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Mardi 7 juillet 2015 - 71 e année - N o 21918 - 2,20 € - France métropolitaine - www.lemonde.fr Fondateur : Hubert Beuve-Méry - Directeur : Jérôme Fenoglio Algérie 180 DA, Allemagne 2,50 €, Andorre 2,40 €, Autriche 2,80 €, Belgique 2,20 €, Cameroun 1 900 F CFA, Canada 4,50 $, Côte d'Ivoire 1 900 F CFA, Danemark 30 KRD, Espagne 2,50 €, Finlande 4 €, Gabon 1 900 F CFA, Grande-Bretagne 1,90 £, Grèce 2,50 €, Guadeloupe-Martinique 2,40 €, Guyane 2,80 €, Hongrie 950 HUF, Irlande 2,50 €, Italie 2,50 €, Liban 6 500 LBP, Luxembourg 2,20 €, Malte 2,50 €, Maroc 13 DH, Pays-Bas 2,50 €, Portugal cont. 2,50 €, La Réunion 2,40 €, Sénégal 1 900 F CFA, Slovénie 2,50 €, Saint-Martin 2,80 €, Suisse 3,50 CHF, TOM Avion 450 XPF, Tunisie 2,50 DT, Turquie 9 TL, Afrique CFA autres 1 900 F CFA « Je suis prêt à t’aider, mais aide- moi à t’aider », a expliqué, di- manche soir, François Hollande à Alexis Tsipras. Le premier minis- tre grec a appelé le chef de l’Etat peu après l’annonce des résultats du référendum. M. Hollande a expliqué au chef du gouverne- ment grec la gravité de la situa- tion. Une majorité d’Etats euro- péens veut expulser la Grèce de la zone euro et, même si la France ne le souhaite pas, elle ne pourra pas longtemps s’y oppo- ser si Athènes n’envoie pas à l’Eu- rope des gages de bonne volonté politique et budgétaire. Pour l’Elysée, le risque d’une sortie de la Grèce de la zone euro est « réel ». Paris « veut tout faire pour l’éviter », mais François Hol- lande privilégie un accord avec Angela Merkel. « Il faut une ana- lyse convergente des deux pays, rien ne serait pire dans le moment actuel que d’apparaître désunis entre Français et Allemands ». LIRE PAGE 8 Hollande veut aider Tsipras sans se brouiller avec Merkel POLITIQUE athènes - correspondance A la fête dimanche 5 juillet au soir, Yanis Varoufakis quitte pourtant le navire dès lundi matin. C’est d’un tweet laconique « Minister no more ! » (Je ne suis plus ministre) que le ministre grec des finances a annoncé sa démission. « Peu de temps après l’annonce des résul- tats du référendum, on m’a informé d’une certaine préférence de plusieurs membres de l’Eurogroupe et de “partenaires” associés (…) pour que je ne sois plus aux réunions ; une idée que le premier ministre [Alexis Tsipras] a jugée potentiellement utile à l’obtention d’un accord. Pour cette raison, je quitte le minis- tère des finances aujourd’hui », écrit M. Va- roufakis dans un court article publié sur son blog personnel, lundi 6 juillet au matin. Le message est clair : les créanciers auraient demandé et obtenu sa tête. Et voilà Varoufakis qui se pose en héros et victime de la machine européenne. Selon le polito- logue Elias Nikolakopoulos, les choses sont cependant un petit peu plus compliquées. « Tsipras et Varoufakis ont négocié pour trouver ce compromis et permettre au se- cond de faire cette déclaration qui sauve son honneur, mais, au fond, Tsipras était furieux de ce que le ministre des finances a fait hier soir », dit M. Nikolakopoulos. Au mépris de l’usage politique grec, M. Varoufakis a pris la parole avant le premier ministre. « Il a parlé sur un ton donneur de leçons et triomphaliste, alors que M. Tsipras attendait patiemment son tour pour lancer un mes- sage mesuré et d’appel à l’union nationale. Ça ne se fait pas ! », ajoute l’analyste. adéa guillot LIRE LA SUITE PAGE 7 Varoufakis contraint à la démission Alexis Tsipras a sacrifié son exubérant ministre des finances Rassemblement des partisans du non, à Athènes, place Syntagma, le soir du 5 juillet. AURENCE GEAI/SIPA POUR « LE MONDE » ALLEMAGNE LES GRECS ONT « COUPÉ LES PONTS » AVEC L’EUROPE, SELON SIGMAR GABRIEL LIRE PAGE 3 GRÈCE : LA QUESTION DE CONFIANCE LIRE PAGE 28 À ATHÈNES « ON A DÉCIDÉ DE MOURIR COMME ON L’ENTEND » LIRE PAGE 5 ÉCONOMIE LE SORT DES BANQUES GRECQUES DÉPEND DE LA BCE LIRE PAGES 6 ET 7 Merkel et Hollande veulent tirer ensemble les premières conséquences du référendum, lundi, à l’Elysée. Le « Grexit » est jugé plus probable que jamais bruxelles - bureau européen Q ue vont faire les Européens de l’éclatant non – à 61,3 % – sorti des urnes grecques, à l’issue du référendum qui s’est tenu dimanche 5 juillet ? Vont-ils, comme l’espère le pre- mier ministre grec, Alexis Tsipras, accep- ter de reprendre la négociation engagée début 2015 et concéder une aide finan- cière sans toutes les réformes d’austérité qu’ils exigeaient jusqu’à présent ? Accep- ter une restructuration de l’énorme dette grecque ? Ou vont-ils fermer la porte et laisser la Grèce, dont l’économie s’as- phyxie à grande vitesse, faire défaut auprès de la Banque centrale européenne, le 20 juillet, et, bon gré mal gré, choisir le « Grexit », sortir de la zone euro ? Un scé- nario inimaginable, que les traités euro- péens n’ont d’ailleurs pas envisagé… Lundi matin, les tenants de la reprise du dialogue, à Paris, à la Commission euro- péenne, étaient pessimistes. « Le prési- dent de la République va étudier quelles sont les voies possibles pour la reprise du dialogue avec Athènes et la recherche d’une solution. Mais, en Allemagne, les po- sitions politiques sont très fermées, y com- pris du côté des sociaux-démocrates. Cela risque d’être difficile », confiait une source à l’Elysée. cécile ducourtieux et jean-pierre stroobants LIRE LA SUITE PAGE 2 ANGELOS CHRISTOFILOPOULOS/AP AVIGNON UN « ROI LEAR » À L’AGONIE POUR OLIVIER PY PAGE 22 APRÈS LE NON GREC, L’EUROPE INFLEXIBLE VOTRE BIEN-ÊTRE COMMENCE ICI CANAPÉS, LITERIE, MOBILIER : 3 000 M 2 DENVIES ! André Renault, Bultex, Duvivier, Epéda, Mérinos, Sealy, Simmons, Swiss Confort, Swiss Line, Tempur, Tréca.... PARIS 15 e -20% -25%-30%... LITERIE www.topper.fr 7J/7 • M° BOUCICAUT • P. GRATUIT Canapés : 63 rue de la Convention, 01 45 77 80 40 Literie : 66 rue de la Convention, 01 40 59 02 10 Armoires lits : 60 rue de la Convention, 01 45 71 59 49 Mobilier design : 145 rue St-Charles, 01 45 75 06 61 Meubles Gautier : 147 rue St-Charles, 01 45 75 02 81 Du 24 juin au 4 août

Le+Monde+du+Mardi+7+Juillet+2015

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Le+Monde+du+Mardi+7+Juillet+2015

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  • Mardi 7 juillet 2015 71e anne No 21918 2,20 France mtropolitaine www.lemonde.fr Fondateur : Hubert BeuveMry Directeur : Jrme Fenoglio

    Algrie 180 DA, Allemagne 2,50 , Andorre 2,40 , Autriche 2,80 , Belgique 2,20 , Cameroun 1 900 F CFA, Canada 4,50 $, Cte d'Ivoire 1 900 F CFA, Danemark 30 KRD, Espagne 2,50 , Finlande 4 , Gabon 1 900 F CFA, Grande-Bretagne 1,90 , Grce 2,50 , Guadeloupe-Martinique 2,40 , Guyane 2,80 , Hongrie 950 HUF, Irlande 2,50 , Italie 2,50 , Liban 6 500 LBP, Luxembourg 2,20 , Malte 2,50 , Maroc 13 DH, Pays-Bas 2,50 , Portugal cont. 2,50 , La Runion 2,40 , Sngal 1 900 F CFA, Slovnie 2,50 , Saint-Martin 2,80 , Suisse 3,50 CHF, TOM Avion 450 XPF, Tunisie 2,50 DT, Turquie 9 TL, Afrique CFA autres 1 900 F CFA

    Je suis prt taider, mais aide-moi taider , a expliqu, dimanche soir, Franois Hollande Alexis Tsipras. Le premier ministre grec a appel le chef de lEtat peu aprs lannonce des rsultats du rfrendum. M. Hollande a expliqu au chef du gouvernement grec la gravit de la situation. Une majorit dEtats europens veut expulser la Grce de la zone euro et, mme si la France ne le souhaite pas, elle ne pourra pas longtemps sy opposer si Athnes nenvoie pas lEurope des gages de bonne volont politique et budgtaire. Pour lElyse, le risque dune sortie de la Grce de la zone euro est rel . Paris veut tout faire pour lviter , mais Franois Hollande privilgie un accord avec Angela Merkel. Il faut une ana-lyse convergente des deux pays, rien ne serait pire dans le momentactuel que dapparatre dsunis entre Franais et Allemands .

    L IRE PAGE 8

    Hollande veut aider Tsipras sans se brouiller avec Merkel

    POLITIQUEathnes - correspondance

    A la fte dimanche 5 juillet au soir,Yanis Varoufakis quitte pourtant lenavire ds lundi matin. Cest duntweet laconique Minister no more ! (Je nesuis plus ministre) que le ministre grec des finances a annonc sa dmission.

    Peu de temps aprs lannonce des rsul-tats du rfrendum, on ma inform dunecertaine prfrence de plusieurs membres de lEurogroupe et de partenaires associs () pour que je ne sois plus aux runions ; uneide que le premier ministre [Alexis Tsipras] ajuge potentiellement utile lobtention dun accord. Pour cette raison, je quitte le minis-tre des finances aujourdhui , crit M. Varoufakis dans un court article publi sur sonblog personnel, lundi 6 juillet au matin.

    Le message est clair : les cranciersauraient demand et obtenu sa tte. Et voilVaroufakis qui se pose en hros et victimede la machine europenne. Selon le politologue Elias Nikolakopoulos, les choses sont cependant un petit peu plus compliques.

    Tsipras et Varoufakis ont ngoci pourtrouver ce compromis et permettre au se-cond de faire cette dclaration qui sauve son honneur, mais, au fond, Tsipras tait furieux de ce que le ministre des finances a fait hier soir , dit M. Nikolakopoulos. Au mpris de lusage politique grec, M. Varoufakis a pris laparole avant le premier ministre.

    Il a parl sur un ton donneur de leons ettriomphaliste, alors que M. Tsipras attendait patiemment son tour pour lancer un mes-sage mesur et dappel lunion nationale.a ne se fait pas ! , ajoute lanalyste.

    ada guillot

    LIRE L A SUITE PAGE 7

    Varoufakis contraint la dmission Alexis Tsipras a sacrifi son exubrant ministre des finances

    Rassemblement des partisans du non, Athnes, place Syntagma, le soir du 5 juillet. AURENCE GEAI/SIPA POUR LE MONDE

    ALLEMAGNELES GRECS ONT COUP LES PONTS AVEC LEUROPE, SELON SIGMAR GABRIEL LIRE PAGE 3

    GRCE : LA QUESTIONDE CONFIANCE L IRE PAGE 28

    ATHNES ON A DCID DE MOURIR COMME ON LENTEND LIRE PAGE 5

    CONOMIELE SORT DES BANQUESGRECQUES DPENDDE LA BCE LIRE PAGES 6 ET 7

    Merkel et Hollande veulent tirer ensemble les premires consquences du rfrendum, lundi, lElyse. Le Grexit est jug plus probable que jamais

    bruxelles - bureau europen

    Q ue vont faire les Europens delclatant non 61,3 % sortides urnes grecques, lissue du

    rfrendum qui sest tenu dimanche 5 juillet ? Vontils, comme lespre le pre

    mier ministre grec, Alexis Tsipras, accepter de reprendre la ngociation engage dbut 2015 et concder une aide financire sans toutes les rformes daustrit quils exigeaient jusqu prsent ? Accepter une restructuration de lnorme dette grecque ? Ou vontils fermer la porte et

    laisser la Grce, dont lconomie sasphyxie grande vitesse, faire dfaut auprs de la Banque centrale europenne,le 20 juillet, et, bon gr mal gr, choisir le Grexit , sortir de la zone euro ? Un scnario inimaginable, que les traits europens nont dailleurs pas envisag

    Lundi matin, les tenants de la reprise du dialogue, Paris, la Commission europenne, taient pessimistes. Le prsi-dent de la Rpublique va tudier quelles sont les voies possibles pour la reprise du dialogue avec Athnes et la recherche dune solution. Mais, en Allemagne, les po-

    sitions politiques sont trs fermes, y com-pris du ct des sociaux-dmocrates. Cela risque dtre difficile , confiait une source lElyse.

    ccile ducourtieux

    et jean-pierre stroobants

    LIRE L A SUITE PAGE 2

    ANGELOS CHRISTOFILOPOULOS/AP

    AVIGNON

    UN ROI LEAR LAGONIE

    POUR OLIVIER PY PAGE 22

    APRS LE NON GREC, LEUROPE INFLEXIBLE

    V O T R E B I E N - T R E C O M M E N C E I C I

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    Armoires lits : 60 rue de la Convention, 01 45 71 59 49Mobilier design : 145 rue St-Charles, 01 45 75 06 61

    Meubles Gautier : 147 rue St-Charles, 01 45 75 02 81

    Du24juinau4aot

  • 2 | europe MARDI 7 JUILLET 20150123L A C R I S E G R E C Q U E

    LEUROPE ESTCONFRONTE

    UN DILEMME : JUSQUO PEUT-ELLE

    IGNORERUN VERDICT POPULAIRE ?

