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1 Bulletin semestriel destiné aux adhé- rents de l’AUVNG (Association des Utilisateurs du VNG Ulmer) : Secrétariat : Daniele TUSSEAU 46 Ave de Mazargues 13008 Web : http://www.vng-ulmer.com Edité par SYNAPSYS S.A 58 r. Paul Langevin, 13013 Marseille PDG : Joël de ROSA Tel.:0491117575 Fax: 0491117555 E-Mail: [email protected] Web : http://www.synapsys.fr Rédaction /rubriques médicales : Erik ULMER, 88 bd Carnot, 06400 Cannes Tel: 0493395435 Fax:0493682501 E-Mail: [email protected] Rédaction techno-scientifique Frédéric BERNERT, Directeur général, Ing. R&D Ingénieurs R&D : Thierry BAGNOL Franck RICCI Céline DESCOTTES Ludovic VAN MACKELBERG Autres membres de Synapsys Responsable qualité : Laeticia BACONNIER Responsable fabrication et SAV : Bertrand COUREAU Technicien : Frédric MEURIN Responsable commercial Sud-Est Georges DAOUD Responsable des ventes posturo et stabilo à Paris : Vincent DE ROSA Responsables Export : Caroline JOSEPH Grégory ROUSSELOT Contrôle de gestion : Ludivine BOULLE Secrétariat : Tiana ROSAAS A l’intérieur de ce numéro Auteurs Page La biophysique des canaux Semicirculaires (Première partie) Transcription de la communication présentée par Pierre Paul VIDAL lors de la 8ème AG des utilisateurs du VNG dans les locaux des Laboratoires Beaufour Ipsen 24, rue Erlanger, Paris 16ème Le samedi 9 juillet 2005 Pierre-Paul VIDAL 2 À 12 Droits réservés : reproduction même partielle strictement interdite N°19 Janvier 2006

A l’intérieur de ce numéro Auteurs Semicirculaires · On m’a demandé de vous faire un exposé sur la biophysique des canaux semi- ... sensoriel présent dans l’oreille in-terne,

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Bulletin semestriel N°19 20,000 yeux sous l'ULMER janvier 2006

Bulletin semestriel destiné aux adhé-

rents de l’AUVNG (Association des

Utilisateurs du VNG Ulmer) :

Secrétariat : Daniele TUSSEAU

46 Ave de Mazargues 13008

Web : http://www.vng-ulmer.com

Edité par SYNAPSYS S.A

58 r. Paul Langevin,

13013 Marseille

PDG : Joël de ROSA

Tel.:0491117575 Fax: 0491117555

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Rédaction /rubriques médicales :

Erik ULMER,

88 bd Carnot, 06400 Cannes

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Rédaction techno-scientifique

Frédéric BERNERT,

Directeur général, Ing. R&D

Ingénieurs R&D :

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Autres membres de Synapsys

Responsable qualité :

Laeticia BACONNIER

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Technicien : Frédric MEURIN

Responsable commercial Sud-Est

Georges DAOUD

Responsable des ventes posturo et

stabilo à Paris : Vincent DE ROSA

Responsables Export :

Caroline JOSEPH

Grégory ROUSSELOT

Contrôle de gestion :

Ludivine BOULLE

Secrétariat : Tiana ROSAAS

A l’intérieur de ce numéro Auteurs Page

La biophysique des canaux Semicirculaires

(Première partie)

Transcription de la communication présentée par Pierre Paul VIDAL

lors de la 8ème AG des utilisateurs du VNG

dans les locaux des Laboratoires Beaufour Ipsen

24, rue Erlanger, Paris 16ème Le samedi 9 juillet 2005

Pierre-Paul VIDAL

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Droits réservés : reproduction même partielle strictement interdite N°19 Janvier 2006

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La biophysique des canaux semi-circulaires Par Pierre-Paul VIDAL

Laboratoire de neurobiologie des réseaux sensori-moteurs LNRS – CNRS Paris 5, Paris 7, 45 rue des Saint Pères

75270 Paris CEDEX 06 [email protected]

Tel 01 42 86 33 97 Tel 01 42 86 33 98 (sec.) Tel. 01 42 86 33 99 (fax.)

