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LES BELLES

NATURES

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CAPRI PETITE ILE.

L'HOMME DU Roi.

BERGÈRE LÉGÈRE.

CHAIR ET CUIR.

CHASSENEUIL.

LES ÉLANS DU Cœur.LES BELLES NATURES.

L'œuf.

CASANOVA OU L'ANTI-DON JUAN.BALZAC ET SON MONDE.

EN DE SECRÈTES NOCES.

FÉLICIEN MARCEAU

Romans-Récits.

Chez d'autres éditeurs

Œuvres de

mf

Théâtre.

Essais.

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FÉLICIEN MARCEAU

LES BELLES

NATURES

XUf

GALLIMARD

5, rue Sé6astien-Bottin, Paris -VIIe

27e édition

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a été tiré de l'édition originale de cet ouvrage cin-quante-cinq exemplaires sur vélin pur fil LafumaNavarre dont cinquante numérotés de i à 50 et cinq,

hors commerce, marqués de A à E.

Tous droits de traduction, de reproduction et d'adaptationréservés pour tous les pays, y compris la Russie.

© 1957 Librairie Gallimard.

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Les rosés de Concettina

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Étant modeste, Concettina Cutolo tenaitson corps en petite estime. C'est dire que,lorsqu'on le lui demandait, assez générale-ment elle le donnait, sans aller s'imaginer,comme tant de femmes, qu'il y eût là dequoi faire beaucoup d'histoires.

En l'occurrence et d'une certaine ma-

nière, c'était sainement jugé Concet-tina n'avait rien de la Vénus de Milo. Son

cou était un peu trop court et sa tailletrop basse. Parlant d'elle-même, elle disaitqu'elle avait le nez retroussé. On eût pudire aussi bien qu'il tenait assez du pied demarmite. Mais enfin, à vingt-deux ans,elle avait de l'éclat. Des rondeurs. De

beaux yeux. Disons que, dans son genre,un peu vulgaire, elle n'était pas mal.

Son père mort, sa mère réduite à se fairemarchande ambulante (en été, de pas-tèques en hiver, de tripe bouillie), Concet-tina, dès sa quinzième année, avait étémise en demeure de gagner sa vie. Elleavait connu différents emplois gardeused'enfants (elle les emmenait dans un ter-

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rain vague où elle jouait avec plus de cœurqu'eux), bonne à tout faire, vendeuse dansdes négoces variés et même une fois, gloirejamais oubliée, figurante dans un roman enphotos. Ce sont là, comme on sait, autantde métiers où souvent l'on se trouve en

butte à des avances. Concettina tantôt ycédait, tantôt refusait, suivant son humeur,suivant la nécessité ou suivant l'individu

mais sans que cela répondît jamais à unprincipe bien défini. A dix-neuf ans, aprèsune courte liaison, un certain Sandro,maçon de son état, l'avait épousée, on sedemande pourquoi car, six mois plus tard,sous couleur d'un engagement à Viterbe, ilavait disparu sans plus jamais donner de sesnouvelles. Concettina n'en avait éprouvéqu'un chagrin modéré.

Là-dessus, la guerre était entrée, en Ita-lie, dans sa phase la plus bousculée. Lesbombardements, les nuits passées dans lesabris, la misère. Son magasin ayant été tou-ché par une bombe, le dernier employeurde Concettina, un chapelier, avait ferméboutique. Concettina, pendant quelquesmois, n'avait pas souvent mangé à sa faim.Lorsque les Américains occupèrent Naples,Concettina, comme beaucoup d'autres,alla chercher près d'eux de quoi se nourrir.Sur les places étroites, entre les noblesfaçades dégradées et les églises chargéesd'anges à trompettes, des boogie-woogie s'or-

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ganisaient. Les soldats américains distri-buaient les boîtes de conserves et les pa-quets de cigarettes qui étaient devenus lesétalons-or du nouvel état de choses. Par-

fois un de ces soldats insistait. Concettina

alors le ramenait chez elle, dans la vaste

pièce sombre, au ras de la rue, qu'elleoccupait avec sa mère. Le soldat déposaitsur la table les boîtes de conserves. La

mère de Concettina soupirait, sortait, allaittraîner dans la rue ou chez une voisine.

Lorsqu'elle revenait, on se mettait à table.Avec le soldat, généralement, qui ne disaitrien ou qui montrait des photographiesde sa mère, de ses enfants. Que celui quin'a jamais eu faim juge. Moi, il m'estarrivé d'avoir faim.

Puis, un jour, passant via Caracciolo, labelle avenue qui longe la mer, Concettinaavait avisé un marin américain assis sur

le parapet. Concettina jusqu'alors n'avaitconnu que des soldats. Ce marin lui plut.Sous son calot blanc, il avait un visagetriste, l'air d'un enfant abandonné. Enpassant, Concettina lui sourit. Il eut uneexpression étonnée. Concettina ralentit lepas. Ses deux pieds ballant, ses deux mainssur le parapet, de grosses pattes attendris-santes, les épaules remontées, le marin lasuivait du regard. Concettina avait sa robede cotonnade, noire à fleurs jaunes. Et lescheveux dans la figure, à cause du grand

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vent qui venait de la mer. Cela lui don-nait un air sauvage, qui lui allait. Del'autre côté du parapet, une barque, àpetits coups de rames, abordait. Concet-tina, d'un mouvement presque parallèle, serapprocha du parapet, s'accouda. Se dé-plaçant sur les fesses, le marin la rejoignit.