    LEurope dfie par le non massif des GrecsFranois Hollande et Angela Merkel devaientse runir lundi 6 juillet au soir pour esquisser la rponse europenne au rejet par les Grecs du plan rformes contre argent frais de lUE et du FMI

    suite de la premire page

    Ce choix de relancer le dialogue ou pas, va devoir tre fait dans les heures et les jours quiviennent. Cest une nouvelle folle squencepolitique qui sengage, lundi 6 juillet, avec une rencontre dcisive entre Franois Hol-lande et Angela Merkel dans la soire Paris,et, ds mardi 7 juillet, une runion avec les 19ministres de la zone euro, puis un sommet de la zone euro dans la foule. Ce choix, en tout cas, engage la fois lavenir de la Grce etcelui de la zone euro, qui va vivre un mo-ment de vrit historique et potentiellementdramatique.

    Qui va lemporter, entre ceux qui vont con-sidrer que le non massif des Grecs davan-tage daustrit, dans un pays dj laminpar la crise et les coupes budgtaires, est enralit un non leuro ? Qui vont estimer quele gouvernement populiste grec na pas dit lavrit ses concitoyens : savoir que pour appartenir leurozone, pour en recevoir delaide, ils devaient accepter un nouvel ajuste-ment conomique ?

    Ou est-ce les autres, Paris et Rome peut-tre, qui, eux, vont plaider pour la prserva-tion de lintgrit de la zone euro, qui vont vouloir viter une dcision aux consquen-ces gopolitiques potentiellement graves. Et qui vont dfendre un changement des rglesdu vivre ensemble dans leurozone, pour un petit pays de 10 millions dhabitants, alors que dautres, lEspagne, le Portugal, lIrlande, Chypre, sy sont plis, quand, dans les m-mes circonstances, ils avaient urgemmentbesoin de largent europen pour viter la banqueroute ?

    Les pays ny croient plus beaucoup , glisseune source europenne proche des ngocia-tions. Au mieux, on va proposer Tsipras derecommencer discuter sur la base de laccordrformes contre argent frais qui tait sur la ta-ble quand il a annonc son rfrendum. Lur-gence, maintenant, cest la mise en place dune aide humanitaire pour la Grce , expli-que au Monde, lundi, une source europennebien informe. Cest au gouvernement grec de faire des propositions , a rpt lundi ma-tin le ministre des finances Michel Sapin, quia prcis que lEurope va montrer quelle est forte dabord en se protgeant elle-mme .

    La rponse cette question aider la Grcecote que cote, ou sen sparer fera de toute faon des dgts politiques considra-bles. Car Alexis Tsipras est dot dun mandat populaire indniable, qui, a priori, na pas

    pour but de couper les ponts avec ses parte-naires de leurozone. Il la nouveau martel,dimanche soir : le rsultat du rfrendum nemarque pas du tout une rupture avec lEu-rope , mais au contraire un renforcement du pouvoir de ngociation des Grecs, a raf-firm le jeune leader de la gauche radicale.

    Yanis Varoufakis avait mme affirm lachane amricaine CNBC en fin de semaine dernire quune fois le non acquis, la rengo-ciation pourrait tre boucle en vingt-qua-tre heures Et sa dmission surprise, annon-ce lundi matin, est considre comme un signal des bonnes dispositions dAthnes, le trs mdiatique ministre des finances grecayant russi liguer lensemble des 18 autresgrands argentiers de la zone euro contre lui.

    LEurope est galement confronte unautre dilemme. Jusquo peut-elle ignorer un verdict populaire. Elle a dj malheureu-sement prouv quelle ne savait pas rpon-dre de manire adquate aux prcdents scrutins, contribuant au dsamour dsor-mais alarmant des citoyens vis--vis du pro-jet europen.

    TRAUMATISME

    Il y a dix ans, elle avait dj feint dignorer le verdict dautres consultations. Les Franais puis les Nerlandais avaient rejet le projet deConstitution europenne. La question taitmal pose : les Franais avaient dit non plus de libralisation et une perte de souverai-net au profit des institutions de Bruxelles ; les Nerlandais avaient traduit un malaise existentiel d deux assassinats politiques, la nostalgie du florin et au sentiment dune perte didentit. Pourtant, le texte a finale-ment t adopt, Nicolas Sarkozy ayant ngo-ci le trait de Lisbonne qui reprenait les-sentiel des points de la Constitution sans de-mander leur avis aux citoyens.

    Ce rendez-vous politique rat de mai 2005,dnonc tort ou raison comme un dni dedmocratie, reste un traumatisme en France et ailleurs en Europe. Le fait de ne pas avoir tenu suffisamment compte du verdict des lecteurs a durablement abm le lien entre les citoyens et lEurope. Depuis, de scrutin en scrutin, le dsamour envers les institutions europennes et le refus de rgles communes, pourtant prsumes assurer un avenir meilleur, nont cess de grandir. Une rponse trop violente de lEurope au non des Grecs, sera un argument de choix pour les partis dextrme droite hostile leuro.

    LEurope ne fait plus rver. Elle est vuecomme un monstre technocratique, incapa-ble de trouver une rponse coordonne au chmage, la monte des ingalits ou lim-migration. Timide et divise lorsquil sagit dese confronter aux grands enjeux dun monde peru comme de plus en plus menaant. Grande avec les petits sujets, petite avec les grands , comme le disent ses dtracteurs.

    Un peu partout, en France mais aussi enFinlande, au Danemark, aux Pays-Bas, enAutriche ou en Grce, des forces populistes souvent unies seulement par leur dtesta-tion de lEurope ont glan de nombreusesvoix. Et elles ont profit des crises conomi-que et morale que connat lUnion pour d-noncer en bloc son fonctionnement. En mai 2014, les eurosceptiques et europhobes sont entrs en force, au Parlement europen.Marine Le Pen a mme russi crer son groupe politique, le premier du genre danslassemble de Strasbourg.

    Entre 2010 et 2014, les plans de sauvetagede pays en quasi-faillite se sont succd en Ir-lande, en Espagne, au Portugal et Chypre,sans que, aucun moment, les populationsne soient consultes. Le premier ministre grec Georges Papandrou a failli sy risquer, en 2011, mais les chefs dEtat de la zone euro notamment le prsident franais Nicolas Sarkozy, et la chancelire allemande Angela Merkel lui ont tordu le bras pour viter ce scrutin.

    et les autres Europens, M. Hollande etMme Merkel se sont beaucoup consults. Ils campaient jusqu prsent sur la mme li-gne : fermet lgard dAthnes, mais vo-lont daider le pays. Que vont-ils finalementdcider ? Daccorder un gouvernement cequils lui ont refus pendant cinq mois, cest--dire une rengociation de la dette grecque (322 milliards deuros environ), quitte en ra-battre sur les rformes structurelles exigesjusqu fin juin, avant la rupture des ngocia-tions ? Et au risque de dstabiliser les gouver-nements espagnols, portugais, etc. qui, eux,ont jou le jeu ?

    Hollande ne pourra en tout cas pas prendreseul la dfense de Tsipras. Je suis prt taider, mais aide-moi taider , a expliqudimanche soir Franois Hollande Alexis Tsipras. En laissant de ct ses promesses mi-rifiques aux Grecs, et en prsentant, en ur-gence, une requte mme dtre valide parses 18 partenaires de leurozone, cest--dire avec une demande de prts, pour viter la banqueroute, mais aussi, une liste de rfor-mes structurelles crdible. Verdict pour laGrce, et lUnion tout entire dans les jours qui viennent. p

    ccile ducourtieux

    et jean-pierre stroobants

    Mais la lgitimit dmocratique des votesgrecs se heurtent celle des autres pays euro-pens. La Slovaquie et les pays baltes conti-nuent dadopter une attitude peu conciliantesur les plans daides un pays qui reste plus riche queux. La grande nouveaut de cesdernires annes, ce nest pas la division entre les peuples et Bruxelles, mais la division entreles peuples , souligne Yves Bertoncini, direc-teur de linstitut Jacques-Delors.

    ASPHYXIE

    Le 30 juin, la Grce a fait dfaut vis--vis du Fonds montaire international, le pro-gramme daides qui lui tait destin sest achev le mme jour faute daccord entreAthnes et ses cranciers, un contrle des ca-pitaux, qui asphyxie son conomie, a t ins-taur le 28 juin. Si rien nest fait, elle fera d-faut vis--vis de la BCE le 20 juillet, qui elle doit 3,5 milliards deuros. Linstitution de Francfort sera alors contrainte de faire cesserle financement durgence quelle pourvoitencore aux banques grecques. Lintroductiondune monnaie parallle, prlude une sortiedu pays de la zone euro, sera invitable pourviter un effondrement conomique et fi-nancier total.

    Depuis le dbut du bras de fer entre Tsipras

    LES CHIFFRES

    61,31 %de non

    La question pose, dimanche 5 juillet, lors du rfrendum or-ganis par les autorits grec-ques, portait sur lacceptation ou non des rformes exiges par les cranciers dAthnes : Faut-il accepter le plan daccord soumis par la Commission europenne, la Banque centrale europenne et le Fonds montaire internatio-nal lors de lEurogroupe du 25 juin ? Mais pour une partie des dirigeants europens, ce rfrendum posait aussi la question de lappartenance de la Grce la zone euro.

    62,50 %de votants

    Cest le taux de participation des lecteurs grecs au rfrendum, dimanche 5 juillet.

  • 0123MARDI 7 JUILLET 2015 europe | 3

    En haut : des partisans du non ragissent aux premiers rsultats du rfrendum, place Syntagma, dimanche 5 juillet, Athnes. PETROS KARADJIAS/AP

    En bas : un employ de banque parle avec des retraits qui veulentretirer les 120 euros autoriss par semaine, lundi 6 juillet. EMILIO MORENATTI/AP

    LAllemagne, furieuse, ne veut rien cderAngela Merkel, attendue lElyse lundi soir, ne sest toujours pas exprime aprs le vote grec

    berlin - correspondant

    Entre la Grce et lAllema-gne, le divorce est pro-nonc. Alors qu Ath-nes le gouvernement af-

    firme tre dsormais en position de force pour ngocier avec les Europens, les Allemands pen-sent exactement linverse. Pour nombre dentre eux, il ny a plus rien ngocier, si ce nest la sortiede la Grce de la zone euro. Certes,il faut tre prudent. La chancelireAngela Merkel ne devrait sexpri-mer sur le sujet que lundi 6 juillet en fin de journe, lors de sa ren-contre avec Franois Hollande lElyse. Il est peu probable quecelle-ci fasse le dplacement Pa-ris pour se prononcer en faveur dun Grexit , sachant que leprsident franais y est hostile.

    Nanmoins, il fait peu de dou-tes quAngela Merkel va se mon-trer trs dure lgard des Grecs dans les jours et semaines venir.Les dclarations du vice-chance-lier allemand, Sigmar Gabriel, mi-nistre de lconomie et prsidentdu parti social-dmocrate, le prouvent. Selon lui, le premierministre grec, Alexis Tsipras, a coup les derniers ponts aveclEurope. Aprs le refus des rglesdu jeu de la zone euro, tel quil sex-prime par le vote non, des ngocia-tions sur des programmes daide chiffrs en milliards paraissent dif-

    ficilement imaginables , juge mme M. Gabriel dans un entre-tien au quotidien Tagesspiegel.

