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Régis MeissonierMaître de Conférences
Université Montpellier [email protected]
Environnement organisationnel des ERP :Gestion du changement
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Introduction
« Ce n’est pas le changement qui fait peur aux gens, c’est l’idée qu’ils s’en font. » (Sénèque)
« Occupez vous de mes ennemis, je m'occupe de mes amis. » (Beaumarchais)
Mon patron me confie un projet TIC, comment gérer le changement organisationnel et humain ?Objectifs et plan de la séance
Évaluer les risques d’un projetPercevoir les résistancesIdentifier les conflitsAppliquer les styles de gestion du changement
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Changements dans les organisations
2 types de changements dans les organisations(G. Bateson)
De type 1 : l'organisation s’adapte à un nouvel objectifTouche au contenuUne formation des utilisateurs peut suffire
De type 2 : remise en cause de l'organisation pour une nouvelle finalité
Touche les processusNécessité de gérer le changement
De plus en plus de projets SI = changement de type 2 (ERP, CRM, SIAD, Knowledge Management, etc.)
Gestion du changement limitée à la formation =une des 1ères causes d’échec
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L’effet tabou du changement
L’effet tunnel de « l’organisation suivra »Tendance à sous-évaluer les aspects humains et à se concentrer sur les problèmes techniques« On avance et on essuiera les plâtres »Au plus le projet avance, au moins on ose dénoncer l’impasse
La loi du silenceTypiques des projets venant « d’en haut »Crainte générale des acteurs de déclarer les problèmes de fond
Source : Vidal & Planeix, 2005
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Historique de la conduite du changement
Années 1980 : La formation des utilisateurs n’est pas systématiqueOn laisse les utilisateurs s’approprier l’outil et signaler les bugs
Années 1990 :Les projets se multiplient (passage à l’euro, bug de l’an 2000, ERP, etc.)Plusieurs échecs retentissants (cas SNCF)Conduite du changement focalisée sur le nouveau système(ex. équation de Beckhard and Harris)
Aujourd'huiL’utilisateur devient un élément cléLes cadres (et non plus les informaticiens) sont les acteurs du changement de projets TICGérer le changement = identifier les résistances, anticiper les conflits
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« L’iceberg » de la gestion du changement
Modèle deW. Krüger
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Les phases d'implantation d’un PGI
Phase 1
Project chartering
Phase 2
The project(configure & rollout)
Phase 3
Shakedown
Phase 4
Onward & upward
Etude préliminaireEtude coût / bénéficesEtude de faisabilitéDéfinition de l’équipe projet, des budgets et du calendrierChoix de l’ERP et des sociétés de conseils
Re-engineeringParamétrageDéveloppements spécifiquesRecettageMigration des donnéesFormation des utilisateursMise en place
Observation de l’adéquation de l’ERP aux spécificités organisationnellesCorrections et adaptationAjustements organisationnels complémentaires
Utilisation de l’ERPAnalyse du niveau de performance obtenuAméliorations du système
Source : Markus & Tanis, 2002
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1) Évaluer le risque du projet
Source: Gibson, 2003, MIT Management School
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Leadership du chef du projet : points sensibles
Sa disponibilité et son écoute en face à face !Les objectifs sont clairs et réalistes :
Graduation des objectifs avec principe de la limite inférieureAnnoncer dès le début les éléments pointilleux (ex. respect des échéances), les marges de manoeuvres (ex. sur la définition des processus)
Ne revient jamais sur une décision (la faire partager et valider)Mettre au clair le référentiel métier => éviter les ambiguïtés sur les jargons et process et leurs interdépendancesCommuniquer sur l’avancée du projet :
Des rencontres périodiquesDéfinir et faire partager les étapes selon une méthodologie(Pert, Gantt, etc.)Demander aux collaborateurs d'évaluer l'avancé du projet et leur propre implicationDocumenter l’accomplissement des étapes
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2) Percevoir les résistances
Resistance = comportement face à un conflitTaxomomie des résistances (Coetse, 1999)
Apathie : inaction, désintéressement détachement Résistance passive : freiner le changement (prises de retard volontaires sur les changements à opérer, stratégie de justification du maintien de certaines règles, etc.)Résistance active : forme constructive du conflit (expression de points de vue, négociation, recherche de compromis, etc.)Résistance agressive : menaces, chantages, boycotts, etc.
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Les marques explicites de résistances
La surprise : « une base de données unique, techniquement c'est impossible ! »L'humour : « mais moi je ne veux rien partager :-) » ; « et ma commission ? Je vais devoir la partager aussi ? »La peur de ne pas savoir : « j’arrive même pas à taper au clavier »Le facteur temps : « projet intéressant, mais moi je n'ai vraiment pas le temps d'y participer »Un passif relationnel : « avec lui cela ne marchera jamais »Les allusions :
« je connais le cas d'une entreprise où on avait mis en place un système similaire pour en fait espionner les salariés »« est-ce que certaines personnes vont changer de service ? »
L'hypocrisie : « idée géniale, super, ça va marcher, foncez ! »Etc.
