1
MIEUX MAîTRISER LES DÉPENSES, C’EST POSSIBLE SEULEMENT SI LES EFFORTS S’ÉQUILIBRENT ENTRE TOUS LES ACTEURS DU SYSTÈME DE SANTÉ Les enquêtes d’opinion révèlent une per- ception paradoxale des Français. Ils dé- noncent une consommation des médica- ments qu’ils pensent être excessive et, en même temps, ils sont très attachés à « leur » traitement et au maintien sans changement de son accessibilité, de sa disponibilité et de son remboursement. Contrairement à d’autres pays du nord de l’Europe, beau- coup n’imaginent pas sortir d’une consul- tation médicale sans ordonnance. Et il est fréquent que des patients demandent à leur pharmacien de leur délivrer des traitements à prescription obligatoire avant d’en obtenir l’ordonnance chez leur médecin. Deux questions complexes sont posées aux prescripteurs : qui peut et doit bé- néficier d’un traitement ? Et, surtout, pour combien de temps? Aujourd’hui, les « bonnes pratiques de prise en charge », les « recommandations thé- rapeutiques » et les « consensus d’ex- perts » sont des questions qui évoluent en permanence. En parallèle, les habi- tudes de prescription, voire le décalage entre les progrès scientifiques et la mise à jour des recommandations, peuvent conduire à des situations où les pa- tients qui devraient avoir un traitement ne le reçoivent pas, tandis que d’autres sont traités alors qu’ils ne devraient pas l’être. Quant à l’automédication, elle concerne des médicaments connus depuis long- temps et dont les dosages recommandés garantissent à court terme un risque mini- mal pour le patient, même en l’absence de prescription et de suivi médicaux. L’automédication est utile pour soulager ra- pidement des symptômes et des troubles de santé mineurs (douleurs diverses, bouton de fièvre, toux, maux de tête, al- lergies, etc.). Pour une consommation de court terme, elle doit être accompagnée du conseil d’un pharmacien, notamment pour éviter des interactions à risque avec d’autres traitements. Pour une consomma- tion de plus long terme, elle nécessite un conseil médical. Après les efforts de réduction des coûts et des consommations continus depuis quatre ans, la question est désormais de savoir si les prescriptions médica- menteuses sont pertinentes, et si elles tiennent toutes compte de l’évolution des connaissances scientifiques. Ainsi, dans certaines situations, la progres- sion rapide d’une innovation majeure pour une maladie jusque-là mal prise en charge peut justifier une augmentation importante des prescriptions d’un type de médicament. Dans d’autres cas, c’est une réduction ra- pide qui serait attendue, en raison de la découverte d’un nouveau médicament ou d’un nouveau mode de prise en charge ren- dant obsolète l’utilisation de médicaments plus anciens. DÉVELOPPER DES PARCOURS DE SOINS EFFICIENTS, UN LEVIER IMPÉRATIF Les parcours de soins reposent sur l’application de protocoles de prise en charge définis en commun par les pro- fessionnels – par exemple le bon médi- cament, au bon moment, pour le bon pa- tient –, fondés sur les recommandations médicales, ainsi que sur un meilleur par- tage des informations entre l’ensemble des intervenants. Cette notion de parcours de soins suppose une meilleure articulation entre : - l’hôpital et la médecine de ville, - les médecins spécialistes et généralistes, - les médecins et les autres professionnels de santé (infirmiers, kinésithérapeutes, sages-femmes, orthophonistes, psycholo- gues), - le monde la santé et celui du médico-so- cial, - les professionnels de santé et les institu- tions de financement des soins, etc. L’enjeu est de rendre compatible la prise en charge d’une personne malade avec l’orga- nisation et le périmètre d’activité de nom- breuses institutions et de professionnels, souvent peu coordonnés et payés dans des cadres contractuels verticaux peu per- méables et adaptables. Dans ce dispositif, la mise en œuvre d’un dossier médical est absolument nécessaire afin de s’assurer de la prise en charge optimale des patients. ON PEUT AUSSI PROGRESSER EN TERMES DE RESPONSABILITE INDIVIDUELLE DES PATIENTS Deux exemples : la vaccination et la non-observance par des patients de leurs traitements. La vaccination est un acte de prévention essentiel pour se prémunir contre de nombreuses maladies infectieuses. Ce n’est pas seulement un acte individuel de protection personnelle, c’est aussi un acte citoyen pour protéger les autres, une mesure de prévention collective, car la vaccination permet de freiner ou d’enrayer la propagation d’un agent in- fectieux. Des maladies graves, comme la variole et, on l’espère, bientôt la poliomyélite, voire la rougeole ont ainsi été ou seront éradiquées grâce à des campagnes de vaccination de grande ampleur. Mais, pour être efficaces, celles-ci doivent atteindre un taux opti- mal de couverture vaccinale de la popu- lation. Malheureusement, on constate par exemple une recrudescence inquiétante de la rougeole en France, ainsi qu’un taux notoirement bas de couverture vaccinale contre l’hépatite B. Une partie de la popu- lation exprime des réticences vis-à-vis des vaccins et certains font régulièrement l’ob- jet de controverses. Pourtant, les bénéfices l’emportent largement sur les risques pour la santé, qui restent malheureusement non nuls, comme pour toute intervention médi- cale. Il faut donc poursuivre le travail d’in- formation des citoyens sur l’intérêt de la vaccination et les associer de plus en plus à des débats sur les enjeux et la définition des objectifs à atteindre dans l’intérêt de la santé publique. Les notions de protection collective, de vaccination « au bénéfice des autres », en particulier, mériteraient d’être mieux explicitées, au regard du risque indi- viduel, jamais nul. Le non-respect par des patients de leurs prescriptions, ce qu’on appelle « la mau- vaise observance des traitements », en- traîne un coût estimé pour le système de santé à 2 milliards d’euros par an en France et serait à l’origine de 1 million de journées d’hospitalisation évitables. Cette mauvaise observance tient parfois à la difficulté d’articuler la prise