60
Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique 27 Chapitre 1. : Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide - Etude bibliographique - 1.1. DIVERS TYPES DE COUPLES FLUIDE-PARTICULES EN SUSPENSION 29 1.1.1. TERMINOLOGIE UTILISÉE 29 1.1.2. PROCÉDÉS DE FABRICATION 30 1.1.2.1. Les émulsions 30 1.1.2.2. Les gels 31 Les gels organiques 31 Processus de polymérisation 31 Processus de polymérisation en émulsion 32 Les gels minéraux 33 Préparation des aérogels de silice 33 Application comme frigoporteur 34 1.1.2.3. La microencapsulation 34 Les méthodes d'encapsulation 34 Taille et qualité de la microcapsule 35 Procédés physico-chimiques 35 Procédés chimiques 37 Procédés mécaniques 38 1.1.3. STABILITÉ DE LA STRUCTURE DES PARTICULES 39 1.1.3.1. Forces de cisaillement 39 1.1.3.2. Cycles thermiques 39 1.1.4. CRITÈRES DE CHOIX DU COUPLE FLUIDE-PARTICULES 40 1.1.5. CARACTÉRISTIQUES DE LA SUSPENSION ÉTUDIÉE 42 1.1.5.1. Aspect de la suspension 43 1.1.5.2. Cycles thermiques 43 1.1.5.3. Conclusion 45 1.2. COMPORTEMENT RHÉOLOGIQUE 46 1.2.1. LOI DE COMPORTEMENT 46 1.2.1.1. Généralités 46 1.2.1.2. Cas particulier des mélanges diphasiques solide-liquide 47 Viscosité : influence de la taille et de la concentration en particules 47 Comportement du fluide étudié : le « coulis de glace stabilisé » 53 1.2.2. ECOULEMENT ET PERTES DE PRESSION 56 1.2.2.1. Pertes de pression régulières 57 Pour ρ p > ρ f 57 Généralités 57 Corrélations 58

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

27

Chapitre 1. : Fluide frigoporteur diphasique à changementde phase liquide solide - Etude bibliographique -

1.1. DIVERS TYPES DE COUPLES FLUIDE-PARTICULES EN SUSPENSION 29

1.1.1. TERMINOLOGIE UTILISÉE 29

1.1.2. PROCÉDÉS DE FABRICATION 30

1.1.2.1. Les émulsions 301.1.2.2. Les gels 31• Les gels organiques 31

Processus de polymérisation 31Processus de polymérisation en émulsion 32

• Les gels minéraux 33Préparation des aérogels de silice 33Application comme frigoporteur 34

1.1.2.3. La microencapsulation 34• Les méthodes d'encapsulation 34• Taille et qualité de la microcapsule 35

Procédés physico-chimiques 35Procédés chimiques 37Procédés mécaniques 38

1.1.3. STABILITÉ DE LA STRUCTURE DES PARTICULES 39

1.1.3.1. Forces de cisaillement 391.1.3.2. Cycles thermiques 39

1.1.4. CRITÈRES DE CHOIX DU COUPLE FLUIDE-PARTICULES 40

1.1.5. CARACTÉRISTIQUES DE LA SUSPENSION ÉTUDIÉE 42

1.1.5.1. Aspect de la suspension 431.1.5.2. Cycles thermiques 431.1.5.3. Conclusion 45

1.2. COMPORTEMENT RHÉOLOGIQUE 46

1.2.1. LOI DE COMPORTEMENT 46

1.2.1.1. Généralités 461.2.1.2. Cas particulier des mélanges diphasiques solide-liquide 47• Viscosité : influence de la taille et de la concentration en particules 47• Comportement du fluide étudié : le « coulis de glace stabilisé » 53

1.2.2. ECOULEMENT ET PERTES DE PRESSION 56

1.2.2.1. Pertes de pression régulières 57• Pour ρp > ρf 57

Généralités 57Corrélations 58

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

28

Modèle triple couche 60• Pour ρp < ρf 62

Synthèse des résultats expérimentaux 62Corrélation 63

• Remarque 631.2.2.2. Pertes de pression singulières 641.2.2.3. Diminution des pertes de pression 65• Suspension polydispersée 65• Ajout d’un tensio-actif 66

1.2.3. CONCLUSION 67

1.3. COMPORTEMENT THERMIQUE 68

1.3.1. COMPORTEMENT AU COURS DU REFROIDISSEMENT 68

1.3.1.1. Cas idéal 681.3.1.2. Cristallisation et fusion au sein des particules 68• Description de la surfusion 68• Paramètres jouant sur la surfusion 70

1.3.2. PROPRIÉTÉS PHYSIQUES 71

1.3.2.1. Propriétés des corps purs 71• Masse volumique 71• Capacité thermique massique 72• Conductivité thermique 721.3.2.2. Propriétés de la suspension 72• Masse volumique 72• Capacité thermique et chaleur latente de fusion 73• Conductivité thermique 73

Au repos 73En écoulement laminaire 73

1.3.3. TRANSFERT DE CHALEUR EN RÉGIME LAMINAIRE 77

1.3.3.1. Rappel sur les fluides monophasiques 77• Longueur d’établissement du profil hydraulique 78• Ecoulement complètement développé 78• Ecoulement non-établi thermiquement 781.3.3.2. Fluides diphasiques sans changement de phase 801.3.3.3. Fluides diphasiques avec changement de phase 811.3.3.4. Influence de certains paramètres sur les transferts de chaleur 83• Nombre de Stefan 83• Concentration en particules 83• Rapport des rayons canalisation/particules 83• Rayons des particules 84• Rapport des conductivités particules/fluide 84• Homogénéité de la suspension 84• Type de particules 85

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

29

Dans ce premier chapitre, nous présenterons dans un premier temps les différents couples de

fluide-particules utilisés comme frigoporteur diphasique en les classant suivant leur procédé

de fabrication et en examinant leurs critères de choix. Ensuite, nous parlerons de leur

comportement rhéologique, de leur lois de comportement et des pertes de charge. Pour finir,

nous étudierons le comportement thermique des suspensions en décrivant les propriétés

thermophysiques puis les transferts de chaleur pour les fluides monophasiques et des fluides

diphasiques liquide-solide sans et avec changement de phase.

1.1. Divers types de couples fluide-particules en suspension

1.1.1. Terminologie utilisée

Dans l’ensemble du document, une terminologie spécifique est utilisée. Afin de lever toute

ambiguïté, ce paragraphe est consacré à la définition de ces termes.

Particule : regroupe l’ensemble des structures en suspension dans le fluide porteur

(émulsions, cristaux de glace, gels organiques ou minéraux et microcapsules).

MCP (Matériau à Changement de Phase) : ce matériau est contenu dans les particules. Il est

choisi pour sa température de fusion et sa chaleur latente. Il change de phase au cours des

cycles thermiques.

Gels : ces particules sont constituées d’une matrice poreuse où le MCP est retenu dans les

pores par des forces de capillarité. Ces particules sont mises en suspension dans un fluide

non-miscible avec le MCP.

Microcapsules : le MCP est encapsulé dans une coque. Il y a donc une paroi étanche qui

sépare le MCP du fluide porteur.

Coulis de glace : ce fluide diphasique se compose de cristaux de glace en suspension dans une

solution aqueuse. Les cristaux sont formés sur les parois d’un échangeur à surface raclée.

Coulis de glace stabilisé : ce terme a été donné par le L. B. H. P. ( Laboratoire de

Biorhéologie et d’Hydrodynamique Physico-chimique) au fluide diphasique qu’il a mis au

point. Ce sont des particules de gels organiques contenant de l’eau et qui sont en suspension

dans une phase organique.

Page 4: Chapitre 1. - Portail documentaire SCD Doc'INSA | INSA de Lyon

Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

30

1.1.2. Procédés de fabrication

Il existe différents procédés pour mettre en suspension un fluide à changement de phase dans

un fluide porteur. Un des moyens, déjà mentionné dans l’introduction, est l’utilisation

d’échangeurs à surface raclée pour former des cristaux de glace en suspension dans une

solution aqueuse. Le but de cette étude est justement de mettre au point un frigoporteur

diphasique utilisant un échangeur de chaleur conventionnel. Il faut donc que les particules

gardent leur structure quel que soit leur état.

Dans le cas où les deux fluides sont miscibles, il est évident qu'ils doivent être séparés par une

membrane étanche. Les procédés de fabrication sont alors limités à l'encapsulation. Les

fluides organiques, dont les molécules sont de taille importante, peuvent être facilement

encapsulés par une membrane étanche. Par contre, il est délicat d'obtenir des microcapsules

chargées avec une phase aqueuse sans être confronté à des phénomènes d'exsudation. En

effet, les molécules d'eau qui sont de petite taille, arrivent à franchir le réseau polymérique de

la membrane.

Lorsque les deux phases sont non miscibles, le choix de procédés de fabrication est plus large.

La suspension peut être réalisée à partir :

− d'une émulsion stabilisée par des tensio-actifs ;

− d'un gel organique constitué d'une matrice polymère ;

− d'un gel minéral préparé par un procédé sol-gel ;

− d'une microencapsulation.

�������� /HV�pPXOVLRQV

Les émulsions sont réalisées à partir de deux fluides non miscibles. Le fluide à émulsionner

est versé sous agitation dans le fluide porteur et forme une dispersion de micro-gouttelettes.

Les émulsions sont intéressantes thermiquement car les deux fluides sont en contact direct.

Par contre elles doivent être soumises à une agitation permanente pour éviter la coalescence

des micro-gouttelettes entre elles. Généralement des tensio-actifs sont ajoutés pour les

stabiliser : ils enrobent les gouttelettes sous forme de micelles. En fonction de la quantité de

tensio-actifs, les micelles s'arrangent sous forme de sphères ou sous forme de plaquettes. Les

plaquettes sont intéressantes par leur stabilité et lorsqu'elles sont soumises à des forces de

cisaillement, elles se réarrangent pour former des microvésicules multilamellaires

(sphérulites), représentées sur la Figure 1. 1. Leur agencement est comparable aux "pelures

d'oignon".

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

31

Figure 1. 1 :Fabrication des sphérulites

Sous cette forme, l'émulsion est très stable, mais 40 à 60 % de la gouttelette est composée de

tensio-actifs. La taille des gouttes obtenues est de l'ordre du micromètre. Le fluide à

changement de phase est emprisonné sous forme de couches successives séparées par des

tensioactifs ce qui favorise le phénomène de surfusion.

�������� /HV�JHOV

Les gels d’origine minérale ou organique présentent une forte affinité avec les solutions

aqueuses. Leur structure poreuse “ ouverte ” vers le fluide porteur doit présenter une forte

affinité envers le fluide à changement de phase et, au contraire, une faible affinité envers le

fluide porteur. Par ailleurs, le fluide à changement de phase ne doit pas être soluble dans le

fluide porteur. Ces contraintes limitent les choix des couples fluides à changement de phase et

fluides porteurs.

• Les gels organiques

Les gels organiques, sous forme de dispersion, se présentent sous la forme d'un réseau

polymère, composé à 90 % d'eau, obtenu par un processus de polymérisation en solution. Ils

ne nécessitent, du fait de la matrice polymère, aucun enrobage préalable à leur utilisation.

Processus de polymérisation

Le mécanisme de polymérisation est une réaction radicalaire entre un monomère et un radical

libre. Il comprend trois étapes :

− une étape d'amorçage.

L'amorçeur se décompose sous l'action de la chaleur ou du pH en un radical libre. Il réagit

avec un monomère en lui transférant son électron non-apparié. La molécule de monomère

devient active.

Force decisaillement

Micelles sous forme de plaquettes Sphérulites

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

32

− une étape de propagation.

La molécule activée se combine avec un monomère voisin, lequel devient à son tour activé.

Cette chaîne active se combine avec une nouvelle unité. La chaîne de monomère continue à

croître jusqu'à épuisement de monomères libres ; le centre actif se déplaçant à l'extrémité de la

chaîne. La polymérisation développe ainsi un réseau plus ou moins complexe de boucles et de

branches interconnectées.

− une étape de terminaison.

L'extrémité de chaque ramification de la chaîne macromoléculaire est désactivée par une

réaction de recombinaison (union de deux macroradicaux par leurs liaisons terminales) ou par

une réaction de dismutation (transfert d'un atome d'hydrogène d'une macromolécule à l'autre).

Processus de polymérisation en émulsion

Le terme de polymérisation en émulsion est habituellement utilisé pour décrire le procédé qui

consiste à disperser à l'aide de tensio-actifs un monomère hydrophobe dans une phase

continue aqueuse. Le milieu initial est une solution aqueuse composée de gouttelettes de

monomères stabilisées par des tensio-actifs et de micelles de tensio-actifs. Une description

schématique du système est présentée sur la Figure 1. 2. La majeure partie du monomère se

trouve sous forme de gouttelettes au début de la polymérisation. L'amorceur est dissout dans

la phase aqueuse. Il se décompose pour générer un radical libre. Il se dépose

préférentiellement sur les micelles qui présentent une surface spécifique beaucoup plus grande

que les gouttelettes. Il amorce la polymérisation, ce qui transforme les micelles en particules

de polymères. La polymérisation se poursuit à l'intérieur des micelles qui sont constamment

alimentées en monomère au départ des gouttelettes via la phase aqueuse. Les gouttelettes

d'émulsion constituent en fait des réservoirs de monomères. Le produit final est une

dispersion colloïdale de particules polymérisées. La taille varie de 10 nm à quelques µm.

Figure 1. 2 : Représentation schématique de l'émulsion initiale

Micelle

Micelle

Gouttelette demonomèreMolécule de

monomère

Tensio-actif

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

33

Lorsque le monomère est hydrophile, le procédé est appelé polymérisation en émulsion

inverse. Le milieu de départ est une solution organique composée de gouttelettes de

monomères stabilisées à l'aide de surfactants à caractère hydrophile. Le mécanisme de ce

procédé n'est pas la réplique exacte du procédé de polymérisation en émulsion. La

polymérisation semble s'effectuer cette fois au sein de chaque gouttelette et les micelles

n'interviennent pas dans son déroulement.

• Les gels minéraux

Les solides "hyperporeux" permettent l'immobilisation de fluides sous forme de gels. De tels

matériaux sont peu nombreux et la famille des aérogels de silice présentent des porosités de

l'ordre de 97 %.

Préparation des aérogels de silice

La préparation est basée sur une méthode de chimie douce (qui n'exige ni hautes

températures, ni fortes pressions) appelée sol-gel. Un sol de silice est préparé en milieu

alcoolique par hydrolyse d'un précurseur de silice en présence d'un catalyseur et condensé

(prise en masse) en gel grâce au développement de réactions de polymérisation-condensation

de telle sorte que la phase liquide est maintenue "piégée" dans les pores du gel comme

indiqué Figure 1. 3. L'opération suivante est plus physique que chimique. Elle consiste à

sécher dans des conditions hypercritiques le gel sans détruire sa porosité de façon à récupérer

un matériau sec aussi poreux que le gel qui lui a donné naissance. Le séchage supercritique se

fait dans une autoclave à une température légèrement supérieure à la température critique.

