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108 | La Lettre du Pneumologue • Vol. XIX - n° 3 - mai-juin 2016 MISE AU POINT Cryobiopsies pulmonaires transbronchiques dans les pneumopathies interstitielles diffuses Transbronchial cryobiopsies in diffuse interstitial lung diseases M. Romagnoli*, M. Amalric*, E. Ahmed*, E. Verdanet**, I. Serre**, A. Bourdin* * Service de pneumologie et addicto- logie, département Cœur-Poumons, hôpital Arnaud-de-Villeneuve, CHU de Montpellier. * Pôle Biologie-Pathologie, hôpital Saint-Éloi, CHU de Montpellier. L’ hétérogénéité anatomique des lésions est une des caractéristiques les plus marquantes des pneumopathies interstitielles diffuses (PID). Étant donné le nombre d’entités reconnues, il est extrêmement complexe d’acquérir un diagnostic de certitude, d’établir un pronostic et, cela va de pair, d’identifier une prise en charge thérapeutique effi- cace lorsqu’elle existe. Actuellement, l’organisation de discussions multi- disciplinaires, idéalement au sein de centres experts, incluant pneumologue, radiologue, chirurgien thora- cique, anatomopathologiste et tout spécialiste potentiellement concerné (praticien de médecine interne, rhumatologue, dermatologue, etc.) est recommandée pour l’élaboration d’un diagnostic définitif. Dès lors que la présentation tomodensitométrique n’est pas typique d’un aspect (pattern en anglais) de type pneumonie interstitielle usuelle (Usual Inter- stitial Pneumonia [UIP]) [tableau I], l’appréciation des remaniements histologiques pulmonaires en anatomopathologie est indispensable. Mais cela impose pour l’instant un abord chirurgical par vidéothoracoscopie. Pour cela, et depuis peu, il a été développé une approche moins invasive pour obtenir du matériel de bonne qualité utilisable pour établir le diagnostic anatomopathologique des PID. Ces cryobiopsies transbronchiques auraient un rendement diagnos- tique pouvant atteindre les 90 %, ce qui ouvre des perspectives nouvelles pour les pneumologues impliqués dans la prise en charge des PID. Hétérogénéité des PID : une classification complexe Les PID regroupent plus de 200 affections diffé- rentes. Pour identifier des causes potentielles, apprécier le pronostic et prendre les meilleures déci- sions thérapeutiques, il est indispensable d’établir un diagnostic aussi précis que possible (1). La classification des PID repose sur l’identification d’une cause connue (par exemple, une pathologie auto-immune, une toxicité médicamenteuse, un déficit immunitaire, une exposition environnementale et/ou professionnelle, des prédispositions génétiques, etc.) ou non ; on parle alors de PID idiopathiques. La classification des PID idiopathiques reste la plus complexe (2) . Lors du dernier consensus ERS/ATS (European Respiratory Society/American Thoracic Society) [2], les 6 entités principales ont été maintenues : fibrose pulmonaire idiopathique (FPI), pneumopathie interstitielle non spécifique (PINS), pathologie interstitielle avec bronchiolite respiratoire (RB-ILD), pneumopathie interstitielle desquamative (DIP), pneumonie organisée crypto- génique (COP), pneumopathie interstitielle aiguë (AIP) ; à part, car très rare, la pneumopathie inter- stitielle lymphoïde idiopathique (LIP). Tableau I. Présentation tomodensitométrique typique d’un aspect (pattern) de type UIP (6). Type d’UIP (ensemble des 4 caractéristiques) • Sous-pleural, prédominance basale • Anomalie réticulaire • Rayon de miel avec ou sans bronchectasies de traction • Absence de caractéristiques incompatibles avec une UIP (prédominance aux lobes supérieur et péribronchovasculaire, lésions en verre dépoli, micronodules profus, kystes, perfusion en mosaïque + piégeage expiratoire, consolidation segmentaire et lobaire)

Cryobiopsies pulmonaires transbronchiques dans les

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108 | La Lettre du Pneumologue • Vol. XIX - n° 3 - mai-juin 2016

MISE AU POINT

Cryobiopsies pulmonaires transbronchiques dans les pneumopathies interstitielles diffusesTransbronchial cryobiopsies in diffuse interstit ial lung diseases

M. Romagnoli*, M. Amalric*, E. Ahmed*, E. Verdanet**, I. Serre**, A. Bourdin*

* Service de pneumologie et addicto­logie, département Cœur­ Poumons, hôpital Arnaud­de­Villeneuv e, CHU de Montpellier.

