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Page | 1 Contrats et Usages Commerciaux CONTRATS ET USAGES COMMERCIA Introduction Les contrats commerciaux qui font partie du foisonnement des contrats spéciaux sont souvent opposés aux contrats civils de sorte qu’il est usuel de répartir les contrats en contrats civils et contrats commerciaux. Cette distinction doit pourtant être bien comprise : elle ne signifie nulle qu’il existe dans notre Droit une réglementation propre aux contrats commerciaux. Et d’ailleurs distinction n’est pas facile à faire entre les contrats civils et les contrats commerciaux car il est grand nombre de contrats qui appartiennent au Droit civil mais que l’activité commerciale a ren commerciaux, de sorte que bien des contrats sont aussi civils que commerciaux : ainsi il y a de ventes civiles et des ventes commerciales, des gages civils et des gages commerciaux, des dé civils et des dépôts commerciaux, des baux civils et des commerciaux… et l’énumération peut longue. En outre, la plupart des contrats constituent des actes mixtes lorsqu’ils sont passés en commerçant et des non-commerçants. En clair, les contrats commerciaux portant souvent le même nom que les contrats civils et prod en principe les mêmes effets, il apparaissait souvent que les distinguer de ceux-ci était sans ob Pourtant la distinction entre contrats commerciaux et contrats civils s’avère nécessaire car si l 1107 al 2 C.civ précise que : « les règles particulières aux transactions commerciale par les lois relatives au commerce », c’est bien pour montrer qu’il existe des contrats com côté des contrats civils, c’est bien pour montrer qu’un régime particulier est appliqué aux contr conclus par les commerçants. D’où la question : qu’est-ce qu’un contrat commercial, par opposition au contrat civil ? On se rendra très vite compte que l’hésitation demeure sur le critère de distinction entre contra commerciaux et contrats civils, et pourtant il faudra arriver à être situé sur la qualification de c commercial. §1 : Distinction entre contrats commerciaux et contr Il est classique d’énumérer les différences de régime entre les contrats civilset les contrats commerciaux. Pourtant ces différences s’estompent par une extension au contrat civil des règle contrats commerciaux. Toutefois, il demeure vraiment une différence d’esprit entre les deux ty de transaction. A/ le particularisme du régime des contrats commerciaux Il est traditionnellement fondé sur le besoin de sécurité et de rapidité propre au Droit des Affair C’est ainsi qu’on observe que : La preuve des contrats commerciaux est libre : la preuve des transactions comme largement facilitée. La règle du Droit civil qui exige un écrit pour toute somme ou valeur dépassant 500 frs ne s’applique pas. Par ailleurs, les formalités du double original pour le

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Contrats et Usages Commerciaux

CONTRATS ET USAGES COMMERCIAUX

Introduction

Les contrats commerciaux qui font partie du foisonnement des contrats spéciaux sont souvent opposés aux contrats civils de sorte qu’il est usuel de répartir les contrats en contrats civils et en contrats commerciaux. Cette distinction doit pourtant être bien comprise : elle ne signifie nullement qu’il existe dans notre Droit une réglementation propre aux contrats commerciaux. Et d’ailleurs, la distinction n’est pas facile à faire entre les contrats civils et les contrats commerciaux car il est un grand nombre de contrats qui appartiennent au Droit civil mais que l’activité commerciale a rendu commerciaux, de sorte que bien des contrats sont aussi civils que commerciaux : ainsi il y a des ventes civiles et des ventes commerciales, des gages civils et des gages commerciaux, des dépôts civils et des dépôts commerciaux, des baux civils et des commerciaux… et l’énumération peut être longue. En outre, la plupart des contrats constituent des actes mixtes lorsqu’ils sont passés entre un commerçant et des non-commerçants.

En clair, les contrats commerciaux portant souvent le même nom que les contrats civils et produisant en principe les mêmes effets, il apparaissait souvent que les distinguer de ceux-ci était sans objet. Pourtant la distinction entre contrats commerciaux et contrats civils s’avère nécessaire car si l’article 1107 al 2 C.civ précise que : « les règles particulières aux transactions commerciales sont établies par les lois relatives au commerce », c’est bien pour montrer qu’il existe des contrats commerciaux à côté des contrats civils, c’est bien pour montrer qu’un régime particulier est appliqué aux contrats conclus par les commerçants.

D’où la question : qu’est-ce qu’un contrat commercial, par opposition au contrat civil ?

On se rendra très vite compte que l’hésitation demeure sur le critère de distinction entre contrats commerciaux et contrats civils, et pourtant il faudra arriver à être situé sur la qualification de contrat commercial.

§1 : Distinction entre contrats commerciaux et contrats civils

Il est classique d’énumérer les différences de régime entre les contrats civils et les contrats commerciaux. Pourtant ces différences s’estompent par une extension au contrat civil des règles des contrats commerciaux. Toutefois, il demeure vraiment une différence d’esprit entre les deux types de transaction.

A/ le particularisme du régime des contrats commerciaux

Il est traditionnellement fondé sur le besoin de sécurité et de rapidité propre au Droit des Affaires. C’est ainsi qu’on observe que :

La preuve des contrats commerciaux est libre : la preuve des transactions commerciales est largement facilitée. La règle du Droit civil qui exige un écrit pour toute somme ou valeur dépassant 500 frs ne s’applique pas. Par ailleurs, les formalités du double original pour les

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actes sous seing privé contenant des conventions synallagmatiques et du « bon pour… » ou « lu et approuvé » pour les engagements unilatéraux ne sont pas rigoureusement exigés en matière commerciale.

La solidarité passive se présume : alors qu’en Droit civil, cette modalité doit être expressément stipulée (hormis bien entendu les cas exceptionnels où elle est légale ou jurisprudentielle), elle est au contraire automatiquement en Droit commercial de sorte que, sauf clause contraire, les codébiteurs d’un même contrat commercial sont solidairement tenus.

L’inexécution des contrats commerciaux peut entrainer l’ouverture d’une procédure collective d’apurement du passif.

La mise en demeure de payer est peu formaliste : une lettre recommandée suffit. En matière commerciale, la mise en demeure n’exige pas un exploit d’huissier. Tout acte par lequel le créancier réclame son dû déclenche les effets de la demeure. En vertu d’une clause du contrat, celle-ci peut résulter de la seule échéance du terme.

La prescription extinctive est en principe de 10 ans : les obligations nées entre commerçants à l’occasion de leur commerce se prescrivent donc par 10 ans si elles ne sont pas sujettes à une prescription plus courte. Le délai trentenaire (30 ans) est donc écarté.

Certes, tout ce précède est vrai en matière commerciale mais ce besoin de rapidité et de sécurité qui caractérise le Droit commercial se trouve aussi en Droit civil, et bien des arguments invoqués à l’appui de la distinction peuvent se nuancer. En effet :

La preuve des contrats commerciaux est certes libre mais beaucoup de contrats commerciaux supposent un écrit (contrat maritime, société commerciale, vente de fonds de commerce, etc.) et inversement, la preuve de quelconque contrat civil est facilitée (preuve électronique, électronique par copie est admise sous certaines conditions).

La solidarité se présume en Droit commercial, il est vrai, mais en Droit civil, elle est également souvent stipulée (pas un banquier ne prêtera à des époux sans exiger leur engagement solidaire par exemple).

S’il est vrai que l’inexécution des contrats commerciaux entraine l’ouverture d’une procédure collective d’apurement du passif, l’inexécution des contrats civils passés par des personnes morales de Droit privé (donc de droit civil ou commercial) l’entraine à différents la loi relative aux procédures collectives dans l’espace OHADA n’exclut guère de son domaine que des personnes physiques et encore non commerçantes.

La mise en demeure de payer consécutive à l’inexécution d’un contrat civil, se fait à l’instar d’un contrat commercial, à la suite de l’évolution jurisprudentielle par lettre recommandée.

La prescription est trentenaire en Droit civil, mais bien des prescriptions sont également plus courtes en droit civil : ainsi pour l’article 2777 C. civ. Prévoit une prescription de cinq (5) ans pour les actions en paiement de salaires, des arrérages des rentes perpétuelles et viagères, des loyers et des fermages, des intérêts des sommes prêtées ; l’art. 2271 C. civ. Prévoit une prescription de 6 mois pour l’action des hôteliers et traiteurs à raison de logement et de la nourriture qu’ils fournissent, etc.

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On le voit, les contrats civils et commerciaux sont voisins, les intérêts légaux ont été unifiés, donc les différences de régimes sont moins nets qu’autrefois. Il reste surtout une différence d’esprit.

B / La Différence d’Esprit

Le droit commercial est spéculatif : c’est le droit des richesses et des bénéfices. C’est aussi un droit attiré par la fortune alors que le droit civil est plus conservateur mais dépendant de l’activité économique. En outre, ces deux types de contrats sont également différents quant aux personnes (les contrats commerciaux seront souvent conclus par des intermédiaires qui s’interposent dans la circulation des biens tels que les concessionnaires, les courtiers ou par des personnes morales, des sociétés, qui sont des êtres singuliers qui ne vivent que pour commercer) et quant aux biens (les contrats commerciaux auront trait pour l’essentiel à des meubles corporels - marchandises ou matériels - à des biens incorporels - cession de fonds de commerce, d’actions de sociétés, de licences de brevets, de marques… - le droit civil s’intéressera plus souvent à l’immeuble. Ces contrats ne sont donc pas animés du même esprit).

Mais tout cela ne suffit pas à dégager un critère suffisant de distinction. D’où la recherche d’une qualification de contrat commercial

§2- La qualification de contrats commerciaux

La commercialité est une notion difficile à définir car si certains actes sont absolument civils (la donation) et d’autres toujours commerciaux comme la signature d’une lettre de change, la plupart des actes peuvent être civils et commerciaux (la vente, le dépôt, le transport).

Ce qu’il faut savoir, c’est que s’agissant de savoir ce qui est commercial et ce qui ne l’est pas, la définition juridique de la commercialité a fait l’objet de controverses : en effet, deux conceptions ont été proposées, une conception subjective et une conception objective. Dans le système dit subjectif, les actes de commerce sont les actes des commerçants et nul ne peut réaliser un acte de commerce s’il n’exerce une profession commerciale. Le droit commercial est alors tenu pour un droit professionnel, le droit des commerçants et l’acte de commerce est en réalité l’acte du commerçant. Cette conception a l’avantage d’une apparente simplicité, mais l’on est sans ignorer qu’elle est limitée. Car un commerçant peut bien passer des actes qui ne soient pas commerciaux pour autant. Pour battre en brèche cette théorie, il a été proposé la théorie objective de la commercialité qui est une théorie détachée de la profession commerciale pour prendre en compte seulement les actes de commerce. Le droit commercial n’est donc plus le droit des commerçants, mais le droit des actes de commerce. Mais comment reconnaître alors ces actes auxquels s’appliqueront les règles du droit commercial ?

Pour savoir si les règles du contrat commercial s’appliquent à un acte, il faut parvenir à le qualifier. En effet, l’existence d’un acte, créateur de droits et d’obligations juridiques entraine la nécessité d’une qualification pour préciser le régime juridique qui doit lui être appliqué. Cependant, en pratique, la qualification est souvent établie de manière implicite par les parties. Elle se déduit des obligations de l’acte. Mais, à l’analyse, certains contrats sont commerciaux par nature ou par détermination de la loi. Il s’agit de tous les contrats régis par l’acte uniforme portant sur le droit commercial général et des contrats de société qui adoptent la forme des sociétés commerciales ( SA, SARL, SNC, SCS). D’autres contrats sont civils par nature. Ce sont des contrats à titre gratuit ou des

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contrats de services gratuits comme la donation (la gratuité est en principe étrangère au Droit commercial guidé par l’esprit de spéculation). Mais en dehors de ces contrats, tout contrat est susceptible d’être commercial ou civil. Fort heureusement, la qualification de contrat commercial peut se déduire grâce à certaines caractéristiques précisées par la jurisprudence.

