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Journal du Citoyen N°1 en français
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Ed i to r i a l
Coordinateurs : Mongi Aouinet,
Néjiba Hamrouni, Charles
Auhteman et Sylvaine Petit
Formateurs : Sabah Mahmoudi, Florence Al Aswad, Moncef
Ayari, Lotfi Touati
Secrétariat de rédaction :
Mohamed Drissi
Traduction :
SETRA Traductions
Rédaction :
Manel Mejri, Ghabri Olfa,
Raoudha Selmi, Karima
Ben Youssef, Melek Lakdar,
Zahra Ben Kalma,
Mohamed Boughanmi, Rim
Ben Frej, Marwa Sahli, Wafa
Ghawari, Chokri Belhedi,
Hattab Fezai.
Exemplaire gratuit : ne peut être venduNuméro 1 21 mars 2012 Avec le soutien de :
http://journalducitoyen.wordpress.com/ Contact : [email protected] Imprimerie : Imprimerie des Berges du Lac, imprimeriedulac.com
Fierté d’appartenance
« Débattre de la politique », dans
la presse tunisienne, aujourd’hui,
s’apparente à approuver ou
réfuter le parti Al Nahdha. Il n’y
a pas un média ou presque qui
n’a"che pas ses couleurs face
aux décisions politiques de cette
nouvelle Tunisie. C’est un bon
début dans la démocratie, mais
il faut surtout veiller à honorer,
gratifier et crédibiliser notre métier
de journaliste. L’accompagnement
de 24 stagiaires par des formateurs
nationaux est de permettre une
meilleure couverture de cette
période décisive dans la vie
politique du pays. Durant cinq
jours de formation intensive et un
suivi sur trois mois, les formateurs
nationaux s’appliquent à mettre à
disposition des journalistes, tout
leur savoir et leurs compétences
exceptionnels. Et la motivation
des 24 nous a bien prouvé qu’ils
ont la volonté d’améliorer leur
profession. Leurs écrits ont été
à la hauteur de nos attentes ; et
les prochains numéros ne seront
que meilleurs… Fruit d’un travail
d’équipe, de mixité d’idées. Notre
objectif à tous est d’aboutir à
un journalisme droit, objectif et
serein…
Florence AL ASWAD
Session de Formation pour Journalistes : «Couverture du Débat Politique»
Débat politique entre le représentant du (POCT) et celui du (PDP)Le représentant du POCT Mohamed Mazzem et celui du PDP Iyad Dahmani ont parlé aussi bien de la vague
de froid qui sévit dans le pays que de la fragilité de la situation économique lors d’un débat organisé par le
Syndicat National des Journalistes avec la collaboration de l’Institut Panos Paris.
Ce débat, tenu le mercredi 8 février 2012 dans un
hôtel de la capitale, dans le cadre d’une session de
formation destinée aux journalistes, a aussi été une
occasion pour passer en revue les réactions suscitées
par l’initiative de Sebsi.
Mohamed Mezzem pense d’abord que le
Gouvernement doit prendre des mesures
préventives pour faire face à ce type de conditions
météorologiques et non compter exclusivement sur
la société civile, alors que Iyad Dahmani a insisté sur
le rôle de la société civile et s’est félicité des e$orts
qu’elle a déployé comparé au rôle relativement
modeste joué par le Gouvernement.
Situation Economique DifficilePar ailleurs, Mohamed Mazzem a évoqué la
fragilité de la situation économique du pays « au
niveau de la production et de la distribution des
richesses, ce qui accentue les disparités entre les
régions, renforce le chômage, particulièrement
dans les régions intérieures, et nécessite une
redistribution des investissements par l’Etat qui
doit jouer le rôle de locomotive, afin d’orienter les
nouveaux investissements vers l’agriculture et vers
les industries o$rant les plus grandes opportunités
d’emploi ».
