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LA NEUROPSYCHOLOGIE DU TRAUMATISÉ CRÂNIEN TROUBLES COGNITIFS Emmanuelle Darnoux Psychologue spécialisée en Neuropsychologie (libéral, 77) CRFTC, 25/11/2014 1

LA NEUROPSYCHOLOGIE DU TRAUMATISÉ CRÂNIEN · TRAUMATISME CRÂNIEN (TC) SYMPTÔMES COGNITIFS 4 grandes catégories pour les perturbations cognitives: - enteur de traitement de l’information

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  • LA NEUROPSYCHOLOGIE DU TRAUMATISÉ CRÂNIEN

    TROUBLES COGNITIFS

    Emmanuelle Darnoux – Psychologue spécialisée en Neuropsychologie (libéral, 77)

    CRFTC, 25/11/2014

    1

  • LÉSIONS CÉRÉBRALES

    AVC: lésions focales ± étendues

    Troubles en lien avec les régions concernées et ses relations avec le reste du cerveau

    TC: lésions traumatiques, axonales diffuses

    atteinte + globale des fonctions cérébrales selon la sévérité du TC

    TC= contact brusque entre la matière cérébrale et la boîte crânienne (contusion, fracture, hématome). Endommage les cellules cérébrales (neurones) et leurs prolongements.

    Séquelles ± nombreuses/intenses selon la localisation

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  • EVALUATION

    Diagnostic et intensité des troubles

    Prédiction des capacités d’autonomie: corrélations entre échelles cognitives et les difficultés pour les actes de la vie quotidienne

    Qui?

    - Orthophonistes: langage, parole, déglutition

    - Neuropsychologues: mémoire, attention, fonctions exécutives, troubles neurovisuels

    - Ergothérapeutes: évaluation en situation de tâches concrêtes et d’AVQ

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  • EVALUATION EN NEUROPSYCHOLOGIE

    La neuropsychologie: Etude des perturbations cognitives et émotionnelles de même que les désordres de la personnalité provoqués par des lésions du cerveau qui est l’organe de la pensée donc le siège de la conscience. (Gil R. Neuropsychologie Abrégés Masson Eds, 1996.)

    Evaluation de l’efficience cognitive avec des tests adaptés, permettant de:

    - caractériser la nature des déficits cognitifs

    - et d’identifier les capacités préservées 4

  • EVALUATION NEUROPSYCHOLOGIQUE: POURQUOI?

    Dépistage: répondre à la plainte

    mnésique, authentifier

    l’existence de troubles cognitifs

    et les fonctions préservées

    Prise en charge: évaluer le bénéfice sur les fonctions cognitives

    Suivi: évaluer l’évolution d’une pathologie ou confirmer une hypothèse diagnostique

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  • EVALUATION NEUROPSYCHOLOGIQUE: COMMENT?

    Entretien clinique (famille, patient); Tests psychométriques (papier-crayon, informatisés); Echelles cliniques, questionnaires

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  • ENTRETIEN CLINIQUE

    Information sur les raisons à l’origine de l’examen; la demande

    Retracer l’histoire de la maladie (nature des troubles, date d’apparition, chronologie)

    Recueil et identification + précise de la plainte avec le retentissement dans les AVQ

    NSC : passé scolaire et professionnel

    Histoire personnelle, mémoire autobiographique

    ATCD, traitement

    État sensoriel

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  • ENTRETIEN AVEC L’AIDANT

    Troubles en situation écologique

    Depuis combien de temps, mode d’apparition

    Autonomie touchée?

    Dépression

    Anosognosie

    Fardeau

    Trouble du comportement

    Fiabilité de l’aidant ou accompagnant ? …

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  • TRAUMATISME CRÂNIEN (TC) SYMPTÔMES COGNITIFS

    4 grandes catégories pour les perturbations

    cognitives:

    - Lenteur de traitement de l’information

    - Troubles de l’attention

    - Troubles de mémoire (court et long terme)

    - Troubles des fonctions exécutives

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  • LES AIRES CÉRÉBRALES

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  • LE RALENTISSEMENT

    Le sujet cérébrolésé peut être atteint d’un ralentissement général

    - du traitement de l’information

    - dans les réactions

    - dans les pensées

    La personne a alors besoin de plus de temps pour réaliser une action ou comprendre les informations qu’on va lui donner

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  • TROUBLES ATTENTIONNELS

    - difficultés de concentration

    - distractibilité

    - difficulté à faire plusieurs choses en même temps

    Concrètement: des difficultés à réaliser une tâche en environnement bruyant, oubli immédiat de ce qui vient d’être dit ou fait

    Attention soutenue: maintien de l’attention pendant une durée ± longue

    Attention sélective: aptitude à se focaliser sur l’information jugée prioritaire et la capacité à inhiber les stimuli non pertinents

    Attention divisée (plusieurs tâches simultanées) 12

  • LA MÉMOIRE

    Mémoire de travail : contient un nombre limité

    d’éléments pendant un cours instant, avec possibilité de les manipuler mentalement.

