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Sida : une avancée vers le vaccin Un essai conduit en Thaïlande a montré qu'une double injection pouvait réduire de 31 % le risque de contracter le VIH. Un progrès encore insuffisant, tempèrent certains experts. developavantime.blogspot.com Sida : une avancée vers le vaccin LE MONDE | 25.09.09 | 15h57 Mis à jour le 25.09.09 | 15h57 Pur la première fois, un essai de vaccination contre le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) a permis d'obtenir une protection partielle : le risque d'infection est diminué de 31 % chez les personnes vaccinées par rapport à celles ayant reçu un placebo, ont annoncé, jeudi 24 septembre, ses organisateurs. "C'est un pas important, salue le professeur Jean-François Delfraissy, directeur de l'Agence nationale de recherche sur le sida et les hépatites virales (ANRS).Il reste cependant modeste et insuffisant. Nous n'avons pas encore un vaccin contre le sida." Incluant plus de 16 000 volontaires thaïlandais séronégatifs, l'essai combinait deux vaccins différents élaborés il y a une dizaine d'années. Le premier vaccin injecté était l'Alvac, fabriqué par Sanofi Pasteur, et le second Aidsvax B/E de VaxGen, qui en a cédé le brevet à l'ONG Global Solutions for Infectious Diseases, dirigée par le chercheur Don Francis, un vétéran de la lutte contre le sida. Les deux vaccins ciblant des souches circulant en Thaïlande étaient injectés l'un à la suite de l'autre sur une période de six mois, le second renforçant l'action du premier, selon la stratégie de primovaccination suivie d'un rappel ("prime-boost"). Dans le groupe placebo, 74 participants ont été infectés par le VIH, contre 51 dans le groupe ayant reçu la vaccination, une différence statistiquement significative. Le fait d'avoir été vacciné n'a pas affecté la charge virale (quantité de virus présents dans le sang) chez les volontaires qui ont contracté par la suite le VIH. Débuté en 2003, l'essai, baptisé "RV144", a été mené avec la participation du ministère thaïlandais de la santé publique. Les autres organisateurs étaient le programme de recherche sur le VIH de l'armée américaine, le ministère de la santé thaïlandais, les Instituts nationaux de la santé (NIH) américains, Sanofi Pasteur et Global Solutions for Infectious Diseases. "Très encourageant" Préalablement informés des risques potentiels du protocole et après avoir donné leur consentement, les volontaires étaient revus tous les six mois au cours des trois années suivant la vaccination, en recevant à chaque visite "des conseils sur la façon de prévenir l'infection à VIH", précisent l'armée américaine et Sanofi Pasteur dans un communiqué commun. "Les résultats de l'étude, qui représentent une avancée scientifique significative, constituent la première démonstration qu'un vaccin peut prévenir l'infection par le VIH dans la population générale adulte et ont une grande importance", ont déclaré l'Organisation mondiale de la santé et l'Onusida. "C'est très encourageant. Ces résultats montrent également que la stratégie "prime- boost" mérite d'être étudiée de manière approfondie", indique le docteur Catherine Hankins, conseiller scientifique en chef de l'Onusida.

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Sida : une avancée vers le vaccin Un essai conduit en Thaïlande a montré qu'une double injection

pouvait réduire de 31 % le risque de contracter le VIH. Un progrès

encore insuffisant, tempèrent certains experts.

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Sida : une avancée vers le vaccin LE MONDE | 25.09.09 | 15h57 • Mis à jour le 25.09.09 | 15h57

Pur la première fois, un essai de vaccination contre le virus de l'immunodéficience humaine

(VIH) a permis d'obtenir une protection partielle : le risque d'infection est diminué de 31 % chez les personnes vaccinées par rapport à celles ayant reçu un placebo, ont annoncé, jeudi 24 septembre, ses organisateurs. "C'est un pas important, salue le professeur Jean-François Delfraissy, directeur de l'Agence nationale de recherche sur le sida et les hépatites virales (ANRS).Il reste cependant modeste et insuffisant. Nous n'avons pas encore un vaccin contre le sida."