Ainsi, selon la jurisprudence, le contrat est commercial lorsqu’il a pour objet un acte de

commerce ou qu’il est accompli par un commerçant pour les besoins de son commerce. Ainsi dans

un arrêt de principe en date du 30 Janvier 1966, la première chambre civile de la Cour de Cassation

Française a considéré que l’acte de commerce est l’acte ayant un rapport direct avec l’activité

professionnelle du commerçant.

Une présomption est donc admise par la jurisprudence : tous les contrats passés par un

commerçant sont en principe des contrats commerciaux. Quant aux actes conclus par un

commerçant avec sa clientèle civile, ils sont qualifiés d’actes mixtes : de ces actes naissent des

obligations commerciales à la charge du commerçant, tandis que celles naissant à la charge de sa

clientèle sont des obligations civiles.

En raison de cette présomption, le commerçant devra prouver si un contrat, source de

contentieux, a été conclu sans qu’il n’ait de rapport direct avec son activité professionnelle. Il devra

apporter cette preuve en se fondant sur la nature de l’objet ou de la cause du contrat.

Somme toute :

­ Sont commerciaux les contrats passés par un commerçant pour les besoins de son

commerce, par application de la théorie de l’accessoire (il faut s’attacher à la qualité de la

personne et à la finalité du contrat. Le droit commercial est en effet un droit corporatiste et

un droit professionnel. Le caractère professionnel implique la commercialité.) ;

­ Sont civils, par application de cette idée ou théorie de l’accessoire, les contrats passés par

des non commerçants (ex : la vente de particuliers à particuliers), et les contrats des

commerçants conclus pour leurs besoins personnels, en dehors de leur activité

professionnelle (ex : achat d’un appartement pour se loger) ;

­ Sont mixtes les contrats conclus entre personnes civiles et les commerçants (ex : achat de

pain). Le même contrat sera civil pour la personne civile ; et commercial pour l’autre. La

plupart des contrats de la vie courante sont d’ailleurs des contrats mixtes.

Il faudra donc ventiler les règles en fonction de la qualité du contractant.

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Une fois la qualification de contrat commercial dégagée, un régime juridique lui est appliqué. Par

conséquent, la qualification de contrat commercial entraîne l’application d’au moins 2 règles

essentielles : la règle de compétence des juridictions et celle de la preuve.

­ Les règles de compétence désignent en principe le tribunal de commerce du domicile du

défendeur. Toutefois les commerçants peuvent prévoir des clauses d’arbitrage qui

soumettent leur contentieux à des arbitres. Quant aux actes mixtes, ils suscitent des

difficultés. A leur sujet, la jurisprudence a considéré que le non-commerçant peut saisir la

partie adverse commerçante devant le tribunal civil comme devant le tribunal de commerce,

alors que le commerçant ne pourra choisir que le tribunal civil.

­ La 2e règle à garder à l’esprit face à un contrat commercial est la liberté de la preuve. Il est

évident que cette règle facilite la preuve de la démonstration des prétentions des parties.

Pour autant, l’écrit reste le meilleur moyen pour éviter de nombreuses difficultés inutiles.

Pour que la règle de la liberté de la preuve s’applique, il faut que le contrat soit commercial

ainsi que les parties. Le régime civil s’applique donc aux actes mixtes, ce qui impose la preuve

écrite (article 1341 C. Civil)

Cette règle de liberté de la preuve entraîne plusieurs conséquences dont notamment :

­ La preuve du contrat commercial peut être faite par tous moyens ;

­ L’action dirigée contre un commerçant a sa preuve libre

­ L’action d’un commerçant contre un non commerçant est soumise aux règles du droit civil.

Cela étant, s’agissant des usages commerciaux, il faut dire qu’ils constituent une des sources du droit

des contrats commerciaux. C’est pourquoi après avoir étudié les contrats commerciaux (1ère partie),

une brève étude leur sera réservée (2e partie).

PREMIERE PARTIE : LES CONTRATS COMMERCIAUX

Il y a une kyrielle de contrats commerciaux dont la totalité ne peut faire l’objet d’étude dans le cadre

de ce cours. Seuls quelques-uns seront étudiés ici : il s’agit notamment de la vente commerciale, du

crédit-bail ou leasing et de la franchise ou franchising.

TITRE 1 : LA VENTE COMMERCIALE

Considérations générales :

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Instrument essentiel des échanges économiques, la vente est, de tous les contrats, celui qui, le plus

naturellement, est commercial. En effet, ce contrat a connu comme beaucoup d’institutions

juridiques une commercialisation : le domaine de la vente commerciale s’est étendu jusqu’à

pratiquement lui faire recouvrir la plupart des ventes mobilières.

En ce qui concerne les sources du droit de la vente commerciale, il faut dire que le seul texte

régissant un tel contrat est le Livre cinquième de l’Acte Uniforme OHADA portant sur le droit

commercial général. Mais ce texte ne s’applique qu’aux contrats de vente de marchandises entre

commerçants, personnes physiques ou morales, à l’exclusion donc des ventes aux consommateurs

(c'est-à-dire à toute personne qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité

professionnelle), à l’exclusion des ventes sur saisie, par autorité de justice, des ventes aux enchères,

des ventes de valeurs mobilières, des ventes d’effets de commerce, de monnaies ou devises, de

cessions de créances, et des contrats dans lesquels la part prépondérante de l’obligation de la partie

qui fournit les marchandises consiste dans la fourniture de main d’œuvre ou d’autres services.

Ces ventes commerciales exclues du champ d’application du Livre Ve de l’AU sur le droit commercial

général sont quant à elles régies par d’autres textes législatifs ou administratifs.

La vente commerciale est aussi soumise aux règles du droit commun (droit applicable sauf

dérogation), car à défaut de règles particulières et de législation complémentaire, il convient de

recourir au C. Civil dont les dispositions forment le fonds commun du droit privé. C’est ainsi que les

règles fondamentales de la conclusion des contrats posées par le C. Civil s’appliquent également au

droit commercial.

Par ailleurs, le droit de la vente commerciale ne comporte de grandes constructions prétoriennes

(jurisprudentielles) sauf en matière de détermination du prix et surtout de garantie du fabricant et

du vendeur professionnel où la jurisprudence a aggravé les responsabilités du fabricant et du

vendeur professionnel (lire par exemple Philippe Malinvaud, La responsabilité civile du vendeur à

raison des vices de la chose, JCP 1968 I. 2153 ; aussi, La responsabilité du fabricant en droit français,

Gaz. Pal 1973, 2, Doctr. 463).

A l’analyse, la source vivante du droit contemporain de la vente commerciale se trouve dans la

pratique : contrat type de vente, conditions générales de vente, code d’usages commerciaux etc.

Il faut également préciser que la vente commerciale est plus encore que toute autre convention

susceptible de nombreuses modalités, qui en déterminent le régime : en effet, de plus en plus, le

contrat de vente se diversifie en type de vente assez différents les uns des autres, différences qui

tiennent surtout à l’objet de la vente. Ainsi avons-nous des ventes internationales et des ventes

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internes, des ventes de choses fongibles et des ventes de choses non fongibles, des ventes en gros et

des ventes en détails. Quelques ventes prévoient même des prestations de service (par exemple un

service après-vente à la charge du vendeur : lire à ce propos, Mousseron et Seube, à propos des

contrats d’assistance et de fournitures, Dalloz 1973, Chrono. 197) ou même portent sur des services

(lire R. Savatier, La vente de services, Dalloz 1971 Chron.223). Bien évidemment, le régime juridique

de ces types de vente ne peut être le même.

Cela étant, le contrat de vente commercial ne se différenciant que très peu de la vente civile, seules

quelques règles autres que celles applicables à la vente civile seront étudiées, notamment les règles

applicables au contrat commercial. Ainsi, dans l’intérêt de la concurrence, les pratiques restrictives

de concurrence ont été règlementées. De cette considération, il faudra voir les modalités pouvant

affecter le consentement.

Chapitre 1 : La règlementation de la vente commerciale

En principe, le vendeur est libre de vendre à qui il veut et aux conditions qu’il veut. Mais l’exercice de

cette liberté peut par ces excès être incompatible avec le libre jeu de la concurrence. Le législateur

ivoirien a donc dû prendre des mesures pour favoriser la concurrence. Ces mesures portent sur les

prix et sur les procédés de vente.

Section 1 : La règlementation des prix

De prime abord, il faut signaler qu’au plan national, la concurrence est régie par la loi nationale 91-

999 du 27 Décembre 1991 relative à la concurrence et les décrets 92-50 du 29 Janvier 1992 portant

règlementation des prix portant Organisation et fonctionnement de la commission de la

concurrence. Mais, le domaine de ces dispositions internes est actuellement restreint par le principe

de l’exclusivité du droit communautaire de l’UEMOA en matière de pratiques anticoncurrentielles.

Il en résulte que seules les dispositions relatives aux pratiques restrictives de la concurrence

demeurent régies par les lois nationales.

A ces textes de base, il faut ajouter des dispositions particulières à certains secteurs d’activités tels

que celui des télécommunications qui a un régime spécial résultant du code des télécommunications.

Cela étant, la loi de 1991 pose le principe de la liberté des prix. En conséquence, le législateur a prévu

certaines dispositions tendant à faire respecter cette liberté en limitant les entraves qui peuvent lui

être portées. Mais cette liberté n’a d’effets concurrentiels positifs que si l’acheteur est bien informé,

d’où les dispositions relatives à la publicité des prix.

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§ 1 : La protection de la liberté des prix

Les atteintes à la liberté des prix peuvent être le fait des pouvoirs publics ou des entreprises. Le

législateur protège la liberté des prix contre les interventions des uns et des autres en encadrant

strictement celle-ci, et contre les pratiques des autres en interdisant l’imposition de prix minima.

A- L’encadrement des interventions des pouvoirs publics

Pour tenir compte des nécessités économiques et sociales, le législateur donne au gouvernement le

pouvoir de règlementer les prix. Mais ce pouvoir est limité aussi bien dans son objet que dans ses

modalités.

1) L’objet de la règlementation

La règlementation des prix ne peut porter que sur 2 objets :

­ Elle peut porter sur des produits de premières nécessités dont la loi ne donne aucune

définition. Mais on peut considérer qu’il s’agit sûrement des produits de consommation,

d’usage pour les besoins courants de la vie selon le niveau de vie moyen de la population. Le

décret 92-50 du 29 Janvier 1992 a prévu une liste de 22 produits dont le prix est règlementé :

sucre, farine pour le pain, hydrocarbures, ciment, pile, machettes etc.

­ Elle peut aussi avoir pour but d’empêcher des hausses excessives des prix découlant d’une

situation exceptionnelle de crise ou d’un dysfonctionnement des marchés.

2) Les modalités de la règlementation

La règlementation des prix est soumise à des conditions relativement restrictives :

­ D’abord elle ne peut intervenir que par décret en conseil des ministres. Aucune autre

autorité n’a compétence pour règlementer les prix ;

­ Ensuite, l’avis de la commission de la concurrence est obligatoire ;

­ Enfin la durée des mesures prises ne peut excéder 6 mois.

B- L’interdiction du prix minimum imposé

La loi de 1991 n’a pas envisagé l’hypothèse des prix imposés. C’est le décret 95-29 du 20 Janvier 1995

(article 3 à 5) qui traite de la question. Ces textes interdisent à toute personne (en fait, aux seuls

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professionnels de la vente, qu’il s’agisse de dirigeants, de mandataires ou de préposés) d’imposer

directement ou indirectement un prix minimal ou une marge bénéficiaire minimale de vente ou de

revente d’un bien ou d’un service. Peu importe le mode de fixation de prix minimum, barèmes,

catalogues, étiquettes, factures, prix conseillés… Peu importe aussi que les autorités aient imposés

des prix ou des marges déterminées : la concurrence doit pouvoir jouer librement au-dessous des

prix limites.

Cette interdiction ne concerne que les prix minimaux et non les prix maximaux. Dans cette limite, elle

est totale et générale ; elle ne tolère aucune dérogation, notamment, pendant une durée limitée

pour des produits nouveaux.