D’après Vidal & Planeix, 2005
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Les marques implicites de résistances
Dans les étapes d’analyses et de conception :Difficultés à impliquer les acteurs clés dans les comités de pilotageReports des documents de validationEtc.
Dans les étapes de réalisation et de testProtocoles de tests non formalisésPV de recettes signés sans conditions, réserves ou commentaires
Dans les étapes de lancement et de déploiementAbsentéismesDégradation du climat social
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La confiance envers le projet
Reconnaissance
ClartéConfiance Participation
Source : Vidal & Planeix, 2005
Est-ce que les objectifs me paraissent clairs ?Sont-ils réalisables ?Quel est l’avantage pour moi ?Les étapes sont-elles cohérentes ?Que vais-je devoir faire concrètement ?
Est-ce que le projet peut remettre en cause mon travail ?Remet-il en cause de la façon dont mon service fait son travail ?
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3) Identifier les conflits
Causes des résistances (Besson et al. 1999 ; Jasperson et al., 2002 ; Bancroft-Truner & Morley, 2002 )Types de conflits :
Conflit sur les tâches : conflits relatif à la façon d'organiser le travailConflit sur les nouvelles compétences :
Niveau faible : la maîtrise de l'ERPNiveau fort : les compétences liés à la transversalité des processus
Conflit sur les valeursPar rapport à soit-même : « c'est une façon de nous contrôler ! »Par rapport à son métier : « on remet en cause notre savoir-faire »Par rapport aux idéologies : « c'est une façon de se focaliser sur la rentabilité, uniquement la rentabilité »
Conflit relatif au pouvoirDû à la transparence des informationsA la perte d'autonomie due à l'interdépendance des processus
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Constituer les équipes
Attentes des acteurs
Ince
rtitu
de d
u pr
ojet
Méfiance
AdhésionRejet
Source : LARIF S. & LESORBE T., « Positionnement des acteurs face à l’implantation d’un ERP »,Système d’Information et Management, n°2, vol. 9, 2004
Retrait
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Analyse sociopolitique de Solé, 1986
Source : Vasquez, 2004
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La « session changement » (F. Kourilsky-Belliard, 2000)
Animation sur ½ journée maximumChaque collaborateur décrit son fonctionnement actuelLe coach demande ensuite des critiques sur lesdits processus existantsParole donnée à l’équipe projet qui présente le processus cible avec les changements impactants, les avantages, les inconvénientsIl faut noter toutes les réactions (acceptations, rejets, colères, etc.)Debriefing
Cas de Allianz (assurances, 6 000 employés)2001 : décision d'implémenter un CRMEnjeu : convaincre les commerciaux de l'intérêt de la fidélisation client10 situations clés de travail (pour les commerciaux et managers)Système d’autoévaluation et évaluation croiséeA permis de se mettre d'accord sur les points forts, les points faibles, les efforts à fournir en matière de CRM
Techniques d'inversion des rôles
Demander à chacun de décrire le travail fait par l'autre => faire comprendre les interdépendancesDemander à chacun de noter les contre-arguments de l'autre et de l'expliquer à l'oral => faire intégrer et admettre des avis opposésMéthode des diagnostics
On demande au « camp des partisans » de prévoir les propositions attendues par le « camp des détracteurs »On demande aux « camp des détracteur » d'exprimer leurs attentesComparaisons
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Dépasser les causes explicites...
Ah que cet ascenseur est long !!! Nous ne faisons que l'attendre !
Ne pas se limiter à ce que disent formellement les gens
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Sur des résistances plus profondes :sortir les gens de leur contexte
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Cas de Skandia
Skandia : compagnie d’assuranceDepuis 1996 : mise en place d’un « incubateur d’idées » sur les TI et la stratégie« 3G teams » :
3 Générations : 25+, 35+, 45+Équipes à temps partiel et cross-culturelles (Venezuela, Allemagne, Suède et US)Objectif : formuler des questions stratégiques (et non des réponses) Traduits en scénario de pièce de théâtre transmis aux seniors managers
« Knowledge Café »150 cadres regroupés sur plusieurs sites par GroupwareDu café pour tout le monde, diffusion de la « pièce de théâtre », plus une heure de discussions anonymeProjet entièrement enregistré en vidéo et diffusé auprès d’une communauté d’employés plus large.
A permis d’inférer la vision qu’avaient les opérationnel de l’évolution du métier de la finance avec les TICMais attention : Skandia est une entreprise suédoise...
Source : McNurlin & Sprague, 2006
Les LEGOS
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La médiation
Recours à un tiers « neutre » (souvent un consultant)Fin du fin : ne pas le présenter comme un médiateur
1ère étape :S’entretenir avec chaque partie prenanteOu bien les réunir pour faire éclater le conflit
2ème étape (après quelques jours)Traiter l’écart entre les messages initiaux et le degré d’interprétation de la partie opposéeObjectif : faire ressortir les non-dits
Exemple chez un équipementier électriqueProjet d’automatisation des SILe DSI n’acceptait pas d’être remplacé par le n°2Le nouveau se sentait mal à l’aise de prendre sa place
Techniques de négociationLe temps : faire durer la négociation pour user l’adversaire
Les pivots : obliger l’adversaire à négocier sur des objectifs en fait secondaires mais formulés de manière exigeante. On cède alors sur ces objectifs secondaires et en contrepartie on exige des concessions sur l’objectif principal.
