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1 Séquence 6 – HG11 Séquence 6 Les totalitarismes Sommaire 1. L’Union soviétique de 1917 à 1991 A La Russie de Lénine (octobre 1917-janvier 1924) B Le totalitarisme stalinien (1927-1953) C De l’apogée de la puissance soviétique à sa disparition (1953-1991) 2. L’Italie fasciste (1922-1945) A La prise de pouvoir par les fascistes B L’Italie de Mussolini C Le fascisme dans la guerre 3. L’Allemagne nazie A La République de Weimar : 1918-30 janvier 1933 B L’Allemagne sous la botte nazie C Le totalitarisme nazi 3. Glossaire Histoire © Cned – Académie en ligne

Les totalitarismes

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Histoire des totalitarismes en Europe

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Page 1: Les totalitarismes

1Séquence 6 – HG11

Séquence 6

Les totalitarismes

Sommaire

1. L’Union soviétique de 1917 à 1991

A La Russie de Lénine (octobre 1917-janvier 1924)

B Le totalitarisme stalinien (1927-1953)

C De l’apogée de la puissance soviétique à sa disparition (1953-1991)

2. L’Italie fasciste (1922-1945)

A La prise de pouvoir par les fascistes

B L’Italie de Mussolini

C Le fascisme dans la guerre

3. L’Allemagne nazie

A La République de Weimar : 1918-30 janvier 1933

B L’Allemagne sous la botte nazie

C Le totalitarisme nazi

3. Glossaire

Histoire

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Page 2: Les totalitarismes

2 Séquence 6 – HG11

Introduction

Le concept de totalitarisme est apparu après la Première guerre mondiale. Il désigne des régimes politiques dictatoriaux, égale-

ment apparus au XXe siècle, qui ont cherché à noyer par la contrainte et

la violence l’individu dans la communauté. Pour cela, les dictatures tota-

litaires ne peuvent se contenter de l’obéissance de leurs sujets. Elles prétendent également créer un homme nouveau au moyen d’un enca-drement de l’individu qui va du berceau jusqu’à la tombe. Dans le fas-cisme italien, tout comme dans le nazisme ou encore dans le commu-nisme, l’individu n’est rien, la collectivité, qu’elle s’incarne dans l’État

ou dans le « peuple » (Volk), est tout. Les instincts supposés égoïstes des individus doivent s’effacer devant l’intérêt exclusif de la commu-nauté. Dans leur projet de faire de l’homme une chose en ayant détruiten lui tout instinct de liberté, les dictatures totalitaires ont toutes eu recours à une propagande massive, omniprésente, rendue possible par l’invention et le développement des media modernes (radio, affiche, cinéma…).

La répression est également l’un des fondements

des dictatures totalitaires. Celui ou ceux qui sont désignés par la propagande des régimes totalitairescomme les « ennemis du peuple » sont impitoyable-ment éliminés : anti-fascistes, juifs, bourgeois, pay-sans riches (koulaks) sont envoyés en camps ou exé-cutés. On doit même constater que pour réussir dans

son dessein de souder la communauté autour d’un projet commun, letotalitarisme a besoin d’un ennemi et que, s’il n’en a pas, il s’en inventeun.

Hormis la répression et la surveillance de tous les instants par la police politique, le système concentrationnaire est également un des pointscommuns des régimes totalitaires. Il existe cependant à ce propos desdifférences entre les différents types de totalitarismes. Si l’URSS mit rapidement en place un système concentrationnaire appelé le goulag,celui-ci se distingue du système nazi dans la mesure où on n’y trouvenulle trace de chambres à gaz ou de fours crématoires. De même, onretrouve le culte de chef aussi bien dans le fascisme italien que dansle nazisme allemand. Le régime s’incarne dans ces deux cas dans « lepouvoir charismatique » du dictateur, le « Duce », Mussolini en Italie, le Führer (c’est-à-dire le guide en allemand), Hitler en Allemagne. Le culte de la personnalité délirant mis en place par Staline proclamé le « vojd », le guide, a bien des similitudes avec les exemples italien et allemandmais ne peut être généralisé dans le cas de la dictature communiste en

son dessein de so

Les définitions des mots de

vocabulaires figurés en bleu

sont regroupées dans le glos-

saire en fin de cours.

N.B.

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Page 3: Les totalitarismes

3Séquence 6 – HG11

Union soviétique. En effet, ni Lénine, ni Khrouchtchev ou ses succes-seurs ne reprirent le modèle stalinien du culte du chef, s’effaçant parfoisderrière la direction collective du Parti communiste.

Quelles sont les caractéristiques originales des dictatures tota-

litaires au regard des autres dictatures ? Quelles sont les dif-

férences et les similitudes entre le fascisme, le nazisme et le

communisme ?

Problématique

Plan : traitement

de la problématiqueNotions clés Repères

1.

A. La Russie de Lénine

(octobre 1917-janvier

1924)

Révolution

Dictature du prolétariat

Marxisme

Stalinisme

Économie planifiée

Collectivisation

Goulag

Lecture croisée d’un texte et

d’un graphique : la NEP

Analyse d’une affiche de proga-

gande : la collectivisation

Analyse de texte : extrait du

rapport Khrouchtchev (février

1956)

B. Le totalitarisme stali-

nien (1927-1953)

C. De l’apogée de la puis-

sance soviétique à sa

disparition (1953-1991)

2. L’Italie fasciste (1922-1945)

A. La prise du pouvoir

par les fascistes

Fascisme

Futurisme

Culte de la personnalité

Le refus de la Démocratie : ana-

lyse d’un texte de Mussolini

Lecture d’un tableau de propa-

gande : Benito Mussolini par

Alfredo Ambrosi

B. L’Italie de Mussolini

C. Le fascisme

dans la guerre

3. L’Allemagne nazie

A. La République de Wei-

mar : 1918-30 janvier

1933

Nazisme

Antisémitisme

Système concentrationnaire

Étude d’un ensemble documen-

taire : la montée du nazisme

pendant la république de

Weimar.B. L’Allemagne sous la

botte nazie

C. Le totalitarisme nazi

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Page 4: Les totalitarismes

4 Séquence 6 – HG11

1 L’Union soviétique de 1917 à 1991

La Russie de Lénine (octobre 1917 - janvier 1924)

dans la Première guerre mondiale

En 1914, la Russie, soumise au pouvoir autocratique du tsar Nicolas II, est apparemment un État puissant, fort de sa population nombreuse et de son essor économique tout récent. Mais l’entrée en guerre de la Rus-sie aux côté de la France et du Royaume-Uni va être fatale au régime. La Russie tsariste ne supporte pas le choc des défaites, des pertes mili-taires et des privations causées par la première guerre mondiale. En 1917, l’armée russe et la monarchie s’effondrent. La première révolution russe du 23 au 27 février 1917 contraint le tsar Nicolas II à abdiquer. Il est arrêté et cède le pouvoir à un gouvernement de coalition rapidement dominé par Alexandre Kerenski et les mencheviks (voir la séquence La guerre au XXe siècle).

2. La révolution d’Octobre ou seconde révolution

Lénine rentre en Russie, avec le concours des services secrets alle-mands en avril 1917. Il publie immédiatement son programme, inti-tulé les Thèses d’avril, en rupture complète avec le gouvernement des Mencheviks. Ceux-ci ont en effet décidé de poursuivre la guerre aux côtés de l’Entente considérant qu’une paix immédiate avec l’Allemagne serait désastreuse pour la Russie compte tenu de la situation militaire. Le nouveau gouvernement prend de multiples mesures démocratiques – liberté de la presse, multipartisme… – mais doit compter avec le pou-voir concurrent du Soviet de Petrograd. Par ailleurs, l’offensive militaire lancée par Kerenski pour repousser les Allemands est un échec qui pré-cipite l’écroulement définitif de l’armée russe et discrédite le nouveau gouvernement.

Le 25 octobre 1917, les Bolcheviks prennent le pouvoir par un coup d’État organisé et planifié par Léon Trotsky. C’est ce qu’on appelle la deu-xième révolution russe ou Révolution d’octobre.

A

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Page 5: Les totalitarismes

5Séquence 6 – HG11

Image du film de Serge Eisenstein,

Octobre, 10 jours qui ébranlèrent le monde (1927)

On voit à l’écran Lénine, à droite de l’image, qui prépare avec Trotsky, également au premier rang à gauche, et les autres dirigeants du partibolcheviks la prise du pouvoir à Pétrograd.

L’œuvre d’Eisenstein, considérée par les cinéphiles comme une des plusgrandes de l’histoire du cinéma, est indissociable de l’histoire de l’URSSet largement composée de films de propagande, comme Octobre, à la gloire de l’Union soviétique et du régime communiste.

3. La guerre civile (1918-1920)

Les Bolcheviks entament des pourparlers de paix dès décembre 1917avec l’Allemagne qui aboutissent à la signature du traité de paix de Brest-Litovsk le 3 mars 1918. La paix est imposée par l’Empire allemand à desconditions terribles pour la Russie. Elle perd le contrôle de nombreux territoires à l’ouest, et notamment en Pologne, les États baltes, la Fin-lande… Dès 1939, Staline, cherchera à récupérer ces territoires perdus.

Malgré la paix qui répond au désir de nombreux Russes, les Bolcheviks restent largement minoritaires dans le pays, n’obtenant que 25 % des

Document 1

Octobre Dix jours qui ébranlèrent le mondeOctobre Dix jours qui ébranlèrent le monde, de Serge Eisenstein avec Vasili Nikandrov, 1927,, de Serge Eisenstein avec Vasili Nikandrov, 1927,

© Rue des Archives/BCA.

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Page 6: Les totalitarismes

6 Séquence 6 – HG11

mandats de députés à l’assemblée constituante élue en 1918. En dépit de ce relatif échec, Lénine ne renonce pas à établir la dictature du prolé-tariat. Sous ce concept, inspiré des idées de Karl Marx, et qui, en principe impliquait le pouvoir des ouvriers, se cache la dictature de Lénine et du parti bolchevik. Toutes les grandes entreprises sont nationalisées sans indemnités dès le mois de juin 1918. Afin de consolider leur pouvoir, les bolcheviks interdisent toute opposition, d’abord celle des partis quali-fiés de « bourgeois » – droite et centre gauche, puis des autres forces de gauche. La presse est de nouveau soumise à la censure et une nouvelle police politique est reconstituée sur le modèle de l’okhrana des tsars. C’est la Tcheka, créée dès décembre 1917, afin de réprimer les ennemis de la révolution bolchevique.

Le pouvoir de Lénine doit cependant faire face à de nombreuses opposi-tions. Plusieurs régions sont des foyers d’une opposition politique, notamment l’Ukraine, le Kouban, la Sibérie, la Géorgie. Par ailleurs, les pays de l’Entente, craignant la contagion révolutionnaire en France, en Grande-Bretagne ou en Allemagne débarquent rapidement des troupes dans l’espoir de renverser le pouvoir bolchevik. Les Japonais débarquent à Vladivostok en avril, les Français et les Britanniques sur les rives de la mer Noire en novembre.

La Russie se divise en deux camps antagonistes, les blancs et les rouges,c’est-à-dire les bolcheviks. Ces deux camps vont se livrer à une guerre

civile impitoyable. Coalition hété-roclite, les blancs sont pour l’es-sentiel dirigés par d’anciens géné-raux de l’armée du tsar, comme Denikine ou l’amiral Koltchak qui se proclame régent de Russie ennovembre 1917. Souhaitant le retour à l’ancien ordre tsariste, ils sont soutenus par les puis-sances occidentales, en particu-lier la Grande-Bretagne, la France et les États-Unis, qui craignaient la contagion révolutionnaire en Europe de l’Ouest.

Document 2

Prolétaires unissez-vous contre

les habits noirs (les militaires

Wrangel et Joffre, les bourgeois

et l’Entente.) Affiche en caractères

russes et arabes, vers 1917-1918.

© Rue des Archives/CCI.

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7Séquence 6 – HG11

Cette affiche, caricature en faveur des rouges, se lit en deux parties. En haut, on voit un homme en costume traditionnel des régions asiatiques de Russie, poussé par Wrangel, le général russe blanc, deux représen-tants du capitalisme et le maréchal français Joffre, représentant l’agres-sion des puissances coalisées contre les bolcheviks. Il hésite à com-battre le soldat de l’armée rouge. Ensuite, le révolutionnaire bolchevik l’ayant persuadé de combattre dans ses rangs, il se retourne victorieuse-ment contre ses anciens maîtres. Le message est clair : grâce au courage du prolétaire asiatique en armes, la Révolution a vaincu ses ennemis, les armées étrangères venues soutenir la contre-révolution et les capita-listes bourgeois

4. Le communisme de guerre

Pour faire face aux nécessités de la guerre civile et pour appliquer son programme marxiste, Lénine appliqua un programme particulièrement violent dès 1918.

Economie et société sont mobilisées par le parti. Après les usines natio-nalisées dès juin 1918, les terres agricoles sont également étatisées en février 1919. Dans l’esprit de Lénine, il s’agit de faire parvenir à tousprix la production agricole dans les villes afin de nourrir la population, en priorité celle des ouvriers des usines d’armement, et l’Armée rouge.Les paysans qui s’étaient constitués en soviets et avaient massivement occupé les terres après la chute du tsarisme se trouvent ainsi dépossé-dés. Accusés d’affamer la Révolution, ils sont bientôt désignés par la propagande bolchevique comme des « ennemis du peuple ». Les récoltes des koulaks sont réquisitionnées. À partir du second semestre 1918, le parti lance la « terreur rouge ». La Tcheka s’emploie à traquer, partout où elle le peut les opposants à la révolution en ayant recours à la dénoncia-tion et multipliant les exécutions sommaires. L’objectif étant de semer la terreur et de terrifier à titre préventif les hésitants. La famille du tsar et Nicolas II sont exécutés le 16 juillet 1918 à Ekaterinbourg, en Sibérie.

En mars 1919, afin d’organiser le mouvement communiste mondial, Lénine crée le Komintern qui siège à Moscou.

C’est Léon Trotsky qui est chargé d’organiser L’Armée rouge. Après lesdéfaites de la plupart des armées blanches en 1919 et la mort de Kolt-chak, exécuté par les Bolcheviks en février 1920, les Bolcheviks sont finalement vainqueurs. Les épreuves de la Première guerre mondiale, la guerre civile, ont fait de la Russie un vaste champ de ruines.

5. La Nouvelle Politique économiqueou N.E.P. (New Economic Policy)

La Russie est, à l’orée des années 1920, dans une situation économique et sociale désespérée. Des famines sporadiques éclatèrent dans le pays,

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Page 8: Les totalitarismes

8 Séquence 6 – HG11

comme en 1922 dans les régions de la Volga. Du fait de l’extrême pau-vreté et de l’évolution toujours plus autoritaire du régime qui s’en prend désormais aux forces de gauche, et en particulier aux anarchistes, dessoulèvements ont lieu parmi les ouvriers ou dans l’armée. Le plus impor-tant est celui des marins de Cronstadt, en mars 1921, à l’origine de la révolution de 1917. Les ouvriers et les marins de Cronstadt se soulèvent contre les bolcheviks qui prennent d’assaut la forteresse et font exécuter sans doute plusieurs milliers d’hommes.

