente par ailleurs de nombreuses faiblesses opérationelles et conceptuelles. Premièrement, la régulation donne l’illusion qu’il y a contrôle public, et que donc les risques sont sous contrôle. Une trop grande confiance a été ainsi accordée aux modèles internes de risque des institutions financières, et aux notations des agences spécialisées. Avec une perception plus correcte que les risques étaient mal contrôlés, le financement des instituions financières aurait été moins aisé et cela aurait freiné l’emballement du crédit169

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168 ibid

169 De Callatay E. (2010), La faute à Voltaire ou à Rousseau? La responsabilité des banques et des autorités dans la crise financière, La crise économique et financière de 2008-2009 l'entrée dans le 21e siècle ?. Bruxelles: PIE-P. Lang. p53-71

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Deuxièmement, « la régulation génère une force qui incite les acteurs à la contourner » 170 . En effet, plus la régulation est exigeante, plus elle pousse certaines activités en dehors du champs de contrôle de autorités. C’est ainsi qu’on émergé les hedges funds, ces fonds spéculatifs qui permettent aux banques de développer des activités hors bilan. En outre, les faiblesses de Bâle I et Bâle II s’expliquent par le fait que le contrôle prudentiel exige une classification du risque. Or toute catégorisation ouvre la voie à une relabellisation en vue d’obtenir un traitement plus favorable171. Ainsi cela incite les institutions financière à transférer des crédits à risque élevé dans une structure “hors bilan”, financée par elle même ou par une autre institution financière faisant partie du shadow banking system. Enfin, la régulation publique peut éventuellement servir des intérêts particuliers sous couvert de défendre l'intérêt général (De Callatay, 2009). En effet, la régulation peut être façonnée en fonction des intérêts de celui qui l’applique où la conçoit. Fannie Mae et Freddie Mac illustrent encore une fois cette exemple. Accordant un financement généreux tant au parti républicain que démocrate, ces deux organismes n’ont pas fait l’objet de régulations plus poussées.

Au regard de la crise des subprimes, une réforme structurelle apparait nécessaire afin de rétablir la confiance dans les mécanismes de régulation de l’économie mondiale. Cette réforme doit s’articuler autour d’un renforcement et d’une extension du champs de la supervision financière internationale ainsi que d’un durcissement des normes appliquées (Rapport du Sénat, 2009). Ce sont en l'occurrence les orientations qui on été retenues lors du Sommet de Londres.

Réadapter les normes macro-prudentielles

L’un des aspects majeur de la nouvelle architecture financière internationale porte la réforme des normes comptables et prudentielles. Elle contribuerait à stabiliser les banques, dont les difficultés ont paralysé l'économie mondiale.

Même si a première vue cela peut sembler paradoxal, des mesures de souplesse ont été adoptées en terme de normes comptables. Dans l’intention de réduire l’effet pro-cyclique de ces normes, le G20 a proposé des aménagements de cette méthode en particulier pour la comptabilisation des titres "illiquides". Cette mesure est temporaire. Rappelons que le G20 avait déclaré que « les normes comptables doivent être

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170 ibid p63

171 ibid p65

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améliorées pour être plus transparentes et pour promouvoir la stabilité financière »172. Le plan prévoit également d’ améliorer les ratios prudentiels. A cette égard, on peut se poser la question de la compatibilité de telle mesures avec la réalité « d’un univers où les spéculateurs recherchent sans cesses les rumeurs et l’instabilité » (Mathieu, 2009). Par ailleurs, ce même texte continue à faire confiance aux méthodes internes des banques et ne prévoit pas de contrôle extérieur systématique.

Ces nouveaux principes envisagés lors des Sommet de Washington et de Londres suscitent plusieurs incertitudes techniques quand à leur application et traduction opérationnelle. Ces inquiétudes visent notamment les normes comptables. Enfin, certains se posent des questions sur les fondements même de l’orientation macropudentielle. Quelles sont les formes opérationnelles que celles-ci imposent ? Comme le résume Catherine Mathieu (2009), «les différentes déclarations du G20 ne répondent pas à ces questions et se limitent à l’affirmation de principes d’action ou d’engagements. Or, de telles interrogations sont loin d’être triviales et elles font écho à des débats tout à la fois théoriques et techniques encore inaboutis ».