Pour sa part, Dahmani constate que « le recul
des investissements est dû à la médiocrité des
infrastructures de base combinée avec l’endettement
de l’Etat, plus particulièrement dans le domaine
du tourisme », ajoutant que le développement
économique se base essentiellement sur le tourisme,
qui doit se focaliser plus sur les secteurs du tourisme
culturel et médical…
Et l’initiative de SebsiQuant à leur point de vue sur l’initiative de Sebsi ;
Dahmani - le représentant du PDP - a expliqué que
le Gouvernement de la Troika n’avait pas tenu ses
promesses faites au peuple, et que le pays passait
par une phase nécessitant un gouvernement de
Salut National et non d’un gouvernement dominé
par un seul parti. Par ailleurs, Mazzem, du Parti
des Travailleurs, pense que cette déclaration a été
préparée à plusieurs niveaux, et que Beji Caied
Sebsi n’a pas proposé de solutions lorsqu’il tenait les
rennes du pouvoir, ajoutant que l’initiative dite «de
Sebsi» avait été préparée avec l’accord d’Ennahdha.
Mazzem a par ailleurs nié avoir reçu des fonds
du Président Syrien et accuse ses détracteurs de
manquer de preuves, ajoutant que le Parti des
Travailleurs Tunisiens soutient le mouvement
populaire syrien contre le Régime d’Al Assad.
Wafa Ghouari
Le Conseil Constitutionnel entre la Tunisie d’Hier et la Tunisie d’Aujourd’hui- La Première Constitution est le fruit du Mouvement Réformateur National
- Sans le savoir, Habib Bourguiba a fondé la Dictature Novembrienne
La Tunisie fût le premier pays arabo-musulman à adopter un régime constitutionnel, lorsque Bey Mohamed promulgua le 9 septembre 1857 un texte connu sous le nom de A’ahd Al Amane ou Traité de Loyauté. Ce texte fut préparé pour répondre aux ingérences étrangères dans les affaires intérieures du pays suite aux troubles engendrés par le meurtre
d’un juif accusé d’avoir renversé et tué un enfant musulman avec son véhicule. L’intention du Bey Mohamed était de mettre en place une constitution et d’enclencher des réformes, y compris la mise en place d’un conseil municipal à Tunis réunissant des représentants des communautés étrangères en plus des membres tunisiens.
La préparation de la Constitution a commencé à
l’époque du Bey Mohamed, mort le 24 septembre
1959, et c’est son frère Mohamed Sadok qui a veillé
à ce qu’elle soit finie et annoncée publiquement en
1861 au terme d’une série de réformes.
Cependant, la révolution d’Ali Ben Ghedhahem
a mis en veille l’application de cette constitution
3 ans après sa promulgation, avec la naissance
du Mouvement Réformateur National initié par
Kheireddine Ettounsi, dont la référence était
« Akouam Al Massalek Fi Maarifet Ahoual Al
Mamalek » (Le plus sûr moyen pour connaître
l›état des nations) publié en 1867. L’action
et la lutte des mouvements réformateurs se
sont intensifiées avec l’occupation française
et l’installation du Protectorat en Tunisie. Les
associations et les journaux créés et développés au
cours de cette période ont joué un grand rôle dans
l’émergence d’une conscience nationale parmi les
intellectuels réunis dans le cadre du Mouvement
des Jeunes Tunisiens, qui a appelé à une assemblée
représentative élue par le Peuple et à la mise en
œuvre de structures constitutionnelles, et dont le
principal instigateur était Ali Bach Hamba.
Le Mouvement des Jeunes Tunisiens a continué
sa lutte pour la mise en œuvre de réformes, et
qui s’est finalement soldé par la création du Parti
Libre Constitutionnel en Mars 1919, dirigé par
Abdelaziz Thaalbi ; sa principale revendication
était la promulgation de la constitution
permettant au peuple de diriger ses propres
a�aires dans le cadre de l’Etat Husseinite, et
l’adoption d’une série de réformes soutenues par
le Résident Général Lucien Saint, principalement
la mise en place du Grand Conseil et des Conseils
Régionaux en 1922.