Analysant le caractère catastrophique de la situation du pays en 1921, Lénine impose, non sans difficultés en raison de l’opposition d’un cer-tain nombre de membres de la direction du parti bolchevik, un retour provisoire à un capitalisme mesuré. Il fait mettre fin aux réquisitions forcées dans l’agriculture, les remplaçant par des impôts en nature. Il fait rendre les petites entreprises à leurs anciens propriétaires et auto-rise une libéralisation du petit commerce. Grâce à l’ensemble de ces mesures, l’économie russe redémarre. En 1923, elle avait retrouvé son niveau de production de 1913.

Le programme de Lénine

« La ruine extrême aggravée par la mauvaise récolte de 1920 a rendu

cette transition nécessaire et urgente, vu l’impossibilité de rétablir rapi-

dement la grande industrie. D’où la nécessité d’améliorer avant tout la

situation des paysans.

Le moyen : l’impôt en nature, le développement des échanges entre l’agri-

culture et l’industrie, le développement de la petite industrie. L’échange,

c’est la liberté du commerce, c’est le capitalisme. Il nous est utile, dans la

mesure où il nous aidera à combattre l’éparpillement des petits produc-

teurs. Il n’y a là rien de dangereux pour le pouvoir prolétarien, tant que

le prolétariat détient fermement le pouvoir, tant qu’il tient solidement en

mains les transports et la grande industrie. »

Lénine, Discours au XeXX Congrès du parti communiste, mars 1921.

L’évolution de l’économie russe (1913-1928)

Document 3

Document 4

19131913 19211921 19281928

Céréales (millions de tonnes) 80,1 56,3 73,5

Bovins (millions de têtes) 60,6 45,8 66,4

Houille (million de tonnes) 29,2 8,6 35,2

Acier (million de tonnes) 4,2 0,2 4,3

Energie électrique (milliards de Kwh) 1,9 0,5 5

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Page 9: Les totalitarismes

9Séquence 6 – HG11

� Quels sont les secteurs économiques qui diminuent le plus ?

� Comment expliquez-vous cet écroulement ?

� Que pouvez-vous conclure des résultats de la NEP ?

� Pourquoi, selon vous, les résultats sont-ils inégaux ?

� Nous pouvons remarquer que la production de charbon et la pro-duction s’écroulent totalement entre 1913 et 1921, la productiond’acier étant quasi nulle à la sortie de la guerre civile. La production de céréales, quant à elle, diminue de moitié au cours de la même période, passant de 80 à 40 millions de tonnes.

� La faillite de l’économie russe durant cette période s’explique par les conséquences de la première guerre mondiale, qui a notammententraîné la mobilisation de millions de paysans, et par les désastres de la guerre civile. Celle-ci a en effet désorganisé l’appareil industriel et s’est également traduite par des massacres et des réquisitions mas-sives dans l’agriculture. Nombre de paysans ont réagi en refusant desemer, en abattant leur propre bétail, renforçant ainsi les effets de la famine de 1921-1922.

� Dès 1921, l’ensemble des productions repart à la hausse. L’arrêt desréquisitions dans l’agriculture, une amélioration au moins relative dans la façon dont les campagnes sont traitées, permettent l’aug-mentation de la production de céréales. Celle-ci atteint en 1926 leniveau de production de 1913, avant de baisser à nouveau en 1927.Dès 1926, la production d’acier a retrouvé son niveau de 1913 avant d’atteindre un peu plus de 5 millions de tonnes en 1928. C’est la pro-duction de charbon qui connaît le redressement le plus spectaculaire.Dès 1925, elle est de nouveau de 30 millions de tonnes, comme en 1913, avant de culminer à plus de 60 millions de tonnes en 1928, soit plus de deux fois la production d’avant-guerre.

� Les variations de la production de céréales – ainsi la baisse desannées 1923-1924, puis 1926-1927 – peut s’expliquer pour une part par les aléas climatiques. Néanmoins, en dépit du discours de Léninequi, en 1921, considérait que le secteur constituait la première des priorités, l’industrie est nettement privilégiée par le régime comme en témoignent la progression bien plus brillante dans la production d’acier et de charbon.

Lénine s’emploie également à changer les rapports entre la Russie etles peuples dominés de cet immense territoire en créant un État de typefédéral. En 1922, la Russie devint l’URSS (Union des Républiques socia-

Questions

Réponses

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Page 10: Les totalitarismes

10 Séquence 6 – HG11

listes soviétiques) sur la base d’une entente fédérale entre les différents États qui la composent.

Lénine meurt prématurément en janvier 1924, laissant ouvert le difficile problème de sa succession.

Le totalitarisme stalinien (1927-1953)

1. La succession de Lénine

À la mort de Lénine, Staline est secrétaire général du P.C.U.S. (parti com-muniste d’Union soviétique). Il s’oppose rapidement à Léon Trotsky, l’or-ganisateur de la révolution d’Octobre et le vainqueur de la guerre civile. Au-delà de la querelle de personnes, les deux hommes se divisent sur la question de l’internationalisation de la révolution. Trotsky souhaite exporter immédiatement la révolution vers le reste du monde, en visant d’abord l’Europe, alors que Staline considère qu’elle doit d’abord se conforter en Union soviétique même.

S’appuyant sur le Parti, Staline l’emporte sur Trotsky qui est expulsé d’URSS en 1927 et sera finalement assassiné par un agent stalinien, àMexico, en 1940. Débarrassé de son principal rival, Staline installa une dictature totale à partir de 1928.

2. La transformation économique de l’URSSsous Staline

Staline va s’employer à faire de l’URSS une grande puissance industrielle en mettant en place une économie de type communiste. Pour cela, il metfin à la N.E.P. dès 1927 et met en place une économie planifiée. Toutesles entreprises, les terres agricoles, l’ensemble du commerce appartien-nent directement ou indirectement à l’État.

Le premier plan quinquennal est lancé en octobre 1928. L’organisme qui s’occupe de répartir les objectifs et vérifier les résultats de chaque entre-prise est appelé le Gosplan. L’accent est mis sur les industries lourdes et la production de charbon. Les industries de biens de consommation sont volontairement laissées de côté car jugées « bourgeoises » dans la mesure où elles sont censées apporter un confort à l’individu et non à la communauté dans son ensemble. Cette incapacité de l’industrie à répondre aux besoins les plus élémentaires de la population sera une caractéristique constante de l’économie soviétique.

B

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Page 11: Les totalitarismes

11Séquence 6 – HG11

L’URSS se couvre de combinats (pôles de développement industriels dans lesquels on trouve presque exclusivement des industries lourdes)c’est surtout l’industrie lourde qui est favorisée.

Des complexes industriels géants se mettent en place dans l’Oural, enSibérie, dans le Kazakhstan (voir le document 5, géographie industrielle de l’URSS).

Le travail à la chaîne socialiste est glorifié en la personne d’Alexeï Stakha-nov, soi-disant inventeur du stakhanovisme (équivalent du taylorisme).En 1935, Alexis Stakhanov, alors mineur dans le bassin houiller du Don-bass, aurait dépassé de 1 400 % sa norme journalière. Sa méthode detravail se diffuse et le travail à la pièce, dans le charbon et l’acier devintla norme. L’image de Stakhanov est immédiatement reprise par la pro-pagande stalinienne.

Sans qu’il soit possible de nier un véritable décollage industriel de l’éco-nomie soviétique, les résultats de cette période sont difficiles à évaluer. En effet, toutes les statistiques économiques étaient systématiquement truquées à la fois pour encourager les Soviétiques à poursuivre leurs efforts et pour montrer au monde la réussite de la révolution.

La géographie industrielle de l’URSS (1927-1940)Document 5

O c é a n G l a c i a l A r c t i q u e

Mer deBarents

Mer Noire

Merd’Okhotsk

Nouveaux centres industriels en 1939

Transsibérien

Centrale hydro électrique de DnieprostroïVilles fondées avant 1913Camps de travail (Goulag) sur régions minièreset exploitations forestières

LacBaïkal

Amour

Léna

Volga

Ob

Irtych

IenisseïOURALOURAL

DONBASSDONBASS

KOUZBASSKOUZBASS

Vladivostok

Irkoutsk

Omsk

Bakou

Rostov

Karaganda

Magnitogorsk

Karaganda

Leningrad

Stalingrad

MoscouMoscou

Sibérieorientale

Sibérieoccidentale

Sibériecentrale

MagnitogorskKomsomolsk

500 km

MerCaspienne

Merd’Aral

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Page 12: Les totalitarismes

12 Séquence 6 – HG11

La collectivisation, affiche de 1932

© Deutsches Plakat Museum, Essen/Archives Charmet/Bridgeman Giraudon.

� Comment cette affiche est-elle composée ?

� Quels aspects de la politique agricole du régime stalinien représente-t-elle ? La réalité correspond-elle à cette image ?

Document 6

© Deutsches Plakat Museum Essen/Archives Charmet/Bridgeman Giraudon

Questions

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Page 13: Les totalitarismes

13Séquence 6 – HG11

� Cette affiche est un photomontage composé avec une grande rigueur, aucun élément n’est choisi ou représenté au hasard. Ce visuel a été créé en 1932 pour valoriser le premier, plan quinquennal dans l’agri-culture. Ce qui frappe en premier lieu c’est l’immense figure de Sta-line. Il regarde vers l’horizon des lendemains qui chantent. Le peuple des kolkhoziens le suit, souriant, montrant sa disponibilité à suivreses consignes. Au premier plan, un tracteur à chenille est attelé à cinqsemoirs. La mécanisation est le symbole du modernisme apporté par le communisme.

� Cette affiche de propagande a été réalisée à l’occasion de la collecti-visation des terres. Elle a deux buts essentiels, convaincre les Sovié-tiques que le communisme est synonyme de progrès, et mettre enavant la figure du dictateur. Le dictateur est immense, parce qu’il saittout et voit plus loin que l’homme du commun. Il est celui qui empor-tera les Soviétiques vers un avenir radieux. Le texte dit qu’à la fin dupremier plan quinquennal, les bases de la collectivisation devront êtretotales. La vision de la collectivisation que présente cette affiche estd’une ironie dramatique dans la mesure où ce mouvement se solda par la mort et la déportation de millions de paysans refusant la collec-tivisation des moyens de la production agricole et l’écroulement de la production agricole.

3. Aspects du totalitarisme stalinien

Le régime stalinien est de type totalitaire. La propagande, la répression,la surveillance de la population sont omniprésentes dans l’URSS de Sta-line.

Les organisations de femmes, de travailleurs, de jeunesse, les komso-mols, c’est-à-dire les jeunesses communistes, par exemple, inculquentà la population les principes du communisme et permettent égalementde la contrôler.

Staline renforce sa dictature en s’appuyant sur le parti communisted’URSS, seul parti autorisé. Afin de contrôler plus efficacement le PCUS, Staline fait exécuter les anciens compagnons de Lénine et les remplaceà l’intérieur du parti par des hommes à lui. Les fidèles du régime fontbientôt figure de nouveaux privilégiés. Ces apparatchiks vont constituer une nouvelle bourgeoisie rouge ou nomenklatura.

Les purges à l’intérieur du parti, dans l’armée et l’administration com-mencent dès 1934 pour atteindre leur point culminant en 1936-1938.

De grands procès publics ont lieu dans la capitale soviétique, c’est cequ’on appelle les procès de Moscou. Le totalitarisme stalinien obtient,par la violence physique, la torture morale, les menaces contre la familledu détenu, que les accusés, tous d’authentiques communistes, s’accu-sent de liens avec Trotsky ou avec les ennemis de l’URSS et d’activités

Réponses

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Page 14: Les totalitarismes

14 Séquence 6 – HG11

anti-communistes. La sentence, décidée avant même le procès, est évi-demment la mort.

Les purges dans l’armée vont s’attaquer aux officiers généraux vain-queurs de la guerre civile dont la popularité fait peur à Staline. Ainsi, il fait exécuter le maréchal Toukhatchevsky, trop populaire aux yeux du dictateur et fait décimer le haut commandement. En 1941, face à l’of-fensive allemande, l’Armée rouge aura perdu l’essentiel de ses cadres compétents.

Le pays tout entier est alors soumis à la terreur et à la répression policière du NKVD, successeur de la Tcheka et futur KGB et de son chef, Béria. Larépression entraîne la mort de dizaine de milliers de victimes et la dépor-tation dans les camps de concentration de Sibérie, le Goulag, de millions de personnes.

Prisonniers du Goulag travaillant à la construction du canal de la mer

Blanche, entre 1931 et 1933

© Rue des Archives/Tal.

Le régime stalinien se caractérise enfin par un culte de la personnalité délirant autour de sa personne de Staline. La propagande le surnommaainsi le Petit père des peuples en affectionnant de le photographier avec

Document 7

© Rue des Archives/Tal

© Cned – Académie en ligne

Page 15: Les totalitarismes

15Séquence 6 – HG11

des enfants dans les bras, célébrant son génie, génie politique, écono-mique, scientifique, militaire. Pendant la seconde guerre mondiale, la propagande en fait le maréchal Staline, le génial organisateur de la vic-toire de l’Armée rouge alors même que ses interventions intempestives dans la stratégie militaire sont largement responsables des terribles défaites soviétiques au début du conflit (voir la séquence 4 « La guerre au XXe siècle »).

Après la seconde guerre mondiale, la surveillance du NKVD est tou-jours aussi omniprésente, la répression à l’égard de toute opposition toujours aussi systématique et Staline est de plus en plus suspicieux. Le régime semble se faire cependant un peu moins violent. Le temps des grandes purges est passé et le traumatisme de la collectivisation s’éloigne quelque peu. Jaloux de la popularité de Joukov, le vainqueur de Stalingrad et de Berlin, Staline se « contente » de l’affecter dans des commandements éloignés. Le complot des blouses blanches, médecins le plus souvent juifs, accusés de crimes imaginaires contre des digni-taires soviétiques en 1952-1953, rappelle cependant aux Soviétiques et au monde que le régime n’a pas changé de nature.

Staline meurt le 5 mars 1953 en ayant terrorisé son entourage jusqu’au bout.

De l’apogée de la puissance soviétique à sa disparition (1953-1991)

1. La succession de Staline

À la mort de Staline, les successeurs se disputent l’héritage dont notam-ment Béria, surtout Nikita Khrouchtchev. Khrouchtchev qui devient pre-mier secrétaire général du PCUS, fait arrêter puis exécuter Béria à la finde l’année 1953. On peut voir dans cette exécution le début de la dés-talinisation.