de médica- ments avec la vie quotidienne. Des pallia- tifs sont parfois nécessaires, comme l’utili- sation d’un pilulier, qui permet de préparer à l’avance la prise des bons médicaments au bon moment. POUR LES PATIENTS, LA MODERNISATION ET LA QUALITÉ DE L’INFORMATION SUR LES MÉDICAMENTS SONT DES ATTENTES FORTES. La notice des médicaments est un docu- ment légal et obligatoire, soumis par le laboratoire lors de la demande de mise sur le marché du médicament et évalué par les autorités sanitaires. Les industriels, comme les autorités, cherchent constamment à améliorer la li- sibilité des notices des médicaments : ca- ractères plus gros, clarté des explications, facilité d’usage. A côté des notices on peut faire encore mieux pour développer la qua- lité de l’information sur les médicaments. Si une indépendance de l’information est nécessaire, elle ne doit pas empêcher le recours à ceux qui disposent de l’informa- tion la plus pertinente, à savoir les méde- cins prescripteurs, les autorités publiques définissant les bonnes pratiques, les indus- triels qui conçoivent les « modes d’emploi » des produits et des utilisateurs « avertis ». L’enjeu est de taille, et les modèles actuels restent imparfaits. La peur d’une informa- tion « biaisée » par des prescripteurs ou des institutions ne doit pas conduire à re- jeter en bloc la connaissance scientifique et technique au profit d’informations por- tées par certaines sectes et par des mou- vements hostiles au progrès. L’information du patient joue un rôle central car un pa- tient qui comprend sa maladie ne peut que mieux suivre son traitement. Les patients vont chercher des masses d’informations concernant les questions de santé sur les forums Internet, les réseaux sociaux… Pour leur procurer des informations de qua- lité, ni trop vulgarisées ni trop scientifiques, médecin, pharmacien, responsable d’as- sociation, assureur et industriel auraient avantage à développer, côte à côte, les mêmes outils d’information, permettant aux patients d’être bien informés, tout au long de la chaîne de soins. C’est notamment la suggestion de l’Académie de Médecine pour lutter contre la iatrogénie chez le sujet âgé. L’ÉTAT EST TOUJOURS LE SEUL DÉCISION- NAIRE FINAL DU PRIX DES MÉDICAMENTS REMBOURSÉS D’abord, pour être commercialisé, un mé- dicament doit avoir obtenu une Autorisa- tion de mise sur le marché (AMM). C’est l’Agence européenne du médicament qui l’octroie après une évaluation approfondie du rapport bénéfice/risque du produit pro- posé. Son évaluation se fonde sur le dos- sier d’AMM soumis par l’entreprise. Celui-ci rassemble et présente de façon normali- sée l’ensemble des informations recueillies tout au long de la période de recherche L’innovation en santé : l’espoir des Français PUBLICITE www.lir.asso.fr et développement du produit (dix ans, en moyenne). Quant à leur prise en charge, c’est le Co- mité économique des produits de santé (CEPS), organisme interministériel, qui né- gocie les prix des médicaments vendus sur prescription, après évaluation de l’intérêt de chacun d’entre eux. Pour chaque médica- ment candidat, le niveau de prix repose sur « l’amélioration du service médical rendu » qu’il apporte. Cette améliora- tion est évaluée par la Commission de la transparence, sous l’égide de la Haute Autorité de Santé. L’industrie pharma- ceutique fournit des dossiers écrits pour présenter les données d’efficacité et de tolérance et pour justifier la valeur de son produit. La Commission de la transparence de la Haute Autorité de Santé de même que le Comité économique des produits de santé agissent en toute indépendance des laboratoires : ces laboratoires ne participent pas aux travaux de ces com- missions. La Commission de la transpa- rence rend publics ces avis argumentés ; les propositions complètes du CEPS ne sont pas rendues publiques car les entre- prises de santé qui agissent dans un envi- ronnement concurrentiel national et interna- tional doivent aussi pouvoir bénéficier de la protection de leurs accords économiques, comme toutes les entreprises. Néanmoins, le CEPS publie chaque année un rapport annuel très complet qui permet d’objectiver les données ayant conduit à la fixation des prix des médicaments. Les prix des médi- caments remboursés en France sont infé- rieurs à la moyenne de ceux de nos voisins européens. C’est en particulier le cas des plus récents et innovants. « L’OPEN DATA » EN SANTÉ TARDE À SE DÉVELOPPER Chaque année, des milliards de données de soins sont produites par le système de santé et certaines sont aujourd’hui systé- matiquement recueillies dans différentes bases de données. Par exemple le SNII- RAM, base nationale mise en place par l’Assurance Maladie pour gérer les rem- boursements, est considéré comme l’une des plus importantes au monde. Des socié- tés privées ont également mis au point des systèmes de recueil des données dans les pharmacies ou chez les médecins, qui four- nissent une multitude d’informations sur les pratiques de prescription et de consomma- tion des médicaments. Toutes ces don- nées sont utiles pour mieux comprendre l’utilisation des médicaments et leurs effets en vie réelle. Par exemple, dans quelles circonstances y a-t-il le plus de difficulté d’observance pour les pa- tients atteints de diabète? Dans quelle région consomme-t-on le plus d’antidé- presseurs? Répondre précisément à de telles questions peut permettre d’amé- liorer l’efficience du système de santé. LA CONSOMMATION FRANÇAISE DE MÉDICAMENTS EST DANS LA MOYENNE EUROPÉENNE Parmi les huit classes majeures de mé- dicaments les plus utilisés dans notre pays, les antalgiques (antidouleurs) sont les médicaments les plus consom- més par les Français (10 % du total, en- viron). Suivent les antihypertenseurs (8 %), l’ensemble des médicaments qui traitent ou préviennent les risques car- diovasculaires représentant 17 % de la consommation totale. Arrivent ensuite les antiallergiques-antirhinite (6 %) et les antiasthmatiques (5 %). Une étude réalisée par le LIR analyse l’évolution de la consommation sur la pé- riode 2000-2013 