Les activités et la lutte politiques se sont poursuivies
au cours des 13 années suivantes, jusque ce que
le Groupe de Travail Tunisien régissant le parti
(Habib Bourguiba, Mahmoud Matri, Tahar Sfar
et Bahri Guiga) ont appelé lors d’un congrès
du Parti Libre Destourien tenu à la Rue de la
Montagne en 1933 à plusieurs réformes dont la
promulgation d’une Constitution garantissant la
souveraineté du Peuple. La lutte a alors pris une
autre dimension, et les revendications du Congrès
de la Rue de la Montagne ont été confirmées lors
du Congrès de Ksar Hellal tenu le 2 mars 1934 par
le Groupe de Travail Tunisien ; ceci a constitué le
début de la lutte contre l’occupation, coordonnée
par le Néo-Destour (Groupe de Travail Tunisien)
pour la réalisation des aspirations du peuple, et
dont la principale était la Constitution devant
mener à l’indépendance.
Le 13 janvier 1952, Habib Bourguiba appela à la
lutte armée.
Premier Conseil National ConstitutionnelLe 1er juillet 1954, Mendes France a proclamé
l’indépendance intérieure du pays lors d’un
discours o!ciel prononcé devant Lamine Bey à
Carthage, et l’Accord d’Autonomie a été signé le
3 juin 1955.
Les grandes lignes politiques du leader Habib
Bourguiba concernant l’indépendance et la
souveraineté ont été exposées lors du Congrès
de Sfax tenu le 15 novembre 1955, et ont surtout
appelé à la promulgation d’un Décret portant la
création d’un Comité National Constitutionnel,
signé par Lamine Bey le 29 décembre 1955. Ce
Conseil élu au su�rage universel par le peuple a
été chargé de préparer la Constitution du pays.
Après l’indépendance totale obtenue le 20 mars
1956, l’Etat Tunisien s’est empressé d’exaucer un
vœu populaire, celui d’avoir une Constitution, et
c’est alors que les membres du Conseil Constitu-
tionnel ont été élus le 25 mars 1956. Ces élections
ont alors été remportées par la liste du Front Natio-
nal menée par le Parti du Néo-Destour et les orga-
nisations nationales le soutenant. Les gagnants ont
présenté le programme du premier gouvernement
d’indépendance au Conseil lors de sa réunion du 9
avril 1956 et ont par la même occasion élu le Lea-
der Bourguiba. Le premier gouvernement de l’ère
de l’indépendance a été constitué le 14 avril 1956,
et c’est Jallouli Fares qui a été désigné Président du
Conseil Constitutionnel à la place de Bourguiba,
puis le Conseil a aboli le Beylicat et a déclaré la
République le 25 juillet 1957.
Ce n’est qu’au 1er juin 1859 que la Constitution
a été annoncée, soulignant la séparation des
pouvoirs et le respect des droits humains. Les
premières élections législatives et présidentielles
ont été organisées selon les termes de la nouvelle
Constitution le 8 novembre 1959, et ont été
remportées par le Front National présidé par
Habib Bourguiba.
Nouveau Conseil National ConstitutionnelLe peuple tunisien, exalté par son indépendance
de la colonisation française, croyait fort que
ces élections remportées par le Leader Habib
Bourguiba qui a pris en main la destinée du
pays, allaient mener la Tunisie sur le chemin
de la démocratie assurée par la Constitution
de 1959. Cependant, les choses ont pris une
autre tournure, et la Constitution fût l’objet de
plusieurs amendements et transformations au
gré des partisans du Parti Libre Destourien dirigé
par le Leader, et qui en ont font finalement un
Leader Suprême et Président à Vie. La situation
s’est empirée au fil des ans et la corruption a
gangréné le pays au cours des années quatre
vingt. La Tunisie a alors connu des mouvements
d’opposition de la part de partis politiques et de
forces syndicales, qui ont fini par un coup d’Etat
pacifique en 1987 renversant le Leader Bourguiba
par son propre Premier Ministre et militaire
de formation Zinelabidine Ben Ali, prenant
le pouvoir et devenant le 7 novembre 1987 le
deuxième Président de la République Tunisienne.