    En raison du silence de leur chef,la plupart des dirigeants de lUnion chrtienne-dmocrate (CDU) sont rests muets diman-che soir. Julia Klckner, une pro-che dAngela Merkel, juge que M. Tsipras ne devrait pas croire quil peut mettre lEurope sous pres-sion avec le rsultat du rfren-dum. Encore plus svre, Andreas Scheuer, secrtaire gnral de lUnion chrtienne-sociale en Ba-vire (CSU), estime que les ma-tres chanteurs de gauche et ceux qui mentent leur peuple comme Tsipras ne peuvent pas parvenir leurs fins avec leur sale tour .

    Peu dimpact

    Alors que les prts de lAllemagne la Grce se montent dj plus de 88 milliards deuros, les dputs vont tre plus que jamais rticents faire de nouvelles concessions. Tout nouveau programme daide devrait dsormais passer par le Mcanisme europen de stabilit(MES), et celui-ci ne peut accorder de prts un pays que sil y a un risque systmique . Or, je ne vois pas ce risque , avait indiqu le1er juillet Gunther Krichbaum (CDU), prsident de la Commis-sion des affaires europennes au Bundestag, jusquici connu pour sa modration.

    Mme si la Bundesbank sin-quite, selon le quotidien Handelsblatt, des consquencesdun Grexit sur son propre bi-lan, les Allemands sont dautant moins prts faire des conces-sions quils sont convaincus quune sortie de ce pays de lazone euro aurait assez peu dim-pact sur lAllemagne.

    Dans un sondage publi ven-dredi 3 juillet par la chane ARD,24 % seulement des Allemands sinquitent des consquencessur lconomie allemande dune faillite de lEtat grec. Ils sont peine plus nombreux, 31 %, sin-quiter des consquences quaurait une telle faillite sur lacohsion de lUnion europenne. Pour eux, il est clair que ce sont les Grecs qui seraient les premi-res victimes dune telle situation.

    Mme les milieux conomiquesmisent dsormais sur une sortiede la Grce de la zone euro. Un Grexit est et reste la pire option pour la Grce, mais il devient tou-jours plus vraisemblable , r-sume linfluent prsident de lins-titut conomique dAllemagne (DIW), Marcel Fratzscher. Il ne doit pas y avoir de compromis pa-resseux, la Grce ne peut pas rester tout prix dans lUnion , jugeUlrich Grillo, prsident de la fd-ration des industries (BDI), le Me-def allemand. Tout se passecomme si, avec la victoire du non,

    le Grexit , qui tait dj, pour beaucoup, une ncessit cono-mique, tait dsormais devenu aussi une ncessit politique.

    Selon le Spiegel, Angela Merkelaurait confi aux dirigeants de la CDU, avant le rfrendum, quAlexis Tsipras mne son pays droit dans le mur en toute connais-sance de cause . Pour la chance-lire, ce non constitue un chec sans prcdent.

    Le vote des Grecs est galementun non une certaine ide alle-mande de lEurope. Celle-ci revt une double caractristique. Pour Angela Merkel, lUnion doit trecomptitive. Sinon, elle dispara-tra. LEurope, cest 7 % de la popu-lation mondiale, 25 % de la ri-chesse mondiale et 50 % des d-penses sociales mondiales , a-t-elle longtemps expliqu. Une quation qui nest viable que si lEurope prserve ses parts demarch en dfinissant des objec-tifs de bonne gestion des deniers publics.

    Certes, Angela Merkel ne veutpas dune Europe allemande. Enrevanche, elle nimagine pas une Europe qui ne suive pas les recet-tes qui ont permis son paysdtre actuellement au mieux de sa forme : des rformes sociales etune stricte orthodoxie budg-taire. En lisant un gouverne-ment runissant lextrme gau-che et lextrme droite, les Grecs avaient une premire fois dit non Mme Merkel, qui ne jure que par le centre. En votant non ce diman-che, ils ont nouveau tourn ledos au compromis et aux rfor-mes prconises par lAllemagne.

    Que lon considre, comme lagauche europenne, quAngela Merkel incarne la rigueur ou quon la voie, comme les conser-vateurs, comme une centriste tou-jours la recherche du compro-mis, la chancelire est donc une des grandes perdantes de ce di-manche soir. Elle va avoir dautantplus de mal les convaincre quelle na pas forcment la bote outils ncessaire. Depuis cinq ans,des centaines de milliards deuros ont t prts par les Europens etle Fonds montaire international la Grce, les comptes publics ont t redresss, et, malgr cela, le pays subit une crise conomique et sociale sans prcdent. Un para-doxe quAngela Merkel na jamais lucid. p

    frdric lematre

    Trois scnarios possibles au lendemain du rfrendumReprise des ngociations, divorce lamiable ou sortie dsordonne de leuro : tout est encore envisageable

    bruxelles - bureau europen

    L e premier ministre grec,Alexis Tsipras, a russi sonpari : dire non aux condi-tions trop svres de laccord r-formes contre argent frais ngo-cies depuis des mois avec les cranciers du pays, la Banque cen-trale europenne (BCE), la Com-mission europenne et le Fondsmontaire international (FMI).

    Sa victoire sera-t-elle totale ? Un Grexit , une sortie du pays de lazone euro, peut-il tre vit ?Point sur les scnarios possibles aprs le oxi massif du peuple grec.

    Premire hypothse : la

    ngociation dun nouvel accord

    Cette voie parat complique, mais pas impossible. Le chef de la diplomatie italienne, Paolo Genti-loni, a assur que les Europens devaient recommencer cher-cher un accord pour sortir du labyrinthe grec . Paris est sur la mme ligne et pourrait disposer du soutien de Donald Tusk, le pr-sident du Conseil europen.

    Sur quelle base discuter ? M. Tsi-pras, fin juin, tait prt accepter la liste des rformes ngocies (augmentation de la TVA, rformedu systme des retraites), mais exigeait aussi un allgement desconditions de remboursement delnorme dette publique (322 mil-liards deuros). La question de ladette sera donc au centre des nou-velles ngociations. Un efface-ment pur et simple de la valeur dela crance tant inacceptable vis--vis des pays anciennement sou-mis un plan daide (Espagne, Portugal, Irlande), il reste loption dallonger la maturit de la dette,aujourdhui de seize ans en moyenne, ou de baisser des tauxdintrt (2,36 % en moyenne).

    Deuxime hypothse :

    le dpart lamiable, le Grexit

    Le 29 juin, Jean-Claude Juncker, le prsident de la Commission euro-penne, avait prvenu les Grecs : Il faut voter oui () parce que les citoyens grecs responsables en Eu-rope, honorables, et juste titre,

    fiers deux-mmes et de leur pays, doivent dire oui lEurope. Pour Berlin, Madrid, Bratislava ou Lis-bonne, le non est la preuve quAthnes naccepte pas les r-gles du jeu europen. Athnes r-clame laide financire de sescranciers sans accepter les rfor-mes exiges en contrepartie.

    Les dirigeants europens pour-raient alors, collectivement, assu-mer une sortie de la Grce de la zone euro. Athnes se rangerait leur avis, estimant que le pays sensortirait mieux en quittant lamonnaie unique, mais en restant dans lUnion europenne (UE) et en conservant le soutien techni-que et politique de celle-ci. Hans-Werner Sinn, le patron de linsti-tut allemand Ifo, dfend une telle option depuis des mois.

    En thorie, lconomie grecquepourrait, en cas de rintroductionde la drachme, profiter dune monnaie dvalue. La comptiti-vit de ses entreprises serait re-gonfle, les touristes, dont le pou-voir dachat serait dop, afflue-raient, tandis que la banque cen-trale de Grce injecterait desdrachmes dans le systme mon-taire afin dviter sa faillite.

    Pendant cette phase de transi-tion, le contrle des capitaux se-rait maintenu tandis que la BCEcontinuerait de soutenir les ban-ques hellnes. LUE apporteraitlaide technique ncessaire pour limpression des pices et billets et la conversion en euros des con-trats financiers, obligations pri-ves et publiques existantes.

    Certains, au Parti populaireeuropen (PPE, conservateurs), rflchissent mme la mise en place dune aide humanitairedurgence en Grce pendant cette priode de transition difficile.

    Troisime hypothse : la sortie

    dsordonne, le Grexident

    De retour la table des ngocia-tions, les dirigeants europens pourraient camper sur leurs posi-tions : pas question de faire un chque en blanc Alexis Tsipras. Le montant de laide, estime par le FMI 50 milliards deuros sur

    trois ans, ferait bondir en Allema-gne o lopinion publique rechi-gne prter encore Athnes,donnant lieu des dbats inter-minables. Une nouvelle liste de rformes serait sur la table, aumoins aussi radicales que celles ngocies avant la convocation du rfrendum et la question de ladette ne serait pas tranche.

    En attendant, le scnario du Grexident , une sortie de la Grce de la zone euro par accident,pourrait simposer. La BCE atten-

    dra le 20 juillet, date laquelleAthnes doit lui rembourser 3,5 milliards deuros, avant dagir. Aprs cette date, face lincapacitde la Grce dhonorer sa dette,linstitut montaire serait amen rduire, puis suspendre ses li-quidits durgence aux banques.

    Cette dcision prcipiterait lafaillite des tablissements hell-nes. Accul, lEtat grec serait tenu de les nationaliser pour endiguer la panique des pargnants. Ruin, incapable de verser les retraites et

    les salaires des fonctionnaires, lEtat naurait dautre choix quedimprimer des reconnaissancesde dette, peu peu acceptescomme une monnaie parallle.

    Une monnaie dconsidre quiaurait tt fait de seffondrer face leuro. Le prix des produits impor-ts flamberait, le pouvoir dachat des Grecs seffondrerait et cest toute lconomie du pays qui plongerait dans labme. p

    ccile ducourtieux

    et marie charrel ( paris)

    Mme les milieux

    conomiques

    misent dsormais

    sur une sortie

    de la Grce

    de la zone euro

    PAR LAUTEUR DES MDUSES, LA NOUVELLE PPITEDU CINMA ISRALIEN, POTIQUE ET BURLESQUE !

    UN F ILM DE SHIRA GEFFEN

    SELFMADE

    LE 8 JUILLETDISTRIBUTION

  • 4 | europe MARDI 7 JUILLET 20150123

    L A C R I S E G R E C Q U E

    Laudace rcompense dAlexis TsiprasLa large victoire du non conforte le premier ministre grec, qui promet de reprendre les ngociations

    athnes - correspondance

    Cest une victoire audel de tous leurs es-poirs. Dimanche5 juillet, le non la

    emport lors du rfrendum grec,avec 61,3 % des suffrages expri-ms contre 38,7 pour le oui. Un cart norme. Loin, trs loin desestimations qui, tout au long de lasemaine, donnaient le non et le oui au coude--coude. Alexis Tsi-pras et son gouvernement ont donc gagn haut la main le pari risqu quils avaient lanc en ap-pelant le 26 juin un rfrendum.

    Sur le balcon dun htel de luxede la place Syntagma, au curdAthnes, le ministre dlgu la rforme de la fonction publique, Georges Katrougalos, polyglottechevronn, multipliait, dimanchesoir, les interviews aux tlvi-sions du monde entier quiavaient pos l leurs camras. Nous tions srs que nous allionsgagner, mais plus de 60 %, cest un rsultat magnifique et qui montre la dtermination de notre peuple dire non laustrit et oui lEu-rope, mais une Europe sociale et solidaire , se flicite le ministre.

    Quand le premier ministre,Alexis Tsipras, sexprime, il est trs sr de lui mais vite tout triomphalisme. Etant donn les circonstances difficiles lheure actuelle, vous avez fait un choix trs courageux, annonce-t-il auxGrecs. Jai tout fait conscienceque le mandat que vous mavez confi nest pas celui dune rupture avec lEurope, mais un mandat pour renforcer notre position auxngociations afin de rechercherune solution viable.

    Alexis Tsipras promet donc dereprendre au plus vite les ngocia-tions. Ds dimanche soir, il sest entretenu avec Franois Hollande et Angela Merkel. Il apporte ds lundi matin un gage pour les Europens, en sacrifiant son mi-nistre des finances, Yanis Varoufa-

    kis, qui avait annonc un peu plustt quil serait en mesure de pr-senter un nouveau plan en moinsde vingt-quatre heures aux cran-ciers. Il tait devenu un point decrispation pour les autres minis-tres des finances de la zone euro. M. Tsipras entend cette fois-ci po-ser la question de la dette grecque sur la table des ngociations . Une ncessit que reconnat dailleurs le dernier rapport du Fonds montaire international dil y a deux jours , affirme-t-il.