2. Le XXe congrès du PCUS (février 1956)

C’est à l’occasion du XXe Congrès du parti communiste qui se tient à Moscou du 14 au 25 février 1956 que Khrouchtchev lit un rapport secret devant les délégués des partis communistes du monde entier. Devant un auditoire médusé, il dénonce les crimes de Staline, il l’accuse en particu-lier d’avoir organisé un culte de la personnalité autour de sa personne etd’avoir écrasé le Parti sous sa tyrannie.

C

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Page 16: Les totalitarismes

16 Séquence 6 – HG11

Extrait du rapport secret de Khrouchtchev au XXeXX congrès du P.C.U.S.

(Parti communiste de l’Union soviétique) (février 1956)

« Camarades ! Dans le rapport du Comité central du parti au XXeXX Congrès,

dans un certain nombre de discours prononcés par des délégués, au

congrès et aussi au cours des sessions du Comité central (c’est-à-dire

l’organe de décision) du P.C.U.S., on a beaucoup parlé du culte de la per-

sonnalité et de ses conséquences néfastes.

Après la mort de Staline, le Comité central du parti a commencé à mettre

en œuvre une politique d’explications concises et conséquentes du

caractère intolérable et étranger à l’esprit du marxisme-léninisme de la

glorification d’un individu, de son élévation au rang de surhomme doté

de qualités surnaturelles comparables à celles d’un dieu. Un tel homme

est censé tout savoir, tout voir, tout pouvoir, penser pour tous et agir au

mieux en toutes circonstances.

Une telle foi en un homme, et plus précisément une telle foi en Staline, a

été cultivée chez nous pendant de longues années. (…)

Tout le monde ne saisit pas encore complètement les conséquences pra-

tiques qui ont résulté du culte de l’individu, le grave préjudice causé par

la violation du principe de la direction collective du Parti. (…)

La manière par laquelle d’anciens membres du NKVD fabriquèrent divers

« centres antisoviétiques » fictifs à l’aide de manières provocatrices

apparaît dans les confessions du camarade Rosenblum, membre du parti

depuis 1906, qui a été arrêté en 1937 par le NKVD de Leningrad. (…).

Lorsque Rosenblum fut arrêté en 1937, il fut soumis à de terribles tortures

au cours desquelles on lui donna l’ordre de faire de fausses dépositions

à son propre sujet et sur d’autres personnes. Puis, il fut conduit dans le

bureau de Zakovski qui lui offrait la liberté à condition qu’il passât devant

le tribunal de faux aveux de « sabotage », espionnage et diversion dans

un centre de terroriste de Leningrad, aveux qui avaient été fabriqués par

le NKVD en 1937 (Mouvements dans la salle). (…)

Plusieurs milliers d’honnêtes et innocents communistes sont morts par la suite des monstrueux truquages de ces « procès » parce qu’on accep-tait toutes sortes de confessions calomnieuses »…

� Quelle est la nature du document ? Pourquoi est-il secret ?

� Quel est, selon Khrouchtchev, le plus grand reproche qu’on peut faire à Staline ? Pourquoi ?

� Quels sont les crimes que Khrouchtchev impute à Staline ? À quel évé-nement précis fait-il référence ?

� Quelle est, selon vous, la raison pour laquelle les déclarations de Khrouchtchev provoquent des mouvements dans la salle ?

Document 8

Questions

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Page 17: Les totalitarismes

17Séquence 6 – HG11

� Le texte qui nous est ici présenté est le texte du discours qui Khroucht-chev prononça à l’occasion du XXe congrès du P.C.U.S. Il s’agit d’un rapport secret, prononcé à huis clos, sans la présence de journalistes,devant les délégués des partis communistes du monde entier. Le secret s’imposait dans la mesure où, pour Khrouchtchev, il ne fallaitpas que la reconnaissance interne des crimes du stalinisme puisseservir à la presse du monde capitaliste pour dénoncer le régime com-muniste en URSS.

� Khrouchtchev dénonce en particulier le culte de la personnalité dontStaline s’est entouré. Il n’hésite pas à déclarer que Staline se faisaitreprésenter comme un surhomme et même comme un dieu. Ce cultede la personnalité est doublement condamnable. Condamnable,parce qu’il est contraire à l’idéologie sur laquelle l’URSS est censéese fonder, c’est-à-dire le marxisme-léninisme. De fait, Marx n’évoque jamais l’idée d’un culte de la personnalité, et Lénine lui-même, ne fitjamais l’objet d’une vénération comparable quand il était au pouvoir.Condamnable également parce que c’est du culte de la personnalitéque découlent, selon Khrouchtchev, les autres crimes de Staline.

� Khrouchtchev fait directement référence aux procès de Moscou qui,entre 1936 et 1938, ont eu pour conséquence l’élimination par Sta-line, de milliers de membres du P.C.U.S. Il dénonce les méthodes du NKVD, et donc, même s’il ne le nomme pas de son adversaire Béria, qui n’hésita pas à avoir recours à la torture pour fabriquer de fausses preuves contre des communistes sincères.

� L’URSS s’est bâtie sur l’idée du paradis des prolétaires, vantée par la propagande. Beaucoup de communistes sincères, notamment enEurope occidentale, ont longtemps voulu croire que les rumeurs évo-quant, parfois dès les années 1920, les crimes du régime soviétique, n’étaient que des inventions des media « bourgeois ». Or, pour lapremière fois, même si on prenait la précaution de dévoiler tout celasous le sceau du secret, les dirigeants de l’URSS eux-mêmes recon-naissaient l’ampleur des crimes staliniens. Cet énoncé des crimes sta-liniens déstabilisa grandement les délégués présents, et notammentceux de la délégation française.

La déstalinisation annoncée par Khrouchtchev à l’occasion du XXe

Congrès du PCUS est le pendant d’un autre changement d’orientation,en politique étrangère, la coexistence pacifique (voir la séquence 4 sur « La guerre au XXe siècle », au chapitre 3).

Les réformes entreprises par Khrouchtchev en politique intérieure, tantdans le domaine économique afin de conférer une plus grande autono-mie à la machine industrielle, que dans le domaine culturel, avec une tutelle un peu moins étouffante de la part de l’État, furent finalementbien timides.

Réponses

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Page 18: Les totalitarismes

18 Séquence 6 – HG11

L’époque Khrouchtchev est celle des réussites soviétiques dans le domaine scientifiques, principalement la conquête spatiale avec le pre-mier vol spatial habité du cosmonaute Youri Gagarine. Figure populairese voulant sympathique, Khrouchtchev est le premier dirigeant sovié-tique à voyager à l’étranger. Mais cette période est vue aussi comme une période de faiblesse aux yeux de la nomenklatura soviétique qui reproche au successeur de Staline sa tiédeur à réprimer les mouvements de révolte en Pologne et en Hongrie. Et, lorsque Khrouchtchev doit recu-ler devant Kennedy au moment de l’affaire des missiles de Cuba (voir la séquence 4 sur « La guerre au XXe siècle », au chapitre 3), il signe sonarrêt de mort politique.

En octobre 1964, le Comité central du PCUS démet Khrouchtchev detoutes ses fonctions, le mettant d’office à la retraite. Leonid Brejnev lui succède alors à la tête du PCUS et donc de l’URSS.

3. L’impossible réforme du système

La période où Brejnev dirige l’Union soviétique est désignée comme unepériode de glaciation, les équilibres internes, sociaux et économiques etinternationale sont maintenus en l’état dans un monde en pleine muta-tion. C’est pourtant à la fin des années 1970 que l’influence de l’URSS est la plus grande dans le monde. Cette influence repose sur la puis-sance militaire du second super-grand, sur l’influence du PCUS sur les intellectuels du monde entier, sur la récupération qu’elle fait des mouve-ments de libération nationale se battant au nom du marxisme-léninisme comme au Vietnam. Mais le système soviétique reste bloqué par une croissance économique beaucoup trop faible pour répondre aux besoins de l’URSS. La décennie 1970, est en fait déjà une décennie de crise. L’économie soviétique est également dans l’incapacité de répondre audésir de la population de voir sa condition s’améliorer. Les Soviétiquesvivent cette époque plongés dans une économie de pénurie. Dans les magasins d’État, les Soviétiques se plaignent souvent du manque de produits et de leur mauvaise qualité. Les produits importés sont réser-vés à la nomenklatura et le marché noir prolifère.

Rapport d’Andreï Gromyko sur la situation du commerce

dans la ville de Moscou (janvier 1986)

« Confidentiel au Comité central

Magasin n° 1 de l’arrondissement de Kountsevo

On note un fort manque de bonnes chaussures d’hiver. Durant les grands

froids, on ne pouvait trouver que des sandalettes d’été. Ce magasin

offre un exemple typique du manque chronique de tissus à la mode. Les

tons des étoffes proposés sont pâles, sombres et même « repoussants »

comme l’a remarqué une acheteuse. Devant nous, les acheteurs critiquè-

rent ceux qui produisent de tels produits et nous demandèrent s’il n’était

Document 9

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Page 19: Les totalitarismes

19Séquence 6 – HG11

pas possible de contraindre le producteur à tenir compte des goûts des

clients. Le personnel du magasin attira notre attention sur le manque de

régularité des livraisons. (…) Les produits ne partent pas à temps des

entrepôts soit à cause de la mauvaise organisation, soit par le manque

de transport.

Archives d’État soviétiques, in Nicolas Werth et Gaël Moullec,

Rapports secrets soviétiques, 1921-1991, Gallimard, 1994.

4. Le problème des dissidents

Même s’il demeure une dictature réprimant toute opposition avec le concours du KGB, le régime soviétique se fait moins répressif à partir desannées 1960. Dès la mort de Staline, un certain nombre de prisonniers du goulag avait été libéré ce qui n’empêche pas le système concentra-tionnaire de perdurer. Au milieu des années 1960, apparaît le mouve-ment des dissidents. Ceux-ci, en général sont des intellectuels ou des scientifiques. Ils exigent le respect des droits de l’homme. Incapable dedialoguer avec ces membres de la nomenklatura qui ne respectent plusle système politique, le régime leur répond en les envoyant au goulag ouen les internant dans des hôpitaux psychiatriques.

Ces dissidents ne sont qu’une poignée, largement coupés du citoyensoviétique, qui vivant dans les difficultés de la vie quotidienne et dans lacrainte des services de sécurité, ne les comprend pas. Mais ces quelquespersonnalités, comme le grand écrivain Alexandre Soljenitsyne ou le physicien Andreï Sakharov, l’inventeur de la bombe à hydrogène sovié-tique, peuvent entrer en contact avec le monde occidental et leur causese fait connaître par les médias occidentaux.

5. Le « moment » Gorbatchev (1985-1991)

Issu d’un groupe de réformateurs qui s’était constitué autour de IouriAndropov l’ancien directeur du KGB, Mikhaïl Gorbatchev, lui aussi ancien directeur du KGB, accède au pouvoir suprême en 1985. Il est convaincuqu’il faut changer le système économique soviétique en profondeur pour sauver l’URSS. Mais les courageuses réformes qu’il entreprend sont troptardives et vont en fait précipiter la fin de l’URSS.

Il résume son programme de réformes par deux mots, glasnost (transpa-rence) et perestroïka (restructuration). Dans son esprit, il s’agit de conci-lier l’idéal communiste de justice sociale aux libertés démocratiques en améliorant l’efficacité économique du système. Il va rapidement se heurter aux apparatchiks du P.C.U.S. qui vont chercher à protéger leurs privilèges. On va les nommer les conservateurs face aux réformistes entraînés par Gorbatchev.

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Page 20: Les totalitarismes

20 Séquence 6 – HG11

Il décide de mettre fin à la censure, autorise le multipartisme et la liberté de la presse. En février et mars 1990 ont lieu les premières électionslégislatives libres de l’histoire de l’Union soviétique. Elles portent Boris Eltsine à la présidence de la République de Russie, c’est-à-dire la répu-blique la plus importante de la fédération qu’est l’URSS.

Les réformes économiques libéralisent le commerce et visent également à supprimer les entreprises publiques non rentables. Loin de relancer l’économie soviétique, ces mesures aboutissent à la baisse dramatiquede la production et du cours du rouble par rapport au dollar. L’inflationexplose, le niveau de vie des Soviétiques s’écroule. Une population ayant vécu sous l’assistance de l’État avec des salaires faibles mais des loyers, des principales dépenses contraintes (eau, électricité, chauf-fage), l’alimentation à des coûts tout aussi faibles découvre l’horreur sociale du chômage et l’incapacité de l’État à soutenir ses victimes. Le désir des réformateurs d’établir une vérité des coûts de production des biens et des denrées essentiels va contribuer à faire exploser les prix. Pour y faire face, les salaires vont être réévalués en permanence, mais ne pourront pas empêcher un véritable effondrement du pouvoir d’achatdes ménages.

Salaires et évolution des prix en URSS (en roubles)

On remarque que le salaire ouvrier est multiplié par 600 entre 1985et 1994, le kg de pain par 9 000 et le kilo de viande par 3 000. On peut en déduire que face à l’ampleur de l’inflation, les salaires ne peuventpas suivre et que le niveau de vie des citoyens soviétiques s’écroule lit-téralement durant cette période.

Les difficultés économiques et sociales font plonger Gorbatchev dans des records d’impopularité. En plus, il fait face également à l’agitation des nationalités qui composent l’URSS. Devant le pouvoir central qui aban-donne progressivement le système communiste qui avait fait le ciment de l’URSS, les états incorporés par la force réclament leur indépendance. Les premiers à se séparer de l’URSS sont les états baltes (Estonie, Letto-nie, Lituanie) qui proclament leur indépendance. Les conservateurs de la nomemklatura tentent de sauver le système en se soulevant contre Gorbatchev. Elle tente un coup d’État à l’été 1991 qui échoue grâce, en particulier, à l’opposition du président de la République de Russie, Boris Eltsine. Gorbatchev est libéré mais il ne peut empêcher Boris Eltsine de

Document 10

19851985 19901990 19941994

Salaire mensuel d’un ouvrier qualifié 250 5 000 150 000

Prix du pain (1 kg) 0,10 25 900

Prix de la viande (1 kg) 5 300 15 000

� Commentaire

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Page 21: Les totalitarismes

21Séquence 6 – HG11

proclamer à son tour la sécession de la Russie de l’URSS. Désormaisprésident d’une fédération fantôme, Gorbatchev démissionne et l’URSSdisparaît le 23 décembre 1991.