Le peuple tunisien a exprimé son soulagement
pour ce Changement qualifié de « béni », et
croyait que de vrais changements allaient être
amorcés sous le règne de Zine El Abidine Ben
Ali. Mais deux ans à peine après ce changement,
les élections ont été falsifiées, les espoirs pour
l’instauration de la démocratie se sont e�ondrés
et la corruption a regagné du terrain dans les
domaines économique, social et même culturel.
Les sonnettes d’alarme ont été tirées à plusieurs
reprises pour avertir les autorités des dangers
guettant le pays, mais celles-ci sont restées
impassibles aux remous populaires, jusqu’au 17
décembre 2010 lorsque Mohamed Bouazizi s’est
immolé par le feu dans la région de Sidi Bouzid
; une étincelle qui a engendré le soulèvement
populaire partout dans le pays, réclamant
des réformes dans tous les domaines, puis la
formation d’un conseil national constitutionnel
après la chute du régime précédent et la fuite de
Ben Ali vers l’Arabie Saoudite le 14 janvier 2011.
La présidence a été remise à Foued Mbazaa,
Président de la Chambre des Députés en vertu de
l’Article 57 de la Constitution dissoute, la tâche
du Conseil Constitutionnel étant d’élaborer une
nouvelle constitution garantissant les droits, la
liberté et la dignité réclamés haut et fort par la
révolution ayant secoué le pays.
Les attentes du peuple vis-à-vis de ce Conseil et
ce qu’il en adviendra du pays après l’élection de
la deuxième constituante restent tributaires des
défis futurs.
Zahra Ben Kamla
La France vient d’octroyer à la Tunisie, par le biais
de l’Agence Française de Développement, une
enveloppe de deux cent milliards, en application
de l’accord signé par l’ancien Gouvernement de
Caied Sebsi avec la France lors de la réunion du
G8 à Deauville.
La Tunisie va bien profiter de ces deux cent
milliards pour soutenir son économie. La question
est de savoir si ce montant sera distribué, utilisé
pour couvrir les dépenses publiques ou pour
alimenter d’autres secteurs. M. Manoubi Akrout,
journaliste et analyste économique a indiqué que
ce montant faisait partie d’un grand programme
de soutien au printemps arabe, visant à permettre
aux pays bénéficiaires de restructurer leurs
économies après la paralysie de leurs entreprises
et des institutions de l’Etat.
M. Akrout a aussi expliqué que l’accord entre la
Tunisie et la France concerne plus spécialement
l’emploi et la formation professionnelle mais
aussi le financement de petits projets. Quant à
la pertinence de cette subvention en ce moment
précis, M. Manoubi Akrout pense qu’elle arrive
au bon moment alors que le Gouvernement
se prépare à soumettre le projet de budget
complémentaire.
Cet analyste a ajouté que ce montant injecté dans
la trésorerie générale permettra aux experts
chargés du budget d’avoir une meilleure visibilité
qui leur permettra de définir les dépenses et les
équilibres financiers avec plus de réalisme.
M. Manoubi Akrout a insisté sur le fait que
la France, à l’instar des autres pays, est bien
consciente de la situation économique que
traverse le pays, et que son engagement à aider
l’économie tunisienne à aller de l’avant reflète le
volume considérable d’échanges commerciaux
entre les deux pays.
Le budget complémentaire pour 2012 sera
soumis dans peu de temps, et ses di�érentes
rubriques commencent à être plus nettes, à
travers les consultations organisées au sein
des conseils régionaux de développement. La
question est maintenant de savoir comment nous
allons faire face aux priorités, et quelles seront
les nouvelles sources de financement.