Ainsi, le passage de la phase liquide à la phase vapeur se produit sans apparition d'une

interface. L'existence d'une interface dans un milieu poreux lors du séchage du gel par

évaporation classique, développe des forces de tension superficielle énormes sur la paroi des

pores qui entraînent l'effondrement de la structure.

Figure 1. 3: le principe de la méthode sol-gel

Sol (colloïdal) de silice Gel de silice Aérogel (matériau débarassé dela phase liquide)

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

34

Finalement un aérogel de silice est le résultat de la combinaison d'une étape chimique

(fabrication d'un gel à partir d'un sol) avec une étape physique (séchage dans des conditions

hypercritiques).

Application comme frigoporteur

Les aérogels présentent l'avantage d'offrir une forte porosité. Les forces de capillarité dans les

pores de 20 nm sont très importantes et permettent de stocker par rétention de nombreux

fluides. Cependant, l'eau réagit avec les atomes d'oxygène de la silice (SiO2) : les solutions

aqueuses solubilisent la structure poreuse empêchant leur stockage dans un aérogel de silice.

Pour les mêmes raisons, le fluide porteur ne peut être aqueux. Il est donc impératif que le

fluide à changement de phase et le fluide porteur soient de nature organique et que ces deux

fluides ne soient pas miscibles entre eux (ex : dodécane en suspension dans de l'éthanol). Ces

contraintes limitent l'application de l'aérogel de silice comme matrice de transport pour les

frigoporteurs.

�������� /D�PLFURHQFDSVXODWLRQ

La microencapsulation est une méthode de conditionnement d'un liquide dans une membrane

continue dans le but de disperser la matière encapsulée dans un fluide porteur quelconque. La

microencapsulation laisse donc un large éventail de choix sur le couple (matériel à encapsuler

(MCP) / fluide porteur) permettant de favoriser des critères thermiques et hydrauliques pour

leur sélection.

• Les méthodes d'encapsulation

Il existe de nombreuses méthodes pour produire des microcapsules qui se différencient les

unes des autres par des détails comme la solubilité du polymère formant la paroi, la taille des

particules, l'épaisseur et la perméabilité de la paroi, les propriétés physiques...

Pour la réalisation de frigoporteur, trois principaux types de procédés peuvent être utilisés :

− les procédés physico-chimiques : coacervation (séparation de phases), évaporation d'un

solvant dans une émulsion ;

− les procédés chimiques : polymérisation interfaciale, réticulation ou polymérisation

d'une émulsion ;

− les procédés mécaniques : pressage + enrobage, séchage d'une pulvérisation.

La Figure 1. 4 récapitule les différentes méthodes d'encapsulation et le domaine de tailles

obtenues.

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

35

Figure 1. 4 : Tailles des particules obtenues en utilisant différents procédés d'encapsulation

• Taille et qualité de la microcapsule

Dans le procédé de fabrication, plusieurs facteurs influent sur la taille et la qualité des

microcapsules.

Leur taille dépend :

− du taux de cisaillement lors de la fabrication de l'émulsion ;

− des viscosités des phases de l'émulsion ;

− des proportions de chaque phase ;

− de la concentration et de la nature des différents composés ;

− du profil de température durant la production.

Leur qualité dépend :

− du choix du solvant ;

− du mélange de solvants utilisés ;

− de la solubilité dans l'eau des agents actifs ;

− du taux d'extraction du solvant ;

− du type et de la masse moléculaire du film polymère ;

− de la cristallinité du film polymère.

Procédés physico-chimiques

Coacervation ou séparation de phases

Ce procédé consiste en l'enrobage d'une émulsion par un film polymère précipité à partir

d'une solution colloïdale de ce polymère déstabilisée par un changement physique ou

chimique du milieu : variations de composition, de pH ou de température, ajout d'un produit

non-solvant pour le polymère...

microns

Coacervation

Polymérisation interfaciale

Evaporation de solvant/émulsion

Réticulation dans une émulsion

110-1 10 102 103 104

Zone de tailles préférentielles

Tailles accessibles si leprocédé est adapté

Pressage+enrobage

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

36

Initialement, ce précipité se présente, au sein de la solution colloïdale, sous la forme de micro-

gouttelettes de 1 nm à 0,5 µm, appelées "coacervats", riches en polymères et visqueuses. Puis

les coacervats tendent à coalescer ou à s'adsorber sur les gouttelettes de l'émulsion à enrober.

Pour éviter leur coalescence et favoriser au contraire l'enrobage, un colloïde protecteur a dû

être préalablement dissous dans la solution colloïdale. Les coacervats adsorbés coalescent en

un film continu. Enfin, la solidification de l'enrobage est obtenue de diverses manières :

refroidissement, désolvatation plus prononcée ou réticulation par irradiation. Les

microcapsules obtenues font, en général, moins de 1,25 mm, avec une épaisseur de paroi

élastique de 1 à 50 µm et une teneur en produit encapsulé supérieure à 60 %.

Figure 1. 5 : Les différentes étapes de la microencapsulation par coacervation

Encapsulation d'une émulsion par évaporation du solvant

Le procédé d'encapsulation par évaporation du solvant est expliqué sur la Figure 1. 6. Ce

procédé permet d'obtenir des sphères de quelques microns à quelques centaines de microns.

L'étape d'évaporation doit être étudiée de façon à éviter, ou du moins limiter, la cristallisation

du MCP pendant la solidification du film polymère.

Figure 1. 6 : Procédé d'encapsulation par évaporation du solvant

Phase organiquesolvant volatil + polymère

Phase aqueuseeau + tensioactifs

Formation del'émulsion

Evaporation dusolvant

∆TRéduction

de lapression

Etape 1 Etape 2

Etape 1 :Préparation de

l'émulsion du MCPdans une solution

colloïdale

Etape 2 :Coacervation

grâce à des agentschimiques

Etape 3 :Déposition dupolymère et

formation d'unfilm continu

Etape 4 :Solidification de

l'enveloppe

émulsion

solutioncolloïdale

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

37

Procédés chimiques

Polymérisation interfaciale

La polymérisation interfaciale est le principal procédé chimique utilisé pour l'encapsulation.

La membrane prend naissance à l'interface d'une émulsion par condensation de deux

monomères précurseurs, respectivement dissous dans chaque phase liquide, la nature de la

membrane polymérisée dépendant du choix de chaque monomère précurseur. Typiquement la

réaction de polymérisation se fait entre un chlorure de diacide (monomère précurseur de la

phase organique) et un amine ou un alcool (monomères précurseurs de la phase aqueuse). La

membrane formée est un polyamide, un polyester, un polyuréthane, un polycarbonate ou un

polyurée. Le procédé d'encapsulation se fait en deux étapes. Dans un premier temps, le MCP

et son monomère précurseur sont dispersés sous forme d'émulsion. Ils ne doivent pas réagir

entre eux. Cette étape rapide est la plus délicate du procédé. Ensuite, l'émulsion est introduite

lentement, pendant environ 4 h, dans une phase organique, si le MCP est hydrophile, ou dans

une phase aqueuse, si le MCP est hydrophobe. La vitesse de polymérisation étant supérieure à

la vitesse de diffusion du précurseur dissout dans la phase continue qui contient l'autre

monomère, le polymère se forme presque exclusivement à l'interface et croît du côté

organique de l'interface. Les microcapsules obtenues ont une taille d'environ 15 µm et une

épaisseur de paroi variable de 1 à 3 µm représentant 10 à 15 % de la masse totale.

Figure 1. 7 : Encapsulation par polymérisation interfaciale

Réticulation d'une émulsion

Le procédé de fabrication par réticulation se divise en trois étapes :

− formation d'une émulsion stable du polymère + MCP dans un liquide non miscible ;

− réticulation par réaction chimique ou par chauffage du polymère dans l'émulsion ;

− récupération des micro-particules par filtration, décantation ou centrifugation.

Phase organique(si MCP hydrophile)

ouphase aqueuse

(si MCP hydrophobe)MCP

+Monomère A

-(A-B-)-n

Monomère B

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

38

Les micro-particules sont ensuite mises en suspension dans un fluide porteur qui présente des

caractéristiques hydrauliques et thermique intéressantes pour former le frigoporteur.

La réaction de réticulation ne doit pas s'accompagner d'agglomération de particules entre

elles. Ceci implique une agitation permanente durant la fabrication et l'utilisation de

stabilisateurs. Des polymères d'origine naturelle sont largement utilisés dans ce procédé,

comme des polysaccharides (agarose, alginate...) ou des protéines (gélatine, albumine...). Les

particules obtenues font quelques micromètres.

Polymérisation d'une émulsion

Cette méthode diffère de la polymérisation interfaciale par le fait qu'un seul monomère est

utilisé. L'initiation de la réaction de polymérisation se fait en ajustant le pH. Le principal

désavantage de ce procédé réside dans la nature toxique du monomère résiduel.

Procédés mécaniques

De nombreuses technologies ont été développées pour l'encapsulation. Les deux retenues pour

cette étude sont :

− le séchage d'un jet pulvérisé ;

− le compactage d'une poudre de MCP à l'état solide puis enrobage.

Séchage d'un jet pulvérisé

Le MCP est mélangé dans une solution organique ou aqueuse de polymère. Le mélange est

atomisé par une buse d'injection dans un courant d'air chaud (150-200 °C). Le solvant du

polymère s'évapore entraînant la solidification du polymère autour du MCP.

Compactage d'une poudre de MCP à l'état solide puis enrobage

Les différentes étapes de ce procédé de fabrication se font en dessous de la température de

fusion du MCP afin qu'il soit à l'état solide. Par broyage, le MCP est mis sous forme de

poudre, puis compacté pour former des pilules. L'étape d'enrobage peut se faire par

pulvérisation d'un solution de polymère dans un lit fluidisé. Les particules solides de MCP

sont fluidisées dans un écoulement d'air; la solution de polymère est pulvérisé dans le lit

fluidisé et se dépose sur les particules mouvantes. Le solvant s'évapore et le film de polymère

se solidifie autour de la particule.

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

39

1.1.3. Stabilité de la structure des particules

La stabilité de la structure des particule est indispensable si elles sont utilisées comme moyen

de transport du froid. Cependant, lors du transport, la suspension est soumise à des

cisaillements mécaniques issus du pompage et des cisaillements hydrauliques. Les particules

sont alors étirées et subissent des distorsions importantes. De plus, lors des cycles thermiques,

leur volume varie (environ de 10 %) ce qui détériore leur paroi interne.

�������� )RUFHV�GH�FLVDLOOHPHQW

Yamagishi et al. (1996) ont soumis à des cycles de pompage un mélange contenant 20 % en

volume de paraffine encapsulés dans une double enveloppe de polymères (5 < dp < 1000 µm)

en suspension dans de l'eau. Ils ont observé que le taux de microcapsules détériorées décroît

avec leur taille. Celles de petites tailles sont plus résistantes et supportent mieux les

contraintes de cisaillement dues à l'écoulement. Les microcapsules de 5 à 10 µm conservent

leur structure sur plusieurs cycles de pompage.

Dans un écoulement avec un taux de cisaillement donné, les particules ayant un diamètre

inférieur à un diamètre critique ne seront pas détériorées.

�������� &\FOHV�WKHUPLTXHV

Roy et Sengupta (1991) ont étudié la tenue thermique et mécanique de microcapsules sous

100 cycles thermiques. Deux types de microcapsules ont été testés. Le premier contient du n-

eicosane comme fluide à changement de phase et sa paroi occupe 30 % du volume. Le second

est rempli d'acide stérique et sa paroi n'occupe plus que 15 % du volume. Dans les deux cas

les parois sont en PVA (polymère) et trois tailles de microcapsules sont étudiées : 50 µm,

100 µm et 250 µm. Des tests supplémentaires seraient nécessaires pour tirer des conclusions

solides de ces travaux, mais leurs résultats montrent que le deuxième type de microcapsules

ne résiste pas à des cycles thermiques répétés alors que le premier type a une structure stable

et ses propriétés thermiques ne sont pas altérées. Ces observations corroborent bien l'équation

de Laplace-Young :

++=∆

p

p

d

edP

21

114

σ(1-1)

avec ∆P la différence de pression entre l’intérieur et l’extérieur d'une particule sphérique, σ

(Pa.m) la tension de surface de la paroi, dp le diamètre et e l'épaisseur des parois des

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

40

microcapsules. La structure des microcapsules s'effondre lorsque la pression externe devient

supérieure à la pression interne. La tenue mécanique de la structure dépend de sa pression

interne, donc du rapport entre l'épaisseur de la paroi et du diamètre des particules : plus les

particules sont grosses, plus leur paroi doit être épaisse pour qu'elles aient une structure

solide. Yamagishi et al. (1996) ont soumis également leurs particules à 5000 cycles

thermiques. Ils confirment que des particules de 5 µm ne se cassent pas au cours des cycles et

que leurs propriétés thermiques restent inchangées. Le problème de l'expansion volumique

lors du changement de phase peut être évité en choisissant une paroi flexible.

Ce problème de tenue thermique et mécanique sous cyclages pour des microcapsules d'une

certaine taille, diminue leur intérêt pour des applications industrielles, car si les parois

occupent 30 % de la matière transportée, c'est autant de moins de froid stocké pour le

changement de phase. Par ailleurs, lorsque les particules sont petites (< 300 µm) le

phénomène de surfusion apparaît. Ces différentes raisons expliquent partiellement

l’orientation de l’étude vers des particules à base de gel organique : la matrice en polymère en

n’occupant que 10 % du volume garde une bonne tenue mécanique et sa souplesse encaisse

les variations de volume lors des changements de phase.

1.1.4. Critères de choix du couple fluide-particules

Le choix d’un fluide frigoporteur est le résultat d’un compromis entre des critères de natures

fort diverses :

− performances énergétiques élevées, conditionnées par les propriétés

thermophysiques du fluide ;

− sécurité élevée, conditionnée par des caractéristiques d’inflammabilité,

d’explosivité et de toxicité ;

− impacts environnementaux limités, conditionnés par de nombreux paramètres

suivant que la pollution des eaux, des sols ou de l’air est prise en compte ;

− critères techniques variés qui incluent la compatibilité avec les matériaux, les

effets du vieillissement, la facilité de mise en œuvre du produit ;

− critères économiques : prix du produit, disponibilité...

Le Tableau 1-1 rassemble les principaux paramètres qu’il serait nécessaire de connaître pour

assurer une caractérisation complète du fluide.