* Pôle Biologie­Pathologie, hôpital Saint­Éloi, CHU de Montpellier.

L’ hétérogénéité anatomique des lésions est une des caractéristiques les plus marquantes des pneumopathies interstitielles diffuses (PID).

Étant donné le nombre d’entités reconnues, il est extrê mement complexe d’acquérir un diagnostic de certitude, d’établir un pronostic et, cela va de pair, d’identifier une prise en charge thérapeutique effi-cace lorsqu’elle existe.Actuellement, l’organisation de discussions multi-disciplinaires, idéalement au sein de centres experts, incluant pneumologue, radiologue, chirurgien thora-cique, anatomopathologiste et tout spécialiste potentiel lement concerné (praticien de médecine interne, rhumatologue, dermatologue, etc.) est recom mandée pour l’élaboration d’un diagnostic définitif. Dès lors que la présentation tomodensitométrique n’est pas typique d’un aspect (pattern en anglais) de type pneumonie interstitielle usuelle (Usual Inter­stitial Pneumonia [UIP]) [tableau I], l’appréciation des remaniements histo logiques pulmonaires en anatomo pathologie est indispensable. Mais cela impose pour l’instant un abord chirurgical par vidéothoraco scopie.

Pour cela, et depuis peu, il a été développé une approche moins invasive pour obtenir du matériel de bonne qualité utilisable pour établir le diagnostic anatomopathologique des PID. Ces cryobiopsies transbronchiques auraient un rendement diagnos-tique pouvant atteindre les 90 %, ce qui ouvre des perspectives nouvelles pour les pneumologues impliqués dans la prise en charge des PID.

Hétérogénéité des PID : une classification complexeLes PID regroupent plus de 200 affections diffé-rentes. Pour identifier des causes potentielles, appré cier le pronostic et prendre les meilleures déci-sions thérapeutiques, il est indispensable d’établir un diag nostic aussi précis que possible (1).La classification des PID repose sur l’identification d’une cause connue (par exemple, une pathologie auto-immune, une toxicité médicamenteuse, un déficit immunitaire, une exposition environ nementale et/ ou professionnelle, des prédispo sitions génétiques, etc.) ou non ; on parle alors de PID idio pathiques.La classification des PID idiopathiques reste la plus complexe (2). Lors du dernier consensus ERS/ ATS (European Respiratory Society/American Thoracic Society) [2], les 6 entités principales ont été maintenues : fibrose pulmonaire idiopathique (FPI), pneumopathie interstitielle non spécifique (PINS), pathologie interstitielle avec bronchiolite respiratoire (RB-ILD), pneumopathie interstitielle desquamative (DIP), pneumonie organisée crypto-génique (COP), pneumo pathie interstitielle aiguë (AIP) ; à part, car très rare, la pneumo pathie inter-s titielle lymphoïde idiopathique (LIP).

Tableau I. Présentation tomodensitométrique typique d’un aspect (pattern) de type UIP (6).

Type d’UIP (ensemble des 4 caractéristiques)

• Sous-pleural, prédominance basale

• Anomalie réticulaire

• Rayon de miel avec ou sans bronchectasies de traction

• Absence de caractéristiques incompatibles avec une UIP (prédominance aux lobes supérieur et péribronchovasculaire, lésions en verre dépoli, micronodules profus, kystes, perfusion en mosaïque + piégeage expiratoire, consolidation segmentaire et lobaire)

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MISE AU POINTPoints forts

» L’hétérogénéité est une des caractéristiques les plus marquantes des pneumopathies interstitielles diffuses (PID), et il est extrêmement complexe d’acquérir un diagnostic de certitude, d’établir un pronostic, et d’identifier une prise en charge thérapeutique.

» Une approche multidisciplinaire en centres experts (centre de référence ou centre de compétences des maladies pulmonaires rares) est indispensable dans le diagnostic des PID.

» Dès lors que la présentation tomodensitométrique n’est pas typique d’un aspect de PIC, l’examen de l’histologie pulmonaire en anatomopathologie est indispensable, mais cela imposait jusqu’ici un abord vidéochirurgical.

» Les cryobiopsies transbronchiques pourraient représenter, dans un avenir proche, une alternative crédible à la biopsie pulmonaire vidéochirurgicale.