Soutien Européen à la Région du Printemps ArabeEconomie
La France injecte Deux Cent Milliards dans l’Economie Tunisienne
L’animateur TV égyptien Bassem Youssef :
« Je suis optimiste pour l’avenir de l’Information en Tunisie et en Egypte »Bassem Youssef est l’animateur du programme TV controversé AL BARNAMIJ (Le Programme) diffusé sur la chaîne égyptienne ONE TV. Son émission aborde les sujets politiques d’actualité avec beaucoup d’ironie et de satire. Il est venu récemment à Tunis pour tourner de nouvelles séries et pour animer un spectacle intitulé « les artistes de la liberté d’expression » les 24 et 26 février 2012. Ce spectacle a réuni dans l’espace Zephir de la Marsa le journaliste Haitham Mekki, des artistes engagés tels Bendirman, Mehdi et des rappeurs.Il est aussi venu en Tunisie pour observer la situation des médias après le 14 janvier et étudier les différences et similitudes entre les expériences tunisienne et égyptienne dans un cadre marqué par l’abondance de l’information dans cette période de transition.Dans cette interview, Bassem Youssef parle de son programme, de son travail et du métier de journaliste en Egypte.
Parlez nous d’abord de Bassem Youssef
Je suis un citoyen égyptien, médecin spécialiste
en chirurgie du cœur, je vis en Egypte et je
suis devenu célèbre grâce au programme AL
BARNAMIJ. Avant ce programme, j’ai conçu
plusieurs séries sur YouTube avant de partir
travailler avec toute mon équipe pour la chaine
ONE TV.
Amour de l’InformationComment vous est venue l’idée du programme ?
Je suis d’abord un amateur de ce qu’on appelle
les satires politiques, un domaine très développé
aux Etats-Unis à la manière de Tom Stewards.
J’avais envie de faire quelque chose de similaire,
surtout que j’ai remarqué qu’il y avait beaucoup
de mensonges, de faux et d’hypocrisie dans les
médias. J’ai commencé par des vidéos faites chez
moi et c’est comme ça que tout a commencé.
Quant aux obstacles auxquels il a eu à faire
face et doit encorea�ronter aujourd’hui, il dit
« mon travail devient de plus en plus di"cile
car je cherche toujours à innover et à inventer
de nouvelles choses, tout en gardant l’e�et de
surprise pour garder mon public » ce qui met
encore plus de pression sur lui.
Quelle est la position d’AL BARNAMIJ dans le
paysage médiatique égyptien ?
« Il est di"cile pour moi de répondre à cette
question, car on peut pas vraiment classer ce
programme dans cette mosaïque des médias en
Egypte. On est habitué dans notre pays à deux
choses : la comédie d’une part et les programmes
sérieux d’autre part, alors que dans notre
programme, nous réunissons les deux, ce qui
suscite les interrogations des téléspectateurs
qui se trouvent face à des séquences drôles mais
sérieuses en même temps ».
Y a t’il un feedback positif de la part des
auditeurs ?
Comme pour tous les programmes du monde, il
y a toujours un feedback positif et un feedback
négatif. Mais dieu merci jusqu’à ce jour, tous les
échos que nous avons reçu sont excellents.
Les pressions continuentAvez-vous fait l’objet ou faites-vous l’objet de
pressions surtout que vous n’arrêtez pas de
critiquer le Conseil Militaire Egyptien ?
Non cela n’a pas encore eu lieu.
Que pensez-vous du secteur des médias en Egypte
et croyez-vous que des changements auront lieu ?
Des intimidations ont été exercées à l’encontre
de plusieurs confrères journalistes soutenant le
processus révolutionnaire, mais elles ne m’ont pas
encore visé personnellement. Elles s’apparentent
souvent à de la di�amation ou de la diabolisation
des activistes et de la révolution, et donc de tous
ceux qui se tiennent derrière.
Quel avenir pour les médias égyptiens ?
Je suis assez optimiste car le rideau de peur a été
détruit, et les gens font tout pour dire librement ce
qu’ils pensent ; il n’est plus question de réprimer
les gens et de les domestiquer comme cela a été
le cas par le passé ; la liberté d’expression est
devenue une évidence.
Que pensez-vous des médias tunisiens comparés
aux médias égyptiens ?
La seule di�érence entre les secteurs des médias
en Tunisie et en Egypte, c’est le nombre de chaînes
et de professionnels des médias. On assiste aux
mêmes confrontations politico-médiatiques, aux
mêmes problèmes et aux mêmes accusations.