    Sur quoi se basera ce nouveauplan grec ? Sur les propositions contenues dans la lettre, signe dela main de M. Tsipras, envoye mardi 30 juin la Commission europenne ? Ce peut tre un bon dpart de ngociation, r-pond Georges Katrougalos, mais la condition expresse que nous ob-tenions une rengociations de la dette. Dans une ultime tenta-tive, Alexis Tsipras avait indiququil tait prt accepter de largespans du programme de la Com-mission, mais lAllemagne avait dclin loffre, prfrant attendre les rsultats du rfrendum.

    Lheure est la clbration

    La vice-ministre des finances, Na-dia Valavani, a quant a elle affirmsur une chane de tlvision di-manche soir quaprs un tel r-sultat, on ne retournera pas l o nous en tions rests la semaine dernire, surtout maintenant que le FMI a confirm que la dette pu-blique grecque ntait pas viable .

    Les propositions que le gouver-nement grec dfendra lors dun Eurogroupe, mardi 7 juillet Bruxelles, et durant le sommet de la zone euro qui suivra seront-el-les acceptes par laile gauche de Syriza ? Nous nous attendons ce quelles soient assez proches de ce que Tsipras proposait depuis quelques semaines, ce qui nous alarme. Nous les avions dj criti-ques fortement les prcdentes se-maines car nous trouvions que Tsi-

    pras allait trop loin dans le compro-mis. Nous attendons de voir , ex-plique un membre de ce courant.

    Depuis dbut juin en effet, denombreuses voix staient levesau sein de la turbulente majorit parlementaire du gouvernement pour contester la stratgie de n-gociation dAlexis Tsipras. Cest cequi lavait conduit organiser le rfrendum. Pour le ministre Georges Katrougalos, ces probl-mes de division ou de discipline au sein du parti ne se renouvelle-ront pas. A condition que nous nerevenions pas les mains vides etque nous obtenions une rengocia-tion de la dette trs court terme.

    Lanalyste politique Georges Se-fertzis est, lui, moins optimiste. Je crains que, renforc par ce nonpopulaire, laile gauche du parti nefasse pression sur Tsipras pour re-fuser des compromis auxquels iltait jusquici prt , explique-t-il. Vainqueur en janvier avec 36 %

    des suffrages, il largit considra-blement sa base en remportant cerfrendum avec plus de 60 % dessuffrages. Il peut opposer cette l-gitimit aux rsistances internes.

    Le premier ministre nen nestpas encore l. Avant de le prsen-ter au Parlement, encore faut-il ar-racher cet accord. Il sest engag lobtenir dans les prochaines qua-rante-huit heures et, pour tenir cette promesse, un coup de pouce est ncessaire. Alexis Tsipras a donc dcid de convoquer ds

    lundi matin une runion des chefs des partis politiques grecs. Afin de les consulter et de re-cueillir leurs propres propositionssur la conduite tenir Bruxelles.

    Dans la rue, le cur est joyeux etlheure la clbration, mais raressont les manifestants ne pas voquer les difficults du jourdaprs. Les banques vont-ellesrouvrir ? ; LEurope va-t-elle ac-cepter de discuter avec nous ? ; Tsipras va-t-il vraiment tre en-tendu pour reprendre la ngocia-tion ? Des questions qui revien-nent systmatiquement entre deux sourires et la convictionque, de toute faon, dire oui taitpire car ctait accepter, de nous-mmes, de nous appauvrir encore plus , comme le dit Zaroula, 29 ans, jeune chmeuse.

    Sur la question de la rouver-ture des banques, le ministre du redressement productif, Panayio-tis Lafazanis, chef de file de laile

    Alexis Tsipras sadresse la presse dans le bureau de vote du quartier de Kypsli, Athnes, o il vote, dimanche 5 juillet.LAURENCE GEAI/SIPA

    POUR LE MONDE

    Etant donn

    les circonstances

    difficiles lheure

    actuelle, vous

    avez fait un choix

    trs courageux

    ALEXIS TSIPRAS

    gauche de Syriza, avouait quellesne pourraient rouvrir que si la Banque centrale europenne ac-ceptait ds lundi de relever le plafond des liquidits durgence [ELA] injectes dans le secteur bancaire grec . La BCE devait seprononcer lundi.

    Le gouvernement reste prudentet a conscience de lampleur de la tche qui lattend Bruxelles, mais aussi pour redonner de la cohsion au pays, alors que les d-bats lectoraux ont vu ressurgirdes clivages qui rappelaient ceux de la guerre civile. Nous sommescertes arrivs en tte, mais prs de39 % des Grecs ont vot pour le oui,explique-t-on dans lentouragedAlexis Tsipras. Il est donc nces-saire aujourdhui de ressouder lanation, et consulter les partis en-voie le message vers ceux qui nont pas vot pour nous que nous les entendons aussi. p

    ada guillot

    ce fut la surprise de la soire. La ce-rise sur le gteau , dclarera mme, unrien moqueuse mais rellement heureuse, une source gouvernementale. A lannonce de la dfaite du oui, Antonis Samaras, lan-cien premier ministre (juin 2012-jan-vier 2015) et prsident du parti conserva-teur de la Nouvelle Dmocratie (ND), a sou-dainement annonc sa dmission.

    Un aveu dchec cinglant pour cethomme qui a recherch le pouvoir pen-dant des dcennies et lavait finalementobtenu au plus fort de la crise, en juin 2012,en formant un gouvernement de coalition avec les socialistes du Pasok.

    Dj au lendemain de la victoire de Sy-riza aux lections lgislatives du 25 janvier,M. Samaras avait t trs contest en in-terne. Plusieurs dauphins officieux avaient alors tent douvrir un processus de succession. Mais les rangs staient viteresserrs et la contestation fut touffe au nom dun objectif sacr : rester unis en-core quelques mois au cas o Syriza

    chouerait gouverner le pays et que denouvelles lections seraient convoques. Nous ne pouvions pas afficher nos divi-sions et entrer dans un processus de recon-figuration du parti, qui prend du temps, alors que nous pressentions que Tsipras ne rsisterait pas longtemps, reconnat undput du parti. Mais nous avions tousconscience que lre Samaras tait termi-ne. Trop discrdite aux yeux des Grecs,qui sanctionnent, scrutin aprs scrutin, lancienne classe politique principale-ment ND et le Pasok , accuse davoir men le pays limpasse. Le dputEvangelos Memarakis, 62 ans, a t dsi-gn comme prsident intrimaire de Nouvelle Dmocratie.

    Plusieurs candidats sur les rangs

    Mme sils ne se sont pas encore officielle-ment dclars il faudra attendre la convo-cation dun congrs du parti , plusieurs candidats sont dj sur les rangs depuis des mois. Sans surprise, au centre droit, on

    retrouve la dpute et ancienne mairedAthnes Dora Bakoyiannis, 61 ans. Mais aussi son jeune frre, Kiriakos Mitsotakis, 47 ans, et qui fut entre 2013 et 2014 le mi-nistre charg de la rforme administrative. Nikos Dendias, qui fut tour tour, entre 2012 et 2014, ministre de la protection ducitoyen, de la croissance et de la dfense, a aussi plac ses pions au sein du parti ces derniers mois.

    Enfin, une partie de la base du parti restetrs fidle lancien premier ministre Costas Caramanlis (2004-2009), notam-ment en raison de son nom. Cest le neveu de Constantin Caramanlis, le trs respect premier ministre qui a ramen en douceurla Grce vers la dmocratie la chute de la dictature des colonels, en 1974. Il est nette-ment plus centriste que M. Samaras, maisil est aussi lhomme en grande partie res-ponsable davoir dissimul ltat rel des fi-nances publiques grecques aux Europens avant 2009. p

    a. gu. (athnes, correspondance)

    Antonis Samaras, victime collatrale du rfrendum

  • 0123MARDI 7 JUILLET 2015 europe | 5

    On a dcid de mourir comme on lentend Les partisans du non, qui ont ft les rsultats au pied du Parlement, mettent en avant leur fiert retrouve

    REPORTAGEathnes - envoye spciale

    Ils attendaient cette date, certains avec fbrilit, dautresavec ferveur, tous avec impatience. Neuf jours aprs la

    dcision surprise du premier mi-nistre Alexis Tsipras de soumettre une consultation populaire leplan de rformes propos par lescranciers du pays, les bureaux devote, installs dans les coles pri-maires du pays, ont ouvert leurs portes dimanche 5 juillet ds 7 heures du matin.

    Devant le bureau de Kypsli, unquartier du nord de la capitale grecque, cest leffervescence. Vers 10 h 30, Alexis Tsipras est venu d-poser son bulletin dans lurne sous les applaudissements et les cris de la foule. Oxi, oxi, oxi [non] ! , scandaient les quelques Grecs prsents, noys parmi lafoule de journalistes internatio-

    naux venus couvrir lvnement. Les lecteurs appels se rendre dans la salle 661, la mme que le premier ministre, ont t aveu-gls par les flashs des photogra-phes. Personne ne peut ignorer ladtermination dun peuple pren-dre son destin entre ses mains , a raffirm M. Tsipras la sortie delisoloir.

    A la mi-journe, les rues dAth-nes la bouillonnante semblaientbien silencieuses. Install sur une terrasse proche, un groupe de re-traits sirotent doucement leurs cafs. Quelques tables plus loin, Christa, 43 ans, est avec des amis.Elle ne veut pas dire quelle case elle a coche. Elle avait vot Syriza lors des lections gnrales de jan-vier. On est pay 3 euros de lheure. Si lon travaille quatre heu-res par jour, a nous fait 12 euros.On fait quoi, avec cette somme ? On ne sort pas, on ne va pas au res-taurant On ne vit pas. On nest

    femme, tous deux gs dunesoixantaine dannes. Le premier arbore firement un autocollant orange sigl dun oxi sur la poi-trine, la seconde, un badge ros barr dun nai [oui]. Personne nest autoris exprimer verbale-ment son opinion dans la salle de vote, mais les observateurs ont le droit dafficher silencieusement leur prfrence.

    Dimitris, lui, est tenu au silence.Mais il montre un vieux poster scotch aux murs de ltablisse-ment qui fait rfrence au 28 octo-bre 1940. Ce jour-l, considr comme historique en Grce, lautocrate Ioannis Metaxas avait rpondu dun non ferme lulti-matum du rgime fasciste de Benito Mussolini, qui exigeait de laisser la libre circulation aux trou-pes italiennes sur le territoire grec et de cder des points stratgiques.Ce non-l avait suscit le rallie-ment de toutes les catgories de la

    socit et reste jusqu ce jour un motif de fiert. Cest un peu notretat desprit aujourdhui , glisse-t-il dans un sourire.

    Dans lattente dun verdict incer-tain, les partisans du parti de gau-che radicale au pouvoir Syriza ont dcid de se runir ds 19 heures place Klafthmonos, la place des gens qui pleurent . Ce sont fina-lement des larmes de joie qui cou-lent sur les joues, lorsque, aux en-virons de 21 h 30, les estimations tires du dpouillement de la moi-ti des bulletins crditent le non deprs de 60 % des voix.

    Cest la fiert retrouve qui rem-plit les yeux de Panos. Ce vieilhomme de 78 ans ne peut pas contenir son motion. Notre es-prit de rsistance renat enfin , l-che-t-il, la voix entrecoupe de sanglots. Il a choisi de clbrer ce moment historique au pied de la Vouli, le Parlement grec, placeSyntagma, comme quelques cen-

    taines de milliers de personnes, ges ou jeunes, parents ou en-fants. La foule rassemble toutes les gnrations, comme ctait dj le cas deux jours plus tt, lorsdu dernier rassemblement en fa-veur du non.

    Les Adonaki sont venus en fa-mille : Vassiliki, 67 ans, ses deux filles, Evagelia, 44 ans, Tatiana, 41 ans, et ses deux petits-fils, Vas-silis, 14 ans, et Yanis, 7 ans. Onveut un meilleur avenir pour nosenfants , explique Tatiana. Au son du bouzouki, le luth grec, etsur des airs rvolutionnaires, la place semplit peu peu. Si on avait dit oui, ils nous tuaient. En choisissant le non, on se suicide. On a dcid de mourir comme on lentend , scande le mgaphone. Lheure est la fte, mme si de nombreux Grecs sont conscients que tout se jouera demain . Le jour daprs. p

    aude lasjaunias

    A gauche : rassemblement des partisansdu non, dimanche 5 juillet, place Syntagma, Athnes.A droite : Platon, conomiste, et Mary, professeure luniversit, partisans du oui, ont suivi, dpits, les rsultats la tlvision.LAURENCE GEAI/SIPA

    POUR LE MONDE ;

    MYRTO PAPADOPOULOS

    POUR LE MONDE

    La peur des lendemains qui dchantentA Athnes, les tenants du oui dnoncent la dmagogie et lintolrance des partisans de Syriza. Ils redoutent un chaos montaire et une sortie de lUnion europenne

    REPORTAGEathnes - envoye spciale

    I ls regardent la tlvision et seservent un verre. Ils car-quillent parfois les yeux pourmieux voir lcran un sondage,un graphique, ou la carte de Grcequi ne cesse de rosir, mais ils neragissent gure. Ou alors lgre-ment. Un sourire ironique, un trs lger soupir. Si lon ne savait quils avaient tous vot oui, etquils assistent en ce moment la dfaite cuisante de leur camp, on croirait de lindiffrence. Mais leur sang est bouillant. Et le cur cogne dans les poitrines. Tout lheure, Mary, lhtesse de la soi-re, professeure luniversit comme lensemble de ce petitgroupe damis, et depuis toujours gauche, laissera mme appara-tre quelques larmes en se disanttente par lmigration. Ils ne pen-saient pas gagner. Mais tout de mme ! 61 % de non ce mauditrfrendum, cest comme un coup de massue. a assomme.