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

41

Tableau 1-1: Critères de caractérisation des fluides frigoporteurs

La difficulté que l’on rencontre pour établir une hiérarchie des fluides existants sur le marché

ou pour évaluer l’intérêt futur d’un fluide nouveau réside en deux points :

Les principaux critères pourles fluides frigoporteurs

Critères secondaires Propriétés caractéristiques

1/ Critères énergétiques 1a/ Pompabilité et réduction de lapuissance de pompage

1b/ Transfert de chaleur et réduction desécarts de température entre fluidefrigoporteur et frigorigène

-point de congélation-point d’ébullition-relation température/pression desaturation-masse volumique-capacité thermique-conductivité thermique-viscosité dynamique-coefficient de dilatation-tension superficielle

2/ Critères de sécurité 2a/ Inflammabilité

2b/ Dangers pour l’homme

2c/ Dangers pour les biens

-point éclair (liquide )-point d’inflammation (liquide)-LIE et LES (vapeur)-produits de séparation ou dedécomposition en casd’inflammation

-contact avec la peau et les yeux-ingestion-inhalation

-danger pour les produitsalimentaires (contact direct ouindirect possible)-incompatibilité avec certainsmilieux à refroidir-incompatibilité avec certainsfrigorigènes

3/ Critères environnementaux3a/ Pollutions des eaux et des sols

3b/ Pollutions atmosphérique (par lesvapeurs ou les produits dedécomposition)

-mobilité et dispersabilité-persistance dans le milieu-bioaccumulation-écotoxicité

4/ Critères techniques 4a/ Compatibilité avec les métaux4b/ Compatibilité avec les matièresplastiques et les élastomères4c/ Aptitude à favoriser la corrosion4d/ Comportement avec l’eau4 e/ Vieillissement du liquide4f/ Mise en œuvre4g/ Précautions d’emploi4h/ Maintenance4i/ Conditions de transport -suivi recommandé (mesure de PH,

densité…)-prélèvement et analyse

-réglementation-type d’emballage

5/ Critères économiques 5a/ Prix du produit

5b/ Disponibilité

6/ Autres critères 6a/ Réglementation spécifique

6b/ Références et niveau desexpériences acquises avec ce fluide

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

42

− le besoin de données fiables sur de nombreuses caractéristiques des fluides,

caractéristiques diverses comme l’énoncé des critères le montre dans le tableau

précédent : seuls les fluides les plus courants aujourd’hui (glycol, par exemple)

sont suffisamment documentés pour permettre l’établissement d’une fiche de

caractérisation complète. Ceci peut constituer et constitue effectivement un frein

aux innovations puisque l’effort de caractérisation d’un nouveau fluide pourrait

apparaître comme très onéreux. Il est clair que seuls les fluides innovants,

présentant une avancée significative par rapport aux fluides actuels sur l’un ou

l’autre des critères énoncés, ont une chance de s’imposer ;

− l’importance relative des critères et l’évolution future de cette

classification : par exemple, aujourd’hui les critères économiques peuvent être

considérés comme primordiaux mais des réglementations éventuelles sur la

consommation énergétique ou les rejets peuvent évidemment positionner les

critères énergétiques et environnementaux comme prioritaires.

Notre démarche privilégie des solutions à faibles impacts énergétiques et environnementaux

tout en recherchant des alternatives aux fluides actuels qui soient économiquement viables.

Ce dernier aspect reste toutefois difficile et parfois fort aléatoire à évaluer car les techniques

mises en œuvre (en particulier, les techniques de production) qui peuvent s’appliquer

aujourd’hui à de faibles quantités de fluides sont sans commune mesure avec les quantités de

fluides frigoporteurs nécessaires pour les applications industrielles, agro-alimentaires, du

froid commercial et du conditionnement d’air.

1.1.5. Caractéristiques de la suspension étudiée

La suspension étudiée se compose de particules de gel organique, fabriquées par le L. B. H .P.

(laboratoire de Biorhéologie et d’Hydrodynamique Physicochimique), suivant le procédé

décrit dans le paragraphe 1.1.2.2. Le MCP est de l’eau. Ainsi les températures de l’étude sont

centrées autour de 0 °C. En extension à ces travaux, il sera possible de modifier le procédé de

fabrication pour insérer un eutectique congelant à des températures négatives. Le fluide

porteur fourni par le L. B .H. P., un mélange de 89 % d’huile Shell Clavus 15 et de 11 %

d’huile Rhodorsil 550, a une masse volumique proche de celle de la glace mais une viscosité

très importante (de l’ordre de 160 mPa.s à 0 °C). Ce fluide, aux températures négatives,

nécessite une puissance de pompage trop importante pour qu’il soit économiquement viable.

Nous l’avons donc remplacé par une huile thermique Syltherm HF. Cette huile est

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

43

intéressante pour sa faible viscosité (2,6 mPa.s à 0 °C), sa densité (892 kg.m-3 à 0 °C), sa

température de congélation (- 82 °C) et sa faible toxicité (sans odeur, non corrosive).

Une suspension de particules concentrée à 15 % (en masse) est testée sous cyclage thermique

afin d’observer son comportement. La procédure expérimentale consiste à immerger le bécher

qui contient la suspension dans un bain thermostaté à température constante. Les

refroidissements sont effectuées avec trois températures de bain différentes : - 10 °C, - 15 °C

et – 20 °C. La suspension est agitée en permanence pour éviter que les particules sédimentent

au fond du bécher. Au préalable, des essais sont faits avec de l’huile pure pour servir de

référence.

�������� $VSHFW�GH�OD�VXVSHQVLRQ

− A température ambiante (+20 °C) :

La densité relative des particules sur l’huile étant de 1,144, le mélange n’est pas homogène au

repos. Une agitation importante est nécessaire pour maintenir les particules en suspension.

Les particules ne s’agglomèrent pas entre elles.

Elles ont un aspect translucide.

− A –10 °C :

La densité relative n’est plus que de 1,016. Une agitation très faible est suffisante pour obtenir

une suspension homogène.

Les particules en se congelant deviennent blanches.

Elles ne s’agglomèrent pas entre elles, mais se fixent sur les parois froides du bécher et

forment une couche qui s’épaissit dans le temps.

�������� &\FOHV�WKHUPLTXHV

Des enregistrements de la température de la suspension au cours du temps, comme ceux

représentés sur la Figure 1. 8, ont mis en évidence la présence de surfusion lors de la

congélation des particules mais ce phénomène dépend de l’écart de température entre la

suspension et le bain thermostaté. Pour un bain à – 10 °C, la température de la suspension

descend à -2 °C avant que l’on observe une légère remontée en température qui indique la

rupture de surfusion. Pour les bains à –15 °C et –20 °C, on n’observe plus cette remontée en

température lorsque les particules commencent à congeler.

Lors du changement de phase, alors que les particules restent à 0 °C, la température de la

suspension continue à descendre sur un intervalle de température de [- 1,3 ; - 3,5 °C]. Il

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

44

semble donc que le flux froid apporté par le bain est supérieur à celui dégagé par les

particules. Il est important de souligner que la température mesurée n’est pas celle des

particules mais celle de la suspension. Par conséquent, s’in n’y a pas équilibre thermique entre

les particules et l’huile porteuse, il est normal de ne pas observer de « plateau » horizontal en

température, caractéristique du changement de phase.

Tem pérature du bain : - 10°C

-10

-5

0

5

10

15

0 100 200 300 400 500 600 700tem ps (s)

T (

°C)

avec particulessans particule

Tem péra ture du ba in : - 15°C

-15

-10

-5

0

5

10

15

0 200 400 600 800 1000 1200tem ps (s)

T (

°C)

avec particu lessans particu le

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

45

Figure 1. 8 : Allure du refroidissement d’une suspension concentrée à 15 % en masse pour différentestempératures de bain thermostaté

�������� &RQFOXVLRQ

La suspension étudiée présente un aspect satisfaisant lorsque les particules sont congelées.

Elle est homogène et les particules ne forment pas d’agrégats. Cependant, certains points

observés risquent d’être problématiques lors de la circulation du fluide frigoporteur dans une

installation :

− à température ambiante, dans un écoulement laminaire, les forces de cisaillement

risquent d’être insuffisantes pour entraîner les particules ;

− le risque de la formation d’une couche de particules congelées sur les parois froides

n’est pas à exclure. Elle aurait pour conséquence de ralentir les échanges thermiques

avec le frigoporteur et de boucher l’échangeur (la suspension étudiée semble présenter

les mêmes désavantages que le coulis de glace) ;

− la viscosité de la suspension augmente fortement lors du changement de phase des

particules. Cette augmentation est due à la présence des particules car la viscosité de la

phase porteuse ne varie pas autant dans cette gamme de température. Lors du

changement de phase, le volume occupé par le MCP augmente entraînant la formation

de dendrites en périphérie de la structure poreuse. Ces dendrites s’accrochent entre

elles et les particules forment des agglomérats.

Tem p éra tu re du ba in : - 20°C

-20

-15

-10

-5

0

5

10

0 100 200 300 400 500 600 700 800tem ps (s )

T (

°C)

a vec p a rticu lessans particu le

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

46

1.2. Comportement rhéologique

1.2.1. Loi de comportement

�������� *pQpUDOLWpV

La rhéologie des fluides a pour objectif la caractérisation des produits par l’expression de

relations contraintes-déformations liées à leurs propriétés mécaniques. Cette caractérisation

permet de les classer en trois catégories principales :

• les fluides non-visqueux appelés fluides de Pascal : ils sont caractérisés par une

contrainte de cisaillement τ toujours nulle ;

• les fluides newtoniens qui présentent une proportionnalité entre la contrainte de

cisaillement τ et la vitesse de déformation γ� : γµτ �= où µ est la viscosité dynamique du

fluide qui est alors constante ;

• les fluides non newtoniens : cette catégorie regroupe l’ensemble des fluides qui ne

suivent pas cette relation de proportionnalité et pour lesquels on définit une viscosité

apparente. Ils sont généralement divisés en trois groupes :

− les principaux sont les fluides ayant un comportement indépendant du temps ou de la

durée de sollicitation.

Ils suivent le modèle d’Herschel-Bulkley (H-B) tel que :

n

kγττ �+= 0 (1-2 )

où τ0 est la contrainte de cisaillement minimale, appelée seuil de plasticité, nécessaire

pour amorcer le mouvement du fluide. k et n sont respectivement le coefficient de

consistance et l’indice de comportement du fluide. Dans le cas particulier où τ0 = 0, le

fluide est dit d’Ostwald et son comportement est défini par une loi en puissance :

n

kγτ �= (1-3)

Un fluide vérifiant une loi en puissance sera dit :

9 pseudoplastique ou rhéofluidifiant lorsque 0 < n < 1. La caractéristique

principale de ces fluides est une diminution de la viscosité apparente lorsque le

gradient de cisaillement augmente. Cependant, à faible taux de cisaillement

( 110−<γ� s-1), ces fluides ont généralement un comportement newtonien ;

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

47

9 dilatant ou rhéoépaississant si n > 1. Ces fluides se caractérisent par une

augmentation de la viscosité apparente avec le taux de cisaillement ;

9 plastique de type Bingham lorsque n = 1 et k = µ :

γµττ �+= 0 (1-4)

− les fluides ayant un comportement dépendant du temps : la contrainte de cisaillement

évolue avec la durée de sollicitation. Dans cette famille, on trouve les fluides

thixotropes (la viscosité apparente diminue avec le taux de cisaillement et le temps) et

les fluides rhéopexes (le phénomène est inversé). Les rhéogrammes de tels fluides

présentent une boucle d’hystérésis ;

− les fluides viscoélastiques qui présentent certaines caractéristiques du solide. Ils ont la

particularité de conserver leur structure propre pour des sollicitations plus importantes

que celles provoquant la rupture de la structure des autres fluides non newtoniens.

La Figure 1. 9 schématise la forme des rhéogrammes associée aux principaux types de

comportements rhéologiques.

Figure 1. 9 : Rhéogramme schématique de fluides newtoniens et non newtoniens

�������� &DV�SDUWLFXOLHU�GHV�PpODQJHV�GLSKDVLTXHV�VROLGH�OLTXLGH

• Viscosité : influence de la taille et de la concentration en particules

La viscosité dynamique d’une suspension diphasique, µs, dépend de celle du liquide, µf, de la

température, de la concentration volumique, cv, de la dimension et de la forme des particules

solides et des interactions entre ces particules et le liquide. La complexité d’évaluation de la

viscosité d’une suspension a amené la majorité des auteurs à décomposer les différents

paramètres. Ils construisent leur analyse en partant de l’équation d’Einstein valable pour des

suspensions très diluées (cv < 2 %), en écoulement laminaire, avec des particules sphériques

τ

γ�

τ0

Plastique de typeBingham

Rhéofluidifiant

Newtonien

Rhéoépaississant

Fluide plastique(Herschel-Bulkley)

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

48

petites (dp < 2µm) et sans glissement à la surface des sphères. La viscosité est alors une simple

fonction de la concentration :

vf

s c5,21 +=µµ

(1-5)

Pour des suspensions à plus forte concentration, il est nécessaire de prendre en compte

l’interaction des particules entre elles, leur rotation, leur collision, la formation d’agglomérats,

… La difficulté d’établir une relation pour ces concentrations réside dans le fait que l’aspect

aléatoire de la structure de la suspension ne peut être représenté par un modèle simple.

Plusieurs des équations théoriques ou expérimentales utilisent un polynôme :

...²5,21 332 ++++= vvv

f

s ckckcµµ

(1-6)

Le terme au carré représente l’interaction hydrodynamique des sphères entre elles. Suivant

l’approche faite, les valeurs de k2 proposées par les différents auteurs fluctuent entre 14,1

(Guth et Simha –1936) et 10,5 (Thomas–1965). Les coefficients des termes d’ordre supérieur

sont déterminés de manière moins précise car ils expriment des interactions complexes,

difficiles à prendre en compte théoriquement.

De nombreuses corrélations de la viscosité dynamique des mélanges diphasiques ont été

établies. Le Tableau 1-2 en présente un certain nombre. Ces relations sont représentées sur la

Figure 1. 10 afin de mettre en évidence l’écart entre les différents résultats.

Les corrélations de Ford et de Kunitz présentent des valeurs très divergentes et qui encadrent

celles des autres auteurs. Puisque aucune indication n’est donnée sur leur domaine de validité,

elles seront négligées. Par contre il est plus délicat de faire un choix entre les autres relations.

Dans la gamme de concentration qui intéresse notre étude (inférieures ou égales à 20 %), la

majorité des relations prédit des facteurs d’augmentation de la viscosité de la suspension par

rapport à la viscosité du fluide porteur assez similaires. Les valeurs obtenues avec la relation

de Steimour (le coefficient dans l’exponentielle est une moyenne de valeurs expérimentales

trouvées pour deux concentrations extrêmes) rejoignent celles prédites avec la relation de

Kunitz.