On m’a demandé de vous faire un exposé sur la biophysique des canaux semi-circulaires, ce qui a deux conséquences : - Premièrement vous ne verrez aucun résultat scientifique de notre groupe, - Deuxièmement vous allez, au cours des ¾ d’heure qui viennent, subir ce qu’il faut

bien appeler un cours. Ce n’est pas moi qui ai choisi le sujet, je tiens à le dire publiquement. J’aurais préféré premièrement vous exposer nos travaux, y compris nos nouveaux résultats, et deuxiè-mement ça me paraît relever du sadisme chez moi et du masochisme chez vous de faire de la biophysique canalaire un samedi matin à Paris. Mais enfin, comme je suis obéis-sant, je fais ce qu’on m’a demandé. Alors étant donné que c’est un exercice de type sa-domasochiste, je vous demande de m’interrompre si vous ne comprenez pas, si je ne suis pas clair, parce que sinon ça n’aurait plus aucun sens : ce serait souffrir pour rien avant l’heure du déjeuner. Et ainsi vous verrez que les concepts sont relativement sim-ples. En résumé la demande qui m’a été formulée revient à vous expliquer, en des ter-mes accessibles, pourquoi le capteur vestibulaire canalaire répond de manières diffé-rentes à différentes fréquences de stimulation. Alors j’espère que ça vous intéresse, car il y a des réponses biophysiques à cette question, et c’est pourquoi vous devez m’inter-rompre si quelque chose ne semble pas clair. Dans le même ordre d’idées vous trouve-rez ici les coordonnées du laboratoire, et par conséquent si par la suite vous avez des questions subsidiaires n’hésitez pas à m’envoyer un e-mail, ou à venir visiter le labora-toire. A présent je voudrais vous faire remarquer deux choses : - Premièrement que le système vestibulaire est l’un des seuls systèmes quantifiables

au niveau du cerveau. On peut quantifier à la fois les entrées, que ce soient les en-trées visuelles, ou vestibulaires, ou proprioceptives, et puis les sorties motrices et perceptives. Si vous y réfléchissez “ quantifier ”, au sens où les ingénieurs l’enten-dent, ça n’est pas « tiens, on dirait qu’il va à droite » , ou bien « tiens, on dirait qu’il va à gauche » , c’est quantifier de manière rigoureuse, avec des chaînes de mesure lourdes, l’entrée et la sortie. Si vous pensez par exemple à la vision vous pouvez quantifier l’entrée mais vous aurez du mal à quantifier la sortie, sauf à demander au sujet ce qu’il voit. Ce n’est pas le cas en ce qui concerne les contrôles du regard et de la posture. Ce qui est excitant dans ce métier, et ce qui est excitant je trouve dans le métier de l’ORL, c’est qu’on peut quantifier, encore une fois de manière extrê-mement précise, au sens physique du terme, les entrées et les sorties.

- Deuxièmement il y a trois niveaux d’explications épistémologiques qui peuvent être intéressants :

Premier niveau : l’étude comportementale Le premier niveau, sur lequel on s’attardera aujourd’hui, est un niveau classique qui dé-

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crit comment, à partir d’un capteur sensoriel présent dans l’oreille in-terne, et en passant par un modèle biophysique, on peut arriver à ex-pliquer en mesurant les entrées et les sorties ce qui se passe dans le cerveau. Le cerveau est a priori une boîte noire contenant des milliards de neurones, et l’intérêt du système vestibulaire c’est que, connaissant les entrées et les sorties, c’est-à-dire ici la rotation sinusoïdale de la tête, et puis la sortie qui est le mouvement oculaire, vous pouvez

enregistrer les neurones et reconstituer, avec un fil d’Ariane qui est la fonction du sys-tème, ce qui se passe entre une entrée et une sortie, et par conséquent voir comment les entrées sensorielles sont transformées en sorties motrices. C’est l’exercice auquel se li-vrent un certain nombre de Laboratoires dans le monde, dont le laboratoire de Michel Lacour et le mien. Deuxième niveau : la neuropharmacologie Il y a un deuxième niveau, qui vous intéresse en tant que médecins parce que c’est là

dessus que vous allez agir la plupart du temps avec les drogues que vous donnez à vos malades, c’est le niveau neurochimique où interviennent les propriétés intrinsèques de membrane. Au lieu d’étudier ce qui se passe dans le cerveau avec des animaux éveillés vous faites des tranches de cerveau, ou vous prenez le cerveau et vous le faites survi-vre dans une cuve, et vous contrôlez le milieu externe et interne. C’est donc qu’il y a un niveau intégré, comportemental, où on regarde plutôt les décharges de neurones, et puis il y a un autre niveau qui se fait plutôt dans une cuve et où on regarde la neuro-