    Platon, conomiste, se veut phi-losophe. Au fond, 39 % dentre nous acceptaient le mauvais ac-cord propos par lEurope. Et 61 % ont vot pour un meilleur accord. Vu de cette faon, tout le monde a gagn, non ? Non, il leur semble au contraire que toute la Grce a perdu. Et ils sont mduss. Je ne comprends pas, soupire Yorgos. Comment Tsipras a-t-il russi ca-pitaliser les voix ?

    Avec des banques fermes !Cest a qui est incroyable !

    Propagande, populisme, natio-nalisme et discours sentimental.Cest simple !

    Navait-il pas contre lui la quasi-totalit des mdias privs qui mi-litaient pour le oui ? Justement ! Le public na aucune confiance dans ces mdias doligarques. Ilsont desservi le oui, incapables dumoindre dbat de fond. Et les lea-ders europens qui se sont adres-ss aux Grecs pour leur dire quoi voter ? Ils ont fait lunanimitcontre eux. Une catastrophe !

    On y perd ses amis

    Impossible pour eux tous de se dpartir de limpression que ce vote massif est une gigantesque tromperie. Et ils avouent leur peurdevant un Syriza au plus hautdans les urnes, intolrant, intimi-dant, et terriblement diviseur. Avec nos collgues Syriza de luni-versit, il ny a pas de place pour lesnuances, affirme Costas. Tu es avec moi ou tu es mon ennemi. Tu es grec ou tu es collabo. Comme lpoque de la guerre civile. Et lon yperd ses amis. Quiconque, luniversit, affiche la moindredistance lgard du gouverne-ment ou montre pour lEuropeune trop grande sympathie sex-pose brimades et ennuis. Cest pourquoi ils prfrent quon ne publie pas leur nom de famille. Vous avez cout la radio du parti ? Elle sappelle En rouge et on se croirait la grande poque dun pays sovitique. Derrire Sy-riza, perce lidologie nationaliste dune gauche trs rtrograde.

    Mary est bouleverse. Cen estfini de la Grce dans lEurope. Ils vont nous foutre dehors, et ils auront raison. Ils tourneront sans nous, dlests, et nous dgringole-rons. Car cette semaine, elle nen doute pas, les vrais ennuis com-mencent : saisie sur les comptes en banque, non-paiement des sa-laires, pnurie de monnaie, de pro-duits dpicerie et de mdica-ments Mon pre, qui a fait des conomies toute sa vie, ma dit cettechose sidrante : Heureusementque ta mre nest plus en vie. Je naurais plus les moyens dassurer les cots de sa maladie. Et je crois que ma fille peut faire une croix sur son anne dtudes Erasmus.

    Pnlope, qui enseigne Chy-pre, a dj perdu toutes ses cono-mies dans la crise financire de2012-2013 et crois revivre le film. Ils mentent, au peuple et lEu-rope, depuis le dbut. Ils manquentde comptence et de vision, mais ils ont de larrogance. Ils ont jou sur le fait que dire non est toujoursplus naturel pour les Grecs. Notrehistoire est faite de non. Mais cette

    fois, on va vers le chaos. Un espoir ? Elle ose peine le

    dire mais ils lont tous en tte :que le peuple, gorg despoir ce di-manche soir, dchante et dgrise rapidement. Banques fermes, ngociations en panne Le voiletombera et Tsipras, accul, partira dans un norme fracas. Je luidonne trente jours ! Costas, lui,craint la violence. Elle est dj sous-jacente, dit-il, les positions se sont fortement radicalises. Quant Spiros, qui enseigne laphilosophie en Crte, il a les yeux rivs sur lextrme droite. Elle esttapie dans lombre, prte rcu-prer les grands dus de Syriza . Le gouvernement, lui, a le dos aumur et va tout droit vers lingra-ble. En suscitant une fusion des patriotismes de droite et de gau-che, il a jou avec le feu.

    Couvrant les voix de la tl, ungroupe de jeunes dextrme gau-che dfile sous les fentres avec des drapeaux rouges. Peuple, prends ta situation en main. Eu-rope et FMI, buvez votre sang ! Les universitaires changent des sourires amuss, fatalistes. Maisau tlphone, un banquier se veut rassurant. Un grand oui aurait peut-tre t pire en forant Tsipras la dmission, avant de nouvelles lections. Nous ne pouvions nous permettre le luxe dune telle va-cance. Car cest maintenant une question dheures. Il vient dannon-cer vouloir runir les Grecs et ngo-cier dans le cadre de leuro Allez ! Jai encore un peu despoir. p

    annick cojean

    Lextrme droite

    est tapie dans

    lombre, assure

    Spiros, prte

    rcuprer

    les grands dus

    de Syriza

    pas des esclaves, on est un peuple avec la tte haute.

    Yorgos, 53 ans, chauffeur de taxi,est all voter non, ds 7 h 05 : Lesgens ne parlent que du rfrendumdepuis une semaine. Il en est cer-tain : le camp du non va gagner. a ne sera pas un plbiscite, se risque-t-il avancer. Les gens ontpeur. A ses yeux, lEurope, cestcomme une famille dont la Grce serait loncle fauch : Il agace,mais au final, on devrait laider.

    Les gens ont peur

    Dans lcole primaire dAgios Pan-teleimonas, vers midi, la valse deslecteurs sintensifie. Cest lheure qui veut a : les retraits sortent de lglise, les familles com-mencent venir. On attend les jeu-nes en fin de journe , expliqueDimitris, le secrtaire prsent pour aider Nikolas, lavocat res-ponsable du bureau. A leurs cts se tiennent un homme et une

    LES RACTIONSColre et intransigeance dans le nord et lest de lEuropeSigmar Gabriel, le vice-chancelier social-dmocrate du gouverne-ment dAngela Merkel, a t lun des premiers ragir au rejet massif par les Grecs des conditions exiges par les cranciers. Le premier ministre grec, Alexis Tsipras, a coup les derniers ponts avec lEurope, a-t-il estim. Traditionnellement trs criti-que lgard dAthnes, le ministre slovaque des finances, Peter Kazimir, a abond en ce sens, jugeant quun Grexit une sor-tie de la Grce de la zone euro tait dsormais un scnario ra-liste . Les Slovaques ne perdront pas un euro cause des Grecs , a ajout Robert Fico, premier ministre slovaque, tandis que son homologue finlandais, Juha Sipila, jugeait que les Grecs [avaient]choisi un chemin incertain pour btir leur avenir . Le gouverne-ment grec, au lieu de dire la vrit son peuple (), a pouss vo-ter contre les rformes ncessaires , a regrett la prsidente litua-nienne, Dalia Grybauskaite. Cela naugure rien de bon pour lavenir de peuple grec , a tweet le premier ministre estonien, Taavi Roivas. Plus svre encore, Ewa Kopacz, premire ministre polonaise, pense que les Grecs ont dit non laide [europenne] donc ils ont dit non aussi la zone euro .

    Angoisse des pays dEurope du SudSi Pablo Iglesias, le chef du parti antilibral espagnol Podemos, alli du grec Syriza, a estim que la dmocratie la emport en Grce , le chef du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy, na pu masquer son effroi, convoquant une runion exceptionnelle de la commission dlgue aux affaires conomiques. Affol, le Parti socialiste (PS) portugais, dans lopposition, a appel uvrer en faveur dune solution rapide la crise grecque pour viter les consquences dun sisme grec pour le Portu-gal. Il y va de lintrt national , a prvenu Porfirio Silva, por-te-parole du PS. Les Europens doivent recommencer cher-cher un accord , pour sortir du labyrinthe grec , a de son ct ragi le ministre italien des affaires trangres, Paolo Gentiloni, dans un tweet dimanche soir.

    Confusion des dirigeants europensLe prsident de lEurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, a jug que le rsultat du rfrendum tait trs regrettable pour lavenir de la Grce . Pour la reprise de lconomie grecque, des mesures diffi-ciles et des rformes sont invitables , a-t-il affirm. Un Grexit peut tre vit, mais lEurope nacceptera pas de chan-tage , a ajout lAllemand Manfred Weber, prsident du Parti populaire europen (PPE, droite) au Parlement europen. Quelle que soit lissue du scrutin, nous ne laisserons pas tomber les gens en Grce , avait toutefois assur plus tt le social-dmo-crate Martin Schulz, prsident du Parlement europen, dans les colonnes du journal allemand Welt am Sonntag.

  • 6 | europe MARDI 7 JUILLET 20150123

    L A C R I S E G R E C Q U E

    Grexit : la BCE lheure des choixLinstitut de Francfort a le pouvoir de faire sortir la Grce de la zone euro, un rle quil rpugne endosser

    Cest lheure de vrit.Celle o larbitre doit,malgr lui, siffler, ounon, la fin de la par-

    tie. La Banque centrale euro-penne (BCE) tient aujourdhui le sort des banques hellnes entre ses mains. Et par extension, celui de la Grce. Dsormais, tous les yeux sont tourns vers elle , ana-lyse Diego Iscaro, conomiste chezIHS Global Insight.

    Lundi 6 juillet, les 25 membresdu conseil des gouverneurs devai-ent se runir pour faire le point surle dossier grec. Auparavant, le pr-sident de la BCE, Mario Draghi, se sera entretenu avec le prsident dela Commission, Jean-Claude Jun-ker, le prsident de lEurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, et lactuel prsident du Conseil europen, Donald Tusk. Avec sur la table, une question cl : alors que le peuple grec a rejet laustrit et que la perspective dun accord rapide en-tre Athnes et ses cranciers sloi-gne, faut-il maintenir les finance-ments durgence ELA ( Emer-gency liquidity assistance ) accor-ds aux banques du pays ?

    Crdibilit en pril

    Une question dterminante, car aujourdhui, ces tablissements survivent uniquement grce la perfusion de linstitut montaire. Selon nos informations, les ban-ques seront court de liquidits ds mardi 7 juillet, jour o elles sont censes rouvrir leurs portes au public. Inquite, la Banque de Grce a dailleurs demand lins-titut de Francfort, dimanche 5 juillet, daugmenter encore ses ELA, aujourdhui plafonnes 89 milliards deuros

    Lennui, cest quen thorie, laBCE rserve ses aides durgence aux banques solvables. Cela la place face un choix cornlien, d-

    crypte un fin connaisseur de lins-titution. Elle ne veut pas tre cellequi expulse la Grce hors de la zone euro, mais elle ne peut pas mettre sa crdibilit en pril en soutenant le pays outre mesure.

    Linstitution refuse de prendreune dcision qui doit incomber, selon elle, aux responsables politi-ques. Mais dans ses murs, la r-volte gronde. Le gouverneur de la

    banque centrale allemande, Jens Weidmann, juge que le soutien ap-port la Grce est la limite du mandat de linstitution, et sou-haite quil prenne fin.

    Malgr ces pressions, la BCEpourrait attendre le sommet de la zone euro de mardi 7 juillet avant de se dcider. Et peut-tre mme le20 juillet, date laquelle la Grce doit lui rembourser 3,5 milliards deuros. Si Athnes choue, la ban-que centrale ne pourrait gure maintenir ses aides longtemps en-core. Elle commencerait probable-ment par augmenter la dcote sur les collatraux cest--dire sur les titres quelle demande en garantie en change des ELA. Cela intensi-fierait la crise de liquidit ban-caire , jugent les analystes de RBS.

    La suspension des ELA, qui netarderait pas suivre, prcipiterait le pays en terres inconnues. A court dargent, il en serait rduit imprimer des reconnaissances de

    dette (les IOU en anglais, pour I Owe You ) afin de payer les fonctionnaires et retraits. Ces IOU finiraient par tre utiliss dans les commerces, et forme-raient de fait une monnaie paral-lle. Sans accord rapide, le pays pourrait glisser vers une sortie de la zone euro, le Grexit .