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

49

Auteur Expression de µm proposée RemarquesEinstein (1906) ( )vf c5,21+µ cv<0,02

dp<2 µmKunitz (1926) ( )

( )415,21v

vf

cc

−+µ 0,1≤cv≤0,4

Guth, Eugene &Simha (1936)

( )²1,145,21 vvf cc ++µ cv>0,02

Steimour (1944) ( )vf c2,4expµ 0< cv ≤0,4

Vand (1945) ( ) 5,2²16,11 −−− vvf ccµ cv >0,20,3<dp<400 µm20<D/dp<100

Vand (1948) ( )

−+

v

vvf

ccc

609,01²7,25,2expµ

Ford (1960) ( )75 5,11115,21 vvvf ccc −++µThomas (1965) ( )( )vvvf ccc 6,16exp00273,0²5,105,21 +++µ (ρf-ρp)≈0

0< cv <0,6250,099<dp<435 µm

Graham & Steele(1984) [ ]

5,22

12

7404,07404,0135,011

−−+− vv

f ccµ(ρf-ρp)≈0

Forces de cisaillement nulles(Rep=0)

Mori-Ototake(cites par Bel – 1996)

−+v

vf

cc

52,056,11µ 0,1≤ cv ≤0,4

Leighton (1985)

( )2

15,11

−+

vs

v

vf

cc

cµ(ρf-ρp)≠0

cvs (concentration de lasuspension lorsqu’elle est

sédimentée) dépend du type de lasuspension et de l’arrangement

des particules entre ellesLeighton prend cvs =0,58

Tableau 1-2: Corrélations de la viscosité dynamique des mélanges diphasiques

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

50

Figure 1. 10 : Représentation graphique des expressions du Tableau 1-2 en fonction de la concentrationvolumique en particules

Parmi tous ces modèles, l’approche micro-rhéologique faite par Graham et Steele (1984)

semble intéressante à présenter. Leur étude porte sur des particules sphériques de même

masse volumique que le fluide porteur. Ils ont observé la formation d’agrégats qui se font et

se défont sous l’effet des forces de cisaillement. Plus les solutions sont concentrées, plus le

nombre de particules formant l’agrégat est élevé. Le liquide au voisinage du point de contact

des particules est immobilisé et contribue à une augmentation du volume « effectif » occupé

par les sphères. Plus l’agrégat est gros, plus il y a de points de contact et plus le volume de

liquide piégé est important. Ce volume dépend de l’arrangement des particules entre elles. En

général ce volume décroît légèrement avec une augmentation du nombre de Reynolds de la

particule (f

fpp

d

µτρ2

Re = ). Effectivement, une augmentation du brassage (soit du taux de

cisaillement τ) casse les agrégats, réduit le nombre de particules les formant, diminuant ainsi

la quantité de fluide piégé. La formation de ces agrégats a un lien direct avec la viscosité

macroscopique de la suspension.

Graham et Steele ont basé leur étude théorique sur ces observations et sur une intégration de

l’équation d’Einstein. Dans une suspension d’origine (i), ils rajoutent des particules de taille

plus importante (i+1). A l’échelle de ces particules, la suspension (i) est considérée comme un

milieu homogène. La viscosité de la suspension (i+1) s’exprime :

( )iii

i cc −+= ++

11 5,21

µµ

(1-7)

1

10

0 0,05 0,1 0,15 0,2 0,25 0,3 0,35 0,4 0,45

concentration

Vis

osité

app

aren

te/V

isco

sité

du

fluid

e po

rteu

r

Eistein

Steimour

Vand 48

Richarson et Zaki Rep<0.2

Thomas

Mori-Ototake

Ford

Guth-Simha

Kunitz

Vand 45

Graham

Leighton

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

51

En intégrant cette relation sur un nombre infini de sphères, ils obtiennent :

( ) 5,21

−−= v

f

s cµµ

(1-8)

Puisque les particules forment des agrégats, le volume efficace qu’elles occupent doit prendre

en compte également le volume de fluide immobilisé. Ce volume dépend de la taille des

agrégats, soit de la concentration volumique et de Rep.

Dans le cas d’une suspension non soumise à des forces de cisaillement, la fraction de volume

immobilisé, trouvée par Graham et Steele, est :

21

2

0 7404,0

7404,0135,01

−−+= vc

V (1-9)

Ainsi, la viscosité de cette suspension est :

( ) 5,2

01−

−= v

f

s cVµµ

(1-10)

Les résultats de cette relation sont en accord avec ceux de Thomas (1965) et avec les mesures

de Gadala-Maria & Acrivos (1980) pour 0 < cv < 0,7.

Dans le cas de suspension soumise à des forces de cisaillement, Graham et Steele (1984)

proposent la relation suivante pour calculer la fraction V de volume immobilisé :

( ) pvv ReccVV 74,0²10,10 −+= (1-11)

Cependant, cette relation doit être utilisée avec attention car pour des Rep trop élevé, V < 1.

L’autre limite de cette relation est la difficulté à déterminer Rep.

La majorité des auteurs cités dans le Tableau 1-2, considère que les particules ont la même

masse volumique que la phase porteuse. Or il s’avère impossible dans notre cas de respecter

cette condition dans les deux états du MCP puisque la glace est plus légère que l’eau. Certains

auteurs, comme Leigthon (1985), Acrivos et al. (1994) ou Yamagishi et al. (1996) ont étudié

la rhéologie pour des suspensions soumises aux forces de flottabilité. Ils se sont intéressés à

des particules de diamètre supérieur à 125 µm afin de pouvoir négliger les mouvements

browniens et les effets électro-visqueux. Ils ont constaté qu’il existait un taux de cisaillement

seuil au-dessus duquel la viscosité de la suspension est indépendante de la contrainte de

cisaillement (comportement Newtonien), et en dessous duquel la viscosité augmente. Ce

phénomène est dû à une distribution non homogène des particules en dessous d’un certain

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

52

seuil d’agitation en raison de la différence de densité (une différence de 3 à 4 % est suffisante

pour observer ce phénomène). La distribution des particules dépend du taux de cisaillement.

Lorsque celui-ci augmente, l’équilibre entre le flux gravitationnel et la diffusion due au

cisaillement se décale et la suspension tend à s’homogénéiser. En résumé, la viscosité

moyenne du mélange dépend de la distribution des particules. Pour une concentration

moyenne donnée, la viscosité moyenne atteint sa valeur minimale lorsque la suspension est

homogène (taux de cisaillement élevé) et augmente de manière monotone au fur et à mesure

que la suspension devient moins homogène.

Leighton (1985) propose une relation pour calculer la viscosité d’une suspension parfaitement

homogène. Celle-ci est donnée dans le Tableau 1-2. Cependant, dans notre cas (suspension

polydispersée de particules non-sphériques), il est délicat de déterminer cvs. Acrivos et al.

(1994) ont orienté leur étude autour d’un paramètre adimensionnel de cisaillement A (rapport

des forces visqueuses sur les forces gravitationnelles). Ils retrouvent que la viscosité moyenne

est une fonction monotone décroissante de A. La valeur de A pour laquelle la viscosité atteint

sa valeur minimale augmente lorsque cv diminue. Effectivement, plus la concentration est

faible, plus la viscosité de la suspension est faible, mais plus l’agitation à apporter pour

l’homogénéiser est importante. Ainsi la viscosité de la suspension homogène est atteinte pour

un cisaillement plus fort. Ils ont remarqué également qu’à l’état stationnaire, la viscosité

d’une suspension monodispersée est indépendante de la taille des particules. Celle-ci

intervient uniquement dans le temps caractéristique pour atteindre cet état stationnaire. Ils ont

validé leurs résultats théoriques par des mesures expérimentales.

Shook (1985) présente une étude expérimentale sur des particules de diamètre 0,3 et 1,4 mm,

ayant une masse volumique proche de celle du liquide porteur (densité relative = 1,05) en

écoulement dans un tube de diamètre 52,2 mm. Les résultats expérimentaux permettent de

constater que le diamètre des particules a une influence importante sur le comportement du

mélange. Une classification en fonction de la taille des particules est proposée :

− pour des particules de tailles inférieures à 10 µm, l’écoulement est généralement

non newtonien,

− entre 10 et 200 µm, l’écoulement possède des propriétés non newtoniennes à partir

d’un seuil de concentration,

− pour une taille supérieure à 200 µm, le comportement reste newtonien quelle que

soit la concentration.

De leur côté, Weber et Stegmaier (1983) proposent une classification en fonction de la

concentration et de la vitesse de sédimentation. Celle-ci est présentée dans le Tableau 1-3.

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

53

Concentration volumique,%

Nombre de Reynolds basésur la vitesse de

sédimentation des particules

Allure de l'écoulement Comportementrhéologique

>35 <0,1 Homogène Non newtonien<30 <0,1 Homogène Newtonien>35 0,1-2 Pseudo-homogène Non newtonien<30 0,1-2 Pseudo-homogène Newtonien<30 >2 Hétérogène Newtonien

Tableau 1-3 : Classification des régimes d'écoulement (Weber et Stegmaier - 1983)

Ben Lakhdar (1998) a mené une étude sur la rhéologie des coulis de glace. Il a trouvé, pour

des fractions massiques comprises entre 0 et 6 %, que le coulis de glace a un comportement

newtonien. Au-delà de 6 %, le coulis présente un comportement non newtonien : l’indice de

comportement, n, très sensible à l’évolution de la fraction massique en glace, s’écarte de

l’unité en décroissant. Pour des fractions massiques en glace égales ou supérieures à 13 %, la

viscosité apparente diminue avec l’augmentation du gradient de vitesse, mettant ainsi en

évidence le caractère non newtonien rhéofluidifiant du coulis à ces concentrations. Pour des

fractions massiques supérieures à 6 % et des vitesses de cisaillement allant de 20 à 310 s-1 le

fluide suit une loi de comportement de type loi de puissance d’Ostwald (équation 1-3).

A partir des rhéogrammes obtenus, Ben Lakhdar a établi des corrélations pour déterminer

l’indice de comportement, n et le coefficient de consistance, k pour l’ensemble du

comportement rhéologique (newtonien et non newtonien) du coulis de glace :

1)()( −= mcnms ck γµ �

avec34,8

12,01

74,026,0)(

+

+=m

mc

cn pour 0 ≤ cm ≤ 28 %

et )8324,5exp()( 5,2mm cck +−= pour 0 ≤ cm ≤ 13 %

)5,1623,6exp()( 5,0mm cck +−= pour 13 ≤ cm ≤ 28 %

• Comportement du fluide étudié : le « coulis de glace stabilisé »

Le « coulis de glace stabilisé » mis au point par le LBHP a été présenté dans le paragraphe

1.1.5. Ce fluide présente un comportement rhéologique complexe lié à sa thermodépendance.

Le changement de phase s’accompagne en effet d’une variation brutale du volume des

particules de gel. Des différences de comportements rhéologiques sont donc attendues de part

et d’autre de la température de changement de phase.

Dans notre étude expérimentale, seules les particules de gel sont utilisées. Elles sont filtrées

puis immergées dans une huile Syltherm HF. Le tableau de valeurs donné par le fabriquant

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

54

(Dow Chemical) permet de trouver une courbe de dépendance en température de la viscosité

de la forme :

T++−=26813284lnµ (1-12)

La température T utilisée dans cette relation est en degré Celsius et la viscosité µ, en mPa.s.

La densité des particules par rapport à l’huile porteuse fluctue de 1,12 à 1,02 lorsque les

particules passent de l’état liquide à l’état solide.

Faute d’appareil de mesure fiable dans notre laboratoire et de pertes de pression trop faibles

dans la section d’essais pour faire une rhéométrie en ligne, l’étude thermo-rhéologique de la

dispersion de particules de gel dans de l’huile Syltherm HF n’a pas pu être réalisée. Les seules

sources que nous ayons, sont les travaux de Royon (1992) pour une suspension concentrée à

50 %. Les particules étudiées sont identiques aux nôtres mais la phase porteuse est de l’huile

Shellsol AB. Cette huile a une viscosité de 4,1 mPa.s à 0 °C qui varie plus faiblement avec la

température que la viscosité de l’huile Syltherm HF. Cette étude ne donne pas clairement le

rapport entre les masses volumiques des particules et de l’huile, mais d’après ces résultats, il

ne semble pas qu’il y ait eu des problèmes de sédimentation. Les propriétés rhéologiques de

notre mélange risquent de différer du sien en raison de cette différence.

Dans ses premiers travaux, Royon (1992) a étudié la thermo-rhéologie du coulis de glace

stabilisé à l’aide d’un viscosimètre Carrimed sur une plage de température comprise entre

10 °C et –10 °C.

− Les rhéogrammes effectués à 5 °C et –1 °C montrent que la viscosité est constante

avec la vitesse de cisaillement : la dispersion se comporte comme un fluide

newtonien dans cette gamme de température.

− Les rhéogrammes obtenus à –5 °C et –10 °C montrent qu’au cours de la montée en

contrainte, la viscosité croît avec la vitesse de cisaillement. La dispersion se

comporte comme un fluide rhéoépaississant. Par contre sur les paliers de contrainte,

la viscosité reste constante et au cours de la descente en contrainte, la dispersion se

comporte comme un fluide newtonien. Cette différence de comportement met en

évidence un changement d’état structurel : lorsque la dispersion est soumise de

manière permanente à un cisaillement, elle se comporte comme un fluide

newtonien. Par contre lorsqu’elle est au repos pendant au moins une heure, elle

présente un comportement rhéoépaississant. Ce comportement rhéologique peut

s’expliquer soit par une rupture de surfusion due à l’agitation (phénomène expliqué

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

55

dans le paragraphe concernant le comportement thermique), soit par la présence

d’un film de tensio-actif lubrifiant autour des particules qui tend à se rompre sous

l’action des contraintes de cisaillement. Ces deux phénomènes (augmentation du

volume des particules changeant de phase et rupture du film lubrifiant) peuvent être

à l’origine de l’augmentation de la viscosité.

− L’étude de la dépendance en température de la viscosité a été faite en utilisant une

viscosité relative (rapport de la viscosité du mélange sur celle du fluide porteur).

L’allure de la courbe (Figure 1. 11) est du type exponentielle décroissant : les

valeurs de la viscosité relative sont supérieures à 2 dès que T<0 °C et dépassent 3 à

partir de –10 °C. Ce résultat met en évidence la faible contribution de la phase

suspendante dans la dépendance de la viscosité de la suspension avec la

température.