Incluant plus de 16 000 volontaires thaïlandais séronégatifs, l'essai combinait deux vaccins

différents élaborés il y a une dizaine d'années. Le premier vaccin injecté était l'Alvac, fabriqué

par Sanofi Pasteur, et le second Aidsvax B/E de VaxGen, qui en a cédé le brevet à l'ONG Global

Solutions for Infectious Diseases, dirigée par le chercheur Don Francis, un vétéran de la lutte

contre le sida.

Les deux vaccins ciblant des souches circulant en Thaïlande étaient injectés l'un à la suite de

l'autre sur une période de six mois, le second renforçant l'action du premier, selon la stratégie de

primovaccination suivie d'un rappel ("prime-boost"). Dans le groupe placebo, 74 participants

ont été infectés par le VIH, contre 51 dans le groupe ayant reçu la vaccination, une différence

statistiquement significative. Le fait d'avoir été vacciné n'a pas affecté la charge virale (quantité

de virus présents dans le sang) chez les volontaires qui ont contracté par la suite le VIH.

Débuté en 2003, l'essai, baptisé "RV144", a été mené avec la participation du ministère

thaïlandais de la santé publique. Les autres organisateurs étaient le programme de recherche

sur le VIH de l'armée américaine, le ministère de la santé thaïlandais, les Instituts nationaux de

la santé (NIH) américains, Sanofi Pasteur et Global Solutions for Infectious Diseases.

"Très encourageant"

Préalablement informés des risques potentiels du protocole et après avoir donné leur

consentement, les volontaires étaient revus tous les six mois au cours des trois années suivant la

vaccination, en recevant à chaque visite "des conseils sur la façon de prévenir l'infection à VIH",

précisent l'armée américaine et Sanofi Pasteur dans un communiqué commun. "Les résultats de

l'étude, qui représentent une avancée scientifique significative, constituent la première

démonstration qu'un vaccin peut prévenir l'infection par le VIH dans la population générale

adulte et ont une grande importance", ont déclaré l'Organisation mondiale de la santé et

l'Onusida. "C'est très encourageant. Ces résultats montrent également que la stratégie "prime-

boost" mérite d'être étudiée de manière approfondie", indique le docteur Catherine Hankins,

conseiller scientifique en chef de l'Onusida.

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Sida : une avancée vers le vaccin Un essai conduit en Thaïlande a montré qu'une double injection

pouvait réduire de 31 % le risque de contracter le VIH. Un progrès

encore insuffisant, tempèrent certains experts.

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Cette preuve du concept d'un vaccin contre le sida intervient deux ans après l'arrêt prématuré de

l'essai vaccinal Step du laboratoire Merck, en raison d'un plus grand nombre d'infection chez les

volontaires vaccinés que chez ceux servant de témoins. Cet échec avait suscité des critiques sur

l'ampleur des sommes consacrées à la recherche d'un vaccin contre le sida, étant donnée

l'absence de concrétisation. Annoncé à de nombreuses reprises depuis le début de la pandémie

de sida à des échéances allant de quelques années à une décennie, un vaccin contre le sida avait

pris des allures d'illusion.

S'il se réjouit de la bonne nouvelle que constituent les résultats de l'essai RV144, le professeur

Jean-François Delfraissy n'en demeure pas moins lucide : "L'outil vaccinal utilisé dans cet essai

est largement insuffisant et nous n'aurons pas un vaccin disponible sur le terrain à court

terme. Nous aurons besoin de poursuivre la recherche fondamentale pour comprendre

comment la protection partielle a été obtenue dans l'essai en Thaïlande : quels sont les

éléments, sur le plan immunologique, impliqués dans la protection et ceux impliqués en son

absence. Il nous faudra aussi une innovation technologique et explorer de nouvelles stratégies

avant d'avoir un vaccin contre le sida."

Evoquant de nombreux autres essais vaccinaux en cours, le professeur Jean-François Delfraissy

souligne l'importance que revêtira la conférence "Aids Vaccine 2009", qui se tiendra à Paris, du

19 au 22 octobre. Toutes ces nouvelles données y seront débattues.

Paul Benkimoun

Article paru dans l'édition du 26.09.09.