    Insuffisances institutionnelles

    Autant dire que dans ce dossier, laBCE se retrouve confronte deuxproblmes de fond. Le premier estque, du fait des insuffisances ins-titutionnelles de lunion mon-taire, elle se retrouve en premire ligne alors quelle devrait rester encoulisse.

    Second problme : la victoire dunon la contraint un choix dlicat.En juillet 2012, en plein cur de la crise des dettes souveraines, son prsident Mario Draghi avait d-clar quil tait prt tout ( whatever it takes , en anglais)

    pour sauver leuro. Mais sauver leuro implique-t-il dy garder la Grce tout prix ?

    Il y a dix jours encore, cela ne fai-sait aucun doute. Jusqu ce que Benot Cur, membre du direc-toire de la BCE, dclare dans Les Echos du 30 juin : La sortie de la Grce de la zone euro, qui tait un objet thorique, ne peut malheu-reusement plus tre exclue. Est-ce dire que linstitution envisage, elle aussi, un Grexit ?

    Difficile dire. Mais une choseest sre : elle se prpare au pire. Nous utiliserons nos instruments pour faire plus si ncessaire , a ainsi dclar M. Cur, dimanche 5 juillet, aux rencontres conomi-ques dAix-en-Provence. De fait, elle a dj largi son plan dassou-plissement quantitatif, le 2 juillet, aux achats dobligations de soci-ts publiques europennes comme la SNCF. Un outil de plus pour augmenter sa puissance de

    La rengociation de la dette, sujet tabou mais incontournableDepuis cinq mois, les cranciers rejettent la demande de la Grce de lier ltalement des remboursements avec la mise en uvre de rformes

    bruxelles - bureau europen

    L e sujet de la dette grecqueavait jusqu prsent tsoigneusement vit parles pays de la zone euro et par les principaux cranciers dAthnes lexception notable de la France. Aprs la victoire du nonau rfrendum du dimanche5 juillet, il va venir la table des discussions en cas de nouvelles ngociations.

    Une rengociation de cette detteest en effet une priorit du pre-mier ministre grec, Alexis Tsipras,et de son gouvernement. Surtout,elle fait sens alors que de plus enplus dconomistes, mais aussi le Fonds montaire international (FMI), jugent draisonnable de penser que la Grce parviendraun jour rembourser un montantcolossal de 322 milliards deuros soit 177 % du produit intrieurbrut (PIB) du pays tout en re-nouant avec la croissance.

    Durant les cinq interminablesmois de pourparlers avec Ath-nes, les cranciers du pays la

    Banque centrale europenne (BCE), la Commission de Bruxelleset le FMI ont refus de mener defront une discussion sur un nou-veau train de rformes mettre en uvre en Grce en change de nouvelles tranches daides et une ngociation sur lallgement desconditions de refinancement du pays. Ils voulaient dabord les r-formes. Et aprs la dette. Ils dou-taient de la volont dAthnes de rellement rformer son cono-mie, dquilibrer un systme de retraites pesant 16 % du PIB (inte-nable, selon eux), dinstituer un systme efficace de collecte de limpt, de lutter contre le client-lisme dans les administrations

    Les blocages taient aussi politi-ques. En Allemagne, lopinion pu-blique est globalement trs re-monte contre lide de donner un euro de plus la Grce, alorsquen 2012 plus de la moiti de lardoise a dj t efface (envi-ron 107 milliards deuros). A lpo-que, ce sont les bailleurs de fonds privs qui avaient accept une d-cote de 50 % et de 75 % de la valeur

    faciale de leurs crances. Aujourdhui, la dette grecque est essentiellement dtenue par descranciers publics : plus de 75 % par le FMI, la BCE, le Fonds europen de stabilit financire(FESF) et les autres pays membres de la zone euro.

    Dialogue de sourds

    En Espagne, en Irlande, au Portu-gal, les chefs dEtat et de gouver-nement assuraient ces derniers mois quaccepter une rengocia-tion de la dette grecque tait im-possible. Tous ont t sous pro-gramme daide financire pen-dant la crise, tous se sont vus im-poser de trs dures politiques daustrit ; aucun na bnficidune rengociation de sa dette.

    Lattitude de M. Tsipras et de sonimptueux ministre des finances,Yanis Varoufakis ce dernier a d-missionn, lundi 6 juillet, au len-demain du rfrendum , na pas aid arrondir les angles. Ds f-vrier, ils ont rclam un efface-ment de la valeur nominale de la dette, un tabou complet pour

    leurs cranciers pourtant prts rallonger les maturits de cet en-dettement et en abaisser encore un peu les taux. Mais dEurogrou-pes en inutiles sommets de la zone euro, les discussions ont virau dialogue de sourds.

    Seule la France et dans une cer-taine mesure la Commissioneuropenne militait pour quon laisse un espoir M. Tsipras, selon lexpression de plusieurs sources europennes Athnes.Et quon inscrive noir sur blanc,dans l accord global qutait cense signer la Grce avec sescranciers, fin juin, un engage-ment ouvrir une discussion sur la dette dans les mois qui vien-nent. Paris avait mme prpar un modle daccord, et le prsi-dent de la Commission, Jean-Claude Juncker, avait propos le mois doctobre 2015 pour com-mencer ngocier. Mais leurs tentatives se sont heurtes aunein de Berlin.

    Si le dialogue est renou, Ath-nes pourra, cette fois, utiliser lar-gument du FMI pour forcer la

    main de ses partenaires. Le FMI, qui la Grce doit encore 21,2 mil-liards deuros, a sem le trouble, le2 juillet, en publiant une note faisant la vrit sur les besoins financiers de la Grce dans les an-nes venir, et assurant que lepays avait besoin de 50 milliards deuros daides supplmentaires dici 2018 et dun allgement desa dette de grande ampleur .

    Cette position, le FMI la dfen-dait depuis des semaines dans le huis clos des ngociations, mais jusqu prsent navait selonplusieurs sources pas tap du poing sur la table pour exiger des Europens quils acceptent deparler de la dette.

    Un pays proche de la rcession

    Il avait continu, selon nos infor-mations, exiger des rformes structurelles exigeantes pour la Grce (retraites, taux de TVA). Se-lon lagence Reuters, des respon-sables europens ont fait pressionsur le FMI pour quil ne publie pascette note. Une source euro-penne a confirm au Monde,

    vendredi, que les cranciers euro-pens avaient fait savoir leur m-contentement Washington, esti-mant que cette note du FMI pour-rait perturber le vote grec.

    De plus en plus dconomistes etdobservateurs le disent : la donnea chang en Grce ces derniers mois. Dbut 2015, le FMI et lUnion europenne prvoyaientencore un taux de croissance du PIB de 2,5 %. A ce rythme, lnormedette paraissait soutenable .

    Mais lincertitude politique ac-tuelle a gel les investissements etla reprise conomique. Et les rem-boursements au FMI ont vid lescaisses de lEtat. Aujourdhui, lconomie grecque est en passede retomber en rcession. Il fautune restructuration de la detteaujourdhui, pour prvenir le be-soin, plus tard, dune restructura-tion plus importante encore. Cestautant dans lintrt des cran-ciers que dAthnes , relve lco-nomiste Ashoka Mody, du think tank bruxellois Bruegel, dans un billet post le 4 juillet. p

    ccile ducourtieux

    Devant la banque

    centralegrecque,

    Athnes,lundi 6 juillet.

    MYRTO PAPADOPOULOS

    POUR LE MONDE

    frappe. Et teindre une ventuelle contagion aux autres pays de la zone euro, en particulier lEspagneet le Portugal.

    Reste une question cl : com-bien un dfaut grec coterait-il ?Dans Target 2 , le systme assu-rant le rglement des oprations des banques centrales nationales de la zone euro, et par lequel tran-sitent aussi les paiements entrebanques commerciales, la banquecentrale grecque affiche un solde dbiteur de 110 milliards deuros. Quelle pourrait avoir du mal rembourser si la crise saggrave. Mais cela naurait pas de cons-quences dramatiques : les simula-tions montrent que la BCE a la ca-pacit dabsorber un dfaut grec , juge Christophe Boucher, cono-miste luniversit de Lorraine. Sacrdibilit, elle, serait en revanchedurement affecte. Tout ce quelle redoute p

    marie charrel

    Le FMI attend la raction des Europens

    Le Fonds montaire international (FMI) sest refus commenter le non massif des Grecs au rfrendum du dimanche 5 juillet. La si-tuation est trop mouvante et trop sensible , expliquait lundi matin une source proche de la direction. Le FMI avait fait savoir samedi quil laisserait les Europens, les premiers concerns par ce casse-tte politique, sexprimer dabord. Nous attendrons de voir ce qui se passe dans lUnion europenne avant de nous exprimer , commen-tait-on de mme source. Contrairement une partie des autres cranciers dAthnes, le Fonds est acquis un allgement de la dette grecque mais la condition cest tout le problme que les autorits engagent effectivement des rformes.

  • 0123MARDI 7 JUILLET 2015 europe | 7

    Yanis Varoufakissort de larneSous la pression de M. Tsipras,le ministre des finances, devenu la bte noire de Bruxelles, dmissionne

    suite de la premire page

    Pour autant, outre cela, Alexis Tsi-pras savait en effet quil ne pouvait pas retourner Bruxelles avec Va-roufakis, dtest par tous les parte-naires, poursuit M. Nikolakopoulos. Simplement, il lui tait difficile de sen dfaire, car lconomiste est trs populaire en Grce. Ce man-quement ltiquette a t la goutte deau qui a fait dborder le vase.

    Tt lundi matin, Alexis Tsipras aruni sa garde rapproche et sest notamment longuement entrenu avec le vice-prsident du gouver-nement, Yannis Dragassakis, lhomme qui a dessin la stratgie conomique de Syriza ces deux dernires annes. Les noms dEuclide Tsakalotos, lactuel chef de lquipe de ngociation Bruxelles, ou encore de Georges Stathakis, ministre de lconomie et de la croissance, ou mme de Dragassakis lui-mme, circulaient lundi matin comme successeurs potentiels de Yanis Varoufakis. Tous des hommes proches dAlexis Tsipras et dj associs au processus de ngociation depuis le dbut. Car il va falloir aller vite. Le premier ministre a promis aux Grecs de ramener un accord dans les quarante-huit heures. Un Euro-groupe, auquel la Grce devra en-voyer un ministre des finances, estprogramm pour le mardi 7 juillet.

    En cinq longs et laborieux moisde ngociations, Yanis Varoufakis naura jamais russi se glisserdans le moule bruxellois. Trop troit pour lui depuis le dbut ,ragissait lundi matin lune de sesconnaissances. Il a choqu, d-plu par sa franchise et son opini-tret dire que la voie du tout-aus-trit tait une impasse. Et pour-tant, il a raison ! Regardez ce qui sepasse aux Etats-Unis : ils ont re-trouv 10 points de PIB depuis la crise financire de 2008 et nous, enEurope, on stagne. Quelle suffi-sance et dogmatisme de la part desEuropens de ne pas avoir voulu utiliser Yanis.

    Pourquoi cet conomiste de 54ans, rput srieux, cosmopolite,sest-il mis dos tous ses pairs de lEurogroupe ? Ds ses dbuts dans le nouveau gouvernement de la gauche radicale grecque, fin

    janvier, le style nonchalant de Va-roufakis, crne ras, sac au dos etcol de chemise ouvert, dtone Bruxelles. Cest surtout son atti-tude qui exaspre. Juge arro-gante, dplace. Un donneur de leons insupportable , dnonce-t-on assez rapidement dans lescouloirs de la Commission euro-penne.

    Quand il est nomm, Varoufakisa une mission claire : plaider pourune rupture radicale avec la politi-que daustrit mene depuis cinq ans en Europe. Il a la con-fiance et mme ladmiration dAlexis Tsipras. Il na certes aucune exprience de gouverne-ment, mais une forte lgitimit il est le mieux lu des dputs Sy-riza, lors du scrutin lgislatif du 25 janvier. Et une forte reconnais-sance en temps que thoricien de la crise grecque.

    Depuis des annes, il dcrypte,de confrences en plateaux de t-lvision, les erreurs commises en Grce par la troka , lancien nom des cranciers. Conseiller,entre 2004 et 2006, de lex-pre-mier ministre socialiste Georges Papandrou, il critique ds le d-but la rponse europenne lacrise financire, qui a consist endetter la Grce au-del du rai-sonnable.

