2
1S66 Ann Pathol 2007 ; 27 : 1S64-1S68 © 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. désespérément binaire, a besoin, à cette étape d’une réponse sans ambiguïté : cancer ou non, cancer infil- trant ou non, composante intra canalaire ou non. Et comme les choses ne sont pas toujours aussi simples, il faudra savoir utiliser encore parfois l’examen extempo- rané, qui seul permettra d’éviter des interventions ité- ratives ou le retour à la chirurgie diagnostique. Pendant l’intervention, le dialogue entre radiologue, chirurgien et pathologiste doit être le plus complet et le plus pré- cis possible. L’ensemble des données cliniques et radio- logiques doit être mis à la disposition du pathologiste et il doit s’en servir ; en cas de chirurgie des lésions infra- cliniques, un cliché de pièce doit lui être transmis. L’orientation de la pièce doit faire l’objet d’un proto- cole clairement établi, non pas tant pour orienter une recoupe mais pour guider l’analyse des marges d’exérè- se : elles ne peuvent être les mêmes en cas de lésion centrale ou en cas de lésion proche de la peau ou du plan profond. Après l’intervention, le compte-rendu doit préciser : la taille de la lésion, non seulement le plus grand axe, mais donner, autant que faire se peut, une idée vo- lumétrique de la tumeur ; — le rapport entre les composantes invasives et in- tracanalaires ; — le caractère plurifocal vrai ou simplement lié à des artefacts de coupe ; — l’état des marges d’exérèse et leur variation en fonction de l’orientation géographique de la pièce. Qu’attendre du pathologiste ? Qu’il soit le garant de la qualité de l’acte chirurgical. La chirurgie conserva- trice du sein ne peut être justifiée que si les conditions de qualité sont parfaites à chaque étape. Ceci est affai- re d’équipe où chacun progresse au contact de l’autre, ou le dialogue est clair et permanent. Une cordée de montagne ne progresse qu’au rythme du plus lent. Le pathologiste et son chirurgien… ou vice-versa. Tourments et sérénités dans la communication JACQUEMIER J (1) , BELLOCQ JP (2) (1) Département de Biopathologie, Institut Paoli-Calmettes, Marseille. (2) Département de Pathologie, Hôpital Hautepierre, Strasbourg. En 2003, le dépistage du cancer du sein a été généra- lisé à l’ensemble du territoire national après la prise en compte de l’expérience des régions pilotes. Ce mouve- ment a modifié notre contact avec cette maladie. Progres- sivement les lésions tumorales invasives sont devenues de plus en plus petites et de moins en moins extensives au moment du diagnostic, avec 35 % de tumeurs invasives de moins de 10 mm, 42 % entre 11 et 20 mm et une ab- sence d’envahissement ganglionnaire dans 73 à 84 % des cas. Parallèlement, les diagnostics de néoplasie lo- bulaire in situ et de carcinome intracanalaire ont été plus nombreux, ces derniers atteignant la fréquence de 20 %. Tous ces faits concourent à affiner les indications thérapeutiques et donc à les multiplier pour les adapter à chaque patiente. Dans ces conditions, comment ne pas concevoir que les modalités relationnelles entre patho- logistes et chirurgiens aient aussi évolué ? Les échanges sont devenus d’une part plus précis et plus techniques, d’autre part moins concentrés sur le diagnostic d’urgen- ce que représente l’examen extemporané. Le diag- nostic préopératoire par microbiopsies/macrobiopsies percutanées et la chirurgie conservatrice ont été pour beaucoup dans cette évolution. En apportant plus de fiabilité et plus de précision que le diagnostic cytologique, le diagnostic histologique sur biopsies percutanées a conduit l’examen extemporané à ne plus être, sauf exception, le premier temps diag- nostique. Que de tensions dès lors épargnées aux chi- rurgiens et aux pathologistes pour causes de temps d’attente et d’incertitudes diagnostiques ou thérapeuti- ques mal maîtrisés de part et d’autre du bloc opératoire ! Il reste que la prise en charge macroscopique per- opératoire de la pièce de résection par le pathologiste peut garder ses adeptes et que le diagnostic lésionnel s’est porté en extemporané sur la recherche histologi- que de macrométastases (2 mm) dans les ganglions sentinelles. Le développement de la chirurgie conservatrice a fait évoluer le besoin des chirurgiens en matière d’informa- tions histologiques. Ils devaient en effet disposer de données fiables et précises conditionnant l’indication de reprise ou non du lit opératoire. Cela concerne en parti- culier la détermination de l’intégrité des marges d’exé- rèses et de la multifocalité lésionnelle, toutes deux très exigeantes en terme de méthodologie d’examen anatomo- pathologique et donc de charge de travail aussi bien technique qu’analytique. Une telle attente difficile à sa- tisfaire peut être source d’incompréhension. Pour garantir aux patients une égalité de chance sur l’ensemble du territoire national, le plan cancer a cher- ché à structurer le développement des réunions de concertations pluridisciplinaires (RCP) et à promou- voir l’utilisation de comptes rendus-fiches standardisés (CRFS). Ces deux actions ont un impact sur la relation pathologistes-chirurgiens. Les RCP, aussi bien préopératoire autour du diag- nostic obtenu sur microbiopsies/macrobiopsies percuta- nées que postopératoire autour du diagnostic obtenu sur pièce chirurgicale, structurent cette relation et am- plifient les exigences réciproques. Elles aboutissent à la formalisation des échanges par la mise en place de fi- ches d’interfaces entre d’une part le radiologue et le pathologiste autour du geste de biopsie transcutanée, d’autre part le chirurgien et le pathologiste autour de la pièce opératoire. Une telle formalisation, une fois ac- ceptée et mise en pratique au quotidien, ne peut être