    Mémoire à long terme : contient toutes les informations maintenues durablement. A une durée et un capacité illimitées.

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  • TROUBLES DE LA MÉMOIRE DE TRAVAIL (MDT)

    MDT: à court terme, permet à une personne de disposer d’un espace de travail mental afin de maintenir des informations pendant une période de plusieurs secondes

    Terme « de travail » cf. aspect actif

    Rôle: stocker et manipuler les informations pendant de courtes périodes et lors de la réalisation d’une activité

    Ex: serveuse (commande, traverse le bar, repère des nouveaux clients…)

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  • TROUBLES DE LA MÉMOIRE DE TRAVAIL (MDT)

    Sollicitée dans nos activités quotidiennes:

    - lors de la recherche d’informations (ex: plan de quartier, code p.36, zone B ; cases 3 et 4 retenir le code le temps de trouver la bonne page, zone, cases …)

    - lors d’un raisonnement: pour élaborer et comparer les différentes idées qui viennent à l’esprit, garder en mémoire les avantages et les inconvénients des solutions proposées

    - lors de la compréhension en lecture: on garde le début de la phrase en mémoire, le temps de lire jusqu’à la fin.

    15

  • TROUBLES MÉMOIRE À LONG TERME

    Amnésie rétrograde : incapacité à

    restituer des informations anciennes

    acquises avant l’accident

    Rares, moins sévères que l’atteinte

    antérograde

    Amnésie antérograde : incapacité à acquérir des informations nouvelles, depuis le début des troubles de la mémoire.

    Amnésie lacunaire : îlot d’amnésie entourant des souvenirs intacts

    Lacune mnésique souvent autour de l’accident 16

  • Mémoire= 3 processus:

    Encodage

    Stockage

    Récupération

    Troubles de mémoire peuvent être liés à un trouble attentionnel et/ou de l’organisation du matériel à mémoriser plus qu’à un réel trouble de l’encodage ou de la récupération

    ≠ types de troubles mnésiques

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  • TEST DE MÉMOIRE – LE CALIFORNIA VERBAL LEARNING TEST

    -16 mots à mémoriser - 5 essais d’apprentissage - 1 liste interférente

    - Rappel indicé avec les 4 catégories

    - Rappel différé

    - Phase de reconnaissance « oui/non »

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  • TROUBLES DE MÉMOIRE QUELQUES CONSEILS

    Ne pas tenter de stimuler la mémoire

    par des activités que le patient n’aime pas (mots croisés, jeux TV, mémoriser des chiffres/mots) mise devant échec

    Le + stimulant= activités qui lui font plaisir

    Aider et soutenir face aux oublis en relativisant la gravité des oublis, sans minimiser

    S’il s’agit d’un problème d’enregistrement des informations, répéter peut aider

    Post-it / mémos attention à ne pas surcharger

    Objectif: soutenir dans les difficultés pour diminuer la gêne et améliorer le quotidien 19

  • LOBE FRONTAL: « CHEF D’ORCHESTRE DES FONCTIONS COGNITIVES »

    Fonctions exécutives: raisonnement/actions dirigés vers un but: programmation de la motricité, pensée, langage…

    Régulation des comportements (activation ou inhibition) en mettant en relation le monde intérieur (motivation, émotions) et les contraintes extérieures

    Rôles dans la mémoire (apprentissage), l’attention, le langage…

    Impact dans l’interaction à l’autre 20

  • FONCTIONS EXÉCUTIVES

    Adaptation à des tâches nouvelles non routinières

    Planification

    Prise de décision

    Maintien d’une consigne

    Auto-surveillance et auto-correction

    Flexibilité en cas d’imprévu

    Clinique: difficultés d’adaptation sociale, professionnelle…

    Nécessité de routines

    Csqces dans la vie quotidienne, retentissement sur l’autonomie

    ≠ syndromes frontaux selon la localisation lésionnelle

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  • TROUBLES EXÉCUTIFS

    Trouble de l’inhibition= difficultés à s’empêcher de produire des actions inadaptées.

    Troubles de la flexibilité mentale= difficultés à passer d’un comportement à un autre en fonction des exigences de l’environnement.

    Trouble de la planification= difficultés à organiser une série d’actions en une séquence optimale visant à atteindre un but.

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  • TROUBLES EXÉCUTIFS (2)

    Des difficultés pour:

    maintenir le but

    planifier à l’avance et choisir les différents plans d’actions qui permettront d’atteindre le but

    choisir le meilleur plan d’action

    initier le plan d’action sélectionné tout en tenant compte d’incidents ou de changements nécessaires à l’atteinte du but fixé

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  • CONCLUSION FONCTIONS EXÉCUTIVES

    Processus complexe, non unitaire

    Définition, évaluation difficile

    Tenir compte du contexte (niveau antérieur, fonctions non

    exécutives)

    Prendre en compte le fonctionnement dans la vie

    quotidienne (personnel et familial)

    Complémentarité indispensable des tests

    neuropsychologiques / évaluation vie quotidienne /

    entretien avec les proches 24

  • TROUBLES SENSORIELS

    Traitement erroné des perceptions (vision, audition, odorat, toucher, …)

    Trouble de la vision d’origine centrale, ne peuvent être corrigés avec des lunettes, résultent d’un dysfonctionnement du traitement des signaux au niveau cérébral

    perception brouillée après quelques minutes de lecture ; sensation d’une pression cérébrale, maux de tête

    Trouble de l’audition centrale entraîne une sensibilité accrue au bruit.