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pharmacologie. Troisième niveau : la clinique Et enfin, le troisième niveau épistémologique, c’est bien entendu le niveau clinique

qui permet aussi de faire de la recherche fondamentale. J’attire votre attention sur le fait que vos malades sont certes des gens qu’il faut soigner. Mais, puisqu’il y a parmi nous des hospitalo-universitaires, c’est aussi un excellent modèle pour faire de la re-cherche sur le fonctionnement du cerveau. C’est-à-dire que vous apprendrez des cho-ses originales, qu’un chercheur dans son laboratoire ne peut pas apprendre, sur la ma-nière dont le cerveau régule son entrée, son contrôle du regard et de la posture, en fai-sant de la recherche cliniquement. A présent si vous considérez ces 3 niveaux épistémologiques, vous comprenez que le débat d’aujourd’hui se situe au premier niveau, c’est à dire au niveau de la biophysi-que des canaux, et au niveau de l’explication par la biophysique des canaux de ce qu’est la décharge du neurone. Je ne parlerai donc pas, et encore moins en présence de Monsieur Alain Sans qui est encore le grand spécialiste de la question, de l'aspect neurochimique et des traitements au niveau périphérique. A titre d’exemple je montrerai simplement cette image d’un cobaye vu de profil en radiographie, avec sa géométrie squelettique très particulière, et vous voyez qu’en enregistrant les neurones en extra-cellulaire, en enregistrant les neurones sur tranche, en enregistrant le cerveau de ce cobaye isolé dans une cuve, et en faisant un peu de biologie moléculaire, on arrive à jeter un pont sur le fossé qui sé-pare le niveau cellulaire du niveau biochimique, ainsi que du niveau “ propriétés de réseaux ”. Et l’objectif c’est, après avoir fait le pont entre ces trois niveaux, d’en tirer des applications pour la recherche clinique.

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La biophysique des canaux Alors on va partir très doucement, et aborder la biophysique canalaire. Les canaux sont situés de manière tridimensionnelle dans la tête, et je vais essentiellement vous parler de ce qui se passe dans le système horizontal. Un petit rappel sur le mode de fonctionnement est nécessaire, puisque c’est cela qui va expliquer la réponse fréquentielle des canaux. Vous avez ici l’ampoule du canal hori-zontal, vous avez des cellules ciliées qui se trouvent sur la crête ampullaire, et puis vous avez des cils qui sont pris dans une membrane qui est la cupule. Alors, quand vous accélérez, il y a un mouvement de la tête d’un côté, un mouvement de l’endolym-phe du côté opposé, ce mouvement de l’endolymphe va déformer la cupule, qui à son tour va déformer les cils, ce qui va induire un signal sur les fibres afférentes primaires. Notre objectif est de comprendre ce qui se passe entre l’accélération de la tête et la dé-charge du nerf.

Contrôle du regard et de la posture : morphologie du système de stabilisation

Alors je vous ai pris diffé-rentes images que j’ai trou-vées sur In-ternet pour que ce soit le plus clair possible : là vous avez

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une vue de profil, vous tournez le canal se-mi-circulaire d’un côté, vous avez une dé-formation de la cupule qui passe de son état initial à un état final ici, puis vous avez un mouvement dû au mouvement de l’en-dolymphe dans le canal, vous tournez la tête vers la gauche, l’endolymphe bouge vers la droite , vous avez une déformation de la cupule et puis vous avez des cils qui sont pris dans la cupule et qui vont s’incli-ner.