Figure 1. 11 : Variation de la viscosité relative en fonction de la température (Royon – 1992)

Cependant, l’étude rhéologique des fluides diphasiques au moyen de viscosimètres usuels

(viscosimètres à cylindres coaxiaux ou en géométrie plane) ne peut s’effectuer sans

prendre en compte à la fois la présence d’un phénomène de sédimentation ou crémage et

de la présence de couche de glissement à la paroi du système de mesure. Ces phénomènes

constituent deux effets parasites qui perturbent fortement la mesure. Il est donc difficile

d'établir avec précision un rhéogramme au moyen de tels appareils. Royon et son équipe

ont donc mis au point en 2001 un nouveau banc d’essais pour pouvoir réaliser une

rhéométrie en ligne. Cette méthode de mesure consiste à placer des capteurs de pression

entre des points de tronçon de conduite rectiligne où le régime d’écoulement est

pleinement établi. On fixe un débit et on mesure la différence de pressions données par les

capteurs. Un traitement des données suivant la méthode de Mooney-Rabinovith [méthode

détaillée dans les travaux de Ben Lakhdar (1998)] permet d’obtenir un rhéogramme

Température (°C)

3,0

2,5

2,0-15 -10 -5 0 5 10 15

µrelative

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

56

similaire à celui obtenu au moyen d’un viscosimètre. La figure 1. 12 montre un exemple de

rhéogrammes que Royon et son équipe ont obtenu à partir de mesures pression-débit sur un

« coulis de glace stabilisé » pour une concentration massique de 25 et 35 % en particules.

On remarque que la viscosité apparente du fluide diminue avec la vitesse de cisaillement.

Figure 1. 12 : Rhéogramme de « coulis de glace stabilisée » concentré à 25 % et 35 % en particules

Le comportement de ce liquisol, d’après la classification rhéologique vue dans le paragraphe

1.2.1.1, est du type rhéofluidifiant. Il peut être modélisé par une loi de comportement du type

Ostwald [équation (1-3)]. D’après les données de la littérature, la majorité des fluides

diphasiques « liquisols » présente un comportement rhéofluidifiant. On peut observer pour un

grand nombre d’entre eux, la présence d’un seuil de contrainte dont l’amplitude est

généralement fonction de la taille et de la forme des cristaux de glace composant le fluide

diphasique.

1.2.2. Ecoulement et pertes de pression

De nombreuses recherches ont été faites sur les écoulements de fluides diphasiques, mais le

plus souvent pour des conduites circulaires horizontales de rayon R0 et de longueur L. Dans ce

cas particulier, la perte de pression par frottement s'exprime par la formule de Darcy-

Weissbach :

0

0.02

0.04

0.06

0.08

0.1

0.12

0.14

0 100 200 300 400 500 600 700 800

gradient de vitesse

visc

osité

(P

a.s)

Cm = 35 %

Cm = 25 %

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

57

22

2

0

U

R

LfP

ρ=∆ (1-13)

Le coefficient de perte de pression par frottement, f, dépend de la rugosité de la paroi, de la loi

de comportement rhéologique et du régime d'écoulement du fluide.

Ces recherches étudient l'augmentation des pertes de pression occasionnées par les particules

en suspension dans le fluide.

�������� 3HUWHV�GH�SUHVVLRQ�UpJXOLqUHV

Contrairement au comportement monotone de la courbe de pertes de pression en fonction de

la vitesse d'un écoulement laminaire simple phase, celle d'une suspension présente un

comportement plus complexe en raison des nombreux paramètres intervenant sur le

coefficient de pertes de pression par frottement dans un tube horizontal : la vitesse

d'écoulement, la taille et la concentration en particules.

• Pour ρρp > ρρf

Généralités

Dans le cas où les particules sont plus lourdes que la phase porteuse elles sont soumises à

deux forces qui s’équilibrent : la gravité qui entraîne leur sédimentation et les forces de

portance et de traînée qui, à l'inverse, tendent à homogénéiser l'écoulement. Plus la vitesse est

élevée, plus les particules sont maintenues en suspension : l'écoulement est homogène.

Lorsque la vitesse décroît, les particules tendent à sédimenter et à s'accumuler en zone basse

de la canalisation : l'écoulement devient hétérogène. Puis à des vitesses encore plus faibles, un

lit mouvant de particules se forme sur le fond. Mais les particules déposées réduisent la

section de passage et par conservation du débit, la vitesse augmente. En dessous de la "vitesse

de dépôt", le lit formé devient stationnaire : les forces d'entraînement agissant sur le lit sont

inférieures aux forces de gravité s'opposant au mouvement du lit. Les valeurs des vitesses

séparant les différents régimes d’écoulement dépendent de la concentration en particules.

Les quatre régimes d’écoulement sont représentés sur la Figure 1. 13.

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

58

Figure 1. 13 : Représentation des pertes de pression pour les différents régimes d’écoulement

Corrélations

L'étude du transport de suspensions dans des conduites circulaires est un sujet qui possède une

littérature extensive. Turian et Yuan (1977) ont regroupé les travaux les plus pertinents et, à

partir de l'ensemble des résultats théoriques, ils ont construit de nouvelles corrélations.

Les délimitations des différents régimes indiquées sur la courbe de la

Figure 1. 13 sont qualitatives et constituent une description incomplète des variations des

régimes. En effet, leur frontière n'est pas bien définie. La précision des résultats

expérimentaux ne permet pas de mieux les redéfinir. Il est cependant évident que les forces

qui affectent l'écoulement jouent un rôle différent suivant les régimes. Turian et Yuan ont

donc cherché des corrélations propres à chaque régime. A partir d'une analyse dimensionnelle

ils ont trouvé que le nombre de Reynolds basé sur la vitesse et sur le diamètre de la conduite

et le nombre de Reynolds basé sur la vitesse de sédimentation et sur le diamètre des particules

sont des variables pertinentes. Ils les ont introduites dans leurs corrélations par l'intermédiaire

des coefficients de friction (ff et CD). Le nombre de Froude intervient également de manière

importante dans un écoulement chargé en particules: ( ( ))12 0

2

−=

sgR

UFr avec s la densité

relative). Il donne une mesure relative des forces inertielles sur les forces gravitationnelles.

Ainsi, ils ont trouvé une première équation empirique :

δγβα FrCfKcff Dfvfs =− (1-14)

fs et ff sont les coefficients de frottement du coulis et du fluide porteur pur à la même vitesse

d'écoulement.

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

59

Le coefficient de traînée CD pour des sphères qui sédimentent à la vitesse terminale de chute

gU dans un liquide au repos est donné par :

( )2

1

3

4

g

pD

U

sgdC

−= (1-15)

Les constantes K, α, β, γ et δ sont déterminées pour chaque régime à partir des résultats

expérimentaux et sur des critères de continuité entre les différents régimes. La forme finale

des corrélations est alors :

− pour un lit stationnaire (régime 0) :

1,14,077,074,04,0 −−=− FrCfcff Dfvf (1-16)

− pour un lit mouvant (régime 1) :

35,142,098,0 −−=− FrCfcff Dfvf (1-17)

− pour un écoulement hétérogène (régime2) :

69,017,02,187,055,0 −−=− FrCfcff Dfvf (1-18)

− pour un écoulement homogène (régime 3) :

35,015,043,15,084,0 −=− FrCfcff Dfvf (1-19)

La variation des coefficients suivant les régimes montre le rôle joué par chaque groupe de

variables. Par exemple, l'exposant du nombre de Froude suggère que les forces

gravitationnelles deviennent moins importantes à l'approche du régime homogène.

Turian et Yuan ont également déterminé un "nombre du régime" qui permet de délimiter

chaque régime :

06,006,108,10193,31 −=

Dfv Cfc

FrR (1-20)

38,023,023,01241,2 −−=

Dfv Cfc

FrR (1-21)

94,067,007,12329,0 −−=

Dfv Cfc

FrR (1-22)

La transition entre les régimes se fait lorsque Ri (i+1)=1.

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

60

Les courbes issues de ces corrélations sont représentées sur les courbes de la Figure 1. 14

pour différentes conditions opératoires et sont comparées à des corrélations proposées par

d'autres auteurs. Elles donnent l’évolution du gradient de pression adimensionnel, i (exprimé

en mètre d'eau par mètre de conduite), en fonction de la vitesse.

a) cv=11,7 % b) cv=15,5 %

Figure 1. 14 : Perte de pression (i=∆P/L) dans un écoulement de coulis - comparaison de corrélationsρρf=100 kg/m3, ρρp=1240 kg/m3, dp=3 mm, R0=25 mm

(extrait de Doron et al. - 1987)

Il est intéressant de remarquer que ce sont les corrélations de Turian et Yuan et le modèle

théorique double couche de Doron et al. (1987) qui se rapprochent le plus des valeurs

expérimentales. Par contre toutes les corrélations présentent les mêmes tendances. La

comparaison des figures a) et b) (1. 14) montre une augmentation de la perte de pression avec

la concentration en particules alors que la vitesse critique qui a lieu lorsque ∆P est minimum,

est indépendante de ce paramètre. La prédiction des coefficients de frottement est meilleure

au fur et à mesure que l'écoulement devient homogène. Ceci vient principalement du fait que

les valeurs expérimentales sont moins reproductibles pour des écoulements avec formation de

lit. La prédiction s'améliore également avec la concentration.

Modèle triple couche

Les courbes de la Figure 1. 14 mettent en évidence que les données des pertes de pression

obtenues par les différentes corrélations divergent à faibles vitesses. Effectivement les

différents modèles sont incapables de prédire précisément l’existence d’un lit stationnaire à

faibles débits. Il existe une gamme de vitesses où la partie supérieure du lit est en mouvement

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

61

alors que la partie inférieure est au repos : les particules du fond restent collées entre elles et

ne sont pas entraînées par le lit mouvant.

Doron et Barnéa (1993) proposent un modèle où pour une certaine gamme de vitesses,

l'écoulement se stratifie en trois couches dans la canalisation : un lit stationnaire au fond, un

lit mouvant au-dessus et une suspension hétérogène dans la partie haute. Leur théorie se base

sur les équations de conservation de la matière, sur un bilan de forces et sur l'équation de

diffusion au niveau de l'interface de chacune des trois couches. Dans la partie haute de

l'écoulement, où la suspension est hétérogène, le fluide est soumis à des forces de cisaillement

aux parois et à l'interface des deux couches. Dans la partie intermédiaire de la conduite, le lit

mouvant de particules exerce des forces de frottement avec la paroi latérale et avec le lit

stationnaire. Dans la partie basse, l’existence du lit stationnaire dépend de la vitesse critique

de réentrainement. Pour qu’il n’y ait pas glissement du lit, le gradient de pression et les

cisaillements à l’interface des deux lits doivent être inférieurs aux forces de frottement au

paroi. Au niveau des interfaces, les particules migrent par diffusion vers les zones de plus

faibles concentrations. A partir de ces bilans, six équations décrivent la situation de

l'écoulement et permettent d'obtenir une courbe théorique du gradient de pression

adimensionnel, i, en fonction de la vitesse (Figure 1. 15).

Figure 1. 15 : Perte de pression en fonction de la vitesse : effet de la concentrationComparaison des résultats du modèle avec des résultats expérimentaux

ρρf=1000 kg/m3, ρρp=1240 kg/m3, dp=3 mm, R0=25 mm_____ modèle théorique des trois couches___.___ frontière entre un écoulement avec un lit stationnaire et un lit en mouvement

(extrait de Doron et Barnea 1993)

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

62

Le modèle triple couche permet de mieux prédire l’allure de l’écoulement aux faibles vitesses

et ainsi les calculs des pertes de pression sont plus en accord avec les résultats expérimentaux.

• Pour ρρp < ρρf

Synthèse des résultats expérimentaux

Les relations proposées pour les suspensions où ρp > ρf, considèrent un terme positif de

différence entre les masses volumiques du solide et du liquide élevé à une certaine puissance

suivant les régimes (ce terme intervient dans le nombre de Froude). Lorsque la masse

volumique des particules est inférieure à celle du fluide porteur, cette différence devient

négative et l’utilisation des relations empiriques devient impossible.

La synthèse des résultats expérimentaux obtenu par de nombreux auteurs sur des coulis de

glace a été réalisée par Bel (1996). Il est arrivé aux conclusions suivantes :

− la vitesse de l’écoulement a une forte influence sur le comportement du mélange.

Aux faibles vitesses, plusieurs auteurs ont observé une agrégation des particules

solides en partie haute du tube. La conséquence de ce phénomène est

l’augmentation du coefficient de perte de pression par frottement lors de la

diminution de la vitesse . Pour les vitesses élevées (> 1 m.s-1), le coefficient de

perte de pression par frottement est presque constant et proche de celui de l’eau

pure à la même vitesse car les particules forment une masse au centre de

l’écoulement ;

− la taille et la concentration en particules solides sont généralement des paramètres

importants. Pour une même concentration, les mélanges constitués de particules de

faibles diamètres présentent un coefficient de perte de pression inférieur à ceux de

forts diamètres. La perte de pression augmente si la fraction solide augmente. Une

seule équipe de recherche a constaté des réductions significatives de la perte de

pression lors de l’augmentation de la fraction solide. La fraction solide à partir de

laquelle la perte de pression augmente brutalement semble liée à la vitesse.

L’augmentation se produit pour des fractions d’autant plus élevées que la vitesse

est forte ;

− les valeurs des pertes de pression sont toujours trouvées supérieures à celle de l’eau

pure.

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

63

Corrélation

De nombreux auteurs ont étudié les pertes de pression des coulis de glace mais très peu

proposent des corrélations. Snoek et al., cités par Bel (1994), à partir de leurs valeurs

expérimentales, proposent une corrélation pour le facteur de frottement du mélange

diphasique fs en fonction de celui de l’eau, feau, du nombre de Reynolds du mélange, du rayon

du tube R0 et de la fraction massique en glace cm :

( )28,00

40,024,015,2 02,0112,01 −++= RcRecff mmeaus (1-23)

Les résultats expérimentaux relatifs aux pertes de pression sont ainsi prédits avec une

incertitude de ±10 %.

• Remarque

Doron et al. (1987) dans leurs travaux font une remarque intéressante sur les performances du

transport hydraulique de particules. Au lieu de raisonner exclusivement sur les pertes de

pression, ils proposent de représenter l'énergie consommée par unité de masse de particules

solides transportées et par unité de longueur (E) en fonction du flux massique en particules

( pM� ). Cette représentation est plus pratique dans la détermination des coûts opératoires. La

Figure 1. 16 met en évidence qu'il est plus intéressant, si on raisonne en énergie à fournir, de

transporter des coulis fortement chargés.

Mp (T/jour)

Figure 1. 16 : Effet de la concentration en particules sur la consommation d'énergieρρp=1240 kg/m3, R0=25 mm, dp=3 mm

(extrait de Doron et al. - 1987)

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

64

Lorsque la concentration augmente, le flux massique de particules augmente plus vite que les

pertes de pression et le flux du fluide porteur diminue. Cependant il y a d'autres facteurs à

prendre en compte pour optimiser le transport de coulis. Les fortes concentrations entraînent

une érosion plus importante des conduites et des problèmes de bouchons.