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Page 22: Les totalitarismes

22 Séquence 6 – HG11

2 L’Italie fasciste (1922-1945)

La prise du pouvoir par les fascistes

guerre mondiale et la crise sociale

Pour le prix de son entrée en guerre aux côtés de la France, l’Italie avait négocié en 1915 des extensions territoriales aux dépens de l’Autriche-Hongrie. Elle réclamait plusieurs territoires autrichiens où on parlait ita-lien, en particulier l’Istrie (région de Trieste) et le Trentin, dans les Alpes.Elle réclamait également la Dalmatie. Bien, que dans le camp des vain-queurs, les traités de paix lui refusent la Dalmatie, et ne lui donnent que l’Istrie et une partie du Trentin sans la ville de Fiume (aujourd’hui Rijeka en Croatie). Celle-ci est en effet placée sous mandat de la S.D.N. L’Italie exprime vivement sa frustration d’avoir ainsi été trompée. La victoire est amère pour les Italiens qui ont payé leur engagement au prix de 600 000 tués et près de 800 000 blessés. Les soldats démobilisés se considèrent alors comme trahis par la France et la Grande-Bretagne. C’est le thème de la « victoire mutilée » qui va se répandre dans tous les familles ita-liennes qui ont sacrifié l’un des leurs dans ce conflit. Cette amertume va se transformer en colère et sera exploitée par des groupuscules poli-tiques extrémistes.

En 1920, le gouvernement est vivement critiqué par des nationalistes quil’accusent de vouloir abandonner Fiume. À la tête d’une légion de volon-taires, l’écrivain Gabriele d’Annunzio occupe la ville en septembre 1919. Il doit cependant l’évacuer à la suite du traité de Rapallo signé par les gouvernements italien et yougoslave en novembre 1920. Ces nationa-listes vont alors considérer que le pouvoir politique légal est devenu l’al-lié des ennemis de l’Italie. Il doit être éliminé.

La sortie de la Première guerre mondiale se traduit pour l’Italie par une très grave crise économique et sociale. De grandes grèves insurrection-nelles se déclarent dans les usines du Nord industriel avec occupation d’usines par les ouvriers, et dans le sud agricole, les paysans occupent les terres des grands propriétaires. Le Président du Conseil Giolitti, per-suadé que cette agitation montrera à la gauche son impuissance, laisse faire. Mais l’inaction de l’État inquiète les classes possédantes qui crai-gnent une révolution bolchevique sur le modèle russe. Le fascisme nais-

A

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Page 23: Les totalitarismes

23Séquence 6 – HG11

sant va exploiter cette aspiration à l’ordre de la bourgeoisie et de l’aris-tocratie italienne. Les anciens combattants extrémistes vont être enrôlésdans des milices aux ordres des propriétaires des usines et des terresoccupées.

Les terres irrédentes* italiennes et les crises sociales de l’après-guerre

2. L’idéologie fasciste

Le mouvement fasciste est créé en 1919 par Benito Mussolini. Anciensocialiste, partisan de l’entrée en guerre de l’Italie en 1915, il est déçu par « la victoire mutilée ». À la tête de son journal, Il popolo d’Italia (« Le

Document 11

I s t r i e

D a l m a t i e

Fiume

Rome

Naples

Palerme

Gênes

Milan VeniseBergame

Turin

Nice

M e r

T y r r h é n i e n n e

M

er A

dr i a t i q u e

Frontières en 1920

Frontières en 1915

Terres irrédentes

Régions annexée par l’Italieen 1919 et 1920

Occupation des terres

Grandes grèves ouvrièresde l’été 1920

* Les terres irrédentes sont des territoires de langue italienne que l’État italien veut annexer.

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Page 24: Les totalitarismes

24 Séquence 6 – HG11

peuple d’Italie »), il va développer rapidement une nouvelle théorie du pouvoir en partie inspirée des idées du philosophe français Georges Sorel et de Friedrich Nietzsche. Mussolini se veut avant tout comme un homme d’action.

Dans le fascisme on trouve donc un certain nombre d’idées politiques plus ou moins nouvelles :

▶ une fascination pour la guerre, le sang versé donnera naissance àla nouvelle Italie.

▶ un rejet total de la démocratie libérale. Pour Mussolini la démocra-tie est mauvaise, c’est un régime faible car elle amène les Italiens à se diviser dans des luttes politiques stériles.

▶ le régime de la nouvelle Italie devra être une dictature où le chef, leDuce, décidera seul de l’intérêt de tous les Italiens.

▶ enfin, l’État doit prendre en charge l’encadrement de chaque Ita-lien dans des associations et des corporations qui, de la naissanceà la mort, lui diront le rôle qu’il doit tenir au sein de la société.

Les conceptions politiques de Mussolini s’expriment notamment dans la devise du fascisme – « Croire, obéir, combattre » ou dans le slogan, omni-présent dans toute l’histoire du régime, « Il Duce a sempre ragione » – le Duce (c’est-à-dire Mussolini) a toujours raison.

Le fascisme italien va devenir le modèle pour tous les régimes poli-tiques reposant sur le totalitarisme, l’autoritarisme, le nationalisme et le racisme et l’utilisation de la force armée à l’encontre des voisins. Bien après sa propre disparition, le fascisme italien sert encore aujourd’hui de modèle à de nombreux régimes identiques de par le monde.

Le refus de la démocratie

« Le fascisme nie que le nombre, par le fait d’être le nombre, puisse diri-

ger les sociétés humaines. Il nie que ce nombre puisse gouverner grâce

à une consultation périodique. Il affirme l’inégalité ineffaçable, féconde,

bienfaisante des hommes qu’il n’est pas possible de niveler grâce à un

fait mécanique et extérieur comme le suffrage universel. On peut défi-

nir les régimes démocratiques comme ceux qui donnent au peuple, de

temps en temps, l’illusion de la souveraineté.

Le fascisme repousse dans la démocratie l’absurde mensonge conven-

tionnel de l’égalité politique, l’habitude de l’irresponsabilité collective,

le mythe du bonheur et du progrès infinis. Mais si la démocratie peut

être comprise différemment, si elle signifie ne pas refouler le peuple en

marge de l’État, le fascisme a pu être défini par celui qui écrit ces lignes

comme une « démocratie organisée, centralisée, autoritaire ».

Benito Mussolini, La doctrine du fascisme, Milan, 1932.

� Que veut dire Mussolini lorsqu’il écrit « Le fascisme nie que le nombre,

Document 12

Questions

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Page 25: Les totalitarismes

25Séquence 6 – HG11

par le fait d’être le nombre, puisse diriger les sociétés humaines » ? Àquelle « consultation périodique » fait-il référence ?

� Quelle est sa conception de la démocratie ?

� Mussolini et le fascisme rejettent par principe le suffrage universel etles élections qu’il implique. Pour Mussolini, le fait d’être la masse nedonne pas le droit ni la compétence au peuple de diriger. Sans doute peut-on voir dans ces conceptions l’idée, traditionnelle et réaction-naire, que le pouvoir ne peut être confié à une masse confuse compo-sée d’individus ignorants.

� Mussolini rejette viscéralement la démocratie. Un des grands défautsde la démocratie évoqué ici est qu’elle n’est en fait qu’une illusion. Elle prétend donner le pouvoir au peuple en le laissant voter (la premièreélection au suffrage universel en Italie a eu lieu en 1913) mais en fait,il s’agit, d’après Mussolini d’une caricature de pouvoir. On trouve icil’idée implicite que ce sont toujours les mêmes classes dirigeantes qui conservent le pouvoir. Sans doute peut-on voir dans cet argument une résurgence des anciens argumentaires socialistes du Mussolinid’avant 1914. À l’inverse, le fascisme, parce qu’il propose au peuple, à tout le peuple de s’unir dans la construction de l’État fasciste, est la« vraie démocratie ». En 1932, Mussolini est au pouvoir. Il omet dansson texte de préciser que les composantes « déviantes » du peuple,en l’espèce les forces de gauche, avaient au préalable été éliminées.

3. Les fascistes à la conquête du pouvoir

Le parti fasciste est l’instrument à partir duquel Mussolini va se lancer àla conquête du pouvoir. À l’origine du fascisme, on trouve les faisceaux

(fasci) qui sont de simples associations de jeunes anciens combattants.L’esprit ancien combattant est fondamental dans l’apparition du mouve-

ment aussi bien à travers sa fascination pour la guerre et la valeur libéra-toire de la violence, que dans le choix de la chemise noire comme vête-ment distinctif. La chemise noire était en fait la chemise portée par les troupes d’élite de l’armée italienne, les arditi, mais le terme de chemises

noires va rapidement désigner les fascistes eux-mêmes.

Les débuts du fascisme sont extrêmement modestes. La réunion consti-tutive du mouvement, à Milan, au printemps 1919, ne rassemble que 56personnes et Mussolini n’obtient que 5 000 voix aux élections législa-tives (contre 170 000 pour le candidat socialiste).

Les difficultés provoquées par le retour des soldats et la crise socialedes années 1919-1920, permettent aux faisceaux de recruter de nou-veaux membres parmi les chômeurs, les ouvriers, la petite bourgeoisiedes commerçants…

Réponses

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Page 26: Les totalitarismes

26 Séquence 6 – HG11

Les fascistes reçoivent également l’appui de la grande bourgeoisie qui craint le danger rouge et la révolution. Mussolini organise ses faisceaux en milices qui deviennent les faisceaux de combat. Les faisceaux font régner la terreur dans toute l’Italie, attaquant les militants de gauche, les ouvriers, allant jusqu’au meurtre. En août 1922, les fascistes cassent la grève générale lancée par la gauche en attaquant les ouvriers grévistes.

La marche sur Rome (28 octobre 1922)

© akg images.

On peut distinguer au premier rang les principaux chefs fascistes :de gauche à droite Michele Bianchi, Italo Balbo, Benito Mussolini (au centre, en costume civil), Cesare Maria de Vecchi, Emilio de Bono. À l’ar-rière-plan, on voit les chemise noires formant la troupe fasciste.

Le 28 octobre 1922, Mussolini organise la marche sur Rome. Les fas-cistes se mettent en route pour se rendre à Rome où réside le gouverne-ment. Prenant peur, alors qu’il aurait sans doute pu utiliser la police ou l’armée pour disperser les bandes fascistes, le roi Victor-Emmanuel III appelle Mussolini au poste de Président du Conseil le 30 octobre 1922. La prise du pouvoir a donc été rapide et facile pour Mussolini dans un pays en pleine crise.

Document 13

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Page 27: Les totalitarismes

27Séquence 6 – HG11

L’Italie de Mussolini

1. Les fascistes au pouvoir

À la différence de ce qui va se passer en Allemagne en 1933 avec les nazis, la dictature fasciste s’installe progressivement à travers un dur-cissement graduel à l’égard de l’opposition. Tout en exerçant un large contrôle sur la presse et la vie politique, Mussolini tolère une relative opposition. Le premier tournant totalitaire du régime se situe effective-ment en 1924.

En avril 1924, par la violence, notamment des actions « punitives » dansles quartiers ouvriers des grandes villes du nord, et divers trucages dontune loi électorale particulièrement avantageuses pour eux, les fascistes réussissent à obtenir 65 % des voix aux élections législatives. Le 10 juin

1924, le député socialiste Giacomo Matteotti le leader le plus impor-tant de l’opposition, qui avait dénoncé les crimes fascistes et la fraude électorale est assassiné par des fascistes. L’énormité du crime amène une partie des élites libérales, politiques et industrielles à s’éloigner du fascisme. Mais l’incapacité de l’opposition à s’unir et le refus du roiVictor-Emmanuel III de congédier Mussolini permettent aux fascistes de retourner la situation en leur faveur à l’été 1924. Même s’il n’est pas certain que Mussolini ait directement commandité le meurtre, il l’utilisepour rompre définitivement avec la démocratie libérale.

2. Vers un régime totalitaire

En 1925-1926, Mussolini fait voter les lois fascistissimes qui aboutisse-

ment à la mise en place d’une dictature totalitaire :

▶ le Duce a le pouvoir exécutif et législatif (il fait la loi et l’exécute) ;

▶ les partis sont tous interdits sauf le P.N.F. (parti national fasciste) ;

▶ les syndicats sont également interdits ;

▶ les députés et responsables politiques de gauche sont déportésdans des camps aux îles Lipari ;

▶ la presse et la radio sont soumises à une censure totale et se limi-tent désormais pour l’essentiel à chanter les louanges du Duce.

Dès 1926, le régime crée une police politique, l’O.V.R.A. (l’ « Organizza-zione di Vigilanza e Repressione dell’Antifascismo » c’est-à-dire l’Orga-nisation de vigilance et de répression de l’antifascisme) qui traque les opposants aux quatre coins de l’Italie. Une fois arrêtés, ceux-ci sont déférés devant des tribunaux spéciaux qui condamnent à mort, ou au bagne.

Désormais, le parlement compte peu. Mussolini s’appuie sur le P.N.F. (3 millions de membres) et sa milice, les chemises noires. Le P.N.F. élit un

B

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Page 28: Les totalitarismes

28 Séquence 6 – HG11

Grand conseil fasciste qui est le véritable organe de gouvernement avec lequel Mussolini dirige le pays.

Néanmoins, le pouvoir de Mussolini ne fut jamais aussi total que celui d’Adolf Hitler. Les grands dignitaires du parti comme Michele Bianchi, Italo Balbo, Cesare Maria de Vecchi, Emilio de Bono…, conservèrent une assez large autonomie dans les régions qui étaient sous leur contrôle. Ainsi Italo Balbo à Ferrare ou Dino Grandi à Bologne. Et tout au long de la période, le grand historien et philosophe Benedetto Croce continua à écrire et à publier des textes condamnant le fascisme, chose inimagi-nable dans l’Allemagne d’Hitler. Si un intellectuel comme Croce fut pro-tégé, il le devait à sa renommée en Europe et par le fait que Mussolini ne le considérait pas comme réellement dangereux pour le régime. Même si les crimes fascistes furent sans commune mesure avec les horreurs commises par les nazis, la dictature fasciste a pratiqué des violences et des assassinats qui ont fait des milliers de victimes.

3. Une volonté esthétique de puissance

Benito Mussolini par le peintre futuriste Alfredo Ambrosi, 1930Document 14

© akg-images

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Page 29: Les totalitarismes

29Séquence 6 – HG11

Pour visualiser ce tableau en couleurs, vous pouvez aller sur votre moteur de recherches et, en mode images, écrire Alfredo Ambrosi. Choisissez plutôt une représentation dans des tonalités roses qui est la plus proche de l’original.

� Qu’est-ce que ce tableau représente ?

� La composition du tableau vous paraît-elle originale ?

� Quelles sont les idées que l’artiste cherche à susciter chez le specta-teur ?

� En quoi, selon vous, l’art peut-il être un puissant outil de propagande ?

� Le tableau peint par l’artiste futuriste Alfredo Ambrosi est un portraitstylisé de Benito Mussolini. On voit apparaître le visage du dictateur en surimpression, au-dessus de la ville de Rome où se mêlent bâti-ments anciens, on remarque notamment le Colisée en haut à droite, et formes géométriques plus récentes. Le choix de représenter le Colisées’explique sans doute par la volonté de l’artiste de faire de Mussolinile nouveau colosse du temps présent mais aussi de montrer que leDuce s’inscrit dans une histoire millénaire.