Intervention de Michel Lacour : “ il y a quelques temps une discussion a eu lieu, à laquelle je ne participais pas, j’y assistais en temps qu’auditeur libre. Et au cours de cette discussion un homme, qui paraissait d’une certaine compétence, prétendait que vu la viscosité de l’endolymphe, et vu le dia-mètre des canaux, un mouvement de la tête ne pouvait pas entraîner un mouvement des liquides dans le canal. ” Réponse de PPV : Je vais commencer par la phrase rituelle : je vous remercie cher collègue pour cette question absolument fascinante, et vraiment très intéressante. A présent ce que je vais vous mon-trer c’est que le coefficient de viscosité et le diamètre du canal sont soigneusement ajustés pour que ça puisse bouger, mais aussi pour que ça bouge peu, et en même temps pour que ça bouge plus ou moins bien selon les fréquences, pour des raisons liées à la viscosité, à l’inertie etc. raisons sur lesquelles on va revenir. Cependant les gens, tout à fait remarquables, qui expliquent que ça ne bouge pas oublient à mon avis deux choses : la première chose c’est la possibilité d’une atrophie des canaux. En effet, pendant l’évo-lution, un certain nombre de mammifères ont été contraints, après être sortis de l’eau il y a très long-temps, d’y retourner. Par exemple les baleines et les phoques. Or les phoques ont gardé un cou, tandis que les baleines ne l’ont pas fait. Et ce qu’on note chez les baleines c’est une atrophie de la lumière du canal semi-circulaire, qui devient non-fonctionnel. Donc au cours de l’évolution il y a des cas, et ce n’est pas le cas du phoque qui lui doit garder un système vestibulaire, où il y a une régression de la fonction des canaux. Et l’hypothèse c’est que cette régression s’opère par réduction du diamètre du canal. La deuxième chose c’est que bien entendu si vous êtes une souris vous ne bougez pas à la même fréquence que les éléphants. Or il y a des études allométriques très anciennes, qui ont fait l’ob-jet de plusieurs articles, et qui montrent que la taille des canaux semi-circulaires et la viscosité du li-quide sont calculées de manière à ce que le canal code de manière préférentielle le domaine de fré-quences correspondant aux mouvements de l’animal en question. C’est ce qu’on appelle une relation allométrique entre la taille de l’animal et la taille des canaux. Donc, pour résumer, il y a bien mouve-ment du liquide mais en fonction de l’évolution il y a d’une part, comme tu le disais, la possibilité d’une dégénérescence de l’appareil et, d’autre part, la possibilité d’une adaptation fonctionnelle de l’appareil à la taille de l’animal et à la nature de ses mouvements. Remarque d’Alain Sans : Je crois que votre illustration pour expliquer que la cupule bouge n’a qu’une valeur pédagogique, car manifestement les seuils de stimulation des cellules sont tels qu’il n’est pas nécessaire que ça bouge beaucoup

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Réponse de PPV : en effet ça ne bouge pas et ça ne bascule pas, et c’est ce que je vais vous mon-trer tout à l’heure, mais ce sont des images que j’ai trouvées sur Internet… Question de Michel Lacour : quant on parle de la manœuvre libératoire, pour faire partir les par-ticules, si ça ne bouge pas beaucoup comment peuvent elles partir ces particules ? Réponse de Sylvette Wiener Vacher : il y a des images magnifiques de labyrinthes membraneux dans lesquels on place des otolithes et on voit que ça progresse tout doucement. Donc ce n’est pas la rapidité du geste qui compte mais surtout le positionnement qui va aider à la migration, et du reste la manœuvre d’Epley est réalisée très lentement. Remarque de PPV : et puis il y a un phénomène bien connu en physiologie vestibulaire qui est l’habituation, car on parle toujours de cristaux qui se déplacent mais l’habituation joue sûrement aussi un rôle dans cette histoire et il ne faut pas l’oublier, et en tout cas c’est une hypothèse qu’il faut faire.