des huit classes majeures de médicaments de prescription pour la France et six pays européens voisins. Elle révèle que si la France est parmi les trois pays les « plus consommateurs » d’antibio- tiques, d’anxiolytiques et d’antidiabétiques, elle est parmi les trois pays les « moins consommateurs » d’antihypertenseurs et d’anti-ulcéreux. Par ailleurs la consomma- tion française est inférieure aux moyennes de consommation des six autres pays pour cinq classes de médicaments : les antiasth- matiques, les hypolipémiants, les antihy- pertenseurs, les antidépresseurs et les an- tiulcéreux. POUR LA DEUXIEME ANNÉE CONSÉCUTIVE, LES MÉDICAMENTS SONT LES SEULES DÉPENSES DE SANTÉ QUI ONT BAISSÉ En 2013, les dépenses courantes de san- té se sont élevées à 248 milliards d’euros, soit près de 12 % du produit intérieur brut (PIB). Le secteur hospitalier représente près de la moitié de ces dépenses d’as- surance maladie. C’est l’inverse avec le médicament : en 2013 sa consommation a baissé de 1,3 %, après une baisse de 1,2 % en 2012. Ces deux années consé- cutives de baisse ont fait suite à deux années de progression plus faible que les autres dépenses de santé : + 1,2 % en 2010 et + 0,9 % en 2011. Selon la Drees, la baisse de 2013 est due à une « nette diminution des prix, de 4,4 %, et une croissance assez modérée des vo- lumes, de 3,3 % ». La hausse continue de la part des génériques dans les ventes de médicaments remboursables, + 18 % en 2013 après + 16 % en 2012 et + 13 % en 2011, a contribué aussi à cette baisse d’ensemble. Enfin, les dépenses de médi- caments non remboursables ont baissé en valeur de 2 %. De nombreux acteurs se sont impliqués au cours de ces quatre années pour obte- nir une baisse des dépenses de médica- ments : médecins et professionnels de san- té, pharmaciens d’officine et entreprises du médicament, patients et associations de patients, autorités nationales et régionales en charge de la régulation du système de santé. Pendant cette période, plusieurs médicaments innovants ont vu le jour, le nombre de personnes âgées et très âgées s’est accru et les maladies chroniques ont continué de progresser (le vieillissement est à l’origine de 90 % de la croissance an- nuelle des dépenses de médicaments). Il y a donc eu un « ajustement » de la consommation, car les anciens médica- ments cèdent la place aux nouveaux, plus performants et mieux étudiés dans le cadre d’une amélioration de la pertinence des prescriptions et de la consommation de médicaments. L’INNOVATION NE CESSE DE PROGRESSER, ET L’AVÈNEMENT DES BIOTHÉRAPIES OUVRE UNE NOUVELLE ÈRE DE PROGRÉS MÉDICAL Des progrès majeurs ont radicalement transformé le pronostic de nombreuses maladies, notamment dans les domaines de l’oncologie, de l’hématologie et de la rhumatologie et des maladies infectieuses. Contrairement à l’idée reçue, la découverte de nouveaux médicaments n’est pas à l’ar- rêt. Le flot d’innovations qui a débuté dans les années 1950 n’est pas interrompu. La nature de ces innovations a changé et les investissements nécessaires pour y parve- nir ont considérablement augmenté. Il n’y a donc pas un problème de performance de la recherche pharmaceutique, mais une modification de son coût par rapport aux ré- sultats obtenus. Au cours de ces dernières années, des progrès majeurs ont été réalisés dans de nombreux domaines pour lesquels on ne disposait auparavant que de peu de ré- ponses médicales satisfaisantes. On peut notamment citer le sida, l’hématologie, l’oncologie, de nombreuses maladies rhu- matismales chroniques et invalidantes, cer- taines maladies de la rétine conduisant à la cécité en l’absence de traitement et, plus récemment encore, l’hépatite C. L’évolution considérable des connais- sances dans le domaine des sciences du vivant, et en particulier de la génétique et de la biologie moléculaire, ainsi que des nouveaux outils de la recherche vont conti- nuer d’entraîner un flux d’innovations, dans les prochaines années. Ainsi le nombre de produits en dévelop- pement n’a-t-il jamais été aussi important. Rien qu’aux Etats-Unis, plus de 5 000 mo- lécules étaient en développement en 2013, selon les statistiques du Pharmaceutical Research and Manufacturers of America, syndicat professionnel des entreprises pharmaceutiques américaines. La capacité des entreprises à innover se mesure aussi à leur rapidité d’adaptation aux évolutions de leur environnement : rapprochement de la recherche privée avec la recherche pu- blique, partenariats avec des sociétés de biotechnologies, développement de nou- velles expertises et de nouvelles voies de recherche. LA COOPÉRATION PUBLIQUE PRIVÉE EST INDISPENSABLE, ET EST UN ATOUT DÉTERMINANT POUR DISPOSER DEMAIN, DES NOUVEAUX MÉDICAMENTS QUE TOUT LE MONDE ATTEND Les équipes de recherche privée et pu- blique collaborent toujours plus étroitement pour accélérer la mise au point de nou- velles thérapeutiques. Les Partenariats Pu- blic-Privé (PPP) se multiplient : ils reposent sur la mutualisation des connaissances, le partage de compétences et le développe- ment en commun de programmes de re- cherche. Les entreprises internationales de re- cherche sont parties prenantes de cette démarche. En France, elles ont initié de- puis 2009 les Rencontres Internationales de Recherche, destinées à accroitre le nombre de projets collaboratifs entre des équipes académiques françaises et des équipes internationales de la recherche privée. Citons pour exemple plus de 100 millions d’euros de partenariats avec les Instituts hospitalo-universitaires tels l’ICM, Imagine, ICAN, etc. Ce décloisonnement des univers de la recherche est incontour- nable et est lié à l’évolution des techniques et des approches de la recherche en san- té. Le développement des biotechnologies exige en effet de répondre à des questions touchant à l’origine des maladies, qui né- cessitent des compétences plus tradition- nellement présentes au sein des équipes de recherche fondamentale. L’ampleur des questions nouvelles encourage également cette nouvelle mobilisation des ressources et des compétences, aucun des acteurs