    Le patient cérébrolésé n’est plus en mesure de filtrer les bruits environnants indésirables

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  • ANOSOGNOSIE

    Anosognosie= méconnaissance des troubles

    Origine est neurologique

    A ne pas confondre avec le déni (mécanisme de défense psychologique)

    Impact sur l’implication dans la rééducation des troubles

    Prise de conscience des troubles est une étape importante

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  • EXPRESSION CONCRÈTE DES TROUBLES COGNITIFS DANS LE QUOTIDIEN

    Difficultés d’orientation (temps et/ou espace)

    Troubles de mémoire: événements très anciens > actions du quotidien

    Difficultés à retenir les noms, les rendez-vous et les informations nouvelles.

    Patient peut redemander une info donnée il y a quelques minutes à peine

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  • EXPRESSION CONCRÈTE DES TROUBLES COGNITIFS DANS LE QUOTIDIEN (2)

    La capacité d’apprentissage,

    la concentration, l’aptitude à planifier ou

    à s’adapter à la nouveauté sont diminuées

    Difficultés à prendre des décisions

    Difficultés à faire deux choses à la fois (Ex: parler tout en marchant)

    Perte des automatismes (d’abord la chaussure ou la chaussette?)

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  • PRISE EN CHARGE

    Hospitalisation souvent suivie d’une

    réadaptation fonctionnelle (jusqu’à plusieurs années)

    Permet de récupérer certaines fonctions, ou de mettre en place des stratégies pour contourner les difficultés

    Rééducation construite en fonction des difficultés particulières / capacités préservées / besoins et en fonction du projet

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  • CAS PARTICULIER DES PATIENTS TC

    Un handicap « invisible » parfois:

    - sous-estimation fréquente des troubles

    - d’autant que les patients sont anosognosiques

    Nécessité d’une prise en charge spécifique:

    accompagnement familial

    rôle des associations des familles de TC

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  • CAS CLINIQUE (1)

    Monsieur M., 44 ans

    TC grave par agression

    Cécité corticale initiale

    Troubles phasiques (paraphasies ++)

    Troubles de mémoire antérograde et rétrograde

    majeurs avec oubli à mesure

    Troubles d’équilibre (syndrome cérébelleux)

    Conservation de l’efficience intellectuelle

    Aucune plainte: anosognosie majeure 31

  • CAS CLINIQUE (2)

    Monsieur C.C., 37 ans

    TC crânio-facial par accident de la voie publique (moto contre camion, en Inde)

    Hématome temporo-pariétal extradural droit avec hémorragie inter-hémisphérique

    Plaintes: -Lenteur de traitement, oublis

    - Difficultés de compréhension de l’implicite

    - Irritabilité, sensibilité au bruit

    - Fatigue

    - Vertiges

    - Maux de tête lors d’efforts intellectuels (lecture)

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  • CAS CLINIQUE (2) SUITE

    Monsieur C.C., est gênée par des angoisses ; impression de se focaliser sur les événements négatifs sans pouvoir s’en empêcher

    Bilan neuropsychologique:

    - concentration fluctuante mais les performances sont normales

    - bonnes capacités de mémoire de travail,

    - mémoire antérograde efficiente

    - Entourage ne comprend pas les difficultés exprimées 33

  • CONCLUSIONS

    Séquelles cognitives et comportementales= 1ère cause de handicap personnel et social

    Limitations d’activité

    Handicap invisible cf. prédominance des troubles cognitifs et comportementaux

    Variabilité ++ des symptômes d’un patient à l’autre

    Importance de connaître les déficiences cognitives et comportementales dues aux lésions cérébrales de nos patients

    permet de prédire et de comprendre leurs difficultés et nos réactions face à elles

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  • CONCLUSIONS (2)

    Parfois difficile de faire la part des choses

    - personnalité et performances antérieures

    - rapports entre troubles cognitifs et cptmt

    - rapports entre troubles psychologiques et cptmt

    Intrication entre:

    - Dysharmonie cérébrale acquise

    - Rupture existentielle et identitaire (l’avant/l’après)

    - Les défenses psychiques mobilisées (par l’atteinte cérébrale, par le traumatisme psychique)

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  • CONCLUSIONS (3)

    Piège: confondre les troubles cognitifs et comportementaux avec une pathologie psychiatrique

    Ne pas oublier l’intrication des répercussions relationnelles, comportementales, affectives et intellectuelles

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  • [email protected]

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