§ 2 : L’information sur les prix

Le législateur a prescrit plusieurs obligations d’informations à la charge des vendeurs professionnels.

A cet égard, la règlementation de la publicité des prix est classique (marquage, étiquetage,

affichage). Elle est destinée à assurer une prise de connaissance des prix directement par le client

sans avoir besoin de recourir à l’intervention du vendeur ou d’un de ses préposés (article 31 loi 1991

et 2 à 7 du décret 92-50 du 29 Janvier 1992).

Le vendeur professionnel est également tenu de délivrer une facture. Cette facture correspond

désormais à des normes déterminées. Enfin les producteurs importateurs et grossistes doivent

communiquer à tout revendeur leurs barèmes de prix et leurs conditions de vente. Cette information

comporte les conditions de règlement ainsi que les rabais ou ristournes.

Section 2 : La règlementation des ventes elles-mêmes

§ 1 : Les procédés discriminatoires

A- L’interdiction du refus de vente

La liberté du commerce et de l’industrie confère à un commerçant le droit de refuser de vendre. Mais

la loi pénale interdit à certaines conditions le refus de vente. Ainsi, il est interdit de refuser la vente à

un consommateur ou la prestation d’un service sauf motif légitime. Cette interdiction s’explique par

2 raisons : pour empêcher que ne soit éludé le contrôle des prix et pour assainir la concurrence

qu’entravent certains contrats d’exclusivité de vente. Le refus de vente est sanctionné pénalement

conformément aux articles 27 et 30-2e de la loi 91-999 du 27 décembre 1991 et articles 10 à 21 du

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décret 95-29 du 20 Janvier 1995. L’infraction implique la réunion de 2 conditions : une demande de

produits ou de service d’une part et un refus de vente d’autre part.

Il faut que le commerçant ait refusé de vendre. Ce refus peut être le refus d’une marchandise ou

celui d’une prestation de service quelconque. Le refus de vente est assez largement compris : il est

constitué lorsque le commerçant refuse par exemple de donner le renseignement permettant

d’établir une commande précise (Paris 1er Mars 1967, Dalloz 1968 Somm. 7 ; Crim. 30 Avril 1968 Bull.

Crim. 134) ou n’accepte de livrer qu’en l’absence de sa marque, ou sous une présentation différente

qui n’est pas habituelle, ce qui constitue, selon l’expression de la C. Cass. Française, « le refus de

satisfaire à l’une des clauses substantielles de la transaction », ou refuse de manière injustifiée de

consentir des délais de paiement normaux.

A l’analyse, pour être répréhensible, le refus de vente doit remplir certaines conditions :

­ L’auteur doit être un professionnel de la vente. Selon l’article 12 du décret de 1995, il doit

être un producteur, un artisan, un commerçant, un industriel ou toute personne en situation

professionnelle de vendre le produit ou la prestation ;

­ L’auteur doit être opposé à un consommateur ou à un acteur économique qui achète en

vue de revendre ou de transformer ;

­ La demande de l’acheteur doit présenter un caractère normal : elle doit être conforme aux

règles et aux usages commerciaux, qu’elle soit faite de bonne foi et présente un caractère

normal. Elle doit respecter les conditions habituelles et légales de vente du produit. Le

vendeur ne peut pas proposer des conditions de vente différentes de celle proposée par

l’acheteur si celles-ci sont anormales. La demande est anormale lorsqu’elle est

disproportionnée soit par rapport aux capacités de livraison du demandeur, soit par rapport

aux besoins du demandeur. Il en est de même lorsque le vendeur propose des modalités

particulières de livraison et lorsqu’il n’a pas les capacités professionnelles de transformer ou

distribuer le produit ;

­ Le vendeur a les disponibilités nécessaires pour satisfaire la demande. Cette condition est

remplie lorsque le vendeur détient effectivement le produit, s’il est en mesure de s’en

procurer ou, s’agissant de prestations de services, s’il a les moyens de les fournir. En

revanche, il n’y a pas de disponibilité lorsque le vendeur est obligé de puiser dans son stock

de sécurité ou de surseoir à l’exécution de commandes fermes.

Le refus de vente ne peut être justifié que dans certains cas :

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­ Le comportement de l’acheteur : pour que l’infraction soit constituée, il faut en effet que la

demande soit normale et émane d’un acheteur de bonne foi. C’est dire que le refus de vente

peut être tout d’abord justifié par le caractère anormal de la demande qui implique, selon la

jurisprudence, que l’acheteur ait eu un comportement inhabituel qui peut résulter par

exemple de l’insuffisance de personnel qualifié et d’agencement pour une commande de

parfum, la demande d’une quantité disproportionnée au besoin, la modification par le

distributeur à l’insu du fabricant de la présentation au public des marchandises livrées dans

des conditions telles que la qualité risquait d’être altérée, la diffusion d’un catalogue à des

prix inférieurs au prix du fournisseur qui n’a pas encore livré, etc. Le refus de vente peut être

ensuite justifié par la mauvaise foi de l’acheteur. Tel est le cas lorsqu’il entend utiliser le

produit pour nuire au fabricant ou au vendeur ou lorsqu’il a l’habitude de vendre le produit à

perte ou ne présente pas des garanties de solvabilité suffisante et que son insolvabilité a été

déjà constatée par le fournisseur.

­ Lorsque le vendeur est lié par un contrat de concession exclusive à un concédant : lorsque le

vendeur a accordé une concession exclusive, cette transaction rend juridiquement

indisponible la marchandise à l’égard des tiers. Encore faut-il que la concession soit exempt

de toute idée de fraude des droits des tiers, n’ait ni pour but une limitation volontaire de la

concurrence, ni pour effet de priver le consommateur de l’abaissement du prix des produits.

­ Lorsque la vente du produit est interdite par la loi ou par un règlement.

­ Le manque de disponibilité : par exemple, la production du fabricant a été entièrement

absorbée par d’anciens clients ou lorsqu’elle est limitée.

­ Les usages commerciaux : ainsi en est-il lorsqu’il est destiné à maintenir le prestige d’une

marque concernant un produit de haute qualité ou s’explique par la technicité particulière

qu’appelle la vente d’un produit.

Mais le refus de vente ne saurait être justifié par le fait que l’acheteur ne respecte pas les

prix conseillés, l’insuffisance alléguée de la technicité de l’acquéreur si la nature du produit

ne le requiert pas, l’insuffisance du volume d’une commande, le fait que l’usage auquel le

client destine la chose risquerait de déprécier la marque. Enfin, il faut le signaler, est

constitutif d’une infraction pénale, le refus de vente pour raison raciale (lire J. Fonlon-

Pignaniol, la lutte contre le racisme, Dalloz 1972 Chronique 261).

B/ L’interdiction de la vente par envoi forcé

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Contrats et Usages Commerciaux

La vente par envoi forcé est le fait pour un commerçant d’envoyer un produit à une personne qui ne

lui avait pas passé de commande en lui donnant la faculté de garder la chose en en payant le prix ou

de la renvoyer à l’expéditeur. La loi civile a toujours admis que, dans ce cas, la personne sollicitée

n’était pas obligée d’acquérir la chose, ni même de la renvoyer ; l’offrant doit la reprendre au

domicile du destinataire si celui-ci n’en veut pas. Mais la vente par envoi forcé, ie le « fait d’avoir fait

parvenir à un destinataire sans demande préalable de celui-ci, un objet quelconque accompagné

d’une correspondance indiquant qu’il peut accepter par lui, au moyen d’un prix fixé ou renvoyer à

son expéditeur, même si ce renvoi peut être fait sans frais par le destinataire », est constitutive d’une

infraction pénale.

La jurisprudence a été amenée à préciser les notions « d’objet quelconque » et de « correspondance

accompagnant l’envoi ». Elle est interprète largement la première et pour qu’une correspondance

accompagne l’envoi, il suffit qu’elle ait été adressée à l’occasion de l’envoi du colis, sans qu’il y ait à

distinguer selon qu’elle ait été envoyé au moment, avant ou après l’envoi. Il importe également peu

que le destinataire ait la faculté de refuser l’envoi.

C/ L’interdiction des clauses ou pratiques discriminatoires

Les pratiques restrictives de concurrence sont constitutives de faute civile et non pénale. Parmi elles,

le législateur prévoit celle des conditions discriminatoires (Art. 30-1er de la loi 91-999 du 27

Décembre 1991 : Art. 26 à 29 de la loi 95-29 de décembre 1995).

Une telle faute consiste à pratiquer à l’égard d’un client ou d’obtenir d’un fournisseur partenaire, des

prix, délais de paiement, conditions de vente ou modalités de vente ou d’achat discriminatoire et

non justifiée par des contreparties réelles en créant de ce fait, pour ce partenaire, un désavantage ou

un avantage dans la concurrence. La faute est constituée même si elle est occasionnelle ou le contrat

conclu.

Les pratiques discriminatoires ne sont interdites que dans les relations entre partenaires

économiques. Elles ne sont donc par interdites si elles sont pratiquées à l’égard des consommateurs.

Les pratiques discriminatoires s’apprécient au regard de la pratique habituelle du vendeur ou du

prestataire de services.

§2 : Les fraudes dans les ventes de marchandises

La fraude est le fait de tromper ou de tenter de tromper un contractant sur la nature ou les qualités

substantielles, l’espèce ou l’origine, la quantité ou l’identité de toute marchandise. Le délit prévu par

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Contrats et Usages Commerciaux

l’article 319 du C. Pénal suppose l’intention frauduleuse. Il est admis que lorsque le vendeur est le

fabricant, les juges de fond trouvent la preuve de la mauvaise foi dans le fait que le fabricant n’a pas

procédé aux vérifications nécessaires avant la mise en vente.

Sont punis également à ce titre les falsifications des denrées servant à l’alimentation de l’homme ou

des animaux, des substances médicamenteuses, boissons, produits agricoles ou naturels destinés à

être vendus.

§ 3 : Les procédés contraignants

A- Les ventes à la boule de neige

Est considéré comme vente à la boule de neige tout procédé consistant à offrir des produits ou des

services au public en lui faisant espérer l’obtention du produit ou du service à titre gracieux ou

contre un prix inférieur à sa valeur en subordonnant leur vente à la collecte préalable par l’acheteur

d’autres clients. L’intérêt de l’opération pour le vendeur est de faire supporter à l’acheteur la

fonction de prospection et de présentation de clientèle en l’alléchant par un appât. De telles ventes

sont interdites et la violation de cette interdiction constitue une infraction pénale (articles 28, 29 et

30-3e de la loi de 1991 ; articles 23à 25 du décret 95-29 du 20 Janvier 1995).

Curieusement, l’article 25 du décret de 1995 dispose que la vente à la boule de neige n’est pas

soumise à la loi sur la concurrence de 1991 si elle est utilisée à d’autres fins que la vente de produits

ou de biens et , notamment, pour proposer la prestation de service. Cette disposition est sibylline

(floue) et aurait mérité d’être mieux explicitée.

B- Les ventes subordonnées

On regroupe sous cette appellation toutes les formes de vente qui obligent l’acheteur à se soumettre

à une condition anormale imposée par le vendeur. En font partie : les ventes d’une quantité

minimale et les ventes couplées.

1) Les ventes d’une quantité minimale

Le droit ivoirien (article 27 de loi de 1991 ; article 22 du décret de 1995) interdit à tout vendeur (en

gros ou au détail, le texte ne précise pas !) d’imposer à un client l’achat d’une quantité minimale de

produits ou de services. Cette interdiction dont la violation constitue une infraction pénale (article 29

de la loi 91) est exprimée dans des termes qui ne laissent place à aucune nuance ou dérogation.

Pourtant, dans la réalité, surtout dans les grandes surfaces, on note que de telles ventes se

pratiquent couramment (sacs de pomme de terres de 10 kg, plusieurs paquets de lames ou de

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tablettes de chocolat ou de chewing-gum) sans que ces pratiques cessent ou soit dénoncées ou

sanctionnées.