ne pouvant espérer y répondre isolément. METTRE AU POINT UNE INNOVATION THÉRAPEUTIQUE, C’EST AU MOINS DIX ANS D’ÉTUDES SUR SON ÉFFICACITE ET SUR SA SÉCURITÉ AVEC LA MOBILISATION DE CENTAINES D’INTERVENANTS ET UN TAUX D’ÉCHEC IMPORTANT A CHAQUE ÉTAPE DE SON DÉVELOPPEMENT. La mise au point d’un nouveau médica- ment trouve souvent son origine dans des travaux de recherche fondamentale. Des scientifiques élucident le ou les dysfonc- tionnements à l’origine d’une maladie et proposent d’agir sur une cible thérapeu- tique. Cette recherche est longue et incer- taine. Il a, par exemple, fallu vingt ans et les ef- forts combinés de dizaines d’équipes de re- cherche académique avant de déterminer que le dysfonctionnement de la protéine Tau participait à l’émergence des maladies neuro-dégénératives. De plus, la majorité des maladies, et notam- ment celles qui constituent aujourd’hui de véritables défis pour la recherche (cancer, Alzheimer) sont des systèmes de dysfonc- tionnements complexes. Agir sur un élé- ment du système fait généralement émer- ger de nouvelles questions plutôt qu’une solution. Lorsqu’une cible est identifiée, il faut alors trouver un candidat médicament susceptible de l’atteindre, puis mettre en œuvre l’ensemble du processus de re- cherche nécessaire à la démonstration de son efficacité et de sa sécurité d’emploi. L’explosion des biotechnologies a entraîné une véritable révolution dans le domaine de la recherche de nouveaux médicaments. Les biotechnologies découlent des progrès considérables réalisés ces dernières dé- cennies dans le domaine de la génétique et de la biologie moléculaire. En permet- tant de mieux comprendre et d’agir sur les mécanismes génétiques, biomoléculaires et immunologiques à l’origine des phéno- mènes pathologiques, elles ouvrent des perspectives extraordinaires en matière de traitement. Cette nouvelle ère de la thérapeutique est déjà d’actualité ; 325 millions de patients ont déjà bénéficié d’un biomédicament : les in- terférons, les hormones recombinantes, les anticorps humanisés, les thérapies molé- culaires ciblées, les vaccins thérapeutiques ou préventifs ciblent des maladies aussi variées que le cancer du sein ou du col de l’utérus, les lymphomes, les leucémies, la polyarthrite rhumatoïde, l’anémie, la sclé- rose en plaques, les retards de croissance, la maladie de Crohn, le diabète, certaines maladies cardiaques ou infectieuses. La thérapie génique et la thérapie tissulaire, qui reposent sur des gènes ou des cellules transformés par ingénierie génétique, sus- citent aussi aujourd’hui beaucoup d’espoir. Les biothérapies ont donc quitté le stade de la promesse. Elles pourraient constituer, à brève échéance, la moitié des outils théra- peutiques à la disposition des médecins, sans pour autant totalement remplacer tous les médicaments produits par chimie selon une approche plus classique. Sources : Des bases de données IMS (consommation 2013 en standard units (SU). Des rapports produits par l’IRDEES et le Panorama de la Santé OCDE, 2013. Du rapport Ondam/ Igas-IGF 2013-2017. Du rapport CEPS 2013. De l’étude LIR menée en toute indépendance par Pierre Chahwakilian, à partir des données IMS et qui a permis d’analyser, sur la période 2000-2013, l’évolution de la consommation (définie par des quantités de médicaments achetés, et mesurée en « doses définies journalières ») de huit classes majeures de médicaments de prescription. POUR TOUTE QUESTION, CONTACTER LA DIRECTRICE DU LIR [email protected] Les 16 entreprises internationales de re- cherche rassemblées au sein du LIR ont deux points communs : elles innovent en permanence et savent que les médica- ments sont un sujet sensible dans nos so- ciétés. Les innovations thérapeutiques que nous mettons à la disposition des patients génèrent des interrogations d’origines mul- tiples (économique, juridique, politique, sanitaire, écologique, éthique) nourrissent des peurs (la maladie, la mort, le risque) mais aussi de grands espoirs (la santé, la guérison, la recherche, la vie). Nos équipes engagées au sein de notre think tank ne souhaitent pas rester spec- tatrices de ce débat, en s’appuyant sur des faits et des preuves, posés en termes rationnels, leur rôle est de vous donner à penser. La consommation française de médica- ments est dans la moyenne européenne. Les derniers travaux issus de la recherche publique, par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statis- tiques (Drees) notamment, indiquent que, depuis deux ans, la consommation de mé- dicaments diminue en valeur et n’augmente que très faiblement en volume, alors que tous les autres postes de la consommation des biens de santé progressent en volume et en valeur. Les mesures continues d’économies sur le médicament ne peuvent tenir lieu de poli- tique sanitaire. Des innovations organisa- tionnelles dans le système de santé, des prescriptions mieux ajustées et une bonne observance de ces prescriptions par les pa- tients sont nécessaires. Halte aux idées reçues qui circulent pour laisser la place aux réformes de fond. Denis HELLO Président du LIR Le LIR a pour mission de produire des études, et des travaux pour préfigurer la santé de demain et pérenniser une équité d’accès à l’innovation. Association loi 1901 le LIR existe depuis plus de quinze ans et fonctionne sur le modèle d’un think tank. Ses 16 entreprises membres sont : AbbVie, Astellas, AstraZeneca, Bayer Healthcare, Boehringer Ingelheim, Bristol-Myers Squibb, GlaxoSmithKline, Janssen, Lilly France, Merck Serono, MSD, Novartis, Novo Nordisk, Pfizer, Roche, Takeda. Elles investissent chaque année plus de 700 millions d’euros dans la recherche publique française (soit autant que le budget annuel de l’Inserm, et trois fois plus que celui de l’Institut Pasteur). Elles portent plus de 70 % des essais cliniques qui sont pratiqués en France, mettent à la disposition du corps médical français plus des trois quarts des médicaments les plus innovants (ASMR 1 à 3). Elles comptent en France plus de 24 000 emplois (42 % en production), et 31 sites répartis sur 21 départements.