Comment organiser une régulation macroéconomique mondiale ?

La « réorientation » macroprudentielle du secteur bancaire s’est traduite par un renforcement de la supervision financière internationale sur plusieurs niveaux. La crise actuelle a montré que dans un marché mondialement intégré, l’instabilité financière se propage rapidement d’un marché à l’autre. Par conséquent, il est impératif de compléter les structures de surveillances macroprudentielles déjà existante par des structures de coordination appropriées au niveau international. La surveillance macroprudentielle correspond au suivi de la santé du système financier dans son ensemble. L’objectif immédiat d’une approche macroprudentielle est de limiter le risque d’épisode de crise financier affectant l’ensemble du système. A l’échelon européen, le rapport Larosière publié en février 2009, préconise la mise en place d’un nouvel organisme dénommé « conseil européen du risque systémique » qui serait placé sous la direction de la BCE. La crise financière a également donné lieu a une tentative de coordination des politiques publiques à un niveau mondial. Dans le cadre du renforcement de la surveillance des banques et des institutions financières transnationales, le G20 propose de développer la coopération internationale des autorités de contrôle. A cet égard, la réunion du G20 du 2 avril 2009 a confirmé le renforcement du rôle du FMI (Rapport du Sénat, 2009). D’une part, le G20 entend réformer le FMI de façon à augmenter le poids des économies émergentes. Adoptée en 2010, la réforme de la gouvernance et des quote-parts du FMI prévoit une augmentation du son capital et des sièges des pays

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172 Déclaration du Sommet G20 à Toronto, les 26 et 27 juin 2010. Communiqué final.

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émergents à son conseil d'administration et élargit ses attributions en matière de surveillance des politiques économiques (voir supra). Ces changements renforceraient l'assise financière du Fonds, lui permettant ainsi de répondre plus rapidement et avec plus de force à de futures crises. Cependant cette réforme de la gouvernance du FMI est une longue saga et fait l’objet de nombreuses discussions. Aujourd’hui la réforme de la gouvernance n’a pas encore été engagée alors qu’elle est une condition de l’entrée en vigueur de la réforme des quote-parts. Début août 2012, Christine Lagarde a déclaré au journal Le Monde vouloir la mettre en oeuvre d’ici la fin de l’année. Quelques jours plus tard, les Echos annonçaient déjà “l’échec d’une vraie réforme de la gouvernance mondiale” et déplorent un étiolement progressif du G20.173

Selon la déclaration du 15 novembre 2008, « le FMI doit mieux anticiper les tensions potentielles et agir rapidement afin de jouer un rôle clé dans le traitement des crises ». Selon celle du 2 avril, « le FMI doit exercer une surveillance franche, impartiale et indépendante sur nos économies et nos secteurs financiers, les effets de nos politiques sur les autres et les risques qui se posent à l’économie mondiale ». Malgré ces déclarations, les textes ne semblent pas donner un rôle pivot au FMI dans la régulation macroéconomique mondiale. En effet, la stabilisation des taux de change, la coordination des politiques monétaires et des soldes des balances courantes ne sont pas des sujets évoquées dans la partie consacrée au FMI . Tout laisse donc à penser que les leçons de la crise n’ont pas été tirées (Mathieu 2009).

Lors du Sommet de Londres, le Groupe des Vingt à également décidé d’élargir le Forum de Stabilité Financière (FSF) en un Conseil de Stabilité Financière (CSF) ouvert aux pays émergents. L’efficacité de cette réforme dépendra de la capacité de ce Conseil développer un point de vue différent de celui des professionnels de la banque et de la finance (ce que le FSF n’a pas réussi à faire) souligne C. Mathieu (2009). Au delà d’un renforcement de la régulation macroprudentielle, Mathieu se pose la question de savoir si il ne faudrait mieux pas “faire reculer la globalisation financière, dont la crise a montré les dangers, en incitant les banques à se concentrer sur leurs pays d’origine, à éviter les investissements aventureux dans des marchés étranger?”.

Bâle III : une avancée?