Le pathologiste et son chirurgien… ou vice-versa. Tourments et sérénités dans la communication

  • Upload
    jp

  • View
    218

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Le pathologiste et son chirurgien… ou vice-versa. Tourments et sérénités dans la communication

1S66

A n n P a t h o l 2 0 0 7 ; 2 7 : 1 S 6 4 - 1 S 6 8

© 2 0 0 7 . E l s e v i e r M a s s o n S A S . T o u s d r o i t s r é s e r v é s .

désespérément binaire, a besoin, à cette étape d’uneréponse sans ambiguïté : cancer ou non, cancer infil-trant ou non, composante intra canalaire ou non. Etcomme les choses ne sont pas toujours aussi simples, ilfaudra savoir utiliser encore parfois l’examen extempo-rané, qui seul permettra d’éviter des interventions ité-ratives ou le retour à la chirurgie diagnostique. Pendantl’intervention, le dialogue entre radiologue, chirurgienet pathologiste doit être le plus complet et le plus pré-cis possible. L’ensemble des données cliniques et radio-logiques doit être mis à la disposition du pathologiste etil doit s’en servir ; en cas de chirurgie des lésions infra-cliniques, un cliché de pièce doit lui être transmis.L’orientation de la pièce doit faire l’objet d’un proto-cole clairement établi, non pas tant pour orienter unerecoupe mais pour guider l’analyse des marges d’exérè-se : elles ne peuvent être les mêmes en cas de lésioncentrale ou en cas de lésion proche de la peau ou du

plan profond. Après l’intervention, le compte-rendudoit préciser :

— la taille de la lésion, non seulement le plus grandaxe, mais donner, autant que faire se peut, une idée vo-lumétrique de la tumeur ;

— le rapport entre les composantes invasives et in-tracanalaires ;

— le caractère plurifocal vrai ou simplement lié àdes artefacts de coupe ;

— l’état des marges d’exérèse et leur variation enfonction de l’orientation géographique de la pièce.

Qu’attendre du pathologiste ? Qu’il soit le garant dela qualité de l’acte chirurgical. La chirurgie conserva-trice du sein ne peut être justifiée que si les conditionsde qualité sont parfaites à chaque étape. Ceci est affai-re d’équipe où chacun progresse au contact de l’autre,ou le dialogue est clair et permanent. Une cordée demontagne ne progresse qu’au rythme du plus lent.

Le pathologiste et son chirurgien… ou vice-versa. Tourments et sérénités dans la communication

JACQUEMIER J

(1)

, BELLOCQ JP

(2)

(1) Département de Biopathologie, Institut Paoli-Calmettes, Marseille. (2) Département de Pathologie, Hôpital Hautepierre, Strasbourg.