Promener? dit-il.

Oui, dit Concettina.Mais elle le dit d'une manière très réser-

vée, comme distraite, sans cesser de regar-der la mer qui, ce jour-là, était assez agitée.Des moutons blancs couraient à la surface

de l'eau. Les barques, elles, faisaient plu-tôt penser à des chèvres, des chèvres fu-rieuses d'être attachées et qui donnaientdes coups de tête dans la mer. A deux centsmètres, un porte-avions, comme une courd'usine.

Promener with me ? dit le marin.

Concettina enfin leva les yeux. Le marinétait penché vers elle. Lui aussi, il avait lenez retroussé mais mal retroussé, comme sion l'avait retroussé d'un revers de la main,de larges narines rondes. Et des taches derousseur.

With me ? dit encore le marin.

Pour qu'il n'y eût pas d'équivoque, il sedésignait du doigt. Concettina eut ce haus-sement d'épaules qui, dans son langage,signifiait l'acquiescement. Le marin sautadu parapet. Déception il était vrai-

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ment petit. Mais on connaît l'adage àconserves données, on ne regarde pas labride. Concettina se retourna, s'adossaau parapet. Ainsi, dans le soleil, la merderrière eux, lui timide, elle souriante,ils avaient l'air exactement de ce qu'ilsétaient une femme, un marin. Devanteux, la large avenue, les grands hôtels dontdeux à moitié détruits par les bombes.Passaient des voitures à chevaux, tap taptap, et des jeeps et des cireurs de bottes,de douze ans, avec des vestes trop longueset qui frappaient avec leurs brosses surleurs boîtes. Et le ciel très bleu. Et le vent,

en brusques rafales, comme de grandesvoiles.

Ils se promenèrent. En passant devantune pâtisserie, le marin voulut y entrer.C'était une des pâtisseries les plus élégantesde Naples. Seule, Concettina n'aurait ja-mais osé y pénétrer. Mais, pour les Améri-cains, comme on sait, rien n'est sacré. Le

marin avait pris la main de Concettina etla caressait doucement, d'un air inquiet, enlui confiant qu'il s'appelait Johnny. Lafourchette piquée dans un gâteau vert etrose, Concettina se sentait envahie par unsentiment étrange une sorte de respectpour elle-même. Elle fut soulagée lorsquele marin, au lieu de l'accompagner chezelle, lui proposa un rendez-vous pour lelendemain.

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Le lendemain, comme Concettina arri-

vait via Caracciolo, elle le vit de loin, déjàarrivé, qui attendait, assis, comme la veille,sur le parapet. A sa gauche, il avait poséun sac de toile bise. A sa droite, un bouquetde roses. Le sac était attendu il contenait

certainement des boîtes de conserves. Mais

les roses ? Arrêtée de l'autre côté de l'ave-

nue, le marin à trente mètres d'elle, sur le

fond bleu pâle du ciel, bleu sombre de lamer, séparée de lui par les jeeps d'où dessoldats lui lançaient des exclamations flat-teuses, Concettina, intimidée, hésitait. Desroses ? Jamais personne ne lui avait offertdes roses. Elle avait été vendeuse chez

un fleuriste pourtant. Les hommes qui yvenaient lui avaient bien parfois proposédes rendez-vous. Aucun, de la gerbe déjàcommandée, n'avait jamais songé à dis-traire une rose. Alors pourquoi ? Pourquoices roses ? Un moment, Concettina pensas'éclipser. Ces roses lui faisaient peur. Cesroses lui semblaient perfides. Que lui vou-lait-il donc, cet Américain? Il avait l'airbien innocent cependant, là, sur son boutde mur. Il ne songeait pas à regarder del'autre côté de l'avenue. C'était vers la

gauche qu'il guettait, déjà anxieux, levisage si nu sous le calot blanc. Concettinaen prit son parti, traversa. Si c'était unefarce, elle le verrait bien. Mais le cœur luibattait.

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Ce n'était pas une farce. Ou alors paspour tout de suite. Le marin lui tendit lesroses puis, comme en s'excusant (mais dequoi? Dio mio), le sac.

Pour manger, dit-il avec quelquesgestes à l'appui.

Depuis la veille, il s'était enhardi. Ilprenait le menton de Concettina, lui rele-vait la tête, scrutait son visage avec uneexpression de médecin.

Vous mal manger. Maintenant man-ger tout ça.

Concettina, cette fois, l'emmena chezelle. Sa mère, pensivement ou, du moins,l'air pensif, éventait un réchaud de braise.En voyant l'Américain, elle voulut s'enaller. Mais pas du tout. Le marin la re-tenait.