Mots-clésBronchoscopie

Histologie pulmonaire

Anatomie pathologique

Scanner thoracique de haute résolution

Approche multidisciplinaire

Highlights » Diagnosis of interstitial lung

disease (ILD) does represent a challenge for pulmono­logists, since they are a group of different clinical entities, characterized by an extreme heterogeneity of clinical beha­viour, radiologic and patho­logic features, as well as by an evident difficulty for finding in most cases a successful treat­ment, whenever available. » The final diagnosis of ILD is

based on all clinical and func­tional information, together with characteristics at imaging and at lung histology, which need to be discussed by an expert medical team, using a multidisciplinary approach, preferably in specialized centres. » Lung histology does still

represent one of the funda­mental e lements in the diagnosis of the ILD presenting with a non­definite UIP pattern at imaging. So far it was the prerogative of the thoracic surgeons, performing lung biopsies in at least 2 different lobes by VATS. » Recently, the new applica­

tion of an “old” bronchoscopic technique, the transbronchial cryobiopsy, for the histologic diagnosis of ILD seems to allow a diagnostic histology in up to 90% of cases, doing a glimpse of dawn for pulmonologists dealing with ILD.

Keywords Bronchoscopy

Lung histology

Pathology

HRCT scan

Multidisciplinary approach

Cependant, il y a eu quelques évolutions impor tantes : ➤ l’entité NSIP est maintenant établie, sans la

mention de “dénomination provisoire” ; ➤ la fibroélastose pleuropulmonaire est désormais

décrite comme une nouvelle entité idiopathique rare ; ➤ lorsqu’il est impossible de trouver un consensus

multidisciplinaire, on parle désormais de PID idio-pathique inclassable ;

➤ la fréquence des PID est mise en avant dans la classi fication privilégiant les formes les plus fréquentes ;

➤ 2 entités rares sont reconnues : les pneumonies organisées aiguës avec dépôts de fibrine et les pneumonies interstitielles à distribution centro- bronchiolaire prédominante. Une classifi cation clinique est également proposée. Elle distingue les processus fibrosants chroniques (FPI et PINS), les PID liées au tabac ( RB-ILD et DIP), les pathologies aiguës ou subaiguës (COP et AIP). L’intérêt et la complexité d’une telle classification sont justifiés par des pronostics excessivement variés. L’histoire naturelle de la FPI est extrê mement hétéro gène et difficile à prévoir à l’échelon indivi-duel. Si la majorité des patients semble suivre une pente déclinante rapide de l’ordre de 1 à 3 ans, d’autres progressent très lentement mais peuvent voir des épisodes d’exacerbation émailler cette évolution. Le GAP index1 (tableau II) est un score pronostique validé dans la FPI (3), mais aussi dans les PID asso ciées aux connectivites, aux pneumonies chroniques d’hypersensibilité et dans la PINS idiopathique (4).

Parvenir au diagnostic dans les PID : apport de l’histologie pulmonaire et arguments pour ou contre la biopsie pulmonaire chirurgicaleSi l’utilité et la pertinence d’une approche pluri-disciplinaire semblent évidentes, les éléments

Tableau II. GAP index dans la fibrose pulmonaire idio pathique et les pneumopathies interstitielles diffuses.

GAP (sexe, âge et physiologie) index dans la fibrose pulmonaire idiopathique (3)

Prédicteur Points

GSexeFemmeHomme

01

A

Âge (ans)≤ 6061­65> 65

012

PhysiologieCVF % théorique> 7550­75< 50

012

P

DLco % théorique> 5536­55≤ 35Pas réalisable

0123

GAP (sexe, âge et physiologie) index dans les pneumopathies interstitielles

diffuses non UIP (4)

Prédicteur Points

Sous-types de PID

FPIPID inclassablesCT­PID/PINS idiopathiqueHP chronique

00­2­2

GSexeFemmeHomme

01

A

Âge (ans)≤ 6061­65> 65

012

PhysiologieCVF % théorique> 7550­75< 50

012

P

DLco % théorique> 5536­55≤ 35Pas réalisable

0123

Points possibles max. : 8.CVF : capacité vitale forcée ; DLco : capacité de diffusion libre du monoxyde de carbone.

1. www.acponline.org/journals/annals/extras/gap

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MISE AU POINT

Figure 1. Cryode souple, de 90 cm de long et 2,4 mm de diamètre (Erbe®).