La transduction

Toujours dans le domaine du rappel vous connaissez le kinocil, et vous connaissez le stéréocil sur la cellule ciliée. Quand les cils bougent du stéréocil vers le kinocil ça excite, et quand ça bouge du côté opposé c’est inhibiteur. C’est-à-dire que le système vesti-bulaire, comme beaucoup de systèmes dans le cerveau, est un sys-tème qui a une décharge de base, ce qui lui permet soit de freiner, soit d’accélérer. Et cela dépend de la polarité des cellules qui se trouvent à la surface de l’épithélium sensoriel. Alors comment ça se passe concrètement ? Vous avez dans le cas de l’oreille interne des liquides qui sont particuliers car ils con-tiennent beaucoup de potassium en extracel-

lulaire, alors que la plupart du temps dans le système nerveux central vous avez beaucoup de sodium à l’extérieur et beaucoup de potassium à l’intérieur de la cellule. Or là c’est un gradient avec beaucoup de potassium à l’extérieur, et assez peu de potassium à l’intérieur. Et au moment où ça s’ouvre ça s’équi-libre, ce qui va introduire ce qu’on appelle une dépolarisation de la cellule. C’est-à-dire que vous faites rentrer des charges + dans une cellule hyperpola-risée, qui contenait initialement davantage de charges moins que de + pour faire une différence de potentiel, et quand il y a autant de charges + à l’inté-rieur qu’à l’extérieur de la cellule son potentiel de membrane va chuter, et c’est ce qu’on appelle une dépolarisation. Ce faisant, et pour être caricatural, vous allez aussi faire rentrer du calcium. Faisant rentrer du calcium dans la

cellule vous allez obtenir une libération de glutamate. Donc, vous faîtes rentrer du potas-sium, comme il y en a initialement peu à l’in-térieur et beaucoup à l’extérieur vous dépolari-sez la cellule. Quand vous dépolarisez la cel-lule vous ouvrez les canaux calciques, le cal-cium rentre, provoque une libération de petites vésicules qui se trouvent à la base et qui con-tiennent du glutamate. Le Glutamate à son tour dépolarise le nerf. Alors comment tout ça ren-tre ? Des chercheurs ont patché le kinocil. Le canal est sur le kinocil, et vous voyez il y a une espèce de porte avec des ressorts, et vous

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voyez que quand ça s’incline dans ce sens là le ressort va ouvrir la porte, alors que si on incline dans le sens inverse la porte se referme davantage. Et ce qu’il faut com-prendre c’est que la porte n’est jamais complètement ouverte ou fermée au repos, c’est-à-dire que vous avez en permanence une dépolarisation de votre système vesti-bulaire, vous avez une “ ligne de base ”. C’est comme la modulation de fréquence dont vous connaissez le principe : vous avez une porteuse que vous modulez, et donc il y a de l’information à la fois quand vous inhibez et quand vous excitez. Là la porte elle est toujours ouverte, ou plutôt entrebâillée, et donc il y a toujours du potassium qui rentre et il y a toujours une petite dépolarisation qui entraîne une fréquence de décharge au repos, et chez l’homme cette décharge atteint 80 à 100 potentiels d’ac-tion par seconde en permanence. Là dessus vous inclinez les cils à droite ou à gau-che : vous fermez la porte, il y a moins de neuromédiateurs, donc vous avez une baisse de vos afférences, vous ouvrez la porte et vous avez plus de potassium, plus de calcium, plus de neuromédiateur, et vous augmentez la décharge de vos neurones. Tout est là : un cil qui s’incline, un système de ressort, un système de porte, du po-tassium qui rentre etc, ça c’est le principe de base de la transduction. Ce qu’il faut surtout retenir c’est qu’au repos la porte n’est jamais tout à fait fermée ou tout à fait ouverte, si bien qu’on peut l’ouvrir ou la fermer davantage selon que l’on tourne la tête dans le sens excitateur ou inhibiteur, ce qui a pour effet de moduler la fréquence de décharge qui existait au repos. C’est donc ce que j’ai montré ici : vous inclinez les stéréocils vers le kinocil vous dépolarisez la cellule et vous augmentez la dé-

charge sur la fibre afférente primaire. A l’inverse vous fermez la porte, ça résulte en une hyperpolarisation de la cellule ciliée ce qui va baisser la décharge de repos.