    Un fort ego

    Il enfonce le clou, en 2010, dans son livre Modeste Proposition pour rsoudre la crise de la zone euro. Une version de cet ouvrageractualise (dition Les Petits Ma-tins), avec des ajouts de lcono-miste James K. Galbraith, en 2014, propose de relancer linvestisse-ment en Europe par linterm-diaire de la Banque europenne dinvestissement, une ide qui a fait son chemin et est, en partie, reprise par lactuel prsident de la Commission europenne, Jean-Claude Juncker. Peu de ministres des finances sont aussi dous en conomie que lui , estime le Prix Nobel, Joseph Stiglitz. Personne na travaill comme Varoufakis pour rsoudre la crise en Europe , ajoute M. Galbraith.

    Devenu ministre, Yanis Varoufa-kis veut bousculer ces rgles. Sor-tir du strict cadre du respect dun

    programme de rformes qui, se-lon lui, a conduit la Grce la ruine. Et commencer trs vite unediscussion sur une restructura-tion de la dette du pays. Mon ho-mologue allemand Wolfgang Schuble na jamais accept de parler de ce sujet , confiait-il auMonde il y a quelques mois. Pourlui, les rgles ont un caractre di-vin. Il ne cesse de nous renvoyer au

    respect du programme au lieu de discuter du fonds du problme.

    Mais tre ministre des finances,cest faire de la politique. Et mani-festement, M. Varoufakis refusait de jouer le jeu. Que pouvais-jefaire dautre que faire la leon ? ,se dfendait dj lintress lpoque Il fallait bien que je mar-que mon dsaccord avec la faon dont lEurope a gr la crise. De-

    vrais-je jouer au lobotomis parce que lon ne veut pas mentendre ?

    Le fort ego de M. Varoufakisaura finalement jou contre lui. Beaucoup pensaient au parti que Tsipras laurait gard aumoins jusqu la conclusion dunaccord , affirmait lundi une source au parti de la gauche radi-cale Syriza. p

    ada guillot

    Les banques grecques au bord du gouffreUn dfaut dAthnes ferait fondre les fonds propres, constitus de crdits dimpts diffrs

    A ffaibli et court dargentdepuis que les capitauxfuient en masse le pays,le systme bancaire grec ne doit sasurvie qu lEurope et aux liqui-dits durgence dnommes ELA (Emergency Liquidity As-sistance) fournies depuis le moisde fvrier par la Banque centrale europenne (BCE) la Banque deGrce.

    De ce strict point de vue, il nepouvait y avoir pire scnario que le non au plan des cranciers, sorti des urnes dimanche 5 juillet.De fait, ce rsultat bascule le pays et la zone euro dans linconnu, tout en crdibilisant lhypothse dun Grexit une sortie de la Grce de leuro. Il va conduire lautorit montaire europenneet son conseil des gouverneurs is-sus des Etats membres de lunion montaire dont lAllemagne et laFrance se poser, ds lundi 6 juillet, la question du maintiende ces liquidits. Donc, en creux, celle de leur suppression moyenterme Il sagit dun enjeu vital pour la Grce, qui psera sur la suite des vnements et sur lesngociations sur le plan daides etles rformes.

    Si les banques parviennent rouvrir mardi 7 juillet comme prvu, aprs une semaine de fer-meture lie linstauration dun contrle des capitaux, malgr lapnurie et le risque de panique bancaire, leur avenir est sus-pendu la dcision de la BCE de proroger ou non cette perfusion.Ce sont en effet ces aides dur-gence qui maintiennent en vie un

    secteur bancaire doublement fra-gilis par la crise conomique et lafuite croissante des dpts depuis2010 (prs de 100 milliards deuros seraient partis vers ltranger, en particulier vers lAl-lemagne). Elles permettent aux banques de fonctionner au quoti-dien, avec des ratios de liquidits conformes aux rgles, et dappro-visionner le pays en euros.

    Comme le manque de capitaux,les crises de liquidits sont fatales aux tablissements bancaires. Le choc de 2007 et la chute de la ban-que amricaine Lehman Brothers, le 15 septembre 2008, lont mon-tr. En Grce, les ELA ont t misesen place en fvrier, aprs larrive au pouvoir de Syriza et la remise en cause du programme daides dont bnficiait le pays depuis 2012 et qui lautorisait se refinan-cer taux bas auprs de la BCE.

    Marges de manuvre tnues

    Lundi 6 juillet, une runion du conseil de cette dernire devait se tenir pour rflchir lavenir et examiner la demande expresse de relvement du plafond des ELAaccordes Athnes, et formule ds dimanche soir par la Banque de Grce, la banque centrale par qui transitent ces liquidits. Cest une demande complique ho-norer. Le scnario le plus probableest celui dun maintien des liqui-dits leur niveau actuel de 89 milliards deuros.

    Et demain ? Les marges demanuvre de la BCE, qui agit se-lon des rgles strictement tablies,sont tnues. Ainsi, en vertu des

    textes, ces prts durgence doiventrpondre trois conditions sinequa non : que les banques aides soient solvables, avec un niveau decapitaux propres acceptable ; que les actifs bancaires apports en ga-rantie soient de bonne qualit ; enfin, que les liquidits ne serventpas financer lEtat

    Or, avec le non du 5 juillet, le ris-que de dfaut de la Grce sur sa dette publique, ou une partie de sa dette, promise restructura-tion, se renforce. Comme les ban-ques grecques dtiennent une part importante de ces crances,pour un montant susceptible dentraner leur faillite dans un telscnario (30 milliards deuros,lessentiel tant dtenu par lesEtats de la zone euro, la BCE et leFonds montaire international), le risque dinsolvabilit du sys-tme bancaire crot lui aussi. Ce qui compromet thoriquementlune des trois conditions nces-saires loctroi daides durgence.

    Tout sera fait pour viter la ca-tastrophe , confiait une source proche de Francfort, dimanche,

    tandis que la population grecque sortait dans les rues pour dire sondsir de voir ltau sur le pays se desserrer. Mais dans le mmetemps, linquitude montait dans les sphres financires sur son maintien dans leuro. Dans cesmilieux, le oui avait t vivement espr avant le week-end. Il auraitouvert la voie la reprise du dialo-gue, donc aux rformes, donc au retour de laide internationale etau refinancement de lEtat grec.

    Dans son quitte ou double pourobtenir un meilleur accord politi-que avec les cranciers, le gouver-nement dAlexis Tsipras a-t-il tenucompte des banques et de leur d-pendance leurosystme ? La-t-il sous-estim ?

    Une chose est sre : le systmebancaire grec, supervis la BCE,est le talon dAchille de la Grce. Dans un scnario extrme de Grexit , les analyses divergent sur la capacit dAthnes fonc-tionner en autarcie, en arrtant de rgler ses dettes pour profiter dune situation dexcdent bud-gtaire primaire (solde positif en-tre recettes et dpenses).

    Mais sur le sort des banquesgrecques, il y a consensus. Cel-les-ci semblent difficilement via-bles. Un dfaut grec provoquerait chez elles des pertes sches et fe-rait fondre leurs fonds propres, constitus pour partie de crdits dimpts diffrs. Ce capital tom-berait si lEtat ntait plus solvable.Pour ce dernier, le cot de la reca-pitalisation du secteur serait in-supportable. p

    anne michel

    Les crises

    de liquidits

    sont fatales aux

    tablissements

    bancaires.

    La chute de

    Lehman Brothers

    la montr

    YanisVaroufakis,

    le 5 juillet, Athnes.

    JEAN-PAUL

    PELISSIER/REUTERS

    Ds fin janvier,

    le style

    nonchalant

    de M. Varoufakis,

    crne ras,

    sac au dos et col

    de chemise

    ouvert, a dton

    Bruxelles

    Malgr le non, les marchs restent calmesLes Bourses europennes ne paniquaient pas, lundi, mais la semaine pourrait tre agite

    C ette fois, on y est. Le scna-rio du Grexit , redoutpar les marchs depuis desmois, des annes mme, semblaitprendre corps, lundi 6 juillet aumatin, dans une zone euro d-boussole par le non massif des Grecs, la veille, laustrit.

    De quoi laisser imaginer des sc-nes de panique sur les marchs fi-nanciers la sortie de la Grce de lunion montaire ayant t par-fois compare un Lehman Bro-thers europen.

    Lundi matin, pourtant, rien detel. Certes, les Bourses europen-nes ouvraient leur sance sur un repli marqu, perdant gnrale-ment plus de 2 % louverture, dans le sillage des marchs asiati-ques. Quant aux rendements des emprunts dEtat espagnols et ita-liens ex-maillons faibles de la zone euro , ils se tendaient.

    Mais on est loin du chaos de lacrise des dettes souveraines : alorsque les taux espagnols avaient culmin 7,5 % en juillet 2012, ils stablissaient 2,3 % lundi. Leuro, lui, tait quasiment stable 1,10 dollar.

    Paradoxalement, un oui au r-frendum aurait probablementdclench de nouvelles lections,avec les incertitudes associes. A linverse, la dmission du ministregrec des finances, Yanis Varoufa-kis, signale peut-tre la volont demodration dAthnes , estime Sylvain Goyon, responsable de la

    stratgie actions chez Natixis Glo-bal Research. Et de souligner que la vritable chance est le 20 juillet [quand Athnes devra rembourser 3,5 milliards deuros la Banque centrale europenne(BCE)] et dici l, les ngociations peuvent reprendre .

    Puissants anesthsiants

    Les pare-feu mis en place ces der-nires annes par la BCE pour li-miter les risques de contagion fi-nancire sont galement pour beaucoup dans le calme relatif des investisseurs. Le programme OMT (oprations montaires sur titres), qui permet thorique-ment linstitution de Francfort de racheter sans limite des titres de dette souveraine si un pays de-mande un plan daide europen, et surtout le fameux quantita-tive easing (QE) font leffet de puissants anesthsiants.

    Enfin, lexposition des banqueseuropennes la Grce est dsor-mais quasi nulle et la situationmacroconomique de la zoneeuro va en samliorant. Autant de bonnes nouvelles que les mar-chs semblaient avoir choisi de privilgier, lundi.

    Il ny a pas de panique pourlinstant. [Mais] la semaine san-nonce encore confuse et agite et tout pourrait sacclrer dans les prochains jours , prviennent les analystes dAurel BGC. p

    audrey tonnelier

  • 8 | europe & france MARDI 7 JUILLET 20150123

    L A C R I S E G R E C Q U E

    Je suis prt taider, mais aide-moi taider , a expliqu dimanche soir Franois Hol-lande Alexis Tsipras. Di-manche 5 juillet, le premier

    ministre grec a appel le chef de lEtat peu aprs 20 heures et lan-nonce des rsultats du rfren-dum. La conversation en anglaispuis en franais entre les deux responsables a t directe et M. Hollande a expliqu au chef dugouvernement grec la gravit de la situation.

    Une majorit dEtats europensveulent dsormais expulser la Grce de la zone euro et, mme si la France ne le souhaite pas, ellene pourra pas longtemps sy op-poser si Athnes nenvoie pas lEurope des gages de bonne vo-lont politique et budgtaire. Tsipras doit absolument mon-trer quil est prt discuter , con-fie une source gouvernementale.

    Pour lElyse, le risque dune sor-tie de la Grce de la zone euro est rel . Paris veut tout faire pourlviter , mais cest aux Grecs de montrer leur volont de discuter , explique lentourage de M. Hol-lande. Cest au gouvernement grec de faire des propositions , arpt lundi matin le ministre desfinances, Michel Sapin, qui a pr-cis que lEurope va montrerquelle est forte dabord en se prot-geant elle-mme .

    Enferm dans son bureau lEly-se, Franois Hollande sest entre-tenu toute la soire de dimanche par tlphone avec la chancelireallemande Angela Merkel, le pr-sident de la Commission euro-penne Jean-Claude Juncker, le prsident du Parlement europenMartin Schulz, et Donald Tusk, le prsident du Conseil europen.

    Sil ne sest pas exprim aprs lalarge victoire du non en Grce, le prsident de la Rpublique a prvu de recevoir lundi Paris Mme Merkel pour un entretiensuivi dun dner de travail afin d valuer les consquences du r-frendum . Les deux chefs dEtatont demand la tenue mardi dun sommet extraordinaire de la zoneeuro sur la Grce, et ils sont dac-cord sur le fait que le vote des ci-toyens grecs doit tre respect , a prcis dimanche soir un com-muniqu de la chancellerie.

    Mais lAllemagne nentend paspour linstant dvier de sa posi-tion trs ferme contre le gouver-nement grec. Une intransigeance que partage de plus en plus la France. Cette nouvelle crise euro-penne a contribu rapprocher Paris et Berlin, alors que la ligne tenir face Athnes a pu appara-

    tre brouille ces derniers jours. Comme chaque fois que la si-tuation est difficile en Europe, ilfaut en revenir aux fondamentauxsolides, cest--dire le couple fran-co-allemand, sans qui rien nest possible , explique lElyse. LaFrance veut tablir une lecture etune stratgie communes face aux vnements grecs. Il faut une analyse convergente des deux pays ; rien ne serait pire dans lemoment actuel que dapparatredsunis entre Franais et Alle-mands , explique un proche de M. Hollande.