En réalité, il y a là une tolérance de la part de l’administration économique qui s’inspire

probablement d’une circulaire française qui se base sur des justifications objectives, exclusives de

tout abus :

­ Le groupage des articles doit être le fait du fabricant ou du producteur dans un emballage

conçu et réalisé par lui ;

­ Le lot d’articles identiques doit être adapté à une consommation ou à un usage qui n’excède

pas les besoins d’un consommateur isolé (c’est la seule restriction que le décret de 1995 de

par son article 22 retient) ;

­ Le consommateur doit avoir la possibilité de se procurer ces articles au détail, par unité soit

dans le même magasin, soit facilement ailleurs.

2) Les ventes couplées ou jumelées

Ces ventes sont interdites sous la menace de sanctions pénales (article 27 & 29 de la loi de 91 et

article 22 du décret de 95). Elle consiste à subordonner la vente d’un produit ou d’un service à l’achat

d’un autre produit ou service (lot de produit ou de service hétéroclite ou complémentaire comme

trousse d’écolier garni, pneu et chambre à air, vidange, graissage et lavage d’un véhicule, machines à

laver le linge plus paquet de lessive)

Ces ventes sont dites ventes jumelées ou couplées ou ventes par lots. La seule dérogation que le

décret (art. 22) apporte à cette interdiction est la possibilité d’acheter chacun des articles composant

le lot, sans que soit précisé si cette possibilité doit exister dans le magasin, dans le quartier, dans la

ville ou dans le pays.

§ 4: Les avantages pervers

Certains avantages accordés ou proposés aux acheteurs sont interdits ou règlementés en raison des

effets pervers qu’ils peuvent avoir sur le jeu de la concurrence. Il s’agit de la vente avec primes, des

ventes promotionnelles, des soldes et liquidations et des ventes à pertes.

A- La vente avec primes

Elle consiste à ajouter gracieusement en cadeau une prestation ou un produit au bien vendu ou au

service rendu à titre onéreux. Une telle vente est interdite lorsqu’elle est faite au consommateur et

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elle est constitutive d’une infraction pénale (art.26& 29 loi 91 ; art.6 à 9 du décret 95 et décret 64-

217 du 26 Mai 1964 portant règlementation des ventes avec prime).

Il résulte de l’article 26 de la loi 91 que l’interdiction de la vente ne concerne que les professionnels

qui s’adressent aux consommateurs. Elle ne s’applique pas dans les rapports entre professionnels.

Quant aux primes prohibées, il s’agit de « tout produit, bien ou service différent de celui qui a fait

l’objet de la vente ou des prestations de services ». Il n’y a prime que si le produit, bien ou service

offert l’est gracieusement, quel que soit la forme ou les modalités de cette libéralité (tickets,

coupons, timbres ou bons donnant droit à la délivrance de cette prime). Les dérogations à cette

interdiction sont classiques et les primes sont licites si elles consistent en :

­ Des produits ou services identiques à ce faisant l’objet de l’opération principale (13 à la

douzaine, carte de fidélité)

­ Le menu objet ou service de faible valeur ou échantillon :

­ Concernant les objets ou services de faible valeur il doit s’agir d’objets conçus

spécialement pour la publicité et ne pas dépasser 5% du prix net ; cette évaluation

est difficile à faire à première vue et dans la pratique, on assiste à la distribution de

prime d’une valeur supérieure de 5% du prix net

­ Quant aux échantillons bien que la loi ivoirienne ne le précise pas, ils doivent être

offerts dans des conditions de quantité ou de mesure strictement indispensables

pour apprécier la qualité du produit du fabricant.

Elle consiste en des remises en escompte ou en espèces

S’agissant des primes entre professionnels, elles doivent figurer parmi les conditions de

vente communicables à tout revendeur et apparaît sur la facture émise par le fournisseur

(sans doute pour éviter les pratiques discriminatoires de vente ; art.6-4 et 9 du décret 95)

B- Les ventes promotionnelles, soldes et liquidations

La règlementation de ces modalités de vente résulte de 2 arrêtés ministériels antérieurs à la loi de

relative à la concurrence :

­ Arrêté 80 MIC du 7 Novembre 1980 portant fixation des modalités de publicités des

prix annonçant les ventes en soldes, les liquidations etc. modifié par l’arrêté 97 MC

du 22 0ctobre 1997 abrogeant les dispositions de l’article 1er alinéa 3.2 b et 3.4 a du

précédent arrêté (voir JORCI du 18-12-1997 page 1308)

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Contrats et Usages Commerciaux

­ Arrêté interministériel n°48 MIC/INT du 14 Avril 1993 portant définition et

organisation des manifestations promotionnelles à caractère commercial et

industriel en C.I (voir JORCI n°21 du 27-5- 1993 page 398)

Il faut le signaler : ces ventes ne sont pas interdites mais soumises à autorisations et subordonnées à

la réunion de conditions cumulatives. Cette règlementation est destinée à éviter que les

consommateurs soient trompés sur les prix.

1) La vente promotionnelle

On peut considérer que c’est une vente destinée à faire connaitre ou découvrir un produit ou service

en attirant sur lui l’attention par une campagne publicitaire et en l’offrant à un prix ou à des

conditions avantageuses.

­ Elle ne doit pas dépasser 1 mois

­ Les promoteurs d’une telle vente doivent indiquer les caractéristiques de la vente

promotionnelle (réduction de prix ou adjonction de menu objet à l’article principal

faisant l’objet de la vente promotionnelle).

­ Le lieu où se déroule la vente promotionnelle doit être précisée

­ Enfin, le produit en question doit être disponible durant toute la vente

promotionnelle.

2) Les soldes

Il y a solde lorsque la vente de marchandises neuves est faite au détail, accompagnée ou

précédée d’une publicité présentant l’opération comme ayant un caractère réellement ou

apparemment occasionnel ou exceptionnel, destiné uniquement à écouler de façon

accélérée les marchandises concernées. Les soldes ne sont autorisées que dans 2

hypothèses :

­ S’il s’agit de soldes périodiques ou saisonnières de marchandises démodées,

défraichies, dépareillées ou de fins de série vendus en fin de saison ;

­ S’il s’agit de ventes effectuées par un soldeur professionnel dans le local où celui

exerce le commerce ; le soldeur professionnel étant un commerçant dont l’activité

habituelle consiste à acheter, à des commerçants ou à des fabricants en vue de les

revendre, des lots de marchandises neuves, dépareillées, défraichies, démodées ou

de second choix.

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En outre, l’autorisation n’est accordée qu’à la condition que le vendeur en solde :

­ Justifie qu’il détient le stock de marchandises depuis 3 mois au moins ;

­ Pratique des prix soldés inférieurs à ceux pratiqués durant la période précédente ;

­ Indique si la vente concerne tout ou partie du stock détenu

­ Pratique un double marquage de prix

3) La liquidation

Elle suppose que les 4 conditions relatives aux soldes sont réunies. Il faut ajouter une 5ième

condition concernant le motif de l’opération qui est l’écoulement accéléré d’une partie des

marchandises à la suite d’une décision de cesser le commerce, d’en modifier les structures ou les

conditions d’exploitation, que cette décision soit volontaire ou intervenue sous forme de vente

forcée (faillite, changement de gérance, changement d’activité commerciale).

C- Les ventes à pertes

La vente à perte d’un produit (et non un service) en l’état est celle qui est faite à un prix inférieur

au prix d’achat effectif (art 24 et 29 de la loi de 1991 et art 1er du décret de 1995). Elle est

sanctionnée pénalement. L’art 24-3 de la loi de 1991 précise ce qu’il faut entendre par prix

d’achat effectif. Ne tombent pas sous le coup de cette interdiction :

­ Les produits vendus après transformation ;

­ Les prestations de services et les opérations des producteurs, industriels ou artisans

sur les produits qu’ils fabriquent ;

­ Les produits périssables menacés d’altération rapide ;

­ Les produits dont le commerce présente un caractère saisonnier marqué lorsque la

vente a lieu soit pendant la période terminale de la saison, soit entre 2 saisons de

vente ;

­ Les produits qui ne répondent plus à la demande générale en raison de l’évolution de

la mode ou de l’apparition de perfectionnement technique (télévision, ordinateur de

génération précédente… ;

­ Les produits dont le réapprovisionnement s’est effectué en baisse ; le prix d’achat

effectif est alors remplacé par le prix résultant soit de la nouvelle facture d’achat,

soit de la valeur de réapprovisionnement ;

­ Les ventes volontaires ou forcées à la suite de la cessation ou du changement

d’activité, aux ventes en solde ou de liquidation

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Contrats et Usages Commerciaux

Section 3 : La concurrence déloyale et le parasitisme

Certains procédés déloyaux ou illicites dans la compétition commerciale entre professionnels sont

interdits. D’une façon générale, la concurrence est qualifiée de déloyale lorsqu’elle n’est pas

conforme aux usages commerciaux. Certains auteurs ont pu affirmer que le parasitisme n’est qu’une

forme de concurrence déloyale, les différences entre les 2 notions étant infimes.

En effet, le parasitisme tout comme la concurrence déloyale est du domaine de la responsabilité

civile délictuelle et se base donc sur l’idée de faute causant un préjudice et appelant à réparation.

Mais il existe une différence fondamentale entre les 2 situations : la situation de concurrence

déloyale suppose une situation de concurrence entre l’auteur de la faute et sa victime. Par contre, il

existe maintes situations dans lesquelles un agissement parasitaire, profitant de l’avantage d’autrui,

peut se caractériser en dépit de l’absence de situations de concurrence. C’est dans cette hypothèse

que la notion de parasitisme, qui ne présuppose aucun lien concurrentiel entre les acteurs

concernés révèle tout son intérêt.

L’action en concurrence déloyale est une action en responsabilité délictuelle fondée sur les art 1382

et 1383 du code civil : « celui qui cause à autrui un dommage par sa faute, son imprudence ou sa

négligence est tenu de réparer ». Or, la responsabilité civile délictuelle est retenue lorsqu’il y a une

faute, un dommage et un lien de causalité entre la faute et le dommage.

§ 1 : La faute

A/ La faute dans la concurrence déloyale

La faute est constituée par un acte déloyal intentionnel ou non. Selon la convention d’union de Paris

sur la protection de la propriété industrielle du 20 mars 1883, « constitue un acte de concurrence

déloyale, tout acte de concurrence contraire aux usages honnêtes en matière industrielle ou

commerciale ». Avec cette définition, on peut recenser 3 types d’actes déloyaux :

1- Le dénigrement

Il s’agit de propos péjoratifs tenus en public à l’encontre d’un concurrent clairement identifié. Ceux

qui trompent sciemment le public sur la nature, les caractéristiques, les qualités, les prix, la

disponibilité, la sécurité d’usage de produits et de services, ou sur les procédés de fabrication dans le

but de détourner à leur propre profit, la clientèle des concurrents.

Le dénigrement d’une entreprise concurrente ou de ses produits peut se faire de diverses façons,

certaines étant plus discrètes que d’autres. Le dénigrement se fera toujours en public, les

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Contrats et Usages Commerciaux

agissements purement internes à une entreprise n’étant pas concernés. Ainsi il peut y avoir

dénigrement par exemple en prétendant faussement être le seul à disposer d’un produit avec des

qualités spécifiques (comme un éditeur antivirus qui prétendrait être le seul à disposer d’un produit

efficace contre une menace d’actualité).

Le dénigrement de la personne physique ou morale constitue un moyen plus direct. Un tel

dénigrement sera sans doute rarement en relation avec un bien informatique, le dénigrement de

produits le sera de façon d’autant plus évidente. En effet, le dénigrement direct d’un produit en

public constitue sans doute le moyen le plus efficace de s’arroger un avantage sur le concurrent, mais

ce sera aussi le comportement fautif le plus facile à déceler.

2- Les actes engendrant la confusion

Il s’agit ici de limitation du nom, des produits ou de l’enseigne d’un concurrent pour profiter de sa

notoriété. Lorsque le concurrent a un droit de propriété industrielle, il peut agir en contrefaçon d’une

part et en concurrence déloyale d’autre part. Dans le cas contraire, seule une action en concurrence

déloyale est possible. L’action en concurrence déloyale ne doit pas être confondue avec l’action en

contrefaçon. L’action en contrefaçon est une action pénale et s’exerce devant les juridictions pénales

ou répressives dans la mesure où la contrefaçon est un délit. L’action en concurrence déloyale n’est

qu’une action civile dont l’objectif est d’obtenir des dommages-intérêts ainsi que la cessation du

trouble.