La crise a montré les limites d’une régulation microéconomique et un système prudentiel fondé sur la responsabilité des banques. Les réflexion engagées à la suite de la crise ont donc porté sur la création d’un nouvel accord de Bâle. Le 12 septembre 2010 , les représentants des banques centrales et des organismes de régulation ont

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173 L’échec d’une vraie réforme de la gouvernance mondiale, Richard Hiauldt 09/08, consultable en ligne sur lesechos.fr

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trouvé un accord sur un vaste plan de réforme du secteur bancaire. "Bâle III" est un ensemble de mesures nouvelles élaborées pour renforcer la réglementation, le contrôle et la gestion des risques dans le secteur bancaire. Ces mesures ont trois objectifs principaux: a) renforcer la capacité du secteur bancaire à absorber les chocs b) améliorer la gestion des risques et la gouvernance c) accroitre la transparence et la communication au sein des banques. Ces accords visent également à limiter les effets pro-cycliques des normes prudentielles et comptables. Bâle III s’attachera à renforcer les exigences de fonds propres; à prendre en compte du risque de liquidité, de change, et de nouveaux produits financiers; et enfin à extendre ces règles aux hedges funds et agences de notations. Ces accords ont aussi pour objectif de favoriser la coordination et et l’ harmonisation de ces règles à l’international.

Bâle III est une pièce maîtresse pour la prévention de nouvelles crises. Cependant ses ambitions se heurtent à de nombreux obstacles qui laissent présager que le système bancaire n’est pas prêt d’être réformé. Ces accords rencontrent des résistances dans les milieux financiers, qui ne sont pas enclins à réduire leurs libertés en se soumettant à de telles règles. Bâle III ne fait pas non plus l’unanimité parmi les gouvernements soucieux de l’attractivité de leur place financière (Ben Hammouda & Sadni-Jallab, 2011). Des inquiétudes s’élèvent notamment quand à l’application des nouveaux standards de Bâle III. En effet, les nouvelles règles pour la capitalisation des banques sont étendues sur 10 ans. Elles ne seraient donc être accomplies avant 2019. Cette longue période de transition soulève des questions. L’issue pourrait s'avérer différente a mesure que le souvenir de la crise s’estompe. D’autant plus qu’il est probable que l’industrie bancaire utilise cette période de transition pour exercer une pression sur le Comité afin d'affaiblir ses recommandations (Martin 2011). Il incombe donc au G20 que cette période de 10 ans soit utilisée à bon escient.

2.2.3 Réformer la sphère financière : les chantiers de réflexion du G20

- La règlementation des produits dérivés.

La régulation des produits dérivés se présente comme un des chantiers les plus important de la finance d’après crise. Du fait de leur sophistication, certains produits dérivés contribuent à introduire une forte opacité dans la façon dont les risques sont répartis entre les acteurs. Tous ces problèmes ont été au cœur de la crise des subprimes, à partir d’un marché de produits dérivés particulier, celui des Credit Default Swaps (CDS).

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Les ambitions du G20 en terme de la règlementation des produit dérivés se sont fait connaitres par le plan adopté à Washington qui se proposait de renforcer la transparence des marchés et des produits financiers complexes. Ces intentions ont été réaffirmées lors du Sommet de Pittsburg en novembre 2009 où le G20 à déclaré que « tous les produits et marchés financiers et tous les participants à ces marchés sont régulés ou objet d’une surveillance ». L’objectif de transparence oblige les banques à enregistrer les transactions de ce type de produit dans une base de données. Alors que l’objectif de sécurité implique de recourir à des « chambres de compensation ».

Les promesses formulées par le G20 sont sur le point de trouver un débouché politique concret selon Christian Chavagneux (2011). Aux États-Unis comme en Europe, des propositions réclament un contrôle du marchés des CDS avec la création par les financiers privés d‘une « chambre de compensation ». Par ailleurs, une initiative législative sur les produits dérivés a été prise et la révision de l’importante Directive sur les marchés d’instrument financiers, dite MiFID, est en cours. Certains déplorent cependant qu’en s’attachant seulement à réduire les risques systémiques du marchés des dérivés, le G20 ne remette pas en cause leur existence, alors qu’ils sont responsables de la crise. Lors du Sommet de Cannes en novembre 2011, le G20 a confirmé son engagement à réguler d'ici fin 2012 les produits financiers dérivés, accusés d'alimenter la spéculation. Les mois à venir nous diront si le G20 arrivera à bout de cette ambition, ou si il se contentera d’un nouvel échec.