    Un problme de confiance

    La semaine dernire, le jusquau-boutisme de M. Tsipras a mis en difficult le prsident de la Rpu-blique, qui stait jusqualors ins-tall dans la posture du facilita-teur, partageant globalement surle fond la position de Mme Merkelet de la Commission euro-penne, mais tentant, par une

    approche plus ouverte sur laforme, de ramener la Grce vers un compromis.

    Lappel voter non lanc parM. Tsipras a plac au pied du murM. Hollande, dautant que selon lElyse, cette dcision du pre-mier ministre grec ne correspon-dait pas aux assurances donnesdans le mme temps par Ath-nes. Il y avait lespoir dun ac-cord la condition que les propo-sitions grecques puissent tre tra-duites rapidement et qu ce mo-ment-l, laccord fasse tomber le rfrendum. Or, dans le mme temps, le premier ministre Tsiprasa raffirm la date du rfrendumet confirm le non la questionquil avait pose, et qui navait dailleurs plus de caractre pr-cis , sest agac le chef de lEtat le1er juillet depuis Cotonou, o iltait en visite officielle. Le prsi-dent la alors clairement nonc son quipe : Il y a un problmede confiance.

    Le chef de lEtat est sous pres-sion politique en France, tant sa gestion de la crise grecque jus-qu prsent est critique de tou-tes parts. Lopposition lui repro-che de stre dmarqu de lAlle-magne en manquant de fermet lencontre de M. Tsipras. LaGrce seffondre, un premier mi-nistre dextrme gauche fait nim-porte quoi et cest le moment que choisit Franois Hollande pour sediviser avec Angela Merkel ? ,

    sest indign Nicolas Sarkozy sa-medi. A linverse, la gauche radi-cale comme les cologistes accu-sent M. Hollande davoir lch laGrce face Berlin. La responsa-bilit de Franois Hollande est ma-jeure car il sest dsinvesti de laquestion europenne et a laiss la gestion Merkel , estime leuro-dput EELV Yannick Jadot.

    M. Hollande doit galementfaire face de fortes attentes jus-que dans son propre camp politi-que. La victoire du non en Grce arelanc le dbat au sein du PSdune rorientation de lEu-rope. Les socialistes dfendent lemaintien de la Grce dans la zoneeuro et plaident pour une ren-gociation de sa dette. Mais plu-sieurs responsables veulent aussi profiter de la crise actuelle pour que la France fasse enten-dre une voix plus forte et diver-gente face lAllemagne.

    Le prsident de lAssemble na-tionale Claude Bartolone, qui a

    Le non grec bouscule le paysage politique franaisLe PS redoute que le rsultat du rfrendum de dimanche enflamme le dbat sur la rorientation conomique

    A u lendemain du rfren-dum grec, chacun enFrance cherche voirdans la victoire du non en Grce letriomphe sinon de ses ides, tout du moins de sa stratgie. Auxdeux extrmits de lchiquierpolitique, le Front de gauche et leFront national se sont rjouis du rejet du plan daide des cran-ciers. La droite en a elle profit pour dnoncer la mauvaise ges-tion du dossier par Franois Hol-lande. La gauche a pour sa part adopt une attitude prudente, sa-luant le choix des Grecs pour vi-ter de voir en son sein lmer-gence dun front du non.

    La gauche radicale jubile Ds lespremiers rsultats, le Front de gau-che a appel un rassemblement place de la Rpublique Paris pourfter la victoire de son alli grec Sy-riza. Jean-Luc Mlenchon a estim

    quune nouvelle page souvrait pour lEurope : On doit arriver un moratoire sur la dette grecque, peut-tre un dlai de grce, une p-riode pendant laquelle on ne paie pas, pour que les gens reprennent leur souffle.

    Pour le secrtaire national duParti communiste, Pierre Laurent, Bruxelles doit maintenant respec-ter le choix des Grecs : Les chan-tages financiers et mesquineries politiques nauront pas eu raison du souffle de dignit et de libert qui a envahi le berceau de la dmo-cratie. () Je mets en garde contre toute nouvelle entreprise de pres-sions politiques et financires sur lepeuple grec.

    Lextrme droite prdit la fin dela zone euro Le Front national a de son ct tent de rcuprer le crdit de la victoire de la gauche radicale. Au-del du message an-

    ti-austrit, lextrme droite serjouit surtout de la fragilisationde la zone euro : Cest un non delibert, de rbellion face aux dik-tats europens qui veulent impo-ser la monnaie unique tout prix,via laustrit la plus inhumaine etla plus contre-productive , aragi Marine Le Pen, la prsidentedu FN.

    La droite charge Franois Hol-lande Pour le parti Les Rpubli-cains (LR), si la victoire du non est une mauvaise nouvelle politique, elle est surtout loccasion de criti-quer le chef de lEtat. Avant mmelannonce du rsultat dimanchesoir, Nicolas Sarkozy avait attaquson successeur, samedi 4 juillet, lui reprochant de navoir pas de plan A, ni de plan B pour trouverune issue la crise. Franois Hol-lande dit quil faut chercher des compromis. Mais pas avec nim-

    porte qui et pas avec nimporte quel compromis. La droite meten garde contre toute concessionfaite au gouvernement dAlexisTsipras dans les ngociations ve-nir. Nous devons redire avec force que le rfrendum grec en-gage les Grecs, et seulement eux. Franois Hollande na pas de man-dat pour imposer aux Franais unenouvelle pression fiscale, tale surdes dcennies pour satisfaire aux caprices de M. Tsipras , a vive-ment ragi Nathalie Kosciusko-Morizet, la numro deux du parti.

    Pour LR, les vnements enGrce ne doivent surtout pas tre un prtexte un relchement des efforts en France. Cest mme le contraire selon Alain Jupp, qui plaide sur son blog pour une plus grande matrise budgtaire : Nous ne pouvons continuer laisser notre dette se rapprocher des 100 % de notre PIB, faute de

    matriser nos dficits. La moindrehausse des taux dintrt nous conduirait la catastrophe budg-taire. Une autre politique cono-mique simpose.

    La majorit joue les funambu-les Le Parti socialiste a accueilli avec circonspection les rsultats du rfrendum. Les lments de langage ont rapidement circul : respect du choix des Grecs, reprisedes ngociations, ouverture des discussions sur la dette. La majo-rit ne veut surtout pas laisser simposer lide que se rejoue en son sein la guerre du non, comme en 2005 lors du rfrendum sur le trait constitutionnel. Il sagit donc de boucher lespace politiquedes frondeurs, qui se sont empres-ss de se fliciter de la victoire poli-tique de M. Tsipras et de Syriza. Ar-naud Montebourg, lancien minis-tre de lconomie, a ainsi imm-

    diatement ragi sur Twitter : Hommage au peuple grec, qui sait dfendre non seulement son juste intrt mais galement lint-rt de tous les Europens.

    Pour le PS, lenjeu est galementde ne pas se couper de ses parte-naires en se ralliant trop ouverte-ment la position allemande dans les ngociations. EuropeEcologie-Les Verts a en effet adopt en conseil fdral une r-solution de soutien la dmar-che dmocratique de M. Tsipras, prnant une baisse du poids de la dette et une attnuation des poli-tiques daustrit. Soutenir un al-lgement de la pression sur laGrce, tout en vitant que le dbatsur la rorientation de la politiqueconomique nenflamme nou-veau ses rangs : la victoire du non place une fois de plus la majoritface ses contradictions. p

    nicolas chapuis

    Franois Hollande et Alexis Tsipras, le premier ministre grec, lElyse, le 4 fvrier. SBASTIEN CALVET/DIVERGENCE

    Face aux

    vnements

    grecs, la France

    veut tablir

    une lecture et

    une stratgie

    communes

    avec lAllemagne

    Hollande exhorte Tsipras inflchir sa positionParis, qui sest rapproch de la fermet allemande, ne croit plus gure la possibilit dun accord avec la Grce

    toujours critiqu depuis 2012 lordo-libralisme de Mme Me-rkel, a demand dimanche soir que les efforts rclams lco-nomie grecque soient amen-ds , car si lEurope senttedans ses drives, les effets rcessifsdes politiques daustrit conti-nueront produire le ressenti-ment populaire au sein de nom-breux pays . Une position parta-ge par laile gauche du PS, quijuge qu il est temps dsormais que le prsident de la Rpubliquechoisisse un chemin, celui attendupar les Franais qui lui avaient confi le mandat en 2012 , expli-que Pouria Amirshahi. Pour le d-put socialiste, le rsultat du r-frendum est loccasion politique et historique de promouvoir avecrsolution un autre cours euro-pen . Pas sr que Franois Hol-lande soit prt sy engager seul. p

    bastien bonnefous

    et david revault d'allonnes

    GREXIT

    POUR La Grce nest plus en mesure aujourdhui dassumer les disci-plines de la zone euro. Nous de-vons laider organiser sa sortie, sans drame. Ce qui ne veut pas dire quelle doit aussi sortir de lUnion. Alain Jupp, candidat la primaire des Rpublicains.

    Il faut quil y ait beaucoup dini-tiatives de la part de la zone euro, sans la Grce, pour regarder quel-les consquences tirer, et poser la question de savoir si on accom-pagne la Grce vers sa sortie de leuro, puisquelle la dcide ce soir. Eric Woerth, charg du pro-jet prsidentiel des Rpublicains.

    CONTRE La Grce doit rester dans la zone euro. Le Parti socialiste sou-haite donc que des ngociations souvrent immdiatement, per-mettant la Grce dhonorer ses engagements immdiats. Jean-Christophe Cambadlis, premier secrtaire du PS.

    Personne na exprim de souhait qui consisterait dire quil faut mettre la Grce dehors. On doit discuter. [Encore] faut-il que chacun prenne la mesure de lenjeu. Stphane Le Foll, porte-parole du gouvernement.

  • 0123MARDI 7 JUILLET 2015 europe | 9

    En Espagne, M. Rajoy sous la pression de PodemosA quelques mois des lections lgislatives, le premier ministre est fragilis par le rsultat du rfrendum grec

    madrid - correspondance

    La victoire du non au rf-rendum grec narrangepas les affaires du chef dugouvernement espagnol.

    Ds les premiers rsultats connus, le conservateur Mariano Rajoy a convoqu pour ce lundi 6 juillet une runion exception-nelle de la commission dlgue aux affaires conomiques, qui runit plusieurs de ses ministreset conseillers. Ils aborderont la question grecque, ses possibles consquences financires et poli-tiques quelques mois des lec-tions lgislatives ainsi que la pos-ture adopter lors des prochainesrunions europennes.

    Ces derniers temps, la crisegrecque semblait tomber pointpour le Parti populaire (PP, droite). M. Rajoy lutilisaitcomme argument de prcampa-gne pour vanter sa propre politi-que conomique et le retour de lacroissance en Espagne. Il la men-tionnait aussi pour fustiger le radicalisme de Syriza et de son ami espagnol, le jeune parti de la gauche anti-austrit Pode-mos. Elle lui servait enfin pour critiquer lirresponsabilit du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), qui a offert plusieurs mai-ries Podemos-Syriza , dont celle de Madrid, lissue des lec-tions locales de mai.

    Un oui au rfrendum aurait tune victoire pour M. Rajoy, d-montrant quil ny a pas dalterna-tive aux plans daustrit quil a lui-mme appliqus en Espagne. Dimanche midi, avant les pre-miers rsultats, M. Rajoy stait

    montr prudent quant lavenir dAthnes. La Grce fait partie de lUnion europenne et de la zone euro. Jespre que cela continuera ,avait-il dclar lors du discours de clture du campus de la Fonda-tion pour lanalyse et les tudes sociales (FAES, le cercle de r-flexion du PP). Quel que soit le r-sultat du rfrendum, que le oui oule non lemporte, lavenir sera diffi-cile, avait-il prvenu. Il sera sans doute meilleur si le oui lemporte,mais pas facile. Pourvu que les ci-toyens grecs fassent le bon choix ! LEurope a t solidaire, mais il ne peut pas y avoir de solidarit sans la responsabilit de tous.

    Un modle pour Podemos

    Devanant de probables turbu-lences sur les marchs, il a aussi exprim ses craintes : Ce qui se passe en Grce peut sans doute af-fecter lEspagne et dautres pays delUnion europenne, mais cela af-fectera beaucoup moins lEspagne grce aux rformes de ces derni-res annes.

    Cette ambigut tranche avec lesdclarations, beaucoup plus clai-res, faites le 30 juin. Si [le pre-mier ministre g