En 2003, le dépistage du cancer du sein a été généra-lisé à l’ensemble du territoire national après la prise encompte de l’expérience des régions pilotes. Ce mouve-ment a modifié notre contact avec cette maladie. Progres-sivement les lésions tumorales invasives sont devenues deplus en plus petites et de moins en moins extensives aumoment du diagnostic, avec 35 % de tumeurs invasivesde moins de 10 mm, 42 % entre 11 et 20 mm et une ab-sence d’envahissement ganglionnaire dans 73 à 84 %des cas. Parallèlement, les diagnostics de néoplasie lo-bulaire in situ et de carcinome intracanalaire ont étéplus nombreux, ces derniers atteignant la fréquence de20 %. Tous ces faits concourent à affiner les indicationsthérapeutiques et donc à les multiplier pour les adapterà chaque patiente. Dans ces conditions, comment ne pasconcevoir que les modalités relationnelles entre patho-logistes et chirurgiens aient aussi évolué ? Les échangessont devenus d’une part plus précis et plus techniques,d’autre part moins concentrés sur le diagnostic d’urgen-ce que représente l’examen extemporané. Le diag-nostic préopératoire par microbiopsies/macrobiopsiespercutanées et la chirurgie conservatrice ont été pourbeaucoup dans cette évolution.

En apportant plus de fiabilité et plus de précision quele diagnostic cytologique, le diagnostic histologique surbiopsies percutanées a conduit l’examen extemporanéà ne plus être, sauf exception, le premier temps diag-nostique. Que de tensions dès lors épargnées aux chi-rurgiens et aux pathologistes pour causes de tempsd’attente et d’incertitudes diagnostiques ou thérapeuti-ques mal maîtrisés de part et d’autre du bloc opératoire !Il reste que la prise en charge macroscopique per-opératoire de la pièce de résection par le pathologiste

peut garder ses adeptes et que le diagnostic lésionnels’est porté en extemporané sur la recherche histologi-que de macrométastases (

2 mm) dans les ganglionssentinelles.

Le développement de la chirurgie conservatrice a faitévoluer le besoin des chirurgiens en matière d’informa-tions histologiques. Ils devaient en effet disposer dedonnées fiables et précises conditionnant l’indication dereprise ou non du lit opératoire. Cela concerne en parti-culier la détermination de l’intégrité des marges d’exé-rèses et de la multifocalité lésionnelle, toutes deux trèsexigeantes en terme de méthodologie d’examen anatomo-pathologique et donc de charge de travail aussi bientechnique qu’analytique. Une telle attente difficile à sa-tisfaire peut être source d’incompréhension.

Pour garantir aux patients une égalité de chance surl’ensemble du territoire national, le plan cancer a cher-ché à structurer le développement des réunions deconcertations pluridisciplinaires (RCP) et à promou-voir l’utilisation de comptes rendus-fiches standardisés(CRFS). Ces deux actions ont un impact sur la relationpathologistes-chirurgiens.

Les RCP, aussi bien préopératoire autour du diag-nostic obtenu sur microbiopsies/macrobiopsies percuta-nées que postopératoire autour du diagnostic obtenusur pièce chirurgicale, structurent cette relation et am-plifient les exigences réciproques. Elles aboutissent à laformalisation des échanges par la mise en place de fi-ches d’interfaces entre d’une part le radiologue et lepathologiste autour du geste de biopsie transcutanée,d’autre part le chirurgien et le pathologiste autour de lapièce opératoire. Une telle formalisation, une fois ac-ceptée et mise en pratique au quotidien, ne peut être

Page 2: Le pathologiste et son chirurgien… ou vice-versa. Tourments et sérénités dans la communication

1S67

© 2 0 0 7 . E l s e v i e r M a s s o n S A S . T o u s d r o i t s r é s e r v é s .

A n n P a t h o l 2 0 0 7 ; 2 7 : 1 S 6 4 - 1 S 6 8

que source de qualité relationnelle, aussi bien sur lefond que sur la forme.

Dans le développement de ce relationnel, le CRFSoffre un double avantage : celui de la standardisa-tion, assurance de reproductibilité des données etdonc de qualité, et celui du remplacement des comp-tes rendus traditionnels, a priori source de simplifi-cation. Avec le temps, le CRFS est progressivementdevenu un besoin pour les cliniciens se heurtant lors

des RCP à un manque d’harmonisation des comptesrendus ACP.

C’est dans ce contexte qu’une enquête a été réaliséepar l’AFAQAP au cours de 3

e

trimestre 2007 afin demesurer les difficultés rencontrées au quotidien par lespathologistes français dans leurs relations avec les chi-rurgiens et cerner les étapes à franchir pour obtenir desrelations pluridisiplinaires les plus favorables à la bon-ne prise en charge des patientes.

Détermination sur lame du statut d’HER2 : bilan en France

PENAULT-LLORCA F

Service de Pathologie, Centre Jean Perrin, Clermont-Ferrand.