� La composition du tableau est particulièrement originale et tranche avec les portraits habituels. Nous sommes ici dans le cadre d’un artd’avant-garde qui s’affranchit des formes de représentation réaliste. Le visage de Mussolini est réduit à une forme modelée par quelqueslignes de force. On perçoit nettement que l’arcature des sourcils devient un casque de guerrier antique. Cette allusion au casque antique devient universel dans l’art occidental puisque les super-héros des « comics » américains sont contemporains de cette pein-ture. Le menton, volontaire, les sourcils froncés montrent le dyna-misme du dictateur. La nuque est devenue tellement raide qu’ellen’a plus rien d’humain, Mussolini est devenu une statue entrée dansl’histoire, à la suite des empereurs qui ont fait de Rome la capitale de l’univers antique. L’espace urbain, au deuxième plan se réduit à quelques monuments et à des formes géométriques. Rome n’est plus le sujet mais l’objet de la volonté mussolinienne.

� L’artiste veut faire naître chez le spectateur l’idée que le fascisme est synonyme de force, de dynamisme, de modernité. Le dictateur pré-tend ressusciter la grandeur du monde ancien, la « Rome éternelle ».Mussolini a marché sur Rome en 1922, il s’est emparé de la capitaleitalienne et entend lui imprimer sa marque en la remodelant. Il entendfaire de Rome un projet digne de ses ambitions en rasant des quar-tiers anciens, des bâtiments antiques, des édifices religieux, pour l’aérer et la moderniser.

Questions

Réponses

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30 Séquence 6 – HG11

L’ancien monde est en même temps dominé par la force du titan Mus-solini qui mène l’Italie vers un nouvel avenir. Cette renaissance de l’Italie surgira d’un chaos digne de la création du monde dans la Bibleéclairé par des traits lumineux dans le fond de nuées menaçantes que la lumière du visage repousse.

� Le fascisme italien partage ce point commun avec le communisme qu’il a su utiliser les avant-gardes artistiques pour célébrer sa puis-sance – le futurisme en Italie, le constructivisme en URSS ou bien encore la poésie de Maïakovski. Le nazisme à l’inverse est en rup-ture totale avec la modernité artistique de son temps, allant jusqu’à détruire des centaines d’œuvre jugées comme décadente.En Italie, le compagnonnage entre le courant futuriste et le fascisme est permanent. En adhérant aux formes de la modernité picturale, le fascisme met en exergue sa volonté de rompre avec le passé et sa fascination pour la technique, la vitesse.

Un exemple d’architecture fasciste :

le palais de la civilisation à Rome

Rome aurait dû abriter l’exposition universelle de 1942, mais la seconde guerre mondiale a annulé l’événement qui devait montrer au monde l’em-preinte de Mussolini sur la ville nouvelle. Il reste de l’époque fasciste des constructions de bâtiments prestigieux comme le palais de la civilisa-tion italienne à Rome. Ce type d’architecture relève d’une modernité qui

/ g

Document 15

© Clément Guillaume /Bridgeman Giraudon.

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31Séquence 6 – HG11

s’oppose aux constructions de l’époque en Europe et présente des lignessobres tout en assurant la fonctionnalité des lieux à ses occupants.

4. La mise au pas de la société italienne

Nous venons de voir que tout en prétendant rendre à l’Italie la gloirede l’époque romaine – thème omniprésent de la propagande mussoli-nienne – le fascisme se veut moderne. En écho au mouvement futuriste,il professe donc une véritable fascination pour la technique.

Il cherche également à encadrer les Italiens dans diverses organisations

qui permettent au Duce de tout contrôler :

Les enfants sont intégrés à des groupes où on les réunit par sexe et par âge. Les plus jeunes garçons (de 5 à 8-9 ans environ) se trouvent dansles « fils de la louve ». Les adolescents de 8 à 14 ans se trouvent dansles Balillas où ils reçoivent un uniforme et commencent à s’entraîner au maniement des armes. Ils sont ensuite avanguardisti (de 14 à 18 ans)avant d’intégrer les Jeunesses fascistes. Les jeunes filles sont égalementintégrées dans ce type d’organisations.

Le nombre des membres du parti fasciste augmente, atteignant rapi-

dement le nombre de 3 millions de membres. Cette augmentation s’ex-plique notamment par le fait que pour exercer une fonction quelconquedans l’administration, il faut avoir sa carte du parti et prêter sermentau Duce. Adhérer au Parti national fasciste, c’est également être sûr d’échapper au chômage et c’est encore bénéficier de loisirs dont notam-ment ceux offerts par le sport.

Dans les années 1930, l’Italie devient une des reines des compétitions

sportives, championne dans le vélo mais aussi et surtout le football

avec la squadra azzura (l’équipe bleue) qui remporte la coupe du mondeen 1934 et 1938. À travers le sport, les Italiens exorcisent un complexe d’infériorité séculaire et le fascisme fait de ces victoires qu’il a organi-sées un des éléments fondamentaux de sa propagande. Le sport joue

ainsi un rôle central dans la glorification du régime et le contrôle des

masses aussi bien dans l’Italie fasciste que dans le nazisme ou en URSS.

Les corporations (où les travailleurs, l’ouvrier comme le patron sont réu-

nis par métier) remplacent les syndicats en fonction de rr la charte du tra-

vail, instituée en 1927. Il s’agit pour les fascistes de mettre fin à la lutte

des classes qui jusqu’ici divisait la société et était susceptible d’affaiblir la nation.

Dans le but d’obtenir le ralliement de l’opinion catholique, Mussolini, qui personnellement est athée, signe les accords du Latran en 1929 avecle pape Pie XI. Ces accords mettent fin au conflit qui opposait le pape etl’état italien depuis 1870 à propos du statut du Vatican. Celui-ci devient un état de plein droit au cœur de la capitale italienne. Par ailleurs, ils fontdu catholicisme la religion officielle de l’Italie.

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32 Séquence 6 – HG11

5. Un programme de modernisation

Menant une politique d’autarcie, Mussolini veut permettre à l’Italie de sesuffire à elle-même en matière économique. L’État lance de grands tra-vaux : autoroutes, barrages. L’Italie va rompre avec une culture de l’inef-ficacité et pour les contemporains, Mussolini est l’homme qui fait arriver les trains italiens à l’heure…

La bataille du blé, lancée par Mussolini dès 1925, a pour ambition d’aug-menter la production italienne de céréales afin que le pays soit capable de se suffire à lui-même. De grands projets d’assèchement des zonesmarécageuses sont lancés afin de gagner de nouvelles terres agricoles et de faire reculer la malaria qui tue encore des milliers d’Italiens chaque année. La propagande du régime met ainsi en scène l’assèchement des

Marais pontins, réalisé entre 1928 et 1932.

L’État mène aussi une politique nataliste. Il multiplie les mesures incita-tives pour pousser les Italiens à faire des enfants. Il interdit par ailleurs l’immigration. Les migrations intérieures, notamment du sud de l’Italie,rural et sous-industrialisé, vers le nord et en particulier vers le Piémont (région de Turin) et la Lombardie (région de Milan) prennent alors de l’importance. Dans le même temps, la population active agricole décroîtau profit de l’industrie et la scolarisation des petits Italiens croît notable-ment au cours de la période.

6. Une politique nationaliste et agressive

Fasciné par la guerre et adepte du passé, Mussolini veut redonner son prestige à l’Italie. Pour cela, il revendique à la France des territoires dont il juge légitime le retour à l’Italie comme la Corse, Nice et la Savoie. Dans le même temps, voulant agrandir son empire colonial, l’Italie se lance dans la conquête de l’Ethiopie en 1935-1936. Cette conquête va se faire au prix de multiples crimes de guerre avec l’usage d’armes chimiques, la liquidation de populations civiles. Face à l’agression italienne, la S.D.N.,poussée par la France et la Grande-Bretagne, se contente de prendre des sanctions économiques contre l’Italie. Celles-ci ont pour effet majeur d’amener Mussolini à se rapprocher d’Hitler.

En 1936, il signe le pacte antikomintern créant ainsi l’axe Rome-Berlin. L’intervention des « volontaires italiens » dans la guerre d’Espagne aux côtés des franquistes et de la « légion Condor » (voir la séquence 4 « La guerre au XXe siècle ») marque le basculement définitif de l’Italie fasciste dans le camp hitlérien.

Cette alliance, critiquée par de nombreux Italiens et même de nombreux fascistes dont Dino Grandi favorable à une alliance anglaise, est d’autant plus surprenante que Mussolini se méfia d’abord d’Hitler. Dans l’espoir d’empêcher l’Anschluss, il s’était d’abord proclamé protecteur de l’Au-triche. Ce revirement en faveur de l’Allemagne nazie ne fit cependant

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33Séquence 6 – HG11

jamais l’unanimité dans la population italienne en dépit de la popularitéréelle du régime dans les années 1935-1936.

En 1938, les armées fascistes occupent l’Albanie et en 1939, Mussolini signe un pacte d’amitié et d’alliance avec l’Allemagne (le pacte d’acier). rr

Pourtant, en 1939, Mussolini hésite encore à se lancer dans un conflitgénéralisé avec les démocraties. C’est certain de la défaite française que Mussolini se lance dans la guerre en attaquant les fortifications fran-çaises des Alpes en juin 1940.

Le fascisme dans la guerre

1. Un alignement progressif sur le nazisme

La politique étrangère agressive de Mussolini à partir de 1935 l’amèneà se rapprocher dès 1936 de l’Allemagne nazie. Cette décision se traduitégalement par l’apparition en Italie de toute une législation raciale, et enparticulier antisémite à partir de 1938.

En juillet 1938, le Minculpop (Ministerio della cultura populare, c’est-à-dire le Ministère de la Culture populaire), publie un manifeste de défensede la race. Alors qu’en 1932, Mussolini déclarait à Emil Ludwig, « L’anti-

sémitisme n’existe pas en Italie. Comme citoyens les juifs italiens se sont

toujours bien comportés, comme soldats, ils se sont battus avec cou-

rage », dans un article du Popolo d’Italia du 24 décembre 1936, il écrit « L’antisémitisme est inévitable, là où le sémitisme exagère en se mon-

trant, en devenant envahissant (…), Trop de juif fait naître l’anti-juif ».

Dès 1937, des lois avaient interdit les relations sexuelles entre Italiens et populations indigènes de l’Ethiopie récemment conquise. Les loisantisémites de 1938 mettent en avant l’idée que les Italiens sont de race aryenne pure, que les juifs n’en font pas partie. Les juifs étrangersdoivent quitter le territoire italien et les juifs italiens sont contraints de se déclarer auprès des autorités. Ceux qui ont acquis la nationalité ita-lienne après 1918 en sont déchus. Les juifs se voient interdire le droit de faire leur service militaire et sont exclus du professorat, de l’adminis-tration, des professions juridiques, du journalisme, de la banques, del’assurance. Sur le modèle allemand, l’économie italienne est « aryani-sée », les juifs italiens possédant des biens immobiliers importants oudes entreprises sont ainsi spoliés par l’État italien.

2. La chute de Mussolini

Dès le début de son engagement dans la guerre, l’armée italienne montre ses limites. En 1940, l’Italie obtient d’occuper quelques portions du terri-toire français frontalier. En 1942, elle occupe Nice et la Corse. Mais Mus-

C

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34 Séquence 6 – HG11

solini, désireux d’imiter Hitler s’engage dans une guerre aventureuse contre la Grèce en 1940. L’incapacité de l’armée italienne de vaincre les grecs, pourtant inférieurs en nombre et en armement, va contraindre Hit-ler à voler au secours de son allié au printemps 1941. Les défaites ita-liennes vont se succéder au cours du conflit, en Afrique, avec la perte de l’Ethiopie et de la Somalie, et en Libye, obligeant à nouveau l’Allemagne à y envoyer ses meilleures troupes. À partir de la fin de l’année 1942, les bombardements des villes italiennes deviennent réguliers.

Après le débarquement des Anglo-Américains en juillet 1943, (voir la séquence 4 « La guerre au XXe siècle », partie 2), Mussolini est désavouépar le Grand Conseil fasciste, puis arrêté sur l’ordre du roi. La présidence du gouvernement est confiée au maréchal Badoglio qui signe, le 3 sep-tembre 1943 un armistice avec les Anglo-Américains. Basculant dans le camp adverse, l’Italie est aussitôt envahie par la Wehrmacht. Dans le même temps, le 12 septembre 1943, un groupe de parachutistes alle-mands parvient à libérer Mussolini de sa prison, dans les Abruzzes.

La libération de Mussolini par une unité parachutiste allemande

© akg-images/Ullstein Bild.

Cette opération de commandos libère un homme affaibli, habillé en civil et qui désormais, disparaît dans une masse d’uniformes allemands. Il est désormais bien loin le temps du tribun en uniforme qui haranguait les foules.

L’Italie devient alors le théâtre de très dures batailles entre les Alliés et les Allemands. Les italiens se déchirent dans une véritable guerre civile

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© akg images/Ullstein Bild

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35Séquence 6 – HG11

entre fascistes restés fidèles à Mussolini et partisans royalistes et sur-tout forces de gauche dominées par le Parti communiste italien.

Sous la tutelle hitlérienne, Mussolini va alors fonder un nouvel état fas-ciste sous contrôle allemand dont la capitale se trouve dans la petite ville de Salò, près du lac de Garde, à la frontière avec la Suisse.

3. La république de Salò (1943-1945)

La république de Salò, ou république « sociale » italienne selon son nomofficiel, est en fait une marionnette entièrement manipulée par les nazis.Son autorité, toute relative, ne s’étend que sur le nord de l’Italie. Avec cette république, Mussolini rompt avec la monarchie italienne, romptavec Rome, avec les chefs du Grand conseil fasciste qui l’ont trahi. Il veutrevenir à un fascisme originel. Et reprend la devise d’origine du mou-vement « no me frego », je m’en fiche. C’est pourtant au cours de cettepériode que Mussolini ajoute à la liste déjà longue de ses crimes, la mise en place d’une politique de collaboration à l’extermination des juifs ita-liens conduite par les nazis. Le 16 octobre, les nazis envahissent Rome et procèdent à la rafle des juifs. Sur les 2 094 personnes déportées,seuls 105 reviendront des camps de la mort. Le 13 décembre 1943, uneordonnance de Mussolini prescrit aux juifs de se présenter aux autoritésafin d’être internés dans des camps de concentration. Tous les biens desjuifs sont confisqués par l’État fasciste. En Italie même, les nazis ins-tallent, à proximité de Trieste, un camp d’extermination muni d’un four crématoire. C’est la Risiera di San Sabba, surnommé le « petit Auschwitzitalien ». Au moins 20 000 juifs et résistants sont ainsi exécutés.