- La règlementation des Hedge Funds

Les Hedges Fund (fonds spéculatifs) ne sont pas entièrement responsable de la crise estime Michel Aglietta174. Ils ont cependant largement contribué à propager l'instabilité financière, à l'amplifier même. Les Hedge Funds se comportent comme des banques, mais ne sont soumis à aucunes régulation prudentielle, même pas un niveau minimum de fonds propres. Cette liberté leur permet de s’endetter exagérément via des effets de levier très importants.

Au cours du sommet à Washington en septembre 2008, les pays du G20 ont pris la résolution selon laquelle : « l’ensemble des institutions financières, des marchés et des produits financiers d’importance systémique doit être soumis à un niveau approprié de régulation et de supervision ». Le G20 entend donc étendre la régulation et le contrôle à toutes les institutions, à tous les instruments et tous les marchés important. Cela inclura, pour la première fois, les hedge funds.

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174 Il faut absolument réguler l'activité des hedge funds. Interview de Aglietta, M. [ 8 février 2010, February 18]- LExpansion.com. L'Expansion. [Consulté le 20 aout 2012] consultable sur l’expansion.fr

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En avril 2009, à Londres, le Groupe des Vingt a précisé comment il entendait que ce principe soit appliqué aux hedge funds, suivant trois grandes idées: a) Les Hedges Funds devront s’enregistrer auprès des régulateurs et leur communiquer régulièrement les informations nécessaires concernant les risques qu’ils font encourir. b) Les Hedge Funds feront l’objet d’une supervision afin de s’assurer qu’ils disposent de mécanismes appropriés de gestion des risques. c) Les institutions financières disposant de fonds spéculatifs devront justifier de mécanismes efficaces de gestion des risques.

Or, il n’y a pas eu d’avancées concrètes de la régulation de ces fonds spéculatifs depuis le Sommet de Londres. Dominique Plihon remarque que «si on les réglemente et qu’on leur impose des limites, alors il n’y aura plus d’intérêt à faire des hedge fund»175. Par conséquent, il doute fort que la finance acceptera de telles mesures. En effet, tout projet de réforme réglementaire des hedge funds fait l'objet d'un lobbying intense. C’est probablement la raison pour laquelle le débat actuel se limite à une série de réformes très consensuelles, comme en témoigne la position de l’UE qui proposent seulement de « mieux superviser » l’activité de ces fonds spéculatifs. Le renforcement de la sécurité financière semble donc encore loin d’être acquis.

- Réformer le fonctionnement des agences de notation

Les agences de notations jouent un rôle central dans le système financier : elles notent la capacité des emprunteurs à rembourser leurs dettes, selon une échelle de risques particulière à chacune. Dès juillet 2007, ces agences ont été montrées du doigt pour l’utilisation de méthodes laxistes d’évaluation des produits structurés. En les notant AAA, soit la meilleure note, elles ont réduit la perception du risque et favorisé leur dissémination dans tout le secteur financier. Or, le problème fondamental dans le fonctionnement de ces agences est qu’elles sont rémunérées par les institutions ayant besoin de leur notation, ce qui suscite de nombreux doutes quand à leur impartialité...

La question du mode de fonctionnement des agences de notation a été pour une première fois abordée lors du sommet de Washington en 2008, où il a été décidé qu’elles devaient faire l’objet d’un agrément et d’une régulation. Le G20 de Londres d‘avril 2009 a appelé à une extension de la régulation et de l’enregistrement des agences de notation de manière à éviter la survenance de conflits d’intérêts. Pour que leurs notes soient véritablement indépendantes, objectives et de la meilleure qualité possible, « elles doivent soumises et surveillées par un régulateur puissant » dixit le site web du G20. La déclaration de Séoul de novembre 2010 a repris les recommandations contenues dans le

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175 G20: des promesses à coup de milliards de dollars " - Libération. (2009, April 3). Libération. [Consulté le 20 aout 2012] consultable sur liberation.fr

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rapport du CSF d’octobre 2010, qui visent à réduire la dépendance vis-à-vis des agences de notation.