Quant à l’alternative qu’il propose et pour laquelle
il travaille, il dit :
« L’alternative existe dans toutes les régions du
monde : un Etat civil, un gouvernement élu, des
forces armées sous l’autorité civile, ce ne sont
pas des choses que j’ai inventé, mais celles qui
existent dans plusieurs pays démocratiques ».
Rym Ben Frej
Le Syndicat a annoncé dans sa déclaration du
20 février une grève de 4 jours des ouvriers
municipaux. Quelles en sont les raisons et
pourquoi aucun accord n’a pu être conclu ?
D’abord, il faut rappeler que ces revendications
sont légitimes, et elles concernent essentiellement
une catégorie de travailleurs vivant des conditions
sociales di�ciles, et qui ne peut plus attendre.
Ce secteur a été négligé par l’ancien régime,
et s’en est toujours plaint. Même du temps de
Ben Ali nous avons fait des grèves partielles et
nous avons exprimé les mêmes revendications
qu’aujourd’hui, à savoir l’octroi d’une prime
spéciale de dépenses pour l’ensemble
des employés municipaux, et la
définition d’une date pour commencer
les négociations concernant le système
de base unifié.
Au Syndicat nous avons essayé de
trouver des solutions avant d’appeler à
la grève. Nous avons organisé une grève
de 4 jours en signe d’avertissement,
puis une grève de 2 heures au cours
du mois de janvier, ensuite nous avons
demandé à faire des réunions, sauf que
le Gouvernement n’a fait que chercher
des excuses et de chercher à gagner du
temps.
Par ailleurs, ce qui est étrange et
que nous ne trouvons pas innocent,
c’est ce qu’a fait le Gouvernement la
veille de la réunion de la commission
administrative des municipalités lorsqu›il a
signé la même convention avec les employés du
Ministère de la Santé, ce qui reflète une politique à
2 mesures dans son traitement des revendications
ouvrières et risque de semer la zizanie au sein du
Syndicat.
Après l’annonce de la grève des ouvriers
municipaux, des gens ont jeté des sacs poubelle
devant les locaux régionaux de l’UGTT et même
devant le siège central, et vous avez alors
directement accusé ENNAHDHA. Avez-vous des
preuves ?
Nous n’avons pas accusé Ennahdha sans
preuves, et nous n’accusons personne à tord.
Nos accusations se basent sur les témoignages
de syndicalistes locaux qui ont reconnu ces
personnes a�liés à Ennahdha. Nous disposons
aussi d’aveux enregistrés.
Les personnes arrêtées ont été livrées à la justice
qui leur a infligé des amendes de 4800 Millimes.
Que pensez-vous de ce jugement ?
L’UGTT va faire appel de ce jugement qu’il
considère ridicule par rapport au tord subi.
Nous demandons aussi à Ennahdha d’ouvrir
une enquête interne au sein de ses structures et
de ses bases, car si ses partisans peuvent ne pas
avoir reçu d’instructions, ils ont failli à leurs
responsabilités, ce qui est inacceptable.
Quelles sont les raisons de la discorde entre
l’UGTT et le parti ENNAHDHA ?
Il y a des raisons directes et des raisons profondes.
Les premières faisant suite à la grève des employés
municipaux alors que les profondes sont peut-
être dues aux positions du Syndicat par rapport
à plusieurs sujets. ENNAHDHA essaie aussi de
limiter le rôle de l’UGTT à celui de revendicateur,
sans plus ; ce parti cherche même à mettre la
main sur le Syndicat.
Plusieurs accusent la direction syndicale d’être
très proche des mouvements de gauche. Qu’en
pensez-vous ?
Les directions régionales et locales n’ont pas
changé et l’UGTT, étant proche des ouvriers,
est considérée de Gauche par nature. Ceci
n’empêche pas la présence de plusieurs tendances
politiques, des gauchistes, aux centraux modérés,
aux partisans de la droite. L’indépendance de la
centrale syndicale n’est pas menacée pour autant,
car de nombreux syndicalistes se sont sacrifiés
pour cette indépendance, et nous n’hésiterons pas
à la défendre encore plus.