La république de Salo s’écroule en avril 1945 avec le reflux des forcesarmées nazies au Nord des Alpes. Mussolini tente de s’enfuir vers la Suisse mais il est reconnu par des résistants communistes dans lapetite ville de Dongo en dépit de l’uniforme allemand qu’il a revêtu. Il est fusillé avec sa maîtresse le 27 avril 1945 et seize derniers fidèles. Leursdépouilles, ramenées à Milan, sont pendues par les pieds place Loretto, et exhibées à la vindicte de la foule. Ainsi le fascisme et ses crimes nepourront s’achever en Italie par un procès public comme celui de Nurem-berg en Allemagne.

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3 L’Allemagne nazie

La République de Weimar : 1918 – 30 janvier 1933

1. La naissance de la République de Weimar

En Allemagne, la démocratie naît de la défaite de 1918. À la fin de la Première guerre mondiale, les alliés exigent l’abdication de l’empereur Guillaume II. Mais c’est la révolution qui éclate en Allemagne qui le contraint à abdiquer le 9 novembre 1918. Il s’enfuit alors aux Pays-Bas. Les généraux de l’état-major, Hindenburg et Ludendorff profitent de l’oc-casion pour rendre le pouvoir aux civils. Ainsi, ils vont rendre les civils responsables de la gestion de la défaite et du désastre auxquels ils ont conduit l’Allemagne (voir la séquence 4 « La guerre au XXe siècle », par-tie 1).

Une assemblée constituante (assemblée qui se réunit pour rédiger une constitution) se réunit donc à Weimar, la ville de Goethe, et proclame la république.

2. La république de Weimar confrontéeà la révolution spartakiste

Au début de l’année 1919, la toute nouvelle république doit faire face à l’insurrection spartakistes (ancien nom du parti communiste allemand), notamment à Berlin mais aussi en Bavière où une République des Conseils (l’équivalent des soviets russes) est créée en avril-mai 1919.

Pour rétablir l’ordre, le président socialiste Friedrich Ebert et son ministre Gustav Noske tous deux membres du SPD (parti social-démocrate alle-

mand) alors au pouvoir, font appel à l’armée et aux corps francs. Il s’agit de milices constituées de combattants démobilisés après l’armistice du 11 novembre 1918. Les hommes des corps francs sont souvent proches de l’armée et de l’extrême-droite mais on y trouve aussi quelques socia-listes. Ils multiplient les exécutions sommaires, tuant sous doute plu-sieurs de dizaines de milliers d’ouvriers. Ce sont également les corps francs qui assassinent le 15 janvier 1919, à Berlin, sur l’ordre direct du ministre socialiste Gustav Noske, les deux leaders du mouvement spar-takiste, Karl Liebknecht et Rosa Luxemburg. La jeune démocratie alle-

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37Séquence 6 – HG11

mande naît dans le sang des spartakistes et dans la compromission avec les forces de répression des corps francs habités par la volonté de revanche.

Spartakistes en armes à Berlin (janvier-avril 1919)

© IAM/akg/World History Archive.

Le KPD (parti communiste allemand) ne pardonnera jamais cette « tra-hison » des socialistes désormais désignés comme « socio-fascistes ».

Outre une situation sociale particulièrement tendue, la république doitégalement endosser la responsabilité de la défaite en signant le Diktat

du traité de Versailles. Cette paix, très dure à l’égard de l’Allemagne per-met à l’extrême-droite de lancer le thème du Coup de poignard dans le

dos. (Voir la séquence 4 « La Guerre au XXe siècle », chapitre 1)

3. De la crise des années 1920aux belles années de la république

Au début des années 1920, l’endettement de l’Allemagne engendre uneterrible inflation. Celle-ci atteint son maximum en 1923. Entre janvier et avril 1923, les prix augmentent de 1 000 %. L’Allemagne se trouve

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© IAM/akg/World History Archive

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38 Séquence 6 – HG11

confrontée à une situation d’hyperinflation, situation dans laquelle la monnaie ne vaut plus rien.

Ce n’est qu’en 1923 que le gouvernement parvient à stabiliser la situa-tion en créant une nouvelle monnaie, le Rentenmark. L’hyperinflation, qui fait suite à l’écroulement militaire de 1918, a durablement trauma-tisé le peuple allemand. Le souvenir de la terrible misère et de l’effon-drement des valeurs de stabilité et de prospérité qui en résulta, demeure encore jusqu’à nos jours dans la conscience nationale allemande.

Enfants devant des piles de marks.

© IAM/akg/World History Archive.

Le dollar que tient le garçon représente l’équivalent de tous les marks amassés dans les trois piles de billets.

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39Séquence 6 – HG11

Les débuts de la République de Weimar, dominés par les sociaux-démocrates et le zentrum, sont également marqués par de nombreusesréformes politiques, sociales.

4. Le rapprochement franco-allemand

Le gouvernement de coalition du leader de la droite Gustav Stresemann

obtient du gouvernement français l’évacuation de la Ruhr en 1924. r

Celle-ci avait été occupée par l’armée française sur l’ordre du prési-dent du Conseil Raymond Poincaré afin de contraindre, sans résultat du reste, le gouvernement allemand à continuer à payer les Réparations. Stresemann, qui est la grande figure politique allemande du milieu desannées 1920, est également favorable à un rapprochement franco-alle-mand. Il rencontre à de multiples reprises Aristide Briand (ministre des Affaires étrangères et président du Conseil français). En octobre 1925,

les accords de Locarno, notamment signés par Briand et Stresemann reconnaissent la validité des frontières occidentales héritées du traité de Versailles. L’Allemagne reconnaît le caractère français de l’Alsace – Lorraine, en contrepartie, la France abandonne ses projets de mainmisesur la Rhénanie.

En 1926, l’Allemagne entre à la S.D.N. avec l’appui de la France. Le 27 août 1928, Stresemann signe le Pacte Briand-Kellog, Frank Kellog étant le secrétaire d’État américain de l’époque, qui met la guerre hors-la-loi. Le 15 septembre 1929, Aristide Briand défend devant la S.D.N. le principe d’une fédération européenne avec le soutien du gouvernement allemand. Et en 1932 encore, c’est-à-dire après le déclenchement de la crise de 1929, le chancelier von Papen propose à la France une uniondouanière franco-allemande, union que le Président du Conseil Edouard Herriot refuse tant par méfiance personnelle qu’en raison de l’opposition absolue des Britanniques.

Cette première tentative de rapprochement entre nos deux pays n’eutpas de suite dans les années 1930. Sans doute reposait-elle trop sur lesrelations personnelles de deux hommes qui disparaissent de la scèneinternationale brutalement et au même moment, Stresemann (mort en1929) et de Briand (mort en 1932). Ce projet européen fut emporté par la crise de 1929 et surtout par l’arrivée d’Hitler au pouvoir, tout à sa soif de revanche.

5. La république de Weimaret l’agitation d’extrême droite

Hormis une courte période de rémission, autour de 1925, marquée par la stabilité politique et la croissance économique, la République deWeimar est sans cesse confrontée à une agitation d’extrême droite. Enmars 1920, la République doit faire face à la tentative de coup d’État de Wolfgang Kapp. Celui-ci marche sur Berlin avec 6 000 hommes, la Reich-

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40 Séquence 6 – HG11

wehr refuse d’arrêter les insurgés au prétexte que l’armée ne tire pas r

sur des soldats. Le gouvernement est contraint de s’enfuir à Stuttgart. Le putsch échoue grâce à la grève générale lancée par la gauche et les syndicats.

En 1922, le grand ministre socialiste Walther Rathenau est assassinédans sa voiture par des membres de l’organisation Consul, groupuscule d’extrême droite dont le futur grand écrivain, Ernst von Salomon, était membre.

En 1923, un groupuscule encore peu connu, le N.S.D.A.P. et son chef, Adolf Hitler, lancent à leur tour, une tentative de coup d’État en novembre 1923 avec la complicité d’Erich Ludendorff. C’est un échec lamentable mais Hitler va réussir à tirer parti de son procès et de sa condamnation à cinq ans de forteresse pour haute trahison. Il ne fera qu’une année de prison, mais il y écrira son livre programme, Mein

Kampf (f Mon combat(( ) lui procurant une notoriété nouvelle. Dans ce livre, t

Hiltler y exprime les quelques idées qui serviront de base à l’applica-

tion de son programme politique et militaire futur : sa croyance fonda-

mentale dans l’inégalité des races, son antisémitisme obsessionnel, sa

volonté de revanche militaire sur les français…

La théorie des races selon Hitler

« Un groupe mène la lutte avec franchise, audace, et conscience de sa

supériorité raciale. C’est le groupe des races de Seigneurs et de Guer-

riers. Elles affrontent la nature pour lui arracher nourriture et trésor du

sol. Mais elles savent aussi prendre le glaive en main, si l’on menace leur

liberté ou si les races inférieures refusent à leur descendance un espace

vital. De ces races, la plus grande de toute est la race allemande.

Une fraction restreinte mais puissante de la population mondiale a choisi

le parasitisme. Feignant intelligemment de s’assimiler, elle cherche à

s’établir parmi les peuples sédentaires, à priver ceux-ci du fruit de leur

travail, à prendre le pouvoir. L’espèce la plus dangereuse de cette race

est la juiverie. »

Adolf Hitler, Mein Kampf, 1925.ff

6. La fin de la république et l’arrivée des nazis au pouvoir

La crise de 1929 va engendrer le processus qui va conduire à la chutede la république. La crise économique a, en effet, des conséquences particulièrement dramatiques en Allemagne. Le retrait quasi immédiat des nombreux capitaux américains, dont l’économie allemande, sortie ruinée de la Première guerre mondiale, était extrêmement dépendante,provoque l’affaiblissement du secteur bancaire et des faillites en chaîne.

Le chômage explose en Allemagne dès la fin de 1929, dans des propor-tions infiniment supérieures à ce qui se passe en France ou en Grande-

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41Séquence 6 – HG11

Bretagne. En 1932, le pays connaît le chiffre ahurissant de 60 % de tra-vailleurs allemands au chômage ou au chômage partiel. Moins de dix ans après la crise de l’hyperinflation, l’économie allemande semble ànouveau s’écrouler.

Compte tenu de l’ampleur de la crise économique et sociale et leur inca-pacité à y faire face, les partis modérés de gauche et de droite perdentdes voix au profit des extrêmes. Les suffrages se reportent vers l’ex-trême-gauche (KPD) et surtout le parti nazi qui s’emploie à rassembler les différents courants de l’extrême droite anti-démocratique.

Le N.S.D.A.P. (parti national socialiste des travailleurs allemands),abrégé en parti nazi) gagne les élections législatives de juillet etnovembre 1932 avec environ 35 % des voix. Le parti communiste avec17 % de voix obtient 100 sièges de députés. Le président de la Répu-blique Hindenburg appelle Hitler au poste de chancelier le r 30 janvier

1933. Cette décision signifie la mort de la République de Weimar et ins-pire à Ludendorff, qui s’était éloigné des nazis et d’Hitler dès 1925, unelettre qu’il adresse à son ancien chef d’état-major Hindenburg :

« Et moi, je vous prédis solennellement que cet homme exécrable (Hitler)

entraînera notre nation vers des abîmes de déshonneur. Les générations

futures vous maudiront dans votre tombe pour ce que vous avez fait ».

Étude d’un ensemble documentaire

La progression électorale du N.S.D.A.P. aux élections législatives

Vote nazi et catégories socio-professionnelles en 1933

Document 20

Élections Élections

législativeslégislativesMai 1924Mai 1924

Décembre Décembre

19241924Mai 1928Mai 1928

SeptembreSeptembre

19301930

JuilletJuillet

19321932

NovembreNovembre

19321932

Résultats Résultats

en %en %6,6 3 2,6 18,3 37,4 33,1

Document 21

Catégories Catégories

socio-professionnellessocio-professionnelles

% des électeurs % des électeurs

nazisnazis

% dans la % dans la

populationpopulation

% des électeurs du parti nazi % des électeurs du parti nazi

selon l’âgeselon l’âge

OuvriersOuvriers 32,5 45,9 18-20 ans 2 %

EmployésEmployés 20,6 12,4 21-30 ans 40 %

IndépendantesIndépendantes 17,3 9,6 31- 40 ans 28 %

FonctionnairesFonctionnaires 6,5 4,8 41-50 ans 17 %

PaysansPaysans 12,5 20,7 51-60 ans 9 %

diversdivers 10,6 6,6 Plus de 60 ans 4 %

totaltotal 100% 100% 100%

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42 Séquence 6 – HG11

La misère ouvrière au début des années 1930

« La femme essayait de nous expliquer comment elle parvenait à tenir

son ménage composé de son mari, leurs cinq enfants et elle-même avec

l’allocation chômage de son mari. (…) Tout en parlant, elle préparait une

boisson qui devrait être du café.

(…) « Et comment nourrissez-vous sept personnes avec 8,20 marks par

semaine ? »

– « du pain et des pommes de terre, surtout du pain. Le jour où nous

recevons l’argent, nous achetons de la saucisse. L’homme doit avoir tout

de même une fois par semaine de la viande. En contrepartie, nous nous

serrons la ceinture les deux derniers jours de la semaine, surtout Max

(c’est-à-dire le père de famille).

Hubert Renfro Knickerbocker, Deutschland so oder so ?, Berlin, 1932.

Les moyens de conquérir le pouvoir

« La faculté d’assimilation de la grande masse n’est que très restreinte,

son entendement petit, par contre son manque de mémoire est grand.

Donc, toute propagande efficace doit se limiter à des points forts peu

nombreux et les faire valoir par des formules stéréotypées aussi long-

temps qu’il le faudra pour que le dernier des auditeurs soit à même de

saisir l’idée.

La grande masse d’un peuple ne se compose ni de professeurs, ni de

diplomates. Elle est peu accessible aux idées abstraites. Par contre, on

l’empoignera plus facilement dans le domaine des sentiments. Qui-

conque veut gagner la masse doit connaître la clef qui ouvre la porte de

son cœur. Ici, l’objectivité est de la faiblesse, la volonté est de la force. »

Adolf Hitler, Mein Kampf, 1925.ff

Une famille allemande au temps du nazisme

« Mes parents étaient d’une manière touchante « apolitiques » comme

tous les habitants d’Eichkamp (c’est un lotissement pavillonnaire de la

banlieue de Berlin) : au vrai, durant les douze années sous Hitler, je n’y

ai jamais rencontré un seul véritable nazi. Il n’y avait là que de braves

familles bourgeoises travailleuses, un peu limitées, un peu bornées,

des petits-bourgeois qui sentaient encore dans leur dos les affres de la

guerre et les angoisses du temps de l’inflation : maintenant, on voulait

« la paix ». On était venu s’installer à Eichkamp au début des années

1920 parce que c’était un nouvel îlot de verdure. Ici, il y avait encore des

pins dans le jardin. Le lac de Teufelsee n’était qu’à un quart d’heure, les

enfants pouvaient s’y baigner. On voulait cultiver soi-même ses légumes

dans son propre jardin, pendant le week-end on arrosait son gazon avec

satisfaction, ça sentait presque la campagne. À la même époque, en

ville, c’étaient les folles années 1920, on dansait le charleston (danse

Document 22

Document 23

Document 24

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Page 43: Les totalitarismes

43Séquence 6 – HG11

très rythmée venue des États-Unis) (…). Les journaux parlaient de com-

bats de rues dans le Wedding (quartier ouvrier du centre de Berlin, bas-

tion du K.P.D. sous la république de Weimar) et de barricades devant la

maison des Syndicats. C’était bien loin de nous, comme à des siècles de

distance, de détestables et incompréhensibles cas de désordre. À Eich-

kamp, j’ai appris très tôt qu’un bon Allemand est toujours apolitique. »

Horst Krüger, Un bon Allemand, © Actes Sud, 1988.