La question de la réforme des agences de notations suscite des propositions variées qui vont au delà des suggestions du G20, qui ne semble pas remettre en cause le principe même de ces agences. Faut-il maintenir des agences rémunérées par les émetteurs de titres ? Peut-on imaginer des agences de notation publiques ? Certains proposent de rendre ces agences publiques, arguant qu’elles rendent un service apportant un bien collectif. Pour Olivier Klein, il conviendrait de les placer sous la supervision « d’un organisme chargé de vérifier la qualité des méthodologies utilisées et des résultats ex post, comme le respect d’une déontologie convenable ». Séparer leurs activités de conseil (en préparation d’une notation) et de notation, peut également se présenter comme une solution. Malgré toutes ces propositions, la question de la règlementation des agences de notation semble avoir été occultée par le Sommet de Los Cabos de Juin 2012. Aucune règles ne figue à ce sujet dans le communiqué final. Espérons que cette problématique soit à l’ordre du jour du prochain G20 qui devrait avoir lieu en Russie en 2013.

- Les rémunérations dans le secteur financier.

Quelles limites imposer aux rémunérations des banquiers ou des traders? Ces rémunérations, jugées indécentes par beaucoup, sont accusées d’avoir encouragé des prises de risques excessives. L’aléa moral joue une nouvelle fois un rôle important: les opérateurs de marchés n’encourent pas de malus en cas de perte. Dès lors, ils sont incités à prendre de risques démesurés, quitte à faire perdre des sommes colossales à leurs banques (la Société générale en a fait les frais).

En s’appuyant sur la charte publiée en 2009 le Forum de stabilité financière (FSF), le G20 a exprimé la nécessité d’en finir avec le court termisme en matière de rémunération. Désormais, il convient de «lier les bonus des traders aux performances de leur société, prendre en compte le risque qu’ils font peser, et soumettre leur attribution à une autorité de surveillance».

“On avance doucement sur le sujet, mais on avance” selon l’économiste Gunther Capelle-Blancard du CAE. Lors du Sommet de Pittsburg, la France a obtenu « l'interdiction des bonus garantis au-delà d'un an« ou encore «l'instauration d'un système de bonus-malus. Les banques centrales disposeront désormais du pouvoir de limiter le montant global des bonus”176. En outre, le Comité de Bâle à publié de

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176 Au G20, Sarkozy crie victoire sur les bonus, Libération, [En ligne] [ modifié le 26 septembre 2009] consultable sur liberation.fr

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nouvelles recommandations en juillet 2011. Les banques sont désormais invitées à adopter une série de mesure censées garantir « une discipline de marché efficace » en matière de rémunération. Applicables au 1er janvier 2012, ces règles complètent et précisent celles que le Comité de Bâle avait édictées en 2009 dans le cadre de Bâle 2. Elles sont inscrites dans le pilier 3 de Bâle II qui traite de la discipline de marché. Toutefois, l'encadrement des bonus voulu par le G20 fait l'objet d'interprétations plutôt divergentes. En effet, chaque Etat met en place ses propres règles. Pour certains, l’harmonisation des pratiques reste à faire. Pour d’autres, moins optimistes, “l'harmonisation des règles sur les bonus reste un voeu pieux”177 . Le dossier symbolique des bonus des traders et du plafonnement de ces rémunérations fait également l’objet d’un affrontement culturel entre l’Europe et les pays anglo-saxons. D’un côté l’Europe, “influencée par les valeurs morales” veut plafonner les rémunérations et réclame des sanctions à l’encontre des banques récalcitrantes. D’un autre côté, les États-Unis et la Grande Bretagne, viscéralement attachés au libre jeu du marché, refusent l'idée d'un plafonnement des rémunérations du secteur privé. Enfin, les recommandations du FSF se heurtent à un principe de faisabilité. La Charte de la FSF sur laquelle s’appui le G20, prévoit de confier aux conseils d’administration le soin de déterminer la politique de rémunération des opérateurs de marchés. Or, Gunther Capelle-Blancard fait remarquer que, «quand on voit comment ils font aujourd’hui avec la rémunération des dirigeants, il faut vraiment être très optimiste pour penser qu’ils vont être plus pointilleux !»178. En outre, la charte du FSF ne pas traite pas de la question des plafonnements aux bonus. Ces recommandations se montreront-elles suffisantes? Plusieurs observateurs suggèrent l’arme très efficace de la fiscalité pour agir sur les montants distribués. - Agir sur les paradis fiscaux

La lutte contre les paradis fiscaux est une mesure phare du G20 en réponse à la crise. La déclaration du sommet de Londres était sans appel : « l’ère du secret bancaire est terminée ». Les pays du G20 s’engageaient alors à « prendre des mesures à l’encontre des juridictions non-coopératives, y compris les paradis fiscaux ». Le G20 a également fait appel à l’OCDE afin que deux listes soient publiées : une grise pour les paradis fiscaux sur le point de mettre fin au secret bancaire. Et une noire pour les pays non coopératifs.