3- La désorganisation de l’entreprise

La désorganisation commerciale d’une entreprise par des pratiques telles le détournement de

commandes et le démarchage sont constitutifs d’actes de concurrence déloyale. Ainsi, le fait pour un

commerçant d’exécuter lui-même, en connaissance de cause, une commande adressée à un

concurrent, ou le fait de provoquer, en allant parfois jusqu’au racolage des clients, la résiliation de

commandes déjà passées auprès d’un concurrent, tombe dans le domaine de la concurrence

déloyale. Le dépôt frauduleux d’une marque ou d’un brevet en vue de gêner l’exploitation d’un

concurrent a aussi été reconnu comme déloyal par la jurisprudence. De même, le dépôt d’une

marque (semblable ou identique au nom d’un produit informatique par exemple), voire encore d’un

nom de domaine (site internet semblable à celui d’un site concurrent), visant à gêner l’exploitation

normale d’un commerce concurrent devrait sans trop de difficultés tomber sous la concurrence

déloyale.

On peut également citer les exemples d’espionnage de savoir-faire, de débauchage de personnel

d’une entreprise concurrente, avec souvent fuite de données (employé débauché ayant copié des

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disquettes confidentielles, de création d’une entreprisse concurrente par un ancien salarié). Il peut

s’agir par exemple du débauchage massif de salariés.

B/ La faute dans le parasitisme

Le parasitisme peut résulter de l’usurpation de la notoriété d’autrui, l’usurpation de la technique

d’autrui ou encore l’usurpation de l’idée d’autrui.

1- L’usurpation de la notoriété d’autrui

C’est à propos de l’usurpation de la notoriété d’autrui que la notion d’agissement parasitaire a été

proposée en 1956 par Yves Saint-Gall ; c’est « le fait de se référer, sans s’adresser à la même

clientèle, à une marque ou à toute autre forme de propriété… intellectuelle créée par un tiers et

particulièrement connue et ce à l’effet de tirer profit de sa renommée ». Contrairement à la

concurrence déloyale, la notion de notoriété est ici essentielle. La protection par la notion de

parasitisme n’est pas accordée à n’importe quel signe, liberté du commerce oblige. On peut ainsi

citer comme exemple l’utilisation ou l’appellation champagne pour des cigarettes ou un parfum. Le

fait d’enregistrer une dénomination connue telle qu’Interpol comme nom de domaine pour un site

commercial tombe aussi dans ce domaine.

2- L’usurpation de la technique d’autrui

Partant de l’usurpation de notoriété et le fait qu’une renommée se fonde entre autre sur des

investissements matériels et intellectuels notables de façon à constituer une valeur économique, la

doctrine et la jurisprudence ont élargi le concept d’agissement parasitaire à des situations

comparables. Cependant, la doctrine met certaines restrictions à l’action pour agissement parasitaire

dans ce cas :

­ Les biens juridiques tombés dans le domaine public ne sont pas protégeables.

­ Il s’agit d’une action subsidiaire qui n’est recevable que si aucune autre action n’est

disponible.

En revanche, l’agissement parasitaire peut consister en un acte isolé ou momentané et n’a donc pas

besoin de perdurer dans le temps ou dans la répétition et il n’est pas nécessaire qu’il crée une

confusion.

3- L’usurpation de l’idée d’autrui

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Contrats et Usages Commerciaux

La jurisprudence a pu sanctionner l’usurpation d’une simple idée par voie de concurrence déloyale

ou de parasitisme : « la reprise systématique d’éléments même banals » d’un modèle, sans « aucune

justification », entrainant une confusion dans l’esprit du public, est constitutive de concurrence

déloyale ou plus exactement de parasitisme.

Il ne s’agit pas pour autant grâce au parasitisme de protéger toutes les idées : une telle protection ne

devrait être possible que pour des idées à valeur économique qui ont été détournée de façon

déloyale et cela dans un but lucratif.

§ 2 : Le préjudice et le lien de causalité

Le préjudice peut être matériel ou moral (perte de chiffres d’affaire dû à la perte de clientèle,

atteinte à l’honneur).

Le lien de causalité entre la faute et le préjudice est parfois difficile à mettre en évidence. La

jurisprudence admet donc une présomption de préjudice et de lien de causalité si la faute est

prouvée. Seul une concurrente victime de concurrence déloyale peut agir. La plupart du temps, la

juridiction compétente est le tribunal de commerce. Le tribunal peut accorder des dommages-

intérêts en réparation du préjudice subi et ordonner la publication. Le tribunal peut surtout faire

cesser les pratiques déloyales et la décision peut être assortie d’astreinte (condamnation d’un

débiteur à payer chaque jour une somme déterminée jusqu’à ce qu’il exécute une obligation).

08/02/10

Chapitre 2 :

12/02

§ 2 : La vente à dégustation

La vente à la dégustation peut se présenter dans les ventes dont la chose est individualisée parce que

son objet est un corps certain (dans ce cas, elle est parfaite du jour de la dégustation ; tel est le cas

de la vente d’une chose déterminée dans son individualité, par exemple 7 tonneaux de vin situés

dans telle cave). Elle peut se présenter aussi dans les ventes où la chose est individualisée par sa

localisation ; il s’agit alors d’une vente en bloc (dans ce cas, la simple acceptation du lieu rend la

vente parfaite). Tel est le cas de la vente de la totalité ou d’une part d’une récolte sur pied comme

par exemple la vente d’une récolte de vin. Car la faculté d’agrément dont jouit l’acquéreur n’a pour

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Contrats et Usages Commerciaux

objet que le lieu où se trouve la marchandise et non la chose qui y est située. Dans l’exemple de la

vente d’une récolte de vin, l’agréage du vignoble rend la vente obligatoire et l’acquéreur ne peut

exercer sa faculté de dégustation sur le vin qui en résulte.

Elle peut se présenter encore dans les ventes où la chose est individualisée par pesage, mesurage ou

comptage ; il s’agit alors d’une vente à la mesure. Dans ce cas, le transfert de propriété n’a lieu qu’au

jour du mesurage : ce n’est qu’à cette date que l’acheteur supporte la charge des risques. Mais la

vente devient obligatoire du jour de l’agréage. Tel est le cas de tant de tonnes de vin, subordonnées

à l’agrément de l’acheteur. Le transfert de propriété n’a lieu que lorsque le mesurage ou la

dégustation ont été effectués.

­ La vente à dégustation doit être distinguée de la vente sur échantillon. En effet, dans

la vente sur échantillon, le contrat est exécuté du seul fait que le vendeur livre une

marchandise conforme à l’échantillon antérieurement acceptée par l’acheteur qui

n’a donc plus le libre pouvoir d’agréer la marchandise livrée. Au contraire, dans la

vente à dégustation, l’acheteur a un pouvoir discrétionnaire de refuser la chose.

Cependant, il arrive souvent qu’à l’égard des choses qu’il est dans l’usage de goûter,

la vente à la dégustation se transforme en une vente sur échantillon : il en est ainsi

lorsque lors des pourparlers précédant la vente, le vendeur présente un échantillon à

l’acquéreur qui l’accepte. Dans ce cas, si la marchandise reçue était d’une qualité très

inférieure à l’échantillon, lequel représentait un produit excellent, le vendeur est, à

raison d’un manquement à ses propres obligations et nonobstant le d »faut

d’agréage par l’acheteur, responsable des conséquences dommageables causées à

celui-ci par la mauvaise qualité de la marchandise.

­ La vente à dégustation se distingue aussi de la vente à l’essai. Cette opposition entre

ces 2 types voisins de ventes vient d’une triple différence tenant au consentement

de l’acquéreur, au mode d’individualisation de la chose et à la date du transfert de

propriété. En effet, dans la vente à dégustation, la faculté de goûter est

discrétionnaire tandis que dans la vente à l’essai, l’acheteur doit accepter la

marchandise si l’essai est satisfait. En outre, le plus souvent, la dégustation est

nécessaire pour opérer l’individualisation de la marchandise. Tandis qu’au cas de

vente à l’essai, l’individualisation est faite avant que la chose soit proposée à l’essai,

puisque la chose est livrée avant l’essai. Enfin, si le transfert de propriété ne s’opère

en cas de vente à la dégustation qu’au jour où celle-ci est exercée, dans le cas de la

vente à l’essai, il rétroagit au jour du contrat.

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Tout ce qui précède emmène bien évidemment à se demander : quand peut-on parler de vente à la

dégustation.

L’art 1587 du code civil y répond en présumant que sont ventes à la dégustation les ventes de choses

que l’on est dans l’usage de goûter avant d’en faire l’achat ; et il donne en exemple l’huile et le vin.

Mais en droit commercial, aucune vente n’est présumée être à la dégustation. Sans doute, le fait

qu’une vente soit commerciale n’empêche pas qu’elle puisse être à la dégustation. Cependant, la

vente commerciale étant un achat pour revendre, l’appréciation personnelle de l’acquéreur est

secondaire, et seules les qualités objectives de la marchandise doivent être prises en considération.

La vente commerciale n’est donc pas à la dégustation que s’il y a un usage constant ou des

stipulations expresses en ce sens. Pour finir avec les développements sur la vente à la dégustation, il

faut dire que les contractants peuvent, soit stipuler la faculté de dégustation dans les ventes qui ne la

connaissent pas normalement, soit au contraire l’écarter dans les ventes ayant pour objet des choses

qu’il est dans l’usage de goûter. L’acheteur peut toujours se réserver par une stipulation formelle, le

droit de déguster une marchandise qui d’habitude ne se déguste pas avant d’en faire l’achat. Il peut

également renoncer de façon expresse ou tacite à la faculté de dégustation.

En sus, le vendeur a l’obligation de donner à l’acquéreur les moyens de déguster la marchandise ;

c’est donc à lui qu’il appartient de transporter les marchandises au lieu que fixe la convention pour la

déguster. Le vendeur restant propriétaire, les risques sont sur sa tête, même ceux qui naissent après

la livraison, notamment les risques du transport, le risque fiscal, l’augmentation des droits de douane

survenus entre la vente et la dégustation. Mais cette règle n’étant pas d’ordre public, mes parties

peuvent y déroger. Par ailleurs, si l’acheteur tombe en « faillite » avant l’agréage, le vendeur peut

revendiquer les marchandises, même arrivées dans les magasins de l’acheteur.

Quant à l’acheteur, il doit proc »der à la dégustation, dégustation qui doit en principe être effectuée

au lieu de la livraison sauf si les parties stipulent qu’elle s’opèrera en un autre lieu. L’inexécution

fautive de cette obligation engage sa responsabilité ; le vendeur peut alors faire revendre aux

enchères la marchandise aux risques et périls de l’acheteur. Et si le vendeur est mis en état de

redressement judiciaire ou de liquidation des biens avant la dégustation, l’acheteur n’étant pas

propriétaire de la marchandise, ne peut en exiger la livraison, ni même obtenir des dommages et

intérêts, de même qu’il ne saurait s’opposer à une saisie avant son agrément.

Et lorsque la dégustation a eu lieu, l’acheteur a un pouvoir discrétionnaire pour accepter ou pour

refuser la chose. Mais en matière de vente commerciale, le droit d’agréage de l’acheteur n’est pas

arbitraire ; l’acheteur peut être condamné à des dommages et intérêts s’il abuse de son droit, abus

que le juge appréciera d’après la destination des denrées.

Au cas où l’acheteur agrée la marchandise, la vente est définitivement conclue. L’acquéreur doit

retirer la marchandise et en payer le prix. Mais le transfert de propriété ne se produit au moment où

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l’acheteur a donné son agrément sans rétroagir au jour du contrat ; de même, c’est à partir de ce

moment que les risques passent du vendeur à l’acheteur sans qu’il y ait de rétroactivité. En

conséquence, les altérations survenues entre la vente et la livraison sont à la charge de l’acheteur. En

principe, le transfert de propriété est irrévocable et l’acheteur ne saurait se dégager du contrat en

arguant de son erreur. Mais la dégustation ne couvre pas l’erreur commise par le vendeur sur la

quantité fournie.