Cryobiopsies pulmonaires transbronchiques dans les pneumopathies interstitielles diffuses

qui doivent y être pris en compte doivent être bien précisés (1). Les données cliniques, para-cliniques, fonctionnelles et radiologiques doivent effecti vement permettre d’établir si un abord histo logique s’impose. Une faible reproductibilité intra- et inter observateur est souvent mise en évidence dans le contexte des PID, ce qui plaide pour une organi sation en centres experts, en général universitaires (centres de référence et centres de compétences pour les maladies pulmonaires rares), et, donc, plus à même d’évoquer des alternatives diagnostiques à la FPI (5). L’absence de biomarqueur diagnostique non invasif ou invasif reste cependant problématique.L’algorithme diagnostique le plus élaboré s’adresse à la FPI où la confrontation anatomoradiologique a déjà été envisagée (6). Trois niveaux de certitude radiologique et 4 niveaux anatomopathologiques ont permis de mieux préciser les cas dans lesquels l’histologie n’était pas nécessaire (6). Dans tous les autres cas, l’obtention d’un diagnostic histologique reste fortement recommandée, sauf dans quelques affections spécifiques comme la RB-ILD où la combi-naison TDM et LBA peut suffire (1).La biopsie pulmonaire chirurgicale garde donc une place importante dans la procédure diagnostique des PID après discussion multidisciplinaire et analyse tomodensitométrique fine.Une récente méta-analyse compilant 23 études et impliquant 2 148 patients rapporte un rende-ment diagnostique médian de la biopsie pulmo-naire vidéo chirurgicale de l’ordre de 95 % (allant de 42 à 100 % selon les études). Le diagnostic de FPI restait de loin le plus fréquent aux alentours de 33,5 %. Une mortalité postopératoire globale de 3,6 % (IC95 : 2,1-5,5 ) est rapportée, avec de grandes hétéro généités selon les centres (7) ; en effet, elle est beaucoup plus faible voire nulle dans les centres experts souvent confrontés à cette nécessité, et beaucoup plus élevée dans les centres en faisant peu.Au total, avec ce profil, un tiers seulement des patients pour lesquels la confrontation pluri-disci plinaire conclut à la nécessité d’un apport histo logique seraient réellement éligibles à la biopsie chirurgicale en pratique. Aussi, la déci-sion est prise au cas par cas, mettant en balance les options diag nostiques et thérapeutiques face aux risques de morbi-mortalité. Les biopsies transbronchiques classiques ne sont hélas pas une vraie alternative avec des rendements dia-gnostiques trop faibles du fait de la petite taille des prélèvements.

Les cryobiopsies transbronchiques : un nouvel élan pour les pneumologues impliqués dans la prise en charge des PID ?L’expérience des cryobiopsies transbronchiques est maintenant décrite depuis 5 ans environ. Cette technique serait assez sûre (8) et faiblement inva-sive, utilisable pour établir un diagnostic dans les PID avec un rendement de l’ordre de 74 à 90 % (9-13). Cette technique “innovante” doit donc maintenant être explicitement validée et répandue pour pouvoir être positionnée, et de manière consensuelle, dans la prise en charge des PID (14).La première publication de 2009 concernant l’utili sation des cryobiopsies transbronchiques pour le diagnostic des PID a décrit les premières procédures dont ont pu profiter 41 patients (9). Les auteurs ont utilisé une sonde de cryothérapie souple de 90 cm de long et 2,4 mm de diamètre (Erbe®) [figure 1], utilisée habituellement pour l’extraction de corps étranger ou la cryothérapie endobronchique. Cette cryode est introduite par le canal opérateur d’un endoscope souple sous contrôle scopique jusqu’à environ 10 mm de la paroi thoracique. Une fois en place, la cryode est refroidie à l’azote liquide jusqu’à − 89 °C pendant 4 secondes, puis retirée avec le tissu pulmonaire congelé à son extrémité. La sonde est alors plongée dans du sérum physio logique pour décongeler le

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MISE AU POINT

A B

Figure 3. PINS avec faible épaississement fibreux à tendance diffuse de l’interstitium alvéolaire associé à une composante inflammatoire lymphocytaire modérée.

Figure 4. FPI avec un faible grossissement montrant une fibrose hétérogène de l’inter stitium avec foyer de métaplasie bronchiolaire et mucostase (A), et un fort grossissement sur un foyer fibroblastique (B).