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177 L'harmonisation des règles sur les bonus reste un voeu pieux, Alexandre Garabedian pour L'AGEFI Quotidien [En ligne] [ modifié le 04/07/2011]

178 G20: des promesses à coup de milliards de dollars " - Libération. (2009, April 3). Libération. [Consulté le 20 aout 2012] consultable sur liberation.fr

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Si l’on se réfère au rapport du CCFD-Terre solidaire ce sont « chaque année ce sont près de 800 milliards d’euros de flux illicites qui s’échappent dans ces “trous noirs” de la finance mondiale »179 . Dès lors, les paradis fiscaux et l’évasion fiscale privent les États de moyens d’agir pour l’intérêt général et de mettre en place des politiques publiques. Les premières victimes de telles pratiques sont bien évidemment les pays les moins développés.

Placée au premier plan lors du sommet de Londres, la lutte contre l'évasion fiscale n’a pas fait partie des priorités de la présidence française. Le G20 semble en panne sur la question. D’une part, la question des paradis fiscaux semble être reléguée au deuxième plan du fait de la conjoncture, les économies développées étant pour la plupart surendettées et au bord de la défaillance. Par ailleurs, force est de constater un manque de volonté politique. Au lieu de se donner les moyens, ou au moins l’objectif de les interdire et de les faire disparaître , le G20 ne parle que de sanctions à l’encontre des paradis fiscaux non coopératifs. A cet égard, Jean de Maillard rappelle que « dans les relations internationales, on parle seulement de sanctions quand on ne souhaite pas aller plus loin »180. . Catherine Mathieu (2009) suggère une méthode plus radicale que celle que propose le G20. Au delà des listes noires et des sanctions, les pays de l’OCDE devraient interdire à leurs institutions financières et à leurs entreprises d’y localiser leurs opérations et d’y avoir des filiales. Il faudrait donc renégocier les conventions fiscales pour les limiter aux pays qui ont des taux minimaux d’imposition.

Au final, la crise financière aura fait apparaitre la nécessité d’améliorer la régulation du système dans son ensemble. Cependant, l’édification d’une architecture macro-prudentielle engendre bon nombre de questions d’ordre techniques et conceptuelles qui font l’objet d’interprétations divergentes. Il est par conséquent peu probable que l’on se dirige vers un véritable fédéralisme global en matière de régulation des marchés financiers. Nous sommes encore loin d’une nouvelle architecture du capitalisme financier international. Le compromis adopté lors du sommet de Londres se résume majoritairement à des règles procédurales. Or ce type de règles s’apparentent à plus à une pétitions de principes qu’à des engagements véritables. Les pays du G20 sont-ils condamnés à se contenter de faux-semblants?

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179 « Paradis fiscaux : le G20 de la dernière chance » rapport du CCFD-Terre Solidaire, Paris, le 13 octobre 2011

180 G20: des promesses à coup de milliards de dollars " - Libération. (2009, April 3). Libération. [Consulté le 20 aout 2012]