Si l’acheteur refuse son agrément, le contrat n’est pas conclu ; l’acquéreur ne peut pas exiger que

d’autres marchandises lui soient fournies ; le vendeur ne peut pas imposer une nouvelle dégustation

d’autres produits analogues, ni démontrer que la marchandise fournie était loyale en demandant une

expertise.

§ 3 : La vente à l’essai

La vente est faite à l’essai lorsque l’acheteur se réserve la faculté d’essayer la chose à vendre afin de

juger si elle lui convient : la réalisation de la vente est donc subordonnée à la démonstration des

qualités objectives de la chose.

La vente à l’essai porte toujours sur des choses individualisées car, pour que l’acheteur puisse

effectuer l’essai, la chose est délivrée à l’acheteur avant que le contrat ne soit définitivement conclu.

La condition de l’essai doit en principe être expressément stipulée : elle peut être convenue à l’égard

de toutes les marchandises devant recevoir une destination particulière telles que des machines, des

moteurs, des automobiles, etc. Néanmoins, cette condition est sous-entendue à l’égard des choses

pour lesquelles l’essai préalable est d’un usage constant : par exemple, pour les vêtements faits sur

mesure ou pour tous autres objets qui doivent être adaptés à la personne de l’acheteur.

Selon l’art 1588 du code civil, « la vente faite à l’essai est toujours présumée faite sous une condition

suspensive ». La chose reste donc aux risques du vendeur tant que l’acheteur ne l’a pas essayé et

agréé. Mais, ce n’est qu’une présomption de volonté. S’il résulte de la convention ou des

circonstances que les parties ont entendu que l’acheteur deviendrait immédiatement propriétaire de

la chose vendue, sauf à la restituer après l’essai, si elle ne lui convient pas, l’essai dans ce cas forme

une condition résolutoire et la chose se trouve aux risques de l’acheteur dès le jour de la vente.

Avant l’essai, le vendeur reste propriétaire, la chose est donc à ses risques. Mais à partir du moment

où la chose a été livrée à l’acheteur, bien qu’elle ne soit pas à ses risques, l’acheteur en est le

dépositaire : il en a la garde et à ce titre, il répond des dommages qu’elle peut causer ; il doit veiller

sur elle et ne peut l’employer ni à des usages extraordinaires, ni pour en tirer profit. Après l’essai, les

risques sont à la charge de l’acheteur ; il n’est d’ailleurs pas nécessaire pour cela qu’il ait donné son

agrément exprès ; il suffit que le délai d’essai stipulé par le contrat ou prévu par l’usage soit écoulé.

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En outre, l’essai doit en principe être effectué par l’acheteur lui-même ; mais il peut l’être par le

vendeur en sa présence. L’acheteur peut même en charger un tiers qu’il estime plus compétent que

lui. Il n’est donc pas nécessaire sauf convention ou usage contraire que l’essai soit fait

contradictoirement avec le vendeur. Egalement, si l’acheteur décède avant d’avoir fait l’essai, ses

héritiers ont comme lui le droit et l’obligation de le faire. Cependant, lorsqu’il s’agit de choses

comportant une part d’appréciation personnelle, le décès de l’acheteur rend l’essai désormais

impossible ; on doit donc supposer que le contrat est résolu par le fait même, puisqu’il ne pouvait se

réaliser qu’la condition que l’acheteur vivrait.

Lorsque le temps de l’essai a expiré sans que l’acheteur ait manifesté sa décision, il faut distinguer

selon que la vente a été faite sous condition résolutoire ou sous condition suspensive : au cas

exceptionnel où la condition d’essai est résolutoire (et non suspensive), l’expiration du délai fixé pour

l’essai aurait pour effet de rendre la vente pure et simple. Mais si la condition est suspensive, le

vendeur a le choix entre le maintien du contrat et sa caducité. Le vendeur peut condamner l’acheteur

à garder la chose comme l’ayant agréé si celle-ci ne comporte pas une part de goût personnel ; il

exercera cette option au cas de perte fortuite de la chose, afin d’en faire supporter la charge à

l’acheteur déclaré propriétaire. Ainsi, il a été jugé que le fait par l’acheteur de conserver la chose

sans observation après l’expiration du délai d’essai met à sa charge les risques de perte de choses

survenues pendant le voyage de retour au vendeur. Par ailleurs, le vendeur peut également

considérer le contrat comme nul, faute d’accomplissement de la condition d’essai. Il a le droit dès

lors de disposer de la marchandise. Il peut en plus dans ce cas demander des dommages et intérêts.

En outre, si ni la convention ni l’usage ne détermine le délai requis pour effectuer l’essai et que le

vendeur ait mis l’acheteur en demeure de faire l’essai de la chose vendue, la chose passe au risque

de l’acheteur conformément à l’art 1138 du code civil. Pour finir, il faut dire qu’une fois l’essai

terminé, l’acheteur a le droit d’accepter ou de refuser la marchandise.

La question se pose alors de savoir si l’acheteur jouit d’un pouvoir discrétionnaire en ce sens, ou s’il

n’aurait pas un tel pouvoir arbitraire, le vendeur pouvant dès lors prouver que l’essai a été satisfait

ou satisfaisant. Comme réponse, il faut faire une distinction sur la nature de la chose vendue : si

l’essai a été stipulé pour démontrer les qualités objectives de la chose, le vendeur pouvait faire

vérifier par des experts si la chose est susceptible de servir à l’usage en vue duquel elle a été achetée.

Cependant il a été jugé que l’acquéreur avait un droit discrétionnaire sauf abus de droit (tribunal de

commerce de Paris, 27 novembre 1968, Gazette du Palais, 1969.2.69). Au contraire, lorsqu’il s’agit

de choses comportant une part d’appréciation et de goût personnel comme les objets d’art ou les

vêtements sur mesure, il ne pouvait être passé outre au refus de l’acheteur (le Havre, 18 octobre

1924, Gazette du Palais, 1924.2.555). La vente à l’essai se rapproche dans ce cas à une vente à la

dégustation.

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En ce qui concerne l’option de l’acheteur, après l’essai, l’exercice de cette option est irrévocable :

l’acheteur ne saurait accepter la chose puis demander la résolution de la vente sous prétexte que la

chose ne lui convient pas.

Aussi, lorsqu’après l’essai, l’acheteur accepte la chose, la condition s’accomplit, et son droit de

propriété rétroagit au jour du contrat. Il peut en conséquence se prévaloir de son droit, soit à

l’encontre des créanciers du vendeur qui auraient fait saisir la chose vendue, soit envers la masse en

cas de mise en « faillite » du vendeur depuis la vente.

De même, lorsque l’essai a réussi, la charge des risques pèse sur l’acheteur. Mais la rétroactivité de la

condition ne se produit pas de sorte que si, avant l’essai, la chose avait été détruite, réquisitionnée

ou endommagée, l’essai n’aurait pu se produire et les risques resteraient à la charge du vendeur.

Enfin, la vente ne devenant définitive qu’après la réussite de l’essai, c’est seulement à partir de cette

date que les délais pour la garantie commencent à courir.

SECTION 2 : La vente en libre service et par correspondance

§ 1 : La vente en libre service

Dans les ventes en libre service, le client se sert lui-même des produits qu’il a l’intention d’acheter et

les paie en quittant le magasin. Le transfert de propriété ici a lieu dès l’échange des consentements

et le moment du transfert de propriété commande la charge des risques (par exemple bousculer le

client à laisser tomber un récipient qui se brise) et surtout l’existence d’un vol. En effet, on peut se

demander s’il y a vol lorsque le client quitte le magasin sans avoir payé les marchandises qu’il a

prises. Il a été jugé que « la remise définitive de l’objet vendu n’est consentie par le vendeur à

l’acheteur qu’au moment du versement du prix ; il y a jusque-là une détention matérielle provisoire

qui ne modifie pas les droits du vendeur » (crim. 4 juin 1915, DP 1921, 1, 57 ; 30 mai 1958, JCP 1958.

II. 10809, note Chavanne).

Pour préciser le moment auquel l’intention frauduleuse est constituée, les tribunaux ont décidé que

« le vol ne peut être caractérisé que si le client franchit la caisse sans déclarer et sans payer les

articles dont il s’est contractuellement rendu détenteur » (tribunal de grande de Seine 12 juin 1967

JCP 1967. II. 15295, note De Lestang ; tribunal correctionnel de Dijon, 28 février 1973 JCP 1974. II.

17803, note crit. Puech).

Certaines décisions ont ajouté que le délit de tentative de vol est caractérisé dès que le client, par les

circonstances qui entourent l’appréhension de la chose, a manifesté son intention de se l’approprier

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sans payer, et par son comportement suffisamment indiqué qu’il n’entendait pas se désister de son

acte.

§ 2 : La vente par correspondance

Cette modalité de vente se fait entre personnes qui ne sont pas présentes au même lieu : l’échange

de consentement s’effectue par lettre, téléphone, télégramme, internet ou tout autre moyen de

communication. Les règles relatives à la formation du contrat relèvent du droit civil. La date et le lieu

auxquels le contrat est conclu dépendent de la volonté des parties, de leurs habitudes et des usages,

cela explique que les juges du fond aient en la matière un pouvoir souverain. Seulement il faut

préciser que les règles suivantes sont généralement applicables :

­ le pollicitant peut révoquer son offre jusqu’à ce qu’il ait reçu l’acceptation de

l’acquéreur. Mais après réception de l’acceptation, l’offre devient irrévocable ; la

proposition que ferait alors l’entreprise de vente par correspondance de ne pas livrer

l’objet promis et de rembourser l’acquéreur, ou de lui remettre un objet similaire, ou

de lui une ouverture de crédit, ne s’imposerait pas à l’acquéreur qui pourrait lui

réclamer le remboursement de son préjudice.

­ De même, l’acceptation peut être révoquée tant qu’elle n’est pas parvenue au

pollicitant (par exemple un bon de commande expédié par lettre peut être révoqué

par un télégramme si ce dernier parvient avant la lettre).

­ Le lieu où le contrat a été conclu est celui où l’acceptation a été donnée sauf clause

ou usage contraire.

­ Pour l’exposé des autres règles, une des applications particulières de la vente par

correspondance nous y aidera. C’est le commerce de détails effectués par de grands

magasins ou des entreprises spécialisées : l’offre se fait dans ces cas par des

catalogues envoyés aux domiciles des clients éventuels ou insertion publicitaire dans

la presse. Pour que la volonté du destinataire soit éclairée, l’annonce ou le catalogue

doit décrire le produit avec précision. Le délai de livraison après réception de la

commande doit être raisonnable. Si la marchandise vendue n’a pas été livrée dans

les délais, la pratique commerciale admet que le client peut refuser la marchandise ;

il peut aussi, au cas de préjudice obtenir une indemnisation. La charge du coût de

l’expédition est déterminée par le contrat. Dans la pratique commerciale, elle doit

être supportée par l’acquéreur si la commande ne dépasse pas un certain prix ; elle

est à la charge du vendeur dans le cas contraire. Quant aux obligations des parties,

elles obéissent aux règles générales de la vente. Le client qui n’est pas satisfait de la

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marchandise envoyée peut la retourner au vendeur à la condition de le faire sans

retard. Quant au prix, il est payable soit au comptant – à la commande où à la

livraison – soit au crédit. Enfin, la vente par correspondance doit respecter

l’ensemble des règles pénales relatives à la vente notamment celles qui prohibent la

vente par envoi forcé, la publicité mensongère et la publicité des boissons

alcoolisées.

TITRE II : LE CONTRAT DE CREDIT-BAIL OU LEASING

Généralités

Technique contractuelle forgée par la pratique américaine, qui l’a diffusée à partir des années 1950, le crédit-bail a pénétré la vie commerciale sous le nom de leasing.