Linnovation en sante_lespoir_des_francais

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Linnovation en sante_lespoir_des_francais

MIEUX MAîTRISER LES DÉPENSES, C’EST POSSIBLE SEULEMENT SI LES EFFORTS S’ÉQUILIBRENT ENTRE TOUS LES ACTEURS DU SYSTÈME DE SANTÉ

Les enquêtes d’opinion révèlent une per-ception paradoxale des Français. Ils dé-noncent une consommation des médica-ments qu’ils pensent être excessive et, en même temps, ils sont très attachés à « leur » traitement et au maintien sans changement de son accessibilité, de sa disponibilité et de son remboursement. Contrairement à d’autres pays du nord de l’Europe, beau-coup n’imaginent pas sortir d’une consul-tation médicale sans ordonnance. Et il est fréquent que des patients demandent à leur pharmacien de leur délivrer des traitements à prescription obligatoire avant d’en obtenir l’ordonnance chez leur médecin. Deux questions complexes sont posées aux prescripteurs : qui peut et doit bé-néficier d’un traitement ? Et, surtout, pour combien de temps? Aujourd’hui, les « bonnes pratiques de prise en charge », les « recommandations thé-rapeutiques » et les « consensus d’ex-perts » sont des questions qui évoluent en permanence. En parallèle, les habi-tudes de prescription, voire le décalage entre les progrès scientifiques et la mise à jour des recommandations, peuvent conduire à des situations où les pa-tients qui devraient avoir un traitement ne le reçoivent pas, tandis que d’autres sont traités alors qu’ils ne devraient pas l’être. Quant à l’automédication, elle concerne des médicaments connus depuis long-temps et dont les dosages recommandés garantissent à court terme un risque mini-mal pour le patient, même en l’absence de prescription et de suivi médicaux. L’automédication est utile pour soulager ra-pidement des symptômes et des troubles de santé mineurs (douleurs diverses, bouton de fièvre, toux, maux de tête, al-lergies, etc.). Pour une consommation de court terme, elle doit être accompagnée du conseil d’un pharmacien, notamment pour éviter des interactions à risque avec d’autres traitements. Pour une consomma-tion de plus long terme, elle nécessite un conseil médical. Après les efforts de réduction des coûts et des consommations continus depuis quatre ans, la question est désormais de savoir si les prescriptions médica-menteuses sont pertinentes, et si elles tiennent toutes compte de l’évolution des connaissances scientifiques. Ainsi, dans certaines situations, la progres-sion rapide d’une innovation majeure pour une maladie jusque-là mal prise en charge peut justifier une augmentation importante des prescriptions d’un type de médicament. Dans d’autres cas, c’est une réduction ra-pide qui serait attendue, en raison de la découverte d’un nouveau médicament ou d’un nouveau mode de prise en charge ren-dant obsolète l’utilisation de médicaments plus anciens.

DÉVELOPPER DES PARCOURS DE SOINS EFFICIENTS, UN LEVIER IMPÉRATIF

Les parcours de soins reposent sur l’application de protocoles de prise en

charge définis en commun par les pro-fessionnels – par exemple le bon médi-cament, au bon moment, pour le bon pa-tient –, fondés sur les recommandations médicales, ainsi que sur un meilleur par-tage des informations entre l’ensemble des intervenants.Cette notion de parcours de soins suppose une meilleure articulation entre :- l’hôpital et la médecine de ville,- les médecins spécialistes et généralistes, - les médecins et les autres professionnels de santé (infirmiers, kinésithérapeutes, sages-femmes, orthophonistes, psycholo-gues),- le monde la santé et celui du médico-so-cial,- les professionnels de santé et les institu-tions de financement des soins, etc.L’enjeu est de rendre compatible la prise en charge d’une personne malade avec l’orga-nisation et le périmètre d’activité de nom-breuses institutions et de professionnels, souvent peu coordonnés et payés dans des cadres contractuels verticaux peu per-méables et adaptables. Dans ce dispositif, la mise en œuvre d’un dossier médical est absolument nécessaire afin de s’assurer de la prise en charge optimale des patients.

ON PEUT AUSSI PROGRESSER EN TERMES DE RESPONSABILITE INDIVIDUELLE DES PATIENTS

Deux exemples : la vaccination et la non-observance par des patients de leurs traitements. La vaccination est un acte de prévention essentiel pour se prémunir contre de nombreuses maladies infectieuses. Ce n’est pas seulement un acte individuel de protection personnelle, c’est aussi un acte citoyen pour protéger les autres, une mesure de prévention collective, car la vaccination permet de freiner ou d’enrayer la propagation d’un agent in-fectieux. Des maladies graves, comme la variole et, on l’espère, bientôt la poliomyélite, voire la rougeole ont ainsi été ou seront éradiquées grâce à des campagnes de vaccination de grande ampleur. Mais, pour être efficaces, celles-ci doivent atteindre un taux opti-mal de couverture vaccinale de la popu-lation. Malheureusement, on constate par exemple une recrudescence inquiétante de la rougeole en France, ainsi qu’un taux notoirement bas de couverture vaccinale contre l’hépatite B. Une partie de la popu-lation exprime des réticences vis-à-vis des vaccins et certains font régulièrement l’ob-jet de controverses. Pourtant, les bénéfices l’emportent largement sur les risques pour la santé, qui restent malheureusement non nuls, comme pour toute intervention médi-cale. Il faut donc poursuivre le travail d’in-formation des citoyens sur l’intérêt de la vaccination et les associer de plus en plus à des débats sur les enjeux et la définition des objectifs à atteindre dans l’intérêt de la santé publique. Les notions de protection collective, de vaccination « au bénéfice des autres », en particulier, mériteraient d’être mieux explicitées, au regard du risque indi-viduel, jamais nul. Le non-respect par des patients de leurs prescriptions, ce qu’on appelle « la mau-vaise observance des traitements », en-

traîne un coût estimé pour le système de santé à 2 milliards d’euros par an en France et serait à l’origine de 1 million de journées d’hospitalisation évitables. Cette mauvaise observance tient parfois à la difficulté d’articuler la prise de médica-ments avec la vie quotidienne. Des pallia-tifs sont parfois nécessaires, comme l’utili-sation d’un pilulier, qui permet de préparer à l’avance la prise des bons médicaments au bon moment.