�������� 3HUWHV�GH�SUHVVLRQ�VLQJXOLqUHV

Les travaux concernant les pertes de charge singulières ne sont pas nombreux. Les

écoulements secondaires dus aux singularités modifient la distribution des particules, ce qui

rend l’écoulement complexe.

Dans le cas des coudes, les pertes de pression dépendent du diamètre des conduites, de la

vitesse d'écoulement, du rayon et de l'angle de courbure du coude, de la densité des différents

milieux... Les résultats expérimentaux sur les écoulements diphasiques de particules

polydispersées sont rares et pas forcément concordants.

Mukhtar et al. (1995) ont étudié les pertes de pression singulières dans un coude à 90° pour

des suspensions hétérogènes polydispersées avec des concentrations comprises entre 10 et 40

%. Malheureusement, les particules étudiées sont petites (< 75 µm) et ont une densité élevée

(2,6 et 4,2 kg/L). Cependant quelques résultats de leurs travaux sont intéressants :

− dans un coude, les pertes de pression sont moins importantes pour un fluide chargé

en particules que pour de l'eau pure. Cette réduction est attribuée aux particules qui

réduisent les effets des courants secondaires dans les coudes ;

− ils ont mesuré, pour un même coulis, des pertes de pression plus faibles dans un

coude que dans un tube droit de même longueur pour des vitesses d'écoulement

inférieures à la vitesse critique de sédimentation (1 à 1,2 m/s). La présence des

courants secondaires dans le coude permet d'homogénéiser la suspension qui

sédimente dans les longueurs droites ;

− lorsque la vitesse d'écoulement est de 0,5 m/s supérieure à la vitesse de

sédimentation, ils ont remarqué que les pertes de pression ne dépendent plus de la

concentration, ni de la vitesse d'écoulement. La distribution des particules par les

courants secondaires est inhibée par les fortes interactions des particules entre elles.

Par conséquent, les particules ne peuvent pas être distribuées de manière plus

homogène dans le coude ;

− la masse volumique des particules ne semble pas non plus jouer un grand rôle sur

les pertes de pression.

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

65

Cependant, ces résultats ne sont pas en accord avec ceux de Ogihara et Miyazawa. (cités par

Bel) ou Bel (thèse - 1996). Ogihara et Miyazawa. ont mené une étude expérimentale sur les

lois de pertes de charge dans un élargissement brusque et un coude à 90° avec un mélange

d’eau et de particules de bentonite dont les caractéristiques sont celles d’un fluide plastique de

type Bingham. Les concentrations en poids varient de 6 à 11 % et les vitesses s’échelonnent

entre 0,01 et 2 m.s-1. Le coefficient de perte de charge du mélange devient 11 fois et 8 fois

plus grand que celui de l’eau pour l’élargissement brusque et le coude à 90° respectivement.

Cette augmentation est attribuée à la rupture du régime d’écoulement de type piston dans ces

singularités.

Bel (1996) a réalisé des mesures de pertes de pression sur un coulis de glace (mélange eau-

éthanol (10 % masse)-glace) ayant des fractions massiques en glace variant entre 0 et 33 %

dans une vanne quart de tour à boisseau sphérique et un coude à 90°. Dans une vanne, les

pertes de pression augmentent faiblement avec la concentration. Le coefficient de perte de

pression du mélange diphasique est toujours supérieur à celui de l’eau. Leur rapport varie

entre 1,3 et 4 lorsque la vitesse décroît. Dans le cas d’un coude à 90°, le rapport des

coefficients de perte de pression monte jusqu’à 5 pour les faibles vitesses (0,2 m.s-1) et les

fortes concentration (25 %). Pour les vitesses plus élevées les deux coefficients tendent à se

rejoindre.

La différence fondamentale entre les deux résultats vient de la densité relative des particules.

Dans le cas où ρp > ρf, l’inertie des particules au niveau des singularités casse la turbulence

provoquée par les écoulements secondaires, permettant une diminution des pertes de pression.

Dans l’autre cas, ce sont les écoulements secondaires qui déstructurent l’arrangement des

particules, cassent l’écoulement piston et entraînent une augmentation des frottements des

particules sur les parois.

�������� 'LPLQXWLRQ�GHV�SHUWHV�GH�SUHVVLRQ

• Suspension polydispersée

L’écoulement dans une conduite verticale, de particules polydispersées de même masse

volumique que le fluide porteur, s'ordonne de la manière suivante : les grosses particules vont

au centre de la conduite tandis que les petites restent près des parois car plus elles sont

grosses, plus elles sont soumises aux contraintes de cisaillement qui tendent à les éloigner des

parois. Ce type de suspension peut transporter plus de particules qu'une suspension

monodispersée pour une perte de pression donnée puisque les résistances à l'écoulement dans

la conduite dépendent du comportement des petites particules situées près des parois. Les

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

66

travaux expérimentaux de Inaba (1997) montrent qu'il existe une perte de pression minimum

pour un certain rapport de petites particules sur les grosses (Figure 1. 17).

Figure 1. 17 : Relation entre les pertes de pression, le facteur de compacité (FC) et lerapport de mélange des petites particules sur les grosses (Inaba-1997)

• Ajout d’un tensio-actif

Pour réduire les coefficients de frottement lors du transport de particules dans une conduite,

certains auteurs ont étudié l'influence de tensio-actifs sur les pertes de pression. Imanari et al.

(1997) ont, dans un premier temps, regardé leur rôle sur de l'eau sans particule. Les molécules

de tensio-actifs forment des micelles qui, à faible concentration, se présentent sous forme

sphérique et, à plus forte concentration, sous forme de filaments. Ces filaments ont la

particularité de réduire la turbulence : ils interagissent avec les tourbillons turbulents. Deux

hypothèses expliquent cette réduction : soit les filaments interagissent dans la sous couche

visqueuse et l'amincissent, soit en se déformant ils absorbent l'énergie turbulente. La présence

de ces filaments permet d'avoir un comportement laminaire à des vitesses plus élevées et donc

des pertes de pression plus faibles. Cependant, les structures finissent par se casser si les

vitesses deviennent trop importantes et l'écoulement redevient turbulent. Dans un deuxième

temps, ils ont rajouté à ce mélange, différentes concentrations volumiques en particules.

L'effet "laminarisant" des tensio-actifs est conservé et entraîne une diminution du coefficient

de frottement dans la zone de transition entre le régime laminaire et turbulent. Cette

Petits cristaux de glace Gros cristaux de glaceMélange

Fa

cteur d

e co

mpacité FC

Gra

die

nt de

pre

ssion (∆

P/L)

% petits cristaux de glace

% gros cristaux de glace

Rapport de mélange0 100 %

FC

100 % 0

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

67

explication est confirmée par les résultats de Yamagishi et al. (1996) qui observent les mêmes

tendances dans la zone de transition de régime hydraulique. Cependant, ils attribuent une

qualité supplémentaire aux tensio-actifs : ils ont une forte influence sur le degré d'interactions

des particules avec le fluide. Ils limitent la formation d'agrégats et réduisent la viscosité

apparente. Ainsi, leur sorbet, qui avait un comportement non-newtonien, devient newtonien

en présence de tensio-actifs.

A titre d'exemple pour montrer l'efficacité des tensio-actifs, voici les résultats obtenus par

Imanari et al. (1997). Ils ont étudié l'influence d'une solution de chlorure de cetyltrimethyl

d'ammoniac et de salicylate de sodium, concentrée à 200 ppm et 500 ppm, sur les pertes de

pression d'un écoulement d'eau chargée en particules de 500 µm dans un cylindre horizontal.

Ils ont obtenu les résultats suivants :

− même à des concentrations volumiques en particules de 12 %, les pertes de pression

d'une suspension avec des tensio-actifs ne sont plus que 25 à 50 % de celles de

l'écoulement de l'eau pure grâce à la chute du coefficient de frottement ;

− la diminution maximale du coefficient de frottement est obtenue pour une valeur

particulière de la vitesse.

Cependant, puisque les tensio-actifs réduisent les pertes de pression en diminuant la

turbulence, les échanges de chaleur sont également diminués. Or, dans le cadre d'un

échangeur, c'est plutôt une augmentation des transferts qui est recherchée.

1.2.3. Conclusion

Comme dans le cas d’un fluide pur, les pertes de pression d'un fluide chargé en particules ne

dépendent pas seulement de la concentration mais également du régime d'écoulement.

L’énergie transportée par la suspension est proportionnelle à la concentration en particules.

Cependant, l'augmentation de la perte de pression due à la charge en particules demande une

puissance de pompage plus élevée et un régime d'écoulement turbulent est nécessaire à

l'amélioration des coefficients d'échange de chaleur. Il est donc important de choisir la

meilleure concentration en particules conduisant à un compromis entre ces impératifs pour

utiliser les fluides diphasiques dans le transport du froid.

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

68

1.3. Comportement thermique

1.3.1. Comportement au cours du refroidissement

�������� &DV�LGpDO

Un refroidissement se passe dans des conditions idéales lorsque les particules congèlent à la

température de congélation du MCP et qu’il n’y a pas de surfusion. Dans ces conditions, le

thermogramme de congélation se divise en trois parties, comme le montre la Figure 1. 18.

Figure 1. 18 : Thermogramme de congélation d’une suspension dans le cas idéal

La suspension rentre dans l’échangeur à une température Ti, supérieure à la température de

changement de phase Tc. Elle se refroidit jusqu’à atteindre Tc. A cette température, les

particules changent de phase : tout le froid apporté par l’échangeur sert à les congeler. La

température reste constante durant la congélation de toutes les particules. Ensuite, la

température de la suspension recommence à chuter.

�������� &ULVWDOOLVDWLRQ�HW�IXVLRQ�DX�VHLQ�GHV�SDUWLFXOHV

• Description de la surfusion

Lorsqu'un liquide est refroidi, il ne cristallise pas en général à sa température de congélation

mais il commence à cristalliser à une température plus basse. Dans le cas où le fluide est

encapsulé, plus la taille de la capsule est faible, plus le phénomène de surfusion est important.

Lors de la fusion, le phénomène inverse est observé, mais de manière moins marquée. Les

nombreux travaux de différents auteurs sur l'étude de la cristallisation ont montré le caractère

TTi

Tc

Sens de l’écoulement

Changement de

phase

Re

froid

issem

ent

Re

froid

issem

ent

Paroi froide

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

69

stochastique des ruptures de surfusion. Des échantillons identiques ne cristallisent pas

forcément au même instant et à la même température. De plus, un échantillon ne cristallise

pas forcément à la même température à chaque refroidissement. Les liquides ne sont pas

parfaitement désordonnés. Les molécules, toujours en mouvement, peuvent s'associer pour

former des germes de nucléation ayant une structure très proche du cristal apparaissant à la

cristallisation. Ces germes se font et se défont de manière aléatoire. La cristallisation n'est

alors possible que lorsque le germe a une taille suffisante. L'agitation moléculaire décroît avec

la température, donc plus on descend en dessous de la température de fusion plus les germes

ont tendance à grossir. Par contre, une fois que la germination a débuté, le reste de la

cristallisation se fait à la température de fusion (il y a rupture de surfusion) : il y a une

remontée brusque de la température de la particule. Le thermogramme de Bedecarrats et

Dumas (1996) obtenu en congelant des nodules de 77 mm remplis d’eau, représenté Figure 1.

19, montre bien l’ensemble de ces phénomènes.

Figure 1. 19 : Températures externes de plusieurs nodules au cours d'une stabilisation à - 2,5 °C(extrait de Bedecarrats et Dumas-1996)

Dans des gros nodules, comme étudié par Bedecarrats et Dumas, la cristallisation commence

sur la paroi interne où la température est la plus faible et se propage concentriquement par

conduction dans la glace. Par contre, dans des nodules plus petits [5 à 1000 µm], comme

étudié par Yamagishi et al. (1996), contenant de la paraffine (n-Tetradécane et n-Dodécane),

la cristallisation se fait suivant deux procédés de nucléation : soit les germes se forment au

sein du liquide (nucléation homogène), soit à l'interface des substances solides (nucléation

hétérogène). La nucléation hétérogène a lieu à une température plus élevée que la nucléation

homogène. En raison de ces deux nucléations à des températures différentes, deux pics sont

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

70

observés sur le thermogramme de congélation (Figure 1. 20). Par contre, pendant la fusion, un

seul mécanisme de nucléation a lieu, ainsi un seul pic apparaît sur le thermogramme.

Figure 1. 20 : Thermogramme de descente en température de n-tétradécane encapsuléTaille des micro-capsules : 106 à 125 µm - Paroi des micro-capsules : gélatine

(extrait de Yamaghishi et al. (1996)

• Paramètres jouant sur la surfusion

L'ensemble des travaux réalisés sur des microcapsules en suspension aboutissent aux mêmes

conclusions :

− la durée des cristallisations diminue avec la température de stabilisation et le nombre

de microcapsules ;

− le degré de surfusion diminue avec l'augmentation du diamètre de la microcapsule:

plus elle est grosse, plus elle contient de MCP et plus il y a de chance qu'un germe

nucléant apparaisse pour initier la cristallisation.

Cependant, Yamagishi et al. (1996) n'observent ce phénomène que pour des microcapsules

ayant un diamètre inférieur à 100 µm. Pour des microcapsules comprises entre 100 µm et

1000 µm, le degré de surfusion est indépendant du diamètre. Les structures poreuses (gel

organique) étudiées par Royon et al. (1995) présentent de la surfusion pour des diamètres

inférieurs à 300 µm. En fonction des microcapsules utilisées, il existe un diamètre seuil au

dessus duquel le phénomène de surfusion peut être évité. Une autre solution pour éviter la

surfusion est d'ensemencer des agents nucléants, ayant des cristaux de mêmes structures que

le fluide changeant de phase, pour accélérer les nucléations. Yamagishi et al. ont utilisé du 1-

Tetradécanol comme agent nucléant pour le n-Tetradécane. Ainsi, il n'y a plus de surfusion.

400

300

200

-11 -9 -7 -5 -3 -1 1

DS

C (µ

cal/mg/s)

Température (°C)

MCP : n-Tetradecanevitesse de descente en température 1 °C/min

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

71

Chen et Chen (1999) ont étudié la surfusion de l'eau dans des capsules cylindriques de grosses

tailles (diamètre équivalent compris entre 3,3 et 12,4 cm). Ils ont étudié les effets de la taille

des capsules, de la température du milieu suspendant, de la quantité et de la nature des agents

nucléants sur le processus de nucléation au sein des capsules. Leurs résultats montrent que les

plus grosses capsules ont une température de nucléation plus haute. L'ajout d'agents nucléants

réduit la surfusion. L'efficacité d'un agent nucléant dépend de sa micro-surface, de ses

caractéristiques chimiques et de la structure de son cristal moléculaire. La nucléation est aussi

affectée par la surface de la paroi de la capsule : plus elle est rugueuse, plus les germes

nucléants ont de facilité à se former et se stabiliser. La probabilité de nucléation augmente

avec la concentration massique dans la solution d'agent nucléant jusqu'à une concentration de

1 %. Au-delà, l'ajout d'agent nucléant n'apporte plus d'amélioration. Parmi les quatre agents

nucléants testés (l'iodure d'argent, l'iodure de plomb, le sable et la poussière de boue), l'iodure

d'argent est l'agent le plus efficace. Néanmoins, ils recommandent plutôt l'utilisation du sable

qui présente un meilleur compromis entre l'efficacité et le coût de revient. L'ajout d'un agent

nucléant peut permettre aussi de jouer sur la masse volumique des capsules afin de se

rapprocher de celle du fluide porteur. Cependant, Royon (1992) a remarqué que l'iodure

d'argent a bien un effet nucléant sur l'eau sur les deux premiers cycles thermiques, mais que

cet effet nucléant a tendance à disparaître rapidement après quelques cycles supplémentaires.