Le crédit-bail ou leasing est une opération commerciale et financière réalisée par les banques et

établissements financiers, ou par une société de crédit-bail légalement habilitée et expressément agréée en cette qualité, avec des opérateurs économiques nationaux ou étrangers, personnes physiques ou personnes morales, de droit public ou de privé. Cette opération qui a pour support un contrat de location pouvant comporter ou non une option d’achat au profit du locataire, porte exclusivement sur des biens meubles ou immeubles, à usage professionnel ou sur fonds de commerce ou sur établissements artisanaux.

Le crédit-bail se définit comme la technique contractuelle de crédit à moyen terme par laquelle

une entreprise dite de crédit-bail acquiert sur la demande d’un client (crédit preneur), la propriété de biens d’équipements mobiliers ou immobiliers à usage professionnel en vue de les donner en location à ce dernier pour une durée déterminée et en contrepartie de redevances ou de loyers.

Ainsi défini, le leasing présente un intérêt certain aussi bien pour l’établissement de crédit-bail

« loueur » que pour le crédit « locataire ».

- Pour l’établissement de crédit-bail, les intérêts sont à situer sur le plan juridique et économique. Le premier de ces avantages est celui de la sécurité. La récupération du bien en cas de non-paiement en est grandement facilitée. Il n’y a pas besoin d’aller au procès, de faire appel à la justice pour récupérer le bien ; le « loueur » en est propriétaire, il peut donc le récupérer de plein droit. Dans le cas des procédures collectives, le leasing a priorité sur l’apurement du passif du débiteur. Un autre de ses avantages est que l’entreprise de crédit-bail se décharge, dans le cadre du contrat, de toutes les contraintes du propriétaire des risques sur la chose et des risques causés par la chose au moyen d’assurance et également des obligations du bailleur (le locataire est directement intéressé à l’entretien du matériel qui lui est « loué » car il a une garantie de pouvoir le racheter en fin de période si le contrat le permet).

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- Pour le crédit « locataire », il n’a pas besoin d’avoir un « historique » de crédit, de garanties matérielles ou de garant ayant un capital (le matériel lui-même sert de garantie). Et même lorsque la garantie est demandée, le dépôt de garantie réclamé est très souvent plus faible que celui demandé pour un crédit. Par ailleurs, les loyers sont en général fixés selon des formules souples que les crédits classiques. En général, les loyers sont fixés en fonction de la rentabilité du matériel.

Le leasing a été introduit en Côte d’Ivoire en 1970 par le décret n°70-06 du 7 janvier 1970. Ce texte permet de dégager les éléments fondamentaux qui lui donnent la qualification de crédit-bail et de le distinguer ainsi des contrats qui lui sont proches. Il donne également un aperçu du déroulement de l’opération de crédit-bail (ou sa formation) et les droits et obligations des parties.

I- Nature et autonomie du contrat de crédit-bail

La nature juridique du crédit-bail est difficile à cerner d’autant que règne une certaine confusion entre l’opération de crédit-bail et le contrat de crédit-bail proprement dit.

En effet, l’opération du crédit-bail est une opération triangulaire qui tisse des liens entre trois

personnes, l’entreprise prêteuse, le crédité et le vendeur du bien. Elle aboutit à la conclusion de plusieurs contrats distincts : le contrat de crédit-bail proprement dit d’une part, et d’autre part les contrats passés en exécution des obligations assumées dans le contrat de contrat-bail : achat du bien, vente ou relocation à la suite de la période de location, assurance, etc.

Il faut dès lors se résigner à reconnaître que le leasing est un contrat sui generis, que l’on doit se

borner à classer dans les contrats synallagmatiques à exécution successive.

A- Les éléments fondamentaux du contrat de leasing

De la définition donnée par l’article 1er du décret de 1970, (« les opérations de crédit-bail sont les opérations de location d’immeuble à usage professionnel ou d’habitation de matériel, d’outillage ou de biens d’équipement spécialement achetés par le bailleur en vue de cette location, et dont les crédits-bailleurs demeurent propriétaires lorsque ces opérations, quelle que soit la dénomination, donnent au locataire la faculté d’acquérir au plus tard à l’expiration du bail, tout ou partie des biens loués, moyennant un prix convenu tenant compte au moins pour partie des versements effectués à titre de loyer »), il ressort que la qualification de crédit-bail résulte de la coexistence de trois éléments nécessaires et suffisants : 1°) l’achat d’un bien en vue de sa location, 2°) la location et 3°) la faculté pour le preneur d’acquérir le bien loué (peu importe la qualification donnée par les parties, même si cette qualification peut permettre de dégager leur intention. Voir Lyon 3 octobre 1968, Rev. Trim. Dr. Com. 1970. 188, obs. Hémard).

Ces conditions appellent quelques observations :

- La nature du bien :

Le bien à acheter doit être un bien mobilier ou un bien immobilier. S’agissant du bien meuble, il

doit être un bien meuble d’équipement, de matériel d’outillage.

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Quel sens donner à ces expressions ? Le texte ne fournit aucune réponse à ce propos. Il est

cependant admis que le terme d’équipement doit être entendu au sens le plus large de sorte à comprendre tous les biens mobiliers équipant le locataire. Il est même admis qu’il n’est pas nécessaire que le matériel soit neuf. Seulement, cette vision des choses ne semble pas tout à fait correspondre à l’esprit du crédit-bail. Car si la société de crédit-bail achète un vieux matériel et le loue, en cas d’insolvabilité du locataire, le propriétaire risque de se retrouver avec son matériel sous la main dans la mesure où il trouverait difficilement un autre preneur, compte tenu de sa vétusté. C’est pourquoi en pratique, les entreprises de crédit-bail refusent que le crédit-bail porte sur du matériel d’occasion.

Enfin, on entend par « matériel et outillage » non seulement tout ce qui touche l’industrie et le commerce, mais aussi tout ce qui touche l’agriculture, l’artisanat et même les professions libérales.

A l’analyse, ce n’est pas tant la nature du bien qui a de l’importance, mais plutôt le but poursuivi

par l’acheteur, c’est-à-dire l’affectation du bien qu’il achète.

- L’affectation du bien : la location

Le bien d’équipement ou d’outillage doit être acheté en vue de la location : cela signifie que le propriétaire bailleur doit avoir pour activité principale l’achat de certains biens, non pas pour les revendre immédiatement, mais plutôt pour les donner en location. En clair, si le bailleur fabrique lui-même le matériel et le donne en location, on ne serait plus en présence du contrat de crédit-bail, mais d’un contrat d’une autre nature (Com. 13 avril 1976, D. 1976, P. 694).

Le bien acheté doit aussi être destiné à une utilisation professionnelle. Dans ce cas, un bien

acheté par une entreprise de crédit-bail qu’elle donne en location pour une utilisation personnelle ne peut entrer dans le cadre de l’application du décret du 7 janvier 1970.

Seront donc exclus les biens destinés à un usage purement personnel et familial.

- La propriété du bien :

Le bien que donne l’établissement de crédit-bail doit être de la propriété de ce dernier. Cela fait que l’utilisateur du bien (le preneur) n’est qu’un simple « locataire » (c’est pour cela que, comme dit plus haut, en cas de prononcé d’une procédure collective à l’encontre du ‘‘locataire’’, l’entreprise de crédit-bail peut toujours revendiquer son bien).

- La faculté pour le preneur d’acquérir le bien loué :

C’est un critère fondamental du crédit-bail, du moins lorsqu’il s’agit d’un crédit-bail qui l’admet. Cette condition signifie qu’à l’expiration du bail, le preneur a un droit d’option qui peut consister en la reprise, en l’acquisition du bien loué (le preneur a une triple option : acheter le matériel pour une valeur résiduelle fixée dans le contrat, souscrire un nouveau contrat de location, ou restituer le bien en bon état).

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C’est dire que la promesse de location doit se doubler d’une promesse unilatérale de vente réalisable en fin de période de location.

Mais, la faculté d’acquisition ne doit pas consister en une simple promesse de vente. Elle doit

être contractuellement stipulée, à un prix déterminé à l’avance (lors de la conclusion du contrat de crédit-bail, le prix d’achat du bien loué doit être déterminé ou déterminable sinon la promesse unilatérale serait sans valeur. Et ce prix doit tenir compte, au moins pour partie, des versements effectués à titre de loyers). Il suit de là que ne constitue un crédit-bail toute opération de location qui ne serait pas assortie à une promesse de vente.

Cependant, il faut le préciser, cette acquisition n’est qu’une simple faculté pour le preneur : on ne saurait stipuler dans un contrat de leasing que le locataire deviendra obligatoirement acquéreur.

Enfin, il est à souligner que cette faculté, le preneur ne peut l’exercer qu’à l’expiration de la période irrévocable stipulée dans le contrat.

B- La distinction du contrat de crédit-bail des contrats voisins

La nature juridique du contrat de crédit-bail reste encore controversée, controverse qui trouve sa source dans le fait que le crédit-bail résulte d’une fusion de techniques juridiques. Seulement, il y a lieu de ne pas confondre le crédit-bail et des contrats voisins qui lui ressemblent comme la location simple et la location-vente, car le leasing a une nature juridique propre.

1°) Distinction crédit-bail et location simple

Si le crédit-bail fait appel aux techniques de la location, il ne peut pas pour autant être ramené à une variante de la location simple. Il est d’autant plus nécessaire de faire la distinction que cette dernière connaît aussi un renouveau important dans le domaine de l’outillage professionnel.

La distinction procède du fait que la location enchâssée dans le crédit-bail n’en est que l’un des

éléments fondamentaux, inséparable des autres que sont l’achat en vue de la location et la promesse unilatérale de vente.

Mais la distinction se manifeste aussi dans la clause de location elle-même, clause dont les

stipulations dérogent considérablement au droit commun, notamment parce que le bailleur s’y affranchit de l’obligation d’entretien et de la garantie des vices cachés.

2°) Distinction crédit-bail et location-vente

La location-vente est un contrat par lequel le locataire acquéreur verse pendant un certain temps des mensualités représentant à la fois un loyer et une partie du prix. Il n’acquiert la propriété du bien qu’à la dernière échéance.

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Il est donc vrai que dans les deux contrats, le locataire a la jouissance immédiate de la propriété du bien, et il ne devient propriétaire qu’à la fin de la location. Mais la différence fondamentale entre les deux contrats et qui est relatif au transfert de propriété, est que dans la location-vente, il y a transfert automatique de propriété à la fin de la location alors que dans le crédit-bail, il n’y aura transfert de propriété que si le preneur opte pour l’acquisition du bien à l’échéance.

En plus, dans le crédit-bail, le locataire a un droit d’option alors que cette faculté n’est pas

connue dans la location-vente : le locataire s’engage dès le début du contrat à acquérir le bien à l’issue de la période de location.

Enfin, le crédit-bail se différencie de la location-vente par le caractère unilatéral de la promesse

de vente qui ne lie que le crédit bailleur alors que la location-vente contient une promesse synallagmatique de vente qui oblige les deux parties à la convention.

C- Les différents types de leasing Il existe deux types de leasing : le leasing financier (ou Financial lease) et le leasing opérationnel (ou operating lease).

- Le contrat financier : le leasing financier est une technique de financement par laquelle la société de leasing achète un bien déterminé suivant les indications spécifiques du futur locataire et le lui donne en location pour une période déterminée. Le locataire obtient donc un droit d’utilisation.

En réalité, le ‘‘contrat financier’’ se conclut à trois : le locataire (celui qui va utiliser le matériel) identifie le matériel souhaité, en négocie le prix et les conditions de livraison. L’organisme de leasing achète le matériel et en devient propriétaire, et le met à disposition du « locataire ». Le contrat de location prévoit que le locataire devient propriétaire du matériel à l’issue de la période de location s’il le désire ; c’est donc ce dernier qui prend en charge tous les frais d’entretien et de gestion du matériel. En effet, l’objectif du leasing financier est presque toujours d’acquérir le bien loué : le contrat prévoit donc spécifiquement une option d’achat, qui peut librement être levée ou non selon le choix du locataire. S’il lève l’option d’achat, il devient propriétaire du bien en payant un prix fixé à l’avance qui correspond à la valeur résiduelle. Dans ce type de contrat, le locataire est propriétaire économique. Cela implique que le locataire doit reprendre le matériel dans ses actifs et l’amortir.