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Conclusion

Par ce travail de recherche, nous avons tenté d’établir une analyse pertinente de l’état de la gouvernance économique contemporaine à la lumière de la crise des subprimes. Cette crise nous a enseigné de nombreuses leçons sur les failles du système actuel de gouvernance, ou du moins de ce qu’il en était en 2008, lors du déclenchement de la crise mondiale. Ce travail nous a démontré qu’il était impératif de rendre la coopération internationale incontournable afin de prévenir de nouvelles crises systémiques. Par l’analyse des théories proposées par les experts et les acteurs de la gouvernance, nous avons tenté de dégager de grands principes permettant de guider la construction d’une meilleure gouvernance économique mondiale. Nous avons retenu que la gouvernance devait répondre à trois principes fondamentaux: la légitimité, l'efficacité et l’équité. D’important progrès ont été accomplis en la matière, notamment grâce à l’action du G20. Ses propositions ont été passé au crible et mise à l’épreuve de leur applicabilité concrète. Le bilan des résolutions entreprises par le G20 nous amène à constater que l’offre de leadership et de coopération au niveau mondial est vouée à demeurer limitée. Force est de constater que l'hétérogénéité des préférences collectives, le manque de pragmatisme et de volonté politique rendent l’espoir de déboucher sur une nouvelle architecture internationale plutôt incertaine. Il ne faut pas non plus sous-estimer le poids des lobbies financiers qui cherchent à affaiblir les recommandations qui limiterait la marché libre. Le monde est encore largement dominé par une petite oligarchie financière déterminée à préserver son statut quo. Par conséquent, il faut que le G20 se résigne à être trop ambitieux sur ses objectifs. Une mission simple et bien définie, des principes clairs et des procédures codifiées sont autant de conditions de succès d’une nouvelle gouvernance économique mondiale. Le G20 doit également produire des réponses concrètes dans un espace temps limité, au risque de perdre son élan, et que l’engouement pour une nouvelle gouvernance s’évapore à mesure que la crise s’estompe. Au final, la crise financière aura fait apparaitre la nécessité d’améliorer la régulation du système dans son ensemble afin de prévenir les crises. La règlementation participera à cette réponse, mais ne sera qu’un élément de celle ci. Une prise de conscience éthique et sociale menant à des changements de mentalités doit prendre place. En ce sens plaider pour une restauration de l’éthique et de la déontologie dans le monde financier parait aussi important, voire même plus important que de songer à de nouvelles réglementations.

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Glossaire

ATTAC Taxation des Transactions financières et pour l'Action Citoyenne

BRI Banque des règlements internationauxBCE Banque Centrale EuropéenneBPM Biens Publics MondiauxCAE Conseil d’Analyse EconomiqueCDS Credit Default Swaps : couvertures de défaillance ou dérivés sur événement de crédit

CSF Conseil de Stabilité FinancièreFSF Fond de Stabilité FinancièreDTS Droits de Tirage SpéciauxFED Federal Reserve Bank : Banque Centrale de l’Etat fédéral américainFMI Fond Monétaire InternationalG7 Groupe des sept: Allemagne, Canada, États-Unis, France, Grande-Bretagne, Italie et Japon.G8 Allemagne, Canada, États-Unis, France, Italie, Japon, Royaume-Uni et Russie.G20 Argentine, Australie, Brésil, Canada, Chine, France, Allemagne, Inde, Indonésie, Vietnam, Italie, Japon, Mexique, Russie, Arabie Saoudite, Afrique du Sud, Corée du Sud, Turquie, Grande Bretagne, Etats-Unis d'Amérique, et l'Union Européenne.PNUD Programme des Nations Unies pour le Développement.OMC Organisation Mondiale du CommerceOMS Organisation Mondiale de la SantéOIT Organisation Internationale du TravailOCDE Organisation de Coopération et Développement EconomiqueSMI Système Monétaire International

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Annexe 1 : Le triangle d’incompatibilité de Robert Mundell (1961) et Dani Rodrik (2000)

Figure I. Le triangle d’incompatibilité de Robert Mundell.

Figure II. Le Triangle d’incompatibilité de Dani Rodrik

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Page 106: Mémoire de Master. Charlyne Restivo.  Institut d'Etudes Politiques de Lyon

Annexe 2. Les deux coordonnées de la mondialisation.Sources : Jacquet, P., Pisani-Ferry, J., & Tubiana, L. (2002). Gouvernance mondiale. Rapport, Paris: La Documentation française.

Figure IV.

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Page 107: Mémoire de Master. Charlyne Restivo.  Institut d'Etudes Politiques de Lyon

Annexe 3. Les Modèles de Gouvernance: un essai de comparaison Sources : Jacquet, P., Pisani-Ferry, J., & Tubiana, L. (2002). Gouvernance mondiale. Rapport, Paris: La Documentation française.

Figure III

Charlyne Fabre-Restivo 2012 107

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Annexe 4. Indicateurs macro-prudentielsTableau I.