1.3.2. Propriétés physiques

�������� 3URSULpWpV�GHV�FRUSV�SXUV

Les fonctions citées ci-dessous sont issues de :

− Dow Corning pour les propriétés de l’huile Syltherm HF ;

− Bel (1996) pour l’eau et la glace ;

− IIF (1997) pour l’eau.

• Masse volumique

Sur une gamme de température réduite, la masse volumique (kg.m-3) d’un corps pur peut

s’approcher de façon classique par une fonction linéaire (T en °C) :

− pour l’huile Syltherm HF : ρ (T) = 892 – T pour T ∈ [-30 ;+20] ;

− pour la glace : ρ (T) = 917 (1 + 1,73.10-4 × T ) pour T ∈ [-30 ;0] ;

Sauf pour l’eau, où c’est une fonction polynomiale d’ordre 2 :

− ρ (T) = 999,9 + 0,0315 × T – 0,0057 × T2 pour T ∈ [0 ;+20].

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

72

• Capacité thermique massique

Un ajustement linéaire de la capacité thermique massique (J.kg-1.K-1) en fonction de la

température est en général suffisant (T en °C) :

− pour l’huile Syltherm HF : Cp(T) = 1633 + 2,463 × T pour T ∈ [-30 ;+20] ;

− pour la glace : Cp(T) = 2116 – 0,78.10-2 × T pour T ∈ [-30 ;0] ;

− pour le gel organique : Cp = 3900 J.kg-1.K-1 pour T ∈ [+2 ;+12] ;

Cp = 160 × T + 2480 pour T ∈ [-10 ;-2]

(valeurs trouvées par Royon, 1992) ;

Sauf pour l’eau, où c’est une fonction polynomiale d’ordre 2 :

− Cp (T) = 4217 - 3,25 × T + 0,075 × T2 pour T ∈ [0 ;+20].

• Conductivité thermique

La conductivité thermique (W.m-1.K-1) des liquides des corps purs peut encore s’approcher

par un ajustement linéaire sur une gamme de température restreinte (T en °C) :

− pour l’huile Syltherm HF : k (T) = 0,112 – 0,0002 × T avec T ∈ [-30 ;+20] ;

− pour l’eau : k (T) = 0,562 + 0,0018 × T avec T ∈ [0 ;+20].

Pour la glace on peut reprendre l’expression citée par Bel (1996) :

− k (T) = 2,24 + 5,975.10-3 × (-T )1,156 avec T ∈ [-30 ;0] ;

Pour le gel organique, les résultats trouvés par Royon (1992) sont :

− k = 0,507 W.m-1.K -1 pour T ∈ [+3 ;+20] ;

− k = -0,126 × T + 0,36 pour T ∈ [-10 ;-2].

�������� 3URSULpWpV�GH�OD�VXVSHQVLRQ

Les propriétés physiques de la suspension (indice s) dépendent du fluide porteur (indice f),

des particules (indice p) mais également de l’écoulement qui conditionne l’interaction des

particules sur le fluide.

• Masse volumique

A partir d’un simple bilan de masse, la masse volumique de la suspension est :

ρs = cv ρp +(1-cv) ρf (1-24)

avec cv la concentration volumique en particules.

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

73

• Capacité thermique et chaleur latente de fusion

La capacité thermique d’un matériau représente la quantité d’énergie qu’il faut lui apporter

pour élever sa température de 1 K et la chaleur latente de fusion la quantité d’énergie pour

qu’il passe de l’état solide à l’état liquide. Ces énergies sont restituées lorsque le matériau

baisse en température ou lorsqu’il passe de l’état solide à l’état liquide. La densité d’énergie

stockable par chaleur latente est très importante devant celle stockée en utilisant seulement la

capacité thermique du matériau et une élévation en température de 1 K.

Dans le cas d’une suspension, la capacité thermique dépend de celles des particules et du

fluide porteur. En réalisant un bilan d'énergie, on trouve une capacité thermique pour la

suspension égale à :

s

ffvppvs

CpcCpcCp

ρρρ )1( −+

= (1-25)

La chaleur latente d’un matériau est mesurée par analyse enthalpique différentielle à l’aide

d’un calorimètre. Dans le cas du gel organique rempli d’eau, Royon et al. (1996) ont réalisé

cette étude calorimétrique et ont mesuré une chaleur latente de 292 kJ.kg-1 (contre 334 kJ.kg-1

pour l’eau).

Lors du changement de phase des particules, il est évident que la chaleur latente dégagée ou

absorbée est proportionnelle à la concentration massique en particules dans la suspension.

• Conductivité thermique

Au repos

La conductivité thermique pour une suspension au repos est évaluée par la relation de

Maxwell (1954). Elle est valide pour une suspension de particules sphériques concentrée au

moins à 22 % :

−−+

−++

=

12

122

f

pv

f

p

f

pv

f

p

f

s

k

kc

k

k

k

kc

k

k

k

k(1-26)

En écoulement laminaire

Les particules dans un écoulement cisaillé sont en rotation sur elles-mêmes. Leur rotation est

proportionnelle au taux de cisaillement (τ = ∂∂u

y) et à leur diamètre. Le fluide autour de la

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

74

particule est entraîné par cette rotation et crée des tourbillons qui sont à l'origine d’effets

micro-convectifs. L’influence des effets micro-convectifs sur la conductivité globale est

caractérisée par une grandeur adimensionnelle : le nombre de Péclet des particules, τdp2/αf,

avec αf, la diffusivité thermique du fluide porteur. Pour des nombres de Péclet suffisamment

élevés, les effets micro-convectifs représentent un mécanisme de transport supplémentaire qui

s'additionne au transport moléculaire entraînant une augmentation de la conductivité

apparente, ksa.

Leal (1973), cité par Charunyakorn et al. (1990), a analysé l'augmentation de la conductivité

pour une suspension diluée (l’interaction des particules entre elles est négligeable) pour des

nombres de Péclet faibles (Pe < 0,67) en considérant que les procédés de diffusion dans

l'écoulement sont la combinaison des effets de diffusion moléculaire et des effets de micro-

convection. Il a obtenu la relation suivante qui est valable lorsque les conductivités des

particules et du fluide sont égales.

5,131 pvf

sa Peck

k+= avec

f

pp

dPe

ατ 2

= (1-27)

Nir et Acrivos (1976), cités par Charunyakorn et al. (1990), ont utilisé un modèle similaire

pour étudier l’écoulement de suspensions diluées à des nombres de Péclet élevés (Pe > 250) et

ont obtenu la relation suivante :

1111 pvf

sa PeAck

k+= ² (1-28)

où A est une constante déterminée expérimentalement.

A partir des résultats expérimentaux de Sohn et Chen (1981), Charunyakorn et al. (1991) ont

déduit une corrélation, lorsque les effets de paroi sont négligeables, pour des nombres de

Péclet modérés, de la forme :

18,08,11 pvs

sa Peck

k+= (1-29)

avec ks la conductivité de la suspension au repos. De ces mêmes résultats, pour avoir une

continuité de la conductivité à Pe = 250, Charunyakorn et al. déduisent une valeur de 3 pour

A pour la relation de Nir et Acrivos. Cependant, ils utilisent les résultats de Sohn et Chen

alors que ces derniers restent plus généraux dans leur interprétation. Aux faibles nombres de

Péclet, ils constatent que l’augmentation de la conductivité est modeste : les effets micro-

convectifs semblent n’être qu’une perturbation aux transports moléculaires. Aux nombres de

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

75

Péclet élevés, la conductivité apparente est plusieurs fois supérieure, indiquant que les effets

micro-convectifs dominent le transport. A ce régime, les mesures expérimentales approchent

une loi en puissance de la forme :

2

1

),( pvs

sa Pecfk

k�= pour Pep > 300 (1-30)

Nir et Acrivos ne proposent pas de relations plus complètes à partir de leurs résultats car la

disparité entre les différents auteurs met en évidence l’importance des conditions

expérimentales (nature des suspensions, taille des particules, conditions opératoires,…) sur

l’allure des courbes.

Pour avoir une approche plus locale du phénomène, Sohn et Chen (1984) ont relié

directement la conductivité au taux de cisaillement. Le taux de cisaillement étant plus fort à

proximité des parois, la conductivité est une fonction de la position du fluide dans la conduite.

Le modèle établi pour représenter la dépendance de la conductivité avec le taux de

cisaillement, est illustré sur la Figure 1. 21 et répond aux équations suivantes :

ssa kk = pour τ < τt (1-31)

n

tssa kk

=

ττ

pour τ ≥ τt (1-32)

où τt est le taux de cisaillement critique au-dessus duquel il y a augmentation de la

conductivité, ks, la conductivité de la suspension au repos et n un exposant. Ces trois

paramètres sont déterminés expérimentalement.

Figure 1. 21 : Illustration schématique de la variation de la conductivité avec le taux de cisaillement

Pour une distribution parabolique des vitesses, la conductivité est proportionnelle à y et

s'exprime sous la forme suivante :

yt

ln ksa

ln τ

n

ks

τt

τt

ks

ksau

τ

2 b0 x

y

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

76

n

w b

y

k

k

= pour y ≥ yt (1-33)

w

s

n

t

w k

k

b

y

k

k =

= pour y < yt (1-34)

avec kw la conductivité à la paroi et yt la coordonnée où le taux de cisaillement atteint son

seuil critique :

U

by t

t 3

²τ= (1-35)

n

tsw

b

Ukk

=

τ3

(1-36)

avec U la vitesse moyenne.

Cette approche est intéressante qualitativement, mais les relations proposées dépendent de

paramètres expérimentaux difficilement déterminables, limitant leur application.

Par ailleurs, les relations présentées ci-dessus ne prennent en compte que le phénomène de

micro-convection alors que de nombreux phénomènes comme l'interaction

particules/particules ou l'effet des parois influencent également la conductivité.

Effectivement, à nombre de Péclet équivalent, Sohn et Chen (1981) remarquent une

différence d’augmentation de la conductivité entre deux suspensions ayant la même

concentration de particules (15 %) mais des tailles et une conductivité de particules

différentes. Leurs résultats montrent que même si les effets micro-convectifs sont intimement

liés au nombre de Péclet, il y a d’autres paramètres qui interviennent dans l’augmentation de

la conductivité.

Ahuja (1975) propose une corrélation différente basée sur des résultats expérimentaux, qui

dépend de six paramètres : la fraction volumique des particules, cv, le nombre de Reynolds

basé sur la vitesse de rotation w des particules, le nombre de Péclet, le diamètre hydraulique

Dh de la conduite, sa longueur L et la fréquence de collisions des particules entre elles :

n

pp

h

f

p

f

pfv

s

sa collisionsdefréquenced

L

d

DwdwdcC

k

k

×

=− −8

222

101αµ

ρ(1-37)

C est une constante, dp le diamètre des particules et n > 1 pour cv < 4,6 %

n = 1 pour cv = 4,6 %

n < 1 pour cv > 4,6 %

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

77

Ces six paramètres contribuent à l'augmentation de la conductivité. Le nombre de Reynolds

prend en compte l'inertie du film de fluide entraîné. Le diamètre et la longueur de la conduite

contribuent également à l'augmentation de ksa : plus la conduite est longue et large, plus elle

contient de particules en rotation. Les collisions tendent à diminuer l'augmentation de ksa

puisqu'à chaque collision, la rotation du film de fluide est empêchée. De plus, certaines

collisions entraînent la formation de doublets entraînant la diminution de la surface de contact

entre les particules et le fluide.

Les travaux d’Ahuja mettent en évidence que le nombre de particules qui migrent radialement

en raison de leur inertie et très inférieur au nombre de particules en rotation. Donc la

migration des particules n'est pas un paramètre qui intervient de manière significative dans

l'augmentation de ksa.

Cette relation est difficilement exploitable en raison de la difficulté à déterminer certains

paramètres comme la fréquence de collisions et la vitesse de rotation des particules sur elles-

mêmes. Elle reste cependant intéressante qualitativement pour mettre en évidence les

différents mécanismes responsables de l'amélioration de la conductivité.

1.3.3. Transfert de chaleur en régime laminaire

�������� 5DSSHO�VXU�OHV�IOXLGHV�PRQRSKDVLTXHV

Dans une conduite, dès qu’il y a un gradient de température entre la paroi (Tw) et le fluide (T)

il se crée un transfert de chaleur qui tend à homogénéiser les températures. Le flux thermique

peut être exprimé selon un modèle connu sous le nom de loi de Newton :

( )wTThS −=ϕ (1-38)

avec S la surface d’échange et h le coefficient de convection. On utilise plus couramment la

grandeur adimensionnelle qui lui est associée : le nombre de Nusselt Nu qui caractérise

l’intensité du transfert thermique. Il représente le rapport :

résistance aux transferts par conduction

résistance aux transferts par convection

Il est défini comme :

khD

Nu h= (1-39)

avec Dh le diamètre hydraulique de la canalisation et k la conductivité du fluide. Le nombre de

Nusselt dépend principalement des propriétés du fluide et de son régime d’écoulement.

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

78

Shah et London (1978) ont étudié les transferts de chaleur en convection forcée d’un fluide

monophasique newtonien en écoulement laminaire, incompressible, aux propriétés physiques

constantes. L’équation de la chaleur qu’ils utilisent prend en compte les sources d’énergie

thermique, les dissipations visqueuses, la conduction axiale et le travail exercé par les forces

de pression. Mais elle néglige la convection naturelle et les sources d’énergie issues du

changement de phase et des réactions chimiques. Dans le cas où le fluide s’écoule entre deux

plaques lisses, les solutions de cette équation sont présentées ci-dessous pour les conditions

limites suivantes : densité de flux de chaleur pariétal, ϕ = constante ou Tw = constante.