� Quelle est la situation de la classe ouvrière dans l’Allemagne du débutdes années 1930 ? Dans le document 26, que signifie la phrase « Touten parlant, elle préparait une boisson qui devrait être du café » ?

� Comment évoluent les résultats électoraux du parti nazi ? Commentexpliquez-vous ces variations ?

� Quelles sont les catégories qui votent en priorité pour le N.S.D.AP. ?Que pouvez-vous observer ?

� Quels sont, selon Hitler, les moyens de conquérir les masses ? Quepensez-vous de ces arguments ?

� Quelles sont les caractéristiques de la famille d’Horst Krüger ? En quoicelle-ci peut-elle être représentative de cette partie de la populationallemande qui accepta l’arrivée au pouvoir d’Hitler ?

� La situation de la classe ouvrière décrite par le journaliste améri-cain d’origine allemande Hubert Knickerbocker est particulièrementdure. Les ouvriers allemands souffrent alors cruellement de la faim.La boisson que prépare la mère de famille devant le journaliste, etqui devrait être du café, s’apparente sans doute à un vague bouillon teinté de café, car ce produit est désormais devenu un luxe pour detrès nombreuses familles allemandes. Le père de famille mange de la viande une fois par semaine mais en contrepartie, ses repas de fin desemaine se limitent sans doute à quelques rares morceaux de pain.

� Au début des années 1920, le parti nazi n’est guère qu’un groupus-cule. En 1924, il parvient à obtenir 6 % des voix, sans doute dansla foulée du procès de son chef après le putsch manqué de 1923.Il décroît ensuite régulièrement jusqu’à tomber à moins de 3 % en1928. L’année 1928, après les drames de la fin de la guerre et l’hy-

perinflation de 1923 apparaît comme une sorte d’apogée de la Répu-blique. Mais dès 1930, le N.S.D.A.P. passe à 18 %. La corrélation entreles succès électoraux des nazis et les effets de la crise de 1929, enparticulier l’explosion du chômage est particulièrement visible. Lacrise sociale économique et sociale allemande atteint son sommet en

Questions

Réponses

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Page 44: Les totalitarismes

44 Séquence 6 – HG11

1932, c’est également aux élections de juillet 1932 que le N.S.D.A.P. atteint son apogée électoral. De manière assez paradoxale, cette pro-gression irrésistible s’arrête à la fin de l’année 1932.

La reprise économique qui se fait sentir dans l’économie dès la fin 1932 et se confirme début 1933 - elle n’est donc pas imputable à la politique des nazis - peut laisser supposer que, par une curieuse iro-nie de l’histoire, si le Président de la République, Hindenburg, n’avait pas appelé Hitler au poste de chancelier en janvier 1933, l’influence des nazis aurait vraisemblablement décru dans la deuxième moitié des années 1930. On ne peut, en effet retenir les résultats des élec-tions législatives de mars 1933 (43,9 % pour le N.S.D.A.P.) commesignificatifs puisque, déjà à ce moment, la plupart des partis d’oppo-sition dont le K.P.D. ont été interdits et la dictature nazie a étendu sa main mise sur le pays.

� Outre les chômeurs, qui représentaient plus de 30 % de son électorat dès 1930, le parti nazi est essentiellement un parti qui recrute chez les jeunes adultes et dans des milieux populaires. Contrairement à une vision préconçue qui voudrait que ces milieux votent systémati-quement à gauche, les ouvriers constituent le groupe le plus impor-tant parmi les électeurs du N.S.D.A.P., suivis par les employés. Ces catégories populaires ont été les premières victimes de la crise et se sont, pour cette raison largement détournées des partis traditionnelsde droite ou de gauche. À l’inverse, des catégories souvent perçues comme conservatrices, comme les paysans ou les personnes âgées votent peu pour les nazis, préférant en général porter leurs suffrages sur les partis traditionnels, souvent plus ou moins monarchistes.

� Après l’échec du coup d’État de 1923, Hitler se résout à conquérir le pouvoir par des voies légales. Dès 1924, il explique dans Mein Kampf ce qui seront pour lui les éléments d’une propagande réussie. Il consi-dère que les masses populaires sont composées d’individus bornés. Nul besoin de tenter de les convaincre par de grands discours abs-traits. Les masses sont selon lui parfaitement opaques aux grandes démonstrations rationnelles. Les masses sont au contraire fondamen-talement irrationnelles et ce qu’il faut toucher, ce n’est pas leur esprit mais leur cœur, l’émotion. Il faut trouver quelques idées simples, sans cesse répétées jusqu’à ce qu’elles pénètrent tous les cerveaux.

� Dans un livre intitulé Un bon Allemand, l’écrivain allemand Horst Krüger revient sur sa jeunesse, dans un lotissement pavillonnaire de la banlieue de Berlin. Dans cette banlieue résidentielle, peupléede petits bourgeois à l’honnête aisance, Krüger nous précise qu’il « n’y a jamais rencontré un seul véritable nazi ». Cette affirmation est i

rigoureusement exacte au sens où, à Eichkamp, il n’y eut sans doute jamais de S.A. et d’activistes nazis. Dans ce quartier tranquille, on se définissait comme « apolitique ». Avec une ironie mordante, Horst Krüger se rappelle de ces familles, de sa famille elle-même, « braves

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45Séquence 6 – HG11

familles bourgeoises travailleuses, un peu limitées, un peu bornées,

des petits-bourgeois ». Traumatisés par la guerre et l’époque de l’hy-perinflation, les petits bourgeois d’Eichkamp n’aspiraient plus qu’à une chose, qu’on les laisse s’occuper tranquillement de leurs fleurs,de leur potager, de leur gazon… Les bruits du monde extérieur, ces faubourgs ouvriers où nazis et militants communistes se battaientpresque quotidiennement leur semblaient d’une incroyable vulga-rité. Ils n’aspiraient qu’à un désir d’ordre, un ordre qui garantirait leur sécurité. Sans pour autant qu’ils n’aient jamais partagé ses idéesextrémistes, Hitler leur apparaissait dès lors comme un avenir pos-sible pour l’Allemagne.

L’Allemagne sous la botte nazie

1. Parti et idéologie nazis

Le parti ouvrier allemand fut créé, en janvier 1919, par Anton Drexler, un ouvrier serrurier.

En septembre 1919, Hitler y adhère ; il en devient le chef et en change lenom, lui donnant le nom du Parti national socialiste des travailleurs alle-mands (N.S.D.A.P.).Dès 1920, le parti nazi propose son premier pro-gramme électoral. C’est dans sa prison de Landsberg qu’Hitler rédige Mein Kampf, livre programme où il développe les principes essentiels du ff

nazisme. À tous les niveaux, l’idéologie nazie repose sur un antisémi-

tisme qui désigne les juifs comme les responsables de tous les maux de

la société allemande. Cet antisémitisme obsessionnel constitue la prin-cipale caractéristique du nazisme et un trait original par rapport aux autres totalitarismes.

Façades de magasins recouvertes d’inscriptions antisémites

destinées à dissuader les clients d’y faire des achats

Rapidement, le parti se dote d’une milice, les S.A. (Sec-tions d’assaut). En chemisesbrunes, les S.A., sous la hou-lette d’Ernst Röhm, chantentdes refrains tels que « quand le sang des juifs coulera sous nos couteaux », et font régner la terreur dans les rues des villes d’Allemagne. Ils attaquent, frappent, tuent les juifs, les militants ouvriers, les membres des partis de gauche…

B

Document 25

© Ullstein Bild/Roger-Viollet.© Ullstein Bild/Roger Viollet

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46 Séquence 6 – HG11

2. Une dictature implacable

Dès son arrivée au poste de chancelier, Hitler installe sa dictature. Dès février 1933, il dissout le Reichstag et le fait brûler le 28 février. Il accuse les communistes de l’incendie et interdit le KPD. Les libertés sont sup-primées ainsi que toute opposition politique. La presse et la radio sont soumises à la censure du ministre de la propagande, Joseph Goebbels.

Après avoir éliminé toute opposition des autres partis politiques, Hitler élimine l’opposition interne au parti nazi. C’est ainsi que lors de la nuit

des longs couteaux, le 30 juin 1934, il fait assassiner Röhm et 300 S.A. mais également des opposants politiques de droite comme le dernier chancelier de la république de Weimar, le général von Schleicher, le jour-naliste et écrivain Friz Gerlich ou encore l’homme politique conservateur Edgar Julius Jung…

Les S.A. perdent alors de leur importance et sont désormais subordon-nés aux S.S., dirigés par Heinrich Himmler. Sorte de garde personnelle dans laquelle Hitler a toute confiance, les S.S. prendront de plus en plusd’importance au cours du temps, devenant pendant la guerre une sorted’État dans l’État.

La répression est terrible et omniprésente. La police, également pla-cée sous les ordres d’Himmler, et la Gestapo, surveillent tout le pays.La moindre critique à l’égard du Führer mène tout droit en prison ou en camp. La délation est encouragée. Dans les organisations de jeunesse,on interroge les enfants pour savoir ce que leurs parents disent du régime.

Dachau, le premier camp de concentration, est ouvert dès mars 1933.Hitler y envoie tous les opposants au régime : militants communistes et socialistes, syndicalistes, des prêtres catholiques également. Les cri-minels y sont aussi internés et sont souvent utilisés par les nazis pour surveiller les prisonniers politiques. Le système concentrationnaire est placé sous l’administration d’Heinrich Himmler et des S.S.

Le règlement du camp de Dachau

Art. 11 Les délinquants suivants, considérés comme agitateurs, seront

pendus : quiconque fait de la politique, tient des réunions de

provocation, se rassemble avec les autres détenus ; quiconque

recueille des renseignements vrais ou faux, sur le camp de

concentration, les fait parvenir hors du camp.

Art 12 Les délinquants suivants, considérés comme mutins seront

abattus sur le champ : quiconque se sera livré à des voies de

fait sur la personne d’un garde ou d’un S.S., aura refusé d’obéir

ou de travailler en corvée, aura protesté ou tenu des discours

sur le lieu de travail.

Document 26

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Page 47: Les totalitarismes

47Séquence 6 – HG11

3. L’antisémitisme d’État

Les premières victimes du régime sont les juifs. En pourchassant les juifs, Hitler et ses complices prétendent préserver la pureté de la race

aryenne.

Les juifs sont rapidement exclus de la société allemande par le biais deslois de Nuremberg (1935). Elles interdisent notamment le mariage entrejuif et non-juifs. Elles sont rapidement complétées par divers textes dont les ordonnances antisémites du 12 novembre 1938. Les juifs sont exclus

des professions libérales (avocats, notaires, médecins), des professions

de l’enseignement, de l’armée, de la magistrature, du journalisme… Les

commerces, les entreprises tenues par des juifs sont aryanisés, c’est-à-dire confisqués par l’État nazi qui les revend à son profit ou les confie àdes fidèles du régime.

Pour les reconnaître, on leur impose bientôt le port de l’étoile jaune. Lesjuifs sont également victimes des violences des S.A. et des S.S. La nuit

de cristal, le 9-10 novembre 1938 est un gigantesque pogrom qui voit les bandes nazies s’attaquer aux quartiers juifs des villes d’Allemagne etd’Autriche. Des milliers d’appartements, de boutiques, des synagoguessont brûlés. Environ 100 juifs meurent au cours de cette nuit d’horreur, 25 000 sont déportés vers les camps de concentration de Dachau, de Buchenwald et Sachsenhausen…

Incendie d’une synagogue lors de la nuit de cristal

(9-10 novembre 1938)

Document 27

© Ullstein Bild/Roger-Viollet.©

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Page 48: Les totalitarismes

48 Séquence 6 – HG11

Le totalitarisme nazi

1. L’encadrement de la population

Le régime s’emploie à diffuser l’image du Führer dans tout le pays. La propagande est omniprésente y compris jusque dans l’espace privé. Le ministre de la propagande, Joseph Goebbels a l’idée de faire fabriquer par l’État des postes de radio à bon marché. Il s’agit de faire pénétrer Hit-ler dans les foyers. Comme le dit le slogan publicitaire du régime, « Toute l’Allemagne écoute le Führer grâce au récepteur populaire ».

Le régime cherche à encadrer et à fanatiser la population. C’est en parti-

culier la jeunesse qui est l’objet de toutes les attentions. Les jeunes gar-çons sont ainsi intégrés aux Hitlerjugend (jeunesses hitlériennes) où ilsreçoivent un entraînement sportif et militaire qui les préparent au service militaire et également des cours de propagande. On les encourage aussià dénoncer leurs parents si ceux-ci critiquent le Führer. L’adhésion aux Hitlerjugend devient obligatoire dès 1936 et l’organisation rassemble 8 millions de membres à la veille de la guerre.

Les programmes scolaires sont également repensés en fonction de l’idéologie nazie. Dès le plus jeune âge, les enfants doivent apprendre àaimer le Führer plus que leurs parents et être élevés dans les préceptesdu national-socialisme.

Un exemple de dictée dans l’Allemagne nazie

« Comme Jésus a délivré les hommes du péché et de l’enfer, ainsi Hitler

a sauvé le peuple allemand de la ruine. Jésus et Hitler furent persécutés,

mais tandis que Jésus fut crucifié, Hitler fut élevé au poste de chance-

lier. Tandis que les disciples de Jésus le reniaient et l’abandonnaient, les

seize camarades d’Hitler s’allièrent pour leur chef. Les apôtres achevè-

rent l’œuvre de leur maître. Nous souhaitons qu’Hitler puisse achever lui-

même son œuvre. Jésus travaillait pour le ciel, Hitler œuvre pour la terre

allemande. »

Hitler est ici comparé à Jésus et ses compagnons aux apôtres. Le parallèle peut paraître surprenant dans la mesure où Hitler était lui-même athée et les principes du nazisme, fondamentalement contraires à l’enseigne-ment chrétien, s’inspiraient en partie d’un néo-paganisme de pacotille. Néanmoins, les Allemands de cette époque sont encore massivement croyants et pétris de culture chrétienne. La référence religieuse est ici utilisée pour inculquer le principe d’une obéissance et d’un dévouement absolu à l’égard du Führer.