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TABLE DES MATIERES

Remerciements..................................................................................................................2

Introduction.......................................................................................................................3

Chapitre I : Un système de gouvernance contemporain inadapté à la mondialisation et à ses crises.

1. La globalisation en crise............................................................................................................6 1.1 La crise des subprimes, une crise de la mondialisation...............................................6 1.1.1 Récapitulatifs des faits ............................................................................... 6 1.1.2 Comment en est-on arrivé là? .....................................................................7 1.1.3 Quelles conséquence pour la gouvernance globale?...................................9 1.2 La globalisation financière et risque systémique ......................................................11 1.2.1 Une globalisation financière marquée par de nombreux déséquilibres et risques...........................................................................................................................................11 1.2.2 Des crises récurrentes................................................................................12 1.2.3 Des marchés de nature instable.................................................................13 1.3 Instabilité croissante et déséquilibre du Système Monétaire International...............15 1.3.1 Un SMI marqué par l’instabilité................................................................15 1.3.2 La nécessité de réexamen..........................................................................182. Le multilatéralisme enlisé......................................................................................................19 2.1. La gouvernance globale en panne............................................................................19 2.1.1 Pourquoi parler de gouvernance? .............................................................19 2.1.2 Les défis de la gouvernance globale..........................................................21 2.1.3 Les faiblesses et limites de la gouvernance dans la gestion crise............. 22 2.2 Monde multipolaire et concurrence des capitalismes..............................................23 2.2.1 Désaccords persistants et manque de volonté politique............................23 2.2.2 Divergences d'intérêts et clivages idéologiques........................................26 2.2.3La crise de finalité du multilatéralisme......................................................26 2.2 Les institutions de la gouvernance en crise...............................................................27 2.3.1 Etat des lieux d’une architecture qui peine à se réformer..........................28 2.3.2 Déficit d’efficacité et de crédibilité...........................................................28 2.3.3 Une crise de légitimité. .............................................................................31

Chapitre II: Une nouvelle gouvernance économique mondiale pour lutter contre les crises systémiques.

1. Refondre le multilatéralisme....................................................................................................33 1.1 L’objectif de stabilité financière: Comment concevoir la gouvernance mondiale?..33 1.1.1 La nécessité d’une action collective..........................................................33 1.1.2 L’approche de la stabilité financière par les Biens Publics mondiaux......................................................................................................................................36 1.1.3 Peut-on réellement mieux gouverner la mondialisation?....................................................42 1.2 Propositions pour une gouvernance rénovée.............................................................42 1.2.1 Comment concevoir la gouvernance mondiale?........................................42 1.2.2 Fonder une gouvernance mondiale légitime, efficace et démocratique.... 45 1.2.3 Le G20 et la nouvelle gouvernance globale............................................. 512. Réformer la finance et le système monétaire international.........................................63 2.1. Définir la nouvelle architecture du système monétaire international...........63 Charlyne Fabre-Restivo 2012 109

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2.1.1 Réduire les déséquilibres mondiaux...............................................64 2.1.2 Une nouvelle politique de change pour faire face à la guerre des monnaies.....................................................................................................................................67 2.1.3 Les défis de la coordination internationale des politiques monétaires...................................................................................................................................71 2.1.4 Redéfinir une monnaie de référence...............................................75 2.2 Construire une nouvelle architecture financière internationale....................77 2.2.1 Une nouvelle architecture placée sous l’égide du G20...................77 2.2.2 Réformer le secteur bancaire..........................................................80 2.2.3 Réformer le monde de la finance: chantiers de réflexion................87

Conclusion......................................................................................................................92Glossaire.........................................................................................................................93

Bibliographie...................................................................................................................94 Allocutions et déclarations officielles..................................................................94 Rapports et dossiers.............................................................................................97 Revues................................................................................................................. 97 Ouvrages............................................................................................................. 97 Articles................................................................................................................99 Sites Web...........................................................................................................101

Annexe 1....................................................................................................................... 102Annexe 2....................................................................................................................... 103Annexe 1....................................................................................................................... 104

Pages: 109

Mots clés: gouvernance économique - coopération internationale - multilatéralisme - système monétaire international - finance internationale - coordination des politiques économiques - G20 - régulation bancaire - régulation financière- instituions internationales - crise des subprimes - instabilité financière - crise financière.

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