Figure 2. Biopsies transbronchiques obtenues par cryode avec une taille moyenne de 5 à 10 mm.

tissu pulmonaire, qui est ensuite récupéré et fixé dans du formol. Ce geste s’effectue sous anes-thésie générale (sédation parentérale au propofol) chez un patient intubé. Dans cette étude, 95 % des procédures ont permis d’établir un diagnostic définitif (39/41) tandis qu’une biopsie pulmonaire chirurgicale était nécessaire pour les 2 derniers patients (9). Mais, finalement, peu d’études ont été publiées sur le sujet (10-13). V. Pajares et al. (11) ont rapporté la première étude randomisée confirmant la supériorité des cryobiopsies sur les biopsies transbronchiques conventionnelles (diagnostic histologique dans 74,4 versus 34 %, diagnostic consensuel final de 51 versus 29 %). Les auteurs montraient, de plus, que que cette technique permet d’éviter une biopsie pulmonaire chirur gicale dans 50 % des cas. Plus récemment, O. Fruchter et al. ont rapporté une expérience avec un rendement diagnostique de l’ordre de 70 % dans une étude ayant inclus 75 patients (12).Cette procédure est exportable et peut être proba-blement utilisée dans tous les centres disposant d’une équipe et de matériel d’endoscopie inter-ventionnelle, mais à la condition que des opé-rateurs soient entraînés spécifiquement pour cette procé dure. À ce jour, il n’est pas décrit de forte courbe d’apprentissage, mais c’est pourtant proba blement le cas. L’équipe pluridisciplinaire est indis pensable pour bien poser les indications et discuter les résultats. La taille des prélèvements varie entre 5 et 10 mm de grand axe (figure 2). Les lésions élémen taires habituelles et les entités nosologiques les plus courantes sont en général facilement identi fiables sur ce type de prélève-ment, comme la PINS (figure 3), la PIC (figure 4), mais des lésions plus rares aussi, comme l’hémo-sidérose (figure 5, p. 112).

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MISE AU POINT

A B

Figure 5. Hémosidérose à la cryobiopsie. A. Coloration à hématoxyline éosine. B. Coloration de Perls.

Cryobiopsies pulmonaires transbronchiques dans les pneumopathies interstitielles diffuses

Cependant, il va de soi qu’un positionnement doit rapidement être adopté pour poser les indi cations à bon escient, ne pas exposer inutilement les patients à un sur- ou à un sous-risque, entre autres. Les courbes d’apprentissage doivent inclure les opérateurs bien sûr, mais aussi les acteurs des réunions multi-disciplinaires, les anesthésistes et les anatomopatho-logistes. Les risques liés à la procédure (pneumo thorax et hémorragies sévères en premier lieu) doivent être parfaitement anticipés et les mesures préventives adéquates mises en place avec des opérateurs formés et entraînés. Cependant, les centres actuellement impliqués rapportent des expériences proches de ce qui apparaît dans les publications, ce qui offre donc des perspectives réelles à assez court terme.

Conclusion

L’avènement de thérapeutiques spécifiques dans les PID rappelle l’importance d’acquérir

un diagnostic de certitude au sein de ce groupe hétérogène.Si les progrès tomodensitométriques ont transformé la prise en charge des PID, il n’en reste pas moins que de nombreuses situations imposent encore un prélèvement histologique.Les cryobiopsies transbronchiques pourraient repré senter une alternative crédible à la biopsie pulmo naire vidéochirurgicale, même si un certain nombre de prérequis restent à acquérir. En effet, même si le nombre d’études reste limité et qu’il n’existe pas encore de comparaison directe entre cryobiopsie et biopsie chirurgicale, cette méthode pourrait à l’avenir se situer en première ligne des prélèvements histologiques. Il est peut-être temps d’oser impliquer tous les acteurs poten-tiels, démarche qui sera probablement assortie d’une évaluation prospective extrêmement rigou-reuse. Le jour où la cryobiopsie pulmonaire sera proposée en routine n’est probablement pas très loin… ■

M. Romagnoli déclare ne pas avoir de liens d’intérêts

en relation avec cet article.

M. Amalric, E. Ahmed, E. Verdanet, I. Serre,

A. Bourdin n’ont pas précisé leurs éventuels liens d’intérêts.

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Références bibliographiques

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