POUR LES PATIENTS, LA MODERNISATION ET LA QUALITÉ DE L’INFORMATION SUR LES MÉDICAMENTS SONT DES ATTENTES FORTES.

La notice des médicaments est un docu-ment légal et obligatoire, soumis par le laboratoire lors de la demande de mise sur le marché du médicament et évalué par les autorités sanitaires. Les industriels, comme les autorités, cherchent constamment à améliorer la li-sibilité des notices des médicaments : ca-ractères plus gros, clarté des explications, facilité d’usage. A côté des notices on peut faire encore mieux pour développer la qua-lité de l’information sur les médicaments. Si une indépendance de l’information est nécessaire, elle ne doit pas empêcher le recours à ceux qui disposent de l’informa-tion la plus pertinente, à savoir les méde-cins prescripteurs, les autorités publiques définissant les bonnes pratiques, les indus-triels qui conçoivent les « modes d’emploi » des produits et des utilisateurs « avertis ». L’enjeu est de taille, et les modèles actuels restent imparfaits. La peur d’une informa-tion « biaisée » par des prescripteurs ou des institutions ne doit pas conduire à re-jeter en bloc la connaissance scientifique et technique au profit d’informations por-tées par certaines sectes et par des mou-vements hostiles au progrès. L’information du patient joue un rôle central car un pa-tient qui comprend sa maladie ne peut que mieux suivre son traitement. Les patients vont chercher des masses d’informations concernant les questions de santé sur les forums Internet, les réseaux sociaux… Pour leur procurer des informations de qua-lité, ni trop vulgarisées ni trop scientifiques, médecin, pharmacien, responsable d’as-sociation, assureur et industriel auraient avantage à développer, côte à côte, les mêmes outils d’information, permettant aux patients d’être bien informés, tout au long de la chaîne de soins. C’est notamment la suggestion de l’Académie de Médecine pour lutter contre la iatrogénie chez le sujet âgé.

L’ÉTAT EST TOUJOURS LE SEUL DÉCISION-NAIRE FINAL DU PRIX DES MÉDICAMENTS REMBOURSÉS

D’abord, pour être commercialisé, un mé-dicament doit avoir obtenu une Autorisa-tion de mise sur le marché (AMM). C’est l’Agence européenne du médicament qui l’octroie après une évaluation approfondie du rapport bénéfice/risque du produit pro-posé. Son évaluation se fonde sur le dos-sier d’AMM soumis par l’entreprise. Celui-ci rassemble et présente de façon normali-sée l’ensemble des informations recueillies tout au long de la période de recherche

L’innovation en santé :l’espoir des Français

PUBLICITE

www.lir.asso.fr

et développement du produit (dix ans, en moyenne). Quant à leur prise en charge, c’est le Co-mité économique des produits de santé (CEPS), organisme interministériel, qui né-gocie les prix des médicaments vendus sur prescription, après évaluation de l’intérêt de chacun d’entre eux. Pour chaque médica-ment candidat, le niveau de prix repose sur « l’amélioration du service médical rendu » qu’il apporte. Cette améliora-tion est évaluée par la Commission de la transparence, sous l’égide de la Haute Autorité de Santé. L’industrie pharma-ceutique fournit des dossiers écrits pour présenter les données d’efficacité et de tolérance et pour justifier la valeur de son produit.La Commission de la transparence de la Haute Autorité de Santé de même que le Comité économique des produits de santé agissent en toute indépendance des laboratoires : ces laboratoires ne participent pas aux travaux de ces com-missions. La Commission de la transpa-rence rend publics ces avis argumentés ; les propositions complètes du CEPS ne sont pas rendues publiques car les entre-prises de santé qui agissent dans un envi-ronnement concurrentiel national et interna-tional doivent aussi pouvoir bénéficier de la protection de leurs accords économiques, comme toutes les entreprises. Néanmoins, le CEPS publie chaque année un rapport annuel très complet qui permet d’objectiver les données ayant conduit à la fixation des prix des médicaments. Les prix des médi-caments remboursés en France sont infé-rieurs à la moyenne de ceux de nos voisins européens. C’est en particulier le cas des plus récents et innovants.

« L’OPEN DATA » EN SANTÉ TARDE À SE DÉVELOPPER

Chaque année, des milliards de données de soins sont produites par le système de santé et certaines sont aujourd’hui systé-matiquement recueillies dans différentes bases de données. Par exemple le SNII-RAM, base nationale mise en place par l’Assurance Maladie pour gérer les rem-boursements, est considéré comme l’une des plus importantes au monde. Des socié-tés privées ont également mis au point des systèmes de recueil des données dans les pharmacies ou chez les médecins, qui four-nissent une multitude d’informations sur les pratiques de prescription et de consomma-tion des médicaments. Toutes ces don-nées sont utiles pour mieux comprendre l’utilisation des médicaments et leurs effets en vie réelle. Par exemple, dans quelles circonstances y a-t-il le plus de difficulté d’observance pour les pa-tients atteints de diabète? Dans quelle région consomme-t-on le plus d’antidé-presseurs? Répondre précisément à de telles questions peut permettre d’amé-liorer l’efficience du système de santé. LA CONSOMMATION FRANÇAISE DE MÉDICAMENTS EST DANS LA MOYENNE EUROPÉENNE

Parmi les huit classes majeures de mé-dicaments les plus utilisés dans notre pays, les antalgiques (antidouleurs) sont les médicaments les plus consom-més par les Français (10 % du total, en-viron). Suivent les antihypertenseurs (8 %), l’ensemble des médicaments qui traitent ou préviennent les risques car-diovasculaires représentant 17 % de la consommation totale. Arrivent ensuite les antiallergiques-antirhinite (6 %) et les antiasthmatiques (5 %).