Faites-nous une évaluation du travail du
Gouvernement …
Le Gouvernement exprime ce qu’il ne pense pas,
car d’une part il condamne les agressions contre
les locaux du Syndicat, mais ne se montre en
revanche pas déterminé à traiter avec sérieux des
sujets actuels tels que le chômage, la flambée des
prix ou encore la révision des systèmes de base du
Code du Travail.
Le problème essentiel est aussi l’absence de
réactivité. Le Gouvernement semble avoir
un agenda qu’il veut réaliser à tout prix sans
considérer l’opposition, les syndicats ou la société
civile.
J’ajoute à cela l’absence d’e�cacité, comme par
exemple son intervention tardive dans les zones
ayant subi de fortes précipitations de neige, où la
société civile a été plus e�cace, en attendant une
meilleure intervention dans les zones inondées.
Comment jugez-vous la diplomatie tunisienne ?
Ce que l’on remarque c’est que la diplomatie
a fait plusieurs erreurs, et qu’elle est en train
d’impliquer la Tunisie dans des agendas qui ne
sont ni les siens ni ceux des pays arabes, et qui
n’ont aucun intérêt pour la Tunisie maintenant.
Par rapport à la Conférence des amis de la Syrie,
notre position est claire : nous sommes
pour l’arrêt des tueries contre le peuple
syrien, et nous ne soutenons sous aucune
forme le régime Al Assad, mais nous
refusons toute intervention militaire
étrangère dans ce pays.
Par ailleurs, et en ce qui concerne la visite
du Premier Ministre en Arabie Saoudite,
il y a un point qui nous semble être très
grave, qui est la reconnaissance implicite
que Ben Ali soit un refugié politique en
Arabie Saoudite ce qui va à l’encontre des
principes de la révolution.
J’ajoute que la politique étrangère est
basée sur l’emprunt et l’hypothèque du
pays à l’étranger, et qui ne ramène ni pain
ni travail aux tunisiens.
Le Président de la République a
annoncé l’organisation prochaine d’élections
municipales. Est-ce possible en l’absence d’un
Code Electoral ?
Il est nécessaire d’entamer des réformes au niveau
des municipalités, sauf que l’on ne peut pas
précipiter les élections de cette façon sans un Code
Electoral clair consensuel, et sans préparations.
Je voudrais ici insister sur la nécessité de relancer
le Haut Comité Indépendant pour les Elections,
car on n’accepte plus de remettre les élections
au Ministère de l’Intérieur ou de permettre à
certains partis de les manipuler ; cela fera revenir
la dictature. Si ce Haut Comité n’est pas remis sur
pied, nous ferons pression par tous les moyens.
Les médias font constamment l’objet de
pressions et les journalistes sont agressés
presque tous les jours, qu’en pense le Syndicat ?
Ils font des médias un bouc émissaire pour y
essuyer leurs erreurs. Comme tous les secteurs,
l’information s’est libérée de la dictature, mais
ne peut pas bien sûr se débarrasser de ses e%ets
néfastes en si peu de temps. Ce n’est pas non
plus une raison pour museler ou domestiquer les
médias. Il ne faut pas aussi imposer des réformes,
car c’est aux gens du métier de le faire.
Manel Mejri
Sami Tahri, Secrétaire Général Adjoint de la Syndicale Ouvrière chargé de la Publication :
Les revendications du Syndicat sont urgentes et le Gouvernement ne cesse de promettre et de chercher à gagner du tempsLes relations entre le Gouvernement provisoire et l’Union Générale des Travailleurs Tunisiens (UGTT) a connu des remous ces derniers temps avec des d’accusations mutuelles ; le Gouvernement accuse l’UGTT de vouloir aggraver la situation alors que la Centrale Syndicale l’accuse de chercher à gagner du temps et de négliger les besoins urgents des travailleurs.Les positions de l’UGTT sur l’urgence des revendications et de leur légitimité et la façon avec laquelle les dossiers économiques sont traités ainsi que le travail du Gouvernement à l’intérieur et à l’extérieur ont fait l’objet de notre entretien avec M. Sami Tahri, Secrétaire Général Adjoint chargé de la Publication.