D’autre part vous avez deux types de cellules, des cellu-les de type I et des cellules de type II. Parmi les innom-brables différences qui ont été montrées les cellules de type I ont un grand calice qui est une terminaison synap-tique des fibres afférentes primaires, alors que l’on trouve de petites terminaisons synaptiques en bouton sur les cellules de type II. Et ce qui a été montré à Montpel-lier c’est que la terminaison en calice est une terminai-son spécialisée qui permet probablement de régler le gain de ces cellules. Donc vous avez dans votre oreille interne des cellules de type I et de type II. Comme c’est

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très compliqué je vais caricaturer le problème : d’une manière générale, au niveau des afférents primaires plus ces derniers sont irrégulier, plus ils ont un gros diamètre, plus ils conduisent vite, et plus ils répondent aux hautes fréquences. Plus ils sont réguliers, plus ils ont un petit diamètre, plus le seuil de stimulation est bas, et plus ils co-dent pour les basses fréquences. Pourquoi ? Chez l’homme, comme chez tous les vertébrés, le jeu se joue entre les très basses fréquences, par exemple quand vous respirez et qu’en perma-nence les yeux montent et descendent, et les très hautes fréquences, par exemple ce que j’appelle dans mon cours l’effet Cantat : la baffe. Quand

on reçoit une baffe, s’il n’y a pas dans la tête un système qui répond aux hautes fré-quences, on peut en mourir. Savez vous quel est, en nombre de g, ce que prend un as-tronaute au décollage de la navette ? 8g. Combien un boxeur poids lourd prend quand il encaisse un coup de poing ? Entre 40 et 80g, selon les assurances qui ont demandé de telles mesures en raison des procès qui engagent des millions de dollars. Or la même cellule ne peut pas répondre à des fréquences de type respiratoires de l’ordre de 0,1Hz et aussi à des accélérations de plus de 10Hz, ce qui explique qu’il y a ait deux types de cellules ciliées. Mais tout ça est caricatural car en fait c’est un continuum en-tre d’un côté les très toniques et de l’autre les très phasiques. Alors, “ to make a long story short ” comme disent les américains, vous avez compris qu’il y a un système qui répond à des très hautes fréquences, et qu’il y va de votre vie, et que vous avez un système qui ré-pond aux très basses fréquences. Et qu’il est tout aussi important d’avoir à la fois une ré-ponse aux hautes et aux basses fréquences. Il est non moins vrai que c’est impossible d’avoir les mêmes cellules qui couvrent un spectre de fré-quences aussi large. Donc retenez qu’à la base de la crête ampullaire les cellules ciliées sont des cellules de type II, c’est-à-dire des cellules qui, en première approximation, répondent plu-tôt bien aux basses fréquences. Tout ça encore une fois est caricatural, c’est beaucoup plus compliqué que ça, mais je vous donne les idées fortes. Et en haut de la crête ampullaire vous avez des cellules de type I, et notez que la même fibre est reliée à plusieurs type I, et en bas de la crête à plusieurs type II, ce qui va augmenter la sensibilité. Et puis dans la partie intermédiaire vous avez à la fois des cellules de type I et de type II. Le problème c’est que cette partie intermédiaire per-sonne ne sait très bien comment elle fonctionne. En gros ce que Mère Nature et quel-ques millions d’années d’évolution ont fait, c’est d’avoir pris une ampoule comme celle-ci, et d’avoir calculé que pour que ça parte vite et bien la déformation se ferait le plus rapidement en haut de la crête où se trouvent les cellules de type I, tandis que le bas de la crête est plus adapté, pour des raisons de biophysique, aux basses fréquences. Et donc avec ce système là vous arrivez à couvrir une gamme de fréquence qui est énorme et va de 0 à 20Hz. Et si vous songez à vos malades privés de labyrinthes, de quoi se plaignent-ils ? Quand ils tapent avec le talon sur le sol lors de la marche ils ont

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des oscillopsies parce que c’est là que vous avez les hautes fréquences. Et il se trouve que dans le cerveau, en première approximation, le système vestibulaire est le seul, il est irremplaçable, à répondre aux très hautes fréquences. Pour caricaturer le système visuel est meilleur que le système vestibulaire dans les basses fréquences, mais ce qui est sûr c’est que si vous avez un déficit sur les hautes fréquences le sys-tème vestibulaire est en cause car les autres systèmes ne répondent pas. Donc voilà

ce que je voulais vous dire à propos de la transduction, et je terminerai par quelques images dont cette image d’un canal de grenouille isolé in vitro, image magnifique que je dois à la courtoisie de Madame Evelyne Ferrari, qui travaille sur cette prépa-

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ration, et vous voyez ainsi à quoi ressemble un canal isolé. Et puis ici vous avez les cils avec le kinocil, et une autre vue qui vous montre à quoi ça ressemble vraiment.