• Longueur d’établissement du profil hydraulique

Le problème du développement d’un écoulement laminaire entre deux plaques lisses a été

résolu par de nombreux auteurs en utilisant l’équation de Navier-Stokes et des conditions

limites appropriées. Chen (1973) propose l’équation suivante pour évaluer la longueur

d’entrée nécessaire au fluide pour établir son profil hydraulique :

ReRe

D

L

h

hy

0175,01

315,0011,0

++= (1-40)

Lorsque la largeur des plaques est grande devant l’écartement (2b), le diamètre hydraulique,

Dh, est équivalent à 4b. Dans nos conditions expérimentales, la vitesse d’écoulement étant très

faible (de l’ordre de 0,05 m.s-1) le nombre de Reynolds est petit. L’écartement des plaques est

de l’ordre du millimètre. Ainsi, la longueur d’établissement du profil hydraulique, Lhy, est de

l’ordre de quelques centimètres. Devant la longueur des plaques, on peut considérer que le

profil hydraulique s’établit instantanément.

• Ecoulement complètement développé

Lorsque le profil hydraulique et le profil de températures sont établis, l’écoulement est dit

complètement développé. Dans ce cas de figure, le nombre de Nusselt est constant sur la

longueur des plaques. Les valeurs trouvées par Shah et London (1978) sont :

− pour une température de paroi uniforme : Nu = 7,541

− pour un flux de chaleur uniforme : Nu = 8,235

• Ecoulement non-établi thermiquement

La longueur de canal nécessaire à l’établissement du profil des températures lorsque la

température de paroi est uniforme se calcule par la relation de Shah et London :

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

79

PrRe00797,0=h

th

D

L(1-41)

et lorsque le flux est uniforme :

Pr01154,0 ReD

L

h

th = (1-42)

avec Pr le nombre de Prandtl égal à kCpµ

.

Lorsque le profil hydraulique est établi mais pas le profil thermique, le nombre de Nusselt

évolue le long des plaques et dépend de la longueur adimensionnelle z* :

Pr*

ReD

zz

h

=

Dans le cas où la température est uniforme aux parois, le nombre de Nusselt local trouvé par

Shah et London est égal à :

( ) 4,0*233,1*)( 31

+= −zzNu pour z* ≤ 0,001 (1-43)

( ) *245488,03 *10874,6541,7*)( zezzNu −−+= pour z* > 0,001 (1-44)

Sur la longueur totale des plaques, le nombre de Nusselt moyenné est égal à :

( ) 31

*849,1 −= LNu pour L* ≤ 0,0005 (1-45)

( ) 6,0*849,1 31

+= −LNu pour 0,0005 < L* ≤ 0,006 (1-46)

*

235,0541,7

LNu += pour L* > 0,006 (1-47)

avec L* la longueur adimensionnelle pour z = L.

Dans le cas où le flux de chaleur est uniforme aux parois, le nombre de Nusselt local est égal

à :

( ) 31

*490,1*)( −= zzNu pour z* ≤ 0,0002 (1-48)

( ) 4,0*490,1*)( 31

−= −zzNu pour 0,0002 < z* ≤ 0,001 (1-49)

( ) *164506,03 *1068,8235,8*)( zezzNu −−+= pour z* > 0,001 (1-50)

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

80

Le nombre de Nusselt moyenné est égal à :

( ) 31

*236,2 −= LNu pour L* ≤ 0,001 (1-51)

( ) 9,0*236,2 31

+= −LNu pour 0,001 < L* ≤ 0,01 (1-52)

( ) 1*0364,0235,8 −+= LNu pour L* > 0,01 (1-53)

�������� )OXLGHV�GLSKDVLTXHV�VDQV�FKDQJHPHQW�GH�SKDVH

Au paragraphe 1.3.2.2, il est montré que la conductivité est une fonction de la position par

rapport aux parois en raison de sa dépendance avec le taux de cisaillement. Ainsi, la

résolution de l’équation d’énergie est plus complexe que dans le cas classique de convection

laminaire. Sohn et Chen (1984) ont résolu ces équations différentielles en utilisant la méthode

de Runge-Kutta. Leurs résultats montrent une augmentation significative du coefficient

d’échange entre le fluide diphasique et la paroi lorsque l’augmentation de la conductivité est

prise en compte. Pour illustrer ces tendances, les estimations de l’augmentation de la

conductivité et du coefficient de transfert de chaleur d’une suspension dans une conduite

circulaire pour plusieurs combinaisons de taille de particules, de diamètre de canalisation et

de vitesses sont montrées dans le Tableau 1-4.

Facteurs d’améliorationde la conductivité

Facteurs d’améliorationdu coefficient d’échange

Diamètre du tube Diamètre du tubeVitesse(m.s-1)

Diamètre desparticules (mm) 3 mm 10 mm 3 mm 10 mm

0,1 - - - -0,3 - - - -0,11 3 1,6 2,5 1,4

0,1 - - - -0,3 2,8 1,6 2,4 1,311 9,4 5,2 7,9 4,3

0,1 3 1,6 2,5 1,40,3 8,9 4,9 7,5 4,1101 30 16 25 14

Tableau 1-4 : Facteurs d’amélioration théorique de la conductivité et du coefficientd’échange d’une suspension s’écoulant dans un tube (extrait de Sohn et Chen – 1984)

Dans certaines conditions, une augmentation impressionnante est prédite. Cependant, l’étude

de Sohn et Chen (1984) néglige certains phénomènes présents dans un écoulement chargé en

particules. Une étude expérimentale est nécessaire pour vérifier ces prédictions.

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

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Sohn et Chen (1984) ont également réalisé une étude paramétrique à partir de lois d’échelle

pour évaluer grossièrement le coefficient d’échange. Ils ont remplacé le taux de cisaillement,

τ, par U/Dh dans les cas de tube très long et de tube très court. Ils ont obtenu :

− pour des tubes très longs :

( ) nh

ns

n

p

h

wsaDkUd

D

kh −−− 112~~ (1-54)

avec ksa w la conductivité de la suspension à la paroi, ks la conductivité de la suspension au

repos (sans prendre en compte les effets micro-convectifs), U la vitesse moyenne, Dh le

diamètre hydraulique du tube et n l’exposant dans la relation de puissance entre k et τ.

− pour des tubes très courts :

3

1

3

)1(23

22

~~

h

n

s

n

h

p

h

wsa

D

Uk

D

Ud

D

kh (1-55)

Pour des longueurs de tube intermédiaires où le profil thermique n’est pas encore développé,

les lois d’échelle ne s’appliquent pas. La dépendance de h par rapport à ces paramètres doit

certainement être comprise entre ces deux cas limites.

La difficulté d’utilisation de ce modèle est dans la détermination de la fonction k(y), soit dans

l’évaluation expérimentale de n et de ksa w.

�������� )OXLGHV�GLSKDVLTXHV�DYHF�FKDQJHPHQW�GH�SKDVH

Le problème du transfert de chaleur dans le cas d'une suspension à changement de phase est

encore plus compliqué que le cas d'une suspension sans changement de phase. Le transfert de

chaleur convectif peut être considérablement augmenté par le changement de phase des

particules. La distribution des températures et des vitesses dans l'écoulement, la viscosité, la

capacité thermique massique moyenne et d'autres paramètres thermodynamiques de la

suspension peuvent être modifiés par le changement de phase. Une approche théorique et

expérimentale sur une suspension à changement de phase est donc difficile en raison du

nombre de paramètres qui intervient.

Chen et Chen (1987) ont réalisé un modèle pour calculer le transfert de chaleur d'une

suspension à changement de phase avec une paroi plane à température constante, mais ils ont

posé de nombreuses hypothèses restrictives. Les particules sont très fines, l'écoulement est

laminaire, établi et la viscosité, la conductivité thermique et la capacité thermique massique

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de la suspension sont indépendantes du taux de cisaillement local et de la température. A

partir de l'équation de l'énergie et des conditions aux limites de la couche de fusion, ils ont

proposé une relation pour calculer le nombre de Nusselt local, Nu(z) :

+−

=

+−

=−

...6

1PrRe475,0

332,0

...6

13

)(3

1

3

1

2

1

3

1

3

1

2

1

3

1

3

1

mmii

mcc

c

i

i

m

c

Ste

c

Ste

c

Ste

Cp

k

Uz

c

Ste

zNu

µρµ

si µc = µi (1-56)

avec l'indice i pour les propriétés physiques à l’état initial (solide, dans ce cas de figure) et

l'indice c pour celles dans la couche de changement de phase.

Ste est le nombre de Stefan [équation (I-57)].

La Figure 1. 22 aide à mieux visualiser la structure de l’écoulement modélisé.

Figure 1. 22 : Ecoulement d’une suspension à changement de phase au dessus d’une plaque chauffante.

Une augmentation importante du coefficient de transfert de chaleur peut être obtenue si le

fluide à changement de phase utilisé a une chaleur latente élevée et si sa fraction massique

n'est pas trop faible.

Pour valider leur modèle Chen et Chen (1987) ont réalisé une expérience simple. Ils trouvent

que l'augmentation du coefficient de transfert de chaleur devient évident pour des suspensions

à 25 % : il est 3 fois plus important que celui pour une suspension sans changement de phase.

Cependant, en raison de la simplicité de leur protocole expérimental et des maigres résultats

obtenus, aucune conclusion solide sur la précision de leur expression analytique ne peut être

déduite de leur résultats expérimentaux. Cependant, l'expérience montre que le coefficient

d'échange est amélioré rien que par le changement de phase (sans prendre en compte

Plaque chaudez

y

Particulesliquides

Particulessolides

Couche de fusion

Profil de vitesse(vitesse moyenne U)

Ti

Tc

Tw

Profil detempérature

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l'amélioration apportée par le taux de cisaillement, puisque les mesures sont faites sur une

émulsion d'eau dans de l'huile au repos).

�������� ,QIOXHQFH�GH�FHUWDLQV�SDUDPqWUHV�VXU�OHV�WUDQVIHUWV�GH

FKDOHXU

Les paramètres importants à étudier sont le nombre de Stefan, la concentration en

particules, le rapport du rayon de la canalisation sur celui des particules, le rapport de la

conductivité des particules sur celle du fluide, le nombre de Péclet modifié et le degré

d'homogénéité de la suspension.

• Nombre de Stefan

C'est le rapport de la chaleur sensible des particules sur leur chaleur latente, H.

( )H

TTCpSte cwp −= (1-57)

Charunyakorn et al. (1990), à partir de leur modèle, ont étudié le nombre de Nusselt moyen

et le profil de températures en différents endroits de la section d'essais. Ils ont constaté que

le nombre de Nusselt peut être amélioré en diminuant le nombre de Stefan.

• Concentration en particules

Il existe un optimum en concentration de particules pour obtenir un compromis entre de

meilleurs transferts de chaleur (une forte concentration améliore la conductivité) et des

pertes de pression pas trop importantes (la viscosité augmente avec la concentration).

Pour avoir de bons transferts thermiques, il faut un nombre de Stefan le plus petit possible.

Goel et al. (1994) ont constaté expérimentalement que l'effet de la concentration, pour un

nombre de Stefan donné, est négligeable, sauf à des concentrations très faibles.

Effectivement, si la concentration en particules augmente, la quantité de chaleur à extraire

pour les congeler augmente proportionnellement.

• Rapport des rayons canalisation/particules

D'après Charunyakorn et al., l'influence du rapport de l'espacement des plaques sur le

rayon des particules est négligeable dans l'amélioration des transferts de chaleur. Il semble

que ce rapport n’intervienne que dans la distribution des particules. Comme le remarque

Sohn et Chen (1984), il existe une fine couche à proximité des parois, de l'ordre du

diamètre des particules, dépourvue de particules. Ainsi pour des rapports de rayons

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

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importants, la distribution peut être considérée comme homogène dans les conduites, ce

qui n’est pas le cas pour des faibles rapports.

• Rayons des particules

Pour une fraction massique donnée, plus les particules sont petites, plus la surface en

contact avec le fluide porteur est importante et plus la quantité de fluide entraînée par la

rotation des particules est conséquente. Il semble donc que des particules de petites tailles

contribuent d'avantage à l'augmentation de la conductivité par les effets micro-convectifs

que des grosses particules. Goel et al. ont effectivement observé expérimentalement cette

tendance. Mais, comme raison possible à ce phénomène, ils ont supposé que plus les

particules étaient grosses, plus elles risquaient de sédimenter, de s'agglomérer et de former

ainsi une couche isolante au niveau des parois, qui ralentirait les échanges thermiques.

Cependant, les résultats d'Inaba (1997) ne présentent pas les mêmes tendances. Il observe

que le coefficient de transfert de chaleur augmente avec le rayon des particules. Il constate

également q’une suspension polydispersée de 20 % en fraction massique de grosses

particules de 20 µm et de 80 % de petites de 1,1 µm a le même coefficient de transfert

qu’une suspension monodispersée de particules de 13,8 µm. Malheureusement aucune

interprétation n’est faite de ces résultats qui vont à l’inverse de ceux trouvés par les autres

auteurs.

Pour conclure sur le choix du rayon des particules, il semble judicieux d'utiliser une

suspension polydispersée tout en trouvant un compromis dans la taille des particules pour

que les petites ne présentent pas de problèmes de surfusion et que les grosses ne soient pas

trop détériorées lors du pompage.

• Rapport des conductivités particules/fluide

Charunyakorn et al. (1990) ont conclu d'après leur modèle que le rapport des conductivités,

kp/kf, a une influence négligeable dans la gamme qu'ils ont étudiée (0,25 à 4) et qu'il n'est

pas utile de le considérer comme un paramètre. Il serait intéressant de confirmer ces

conclusions par des résultats expérimentaux.

• Homogénéité de la suspension

Goel et al. (1994) ont réalisé deux types d’expérience pour étudier l’effet de

l’homogénéité. Dans un premier temps, ils ont augmenté le débit pour une suspension non-

homogène afin de réduire la séparation des deux phases. Ensuite, ils ont modifié la masse

volumique du fluide porteur pour la rendre égale à celle des particules. Leurs résultats

montrent que la variation du débit ou de la densité ont des effets négligeables sur la

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Fluide frigoporteur diphasique à changement de phase liquide solide – Etude bibliographique

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température des parois. Le degré d'homogénéité de la suspension n'a pas d'effet significatif

sur les transferts thermiques de la suspension.

• Type de particules

Dans leurs travaux Roy et Avanic (1997) ont étudié des émulsions. Ils ont comparé leurs

résultats avec ceux de Goel et al. (1994) qui portaient sur des microcapsules et ils ont constaté

que les transferts de chaleur étaient identiques dans les deux cas. Lorsqu'un fluide frigoporteur

est sélectionné, le choix entre des microcapsules et des émulsions ne se base pas sur des

critères thermiques, mais sur des considérations comme la concentration (des plus grandes

valeurs sont possibles avec des émulsions), la perte de pression (plus faible avec des

microcapsules qu'avec des émulsions - Inaba 1997), la durée de vie des suspensions, les

caractéristiques de pompage, la compatibilité des fluides...

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