2. La culture sous contrôle

Le régime nazi s’emploie à établir un contrôle total sur la culture, tâche qui est confiée au ministère de la propagande. Joseph Goebbels interdit

C

Document 28

▶ Commentaire

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49Séquence 6 – HG11

et traque les « mauvais livres », notamment dans les bibliothèques. Leslivres écrits par des juifs, par des penseurs de gauche, des pacifistesvoire des hommes d’Eglise sont brûlés la nuit dans d’immenses feux,sur la place des grandes villes allemandes, c’est ce qu’on appelle lesautodafés.

Les œuvres d’art modernes, peintures et sculptures, notamment cellesde l’expressionnisme ou de l’art abstrait sont chassées des musées, vendues pour des sommes dérisoires ou tout simplement brûlées.

À l’inverse, des affiches, des films, des livres multiplient les imagesd’Hitler et propagent l’idéologie nationale-socialiste. Des livres d’enfant,des cartes postales répandent les thèmes antisémites. La culture durégime exalte l’homme nouveau qui doit émerger des temps nouveaux. Le nazisme s’emploie à diffuser un véritable culte du corps masculin dontla dimension homosexuelle implicite (alors que dans le même temps lerégime nazi faisait la chasse aux homosexuels et les internait dans des camps de concentration) a été clairement mise en exergue par l’historienaméricain d’origine allemande George Moss. Ce culte du corps s’exprime notamment par la valorisation par le régime du sport, et en particulier del’athlétisme. Les sculptures d’Arno Brecker, sculpteur officiel du régime,représentent des hommes aux épaules et aux muscles surdimensionnés.Les Jeux Olympiques de Berlin, en 1936, sont un moment privilégié decette exaltation de la force physique qu’on trouve au cœur de l’idéologienazie. Ce moment qui constitue un des sommets de l’œuvre de propa-gande du régime fut immortalisé par le film de la cinéaste Leni Riefens-thal, « Les dieux du stade ».

3. La préparation d’une nouvelle guerre

L’économie est également soumise à un contrôle étroit. Le régime nazicherche à développer les industries d’armement et à rendre possible l’autarcie économique.

Dès 1934, Hitler lance une politique de grands travaux, en particulier la construction d’autoroutes dans le but de faciliter les futurs mouvementsde troupes. Les industriels sont encouragés à développer la production de produits de substitution (les Erzats) tels le caoutchouc synthétiqueou l’essence de synthèse. La fabrication de ces produits coûteux vise exclusivement à rendre l’Allemagne capable de répondre aux besoins del’armée pour la guerre qui s’annonce.

En 1935, le service militaire est rétabli et en 1936 Hitler se sent assezfort pour commencer à briser une à une les clauses du traité de Versaillesen remilitarisant la Rhénanie. Un plan de réarmement est également lancé en 1936. Celui-ci s’applique à de multiples secteurs dont la sidé-rurgie, mais aussi l’aviation, les industries mécaniques, et notammentl’automobile. C’est en 1936 qu’est créée, à la demande du régime nazi, la première voiture populaire allemande, la Volkswagen. Conçue par l’in-

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Page 50: Les totalitarismes

50 Séquence 6 – HG11

génieur Ferdinand Porsche, la Volkswagen (la voiture du peuple en alle-mand) fut utilisée comme outil de propagande mais, en fait, lorsque la guerre éclata, seuls quelques exemplaires avaient été livrés.

Carnet d’épargne pour l’achat d’une Volkswagen en 1938

© akg-images.

En 1939, Hitler estime que l’Allemagne est maintenant prête à affronter

une autre guerre. Pour lui, cette guerre sera celle qui soldera le premier

conflit mondial. Il a encadré et fanatisé la population, mis toutes les

forces de l’État au service de son projet, préparé son armée, organisé

une industrie militaire qui va lui permettre d’abattre ses ennemis les

uns après les autres.

Document 28

© k i

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Page 51: Les totalitarismes

51Séquence 6 – HG11

Glossaire(Voir : ) renvoie à une autre définition dans le glossaire.

Les définitions en gras sont celles indispensables à connaître en vue del’épreuve au Baccalauréat

région montagneuse du sud de l’Italie.

mot allemand signifiant union, désigne la réunion de l’Autriche et de l’Al-lemagne.

haine des juifs.

nom donné à la « bourgeoisie rouge », c’est-à-dire aux privilégiésmembres du parti communiste.

nom donné à l’armée soviétique.

peuple indo-iranien qui occupe le nord de l’Inde vers 1800 av. J.-C. Les théoriciens nazis reprennent ce nom pour désigner les peuples euro-péens du Nord censés représenter la race supérieure.

système économique dans lequel un pays et sa population cherchent àvivre au maximum de leurs ressources propres en limitant le plus pos-sible leurs échanges commerciaux (importation et exportations) avecl’extérieur.

type de régime au pouvoir particulièrement autoritaire et anti-démocra-tique.

partisans de Lénine, ils constituent l’aile gauche de la social-démocratierusse. Le parti bolchevik prend le nom de Parti communiste en 1919.

AAbruzzes

Anschluss

Antisémitisme

Apparatchiks

Armée rouge

Aryens

Autarcie

Autocratie

BBolcheviks

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Page 52: Les totalitarismes

52 Séquence 6 – HG11

vaste camp où sont internées des personnes jugées hostiles ou indési-rables par un régime politique. Ils impliquent un traitement particuliè-rement dur des prisonniers généralement soumis à des mauvais traite-ments (coups, sous-alimentation) et au travail forcé.

contrôle de l’information par les autorités militaires ou civiles.

nom donné au chef du gouvernement en Allemagne et en Autriche.

décision de l’État soviétique de supprimer totalement la propriété indi-viduelle en la remplaçant par la propriété collective des terres agricoles.

rassemblement dans un même lieu de plusieurs industries complémen-

taires.

désigne un prétendu complot fabriqué de toute pièce en 1953. Plusieurs centaines de médecins, dont la plupart juifs, sont accusés par le régime stalinien d’avoir voulu empoisonner plusieurs cadres du régime commu-niste dont Staline lui-même. Après la mort du tyran, Béria déclare que ce complot n’a jamais existé et il fait libérer les prisonniers.

mouvement artistique et architectural russe et soviétique du début du XXe siècle.

milices constituées de combattants démobilisés après l’armistice du

11 novembre 1918 en Allemagne. Les hommes des corps francs sont

souvent proches de l’armée et de l’extrême-droite mais on y trouve aussi

quelques socialistes.

principal port de guerre de la marine russe de la Baltique.

politique entreprise par Khrouchtchev qui visait à mettre fin à certains des aspects les plus scandaleux de la dictature stalinienne, notamment le culte de la personnalité.

concept défini par Karl Marx. Premier stade vers la société sans classe, la dictature du prolétariat désigne le pouvoir de la classe ouvrière.

décision injuste imposée de manière arbitraire. C’est sous ce terme que l’immense majorité des Allemands désigne le traité de Versailles.

région charbonnière du sud-ouest de la Russie.

Camp de concentration

Censure

Chancelier

Collectivisation

Combinat

Complot des blouses blanches

Constructivisme

Corps francs

Cronstadt

DDéstalinisation

Dictature du prolétariat

Diktat

Donbass

C

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Page 53: Les totalitarismes

53Séquence 6 – HG11

politique économique qui vise à fixer à l’avance, dans le cadre de plan

de cinq ans (plans quinquennaux) les objectifs à atteindre par chaque

branche industrielle. En URSS, la planification était obligatoire. Dans

les pays occidentaux, en particulier la France et la Grande-Bretagne, qui

mirent une place la planification économique après la seconde guerre

mondiale, celle-ci était purement indicative.

produit de substitution artificiellement recréé par les industrieschimiques.

courant artistique essentiellement italien apparu au début du XXe siècle. Le premier Manifeste du Futurisme, signé du jeune poète Filippo Mari-netti est publié en 1909. Les poètes et peintres futuristes professent une fascination pour la civilisation industrielle, la vitesse, l’acier, les armes,la violence. La plupart d’entre eux se rallieront au fascisme.

(Geheime Staatspolizei), c’est-à-dire police secrète d’État, police poli-tique du régime nazi, intégrée aux S.S.

(transparence) politique de Gorbatchev qui vise à rendre transparente les affaires de l’État, c’est-à-dire concrètement, établir la liberté de lapresse, le multipartisme et les libertés démocratiques en U.R.S.S.

organisme d’État chargé de concevoir et d’appliquer les plans quinquen-naux.

système concentrationnaire soviétique. Il causa la mort de millions deSoviétiques par le travail forcé, la sous-alimentation, les mauvais traite-ments. Il se distingue cependant du système concentrationnaire nazi par l’absence de chambres à gaz et de fours crématoires.

EÉconomie planifiée

(ou planification)

Ersatz

FFuturisme

GGestapo

Glasnost

Gosplan

Goulag

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Page 54: Les totalitarismes

54 Séquence 6 – HG11

jeunesses hitlériennes, organisations paramilitaires destinées aux jeunes garçons de 15 à 18 ans. Leur adhésion est devenue obligatoire à partir de 1936.

inflation explosive échappant à tout contrôle. Dans cette situation que connut l’Allemagne en 1923, la monnaie perd toute valeur.

augmentation des prix.

industries qui fabriquent des produits destinés à la satisfaction des

besoins des populations, comme par exemple les industries textiles,

l’électro-ménager, l’électronique grand public…

successeur du MVD, nom des services secrets et de la police politique soviétique de 1954 à 1991.

successeur du parti spartakiste, il prend le nom de Parti communiste

allemand en 1919.

ferme coopérative où la terre et les moyens de production sont la pro-

priété des paysans membres de la ferme, les kolkhoziens.

région du sud-ouest de la Russie, limitrophe de la mer Noire. C’est la terredes cosaques, paysans éleveurs guerriers au service de la monarchie russe en guerre contre les Tatars.

paysan russe supposé riche.

voir Petrograd

HHitlerjugend

Hyperinflation

iInflation

Industries de biens de

consommation

KKGB

KPD

Kolkhoze

Kouban

Koulak

LLeningrad

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Page 55: Les totalitarismes

55Séquence 6 – HG11

aile modérée de la social-démocratie russe. Son principal leader estAlexandre Kerenski.

appropriation par l’État d’une entreprise, d’un bien privé. Les nationali-sations peuvent donner lieu à une indemnisation des anciens proprié-taires par l’État, ce qui ne fut pas le cas dans la Russie bolchévique.

nom donné à la police politique soviétique de 1934 à 1946.

c’est la classe constituée par les cadres du régime soviétique.

Nationalsozialistische deutsche Arbeiterpartei, c’est-à-dire Parti natio-

nal-socialiste des Travailleurs allemands, généralement abrégé en parti

nazi.

(restructuration), ce mot désigne l’ensemble des réformes économiqueset sociales lancées par Mikhaïl Gorbatchev.

aujourd’hui Saint-Petersbourg, deuxième ville de Russie. Avant dereprendre son premier nom, la ville a porté le nom de Leningrad pendantla période communiste.

voir définition de l’économie planifiée.

plan de développement économique fixé pour cinq ans.

massacre de populations juives. Les premiers grands pogroms de lapériode contemporaine ont été commis à la fin du XIXe siècle dans l’Em-pire des tsars.

désigne d’ordinaire la classe ouvrière.

action visant à répandre, à diffuser des idées dans le but d’endoctriner une population.

tentative de coup d’État militaire.

MMencheviks

NNationalisation

NKVD

Nomenklatura

N.S.D.A.P.

PPérestroïka

Petrograd

Planification

Plan quinquennal

Pogrom

Prolétariat

Propagande

Putsch

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Page 56: Les totalitarismes

56 Séquence 6 – HG11

voir définition Aryens

nom donné à la Chambre des députés sous le IIe Empire (1871-1918) et sous la République de Weimar.

armée allemande pendant la République de Weimar.

monnaie russe.

région industrielle de l’Ouest de l’Allemagne. Disposant des plus impor-tants gisements de charbon, la Ruhr fut pendant plus d’un siècle la pre-mière région industrielle d’Europe.

Sturmabteilung, c’est-à-dire sections d’assaut. C’est la milice du parti nazi.

Société des Nations, organisation internationale créée après la pre-mière guerre mondiale afin d’œuvrer en faveur du désarmement et de la paix. Elle siégeait à Genève. Alors que la S.D.N. était à l’origine une idéedu président américain Wilson, les États-Unis n’y participèrent pas cequi contribua fortement à affaiblir l’organisation. La montée des périlsdurant les années 1930 et l’éclatement de la seconde guerre mondiale sont autant d’échecs dont la S.D.N. ne se relève pas. Elle est dissoute en 1946 et remplacée par l’ONU.

nom donné, aux États-Unis, au ministre des Affaires étrangères.

ferme d’État où les paysans sont des salariés payés par l’État lui-même.

Les sovkhozes sont de très grande taille (plusieurs milliers d’hectares).

conseils d’ouvriers ou de paysans en Russie au moment des révolutions russes.

mouvement d’extrême gauche créé fin 1918, c’est l’origine du Parti com-

muniste allemand (K.P.D.)

(Sozialdemokratische Partei Deutschlands) : parti social-démocrate allemand, plus vieux parti d’Allemagne, c’est un parti de centre gauche,l’équivalent en France du parti socialiste.

Schutzstaffel ou section spéciale, à l’origine les SS sont conçus comme la garde personnelle d’Hitler. Dirigés par Himmler, les SS prennent deplus en plus d’importance pendant la guerre – ils dirigent le fonctionne-ment des camps de la mort par exemple – et se dotent d’unités militaires (les Waffen SS). Ils sont les principaux responsables de la Shoah.

RRace aryenne

Reichstag

Reichwehr

Rouble

Ruhr

SS.A.

S.D.N.

Secrétaire d’État

Sovkhoze

Soviets

Spartakiste

S.P.D.

S.S.

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Page 57: Les totalitarismes

57Séquence 6 – HG11

nom de la police politique soviétique en décembre 1917. Elle est dis-soute en 1922 pour céder la place à une organisation du même type, laguépéou.

type de dictature qui cherche à changer l’Homme en supprimant toute

différence entre vie publique et vie privée. Le totalitarisme tente de

contrôler les citoyens dans tous les aspects de leur vie. Pour cela, les

régimes totalitaires créent diverses structures (organisations de jeu-

nesse, syndicats, organisations de loisirs…) auxquelles les enfants, les

femmes et les hommes doivent adhérer. Ces structures servent de relais

à l’État qui inculque ainsi ses principes aux citoyens.

nom donné à l’armée régulière allemande pendant la période nazie.

parti confessionnel catholique centriste, créé en 1870, ce fut un des par-

tis politiques centraux de l’Allemagne wilhelmienne (1871-1918) et de

la république de Weimar (1918-1933).

TTcheka

Totalitarisme

WWehrmacht

ZZentrum

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