La biophysique du système de stabilisation Maintenant nous allons aborder la biophysique du système de stabilisation. Vous ve-nez de voir la structure des capteurs, et maintenant vous allez avoir la partie biophy-sique. Et d’abord un peu d’intuition… Alors pas de panique, on va d’abord se livrer à un exercice, j’ai réfléchi et je crois que le mieux ça va être de faire en premier un peu d’imagerie mentale. Imaginez que vous avez dans les mains un bol de soupe, et pas n’importe quelle soupe, une soupe

poireau/pommes de terre. Pourquoi poireau/pommes de terre ? Parce qu’il faut que ça soit viscoélastique. Vous mettez un morceau de beurre, comme on le faisait dans le temps, sur la paroi du bol pour qu’il tombe à la surface de la soupe tout en y restant en périphérie. Maintenant vous tournez votre bol de soupe vers la gauche, que fait le morceau de beurre? Il bouge par rapport à la paroi du bol et dans le sens opposé parce qu’effectivement la soupe, qui est viscoélastique, va être plus ou moins entraî-née avec les parois du bol, et le morceau de beurre sert d’indicateur du mouvement de la soupe. Si à présent vous repliez les parois du bol pour former un tube fermé, qu’on appelle un tore, donc vous imaginez l’équivalent d’un tuyau d’arrosage refer-mé sur lui-même avec la soupe à l’intérieur, et toujours le morceau de beurre : vous tournez le tore sur la gauche, que fait le morceau de beurre par rapport à la paroi ? Il tourne à droite. Mais là vous n’êtes pas encore au canal semi-circulaire, parce qu’à l’intérieur du tore, il faut rajouter un diaphragme élastique qui en obstrue la lumière.

(Suite page 12)

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Délégué Régional :

Dans ce numéro... La biophysique des canaux semi-circulaires Par Pierre-Paul VIDAL

Vous tournez alors vers la droite et que fait la membrane ? Elle bombe vers la gauche. Et si vous imaginez des cils à l’intérieur qui envoient leurs filaments dans cette mem-brane en caoutchouc alors ces cils vont bouger : et bien c’est ça un canal semi-circulaire. Ca paraît trivial mais ça ne l’est pas car qu’est-ce qu’on a mis en évidence dans tout ça ? On a mis en évidence un système élastique, c’est la cupule, un système visqueux, c’est la soupe, et on a considéré les frottements entre la soupe et les parois du bol. Donc vous avez le frottement du liquide, d’autant plus poisseux que le canal est de petit diamètre, et vous avez les forces de rappel de votre cupule qui d’abord se dé-forme, puis étant élastique tend à revenir à sa forme initiale, et enfin vous avez l’inertie qui va déterminer l’accélération avec laquelle vous allez bouger le liquide. Donc vous avez viscosité, élasticité, et inertie. C’est ça, un modèle de biophysique du canal, et vous concevez bien que le liquide ne va pas se déplacer de la même manière si vous bougez à haute fréquence ou si vous bougez à basse fréquence. Considérez en effet quelque chose de très poisseux, prenez par exemple la fameuse expression populaire “ tu rames dans la semoule ”, vous concevez que vous avancerez d’autant plus diffici-lement que le liquide dans lequel vous essayez de ramer est plus visqueux. Donc vous voyez bien intuitivement qu’il y a un rapport entre la fréquence du mouvement, la vis-cosité, les forces de rappel, l’élasticité etc. Considérez à présent l’inertie : quand vous poussez votre voiture, si vous donnez un grand coup à haute fréquence vous allez vous casser les poignets, donc quand vous poussez votre voiture vous allez de préférence appuyer progressivement. (suite au prochain numéro)

« La posturographie statique et dynamique est l'une des seules épreuves qui permette d'examiner l'équilibre dans sa globalité, le patient étant debout li-bre de ses mouve-ments. C'est dans ce sens qu'elle étudie la fonction d'équilibra-tion dans les condi-tions habituelles de vie. Avec la gamme SPS, SYNAPSYS vous pro-pose des produits in-novants issus d'une collaboration étroite avec la recherche fon-damentale »