En clair, les opérations de crédit-bail sont dites ‘’leasing financier’’, si le contrat de crédit-bail prévoit le transfert au locataire de tous les droits, obligations, avantages, inconvénients et risques liés à la propriété du bien financé par le crédit-bail, si le contrat de crédit-bail ne peut être résilié et s’il garantit au bailleur le droit de recouvrer ses dépenses en capital et se faire rémunérer les capitaux investis.

- Le contrat opérationnel : le leasing opérationnel s’applique davantage à la location axée sur l’utilisation pure. Le contrat ne peut prévoir d’option d’achat. En effet, le ‘‘contrat opérationnel’’ consiste à louer un matériel pour une période donnée, le « loueur » récupérant l’élément loué à l’issue de la période contractuelle. Le « loueur » reloue le matériel à un autre « locataire » et ainsi de

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suite. Le loueur récupère donc son capital à travers les loyers successifs demandés et il prend en charge les dépenses de gestion et d’entretien du matériel.

Le leasing opérationnel est surtout intéressant pour les équipements à durée de vie courte ou moyenne. C’est souvent le cas pour des véhicules en leasing. Le locataire n’est donc pas obligé de racheter le matériel à la fin du contrat et peut donc le renouveler régulièrement.

En réalité, à la fin de la période de location, le locataire a trois possibilités : il peut rendre simplement le matériel, continuer à le louer à un loyer réduit à convenir avec la société de leasing en fin de contrat ou, enfin, racheter le matériel à la société de leasing également à un prix à convenir en fin de contrat. Le bailleur est donc propriétaire économique.

A l’analyse, les opérations de crédit-bail sont dites « leasing opérationnel » si la totalité des droits, obligations, avantages, inconvénients et risques inhérents au droit de propriété du bien financé n’est pas transféré au locataire et reste au profit ou à la charge du bailleur.

Seulement, il faut le souligner, ce type de contrat n’est pas pris en compte par le décret de 1970. Il ne sera donc pas étudié ici.

En outre, faut-il le dire, en fonction de la nature des biens auxquels ils s’appliquent, il faut distinguer deux types de crédit-bail : apparu le premier, le crédit-bail mobilier constitue en quelque sorte le droit commun de l’opération. Le crédit-bail immobilier en diffère par quelques traits (qui en altère la pureté originelle) qu’il suffira de signaler.

Le crédit-bail se définit comme mobilier s’il porte sur des biens meubles constitués par des

équipements ou du matériel ou de l’outillage nécessaire à l’activité de l’opération économique. Il se définit comme étant immobilier s’il porte sur des biens immeubles construits ou à construire pour les besoins professionnels de l’opérateur économique.

Titre 3 : Le contrat de franchise

I. Définition Issu de la pratique américaine (États-Unis), le franchising ou contrat de franchise (officiellement parlant) ou tout simplement le contrat de franchise peut être défini comme le contrat commercial en vertu duquel une personne est titulaire d’un signe distinctif généralement déposé à titre de marque (le franchiseur) s’engage à en concéder l’usage en communiquant un savoir-faire, en faisant jouir de sa marque et, le cas échéant, en fournissant en marchandises une autre personne qui est également un commerçant indépendant (le franchisé), et en contrepartie, cette dernière s’engage à exploiter ce savoir-faire, à utiliser la marque et, le cas échéant, à s’approvisionner auprès de la 1ière. En clair, le franchiseur s’engage, tout en concédant l’usage de sa marque au franchisé, à assumer auprès de lui une fonction de conseil et d’assistance commerciale, et le franchisé s’engage au paiement d’une redevance sur le chiffre d’affaire ainsi qu’à s’approvisionner en tout ou partie auprès

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du franchiseur et de tiers déterminés et respecter un certain nombre de normes tant pour son implantation que pour le … de sa vente. En d’autres termes, le contrat de franchise confère au franchisé le droit d’utiliser la marque, le savoir-faire et l’assistance du fournisseur pour vendre les produits qu’il reçoit de lui ou d’un tiers convenu de concert ; au franchiseur, ce contrat confère le droit d’obliger le franchisé à lui payer des redevances, à respecter ses techniques commerciales, à l’informer des améliorations qu’il découvre, et à la confidentialité.

II. Caractères et autonomie du contrat de franchise

A- Caractères du contrat de franchises Le franchising est un contrat innommé ; il ne rentre donc dans aucune prévision légale, notamment en C.I.. A défaut d’une telle réglementation, il est revenu à la pratique et à la jurisprudence de régir le contrat en s’efforçant d’équilibrer les relations entre les parties. Le contrat de franchise est également un contrat à titre onéreux, un contrat synallagmatique conclu entre 2 personnes indépendantes mais surtout un contrat qui est commercial.

B- Autonomie du contrat de franchise Le contrat de franchisage est un contrat qu’il est difficile d’enfermer dans une catégorie préexistante. En effet, il est souvent confondu au contrat de concession exclusive, car comme le contrat de concession exclusive, il suppose une collaboration étroite entre les parties, comprend une exclusivité de fourniture et d’approvisionnement. Comme le concédant, le franchiseur confère à son partenaire un droit d’usage sur son enseigne, lui promet une assistance technique (formation de personnel, élaboration de campagnes publicitaires, conseils juridiques, etc.) et lui accorde une exclusivité territoriale. Cependant, l’exclusivité n’est pas l’essence du contrat de franchise et s’accompagne d’autres éléments. En effet, l’exclusivité qui existe dans le contrat de franchise n’en est que l’un des éléments, d’autant que le contrat de franchise appelle nécessairement une licence de marque : le franchisé doit donc pouvoir distribuer, sous la marque du fournisseur, d’autres produits et services qui ne sont pas nécessairement fournis par ce dernier. Ce qui n’est pas le cas du contrat de concession exclusive dans lequel le concédé ne peut distribuer que les produits et services provenant du concédant. En réalité, le contrat de franchise est un contrat sui generis qui se fonde essentiellement sur un transfert de connaissances techniques et de procédés commerciaux, sur un savoir-faire de sorte que si ce savoir-faire transmis est inconsistant, de manque de suite et d’ensemble, le contrat doit être annulé pour défaut de cause. A l’analyse, les éléments fondamentaux qui caractérisent en définitive la franchise sont : la communication, le savoir-faire, l’assistance commerciale, la licence de marque et la présence de 2 commerçants indépendants comme parties au contrat.

III. La formation et la mise en place du contrat de franchise

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Le contrat de franchise se présente généralement sous la forme d’un contrat type qui est proposé au franchisé. Mais, il peut arriver que le contrat soit précédé d’un accord par lequel le futur franchiseur met à l’épreuve son futur partenaire (le futur franchisé). Ce contrat est appelé contrat de « corner » qui est un contrat par lequel un commerçant accepte de consacrer une partie de sa boutique à la vente de produits choisis par un fabricant (généralement de renom) et fait donc obligation à ce commerçant, potentiel franchisé, de réserver à ces produits un traitement suivant les présomptions du fabricant. Au terme de la période prévue pour ce contrat, si les produits se vendent bien, le fabricant pourra alors accepter de conclure un véritable contrat de franchisage et le franchisé pourra ainsi consacrer la totalité de son magasin à la vente de ses produits. Mais en général, la mise en place du contrat de franchise obéit au mécanisme habituel du droit des obligations en respectant le droit de la concurrence (com. 1er janvier 1993, D.1993, Inf.Rap.162). Ainsi, l’objet du contrat doit être déterminé ou du moins déterminable : si donc la quantité de choses à vendre dépend de la seule volonté du franchiseur, le contrat serait déclaré nul (V.Paris 1er déc. 1989, D.1990, Inf. rap. 13 et Com. 5 nov. 1991, Bull. crim. IV, n°335). De même, le conrtat serait annulé si le prix des produits n’est pas fixé par référence à des éléments sérieux, précis et objectifs (com. 12 janvier 1988, Bull. crim. IV n°31 ou RID civ. 1988, 527) ou encore si le franchisé n’a pas la possibilité de négocier librement ses prix (com. 19 nov. 1991, bull. crim. IV, n°356 ou D. 1992, sommaire 27 cahier ; voir aussi com. 16 Juillet 1991, JCP, 1992, II, 21796 dans lequel il est montré que l’exigence du prix est bien moins stricte en cas de franchise de services différents de franchise de vente, car le franchiseur ne s’engage dans ce cas essentiellement qu’à faire et non à donner). Hormis ces conditions de fond de formation de contrat de franchise, il est à noter qu’un tel contrat fait l’objet d’un formalisme informatif. En effet, afin de protéger le franchisé, et vertu de l’obligation d’information prévue par l’art 1116 du code civil, la jurisprudence oblige le franchiseur à communiquer au franchisé au moins un jour avant la conclusion du contrat un document donnant des informations sincères qui lui permettent de s’engager en connaissance de cause. Cette information porte notamment sur la valeur commerciale du nom de la marque ou de l’ancienneté et l’expérience de l’entreprise du franchiseur et sur le réseau commercial dont cette entreprise dispose. Relativement aux sanctions attachées à la reconnaissance de cette obligation, il faut écarter la nullité de droits, et- appliquer le droit commun des vices du consentement, notamment l’erreur. L’absence d’information ne conduit donc pas automatiquement à la nullité, sauf s’il y a erreur. L’information erronée n’entraine que la responsabilité (colmar, 9 mars 1990, D. 1990. 232).

IV. Effets du contrat de franchise En tant que contrat synallagmatique, le contrat de franchise fait naître des obligations à la charge des 2 parties, même si celles qui pèsent sur le franchiseur sont, sans doute, moins lourds que celles qui pèsent sur le franchisé. Le franchiseur a d’abord une obligation de renseignement (com. 4 déc. 1990, JCP 1991, II. 21725 ; Colmar, 9 mars 1990, op. cit). Il a l’obligation de communiquer son savoir-faire, de fournir une assistance technique et commerciale à son partenaire, d’assurer la protection territoriale qu’il a pu accorder à son cocontractant (Aix-en-Provence, 25 avril 1985, bull. civ. N°90) et d’une manière générale l’obligation de ne pas concurrencer le franchisé (Com. 3 déc. 1991, RJDA 1992, n°28). Le non respect de ces obligations entraine la résolution du contrat (Com, 4 nov. 1986, Som. 22).

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Quant au franchisé, il a l’obligation de respecter les termes définis par le franchiseur, consacrer tout son temps et déployer tous ses efforts à l’objet du contrat afin de permettre une exploitation convenable de l’établissement ; il doit maintenir cet établissement en bon état, contracter les polices d’assurance requises, tenir une comptabilité en suivant les instructions du franchiseur, etc. il doit aussi défendre l’image de marque du franchiseur et ne rien faire qui puisse la compromettre (Com. , 9 déc. 1986, D. 1988, Som 22). L’une des obligations principales du franchisé est de payer un « droit d’entrée » ainsi qu’une redevance calculée d’près le chiffre d’affaire réalisé. Hormis les obligations des parties entre elles, il faut signaler qu’en général, le contrat de franchise est conclu pour une durée déterminée. S’il contient une exclusivité d’approvisionnement, elle ne pourra excéder 10 ans. Ainsi, à l’expiration du terme, les parties ne sont-elles pas tenues de renouveler leur accord, encore que le plus souvent, une clause du contrat prévoit une tacite reconduction et oblige les parties à respecter un préavis si elles veulent y mettre fin. Si au contraire le contrat est conclu pour une durée indéterminée, le droit commun autorise qu’il puisse être résilié à tout moment pourvu que cette résiliation ne soit pas abusive, c’est-à-dire n’intervienne pas brutalement ey sans avertissement. Le contrat prend fin souvent en cas de décès du franchisé, car le contrat de franchise est certainement un contrat conclu intuitu personae.