Une étude réalisée par le LIR analyse l’évolution de la consommation sur la pé-riode 2000-2013 des huit classes majeures de médicaments de prescription pour la France et six pays européens voisins. Elle révèle que si la France est parmi les trois pays les « plus consommateurs » d’antibio-tiques, d’anxiolytiques et d’antidiabétiques, elle est parmi les trois pays les « moins consommateurs » d’antihypertenseurs et d’anti-ulcéreux. Par ailleurs la consomma-tion française est inférieure aux moyennes de consommation des six autres pays pour cinq classes de médicaments : les antiasth-matiques, les hypolipémiants, les antihy-pertenseurs, les antidépresseurs et les an-tiulcéreux.

POUR LA DEUXIEME ANNÉE CONSÉCUTIVE, LES MÉDICAMENTS SONT LES SEULES DÉPENSES DE SANTÉ QUI ONT BAISSÉ

En 2013, les dépenses courantes de san-té se sont élevées à 248 milliards d’euros, soit près de 12 % du produit intérieur brut (PIB). Le secteur hospitalier représente près de la moitié de ces dépenses d’as-surance maladie. C’est l’inverse avec le médicament : en 2013 sa consommation a baissé de 1,3 %, après une baisse de 1,2 % en 2012. Ces deux années consé-cutives de baisse ont fait suite à deux années de progression plus faible que les autres dépenses de santé : + 1,2 % en 2010 et + 0,9 % en 2011. Selon la Drees, la baisse de 2013 est due à une « nette diminution des prix, de 4,4 %, et une croissance assez modérée des vo-lumes, de 3,3 % ». La hausse continue de la part des génériques dans les ventes de médicaments remboursables, + 18 % en 2013 après + 16 % en 2012 et + 13 % en 2011, a contribué aussi à cette baisse d’ensemble. Enfin, les dépenses de médi-caments non remboursables ont baissé en valeur de 2 %.De nombreux acteurs se sont impliqués au cours de ces quatre années pour obte-nir une baisse des dépenses de médica-ments : médecins et professionnels de san-té, pharmaciens d’officine et entreprises du médicament, patients et associations de patients, autorités nationales et régionales en charge de la régulation du système de santé. Pendant cette période, plusieurs médicaments innovants ont vu le jour, le nombre de personnes âgées et très âgées s’est accru et les maladies chroniques ont continué de progresser (le vieillissement est à l’origine de 90 % de la croissance an-nuelle des dépenses de médicaments).Il y a donc eu un « ajustement » de la consommation, car les anciens médica-ments cèdent la place aux nouveaux, plus performants et mieux étudiés dans le cadre d’une amélioration de la pertinence des prescriptions et de la consommation de médicaments.

L’INNOVATION NE CESSE DE PROGRESSER, ET L’AVÈNEMENT DES BIOTHÉRAPIES OUVRE UNE NOUVELLE ÈRE DE PROGRÉS MÉDICAL

Des progrès majeurs ont radicalement transformé le pronostic de nombreuses maladies, notamment dans les domaines de l’oncologie, de l’hématologie et de la rhumatologie et des maladies infectieuses.Contrairement à l’idée reçue, la découverte de nouveaux médicaments n’est pas à l’ar-rêt. Le flot d’innovations qui a débuté dans les années 1950 n’est pas interrompu. La nature de ces innovations a changé et les investissements nécessaires pour y parve-nir ont considérablement augmenté. Il n’y a donc pas un problème de performance

de la recherche pharmaceutique, mais une modification de son coût par rapport aux ré-sultats obtenus. Au cours de ces dernières années, des progrès majeurs ont été réalisés dans de nombreux domaines pour lesquels on ne disposait auparavant que de peu de ré-ponses médicales satisfaisantes. On peut notamment citer le sida, l’hématologie, l’oncologie, de nombreuses maladies rhu-matismales chroniques et invalidantes, cer-taines maladies de la rétine conduisant à la cécité en l’absence de traitement et, plus récemment encore, l’hépatite C. L’évolution considérable des connais-sances dans le domaine des sciences du vivant, et en particulier de la génétique et de la biologie moléculaire, ainsi que des nouveaux outils de la recherche vont conti-nuer d’entraîner un flux d’innovations, dans les prochaines années. Ainsi le nombre de produits en dévelop-pement n’a-t-il jamais été aussi important. Rien qu’aux Etats-Unis, plus de 5 000 mo-lécules étaient en développement en 2013, selon les statistiques du Pharmaceutical Research and Manufacturers of America, syndicat professionnel des entreprises pharmaceutiques américaines. La capacité des entreprises à innover se mesure aussi à leur rapidité d’adaptation aux évolutions de leur environnement : rapprochement de la recherche privée avec la recherche pu-blique, partenariats avec des sociétés de biotechnologies, développement de nou-velles expertises et de nouvelles voies de recherche.

LA COOPÉRATION PUBLIQUE PRIVÉE EST INDISPENSABLE, ET EST UN ATOUT DÉTERMINANT POUR DISPOSER DEMAIN, DES NOUVEAUX MÉDICAMENTS QUE TOUT LE MONDE ATTEND

Les équipes de recherche privée et pu-blique collaborent toujours plus étroitement pour accélérer la mise au point de nou-velles thérapeutiques. Les Partenariats Pu-blic-Privé (PPP) se multiplient : ils reposent sur la mutualisation des connaissances, le partage de compétences et le développe-ment en commun de programmes de re-cherche. Les entreprises internationales de re-cherche sont parties prenantes de cette démarche. En France, elles ont initié de-puis 2009 les Rencontres Internationales de Recherche, destinées à accroitre le nombre de projets collaboratifs entre des équipes académiques françaises et des équipes internationales de la recherche privée. Citons pour exemple plus de 100 millions d’euros de partenariats avec les Instituts hospitalo-universitaires tels l’ICM, Imagine, ICAN, etc. Ce décloisonnement des univers de la recherche est incontour-nable et est lié à l’évolution des techniques et des approches de la recherche en san-té. Le développement des biotechnologies exige en effet de répondre à des questions touchant à l’origine des maladies, qui né-cessitent des compétences plus tradition-nellement présentes au sein des équipes de recherche fondamentale. L’ampleur des questions nouvelles encourage également cette nouvelle mobilisation des ressources

et des compétences, aucun des acteurs ne pouvant espérer y répondre isolément.