Moi pas déranger, dit-il. Moi invité.Comme pour réparer un impair et

avec un regard d'excuse à l'intention deConcettina, il reprit les roses et les offrità Mme Cutolo. Celle-ci en resta perplexe.

Mets-les dans un vase, dit Concet-tina. Cela lui fera plaisir.

La stupeur arracha à Mme Cutoloquelques marmonnements de significationimprécise. En fourgonnant dans le fondde la pièce, elle finit par trouver un vase,y planta les fleurs d'un coup sec et vintdisposer le tout sur la table, non pas aumilieu mais devant l'Américain.

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Good! dit celui-ci.

Il eut quelques gestes légers pour arran-ger mieux les fleurs. Hébétée, Mme Cutoloétait restée debout. L'Américain la fit as-

seoir. Renonçant à comprendre, Concet-tina trouva plus simple de faire ce dontelle avait envie elle prit des assiettes, lesdisposa sur la table. Très zélé, Johnnyouvrait les boîtes et en montrait fière-

ment le contenu. Ils mangèrent. Des mi-miques appropriées furent échangées, entreConcettina et le marin pour signifier res-pectivement qu'elle trouvait les conservessucculentes et qu'il en était ravi, entre lemarin et Mme Cutolo pour l'inciter à man-ger davantage et pour faire entendre quenon merci elle était comblée. De temps entemps, d'un air songeur, Mme Cutolo re-gardait les roses. Elle avait un large visagegras, assez majestueux.

Le repas terminé, l'Américain eut unrire carré puis, soudain rougissant, il seleva et entama un baragouin infini danslequel, n'en croyant pas leurs oreilles,Concettina et sa mère finirent par décelerqu'il demandait à Mme Cutolo la permis-sion d'emmener sa fille au cinéma. La per-mission ? Concettina haussait les épaules.Mme Cutolo avait un regard éperdu pourles roses. Le cinéma? A tout hasard,Mme Cutolo dit oui. Le marin eut un

rire charmé et, se penchant, il embrassa

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Mme Cutolo laquelle, complètement éga-rée, eut alors un geste qui lui revint dufond de son enfance sur le front du marin,de son pouce épais, elle traça une petitecroix.

Le lendemain, ce fut pareil. Et lesurlendemain. Et pendant huit jours.Johnny maintenant venait directementchez Concettina, toujours chargé de boîtesde conserves, de paquets de cigaretteset d'autres menues babioles pas toujoursd'une utilité très immédiate pour desfemmes mais dont Concettina se servait

comme" monnaie d'échange pour ses em-plettes. Un jour sur deux aussi, il apportaitdes fleurs, toujours deux bouquets, l'unpour Concettina, l'autre pour Mme Cutolo.Le dîner terminé, il se levait et, trèsgourmé, il demandait la permission d'em-mener Concettina. Ils allaient au cinéma.

Ou bien ils se promenaient, allaient jusqu'àSanta-Lucie. Le temps était tiède et doux.Assis sur le seuil des bassi, des vieillards

rieurs et des épouses obèses suivaient lesdeux amoureux d'un regard tantôt bla-gueur, tantôt sagace. Des galopins parfoisfaisaient un geste précis. Johnny ne sem-blait pas s'en apercevoir, sauf une fois oùil calotta un des petits insolents (ce gestefut généralement blâmé). En italien, ilfaisait des progrès rapides. Pour le reste.Eh bien, pour le reste, rien. En prenant

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congé, il embrassait Concettina sur la joue,comme un cousin. C'était tout. Les coudes

sur le parapet, Concettina à côté de lui,Johnny regardait la mer, l'immense baie,le soleil couchant, le gros tas lilas de Capriémergeant d'une eau sombre. Ce spectaclequi a fait rêver tant de jeunes mariés ettant de couples adultères ne lui arrachaitpas un geste plus vif. Dans le restaurant encontrebas, un chanteur, la tête renversée,le corps dodelinant, comme ivre de sesroulades, lançait vers le ciel ses délirescharmés. Johnny restait impassible. Cen-til, prévenant, affectueux. Mais impassible.

Le neuvième jour, Concettina émergeaenfin de la stupeur d'ailleurs heureuse-•où la faisait vivre l'Américain. L'heure de

la visite rituelle approchant, elle renvoyasa mère, mit son nouveau chemisier (quilui avait coûté six paquets de Lucky strike),s'inonda de parfum (huit paquets) et atten-dit. Johnny arriva, s'inquiéta de l'absencede Mme Cutolo, en montra du regret.C'était un de ses jours à fleurs. Il avait sesdeux bouquets, des roses précisément. Avecdes soins de ménagère, il prit les bouquetsde l'avant-veille, alla les jeter dans la rue(on n'est pas mesquin, à Naples. Tu asquelque chose qui te gêne? Tu le jettesdans la rue) et revint disposer les nouveaux.

Embrasse-moi, dit Concettina à boutde patience.

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