Les résultats cliniques des thérapeutiques ciblantHER2, comme l’Herceptin

®

, ont rendu la détermina-tion du statut HER2 d’un carcinome mammaire indis-pensable au moment du diagnostic. Le taux moyen dedétection du statut HER2 au diagnostic dans des payscomme la France, l’Espagne et l’Allemagne, très sensi-bilisés au sujet et possédant un système de santé rem-boursant la prescription de l’Herceptin en adjuvant, estproche de 95 %. Seraient exclues des tests dans cer-tains centres et cabinets, les patientes très âgées, lescarcinomes lobulaires classiques et les petites tumeurs(carcinomes microinvasifs, tumeurs inférieures à 0,5 cmvoire à 1 cm). La technique utilisée en routine pour dé-tecter les patientes à traiter est l’immunohistochimie(IHC), les cas positifs étant les cas 3+ (selon la grilleHerceptest

®

). Des résultats ambigus, ou 2+, doivent im-pérativement être vérifiés par une autre technique commela FISH (

fluorescent in situ hybridization

), considéréecomme la technique de référence, ou d’autres techniquesd’hybridation in situ non fluorescente (CISH, SISH,

dual color

CISH).Des progrès restent encore à réaliser dans l’approche

de la qualité des tests, mais aussi dans leur évaluationet leur prise en charge financière. Il est clair que cha-que pathologiste impliqué doit s’inscrire dans une dé-marche d’assurance qualité interne et externe aveccalibration de sa technique IHC à l’aide de contrôlesqualités externes et internes permanents. Or, actuelle-ment, en France, la participation à un test de contrôlequalité national n’est pas obligatoire.

Le GEFPICS (groupe d’étude sur les facteurs pro-nostiques en immunohistochimie dans les cancers dusein) a très tôt travaillé à des études de calibration del’IHC avec la FISH [1], puis à une étude de reproducti-bilité interobservateurs des immunomarquages ambi-gus (2+), enfin à la production de tissus microarrays decontrôle. Néanmoins des taux de discordances inter-observateurs persistent, de l’ordre de 20 %, dans les cas2+ [2]. On peut penser que si de tels taux sont présentsparmi des centres ultra-spécialisés en pathologie mam-maire, produisant un volume moyen de 500 tests paran, des variations au moins aussi importantes se ver-raient parmi les structures ayant souvent un volume an-

nuel de tests plus faibles mais évaluant plus de 70 %des tumeurs mammaires en France.

À titre d’exemple en 2005, 78 structures de pathologie(publiques et privées) ont participé au test AFAQAPsur HER2. L’AFAQAP avait fait le choix de réaliserce test sur coupes de tumeurs mammaires, ce qui rendla préparation et la correction du test plus longue etdifficile qu’un test sur lignées cellulaires mais quipermet de se rapprocher des conditions de la « vraievie ». En outre, il avait été demandé aux participantsd’envoyer des lames « maison », à savoir émanant deleur structure, et représentatives de niveaux d’expres-sion 2+ et 3+. Ce test a montré une concordance de80-92 % pour le score 0, et de 80-82 % pour le niveau 3+.Par contre, une discordance plus forte était observéepour les niveaux 1+ et 2+. La fréquence des cas malclassés avec impact sur le traitement des patientes, étaitde moins de 2 % pour les faux positifs et de près de10 % pour les faux négatifs. Les résultats du test 2006seront donnés lors de Carrefour 2007 et comparés àceux de 2005.

En parallèle, l’étude FISH 2002 [3] a été conçue pourfaire bénéficier au plus grand nombre de structuresd’une validation de l’IHC par la FISH. L’objectif étaitde corréler les résultats de la technique IHC, réaliséepar des laboratoires régionaux publics et privés appeléscentres périphériques, à ceux de la technique FISHréalisée par des laboratoires régionaux de référenceappelés centres relais (qui étaient aussi centres péri-phériques pour leur propre recrutement local). La dé-termination du statut HER2 par IHC a été effectuéedans un premier temps sur la tumeur primitive depatientes présentant un cancer du sein métastatique,selon les habitudes techniques de chaque centre péri-phérique recruteur. Dans un deuxième temps, le centrerelais a refait l’IHC à partir du bloc transmis par lecentre périphérique et a déterminé en parallèle le sta-tut HER2 par la technique FISH. Sur les 1 500 cas pla-nifiés, 1 340 ont été recueillis dans 18 centres relais àpartir de 73 centres périphériques. Les scores IHC dou-teux (2+) ont été exclus de l’analyse de concordance(n = 174). La surexpression de HER2 (3+) était de23,6 % dans les centres relais et de 19,3 % dans lescentres périphériques. Une amplification par FISH a