Les 4 marches : on présente 4 solutions et non pas 2 comme souvent :
1. excellente pour l'autre ; inacceptable pour soi => on l'élimine pour son côté injusteEx : renoncer à l'ERP pour te permettre de conserver l'appli de ton service
2. excellente pour l'autre ; acceptable pour soi => on l'élimine des raisons techniquesEx : Implanter l'ERP tout en conservant l'appli existante de ton service
3. inacceptable pour l'autre ; trop avantageuse pour soi ; =>on l'élimine pour les même raisons que la premièreEx : T'imposer le module standard de l'ERP
4. acceptable pour l'autre ; excellente pour soi (inverse de la 2ème)Ex : Implanter l'ERP en te laissant la possibilité de faire des traitements parallèle sous Excel
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4) Styles de management du conflitTypologie de Barki et al., 2001
La résolution de problèmes
Les managers cherchent à identifier les causes du problème et à y apporter les solutions appropriées.
L’atteinte de compromis
Le problème n’est pas soluble en soi et les managers essaient de trouver des solutions satisfaisantes.
L’affirmation Des décisions autoritaires sont imposées
L’accommodation La direction de l’entreprise sacrifie ses désirs et préférences au profit de ceux revendiqués par les utilisateurs.
L’évitement Les managers n’interviennent pas dans le conflit et laissent la situation évoluer d’elle-même.
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Management de projet, Typologie de Gibson, 2003
Management Style
Authoritative Participative
Budget and Deadline
Fixed Big Bang Guided Evolution
Adjustable Top-down Coordinator Improvisation
Source: Gibson, 2003
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Savoir combiner plusieurs styles :Cas de Dow Corning
Projet implantation d’un ERP (R/3 de SAP)
Objectif : utiliser les TI pour forger le changement organisationnelDurée : 1995-1999
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Cas de Dow Corning
Phase 0 : projet risquéLeadership défavorable : échec préalable d’un SI de gestion de commandesPerception des employés : défavorable (pas habitués aux gros changements)Cible et délais défavorables : objectifs larges et impactant pour des délais très courts.
Phase 1 : approche improvisationImplications des 40 managers les plus respectés (key users)Consensus et échéances flexibles pour faire adapter les processus de l’entrepriseRésultat : implication des 40 managers, mais échec les changements de processus annoncés => perception négative des employés
Phase 2 : approche guided evolutionNouveau pilote de projet (un ancien de SAP)Établissement d’échéances sur les changements au niveau des processusRésultat : perception des employés redevient favorable
Phase 3 : approche top-down coordinatorProject scope = perception négative du fait de l’ampleur internationale du projetGros travail pour convaincre les cadres d’adapter leurs processus aux standards de l’ERPSeule flexibilité : échéances fixées pour adapter les processusRésultat : ERP déployé dans la plupart des entités
Phase 4 : approche Big BangDéploiement de l’ERP dans les sites résistantsRésultat : implantation sur 4 mois par site au lieu de 18 mois(effet diffusion des TIC)
Formation et accompagnement
Impératif d'organiser des sessions de formation !Éviter le syndrome « paper board »Intérêt d'une formation par les « pairs »(cas de Stihl)Système de bug reporting et de boite à idées pour l'amélioration du systèmeJouer sur « l'influence sociale »
Faire du tracking et du reporting sur l'utilisation faite du systèmeMettre en ligne des indicateurs visibles : ex. personnes connectéesValoriser les « best users » ou les contributeurs (ex. pour un KMS)
Pour les nouveaux arrivants : un coach ou un parrain
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Conclusion
Les résistances sont humaines donc inévitablesFaire le changement sans les autres, c’est faire contre les autresPour qu’un changement ait du sens :
Il faut que les utilisateurs aient l’impression d’avoir été acteursVoire même que l’idée venait de eux
Savoir être impopulaire mais juste
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Références
Bancroft-Turner & Morley (2002), “Organisational politic is about to go positive”, Organisational politicsGibson, C. (2003), « IT-Enabled Business Change: An Approach to Understanding and Managing Risk », MIS Quarterlerly Executive, vol. 2, n°2Kroenke D. M. (2006), Using MIS, Pearson Prentice HallLaudon K. C., Laudon J. P. (2006), Management Information Systems, Pearson Prentice HallMcNurlin B. C., Sprague R. H. (2006), Information Systems Management in Practice, Pearson Prentice HallVasques S. (2004), « Pouvoir et participation dans la mise en oeuvre de SI », Conférence de l’Association Information et ManagementVidal P., Planeix P. (2005), Systèmes d’information organisationnels, Pearson Education
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Vision mathématique du changement :l’équation de Beckhard and Harris (1987)
D x V x F > R =
Dissatisfaction x Vision x First Steps > Resistance to Change