METTRE AU POINT UNE INNOVATION THÉRAPEUTIQUE, C’EST AU MOINS DIX ANS D’ÉTUDES SUR SON ÉFFICACITE ET SUR SA SÉCURITÉ AVEC LA MOBILISATION DE CENTAINES D’INTERVENANTS ET UN TAUX D’ÉCHEC IMPORTANT A CHAQUE ÉTAPE DE SON DÉVELOPPEMENT.

La mise au point d’un nouveau médica-ment trouve souvent son origine dans des travaux de recherche fondamentale. Des scientifiques élucident le ou les dysfonc-tionnements à l’origine d’une maladie et proposent d’agir sur une cible thérapeu-tique. Cette recherche est longue et incer-taine. Il a, par exemple, fallu vingt ans et les ef-forts combinés de dizaines d’équipes de re-cherche académique avant de déterminer que le dysfonctionnement de la protéine Tau participait à l’émergence des maladies neuro-dégénératives. De plus, la majorité des maladies, et notam-ment celles qui constituent aujourd’hui de véritables défis pour la recherche (cancer, Alzheimer) sont des systèmes de dysfonc-tionnements complexes. Agir sur un élé-ment du système fait généralement émer-ger de nouvelles questions plutôt qu’une solution. Lorsqu’une cible est identifiée, il faut alors trouver un candidat médicament susceptible de l’atteindre, puis mettre en œuvre l’ensemble du processus de re-cherche nécessaire à la démonstration de son efficacité et de sa sécurité d’emploi. L’explosion des biotechnologies a entraîné une véritable révolution dans le domaine de la recherche de nouveaux médicaments. Les biotechnologies découlent des progrès considérables réalisés ces dernières dé-cennies dans le domaine de la génétique et de la biologie moléculaire. En permet-tant de mieux comprendre et d’agir sur les mécanismes génétiques, biomoléculaires et immunologiques à l’origine des phéno-mènes pathologiques, elles ouvrent des perspectives extraordinaires en matière de traitement. Cette nouvelle ère de la thérapeutique est déjà d’actualité ; 325 millions de patients ont déjà bénéficié d’un biomédicament : les in-terférons, les hormones recombinantes, les anticorps humanisés, les thérapies molé-culaires ciblées, les vaccins thérapeutiques ou préventifs ciblent des maladies aussi variées que le cancer du sein ou du col de l’utérus, les lymphomes, les leucémies, la polyarthrite rhumatoïde, l’anémie, la sclé-rose en plaques, les retards de croissance, la maladie de Crohn, le diabète, certaines maladies cardiaques ou infectieuses.La thérapie génique et la thérapie tissulaire, qui reposent sur des gènes ou des cellules transformés par ingénierie génétique, sus-citent aussi aujourd’hui beaucoup d’espoir. Les biothérapies ont donc quitté le stade de la promesse. Elles pourraient constituer, à brève échéance, la moitié des outils théra-peutiques à la disposition des médecins, sans pour autant totalement remplacer tous les médicaments produits par chimie selon une approche plus classique.

Sources :Des bases de données IMS (consommation 2013 en standard units (SU). Des rapports produits par l’IRDEES et le Panorama de la Santé OCDE, 2013. Du rapport Ondam/Igas-IGF 2013-2017. Du rapport CEPS 2013. De l’étude LIR menée en toute indépendance par Pierre Chahwakilian, à partir des données IMS et qui a permis d’analyser, sur la période 2000-2013, l’évolution de la consommation (définie par des quantités de médicaments achetés, et mesurée en « doses définies journalières ») de huit classes majeures de médicaments de prescription.

POUR TOUTE QUESTION, CONTACTER LA DIRECTRICE DU LIR [email protected]

Les 16 entreprises internationales de re-cherche rassemblées au sein du LIR ont deux points communs : elles innovent en permanence et savent que les médica-ments sont un sujet sensible dans nos so-ciétés. Les innovations thérapeutiques que nous mettons à la disposition des patients génèrent des interrogations d’origines mul-tiples (économique, juridique, politique, sanitaire, écologique, éthique) nourrissent des peurs (la maladie, la mort, le risque) mais aussi de grands espoirs (la santé, la guérison, la recherche, la vie). Nos équipes engagées au sein de notre think tank ne souhaitent pas rester spec-tatrices de ce débat, en s’appuyant sur des faits et des preuves, posés en termes rationnels, leur rôle est de vous donner à penser. La consommation française de médica-ments est dans la moyenne européenne. Les derniers travaux issus de la recherche publique, par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statis-tiques (Drees) notamment, indiquent que, depuis deux ans, la consommation de mé-dicaments diminue en valeur et n’augmente que très faiblement en volume, alors que tous les autres postes de la consommation des biens de santé progressent en volume et en valeur. Les mesures continues d’économies sur le médicament ne peuvent tenir lieu de poli-tique sanitaire. Des innovations organisa-tionnelles dans le système de santé, des prescriptions mieux ajustées et une bonne observance de ces prescriptions par les pa-tients sont nécessaires.Halte aux idées reçues qui circulent pour laisser la place aux réformes de fond.

Denis HELLOPrésident du LIR

Le LIR a pour mission de produire des études, et des travaux pour préfigurer la santé de demain et pérenniser une équité d’accès à l’innovation. Association loi 1901 le LIR existe depuis plus de quinze ans et fonctionne sur le modèle d’un think tank. Ses 16 entreprises membres sont : AbbVie, Astellas, AstraZeneca, Bayer Healthcare, Boehringer Ingelheim, Bristol-Myers Squibb, GlaxoSmithKline, Janssen, Lilly France, Merck Serono, MSD, Novartis, Novo Nordisk, Pfizer, Roche, Takeda.

Elles investissent chaque année plus de 700 millions d’euros dans la recherche publique française (soit autant que le budget annuel de l’Inserm, et trois fois plus que celui de l’Institut Pasteur). Elles portent plus de 70 % des essais cliniques qui sont pratiqués en France, mettent à la disposition du corps médical français plus des trois quarts des médicaments les plus innovants (ASMR 1 à 3). Elles comptent en France plus de 24 000 emplois (42 % en production), et 31 sites répartis sur 21 départements.